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AMIBIASE HEPATIQUE

Cours M1
Pr SORO Dramane
UFR SMA Université FHB
Service d’Hépato-Gastroentérologie CHU Cocody
Objectifs
1- Définir l’amibiase hépatique
2- Décrire la pathogénie de l’amibiase hépatique
3- Décrire la triade de FONTAN
4- Enumérer 02 anomalies biologiques
d’orientation et 02 examens de certitude de l’AH.
5- Citer 03 principales complications de l’AH.
6- Prescrire le traitement d’un abcès amibien du
foie collecté non compliqué
7- Enumérer 03 indications de la chirurgie
Introduction
L’amibiase est une infection du tube
digestif de l’homme due à un
protozoaire, Entamoeba histolytica.
La forme mobile du parasite est un
organisme saprophyte du côlon où il se
multiplie.
Ce protozoaire est responsable de l’amibiase
invasive qui est fréquente dans les pays en
développement.
Introduction
L’invasion de la muqueuse colique par les
souches pathogènes entraine un syndrome
dysentérique et le passage dans la circulation
sanguine peut donner naissance à des lésions
extra intestinales, en particulier les abcès
hépatiques.
Ces derniers constituent une complication
pouvant être mortelle et qui nécessite un
diagnostic et un traitement rapides.
I. Généralités

I.1. – Définition
• L’amibiase hépatique est due à l’action

nécrosante dans le foie de Entamoeba

histolytica responsable de suppuration


développée dans une cavité néoformée.
• L’atteinte hépatique est généralement observée alors que
l’amibiase intestinale est quiescente.
I. Généralités
I.2 - Epidémiologie
• Amibiase invasive : toujours un problème majeur
de santé publique en Afrique, en Asie et en
Amérique Latine.
• Amibiase hépatique surtout chez l’Homme jeune.
• Nombre de cas sévères faible dans la plupart des
pays industrialisés.
• Au Japon des cas d’amibiase invasive due à
E.histolytica ne sont pas rares chez les
homosexuels masculins.
I. Généralités
I.2 - Epidémiologie
• En zone d’endémie, la maladie est habituellement
permanente probablement en rapport avec des
réinfestations constantes.
• Amibiase représente la 3ème cause de décès par
maladie parasitaire après le paludisme et la
bilharziose.
• En 1984, 40 millions d’individus étaient atteints
d’une colite invalidante ou d’abcès hépatiques et au
moins 40.000 décès étaient imputables à l’amibiase,
la plupart en raison d’abcès hépatiques.
I. Généralités
I.2 - Epidémiologie
• Mode de transmission : aliments souillés par Kystes
d’E. histolytica et contamination intra individuelle.

• Transmission directe intra individuelle par voie féco


orale favorisée en zone d’endémie par le bas niveau
de vie, la surpopulation et une mauvaise hygiène.

• Contamination intra familiale mise en évidence par


l’agrégation des cas familiaux dans plusieurs études.
I. Généralités
I.3 - Pathogénie
• Certains sujets peuvent présenter une amibiase
symptomatique dite invasive.
• Le trophozoïte, forme mobile d’E.histolytica en
envahissant la muqueuse colique produit, soit un
syndrome dysentérique, soit une amoebome.
• Les trophozoïtes en grand nombre qui gagnent le
foie par une voie portale peuvent conduire à
l’amibiase hépatique.
• L’ »abcès » amibien du foie surviendrait chez 2 %
des adultes infectés par E.histolytica.
I. Généralités
I.3 - Pathogénie
• Mécanisme des lésions hépatiques dépendent de la
relation hôte-parasite encore insuffisamment comprise
chez l’homme.
• Inoculation hépatique par voie portale chez le hamster
a montré les étapes suivantes :
> microscopiquement, un trophozoïte unique est
entouré par des polynucléaires ;
> la lyse des polynucléaires au voisinage des amibes
déclenche un processus de nécrose focale du foie et une
réaction granulomateuse;
I. Généralités
I.3 - Pathogénie
> extension des lésions provoque la nécrose des
granulomes, ce qui entraîne le remplacement
progressif du parenchyme hépatique par la
nécrose;
> les hépatocytes adjacents sont le siège de
lésions dégénératives conduisant à la nécrose;
> les lésions peuvent prendre l’aspect de vastes
zones de nécrose liquéfiée entourées d’une mince
capsule conjonctive;
I. Généralités
I.3 - Pathogénie

> la formation d’abcès hépatique par les


trophozoïtes d’E. Histolytica n’est pas liée à la
lyse directe des hépatocytes, mais plutôt à
l’accumulation et à la nécrose des polynucléaires
et des macrophages présents autour des amibes.
Conclusion
I. Généralités
I.4 – Anatomie pathologique
• Une atteinte intestinale plus ou moins
lointaine, oubliée voire méconnue car
infraclinique précède toujours l’atteinte
hépatique.
• Le délai d’apparition entre les manifestations
intestinales et le début de la localisation
hépatique est très variable (environ 10 mois
à 5 à 10 ans).
• La concomitance est rare.
I. Généralités
I.4 – Anatomie pathologique
Constitution des lésions

• L’embol amibien thrombose les veinules


portes interlobulaires et crée une nécrose
focale selon 2 mécanismes :

> nécrose ischémique ;

> nécrose cytolytique de contact due au


pouvoir enzymatique.
I. Généralités
I.4 – Anatomie pathologique
Constitution des lésions

• Lésion initiale de quelques millimètres de


diamètre appelée :

« granulome primaire » de Grall;

« ilot nécrotique primitif » de Palmer;

« élément nécrotique élémentaire » de L. Cornet


et R. Loubière.
I. Généralités
I.4 – Anatomie pathologique
Constitution des lésions

• Cette lésion primaire n’est vue qu’exceptionnellement à


l’état isolée mais peut être retrouvée dans des
territoires adjacents à un abcès déjà constitué.

• Elle est formée d’une magma nécrotico inflammatoire


contenant d’assez nombreuses hématies et bordée
directement par du parenchyme hépatique à peine
altéré par un liseré inflammatoire.
I. Généralités
I.4 – Anatomie pathologique
Constitution des lésions

• L’extension et la confluence de ces lésions primaires


aboutissent à la constitution d’une cavité sans paroi
propre.

• A cette nécrose aseptique s’associent des


phénomènes exsudatifs très importants qui
augmentent la taille des abcès refoulant le
parenchyme hépatique.
I. Généralités
I.4 – Anatomie pathologique
Constitution des lésions

• Le foyer de nécrose n’est pas en lui-même responsable


de l’hépatomégalie.
• L’hépatomégalie est due à une congestion active, à la
réaction inflammatoire autour de la lésion et à la
vasodilation diffuse des sinusoïdes.
• A la période d’état ou stade de collection, la paroi perd
son caractère anfractueux et devient plus régulière.
I. Généralités
I.4 – Anatomie pathologique
Constitution des lésions

• Le « pus » se modifie également, de rouge brun lie-de-


vin ou chocolat à la période d’état, il devient café au lait
ou jaunâtre : c’est le « pus mort » de Chauffard et Ravaut.

• Le reste du parenchyme hépatique est sain. L’amibiase


hépatique est bien une affection localisée.

• La guérison est une restitution ad integrum du foie.


II. Signes
II.1- Type de description : la forme aiguë classique.
Elle associe inégalement 3 signes = triade de FONTAN.

– Douleur: spontanée ou provoquée


siège dans l’HCD ou à la base de l’hémithorax droit
irradie à l’épaule et à l’aisselle droite «en bretelle trop
serrée», à l’épigastre, dans le dos, voire à tout l’abdomen.
intensité variable allant de la simple pesanteur à la douleur
syncopale, inhibant l’inspiration profonde.
constante à recrudescence nocturne dans 78 % des cas.
entraine une posture antalgique en «chien de fusil» sur le
côté atteint dans 72 % des cas.
II. Signes
II.1- Type de description : la forme aiguë classique.

– Fièvre:

• constante ou présente dans 75 à 96 % des cas, elle

est souvent secondaire à l’hépatalgie et apparaît en 2 à 3


jours.

• elle est souvent désarticulée, oscillant généralement

entre 38°-39° dépassant rarement 40° et réagit

rapidement au traitement spécifique (57% des

apyrexies sont obtenues en 48 heures).


II. Signes
II.1- Type de description : la forme aiguë classique.

– Hépatomégalie: signe capital, mais moins constant

de la triade (localisation supérieure et au début).

surface lisse, consistance ferme, bord inférieur mousse,

douloureuse à la palpation appuyée et à l’ébranlement

provoquée par la manœuvre de Bordes-Blanc et Siguier

Cette manœuvre déclenche une douleur profonde, vive, dite


« douleur à l’ébranlement » qui peut aussi être déclenchée
en décubitus latéral gauche ou sur le malade assis.
II. Signes
II.1- Type de description : la forme aiguë classique.

– Signes cliniques associés : se voient volontiers dans les formes


évoluées :

• anorexie globale d’aggravation progressive ;

• nausées et vomissements ;

• céphalées souvent présentes dès le début ;

• syndrome dysentérique aiguë ou une diarrhée ;

• signes de la série thoracique pleuraux ou pulmonaires :


douleurs thoraciques, toux, dyspnée ;

• ictère peut se voir.


II. Signes
II.1- Type de description : la forme aiguë classique.
– Examens complémentaires
Biologie d’orientation
• NFS : anémie modérée en rapport avec un trouble du
métabolisme du fer; hyperleucocytose à polynucléose
neutrophile; absence d’hyperéosinophilie.
• VS élevée; CRP élevée; Herperfibrinémie courante.
• Bilan hépatique normal ou peu perturbé
(transaminases, phosphatases, bilirubinémie,
electrophorèse des protéines sériques).
II. Signes
II.1- Type de description : la forme aiguë classique.
– Examens complémentaires
Biologie de certitude
• La sérologie amibienne positive en IFI
(ImmunoFluorescence Indirecte). Hémaglutination
indirecte et l’Elisa sont les plus utilisées et atteignent
100 % de positivité, si elles sont répétées au cours de
l’affection.
• La ponction à visée diagnostique et/ou thérapeutique
ramène un pus chocolat inodore bactériologiquement
stérile.
II. Signes
II.1- Type de description : la forme aiguë classique.
– Examens complémentaires
Imagérie
• La radiographie thoracique va montrer :
> une surélévation de la coupole diaphragmatique droite
d’une manière globale, témoin de l’hépatomégalie avec
immobilité ou hypocinésie de celle-ci.
> plus évocateur est une déformation en « brioche », en
« soleil couchant », en « toit de mosquée » vue de face.
> une réaction pleurale, simple comblement du cul-de-
sac costodiaphragmatique est assez fréquente.
II. Signes
II.1- Type de description : la forme aiguë classique.
– Examens complémentaires
Imagérie: siège, volume et évolution
• Echotomographie :
Montre une ou plusieurs zones d’échostructure liquidienne
(hypoéchogène ou anechogène) ou mixte, hétérogène,
traduisant la nécrose.
• Tomodensitométrie
Montre une ou plusieurs zones hypodenses ne se
rehaussant pas après injection du produit de contraste.
• IRM: n’apporte pas d’informations supplémentaires.
II. Signes
II.1- Type de description : la forme aiguë classique.
– Evolution
Emaillée de complications si la prise en charge du patient
n’est pas effectuée rapidement et efficacement.
Principales complications: la rupture et la surinfection.
• Épanchement pleural : toux sèche, douleurs thoraciques
et dyspnée dont la sévérité est fonction de l’abondance.
• Rupture intra bronchique : toux brutale, vomique
chocolat.
• Rupture dans la cavité pleurale : rare, douleur aiguë,
dyspnée sévère et état de choc.
II. Signes
II.1- Type de description : la forme aiguë classique.
– Evolution
• Péricardite : en cas d’atteinte du lobe gauche du foie,
douleur précordiale intense avec anxiété dyspnée,
tachycardie, turgescence des veines jugulaires
assourdissement des BDC, parfois pouls paradoxal et état de
choc.
• Rupture intra abdominale : syndrome péritonéal de début
brutal.
• Rupture rare dans la vésicule biliaire, l’estomac le
duodénum, le côlon ou la VCI.
• Fistulisation à la peau : exceptionnelle.
II. Signes
II.2- Formes cliniques
– Formes symptomatiques
• Formes fébriles pures: rares 3 à 12%, début brutal
fièvre à 39°-40° apparemment isolée résistante aux
antibiotiques évoquant un suppuration profonde.
• Formes silencieuses ou frustes : apyrétiques 2 à 3 %
par compression des VB; contexte pseudo
angiocholitique. Atteinte hépato cellulaire dans les très
gros abcès supérieurs à 15-22 cm de diamètre et lors
des abcès multiples.
II. Signes
II.2- Formes cliniques
– Formes symptomatiques
• Formes neurologiques : environ 7%, troubles de la
conscience et changement de caractère, coma
profond avec flapping tremor.
• Formes rénales rares : 1 à 3%, tuméfaction de l’HCD
et du flanc droit simulant un gros rein ou tableau de
phlegmon péri néphrétique avec pyurie associée à
des signes généraux de suppuration profonde.
• Formes du nourrisson et du jeune enfant : atteinte
profonde de l’état général.
II. Signes
II.2- Formes cliniques
– Formes symptomatiques
• Formes compliquées (Cf = évolution)
- Formes topographiques
• Pôle supérieur droit : symptomatologie pleuro pulmonaire droite.
• Abcès latéral droit simule une tumeur de l’HCD ou du flanc droit.
• Abcès antérieur droit: masse fluctuante de l’HCD et de
l’épigastre.
• Abcès postérieur droit : masse lombaire fébrile
• Abcès central : formes fébriles pures souvent
• Abcès de lobe gauche : tumeur épigastrique, syndrome de la
base pulmonaire gauche, signes péricardiques.
III.1- Diagnostic positif
CDD: - douleur de l’HCD, fièvre, masse abdominale
- fortuite (échographie abdominale)
- complications
Anamnèse: ATCD et facteurs de risque
Examen: triade de FONTAN
Biologie: Hyperleucocytose à PNN, CRP ou VS élevée
Sérologie amibienne positive +++
Echographie abdominale: une ou plusieurs zones
hypoéchogène ou anechogène ou mixte, hétérogène
Ponction d’abcès ramène du pus chocolat inodore et
stérile
III.2- Diagnostic différentiel
Devant un gros foie douloureux et fébrile:
• CPF: dans sa forme pseudo-abcédée, échec du
traitement au Metronidazole, sérologie amibienne
négative, AFP élevée L’échotomagraphie est
l’examen qui différencie le mieux une tumeur
liquidienne, d’une tumeur pleine.
• Abcès à pyogènes: sérologie amibienne négative, la
ponction de l’abcès ramène un pus jaunâtre ou
verdâtre et la culture retrouve le germe.
• Kyste hydatique du foie surinfecté: erreur grave
quand elle conduit à une ponction du kyste
IV. Traitement
1- Buts

Calmer la douleur

Obtenir l’apyrexie

Eviter la survenue des complications


2- Moyens

Médicaux

chirurgicaux

Préventifs
IV. Traitement
2- Moyens médicaux

- Amoebicides de contact

qui ne traversent pas la paroi colique et vont


détruire les formes dispar.

• Arsenicaux (Bémarsal®) cp/gel 0,50g 4cp 10j.

• Oxyquinoléines iodées (Direxiode®) cp 0,21g

• Oxyquinoléines non iodées (Intétrix®) 2 gel x 2/j

• Amides (Furamide®) cp 0,50g 3cp/J pdt 10J


IV. Traitement
2- Moyens médicaux

- Amoebicides tissulaires
• Métronidazole (Flagyl®) comprimé 250 mg; 500 mg,
flacon 0,50g pour 100 ml en perfusion, 30-40 mg/kg/j
pendant 10 Jours
• Autres dérivés de l’imidazole.

Nimorazole ou Nitrimidazine (Naxogyn®).


Secnidazole (Flagentyl®) cp 0,50g 40-50mg/kg 1-5 J.
Tinidazole (Fasigyn®).
Ornidazole (Tibéral®).
IV. Traitement
2- Moyens instrumentaux
- Ponction échoguidée
• Retire un « pus » dont les caractères
macroscopiques et biologiques peuvent être
analysés (couleur, odeur, bactériologie).
• Peut être répétée.
• Permet le lavage aspiration de la cavité au
sérum physiologique après retrait du « pus ».
• Diminue la douleur et prévient la rupture.
IV. Traitement
2- Moyens chirurgicaux

- Drainage continue de l’abcès

• Consiste à placer chirurgicalement un drain


tubulaire dans la cavité de l’abcès.

• Permet d’évacuer l’abcès en totalité, d’extraire


des séquestres hépatiques dépendant de la
paroi.
IV. Traitement
3- Indications
• Traitement médical : toujours entrepris
Métronidazole comprimés ou par perfusion si le
malade vomit ou ses dérivés
à la dose de 1,5g/j chez l’adulte,
30 à 45 mg/kg/j chez l’enfant
pendant 7 à 10 jours.
• Amélioration en général dès le 3è jour.
• La poche de l’abcès disparait totalement en 6 à
18 mois.
IV. Traitement
3- Indications
• Traitement chirurgical ne traite que la cavité et
non pas l’amibiase hépatique et on lui associe
toujours un traitement médical. Indiquée:
> collection prête à se rompre;
> signes de « menace de rupture » (défense
généralisée ou localisée, dyspnée, toux etc…);
> coque scléreuse épaisse d’abcès enkysté;
> compression de la VCI ou des voies biliaires;
> formes compliquées ou les migrations.
IV. Traitement
4- Résultats
Bons.
5- Pronostic
Bon en l’absence de certains facteurs:
- intoxication éthylique;
- dénutrition sévère;
- âge supérieur à 50 ans;
- coma associé à une ascite ou un ictère;
- syndrome péritonéal;
- syndrome toxique.
IV. Traitement
5- Prophylaxie
- Générale
• dépister et traiter les porteurs sains de kystes,
surtout dans les collectivités et parmi les
personnes manipulant les aliments
• aménagement de latrines et réglementation de
l’utilisation agricole de l’engrais humain
• lutte contre les mouches
• épuration des eaux de boisson
- Individuelle: règles d’hygiène
Conclusion
• Si l’amibiase hépatique non compliquée a
un traitement efficace et un bon pronostic,
ce n’est pas le cas de l’amibiase hépatique
compliquée dont le pronostic est encore
sévère.
• Maladie du péril fécal
• Meilleur traitement = respect des règles
d’hygiène.

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