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Qu’est-ce que le Tiers Etat

Auteur :
- Emmanuel-Joseph Sieyès
- Né à Fréjus en 1748
- Il se fait ordonner prêtre et se retrouve grand vicaire de Chartres en 1787
- Sieyès vu comme premier et plus profond théoricien de la Révolution Fr (livre jaune)
- Vu comme disciple de Condillac
o Etienne Bonnot de Condillac
o Philosophe mort en 1780
o Influence par Locke et son empirisme, il va influencer Jean-Jacques Rousseau
- Il se fait connaitre avec son Essai sur les privilèges en 1788
o Texte dans lequel il s’attaque aux privilèges et à la noblesse
o Il s’attire les faveurs du Tiers Etat
- Fait une carrière politique
o Elu député du clergé en 1787 à l’assemblée de l’Orléanais
o Député du Tiers Etat de Paris aux Etats généraux
- Il réapparait en 1795 pour le Directoire
- Organise le Coup d’Etat du 18 Brumaire
Nature :
- Pamphlet politique
- Texte assez court 180 pages
- Vendu 30 000 exemplaires
- Format classique et petit (montrer exemple)
Contexte :
- Texte publié en janvier 1789 mais rédigé durant l’assemblée des notables de 1788
o Sieyès précise même que ce texte peut être considéré comme la suite de son
Essai sur les privilèges
- Texte publié peu de temps avant les Etats généraux
- Les Etats généraux sont convoqués dès 1788
- Des élections ont lieu le 24 janvier 1789
o Après publication de son pamphlet
o L’abbé Sieyès est alors élu député du Tiers Etat pour la ville de Paris
o Député du Tiers et non du clergé car il a essuyé plusieurs échecs pour devenir
député du clergé0
o
- Période de trouble de la monarchie avec une monarchie qui est arrivé au bout, les
Etats généraux étant le dernier recours pour tenter de régler la situation
Problématique : Comment à travers son pamphlet Sieyès jette-il les bases d’un nouvel Etat-
nation ?
Plan :
I- Le Tiers-Etat moteur de la société
II- Ordre privilégié
III- Une conception nouvelle de la Nation
Développement :
I- Le Tiers-Etat moteur de la société
- Sieyès divise la Nation en deux parties
o Les travaux particuliers
o Fonctions publiques
A/ La campagne et l’industrie 
1. La campagne
- Dans un premier temps Sieyès dégage une première classe, celle des « travaux de la
Campagne » (cit.)
- Il met cette classe en avant car elle apporte les « matières premières des besoins de
l’homme » (cit.)
- On peut penser qu’il met cette classe en premier car elle est sans doute la plus
importante et nombreuse dans la société
- En effet, la population est majoritairement rurale
o On ne compte que 16% de la population urbanisée
- Également les trois quarts des Français appartiennent à la paysannerie, 3 français sur
4
o Distinction entre paysans propriétaires et sans terre mais ici pas précisé
- Alimentation générale de céréales transformées sous forme de pain ou de bouillies
o 1,5 à 2 kg par jour pour que l’on puisse manger à sa faim
2. L’industrie
- L’industrie ajoute « une valeur seconde plus ou moins composée » (cit.)
- Industrie qui celui Sieyès « perfectionne les bienfaits de la Nature » (cit.)
- Quelle est cette industrie ?
- On distingue trois grands types de production
o Production urbaine (corporations d’arts et métiers avec de grands
monopoles)
 Exemple à Lille de la manufacture de fils de lin retors qui comptait en
1788 environ 521 moulins à retordre. Ce qui fait que 2 500 personnes
étaient employées à la veille de la Révolution
o Production artisanale rurale
 Historiens parle de proto-industrie
 Production massive de biens (fils, tissus, petite métallurgie, …)
 Complément de salaires pour les paysans
 Producteur n’a aucun contrôle sur le salaire
o Production familiale
 Etablissements qui échappent aux cadres corporatifs
 Etablissements familiaux
Exemple de la compagnie de charbonnage d’Anzin (Hainaut) fondée en
1757 avec un capital de 630 000 livres tournois réparti entre 19
propriétaires
- Sieyès met donc la bourgeoisie industrielle en deuxième classe plus importante
o Bourgeoisie au sens de qui vit dans la ville et sens de patron (voir dictionnaire)
B/ Les financiers et les services
1. Les financiers
- Sieyès nous présente ensuite les marchands et négociants comme fin de la chaine de
production
- Ils font office de pont entre le Producteur et le Consommateur
o « agents intermédiaires utiles tant aux Producteurs qu’aux Consommateurs »
- Il distingue deux classes : les négociants et les marchands
- Les négociants sont des personnes qui font du commerce en gros
o Développement de la traite négrière
o La famille des Montaudoüin réalise 89 expéditions de Nantes
- On les retrouve dans tous les ports majeurs français au XVIIIe siècle
o Majoritairement des Nantais et Lorientais
- Ni marchand ni bourgeois, le milieu du négoce se caractérise par le renouvellement
et l’intégration de nouveaux venus
o Petits marchands enrichis
o Négociants étrangers
- « la garde et du transport »
o En plus d’être marchands, ils sont armateurs, propriétaires voire même
constructeurs de navires
- Les négociants sont parfois mal vu
o François Quenay, économiste
o « les commerçants participent à la richesse des nations, mais les nations ne
participent pas à la richesse des commerçants. Le négociant est étranger dans
sa patrie… »
- Les marchands, regroupent à l’inverse des négociants, le commerce intérieur
- Un essor des échanges marchands permet l’égalisation des prix au sein du royaume
2. Les services
- Sieyès évoque une autre classe assez générale
- A la différence de toutes celles évoqués, elle ne rentre pas réellement dans la chaine
de production évoquée précédemment
- Sieyès caractérise cette classe en disant qu’elle fournit « soins directement utiles ou
agréables à la personne »
- Sieyès donne par la suite un exemple en parlant de professions scientifiques
o Nous pouvons donc penser à tout ce qui concerne la médecine
- Puis il va même jusqu’à citer les services des domestiques
- Cette catégorie de la population ne sert donc pas au bon fonctionnement matériel de
la société, mais elle sert à la rendre agréable
C/ Les fonctions publiques
- Sieyès distingue ces travaux particuliers de ce qu’il appel fonction publique
- Il détail ce qui compose cette fonction publique
o « l’Epée, la Robe, l’Eglise et l’Administration »
- Sieyès part du principe que cela ne vaut pas la peine de détaillé car « les dix-neuf
vingtième » appartiennent au Tiers
- L’épée
o Correspond au domaine militaire
o Bien évidemment le Tiers-Etat occupe les postes de soldats et pas d’officiers
- La Robe
o Cela regroupe tout ce qui comprend la justice
o Un nombre important de membre du Tiers dans le domaine de la justice
o En 1789, sur 663 députés du Tiers-Etat, 70 % proviennent des domaines de la
loi (surtout des magistrats et des avocats)
- L’Administration
o Présence de membre du Tiers-Etat dans des postes administratifs territoriaux
o Ils occupent de petites fonctions, les postes clés étant réservés aux ordres de
la noblesse et du clergé
- Le Clergé
o Cela peut surprendre que le clergé soit dans les fonctions et non les ordres
o C’est ainsi dans la pensée de Sieyès
o Lui-même homme d’Eglise, il considère que le clergé est avant tout une
profession
o Il fait du clergé une profession car il considère qu’il est utile à la société
II- Face à un ordre privilégié
A/ Un ordre qui ne travaille pas
- Sieyès explique que les places « lucratives et honorifiques » sont réservées aux
« Membres de l’Ordre privilégié
- Membre de l’Ordre privilégié renvoie à la noblesse
o Terme qui est employé par d’autre auteurs
- Sieyès reproche à la noblesse de ne pas participer au travail
o « tout ce qu’il y a de vraiment pénible, de tous les soins que l’Ordre privilégié
refuse d’y remplir »
- Il est vrai que la noblesse ne participe pas au travail dans la société
o Principe renvoyant à la répartition de la société comme au Moyen-Age
(bellatores, auratores, laboratores)
- Pour rappel la noblesse ne compose que 1% de la population
o Diminution suite aux « Grandes recherches »
o Entre le XVIIe siècle et 1789, la noblesse perd 50 % de ses effectifs
- Sieyès va même plus loin en parlant de véritable caste
- Il explique également que ce n’est plus seulement l’homme qu’il faut payer, comme
dans le Tiers-Etat, mais la famille entière
- C’est avec cet argument qu’il explique le problème des privilèges de la noblesse
o La noblesse bénéficie en effet d’un certain nombre de privilège à la veille de la
Révolution française
- Certains nobles bénéficient de grandes rentrées d’argent avec les privilèges
o De 100 000 livres à 500 000 livres par an
B/ Un ordre qui gouverne
- En effet, c’est ce que Sieyès entend lorsqu’il dit « frapper l’Ordre du Tiers
d’interdiction »
o Sieyès explique que le Tiers-Etat est exclu de tout pouvoir, fait réel
- Sieyès dit que cette occupation unique du pouvoir provoque la création de monopole
o Cela renforce donc l’idée de véritable caste évoqué auparavant
- Ce 1% de la population possède une grande richesse, avoisine un cinquième des
terres du royaume, une domination considérable des campagnes avec les seigneuries
et les postes clés du pouvoir
- Sieyès compare le gouvernement à un « patrimoine » qui appartiendrait à la noblesse
o Le patrimoine s’enfle au profit non pas des gouvernés, mais des gouvernants
- La noblesse a tenté dans les dernières années avant la Révolution française de
renforcer son pouvoir
o C’est ce que l’on a appelé la réaction nobiliaire
- Cela s’est traduit concrètement par le dressage de censiers et terriers
o Les censiers permettant d’enregistrer la recette du cens et des rentes
o Les terriers sont des registres dans lesquels sont consignées les redevances et
obligations de la seigneurie
- Également l’Edit de Ségur en 1781 qui réservait la charge d’officier de l’armée aux
nobles
C/ Un ordre ancien inutile
- Sieyès nous explique cette conception des choses nous la retrouvons dans l’Egypte
ancienne
o « cet ordre des choses […] nous le trouvons, en lisant l’Histoire de l’ancienne
Egypte »
- En plus Sieyès parle même des Indiens
o « voyages aux grandes Indes »
o Cela renforce une fois de plus l’idée de caste
- Il considère cet ordre des choses comme destructeur, ennemi des progrès sociaux
- Sieyès va plus loin que seulement critiquer les privilèges ou critiquer l’ordre, il
souhaite la disparition de la noblesse
o « il faut laisser des considérations qui en agrandissant la question, en
l’éclairant, peut-être, par de nouveaux jours, ralentiroient notre marche »
- Sieyès s’inscrit avec l’expression de cette idée dans un des discours révolutionnaires
- Opposition de trois discours durant la période révolutionnaire
o Premier discours prônant la justice
 Veut une monarchie constitutionnelle avec les trois anciens ordres
 Restriction du pouvoir des députés
o Discours de la volonté
 Discours qui puise sa théorie dans la conception antique de la cité
 Liberté apparait comme une expression de la volonté générale
 Ce discours apporte la thèse de la souveraineté nationale
 Tension au sein de ce discours sur l’idée de représentation (Rousseau)
o Discours de la raison
 Discours de la modernité
 Refonte de l’administration, l’économie
 Idée de représentation des intérêts de la société via des assemblées
provinciales
- Sieyès se rallie au discours de la volonté et s’oppose frontalement au discours de la
justice qui est pour le maintien de la société d’ordre
III- La conception nouvelle de la Nation
A/ « le Tiers-Etat est une Nation complette »
- Pour Sieyès, la Nation ne peut être composée d’autres choses que du Tiers
o Cela s’explique entre autres par le fait que le Tiers-Etat représente 98 % de la
population
- Sieyès voit la nation comme un corps unitaire de citoyens exerçant une volonté
commune, inaliénable
- La nation suppose donc que la citoyenneté soit universelle et égale
- Cette conception de la nation amène à l’exclusion des privilégiés pour deux raisons
o Pas d’égalité possible avec leurs privilèges qui constitue pour Sieyès un
imperium in Imperio
o Ils ne sont pas utiles à la société car ils ne produisent rien
- Avec cette idée Sieyès renverse donc toute la pensée de l’Ancien Régime
- C’est une refonte complète de la société
o « Qu’est-ce que le Tiers-Etat ? Tout »
B/ La place du Tiers en politique
- Pour Sieyès, le Tiers-Etat doit occuper une place en politique
o Son action serait d’ailleurs meilleure que celle de la noblesse
- Pourquoi doit-il être au pouvoir ?
o Comme déjà dit, il représente 98 % de la population
o Également parcequ’il est mieux placé pour représenter les idées du peuple
 « les places supérieures seroient infiniment mieux remplies »
 Toutes ces personnes partagent une histoire commune, des
aspirations communes et un mode de vie commun
 Le Tiers-Etat ne pouvait donc pas se sentir représenter ou défendu par
la noblesse ou même le clergé
o Récompense pour ses « talens et services reconnus »
- Sieyès avance l’idée de « travail représentatif »
o Cela signifie que le pouvoir se réparti en fonction de qui effectue quel travail
o Ce sont ceux qui travaillent qui doivent gouverner et être au pouvoir
- Il est donc naturel qu’avec cette conception, la noblesse est écartée du pouvoir en
plus d’être écarté de la nation
- Dans cette conception, le clergé participe au pouvoir mais perd son statut d’ordre
C/ L’idée de souveraineté nationale
- Si l’on suit le raisonnement de Sieyès
o La Nation est le Tiers-Etat
o Tout ce qui n’est pas du Tiers n’est pas de la Nation
o Le Tiers-Etat est donc le seul à pouvoir gouverner
- C’est ce que sous-entend Sieyès lorsqu’il dit
o « Tout, mais un tout libre et florissant »
o « Tout iroit mieux sans les autres »
- Dans la pensée sieyesienne, le Tiers-Etat se retrouve donc maitre du pouvoir
- Sieyès souhaite donc que le Tiers-Etat ne soit plus, comme il était avant, consulté à
but seulement exceptionnel
- Le Tiers-Etat doit devenir « l’homme fort et robuste »
o Pour cela il faut aussi que le Tiers soit représenté par des « députés tirés de
son ordre »
o Cependant il faudrait pour représenter toutes les fractions du peuple des
députés provenant de la paysannerie, de l’industrie, …
- Cette idée de souveraineté nationale est à nuancer car dans la pensée sieyèsienne, il
y a un postulat qui ai fait
o Celui que la Nation est une et indivisible, inaliénable avec une volonté
commune
o Ce qui est une caricature de la société de son temps
Conclusion :
- Nous avons pu voir à travers cet extrait l’ébauche que Sieyès fait d’un nouvel Etat-
nation
- Presque tous les ingrédients sont réunis
o L’idée de la Nation comme une seule entité
o L’idée d’une Nation qui est également souveraine
o Etat purgé de toutes les classes privilégiées
- Manque encore le nationalisme ou patriotisme
Ouverture :
- Constitution d’une Assemblée Nationale en juin 1789
- Mise en place d’une souveraineté nationale
- Nuit du 4 août 1789
Bibliographie :
Révolution, Consulat, Empire 1789-1815, sous la dir. de Joël CORNETTE, Paris, Belin, 2006, 715
p.
FURET (François) et OZOUF (Mona), Dictionnaire critique de la Révolution française. tome 2
Acteurs, Paris, Flammarion, 1992, 466 p.
BRIARD (Michel) et DUPUY (Pascal), La Révolution française. Dynamiques et ruptures, 1787-
1804, Paris, Armand Colin, Coll. U, 2004, 382 p.
CARON (Jean-Claude), La nation, l’Etat et la démocratie en France de 1789 à 1914, Paris,
Armand Colin, Coll. U, 1995, 364 p.
VOVELLE (Michel), La Révolution française, 1789-1799, Paris, Armand Colin, Coll. « Cursus »,
2015, 220 p.
1789, Recueil de textes et documents du XVIIIe siècle à nos jours, sous la dir. de Alain
MONCHABLON, Paris, Centre national de documentation pédagogique, 1989, 287 p.
GRENOUILLEAU (Alain), Fortunes de Mers, sirènes coloniales. XVIIe-XXe siècles, Paris, CNRS
Editions, 2019, 239 p.
Sitographie :
BOSSENGA Gail. La Révolution française et les corporations : trois exemples lillois. In: Annales.
Economies, sociétés, civilisations. 43ᵉ année, N. 2, 1988. pp. 405-426
ROCHE Daniel. Négoce et culture dans la France du XVIIIe siècle. In: Revue d’histoire moderne
et contemporaine, tome 25 N°3, Juillet-septembre 1978. pp. 375-395

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