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Université Constantine 3

Faculté de Médecine
Département de médecine dentaire
Service d’Orthopédie Dento- Faciale

Cours d’ODF 3ème année

Réactions tissulaires au cours des déplacements


dentaires

Dr. N.GHERS

Année Universitaire
2021-2022
Réactions tissulaires au cours des déplacements dentaires

Plan

Introduction

1) Le déplacement dentaire physiologique

2) Les réactions tissulaires au cours d’un déplacement dentaire provoqué

2-1) Les effets immédiats (hydropneumatiques)

2-2) Les effets biologiques à court et moyen terme

3) Les différents types de déplacement dentaire

3-1) Le mouvement de version

3-2) Les mouvements de torque et de redressement après version

3-3) Le mouvement de translation

3-4) Le mouvement d’ingression

3-5) Le mouvement d’égression

4) Les facteurs influençant le déplacement dentaire

4-1) Les facteurs biologiques intrinsèques

4-2) Les facteurs extrinsèques

Conclusion

Bibliographie
Introduction

Les dispositifs orthodontiques permettent de corriger les malocclusions grâce à des


déplacements dentaires provoqués induits par les forces déployées au cours du
traitement. Ces mouvements impliquent l'intervention des phénomènes tissulaires des
tissus parodontaux en fonction de chaque type du déplacement permettant une
adaptation progressive et un retour à la situation d'équilibre.

1) Le déplacement dentaire physiologique :

Ce déplacement dentaire spontané se produit dans une direction précise et constante


chez une même espèce (chez l’homme il est mésial et vertical). Il se fait grâce au
renouvellement permanent à la fois cellulaire et extracellulaire des tissus péri-
dentaires (du desmodonte, de l'os alvéolaire et du cément).

1-1) Le remaniement du desmodonte :

-Il possède sa propre capacité de remodelage ; les fibres de collagène sont détruites et
remplacées de façon continue

-Il a un rôle régulateur du remodelage osseux ;

1-2) Remodelage de l'os alvéolaire :

Il se fait selon la séquence activation–résorption–inversion–formation (ARIF) :

 Activation :

- recrutement des préostéoclastes,

- reconnaissance de la zone osseuse à résorber,

- attachement des préostéoclastes à la surface,

- fusion des préostéoclastes en ostéoclastes multinuclés ;

 Résorption : les ostéoclastes détruisent le tissu osseux ;


 Inversion :

- mise en jeu des cellules mononuclées type macrophages, qui établissent la limite os
nouveau/os ancien (ligne cémentante),

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- recrutement de préostéoblastes qui se différencient en ostéoblastes ;

 Formation :

- apposition de tissu ostéoïde le long de la ligne cémentante,

- minéralisation.

Cette séquence ARIF est suivie par une phase dite de quiescence durant laquelle l'os
nouveau est tapissé par des cellules bordantes.

Fig.1 : Séquence de remodelage de l’os alvéolaire : a. Quiescence ; b. activation ; c. résorption ; d.


inversion ; e. formation. 1. Cellules bordantes ; 2. Préostéoclastes ; 3. Ostéoclaste ; 4. Cellule stromale ;
5.préostéoblastes ; 6. Ostéoblastes.

2) Les réactions tissulaires au cours d’un déplacement dentaire provoqué


(thérapeutique) :

2-1) Les effets immédiats (hydropneumatiques) :

Dès l’application de la force, un déplacement immédiat (initial) est apparent :

• dans un premier temps, il correspond à un phénomène hydraulique : on assiste au


niveau desmodontal une compression des espaces vasculaires avec ischémie (fuite du
sang des vaisseaux vers les tissus voisins). Le ligament est progressivement comprimé
le long de la lame criblée d’un côté (responsable de la sensation de douleur à
l’activation) et il est étiré sur l’autre face de l’alvéole ;

• dans un deuxième temps, on assiste à une déformation de l’os alvéolaire (flexion


alvéolaire) faisant suite à cette compression du desmodonte.

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Fig.2 : Réactions tissulaires provoquées

2-2) Les effets biologiques à court et moyen terme :

2-2-1) Côté pression :

A) Création de la zone hyaline

-Au niveau des zones soumises à de fortes pressions apparaît une dégénérescence
cellulaire due au manque d’apport métabolique et à la compression des fibres de
collagène. Il se produit à ce niveau une nécrose aseptique, cette zone est alors
constituée uniquement des fibres de collagène tassés et au microscope optique a un
aspect vitrifié acellulaire : c’est la zone hyaline.

-Elle débute au bout de 36 heures et dure en moyenne 12 à 15 jours, pendant lesquels


aucun mouvement n’est perceptible (temps de latence). Chez l’adulte ou lors de
l’utilisation de force excessive, elle peut persister 40 jours et plus.

B) Élimination de la zone hyaline :

-Les tissus réagissent à cette nouvelle situation en tentant de recréer un équilibre ; l’os
est résorbé, de manière à restaurer un espace desmodontal voisin de la normale et la
zone hyaline est éliminée et réoccupée par des cellules et des vaisseaux.

Résorption osseuse direct : l’élimination de la zone hyaline se fait à partir des zones
latérales ligamentaires. Deux phases se succèdent dans le temps :

• la résorption latérale directe ; dans laquelle les ostéoclastes autour de la zone hyaline
résorbent la lame criblée ;

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• la résorption frontale directe ; qui se produit après destruction de la zone hyaline,
elle se fait à distance de la zone hyaline dans des zones de moindre pression.

Résorption osseuse indirecte : en regard de la zone hyaline ; l’activité ostéoclastique


est reportée à distance du desmodonte dans les espaces médullaires, riches en cellules.

Les ostéoclastes résorbent le mur alvéolaire, puis la lame criblée, par voie centripète.
À ce stade, le ligament est considérablement élargi et le déplacement dentaire peut
reprendre

C) Reconstruction : après élimination de la zone hyaline, une nouvelle couche de


cément et d’os alvéolaire se dépose et sert d’ancrage aux fibrilles de collagène
néoformées.

Fig.3 : Modifications histologiques au niveau d'une zone comprimée (d'après BARON).


R. L. D. = résorption latérale directe. R. I. = résorption indirecte. H = hyalinisation.
A. C. = apposition compensatrice. Ost.c. = ostéoclastes. Ost.b. = ostéoblastes.
F = direction de la force. e. = émail.

2-2-2) Côté tension :

Effets : Les effets du déplacement mécanique initial de la dent dans son alvéole se
résument à un élargissement desmodontal quantitativement égal au rétrécissement du
côté opposé.

De ce côté du desmodonte, on observe :

• un élargissement des espaces vasculaires ;

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• une orientation générale des faisceaux des fibres dans le sens de la traction.

Réactions : elles sont très proches de celles observées du côté en pression, mais de
sens opposé

Il se produit donc une réorganisation ligamentaire avec une augmentation de la


synthèse fibrillaire et une apposition osseuse d’os fibreux immature (l’ostéoïde) qui
représente la trame organique sur laquelle se déposera ultérieurement la substance
minérale pour donner l’os complet.

3) Les différents types de déplacement dentaire :

3-1) Le mouvement de version :

Le mouvement de version se produit par des appareils mobiles ou fixes.

-Effets : La force exercée par l’appareil pousse la dent contre la crête alvéolaire du
côté opposé à la force et une première zone de pression apparaît dans le desmodonte

-Réactions :

•Au niveau cervical :

- Du côté du déplacement : les fibres desmodontales et le système hydraulique sont


comprimées. Il y aura fréquemment apparition d’une hyalinisation suivie d’une
résorption osseuse indirecte.

- Du côté opposé au déplacement : les fibres sont étirées opposant une résistance
maximum au mouvement dentaire. A ce niveau, on aura une apposition osseuse plus
ou moins rapide selon la nature de la force.

•Au niveau du centre de rotation : les fibres ligamentaires et le système hydraulique


parodontal ne subiront aucunes contraintes.

•Au niveau apical : les phénomènes sont les mêmes qu’au niveau gingival mais dans
le sens inverse.

Fig.4 : mouvement de version

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3-2) Les mouvements de torque et de redressement après version :

Il s’agit de déplacement de la racine alors que la couronne est stabilisée.

Effets : ce mouvement est obtenu en appliquant à la dent un couple de forces au


niveau de la couronne grâce à un dispositif approprié et en maintenant cette couronne
fixe.

Réactions : Le mouvement de redressement après version va induire la formation de


zone de compression très importante à l’apex et dans une moindre mesure au niveau
de la crête alvéolaire.

3-3) Le mouvement de translation :

Effets : ce mouvement correspond à un déplacement de la dent parallèlement à son


grand axe (gression mésiale ou distale, vestibulaire ou linguale) ; la racine se déplace
donc dans la même direction et de la même distance que la couronne.

Fig.5 : mouvement de translation

Réactions : La pression est répartie régulièrement sur toute la surface radiculaire du


côté pression et reste faible. Pour une même force on a une pression relativement
faible par rapport aux pressions rencontrées dans un mouvement de version, ce qui va
permettre de limiter voir d’éviter (selon les auteurs) la hyalinisation, donc une
résorption osseuse directe avec un déplacement continu de la dent.

- Du côté opposé ; les fibres ligamentaires étirées, une apposition osseuse sur toute la
hauteur de l’alvéole du côté ligamentaire et une activité de remodelage osseux du côté
endosté pour essayer de maintenir constante l’épaisseur de l’os alvéolaire.

3-4) Le mouvement d’ingression :

C’est le mouvement qui rencontre le maximum de résistance de la part de la dent.

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Ce déplacement provoque au niveau histologique :

-Un étirement de toutes les fibres ligamentaires

-Une compression du système hydraulique desmodontal

-Une compression de l’os alvéolaire

La zone hyaline est localisée : pour les pluri-radiculées, au sommet du septum inter-
radiculaire et pour les mono-radiculées, à l’apex de la dent.

3-5) Le mouvement d’égression :

C’est le mouvement qui déplace la dent dans le sens de son évolution.

Dans ce mouvement on a uniquement un étirement des fibres desmodontales avec


théoriquement aucune zone de compression, on aura donc un remodelage ligamentaire
associé à une apposition osseuse.

3-6) Le mouvement de rotation :

Ce mouvement correspond à une rotation autour du grand axe de la dent après


l’application d’un couple de force. Trois éléments vont influencer ce déplacement :

- La forme de la racine en section

- Le nombre des racines

- La localisation de l’axe de rotation autour duquel se fait le mouvement

4) Les facteurs influençant le déplacement dentaire :

4-1) Les facteurs biologiques intrinsèques :

4-1-1) Les facteurs généraux :

-L’âge du patient : avec l’âge on observe des modifications quantitatives et


qualitatives des tissus parodontaux qui vont pouvoir influencer les caractéristiques du
déplacement dentaire.

-Les facteurs nutritionnels : une carence en une substance intervenant lors du


déplacement dentaire peut altérer celui-ci. ex : vitamine C, D

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-Les facteurs endocriniens : ex : Les modifications hormonales chez la grossesse ;
augmentant la quantité d’eau dans le ligament qui devient plus compressible

4-1-2) Les facteurs locaux :

-Les caractères morphologiques de la dent : (nombre et longueur des racines)

-La dépulpation : une dent dépulpée se déplace aussi aisément qu'une dent saine, si le
canal est correctement traité et s'il n'existe pas de lésion apicale.

-les tissus parodontaux : l’os alvéolaire (site, densité, hauteur), le desmodonte et l’état
gingival

4-2) Les facteurs extrinsèques :

4-2-1) Les facteurs liés aux dispositifs : en méthode Edgewise, l’objectif


biomécanique est de déplacer les dents en translation, la zone de pression se répartit
sur la totalité de la hauteur de la racine. A l’inverse avec des appareils amovibles,
seules des versions sont réalisées entraînant des pressions plus importantes et limitées
à des zones précises de la racine.

4-2-2) Les facteurs liés aux forces (l’intensité, le rythme d'application et la direction
de la force)

Conclusion

La connaissance des forces utilisables et des réactions histologiques engendrées par le


déplacement dentaire aussi bien physiologique que provoqué va permettre au praticien
de mieux contrôler le déplacement en utilisant des systèmes de forces et des
dispositifs appropriés ne déclenchant pas de réactions pathologiques irréversibles.

Bibliographie

1) Bassigny.F ; Manuel d’orthopédie dento-faciale ; MASSON.1983.

2) Duhart.AM, Bardinet. E ; Biomécanique et notion de force légère ; EMC 23-490-B-


10 ; 1997 ; P.23

3) L. Massif, L. Frapier ; Orthodontie et parodontie, EMC 23-490-A-07 ; P.16

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