Vous êtes sur la page 1sur 8

Chapitre 10 

: Les politiques de redistribution

Quelles politiques de redistribution face aux risques sociaux et aux inégalités sociales ?

I. La redistribution : objectifs, formes instruments


A. Les objectifs de la redistribution
B. Les formes de la redistribution
C. Les instruments de la redistribution
II. Les modèles de protection sociale
A. Les modèles de Bismarck, Beveridge, Laroque
B. La typologie de ESPING-ANDERSEN
C. La protection sociale en France
III. Le financement des politiques de redistribution
A. Les deux moyens de financement des politiques de redistribution
B. Les enjeux principaux du financement de la redistribution

INTRO :

L’État social ( État-providence) est devenu la forme institutionnelle caractéristique des sociétés
avancées.
Pour recréer du lien social, nécessaire à la cohérence des sociétés, les pouvoirs publics recourent à
un mécanisme particulier : la redistribution.
Elle peut être basée sur la fourniture de services publics, une fiscalité redistributive et des
institutions de solidarité comme la Sécurité Sociale.
La redistribution vise à lutter contre les inégalités et à couvrir les risques sociaux.

I. La redistribution : objectifs, formes, instruments

A. Les objectifs de la redistribution

La redistribution fait partie des fonctions principales des pouvoirs publics. Dans sa Théorie des
Finances publiques en 1959, Richard MUSGRAVE (1910 – 2007), présente les trois fonctions de
l’État :
. répartition,
. stabilisation,
. et allocation des ressources.

La redistribution fait partie de la fonction de répartition.


L’État a alors pour but de modifier la répartition des revenus par une politique des revenus ou par
une intervention ex-post grâce à un système de prélèvements et de transferts c’est-à-dire une
politique de redistribution.

Définition de la redistribution : Ensemble des transferts monétaires ou en nature effectués par les
pouvoirs publics entre les ménages.

Elle s’inscrit dans une logique de justice sociale et de solidarité.


Il s’agit de corriger et modifier la répartition initiale des richesses pour atteindre une plus grande
équité.
À cet objectif social doit être joint un objectif économique dans le sens où une modification de la
répartition des revenus et du patrimoine par a fiscalité peut induire un changement de comportement
des agents influençant l’activité économique.
Exemple : Une augmentation des revenus des plus pauvres en leur versant des prestations sociales
ce qui entraînera une hausse de la demande qui sera bénéfique à l’activité économique.

Le multiplicateur budgétaire illustré par le théorème de HAAVELMO justifie cette logique mais
aussi l’intervention de l’État qu’elle soit économique ou en matière de redistribution.

Le multiplicateur de dépense publique positif est supérieur au multiplicateur fiscal qui, lui, est
négatif.
Il convient cependant de nuancer cette analyse, toute dépense publique a nécessairement un impact
économique positif.
Globalement, on peut assigner 3 objectifs à la redistribution :
. de justice sociale
. de protection sociale
. d’efficacité économique

Un objectif de justice sociale :


. Cet objectif consiste à lutter contre les inégalités au sein de la nation (redistribution
verticale).
. L’objectif de justice sociale rejoint le débat sur les inégalités dites « justes » (RAWLS), et
peut être interprété de différentes façons :
. Critère d’optimalité au sens de Pareto : l’optimum de Pareto est une situation
d’allocation des ressources dans laquelle on ne peut pas augmenter la satisfaction d’un agent
économique sans détériorer celle d’un autre. Ce critère est très contesté car il n’est pas question
d’équité. Exemple : une minorité de la population détient toutes les richesses est optimal pour
Pareto dans le sens où si on reprend la définition, l’augmentation de l’un ne dégrade pas celle de
l’autre.
. Critère utilitariste (BENTHAM et MILL) : il s’agit de la recherche de la
maximisation par l’État de l’utilité de la société considérée comme une somme d’utilité
individuelle. L’utilité marginale est décroissante ( la dernière unité consommée n’est pas aussi
satisfaisante que la première ) mais elle ne l’est pas pour tout le monde. Par conséquent la
redistribution des revenus au bénéfice des plus pauvres peut augmenter le bonheur global car
l’utilité marginale par les plus pauvres est supérieure à celle des populations les plus favorisées.
. Critère égalitariste : c’est un critère qui repose sur l’égalité stricte des situations et
sur un idéal de certaines utopies philosophique face aux excès de la propriété privée.
. Critère libéral : il insiste sur l’égalité des chances et d’existence ainsi que sur la
reconnaissance des droits de propriété. L’objectif est la méritocratie.

En France, les 10 % des plus riches concentrent 1/4 des revenus environ. Leur pouvoir d’achat a
augmenté 20* plus que celui des plus pauvres.

Un objectif de protection sociale :


. La redistribution permet de protéger les individus contre les risques sociaux.

Un objectif d’efficacité économique et de soutien de la demande :


. Ford, Beveridge, Keynes sont à l’origine de la conception de la redistribution comme
moteur de la croissance par le soutien à la demande.

Plusieurs approches démontrent les finalités économiques de la redistribution.


. A court terme :
. Dans une optique keynésienne, la redistribution permet de soutenir la demande
globale : surtout les plus pauvres de part leur propension marginale à consommer qui est plus forte
. Elle joue un rôle de stabilisateur automatique.
. A long terme :
. La redistribution présente des avantages en matière de paix sociale et de régulation
économique. BARRO (2000) souligne en ce sens que la redistribution réduit le crime et les activités
antisociales.
. Elle crée un filet de sécurité et réduit l’incertitude.

B. Les formes de la redistribution

La politique de redistribution se scinde en deux actions principales :


. La redistribution verticale qui consiste à transférer du pouvoir d’achat entre des individus
différents en visant à réduire les inégalités de revenus entre les ménages à haut revenu et ceux à
faibles revenus.
. La redistribution horizontale qui consiste à prendre en considération des situations sociales
différentes : les handicaps, l’âge, la zone géographique.

S’il convient de distinguer ces deux formes de redistribution, il faut souligner leur complémentarité
mais aussi leur caractère additionnel : les prestations familiales, les allocations de la CAF.

Ces deux modèles de redistribution s’appuient sur la notion d’équité ou de justice sociale.

L’équité verticale consiste à imposer plus fortement les ménages des déciles les ^mus élevés
comparativement à ceux des déciles les plus faibles.

L’équité horizontale consiste à imposer à niveau égal des ménages aux niveaux de vie identiques
avant impôts.

C. Les instruments de la redistribution

Le mécanisme de la redistribution s’opère en 4 temps :


. La redistribution des revenus s’appuie sur un premier agrégat : le revenu primaire supérieur
brut.
. A ce revenu, on vient rajouter les revenus de remplacement (ex : allocation chômage… ),
les revenus de transferts privés (ex : pension alimentaire) et retrancher les cotisations sociales
contributives. On aboutit alors au revenu initial.
. A ce revenu initial sont ensuite ôtées les cotisations sociales non contributives, CSG et
CRDS pour obtenir le revenu net.
. Sont ensuite retranchés les impôts directs et ajoutées les prestations sociales pour aboutir
au revenu disponible permettant alors seulement de calculer le niveau de vie disponible.
. Le revenu final correspond au revenu disponible moins la fiscalité directe.

Ainsi, la redistribution doit permettre une réduction de la dispersion des niveaux de revenus et
niveaux de vie.

Une politique de lutte contre les inégalités :


. Modifier la répartition des revenus primaires,
. Agir ex-post par une redistribution des revenus.
François BOURGUIGNON dans son rapport « fiscalité et redistribution » en 1998, présente quatre
circuits permettant de définir l’ensemble du système redistributif français et de l’appréhender par
son caractère pluridimensionnel et non restreint à la seule fiscalité :
.La fiscalité
.Les assurances sociales : l’ensemble des prestations conditionnées par le paiement de
contribution durant une période de temps et selon des conditions spécifiques. Ex : assurance
chômage, retraite ou assurance situationnel = des biens portants vers les malades.
. Le système des prestations non contributives : un système de solidarité plus que
d’assurance. Ex : les minimas sociaux, les allocations logements.
. L’ensemble des interventions publiques modifiant le jeu des marchés : prise en charge de la
production des biens publics ( voir typologie de Samuelson, 1954), service public, ou encore
fixation d’un salaire minimum.

II. Les modèles de protection sociale

La Protection Sociale correspond aux institutions et aux mécanismes de prise en charge collective
des risques sociaux.

Un risque social correspond à un événement qui entraîne une augmentation des dépenses d’un
individu ou une baisse de ses revenus (maladie, perte d’emploi, accidents..)

A. Les modèles de Bismarck, Beveridge. Laroque

Le modèle Bismarckien
. Le modèle assurantiel allemand de Bismarck (1880) est un système d’assurance sociale
fondé uniquement sur le travail et financé par les cotisations ouvrières et patronales.
. Lien entre la situation de travail des individus et les droits acquièrent ainsi et dont ils
disposent à la fois survenance du risque ?
. Il oblige les travailleurs salariés à cotiser.
.il s’agit donc de compenser

Le modèle de Beveridge
. Le modèle assistanciel britannique Beveridgien (1942) est fondé sur les trois principes, les
trois U :
. université de la protection sociale ( elle s’adresse à toute la population),
. uniformité ( les prestations sont calculées sur les besoins des individus et non sur
leurs revenus),
. unité de gestion (l’état gère l’ensemble du système).
. Financé par l’impôt, le système est entièrement nationalisé.
. Mais les problèmes de financement vont conduire à la multiplication des systèmes privés.
Ce modèle suppose de modifier le partage initial du revenu nationale de manière à lutter contre les
différentes formes de pauvreté ;
La société reconnaît à chacun de ses membres le droit à un minimum de ressources m^me s’il n’a
pas cotisé auparavant.
Il s’agit de répondre gratuitement aux risque de la vie par une redistribution verticale.
Le modèle de Laroque

Le système français(1945), préparé par LAROQUE choisit une solution intermédiaire.

In incorpore le système Beveridgien d’universalité tout en reprenant le système de financement


bismarckien.

Une logique de protection universelle complète le dispositif français, afin de couvrir certaines
catégories de dépenses pour tous les individus.

Les prestations telles que les allocations familiales sont donc accordées sans condition de
cotisations préalables ni de ressources et sont les mêmes pour tous.

La typologie d’ESPING-ANDERSEN

travaux d’Esping-Andersen distinguent 3 régimes principaux d’État providence en fonction de 3


variables principales :
. la qualité des droits sociaux (universalités, assurantiels, assistanciels),
. Les effets de la redistribution en terme de stratification sociale,
. et la manière dont l’État, marché et famille contribuent respectivement à la protection.

On peut distinguer trois modèles d’État-providence en reprenant la typologie d’ESPING-


ANDERSEN dans son ouvrage « les trois mondes de l’État-providence »(2007) :

. Un modèle conservateur ou continental : caractérisé par un héritage historique de forte


intervention de l’État.
. Ce modèle se retrouve en Allemagne, Autriche ou encore en France.
. On parle aussi de modèle corporatiste car la système des droits sociaux est
dépendant des métiers et de la profession.
. L’impact redistributif reste alors limité.
. La logique d’assurance bismarckienne prévaut.

. Le modèle libéral qui caractérise le Royaume Uni ou l’Irlande.


. Les prestations sociales et par conséquent la fiscalité y sont plus faibles.
. L’État encourage la place du marché.
. La protection sociale répond à une logique d’assistance.

. Le modèle sociale démocrate qui caractérise la Suède, le Danemark et la Finlande.


. Il privilégie l’inclusion socialen un niveau élevé de protection sociale. Il s’appuie
sur des mesures fortes en matière de formation notamment en direction des seniors et des femmes.
. La fiscalité est lourde.
. Le système d’assurance est fondé sur une logique beveridgienne où la protection
sociales est ouverte à tout individu, sans référence à l’activité professionnelle.
. Dans ce modèle, on assiste donc à une démarchandisation des droits sociaux.

C. La protection sociale en France

Elle repose sur un nombre important d’institutions :


. L’État : il exerce un pouvoir de tutelle sur les organismes de protection sociale, il la finance
directement ou non via les taxes et subventions.
. Les collectivités territoriales : pour la protection maternelle et infantile.
. Les institutions paritaires : les représentants des salariés et des employeurs mais aussi les
organismes de sécurité sociale.
. Secteur privé commercial : les pharmacies, les cliniques privées, les maisons de retraite.
. Les mutuelles
. Les associations.

Importance de la contribution sociale généralisée dans le financement de l’assurance maladie.

Les principales recettes de la protection sociale (758,7 milliards en 2016) sont :


. Les cotisations sociales versées par les employeurs, salariés et indépendants (461,3
milliards en 2016)
. Les impôts et taxes affectés à la redistribution (181,4 milliards en 2016)

Les principales dépenses de la PS :


. 75 % pour la sécurité sociales
. 20 % pour les ménages
. 4 % pour les mutuelles
. 1 % pour l’État

La couverture des risques sociaux :


. Avec près de 759Mds en 2016, les dépenses de sécurité sociale concernaient
principalement la couverture contre les risque vieillesse-survie (325,3)
. La santé 249,9
. La famille 54,5
. Puis l’emploi 44,5

Solde du régime général :


. Depuis plusieurs années, on assiste à une augmentation des dépenses sociales : de
part un vieillissement de la population, baisse ou stagnation de la natalité, hausse des prix des
matériels médicaux et hausse du chômage.

III. Le financement des politiques de redistribution

A. Les deux moyens de financement des politiques de redistribution

La fiscalité par l’intermédiaire de l’ensemble des prélèvements obligatoires dont :


. La fiscalité sur le travail : impôt sur le revenu principalement, il est à la fois proportionnel
et progressif.
. La fiscalité sur le capital : Impôt sur la fortune immobilière, taxe foncière, il sert à financer
une partie des minimas sociaux mais ce caractère redistributif de l’impôt est contesté car ce sont les
classes moyennes qui sont le plus fiscalisées.
. La fiscalité indirecte : la TVA, l’impôt qui rapporte le plus dans les caisses de l’État ( la
moitié contre 25 % pour l’impôt sur le revenu).
. Et enfin les cotisations sociales : contributives ( chômage, retraites…), non contributives
( maladie, famille…) et celles dédiées exclusivement à la protection sociale

L’endettement.

B. Les enjeux principaux du financement de la redistribution


Pour Pierre Rosanvallon, les systèmes de protection sociale sont soumis à une triple crise :
. Crise de financement : vieillissement démographique, hausse du chômage… = déficit
. Crise d’efficacité : malgré le niveau des dépenses : persistance d chômage, des inégalités,
de la pauvreté… = donc la PS échoue à réaliser ses objectifs.
. Crise de légitimité : l’adhésion à l’action de l’État est remise en cause en raison du
maintien des inégalités, du développement des thèses libérales et de la mondialisation qui tend à
réduire les salaires.

Ces critiques de l’intervention de l’État ainsi que de l’efficacité et de la légitimité de la PS sont au


cœur des analyses :
. La courbe de LAFFER : Un taux élevé d’imposition risque de dissuader de travailler et de
réduire les recettes fiscales. C’est la célèbre expression « trop d’impôts tue l’impôt » ; des taxes
« trop » élevées conduisent à des arbitrages : fuite des capitaux et arbitrage en faveur des loisirs.

De la théorie des choix publics (Public Choice) de Buchanan et Tullock.


Afin d’être réélus, les responsables politiques peuvent mener des politiques d’accroissement
des dépenses publiques à destination de certains agents économiques au détriment de l’intérêt
général.

La redistribution représnete un poids important dans le budget des administrations publiques et peut
poser la problématique de la soutenabilité d’une politique sociale et redistributive.

Une autre problématique consiste à consilier niveau de redistribution et maintien d’un niveau
d’activiter économique, de croissance.

L’efficacité du système redistributif est aussi discutable notamment dans ses effets sur la réduction
des inégalités, les incitations ou encore par sa nature comme le souligne T. PIKETTY, E. SAEZ et
C. LANDAIS dans leur ouvrage « pour une révolution fiscale » tout comme l’existence d’une
fiscalité optimale.

Actuellement, les grands enjeux de la PS sont multiples :


Le financement des retraites
Le financement de l’assurance maladies
La gestion du vieillissement démographique
La gestion de l’assurance chômage
Le financement par l’impôt
Le recours au marché pour la retraite ou la protection
Vers un revenu universel.

Vous aimerez peut-être aussi