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date de dernière mise à jour :25 Septembre 2006

Les marqueurs tumoraux :

Les réponses aux questions que vous pouvez vous poser

D.Bellet, A.Pecking

Les marqueurs tumoraux : qu'est-ce que c'est ?


Les marqueurs tumoraux sont des substances (protéines) qui sont produites
principalement par les cellules cancéreuses et que l'on retrouve dans le sang. La
quantité de marqueurs présente dans la circulation sanguine reflète souvent le
nombre de cellules cancéreuses présentes dans la tumeur ou le nombre de cellules
cancéreuses qui se sont disséminées à distance de la tumeur pour former des
métastases.
En mesurant la quantité d’un marqueur tumoral ou de plusieurs marqueurs
tumoraux présents dans le sang, on peut estimer le nombre de cellules cancéreuses
présentes dans l'organisme. De fait, les marqueurs tumoraux les plus sensibles sont
capables de détecter des tumeurs contenant environ 100 000 cellules cancéreuses.
Ce nombre de cellules paraît élevé. Pourtant, on considère que pour se propager à
distance et former des métastases, une tumeur doit contenir 100 fois plus de
cellules cancéreuses soit environ un million de cellules tumorales. Ainsi, le dosage
des marqueurs tumoraux dans le sang est une des techniques les plus sensibles pour
détecter la présence de petites tumeurs ou suivre leur évolution au cours du
traitement avant qu'elles n’acquièrent la capacité de former des métastases. Par
comparaison, les techniques d'imagerie médicale permettent de détecter au mieux
une tumeur de la taille d'une tête d'épingle qui contient déjà 10 millions de cellules
tumorales alors qu'un clinicien ne peut détecter par la palpation que des tumeurs
superficielles qui ont environ la taille d'une noisette et contiennent déjà un milliard
de cellules tumorales. Seul, le pathologiste peut détecter une seule cellule tumorale
qui sera visible sous son microscope. (Figure 1).

Figure1 : comparaison de la sensibilité des différentes méthodes pour détecter la


présence de cellules cancéreuses.

Les marqueurs tumoraux sont-ils utiles pour le dépistage de


cancer ?
Le dépistage d'un cancer consiste à détecter celui-ci avant l'apparition de tout signe
clinique. On sait aujourd'hui que seuls quatre marqueurs tumoraux peuvent être
utiles pour dépister des cancers.
Un de ces marqueurs est la calcitonine (CT) pour la détection précoce des cancers
médullaires de la thyroïde (une forme rare de cancer thyroïdien) dans les familles à
risque. Ce marqueur est capable de détecter un cancer de moins de 1 mm de
diamètre près de 20 ans avant l'apparition de signes cliniques par exemple chez un
adolescent dont l'un des parents a déjà un cancer médullaire de la thyroïde. Les
trois autres marqueurs utilisés pour le dépistage sont l'hormone chorionique
gonadotrope (hCG) et sa sous unité béta libre (hCGβ) pour le dépistage des cancers
du placenta chez les femmes à risque et l'alphafoetoprotéine pour le dépistage des
cancers du foie chez des sujets à risque (malades avec une hépatite B ou C ou avec
une cirrhose du foie).
Les avis divergent encore sur l'intérêt d' un cinquième marqueur, le PSA, pour le
dépistage des cancers de la prostate.

Les marqueurs tumoraux sont-ils utiles pour la détection


précoce des cancers ?
La détection précoce des cancers consiste à reconnaître la présence d'un cancer dès
que se manifestent des premiers signes cliniques. Les mêmes marqueurs
précédemment utilisés pour le dépistage peuvent être également utilisés pour la
détection précoce des cancers. Le meilleur exemple est la détection précoce des
cancers du testicule, un cancer relativement fréquent chez l'homme jeune. Lorsqu'il
y a un premier signe clinique (souvent une augmentation de volume du testicule),
les dosages d’hCG, d’hCGβ, d’AFP et de LDH permettent de faire le diagnostic de
cancer du testicule. L'utilisation de ces marqueurs pour le diagnostic précoce de ces
cancers et la découverte de traitements efficaces permettent aujourd'hui de guérir
un grand nombre de malades avec un cancer du testicule.

À quoi servent la plupart des marqueurs tumoraux ?


La plupart des marqueurs tumoraux sont surtout utiles pour la surveillance des
patients avec un cancer au cours du traitement et après celui-ci.
Au cours du traitement, le dosage des marqueurs est un des éléments qui va
permettre au médecin de suivre la réponse à un traitement et d'ajuster celui-ci au
cas de chaque malade. Au début du traitement, le dosage d'un ou de plusieurs
marqueurs va aider le médecin à établir ou à préciser son diagnostic. Il interprétera
le résultat des dosages de marqueurs biologiques en fonction de son examen
clinique et des résultats d'autres examens biologiques ou radiologiques tels que la
radiographie, le scanner, la résonance magnétique nucléaire ou le TEP-scan.
Au cours du traitement, l'évolution du taux des marqueurs va permettre au médecin
de mieux adapter son traitement. Si un traitement est efficace, le taux d'un
marqueur doit progressivement baisser. À l'inverse, si le traitement n'est pas
suffisamment efficace ou s'il y a une nouvelle progression de la maladie, le taux du
marqueur pourra s'élever.
A l'arrêt du traitement, le dosage des marqueurs va permettre de vérifier que la
maladie est contrôlée, stabilisée ou éradiquée.

Les marqueurs tumoraux sont-ils présents uniquement en


cas de cancer ?
Si les marqueurs tumoraux sont produits principalement par les cellules
cancéreuses, tous les marqueurs, sans aucune exception, peuvent être également
produits par certaines cellules non cancéreuses. De ce fait, de nombreux marqueurs
sont détectables dans le sang en l'absence de tout cancer. Généralement, la
production de marqueurs tumoraux par des cellules non cancéreuses est faible et, en
l’absence de cancer, les taux de marqueurs observés dans le sang sont peu élevés.
Cependant, dans le cas de certaines pathologies non cancéreuses, la production de
marqueurs tumoraux par des cellules non cancéreuses peut devenir plus importante
et les taux de marqueurs observés dans le sang, toujours en l’absence de cancer,
sont alors plus élevés. Par exemple, malgré leur nom CA (antigène de cancer) très
évocateur de cancer, les marqueurs tumoraux tels que le CA15-3, marqueur utilisé
pour la surveillance des cancers du sein, le CA125, marqueur utilisé pour la
surveillance des cancers de l'ovaire ou le CA19-9, marqueur utilisé pour la
surveillance des cancers du pancréas, peuvent être tous retrouvés en quantité élevée
et parfois très élevée dans le sang en l'absence de cancer. Cette élévation est alors
due à une autre maladie non cancéreuse (maladie bénigne par opposition à une
maladie cancéreuse dite maladie maligne). La cause la plus fréquente d'une
élévation d'un marqueur tumoral en l'absence de cancer est une cause infectieuse ou
inflammatoire. Toute infection ou toute inflammation, par exemple dans les
poumons ou dans l'abdomen, peut provoquer l'élévation du taux d'un marqueur
tumoral dans le sang.
Une autre cause fréquente d'élévation d'un marqueur tumoral en l'absence de cancer
est la forte prolifération d'un tissu. Par exemple, le PSA peut se retrouver en
quantité relativement élevée dans le sang lorsque les cellules de la prostate se
multiplient de façon importante alors que ces cellules ne sont pas cancéreuses
.Dans ce cas, le volume de la prostate augmente du fait de cette prolifération
bénigne (hyperplasie).
En fait, la plupart des marqueurs tumoraux sont également produits en très faible
quantité par les cellules normales et des taux peu élevés de ces marqueurs peuvent
donc être retrouvés chez des hommes et chez des femmes en l'absence de toute
maladie. Par exemple, l’ACE (antigène carcinoembryonnaire) qui est utilisé pour la
surveillance des cancers du colon et des cancers du sein est retrouvé à des taux
supérieurs aux valeurs usuelles chez 2 % des sujets sains et chez 14 % des gros
fumeurs. En pratique, un taux d'un marqueur biologique supérieur aux valeurs
usuelles (celles qui sont souvent indiquées sur la feuille de résultats) n'indique pas
forcément la présence de cellules cancéreuses.

Quels sont les marqueurs tumoraux les plus fréquemment


recherchés et pour quels cancers ?
La figure 2 présente les marqueurs tumoraux les plus fréquemment demandés par
les médecins et le type de cancer pour lequel un marqueur est souvent prescrit. À
nouveau, il faut souligner que la plupart des marqueurs sont plus utiles pour la
surveillance d'un cancer que pour son dépistage ou pour sa détection précoce. On
remarquera sur cette figure qu'un même marqueur peut être produit par des cellules
tumorales d'origines différentes. Par exemple, l’AFP est un marqueur qui peut être
produit par un cancer du foie ou par un cancer du testicule! De plus, un même
organe, par exemple la prostate, possède des cellules différentes qui peuvent
sécréter dans le sang des marqueurs différents tels que le PSA ou la chromogranine
A (CGA).
Figure 2: les principaux marqueurs tumoraux et les
organes qui les produisent (d’après M.F Pichon et coll).

Les marqueurs tumoraux indiquent-ils l’origine du cancer ?


Lorsque l'origine d'un cancer n'est pas déterminée, ce qui n'est pas rare, le dosage
de plusieurs marqueurs tumoraux peut effectivement aider le médecin à déterminer
l'origine du cancer. Les résultats de ces dosages seront alors interprétés en fonction
de l'examen clinique et des résultats de l'imagerie médicale. En effet, un même
marqueur tumoral peut être produit par des cellules cancéreuses d'origines
différentes. Par exemple, le taux de CA 15-3, marqueur des cancers du sein, peut
également être élevé en cas de cancer de l'ovaire alors que le taux de CA 125,
marqueur des cancers de l'ovaire peut s'élever en cas de cancer du sein!

Comment mesure-t-on les taux des marqueurs tumoraux ?


Pour doser les marqueurs tumoraux, il faut d'abord faire une prise de sang

Ce sang contient des cellules (globules rouges, globules blancs ...) qui « flottent »
dans un liquide appelé sérum. En centrifugeant le sang, on récupère le sérum qui
contient les marqueurs tumoraux (Figure 4). Pour doser les marqueurs, le
laboratoire effectue le plus souvent une technique dite « sandwich ». En effet, un
premier réactif « capture » le marqueur dans le sérum alors qu'un second réactif
permet de mesurer la quantité de marqueur capturé. Ainsi, le marqueur est pris en «
sandwich » entre le réactif de capture et le réactif de mesure.

Figure 4: principe des dosages de marqueurs tumoraux.


Pourquoi faut-il faire toujours doser les marqueurs
tumoraux dans le même laboratoire ?
Il faut effectivement faire toujours doser les marqueurs tumoraux dans le même
laboratoire. En effet, les laboratoires d'analyses biologiques n'utilisent pas tous les
mêmes réactifs de capture et de mesure. De ce fait, le résultat du dosage de
marqueur effectué sur le même échantillon de sang peut être légèrement différent
d'un laboratoire à l'autre. Chez un malade dont le taux de marqueur est stable, le
simple fait de doser un marqueur dans deux laboratoires différents peut faire
légèrement fluctuer le taux et conduire le médecin à faire une interprétation erronée
de cette fluctuation. C'est pourquoi votre médecin demande que les dosages de
marqueur soient toujours faits dans le même laboratoire (Figures 5 à 8).

Figure 5 : saisie et contrôle des demandes de dosages de marqueurs.

Figure 6 : distribution des réactifs pour doser les marqueurs.

Figure 7 : préparation des échantillons de sérum avec un automate.

Figure 7 B: Réalisation des dosages par un automate capable de doser plusieurs


marqueurs en quelques minutes.
Figure 8 : Réalisation des dosages par un automate capable de doser un marqueur
en comptant la radioactivité d’un réactif de mesure (voir figure 4).

Le taux d'un marqueur tumoral augmente juste après une


chimiothérapie.
Est-ce alarmant ?
Après une chimiothérapie qui doit diminuer le nombre des cellules cancéreuses, on
s'attend effectivement à ce que le taux du marqueur tumoral baisse (moins il y a de
cellules cancéreuses et moins le taux de marqueur tumoral est élevé). En fait, il
n'est pas rare que, juste après le début d'une chimiothérapie, le taux du marqueur
s'élève. En effet, la chimiothérapie détruit un grand nombre de cellules tumorales.
Celles-ci libèrent immédiatement dans le sang une forte quantité de marqueur, ce
qui explique une élévation transitoire du taux de marqueur. Après cette élévation
transitoire, le taux du marqueur devrait ensuite baisser progressivement.
Est-il vrai que le taux d'un marqueur peut fluctuer
indépendamment de l'évolution d'un cancer ?
Le taux d'un marqueur peut effectivement fluctuer indépendamment de l'évolution
d'un cancer. En dehors des fluctuations causées par un changement de laboratoire,
de nombreuses pathologies non cancéreuses, et notamment une infection ou une
inflammation, peuvent modifier le taux d'un marqueur indépendamment de
l'évolution de la maladie cancéreuse. Ceci souligne à nouveau que le résultat d'un
dosage de marqueur doit être interprété par un médecin. Celui-ci l'interprète en
fonction de l'examen clinique et d'autres résultats d'examens biologiques ou
radiologiques.

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