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Vomissements de l’enfant

Dr KALLA Ginette Claude


Pédiatre/Chargé de Cours
Département de pédiatrie/FMSB/UY1
Cible
M1/Filière médecine/FMSB/UY1

Prérequis
• Anatomie du tube digestif (L1)
• Physiologie du tube digestif (L2)
• Sémiologie digestive (L3)
Objectifs
A la fin de ce cours, l’étudiant sera capable de:

• Définir un vomissement
• Décrire le mécanisme physiopathologique de
survenue du vomissement
• Savoir faire la démarche étiologique devant un
vomissement chez l’enfant
• Enumérer 3 étiologies les plus fréquentes selon l’âge
• Citer 2 diagnostics différentiels du vomissement
• Enumérer 3 complications du vomissement
• Connaître les principes de traitement du vomissement
Plan
• Généralités • Diagnostic
– Définition – Positif
– Intérêts – Différentiel
– Rappels • Complications
physiologiques • Traitement
– Physiopathologie Conclusion
– Etiologies
Définition
• Le vomissement est un rejet actif par la bouche
de tout ou une partie du contenu gastrique.

• Il est souvent précédé de nausées.


• Nausée: phénomène subjectif désagréable
provenant du tractus digestif haut, associé à
une sensation d'envie de vomir.
• Le vomissement est un symptôme et pas une
maladie
Intérêt
Epidémiologique
• Motif fréquent de consultation en pédiatrie.
• Retrouvé dans de multiples pathologies en
pédiatrie.

Pronostique
• Parfois révélateur de pathologies graves.
• Complications graves (déshydratation,
dénutrition).
Rappels physiologiques
• La continence gastrique est assurée à son
orifice supérieur par la partie terminale de
l’œsophage appelée vestibule.

• Le vestibule, situé en position abdominale se


comporte comme un véritable sphincter. Ses
fibres musculaires circulaires assurent un tonus
permanent qui suffit à s’opposer à la pression
hydrostatique du contenu gastrique.
Rappels physiologiques 2
• Lorsqu’il y a une augmentation de pression dans
l’abdomen, cette pression s’équilibre de part et
d’autre du cardia et s’exerce à la fois sur
l’estomac et sur le vestibule.
• Cette pression ainsi exercée, le vestibule glisse et
se retrouve en position intra thoracique. Dans
cette position intra thoracique, il est soumis aux
pressions négatives qui règnent dans le thorax, ce
qui va faire apparaître un déséquilibre dans la
répartition des forces.
• Ce déséquilibre va favoriser l’ouverture du
sphincter œsophagien inférieur et par conséquent,
le reflux du contenu gastrique vers l’ œsophage.
Physiopathologie

Récepteurs H et M

Bulbe rachidien
Physiopathologie 2
• Le vomissement trouve son origine dans le
bulbe rachidien où existent deux zones qui le
provoquent:
– le centre du vomissement situé dans le tronc
cérébral.
– une zone chémoréceptrice située dans le
plancher du 4ième ventricule sensible aux
stimulations chimiques.
Physiopathologie 3
• Le centre du vomissement peut être activé par:
– des informations venant de la zone chémoréceptrice
– des stimulations directes venant du cortex cérébral
(provoquées soit par une anxiété, une émotion, la vue, la
perception de certaines odeurs…)
– des informations sensitives périphériques d’origine
digestive (pharynx, péritoine, voies biliaires) véhiculées par
voie nerveuse (pneumogastrique ou sympathique) et
déclenchées notamment par la distension abdominale
– des informations sensitives périphériques d’origine extra-
digestive (vaisseaux coronaires, voies urinaires ou
testicules).
– Des stimulations directes venant de l’appareil vestibulaire
Physiopathologie 4
• Au niveau du centre de vomissement, il y a de
nombreux récepteurs
– les récepteurs sérotoninergiques de type 3
qui stimulent la libération de dopamine qui
active les récepteurs dopaminergiques D2 du
centre du vomissement.
• Dans le système vestibulaire, ce sont les
récepteurs histaminiques H1 et muscariniques
M1 qui sont particulièrement abondants.
Physiopathologie 5
• En réponse à ces stimulations, le centre du vomissement
émet des messages efférents moteurs qui vont modifier
1) la motricité duodéno-pylorique (hypertonicité
duodénale, fermeture pylorique, inversion du
péristaltisme)
2) La motricité fundique (relâchement avec ouverture
cardiale)
• et provoquer une contraction diaphragmatique et
musculaire abdominale afin de faciliter la remontée du
contenu gastrique.
Physiopathologie 6
• En même temps, deux réflexes se mettent en
place
– un réflexe d’élévation vélo palatine afin de
prévenir l’entrée du matériel expulsé dans le
nasopharynx.
– un second réflexe de fermeture glottique et
d’inhibition respiratoire qui prévient
l’inhalation du contenu gastrique expulsé
lors du vomissement.
Etiologies 1
Vomissements aigus
 Causes chirurgicales
1) Occlusion hautes
• En période néonatale, elles sont malformatives et sont
dues à des sténoses, des atrésies congénitales ou à des
anomalies de rotation.
• Chez le nourrisson, elles sont plus rares : hernies
étranglées, bride chez un enfant déjà opéré, accidents
occlusifs sur anomalies de rotation ou mésentère
commun.
• Chez l’enfant plus grand, les causes sont superposables à
celle du nourrisson.
Etiologie 2
2) Occlusion basse
Chez le nouveau-né: Maladie de Hirschsprung: Y penser
devant un retard d’élimination du méconium ou devant une
constipation précoce, les atrésies coliques et les pseudo-
obstructions intestinales chroniques. (peu fréquentes).
3) Syndrome péritonéal
Chez le nourrisson: Appendicite aiguë
4) Douleurs abdominales paroxystiques
L’invagination intestinale aigue: première cause d’occlusion
intestinale du nourrisson et du petit enfant se manifestant
par des douleurs abdominales paroxystiques brutales, des
rectorragies et une palpation abdominale retrouvant parfois
une masse (boudin).
Etiologie 3
Vomissements aigus
 Causes médicales: plus fréquentes
1) Erreur diététiques quantitative, qualitatives ou non respect des
rythmes biologiques chez le nourrisson
2) Les infections communes qui constituent de loin les causes les plus
fréquentes de vomissements, surtout chez le nourrisson :
• les infections de la sphère ORL et respiratoires : rhinopharyngites,
sinusites, otites sans oublier le muguet buccal, pneumopathies ou
broncho-pneumopathies (+++ virales)
• les infections digestives : entérites à rotavirus et entérocolites
bactériennes. Les hépatites aiguës du nourrisson et de l’enfant
• les infections urinaires
• méningites : elles peuvent se révéler par des vomissements en
contexte fébrile. Y penser surtout chez le petit nourrisson
Etiologie 4
Vomissements aigus
3) Des signes neurologiques ou des troubles du comportement
doivent faire évoquer une hypertension intracrânienne, surtout si
les vomissements sont matinaux, en jet. Le fond d’œil est un bon
moyen de dépistage. Une tomodensitométrie cérébrale sera
réalisée à la recherche d’un hématome sous-dural ou d’une
tumeur.
4) Des vomissements associés à un tableau douloureux
abdominal, peuvent révéler un ulcère gastrique ou duodénal, une
gastrite, une pancréatite ou un purpura rhumatoïde (même en
l’absence d’éruption cutanée).
5) En l’absence de tout signe d’orientation : il faut penser à la
possibilité d’une intoxication accidentelle médicamenteuse ou par
des produits ménagers ou industriels.
Etiologie 5
Vomissements chroniques
• En présence de vomissements habituels, les facteurs
diététiques (suralimentation, jeûne prolongé) ou une
infection chronique (ORL ou urinaire) sont rarement
en cause. Cependant, il convient de toujours les
éliminer en premier lieu.
• La recherche d’une étiologie se conduit ensuite
différemment en fonction de l’âge.
Etiologie 6
 Chez le nouveau-né
• Des vomissements bilieux chroniques peuvent révéler
un obstacle organique: rechercher une atrésie, une
sténose du grêle, une anomalie de rotation ou un iléus
méconial.
• Des vomissements alimentaires chroniques et parfois
bilieux: les troubles de la motricité intestinale
rencontrés au cours des entérocolites aiguës
néonatales, des pseudo-obstructions intestinales
chroniques (très rares) et de la maladie de
Hirschsprung
Etiologie 7
• Des vomissements hémorragiques: oesogastrite
ulcéro-hémorragique, des gastrites ulcérées ou
pétéchiales, plus rarement un ulcère aigu gastrique ou
duodénal.
• Des vomissements chroniques ou intermittents,
associé à des troubles respiratoires (toux à répétition,
broncho-pneumopathies ou accidents de déglutition),
doivent faire évoquer un reflux gastro-oesophagien
• Une souffrance cérébrale pendant les premiers jours
de vie s’accompagne très souvent de vomissements
Etiologie 8
• Des troubles métaboliques peuvent se révéler en période néonatale
par un syndrome émétisant. Ce sont des causes rares parmi
lesquelles ont peut citer la galactosémie, l’intolérance héréditaire au
fructose (hépatomégalie avec hypoglycémie), les anomalies du
métabolisme des acides aminés, les hyperammoniémies…
• L’insuffisance surrénale primitive ou l’hyperplasie congénitale des
surrénales peuvent également se manifester par des vomissements,
s’y associe une perte anormale de sodium et des troubles de
l’hémodynamique.
• L’hypercalcémie peut être responsable de vomissements notamment
dans le cadre d’hyperparathyroïdie.
Etiologie 9
 Chez le nourrisson
• La survenue de vomissements chez un nourrisson de 3 semaines
(entre 10 jours et 3 mois maximum), le plus souvent un garçon,
après un intervalle libre asymptomatique, se majorant de jour en
jour, avec un appétit conservé, doit faire évoquer une sténose
hypertrophique du pylore, à fortiori s’ils s’accompagnent d’une
cassure de la courbe pondérale
• Les vomissements alimentaires répétés depuis la naissance aux
changements de position, accompagnés de régurgitations, associés
ou non à des broncho-pneumopathies à répétition, évoquent
l’existence d’un reflux gastro-oesophagien
• Les vomissements peuvent s’intégrer dans le tableau d’une
intolérance ou d’une allergie alimentaire : allergie aux protéines du
lait de vache et maladie cœliaque (intolérance au gluten) évoquées
en fonction de l’âge de l’enfant et de son alimentation.
Etiologie 10
 Chez le grand enfant: les causes organiques sont moins fréquentes.
Il convient cependant d’éliminer un ulcère, une tumeur cérébrale
ou un RGO. Les causes fonctionnelles dominent. On retiendra :
• les vomissements acétonémiques ou syndrome des vomissements
cycliques (vomissements périodiques avec cétose) : survenant
souvent sans cause évidente ou après un jeûne ou une infection
banale, ils entraînent une intolérance gastrique avec vomissements
incoercibles. L’haleine est caractéristique, acétonémique ; la
cétonémie et la cétonurie sont le reflet du déficit énergétique.
• Le mal des transports : extrêmement fréquent, il survient
préférentiellement chez des enfants plutôt émotifs entre 3 et 12 ans.
• Enfin, le syndrome émétisant peut être un facteur révélant un
conflit parents-enfant et le témoin de manifestations
psychologiques ou de phénomènes de conversion somatique. Ce
diagnostic ne doit être retenu qu’après avoir éliminé formellement
une cause organique.
Diagnostic positif 1
Caractéristiques des vomissements
• L’âge de début: existence ou non d’un intervalle libre par
rapport à la naissance (Sténose du pylore)
• L’horaire par rapport aux prises alimentaires: RGO
• La fréquence: aigu ou chronique
• Leur aspect: alimentaire, bilieux, fécaloïde ou hémorragique
• Leur type : émis avec ou sans effort, leur provocation par les
changements de position (RGO)
• Le caractère douloureux ou non (RGO)
• Leur abondance : souvent majorée, difficile à apprécier. Les
vomissements abondants s’accompagnent toujours d’une
mauvaise prise pondérale => l’étude de la courbe pondérale
peut donc être un bon élément d’orientation
Diagnostic positif 2
Alimentation: surtout chez le nourrisson :
• Le mode de préparation et de reconstitution des
laits artificiels
• La quantité proposée et l’apport énergétique reçu
• Le nombre de prises alimentaires
• La nature des aliments proposés depuis la
naissance, avec leur date d’introduction dans le
régime (protéines du lait de vache, gluten
notamment)
• Les éventuels changements diététiques pratiqués
depuis l’apparition des symptômes.
Diagnostic positif 3
• Les antécédents périnataux: hydramnios, absence
d’émission du méconium
• Les antécédents médicaux: infections pulmonaires
à répétition
• Les antécédents chirurgicaux: traumatisme récent
• Des cas similaires dans l'entourage: maladies
métaboliques
• Notion de prise de médicaments: Digoxine,
tramadol….
• Les antécédents familiaux (parents et collatéraux)
Diagnostic positif 4
Les symptômes associés
• Généraux: fièvre, anorexie, amaigrissement
• ORL: otalgie, dysphagie (otite, angine)
• Urinaires: dysurie (infection urinaire)
• Digestifs: diarrhée, douleur abdominale, défense,
absence de bruit du péristaltisme, rectorragie…
• Respiratoires: toux, rhinorrhée (pneumonie)
• Neurologiques: céphalées, convulsions, irritabilité,
refus de téter (HTIC, méningite)
• Odeur acétonémique de l’haleine (diabète)
Diagnostic positif 5
Le contenu des vomissements
• Alimentaires : survenant tardivement après les repas,
contenant des aliments partiellement digérés, nauséabonds.
Ces vomissements orientent vers une sténose pylorique ou
duodénale.
• Fécaloïdes : orientent vers une obstruction intestinale
• Les vomissements de liquide clair et acide donnant la
sensation de brûlure œsophagienne : reflet d’une gastrite, RGO
• Les vomissements bilieux : se distinguent par leur couleur
jaune-verdâtre et leur goût amer. Ils traduisent un reflux
anormal de bile dans 1'estomac puis dans l’ œsophage
• Les vomissements hémorragiques (hématémèse).
Diagnostic positif 6
Examen clinique
 Les vomissements, par leur abondance et leur
caractère aigu, peuvent entraîner une déshydratation
 La répétition des vomissements peut retentir sur l’état
nutritionnel
Analyser des courbes de croissance
• Cassure de la courbe de poids
• Infléchissement de la taille
• Augmentation trop rapide du périmètre crânien
NB: Examen clinique complet à la recherche des signes
pouvant orienter vers une étiologie.
Diagnostic positif 7
Rechercher les complications du vomissement
• Signes de déshydratation : sécheresse buccale, paresse du pli
cutané, tachycardie, hypotension artérielle, oligurie.
• Signes de dénutrition: amaigrissement, fonte panicule adipeux et
fonte musculaire, surtout en cas de vomissements chroniques)
• Des hématémèses causées par des fissurations cardiales
secondaires aux vomissements répétitifs (Syndrome de Mallory-
Weiss).
• Broncho-pneumopathie d'inhalation surtout s'il existe des
troubles de déglutition ou de conscience.
• Rupture traumatique de l’oesophage (syndrome de Boerhaave)
suite d'effort de vomissements importants (très rare).
Diagnostic positif 8
Examens complémentaires: demandés surtout dans
le but
– Evaluer le retentissement
– Confirmer une orientation étiologique

• Ionogramme sanguin, fonction rénale, gaz du sang


• Bilan infectieux: NFS, hémoculture, LCR, ECBU,
GE/TDR…
• Bilan morphologique: Lavement baryté, FOGD,
Radiographie, échographie, scanner…
• Dosage enzymatiques, hormonaux…
Diagnostic différentiel
• Régurgitation: rejet passif par la bouche de petites
quantités de lait ou de liquide gastrique, qui
accompagnent parfois l’éructation physiologique
chez le petit nourrisson, généralement en rapport
avec l’existence d’un reflux gastro-oesophagien

• Rumination/mérycisme: remontée volontaire ou


automatique d’aliments dans la bouche suivie de
leur redéglutition. Il s’agît d’un symptôme rare,
conséquence d’un trouble grave du comportement
Traitement
Buts:
Arrêter les vomissements et prévenir les complications
• Avant tout et si possible le traitement étiologique
(médical, chirurgical)
• Prise en charge des complications
– Réhydratation en fonction du degré de
déshydratation
– Prise en charge nutritionnelle
– Traitement symptomatique possible en absence
d’une cause justifiant un traitement spécifique ou
alors si vomissements incoercibles
Traitement 2
Moyens
• Mesures posturales
• Placer une SNG (pathologie chirurgicale,
patient inconscient)
• Antiémétiques (IV, IR ou per os si possible)
Traitement 3
Antagonistes des récepteurs à la dopamine: ce sont
-Dompéridone (Motilium®, Perydis®)
-Métoclopramine (Primpéran®, Anausin®, Prokinyl®)
-Métomipazine (Vogalene®).
-Alizapride (Plitican®).
• Pharmacodynamie : ces médicaments de la classe des
neuroleptiques, exercent leur action antiémétique par blocage
des récepteurs dopaminergiques périphériques
• Effets indésirables : Rares : somnolence, troubles
extrapyramidaux (dyskinésies, syndromes parkinsoniens),
troubles endocriniens (hyperprolactinémie, galactorrhée,
gynécomasties), recrudescence des crises d'épilepsie chez les
épileptiques.
• Posologie
-Dompéridone: 0,75mg/kg/jr
-Métopimazine: 0,5-1mg/kg/jr
Traitement 4
Antagonistes des récepteurs de type 3 à la
sérotonine (5-HT3)
-Dolasetron (Anzemet®)
-Granisetron (Kytril®)
-Tropisetron (Navoban®)
-Ondansetron (Zophren®).
• Pharmacodynamie: bloquent sélectivement
les récepteurs 5-HT3 centraux impliqués dans
les phénomènes de vomissement
Traitement 5
• Anticholinergiques
Scopolamine (Scopoderm TTS®)
Indiqué contre le mal des transports.
Conclusion
• Symptôme fréquent en pédiatrie
• Différentier les vomissements aigus et
chroniques
• Révélateur de pathologies variées pas toujours
digestives
• Toujours pathologiques chez le nouveau né
• Le plus souvent bénins chez le nourrisson et
l’enfant
• Mais parfois révélateur de pathologies graves
• Sa prise en charge repose sur le traitement
étiologique

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