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Université Abdelmalek Essaâdi

Ecole Nationale de Commerce et de Gestion

‫المدرسة الوطنية للتجارة والتسيير‬


Adresse: BP1255, Tanger Principal, Tél. : 0539-31-34-87/88/89,

Fax : 0539-31-34-93- Tanger

Travail de recherche

Niveau : 5ème année - Semestre 09


Filière : Commerce International

Sous le thème :

INTELLIGENCE TERRITORIALE

Réalisé par : MAIGA Diakaridia


et DIARRA Amadou Baba

Encadré par:
M. ABAKOUY Mostafa

Année universitaire 2017-2018


SOMMAIRE

Introduction générale

Partie I:
A- Concepts et théories
B- Enjeux de l’Intelligence Territoriale

Partie II :
A- Processus de mise en place de l’IT
B- Cas de la région Midi-Pyrénées

Conclusion

1
Introduction générale :

Face à un monde en constante évolution tant sur le plan économique, technologique,


que sociodémographique, conjuguée avec un marché mondial de plus en plus
concurrentiel d’autant plus que l’exigence de ses acteurs croissent et s’intensifient, et
tout cela ajouté aux nouvelles préoccupations d'aménagement territorial et de
développement durable ; les territoires, à l’image des entreprises, sont appelés eux
aussi à se munir d'un dispositif d’intelligence économique qui va s’articuler autour
des enjeux territoriaux et donner naissance ainsi à ce que l’on peut qualifier
d’intelligence territoriale.

Au regard des grands défis et mutations majeures de notre ère, cet outil d’aide à la
décision, de veille, d’influence, de protection pour les collectivités ; se présente
comme étant un des leviers de développement économique et industriel d’un territoire,
que ce soit dans le cadre d’un pôle de compétitivité ou encore d’excellence
territoriale.

Ceci étant, qu'entendons-nous donc par intelligence territoriale ? A quels enjeux


répond-elle? Dans quelle mesure pourrions-nous éventuellement la mettre au service
du développement local? Tant d’interrogations en perspective auxquelles nous
tenterons d’apporter des éléments de réponses dans le présent travail de recherche
composé de deux grandes parties : la première dédiée aux concepts et enjeux relatifs à
l’intelligence territoriale, la seconde quant à elle, portera sur sa mise en œuvre
concrète sur un territoire donné.

2
Partie I : Concepts et Enjeux

A. Intelligence territoriale: définitions de concepts

La notion d’IT donne lieu à des définitions variées mais l’ensemble des experts s’accorde
sur les fondamentaux. Le concept d’Intelligence Territoriale (IT) se définit généralement
comme la mise en application des principes de l’Intelligence Economique, dans le cadre
d’une action publique, au service du développement économique et industriel d’un
territoire. L’IT se traduit par « l’organisation innovante, mutualisée et en réseau, de
l’ensemble des informations et connaissances utiles au développement, à la
3
compétitivité, à l’attractivité d’un territoire, collectivement et pour chacun de ses
acteurs.
L’intelligence territoriale se propose de relier la veille et l’action publique au service du
développement économique et industriel d’un territoire, dans le cadre d’un pôle de
compétitivité ou d’excellence territoriale par exemple.

Toutefois, on peut présenter l’IT sous deux approches : descendante et ascendante.


La première est la déclinaison directe, au plan local, du concept d’IE tel qu’il a été défini
précédemment. La seconde pense la recomposition locale par la mise en synergie
d’acteurs partageant des valeurs et une finalité communes. Entre les deux, une
divergence profonde porte sur la vision du développement territorial. Dans sa première
acception, l’IT a pour objectif la compétitivité-attractivité du territoire. Dans la seconde,
elle s’accorde avec une vision plus large et complexe du développement incluant non
seulement les principes du développement durable mais s’inscrivant aussi et surtout
dans une perspective de réalisation du bien être humain.

L’intelligence territoriale comme prolongement de la politique nationale


d’intelligence économique

Dans une première acception, l’intelligence territoriale n’est qu’une déclinaison, à


l’échelle locale, de la politique d’IE consistant à restaurer la compétitivité de la nation.
Les cibles premières d’une telle politique sont les PME/PMI présentes sur les territoires.
Il s’agit d’une part, de sensibiliser les PME/PMI aux risques et menaces portées par leur
environnement et les inciter à se protéger en menant une politique systématique de
gestion de brevets, de protection à l’égard de la cybercriminalité, l’espionnage industriel,
le pillage technologique ou la désinformation. Il s’agit aussi d’améliorer les
performances commerciales et les stratégies d’exportation des PME. En termes concrets,
cela peut se traduire de diverses façons. Tout d’abord, cela peut se traduire par un
accompagnement des entreprises dans leur stratégie de conquête de marchés
internationaux (en aidant à la prospection de marchés nouveaux par exemple). En
aidant à la visibilité à l’international, l’IT espère ainsi contribuer à l’espoir de limiter les
désindustrialisations et délocalisations. L’application territoriale de l’IE est étroitement
associée à ce que l’on appelle aujourd’hui le « marketing territorial ».

La mise en œuvre d’une démarche d’IT peut enfin consister à favoriser la mise en place
de réseaux de partenariats entre le public et le privé dans l’optique d’améliorer la
circulation de l’information stratégique du premier vers le second. Selon Raymond
Peutrat, l’IT consiste à organiser la synergie des pouvoirs publics à l’échelon local et la
coopération public/privé au profit de la puissance nationale, laquelle passe aujourd’hui
par la prospérité économique.

Cette vision institutionnelle de l’intelligence territoriale conçoit le territoire comme un


échelon méso-économique et un espace d’application d’une politique déconcentrée
d’intelligence économique. Les territoires sont ici appréhendés comme espace de
continuité de la politique d’intelligence économique menée au plan national : volet
défensif pour contrer les menaces traditionnelles et les nouveaux risques ou bien
protéger le patrimoine matériel et immatériel ; volet offensif pour donner à l’entreprise
les moyens de se développer et de rester compétitive.

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Cette démarche globale est référée à l’intelligence économique avec, pour échelle
pertinente, la seule prise en compte de la nation. Dans un contexte de guerre
économique, le rôle de « l’État stratège » est ainsi revendiqué pour protéger l’industrie
nationale. Les partisans de cette approche vont même jusqu’à prôner un patriotisme
économique. Notons qu’en défendant un tel principe, ils renouent avec une conception
interventionniste de l’État dans les relations économiques internationales – là où
précisément la mondialisation a progressivement évincé sa légitimité.

Sur un plan administratif, l’application territoriale de la politique d’intelligence


économique est coordonnée par chaque préfecture de région et doit se traduire par un «
schéma régional d’intelligence économique », reposant sur la création d’instances
nouvelles chargées de mettre en œuvre, à l’échelle locale, le dispositif national d’IE. Le
chef d’orchestre de cette politique est donc clairement l’État déconcentré. Ce dernier est
accompagné par tous les services de l’État qui, au niveau régional, sont en liaison directe
avec les entreprises. Il est aussi souligné le rôle crucial d’autres institutions locales au
premier rang desquelles on trouve les chambres consulaires, les fédérations
professionnelles, bien encore la gendarmerie nationale.

L’intelligence territoriale comme co-construction de ressources selon une logique


coopérative

La première approche de l’intelligence territoriale est née du champ institutionnel et des


enjeux économiques des nations. La seconde approche est issue de la transdisciplinarité
(économie, géographie, information et communication). Elle considère le territoire non
pas comme un espace d’application de politique déconcentrée d’intelligence
économique, mais comme un lieu d’émergence d’une nouvelle conception de la
gouvernance locale dans le cadre du développement durable. L’intelligence territoriale
prend ainsi pour principal objet le développement durable et équitable de la collectivité
territoriale. Elle participe d’une vision du territoire comme espace de valorisation de
ressources construites selon une logique endogène et favorise le partage de
l’information selon une logique coopérative. Yann Bertacchini (2006) assimile cette
acception de l’intelligence territoriale à un phénomène d’appropriation de ressources du
territoire puis de transfert de compétences entre des catégories d’acteurs locaux de
cultures différentes.

Les territoires ne sont plus considérés comme des réceptacles passifs mais comme des
ressorts locaux de dynamisme dans une nouvelle approche du développement local ou
territorial. A un rôle passif de pourvoyeur de ressources, les territoires deviennent actifs
et acteurs de leur propre développement. Dans le contexte actuel d’une concurrence
mondialisée, L’efficacité est avant tout relationnelle : l’écosystème relationnel est
devenu le facteur clé de performance. Le territoire devient ainsi le fournisseur privilégié
de ces ressources relationnelles. En effet, dans une économie changeante,
l’apprentissage rapide est la seule garantie de survie. Celui-ci repose sur la capacité des
acteurs à partager des ressources informationnelles. Or, la proximité permet le partage
de connaissances tacites, peu formalisées, non officielles comme l’ont montré de
nombreux travaux sur les clusters (Bresh, Malerba, 2005). A noter que l’un des aspects
essentiels de ces apprentissages est la confiance entre les acteurs qui permet en
particulier de valider des informations sans avoir à valider au préalable les
informateurs. Cette mise en confiance dépend d’un sentiment d’appartenance ou

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d’appropriation territoriale qui participe d’un phénomène de représentation
symbolique. Pour que les acteurs locaux pensent leur rapport au territoire par
l’intégration progressive d’un sentiment local, il est nécessaire qu’émerge un espace
public local dont ils se sentent responsables et pour lequel ils s’engagent dans un projet
partagé.

Le patrimoine du territoire est ici apprécié comme une identité propre qui se construit
avec le temps. Les spécificités des territoires sont autant d’avantages comparatifs qui
participent à la création de nouvelles formes de concurrence. Aux ressources matérielles
issues de l’espace physique (terre, main d’œuvre et capital) se combinent des ressources
construites liées à l’espace construit (savoir, compétence, organisation). La valorisation
de ces dernières participe de la valorisation d’un territoire différencié. Les ressources
construites sont des avantages clés indépendants des ressources matérielles. Elles
autorisent un refus du déterminisme par la capacité du territoire à réagir et inventer des
solutions nouvelles aux défis rencontrés. Le territoire émerge ainsi en qualité d’acteur
du développement par la mise en valeur de ses facteurs de dynamisme. Le territoire
devient une organisation au sens d’une entité socio-économique construite. Il est le
résultat émergent de multiples interactions entre les acteurs hétérogènes composant ce
territoire, donnant naissance à tout un ensemble de ressources construites ». Le
renforcement de ces ressources crée l’identité du territoire qui, de fait, devient de moins
en moins substituable.

Dans cette approche du territoire, l’intelligence territoriale consiste à considérer les


individus insérés dans un territoire comme les acteurs clé d’un dynamisme local réussi.
Pour être endogène, le développement territorial doit s’appuyer sur des initiatives ou
projets locaux reposant sur des logiques de coordination hors marché vers l’élaboration
de ressources construites. La coopération entre acteurs hétérogènes devient une
modalité d’interaction privilégiée dans une dynamique d’apprentissage collectif et
permet une mutualisation voire une valorisation de connaissances auparavant diffuses.
L’IT définit ainsi un mode de gouvernance participatif selon une logique ascendante. Il se
traduit par une démarche d’information et de communication territoriale, de création de
contenus territoriaux innovants susceptible de favoriser la collaboration et l’adhésion
aux projets innovants vers l’émergence et la valorisation d’un capital formel territorial.
Yann Bertacchini (2004, 3) définit cette conception de l’IT comme un processus
informationnel et anthropologique initié par les acteurs locaux, présents physiquement
ou au moyen des TIC, qui s’approprient les ressources locales et en créent de nouvelles
afin de développer des projets endogènes. Les systèmes d’information territoriaux (SIT)
jouent alors un rôle crucial en offrant la possibilité de création d’un environnement
d’apprentissage propice au développement territorial endogène ainsi que la possibilité
de mutualisation et de diffusion de connaissances multiples et transdisciplinaires. Dans
cette perspective, l’IT et les SIT servent la cause du développement durable.
L’intelligence territoriale s’inspire de l’éthique du développement durable qui met en
avant trois principes : la participation, l’approche globale et équilibrée des territoires et
le partenariat.

Ces deux approches de l’intelligence territoriale sont fondamentalement opposées. La


première, qualifiée d’intelligence territoriale descendante, n’accorde que peu de
pertinence au territoire, elle en privilégie une approche stratégique destinée à restaurer
la compétitivité d’une nation par l’attractivité de ses territoires. La seconde, qualifiée

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d’intelligence territoriale ascendante, pose comme préalable la question de la diversité
des territoires et notamment celle d’un développement local porté par les acteurs locaux
selon une logique endogène. Cette vision rejoint celle d’un développement local
équilibré et durable, de la capacité à développer des projets diversifiés, à constituer un
capital formel en associant les acteurs du territoire selon une logique de partenariat.

Qu’en est-il donc de la notion de territoire elle-même ?

Le territoire est une réalité complexe : son environnement est incertain, son degré
d’organisation est élevé du fait du grand nombre de ses éléments et des relations qui
s’instaurent entre eux à un tel point qu’il est difficile d’identifier tous ces éléments et de
comprendre toutes les interactions en jeu. Le territoire lui-même ne se réduit pas à
l’ensemble de ses éléments, il constitue un tout supérieur à la somme des parties et dont
les propriétés sont non déductibles des propriétés élémentaires. L’intelligence
territoriale en tant qu’approche systémique, comme nous le proposons tout d’abord,
consisterait donc à considérer le territoire comme un système et à s’interroger en
conséquence à la fois sur ses propriétés (quelles composantes et quels liens
transversaux ?), ses entités (quels acteurs et quels échanges ?), ainsi que les interactions
entre celles-ci (quelles activités et quelle cohérence ?).
Chaque territoire a une forme. Cette forme est bien sûr liée à une situation, à un site,
certains étant plus propices que d’autres au développement des activités humaines en
général et des villes en particulier. Mais plus que ça, Il est l’espace d’une communauté
qui lui imprime sa marque et le fait exister en tant que territoire. Nous parlerons de
statut pour rendre compte de ce marquage et de cette appropriation de l’espace qui, au-
delà de la simple distinction espace public/espace privé, est connoté socialement en
fonction de sa propriété, de son usage, de sa considération, de son aménagement, de son
entretien ou de sa dégradation jusqu’au statut de friche.
Quant aux acteurs, chacun se représente ainsi l’espace selon ses propres cartes
mentales.
Je suis par conséquent un acteur territorial non seulement si je travaille dans
l’agriculture ou le BTP, ou si je suis propriétaire et que j’aménage ma propriété. Je le suis
car j’habite une zone résidentielle, je fréquente des zones commerciales, je travaille dans
une zone d’activité, j’emprunte des itinéraires... Par ailleurs, il y a des institutions
publiques, des entreprises publiques/privées, des centres de recherche, des agences
spécialisées, des institutions universitaires et j’en passe. Tous ceux-là contribuent d’une
manière ou d’une autre au dynamisme de mise en œuvre de projets d’IT.

Pour synthétiser, le territoire est comme un espace d'acteurs où se génèrent une


production et une appropriation des ressources. Dans la société de la connaissance, la
première ressource nécessaire, objet de cette production et appropriation, sera la
connaissance existante du territoire ainsi que les processus qui se développent au sein
de celui-ci. Mise en relation avec la gouvernance territoriale, on peut donc définir
l'intelligence territoriale comme un ensemble de connaissances relatives à la
compréhension des structures et dynamiques territoriales, ainsi que des instruments

7
utilisés par les acteurs publics et privés afin de générer, utiliser et partager cette
connaissance.

B. Les enjeux de l’IT :


Pour Philippe CLERC (actuellement conseiller expert en intelligence économique
internationale à CCI France) et Agnès BRICARD (dirigeante du cabinet d'expertise
comptable Bricard, Lacroix & Associés), à bien regarder se mettre en place cette
politique, quatre enjeux se distinguent, sur lesquels les décideurs et les entreprises
devront être vigilants :
Le premier enjeu est celui des capacités de diagnostic permanent. Pour cela, l'Etat, la
Région avec les réseaux d'appui économique et technologique et les entreprises, devront
se doter de compétences de pilotage stratégique et d'outils de diagnostics et d'alerte en
temps réel.

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Le second concerne la mise en place de coopérations et de stratégies interrégionales. Il
est essentiel que des coopérations transrégionales se mettent en place au moins pour
partager les diagnostics et les alertes. Ces coopérations ont également tout leur sens à
l'échelle nationale.
Le troisième enjeu pour l'intelligence territoriale consiste dans l'intégration progressive
des dynamiques de la gouvernance sociale sur les territoires et associant la société civile
par la concertation, à la définition de la stratégie de développement.
Le quatrième se situe au niveau de la politique de sécurité économique. Les décideurs
territoriaux, économiques et politiques devront veiller en permanence à garantir deux
équilibres : entre l'ouverture indispensable à la compétitivité et la protection ; entre les
entreprises dites du périmètre stratégique et celles qui n'ont pas ce « label », afin
d'éviter que s'établisse « une fracture compétitive » sur les territoires.

Dans la même perspective, Jean-Jacques GIRARDOT et Cyril MASSELOT soulignent cinq


objectifs de l'intelligence territoire à savoir :
Elle vise à mieux comprendre collectivement pour mieux agir ensemble.
Elle compare et intègre les connaissances pluridisciplinaires et interculturelles sur les
structures et les dynamiques territoriales.
Elle adapte les méthodes fondamentales et les outils génériques de large applicabilité
pour analyser les territoires et l'information territoriale.
Elle évalue les principes de gouvernance qui garantissent une prise en compte
équilibrée des besoins, une distribution équitable et la pérennité des ressources, grâce
au partenariat et à la participation.
Elle conçoit et réalise des outils avec les acteurs territoriaux qui aspirent à développer
leurs territoires dans le respect de ces principes éthiques.

Par ailleurs, l’un des enjeux majeurs de l’IT est de faire naître des pôles de compétitivité,
qui seraient des groupes géographiquement proches d’entreprises liées entre elles par
des intérêts commerciaux et/ou des complémentarités technologiques, auxquels
s’associent des administrations nationales, des collectivités locales, des universités, des
centres de recherche, etc.

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Partie II : Démarche d’implémentation
de L’IT

A. Démarche de l’Intelligence territoriale


Après avoir compris les définitions et les enjeux de l’Intelligence territoriale, la suite
logique de cette tentative de recherche qui s’impose à nous s’intéressera à la démarche
à adopter pour parvenir à la consécration de cette dernière.
L’opinion du courant des mortels stipulera sans doute l’entendement d’une présentation
schématique ou même à son plus grand aise hiérarchique. D’autant que par démarche
autre aventure de l’esprit ne serait permis. Accordant en toute évidence ce crédit - une
manière loin de se résigner au carcan que cela induirait - qu’il nous soit aussi permis
au même moment d’admettre la complexité véritable de la démarche de l’Intelligence
territoriale.

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En effet, ce n’est pas un domaine dont les codes ont été édictés et formalisés. Bien au
contraire, son champ a toujours été plus une esplanade ouverte qu’un enclos fermé.
Ainsi donc, les acteurs de l’intelligence territoriale – les collectivités territoriales, la
puissance centrale (L’Etat) - sont appelées à concevoir à leur guise une articulation
modulaire d’éléments qui fera acte d’orientations générales lesquelles produiront la
démarche qui sera valable pour cette collectivité ou cet Etat.
Nous avons étudié et analysé plusieurs propositions de démarche, toutes différentes les
unes des autres. N’en demeure que comme pour toute chose, certains éléments se
caractériseront par leur constance et s’en font le généralement valable.
Deux approches maitresses dominent- la démarche extirpée de cette dynamique- à
savoir :
- L’Intelligence Territoriale est une démarche d’information et de communication
au service de l’action publique.
- L’IT est aussi une démarche de sécurisation économique du patrimoine d’un
territoire en l’occurrence ses entreprises.

Pour ce qui est de la première, une prédisposition au sens des attitudes à adopter
lesquelles guidées par une ferme résolution de l’esprit est indispensable. Les plus grands
récits des stratégies de guerre ont l’habitude de reprendre que : « Partir en guerre avec
l’idée de perdre, on l’aura déjà perdu ». Nous avons envie de dire que cette affirmation
révèle encore d’avantage la réalité de l’Intelligence Territoriale.
L’IT : démarche d’information et de communication
Comment s’assurer d’être prêt pour une démarche d’IT ? Guihlon et Moinet ont abordé
cette préoccupation sous la forme de la chance territoriale.
Dans ce contexte, on pourrait penser que les territoires qui « gagnent » et se développent
économiquement seraient alors des territoires « chanceux » ; reste à définir ce que la «
chance territoriale » pourrait être. Nous postulons que cette « chance » serait une capacité
à créer un environnement favorable, à gagner des concours de circonstance, à saisir les
opportunités et en définitive, elle serait une compétence qui se travaille. La « chance
territoriale » est tout sauf du hasard : les collectivités et les territoires sont responsables
d’en avoir ou pas. Il faut ainsi faire les bonnes rencontres pour faire du bon « business » et
pour cela, il faut identifier les bons territoires de « chasse » et être à l’écoute des bonnes
demandes. Ainsi, pour créer et saisir des opportunités, il faut adopter quatre postures dans
le processus d’intelligence territoriale :
• la vigilance : surveiller ses arrières, ne pas tourner en rond, sortir de la routine (accepter
la remise en question) et être curieux ;
• l’interaction : devenir le territoire qui crée les liens, être au centre de l’information pour
avoir à ne pas courir après ;
• la conscience : cela ne marche pas toujours et donc utiliser l’échec comme une matière
première pour le transformer en projet ;

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• l’anticipation : avoir toujours un projet d’avance car le monde est toujours en
mouvement.
La vraie chance territoriale, ce n’est donc pas ce qui arrive au territoire, mais ce que le
territoire fait avec ce qui lui arrive.

Ces deux auteurs ont proposés le schéma suivant du processus d’intelligence


économique des territoires.

De ce schéma, nous prenons note de la pluridisciplinarité de l’Intelligence Territoriale.


Nous remarquons comment elle part d’une simple déclinaison des politiques publiques à
un véritable système d’information territorial.
Les collectivités territoriales proportionnellement à leurs responsabilités et domaines
de compétences ont en charge la définition de stratégies territoriales. Ces stratégies
peuvent être d’inspiration diverses. Ce qui est pour dire que contrairement à la veille
territoriale - outil par excellence de l’Intelligence Territoriale, en tout cas l’entendant
dans le sens qu’elle appréhende les mutations économiques pour le compte de son
territoire - la stratégie territoriale s’établie à la façon ponctuelle. Elle est le chapiteau qui
surplombe toutes les activités d’un territoire.
Le cap fixé, l’étape faîtière est la veille thématique. Cette dernière, dans la même logique
que la phase d’analyse des besoins dans l’Intelligence Economique portera sur la
déclinaison d’un plan de veille retraçant les axes de veille (les grands besoins du
territoire). Une veille thématique est finalement une surveillance des principaux sujets
de préoccupations d’un territoire. Par exemple, si un de ses sujets concerne la création
de contenus à caractère local (démarche de communication du territoire) se trouve là
une thématique qui sera scindée en sous-axes pour enfin conclure des questions
pertinentes et directement attrayantes à un moyen spécifique de collecte.
Exemple de plan de veille au niveau Micro.

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Après avoir esquissé l’ensemble des besoins informationnels, lequel trouvera réponse
dans le dispositif de veille continu, le Marketing territorial va corroborer la suite de la
démarche par un examen des divers positionnements susceptible d’être adoptés. Celui-
ci se concrétisera systématiquement par une offre territoriale.
Un système d’information territorial qui sera mise en place se verra en être la
capitalisation de tout le processus.

L’IT : démarche de sécurisation économique du territoire


Il s’agit surtout dans cet axe d’admettre une double démarche de l’Intelligence
Territoriale. Comme quoi on ne peut être à la chasse de l’information sans se protéger
soi-même et sans protéger son patrimoine. Pour le territoire, ce patrimoine s’apparente
à l’information économique stratégique des entreprises qui le composent. Sans compter
que la protection en intelligence économique fait partie d’un des facteurs clés de la
valorisation de l’information.
13
La sécurité économique territoriale consiste à protéger l’activité économique des entités
sur un territoire donné. Il peut s’agir indépendamment d’entreprises privées, mais
également de structures bénéficiant de financements publics (établissements publics
industriels et commerciaux ou EPIC, laboratoires de recherche publique, etc.) dont
l’activité a, ou aura, des implications économiques (brevets, par exemple).
Partant du postulat suivant : « la meilleure façon de se défendre est d’attaquer », nous
comprendrons que se sécuriser en IT revient en grande partie à concevoir un arsenal
d’activités à mettre en œuvre, bien sûr dans le même ordre d’idée que la stratégie
territoriale. Cette façon de faire dénotera de la volonté réelle d’action des autorités
publiques. Ainsi, par activité, il faudrait entendre la conception de contenus territoriaux
mais pas que, aussi la construction d’infrastructures. Enfin, tous ceux susceptible
d’attirer des investissements au bénéfice du territoire. Démarche qui aura pour
corollaire la redynamisation des capacités financières des collectivités ou même des
Etats.
La sécurité économique territoriale est donc un concept aux conséquences à plusieurs
niveaux. Elle désigne la politique menée par les collectivités publiques pour offrir un bon
niveau de prestations aux entreprises afin de les attirer ou les maintenir sur leur aire
géographique. Par ricochet, cette dynamique génère des recettes fiscales supplémentaires
qui permettent alors à la collectivité d’investir à son tour et de développer ses prestations.
Ainsi, se met en place un cercle vertueux. Malheureusement, le cercle vicieux existe bel et
bien dans l’autre sens.

Par ailleurs, quoi qu’ici nous ayons mis l’accent sur la protection par l’attaque, on ne
peut nier le caractère indispensable d’un bouclier de défense. Peut-être aura été
l’incompétence des collectivités territoriales, véritables acteurs territoriaux qui justifie
ce revirement dont on a fait preuve précédemment.
En effet, Il est évident aujourd’hui que les collectivités territoriales ont une vision pour le
moins floue de la sécurité économique territoriale et un aveuglement total sur les mesures

14
qu’il conviendrait de prendre à leur niveau. L’information économique est souvent perçue
par les collectivités territoriales comme un élément de prise de décision pour favoriser le
développement économique. Mais il serait injuste de les en blâmer ; cette mission n’entre
pas spécialement dans leurs prérogatives. Elles considèrent le plus souvent que la sécurité,
fut-elle économique, relève des services régaliens de l’État. Il ne s’agit pas seulement d’une
posture idéologique ; ce positionnement est fondé par la loi et les règlements.
Finalement se sont les ministères de l’intérieur, de la défense et leurs émanations qui
sont prédisposés à accomplir les missions de sécurisation économique. Lesquelles sont
des actions outillées de dispositifs plus ou moins secrètes et militaires.
En France, par exemple la Direction Générale de la Sécurité Intérieure (DGSI) œuvre
notamment dans la contre-ingérence et dans la protection du patrimoine économique.

B. Cas de la région Midi-Pyrénées : le dispositif DRIME


Dans le souci d’apporter un éclairage particulier à ce travail, nous avons jugé nécessaire
de vous reprendre ici tel quel une expérience de dispositif d’Intelligence Territoriale.

15
Cette expérience a été développée par Guihlon et Moinet. C’est donc leur analyse qui
vous sera présenter de façon non dénaturée car sans ajout, ni soustraction.
Dispositif DRIME en région Midi-Pyrénées1
Le dispositif DRIME2 est une initiative régionale faisant suite à une démarche concertée
d’intelligence économique territoriale engagée en Midi-Pyrénées en 2000. La région
Midi-Pyrénées souhaitait alors relever les défis d’une économie internationalisée et
anticiper les mutations économiques, action considérée comme indispensable par ses
décideurs publics. Le principe général fixé par les élus était : « Comprendre pour mieux
intervenir ». Il y avait localement la réelle prise de conscience que dans une économie en
mouvement, les relations entre les entreprises et les pouvoirs publics devaient
s’intensifier dans un leitmotiv partagé : « aller plus loin ensemble ». Les raisons affichées
par les élus étaient multiples :
• mieux cerner les enjeux des entreprises structurantes implantées en Midi-Pyrénées
(mutations industrielles, technologiques, capitalistiques, etc.) ;
• se doter d’un diagnostic partagé ;
• favoriser une action publique plus réactive, etc.
DRIME réunit alors des représentants des services de l’État, de la région, d’organismes
institutionnels, du monde des entreprises et de celui de l’université. En 2007, la région
décide d’intégrer au SRDE3 une action visant l’anticipation des mutations économiques à
venir, impactant l’emploi et les compétences, dans le but de permettre aux parties
prenantes territoriales de disposer d’informations permettant de détecter les signaux
annonciateurs de futures mutations. Opérationnel depuis mai 2008, ce dispositif original
d’aide à la décision politique en matière économique réunissant des entreprises
régionales, des personnalités qualifiées de la recherche académique, des économistes et
la région, repose sur trois piliers :
• un panel d’entreprises qui réfléchissent ensemble à l’évolution de leurs activités ;
• une équipe pour faire vivre le dispositif ;
• des outils et supports permettant de capitaliser sur l’information économique et de
diffuser les résultats de cette initiative.
On constate que les notions clés partagées par les acteurs publics étaient centrées
autour de celles de mutations et d’ancrage territorial. Pour ce faire, il a été décidé d’avoir
une nouvelle approche des rapports entre les entreprises et la région par un partenariat
sur la durée fondé sur les principes de disponibilité, d’écoute, de réactivité et de
confidentialité.

1
Intelligence Economique ( Alice Guihlon et Nicolas Moinet), Chap 4, section 5, 3.)
2
Dispositif régional d’information sur les mutations économiques.
3
Schéma régional de développement économique.

16
Coordonnée par MPE4 (devenue Madeeli5), l’initiative réunit les services de la région et
des agences MPI6 et MPE ; une démarche a donc été mise en place se déroulant en deux
phases :
• phase d’entretiens individuels ;
• phase de séminaires collectifs (afin de produire des rapports de mutation).
Celle-ci a nécessité une nouvelle organisation des équipes régionales (MPE, MPI, Conseil
régional), en recrutant différents profils de chargés de missions (20 capteurs, 5
analystes, 3 administrateurs, 1 animateur) pour un total de 25 personnes impliquées
dans le dispositif. Ainsi est né le dispositif DRIME, véritable système territorial
d’intelligence collective grâce à un processus collaboratif, avec la mise en place d’un
outil de veille et d’une plateforme collaborative (voir figure 4.6).
Le dispositif constitue un exemple de la synergie entre les trois structures avec une
ambition qui se situe à plusieurs niveaux :
• anticiper les mutations économiques ;
• construire une réflexion collective ;
• optimiser l’action politique pour renforcer l’économie territoriale de la connaissance.
Le dispositif DRIME en Midi-Pyrénées

4
Midi-Pyrénées Expansion.

5
Agence du développement économique, de l’export et de l’innovation en Midi-Pyrénées (http://
www.madeeli.fr/).
6
Midi-Pyrénées Innovation.

17
Au coeur de DRIME, se trouvait une véritable dream team de 56 entreprises dites «
structurantes » pour l’économie régionale. L’idée sous-jacente de la mise en place d’un
tel dispositif fût de constituer une forme de think tank en situation de faire remonter les
besoins et souhaits des entreprises (une force de propositions) pour aider la région à
être plus pertinente dans sa politique économique.
L’action produisait trois « livrables » :
• des alertes ;
• des tableaux de bord des « entreprises structurantes » ;
• un « rapport mutation » périodique qui comportait deux parties : un diagnostic et une
série de préconisations adressées au Conseil régional.
Sur la base de ce dernier livrable, le Conseil régional devait indiquer dans un délai court
(4 à 6 semaines) les préconisations qu’il retenait et comment il envisageait de les mettre
en œuvre : la constitution de ce rapport a donc donné lieu à une coordination en
situation des acteurs économiques concernés par les mutations.
Par ailleurs, le dispositif DRIME fonctionne autour de quatre axes stratégiques
préalablement définis par les décideurs publics et privés :
• un panel de firmes structurantes régionales, avec pour objectif de recueillir les
informations sur les entreprises de ce panel ;
• l’environnement des firmes structurantes, avec pour enjeu d’identifier les éléments
d’environnements économiques, technologique, financier, juridique, etc. ;
• la veille sectorielle, afin d’identifier les principales évolutions et tendances des
secteurs clés de l’économie régionale (Agroalimentaire, Aéronautique, Espace et TIC-
Télécom) ;
• un benchmark permanent par la surveillance des politiques publiques initiées par les
autres conseils régionaux et leurs agences.
Même si le dispositif présente des limites, il faut bien être conscient que créer un tel
outil sur l’anticipation des mutations économiques, c’est investir dans la durée et que sa
réussite tient à un retour sur investissement pour chacune des parties prenantes

Bilan synthétique du dispositif DRIME.

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Conclusion :
Au terme de ce travail, s’il y a une chose qu’il faille retenir ce serait bien - au vue des
enjeux actuels des territoires - la nécessité prégnante de faire converger action
publique et dispositif d’Intelligence Territoriale.
C’est pourquoi le long de ce rapport, nous nous sommes échinés à faire parvenir cet
angle de vue combien capital. En effet, dans une première partie nous avons abordé de
près le concept d’Intelligence Territoriale au travers des analyses de différents
auteurs. Ensuite, il fallait s’entendre sur ses véritables enjeux. Une deuxième partie a

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retracé le processus d’implémentation de l’Intelligence Territoriale tout en reprenant
un cas concret : Dispositif DRIME en région Midi-Pyrénées.
Par ailleurs, plus d’un qui a lu ce rapport, remarquera qu’enfin de compte l’IT n’est
qu’un outil à la disposition des autorités publiques. Son efficacité dépendra donc de
l’engouement de ces dernières quant à la prise de conscience sur son importance à la
fois pour éclairer les décisions publiques, être à même de s’inscrire dans la réactivité
eu égard à un environnement dynamique et assurer le rayonnement du territoire. Se
trouve là alors, une préoccupation rédhibitoire pour les experts de l’IT.
Ce sera donc une avancée considérable si l’IT parvenait à se mouvoir
indépendamment des velléités des acteurs publiques.

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Bibliographie
Livre : Intelligence Economique (Alice Guihlon et Nicolas Moinet)

Webographie
i-KM.com
Zeknowledge.com
https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-du-numerique-2009-4-page-93.htm
https://portail-ie.fr/resource/glossary/74/intelligence-territoriale
https://www.memoireonline.com/10/10/4042/m_Lintelligence-territoriale1.html

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