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Bakary DIALLO
Docteur en droit des affaires
Université de Paris I Sorbonne
S’il est vrai que la mésintelligence d’une règle commune entre les diverses juridictions
nationales peut apparaître comme rédhibitoire pour un droit qui se veut d’application et
d’interprétation uniformes, la spécificité de la CCJA va bien plus loin que ce souci
traditionnel, son caractère supranational n’a tout simplement pas d’équivalent dans les
systèmes juridiques modernes.
Assez clairement, disons qu’à côté de l’abandon de souveraineté sur le plan législatif1, le
Traité réalise l’abandon de la souveraineté judiciaire et la consécration d’une
supranationalité judiciaire qui complète la supranationalité juridique2.
Les auteurs du traité ont également pris soin d’instituer un arsenal textuel destiné à empêcher
un empiétement réciproque des domaines de compétences de la CCJA et des juridictions
nationales de cassation.
1
Consulté sur la question, le Conseil constitutionnel sénégalais avait estimé dans un considérant qu’il ne résulte
du transfert de compétence au Conseil des ministres ou à la Cour Commune « ni changement du statut
international du Sénégal en tant qu’Etat souverain et indépendant , ni la modification de son organisation
institutionnelle ; que le dessaisissement de certaines de ses institutions- Cour de cassation , mais aussi l’
Assemblée nationale – n’est ni total ni unilatéral , qu’il s’ agit donc en l’espèce , non pas d’un abandon de
souveraineté mais d’une limitation de compétences qu’implique tout engagement international et qui, en tant que
telle, ne saurait constituer une violation de la constitution, dans la mesure où celle-ci, en prévoyant la possibilité
de conclure des traités, autorise, par cela même, une limitation de compétence » 16 décembre 1993, Penant
numéro 827 spécial OHADA , mai à Août 1998 p.225 note A. SALL.
2
Voir D. ABARCHI, La supranationalité de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires (OHADA) op.cit.
3
Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée, République
Démocratique du Congo, Mali, Niger, Sénégal, Tchad et le Togo.
4
Guinée Bissau.
5
Guinée Equatoriale.
6
Nigeria, Ghana, Libéria.
1
Ainsi, lorsque la CCJA est saisie, à tort, d’une question de droit qui ne porte pas sur
l’application du droit OHADA, elle doit se déclarer incompétente, soit d’office (article 32-2
R), soit à la demande des parties (article 17 du Traité). Cette déclaration d’incompétence doit
être suivie d’un renvoi à la juridiction nationale7.
Inversement, lorsque c’est la juridiction nationale qui se trouve saisie d’un recours pour
violation des règles droit uniforme, elle doit décliner sa compétence et renvoyer l’affaire
devant la CCJA sur la base de l’article 15 du Traité8.
Malgré cette délimitation, on observe dans la pratique quelques cas de résistance de certaines
juridictions suprêmes nationales qui s’obstinent à rendre des décisions en violation des règles
de compétences fixées par le traité.
Dans de nombreux cas ce sont les parties qui décident délibérément ou involontairement de
laisser juger leur affaire par la juridiction nationale de cassation, dans d’autres cas c’est la
juridiction qui estime qu’au moins un des moyens soulevés par le pourvoi porte sur le droit
national non harmonisé de sorte qu’elle n’a pas à procéder au renvoi.
Partant de ce constat, on peut au moins considérer qu’il subsiste une incertitude dans les
règles de répartition de compétences entre la juridiction supranationale et les juridictions
nationales de cassation dans « les affaires mixtes ».
Malheureusement, il est à craindre que les turbulences ne s’amplifient, notamment par l’effet
de l’extension du droit des affaires uniformisé à des matières purement civiles9, ce qui aurait
pour conséquence de dépouiller entièrement les juridictions nationales de cassation de leur
compétence.
Cette crainte légitime les juges suprêmes nationaux l’on exprimé, lors d’un colloque tenu en
juin 2006 à Lomé, ils ont réclamé avec fermeté le retour du droit des affaires uniformisé dans
leur sphère de compétence10.
Mais, cette revendication, quel que soit da légitimité a très peu de chance d’aboutir car elle
trouve dans le principe de l’exclusivité de compétence posé par l’article 14 du traité un
obstacle invincible.
Il n’en demeure pas moins qu’elle soulève la question du respect réciproque des domaines de
compétence dans les affaires mixtes mêlant le droit uniforme des affaires et le droit national
non harmonisé.
7
Ce fut le cas 2 fois en faveur du Mali, 13 fois en faveur de la Côte d’Ivoire et 2 fois en faveur du Bénin.
8
Au 30 juin 2008, elle a été saisie 228 fois de cette façon, dont une fois à tort par la Cour suprême de la Côte
d’Ivoire. Exemple : Cour suprême de Côte d’Ivoire, Chambre judiciaire, arrêt n° 784/02 du 12 décembre 2002,
PDCI c/ J et A International, Actualités juridiques, n° 40, p. 26, observations François Komoin. Ohadata J-04-66.
Dans cette affaire d’arbitrage, la Cour suprême s’est dessaisie au profit de la CCJA.
9
Il en sera ainsi si l’Acte uniforme sur les contrats et obligations est doté d’une portée générale couvrant les
obligations civiles et commerciales et si l’Acte uniforme sur le droit du travail ne dissocie pas l’emploi du
personnel domestique de sa compétence ratione materiae.
10
Au terme d’un colloque tenu par en juin 2006, à Lomé, l’Association Africaine des Hautes Juridictions
Francophones (AA-HJF) a formulé des recommandations relatives à la CCJA dans son rapport général, d’une
part, et, d’autre part, dans un document intitulé « Suivi de la mise en œuvre des recommandations du colloque de
Lomé (7-9 juin 2006) - Contribution de l’AA-HJF à la révision du Traité OHADA ». Parmi ces
recommandations figure notamment le retour du contrôle du droit uniforme des affaires à la compétence des
juridictions nationales de cassation.
2
Or cette question spécifique n’a pas été traitée par le législateur africain.
La revendication des juges suprêmes nationaux révèle, en tous cas à elle seule qu’au-delà de
leur frustration manifeste, les rapports entre les juridictions nationales de cassation et la CCJA
sont loin d’être clairs et apaisés.
Dans cet esprit, la réflexion est entamée pour imaginer la mise en place d’un mécanisme
permettant d’opérer un filtre des pourvois portés devant la CCJA.
Ce critère de sélection s’il présente des avantages certains, il n’en comporte pas moins des
failles évidentes.
Certains observateurs11 ont très tôt avancé l’idée de ce mode de sélection qui aurait permis
aux juridictions nationales de cassation de rester dans le jeu du contentieux des Actes
uniformes.
Dans ce cadre, les affaires dont l’enjeu financier ne dépasse pas une certaine somme seraient
portées à ces juridictions, mais les autres, celles dont l’enjeu financier est conséquent seraient
réservées à la Cour Commune.
Cette solution, peut se comprendre pour plusieurs raisons dans le contexte socioéconomique
africain.
Certains se demandent en effet, pour quelle raison on obligerait l’ensemble des justiciables de
l’espace géographique OHADA à porter leurs litiges devant la juridiction supranationale
abidjanaise, alors que pour la plupart du temps la valeur du contentieux est modique ?
Il serait plus logique pensent les tenants de cette solution de laisser à la connaissance des
juridictions nationales de cassation ce type contentieux, d’abord pour une raison de proximité
du contentieux (géographique, temporelle et sociale), mais aussi pour une raison de bonne
administration de la justice ; parce que ce serait tout simplement, la meilleure façon de lutter
contre le découragement et le renoncement de quelques-uns des justiciables qui s’effraient à
l’idée de porter leur litige dans un pays qui n’est pas le leur.
On peut d’ailleurs observer que ce système de sélection par la valeur du litige est celui qui est
mis en œuvre et fonctionne parfaitement en Suisse, où les demandes déterminées doivent
atteindre un certain montant pour pouvoir être déférées à la Cour suprême fédérale12.
11
V. L .BENKEMOUN, Quelques réflexions sur l’OHADA 10 ans après le Traité de Port Louis. Op. cit.
3
Mais disons-le-tout net: cette forme de justice ne correspond plus à l’esprit initial de l’ordre
juridique OHADA et n’emporte guère notre adhésion.
Ce mode de sélection doit être accueilli avec réserve parce que non seulement une question de
principe peut se poser à l’occasion du paiement d’une somme insignifiante13, mais encore
parce qu’une somme modique peut être vitale pour un plaideur peu fortuné. Or, comment ne
pas percevoir le risque d’institutionnalisation d’une justice à deux vitesses :
- la première moins certaine faite pour les pauvres qui serait rendue par les juridictions
nationales de cassation là où elles existent et fonctionnent correctement ;
- la seconde qui serait de meilleure qualité rendue par la Cour Commune au profit des grandes
fortunes et du gratin local des affaires, c'est-à-dire pour ceux qui ne peuvent que préférer la
sécurité judiciaire qu’offre incontestablement le recours devant la CCJA.
Or relâcher l’unité du contrôle des pourvois, par ce critère serait créer les conditions d’un
éclatement du contentieux et entériner définitivement l’idée d’un droit uniforme fait pour les
nantis.
Pour toutes ces raisons, nous pensons qu’il y a lieu d’écarter ce système de sélection, car il
porte gravement atteinte aux droits des citoyens et à l’unité de la jurisprudence.
Ce mode de sélection reviendrait à réserver à la juridiction supranationale, les affaires qui lui
paraissent présenter un intérêt doctrinal et jurisprudentiel suffisant.
Ce système, que pratiquent par ailleurs les pays anglo-saxons et l’Allemagne fédérale15,
même s’il présente des avantages se heurte également à de graves difficultés de praticabilité.
12
J. C. P 1962.II. 12836, note BRUNET.
13
Voir. L’exemple célèbre, en France, de l’arrêt des Chambres réunies du 11 mars 1914, D.1914.1.257, note L.S
pour la définition de la notion de bénéfice.
14
E. PIWNICA, Propos introductifs : la sélection des pourvois à la Cour de cassation, op.cit.
15
En Allemagne fédérale, les critères de sélection ne sont pas si précis que çà : en principe, la sélection des
affaires civiles se fait d’ après le critère de « l’importance fondamentale » que présente le pourvoi pour l’unité de
la jurisprudence, ce qui conduirait par exemple à n’admettre, pour les juger, que quelques pourvois posant des
questions nouvelles ou des problèmes controversés. Mais les recours qui ne concernent pas une question
d’importance fondamentale peuvent être admis lorsque la Cour leur accorde une chance sérieuse de gain de
cause au fond.
4
Alors qu’une sélection fondée sur la valeur du pourvoi est très incertaine, au contraire
lorsqu’elle repose sur la nature du problème posé par les moyens du pourvoi16, elle peut être
très simple puisqu’il s’agit seulement de déterminer si le pourvoi pose une difficulté juridique
telle qu’il nécessite l’intervention de la juridiction supranationale.
Nul ne saurait contester que les arrêts, que la Cour Commune est appelée à rendre n’ont pas
tous la même portée et la même valeur juridique.
Certains ont une valeur doctrinale incontestable, parce qu’ils fixent une règle de droit
uniforme sur une question nouvelle ou controversée, ou tranchent une question d’application
de la règle de droit dont la solution n’était pas évidente.
On conçoit dès lors, que ces deux types de pourvois n’exigent pas les mêmes soins et
n’appellent pas le même examen: alors que les premiers, appellent une prise de position
doctrinale et méritent d’être examinés par la CCJA, les autres pourvois peuvent être soumis
aux juridictions nationales de cassation. On constate, en effet, à l’analyse que bon nombre de
pourvois présentés devant la CCJA tendent à voir censurer une erreur de droit certaine ou à
contester une règle bien établie17.
Ces pourvois ne présentent, en général, guère de difficultés et appellent une solution rapide,
permettant de purger sans retard l’arrêt du vice qui l’entache ou de rejeter le pourvoi.
Ce système de filtrage devrait en outre, servir à éliminer les affaires répétitive ou/ et clones
qui encombrent la CCJA.
En réalité notre principale objection n’est pas dans l’acceptation du principe de ce mode de
sélection, elle est dans sa praticabilité dans le système très particulier de l’OHADA.
En effet, la mise en œuvre de ce critère commande que soit réglée au préalable l’épineuse
question de l’auteur de la sélection.
Or selon que l’on confie ce rôle de filtrage à la CCJA ou aux juridictions nationales de
cassation les difficultés ne sont pas de même nature.
16
En vérité, cette conception, qui peut avoir aussi ses mérites, n’est pas dans nos traditions, comme le dit M.
Louis Boré : « Les cours suprêmes d’inspiration française ne sélectionnent pas les recours qui leur sont soumis,
elles sélectionnent les moyens qui peuvent être invoqués à leur appui en limitant leur contrôle aux seules
questions de droit ». L. BORE et J. de SALVE de BRUNETON, Quelques idées sur le pourvoi en cassation,
Dalloz, 2005. chr. p. 180. Et comme pour lui faire écho, le Professeur Roger Perrot ajoute qu’ : « il faut constater
cette évidence que, dans le cadre d’un contentieux qui reste subjectif même au niveau suprême, toute idée de
sélection qui ne se limite pas à des critères de pure recevabilité est une vaine illusion ». R. PERROT, Cour de
cassation et Conseil d’Etat à travers leurs fonctions de juges suprêmes, in bicentenaire de la Cour de cassation
.LITEC 1990.p150 et s
17
Ibidem.
5
Laisser le choix aux juridictions nationales de cassation le soin de faire le tri des pourvois
devant être portés à la connaissance de la CCJA c’est introduire un facteur supplémentaire
d’insécurité.
Ici, comme dans le critère développé précédemment le souci de l’unité du droit harmonisé et
de son application uniforme doit prévaloir18.
Quelle confiance peut-on avoir en un mécanisme de renvoi et de contre- renvois qui, même
avec une directive légale, resterait dans une large mesure à l’appréciation souveraine des
juridictions nationales ?
On peut effectivement craindre, dans cette hypothèse que l’unité du droit régional ne survive
pas longtemps à l’application d’un système aussi compliqué et finalement peu contraignant
pour les juges internes.
On peut aussi craindre que les Cours suprêmes nationales ne profitent de ce mode de sélection
de façon plus ou moins délibérée pour conserver les pourvois plus intéressants.
En revanche, une sélection des pourvois par la CCJA aurait le mérite d’ôter aux juridictions
nationales la lourde et dangereuse responsabilité de la détermination des questions de droit qui
pourraient donner lieu à l’accès à la CCJA.
Le risque encouru en confiant à la CCJA le soin de la sélection serait d’instaurer une lourdeur
et un facteur de ralentissement de la procédure, en raison du double examen des affaires.
Lorsque la CCJA refuse d’examiner une affaire et procède au renvoi devant une juridiction
nationale de cassation elle accentue en effet la lenteur du pourvoi, allant ainsi à contre-courant
du mouvement général et contemporain d’accélération des procédures judiciaires.
Le risque que les juridictions nationales ne portent atteinte à l’égalité des citoyens n’est pas
non plus à écarter même dans les litiges jugés sans réel intérêt juridique ou doctrinal. Par
ailleurs, une telle option ne nous éloignerait pas beaucoup de la situation actuelle. Le
problème reste posé dans les mêmes termes, rien n’indique en fait que les juridictions
nationales accepteraient de coopérer plus dans ce nouveau système que dans l’actuel, en
déclinant leur compétence pour tous les pourvois qui leur seront déférés.
En définitive, aucun des critères ci-avant développés n’emporte notre adhésion car dans l’un
ou l’autre cas on se trouve confronté soit à un risque sérieux de divergence dans l’application
et l’interprétation des Actes uniformes, soit à un risque certain de ralentissement de la
procédure du pourvoi en cassation.
En revanche, nous préconisons la mise en œuvre d’une procédure qui viendrait non pas pour
se substituer aux procédures déjà existantes, mais qui serait regardé comme un mécanisme
complémentaire qui ne serait utilisé que dans des cas spécifiques.
Il s’agit de la procédure de renvoi préjudiciel.
18
A. PERDRIAU, La non- admission des pourvois, JCP éd. G. 2002 –I, 181 spéc. N°97100
6
III- Pour l’instauration d’un mécanisme de la procédure
préjudicielle
Si l’on excepte les cas de renvoi dans les rapports des juridictions nationales de cassation et la
CCJA, il y a deux circonstances qui pourraient justifier rationnellement le regroupement d’un
procès devant un même juge: le dessaisissement total d’une juridiction en faveur d’une autre
et la procédure de renvoi préjudiciel.
La voie du dessaisissement semble être celle qui a été adoptée par le traité.
Or nous avons déjà souligné les limites et l’impraticabilité de cette procédure dans de
nombreux cas.
C’est lorsque dans un litige donné l’application du droit harmonisé n’a qu’une part marginale,
alors que le reste du contentieux relève de la compétence souveraine du juge suprême national
juge de droit commun.
Nous pensons effectivement que dans cette hypothèse l’instauration d’un mécanisme de
question préjudicielle est celui qui présente le moins d’inconvénients.
Il n’y pas lieu, pour lui de considérer si la question est ou non « prépondérante »19 pour la
solution du litige, ni d’admettre la théorie d’un acte clair développée par les juridictions
françaises dans le cadre du droit européen20.
19
On sait que ce critère avait été suggéré par la Cour Suprême nigérienne pour rejeter la compétence de la CCJA
dans les litiges d’affaires mixtes, Cour Suprême du Niger, 16 août 2001, arrêt pré- cité.
20
L’idée a été exprimée dès 1896 par LAFERRIERE : « Il faut qu’il ait une question, c'est-à-dire une difficulté
réelle, soulevée par les parties ou spontanément reconnue par le juge, et de nature à faire naître un doute dans un
esprit éclairé », Traité de la juridiction administrative, Paris, 1896, T.I, p.498. Elle est appliquée par les
juridictions françaises qui sont tenues de renvoyer l’interprétation des traités internationaux au gouvernement. La
théorie de l’acte clair est donc un moyen inventé par ces juridictions pour renforcer leur pouvoir à l’égard de
l’exécutif. Le Conseil d’ Etat français l’a transposée à la procédure du renvoi préjudiciel instituée par l’article
177 dans un arrêt du 19 juin 1964, aff. Shell -Berre (Rev.de droit public et de sc. pol., 1964, p.1039)
7
Car il s’agit avant de permettre à la CCJA de garder tout son imperium sur tout le contentieux
du droit harmonisé et de se prémunir contre les juges nationaux qui voudraient prendre
quelques libertés avec les règles de compétence exclusive instituées par le traité.
5- Saisie de la question la CCJA, qui garde sa compétence exclusive dit le droit sous forme
d’un arrêt interprétatif; 6- Le juge national reprend l’instance fait application de cet arrêt
interprétatif au litige et rend une décision qui éteint le contentieux.
Cette idée de coopération et de collaboration plus que d’antagonisme est une idée décisive.
L’esprit de collaboration peut s’expliquer par le fait que lorsque dans un litige le juge national
décide de recourir à la question préjudicielle, il le fait dans le total respect des règles de
compétence définies par le traité OHADA lui- même.
Le juge national pour gagner du temps sursoit à statuer et pose la question préjudicielle au
juge supranational qui garde ainsi en tout état de cause le monopole d’éclairer le sens des
normes harmonisées.
En bref, contrairement à la situation actuelle qui est potentiellement conflictuelle pour les
juridictions nationales de cassation et la CCJA, la procédure du recours à la question
préjudicielle devrait permettre à instaurer un climat de confiance de complémentarité et de
collaboration entre ces juridictions21.
21
76 Cf., Les rapports entre les juridictions de cassation nationales et la CCJA : bilan et perspectives d’avenir.
Organisé par l’Association Africaine des hautes juridictions francophones (AA- HJF). Abidjan du 26 au 287
janvier 2005.