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Sara,+1505 5380 1 CE
Sara,+1505 5380 1 CE
au Maroc*
Résumé Hassan
L’article démontre le lien entre le chômage et la pauvreté et propose une Bougrine
solution pour leur élimination. La solution proposée repose sur deux piliers : Laurentian University,
le premier consiste à encourager la création d’emplois dans le secteur privé, Sudbury, Ontario
(Canada) et Université
essentiellement par le biais de l’expansion de crédit aux petits et micro Al Akhawayn, Ifrane
entrepreneurs, alors que le deuxième consiste à utiliser le gouvernement (Maroc)
comme « employeur de dernier ressort », qui devrait alors engager tout le
surplus de travailleurs auprès des organismes du secteur public à travers
une variété de programmes sociaux et de travaux publics. La Banque centrale
jouerait un rôle primordial dans le financement de cette opération, qui aurait * Je tiens à remercier
des effets bénéfiques pour la croissance et le développement du pays. pour leurs précieux
commentaires Phil
O’Hara, Alain Parguez,
Mots-clés Mario Seccareccia, John
Chômage, pauvreté, création d’emplois, crédit, création monétaire, recettes Smithin et Randy Wray.
Je remercie également
de l’Etat, détermination des taux d’intérêt. Houssam Lahrech et
Noureddine Marzoug
pour leur assistance.
Introduction
La pauvreté est généralement considérée comme étant le plus grand mal
social. Au cours de leur histoire moderne, la plupart des pays industrialisés
a utilisé des programmes et des politiques dans le but de réduire l’impact
de la pauvreté sur les couches les plus vulnérables de la société. L’un des
(1) En ce qui concerne le
problèmes urgents à l’ordre du jour du sommet du Millenium des Nations Maroc, le pourcentage de
Unies (New York, 2000) était l’extrême pauvreté en Afrique et dans d’autres la population totale
pays en voie de développement. Une revue des rapports des conférences vivant dans la pauvreté a
augmenté de 13,1 % en
antérieures commanditées par les Nations Unies montre que la réduction 1990-1991 à 19 % en
de la pauvreté a été une préoccupation depuis au moins 1990. La raison 1998-1999 (World
Development Indicators,
d’être de plusieurs organisations internationales est la lutte contre la pauvreté. 2005). Selon la division
Le FMI considère la réduction de la pauvreté comme faisant partie de son des Statistiques des
nouveau mandat et a récemment créé un organe surnommé « la facilité Nations Unies, les
pourcentages de pauvreté
pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance ». Le « rêve » de la des populations rurale et
Banque mondiale est « un monde sans pauvreté ». Pourtant, la pauvreté urbaines sont passés de
demeure un problème majeur dans la plupart des pays en voie de 18 % à 27,2 % et de
7,6 % à 12 %
développement. Elle a même connu des augmentations dans certaines parties respectivement, durant la
du monde (1). même période.
crédit aux couches les plus pauvres. Mais le rôle du micro-crédit tel qu’il
a été pratiqué jusqu’à présent restera limité pour les raisons mentionnées
ci-dessous et pour d’autres que nous développerons plus loin (voir aussi
Hulme and Mosley, 1996 ; Khandker, 1998). De plus, il faut noter qu’avec
les récentes vagues de libéralisation financière et de globalisation, ces
institutions ont été obligées d’adopter des techniques de marché et ont donc
commencé à prêter sur des bases commerciales pour pouvoir survivre (4). (4) Par exemple, El Banco
Même si ces institutions continuent d’octroyer des crédits aux pauvres, les Solidario en Bolivie s’est
transformé d’une
prêts sur des bases purement commerciales ne sont pas la solution pour organisation non
l’élimination de la pauvreté car, comme nous l’avons souligné auparavant, gouvernementale à une
la majorité des pauvres reste exclue (5). Cette exclusion financière des pauvres banque commerciale, et
Grameen Bank au
ne peut être évitée que par l’établissement d’institutions gouvernementales Bangladesh est devenue
à but non lucratif. Nous partons donc de l’idée de base selon laquelle donner une banque à charte par
aux pauvres le financement, l’éducation et la formation nécessaires pour un décret du
gouvernement.
assurer le succès du crédit est une responsabilité publique.
(5) La Banque mondiale
C’est pour cela qu’il incombe au gouvernement de s’assurer que la et les Nations Unies ont
demande de crédit est satisfaite et que la dépense totale au sein de l’économie récemment admis ces
nationale ne tombe pas en-deçà de la pleine utilisation de sa capacité limitations mais il n’y a
aucun changement dans
productive ; faute de quoi, il permettrait l’existence du chômage (voir sur leurs stratégies.
ce point l’explication donnée par Lerner, 1943). Pour atteindre cet objectif,
le gouvernement souverain doit créer une « Banque nationale de crédit »
avec des succursales dans tout le pays pour octroyer des crédits à tous ceux
qui en ont besoin et particulièrement aux pauvres. Il ne s’agit pas ici de
charité ou de « folie de bien-être » social comme les néo-conservateurs
voudraient nous le faire croire. Au contraire, il s’agit d’une initiative qui
montre que le gouvernement a bien le sens des affaires, et ceci parce que :
(i) les prêts doivent être – et seront – remboursés car le gouvernement
possède plus de pouvoir que les institutions informelles ou semi-formelles
lorsqu’il s’agit de collecter les remboursements ;
(ii) grâce au crédit, les pauvres et les chômeurs amélioreront leur niveau
de vie et sortiront de la pauvreté, ce qui leur permettra de participer avec
fierté aux affaires communautaires ;
(iii) le gouvernement ne sera pas tant préoccupé par les questions
d’assistance sociale et les problèmes associés au chômage et à la pauvreté.
Il pourra donc allouer plus d’énergies et de ressources à la poursuite d’autres
objectifs nobles (recherche scientifique, développement des facultés
artistiques et culturelles des citoyens, etc.).
Maroc France Maroc France Maroc France Maroc France Maroc France
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1 000 habitants
mêmes règles que les décisions prises par les agents individuels. Equilibrer
le budget signifie cependant que le gouvernement doit accepter l’austérité
comme ligne de conduite et, par conséquent abandonner les politiques
économiques visant à atteindre le plein emploi et la justice sociale. La
conclusion servant souvent de recommandation de politique économique
à la fois pour les pays développés et les pays en développement est alors
que, puisqu’il y a de fortes raisons politiques et économiques justifiant à
la fois les contraintes sur l’utilisation de la dette et de la création monétaire
et les limites de l’utilisation d’une imposition accrue « pour augmenter le
revenu du gouvernement », la « stratégie interventionniste » de croissance
économique est intenable et doit être abandonnée. Cette conception est
fondée sur une mauvaise compréhension sérieuse et dangereuse des finances
publiques et du rôle de la monnaie dans les économies modernes. Nous
montrerons dans cet essai pourquoi cette conception est complètement
erronée et donnerons un exposé de notre approche qui est fondamentalement
différente.
Selon le point de vue dominant, les impôts sont nécessaires au financement
de l’activité du secteur public et donc un vaste secteur public nécessiterait
des impôts plus élevés. Ces derniers sont à leur tour censés diminuer le
rendement net de l’investissement privé, décourageant ainsi des projets
(12) Lerner (1943, d’investissement risqués (12). On dit également que des impôts élevés
p. 45-46) a démontré que découragent l’épargne individuelle et poussent les ménages à réduire le temps
c’est inexact.
de travail. Pour toutes ces raisons, ils sont considérés comme nuisibles à
la croissance économique. Les partisans de cette conception militent par
conséquent en faveur d’un secteur public réduit, ce qui signifie une
implication plus faible du gouvernement dans l’activité économique et un
rôle plus important du secteur privé (c’est-à-dire la privatisation des
entreprises publiques et des services publics tels que la santé, l’éducation,
(13) En plus de la etc.) (13).
commercialisation des Cette conception pose plusieurs problèmes que nous présenterons sous
services de santé et de
l’éducation, le forme de commentaires généraux avant de s’attaquer aux fondements
gouvernement marocain a théoriques de l’approche elle-même. Premièrement, les impôts ne sont
déjà procédé à la absolument pas nécessaires au financement des dépenses gouvernementales.
privatisation d’une
dizaine d’entreprises Au niveau macroéconomique, la fonction première des impôts n’est pas de
publiques durant les financer les dépenses du gouvernement, mais plutôt de réguler l’économie
vingt dernières années. en prévenant l’inflation (quand la dépense privée est trop élevée) et le
chômage (quand la dépense privée est trop faible).
Deuxièmement, puisque les impôts sont considérés comme la seule source
légitime des revenus du gouvernement et puisqu’ils sont censés être maintenus
le plus bas possible, les décideurs politiques s’abstiennent d’engager des
dépenses publiques de tous ordres comprenant les programmes sociaux et
les projets d’infrastructure. Cette situation qui prévaut dans de nombreux
pays en développement, y compris le Maroc, provient souvent des directives
des institutions internationales telles que la Banque mondiale et le Fonds
comme le font les Pour clarifier encore plus notre analyse, nous revenons sur les
gouvernements
municipaux. Dans ce
implications du déficit (surplus) public. Comme nous l’avons déjà
contexte, on doit noter mentionné, un déficit public augmente la masse monétaie (ou richesse) reçue
que les Etats-membres de par le secteur privé pour les services rendus au gouvernement. Lorsque les
l’Union monétaire
européenne ont
chèques sont déposés par les citoyens (individus ou entreprises) sur leurs
volontairement choisi ce comptes bancaires (avec les banques commerciales), le bilan de ces dernières
statut “municipal” dans le est augmenté par le même montant du côté du passif (dû aux dépositaires)
souci de faire valoir les
principes néoclassiques
et du côté de l’actif (puisque les banques commerciales détiennent
qui gouvernent le traité maintenant la monnaie de la banque centrale). Il s’ensuit que les réserves
de Maastricht. D’autres des banques commerciales avec la banque centrale augmentent.
voient en cette décision
Contrairement aux bons du gouvernement, ces réserves (monnaie du
une manière de tordre la
réalité pour la faire gouvernement) ne paient pas d’intérêt ou seulement un intérêt négligeable.
correspondre à la théorie. Puisque les banques cherchent à faire du profit, elles ne voudraient pas détenir
de fonds qui ne génèrent aucun revenu (ou un revenu négligeable). Lorsque
les banques commerciales chercheront à se débarrasser de ces fonds, elles
les échangeront contre des bons du Trésor, ce qui augmentera la demande
pour ces derniers. Cependant, si le gouvernement choisit de ne pas émettre
de nouveaux bons, leur prix augmentera, et le taux d’intérêt diminuera.
On obtiendra le même résultat si les banques ayant un excès de réserves
cherchent à les prêter sur le marché des fonds (marché interbancaire). Il
est donc évident qu’un déficit budgétaire aboutit à un excès de réserves dans
le système bancaire et forcera le taux d’intérêt au jour le jour à la baisse,
alors qu’un surplus donnera le résultat contraire. Par ailleurs, si le Trésor
choisit d’émettre de nouveaux bons, il obtiendra en contrepartie les réserves
excédentaires des banques commerciales et par conséquent empêchera le
taux d’intérêt au jour le jour de baisser au-delà des limites pré-établies. Il
est donc clair que, puisque les banques commerciales préfèrent des actifs
produisant des revenus (des bons) et que le Trésor est en position de décider
du taux d’intérêt qu’il paie sur ses bons, la banque centrale peut contrôler
le taux d’intérêt en contrôlant l’émission des bons du Trésor. La vente (et
l’achat) des bons du Trésor (les opérations d’open market) servent donc à
gérer les réserves bancaires (c’est-à-dire la liquidité) pour des fins de contrôle
du taux d’intérêt et non pas à financer les dépenses de l’Etat.
Il n’est un secret pour personne que des taux d’intérêt élevés
augmentent le revenu (et la richesse) des rentiers aux dépens des autres
groupes de la société. Les effets négatifs des taux d’intérêt élevés sont connus
et peuvent être résumés ainsi :
(i) ils baissent la valeur des actifs détenus par les ménages et les entreprises ;
(ii) ils augmentent le coût de l’emprunt et par conséquent réduisent la
marge des profits des entreprises, ce qui diminue les opportunités d’expansion
et de création d’emplois à travers de nouveaux investissements ;
(iii) ils découragent les ménages qui cherchent à emprunter des fonds
pour l’acquisition d’actifs (maison, etc.) ou pour lancer de nouvelles affaires,
ce qui limite leurs possibilités d’améliorer leur richesse et leur bien-être.
Références bibliographiques
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