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Revue suisse romande Avril

des techniques 2023


et cultures du bâti 3530

Cartographie des Focus sur les Radical Pedagogies :


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We Elevate
1 Éditorial LEARNING FROM ENSA 5
Marc Frochaux

Dossier VOYAGE EN PÉDAGOGIE 7


Marc Frochaux

CARTOGRAPHIE DES NOUVEAUX 8


­TERRITOIRES PÉDAGOGIQUES
Marc Frochaux

BIG BANG DANS LA FORMATION 16


DU BÂTI SUISSE DU ZURICH
NORD-OUEST

Valérie Bovay, Yony Santos, Cedric van der Poel


E S PA C E SUISSE CENTR ALE
MIT TELL AND
SUISSE

ENTRETIENS : NATACHA GUILLAUMONT, 20


O R I E N TA L E

SOPHIE DELHAY ET SILKE LANGENBERG


TESSIN

RÉGION
LÉMANIQUE

Propos recueillis par Marc Frochaux

RADICAL PEDAGOGIES : INTRODUCTION 28


B. Colomina, I. G. Galán, E. Kotsioris
et A.-M. Meister

Journal ACTUALITÉS : IL EST VENU LE TEMPS 36


DES CHARPENTES BOIS
Camille Claessens-Vallet

PROFESSION40

TOUT SE TRANSFORME : VIDES URBAINS 46


RESSOURCES TEMPORAIRES
S. Vanbutsele et E. Brahimllari Schaffner

LAISSE BÉTON 50

CONCOURS54

Réalisation LES NOUVEAUX ESCALIERS 64


DES GARES DE VEVEY ET MONTREUX
Nicolas Meier

UNE VOÛTE PARAPLUIE 68


POUR DES DEMOISELLES COIFFÉES
Jacques Perret

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3 TRACÉS 4/2023, 14.04.2023
Impressum
Der Verlag für Baukultur
Les éditions pour la culture du bâti
Edizioni per la cultura della costruzione

TRACÉS, REVUE SUISSE ROMANDE DES CULTURES MAQUETTE GRAPHIQUE ET COUVERTURE


ET TECHNIQUES DU BÂTI Automatico Studio : Demian Conrad, David Héritier,
Revue fondée en 1875 / 11 numéros par an Dario Pianesi et Arnaud Chemin

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Tirage diffusé : 4245 / vendu : 3951 (ISSN 0251-0979) Numéro isolé : fr. 25.— (port en sus)
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Rue de Bassenges 4, 1024 Écublens / 021 691 20 84 CHANGEMENT D’ADRESSE (MEMBRES SIA)
— espazium.ch/fr/revue-traces SIA Zurich / 044 283 15 15
— redaction@revue-traces.ch — mutationen@sia.ch

Marc Frochaux, rédacteur en chef ÉDITEUR


Lic. phil. UNIL, MSc Arch ETH espazium, les éditions pour la culture du bâti
Zweierstrasse 100, Postfach, 8036 Zurich / 044 380 21 55
Philippe Morel, rédacteur en chef adjoint, ingénierie — verlag@espazium.ch
Lic. ès sciences UNINE Senem Wicki, présidente
Katharina Schober, directrice
Camille Claessens-Vallet, rédactrice architecture
MSc Arch EPFL RÉDACTION SIA
— media@sia.ch
Julia Jeanloz, rédactrice profession
MA Sciences sociales UNIL RÉGIE DES ANNONCES
Fachmedien, Zürichsee Werbe AG, Zicafet Lutfiu
Stéphanie Sonnette, rédactrice urbanisme Laubisrütistrasse 44, 8712 Stäfa / 044 928 56 11
Urbaniste Paris XII
RÉGIE DES ANNONCES (SUISSE ROMANDE)
Audanne Comment, rédactrice Urbanic, Claude Froelicher
MSc Arch EPFL Avenue Édouard Dapples 54, 1006 Lausanne / 079 278 05 94

Cedric van der Poel, codirecteur et resp. éditorial espazium.ch IMPRESSION


Lic. phil. UNINE, MAS Urbanisme UNIL Stämpfli SA, 3001 Berne

Valérie Bovay, mise en page et design graphique


BA HES-SO communication visuelle, CAS BFH Data Visualization
imprimé
Marlyse Audergon, mise en page et design graphique myclimate.org/01-21-718623

Graphiste
ASSOCIATIONS PARTENAIRES
Yony Santos, rédacteur web TRACÉS, TEC21 et Archi sont les organes officiels de la Société suisse
MSc Arch EPF ETSAC, MAS Arch Aalto University of Helsinki des ingénieurs et des architectes (SIA), sia.ch
Fondation ACUBE, epflalumni.ch / ETH Alumni, alumni.ethz.ch /
Laurent Guye, photolithographie Union suisse des ingénieurs-conseils (suisse-ing), suisse-ing.ch /
Fédération des architectes suisses (FAS), architekten-bsa.ch
Polygraphe
Toute reproduction du texte et des illustrations n’est autorisée
qu’avec l’accord écrit de la rédaction et l’indication de la source.

PARAISSENT CHEZ LE MÊME ÉDITEUR

NEW YORK ICI ET MAIN­TE­NANT


On croyait les États-Unis incurables, les voici
sur le chemin vertueux du réemploi, de la
concertation et d’une architecture à forte
valeur ajoutée sociale et écologique. Espazium
TEC21 Nr. 12/2023 (21.04.23) ARCHI N. 2/2023 (17.04.23) s’est entretenu avec Evangelos Kotsioris,
Von aussen nach innen Prolungare la vita utile degli edifici co-commissaire de la nouvelle exposition du
MoMA : New York, New Publics

– espazium.ch/fr
5 TRACÉS 4/2023, 14.04.2023
Learning from ENSA

Marc Frochaux

Pendant que nous rédigions ce dossier sur la pédagogie, les


vingt écoles d’architectures de France se se mobilisaient, l’une
après l’autre. Le 6 février, lors d’une assemblée générale, l’École
nationale supérieure d’architecture (ENSA) Normandie démar-
rait le mouvement après que la direction avait annoncé le report
du semestre de printemps, faute de personnel, faute de moyens.
Valéry Didelon, enseignant-chercheur dans cette école, signait
une tribune dans la revue d’A qui dénonçait la situation1. L’État
français veut soutenir les écoles architecture mais investit près
de deux fois plus pour les écoles d’ingénieur·es et les grandes
écoles. Il veut valoriser le doctorat, mais n’octroie qu’une dizaine
de bourses par année. Il crée un nouveau prix, mais n’augmente
pas les budgets, dérisoires. Aujourd’hui, les étudiant·es traitent
de questions pédagogiques, débattent du projet, de la culture
de la charrette et des inégalités. Mais pour l’enseignant, le sujet
central de la lutte est d’abord l’investissement dans une profes-
sion laissée à l’abandon. Une profession qui va se retrouver au
cœur des questions liées à la transition énergétique et écologique.
Selon lui, les écoles vivent un moment de bascule histo-
rique. Dans les années 1980, elles ont été rattachées au minis-
tère de la Culture – années où Jean Nouvel était reçu dans les
émissions de variété, ironise-t-il. « À l’époque, cela avait été une
conquête : sortir du ministère de l’Équipement, se retrouver avec
les cinéastes, les dramaturges, les artistes… » Les architectes se
sont identifié·es dans ce rôle de création, détaché de la mission
d’exécution. Aujourd’hui, ce rôle a changé, la nouvelle généra-
tion souhaite se reconnecter avec la technique et l’économie.
Or le ministère ne comprend pas ces besoins, et l’architecture
serait bonne dernière sur la liste de ses préoccupations. S’il faut
former des gens utiles à la transition, il faut donc changer de
cadre, et s’adresser au ministère de la Transition écologique et
de la Cohésion des territoires.
La situation diffère en Suisse, où l’on investit dans la
« culture du bâti » et où les écoles d’architecture sont souvent
décrites comme des écoles d’art dans des écoles d’ingénierie.
Comparé à la situation française, le petit voyage que nous pro-
posons ce mois-ci pourrait ressembler à une escapade touris-
tique au pays d’Alice. Mais en réalité, les projets pédagogiques
enthousiastes décrits dans ce numéro cachent aussi certaines
divergences, et parfois des conflits qui outrepassent largement
les rivalités de tendances. À l’EPFL, une ambiance délétère se
fait sentir épisodiquement, avec des controverses portant sur la
prise de parole et sa légitimité.
Tant mieux si les étudiant·es se saisissent des questions
pédagogiques, à l’heure où des pistes sont activement recher-
chées pour réorienter l’architecture vers un projet de société
plus sobre. Mais la contestation du cadre, qu’il soit tradition-
nel ou innovant, démontre aussi que l’institution, soit le corps
enseignant et administratif, est fragilisée. Et cela ne vient pas
des étudiant·es. En Suisse aussi, les assistant·es et les profes-
seur·es décrivent une situation de surcharge administrative
constante, liée tant à la recherche de financements qu’à la pres-
sion compétitive propre au système académique et ses impéra-
tifs. Certain·es sont à cran et les burn-out guettent. Toutes pro-
portions gardées, les discussions qui se déroulent actuellement
en France peuvent jeter un éclairage critique sur notre propre
situation, aussi privilégiée soit-elle.

1 Valéry Didelon, « Less is no more », D’Architectures, février 2023.


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Voyage en Pédagogie

Marc Frochaux

Les professionnel·les n’entendent que des échos lointains de


ce qui se trame dans les contrées pédagogiques. De ce conti-
nent étrange, nous recevons en général de belles publications,
fruits du labeur intense d’étudiant·es discipliné·es. Mais depuis
quelque temps, l’activité de construction qu’on leur enseigne
est tenue pour responsable du réchauffement climatique et de la
destruction d’écosystèmes. On assiste à des soulèvements : des
potentats sont renversés, l’ordre établi est contesté ! La pandé-
mie, particulièrement éprouvante sur le continent pédagogique,
aurait révélé la fragilité, non pas tant des étudiant·es, que d’un
système et de ses rituels (charrettes, critiques, compétition).
Depuis lors, on organise des cercles de parole, on travaille en
collectifs, on se préoccupe des heures de travail, on prend soin
les un·es des autres…
Pour comprendre ce qui se passe dans les écoles, il faut
varier les perspectives. Nous avons donc lancé un appel à
contribution sur le thème de « l’inéduquation » au mois de
décembre 2022. L’éducation actuelle des architectes et des
ingénieur·es est-elle en adéquation avec les besoins actuels,
et surtout futurs ? Trente missives nous sont parvenues, d’étu-
diant·es, de professionnel·les, d’enseignant·es et même de pro-
fesseurs à la retraite. Ces témoignages nous confirment que les
rapports entre « enseignant·es » et « enseigné·es » ont changé,
mais de manière pacifique. « C’est un peu comme 1968, mais
sans les pavés », résume Jeffrey Huang, directeur de l’Institut
d’architecture de l’EPFL. Il décrit une génération d’étudiant·es
très impliqué·es dans la réforme de leurs écoles. Avec l’évo-
lution rapide des questions écologiques, sociales et technolo-
giques, la recherche, l’enseignement et l’innovation tendent
à se confondre toujours plus : étudiant·es, chercheur·euses et
enseignant·es y participent collectivement et on ne sait parfois
plus qui apprend de qui, de l’aveu de quelques enseignant·es.
Les catégories se brouillent : en Pédagogie, il n’est pas aisé
d’opposer les fronts, que ce soit entre générations, entre
orientations politiques, entre « progressistes » et « conserva-
teurs », pas même entre étudiant·es et institutions. La situation
actuelle ressemble au récit livré dans l’introduction à Radical
Pedagogies, dont nous livrons une traduction inédite (p. 34) :
comme jadis sous la pression des crises écologiques et énergé-
tiques, émergent des revendications multiples et parfois contra-
dictoires, que les écoles ont rapidement absorbées dans leurs
cursus, spontanément, ou lors d’une réforme en profondeur.
Dans les contrées pédagogiques, les frontières et les points
de vue évoluent rapidement. Dresser une carte ressemble à un
travail d’explorateur dont les récits finissent par disséminer des
fables farfelues. Certes, nous avons arpenté quelques régions,
entre ­l’Utopie et la Pragmatie (celles du « faire », celles de la
participation, celles où l’on ne construit même plus…). Mais
pour se faire une idée précise, il vaut mieux consulter les per-
sonnes intéressées : les 30 textes que nous avons reçus sont
publiés en ligne, sur ­espazium.ch.

Carte des contrées pédagogiques (Giona Bierens de Haan)


Cartographie des nouveaux territoires Pour comprendre ce qui se trame dans les écoles d’architecture et Dossier
d’ingénierie, nous avons lancé un appel à contribution. En com- 8
pédagogiques pagnie de trente auteur·rices, nous explorons ces territoires situés
entre utopie et réalisme, et dont les frontières évoluent rapidement.

Marc Frochaux

On se pose bien des questions dans les écoles d’architecture et


d’ingénierie. En 2022, dans le cadre d’une démarche structurée
et autoportée, les étudiant·es d’architecture de l’EPFL ont décrit
leur perception de leur école et l’image qu’ils et elles se font de
leur avenir professionnel1. Dans cet impressionnant cahier de
doléances, on peut lire une critique à charge contre la culture
architecturale au sens large : une section « déconnectée » des
autres filières et des besoins réels de la société, une surcharge
de travail, de théorie aussi, qui, de toute façon, finirait par mener
au « béton partout et pour tout ». Côté ingénieur·es, le mouvement
Ingénieur·e·s engagé·e·s (IE) relaie un manifeste qui explique « à
quel point la fonction d’ingénieur est indispensable au fonctionne-
ment du système capitaliste et extractiviste qui opère les ravages
écologiques et entretient les inégalités sociales ».2 Le débat gagne
désormais le grand public : en France, de jeunes diplômé·es de
grandes écoles ont appelé à « bifurquer » ou même à « déserter »3.
A Certes, des colloques et des publications traitent du sujet,
mais rarement en mélangeant tous·tes les acteur·rices concer-
né·es (étudiant·es, professionnel·les, enseignant·es et profes-
seur·es, jeunes et moins jeunes). Or, actuellement, ce sont les
fondements mêmes de ces disciplines qui sont remis en ques-
tion – et donc les rapports entre « enseignant·es » et « ensei-
gné·es ». Le savoir dominant est contesté, on organise même
des Unlearning Centers pour se former autrement. Pour parler
du phénomène, il faut donc nécessairement donner la parole à
chacun·e. Aussi avons-nous lancé en décembre 2022 un appel
à contributions aussi ouvert que possible. Il demandait de se
positionner sur la question de l’adéquation, ou non, de l’en-
seignement avec les besoins actuels, d’une part, et futurs, de
l’autre. Nous avons obtenu une trentaine de réponses, qui sont
toutes publiées en ligne sur espazium.ch. Ces contributions
permettent de cartographier les revendications et les réponses
pédagogiques contemporaines, que nous tâchons de synthéti-
B ser ici. Les projets décrits s’articulent autour de trois grandes
régions : faire, réparer, et se mettre au service. Toutes com-
mencent par questionner leur discipline. Toutes revendiquent
un « retour au réel ».

Reconnecter

« En sortant de l’école, nous voilà propulsés dans un monde dont


on ne connaît ni le fonctionnement, ni les outils de fabrication »,
écrit Juliette Contat, une architecte fraîchement diplômée de l’EPFL.
Bien des étudiant·es, comme elle, accusent la déconnexion de leur
école par rapport à la réalité (économique) du monde. Francesco
Alonso, aussi, mais en établissant la liste des sujets abordés pen-
dant ses études (« urbanisme social, écologie, paysage, durabi-
lité, énergies renouvelables, économie circulaire »), lui accuse le
monde professionnel et « l’inertie qui le caractérise » de ne pas
être du tout en phase avec les crises actuelles et à venir.
Cette double déconnexion suscite un questionnement de
fond sur les disciplines. Au pays des ingénieur·es, d’abord, avec
un appel à la modestie : Jean-François Contat souhaite « simple-
ment que l’humilité redevienne une valeur clé ». Dans le texte
qu’il nous adresse, il pointe vers la démarche initiée par The
A « On ne m’avait pas prévenue qu’être architecte, c’était aussi faire des Shift Project. L’association qui cherche à décarboner l’écono-
estimatifs, des tableaux comparatifs, rédiger des courriers pour répondre mie française (avec le soutien de grandes entreprises privées) a
à un préavis défavorable. En contrôlant des factures, en rédigeant des publié en 2022 un manifeste appelant à reprendre la formation
soumissions, je ne l’imaginais pas comme ça, la passion. » – Juliette
Contat, architecte diplômée EPFL 2019 (Vamille)
depuis ses fondements. Si le métier a été établi au tournant de
B « Votre question ainsi posée appartient à ce monde. Un monde qui se la Révolution industrielle, « la finitude du monde a rajouté une
décharge des responsabilités, les laissant aux générations successives. dimension temporelle majeure », y écrit son président, Jean-
Un monde qui repousse la question écologique pour le moment où il Marc Jancovici : les designers doivent désormais prendre en
sera trop tard […] Soyons sérieux. La nouvelle génération est déjà prête
à changer les choses. » – Francesco Anfosso, architecte diplômé EPFL compte l’analyse du cycle de vie (ACV), opérer un arbitrage
2020 entre un « optimum à court terme et un optimum à long terme ».
Dossier Et comme cette question est forcément politique, le guide finit
9 par recommander… l’introduction de cours en sciences sociales
et humaines (SHS) dans les cursus.
Au pays des architectes, on réclame d’abord de se recentrer
sur l’architecture comme agent climatique et non plus comme
exercice de style. Philippe Rahm, qui enseigne à la HEAD, éta-
blit un lien entre « l’autonomie disciplinaire » et « l’inaction cli-
matique » : il accuse les écoles suisses de n’être pas sorties
des débats des années 1980, où l’on célébrait l’autonomie des
formes architecturales en se reposant sur la linguistique4.
Mais pour les paysagistes, il est temps d’investir ailleurs. « Le
réchauffement ne peut pas être arrêté, et surtout pas par l’archi-
tecture », nous écrit sur un ton provocateur Peter Wullschleger,
président de la Fédération suisse des architectes-paysagistes
(FSAP). Comme Natacha Guillaumont, enseignante à l’HEPIA
(lire l’entretien, p. 20), il milite pour que les établissements
A de formation établissent des filières d’architecture du paysage.
Pourtant les cursus ont rapidement évolué ces dernières
années. Le directeur de l’HEPIA, Nicolas Pham, l’observe dans
toute l’Europe. Si les étudiant·es sont bien les moteurs de ces
réformes, il constate que « ce sont surtout les jeunes ensei-
gnant·es qui, depuis la prise de conscience de la crise clima-
tique et sociétale, ont changé leur discours, l’ont orienté vers les
questions liées au processus et aux ressources ».
À l’EPFL aussi, le cursus BA a évolué, nous explique Dieter
Dietz, le directeur de la section d’architecture : un cours de théo-
rie de l’architecture a été remplacé par un cours d’histoire et
théories de l’environnement (Sébastien Marot), qui situe l’archi-
tecture dans le contexte du vivant, tandis qu’un nouveau cours
« Arts Fundaments » (comme jadis au Bauhaus) engage diffé-
rents modes de pensée, discute les flux des matériaux, les inten-
tions de projet, et emmène en visite sur des sites d’extraction,
afin de réfléchir à l’empreinte de la construction. Enfin, le choix
B des ­professeur·es invité·es reflète les tendances : travail collectif,
paysage, et « habitat-logement » (voir l’entretien avec Sophie
Delhay, p. 22).

Faire

Les étudiant·es, nous explique Dieter Dietz, s’intéressent à des


projets d’action directes, à une architecture à « faire, immédiate-
ment, pragmatiquement, plutôt que de projeter un idéal qui ne
sera jamais atteint » – à l’image de l’inaction politique envers la
crise climatique. Alors pour déconstruire les manières d’enseigner,
il faut construire, autrement. Notre premier « retour au réel » est
celui des enseignant·es qui prêchent un retour à la construction
1 :1, un courant en plein essor5. À l’ENSA Paris-La Villette, par
exemple, Benoît Rougelot conduit un atelier où l’on construit
réellement un édifice (un local répondant aux besoins identifiés
avec une communauté), en exploitant « le nouveau BTP (Bois
C Terre Paille) ». L’enjeu pédagogique est une réponse à la crainte
que construire serait devenu impossible : il veut « démontrer aux
futur·es professionnel·les que des solutions bas carbone, à haute
valeur sociale, sont possibles ». L’autre option constructive, c’est
évidemment l’économie circulaire, qui est devenue un sujet cen-
tral des écoles. Mais là aussi, il ne s’agit pas forcément d’une fin
en soi, plutôt d’une manière d’interroger les modes de faire. Ainsi,
à la HEAD, Manon Portera et Valentine Maeder proposent, elles,
de déconstruire. La démarche invite surtout à questionner les pro-
cessus habituels. « D’où proviennent ces matériaux ? Comment
ont-ils été extraits ? Comment seront-ils mis en œuvre ? Par qui ? »
Depuis quelques années, l’exercice de construction collec-
tive de la première année EPFL, menée par le studio ALICE, a
évolué. Les pavillons autonomes de jadis sont désormais entrés
A 
« Le démontage complet de la structure, opéré en deux jours, a permis en résonance avec l’espace public. Ils sont réadaptés, s’éta-
l’identification d’éléments assemblés aux qualités à priori peu percep-
tibles mais remarquées grâce à une observation calme et minutieuse. blissent de manière pérenne et les matériaux restant sont rem-
Ceux-ci sont chargés et transportés en camion jusqu’au campus de ployés. Voilà pourquoi Camille Fauvel et Julien Gamerro, qui
l’EPFL, puis détournés et adaptés pour intervenir dans d’autres lieux » – enseignent à l’EPFL, nous parlent d’un « projet ritournelle » qui
Camille Fauvel et Julien Gamerro, enseignant·es ALICE–EPFL
B « Malgré la place faite à la philosophie, la sociologie, l’histoire ou encore
doit « réconcilier l’acte de construire et ou de reconstruire, avec
au biomimétisme, les dernières découvertes en psychologie ou en neu- celui de prendre soin ». Pour Daniel Zamarbide, qui codirige le
rologie etc., il manque dans le creuset l’expérience vécue, les sens et laboratoire avec Dieter Dietz, il s’agit de projeter, « sans média-
l’esprit. – Volker Ehrlich, enseignant ENSAPV tion d’une conceptualisation prolongée qui éloigne, temporel-
C « Et si on apprenait à déconstruire ? Déconstruire un bâtiment pour
mieux comprendre comment concevoir le prochain. » – Manon Portera lement du moins, la pensée de son application et, surtout, de
et Valentine Maeder, enseignantes à la HEAD ses conséquences ».
Ce besoin de « faire » s’inscrit aussi dans une pensée qui Dossier
flirte avec l’écologie profonde. Volker Ehrlich, qui organise des 10
workshops terre-paille à l’ENSAVT, estime qu’il faut répondre
à la « prédominance d’un milieu virtuel » et cultiver dans les
écoles des expériences sensorielles, corporelles, qui aideraient à
« conscientiser le monde ». Cette ambition est également latente
dans la proposition de Laurent de Wurstemberger, architecte-
entrepreneur et enseignant à la HEIA-FR, qui souhaite que les étu-
diant·es fassent des stages de chantier, pas seulement pour com-
prendre d’autres métiers, mais aussi pour éprouver l’expérience
du « quotidien de l’artisan qui bâtit, l’art du geste, la répétition et
une routine qui s’installe au fil des jours. La fatigue, la sueur, les
douleurs et les courbatures après les premiers jours de travail ».

Réparer

Et puis il y a ces contrées pédagogiques où l’on ne veut même plus


construire. C’est ce que revendique Patrick Henry, par exemple,
enseignant à l’ENSAPB qui estime que « le ‹ déjà là ›, qu’il soit ordi-
naire ou extraordinaire, doit devenir la matière première de nos
enseignements et de nos pratiques à toutes les échelles ». Depuis
2015, le projet dans l’existant est l’objet du Master Transformation
de l’ENSAVT, fondé notamment par Patrick Rubin (Canal architec-
ture). « La planète, accablée par deux siècles d’intense production,
a besoin de répit, nous écrit son directeur, Paul Landauer. Elle
ne peut accepter l’édification de nouveaux bâtiments et de nou-
veaux aménagements qui alourdirait son bilan carbone et épui-
serait davantage ses ressources. Ce paradoxe a été occulté ces
dernières décennies par le succès de l’écoconstruction, lequel a
préservé l’illusion que les édifices du passé, souvent pollués et
frappés d’obsolescence programmée, pouvaient être remplacés
par des bâtiments neufs, plus durables et plus vertueux, prolon-
geant ainsi ce principe d’espérance de la modernité : ‹ le monde
ne fonctionne plus tel qu’il est, (éco)construisons en un autre ! › »
« Un autre paradigme est en train d’émerger dans de nombreux domaines, La pédagogie de la transformation est désormais revendiquée par
lequel invite à demander aux arts, aux sciences et aux techniques de réparer plusieurs écoles européennes, indique Landauer. Citons l’institut
le monde plutôt que de le changer. » – Paul Landauer, enseignant à l’ENSAVT.
Réparation d’un pont sur le Mincio, photographie de Gianni Braghieri publiée Transform (HEIA-FR), qui se présente comme « le seul en Suisse
dans l’Autobiographie scientifique d’Aldo Rossi (1981). à faire de la transformation son thème d’innovation, alors même
que la moitié des mandats professionnels sont concernés ». Le
travail sur l’existant n’est plus une posture militante, c’est une
réalité. Voilà quelques années que les ateliers de l’EPFZ n’en-
seignent pratiquement plus la construction nouvelle (Neubau),
comme nous l’indique Silke Langenberg, qui a mis en place un
cours dédié à la « réparation » (voir p. 25). Certain·es professeur·es
s’en plaindraient, d’ailleurs, mais pas à haute voix. La publication
annuelle des diplômes EPFL (MAP) a recensé le phénomène : en
2022, seuls 26 % proposaient des constructions neuves.
Pour Franz Graf, qui tire sa révérence après avoir enseigné
pendant des années la sauvegarde du patrimoine moderne au
sein du TSAM–EPFL, c’est une évidence : démolir n’est plus une
option. « Tout le monde s’accorde aujourd’hui sur l’absurdité de
la destruction. Comment cette tautologie peut paraître originale
alors qu’elle est banale, de l’ordre du bon sens : il faut faire durer,
comme le titre du livre de Pierre Caye6. »
Dans ces conditions, on comprend l’inquiétude ressen-
tie par le professeur Eugen Brühwiler, qui quitte également sa
chaire, à la section génie civil de l’EPFL. Son enseignement aura
porté pendant des années sur les structures existantes, dans le
but d’éviter ou de limiter au strict minimum les interventions de
construction et d’adapter et améliorer les ouvrages, prolonger
leur durée d’utilisation. « La profession doit encore être ‹ conver-
tie › à l’ingénierie des structures existantes », écrit-il, sans savoir
si cet enseignement sera poursuivi.
Dans cette tendance, l’atelier qui suscite le plus d’attentes
à la SAR-EPFL est certainement celui de Charlotte Malterre-
Barthes (laboratoire RIOT), qui a initié en 2021 un débat sur la
nécessité d’établir un moratoire global sur la construction nou-
velle. En réponse, l’exercice qu’elle conduit propose de « regar-
der ce qui se passe si on arrête de construire à Lausanne ».
« Nous étudions tout : le financement du bâti, la gouvernance,
les codes urbains, les manières d’habiter, l’accès à la propriété,
la vacance des bâtiments, la réalité des surfaces disponibles
non utilisées, les parkings, les garages, les toits, les caves, la
façon dont la propriété est distribuée, héritée, transmise, etc. »7
Dossier Servir
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La démarche du RIOT-EPFL rappelle celle que Lucius et Annemarie
Burckhardt développaient au début des années 1970, qui visait « la
plus petite intervention possible », en commençant par remettre
en question la tâche (voir p. 31). Si elle bouscule les conceptions
traditionnelles, cette posture donne aussi à l’architecte un rôle
nouveau, qui ne se cantonne plus à la construction ou même la
transformation, mais plus globalement à la recherche de solutions
spatiales, en impliquant d’autres acteur·rices. En premier lieu : les
habitant·es – qui font depuis quelques années leur entrée dans
les écoles. Un archipel nous envoie des témoignages de péda-
gogies participatives.
Un étudiant de la HEIA-FR, par exemple, nous livre un récit
de l’atelier « densification de zone villa » où il était confronté aux
propriétaires des maisons concernées. « Nous passions parfois
A plus de temps à débattre autour de leur table à manger qu’à tra-
vailler sur les bureaux de nos ateliers. Les discussions étaient
animées et la spontanéité de leurs réactions quand ils voyaient
nos projets nous obligeait à nous embarquer dans un processus
de sensibilisation. »
Mounir Ayoub et Vanessa Lacaille, invité·es pendant l’an-
née 2022-2023 à l’EPFL, ont aussi emmené leurs étudiant·es à la
rencontre d’habitant·es : en l’occurrence les personnes yéniches,
manouches et roms qui nomadisent une partie de l’année en
Suisse. Après avoir réalisé avec elles des maquettes, les étu-
diant·es répondent à un besoin identifié en réalisant une instal-
lation lumineuse qui agrémente une place. Les habitant·es, les
responsables et mêmes les gendarmes seront invité·es aux cri-
tiques. « Impliquer complètement les habitant·es dans la fabrica-
tion du projet a pour conséquence d’abord une ­contestation puis
un enrichissement de l’architecture à laquelle nous sommes
habitués […] L’architecte n’est plus le prescripteur de formes
B issues d’un programme mais l’acteur d’un processus qui initie
l’émergence de lieux habités. »
Dans beaucoup de contributions domine le sentiment que
les architectes devraient être plus modestes et se mettre désor-
mais au service. « Être à l’écoute, traduire, orchestrer, et surtout
ravaler son ego, se souvenir […] que la profession est avant tout
un métier de service », écrit Théo Bellmann, architecte (Labac).
Ainsi, plus que les habitant·es, ce sont les lieux, et des problé-
matiques réelles, qui mènent au projet. Julio Paulos, sociologue
enseignant à l’UNIL, questionne la centralité du projet urbain
déployé depuis les années 1990, alors que, depuis quelques
années, l’accélération des sociétés provoque des interven-
tions citoyennes (activisme, occupations) qui mettent en crise
la gestion de l’espace public et la fabrique de la ville en géné-
ral. Le climat d’incertitude profonde actuel re-brasse les cartes
entre « expert·es » et « usager·ères », observe-t-il. Aussi, plutôt
que de considérer l’éducation comme « un moyen de transfé-
C rer des connaissances, nous pourrions adopter une approche
qui met l’accent sur ‹ l’apprentissage par la pratique › et procla-
mer ce que Jacques Rancière qualifie ‹ d’émancipation intellec-
tuelle › (…) Nous pourrions partir de cette émancipation afin […]
de poser des problèmes ou formuler des questions au fur et à
mesure qu’elles se présentent, au lieu d’appliquer et de repro-
duire des compétences opérationnelles. »
En somme, il faut tâtonner, marcher comme des aveugles,
et s’adapter au terrain. C’est bien ce que proposent d’autres
enseignant·es, notamment à l’HEPIA : une « pédagogie inver-
sée », centrée autour des problèmes (problem-based learning),
induite par une situation, et dirigée par des étudiant·es que les
A « Nous décidons avec les habitants d’une double action : dénoncer les
conditions indignes dans lesquelles ils vivent et en même temps énon- enseignant·es ne font plus qu’encadrer. C’est ce que propose
cer un projet possible […] Nous dessinons puis fabriquons en atelier une Agnès Perreten Lopez à l’HEPIA, par exemple, avec un cours
installation lumineuse de 200 mètres de long […] Faire avec, et non seu- centré autour d’une carte collective, thématisant la perception
lement pour, implique de reconsidérer les rapports de pouvoir au sein du
projet. » – Mounir Ayoub et Vanessa Lacaille, prof. invité·es ENAC-EPFL et les affects des lieux explorés avec les habitant·es, ou Ivan
B « Nous devions aller à la rencontre des propriétaires de maison et leur pro- Vuarambon, un architecte engagé avec le Corps suisse d’aide
poser différents scénarios de densification de leur parcelle, visant à accueil- humanitaire de la DDC. Celui-ci anime depuis 2011 un atelier
lir de nouveaux habitants sur leur terrain […] Nous passions parfois plus
de temps à débattre autour de leur table à manger, qu’à travailler sur les
dédié à l’architecture de crise, en se reposant sur les principes
bureaux de nos ateliers. » – Fabien Peter, étudiant JMA-FR 2022, cours de la pédagogie inductive, interrogative, ce qui aboutirait à de
F. Frank fertiles remises en question. « Les crises, écrit-il, parce qu’elles
C « […] étudiant·es et habitant·es ont pu échanger pour former une série bousculent les cadres normatifs, peuvent nous aider à question-
de cartographies sensibles et interactives : un appareil à repérer et ima-
giner un quartier cohérent et rythmé. » – Agnès Perreten Lopez, ensei- ner les formes architecturales et urbaines contemporaines, que
gnante HEPIA nous continuons à concevoir sur des modèles figés. »
Dossier
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« Aujourd’hui particulièrement, on trouve dans l’architecture vernaculaire les traces de sociétés qui vivaient avec cohérence, résilience et autonomie sur
leur territoire, sans gros appareil législatif et, surtout, sans recours à l’énergie fossile. » – Valérie Ortlieb, HEIA-FR. Ferme d’alpage à Saanen : travail d’ana-
lyse du cours de Théorie de l’architecture et de la ville, 3e année, HEIA-FR (Elio et Luca Von Grünigen)

« Si les étudiants d’aujourd’hui n’inventent pas les formes de demain, qui le fera à leur place ? » – Tanguy Auffret-Postel et Éric Lapierre, TEXAS-EPFL.
Infrastructure de stockage énergétique représentée dans une perspective dessinée avec des mots, semestre automne 2022 (Inès Michelin, Raphaël Raccio)
Dossier Enfin, cette inversion pédagogique, fondée sur un problème
13 réel et non sur le modèle théorique, mène logiquement à colla-
borer avec d’autres disciplines. Or l’interdisciplinarité, cela s’ap-
prend. Pour « dépasser la pensée en silo » et « ancrer les projets
dans les défis réels de la ville en transition », un groupe d’ensei-
gnant·es a mis en place, de sa propre initiative, un atelier inter-
disciplinaire appelé Créagir* qui ne regroupe pas moins de six
écoles de la HES-SO Genève : une « constellation de connais-
sances opératoires toutes légitimes, incluant le travail social, la
santé, la gestion, les arts et le design, au même titre que l’archi-
tecture, le paysage ou l’ingénierie ».

Dessiner

Interdisciplinarité, autoconstruction, participation, émancipation


intellectuelle… Il semble que la palette complète des postures
développées au tournant des « années 68 »8 soit réemployée (voir
« En ayant refusé de regarder l’infrastructure matérielle pendant 50 ans, en l’introduction de Radical PedagogiES, p. 28). Et, comme à
s’étant cantonné dans une même superstructure idéologique née dans les l’époque, une même inquiétude surgit déjà : celle d’une perte des
années 1980, le principe d’autonomie, légitime dans les années 1980, a sim-
plement produit à partir des années 1990 une pure pensée réactionnaire savoir-faire spécifiques à la discipline, et en particulier du des-
[…] » – Philippe Rahm, HEAD. Projet d’atelier conçu à partir de la donnée sin. C’est ce qui inquiète Nicolas Pham, soucieux que la digitali-
climatique (Carla De Haro) sation et l’automatisation des processus réduise encore la capa-
cité des étudiant·es à dessiner. Dieter Dietz estime aussi qu’il y a
un risque de perdre des compétences et pour cette raison nous
indique que le cursus Bachelor renforce à la fois le dessin de repré-
sentation et le dessin d’analyse (avec un cours de « tomographie
architecturale »).
Le site livingarchives.epfl.ch recense les travaux des étu-
diants d’architecture de l’EPFL. On constate que beaucoup de
studios fondent leur approche sur la cartographie et le dessin
­analytique hérités de la méthode élaborée il y a 20 ans par l’Ate-
lier Bow Wow – comme celui de Mio Tsuneyama (prof. invitée à
l’EPFL), où l’on trace de vastes axonométries pour décrire avec
minutie des fonctionnements écosystémiques. Dans un même
registre, Valérie Ortlieb (HEIA-FR) demande à ses étudiant·es de
porter un regard ethnographique sur l’architecture vernaculaire.
Elle aimerait les reconduire ainsi vers l’étude typologique. « Le
type est un outil toujours d’actualité, nous écrit-elle, il permet de
constituer des ensembles cohérents de modèles adaptés, dans
un contexte donné. »
La typologie reste toujours au cœur de plusieurs ateliers
et la recherche sur la forme n’est pas totalement abandonnée,
mais dans l’objectif de traiter des programmes qui n’en ont pas
forcément. Ainsi l’atelier Texas-EPFL, qui défend cette approche,
s’intéresse cette année aux espaces de stockage invisibles qui
façonnent le commerce globalisé, et propose de les monumen-
taliser. « Par forme, nous entendons toutes les décisions qui per-
mettent de fixer la réalité matérielle d’un ouvrage. [Elles] ne sont
jamais neutres et procèdent toujours de développements histo-
riques et culturels complexes », écrivent Tanguy Auffret-Postel
et Eric Lapierre.

Faire synthèse

Notre dernier réalisme : la Realpolitik. Concrètement, à quels


besoins les écoles doivent-elle répondre? Nous avons posé la
question à un administrateur, Enrico Slongo, architecte de la Ville
de Fribourg. Avec la complexification du métier, la digitalisation,
les calculs d’écobilans et les standards qui évoluent, etc., il est
devenu impossible de conserver un profil d’architecte généraliste,
regrette-t-il. Dans les communes, « entre les différents services
(mobilité, urbanisme, architecture), ce sont les élus qui finissent
par trancher, parce que plus personne ne peut faire une pesée des
intérêts ». Slongo n’aimerait pas pour autant que l’on renonce à
former des architectes généralistes, capables de mener du pro-
jet urbain et qu’on effectue les spécialisations lors de formations
postgrades (CAS, DAS, MAS, voir p. 16).
Paolo Tombesi réfléchit également à la synthèse. Mais ce
professeur d’architecture et construction de l’EPFL juge « l’in-
tellectualisme générique et passe-partout » utopique car il serait
fondé sur « une grande tromperie ». « Nous continuons à perpé-
tuer la figure de l’architecte amateur et généraliste, bon pour
toutes les échelles et toutes les saisons, alors qu’en réalité les
figures professionnelles sont multiples et distinctes. » Il préconise
DECOUPAGE DU PROJET D’ARCHITECTURE
ENSEIGNEMENT EPFL : https://www.epfl.ch/schools/enac/education/architecture/fr/sar-bienvenue/education

GESTION DU PROJET AXE 3 : THEORIE ET CRITIQUE DU PROJET


MEMBRES BATI Dossier
CONSIGNE SOUS-ENSEMBLES
14
RESSOURCES ET GESTION DU PROJET
CONSEIL
COMMANDITAIRES RESERVES
STRATEGIQUE OBJECTIF STRATEGIQUE GESTION DE LA CONSTRUCTION

ECONOMIE CIRCULAIRE
CODIRECTION
REPRESENTANTS THEORIE DU PROJET
PORTEFEUILLE
HISTOIRE ET THEORIE DE L’ARCHITECTURE
COPILOTAGE
TECHNOLOGIE DU BATI
PROGRAMME
CONSTRUCTION ELEMENTAIRE
CONTRAT MANDATAIRE
CONDUITE

PROJET
PILOTE

DIRECTEUR PLANIFICATEUR
DES TRAVAUX GENERAL

GESTION DE LA TECHNOLOGIE SEMANTIQUE


CONSTRUCTION DU BATI DU PROJET

VARIABLE IMMUABLE
PRESTATAIRES

MORPHOLOGIE SYSTEME STRUCTURE CONSTRUCTION


ELEMENTAIRE

AJUSTAGE/ ELEMENTS/
COMPLEXITE MATERIAUX THEORIE HISTOIRE
ADAPTABILITE ASSEMBLAGE
PROJET
• ILOT • ENVELOPPE • DIMENSION- • POTEAU
• QUARTIER (PHYSIQUE NEMENT • POUTRE
ENCODAGE • VILLE DU BATIMENT) • BETON/BFUP • DALLE NERVUREE
• POLE • ACCESSIBILITE • ACIER
TAKTPLAN (CADENCE) • METROPOLE UNIVERSELLE • BOIS • PRINCIPE
• CIRCULATION • BRIQUE/TERRE PREMIER
ECHEANCIERS VERTICALE • REEMPLOI • ANGLE RENTRANT
• SISMIQUE • ANGLE PLAT
• CVSE PERPENDICULAIRE
COMMANDE • ANGLE SAILLANT
• ANGLE PLAT
EXECUTION PARALLELE
CONTRAT ENTREPRISE AXE 1 : TECHNIQUES CONSTRUCTIVES AXE 2 : HISTOIRE ET THEORIE

« Avant de redéfinir les cursus, il serait judicieux de dresser une carte des profils professionnels » – Thierry Voellinger, ENAC-EPFL

l’établissement d’un réseau d’enseignements spécialisés mais


qui tous aborderaient la capacité à élaborer une « synthèse »,
même si celle-ci sera appliquée à des problèmes spécifiques.
Du côté des professionnel·les, on craint qu’à trop vouloir
« déserter » ou « bifurquer », on risque bien d’abandonner la
construction à des acteurs moins scrupuleux… Lionel Rinquet,
par exemple, enseignant HEPIA et actuel vice-président de la
SIA Vaud, s’en inquiète et cherche une voie médiane, entre deux
précipices. « Entre former des intellectuels-militants prêchant
la bonne parole dans ce qui s’apparentera de plus en plus à
un désert, et laisser le champ libre aux entreprises générales,
aux promoteurs, voire à l’intelligence artificielle, ou former des
tâcherons formatés à bétonner sans conscience, la ligne de
crête est étroite. » Dès lors, il plaide pour une pédagogie cen-
trée autour du projet, auquel toutes les autres matières seraient
subordonnées.
Certain·es jeunes diplômé·es EPFL partagent aussi ce
« Si Tafuri a provoqué jadis une fuite vers la théorie, la crise écologique actuelle besoin de synthèse. « À vouloir trop diluer et étendre le champ
risque de nous mener vers un activisme qui se positionne uniquement dans de l’architecture à tous les domaines, écrit Louis Conforti, un
la dénonciation. […] Il y a pourtant une place dans le métier d’architecte pour
mener une action militante au sein même de la profession telle que définie
ancien président de l’ASAR-EPFL, on finit par perdre de vue la
par la société. » – Collectif La Méduse. Couverture de l’édition américaine capacité des architectes à répondre à des situations complexes
(1975) d’Architecture and Utopia de Manfredo Tafuri, illustrée par un dessin (programme, budget, normes, etc.) de manière synthétique et
d’Aldo Rossi « L’architecture assassinée »
efficace. » Une enseignante, Clarisse Labro, accuse aussi ce
trop-plein de connaissances dont les étudiant·es seraient gavés
(« comme des oies ») tandis que le collectif La Méduse (trois
jeunes diplômé·es EPFL en architecture) s’en prennent à cette
sorte de surenchère théorique qui finit par nuire à la capacité
d’agir. « L’écoanxiété ambiante paralyse et mène surtout à la
dénonciation », regrettent-ils et elles. Mais là aussi, « il serait ina-
déquat de dire que nous sommes mal éduqué·es. Nous avons
en revanche besoin de joindre nos connaissances et d’observer
notre formation comme un outil transversal et non comme un
ensemble d’entités séparées et obligatoires. »
Pour s’orienter dans ce débat, il faudrait pouvoir se situer.
Thierry Voellinger (enseignant à la SAR-EPFL) nous a répondu
par un diagramme qui présente l’ensemble des rôles liés à la
conduite d’un projet (et qui relativise l’importance de la théorie
et de l’histoire…). Pour répondre aux questions que nous avons
soulevées, il faudrait d’abord établir une carte, dit-il, et y pla-
cer les nombreux profils professionnels que l’on aimerait déve-
lopper, puis seulement dessiner les parcours pédagogiques en
fonction de ceux-ci.
Dossier Une telle « carte des formations » liée aux profils profession- l’architecture afin de former les futurs acteurs de la transition », Tribune,
15 nels n’existe pas encore, mais elle serait en voie d’élaboration, collectif, Le Monde, 2 décembre 2022. Les grèves des ENSA ont com-
mencé pendant l’écriture de ce dossier.
nous indique Heike Biechteler, la secrétaire générale du Conseil 4 Récemment, Philippe Rahm a publié dans la collection Manifestes de la
suisse de l’architecture (Architekturrat). Cet organisme réu- HEAD un ouvrage qui reprend ses thèses actuelles : Le style anthropocène,
nit des représentant·es des différentes écoles de Suisse (HES, 2022.
5 Parmi les initiatives, citons, en France, les Grands Ateliers. Créée en 2001,
Academia et EPF), de la SIA et de la FAS. Il s’agit dans un pre-
cette structure est entrée en partenariat avec l’ENSA Grenoble pour devenir
mier temps d’actualiser les différents profils de formation, afin un pôle de formation pluridisciplinaire où sont enseignées de nombreuses
de répondre aux besoins actuels – digitalisation, changements techniques artisanales.
climatiques, etc. – mais cela prend du temps. D’autant plus que 6 Franz Graf, « Onze considérations sur l’enseignement de la sauvegarde »,
dans Cahiers du TSAM 3, 2023. Pierre Caye, Durer. Éléments pour la trans-
dans la plupart des écoles, le profil professionnel existant est formation du système productif, Les Belles-Lettres, octobre 2020.
actuellement en cours de révision. Le Conseil de l’architecture 7 Charlotte Malterre-Barthes, en entretien avec Océane Ragoucy, in Archiscope
ne se veut qu’une plateforme de discussion : il ne s’agit pas de 31, octobre 2022, p. 14. L’ouvrage décrivant la démarche, A Moratorium
on New Construction, est à paraître chez Sternberg Press en septembre
décider des différentes orientations dans les écoles.
2023.
Dans tous les cas, il règne une certaine confusion dans les 8 Sur les expériences pédagogiques françaises de la période, voir Les années
écoles, qui promet un renouvellement du paysage. Comme per- 68 et la formation des architectes, Sous la dir. de Caroline Maniaque, Éditions
sonne ne sait vraiment où l’on se dirige en ce moment, seule points de vue et ATE/ENSA Normandie, 2018

l’expérimentation sous toutes ses formes peut dessiner de nou- Abréviations :


velles contrées sur cette grande carte pédagogique, dont les HEPIA : Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture, Genève
contours sans cesse se redessinent. HEAD : Haute école d’art et de design, Genève
HEIA-FR : Haute école d’ingénierie et d’architecture, Fribourg
HES-SO : Haute école spécialisée de Suisse occidentale, réunissant les 28
1 « Architectes EPFL : qui sommes-nous? », disponible en ligne sur le site de écoles de la région
l’EPFL : actu.epfl.ch/news/architectes-epfl-qui-sommes-nous. ENAC – EPFL : Faculté de l’environnement naturel, architectural et construit
2 IE est un pôle de l’Unipoly association UNIL-EPFL. Manifeste des de l’EPFL
Désertheureuses : desertheureuses.noblogs.org/manifeste SAR – EPFL : Section d’architecture de l’EPFL
3 « Des étudiants d’AgroParisTech appellent à ‹ déserter › des emplois ‹ des- ENSA : en France, les écoles nationales supérieure d’architecture, de
tructeurs › », Le Monde, 11 mai 2022. « Nous, directeurs d’école d’archi- Paris-La Villette (ENSAPV), de Belleville (ENSAPB) et de Marne-la-Vallée, École
tecture, appelons à un investissement massif dans l’enseignement de d’architecture de la ville & des territoires Paris-Est (ENSAVT)

« INÉDUQUATION » 30 réponses à l’appel à contributions

Cet article a été composé à partir de témoignages et en puisant


dans les textes reçus à la suite d’un appel à contribuer lancé en
décembre 2022. Celui-ci questionnait l’adéquation (ou non) des
enseignements actuels dans les domaines de l’architecture et de
l’ingénierie avec les besoins actuels et à venir. Nous avons reçu
une trentaine de réponses, avec image, émanant d’étudiant·es,
d’enseignant·es, de professionnel·les ou de professeur·es. Elles
prennent la forme d’une prise de position ou décrivent un projet
pédagogique récent ou actuel.
Merci à Agnès Perreten Lopez, Manon Portera et Valentine
Maeder, Benoît Rougelot, Camille Fauvel et Julien Gamerro,
Chris Younès, Clarisse Labro, Daniel Zamarbide, Didier Challand,
Carla Jaboyedoff, Nathalie Mongé et Raffaella Poncioni-Derigo,
Eugen Brühwiler, Fabien Peter, Diane Henny, Francesco Anfosso,
Juliette Contat, Louis Conforti, Luciano Antonietti, Mathias
Helfenstein, Basil Merz et Tiffanie Paré, Thierry Voellinger,
Mounir Ayoub et Vanessa Lacaille, Ivan Vuarambon, Julio Paulos,
Théo Bellmann, Laurent de Wurstemberger, Lionel Rinquet,
Patrick Henry, Paul Landauer, Peter Wullschleger, Philipp Urech,
Philippe Rahm, Valérie Ortlieb, Eric Lapierre et Tanguy Auffret-
Postel, Volker Ehrlich, Valentin Kunik, Paolo Tombesi, Jean-
François Contat, le Comité Ville en Tête, Grégoire Guex-Crosier
et Garance Paillasson.

DOSSIER EN LIGNE

Tous les textes peuvent être consultés


en ligne sur ­espazium.ch
Big bang dans la formation du bâti Grâce à l’analyse des données issues de notre plateforme ­education. Dossier
espazium.ch consacrée à l’éducation dans le domaine de la culture 16
du bâti, nous avons brossé un portrait inédit de l’état de l’offre de
formations en Suisse. Un premier bilan nous permet de consta-
ter la prépondérance d’une série de programmes d’étude à mi-­
Texte : Yony Santos, Cedric van der Poel et Valérie Bovay ; chemin entre pratique et pédagogie : les formations continues.
infographies : Valérie Bovay

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La Suisse compte 202 formations continues dans le domaine de la culture Cette visualisation présente le paysage de la formation continue dans
du bâti réparties dans 7 grandes régions, 26 institutions, 15 domaines le domaine de la culture du bâti sur education.espazium.ch au
d’études et 4 langues. 13 novembre 2022. Les cours du type CAS, unité de base des DAS et
Une offre de formation = MAS, sont les plus répandus avec 139 programmes sur les 202 recensés.
Degrés : formations postgrades (Certificate , Diploma , Master of Répartition de l’offre par degrés : CAS 139, DAS 10, MAS 34 et autres
Advanced Studies ), autres formations continues (cours spécialisés, ­formations continues 19. Au niveau des langues, l’offre italophone est
­brevets et diplômes fédéraux) la moins garnie, l’italien est même devancé par l’anglais. Répartition
Langues : allemand , français , italien et anglais . de l’offre par langue : allemand 135, français 45, anglais 13 et italien 9.
Dossier À l’instar d’autres secteurs, l’offre de formations attachées à la ainsi que celle des savoirs, des pratiques et des tendances liées
17 culture du bâti1 se multiplie. Les hautes écoles universitaires et à l’éducation en matière de culture du bâti.
spécialisées proposent une pléthore de cours innovants et poin-
tus, multipliant l’orientation des futur·es étudiant·es et des pro- Prochaine étape : présenter les résultats des formations
fessionnel·les désireux·reuses de se spécialiser dans un environ- continues
nement hautement compétitif et concurrentiel.
Pour comprendre cette métamorphose et lui conférer une Les résultats des formations de base, ateliers ou cours théo-
vision globale, espazium.ch a entrepris d’inventorier tous les riques, tout comme ceux des programmes doctoraux, sont sou-
établissements d’enseignement suisses liés au domaine et de vent divulgués par leurs auteur·ices ou promus par les propres
recenser leurs programmes d’étude. Une démarche qui a abouti centres d’enseignement et de recherche. Mais qu’en est-il des
à la conception du site education.espa- formations postgrade ? Quels en sont les résultats ? À ce jour, mal-
zium.ch : un lieu de rencontre entre les gré des méthodes et des objectifs bien moins exigeants que ceux
écoles et les personnes cherchant à d’un doctorat, rares sont les occasions de consulter les mémoires
compléter de la manière la plus adé- Parmi toutes rédigés en fin de parcours.
quate possible leur parcours. Avec plus les offres Ces programmes sont pourtant un terrain idéal pour expé-
de 300 propositions référencées lors recensées sur rimenter de nouvelles idées à la croisée entre pratique et
de son lancement en novembre der- la plateforme recherche. En quelques mois d’étude, les participant·es peuvent
nier, tous diplômes confondus, educa- education. s’épanouir à proximité de la pratique professionnelle qu’ils ou
tion.espazium.ch se présente comme espazium.ch, elles exercent au quotidien et participer avec leur expérience du
une « boussole » numérique permettant plus de 200 métier, et leur envie d’apprendre, aux débats sur les défis actuels
de naviguer librement à travers cette correspondent du secteur. Et ils sont énormes. Ce contexte d’étude, avec l’ap-
constellation d’offres d’étude. à des formations pui d’expert·es clés, permet à ces formations de réunir tous les
Ce travail d’analyse et de repré- continues, atouts pour aboutir à des propositions et des synthèses de qua-
sentation des données extraites de la ou formations lité. C’est du moins la nouvelle hypothèse que nous évaluerons
plateforme nous a permis de dresser un postgrade, ces prochains mois en mettant l’accent sur les mémoires et les
inventaire inédit de l’état de l’offre des du type CAS, DAS exposés issus des programmes les plus originaux et innovants
formations en Suisse et de confirmer ou MAS. du panorama suisse.3
une première hypothèse : parmi toutes Ce qui est certain, c’est que ce « big bang » des formations
les offres recensées sur la plateforme du bâti et les synergies qui émanent de ces allers-retours entre
­education.espazium.ch, plus de 200 – soit milieux professionnels et académiques bénéficient tant aux indi-
deux tiers – correspondent à des formations continues, ou for- vidus qu’aux entreprises. À coup sûr, le développement de ce
mations postgrade, du type CAS, DAS ou MAS2. Élément clé sur type de formations est un facteur crucial qui permettra d’adap-
le marché du système éducatif suisse, ces programmes à durée ter les savoir-faire de la culture du bâti aux incertitudes sociales
déterminée sont actuellement proposés par 26 institutions acadé- et économiques actuelles. D’autant plus que ce courant
miques recensées à la date de lancement de la plateforme, répar- post-académique qui a le vent en poupe est une opportunité de
ties dans 15 domaines d’études et instruits en quatre langues. souligner que, pour la branche du bâti, tous les enseignements
sont une forme de pratique – et toutes les pratiques sont, ou
Se spécialiser pour évoluer dans un environnement devraient être, un enseignement continu.
en transition
Valérie Bovay est graphiste et directrice artistique,
Pour les praticien·nes ou jeunes diplômé·es, ces programmes sont ­espazium – TRACÉS. Elle a réalisé les visualisations illus-
un investissement stratégique. Ils leur permettent de perfection- trant cet article dans le cadre du Certificate of Advanced
ner ou de réorienter leurs compétences et d’entrevoir de nou- Studies BFH in Data Visualization.
velles opportunités professionnelles dans l’une des nombreuses Yony Santos est responsable de la plateforme Education.
disciplines du bâti. Cedric van der Poel est codirecteur espazium.ch.
Pour les centres d’enseignement, ces formations sont un
moyen efficace de proposer des sujets d’étude innovants qui 1 Pour le recensement des formations dans le domaine de la culture du
bâti, ­espazium.ch s’est appuyé sur la définition de la Déclaration de Davos,
peuvent difficilement être adaptés dans les formations de base signée en 2018 par la Conférence des Ministres européen·nes de la culture :
du type Bachelor (BA) ou Master (MA). Les conditions admi- « La culture du bâti comprend la somme de toutes les activités humaines
nistratives et temporelles sous-jacentes à la modification d’un qui transforment l’environnement bâti. Son ensemble doit être envisagé
comme un tout indissociable qui englobe l’intégralité du bâti existant et
plan d’étude ne sont pas aussi flexibles. Ainsi, ces programmes
des aménagements qui sont ancrés dans l’environnement naturel et qui
s’adaptent rapidement et de façon plus souple à l’évolution lui sont liés. La culture du bâti comprend le bâti existant, lequel inclut
des pratiques. Grâce à leurs prix souvent élevés, ils contribuent les monuments et d’autres éléments du patrimoine culturel, la création
activement au financement de ces institutions, en particulier contemporaine, les infrastructures, l’espace public ainsi que les pay­-
s­ages. » (Déclaration de Davos, 2018, p. 4, davosdeclaration2018.ch)
des hautes écoles spécialisées (HES), dont le fonctionnement 2 CAS – Certificate of Advanced Studies, min. 10 ECTS ; DAS – Diploma of
dépend en partie de cette ressource financière. Probablement, Advanced Studies, min. 30 ECTS ; MAS – Master of Advanced Studies,
pour les HES, les formations continues s’inscrivent dans la suite min. 60 ECTS. Source : swissuniversities
3 Curieux de connaître les résultats des formations continues et d’en accroître
de leur orientation pédagogique, historiquement plus profes- la visibilité, à l’automne prochain, nous présenterons sur notre plateforme
sionnalisante et pratique que les EPF. Les infographies ci-contre une sélection des projets, recherches, mémoires et démarches élaborés,
confirment ces constats et exposent davantage leurs différences. individuellement ou collectivement, pour obtenir le diplôme d’une forma-
Entre autres singularités, nous observons que presque 50 % tion postgrade. Un appel à contribution sera lancé tout prochainement sur
notre site aux nombreux centres et institutions concernés.
des formations continues en Suisse sont offertes par les seules
Haute École de Lucerne (HSLU), Haute école des sciences appli-
quées de Zurich (ZHAW) et Haute école spécialisée bernoise
(Berne).
En complément des études généralistes proposées par les
Bachelors et les Masters, ces cours répondent également à une
demande forte du marché de l’emploi, qui exige de plus en plus
d’expert·es aptes à développer des compétences concrètes et
novatrices. Pour répondre à cette nouvelle réalité, les profession-
nel·les sont incité·es à s’instruire dans un contexte helvétique,
plurilingue et fédéral, qui présente des disparités territoriales,
linguistiques et économiques importantes. Avec la naissance
d’education.espazium.ch, nous suivrons de près cette évolution
RÉPARTITION THÉMATIQUE DE L’OFFRE DE FORMATION CONTINUE : QUELS SONT LES POINTS FORTS DES INSTITUTIONS ? Dossier
18

Paysage, environnement

Architecture d’intérieur
Immobilier, expertise

Sciences humaines
Théorie, médiation
Développement 

Administration, 
Développement

Design, culture
Construction, 

Digitalisation

Restauration
Architecture

coopération
technologie
Ingénierie, 
technique,
matériaux

territorial

Mobilité
durable
1. Z U R I C H
ETH Zürich (ETHZ)

Zürcher Hochschule für


­A nge­wandte Wissen­schaften
(ZHAW)
Zürcher Hochschule der Künste
(ZHdK)

Universität Zürich (UZH)

Kalaidos Fachhochschule
Schweiz (KFH)

2. R É G I O N L É M A N I Q U E
Haute école spécialisée
de Suisse occidentale (HES-SO)

Haute école d’ingénierie et


de gestion du Canton de Vaud
(HEIG-VD)
Swiss Real Estate School
(SVIT)

École polytechnique fédérale


de Lausanne (EPFL)

Fernfachhochschule Schweiz
(FFHS)

Haute école du paysage, d’ingé­


nierie et d’architecture (HEPIA)

Université de Genève (UNIGE)

Haute école de travail social


de Genève (HETS)

HES-SO Valais-Wallis

Université de Lausanne (UNIL)

3. E S PA C E M I T T E L L A N D
Berner Fachhochschule (BFH)

sanu future learning

Haute école d’ingénierie 


et d’architecture ( HEIA-FR)

Schweizer Licht Gesellschaft


(SLG)

Centre de formation prof.


Berne francophone (CEFF)

Université de Fribourg (UNIFR)

4. S U I S S E C E N T R A L E
Hochschule Luzern (HSLU)

5. SUIS SE DU N O RD - O UES T
Fachhochschule
Nordwestschweiz (FHNW)

6. S U I S S E O R I E N TA L E
Ostschweizer Fachhochschule
(OST)

Fachhochschule Graubünden
(FHGR)

7. T E S S I N
Scuola universitaria profes-
sionale della Svizzera italiana
(SUPSI)

01 5 10
Nombre de formations

Les domaines d’études sont classés de gauche à droite par nombre Le nombre d’occurrences par thématique est montré par institution et
décroissant d’occurrences (architecture compte le plus d’offres de forma- degré. Les formations en lien avec l’architecture et l’ingénierie sont les
tion ; sciences humaines le moins) et selon l’ordre décroissant du total plus nombreuses, suivies de celles en rapport avec le développement
d’offres par région. durable et l’aménagement du territoire : une nouvelle réjouissante
Degrés : formations postgrades (Certificate , Diploma , Master of compte tenu des problématiques climatiques actuelles. Les centres de
Advanced Studies ), autres formations continues (cours spécialisés, gravité des thématiques sont majoritairement situés dans les hautes
brevets et diplômes fédéraux). écoles spécialisées en Suisse allemande.
Dossier RÉPARTITION DES TYPES DE FORMATION CONTINUE : QUELLES INSTITUTIONS PROPOSENT L’OFFRE LA PLUS LARGE ?
19

1. Z U R I C H 2. RÉGI O N LÉM A NI Q UE

Zürcher Hochschule Zürcher Hochschule Universität Zürich Kalaidos Fachhochschule Haute école spécialisée
für Angewandte der Künste (ZHdK) (UZH) Schweiz (KFH) de Suisse occidentale
ETH Zürich (ETHZ) Wissenschaften (ZHAW) (HES-SO)

Haute école d’ingénierie Swiss Real Estate School École polytechnique fédé- Fernfachhochschule Haute école du paysage, Université de Genève Haute école de travail
et de gestion du Canton (SVIT) rale de Lausanne (EPFL) Schweiz (FFHS) d’ingénierie et d’archi­ (UNIGE) social de Genève (HETS)
de Vaud (HEIG-VD) tecture (HEPIA)

3. E S PAC E M I T T EL L A N D

HES-SO Valais-Wallis Université de Lausanne Berner Fachhochschule sanu future learning Haute école d’ingénierie Schweizer Licht Centre de formation prof.
(UNIL) (BFH) et d’architecture (HEIA-FR) Gesellschaft (SLG) Berne francophone (CEFF)

4. S U I S S E C E N T R A L E 5. SUISSE NORD - OUEST 6. S U I S S E O R I E N TA L E 7. T E S S I N

Université de Fribourg Hochschule Luzern (HSLU) Fachhochschule Ostschweizer Fachhochschule Scuola universitaria
(UNIFR) Nordwestschweiz (FHNW) Fachhochschule (OST) Graubünden (FHGR) ­professionale della
Svizzera italiana (SUPSI)

Une offre de formation = Les CAS sont les formations les plus répandues. Leur durée, entre 6 et
Crédits ECTS : pas de crédits , ≤10 , ≤30 , ≤60 12 mois à temps partiel, permet de les suivre en parallèle d’un emploi.
Degrés : formations postgrades (Certificate , Diploma , Master of Les HES situées en Suisse allemande sont leaders sur le marché : la BFH,
Advanced Studies ), autres formations continues (cours spécialisés, la HSLU et la FHNW proposent à elles seules 78 des 202 offres.
­brevets et diplômes fédéraux) En Romandie, le choix est plus restreint : les institutions les plus impor-
Langues : allemand , français , italien et anglais tantes sont la Haute école spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO)
Régions : par ordre décroissant du nombre d’offres. et la Haute école d’ingénierie et de gestion du Canton de Vaud (HEIG-VD).

FRAIS DE FORMATION CONTINUE : COMBIEN COÛTE UN CAS EN SUISSE ?

1. Z U R I C H

2. R É G I O N L É M A N I Q U E

3. E S PA C E M I T T E L L A N D

4. S U I S S E C E N T R A L E

5. S U I S S E D U N O R D -
OUEST

6. S U I S S E O R I E N TA L E

7. T E S S I N

0 2000 4000 6000 8000 10 000 12 000 14 000 16 000 18 000 CHF

Un CAS = L’analyse des coûts des CAS (plus petit dénominateur commun des forma-
Prix médian régional tions postgrades) par grandes régions révèle d’importants écarts.
Nombre de crédits ECTS : 10-11 , 12-14 , ≥15 Les cursus en Suisse alémanique sont les plus chers avec un prix médian
Langues : allemand , français , italien et anglais . de CHF 7500.–, alors qu’en Romandie le prix médian est de CHF 6500.–
contre CHF 5500.– au Tessin. On constate également des variations consi-
dérables au sein d’une même région.
NATACHA GUILLAUMONT : « LE PAYSAGE EST En 2019, la HES-SO Master a mis en place avec l’UNIGE un Master Dossier
FÉDÉRATEUR » en développement territorial (MDT), dont l’une des orientations 20
est dédiée au paysage . L’atelier, pluridisciplinaire, forme des étu-
diant·es de différents horizons aux dynamiques du vivant.

TRACÉS : Avons-nous besoin de plus d’architectes du pay-


sage en Suisse ?
Natacha Guillaumont : Oui ! L’Office fédéral de l’environne-
ment (OFEV) indique qu’il faudrait former six fois plus de
paysagistes qu’actuellement pour assurer la planification ter-
ritoriale et paysagère. Toute la profession est sous pression :
les bureaux ont trop de travail, n’arrivent pas à répondre aux
demandes, ni à embaucher. Nos étudiant·es trouvent immé-
diatement un emploi après leurs études, depuis des années,
aussi directement après le Bachelor. En 2019, nous avons
lancé un nouveau Master paysage, au sein d’une formation
romande en urbanisme, qui associe la HES-SO Master et l’Uni-
versité de Genève (UNIGE). Celui-ci s’inscrit dans la continuité
d’un Master pluridisciplinaire lancé en 2014 déjà. La nouvelle
formation réunit des architectes, des géomètres, des géo-
graphes, des sociologues, des paysagistes, qui apprennent
Natacha Guillaumont est architecte paysagiste, professeure et responsable à projeter ensemble. Ils et elles travaillent majoritairement à
de la filière Architecture du paysage à la Haute école du paysage, d’ingé- mi-temps en agence, ce qui permet de répondre à la pression
nierie et d’architecture (HEPIA) et de l’orientation Architecture du paysage
du Master conjoint développement territorial MDT de la HES-SO Master et professionnelle et d’assurer une formation orientée pratique.
de l’UNIGE. (HEPIA) Le paysage est plutôt en vogue parmi les étudiant·es en archi-
tecture, qui s’y intéressent enfin, et l’intègrent de plus en plus
dans leurs projets. C’est positif non ?
Ce sont plutôt « l’écologie » et la « durabilité » qui sont à la
mode. Certes, il y a parmi les étudiant·es en architecture un
intérêt qui se manifeste pour le paysage. Mais il faudrait les
former très tôt aux dynamiques du vivant. La pensée de l’ar-
chitecture est encore trop fréquemment enseignée à partir
de l’objet, de la construction, et non des questions de sens
territorial. Et même quand c’est le cas, elles portent sur des
tissus urbains, avec une réflexion autour des espaces publics,
mais pas autour de la notion du vivant. Cela conditionne des
manières de penser. Sur le thème de « l’urgence », quand
on a été formé sur les questions du vivant, on ne pense pas
« objet », on pense immédiatement « temps ». Or les écoles
d’architecture ne parviennent pas à revenir en arrière sur ces
façons de penser. Certain·es architectes pensent qu’une toi-
ture végétalisée est vertueuse, mais pour nous c’est le parent
L’enseignement est structuré autour du projet d’atelier et du travail en pauvre d’un projet.
groupe. (HEPIA) Pourquoi l’OFEV estime-t-il que nous aurons besoin d’autant
de paysagistes ?
Les paysagistes réclament d’être invité·es dans les concours,
mais ils ne sont pas assez nombreux et l’on ne parvient pas à
former des équipes avec les architectes. Le paysage vient après
coup, comme pour apposer la dernière couche, en plantant
quelques arbres – parfois dans des fosses restreintes à chacun
des arbres. Or la pratique du paysage ne consiste pas à sau-
ver quelques arbres existants, bien visibles, mais à préserver
les conditions d’un milieu, préserver les dynamiques du vivant.
Ce que nous revendiquons, c’est de penser le paysage, dès le
début d’un projet : participer aux montages sur les questions
d’économie des moyens, d’écologie, d’implantation. Ce sont
là des questions cruciales pour permettre le développement
du vivant dans le temps long – écoulement de l’eau, étude des
sols, conservation des couvertures végétales et, surtout, assu-
rer la continuité de la pleine terre et des réseaux racinaires.
L’OFEV met un autre point en avant : la biodiversité, en réponse
aux pertes colossales en cours, et plus précisément le phéno-
mène de biodynamisation. Il nous faut encore expliquer que
le paysage n’est pas quelque chose de contraignant mais, au
contraire, contribue au renforcement des services écosys-
témiques : plus on fabrique de la qualité paysagère, plus on
augmente les chances de maintenir la biodiversité.
Il me semblait pourtant que de gros efforts étaient faits dans
les villes pour améliorer les espaces publics, notamment pour
lutter contre les îlots de chaleur.
Oui, mais on se trompe d’urgence : on se concentre sur
quelques zones, on replante quelques arbres, mais il faut
surtout conserver ce qui reste ! Certes, les trames vertes sont
identifiées, on tâche de les préserver, mais il faudrait repenser
Dossier
21

Carte du sous-sol racinaire de Chêne-Bougeries (GE) dessinée par Maëlle Proust, étudiante du Master en développement territorial – orientation paysage.
(HEPIA)

les distances dans ces zones car les arbres vont être en dif- Comment se déroulent concrètement vos enseignements
ficulté. Dans les projets publics, cela va encore, mais je vois dans le Bachelor et dans le Master, sur site ?
tellement de projets de promotion immobilière sur lesquels Nous soutenons une « approche par compétence », un pro-
les paysagistes n’ont pas la main, où l’on se fiche de la pleine jet intégré : tous les cours seront subordonnés à l’atelier de
terre, des cortèges floristiques et des systèmes racinaires… projet, y compris ceux d’histoire et de théorie. Dès lors, nous
C’est comme si l’on comptait sur le « pouvoir du végétal » à n’avons pratiquement plus de cours généraux, et nous faisons
toujours rejaillir, renaître, alors que le réchauffement le fait plutôt intervenir des spécialistes en lien avec chaque site et
souffrir et que des essences sont menacées. Au contraire, il ses problématiques. Chaque projet de semestre porte sur un
faudrait se demander pourquoi un milieu est en vie, quand site véritable, avec des contraintes réelles, et en partenariat
c’est encore le cas. Si on perd les pénétrantes vertes, avec avec une commune, une association, ou une institution qui
leurs cours d’eau, leurs charpentes paysagères, on perd un ont une vraie problématique à gérer (mais tout en gardant une
réseau de circulation d’eau et d’air déjà constitué. On veut certaine liberté pédagogique). Le multiscalaire – de la placette,
densifier vers l’intérieur, d’accord, mais certains choix seront du jardin au quartier – est présent depuis le Bachelor, puis le
décisifs pour les décennies, voire les siècles à venir, et ils Master travaille à l’échelle territoriale et régionale. Autant que
seront irréparables. possible, nous allons sur le terrain, rencontrons les acteurs
Il n’est pas évident de réunir autant de profils dans une même concernés. Seules les questions logistiques nous empêchent
formation. Comment fabriquez-vous un environnement plu- de faire tous les jours « l’école buissonnière ». L’école du pay-
ridisciplinaire qui parvient à les mélanger? sage, c’est l’école du dehors et du vivant.
C’est la pédagogie de l’atelier et la pratique du dessin qui per- Quelle est la posture des enseignant·es dans le cadre de cette
mettent de convoquer cette mission commune. Pour initier approche par projet ?
au dessin ou à la connaissance des essences, nous offrons Les enseignant·es doivent adapter leur enseignement à chaque
des cours-outils avec des encadrants aux étudiant·es qui projet, ce qui est assez exigeant. Mais ce qui est au cœur,
en ont besoin. Certain·es découvrent le processus de projet c’est l’étudiant·e, pas l’enseignant·e : on veut faire naître sa
et c’est parfois très difficile pour celles et ceux qui ont été vision. Donc il faut l’accompagner, sans qu’il ou elle s’en
formé·es à livrer des résultats, comme les géomètres. Mais rende compte. Les enseignant·es sont d’accord avec cette
tous doivent se montrer ouverts aux compétences des autres. approche et disent rarement « regardez comment je fais ».
Être jeunes, mais à l’écoute des autres visions disciplinaires. J’ai suivi l’enseignement de Gilles Clément, qui, justement,
Une ancienne étudiante m’a dit qu’elle avait appris à travail- savait ne pas « faire école » (alors qu’en réalité, il l’a fait !), ne
ler collectivement et qu’aujourd’hui elle voit immédiatement pas signer un projet, « faire œuvre ». Quand on est confronté
les gens qui en sont incapables. au vivant, cela n’a pas de sens.
À quelle profession exactement formez-vous ? Parvenez-vous à diffuser la pensée paysagère dans d’autres
Nous revendiquons le terme « architectes du paysage » pro- contextes ?
posé jadis par Frederick Law Olmsted, une discipline qui a Avec ma collègue Anne Sgard (professeure à l’UNIGE), nous
plusieurs siècles. Nos étudiant·es ont un Bachelor of Science, menons un projet de recherche sur la didactique du paysage
pas of Arts, ils ont un titre d’ingénieur. Jadis on distinguait le et pensons que c’est un sujet qui devrait être enseigné dès
« génie rural », du « génie civil » et du « génie naturel », donc l’école secondaire. Nous sommes convaincues que le paysage
l’ingénierie qui comprend la façon dont les éléments fonc- est une chance de former de meilleur·es citoyen·nes, car il
tionnent et s’articulent entre eux. J’aime ce terme, car il aide porte sur trois axes, qui concernent tout le monde : le sensible,
à faire comprendre que les dynamiques du vivant se res- le politique et la complexité. Le paysage est fédérateur.
pectent puis s’accompagnent ; le vivant aussi, ça se fabrique.
SOPHIE DELHAY : « L’EXPÉRIENCE DU PROJET PRODUIT Sophie Delhay vient de rejoindre la section architecture de Dossier
DE LA CONNAISSANCE » l’ENAC-EPFL, où elle conduit un atelier dédié au logement du 22
grand nombre et à l’habitat communautaire, un programme qui
peine à se renouveler malgré les changements sociaux.

TRACÉS : Comment observez-vous l’évolution de la pédago-


gie ces dernières années, notamment en parallèle avec les
crises sociales et écologiques en cours ?
Sophie Delhay : Les enjeux actuels doivent évidemment être
sous-jacents aux sujets enseignés. Tous les programmes
devraient se préoccuper du climat et de justice sociale.
Dans notre atelier, il est question de logement et d’habitat,
et j’essaie d’articuler la dimension spatiale avec la dimen-
sion sociale. Ce sont, à mon avis, les enjeux spécifiques de
l’habitat : il doit être plus appropriable et plus modulable
­qu’aujourd’hui, construit aussi dans un objectif d’écono-
mie de matière et d’énergie.
Plus généralement – sur les études d’architecture et la péda-
gogie –, je m’oppose à des études professionnalisantes.
L’architecture doit délivrer une culture. L’expérience du projet,
que ce soit à l’école ou en atelier, produit de la connaissance,
Sophie Delhay est architecte à Paris. Depuis 2022, elle enseigne le projet et c’est ainsi que les architectes peuvent chercher, apprendre
et coordonne l’orientation Housing-Habitat à la section architecture de la à apprendre, douter, interroger, poser les bonnes questions,
Faculté ENAC-EPFL. (SYDNEY CARON)
et finalement contourner les nouvelles normes, aborder les
changements. C’est une manière de faire de la recherche
que l’on apprend à l’école, et que l’on peut déployer dans la
pratique professionnelle.
Comment fonctionne votre atelier de projet ?
L’année est structurée en deux semestres complémentaires :
au premier, nous travaillons sur « la maison comme une ville »,
au deuxième sur « la ville comme une maison ». Une manière
d’aborder la question de l’habitat, qui défie les représenta-
tions séparant habituellement le logement et la ville.
« La maison comme une ville » est un projet de maisonnée
pour 100 personnes, dans laquelle les liens entre habitant·es
sont organisés autour de la question du repas et de la cui-
sine. C’est un projet manifeste, un prototype, non situé, une
expérience « in vitro » qui explore les capacités de l’espace à
ménager des liens spatiaux entre habitant·es, à interroger les
normes et les conventions, à penser l’économie de matière
et d’énergie. « La ville comme une maison » tire un portrait
domestique de la ville de Lausanne en l’observant depuis
l’intérieur, c’est-à-dire depuis sa dimension domestique. Ce
portrait consiste en une grande coupe sur la ville – du lac à
la campagne –, réalisée collectivement par les étudiant·es.
Ces dernier·ères s’appuient sur ce portrait pour proposer un
projet de transformation de la ville dont on détaille un frag-
ment. C’est une manière de penser la ville depuis l’intérieur,
maintenant que les villes ne peuvent plus s’étendre mais
doivent plutôt se renouveler sur elles-mêmes. Ici, c’est une
expérience « in vivo ».
Mon expérience d’architecte m’indique que c’est ainsi
qu’il faut procéder : d’une échelle à l’autre, sans jamais
les séparer. Ces deux approches – in vitro et in vivo – sont
complémentaires.
Ces catégories évoquent la méthode typo-morphologique
développée dans les années 1970, suivez-vous cette tradition ?
Non. Peut-être qu’on retrouve les catégories morpholo-
giques et typologiques, des sillons de pensée bien connus,
mais dont je souhaite libérer les étudiant·es. Dans notre
approche, nous demandons aux étudiant·es de travailler
sur le concept de maisonnée – soit un ensemble de per-
sonnes vivant ensemble (en principe intergénérationnel) : une
« grande maison », pour une centaine de personnes. C’est
une manière d’aborder la communauté et la mutualisation
des usages et des espaces, afin de considérer plus que son
propre logement. La contrainte du premier semestre était
d’organiser la vie collective autour du temps du repas et
autour des cuisines. Le but était de tisser des liens sociaux
entre les habitant·es, entre les échelles et, en même temps,
diminuer les équipements techniques – ce qui permet aussi
de réduire la consommation d’énergie.
Dossier
23

Une barre pour 100 personnes (Arthur Stepczynski, Or Mizrahi, Thomas Brütsch)
Pensez-vous que la taille des appartements représente un Dossier
enjeu ? Aujourd’hui, on entend dire que les surfaces devraient 24
être (encore) réduites, pour répondre à l’urgence climatique…
En effet, lors de ce premier semestre, j’avais plafonné la sur-
face de la maisonnée : je considère qu’on doit pouvoir vivre
confortablement et de manière écologique sans employer
plus d’espace. Plutôt que discuter la taille des logements,
c’est la relation entre espaces intimes et collectifs qu’il faut
faire évoluer, ces derniers pouvant être mutualisés. On pour-
rait même imaginer ne disposer plus que de chambres et de
salles de bains privées, puis partager avec la maisonnée une
multitude de grands espaces. Ce n’est donc pas la même
logique comptable. Si on cherche à construire moins, alors
changeons de repères et redéfinissons les qualités.
Depuis la pandémie, il est devenu courant de travailler à
domicile. Comment penser l’hybridation, la mixité de l’habi-
tat ? Les architectes ont-ils prise là-dessus ?
La pandémie n’a fait que révéler un changement majeur, lié
à une forme d’atomisation de la société. Dans les années
1960, le logement s’organisait autour de la famille et de
petites communautés. Aujourd’hui, la société est fractionnée
(en raison des divorces, de la mobilité, etc.), et les individus
appartiennent tous simultanément à plusieurs communautés
(travail, loisirs, etc.). Les communautés de foyer sont donc
multipolaires et moins hiérarchisées. Il ne suffit pas de dres-
ser le constat de cette évolution, mais de s’inspirer de ces
changements pour penser des logements qui s’émancipent
de ces standards révolus et adapter l’habitat aux usages
contemporains : le logement est une opportunité de repenser
la manière de vivre ensemble, d’agir sur les relations entre les
échelles. C’est ce travail que l’on essaie de mener à l’agence,
avec l’idée de logements multipolaires, composés d’espaces
flexibles et appropriables.
Peut-on vraiment faire des expériences dans la réalité comme
on les fait à l’école ? Et peut-on développer des logements
innovants sans l’appui d’une coopérative ou le recours à la
participation des habitant·es ?
En France, notre agence se concentre sur le logement banal,
avec des promoteurs ordinaires. Et même dans ce cadre, il
est possible d’offrir un programme supplémentaire ou de
réaliser des logements non standard : nous parvenons tou-
jours à insérer des espaces partagés généreux qui n’étaient
initialement pas budgétés ou encore à proposer des loge-
ments librement interprétables par leurs futur·es habitant·es.
Il y a dix ans, nous avons fait le choix de nous focaliser sur
la question du logement et, aujourd’hui, nous en tirons une
certaine expertise qui nous permet de nous appuyer sur nos
réalisations. Aussi je conseille aux étudiant·es de faire des
pas de côté, de passer par la fenêtre – littéralement. Être stra-
tégique et employer le projet comme levier pour convaincre
les client·es. Le projet est notre arme, c’est lui que l’on peut
partager et qui nous sert à convaincre. Il n’y a pas pour moi
de « site idéal » : l’architecte trouve la beauté là où elle est. En
revanche, la qualité du dialogue avec nos interlocuteur·ices
(décideur·euses, habitant·es, client·es) est toujours détermi-
nante pour celle des projets.
Dans un projet d’habitat participatif, j’ai eu l’opportunité de
développer des projets uniques, des situations très ouvertes,
directement avec les habitant·es. Mais on peut le faire autre-
ment, car chaque logement doit être aussi imaginé pour que
d’autres puissent par la suite s’y projeter, et ceux-là, nous ne
pouvons pas les rencontrer. Cela fait partie des règles du jeu
du programme de logement. Au propre comme au figuré,
l’habitant devrait toujours être considéré comme inconnu.
Une tour pour 100 personnes (Melchior Dechance, Victoria Siragusa, Finalement, avec ou sans habitants, la question est posée
Joanne Robert Nicoud) différemment, mais reste fondamentalement la même : com-
ment leur offrir un maximum d’espaces de liberté ?
Dossier « TOUT A DE LA VALEUR ! » : SILKE LANGENBERG À l’EPFZ, Silke Langenberg propose un cours de réparation. Les
25 étudiant·es amènent un objet endommagé et doivent le remettre
en état. Une manière de les emmener dans les problématiques
complexes du projet de sauvegarde.

TRACÉS : Votre chaire à l’EPFZ est consacrée à la gestion du


patrimoine bâti, à l’inventaire et l’évaluation des monuments
historiques, ainsi qu’à la théorie et l’histoire. Dans ce cadre,
vous proposez un cours pratique qui consiste à réparer des
objets. D’où vient cette idée ?
Silke Langenberg : La réparation est un concept courant dans
la conservation du patrimoine bâti ; il n’est pas contesté, car
il aide à préserver la substance originale – contrairement à la
restauration ou à la reconstruction, qui impliquent naturelle-
ment des remplacements ou des modifications. Nous avons
remarqué en revanche que la réparabilité jouait un rôle de
moins en moins important dans la construction. Les archi-
tectes conçoivent des objets, sans prendre en compte leur
entretien à long terme. Autrefois, le bâtiment était réalisé
et, après une première phase d’usage, il devait être rénové,
réparé, avant de passer à la phase suivante. De nos jours,
Silke Langenberg est professeure ordinaire de patrimoine bâti et de conser- un bâtiment est trop souvent démoli après cette première
vation des monuments à l’EPF de Zurich. Elle propose un cours théorique sur phase. L’idée du cours est d’amener à la phase suivante : for-
l’appréciation de la protection patrimoniale et le cours à option « Réparation ».
(Konstruktionserbe und Denkmalpflege, ETH Zürich)
mer les étudiant·es à penser à plus long terme, à la manière
En 2022, elle a dirigé l’ouvrage collectif Upgrade: Making Things Better (Hatje de remettre en état, voire de déconstruire. En réparant soi-
Cantz) qui explicite la démarche du cours. même un objet, on se rend compte à quel point il est difficile
de réparer quelque chose supposé être immuable.
Comment fonctionne le cours et quel est le but que vous
recherchez ?
Les étudiant·es apportent un objet endommagé et doivent
développer un concept : la réparation doit-elle être visible ou
non ? Doit-elle être particulièrement mise en valeur ? L’objet
sera-t-il perçu différemment ? Ils et elles apprennent ainsi
comment les choses sont faites, découvrent des matériaux
historiques et des techniques de production. Selon les objets,
nous avons recours au savoir-faire d’artisan·es ou de techni-
cien·nes en matériaux, parfois de designers, d’entreprises de
meubles, etc. Nous faisons aussi des partenariats avec des
fablab, quand il nous faut fabriquer des pièces de rechange.
Mais le cours ne porte pas sur l’objet à proprement parler,
plutôt sur quelque chose d’immatériel : il s’agit surtout d’ap-
précier, de reconnaître des valeurs, de les identifier et d’y
réagir de manière appropriée. L’objectif est d’une part d’ac-
quérir une certaine expérience concrète dans le domaine de
la réparation, et, d’autre part, de permettre le transfert vers
l’architecture, vers l’activité professionnelle.
Comment s’opère, justement, ce transfert ?
Si je vous apprends à dessiner maintenant, je suppose que
vous saurez le faire au semestre suivant, non ? Une fois que
vous avez effectué cet exercice, j’espère que vous compren-
drez l’idée et que vous la transférerez dans l’architecture.
J’ai déjà donné ce cours à Munich au niveau Bachelor et
je pouvais vérifier dans les projets d’atelier des étudiant·es
en Master s’ils et elles appliquaient ou non ce qui avait été
enseigné. Cela a bien fonctionné. Il faut savoir qu’ici les
étudiant·es sont très critiques, posent des questions sur la
durabilité, refusent la démolition, etc. Dès lors, beaucoup
participent au cours parce qu’ils et elles comprennent que
les méthodes de conservation du patrimoine sont tout aussi
adaptées aux objets non protégés. Si l’on traitait chaque
objet comme s’il s’agissait d’un monument, alors il ne serait
probablement pas démoli.
Je ne comprends pas très bien comment vous établissez le
lien entre cet exercice et l’évaluation patrimoniale. Où com-
mence et où s’arrête le patrimoine ?
Si nous partons de cette position, il ne nous reste plus qu’à
juger quelles valeurs sont déterminantes pour la préserva-
tion d’un objet. Selon la raison, je peux traiter un bâtiment
très différemment : s’il n’est protégé que pour des raisons
urbanistiques, je peux le vider de l’intérieur. S’il est protégé
parce qu’il présente un mode de construction particulier,
c’est plutôt sa conception qui m’importe. On ne devrait pas
interdire de transformer un objet uniquement parce qu’il est
inscrit au patrimoine : de nombreux bâtiments récents ont
Dossier
26

A C

B D

A Panier en osier réparé avec de la corde en sisal (Pablo Soladati) C Moka Bialetti améliorée (Jökull Jónsson)
B Semelle crêpe de Desert Boot recréée avec un filament élastomère D Placage or façon kintsugi pour réparer cette tasse en céramique (Leo Filser)
thermo­plastique (TPE) (Dustin Klammt)
Dossier été conçus pour être transformés et doivent rester flexibles. Ce qui m’importe, c’est d’enseigner à reconnaître quand
27 Et puis, bien sûr, il y a aussi des objets qu’il faut absolument on ne peut pas faire quelque chose soi-même, quand on a
conserver tels quels, parce qu’ils ont une valeur de mémoire besoin d’aide. Bien sûr, il faut développer certaines compé-
ou culturelle particulière. tences manuelles – dessiner, construire des maquettes, etc.
Ce sont ces questions que nous discutons avec les étudiant·es – et notre spécialité consiste évidemment à appliquer des
dans le séminaire. Selon les objets qu’ils apportent, et leur principes et des textes sur la protection du patrimoine, à
valeur, nous leur disons : « laisse faire un professionnel » (c’est maîtriser les règlements en vigueur. Mais ça, tout le monde
de la restauration), ou « c’est magnifique, fais-en le moins peut l’apprendre très vite, il suffit de lire les Principes pour
possible, essaie de conserver le maximum », ou encore « il y la conservation du patrimoine culturel bâti en Suisse. Dans
a beaucoup de matière, beaucoup de travail, qu’il ne faut pas notre enseignement, il s’agit de questionner les objets, de
jeter. Mais, au fond, tu peux le transformer complètement. » les comprendre. Non pas de lire un livre, mais de le lire de
D’autres objets ont peu de valeur matérielle, mais un bon manière critique.
design, dont il faut garder l’esprit. Il est donc important de Estimez-vous que l’enseignement actuel dispensé dans les
développer un concept en fonction de l’objet et de sa valeur. écoles répond aux besoins actuels et futurs ?
Et cela nous amène précisément aux questions patrimoniales Je pense que ce serait plus intéressant si on demandait tou-
ou à la construction dans l’existant. jours aux étudiant·es de concevoir dans l’existant. Beaucoup
Comptez-vous faire un cours de réparation similaire, mais qui de professeur·es d’atelier à l’EPFZ proposent du projet dans
porterait sur l’architecture ? l’existant (Entwurf im Bau). C’est bien, mais à l’avenir, si nous
C’est idée qu’il est pour le moment trop difficile à mettre en voulons moins démolir, il faudra davantage de construction
place. Mais dans un autre cours nous pratiquons la répara- dans l’existant (Konstruktion im Bau). C’est beaucoup plus
tion sur site : au semestre d’automne prochain, nous partons difficile, mais c’est plus important, car cela fait partie des
à l’hôtel Schatzalp de Davos, et nous réparerons avec les tâches d’aujourd’hui et de demain. Je ne parle pas de sta-
étudiants·es une chambre ainsi que son mobilier, afin d’ap- tique ou autre, mais bien de construction – comment les
prendre in situ ce que l’on fait habituellement en atelier. Le choses sont fabriquées, quels sont leurs principes d’assem-
cours s’intitule Keep in place – parce qu’on ne veut pas faire blage. Désormais, la construction devrait avoir un impact plus
de réemploi. Il s’agit de démonter un objet – fenêtres, portes, important que la conception. La recherche dans ce domaine
etc. –, le réparer et le remonter sur place. Le réemploi est va jouer un rôle fondamental.
très à la mode en ce moment et je suis parfois critique. Notre Pouvez-vous donner un exemple de recherche en réparation ?
principe est toujours d’abord reduce, puis seulement reuse L’un de nos doctorant·es s’intéresse aux façades high-tech.
et enfin recycle. Il se demande comment fabriquer des pièces de rechange
Qu’est-ce qui devrait être enseigné dans une école pour ce type de façades, en consultant des ingénieur·es en
d’architecture ? mécanique, car souvent les entreprises n’existent plus. Donc,
Ces derniers temps, je constate que, parmi les étudiant·es, très souvent, des façades entières sont remplacées parce que
certain·es refusent de participer à des tâches qui n’ont aucun les pièces de rechange se sont plus produites, ou introuvables.
sens à leurs yeux. S’il est prévu de faire un concours pour Or, il suffit parfois de changer cinq pièces.
un édifice qui remplace un autre (Ersatzneubau), ils plani-
fient simplement dans l’existant et disent : « Détruire n’est Propos recueillis par Marc Frochaux
pas une option. » Et ils le font avec énormément d’assu-
rance. Cet esprit critique est selon moi une qualité importante
à développer.

DENISE SCOTT BROWN ET LA PÉDAGOGIE DE L’ATELIER Article inédit, à lire sur espazium.ch

Nous publions en ligne une traduction inédite d’un article de


Denise Scott Brown rédigé en 2006 : L’atelier, ce cadeau de l’archi­
tecture à l’académie. En automne 1968, l’architecte dirige à Yale
avec Robert Venturi (son mari et associé) et Steven Izenour un
atelier dédié à l’architecture du strip de Las Vegas, qui conduira
au livre Learning from Las Vegas, publié en 1972. Le trio dirige un
second atelier sur les maisons suburbaines de Levittown, dont les
résultats ne furent pas publiés, mais qui poursuivait l’investiga-
tion d’une architecture vernaculaire américaine, cette fois dans
le domaine privé. Par la suite, Denise Scott Brown mène une
longue carrière d’enseignante dans différents contextes, qu’elle
raconte dans cet article. Elle plaide en faveur de la pédagogie de
l’atelier, une méthode d’apprentissage par le faire, collaborative,
qui associe recherche et projet.
Le texte a été traduit et commenté par Valéry Didelon, cri-
tique et historien d’architecture.
Learning from Levittown, panneau de présentation, 1970 (Archives archi-
tectures, Université de Pennsylvanie, don Robert Venturi et Denise En ligne sur espazium.ch : Denise Scott Brown, L’atelier comme contribution de
Scott Brown) l’architecture à l’enseignement universitaire (2006), trad. Valéry Didelon
Radical Pedagogies : introduction Nous publions une traduction inédite de l’ouvrage Radical Dossier
Pedagogies. Ce projet collectif, initié à la Biennale de Venise 2014, 28
a pris en 2022 la forme d’un ouvrage de 400 pages, documen-
tant près d’une centaine de récits d’expériences pédagogiques
architecturales expérimentales ou alternatives conduites dans la
Beatriz Colomina, Ignacio G. Galán, Evangelos Kotsioris seconde moitié du 20e siècle.
et Anna-Maria Meister
Dans les années 1960 et 1970, l’enseignement de l’architecture classe – un espace mobile et improvisé dans lequel le véritable Dossier
a été profondément ébranlé par une explosion de pratiques péda- professeur est désormais la rue elle-même. La frontière entre 30
gogiques expérimentales, et ce partout dans le monde. Ce ne fut vie urbaine et enseignement a été dissoute. La contestation est
rien de moins qu’une révolution. Radical Pedagogies explore la devenue pédagogie.
galaxie de ces expériences singulières qui, par leur refus de toute Les expériences pédagogiques intégraient diverses dimen-
pensée normative, ont profondément refaçonné l’architecture sions de la politique de l’époque, soit en jouant un rôle actif
et continuent à le faire. Sans suivre aucune recette ou méthode dans la contestation politique, soit en se mettant en retrait pour
existante, ces projets éducatifs ont connu de multiples débuts repenser les conceptions traditionnelles de celle-ci. La pédago-
et fins. De fait, si l’architecture a été si déstabilisée, c’est préci- gie était conçue comme une arène politique qui dépassait les
sément en raison de la nature hétérogène et changeante de ces strictes limites de l’enseignement de l’architecture. Dans tous
projets. Leurs effets se ressentent encore aujourd’hui et hantent les cas, il s’agissait d’une révolte. Mais le sens de cette révolte
les conversations. était tout sauf figé ; les projets changeaient sans cesse, exacer-
Étymologiquement, le terme « radical » vient du latin radix, bés par le fait qu’une révolution dans l’éducation est par défini-
la racine. Toutes ces expériences pédagogiques avaient ceci tion paradoxale, voire une contradiction dans les termes. Dans
de radical qu’elles visaient constamment à ébranler les fonde- l’enseignement, une révolte ne peut jamais se satisfaire d’elle-
ments de la discipline, préférant troubler les hypothèses que même. La « pédagogie radicale » pourrait même être un oxymore.
les renforcer ou les disséminer. Le champ s’est donc ouvert à Plusieurs philosophes, qui étaient des références impor-
de nouveaux types de pensée, de pratique et de responsabilité, tantes pour ces architectes radicaux, ont mené une réflexion
ainsi qu’à de nouveaux modes de perception, de solidarité et de approfondie sur ces paradoxes. En 1954, Hannah Arendt affir-
communication. Radical Pedagogies rend compte de cet appel mait que « dans le monde moderne, le problème de l’éducation
constant à révolutionner l’architecture, à multiplier et amplifier tient au fait que par sa nature même l’éducation ne peut faire fi
ses possibilités. de l’autorité, ni de la tradition, et qu’elle doit cependant s’exer-
En règle générale, ces expériences ont eu une durée de vie cer dans un monde qui n’est pas structuré par l’autorité, ni
assez brève : certaines ont été abandonnées ou dissoutes par les retenu par la tradition3 ». Selon elle, la crise de l’éducation était
protagonistes eux-mêmes ; d’autres ont été supprimées des pro- indissociable d’une crise de l’autorité en général. Ivan Illich a
grammes classiques ou, à l’inverse, y ont été assimilées, ou ont défié l’autorité à travers un projet de « déscolarisation ». Pointant
tout simplement pris fin en raison de contraintes politiques ou du doigt les politiques internes des relations forgées au sein de
financières1. À travers leur façon de tester les limites de la dis- la salle de classe, il a proposé de concevoir des « ‹ réseaux de
cipline, ces expériences étaient par définition précaires. Parfois, communication › à dessein éducatif, par lesquels seront accrues
c’est même leur succès qui a précipité leur fin. À l’inverse, ce les chances de chacun de faire de chaque moment de son exis-
qui à l’époque aurait pu être perçu comme un échec peut appa- tence une occasion de s’instruire, de partager, de s’entraider4 ».
raître avec le recul comme une réussite. Certaines étaient même À l’époque, l’une des questions essentielles était de voir com-
conçues pour échouer. Beaucoup ont été réalisées à la hâte et ment l’éducation maintenait les hiérarchies sociales ou offrait
sans véritable stratégie, tandis que d’autres, conçues à plus au contraire une possibilité de les subvertir. Paulo Freire, phi-
long terme, se sont incorporées au système comme des che- losophe et pédagogue brésilien dont la « pédagogie des oppri-
vaux de Troie. Bien souvent, elles ont connu une deuxième vie. més » a été reprise dans l’enseignement, l’architecture et les
Malgré leur « mort » souvent prématurée, ces projets apparem- expositions de Lina Bo Bardi, soutenait qu’une pédagogie favo-
ment éphémères ont eu un impact considérable sur les struc- rable au développement de la pensée critique était inextricable-
tures qui les ont absorbés, transformant la discipline pour les ment liée à la « lutte perpétuelle [des opprimés] pour affirmer
décennies à venir. Même après leur destruction apparente, leurs leur humanité5 ».
idées ont perduré et les réseaux ont persisté. Après tout, dans Aux États-Unis, le potentiel libérateur de l’éducation a acquis
leur ascension comme dans leur chute, ils n’ont jamais été iso- une importance nouvelle avec le mouvement des droits civiques.
lés ; à travers leurs connexions et leur interactivité, ils se sont Dans sa Conférence aux enseignants de 1963, James Baldwin
ramifiés comme le mycélium des champignons qui résiste mal- dénonçait la racialisation et les omissions de l’enseignement et
gré les changements2. Plutôt que de s’intéresser uniquement à observait qu’un changement de société ne serait possible qu’en
leurs mythes fondateurs, il est ici essentiel de tenir compte de remettant en question le système actuel, en libérant l’élève plu-
leur dissolution, de leur absorption, de leur disparition et de leur tôt qu’en le piégeant : « L’un des paradoxes de l’éducation, c’est
éventuelle seconde vie pour comprendre la situation à laquelle que c’est précisément au moment où
ces projets étaient confrontés, la menace qu’ils représentaient vous développez une conscience que
et les changements à long terme qu’ils ont provoqués. vous commencez à examiner la société
Il est important d’insister sur le fait que la lutte n’a jamais dans laquelle vous êtes éduqué. Le but Le but de l’édu-
été simplement binaire, qu’elle ne s’est jamais simplement tra- de l’éducation, finalement, c’est de créer cation, finalement,
duite par une opposition entre institution conservatrice et expé- chez l’individu la capacité de regarder c’est de créer
rience radicale, entre administration figée et étudiants mobiles, le monde par lui-même, de prendre ses chez l’individu
entre idées nouvelles et conventions anciennes. Il n’existait pas propres décisions6. » De la même façon, la capacité de
un seul front, mais des champs de bataille multiples et chan- l’auteure, enseignante et militante June regarder le monde
geants dans lesquels le statut des acteurs était constamment Jordan a exhorté les étudiants noirs et par lui-même,
renégocié. C’est même parfois entre l’enseignant radical et l’étu- portoricains à produire eux-mêmes des de prendre ses
diant contestataire que les antagonismes ont été les plus vifs. connaissances et non se contenter de propres décisions.
Ainsi, une étonnante photographie de mai 1968 montre les recevoir. Elle les a encouragés à s’ap- – James Baldwin
Giancarlo De Carlo au milieu d’un vif débat avec des étudiants puyer sur leurs expériences vécues dans
contestataires qui occupent la Triennale de Milan. Le corps pen- la communauté de Harlem pour contrer
ché en avant et visiblement en colère, il écoute toutefois avec les structures de pouvoir fondées sur la
une grande attention l’étudiant qui le harangue. Les deux par- race, la classe et le sexe, représentées et alimentées par l’uni-
ties, le professeur et les étudiants autour de lui, sont des radi- versité7. Quant à la philosophe féministe militante Grace Lee
caux. Malgré sa veste et sa cravate, Giancarlo De Carlo se Boggs, elle considérait l’éducation comme « une grande néces-
­revendiquait anarchiste et, de fait, en manifestant leur désac- sité » et « une grande obsession », refusant le « mythe » selon
cord, les étudiants n’ont pas fait autre chose que suivre son lequel les « écoles sont le meilleur et le seul endroit où l’on peut
appel à défier l’autorité institutionnelle, alors même qu’il diri- s’éduquer8 ». Boggs appelait à la création d’un « nouveau sys-
geait une Triennale supposément consacrée à l’auto-détermi- tème d’éducation » qui serait contrôlé par les communautés
nation politique des individus au sein du « plus grand nombre ». noires, « principales victimes » du système actuel. En Europe, le
Toute l’écologie de l’enseignement de l’architecture s’en est philosophe Jacques Rancière s’est fait l’écho de ce renverse-
trouvée déstabilisée, tournant comme une toupie dans une ment de la dynamique du pouvoir. Selon lui, les actes relatifs à
sorte de vortex. Le cercle des étudiants est devenu une salle de la maîtrise et à l’explication sont une forme d’abrutissement, car
Dossier
31

Des étudiants installent des « tuiles » fabriquées à partir de néoprène provenant d’un fabricant local de pièces automobiles, Dora Crouch House, RPI, Troy,
New York, 1975-1976. Garbage Housing – une série de programmes de recherche universitaires et de studios dirigés par l’architecte et critique britannique
Martin Pawley aux États-Unis dans les années 1970 – visait à développer une sensibilité culturelle et des connaissances techniques sur la réutilisation des
ordures comme matériau de construction pour des logements à faible coût. (Martin Pawley, avec l’aimable autorisation d’Oliver Pawley et Philippa
Morrisson)

À l’université de Kassel, Lucius Burckhardt développe la « promenadologie », une méthode scientifique et artistique d’« enseignement par l’action ». Chacune
de ses promenades suivait un scénario conceptuel spécifique dans lequel le paysage était examiné à travers des textes, des images et des théories his-
toriques. Déambulation intitulée « Le voyage à Tahiti », sur l’ancien terrain d’entraînement militaire de Dönche, Kassel, 1987. (Martin Schmitz Verlag)

Pages 28-29 : Giancarlo de Carlo débat avec Gianemilio Simonetti pendant l’occupation étudiante de la Triennale de Milan en mai 1968. (Cesare Colombo)
Dossier
32

Dirigé par l’architecte chilien Alberto Cruz et le poète argentin Godofredo Iommi, le projet pédagogique de Valparaíso a toujours cherché à déstabiliser
les structures universitaires conventionnelles par des pratiques qui effacent les frontières entre l’apprentissage, le travail et la vie. Tournoi « Giro y realce
de triple cortejo sobre volutas » organisé à Viña Del Mar en 1975. (Archivo Histórico Jose Vial, Escuela Arquitectura y Diseño, Pontificia Universidad
Católica de Valparaíso)

Dans plusieurs de ses projets, Cedric Price envisageait des dispositifs pédagogiques. ATOM (1967-1968) consistait en une « communauté intégrée sur le
plan éducatif » avec des technologies d’apprentissage installées dans les maisons, les usines, les bus et les parcs, coordonnées par un centre de distribu-
tion des communications appelé « cerveau de la ville ». (Fonds Cedric Price, Collection Centre Canadien d’Architecture CCA)
Dossier ils présupposent la supériorité intellectuelle d’une personne par système de discrimination enraciné. Mais même lorsqu’elles
33 rapport à une autre. Il leur oppose une logique d’émancipation étaient déployées au sein d’écoles « traditionnelles », ces expé-
qui remet en question les hiérarchies traditionnelles entre pro- riences ont poussé l’institutionnalisation elle-même à des inter-
fesseurs et étudiants dans les modes de production et de diffu- ventions critiques. Le développement institutionnel était consi-
sion des connaissances9. déré comme une forme d’émancipation expérimentale, un
La pédagogie étant de plus en plus considérée comme instrument permettant de rendre visible ce qui avait été tradi-
un instrument politique à part entière, les institutions universi- tionnellement négligé, comme les pratiques de construction
taires sont devenues un théâtre d’affrontements tant intellec- locales, les formes et les technologies vernaculaires, ou encore
tuels qu’esthétiques, et souvent physiques. Les mouvements de les méthodes non académiques. Le potentiel émancipateur
contestation étudiants qui se sont produits un peu partout dans des institutions en tant qu’éléments reconnus de la société a
le monde à partir de 1968 ont brisé les cadres établis, réclamant offert une reconnaissance à des groupes et des communau-
la participation des étudiants aux programmes et à la gestion tés jusque-là exclus, en validant les besoins et les sensibilités
des établissements, ainsi qu’un meilleur accès à l’enseignement des personnes non blanches, des personnes défavorisées, des
supérieur, indépendamment de la race, de la classe, du handicap femmes et des individus en situation de handicap, entre autres.
et du sexe. Certains considéraient les institutions universitaires Plutôt que d’opposer des points de vue extrêmes aux structures
comme des mécanismes de reproduction des systèmes de domi- conventionnelles, cet ouvrage identifie un large éventail d’ef-
nation, tandis que d’autres les envisageaient comme des hôtes forts critiques – de la résistance au renforcement, de l’activisme
indispensables, voire comme une source d’actions politiques clandestin à la contestation politique ouverte15. C’est l’idée
émancipatrices10. La plupart des intellectuels voyaient d’un œil même d’activisme politique, et plus largement de politique, qui
critique la situation privilégiée de l’université, et considéraient est ici débattue et repensée.
ses aspirations à devenir indépendante des structures politiques Dans l’architecture, les années 1960 et 1970 « radicales »
comme une forme sélective de liberté, complice de l’idéologique ont révélé les angoisses causées par les contours incertains de
libérale bourgeoise11. Aux États-Unis, de nombreux établisse- son identité dans un monde en rapide transformation. L’évidente
ments d’enseignement supérieur étaient directement corrélés au complicité de l’architecture avec la logique du capital et des
développement du complexe militaro-industriel ; d’autres étaient forces coloniales, ainsi que son implication dans le maintien
des pépinières du mouvement des droits civiques. Dans les des hiérarchies normatives, ont suscité des interrogations sur
nations postcoloniales, les écoles ont joué un rôle crucial dans ses valeurs. Tandis que les entreprises
le projet d’indépendance, même si certaines ont surtout servi à et les gouvernements renforçaient l’uni-
maintenir les hiérarchies coloniales12. Afin de se soustraire aux formisation de l’industrie du bâtiment et
cadres peu adaptés fournis par l’éducation institutionnalisée, de que l’urbanisme devenait une discipline La lutte n’a jamais
nombreuses expériences ont été menées en dehors du cadre à part entière, le rôle social de l’archi- été simplement
universitaire, comme geste de résistance politique. tecte a été peu à peu remis en question. binaire, elle ne
Dans l’enseignement de l’architecture, l’élan politique né Même l’avenir radieux (blanc) promis par s’est jamais
des mouvements contestataires de 1968 a été utilisé pour battre l’architecture moderne était remis en simplement
en brèche les forces de l’autorité, les hégémonies politiques, les cause par les sentiments anti-­coloniaux traduite par
hiérarchies coloniales et les structures capitalistes. De nouvelles et les préoccupations environnemen- une opposition
organisations, ainsi que de nouvelles techniques et matériaux tales. L’illusion monolithique du pro- entre institution
ont été introduits dans la communauté fermée de cette disci- grès s’était désormais scindée en une conservatrice
pline pour transformer ses écologies sociales et matérielles ; multitude d’approches – anti-modernes, et expérience
dans d’autres cas, l’enseignement est sorti des établissements pré-modernes et post-modernes – qui radicale, entre
pour se déployer dans d’autres espaces, technologies, médias aspiraient toutes à une nouvelle défini- administration
et formes de vie issus de la contre-culture. À l’inverse, dans les tion de l’architecture. figée et étudiants
nations postcoloniales, l’existence même de programmes d’en- Dans la mesure où les protocoles dis- mobiles, entre
seignement de l’architecture totalement autonomes a souvent ciplinaires ne pouvaient plus être consi- idées nouvelles
constitué une proposition politique radicale en soi. dérés comme acquis, l’architecture a été et conventions
Les pédagogies de l’architecture, et plus particulièrement contrainte de réexaminer ses fondements. anciennes.
les écoles d’architecture, ont sans cesse été l’objet de critiques Quelques formes de pratiques radicales
dans toutes ces luttes. Dans les cadres institutionnels, l’auto- ont tenté de répondre à la complicité
rité a été défiée de l’intérieur. Et un large éventail de nouveaux avec le pouvoir et le marché en délimitant
contre-­mouvements et de modèles pédagogiques non ortho- artificiellement les cadres disciplinaires, en concevant l’architec-
doxes a cherché à démanteler les structures hiérarchiques exis- ture comme un langage formel discret. Mais la plupart ont plutôt
tantes. Des tentatives ont été menées pour institutionnaliser cherché à élargir le champ d’implication de l’architecture dans
ces actions radicales ou, au contraire, pour abolir les institu- d’autres milieux culturels et environnementaux, en se confron-
tions elles-mêmes. Pour autant, la question de la possibilité d’un tant à différentes formes de connaissance issues d’autres disci-
contre-mouvement au sein même de ces institutions éducatives plines, allant de l’anthropologie et la sociologie aux mathéma-
n’est pas résolue. « Mais si l’exercice d’une telle éducation sup- tiques, aux statistiques et aux sciences « dures ».
pose un pouvoir politique, et si les opprimés n’en disposent pas, Cherchant à élargir ses horizons, l’architecture s’est davan-
comment alors concrétiser la pédagogie des opprimés avant la tage tournée vers les types de processus médiatisés par l’envi-
révolution ? », demande Freire. Il a ainsi proposé d’opérer une ronnement bâti plutôt que vers les bâtiments eux-mêmes. Les
distinction entre « l’éducation systématique, qui peut seulement enseignants se sont ainsi éloignés de la conception de l’objet
être changée lorsque l’on détient le pouvoir », et les « travaux architectural pour réorienter les outils et les protocoles disci-
éducatifs, qui doivent être élaborés avec les opprimés13 ». Les plinaires de l’architecte vers un tout nouvel ensemble de per-
professeurs d’architecture – parmi lesquels figurent de nom- formances, de techniques d’analyse et de cadres théoriques.
breuses personnalités politiques et des activistes assumés – ont Parallèlement à ce décentrement, de nombreux professeurs et
souvent revendiqué leur « indépendance » par rapport aux sys- étudiants ont abandonné la conception de l’architecte comme
tèmes dans lesquels ils opéraient, même si – assez ironiquement unique auteur, définissant de nouveaux rôles pour les concep-
– nombre d’entre eux parasitaient, exploitaient ou avaient sim- teurs, ainsi que des pratiques participatives en vue de déve-
plement besoin de ces institutions pour se définir de manière lopper des formes d’organisation plus collectives. L’idée de
autonome et radicale14. ­l’architecture comme champ de connaissance unifié et stable a
Les pédagogies radicales ont cherché à s’affranchir des été abandonnée au profit d’un kaléidoscope d’approches défiant
définitions conventionnelles des institutions. Échappant souvent les manières conventionnelles de penser et de faire.
aux écoles ou aux ensembles administratifs officiels, elles aspi- Ces changements se sont parfois manifestés dans les port-
raient à défaire de manière systématique et directe les struc- folios d’étudiants, les revues d’atelier, les projets de thèse et
tures de pouvoir patriarcales, coloniales, validistes ou tout autre les présentations de fin d’année. Mais c’est surtout dans les
structures des programmes, les exposés d’atelier, les conte- Dossier
nus des cours et des exercices, les bibliographies indicatives, 34
les programmes de voyage, la planification des tâches et les
contraintes de calendrier que s’est gravée l’essence de ces
expériences. Le rejet polémique des anciens modèles d’ap-
prentissage et l’aspiration à de nouveaux modes de produc-
tion de connaissances architecturales ont été condensés dans
ces documents pédagogiques. Non seulement ils ont permis
de reconstruire des expériences novatrices dans l’architecture,
mais ils ont aussi apporté une perspective claire des impératifs
éthiques – qu’ils soient implicitement ou explicitement énoncés
– qui motivaient ces désirs de changement. Bien qu’ils soient
généralement perçus comme des documents conçus en amont
des programmes d’enseignement et de formation, ils sont une
bonne illustration d’une théorie de l’éducation et d’une théorie
de la pratique ; ils révèlent une redéfinition particulière de l’archi-
tecture, en nous disant par qui et pour qui elle est créée.
Malgré les appels à agir directement sur la bureaucratie ins-
titutionnelle, même les enseignants les plus anti-­bureaucratiques
de la seconde moitié du 20e siècle se sont beaucoup appuyés
sur une variété de documents écrits. À une époque de déma-
térialisation croissante, les traces matérielles de l’architecture
et de sa pédagogie apparaissent d’autant plus importantes. Il
s’agit moins de délicates esquisses ou d’habiles dessins d’ar-
chitectes que de publications d’étudiants, brochures, tracts,
affiches et tout un éventail de nouveaux « documents pédago-
giques » – cartes de voyage, schémas (pseudo)-scientifiques,
fresques peintes à la main, tracts de manifestations, question-
naires d’enquête, infographies, cartes perforées, chartes auto-
gérées et bulletins de vote. Plus les architectes s’efforçaient
de réduire l’épaisseur des murs jusqu’à des membranes éthé-
rées, plus la finesse du papier était élevée au rang de ­substitut
de l’architecture elle-même. C’est ainsi que l’architecture a
été redéfinie comme un médium parmi d’autres, indissociable
École de Baroda, en Inde : préparation à la foire des Beaux-Arts, 1967. des profondes transformations créées par tout un faisceau de
Photographie de Jyoti Bhatt. (Jyoti Bhatt Archive. Avec l’aimable autori- nouveaux médiums.
sation de Jyoti Bhatt et Asia Art Archive)
Ces divers médiums ne se sont pas contentés de sonder
les limites de la discipline, ils sont devenus une menace pour
le système de contrôle des connaissances16. Buckminster Fuller
avait prophétisé que les salles de classe seraient bientôt déser-
tées et que les cours seraient dispensés par voie électronique,
les étudiants étant reliés par des systèmes de télévision bidi-
rectionnels depuis leur domicile17. Il est d’ailleurs symptoma-
tique que les premières grandes expériences en matière d’en-
seignement à distance aient été mises en œuvre juste après mai
1968. Tandis que les innovations technologiques – télévision
par satellite, premiers réseaux informatiques et VHS – modi-
fiaient de façon décisive la pédagogie architecturale, plusieurs
groupes radicaux ont imaginé une infrastructure interplanétaire
pour démocratiser l’accès aux informations pédagogiques, par
des terminaux informatiques terrestres, des satellites en orbite
et même des bases lunaires. Le modèle unidirectionnel de trans-
missions des connaissances est devenu une cible, jugée comme
une relique des structures de pouvoir hiérarchiques désormais
minées par la démocratisation des technologies photoméca-
niques et électroniques. L’innovation pédagogique ne dépendait
pas uniquement des nouveaux médias : même la technique héri-
tée de l’enseignement de l’histoire de l’art au 19e siècle – la pro-
jection comparative de diapositives à la Wölfflin – est devenue
un instrument de critique grâce au développement de nouveaux
moyens d’échange de contenu.
Les corps eux-mêmes, autrefois considérés dans la tradi-
tion humaniste occidentale comme la base de la proportion et
de l’harmonie architecturale, sont devenus un médium pour la
pédagogie radicale18 : rassemblés dans des salles de classe bien
chauffées ou sur des terrasses ensoleillées ; en créant ensemble
des structures, marteau à la main ; en voyageant à travers la
campagne en voiture, en avion ou en car ; liés par l’effort phy-
sique d’une escalade en montagne ; en se retrouvant dans des
lieux pour s’organiser et mettre au point des institutions éduca-
tives plus inclusives et solidaires ; en se rassemblant dans des
Des participantes de la WSPA formant un symbole féminin, 1975. La Women’s espaces publics pour protester contre les structurations gen-
School of Planning and Architecture (WSPA) était un programme d’été expé- rées dans l’espace domestique ; des corps unis pour remettre en
rimental créé en 1974. (Archives WSPA, Smith College)
question les structures du passé et prendre un nouveau départ.
Dossier Radical Pedagogies reconnaît la nature illimitée du champ 4 Ivan Illich, Une société sans école, trad. G. Durant, Points Seuil, 1971, p. 2.
35 d’expériences qu’il décrit – un corpus dont les contours toujours 5 Voir Paulo Freire, La Pédagogie des opprimés [1968], trad. par E. Dupau
et M. Kerhoas, Marseille, Agone, 2021. Freire a conçu cet objectif pour
changeants se précisent, sans toutefois jamais chercher à se « transformer ce que Frantz Fanon appelle ‹ les damnés de la terre › d’‹ êtres
fixer. L’adhésion à cette polysémie donne non seulement l’occa- pour les autres › en ‹ êtres pour eux-mêmes › », Stanley Aronowitz, « Paulo
sion de prendre en compte des expériences pédagogiques dif- Freire’s Radical Democratic Humanism », dans Peter McLaren et Peter
Leonard, Paulo Freire: A Critical Encounter, Londres, Routledge, 1993, p. 13.
ficiles à catégoriser, mais aussi d’explorer l’étendue des mul-
6 James Baldwin, « Conférence pour enseignants », prononcée le 16 octobre
tiples champs d’action de l’architecture, tout en ménageant 1963, sous l’intitulé « L’enfant noir – son image de soi », dans Retour dans l’œil
un espace pour des formes de radicalité inattendues. En adop- du cyclone, trad. par H. Borraz, Christian Bourgois, Paris, 2015, pp. 81-82.
tant la structure ouverte et hétérogène de son matériau, le pro- 7 À propos des activités pédagogiques de Jordan, voir « ‹This Class Has
Something to Teach America› : June Jordan and the Democratization of
jet conserve certaines gravitations propres à la discipline, qui Poetry and Pedagogy », dans Danica Savonick, « Insurgent Knowledge :
sont tournées vers des géographies et des figures spécifiques. The Poetics of Pedagogy of Toni Cade Bambara, June Jordan, Audre Lorde,
Beaucoup font d’ailleurs aujourd’hui partie du canon de l’archi- and Adrienne Rich in the Era of Open Admissions », thèse de doctorat, City
University of New York, 2018.
tecture, même si à l’époque elles tentaient de travailler contre la 8 Grace Lee Boggs, « Education : The Great Obsession », Monthly Review 22,
pensée canonique. Mais ces gravitations sont aussi le reflet des n° 4, septembre 1970, pp. 18-39. Cet essai faisait à l’origine partie d’un
archives à notre disposition pour élaborer les histoires recen- cycle de conférences intitulé « Challenge of the 70s », prononcées au cours
sées dans cet ouvrage. Bon nombre des études de cas pré- de l’automne 1969 à l’University Center for Adult Education, Wayne State
University.
sentées ici proviennent d’archives organisées dans des institu- 9 Jacques Rancière, Le Maître ignorant : Cinq leçons sur l’émancipation intel-
tions qui font autorité et sont dotées d’une grande quantité de lectuelle, Paris, Fayard, 1987.
matériaux visuels et documentaires. En même temps, les nom- 10 Le philosophe germano-américain Herbert Marcuse, par exemple, a reconnu
le potentiel « subversif » de l’enseignement général, mais a également noté
breuses autres initiatives d’étudiants, de professeurs dissidents que l’élargissement du système éducatif était motivé par le besoin des
et de militants politiques dont il est question ici ont été délibéré- sociétés industrielles de disposer d’une main d’œuvre qualifiée. Herbert
ment omises par les « archives » conventionnelles. Les archives Marcuse, « Lecture on Education, Brooklyn College, 1968 », dans Marcuse’s
Challenge to Education, sous la direction de Douglas Kellner, Tyson Lewis,
sont « fondamentalement une affaire de discrimination et de
Clayton Pierce et K. Daniel Cho, New York, Rowman & Littlefield, 2009,
sélection qui, en fin de compte, accorde un statut privilégié à pp. 33-34.
certains documents écrits, tout en refusant ce même statut à 11 Louis Althusser, « Problèmes étudiants », La Nouvelle Critique, n° 152,
d’autres », comme l’a judicieusement observé Achile Mbembe19. janvier 1964.
12 À propos de la tension entre les universités et le projet de décolonisa-
Pour offrir un espace à des expériences non documentées, de tion en Afrique, voir Achile Mbembe, « Decolonizing the University : New
nombreuses contributions à ce volume s’appuient sur des col- Directions », Arts and Humanities in Higher Education 15, n° 1, 2016. Cette
lections personnelles, des histoires orales et divers documents période coïncide avec ce que Paul Tiyambe Zeleza a appelé « l’âge d’or »
des universités africaines entre 1950 et 1970. Voir Paul Tiyambe Zeleza,
éphémères – et mettent l’accent sur le travail qui reste à faire. « African Studies and Universities since Independence », Transition, n° 101,
À l’heure des crises globales, des catastrophes écologiques 2009, p. 112.
et de l’accroissement rapide des inégalités, la remise en question 13 Freire, Pédagogie des opprimés, op. cit.
des hiérarchies disciplinaires héritées du passé peut, et doit, se 14 Certains enseignants partageaient la thèse d’Althusser sur l’éducation ins-
titutionnalisée, pour qui « l’école… enseigne des ‹ savoir-faire › mais dans
produire dans les espaces éducatifs. Radical Pedagogies dévoile des formes qui assurent l’assujettissement à des idéologies dominantes,
un panorama des tentatives passées de subversion du statu quo, ou la maîtrise de sa pratique », Louis Althusser, « Idéologie et appareils
et révèle un corpus sur lequel s’appuyer et des idées qui n’at- idéologiques d’État », La Pensée, n° 151, juin 1970.
15 Cette approche s’appuie sur des méthodes critiques féministes comme
tendent qu’à être reprises. Il s’agit d’une sorte d’inventaire des celle défendue par Donna Haraway dans son célèbre « Manifeste Cyborg »
possibles, d’une invitation à ouvrir de nouveaux chemins et à for- publié en 1985, plus favorable aux approches diversifiées qu’aux catégo-
muler un ensemble indiscipliné de nouvelles questions qui ries oppositionnelles. Voir Donna Haraway, « Manifeste Cyborg. Science,
technologies et féminisme socialiste à la fin du XXe siècle » dans Manifeste
s’adressent autant aux architectes qu’aux historiens de l’archi-
cyborg et autres essais : sciences – fictions – féminismes, Paris, Exils, 2007,
tecture – une incitation à défier les conventions, les catégories et pp. 29-92. Comme l’écrit Chela Sandoval, toute « coalition transculturelle
les canons et à repenser collectivement la pédagogie vers des globale pour une justice sociale égalitaire » dépend du différentiel en tant
formes de pratique de l’architecture entièrement nouvelles. que pratique critique. Voir Chela Sandoval, Methodologies of the Oppressed,
Minneapolis, University of Minnesota Press, 2000.
16 Pour le théoricien canadien des médias Marshall McLuhan, la technologie
Beatriz Colomina est titulaire de la chaire Howard Crosby électrique représentait la force même qui, de manière décisive, allait modi-
Butler d’histoire de l’architecture et directrice fondatrice du fier « toutes les institutions autrefois considérées comme allant de soi ».
Voir Marshall McLuhan et Quentin Fiore, Message et massage. Un inven-
programme sur les médias et la modernité à l’Université taire des effets, trad. par J. Agel et T. Lauriol, Paris, Jean-Jacques Pauvert,
de Princeton. 1968.
Ignacio G. Galán est architecte, historien et professeur 17 R. Buckminster Fuller, Education Automation : Freeing the Scholar to Return
adjoint au Barnard College de l’Université de Columbia. to His Studies, Carbondale, Southern Illinois University Press, 1962.
18 Alors que McLuhan voyait dans les médias « une extension de notre
Evangelos Kotsioris est historien de l’architecture, ensei- système nerveux central », le théoricien allemand des médias Kittler a
gnant et conservateur au Musée d’art moderne de New- contre-argumenté en affirmant que « les médias déterminent notre situa-
York (MoMA). tion », car ils constituent la base matérielle grâce à laquelle la construc-
tion et la diffusion des connaissances sont rendues possibles. McLuhan
Anna-Maria Meister est architecte, historienne, critique et Fiore, Message et massage, op. cit. ; Friedrich A. Kittler, Gramophone,
et professeure de théorie et de science de l’architecture Film, Typewriter, trad. par F. Vargoz, Dijon, Les Presses du Réel, 2018.
à l’Université technique de Darmstadt. 19 Achile Mbembe, « The Power of the Archive and Its Limits », dans Refiguring
the Archive, dir. Carolyn Hamilton et al., Cape Town, David Philip, 2002,
p. 20.
Traduction : Sophie Renault
Avec l’aimable autorisation du MIT Press et des auteur·rices.

1 Il existe une abondante littérature sur la manière dont la pensée radicale a


été absorbée par les institutions qu’elle remettait en question. On notera
un parallèle particulièrement frappant entre ce processus d’absorption des
expériences pédagogiques au sein de la discipline (ou du moins sa tenta-
tive) et l’effort pour absorber les histoires subalternes dans l’histoire en
tant que discipline. Voir, par exemple, Dipesh Chakrabarty, Provincializing
Europe : Postcolonial Thought and Historical Difference, Princeton, NJ,
Princeton University Press, 2000.
2 Les théories de la révolution ont utilisé l’image du mycélium comme un
tissu de connexions invisibles entre des moments de résistance en appa-
rence disparates. Voir Abraham DeLeon, « A Schizophrenic Scholar out for
a Stroll : Multiplicities, Becomings, Conjurings », dans Taboo : The Journal
of Culture and Education 17, n° 1, mai 2018. Pour une histoire culturelle du
champignon en tant qu’objet et analyse des dépendances économiques et
politiques mondiales, voir A. L. Tsing, Le champignon de la fin du monde,
trad. P. Pignarre, Les Empêcheurs de penser en rond, La Découverte, Paris,
2017.
3 Hannah Arendt, « La crise de l’éducation », in La crise de la culture, trad.
sous la direction de P. Lévy, Folio essais, Gallimard, 1954, p. 250.
ACTUALITÉS Charpentes bois Journal
36

Il est venu le temps des charpentes bois Les architectes ne sauraient plus dessiner des projets en bois.
C’est le lourd constat établi lors du dernier Salon Bois de Bulle.
Pourtant, une vitrine européenne comme celle de la reconstruction
de la charpente de Notre-Dame de Paris en témoigne : les savoir-
faire sont encore là, ils doivent désormais réinfuser la construc-
Camille Claessens-Vallet tion contemporaine.

Le Salon Bois à Bulle est le rendez-vous annuel des métiers du


bois : on s’y informe sur les nouveaux produits en lien avec ce
matériau, on y admire le travail des tavillonneur·euses ou on y
découvre les projets les plus récents, en déambulant dans la halle,
dessinée à la fin des années 1990 par Galletti Matter architectes.
Le 10 février dernier, la lumière d’hiver vibrait entre les longues
verticales des piliers en métal et les tirants doubles en bois qui
tendent les sheds. À l’étage, derrière la façade borgne, se tenait
un séminaire organisé par Michel Niquille (consultant bois) portant
sur les charpentes historiques. À la table des invité·es : Vincent
Steingruber, collaborateur scientifique pour le Service des biens
culturels de Fribourg, Marc Jeannet, ingénieur civil et charpen-
tier, Fabrice Macherel, architecte, Jean-Luc Sandoz, ingénieur, et
enfin Fanny Vidale, charpentière.

Les architectes ne savent plus parler la langue du bois

« Bâtiments historiques, quelle place pour le bois ? » On aurait


pu croire le sujet réservé aux expert·es du patrimoine, voire aux
nostalgiques ; et on aurait eu tort, puisqu’aujourd’hui, en Suisse,
1 bâtiment sur 29 serait recensé à l’inventaire des biens culturels1.
Des bâtiments fréquemment édifiés en bois ou en pierre, maté-
riaux omniprésents dans la construction il y a quelques siècles,
d’où l’importance de bien comprendre ce patrimoine, afin de
pouvoir intervenir sur sa substance, ne serait-ce que pour le res-
taurer ou le transformer.
Ce jour-là, on a rappelé qu’il y a aussi eu des périodes de
l’histoire où l’on était plus précautionneux : la charpente du
16e siècle de la halle aux grains de l’Hôtel cantonal existe depuis
400 ans, les jacquemarts du 20e siècle ont quant à eux tenu…
20 ans.
« Les constructions érigées aux siècles précédents étaient
pensées pour traverser les générations futures, explique la
charpentière Fanny Vidale. Nos ancêtres charpentiers avaient
une autre notion que nous de la valeur du bois : en effet le tra-
vail d’abattage et d’équarrissage étaient déjà une épreuve…
avant même de commencer à tailler une poutre ! Puis les tra-
cés et taillages des assemblages se faisant manuellement, avec
toute l’énergie que cela nécessite, on peut aisément s’imagi-
ner le soin nécessaire pour réaliser chaque pièce. C’est pour-
quoi, lorsque l’on construisait, on le faisait pour longtemps ! »
Elle évoque aussi la disparition progressive de certaines tech-
niques anciennes, remplacées progressivement par la numé-
risation (voir encadré p. 39). Une perte de connaissances qui
aurait, selon Vincent Steingruber, collaborateur scientifique pour
le Service des biens culturels de Fribourg, des conséquences sur
la qualité des projets contemporains.
Il martèle qu’« aujourd’hui, il n’y a pas suffisamment de
bons projets en bois soumis dans le canton2 » et cite tout de
même en modèle quelques réalisations récentes : un immeuble
de logements à Vaulruz (2021, Dreier Frenzel) ; le centre nau-
tique de Nant (2021, Atelier Pulver) ; la passerelle des Buissons
à Bulle (2023, RBCH architectes et Gex&Dorthe ingénieurs)3.
Mais il note que « la majorité des projets soumis actuellement
sont d’une banalité affligeante, en plus d’être inadaptés au
lieu. Généralement, une expression bois se traduit par quelques
planches lancées en façades, pour faire joli. Ce n’est pas ce que
j’appelle la culture du bâti. »
Journal
37

Notre-Dame : une reconstruction mise en vitrine

Alors comment construire à nouveau qualitativement en bois ?


Le débat de Bulle s’inscrit dans un climat européen favorable à
ce matériau, quasiment considéré comme l’une des solutions
miracles pour lutter contre le réchauffement climatique. Mais
comme le rappellent certain·es expert·es, telle Fanny Vidale, le
bois mis en œuvre aujourd’hui est fréquemment un matériau
composite : les colles utilisées, en plus d’être rarement écolo-
giques, sont de potentiels points faibles pour les assemblages.
Et ces matériaux nouveaux sont générateurs de solutions stan-
dardisées : on ne respecte pas, ou seulement partiellement, les
caractéristiques du bois, puisque la colle permet à la matière
de travailler dans plusieurs directions, en superposant des pan-
neaux dont la fibre est orientée selon plusieurs axes. Bref, on
conçoit souvent aujourd’hui en bois comme on le ferait en béton
B préfabriqué.
Pourtant, les savoir-faire du bois
sont encore là. C’est sur ce point que se
sont accordé·es les experts·es du sémi- On conçoit
naire, mais c’est aussi ce que montre souvent
actuellement, à plus grande échelle, la aujourd’hui
reconstruction de la cathédrale Notre- en bois comme
Dame de Paris, dont l’incendie d’avril on le ferait en
2019 avait tant ému. Au-delà du drame, béton préfabriqué.
le chantier est actuellement une formi- Pourtant,
dable vitrine pour ces métiers ances- les savoir-faire
traux : forestier·ère, charpentier·ère, fac- du bois sont
teur·ice d’orgue… Certains sont en encore là.
tension, mais les traditions et les compé-
tences multiséculaires existent toujours.
Pour accompagner le projet, l’établisse-
ment public chargé de la conservation et de la restauration de la
cathédrale Notre-Dame de Paris ainsi que la Cité de l’architec-
ture ont monté une exposition4 qui présente le déroulement et
les enjeux du chantier. S’il s’agit avant tout d’une opération de
communication qui peut sembler un peu creuse aux yeux des
professionnel·les, elle n’en est pas moins un laboratoire vivant
Montage à blanc du tabouret de la flèche de Notre-Dame de Paris : pour les recherches sur le patrimoine. La fermeture au public
A en extérieur
B en atelier de la cathédrale est en effet une occasion rare d’effectuer des
(David Bordes) recherches sur les parties difficilement accessibles : le groupe
de travail métal a découvert par exemple l’existence d’agrafes Journal
qui permettaient de fixer certaines pierres, ce qu’on ignorait 38
jusqu’à présent.
Pour les métiers du bois, la reconstruction de la forêt –
comme on appelle la charpente de la cathédrale – est un évé-
nement majeur. L’abattage du dernier chêne nécessaire s’est
déroulé symboliquement de manière manuelle en février dernier
dans la forêt domaniale de Bellême, dans l’Orne (F). En tout, ce
sont près de 2000 arbres, issus de tout l’Hexagone, qui permet-
tront la reconstruction de la flèche, la voûte et la croisée du tran-
sept, ainsi que de la nef et du chœur de la cathédrale.
Le chantier de près de 5000 m3 de bois massif de la cathé-
drale Notre-Dame est certes spectaculaire, mais il reste bien
derrière d’autres qui se déroulent actuellement en Europe. On
peut nommer par exemple celui du Campus de l’Arboretum à
Nanterre (125 000 m2, 32 400 m3 de bois massif), celui d’Ecotope
(25 000 m2), qui devrait démarrer bientôt sur le campus de
l’EPFL, ou encore ceux qui se déroulent actuellement à
Bluefactory, à Fribourg. Espérons qu’à l’image de leurs ancêtres,
ces nouvelles constructions seront capables de durer – et de
se transformer.

1 Texte de présentation du séminaire « Bâtiments historiques, quelle place


pour le bois ? », Salon Bois 2023
2 On notera que, à l’instar de son cousin fribourgeois qui a modifié sa légis-
lation en 2014 déjà pour favoriser l’utilisation du bois dans la construction,
le Canton de Vaud vient d’annoncer qu’il lançait un programme de sub-
ventions de 1,5 million de francs, afin d’encourager l’usage du bois local
dans les projets de nouveaux bâtiments.
3 Philippe Morel, « Passerelle des Buissons à Bulle : simplement complexe »,
TRACÉS 2/2023
4 Exposition jusqu’au 29.04.2023. « Notre-Dame de Paris. Des bâtisseurs
aux restaurateurs », Cité de l’architecture, Paris

En haut : L’art du trait pratique de charpente, traité du 19e siècle. En bas : « pavil-
lon carré de pente et rampant à tous devers – comble de lucarne en éventail et à
devers placé sur la noue d’un comble en retour d’équerre de pente et rampant. »
(gallica.bnf.fr / BnF)
Journal TRAIT DE CHARPENTE OU L’ART
39 DE TRAVAILLER AVEC L’EXISTANT

Lors du Salon Bois de Bulle, la charpen-


tière Fanny Vidale a expliqué avec préci-
sion son métier ancestral, mais qu’elle
définit elle-même comme fragile. En

Le spécialiste
cause ? La disparition progressive de l’art
du trait de charpente et des techniques
anciennes, remplacés aujourd’hui par

pour la protection
les machines numériques. Cette étape
manuelle se déroule après l’abattage,
l’équarrissage et le sciage des grumes,
tâches réalisées par le ou la bûcheron·ne.
Elle commence par une épure au 1:20 de
la charpente à réaliser. Ensuite le dessin
est reporté à même le sol à l’aide d’un
et la cosmétique
du béton
cordex et d’une craie, puis les bois sont
mis sur l’esquisse et piqués, ce qui signi-
fie que chaque intersection des pièces
est tracée à l’aide d’un fil à plomb. Les
pièces sont ensuite marquées à l’aide www.desax.ch
d’une rainette, qui permet de graver dans
le bois, ce qui est plus pratique qu’un
trait de crayon en cas d’intempérie sur
le chantier. « Le marquage doit sauter
aux yeux. Le chantier, ce n’est pas une
chasse au trésor, il faut être efficace »,
commente Fanny Vidale. Le marquage en
charpenterie répond à une numérotation
qui évoque les chiffres romains, mais car-
dinale, pour éviter les erreurs de lecture
lorsque les éléments sont tournés. Le
taillage des bois, fait avec des machines
portatives, permet ensuite l’assemblage,
qui est le plus souvent testé avec une
remise sur épure, au sol, pour corriger les
éventuelles erreurs – « c’est plus simple
que lorsqu’on est sur le chantier à 12 m
de haut ».
L’art du trait de charpente, en usage
depuis le 13e siècle, aurait été élaboré
en même temps que la stéréotomie.
Ce serait même cet art qui serait à l’ori-
gine de la géométrie descriptive inven-
tée par Gaspard Monge en 1766. Même
si l’UNESCO a inscrit cette technique sur
la liste de son patrimoine culturel imma-
tériel en 2009, elle n’est plus apprise
aujourd’hui que de manière sporadique.
À tort, selon Fanny Vidale, car elle per-
met de travailler sur les vieux bois tordus,
non standardisés. « C’est une technique
qui marchera toujours pour la rénovation
et c’est pourquoi elle doit être enseignée
et mise en œuvre. »
SRF, Zurich
Architecture: Penzel Valier
Texte rédigé sur la base de la présentation
« La charpente, ce métier ancestral qui a
traversé les siècles et pourtant si fragile
aujourd’hui », donnée par Fanny Vidale Protection anti-graffiti
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PROFESSION Entretien Journal
40

« La seule erreur que nous puissions Matthias Gmür a récemment pris ses fonctions de président du
groupe professionnel Technique (BGT). Nouveau venu à la SIA, il
commettre, ce serait de ne rien faire » enrichira le BGT de son regard neuf.

Jasmine Scheidegger, spécialiste Communication SIA

SIA : Jusqu’à l’été dernier, personne ne vous connaissait


à la SIA. Vous n’étiez même pas membre. Vous avez alors
adressé votre candidature au poste de président du groupe
professionnel Technique (BGT). Qu’est-ce qui vous a incité
à vous présenter ?
Matthias Gmür : C’est vrai, je suis nouveau à la SIA. C’est
Philippe Jorisch, le président du groupe professionnel archi-
tecture (BGA), qui m’a parlé du poste. Nous nous connaissons
depuis le gymnase et collaborons aujourd’hui sur des pro-
jets communs : lui, en tant qu’architecte ; moi en tant qu’in-
génieur en énergie et techniques du bâtiment. Cet appel à
candidatures est arrivé à point nommé, alors que je cherchais
­justement à m’engager davantage pour la branche.
De formation, vous êtes ingénieur en génie de l’environne-
ment, mais vous avez aussi cofondé cinq entreprises. Dans
l’une d’elles, vous dirigez les opérations. Racontez-nous.
Avec d’autres camarades d’études, nous avions choisi le
À PROPOS domaine des bilans écologiques pour nos mémoires de
master : moi, sur la gestion des déchets ; les autres, sur les
Matthias Gmür (ZH) est le nouveau pré- ­techniques du bâtiment. Pour ce projet, nous avions créé des
sident du groupe professionnel Technique logiciels que nous voulions continuer à développer ultérieure-
(BGT) de la SIA. À 28 ans, l’ingénieur en ment. C’est comme ça que nous avons créé notre première
génie de l’environnement fondait sa pre- entreprise. Très vite, nous avons trouvé de la demande dans
mière entreprise. Quelques années plus le domaine des techniques du bâtiment.
tard, quatre autres avaient suivi, toutes À quoi sert ce logiciel ?
dans le domaine des techniques du bâti- À développer, optimiser et analyser des concepts énergétiques
ment et de l’énergie. (Philip Böni) pour le bâtiment en conjuguant différentes technologies et
concepts. Nous cherchons des solutions avec un impact éco-
logique limité et nous en démontrons la rentabilité financière.
Revenons à votre mandat de président du BGT. Celui-ci a offi-
ciellement démarré le 1er mars. Quelles sont vos premières
impressions ?
Je n’ai pas encore pu identifier tous les champs d’actions
possibles ni quels sujets trouveraient le plus d’écho au sein
du groupe. Je dois encore me familiariser avec les structures.
En revanche, il me tient vraiment à cœur de m’engager pour
que les techniques du bâtiment soient davantage perçues
comme inhérentes au concept d’un bâtiment, particulière-
ment sur le plan énergétique.
Vous vous êtes lancé dans cette aventure pour ainsi dire en tant
que novice. Est-ce à votre avantage ou cela vous pénalise-t-il ?
Mon regard neuf sera certainement un atout. Pour être hon-
nête, j’avais une image encore assez vague de la SIA, il n’y a
pas si longtemps. Je la voyais surtout comme un organisme
édictant des normes. Je pense qu’on gagnerait à mieux
informer le public et nos membres de nos activités. Ce sont
eux qui permettent à la Société de prendre le pouls du ter-
rain. C’est par là que je veux commencer, dans mon mandat
de président du BGT : créer le contact, renforcer la proximité
avec les membres et les sections.
Peut-on donc s’attendre à ce que vos activités de président
du BGT accordent une place importante aux membres ?
Oui, je représente un groupe professionnel : je veux que ses
membres soient au premier plan. Avec 750 membres, le
BGT est le plus petit des quatre groupes professionnels de
la SIA. C’est une chance, car cela me permet de communi-
quer de manière plus directe et ciblée avec les membres et
d’essayer de les impliquer au sein de la Société. L’enjeu du
Journal BGT est notamment de représenter au mieux ses membres au maximum les leviers actuels. Et c’est à nous, à notre asso-
41 et leurs profils variés, qu’ils soient titulaires de diplômes HES ciation, d’intervenir dans le secteur et de nous positionner
ou non. Je suis ouvert à toutes les idées ou suggestions pou- clairement. Nous devons motiver tous les acteurs du secteur
vant aller dans ce sens. à travailler main dans la main pour atteindre ces objectifs.
Ces dernières années, les principaux thèmes au BGT ont été Que faut-il, du point de vue du BGT, pour y parvenir ?
les outils BIM et la low-tech/no-tech. Des thèmes importants À mon avis, la position des ingénieur·es doit être encore cla-
à vos yeux ? rifiée : nous devons agir comme une équipe interdisciplinaire
Assurément. Les outils BIM devraient être utilisés de manière poursuivant un même objectif, tout au long du processus
beaucoup plus systématique. Certain·es professionnel·les d’études. Il relève de notre responsabilité de maintenir le parc
de la conception restent encore à convaincre des avantages immobilier suisse à la hauteur des aspirations de la société.
de la méthode. Nous avons beaucoup à faire, mais le jeu en Nous voulons atteindre la neutralité carbone et contribuer à
vaut la chandelle. la densification. Une mission que nous partageons avec les
Et la low-tech/no-tech ? architectes et les autres acteurs impliqués dans un projet de
MG : Je n’aime pas trop ce concept. D’une certaine manière, construction.
il traduit une intention de se passer des techniques du bâti- Vous avez parlé plusieurs fois de travailler en équipe. Pourquoi
ment et crée une frontière entre les différent·es profession- est-ce important pour vous ?
nel·les de la construction. Alors qu’une approche interdisci- J’essaie toujours de penser au collectif, d’impliquer tout le
plinaire est aujourd’hui essentielle pour garantir la meilleure monde. Les améliorations de processus ne doivent pas ser-
utilisation possible des technologies et composants à notre vir à une seule personne, mais à toute son équipe. Et notre
disposition. Et si l’on pense aux objectifs climatiques, c’est association doit continuer à avancer unie, en tenant compte
la seule approche possible. des préoccupations de la société dans laquelle elle est ancrée.
En parlant d’objectifs climatiques, avez-vous une stratégie Nos idées, nos projets, doivent profiter à tous les groupes pro-
en la matière ? fessionnels et ne pas servir seulement des intérêts individuels.
Cette approche interdisciplinaire se retrouve dans la vision Comment envisagez-vous l’avenir immédiat de la branche ?
même de la SIA : « ensemble pour créer un cadre de vie durable ». Les défis qui se présentent à nous aujourd’hui sont tels que
La Suisse a par ailleurs signé l’Accord de Paris sur le climat la seule erreur que nous puissions commettre, ce serait de
et s’est engagée à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. ne rien faire. Lorsque nous avons à disposition les techno-
Nous n’avons pas le choix, nous devons aller de l’avant. C’est logies nécessaires à une neutralité carbone, nous devons
un objectif qui doit nous contraindre toutes et tous. absolument les utiliser. Dans les autres cas, il est nécessaire
Ce qui n’est pas encore vraiment le cas… de réduire nos émissions et les compenser. Et il s’agit de
D’un point de vue théorique, nous avons conscience de nos reconnaître et d’assumer notre responsabilité en tant
possibilités, nous connaissons nos limites et savons là où il ­qu’ingénieur·es et architectes, qui est d’informer les maîtres
nous faudra trouver des solutions. C’est à nous, les expert·es d’ouvrage des modes de construction écologiques.
de la conception, d’utiliser nos connaissances pour exploiter

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Nouvel outil en ligne : Le nouveau site acquisition-prestations-


etudes.ch détaille les étapes-clés de la
Le « Guide pour l’acquisition de presta-
tions d’études » couvre l’ensemble du
« Guide pour l’acquisition passation des marchés d’architecture processus d’acquisition, de l’idée de pro-
de prestations d’études » et d’ingénierie. Les maîtres d’ouvrage jet à l’adjudication du marché. Il propose
pourront désormais s’aider de ce guide des objectifs concrets pour chaque étape,
en ligne. des conseils sur la manière de procéder,
Le « Guide pour l’acquisition de presta- un glossaire et des liens vers des infor-
tions d’études » offre aux maîtres d’ou- mations complémentaires. Pièce maî-
vrage un moyen simple et rapide de tresse du site, un assistant (ou « finder »)
s’informer sur la marche à suivre pour permet d’identifier la forme de mise en
l’adjudication d’un marché d’architec- concurrence appropriée sur la base du
ture ou d’ingénierie. Si une commune volume du marché et de la marge créa-
souhaite, par exemple, faire construire tive offerte par le projet.
un nouveau bâtiment scolaire, elle aura à Ce guide résulte d’une initiative de la
préparer avec soin l’attribution du projet Société suisse des ingénieurs et des archi-
à un bureau d’études. Il lui faudra donc tectes (SIA) menée conjointement avec la
régler la question du financement, cla- Fédération des architectes suisses (FAS)
rifier les exigences légales, faire appel à et l’Union suisse des sociétés d’ingé-
des spécialistes et lancer une procédure nieurs-conseils (suisse.ing). Il bénéficie du
d’adjudication. Grâce à cette préparation soutien de Constructionsuisse, l’associa-
minutieuse et au choix judicieux du mode tion faîtière de l’industrie de la construc-
de passation, la commune réduira les tion suisse.
risques de dépassement des délais et des
coûts et augmentera les chances de réali- Barbara Angehrn, spécialiste
ser une construction durable. Communication auprès de la SIA

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de prendre contact avec Lionel Rinquet
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en Romandie : appel che (Mat-loop et REMCO), financés entre jet, ainsi que des données de base sur ce
à renseignements autres par l’Office fédéral de l’énergie dernier (situation du projet, année, type
(OFEN) et portant sur la logistique du de réemploi) : lionel.rinquet@hesge.ch
réemploi dans la construction, le labora-
toire énergie, climat, environnement et
architecture (LECEA) de l­’HEPIA récolte
tous types d’informations sur des pro-
jets ayant mis en œuvre le réemploi
­d’éléments en Suisse romande, les freins
et les moteurs qui caractérisent ces
démarches.
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sance d’un projet où le réemploi, in situ
ou en provenance d’un autre chantier
a été employé, nous vous saurions gré

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TOUT SE TRANSFORME VI-Vid : le cas de Fribourg Partenariat Journal
46

Vides urbains : ressources temporaires Face à la standardisation et à la réglementation des espaces


publics, les vides urbains sont aujourd’hui une opportunité de
pour transformer la ville résistance face au changement climatique, et une manière de
rendre aux habitant·es le « droit à la ville ». Avec l’étude du cas
fribourgeois, les autrices invitent à considérer les vides selon de
Séréna Vanbutsele et Estela Brahimllari Schaffner nouvelles temporalités et à mettre en œuvre des outils légaux
pour favoriser leur appropriation.

PRÉSERVER LE VIDE Le principe de densification urbaine, largement partagé par les


acteur·ices de l’aménagement du territoire, évolue aujourd’hui
Cette contribution poursuit la réflexion vers un cadre légal qui inciterait à la sobriété foncière et à l’inter-
sur le réchauffement des villes amorcée diction d’artificialisation des sols. Cette approche s’inscrit notam-
dans l’article du mois de février, qui dis- ment dans la Stratégie Sol Suisse1. Cependant la ville dense et
cutait le phénomène d’îlots de chaleur et compacte visée par ces politiques est souvent remise en question
de fraîcheur. Il est ici question de « vides et même contestée tant par les habitant·es que par les acadé-
urbains », un terme qui décrit d’abord miques.2 En 2014, la sociologue-urbaniste Marie-Paule Thomas
de manière peu différenciée les espaces montrait la persistance d’une « aspiration résidentielle forte vers
non bâtis, les « trous » dans la texture un habitat individuel peu dense hors du tissu des villes suivant le
urbaine, puis les usages qu’on y observe, modèle de la villa quatre façades – unifamiliale avec jardin à l’en-
plus ou moins formalisés, et dont la des- contre du paradigme de la densification »3. Sur ces dix dernières
tination pourrait changer ou rester relati- années, ce constat se vérifie encore. La ville de Fribourg continue
vement indéfinie dans les années, voire de présenter un solde migratoire interne négatif, contrairement
les décennies à venir. Si la trame théo- aux communes périphériques qui, elles, continuent de gagner
rique employée se heurte à la réalité phy- des habitant·es4. Outre les explications d’ordre économique, la
sique, forcément complexe, d’un site présence d’un jardin et de « vert » autour et à proximité directe
réel, l’hypo­thèse demeure, à savoir que du logement reste un argument majeur face auquel la présence
la cartographie de ces ressources pour- de parcs et d’espaces verts publics au sein des villes ne semble
rait contribuer à un principe : celui de tou- pas suffire. Aujourd’hui, les espaces publics font l’objet de régle-
jours en préserver un nombre minimum, mentations de plus en plus nombreuses qui, au mieux, limitent
conserver une « réserve » d’espaces non les possibilités de jeu et de loisirs5 et, au pire, menacent la liberté
bâtis, afin de rendre la densification d’expression et les interactions qu’ils sont censés favoriser6. Ce
des villes acceptable pour le plus grand constat mène à porter notre attention sur une série d’espaces
nombre. Les autrices renouvellent ainsi urbains informels appelés friches, terrains vagues, espaces aban-
un credo vital de la planification urbaine : donnés, espaces libres ou encore « vides urbains ».
le vide doit conduire le plein, et non La prise de décision quant à leur devenir reste aujourd’hui
l’inverse. une question complexe pour les aménageur·euses. En effet,
les vides urbains peuvent être considérés soit comme des res-
Comité éditorial Tout se transforme : sources de terrain constructibles, soit, au contraire, comme
Camille Claessens-Vallet, Isabel des espaces de nature à protéger au sein des villes pour rendre
Concheiro, Marc Frochaux, Valérie acceptable, voire viable, leur densification. Ces deux approches
Ortlieb, Marco Svimbersky et Séréna opposées visent pourtant toutes deux à renforcer une politique
Vanbutsele d’urbanisation vers l’intérieur. Or la tendance actuelle est à favo-
riser la construction face à la pression foncière exercée par le
marché immobilier.

Des espaces complémentaires aux espaces publics plus


traditionnels

À l’heure où de nombreuses métropoles voient fleurir des initia-


tives pour valoriser les vides urbains via des occupations tempo-
raires7, il est de plus en plus évident que ces espaces agissent
en complément des espaces publics plus conventionnels ou for-
mels. Cette complémentarité se trouve dans le potentiel qu’ils
détiennent : (1) pour encourager les activités spontanées, par
opposition aux loisirs standardisés et réglementés autorisés dans
les espaces publics ; (2) pour être des espaces d’inclusion sociale
et d’autonomisation, où la communauté peut exercer son « droit
à la ville »8, en contraste avec à l’utilisation plus ségréguée de
l’espace public, où les utilisateur·ices tendent parfois à être des
consommateur·ices passif·ves ; (3) pour encourager la biodiver-
sité et renforcer le lien avec la nature ; et (4) pour agir comme
laboratoires urbains et tester des solutions, par opposition aux
espaces publics soumis à des conceptions plus permanentes et
rigides. À cela s’ajoutent les potentiels plus communément recon-
nus des espaces verts urbains avec les services écosystémiques
essentiels qu’ils peuvent fournir (notamment la préservation de
Journal
47

Vides urbains Espaces verts informels (EVI) Espaces verts formels


espaces en pleine terre sites perçus comme EVI surfaces végétales, places de jeux,
espaces à prédominance minérale par 145 répondant·es de secteurs « parcs et promenade », etc.
bâtiments vides l’enquête VI-Vid diffusée en été 2022 gérés par la Ville de Fribourg

La méthode d’identification des vides urbains repose sur quatre critères : (1) la physionomie de friche, identifiée à travers Carte de base: SWISSTOPO
l’arpentage (espaces en appa-
rence délaissés, avec des traces d’appropriation spontanées, passages informels, éléments de décor stéréotypés de la friche…) ; (2) la perception d’infor-
malité ou de sous-utilisation, identifiée à travers les entretiens et l’enquête ; (3) la pression urbaine, identifiée à travers les instruments d’aménagement du
territoire pour pointer les sites voués à être urbanisés ou densifiés (PAD, PAZ, Projet d’agglo…) ; (4) l’organisation spatiale du non-bâti, identifiée à travers
l’analyse morphologique (espace non bâti enclavé dans le tissu bâti). (Séréna Vanbutsele et Estela Brahimllari Schaffner)
Journal
Espaces en pleine terre Espaces minéraux Bâtiments
48
Transformation en cours
espaces qui ont été considérés
comme des vides dans le passé
mais qui sont actuellement en
cours de reconversion et qui font
l’objet de chantier de construction

Friche, Marly BlueFACTORY Ancienne halle CAFAG

Transformation agendée
espaces aujourd’hui non
construits mais qui le seront
dans le futur

Colline de Torry, Fribourg Anciens abattoirs, Fribourg Ferme Ueberwil

Pas de transformation
agendée
espaces reconnus comme non
constructibles mais dont la
physionomie et la gestion actuelle
seront appelées à être reconsidérées
dans le futur

Bords de la Glâne Le Port de Fribourg La Chassotte, Givisiez

Vides futurs
sites voués à la démolition, ou
qui vont faire l’objet d’une trans-
formation radicale, mais qui
sont toujours occupés formellement

Ferme, Le Guizet Caserne militaire, Fribourg Prison centrale, Fribourg

Réemploi des matériaux Recreation / Laboratoire urbain Biodiversité / Îlots de fraîcheur


Les espaces minéraux ou bâtiments, qui sont Les espaces en pleine terre ou minéraux, qui Les espaces en pleine terre ou minéraux, qui
en voie de construction ou démolition ou qui ne sont pas construits et ne le seront pas ne sont pas construits et ne le seront pas à long
le seront prochainement, ont un grand prochainement, ont un potentiel d’experimen- terme, ont un potentiel pour la biodiversité,
potentiel pour l’économie circulaire. tation à travers l’urbanisme transitoire ou ainsi que pour refroidir la ville et assister les
de l’agriculture urbaine, pour renforcer les services écosystémiques plus traditionnels des
liens sociaux. espaces verts urbains.

Matrice des types de sites identifiés en fonction de leur temporalité (Séréna Vanbutsele et Estela Brahimllari Schaffner)

PROJET VI-VID la biodiversité, la gestion de l’eau, la production alimentaire, l’at-


ténuation des îlots de chaleur, le contrôle de l’érosion des sols,
Projet : la filtration de la pollution de l’air…).
VI-Vid – Valeur Intrinsèque des Vides Dans ce contexte, le projet de recherche VI-Vid (Valeur
urbains : cartographier et identifier Intrinsèque des Vides urbains) relève le potentiel des vides 9
les vides urbains pour en révéler les urbains pour favoriser les interactions sociales et le contact
potentiels avec la nature, et contribuer à une densification qualitative dans
Financement : les petites et moyennes communes. À travers un travail théo-
Smart Living Lab@HEIA rique, cartographique et l’échange avec les acteur·ices de ter-
Période : rain et usager·ères, plus de 40 vides urbains ont été localisés
Octobre 2021 à décembre 2022 sur le centre urbain le plus densément bâti de l’agglomération
Equipe : fribourgeoise incluant les communes de Fribourg, Marly, Villars-
Séréna Vanbutsele, Estela Brahimllari sur-Glâne, Givisiez, Belfaux et Granges-Paccot. Ces 40 sites
Schaffner, Götz Menzel, Philipe Gloor représentent 250 ha, qui s’ajoutent aux 100 ha de parcs, places
Plus d’info : de jeux et autres espaces gérés officiellement par la Ville de
smartlivinglab.ch/fr/projects/vi-vid Fribourg.

Vides urbains à Fribourg : appropriations et temporalités


contrastées

Les vides urbains identifiés à Fribourg sont multiples. Les friches


industrielles les plus « notoires » (blueFACTORY, le Port de Fribourg
ou les anciens abattoirs) présentent un ensemble d’activités assez
structurées et une animation organisée, généralement initiés par
des institutions publiques qui cherchent à activer des espaces
Journal vacants. Les aménagements reprennent les codes esthétiques des constructions. Ne pourrait-on pas dès lors imaginer la planifica-
49 occupations informelles : mobilier en palette, fanions, tags…, sans tion d’un stock de vides urbains à maintenir comme une « réserve
pour autant que l’occupation du lieu soit issue d’une démarche de solutions »13? Cette logique de processus nécessite une connais-
alternative ou subversive10. A contrario, sur d’autres sites, on sance des caractéristiques des vides en termes de temporalité
retrouve des traces d’usages informels, indices d’une occupa- (pour garantir la présence de ce stock en permanence), en termes
tion parfois illégale, « invisible » ou indésirable qui est alors diffi- d’accessibilité (pour entrer en discussion avec les propriétaires si
cilement prise en compte dans un futur projet de transformation besoin) et en termes d’appropriation (pour relever les usager·ères
du site. Ces observations de terrain concordent avec les résultats des lieux).
de l’enquête menée auprès de 145 habitant·es et usager·ères fri-
bourgeois·es en juin 2022, qui confirment qu’une majorité des Pr Dr Séréna Vanbutsele enseigne à la HEIA-FR.
répondant·es ne sont pas des usager·ères des vides urbains bien Estela Brahimllari Schaffner est architecte et collaboratrice
qu’ils en connaissent la présence11. scientifique à l’Institut Transform.
Afin de comprendre les conditions d’activation des vides
1 Stratégie adoptée par le Conseil fédéral le 8 mai 2020
urbains dans une logique de transformation des villes, ces 2 Michael Wicki, David Kaufmann, Accepting and resisting densification:
espaces ont été catégorisés en fonction de leur évolution sur The importance of project-related factors and the contextualizing role
la ligne du temps de l’aménagement du territoire. Cette caté- of neighbourhoods, Landscape and Urban Planning, Volume 220, 2022,
104350, ISSN 0169-2046, https://doi.org/10.1016/j.landurbplan.2021.104350
gorisation permet de déterminer les ressources les plus faci-
3 Marie-Paule Thomas (2014). Urbanisme et mode de vie – Enquête sur les
lement activables en fonction des priorités à viser. Dans une choix résidentiels des familles en Suisse.
situation de manque d’espaces publics et face à la nécessité 4 Solde migratoire interne, 2021, Atlas statistique de la Suisse, atlas.bfs.
de renforcer les liens sociaux, une série d’espaces voués à être admin.ch/maps
5 Sonia Curnier, « Programmer le jeu dans l’espace public? », Métropolitiques,
construits et généralement peu ouverts au public pourraient être 10 novembre 2014
utilisés comme espaces collectifs, au moins temporairement. metropolitiques.eu/Programmer-le-jeu-dans-l-espace.html
L’implémentation d’interventions temporaires à petite échelle, 6 Christian Dessouroux (2003). La diversité des processus de privatisation
de l’espace public dans les villes européennes. Belgeo, 1, 21-46. journals.
ou le développement de jardins partagés dans des sites qui ne openedition.org/belgeo/15293 ; DOI : doi.org/10.4000/belgeo.15293
seront pas construits ou qui le seront à moyen-long terme, offri- 7 Stéphanie Sonnette, « Transitoire, l’esprit ou la lettre », TRACÉS 2/2022
raient le potentiel d’y stimuler l’interaction sociale. En outre, de 8 Henri Lefebvre (1968), Le droit à la ville, Paris : Anthropos
petites interventions de restauration de la biodiversité auraient 9 Le ‹ vide › se réfère au vide spatial laissé entre bâtiments/infrastructures,
mais aussi au vide social et juridique laissé sur des espaces où l’occupation
le potentiel de créer des espaces de nature riches, sans pour n’est attribuée à personne, mais que chaque individu peut potentiellement
autant entrer dans une logique de parcs aménagés ou de utiliser à son gré ; ou encore au vide temporaire laissé entre une fonction
réserves naturelles à long terme suivant l’exemple d’initiatives ancienne et future, à déterminer, ou retardée à cause de complications
administratives, environnementales, financières ou sociales. Néanmoins,
similaires déjà testées sporadiquement à Fribourg12. si les espaces étudiés sont qualifiés de ‹ vides ›, ce sont assurément des
Les bâtiments abandonnés en passe d’être démolis et les ‹ pleins › au sens biologique mais aussi social. Dans le cadre du projet VI-Vid,
futurs espaces de transformation de la ville sont également une nous qualifions le vide comme des parcelles de terrain abandonnées, non
entretenues ou non officiellement utilisées qui sont soumises à la pression
potentielle source de matériaux de construction.
urbaine ou encore des bâtiments non utilisés et en passe d’être démolis.
10 Claire Fonticelli, Séréna Vanbutsele et Luca Piddiu, 2023, « La friche
Des espaces temporaires mais une ressource permanente urbaine, d’erreur en solutions, de solutions en dévoiements. Arpentage à
pour la ville la recherche des friches genevoises », Urbanités, #17 / L’erreur est urbaine,
janvier 2023
11 Séréna Vanbutsele et Estela Brahimllari Schaffner, 2022, « Vides urbains
Les vides urbains sont une composante intégrale des environne- à Fribourg », Pro-Fribourg, Vol 3, no 216, pp. 30-35
ments bâtis même dans des contextes de petites et moyennes 12 Voir notamment le projet de valorisation des espaces libres pour améliorer
la biodiversité en milieu urbain porté par Pro Natura ou le projet Préfleuri
villes comme Fribourg. Leur présence est inhérente à celle du au Schoenberg par l’association REPER
bâti et ils recèlent une capacité d’influence sur la qualité de vie 13 Caroline Mollie et Natacha Guillaumont, « Le paysage en ville : place au
des habitant·es. Le devenir de ces sites étant souvent « scellé » vivante », TRACÉS 4/2021
aux yeux des aménageur·euses, ils ne sont généralement pas
La rubrique Tout se transforme est un partenariat entre la revue TRACÉS, ­l’Institut
actionnés en tant que ressource temporaire, et ce d’autant plus TRANSFORM et la filière d’architecture de la HEIA-FR de la HES-SO.
s’ils sont privés. Pour utiliser ces espaces comme bien commun
et leviers pour limiter les conséquences du changement clima-
tique, il y a un besoin de rendre opérationnels des outils légaux
qui pourraient par exemple se décliner en contrat d’occupation
temporaire ou bail de courte durée.
Le décalage constaté entre la planification à long terme de ces
espaces et les besoins à court terme des acteur·ices de terrain
invite à penser ces sites dans une logique de processus et non
de produit fini : à l’échelle de la ville, les vides urbains apparaissent
et disparaissent au fur et à mesure des démolitions et des

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LAISSE BÉTON Ciments et bétons bas-carbone Journal
50

Ciments et bétons bas-carbone, Dans le sixième épisode de cette chronique, Alia Bengana se
penche sur les nombreuses pistes développées par l’industrie
où en sommes-nous ? pour décarboner ses processus de production. Si les promesses
semblent porteuses, les résultats concrets se font attendre.

Alia Bengana

En janvier 2023, un groupe de chercheurs du Massachusetts


Institute of Technology (MIT) mené par le Pr Masic publiait un
article scientifique1 qui sera très relayé dans la grande presse : la
composition chimique du béton romain, que l’on pensait perdue,
a enfin été exhumée. Cette publication modifie la compréhension
consensuelle concernant l’édification de monuments tels que la
coupole du Panthéon de Rome. L’ouvrage, construit au 2e siècle
de notre ère, et dont le diamètre avoisine les 40 mètres, reste
encore aujourd’hui la seule coupole de cette envergure intacte en
béton non armé. Alors que l’on attribuait à la pouzzolane, roche
volcanique de la région de Naples, le secret de la résistance et de
la longévité extrêmes de la réalisation, l’équipe du MIT nuance le
propos. Grâce à des techniques d’imagerie fine, des fragments
de chaux à l’échelle millimétrique ont été révélés : l’oxyde de cal-
cium serait ainsi la clé de voûte chimique du ciment romain. La
présence de chaux était jusqu’alors attribuée à un mélange hâtif,
Des chercheurs ont récemment démontré que le composé calcaire du ciment ou une mauvaise qualité de la matière première. Pourtant, les
romain (ici la coupole du Panthéon) était mélangé à chaud et conférait au béton chercheurs démontrent que le composé calcaire, loin d’être un
des propriétés régénératrices. Une découverte inspirante. (Andreadonetti/
Dreamstime) résidu inerte négligemment introduit, était au contraire mélangé
à chaud dans la formule romaine. Selon ces experts, la qualité
principale de cet ajout est de conférer au béton des propriétés
régénératrices. Ainsi, lors de l’apparition de fissures, l’eau de pluie
produit au contact de la chaux une solution saturée en calcium,
qui se cristallise en carbonate de calcium, suturant ainsi les inter‑
stices et permettant au béton de s’autoréparer. Les découvertes
de cette recherche bousculent l’état de l’art concernant la com-
préhension des bétons et des ciments antiques ; elles ouvrent
aussi une perspective neuve quant à la durabilité et la longévité
de nos formules contemporaines.

Moins de clinker, mais pas beaucoup moins d’émissions

Rappelons que c’est la production du clinker, constitué de calcaire


et de marnes cuits à 1450° C (processus de décarbonatation), qui
est responsable de 60 % des émissions de gaz à effet de serre
du ciment. Le broyage du clinker, couplé à l’adjonction de subs-
tances calciques, plâtre et coproduits d’autres industries, parti-
cipe à la réalisation des liants dits Portland. On comprend dès lors
que l’empreinte carbone de ces liants est directement proportion-
nelle à la concentration de clinker dans le mélange. Les catégories
normatives CEM I (92 % de clinker) à CEM III/B (teneur entre 20 à
34 %) permettent de classer les ciments en fonction de la propor-
tion en clinker et donc de leur émissivité en carbone. Ainsi, les
enjeux contemporains en matière d’objectifs carbone focalisent
l’attention des fabricants sur deux paramètres : 1) la réduction
de la teneur en clinker sans altération des performances structu-
relles du béton et 2) la diminution de l’usage des combustibles
fossiles lors des phases de calcination – 40 % des rejets restants.
Prenons pour exemple l’entreprise Holcim Suisse. Cette
dernière lance en septembre 2020 le produit Susteno, présenté
dans les communiqués de presse comme « le ciment qui pré-
serve les ressources »2. S’il est innovant, c’est avant tout parce
qu’il réduit la quantité de clinker par incorporation de pous-
sières de granulats mixtes traités, provenant de bâtiments
démolis. Il faut souligner cette spécificité suisse, seul pays d’Eu-
rope à autoriser l’utilisation de ces fines de recyclage dans le
ciment. Pourtant, ce procédé ne réduit que de 10 % l’impact car-
bone du produit par rapport à un ciment CEM II B (69.9 % de
Journal
51

Réduction du CO des bétons de la gamme ECOPact par rapport à un mix standard avec CEM I/OPC (mélange Portland ordinaire) : schéma explicatif (HOLCIM)
2

clinker pour 517 kg CO2 équivalent par tonne de liant), l’un des forte dans l’économie circulaire. Encourageantes sur le prin-
ciments communs les plus employés de Suisse (58 % des ventes cipe, les performances du procédé ne sont pas encore commu-
en 2022)3. Toutefois, la branche communication d’Holcim per- niquées par l’entreprise ; et le financement de l’expérience a été
siste et signe lors de la présentation d’EVOPact, renommé par la jusqu’ici compromis par un manque de visibilité économique au
suite ECOPact, et produit à partir de ciment Susteno. Si celui-ci long terme dû aux décisions de justice concernant l’extension
est présenté comme « le béton le plus durable de Suisse », ses de l’exploitation à la colline du Mormont. Depuis janvier 2023,
10 % de réduction de CO2 font tout de même pâle figure face le Tribunal fédéral a avalisé l’activité de l’entreprise jusqu’en
aux enjeux contemporains. Dans de telles conditions, l’appella- 2060, envers et contre les recours des associations Pro Natura,
tion « bas-carbone » interpelle, et nous lui préférerions un label Helvetia Nostra, Sauvegarde du Mormont et des activistes de la
« carbone-réduit » plus en phase avec la réalité des atténuations ZAD de 2021. Ce report d’investissement questionne au regard
effectives. Une affaire de communication. Par ailleurs, le mar- des supers profits de l’entreprise en 2022, qui a vu bondir son
ché suisse boude ces nouveau-nés de la gamme du cimentier bénéfice de 8.8 % par rapport à l’année précédente, et s’est féli-
(8 % pour Susteno en 2021, 4.9 % pour ECOpact), pourtant fon- citée en février dans un communiqué de presse « d’une année
damentaux dans les objectifs fixés par la filiale pour atteindre la record »6.
neutralité carbone à l’horizon 20504. Un autre produit du cata- Quant au second producteur de suisse Juracime – filiale
logue, l’ECOpactZero, lancé en 2021, est également négligé de la holding irlandaise CRH plc (Cement-Roadstone Holding
par les acteurs du secteur, bien que présenté comme « premier depuis 2000), il se contente d’appeler JURA ECO un ciment
béton suisse climatiquement neutre ». Cette revendication, justi- commun CEM II/B plus émissif que Susteno7.
fiée par un financement de la plateforme zurichoise South Pole
qui soutient des projets de protection de l’environnement dans Éco-messages plus qu’éco-produits
le monde entier, ne convainc apparemment pas la majorité des
ingénieurs ni les entreprises générales. Holcim impute cette Dans le reste de l’Europe et dans le monde, la politique d’Holcim
méfiance des professionnels à l’égard de la gamme ECOPact et est différente. Le ciment ECOplanet et le béton prêt à l’emploi
de Susteno à l’utilisation de granulats recyclés, qui affecteraient ECOpact, tous deux déployés dès juin 2021 par la branche fran-
leurs performances5. çaise de l’entreprise, sont présentés comme « allégés en carbone
Depuis 2021, Holcim Suisse ne semble avoir investi que de -30 à -100 % » par rapport à un Portland standard (CEM I)8. Les
modérément dans d’autres technologies de réduction des 100 % sont ici aussi obtenus par compensation carbone. La gamme
impacts carbone des ciments et bétons. Pour autant, l’ambition ECOplanet, désormais commercialisée à l’échelle mondiale, ne
affichée reste d’atteindre 30 % de diminution d’émissions pour représente pourtant que 12,6 % des ventes en 2022. Les effets
le ciment de masse dès 2030. Si la mise au point de Susteno a d’annonce des produits de cette gamme sont à nuancer9, car les
nécessité une décennie, on peut être dubitatif quant à la réalisa- cimentiers profitent d’un aléa conventionnel, un défaut comp-
tion de cet objectif dans le temps résiduel imparti. table sur l’émission carbone de certains de leurs composants.
Holcim Suisse explore de nouvelles pistes sur le site de la Ainsi, ECOplanet et ECOpact utilisent une composition alterna-
cimenterie d’Eclépens (VD). Le projet pilote nommé SynMIC tive mais ordinaire, substituant au clinker : du laitier de hauts-four-
étudie la substitution d’une partie du clinker du ciment par des neaux (sous-produits des aciéries résultant de l’élaboration de la
déchets minéraux (gypses de déconstruction, boues des dépo- fonte), des cendres volantes (déchets de centrales thermiques),
toirs de routes, etc.) cuits dans un second four à plus basse tem- du filler calcaire (farine de roche non cuite), ou de la pouzzolane
pérature (850° C à 900° C au lieu de 1450° C). SynMIC, comme (roche volcanique basaltique). Or il se trouve que le laitier, utilisé
Susteno et consorts, s’inscrit dans le cadre d’une politique suisse massivement par les entreprises du secteur depuis des décen-
des granulats recyclés de démolition et donc d’une implication nies, fait chuter artificiellement le bilan carbone des ciments : un
Journal
52

Production du LC3 et réduction des émissions de CO par rapport à un mélange Portland ordinaire (OPC). Schéma présenté dans la brochure LC3 – A sus-
2
tainable alternative for the cement industry (LC3/EPFL/INFRAS)

vide juridique dans la règle européenne lui attribue un montant matière première. L’objectif initial de la succursale est de pro-
comptable quasi nul (17 kgCO2eq/t sur les 1623 kg de CO2 émis duire 500 000 t de ciment par an (3 % de la production totale
par tonne de fonte). Et le miracle opère : nous voici donc en pré- du pays toutes entreprises confondues). Initiative unique en son
sence de ciments et de bétons très allégés en émissions. Précisons genre en Europe, le projet a bénéficié du soutien financier du
donc sans détour que ces laitiers, scories de fusion dont la pro- gouvernement français, dans le cadre du programme « France
duction va inexorablement s’amenuiser suite à la fermeture des Relance » qui encourage les initiatives industrielles de décarbo-
aciéries, sont en ce moment réévalués par la Commission euro- nation à grande échelle.
péenne, et se verront attribuer un nouveau poids carbone réel
situé entre 83 et 400 kgCO2eq/t10. La meilleure stratégie de décarbonation : moins de béton
La Suisse se trouvera probablement aussi affectée par cette
modalité nouvelle puisque le ciment Modero CEM III/ B d’Hol- Et en Suisse, pourquoi ne pas développer immédiatement un ciment
cim Suisse (325 kgCO2eq par tonne de ciment), produit sur le issu des travaux sur le LC3, puisque cette technologie – la plus
territoire à partir de l’importation intégrale du laitier, profite de performante en matière de réduction des émissions carbone du
ce décompte avantageux. Dans ces conditions, Modero fait ciment – a été élaborée à l’EPFL ? La réponse est à trouver dans
mieux que Susteno. Pourtant, la commission SIA 262 n’est pas la relative rareté des argiles (métakaolin) nécessaires aux liants
dupe et ne recommande pas l’usage de CEM III/B en remplace- sur le territoire. Or le béton reste avant tout un matériau exploitant
ment d’un ciment de masse car elle estime qu’il n’est « techni- des ressources locales : l’importation de l’un de ses composants
quement pas à la hauteur des exigences liées à la construction conduirait à un contresens économique, mais aussi écologique.
de bâtiments »11. Il est donc étonnant de voir Juracime s’apprêter à lancer une pro-
duction de cette nature dans son usine d’Argovie. Il semblerait,
La promesse des kaolins selon le service de communication de l’entreprise, que certaines
argiles présentes en Suisse (montmorillonite et illite), si correc-
La véritable nouveauté dans l’industrie du ciment en Europe est tement activées thermiquement, pourraient être aussi réactives
la parution de la norme NF 197-5 en octobre 2021. Elle permet- que les métakaolins. Affaire à suivre.
tra une certification NF des mélanges cimentaires ternaires12, en Du côté des entreprises de construction, la tentation
particulier du prometteur LC3 (Limestone Calcined Clay Cement) est donc forte d’aller s’adresser à d’autres fournisseurs pour
issu des travaux du laboratoire des matériaux de l’EPFL – dirigé obtenir des bétons moins carbonés, même s’ils doivent voya-
par la Prof. Karen Scrivener. Dans cette formule, l’interaction ger plus de 700 km. Récemment, le groupe genevois Maulini
entre le calcaire finement broyé et l’argile calcinée (métakaolin) a annoncé la signature d’un partenariat avec le cimentier fran-
à 600° C favorise la formation de carbo-aluminates. Cette combi- çais Hoffmann Green Cement Technologies pour produire six vil-
naison rend possible une résistance mécanique supérieure à celle las sur la commune d’Onex (GE) avec un béton employant le
des ciments Portland de type CEM I, tout en divisant par deux H-UKR, un ciment de laitier activé par les alcalins13. Maulini est
l’empreinte carbone générale. Jusqu’ici, le LC3, dont la formule devenu depuis le revendeur officiel d’Hoffmann Green en Suisse.
n’a jamais été brevetée, n’a été testé qu’à Cuba et en Inde dans Il faut quand même préciser que le ciment H-UKR – dont l’im-
le cadre de projets pilotes. Récemment, le cimentier colombier pact carbone est divisé par 5 par rapport à un ciment de masse –
Argos a été le premier à commercialiser le composé. bénéficie aussi du décompte carbone avantageux du laitier. Le
Sur le territoire français, Holcim a commencé la produc- cimentier déploie cependant beaucoup d’énergie pour ne pas
tion du LC3 depuis 2022 dans une usine pionnière, à Saint- dépendre du laitier et a développé le ciment H-EVA à base d’ar-
Pierre-la-Cour en Pays-de-Loire, à proximité de gisements en giles flashées14.
Journal Enfin, d’autres pistes sont explorées par les cimentiers : 12 Source : infociments.fr/ciments/les-ciments-bas-carbone
53 des technologies complexes de recarbonatation de granulats 13 L’usine de production du ciment H-UKR se situe en Vendée, à 60 km au
nord de la ville de La Rochelle.
de démolition15, ou encore de captation de CO216 à la sortie des 14 Le ciment H-EVA est préconisé par les ciments Hoffmann comme liant
cheminées des fours, qui seraient liquéfiés pour être ensuite pour les routes, les mortiers, les enduits et les bétons de chantier. Il est
envoyés par camion puis par bateau vers la mer du Nord dans constitué d’argile flashée, mélangée avec du phosphogypse/désulfogypse,
à laquelle sont ajoutés des activateurs et suractivateurs (brevet Hoffmann
d’anciens gisements de pétrole. Il y a fort à parier que ces pro-
Green).
jets, onéreux et encore incertains sur le plan de la faisabilité et 15 Projet Fastcarb. « LafargeHolcim inaugure son démonstrateur FastCarb pour
de l’efficacité, ne puissent offrir de solutions à l’échelle pour accélérer la carbonatation des granulats de béton recyclé et réduire l’em-
atteindre les objectifs de l’horizon 2030 mais peut-être même preinte carbone de la construction », communiqué du 28.01.2020, lafarge.fr
16 Rapport CEM Suisse 2022, feuille de route 2050: objectif climatiquement
aussi de l’horizon 2050. neutre – « Dans le cas du captage du carbone, le CO est séparé du flux
2
Lorsque les promesses communicationnelles optimistes, de gaz de combustion au niveau de la cheminée haute au moyen de pro-
les procédés comptables avantageux et les géo-technologies cédés techniques et peut ensuite être utilisé ou stocké dans des réservoirs
souterrains. »
sont écartés, l’utilisation raisonnée et parcimonieuse du béton
et du ciment semble être aujourd’hui la seule véritable piste cré- Cet article a été rédigé grâce a des entretiens menés avec : Coralie Brumaud
dible en matière d’ambition carbone. (chercheuse en sciences des matériaux à l’EPFZ – Chair of sustainable construc-
tion), Edelio Bermejo (directeur recherche & developpement d’Holcim France),
1 «Hot mixing : Mechanistic insights into the durability of ancient Roman Stéphane Pilloud (directeur Suisse Romande granulats et béton d’Holcim),
concrete», L. Seymour, J. Maragh, P. Sabatini, M. di Tommaso, J. Weaver, Arthur Got (responsable communication et affaires publiques Holcim Suisse),
A. Masic, Science Advances 9(1):eadd1602, janvier 2023 Francois Girod (codirecteur de la cimenterie d’Eclépens).
2 holcim.ch/fr/fr/susteno-le-ciment-qui-preserve-les-ressources
3 Rapport annuel CEM Suisse 2022. report.cemsuisse.ch/fr
4 Holcim net zero Journey, climate report 2022
5 Nous avons interviewé les responsables innovations et communication
de Holcim France et Suisse.
6 Jan Jenish, le CEO d’Holcim, se félicite en février 2022 de l’année record
d’Holcim qui a cédé des activités en Inde et au Brésil, mais dont la majorité
des bénéfices concerne la vente de ciment et de béton. Le groupe mise
sur une croissance des recettes de 3 à 5 % sur une base comparable pour
l’année 2023. video.holcim.com/2022-was-a-record-year-for-holcim-1
7 Malgré nos emails envoyés au service de communication du 3e cimentier
de Suisse Vigier, nous n’avons pas obtenu de retours de leur part quant
à leur politique en termes de bétons bas-carbone.
8 Source : lafarge.fr/lafargeholcim-lance-ecoplanet-en-france-une-nouvelle-
gamme-de-ciments-bas-carbone-aux-compositions-innovantes
9 Holcim affiche un objectif mondial de béton prêt à l’emploi EcoPact de
25 % des ventes en 2025.
10 Le poids carbone du laitier avait plutôt été évalué entre 250 et 500 kg
CO équivalent par tonne par le bureau d’ingénierie français Elioth dans
2
l’article « Le vrai-faux des bétons bas-carbone », Mathias Devreton,
Guillaume Meunier et François Consigny, 15 décembre 2020, elioth.com/
le-vrai-du-faux-beton-bas-carbone
11 Winnie Mathes et Yves Schiegg, « Ciment spécial CEM III/B : rétablir la
vérité sur ses usages », TRACÉS 03/2023

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CONCOURS Journal
54

Stade de Bulle : structurer par le vide Le projet lauréat du concours pour la rénovation et la transforma-
tion du stade de Bulle explore non seulement les relations entre
architecture et paysage, mais il interroge aussi l’usage et la main-
tenance de ce type de programme.

Camille Claessens-Vallet

Même une intervention architecturale sur un stade est un exercice


qui peut interroger les limites de la discipline. À Bulle, celui de
Bouleyres est adossé à la forêt éponyme. Ses six pistes d’athlé-
tisme dominées par une tribune couverte, son café en angle, ses
terrains de foot et de tennis n’ont pour la plupart pas été rénovés
depuis les années 1980. Depuis 2012, un nouveau plan directeur
introduit une promenade arborisée de 915 mètres reliant le nord
au sud du site1. Ce n’est donc pas seulement une infrastructure
sportive bâtie que le concours pour la transformation et la réno-
vation du stade demandait de considérer, mais bien un système
complexe composé d’un maillage écologique et de structures
d’origine en bon état général, qu’il fallait rénover pour les remettre
aux normes et repenser l’organisation.
« Sur une esplanade sportive, ce sont les vides plutôt que
les pleins qui sont structurants, commente le président du
jury, Manuel Bieler. La composition du site se fait au travers
des terrains de sport et les bâtiments ne sont là que comme
des éléments de ponctuation. » À cet exercice, les architectes
Truwant+Rodet et la paysagiste Camille Frechou se sont impo-
sé·es avec le projet Interstices sportifs (1er rang, 1er prix). Manuel
Bieler relève chez les lauréat·es une réelle connaissance de ce
qu’est un stade – comment on le parcourt, on y évolue – qui les
a distingué·es de leurs concurrent·es.
Devant le sort encore incertain du café du stade, l’équipe
applique la même logique qu’au reste du projet : conser-
ver et s’appuyer sur les structures existantes, qu’elles soient
construites ou paysagères, pour y ancrer les besoins program-
matiques. « Les terrains de sport existants sont caractérisés par
leur horizontalité, combinée à des éléments verticaux légers
comme les clôtures, les lampadaires, les cages… Les nouveaux
bâtiments cherchent à s’inscrire dans ce paysage, ils forment
un ensemble de toits, construits par une structure métallique
légère recouvrant un remplissage bois2 ».
Ainsi, le long de la liaison nord-sud, les lauréat·es dessinent
Interstices sportifs (1 er rang, 1 er prix), vue des vestiaires et d’une citerne un bâtiment filigrane pour les vestiaires, dont les coursives abri-
(Truwant+Rodet, Camille Frechou) tées deviennent autant de belvédères d’où contempler les ter-
rains. Perpendiculairement à cette ligne et dans l’axe de l’entrée
CONCOURS STADE DE BOULEYRES, secondaire du stade, ils et elles esquissent une double toiture
BULLE (FR) voûtée pour la halle de tir et la salle polyvalente. Le projet pro-
pose ensuite d’élever deux édicules symétriques en tête de tri-
Maître d’ouvrage : bune afin d’accueillir la buvette et l’espace VIP. Enfin, le café du
Ville de Bulle stade est coiffé d’une nouvelle toiture qui revalorise sa position.
Procédure :
Concours en procédure sélective Autres projets
à un degré (SIA 142)
Projets : Les bureaux LVPH (2e rang, 2e prix) et Boeglikramp (3e rang, 3e prix)
Interstices sportifs (1 rang, 1 prix) –
er er
se sont également illustrés par leur grande maîtrise de l’architec-
Truwant+Rodet, Camille Frechou ture et du paysage. Le premier, en concevant une architecture qua-
Élis (2e rang, 2e prix) – LVPH si-troglodyte tout autour des pistes d’athlétisme, pour y loger les
architectes vestiaires et le café. Si la proposition a effrayé les utilisateur·ices,
Pentathlon (3e rang, 3e prix) – qui ont douté des qualités lumineuses d’un tel espace édifié dans
Boeglikramp Architekten, Hager une topographie artificielle faite en terre de remblai, elle a néan-
Partner, Timbatec ingénieurs bois moins fasciné le jury par sa grande cohérence conceptuelle3. Le
second proposait quant à lui un nouveau bâtiment en structure
bois pour héberger les vestiaires, la buvette, la salle polyvalente
et le café. Si l’expression du nouvel édifice a été jugée élégante,
l’édification d’un ouvrage de cette ampleur s’est néanmoins
révélée complexe à réaliser et trop ambitieuse pour les besoins
Journal
55

Interstices sportifs (1er rang, 1er prix), deux édicules symétriques viennent ponctuer les tribunes existantes (Truwant+Rodet, Camille Frechou)
Plan de situation 1:1000

10
50m
N

tribune

vestiaires
restaurant

salle polyvalente
halle de tir

90 4 90 4 90 3 90 3 80 3
stockage mixte stockage mixte matériel foot ball matériel foot ball ent ret ien terrain
26 m2 13 m2 américain américain 26 m2
13 m2 13 m2

Interstices sportifs (1er rang, 1er prix), plan de situation (Truwant+Rodet, Camille Frechou)
5H]GHFKDXVVpH (WDJH

Journal
56
)DoDGH
 

 
5FSSBTTF 3FTUBVSBOU



 
7FTUJBJSFT &DPOPNBU
QFSTPOOFMT


([SUHVVLRQHWPD
   -PDBM
/DORJLTXHG·RUJDQ
7FTUJBJSF
'$#4"#
EPVDIFT EPVDIFT UFDI
ORJLTXHFRQVWUXFWLY
 FRQVWUXFWLRQERLV \

7FTUJBJSF

EPVDIFT

EPVDIFT
-PDBM
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'$#4"#
FRQWUHF±XUVHQPD

SRVVLEOHV/DFRQF

8$ SUpIDEULFDWLRQXQH

SRXUFRXUVLYHVTXL
 
FRQVWUXFWLYHSRXUOH
EPVDIFT -PDBMUFDI
QRUPHV(&$
 

&RXSH 
Pentathlon (3e rang, 3e prix) (Boeglikramp Architekten, Hager Partner, Timbatec ingénieurs bois)
SITE
1:500

du maître d’ouvrage. « L’équipe lauréate a au contraire très bien


saisi l’équilibre nécessaire entre une position interventionniste
1ère équipe
administration /
Accès
Accès

gradins
Accès

gradins
Accès
stade

Accès
stade

et conservatrice, explique Manuel Bieler. Elle a anticipé les ques-


zone exclue

tions qui peuvent surgir dans un tel type de processus, qui peut
stockage matériel
d'échauffement
zone

prendre une dizaine d’années. Le projet, souple et flexible, per-


met aux utilisateur·ices de gérer les interventions nécessaires
station électrique

sur le temps long. »


Accès principale
place du stade

stockage matériel

Interstices sportifs répond donc très bien au programme,


mais va aussi bien au-delà. L’image qui frappe le plus est sans
Accès secondaire

doute celle de ces grandes citernes absentes des prescriptions


restaurant
terrasse
parking 42pl

initiales qui, combinées aux vastes toitures tantôt convexes tan-


salle polyvalente
café

tôt concaves, récoltent de l’eau pour arroser les terrains de sport


bureau concierge
secteur
visiteurs
vestiaires
restaurant

(surtout ceux en synthétique demandant parfois, à l’inverse de


vestiaires
vestiaires

vestiaires
(secteur visiteurs)
Accès secondaire

abri vélos 30pl abri vélos 24pl


vélos 18pl

vélos 24pl vélos 24pl

ce que le bon sens inspirerait, encore plus d’eau que les


910 espace de stockage des buts
Zone de manifestation
limite

pelouses naturelles durant les surchauffes estivales !). Les


de con
structio
n

ventres ronds et brillants de ces installations deviennent des élé-


Élis (2e rang, 2e prix) (LVPH architectes) ments emblématiques du projet, totems climatiques qui outre-
passent leur vocation technique pour devenir tectoniques. Bien
sûr, ce n’est pas la première fois que les architectes s’emparent
du silo comme élément de conception (c’était, pour le Corbusier,
les magnifiques prémices du nouveau temps4), et l’échelle de
+1

+2
COUPE CONSTRUCTIVE

TIR A AIR

TRIBUNES 0 1:200

1:200

1:200

ces citernes-ci évoque plus une esthétique à la Gurzelen5 que les


1:200

50m²
501 local buvette

mastodontes américains en béton armé salués par les Modernes.


1:50

250m²
901 tir à air comprimé

600 tribunes 625 places


h=1.5m

700 wc publics

60m²
503 espace VIP
23m²
101 vestiaires 1ère ligue

Néanmoins, un siècle plus tard, alors qu’on se demande encore


16m²
802 local entretien

25m²
404 bureau administratif SAB
11m²
102 douches

103 wc

comment concilier énergie et patrimoine, les initiatives de ce


20m²
110 vestiaire entraineur 1
15m²
502 mini-cuisine

12m²
attribué
406 bureau non

type, qui intègrent la question de l’usage et de la maintenance


10m²
soins
220 salle de

124 wc

au cœur même de la question architecturale, sont à saluer.


25m²
402 salle conférénce FCB
10m²

220 salle de
soins
15m²
210 infirmerie pour sportifs

111 vestiaire entraineur 2


20m²
/ anti-doping
55m²
synthétiques
902 local entretien terrains

25m²
403 bureau administratif FCB
50m²
230 salle de musculation

11m²
102 douches

15m²
archives FCB
405 local rangement

1 Voir programme du concours


103 wc
"Concours d'architecture - Stade de Bouleyres"

mixte
40m²

904 local stockage

101 vestiaires 1ère ligue


23m²

2 Truwant+Rodet et Camille Frechou, Interstices sportifs, planche de rendu


700 wc publics
40m²
américain
903 local football

de concours, 2023
14m²
407 buanderie

3 Le projet rappelle par ailleurs la proposition que LVPH avait fait en 2016
pour le concours du stade de Coubertin à Lausanne (2e prix)
4 Le Corbusier, Vers une architecture, 1925, p. 20
5 Stéphanie Sonnette, « Occuper le terrain : l’esprit Gurzelen », TRACÉS
2/2022
Journal
57
Mises au concours Département fédéral
Département fédéral des
des finances
finances DFF
DFF
Office fédéral
Office fédéral des
des constructions
constructions et
et de
de la
la logistique
logistique OFCL
OFCL
Constructions
Constructions

19.04 – Candidature Construction d’une


Construction d’une nouvelle
nouvelle centrale
centrale énergé-
énergé-
Étude de projet, procédure sélective tique et
tique et aménagement
aménagement desdes espaces
espaces extérieurs
extérieurs
Parc linéaire entre le pont Hans-Wilsdorf pour l’office
l’office fédérale
Construction
pour fédérale du sport
d’une
du sport àà Macolin
nouvelleMacolin
centrale
et le pont de la Jonction, Genève (GE)
énergétique
Concours de
Concours
et aménagement
de projets
projets enen procédure
procédure ouverte ouverte
25.04 – Candidature des espaces
Adresse de
Adresse
extérieurs
de l'adjudicateur
l'adjudicateur
pour l’Office
Concours de projets, procédure sélective
Passerelle des Sciers (GE) fédéral
Office dudes
Office fédéral
fédéral sport
des à Macolin
constructions
constructions et de
et de la
la logistique
logistique OFCL,
OFCL,
Service des
Service des marchés
marchés publics,
publics, «« Concours
Concours de
de projets
projets (b23013)
(b23013)
OFSPO Macolin,
OFSPO Macolin, construction
construction d’une
d’une nouvelle
nouvelle centrale
centrale énergé-
énergé-
25.04 – Rendu des projets 1 degré er
Concours de projets en procédure
tique et
tique et aménagement
aménagement des des espaces
espaces extérieurs
extérieurs »» ,,
Concours de projets, procédure ouverte Fellerstrasse 21,
Fellerstrasse 21, CH-3003
CH-3003 Berne
Berne
Construction d’équipements publics
ouverte
Mandat
Mandat
et aménagements extérieurs, Cologny (GE) L’Office fédéral
L’Office fédéral des des constructions
constructions et et de
de la
la logistique
logistique OFCL
OFCL orga-
orga-
nise un
nise un concours
concours de de projets
projets àà unun degré
degré destiné
destiné àà des
des équipes
équipes de de
Adresse de l’adjudicateur
planification avec avec planificateur
planificateur général
général composées
composées d’architecture
d’architecture
17.05 – Rendu des projets planification
Office fédéral des
(direction générale),
(direction constructions
générale), génie et
génie civil de
civil et la
et de logistique OFCL,
de planification spécialiséedes
Service
planification spécialisée
Concours de projets, procédure ouverte marchés publics,
chauffage,
chauffage, « Concours
ventilation,
ventilation, de installations
froid,
froid, projets (b23013)
installations OFSPO
sanitaires
sanitaires Macolin,
et électricité
et électricité
Nouvelle école professionnelle, Payerne EPP (VD) ainsi que
ainsi
construction qued’une
l'architecture
l'architecture paysagère.
nouvellepaysagère.
centrale énergétique et aménagement des
Le concours
Le
espaces concours
extérieurs se»,compose
se compose d’une21,
d’une
Fellerstrasse partie
partie projet pour
projet
CH-3003 pour
Berne la construction
la construction
de la
de la nouvelle
nouvelle centrale
centrale énergétique
énergétique et et d’un
d’un périmètre
périmètre de de réflexion
réflexion
17.05 – Rendu des projets sur l’aménagement
l’aménagement des des espaces
espaces extérieurs.
extérieurs.
sur
Mandat
Concours de projets, procédure ouverte Outre les
Outre les fonctions
fonctions techniques,
techniques, les les critères
critères les
les plus
plus importants
importants
L’Office
sontfédéral
sont
des constructions
l’intégration
l’intégration au lieu,
au lieu, la et de la logistique
la conception
conception OFCL
architecturale
architecturale duorganise
du volume
volume
Centre d’entretien routier des montagnes
un concours
et sa
et de projets à Sont
sa matérialisation.
matérialisation. un degré
Sont destiné
attendues
attendues des
desà approches
des équipes
approches de planifi-
globales
globales in-
in-
Neuchâteloises, La Chaux-de-Fonds (NE)
cationnovantes
novantes dans l’interaction
avec planificateur
dans l’interaction
général entre lieu, architecture,
composées
entre lieu, architecture, utilisation,
d’architecture ef-
(direction
utilisation, ef-
ficience
ficience
générale), de l’énergie
de
génie l’énergie et des
et
civil et de des ressources.
ressources.
planification spécialisée chauffage, ventila-
17.05 – Rendu des projets 1er degré tion, froid, installations sanitaires et électricité ainsi que l’architecture
Concours de projets, procédure ouverte Délais
Délais
paysagère.
Publication simap
Publication simap 30.03.2023
30.03.2023
Site scolaire et sportif du Pré-de-la-Cible, Le concours se compose d’une partie projet17.05.2023
pour la construction de la
Formulation des
Formulation des questions
questions 17.05.2023
Bex (VS) nouvelle centrale
Remise
Remise énergétique et d’un périmètre
des plans
des plans de réflexion sur l’amé-
08.09.2023
08.09.2023
nagement
Remise
Remise desdeespaces
de la maquette
la extérieurs.
maquette 22.09.2023
22.09.2023
23.05 – Rendu des projets Outre les fonctions techniques, les critères les plus importants sont
Concours étudiant·es, procédure ouverte l’intégration
Membres
Membres au du
lieu,
du la conception
jury
jury spécialisé architecturale du volume et sa ma-
spécialisé
térialisation.
SUTER Sont
SUTER Barbara, attendues
Barbara, des approches
BBL, architecte
BBL, architecte globales innovantes dans
ETH (présidente)
ETH (présidente)
Passerelles écologiques, UNIL (VD)
ZEIN Tanya,
l’interaction
ZEIN Tanya, architecte
entre architecte EPFL FAS
lieu, architecture,
EPFL FAS SIA
utilisation,
SIA efficience de l’énergie et
FRIEDLI Beatrice,
FRIEDLI
des ressources. Beatrice, architecte
architecte paysagiste
paysagiste HES
HES FSAP
FSAP SWB
SWB
01.06 – Rendu des projets ESCH Philipp,
ESCH Philipp, architecte
architecte ETH
ETH FAS
FAS SIA
SIA
Concours de projets, procédure ouverte MOSIMANN Reto,
MOSIMANN
Délais Reto, architecte
architecte HES
HES FAS
FAS SIA
SIA SWB
SWB (juge
(juge sup-
sup-
Création d’un accueil collectif de jour pré et pléant, président
pléant, président adjoint)
adjoint)
Publication simap 30.03.2023
parascolaire, agrandissement du site scolaire, Formulation
Condition
Condition desde
questions
de participation
participation 17.05.2023
Jongny (VD) Le concours
Remise
Le concours est ouvert
des plansest ouvert aux
aux équipes
équipes de
de08.09.2023
planification avec
planification avec planifi-
planifi-
cateur
cateur
Remise général
de général
la composées d’architectes
composées
maquette d’architectes (direction générale),
(direction
22.09.2023 générale),
d’ingénieures civiles
d’ingénieures civiles ou
ou d’ingénieurs
d’ingénieurs civils,
civils, de
de planificatrices
planificatrices gé-
gé-
08.09 – Rendu des projets nérales CVFSE ou de
de planificateurs
planificateurs généraux
généraux CVFSECVFSE et
et d’archi-
d’archi-
nérales
Membres duCVFSE ou
jury spécialisé
Concours de projets, procédure ouverte tectes paysagistes
tectes paysagistes ayant
ayant leur
leur domicile
domicile ou ou leur
leur siège
siège social
social enen
SUTER Barbara,
Suisse ou BBL,
ou dans
dans un architecte
un Etat ETH
Etat signataire (présidente)
signataire de
de l’accord
l’accord GATT/OMC
GATT/OMC sur sur les
les
Construction d’une nouvelle centrale énergé- Suisse
ZEINmarchés
Tanya, architecte
marchés publics, EPFL
publics, pour
pour FAS que
autant
autant SIA
que l’Etat
l’Etat concerné
concerné accorde
accorde la
la ré-
ré-
tique et aménagement des espaces extérieurs
ciprocité
FRIEDLI aux soumissionnaires
Beatrice,
ciprocité aux soumissionnaires
architecte paysagistesuisses.
HES FSAP SWB
suisses.
pour l’office fédéral du sport, Macolin (BE) ESCH Les
Les conditions
conditions
Philipp, de participation
de participation
architecte doivent être
ETH FAS doivent
SIA être remplies
remplies auau plus
plus tard
tard
àà la
MOSIMANNla date
dateReto,
de remise
de remise des contributions
des
architecte contributions
HES FAS SIA auSWB
au concours.
concours.
(juge suppléant, pré-
15.09 – Rendu des projets sident adjoint)
Somme des
Somme des prix
prix et
et mentions
mentions
Concours de projets, procédure ouverte
La somme
La somme totale
totale des
des prix
prix s’élève
s’élève àà 150
150 000.-
000.- francs,
francs, hors
hors TVA.
TVA.
Nouveau demi-groupe scolaire Le Foron, Condition
De troisde
De trois participation
àà six
six prix
prix sont
sont prévus.
prévus. UnUn maximum
maximum de de 40%
40% de
de somme
somme
Thônex (GE) Le concours
totale des
totale des est ouvert
prix
prix aux équipes
est disponible
est disponible pourde
pour planificationmentions.
d’éventuelles
d’éventuelles avec planificateur
mentions.
général composées d’architectes (direction générale), d’ingénieures
Obtention
Obtention
civiles des documents
des documents
ou d’ingénieurs civils, de planificatrices générales CVFSE ou
CONCOURS
Les documents
Les documents
de planificateurs d’appelCVFSE
d’appel
généraux d’offreset
d’offres peuvent
peuvent être téléchargés
être téléchargés
d’architectes surayant
sur
paysagistes la
la
Informations sur les concours organisés selon les règlements plateforme www.simap.ch.
SIA 142, SIA 143 ou UIA (ne font pas foi sur le plan juridique). leur domicile ouwww.simap.ch.
plateforme leur siège social en Suisse ou dans un Etat signataire
Plus de contenus : de l’accord GATT/OMC sur les marchés publics, pour autant que l’Etat
— competitions.espazium.ch concerné accorde la réciprocité aux soumissionnaires suisses.
Les conditions de participation doivent être remplies au plus tard à la
date de remise des contributions au concours.

Somme des prix et mentions


Doku-Name:
Doku-Name: 20230316_Tracé-Inserat-WW Energiezentrale_f.docx
20230316_Tracé-Inserat-WW Energiezentrale_f.docx Seite
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La somme totale des prix s’élève à 150 000.– francs, hors TVA.
11 von
von 11
De
Version:
Version: trois à six prix sont
Version 1.0
Version 1.0 prévus. Un maximum de 40 % de somme totale
des prix est disponible pour d’éventuelles mentions.

Obtention des documents


Les documents d’appel d’offres peuvent être téléchargés sur la plate-
forme www.simap.ch.

23_4_BBL Bern_1/2.indd 1 21.03.23 10:


BAUKULTOUR Journal
58

Journée de la construction Sous le slogan « Élargir la construction


bois », la Journée de la construction bois
d’expériences scientifiques et permet
d’avoir un aperçu complet du marché.
bois 2023 2023 approfondira trois thématiques : la Elle offre aux cadres de l’industrie de la
préservation des ressources, l’adapta- construction et du bois une formation
tion des matériaux et l’économie circu- continue ciblée et l’occasion de se ren-
laire. Elles seront examinées sous divers contrer et d’échanger. Dans l’exposition
angles : urbanisme, architecture, struc- spécialisée qui l’accompagne, de nom-
ture porteuse, construction, physique du breuses entreprises présentent leurs der-
bâtiment, logistique de construction, etc. niers produits, services et solutions.
Espace de dialogue de l’ensemble des
entreprises, des architectes, des pla- Congrès – 11.05
nificateur·rices et des ingénieur·es en Journée de la construction bois 2023
construction bois intéressé·es par la Palais des Congrès, Bienne
construction durable en bois, la Journée — bfh.ch
de la construction bois est le plus impor-
(Architektur : Duplex Architekten, Visualisie- tant congrès professionnel du secteur du
rung : Bonowics Studio) bois en Suisse. Elle favorise l’échange

Sympoïetique à Archizoom Le dossier de ce numéro le montre, l’in-


quiétude grandissante des jeunes géné-
une maquette au 1/87 qui propose d’en-
visager de nouvelles alliances entre des
rations face au réchauffement climatique partenaires qui jusqu’alors s’ignoraient ;
et l’injonction à agir pour y remédier une matrice d’images savantes et verna-
n’engagent pas à poursuivre la pra- culaires, qui esquissent, comme autant
tique actuelle de l’architecture. Nous de références, les contours formels de ce
avons atteint un point critique. Pourtant, que pourrait être une architecture écolo-
comment continuer à faire du projet ? gique ; et, enfin, une collection de projets
C’est ce sujet qu’investigue l’exposi- qui montrent des pratiques capables de
tion « Sympoïetique, arts de faire de la faire face aux incertitudes et de s’actua-
ville écologique ». Si le titre paraît bien liser perpétuellement. L’exposition veut
complexe, son étymologie est pourtant donc être un plaidoyer pour le faire, pour
simple : du grec poíēsis « œuvre, créa- le projet. Une collection d’initiatives qui
Nouvelles alliances de la métropole domestique, tion » et sún « avec, ensemble », le mot visent le temps long, sans vision globale
maquette (UR, Peaks, Altitude – 35, ZEFCO, avec invite à reconsidérer un art de faire à plu- ou surplombante, mais justement dans
les contributions de Marie Cazaban-Mazerolles,
Julien Claparapède-Petitpierre et Antoine
sieurs et s’articulant entre la théorie et des protocoles agiles, qui avancent par
Espinasseau, 2019) la pratique. Les cocurateur·ices Gaëtan petits sauts en avant et rebonds.
Brunet et Chloé Valadier (agence UR) se
défendent de devoir définir ce que devrait Exposition – jusqu’au 15.05
être la ville ; il et elle préfèrent s’inté- Sympoïetique, arts de faire de la ville
resser, dans une perspective koolhaa- écologique
sienne, à ce qu’est la ville. L’exposition Archizoom, EPFL
se développe autour de trois supports : — archizoom.ch

Paris animal à l’Arsenal L’exposition « Paris animal, histoire


et récits d’une ville vivante » qui s’est
plus tard l’animal et la ville sous contrôle ;
enfin, la période contemporaine, face aux
ouverte au Pavillon de l’Arsenal à Paris le enjeux écologiques, interroge les modali-
29 mars 2023, apporte sa pierre à l’édi- tés d’un nouveau partage de la ville avec
fice des réflexions récentes sur le vivant le vivant. 44 récits illustrent les bascule-
dans la ville et les rapports ambigus et ments et les continuités qui structurent
changeants qu’homo urbanus a entretenu l’histoire animale de la capitale, entre
avec lui au fil des siècles. L’exposition tension, collaboration et domination.
et le livre qui l’accompagne ont l’am- Commissaires scientifiques : Henri Bony
bition de raconter une histoire, celle de et Léa Mosconi, architectes
la construction de la capitale, de l’Anti-
quité à aujourd’hui, par le prisme de l’ani- Exposition – jusqu’au 03.09
mal et d’en comprendre les enjeux et Paris animal, histoire et récits
Cheval de renfort, rue des Martyrs, Paris 9e, ­photo­- les perspectives. Du Paris gallo-romain d’une ville vivante
graphie agence Rol, 1921 (BnF) à la période préindustrielle, la cohabita- Pavillon de l’Arsenal, Paris
tion est marquée par une forme d’anima- — pavillon-arsenal.com
lité de la ville, des bêtes, mais aussi une
« animalité humaine » ; l’industrialisation
et l’hygiénisation de la capitale mettent
Journal
59
Forum des transitions Vous aviez dit « écoquartier » ? Les
ensembles urbains labellisés ainsi qui
Colloque – 08.09
Forum des Transitions urbaines
urbaines : 11e édition sortent de terre aujourd’hui ont été pla- Auditorium Microcity, Neuchâtel
nifiés il y a dix ans. Entre-temps, les exi- — transitionsurbaines.ch
gences se sont renforcées et les critères
de durabilité ont évolué : au-delà des
mobilités et de la consommation éner-
gétique, ceux-ci prennent surtout en
compte l’empreinte carbone des maté-
riaux, leur circularité, l’usage de struc-
tures existantes. Pour sa 11e édition, le
Forum des transitions urbaines propose
un tour d’horizon des projets contempo-
rains. Beaucoup s’appuient en priorité
sur des immeubles existants, transformés
et adaptés pour constituer de nouveaux
ensembles urbains.
Les inscriptions sont ouvertes.
Intervenant·es : Sylvain Grisot (Dixit.net) ;
Hélène Chartier (C40 Cities) ; Yannick
Beltrando (Anyoji Beltrando architectes -
urbanistes) ; Claire Schorter (agence Laq) ; ÉVÉNEMENTS
Ulrich Liman (LAST EPFL) ; Yves Schihin Retrouvez tous les événements consacrés
à la culture du bâti sur notre agenda
(Oxid Achitektur) ; Raphaël Ménard — events.espazium.ch
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TECHNIQUES & TEXTURES Le bois dur Journal
60

Du hêtre en structure pour mieux Alors que le bois devient un matériau de construction prépondé-
rant, la ressource, bien que disponible, est toujours sous-­exploitée
exploiter les ressources forestières en Suisse. Afin de diversifier les solutions du marché, l’entreprise
Fagus Suisse offre un produit innovant : un lamellé collé en hêtre
indigène à même d’affiner les structures.
Audanne Comment

Couvrant un tiers du territoire, la forêt suisse est actuellement


gérée de manière responsable : la régénération naturelle de la res-
source est supérieure à la mortalité additionnée de la part récol-
tée. Une exploitation durable permet en effet de conserver une
forêt saine et vigoureuse à long terme.
Plus de la moitié des essences composant les forêts sous
nos latitudes est constituée d’arbres résineux : l’épicéa y est lar-
gement dominant (37 %), suivi par le sapin blanc (11 %), le mélèze,
le pin et l’arolle. Les deux premières essences fournissent une
matière facile à façonner en bois d’œuvre et se retrouvent habi-
tuellement dans les charpentes – toitures à pans, ossatures,
Épicéa Sapin Mélèze Pin Arolle Hêtre Érable Frêne Chêne Châtai-
37 % 11 % 5% 3Pin
% 1% 18 % 5% 5% 2% gnier panneaux reconstitués – mais aussi comme planches ou lam-
Épicéa Sapin Mélèze Arolle Hêtre Érable Frêne Chêne Châtai-
37 % 11 % 5% 3% 1% 18 % 5% 5% 2% 2%
gnier bris. Les bois de feuillus, dénommés également bois durs, se
2% retrouvent quant à eux dans des usages plus spécifiques. On les
Proportion des essences de bois dans les forêts suisses en % (Lignum) utilise pour fabriquer des parquets, des escaliers ou du mobilier.
Parmi la grande diversité d’essences présentes, le chêne, le frêne,
EXTENSION DU TRIBUNAL CANTONAL l’érable, le châtaignier et le hêtre ont chacun des qualités propres.
DE L’HERMITAGE, LAUSANNE (VD) Occupant une place importante (18 %) dans les forêts, le hêtre a
peu à peu perdu ses parts de marché, grignotées par des produits
Maître d’ouvrage : en plastique ou en métal.
État de Vaud, Direction générale
des immeubles et du patrimoine, Hêtre ou ne plus être ?
Lausanne
Architecture : La tempête Lothar, qui a couché 13 millions de m3 de bois en
Blättler Dafflon Architectes, Zurich Suisse en 1999, a entraîné une chute spectaculaire du prix de
Ingénierie bois : vente pour le hêtre. Cet épisode a marqué un coup d’arrêt pour
Makiol Wiederkehr, Beinwil am See les nombreuses scieries de bois durs qui n’ont eu d’autres alter-
et Timbatec ingénieurs bois, Berne natives que de mettre la clé sous la porte. Et pour celles qui
Entreprise construction béton et bois : s’étaient maintenues, l’exportation en Asie était devenue le seul
Dénériaz Groupe Holding, Sion marché en croissance, tandis que les trois quarts de bois de feuil-
Fourniture hêtre : lus étaient utilisés en Suisse comme bois énergie. En parallèle
La Forestière, Echandens de ce constat, beaucoup de propriétaires forestiers se trouvaient
Sciage hêtre : également dans des situations économiques difficiles, avec des
Corbat, Glovelier et Burgat, St-Aubin recettes de vente de bois à la baisse ne couvrant plus les dépenses
(NE) de gestion. Ainsi, trop de hêtre était finalement conservé sur pied,
Façonnage hêtre : empêchant d’atteindre le fameux équilibre entre accroissement
Fagus Suisse, Les Breuleux naturel d’une part, bois récolté et mortalité d’autre part, garant
d’une régénération saine de la forêt.
L’Office fédéral de l’environnement estime que pour
atteindre un meilleur bilan carbone, il faudrait théoriquement
utiliser le feuillu comme matériau de construction1, le réem-
ployer ou le recycler le plus de fois possible avant de le trans-
former en énergie en toute fin de cycle. Le hêtre possède un
avantage non négligeable : il procure une résistance accrue à la
traction par rapport à un résineux, ce qui implique que ses sec-
tions sont bien plus fines lors du dimensionnement d’une struc-
ture. Sa résistance caractéristique en flexion peut atteindre 48
N/mm2 là où un lamellé-collé standard en épicéa atteint 24 N/
mm2. En dimensionnement, sa résistance en traction parallèle
au fil est alors de 25 N/mm2 et de 32 N/mm2 en compression. La
Haute école spécialisée bernoise a d’abord étudié le comporte-
ment du bois façonné sous la forme de tasseaux collés de hêtre,
la recherche ayant ensuite mené à la création d’une start-up en
mains majoritairement de propriétaires forestiers.

Fagus Suisse, une production industrielle locale

La production de bois de hêtre collé se développe sur les montagnes


Journal jurassiennes. Les scieries helvétiques livrent à l’ancienne parque-
61 1 1 terie des Franches-Montagnes des lattes de 50 × 50 mm ou de
100 × 50 mm qui sont ensuite transformées en tasseaux collés
1 1

type 3; 8/150 1
de 40 × 40 mm. Comme le hêtre est plus sensible à l’humidité

TR- 1. 01
B500B

1
TR- 1. 0
TR-

. 01
que les résineux, avec un gonflement et un retrait plus important,

1.

-1
01
L1

TR
type 2; 10/150 1
type 1; 10/300
le taux d’humidité du bois est maintenu particulièrement bas, à

1
B500B

.0
B500B type 1; 10/300

-1
TR
B500B

P 283.
1 P 28 4 . 1

-1
.0
1 8 %. Le hêtre qui présente également une densité et une dureté
TR 1

type 2; 10/150 plus élevées que les résineux, est plus exigeant durant les étapes

P
B500B

28
5.
de façonnage. La production industrielle de Fagus a démarré en
1

1
1. 0
TR-

P2
86
.1
mars 2020. Les commandes ont vite afflué, certaines provenant
1
type 1; 10/300
B500B
A
A TR- 1. 01

v.p.80x200
de grands chantiers comme le projet Hortus, à Allschill (ZH), des
TR- 1. 01 1 architectes Herzog & de Meuron, ou la tour Zwhatt, à Regensdorf

.1
P 28 7
porte de

(ZH), de Boltshauser architectes. Même si la production est bien


révision
type 2; 10/150
B500B
C

.1
88
L1

P2
TR-
1. 0
1 rodée, la phase R&D se poursuit à l’usine, afin d’étudier les besoins
C

P
29
2.
type 4; 8/150 1

1
B500B 1
1. 0type 2; 10/150
TR
-
B500B
P
29
1 .1

TR du marché et sonder de nouvelles pistes de développement.

B
-

C
1
type 1; 10/300 . 01
9.1
P 28

1
P 290.1

B500B
.0
-1

B
1 TR 1
type 2; 10/150

TR
Du bois façonné en circuit court
type 1; 10/300
B500B

-1
B500B

.0
1

1
1. 0

TR
1. 0 1
-

- 1.
TR

TR- 1. 0
TR- 1. 01
1

01
1
TR-

Plus proche de nous, le Tribunal cantonal de l’Hermitage, à Lausanne,

1
G
1 G
1
est actuellement en rénovation. Sa nouvelle extension de sept
1 1
niveaux s’appuie sur une série de poutres et de poteaux en hêtre 1
C

Eléments linéaires:
TR-1.01Porteurs bois-bøton
produits par Fagus. Le concours remporté en 2019 dessinait une
Poteaux:
– béton 140 mm élégante ammonite posée dans une prairie, un escalier hélicoïdal
– BLC GL48h 240/280 mm 1 BLC GL40h 320/240 mm
desservant une série de bureaux lumineux répartis en périphérie.
Plan de l’extension du Tribunal cantonal de l’Hermitage, Lausanne (Makiol Conçue par les architectes Blättler Dafflon, la construction hybride,
Wiederkehr) bois et béton, est en cours de construction. Les poutres en BLC
de hêtre d’une portée de 7 m ont une section de 240 × 280 mm.
Elles reposent sur des poteaux disposés sur le pourtour, d’une sec-
tion de 320 × 240 mm. La finesse de la structure offre la possibi-
lité de s’étendre en hauteur et de préserver la prairie. L’emploi du
hêtre permet de construire en bois jusqu’en limite de gabarit, sans
sacrifier d’étage. Le surcoût engendré par le recours au hêtre est
presque totalement compensé par l’économie de matière réalisée.
La structure certifiée EI60 reste visible à l’intérieur, avec une vitesse,
ou plutôt une lenteur de combustion de 0,75 mm/min en cas d’in-
cendie. Le bois fourni par les forêts du maître d’ouvrage, ici l’État
Coupe transversale sur poteau de façade et dalle composite bois-béton de Vaud, a été scié et assemblé dans un rayon de moins de 100 km.
(Makiol Wiederkehr) L’exercice, qui a nécessité de choisir assez tôt les arbres à prélever
(le hêtre n’étant abattu qu’en saison hivernale), démontre brillam-
ment les bénéfices d’une économie locale et circulaire. L’extension
du Tribunal cantonal s’avère ainsi exemplaire à bien des égards.
Cependant, réfléchir en circuit court devrait peut-être impli-
quer à l’avenir de connaître les diverses ressources mises à dispo-
sition par la forêt, pour ensuite seulement concevoir le projet
architectural. Cela pourrait être la prochaine étape à franchir. La
maison de vacances de Büttenhardt (SH), conçue en 2010 déjà
par les architectes bernath+widmer, reste à cet égard un exemple
inspirant. Notons que l’entreprise Fagus Suisse réalise des
poutres à partir d’autres essences, comme le frêne ou le chêne. Si
l’on veut soutenir la biodiversité de la forêt, il faudra bien un jour
diversifier également nos savoirs et nos pratiques constructives.

1 Pr Andrea Bernasconi et al., Bois de feuillu collé à usage structurel, Lignatec


33/2021, édité par Lignum, Zurich et Lausanne

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VITRINE Journal
62

De bonnes raisons de prendre l’ascenseur Un bassin de lumière Entre-meuble de cuisine sur mesure

L’efficacité électrique est un sujet impor- Le centre commercial de trois étages abri- Avec ses entre-meubles de cuisine en
tant chez Schindler depuis des années. tant le magasin d’ameublement Pfister acier-titane émaillé, la société Schmidlin
La consommation d’énergie d’un ascen- d’Albispark est surplombé d’un gigan- propose désormais une solution particu-
seur peut être très différente. En prin- tesque bassin de lumière. La construc- lièrement attrayante. D’une part, il s’agit
cipe, ce qui suit s’applique : plus une ins- tion en verre impressionne par ses dimen- d’un matériau anorganique empêchant la
tallation est jeune, moins elle consomme sions dignes d’une piscine olympique : prolifération des bactéries, d’autre part,
d’électricité. Nos derniers produits de 8 × 24 mètres. Pour créer le bassin de les entre-meubles de cuisine sont très
classe énergétique A sont très éco- lumière, Cupolux a utilisé le système robustes et totalement résistants aux UV.
nomes en énergie grâce à la récupé- de structure en verre PR60. Le concept De plus, la surface homogène et dépour-
ration d’énergie, aux lampes à écono- repose sur une structure de toit à deux vue de joints s’avère particulièrement
mie d’énergie LED et à d’autres détails versants, divisée en 12 × 4 panneaux facile à nettoyer sans laisser de traces.
techniques. Notre nouvel ascenseur de vitrés. Chaque panneau vitré mesure Enfin, ils sont magnétiques et disponibles
type S3000 / S3000 Plus, par exemple, 2 × 2 mètres et est encastré dans un cadre. dans de nombreux coloris.
consomme environ 490 kWh par an
avec une utilisation courante. C’est à — cupolux.ch — schmidlin.ch
peu près la consommation d’énergie de
la machine à laver dans un immeuble
d’appartements pour la même période
de temps.

— schindler.ch

Ranger en toute simplicité L’alternative écologique au bois tropical :


Kebony
La collection de meubles Lani créée par
le designer français Toan Nguyen se L’ancienne terrasse de cette maison
caractérise par des lignes élégantes et hors du commun située dans le canton
minimalistes pour les salles de bains pri- ­d’Argovie n’a pas résisté au contact per-
Silencieuse, élégante et efficiente vées comme dans le domaine public. manent avec l’eau au bord de la piscine
Lani est en outre la première ligne de à débordement. Pour la remplacer, on
La nouvelle pompe à chaleur AEROTOP Laufen combinable avec de nombreuses a choisi le Kebony, car ce bois est très
SX d’ELCO s’adapte à n’importe quel collections du portefeuille, pour encore durable, même dans des conditions aussi
type de bâtiment. Grâce à ses excellentes plus de personnalisation dans la salle difficiles, et constitue une alternative éco-
performances sonores, de 54 dB(A) maxi- de bains. Lors de la conception, Toan logique au bois tropical. Le Kebony est
mum, la machine peut être installée sur Nguyen a accordé beaucoup d’impor- un bois véritablement écologique et de
les parcelles les plus étroites et densé- tance à l’interaction avec l’utilisateur final haute qualité dont les propriétés sont
ment peuplées. La circulation de l’air sans pour autant négliger la sensualité du améliorées grâce à un procédé de pro-
autour du ventilateur a été optimisée afin matériel et son impact émotionnel. duction breveté et respectueux de l’envi-
de limiter les bruits de fond. L’AEROTOP ronnement, de sorte qu’elles sont com-
SX atteint un COP (niveau de rendement) — laufen.ch parables à celles des bois tropicaux. Il est
allant jusqu’à 5,3 à A7/W35. Elle est dis- très stable, nécessite peu d’entretien
ponible avec une puissance de 7 ou et acquiert avec le temps une élégante
10 kW. patine gris argenté.

— elco.ch — balteschwiler.ch
Journal
63

Rénovation avec plaque de construction Durable depuis près de 125 ans Bien plus que du café froid
en bois Riduro
« Immer besser » : depuis sa création, La mode du cold brew ne cesse de
La Casa von Muralt, une demeure patri- Miele est fidèle à cette devise, y compris gagner en popularité ces dernières
cienne représentative du style néo-ba- ou surtout dans la conception de ses pro- années auprès des amateurs de café.
roque construite en 1924 et sous pro- duits. Le design caractéristique, intem- En parallèle, les consommatrices et
tection des monuments historiques porel et donc durable rend les appareils consommateurs souhaitent de plus en
depuis 1999, a récemment été partielle- incomparables. La conception du design plus déguster un café de haute qualité
ment rénovée. L’architecte a opté pour la de Miele ne se limite pas à un aspect chez eux. Les deux nouvelles machines
plaque anti-feu Riduro® de Rigips, spé- visuel attrayant, il intègre également une à café Eletta Explore et La Specialista
cialement conçue pour la construction utilisation intuitive, auto-explicative et Maestro de De’Longhi, dotées désor-
en bois. Cette plaque a permis de ren- adaptée à chacun et chacune. Il est donc mais aussi de technologie d’extraction
forcer la structure du toit tout en offrant particulièrement axé sur les besoins de à froid, répondent parfaitement à ces
une stabilité et une cohésion supérieures. la clientèle et sur son expérience glo- deux besoins.
Les bords biseautés de la plaque ont faci- bale lors de l’utilisation – de l’ouverture
lité le travail du plâtrier, qui peut utiliser d’une porte d’appareil à la robustesse — delonghi.com
ses outils de travail habituels. face à une éventuelle erreur de manipula-
tion, en passant par la qualité acoustique, Vitrine : Les nouvelles sur les entreprises, produits
— rigips.ch olfactive et haptique. et prestations se basent sur des informations
fournies par les entreprises. La rédaction ne saurait
être tenue responsable d’éventuelles erreurs ou
— miele.ch imprécisions dans les textes ou photos qui lui sont
communiqués.

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tallations sanitaires publiques, misez
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L AUF EN 1892 | SW IT Z ER L AND
CFF IMMOBILIER 1:5000 PROPRIÉTAIRE
144
Les nouveaux escaliers des gares En 2014, le bureau d’architectes Tempesta Tramparulo se voit Réalisation
CFF IMMOBILIER SA
PORTFOLIO ± 0.00 =389.00m Gérance région ouest - A. Foster
PLAN MASSE_5000 attribuer deux mandats d’analyse
Case postale du potentiel commercial des 64
345, 1001 Lausanne
de Vevey et de Montreux
Réaménagement de la gare de Montreux
N° PLANCHE
gares
DATEde Vevey et
COMM
de Montreux. La volonté initiale d’un dépla-
30.03.2023
N cement des guichets
FICHIER s’est muée, grâce à l’approche globale des
144_MONTREUX_COMM_022_09_
12.pln
architectes,
FORMAT en une
A4 VERrévision
1 complète des circulations, pour le
Texte : Nicolas Meier ; photographies : Milo Keller et Stéphane plusDESSIN AT/MT/MV/AG
grand bien des
PARCELLE deux bâtiments.
N°452 - Avenue des Alpes,
Existant
Millet A démolir
1018 Montreux
AUTORISATION CAMAC N° 162 317
A construire

Peut-être plus que d’autres programmes architecturaux, les gares


sont contraintes de l’intérieur et de l’extérieur. D’un côté, les villes
où elles s’installent exigent d’elles une présence visuelle, pour ne
pas dire une monumentalité, qui doit permettre de les repérer. De
l’autre, les exigences techniques liées aux voies ferrées imposent
une installation calée au millimètre. De ce fait, il n’est pas rare
que la disposition intérieure des bâtiments soit confiée à des ingé-
nieurs, alors que leur habillage est laissé à des architectes. À les
ausculter dans les détails, ces cohabitations peuvent se révéler
cocasses : à Vevey, elles génèrent une gare qui n’est pas dans
l’axe de sa place et à Montreux, une gare sans place – les plus
chauvin·es disant sans doute qu’en cette ville, la place, c’est le
lac. Les problèmes circulatoires internes, et tout spécialement
la jonction des quais et de la rue, ne font qu’ajouter une couche
de difficulté. À Zurich, où personne n’a peur de rien, on met tout
au même niveau et on creuse des tunnels ou on élève des via-
Gare de Vevey : plan masse 1:5000 ducs ; à Genève, on déroule des escaliers longs comme un jour
sans pain ; à Lausanne, la plateforme formée par les quais et la
place n’existe qu’à la faveur, côté rue du Simplon, d’une intermi-
nable file d’arcades. Les solutions pour établir et relier les niveaux
respectifs des quais, des passages sous-voies et de la rue étant
infinies, la gare de Vevey stabilise la sienne en deux temps : une
première gare (1861, arch. Jean Franel) retient la solution d’esca-
liers latéraux, flanquant le bâtiment-voyageur1. Quelques décen-
nies plus tard, alors que le tunnel du Simplon vient d’être percé,
les CFF commandent la construction d’un nouvel édifice (1907,
arch. Charles Coigny), prolongeant le précédent au sud-est et qui
abrite à présent un escalier monumental. C’est somptueux, mais
l’axe de la place est définitivement perdu. À Montreux, la diffé-
rence de niveau entre les quais et la rue étant de deux étages, il
faut un grand escalier à deux volées, alors que le corps central
offre trois travées. L’architecte Eugène Jost ne s’en émeut guère
et ose un bâtiment discrètement asymétrique2.
Gare de Montreux : plan masse 1:5000
Concomitance

Dans le courant du 20e siècle, les gares se voient peu à peu sou-
mises au développement d’une nouvelle exigence, celle de la ren-
tabilité économique. Si elles pouvaient se contenter à l’origine de
n’être que d’efficaces machines de répartition des flux, elles doivent
aujourd’hui aussi être de grandes salles d’attente commerciales.
Pour quantifier leur valeur économique, la gérance des CFF fait
volontiers appel à des as de la calculette, qui inventent autant de
surfaces monétisables que l’on peut en vouloir. Ils étendent le réel,
repoussant murs et plafonds, pour aboutir à d’alléchantes études
de commercialisation, souvent aussi obèses financièrement que
lacunaires constructivement. La formule est bien sûr caricaturale
et le processus décrit n’est jamais aussi systématique. Il s’agit
plutôt d’évoquer une tendance à la segmentation qui veut que
l’aspect économique soit analysé en premier par une catégorie
de professionnels, et que ce qui concerne la construction soit
traité ensuite par une autre catégorie. La rencontre des études
commerciale et architecturale peut alors se faire au détriment
de bâtiments bien réels, où il n’y a pas que des locaux idéaux.
Heureusement pour les gares de Vevey et Montreux, il y a
0 50 250m
eu concomitance. Dans un procédé peu conformiste, la gérance
des CFF confie au bureau d’architectes Tempesta Tramparulo
un mandat d’analyse simultanée du potentiel commercial et
architectural des deux gares. Par goût personnel, les manda-
taires ajoutent à leur cahier des charges la prise en compte de
la valeur patrimoniale des bâtiments. Pour se guider, ils usent
de l’adage des professionnel·les de la conservation du patri-
moine bâti : « le bâtiment dicte le programme et non l’inverse ».
En substance, ils refondent les valeurs commerciale, artistique
Réalisation
65

Sébeillon 1, CH–1004 Lausanne CFF IMMOBILIER 1:1000 PROPRIÉTAIRE CFF IMMOBILIER SA


T +41 21 983 10 90 ± 0.00 =389.00m Gérance région ouest - A. Foster
PLANS MONTREUX Case postale 345, 1001 Lausanne
F +41 21 983 10 92 N° PLANCHE 144_COMM_1000_
mail@tempestatramparulo.ch
www.tempestatramparulo.ch
Réaménagement de la gare de Montreux N DATE
FICHIER
30.03.2023
144_CFF_Montreux_EXE_023_03_
02.pln
FORMAT A3 VER 2
DESSIN AT/MT/MV/AG
PARCELLE N°452 - Avenue des Alpes,
Existant 1018 Montreux
A démolir AUTORISATION CAMAC N° 162 317
A construire

REZ 1/1000 COMBLES 1/1000

Montreux : un escalier introduit dans le hall permet de desservir les étages Vevey : un escalier introduit dans l’un des flancs de l’entrée permet de joindre
jusqu’aux combles, réaffectés en espaces de bureaux. les espaces situés à l’étage et de les transformer en espace d’exposition
ouvert au public. (Tempesta Tramparulo)
TRANSFORMATION DES GARES et historique dans la valeur d’usage qui, loin de réduire le bâti- Réalisation
DE VEVEY ET DE MONTREUX (VD) ment à un sac de pépites, met l’accent sur ce qu’il est et sur ce 66
qu’il peut. La valeur d’usage substitue à un état figé et abstrait –
Maîtres de l’ouvrage : portrait comptable – un processus concret. La quintessence du
CFF Immobilier portrait élaboré par Tempesta Tramparulo se manifeste dans la
Architecte : proposition de réaffecter l’ancien appartement de cheminot de
Tempesta Tramparulo la gare de Vevey. Voici ce que dit l’étude :
Ingénieur civil : « Il sera également plus rentable de réaffecter cet espace
MCR & Associés Ingénieurs civils avec un programme culturel en comparaison avec des bureaux
(Vevey et Montreux) ou des commerces. De plus l’accès étant moins immédiat
Ingénieur électricité : qu’aux niveaux inférieurs, il est préférable de placer cet espace
Innotech Electrical Engineering culturel ici, plutôt que dans un espace qui pourrait accueillir des
(Vevey et Montreux) commerces. »3
Ingénieur CV : Mettre dos à dos la compétitivité d’un espace culturel et
Enerconseil (Vevey), d’un espace commercial, il fallait le faire ! Les architectes syn-
M+S Ingénieurs conseils (Montreux) thétisent finalement leurs diagnostics des deux gares en une
Spécialiste AEAI : image efficace : « il faut leur redonner de la lymphe ». Un espace
Ignis Salutem (Vevey), loué n’est pas rentable parce que son locataire est riche, mais
Inexis (Montreux) parce qu’il est intelligemment disposé autour d’une circulation
Spécialiste pierre naturelle : efficace. Cette approche leur permet de remporter les appels
Atelier Lithos (Vevey et Montreux) d’offre sur invitation.
Conception lumière :
Carré Mambo (Vevey et Montreux) Escaliers
Spécialiste maçonnerie crépis :
Roger Simons (Vevey) Pour éviter l’embarras de commerces mal desservis, Tempesta
Spécialiste investigation & conservation : Tramparulo adoptent une solution contraire à celle retenue à la
Sinopie et Atelier Saint-Dismas gare de Zurich ; plutôt que de multiplier les galeries souterraines,
(Vevey) ils augmentent les distributions verticales – « allons chercher les
Spécialiste bois : étages inoccupés ». Il faut dire qu’à ce sujet, les gares de Vevey et
Claude Veuillet (Vevey) Montreux reviennent de loin : leurs étages ne se ralliaient jusqu’à
Ingénieur bois : récemment que par chance et beaucoup de hasard. Dans les
CBT Concept Bois Technologie deux cas, vivotaient des archétypes d’escaliers de service perdus
(Montreux) dans les coins, qui n’allaient même pas d’un seul trait de fond en
Rapports historiques : comble – à Montreux, la plaisanterie s’est même amplifiée lors
Bruno Corthésy (Vevey), des travaux de la décennie 1990, lorsqu’un complément d’esca-
Lichen architecture et patrimoine lier daignant finalement descendre jusqu’au rez-de-chaussée fut
(Montreux) installé dans le mauvais sens, de sorte à ne pas pouvoir faire le
Durée du projet : lien avec son prédécesseur des étages supérieurs.
2014-2017 (Vevey), Tempesta Tramparulo soignent ce mal en perçant dans la
2014-2016 (Montreux) masse de puissantes circulations verticales, qu’ils raffinent
Durée du chantier : jusqu’au comble de l’élégance – comme s’ils voulaient s’excuser
2017-2019 (Vevey), d’avoir brusqué les vieilles pierres. À Vevey, ils déplient l’escalier
2016-2023 (Montreux) comme une élégante broderie diaphane où la focale se perd
Coûts CFC 1-9 : incessamment, rappelant ainsi l’appareil de pierre feint des
8.9 mio CHF (Vevey), façades où les ombres ne sont qu’un jeu de dupe. À Montreux,
11 mio CHF (Montreux) la citation devient littérale, puisque l’escalier en béton noir et
blanc doit rappeler la polychromie minérale des façades – le
sombre marbre de St-Triphon (CH) et la blanche pierre de St-Paul-
Trois-Châteaux (FR). Sachant que la carrière d’Arvel (Roche, VD)
a par ailleurs fourni à la gare de 1903 ses encadrements de baie
sur le quai no 1, et qu’aujourd’hui cette même carrière produit
de l’agrégat pour béton, les architectes se proposent d’ajouter
une dose de promiscuité matérielle à leur citation : leur escalier
doit être en béton « d’Arvel ». Las, ils déchantent vite lorsqu’ils
apprennent que l’échantillon à la teinte parfaite qu’ils ont sous
les yeux est en réalité à base d’agrégats de la carrière de
Meillerie, achetés par le bétonneur à Arvel. Les carriers sont des
gens d’affaire comme les autres, ils ne produisent que s’ils sont
meilleur marché que leur concurrent. Dans le cas contraire, ils
lui achètent son produit. Tempesta Tramparulo se consolent
alors en se disant que les quais de Montreux sont en bonne par-
tie construits en pierre de Meillerie, et que leur citation tient tou-
jours la route. Pour que la circulation de la lymphe soit parfaite, il
ne manque maintenant plus que le réaménagement des espaces
publics qui devancent les gares.

Nicolas Meier est architecte du patrimoine et chargé de


recherche à l’Université de Lausanne.

1 Bruno Corthésy, La gare de Vevey, étude historique, mai 2018


2 Lichen architecture+patrimoine, La gare de Montreux, étude historique et
patrimoniale, iconographie, juillet 2020, figure 29. La gare de Montreux
est inaugurée en 1903
3 Tempesta Tramparulo Architectes, Étude de commercialisation de la gare
de Vevey, Lausanne, 2014
Réalisation
67

Montreux : le nouvel escalier et sa destination, des bureaux panoramiques Vevey : le nouvel escalier et sa destination, un espace d’exposition donnant
(en haut : MILO KELLER, en bas: Stéphanie Millet) sur le hall (MILO KELLER)
Tunnel d’Euseigne : une voûte parapluie Dans le cadre d’un projet de valorisation du site touristique des Réalisation
Pyramides d’Euseigne (VS), un nouveau tunnel a été creusé au 68
pour des demoiselles coiffées travers de ces fragiles formations géologiques. Retour sur un
chantier réalisé en entreprise totale.

Texte : Jacques Perret, photos : Bernard Dubuis

La route cantonale Sion – Les Haudères – Arolla (RC 54) présente


la particularité de traverser le site des Pyramides d’Euseigne, une
des plus fameuses curiosités géologiques des Alpes (voir ­encadré
p. 72) et un des hauts lieux du tourisme valaisan. À cet endroit, la
route actuelle, qui serpente à flanc de montagne, perce depuis
1947 l’une des pyramides par un court et étroit tunnel.
La configuration de ce secteur de la RC 54 présentait un
certain déficit de sécurité : mauvaise visibilité, parcage sauvage
en bord de chaussée des voitures (les touristes s’arrêtant pour
admirer les pyramides), cohabitation forcée et peu sécurisée de
ceux-ci avec la circulation, chutes de pierres et coulées de boue
lors de pluies abondantes ou durant la période de dégel. Ces élé-
ments portaient préjudice à la visite d’un site touristique excep-
tionnel et limitaient considérablement sa valorisation.
Afin de remédier à ces inconvénients, l’État du Valais, d’en-
tente avec la commune d’Hérémence, a donc décidé de dépla-
cer la route cantonale en perçant un nouveau tunnel, d’une
Modèle 3D du tunnel et de sa voûte parapluie. On distingue également les longueur d’environ 120 m et d’un diamètre de 5.2 m, dans la
deux tranchées couvertes aux extrémités de l’ouvrage ainsi que le tracé de moraine du versant amont des pyramides. Cet aménagement
l’ancienne route. (DMTE)
implique une correction du tracé actuel sur une longueur totale
de quelque 320 m, rendant le nouveau tracé pratiquement rec-
TUNNEL DES PYRAMIDES, tiligne. Quant à l’ancienne route, elle sera déclassée et remise
EUSEIGNE (VS) à la commune d’Hérémence, laquelle prévoit de la réaménager
en zone piétonne pour améliorer les conditions de visite dans le
Maître d’ouvrage : cadre d’un projet de valorisation du site impliquant la construc-
État du Valais, Département de la tion d’une zone touristique à l’entrée du village d­’­Euseigne
mobilité, du territoire et de l’environ- (concours remporté par le bureau Fournier Maccagnan en 2019).
nement (DMTE)
Bureau d’assistance au maître Des pyramides sous contrôle
de l’ouvrage (BAMO) :
Pini Groupe Le tunnel devant être percé dans une moraine de bonne qualité,
Réalisation : les travaux ne présentaient a priori pas de particularités autres
Groupement Tunnel des Pyramides que d’éviter d’endommager le joyau touristique que sont les pyra-
(GTP) : mides. Pour réaliser le tunnel, la technique retenue – imposée à
Entreprises : l’entrepreneur par le maître d’ouvrage – repose sur le principe de
Dénériaz Bâtiment et Infra­ la voûte parapluie. Elle a été utilisée par étapes de 8 m, réalisées à
structures (pilote), Infra Tunnel, l’aide de 53 tubes métalliques divergents d’une longueur de 11 m,
Evéquoz, Ulrich Imboden ce qui garantit un recouvrement de 3 m entre les étapes. Étant
Ingénieurs civils : donné qu’il n’était pas possible d’avoir un front d’attaque direc-
BG Ingénieurs Conseils et tement en bord de route, les travaux ont débuté par l’excavation
Pra Ingénieurs Conseils des deux portails à ciel ouvert, sur des longueurs (38 m côté Vex,
Géologie : 35 m côté Euseigne) suffisantes pour que la couverture rocheuse
BEG – Géologie permette la creuse à l’abri des voûtes parapluie. Ces premiers tra-
& Environnement vaux ont nécessité la mise en place de parois clouées pour stabili-
Électrotechnique : ser les fouilles, qui atteignaient des hauteurs allant de 12 à 20 m.
 DPE Electrotechnique Afin de ne pas mettre en danger la stabilité des blocs coif-
Durée des travaux : fant les pyramides, il a été décidé de surveiller les vibrations
Avril 2022 à octobre 2023 durant les travaux en installant des géophones. Faute de valeur
Coûts : de référence, des premières mesures ont été effectuées sur le
10.5 mio CHF tunnel existant lors du passage d’un chasse-neige. Les résul-
tats ont été utilisés pour fixer une valeur seuil impliquant de
stopper le chantier. Trop souvent atteinte en début de chantier,
cette valeur a toutefois été adaptée, des mesures de contrôle
étant par ailleurs effectuées lors de l’arrivée de chaque nou-
vel engin utilisé sur le chantier. Une méthode qui s’est montrée
concluante : en fin de chantier, aucun dégât n’avait été observé
sur les pyramides.

Travaux en entreprise totale : une réussite

À l’initiative de l’ingénieur cantonal, le Canton du Valais a décidé


de faire réaliser les travaux par l’intermédiaire d’un contrat d’en-
treprise générale par lequel le groupement d’entreprises adjudi-
cataire est seul responsable du respect du planning, des coûts
Réalisation ZONE PEDESTRE

69 EU
SE
IG
NE
>>

3.25
ssée
au
Ch

3.2
5
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3.2
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Chaussée 3.25

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ZONE PEDESTRE
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Déviation de

3.75
3,25

début

3.75
3,75
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fin
3,31
fin
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PLAC

début
3.75

3.75
3,31
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1
Axe + surlageur
Chaussée 3.25

t
3,25
Chaussée 3.75
fin

VEX
<<

0 10
Plan de situation (DMTE)

EUSEIGNE VEX

Panneau de protection
en tête de fouille
Panneau de protection
Emprise de fouille
en tête de fouille

50 Emprise de fouille
968.44
1.00

50

967.44
50
965.26
1.00 3.00

1.00
50
6.90

6.90

964.26
962.50 962.63
1.47

1.725

<< EUSEIGNE 961.03 960.905

6.90
960.665 960.54 5.00 1.00

6.90
960.115
40 93

959.355
1.38

958.55

2.20
957.69

1.515
957.36 957.28 957.155 957.035

1.38
VEX >>
250.000

248.000

244.000

40 93
240.000

236.000

232.000

230.000

220.000

218.000

210.000

200.000

190.000

180.000

170.000

160.000

150.000

140.000

130.000

120.000

114.000

110.000

104.000

100.000

98.000
0 10
Coupe longitudinale (DMTE)

Vallée Montagne

Espace pour les écarts de réalisation


(15 cm; voir concept des structures et base
du projet; PRA-2141-RA02; chapitre A.3.2.2.)

Intrados du revêtement intérieur du tunnel 6.90


49

R=5.2

56
0

20 40
10

5
37
39

32
30 20 30 30

29 5
23 5 32

15
15 Direction Vex Direction Euseigne
6.90

5
15
12
3.75 80
80 3.75
30 30
80

30 30 70 30 30 2.50
30 30 2.50
80

4.50

1.70
4.00

2.00

°
.00
170
2.00

70
1.70

70 -0.112 0.112
2%
2%
3% 0.00
185

18

-0.53

Corridor pour transports exceptionnels TE


5.00

Coupe transversale – gabarit d’espace libre (DMTE)


Réalisation
70

Vue générale du portail aval et des pyramides

(forfait) ainsi que des exigences et performances attendues.


Dans les faits, il s’agit plutôt d’une entreprise totale, puisque
les prestations des ingénieurs et des spécialistes (ingénieur civil,
géologue, géomètre, électromécanique, sanitaire, etc.) néces-
saires à la réalisation sont incluses dans le contrat (phases par-
tielles 51 à 53 selon les normes SIA). Outre l’organisation et la
documentation des séances de chantier, cela comprend aussi
le dimensionnement des éléments porteurs et l’élaboration des
plans d’exécution et des détails constructifs ; des tâches qui, si
elles demeurent de la responsabilité du groupement adjudica-
taire, sont soumises à l’approbation du maître d’ouvrage ou, le
plus souvent, de son BAMO, dont le travail consiste alors princi-
palement à s’assurer que l’entrepreneur respecte le cahier des
charges auquel il s’est engagé.
À Euseigne, cette démarche s’est semble-t-il révélée très
efficace. Contrairement à ce que l’on entend souvent dans le
Début du percement de la première voûte parapluie au front aval bâtiment, l’ambiance sur le chantier était excellente, de l’avis
général des personnes impliquées, notamment grâce au climat
de confiance entre les différents intervenants. Les délais et les
coûts sont respectés jusqu’à présent et le résultat obtenu rem-
plit les critères de qualité exigés par le maître d’ouvrage. Pour
ce dernier, la préparation du dossier d’appel d’offre, avec son
BAMO, l’a contraint à bien cerner son projet et, par la suite, à
mieux anticiper son exécution. La procédure s’est aussi révélée
bénéfique en raccourcissant le délai d’établissement du projet
définitif, qui était en grande partie contenu dans l’offre du grou-
pement d’entreprises.
Du côté du groupement d’entreprises, il a véritablement été
possible d’optimiser la construction, non seulement lors de la
préparation de l’offre, mais aussi en cours de chantier. À noter
toutefois que le projet présentait l’avantage d’être peu complexe
et que les risques d’imprévus étaient a priori limités : les condi-
tions géologiques, établies à partir d’un sondage, étaient favo-
rables, la technique de percement du tunnel à l’abri de voûtes
parapluie imposée, et le contexte général plutôt simple (absence
de tiers ou d’infrastructures existantes importantes).
Le principal changement, par rapport à une procédure tra-
ditionnelle avec des mandataires agissant pour le compte du
maître d’ouvrage, est peut-être à chercher du côté des ingé-
nieurs qui disposent de plus de liberté pour adapter les tech-
niques et les détails de réalisation aux capacités effectives de
Réalisation
71

Coffrage monté avant son entrée dans le tunnel

l’entreprise avec laquelle ils travaillent. Selon leurs dires, c’est


une situation très stimulante, dans laquelle il convient d’être
imaginatif. Ils soulignent aussi l’avantage que représente le
fait que les partenaires ont librement choisi de s’associer pour
le projet et sont donc porteurs d’une motivation commune,
d’abord pour acquérir le marché, puis pour optimiser son exé-
cution ; laquelle passe alors par la recherche d’économies en
termes de matériaux et de temps. À titre d’exemple, un calcul
supplémentaire tenant compte de la tridimensionnalité du sou-
tènement du tunnel a permis de réduire la quantité d’armature.

Un modèle adapté à toutes les situations ?

Ces avantages ne signifient pas pour autant que la démarche uti-


lisée à Euseigne doit être généralisée sans discernement.
Tout d’abord, le succès de travaux réalisés en entreprise
totale dépend prioritairement de la qualité et de la précision du
descriptif mis à disposition des soumissionnaires. Cela signifie
que le maître d’ouvrage doit être en mesure d’anticiper et de
maîtriser, avec un maximum de certitude, les incertitudes liées
à son projet, ce qui n’est pas toujours évident selon sa com-
plexité. D’autant plus que cette complexité ne concerne pas que
les conditions géologiques et les solutions techniques envisa-
geables, mais aussi les relations et les exigences des différents
partenaires impliqués dans le projet. Dans ces cas-là, avoir des
mandataires externes à l’entreprise permet souvent de disposer
d’une expertise plus neutre et mieux à même de favoriser le dia-
logue nécessaire à la résolution des inévitables imprévus.
Ensuite, le travail exigé pour répondre à un appel d’offres de
ce genre est considérablement accru, puisqu’une part non négli-
geable des prestations d’ingénierie doivent être faites par les
candidats sans certitude d’être rémunérées par l’attribution du
mandat. Il est possible, comme ce fut le cas à Euseigne, de
dédommager les participants, mais le montant proposé ne
couvre qu’une part relativement faible des frais engagés et reste
plutôt symbolique.

Dr Jacques Perret est ingénieur en génie civil EPFL et cor-


respondant pour TRACÉS.
QUAND LA COIFFE FAIT LA DEMOISELLE Réalisation
72

À la fin de la dernière grande glaciation (Würm), deux glaciers se début du troisième acte. Privée de son chapeau, la colonne se
rejoignaient au niveau de l’actuel emplacement des Pyramides retrouve à la merci des intempéries et s’érode rapidement avant
d’Euseigne, noyant la région sous près de 2000 m de glace. Lors de disparaitre. Rideau.
de leur retrait et de leur fonte, ils laissèrent derrière eux une Les demoiselles coiffées constituent un paysage très dyna-
moraine basale très hétérogène quant à sa composition – allant mique, voué à la disparition sur une échelle de temps allant de
des argiles aux blocs plurimétriques –, compactée sous le poids quelques décennies à plusieurs siècles. Ceci explique en par-
des glaces et cimentée grâce aux eaux interstitielles circulant tie pourquoi on dénombre moins d’une dizaine de sites sur
dans les pores. Voilà pour le premier acte du scénario qui allait l’ensemble de l’arc alpin alors qu’on y trouve des matériaux
déboucher, quelques dizaines de millénaires plus tard, sur une morainiques en abondance. La combinaison de l’influence de
curiosité géologique exceptionnelle inscrite à ­l’Inventaire fédéral la composition minéralogique sur la cimentation de la moraine,
des paysages, sites et monuments naturels d’importance natio- la dureté des blocs et le degré de compaction constituent proba-
nale (IFP-1708) et constituant l’un des sites touristiques les plus blement une autre partie de l’explication.
visités du Valais. Il est à noter que des demoiselles coiffées peuvent se for-
La clé du deuxième acte réside dans la dénomination géné- mer dans d’autres environnements géologiques. Dans le cas
rique de ce type de formation géologique : « demoiselles coiffées »1. des hoodoos du Parc national de Bryce Canyon (Utah, USA), par
Si elle décrit très bien l’apparence de ces colonnes élancées attei- exemple, c’est une couche de dolomie qui sert de protection à
gnant une hauteur de 10 à 15 m et surmontées d’un gros bloc des calcaires sous-jacents plus sensibles à l’érosion et à l’altéra-
dont le poids peut atteindre environ 20 t, elle indique aussi leur tion, alors que dans celui des cheminées de fées de Cappadoce
mécanisme de formation : leur coiffe. Plus résistant à l’érosion que (Turquie), c’est une couche de basalte qui protège des dépôts de
les matériaux fins constituant la colonne, le bloc sommital pro- tufs volcaniques.
tège partiellement cette dernière du ruissellement, à la manière
d’un chapeau. Le ruissellement, les infiltrations d’eau et les cycles Philippe Morel
de gel-dégel sapent en effet peu à peu la colonne. Faute d’assise
suffisante, le bloc sommital finit pas basculer, marquant ainsi le 1 Appelées aussi cheminées de fées

©Olivier Maire

GROUPEMENT
TUNNEL DES PYRAMIDES MANDATAIRES
FORUM 23
DES
TRANSITIONS
URBAINES

VERS DES
QUARTIERS
POST-CARBONE ?
08.09.2023 Auditorium Microcity
EPFL Neuchâtel

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