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MONIQUE SCHNEIDER : PARADIGME DU FÉMININ

Ursula Renard

ERES | « Figures de la psychanalyse »

2005/1 no11 | pages 233 à 234


ISSN 1623-3883
ISBN 2-7492-0337-6
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-figures-de-la-psy-2005-1-page-233.htm
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Monique Schneider :
Paradigme du féminin*
• Ursula Renard •

« On ne saurait donc parler d’un l’auteur d’un allégement de la « répres-


primat utérin comme on parle d’un sion de la « sensualité », liée à la mater-
primat du phallus. Les schèmes séquen- nité, pour passer à sa mise sous tutelle
tiels qui suggèrent plus qu’ils ne définis- dans « l’homme Moïse ».
sent le féminin invitent par conséquent à
Ainsi la théorisation qui accorde au
complexifier la logique du propre, pour
phallus un « pouvoir structurellement
qu’il soit tenu compte de ce qui, dans les
réparateur » du « défaut féminin » met
potentialités féminines, actualise une
de côté, selon l’auteur, son aspect de
radicale exposition à l’altérité (329). »
« corps étranger » effracteur.
À la question « Y a-t-il une symboli-
C’est cette logique phallique qu’elle
sation du sexe de la femme ? »,
souhaite interroger en l’insérant dans
Monique Schneider exclut l’idée d’offrir
une logique plus vaste du « vivant » et de
un parallélisme d’avec la logique phal-
l’effroi qu’il suscite en son mouvement.
lique, mais propose une réflexion déca-
La topographie féminine, « offrant cette
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lée, riche et dense à travers de multiples
références (Shakespeare, Duras, Apulée, fente étroite », figure « l’espace psy-
Tournier, Lacan, Dolto…) et surtout, chique », « espace creux » qui ne fait pas
Freud dont elle retrace la pensée pour trou, car il est « construit à partir d’une
tenter de saisir les remaniements théo- paroi venant protéger contre la chute
rico-cliniques autour de la question du dans le vide ». L’espace creux offre alors
féminin. Elle cherche dans « l’infra une possible « dilatation des formes » qui
texte » ce qui du premier Freud se trouve se déroule au cœur de la vie fantasma-
transformé par l’infiltration de fan- tique du sujet, dans la cure et au-delà.
tasmes « du masculin atrophié » dans la L’auteur insiste sur « l’irruption du
théorie, où se dessine alors un « efface- vivant » contre « la visée matricide :
ment des traces » par souci de « cohé- purger la femme de tout stigmate matri-
rence » alors qu’une autre voix s’énonce ciel ». Cet espace se trouve aussi au cœur
à travers la « protestation féminine ». du geste d’aufnehmen et donc de la
Rébellion reprise du côté de Freud bejahung comme « geste paradigma-
pour réformer sa théorie passant selon tique du féminin » qui implique une

* Paris, Aubier, 2004, 332 p.


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possible « fortification », désignant un différentes. Je dirais même plus – c’est


« refus de la féminité », jusque dans le parce qu’on ne le devient pas qu’on s’in-
travail analytique. terroge, et jusqu’à un certain point, s’in-
Le Freud « crypto-féministe » des pre- terroger est le contraire de le devenir 1 ».
miers temps fera retour au cours de ses En ça, l’auteur propose de revenir et d’in-
développements sur « l’au-delà du prin- terroger la place du ventre, de « cet
cipe de plaisir », où insiste « le féminin espace creux » dans la clinique, la théorie
universel, ne faisant qu’un avec ce qui, et l’écriture offrant une réflexion qui dis-
dans le pulsionnel, se laisse aimanter par perse la pensée, la temporalité, la vertica-
Eros ». Dans son cheminement théo- lité pour laisser place à une « dilatation
rique, « Freud n’a t-il pas, dans sa plai- des formes » qui ouvre à des séquences
doirie, aboli le ventre pour sauver le « incurvées », à l’image du « triangle vul-
visage en tant que face » ?, « la gros- vaire ».
sesse cérébrale de Zeus n’a t-elle pas, en Cet ouvrage permet de remettre au
effet, été rendue possible que par l’ava- travail des repères théoriques selon
lement préalable de la mère enceinte, l’image de sa structure éclatée et ordon-
Métis » interroge l’auteur. Avalement qui née. On peut avoir le sentiment de s’y
se retrouve selon Monique Schneider perdre, mais n’est-ce pas un point de réel
quand on interroge la question d’un nécessaire quand on interroge le fémi-
« lieu-source, indissolublement trouble nin ? La fluctuation des énoncés s’impose
et fécond » au regard de la logique phal- pour confirmer que : « Le féminin n’est
lique qui sert alors de « garde-fou », saisissable que dans sa traversée du
« impliquant une éviscération symbo- négatif et de l’errance, il est incapable de
lique préalable. » rivaliser avec le symbole phallique de la
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Ainsi « n’est-ce pas cette logique pierre dressée. » (219)
phallique qui, du même coup, se voit La structure en poupée russe de cet
signifier ses limites, quand est prise en ouvrage qui donne une figure éclatée et
compte la fonction de la gestation dense autour du « paradigme féminin »
maternelle ? », souligne t-elle. est à l’image de la position du lecteur s’in-
Elle questionne, tout au long de ses terrogeant sur la réflexion de Monique
développements, la notion de « primat Schneider à partir de l’oscillation de Freud
du phallus » pour insister sur une néces- sur la question du féminin : il y a toujours
saire suspension qui est sous jacente à un creux au cœur de la structure qui ouvre
l’écriture même de ce livre « le paradigme vers une autre structure, vers un autre
du féminin », qui peut paraître dense, creux, indéfiniment à l’image de ce « lieu-
mouvant et flottant, en écho peut-être, à source » propre à la maternité. Rappro-
cet énoncé de Lacan : « Devenir une chement souvent oublié que l’auteur fait
femme et s’interroger sur ce qu’est une naître, tout au long de son récit, sans pro-
femme sont deux choses essentiellement testation, avec élégance.

1. Jacques Lacan, Le séminaire III. Les psychoses, Paris, Le Seuil, 1981, p 200.

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