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II- PHYSIOPATHOLOGIE :
O Les séquelles de la chirurgie gastrique associent des troubles de la vidange gastrique et une malabsorption.
O Vidange gastrique :
Chez le sujet sain :
L’estomac sert de réceptacle aux aliments, les accumule, les modifie sous l’effet conjugué de la sécrétion
gastrique et de l’activité antrale qui liquéfie les aliments solides.
Puis, l’évacuation gastrique règle le rythme d’arrivée des nutriments dans l’intestin et leur absorption.
L’estomac peut être divisé en 02 zones :
la région fundique qui se comporte comme un réservoir ;
la région antropylorique, sous le contrôle vagal, qui présente des contractions péristaltiques et régule la
vidange des solides ; les contractions augmentent lors de la distension de l’estomac et diminuent lors de
la distension du grêle proximal ou de l’arrivée des graisses dans le duodénojéjunum.
Après vagotomie :
Après vagotomie tronculaire ou sélective :
Le débit acide basal diminue de 80 % ainsi que le débit acide maximal.
La vidange des liquides est accélérée.
La vidange des solides est ralentie.
Après vagotomie fundique :
Le débit acide basal diminue de 80 % et le débit acide maximal seulement de 50 %.
La vidange des liquides est accélérée.
La vidange des solides est normale (pas d’altération de la pompe antropylorique).
À distance, les paramètres d’évacuation des liquides se normalisent.
Après gastrectomie :
Après gastrectomie distale :
Le débit acide basal diminue de 50 % ainsi que le débit acide maximal.
La vidange des liquides est accélérée ainsi que la vidange des solides avec une augmentation de la taille
des particules.
Le temps de vidange gastrique passe de 3 à 4 heures chez le sujet non opéré à une demi-heure à
2 heures chez le gastrectomisé, sans qu’il y ait une différence suivant le type d’anastomose
(gastroduodénale ou gastrojéjunale).
Chez le sujet opéré, il existe une phase initiale de vidange très rapide de 15 à 65 % du repas, suivie d’un
délai de 20 à 30 minutes, puis d’une phase de vidange plus lente.
L’accélération de la vidange gastrique aboutit au remplissage massif et précoce du duodénojéjunum par
un liquide hyperosmotique comportant de gros fragments alimentaires. Cela a pour conséquences une
modification de la cinétique d’absorption des glucides, une hyperosmolarité du contenu intraluminal et
une accélération du passage du repas à travers le jéjunum.
Les sécrétions biliopancréatiques sont débordées et diluées.
Après gastrectomie totale :
La perte totale du réservoir gastrique, associée à une vagotomie tronculaire, a un plus grand
retentissement sur la diminution des apports ingérés par le patient que sur des troubles de vidange
gastrique.
Influence du type de drainage associé à une vagotomie tronculaire :
Le drainage gastrique a pour but de diminuer les résistances à l’évacuation gastrique dues à la vagotomie
tronculaire.
Après vagotomie tronculaire et pyloroplastie :
Le débit acide basal diminue de 80 % et le débit acide maximal de 50 %.
La vidange des liquides est accélérée par le même mécanisme qu’une vagotomie tronculaire auquel il
faut ajouter la perte de résistance du pylore en raison de la pyloroplastie.
La vidange des solides est quasi normale.
Après vagotomie tronculaire et antrectomie :
Le débit acide basal diminue de 80 % ainsi que le débit acide maximal.
La vidange des liquides est accélérée.
La vidange des solides est ralentie par la diminution des contractions antropyloriques et il existe, de plus,
une augmentation de la taille des particules solides.
O Malabsorption :
Après gastrectomie :
La stéatorrhée : définie par un pourcentage de graisse dans les selles > 5 % du poids total de selles par
24 heures.
La créatorrhée est augmentée en cas de gastrectomie totale ou partielle chez quelques patients.
Une malabsorption des hydrates de carbone est la conséquence d’une maldigestion au niveau du grêle.
Les sécrétions biliopancréatiques, pourtant normales en quantité comme en qualité, se trouvent débordées
et diluées, responsables d’une insuffisance pancréatique exocrine.
Des intolérances au lactose en raison de l’évacuation rapide du contenu gastrique après gastrectomie. Elles
peuvent être à l’origine d’une hydrolyse insuffisante du lactose par les enzymes intestinales ou démasquer
une intolérance au lactose jusque-là latente.
Après vagotomie :
Les conséquences de la vagotomie fundique sont pratiquement nulles sur la malabsorption.
Après vagotomie tronculaire et antrectomie, l’augmentation de la taille des particules est responsable
d’une maldigestion des graisses prouvée expérimentalement.
IV- DUMPING :
O Le dumping syndrome réunit des manifestations locales et générales survenant précocement après le repas.
O Il est la conséquence d’un court-circuit ou d’une altération du pylore.
O Il peut donc survenir après vagotomie tronculaire et drainage ou après gastrectomie partielle.
O Cependant, seuls 5 % des patients ayant un dumping ont des troubles sévères.
O Après vagotomie fundique qui, en principe, n’altère pas la fonction du pylore, la prévalence du dumping est < 2 %
et le trouble n’est jamais invalidant.
O Physiopathologie :
Perte de la compliance gastrique et l’arrivée brutale des solides et des liquides dans le duodénum ou le
jéjunum. Ce qui entraîne une distension intestinale importante et un appel d’eau intraluminal pour rétablir
l’équilibre osmotique. Il apparaît une hypovolémie, conséquence de l’exsudation intraluminale de liquide
plasmatique pour diluer le contenu hypertonique.
La distension entraîne une traction sur les mésos qui pourrait être responsable des douleurs abdominales.
Il y une corrélation entre la rapidité de la vidange gastrique pour un repas solide et semi-liquide et l’intensité
des symptômes après gastrectomie distale et montage type Billroth II.
Des facteurs humoraux ont aussi été mis en cause (sérotonine, bradykinines artérielles). En fait, tous les autres
peptides intestinaux semblent avoir un rôle (VIP [vasoactive intestinal peptide], GIP [gastric inhibitory
peptide], entéroglucagon, motiline, neurotensine).
O Diagnostic :
Le tableau typique survient 5 à 20 minutes après le repas et dure 20 à 40 minutes.
Il associe des signes généraux :
une asthénie majeure : faiblesse musculaire obligeant le patient à s’allonger, lipothymies, vertiges et une
somnolence ;
des troubles vasomoteurs : sueurs, pâleur des téguments, tachycardie ;
des troubles digestifs : sensation de plénitude gastrique avec météorisme abdominal, inconfort digestif, et,
plus rarement, vomissements.
La fin du malaise est parfois marquée par une crise polyurique ou une débâcle diarrhéique.
Des opacifications gastriques avec ingestions de marqueurs isotopiques peuvent aider au diagnostic.
La fréquence des troubles est variable :
certains opérés ont un dumping après chaque repas,
d’autres n’éprouvent des symptômes qu’au décours des repas abondants.
Les formes d’intensité modérée s’amendent en quelques semaines ou quelques mois.
O Traitement :
Mesures hygiéno-diététiques :
un fractionnement des repas,
l’éviction des sucres d’absorption rapide et l’ingestion des boissons en dehors des repas.
Des médicaments comme la pectine, le glucomannan, l’acarbose, les inhibiteurs des alphaglucosidases
peuvent être proposés en cas d’échec des règles hygiénodiététiquesmais, ils ont été décevants.
L’octréotide, en inhibant la sécrétion des peptides régulateurs (glucagon, VIP, GIP, neurotensine) et le flux
splanchnique, est le traitement actuellement prometteur.
Réintervention pour certaines formes sévères :
Rétablir le circuit duodénal en transformant une anastomose Billroth II en Billroth I.
Diminuer le calibre de la partie efférente de l’anastomose gastrojéjunale.
Reconstruire le pylore.
Faire une dérivation gastrique sur une anse en Y.
Interposer une anse jéjunale antipéristaltique de 10 cm pouvant être, soit placée sur une anse jéjunale en Y
de type Roux, soit sur la branche efférente d’une anastomose gastrojéjunale.
Cependant, aucune de ces techniques n’est validée de façon définitive, ce qui est explicable par la rareté des
indications du traitement chirurgical du dumping.
B- Diarrhée postgastrectomie :
O Elle survient chez 50 % des patients qui ont eu une gastrectomie totale et chez 15 % des patients qui ont eu une
gastrectomie partielle.
O Elle serait plus fréquente après anastomose gastrojéjunale que gastroduodénale.
O 02 mécanismes peuvent s’associer :
L’accélération du transit par inondation brutale du jéjunum par un liquide hyperosmolaire entraînant une
hypersécrétion intestinale réactionnelle et la libération de sérotonine ;
Une maldigestion pancréatique par débordement des sécrétions biliopancréatiques et une pullulation
microbienne (syndrome de l’anse borgne).
O Le traitement : des antibiotiques, des extraits pancréatiques ou des ralentisseurs du transit.
O Complications :
Gastrite sur moignon :
Lorsque le traitement médical visant à atténuer le reflux s’avère insuffisant et que la gastrite est invalidante,
il paraît raisonnable de proposer une diversion duodénale totale.
Cancer sur moignon gastrique :
En cas de dysplasie sévère : totalisation de la gastrectomie systématique.
Reflux alcalin œsophagien :
Le traitement associe des prokinétiques avec une action du cisapride ou des chélateurs d’acide biliaire.
En cas d’œsophagite résistant au traitement médical, il faut proposer une diversion duodénale totale.
O Diagnostic :
Lors d’un syndrome de l’anse afférente précoce, au cours du repas ou immédiatement après, apparaît une
douleur de l’hypocondre droit accompagnée d’un malaise.
Une masse douloureuse est trouvée à la palpation de l’hypocondre droit.
L’échographie et le scanner abdominal montrent la dilatation de l’anse afférente.
Lors d’un syndrome de l’anse afférente tardif, après accumulation des sécrétions biliopancréatiques, celles-ci
s’extériorisent sous forme de vomissements exclusivement biliaires, non alimentaires.
O Traitement :
Le traitement du syndrome de l’anse afférente précoce est chirurgical.
En cas d’anse afférente viable, il faut faire une anastomose jéjunojéjunale entre les anses afférente et
efférente (de type Braun).
En cas de nécrose duodénale, des montages par anse en Y interposés peuvent être proposés.
Le traitement du syndrome tardif de l’anse afférente est exceptionnellement chirurgical. Hocking et al
proposent une gastro-entéro-anastomose en Y type Roux.
Ces mêmes auteurs préconisent, pour éviter le syndrome de l’anse afférente, de réaliser des gastro-entéro-
anastomoses de type isopéristaltique.
XIII- CONCLUSION :
O Les conséquences les plus marquantes de la chirurgie gastrique concernent les modifications de la vidange
gastrique qui sont à l’origine de l’essentiel des séquelles de la chirurgie gastrique.
O La liste des séquelles possibles étant impressionnante, il est difficile d’informer totalement le patient en
préopératoire.
O La surveillance postopératoire est donc ici fondamentale en ce qu’elle permet de dépister les complications
immédiates qui peuvent souvent se résoudre par des règles hygiénodiététiques devant être expliquées avec
soin.
O La surveillance ultérieure doit se poursuivre, même chez les patients qui vont bien, à la recherche notamment
d’un syndrome carentiel.
O Pour les patients qui présentent secondairement des signes cliniques, il convient de faire un bilan soigneux
afin de traiter de façon adaptée l’éventuelle complication.