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RABAT
FACULTE DES SCIENCES
JURIDIQUES ECONOMIQUES ET
SOCIALES
AGDAL
COURS DE
DROIT
COMMERCIAL
PROFESSEUR Chakib EL OUFIR
MASTER S 1
GESTION FINANCIERE,
COMPTABLE ET FISCALE
Master GFCF Professeur Chakib
2016-2017 El Oufir
2
INTRODUCTION
Alors que l’économie est la science d’observation des phénomènes du
monde des richesses (modes de production et de circulation des richesses), le
droit est la discipline qui le réglemente.
Le droit est directement lié aux sciences économiques, car les activités
économiques ne peuvent s’exercer dans le désordre, il faut qu’elles soient
réglementées. Le droit va établir des règles qui vont régir les activités
économiques. Il sera au service des économistes puisqu’il va réglementer tout
ce qui concerne la production et la circulation des richesses.
Ce qui nous interesse directement de ces règles, ce sont celles qui
concernent la production et la circulation des richesses, les règles qui régissent
le monde économique, celui de la spéculation, de la recherche du profit.
L’ensemble de ces règles forme le droit commercial.
Qu’est ce que le droit commercial ? Quelles sont ses particularités ?
Quelles sont ses sources ? Et quelles en sont les juridictions compétentes ?
1
B.O. n° 4418, du 3 octobre 1996, pp. 568-634.
2
Dahir 25/12/1992 portant promulgation de la loi 9/88 relative aux obligations comptables des
commerçants (B.O. n° 4183 du 30/12/1992, p.623).
3
Dahir portant loi 1/93 du 6/7/1993 relatif à l’exercice de l’activité des établissements de crédit
et de leur contrôle, appelée « loi bancaire » (B.O. n°4210 du 7/7/1993, p.333).
4
Dahir portant loi n° 1-93-211 du 21 septembre 1993 relatif à la Bourse des valeurs (B.O. n°
4223 du 6/10/1993, p. 513).
5
La loi cadre n° 18/95 formant charte de l’investissement, dahir du 8/11/1995 (B.O. n° 4336 du
6/12/1995).
les sociétés anonymes6, les autres sociétés commerciales7, les tribunaux de
commerce8, la loi sur la liberté des prix et de la concurrence 9, la loi relative à la
protection de la propriété industrielle10, etc.
2/ Le D.O.C. :
Le D.O.C. est notre code civil (Dahir formant code des obligations et
contrats également du 12 août 1913).
En tant que code de droit privé marocain, le D.O.C. constitue ce qu'on
appelle le droit commun. Par conséquent, en cas de lacune des règles
commerciales, ce sont ses règles qui s’appliquent.
À ce propos, le nouveau code de commerce stipule dans son article
2 : « il est statué en matière commerciale, conformément aux lois, coutumes et
usages du commerce ou au droit civil, dans la mesure où il ne contredit pas les
principes fondamentaux du droit commercial ». Même les lois relatives aux
sociétés renvoient à l'application des règles du DOC lorsqu'elles ne sont pas
contradictoires avec elles.
B- LES SOURCES INTERNATIONALES
Il s’agit des conventions internationales qui constituent une source
fondamentale du droit commercial.
Ces conventions peuvent être bilatérales se limitant à régler certaines
questions entre deux États signataires ou entre un État et un groupement
économique régional (par exemple l’accord d’association entre le Maroc et la
CE).
Il existe aussi des conventions internationales, par exemple les traités
internationaux ratifiés par le Maroc tels que ceux sur les transports maritimes,
ferroviaire, routier et aérien ; les accords du GATT ; les conventions
internationales portant lois uniformes (les conventions de Genève du 7 juin
6
Ddahir n° 1-96-124 du 30 août 1996 portant promulgation de la loi 17/95 relative aux
sociétés anonymes (B.O. n° 4422, du 17 octobre 1996, pp. 661-704).
7
Dahir n° 1-97-49 du 13 février 1997 portant promulgation de la loi 5/96 sur la société en nom
collectif, la société en commandite simple, la société en commandite par actions, la société à
responsabilité limitée et la société en participation (B.O. n° 4478 du 1 er mai 1997, p. 482).
8
Dahir n° 1-97-65 du 12 février 1997 portant promulgation de la loi 53/95 instituant des
juridictions de commerce (B.O. 15 mai 1997, n° 4482, p. 520).
9
Loi n° 06-99 promulguée par Dahir n° 1-00-225 du 5 juin 2000, Bulletin Officiel n° 4810 du
Jeudi 6 Juillet 2000.
10
Loi n°17-97 promulguée par Dahir N° 1-00-19 du 15 Février 2000.
1930 sur la lettre de change et le billet à ordre et du 19 mars 1931 sur le
chèque).
Le droit commercial n’a pas que des sources écrites, il en a d’autres
importants, mêmes non écrites.
B- LES SOURCES NON ECRITES
Il s’agit des usages et de la jurisprudence.
A- LES USAGES COMMERCIAUX
Bien que le droit commercial soit codifié, les usages commerciaux
continuent d’en constituer une source fondamentale ; car la législation, avec sa
lenteur, est incapable de suivre l’évolution rapide du monde des affaires.
Les usages sont des règles générales non écrites issues de pratiques
professionnelles constantes et tacitement acceptées par les commerçants à
l’occasion des négociations ou de l’exécution de leurs opérations
commerciales.
Ce sont les pratiques qui créent des règles par la force de l’habitude
professionnelle.
C’est à l’occasion de la conclusion des contrats et de leur exécution que
le rôle des usages intervient, par exemple, en matière de ventes commerciales
ce sont les usages de chaque profession qui fixent les délais, les modalités et
les modes de paiement, les délais de livraison, la charge de la livraison et ses
frais, la charge des frais de courtage et leur taux, les risques des défauts des
marchandises, etc.
Les usages peuvent réglementer toute une institution nouvellement
créée, par exemple le leasing était, avant le nouveau code, presque
exclusivement régis par les usages.
B- LA JURISPRUDENCE
C’est la solution donnée par un ensemble de décisions concordantes
rendues par les juridictions sur une question de droit.
Ce sont les précédents judiciaires qui servent de guide aux décisions
des juridictions à travers la pyramide judiciaire, l’unification de la jurisprudence
se réalise d’ailleurs par le biais des voies de recours.
Il n’est pas besoin d’insister sur le rôle de la jurisprudence en matière
commerciale ; c’est aux tribunaux qu’il revient d’interpréter les lois et les
contrats conclus entre commerçants, de fixer les usages auxquels ils se
réfèrent, de déterminer le statut des institutions nouvelles créées par la
pratique.
11
Il existe actuellement 8 tribunaux de première instance de commerce: Agadir, Marrakech,
Meknes, Fes, Oujda, Tanger, Rabat et Casablanca.
12
(B.O. n° 5030 du 15/8/2002)
13
B – Les cours d’appel de commerce
A– COMPOSITION
La cour d’appel de commerce comprend un premier président, des
présidents de chambres et des conseillers, un ministère public composé d’un
procureur général du roi et de ses substituts, un greffe et un secrétariat du
ministère public.
Elle tient ses audiences et rend ses arrêts par un président de chambre
et deux conseillers, assistés d’un greffier.
B– COMPÉTENCE
La cour d’appel de commerce connaît des appels contre les jugements
rendus par le tribunal de commerce.
L’appel doit être formé dans un délai de 15 jours à compter de la date de
la notification du jugement du tribunal de commerce.
Plan de la cour :
PREMIÈRE PARTIE :
13
Il existe actuellement trois cours d'appel de commerce: Casablanca, Fes et Agadir
effectué par un commerçant, c’est un acte de commerce ; si le même acte est
exercé par un non-commerçant, il est civil.
Les actes de commerce sont donc, dans ce système, strictement l’œuvre
des commerçants et nul ne peut accomplir un acte de commerce s’il n’exerce
pas une profession commerciale.
Le système objectif : Dans ce système c’est l’inverse qui se produit,
c’est l’acte de commerce qui donne la qualité commerciale à celui qui l’exerce.
Le droit commercial est le droit des actes de commerce et non celui des
commerçants, on parle du code de commerce et non du code des commerçants
; lorsque la loi qualifie un acte de commercial, toute personne, même un non
commerçant, qui accomplirait un tel acte serait assujettie au droit commercial.
Ce système repose exclusivement sur l’acte effectué, indépendamment
de la personne de son auteur.
La position du législateur : Le code de commerce de 1913, à l’instar
du code français de 1807, se voulait adopter les deux systèmes. Le nouveau
code de commerce de 1996 annonce la même position en disposant dans son
article 1er que «la présente loi régit les commerçants et les actes de commerce
».
Mais malgré cette apparence qui laisse entendre que notre code adopte
les deux systèmes, il ressort des diverses dispositions de ce dernier que la
tendance objective y a le maître mot.
Néanmoins, quel que soit le système adopté, nous pouvons considérer
que la matière du droit commercial est double : ce sont les activités
commerciales et les actes du commerce qui en constituent l’objet et le
commerçant le sujet.
Plan de la première partie :
Chapitre I – L'objet du droit commercial
Chapitre II – Le sujet du droit commercial
14
- Exemples des mines : fer, cuivre et tous les métaux, phosphate, charbon, etc. Les carrières
sont de sable, de marbre, de pierres, d’ardoise, d’argile, etc.
15
- Il ne peut s’agir bien entendu que des exploitations agricoles traditionnelles ; les
cultivateurs et les éleveurs traditionnels ne sont pas des commerçants même s’ils achètent leurs
produits comme les semences, les engrais ou les animaux qu’ils revendent ; par contre, les
exploitations agricoles modernes (d’agroalimentaire ou d’élevage industriel) ne peuvent être
exclues du domaine commercial.
logiciels par exemple), le compositeur d’une œuvre musicale, l’artiste peintre
qui vendent les produits de leur création.
§ 2 – LES ACTIVITES DE DISTRIBUTION
La distribution est l’ensemble des opérations par lesquelles les produits
sont répartis entre les consommateurs.
Deux activités de distributions peuvent se dégager de l'art. 6 : l’achat
pour revente et la fourniture.
A - L’ACHAT POUR REVENDRE
L'achat pour revendre peut avoir pour objet aussi bien les meubles
(corporels ou incorporels) ou les immeubles16.
Cet achat doit avoir lieu avec l'intention de revendre et quel que soit, en
l’état ou après transformation, c'est-à-dire qu'il s'agisse de meubles ou
d'immeubles, la revente constitue une activité commerciale qu'ils soient
revendus tels qu'ils ont été achetés ou après les avoir travaillés. Ainsi, nous
pouvons intégrer dans ce secteur non seulement les industries de
transformation, mais aussi certaines petites entreprises comme la menuiserie,
la boulangerie ou la pâtisserie.
Mais si le contrat de vente est un contrat à exécution instantanée, le
contrat de fourniture est un contrat à exécution successive.
B - LA FOURNITURE
C’est le contrat par lequel le fournisseur s’engage, moyennant un prix, à
délivrer des produits qu’il se procure (achète) préalablement aux livraisons ou à
effectuer des services à ses clients, de manière périodique ou continue. C’est
pourquoi le contrat de fourniture est un contrat à exécution successive.
Par conséquent, la fourniture peut concerner aussi bien les biens que les
services.
Par « produits » il faut entendre les denrées et les marchandises
(produits alimentaires ou industriels), mais aussi actuellement l’eau, l’électricité
et le gaz.
La fourniture peut également concerner les services. Les services dont il
est question ici sont ceux qui sont fournis de manière périodique et régulière ;
exemples : les services d’entretien et de réparations des appareils, machines,
véhicules…ou le service de gardiennage.
16
Par contre, la location des immeubles reste civile.
Et, dans le cadre de la politique d’extension de la commercialité de
certains services publics, le législateur de 1996 a intégré dans les activités
commerciales même les services rendus en matière de postes et
télécommunications (art. 6-18°).
§ 3 - LES ACTIVITES DE SERVICES
Il s’agit d’activités qui consistent à exécuter un travail au profit des clients
ou de mettre à leur disposition l’usage temporaire de certains biens.
Trois catégories d’activités de services se dégagent de l’art. 6.
A - LES SERVICES DE L’INTERMEDIATION
L’objet de ces activités réside seulement dans l’information, le conseil et
l’assistance aux tiers cocontractants.
a - Le courtage
C’est l’activité par laquelle une personne (le courtier) met deux
personnes en relation en vue de la conclusion d’un contrat.
Par conséquent, le courtier n’intervient d’aucune manière dans le contrat
conclu entre les personnes qu’il rapproche.
b - La commission
Le contrat de commission est une variété de mandat en vertu duquel le
commissionnaire s’engage à réaliser des opérations tels que des achats ou
des ventes pour le compte du commettant, mais en son nom personnel.
À la différence du simple mandataire qui traite au nom de son mandant,
le commissionnaire contracte avec les tiers en son nom personnel. Les tiers
(les cocontractants) ne connaissent que le commissionnaire.
Dans la pratique, les commissionnaires sont désignés par des
dénominations techniques suivant leurs domaines de spécialisation : les
intermédiaires de la bourse (ou agents de change en France), les
commissionnaires de transport, les transitaires de douane, les mandataires des
halles, etc.
c - Les bureaux et agences d’affaires
Ce sont des activités qui consistent à administrer les affaires des autres
et à gérer leurs biens, moyennant rémunération. Les agences d’affaires
peuvent même être spécialisées dans certains domaines ; ces spécialités ont
même été prises en considération par le nouveau code qui cite expressément
les agences de voyages, les agences de publicité17 et les agences
d’information18.
B - LES SERVICES FINANCIERS
C’est l’ensemble des activités qui ont pour objet la spéculation sur
l’argent.
L’alinéa 7 de l’article 6 mentionne la banque, le crédit et les
transactions financières, mais il faut aussi ajouter les assurances (al. 8) qui
visent d’ailleurs la spéculation sur l’argent (les primes d’assurance).
Que veut-on dire par activités de banque, de crédit et de finance ?
Les définitions sont désormais données par la loi bancaire 19.
1 - La banque
D’après la loi bancaire, les principales activités bancaires sont :
- la réception de fonds du public ;
- la distribution de crédits ;
- et la mise à la disposition de la clientèle de tous moyens de paiement
ou leur gestion.
2 - Le crédit
Il consiste, d’après l’article 3 de la loi bancaire, en trois opérations, qui
doivent toutes être effectuées à titre onéreux20. Ces opérations sont :
- met ou s'oblige de mettre des fonds à la disposition d'une autre
personne, à charge pour celle-ci de les rembourser ;
- ou prend dans l'intérêt d'une autre personne, un engagement par
signature sous forme d'aval, de cautionnement ou de toute autre garantie.
17
- Ce sont toutes les agences de publicité qui interviennent entre les annonceurs et les médias
(télévision, radio, journaux…)
18
- Les agences d’information sont appelées en pratique les agences de renseignements
commerciaux ; elles sont spécialisées dans l’ingénierie financière, le marketing et tous les
services destinés à faciliter la création et le développement des entreprises.
On ne peut bien entendu exclure du domaine commercial les agences de presse ou les organes
de presse (journaux et périodiques autres que les journaux d’opinion) dans la mesure où
l’information est devenue une véritable industrie avec des moyens financiers et techniques
considérables à visée commerciale incontestée.
19
- Dahir n° 1-05-178 du 14 février 2006 portant promulgation de la loi n° 34-03 relative aux
établissements de crédit et organismes assimilés. B.O. n° 5400 du 2 mars 2006 p. 298.
20
- C’est une condition essentielle, car les prêts concédés à titre gratuit ne sont pas considérés
du crédit.
3 - Les transactions financières
Il s’agit en fait de l’activité des sociétés de financements telles que
définies par l’article 10, al.3 de la loi bancaire, comme les sociétés de crédit à la
consommation. C’est donc pour ce genre d’établissements que l’article 6 du
code de commerce a réservé ce concept de transactions financières qu’il a
délibérément séparé des autres concepts de la banque et du crédit.
4 - L’assurance
Le code de 1996 parle des opérations d’assurances «à primes fixes »,
c'est-à-dire les assurances du secteur commercial, pour les distinguer des
assurances mutuelles21.
C - LES AUTRES SERVICES
Quatre activités prévues par l'article 6 peuvent être rangées dans ce
cadre.
1 – L'activité industrielle
L’art. 6-5° parle d’activité industrielle. Il s’agit de toute activité qui
consiste à effectuer des travaux sur des biens meubles 22 ou immeubles.
Mais à la différence avec l'achat pour revente après transformation où il y
a achat de la matière première qui sera transformée pour être revendue,
l'article 6 désigne par activités industrielles celles où les produits ou matières
premières sont fournis à l'industriel par ses clients à charges pour lui de les leur
restituer après transformation.
Mentionnons enfin dans le cadre des autres services, l'extension de la
commercialité pour la première fois à l’artisanat23, l’imprimerie et l’édition, le
bâtiment et les travaux publics.
L’activité industrielle peut également avoir pour objet les immeubles (les
entreprises ayant pour objet d’effectuer des travaux sur des immeubles tels que
21
Telles que la M.A.E.M. (Mutuelle d’Assurances des Enseignants du Maroc), et la M.A.M.D.A.
(Mutuelle Agricole Marocaine d’Assurance) et des organismes de prévoyance sociale telles que
la M.G.P.A.P.M. (Mutuelle Générale du Personnel des Administrations Publiques du Maroc), la
M.G.E.N. (la mutuelle générale de l’éducation nationale et les organismes à caractère social
telles que la CNSS (caisse nationale de la sécurité sociale) et la CIMR (caisse
interprofessionnelle marocaine de retraite).
22
- Certaines activités telles que la blanchisserie peuvent entrer dans cette catégorie.
23
- Ce qui inclue aujourd’hui tous les petits artisans comme le coiffeur, le tailleur, le plombier,
l’électricien, le maçon ; actuellement même les chauffeurs de taxis indépendants, qui étaient
jadis assimilés aux artisans, n’échappent pas au droit commercial.
le nivellement et le terrassement et qu’on appelait les manufactures
immobilières).
2 - La location de meubles
La location est une activité de service en vertu de laquelle le bailleur met
à la disposition de son locataire la jouissance temporaire de certains biens.
En vertu de l’art 6 - 1° et 2° toute location des biens meubles corporels
(voitures, machines, bijoux,) ou incorporels (des films) est une activité
commerciale quelle que soit l’origine de ces biens, qu’ils soient achetés ou
seulement loués.
Le législateur de 1996 est resté muet sur les opérations de location des
immeubles. L’achat d’immeubles en vue de leur location demeure donc une
activité civile.
3 - L’exploitation de locaux à usage public
Au sein de l’article 6 on dénombre quatre sortes de ces établissements.
- La vente aux enchères publiques : Il s’agit de l’exploitation de salles de
ventes aux enchères publiques des marchandises.
- L’exploitation de magasins généraux : ce sont des entrepôts dans
lesquels les marchandises sont déposées contre remise de titres négociables,
appelés récépissés - warrants, qui permettent la vente ou le nantissement de
ces marchandises sans leur déplacement.
- L’exploitation des entrepôts publics : ce sont également des locaux de
dépôt de marchandises mais, avec remise de simples reçus qui ne bénéficient
pas des vertus des récépissés - warrants. Exemple : les entrepôts des ports ou
des aéroports, les entrepôts frigorifiques, les garde-meubles, les garages de
voitures, etc.
- L’organisation de spectacles publics : il s’agit de l’organisation de
spectacles offerts au public dans des salles ou locaux destinés à cet effet dans
un but lucratif (théâtre, cinéma, salles de conférences et lieux des
manifestations sportives professionnelles).
Quant à l’industrie hôtelière (l’hôtellerie et la restauration), on ne peut
soutenir qu’il s’agit d’une activité civile.
4 - Le transport
La commercialité du transport se base sur le fait qu’il participe à la
circulation des richesses, qu’il s’agisse du transport des personnes ou des
marchandises et quel que soit le mode de transport.
24
- On peut encore citer les crédits que le commerçant contracte pour le développement de son
entreprise, les contrats d’assurance relatifs aux opérations commerciales (les assurances
contractées en vue de l’obtention de crédits bancaires, les assurances relatives aux transports
des marchandises ou du personnel), les contrats d’assurance relatifs aux biens de
l’entreprise (assurance incendie des magasins, entrepôts), les contrats de travail conclus entre
le commerçant et ses employés, l’achat ou la location d’immeubles pour l’exercice du
commerce, etc.
C’est le cas pour toutes les ventes au détail ou ventes à la
consommation : l’acte est commercial pour le vendeur et civil pour le
consommateur.
Devant le silence du code de 1913, c’est la jurisprudence qui a toujours
décidé des règles à appliquer aux actes mixtes avant que le code de 1996 ne
les consacre légalement. Son article 4 dispose en effet que « lorsque l’acte est
commercial pour un contractant et civil pour l’autre, les règles du droit
commercial s’appliquent à la partie pour qui l’acte est commercial ; elles ne
peuvent être opposées à la partie pour qui l’acte est civil sauf disposition
spéciale contraire ».
Par conséquent, les solutions consacrées précédemment par la doctrine
et la jurisprudence en matière des actes mixtes resteront toujours applicables :
1 - La compétence judiciaire
Actuellement, avec la création des tribunaux de commerce, la loi a confié
au commerçant de convenir avec le non commerçant d’attribuer la compétence
au tribunal de commerce pour connaître des litiges pouvant les opposer à
l’occasion de l’exercice de l’activité du commerçant.
2 - La preuve
La jurisprudence a appliqué le principe suivant lequel le régime des
preuves s’apprécie en fonction de la personne contre laquelle la preuve doit
être faite.
Par conséquent, dans un acte mixte :
- le commerçant ne peut invoquer la liberté de la preuve contre le non
commerçant, il ne peut établir la preuve à l’égard de ce dernier qu’en se
conformant aux règles du droit civil (nécessité d'un écrit lorsque l’opération
excède 250 dhs).
- inversement, lorsque le non commerçant doit fournir la preuve contre le
commerçant, la preuve sera libre pour lui (c’est-à-dire même par témoins).
3 - La prescription
# Avant le code de 1996 il était fait application des règles du D.O.C. qui
prévoyait deux prescriptions :
- une prescription de 5 ans, s’agissant d’obligations contractées entre
commerçants pour les besoins de leur commerce ;
- la prescription en matière civile de 15 ans.
# Actuellement, avec le nouveau code, lorsqu’il s’agit des actes mixtes,
cette prescription est unifiée ; l’article 5 a prévu désormais une seule
prescription de 5 ans, qu’il s’agisse de relations entre commerçants à l’occasion
de leur commerce ou de relations entre commerçants et non commerçants.
25
- V. à ce sujet notre article paru dans le journal L’opinion du 21 mars 1996, p. 1, intitulé :
«La restauration du droit de la femme mariée à la liberté d’exercer le commerce».
26
Sous le dahir du 14 mars 1938, l'âge de la majorité était fixé à 25 ans, sous le dahir du 25
janvier 1958 formant CSP il est passé à 21 ans, ensuite à 20 ans par dahir du 11 juin 1992.
27
Depuis la modification de l’ancien code de statut personnel par le dahir du 24 mars 2003
(B.O .n° 5096 du Jeudi 3 Avril 2003) prévu actuellement par l’article 209 du nouveau Code de la
famille.
§ II - LES RESTRICTIONS A LA LIBERTE DU COMMERCE
La liberté du commerce est un principe fondamental de notre droit,
consacré désormais par la constitution28.
Toutefois, cette liberté du commerce est limitée par certaines restrictions.
Le non-respect de ces restrictions est puni, suivant les cas, par des
sanctions disciplinaires ou administratives et même, le cas échéant, pénales.
En outre, les opérations commerciales effectuées par le contrevenant
sont considérés valables et peuvent le soumettre aux règles du droit
commercial, notamment celles relatives aux procédures de redressement et de
liquidation judiciaires.
Cette règle est maintenant consacrée expressément par l’article 11 du
code de commerce qui dispose que « toute personne qui, en dépit d’une
interdiction, d’une déchéance ou d’une incompatibilité, exerce habituellement
une activité commerciale, est réputé commerçant ».
A - LES INCOMPATIBILITÉS
Il arrive que certaines personnes exercent certaines professions, et cela
ne les empêche pas d’exercer le commerce en parallèle. Mais cette faculté
n’est pas toujours possible, car le législateur estime, pour différentes raisons,
que certaines professions sont incompatibles avec l’exercice du commerce, par
exemple les médecins, les avocats, les adouls, les notaires, les fonctionnaires,
etc.
B - LES DÉCHÉANCES
Il s’agit d’une autre restriction à l’exercice du commerce qui vise les
commerçants ou les postulants au commerce, c’est-à-dire les personnes qui ont
fait l’objet de certaines condamnations pénales (pour vol, escroquerie, abus de
confiance, émission de chèque sans provision, infractions fiscales ou
douanières, banqueroute, etc.) ou d’une liquidation judiciaire.
En outre, la déchéance commerciale emporte interdiction de diriger,
toute entreprise ayant une activité économique (art 711 code de commerce).
28
- L’article 15 de la constitution dispose que le droit d’entreprendre demeure garanti.
Ces déchéances résultent de divers textes législatifs spéciaux 29 (ce sont
des déchéances de plein droit) mais, dans certains cas, elles doivent être
prononcées par jugement.
C - LES INTERDICTIONS
Au titre de cette restriction, le commerçant n’a pas le droit de postuler à
l’exercice de certaines activités commerciales :
- lorsque ces activités sont interdites par le législateur : par exemple
l’interdiction du commerce de la fausse monnaie (art. 335 C.P.), l’interdiction du
commerce lié aux jeux de hasard (art. 282 C.P.), l’interdiction du commerce des
objets et images contraires aux mœurs (art. 59 dahir 15/11/1958 formant code
de la presse), le commerce des stupéfiants ;
- ou lorsque ces activités constituent un monopole de l’Etat : par
exemple la recherche du pétrole et du gaz, l’exploitation et le commerce des
phosphates, le transport ferroviaire, etc.
D - LES AUTORISATIONS
Il s’agit de l’interdiction d’exercer certaines activités commerciales sans
autorisation préalable des autorités administratives.
En effet, dans certains cas, une autorisation administrative, sous forme
d’agrément ou de licence, est nécessaire avant l’ouverture du commerce ou
l’exercice de certaines activités commerciales, par exemple :
- la vente des boissons alcooliques (qui est soumise, suivant le cas, à
une licence ou à une autorisation),
- les activités cinématographiques (notamment les clubs vidéo soumis à
une autorisation du C.C.M.),
- les agences de voyages (qui doivent être autorisées par le ministère du
tourisme),
- le transport public des personnes (soumis à des agréments du
ministère du transport), etc.
Dans d’autres cas l’existence de ces autorisations s’explique par des
exigences de la profession, par exemple l’ouverture d’une pharmacie nécessite
d’être titulaire d’un diplôme de pharmacien, les banques et les sociétés
d’assurances doivent être inscrites sur les listes de ces professions, etc.
29
- Par exemple la loi bancaire du 6/7/1993 (art 31), la profession d’agent d’affaires : dahir du
12/1/1945, les agences de voyages : dahir portant loi du 8/10/1977, les pharmaciens : dahir du
19/2/1960, les intermédiaires d’assurances : dahir portant loi du 9/10/1977, etc.
Il faut ajouter que certaines activités ne peuvent être exercées que par
des personnes morales, par exemple les activités bancaires.
31
- TPI d’Oujda, 24 mai 1961, Revue Marocaine de Droit du 1/11/1961, pp. 415 - 417.
28
Master GFCF Professeur Chakib
2016-2017 El Oufir
32
- B.O. 30/12/1992, n° 4183 bis, p. 623.
29
A - LES LIVRES ET DOCUMENTS COMPTABLES
Désormais, notre législation actuelle ne dispense plus aucun
commerçant, aussi modeste que soit son commerce, de la tenue de la
comptabilité commerciale. L’article 1er de la loi 9-88 impose en effet à toute
personne, physique ou morale, ayant la qualité de commerçant de tenir une
comptabilité dans les formes qu’elle prescrit.
Dans ce but trois livres comptables sont obligatoires pour tous les
commerçants, à savoir :
- le livre journal : C’est un registre où sont enregistrées
chronologiquement opération par opération et jour par jour les mouvements
affectant les actifs et les passifs de l’entreprise. On y enregistre par exemple
toutes les ventes et tous les achats de la journée, les factures payées, les
salaires versés…
- le grand livre : C’est un livre où sont reportées les écritures du livre -
journal ; il a pour objet de récapituler et d’enregistrer ces écritures suivant le
plan de comptes du commerçant. Il s’agit en quelque sorte d’un recueil de tous
les comptes ouverts par l’entreprise commerciale.
- et le livre d'inventaire : L’art. 5 de la loi impose aux commerçants de
dresser un inventaire des éléments actifs et passifs de l’entreprise au moins
une fois par exercice ; à cette fin, le commerçant doit tenir un livre d’inventaire
sur lequel il doit transcrire le bilan et le C.P.C. (compte des produits et charges)
de chaque exercice.
En outre, elle oblige les entreprises dont le chiffre d’affaires annuel est
supérieur à 10.000.000 dhs 33 d’établir un certain nombre de documents
comptables supplémentaires tels que le manuel, l’état des soldes de gestion
(l’E.S.G.), le tableau de financement, l’état des informations complémentaires
(ETIC) et les états de synthèse annuels (ES).
B - LES REGLES RELATIVES À LA TENUE DE LA COMPTABILITE ET
LEURS SANCTIONS
Analysons d’abord ces règles, ensuite leurs sanctions.
33
Article 4 de la loi modifié par l'article 1er de la loi n° 44-03 promulguée par le dahir
n° 1-05-211du 14 février 2006 ; B.O. n° 5404 du 16 mars 2006
a - Les règles
Afin de veiller sur l’authenticité des écritures comptables et la sincérité
des opérations effectuées par les commerçants, l’article 22 de la loi exige que
les documents comptables soient établis «sans blanc ni altération d’aucune
sorte », c’est-à-dire qu’il est interdit de laisser des blancs susceptibles d’être
remplis en cas de besoin ou de biffer des écritures, celles-ci doivent, le cas
échéant, tout simplement être rectifiées par d’autres écritures en sens inverse,
autrement dit procéder à la contre-passation.
C’est d’ailleurs pour les mêmes raisons que l’article 8 dispose que le livre
journal et le livre d’inventaire sont cotés et paraphés sans frais par le greffier du
tribunal du siège de l’entreprise. Chaque livre reçoit un numéro répertorié par le
greffier sur un registre spécial. Ne sont pas tenues à cette obligation les
personnes physiques dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas deux
millions de dirhams (2.000.000 DH), à l'exception des agents d'assurances34.
Par ailleurs, l’article 22 exige des commerçants de conserver leurs
documents comptables et leurs pièces justificatives pendant 10 ans. L’article 26
du code de commerce les oblige, de son côté, de classer et conserver pendant
10 ans, à partir de leur date, les originaux des correspondances reçues et les
copies de celles envoyées.
b - Les sanctions
Les sanctions de ces formalités sont d’ordre fiscal et pénal.
1 - Les sanctions fiscales
Comme les documents comptables servent de base à l’établissement
des déclarations fiscales, ils peuvent faire l’objet de vérification de la part des
inspecteurs des impôts. Aussi, lorsque ces documents ne respectent pas les
normes prescrites par la loi 9-88, l’article 23 de cette dernière laisse la faculté à
l’administration des impôts de les rejeter et d’établir une imposition forfaitaire.
Elle peut même appliquer, le cas échéant, des sanctions pécuniaires
(majorations, indemnités de retard, etc.)
2 - Les sanctions pénales
S’il s’avère que le commerçant a falsifié les livres et documents
comptables, il peut être poursuivi pour banqueroute ou pour fraude fiscale ou
pour faux en écriture du commerce.
34
Loi n° 44-03
D’un autre côté, en cas d’ouverture d’une procédure de traitement, les
dirigeants d’une entreprise individuelle ou à forme collective risquent d’être
poursuivis pour banqueroute35 lorsqu’il se révèle qu’ils ont tenu une comptabilité
fictive ou fait disparaître des documents comptables de l’entreprise ou de la
société ou s’ils se sont abstenus de tenir toute comptabilité prescrite par la loi.
Par ailleurs, la loi de finances 1996-1997 a, pour la première fois,
incriminé la fraude fiscale ; cette loi prévoit cinq faits qui peuvent constituer la
fraude fiscale, parmi lesquels la production d’une comptabilité fausse ou fictive
et la soustraction ou la destruction des documents comptables 36.
C - LA PREUVE PAR LES DOCUMENTS COMPTABLES
L’un des intérêts de la tenue de la comptabilité pour le commerçant, et
non des moins importants, est qu’elle peut lui servir de preuve à l’égard des
autres commerçants.
Si les principes techniques de la comptabilité ont été réglementés par la
loi 9-88, les règles relatives à la preuve sont demeurées prévues par le code de
commerce dans ses articles 19 à 26.
Deux sortes de questions se posent à ce sujet : l’une relative à la force
probante des documents comptables, l’autre concerne les modes de production
de ces documents en justice.
a - La force probante des documents comptables
En ce qui concerne la preuve, il y a lieu de distinguer deux hypothèses,
suivant que les documents comptables sont invoqués contre le commerçant qui
les tient ou qu’ils sont invoqués par lui contre les tiers.
1 - Les documents comptables sont invoqués comme preuve contre
le commerçant qui les tient
Cette hypothèse se présente de la manière suivante : un détaillant
achète de la marchandise de chez son fournisseur mais il prétend ne pas l’avoir
reçue, pourtant, dans les livres de ce détaillant, il est fait mention de sa
35
- La sanction encourue est l’emprisonnement de 1 à 5 ans et une amende de 10 000 à 100000
dhs ou l’une de ces deux peines seulement. Ces peines sont portées au double lorsque le
banqueroutier est dirigeant d’une société dont les actions sont cotées en bourse.
36
- La sanction prévue est l’amende de 5 000 à 50 000 dhs qu’il s’agisse de l’IS, de l’IGR ou de
la TVA (Art. 12, 13 et14 LF) ; en cas de récidive, le contrevenant est passible, en plus de cette
amende, d’un emprisonnement de 1 à 3 mois. (Il faut rappeler que l’emprisonnement ne peut
être prononcé que contre les personnes physiques, s’il s’agit d’une personne morale, il
s’appliquera à ses dirigeants). Ajoutons que ces infractions doivent être constatées par deux
inspecteurs des finances par procès-verbal.
réception. Dans ce cas, le fournisseur peut-il invoquer les livres du détaillant
comme preuve contre ce dernier d’avoir reçu la marchandise ?
En réalité, ces écritures constituent un aveu du commerçant. C’est
pourquoi l’article 20 du nouveau code de commerce a prévu expressément que
les tiers peuvent opposer au commerçant le contenu de sa comptabilité ; mieux
encore, cette comptabilité peut servir de preuve contre lui alors même qu’elle
soit « irrégulièrement tenue ».
2 - Les documents comptables invoqués comme preuve par le
commerçant qui les tient
L’un des intérêts de la tenue de la comptabilité pour le commerçant, et
non des moins importants, est qu’elle peut lui servir de preuve à l’égard des
tiers. Néanmoins, il convient de distinguer, suivant que le tiers est un
commerçant ou un non-commerçant.
2.1/ La preuve est dirigée contre un commerçant
Des dispositions de l’article 438 DOC37 on a déduit une règle générale
suivant laquelle nul ne peut se constituer une preuve à soi-même.
L’article 19 du code de commerce déroge cependant à cette règle en
admettant qu’une comptabilité régulièrement tenue est admise par le juge pour
faire preuve entre les commerçants à raison des faits de commerce.
Par conséquent, en cas de litige entre commerçants à propos de leurs
affaires commerciales, chacun peut invoquer ses propres documents
comptables pour faire preuve contre l’autre, à condition qu’ils soient
régulièrement tenus.
2.2/ La preuve est dirigée contre un non commerçant
Contrairement à l’hypothèse précédente où les commerçants se trouvent
à égalité des preuves, les documents comptables d’un commerçant ne peuvent,
en principe, revêtir une force probante à l’égard d’un non-commerçant. En plus
du fait que ce dernier n’a pas de moyens de défense pour faire face aux
documents du commerçant, il faut rappeler qu’en matière d’actes mixtes les
règles du droit commercial, notamment celle de la liberté de la preuve, ne
peuvent être opposées au non-commerçant (art. 4) ; ceci sans oublier que les
documents du commerçant sont des preuves de sa propre création.
37
- V. art. 433 et suiv. D.O.C.
Néanmoins, on peut trouver une atténuation à ce principe dans la
disposition de l’article 433 DOC qui a été reprise par l’article 21 du code 1996
suivant laquelle « lorsque les documents comptables correspondent à un
double qui se trouve entre les mains de la partie adverse, ils constituent pleine
preuve contre elle et en sa faveur ».
Il faut déduire de cet article qu’il suffit que le non-commerçant détienne
une copie de ces documents, pour que celle-ci constitue une preuve contre lui
ou en sa faveur38.
La question se pose en pratique à propos des relevés de comptes
établis par les banques à l’intention de leurs clients
non commerçants. La jurisprudence tantôtleur refuse
la force probante, tantôt y puise un
commencement de preuve, tantôt enfin elle leur reconnaît une force probante39.
Mais le législateur, par principe, n’a pas fait d’exception à la règle de l’art.
4 relatives aux actes mixtes ; bien au contraire, il a adopté une position explicite
à ce sujet en décidant que les relevés de comptes établis par les
établissements de crédit ne sont admis comme moyens de preuve qu’entre eux
et leurs clients commerçants.
b - Les modes de production en justice
Les documents comptables peuvent donc être invoqués en justice
comme preuve de leurs allégations soit par le commerçant qui les tient, dans ce
cas il les mettra de sa propre volonté entre les mains de la justice, soit par les
tiers, et la loi met à leur disposition deux procédés : la communication et la
représentation. Mais le juge peut ordonner d’office l’un ou l’autre de ces
procédés, c’est-à-dire sans que ce soit requis par les parties.
1 - La communication
« La communication est la production intégrale des documents
comptables ». Elle consiste donc pour le commerçant de mettre toute sa
comptabilité à la disposition de la partie adverse. L’article 24 laisse toutefois
aux parties de décider de la manière dont la communication doit être établie -
38
- Rappelons cependant que les tiers, commerçants ou non, peuvent invoquer en leur faveur la
comptabilité d’un commerçant sans avoir à en détenir un double (art. 20 code de commerce).
39
- V. dans ce dernier sens, à titre d’exemple, TPI Casablanca, section commerciale, du
15/10/1987, aff. BCM c/ Barich Omar, n° 2547, RMD, 1987, n° 15, p. 306 qui a jugé que dans
la mesure où le relevé de compte établi par la banque est extrait de ses livres et registres
régulièrement tenus, sa contestation non appuyée par des moyens de preuve est insuffisante à
lui retirer sa valeur probante.
notamment la remise des documents à un expert - et à défaut d’accord, de les
déposer au secrétariat-greffe du tribunal.
C’est dire le danger que présente la communication pour le commerçant
qui verra tous les secrets de son commerce dévoilés à son adversaire.
C’est pourquoi l’article 24 du code de 1996 a prévu des cas
exceptionnels où la communication peut être ordonnée en justice, à savoir « les
affaires de succession, de partage, de redressement ou de liquidation judiciaire
et dans les autres cas où ces documents sont communs aux parties ».
On remarquera donc que la communication se justifie dans ces affaires
par deux raisons : soit que les adversaires ont le même droit sur ces
documents (succession, partage de société, etc.), soit par la cessation de
l’activité du commerçant (redressement ou liquidation judiciaire, le commerçant
ne courant plus aucun danger à dévoiler sa comptabilité).
2 - La représentation
« La représentation consiste à extraire de la comptabilité les seules
écritures qui intéressent les litiges soumis au tribunal » (art. 23 code
commerce).
Aussi, la représentation se distingue-t-elle de la communication en ce
que :
- Seules les parties de la comptabilité qui concernent le litige en question
sont produites en justice ;
- Les documents sont examinés par le juge lui-même ou par un expert
nommé par lui afin d’y extraire les écritures concernant le procès, ils ne peuvent
donc être confiés à l’adversaire ;
- Enfin, et par conséquent, la représentation n’est pas limitée aux
situations énumérées par l’article 24.
Il reste à signaler que si le commerçant refuse, sur injonction du juge, de
produire sa comptabilité, ou s’il déclare ne pas avoir de comptabilité, le juge
peut déférer le serment à l’autre partie pour appuyer ses prétentions (art. 25).
Si cette dernière prête ce serment dit supplétoire 40, elle sera alors crue sur
sa parole et gagnera son procès au détriment du commerçant qui a refusé de
produire sa comptabilité ou qui a déclaré ne pas en avoir.
40
- Ce serment est appelé ainsi dans la mesure où il supplée à la production de preuve en faveur
de celui auquel il est déféré ; autrement dit, en cas d’absence de preuve, le serment lui est
déféré.
Une nouvelle catégorie de commerçants est désormais dispensée de l'obligation
de tenir une comptabilité et de l'obligation de s'inscrire au registre de commerce, ce sont
les nouveaux auto–entrepreneurs.
Section IV – L'auto-entrepreneur
La loi 114/1341 a instauré un nouveau statut des auto-entrepreneurs. Son objectif
est de lutter contre l'informel pour deux raisons: limiter la concurrence livrée par l'informel
et surtout élargir l'assiette fiscale.
Au sens de la loi, l'auto-entrepreneur est toute personne physique exerçant, à titre
individuel, une activité industrielle, commerciale ou artisanale, ou prestataire de services,
dont le chiffre d'affaires annuel encaissé ne dépasse pas :
• 500.000 dirhams pour les activités industrielles, commerciales et artisanales ;
• et 200.000 dirhams pour les prestations de services.
La liste des activités industrielles, commerciales et artisanales et la liste des
prestations de services sont fixées par voie réglementaire.
Plusieurs avantages sont associés à ce régime, notamment :
- du côté social, la population concernée devrait bénéficier d'une couverture
sociale;
- du point de vue formel, un allègement est prévu concernant la
contrainte de la domiciliation, puisque les auto-entrepreneurs peuvent exercer
leurs activités dans leur propre lieu de résidence ou dans un local partagé entre
plusieurs entreprises;
- sur le plan comptable, l'auto-entrepreneur est dispensé des lourdes
obligations comptables classiques, il est seulement tenu à une comptabilité
simplifiée de caisse, càd de tenir un registre des achats
41
- Dahir n°1-15-06 du 29 rabii II 143 6 (19 février 2015) portant promulgation de la loi n° 114-13
relative au statut de l'auto-entrepreneur. B.O. n° 6344 du 19 mars 2015.V. aussi le décret n°2-15-
257 du 10 avril 2015 fixant la composition et les modalités de fonctionnement du conseil national
de l'auto-entrepreneur; le décret n°2-15-258 du 10 avril 2015 pris en application des articles 5, 6
et 8 de la loi n°114-13 relative au statut de l'auto-entrepreneur fixant les modalités d'inscription au
registre des auto- entrepreneurs et le décret n°2-15-263 du 10 avril 2015 relatif à l'exclusion des
contribuables exerçant certaines professions, activités et prestations de service du bénéfice du
régime fiscal applicable à l'auto-entrepreneur, B.O. n°6358 du 7/5/2015.
et des ventes qui doit être visé par le responsable du service
d'assiette du lieu de son domicile fiscale42 ;
- sous l'angle fiscal, déjà la loi de finances de 2014, càd avant
l'adoption du projet de loi par le parlement, a prévu un taux de
taxation très allégé (1% du chiffre d'affaires pour le commerce,
l'industrie et l'artisanat et 2% pour les prestations de services 43;
- du point de vue juridique l'auto-entrepreneur est désormais dispensé
de l'obligation d'immatriculation au registre de commerce, ce dernier
est remplacé par un registre national des auto-entrepreneurs; la
gestion de ce registre est confiée à Barid Al Maghrib pour le compte
de l'Etat. Poste Maroc est chargée des inscriptions mais aussi de la
réception des déclarations du chiffre d'affaires, de collecter les
impôts et les cotisations sociales44.
On constatera cependant que le texte n'évoque nulle part les
effets juridiques de l'inscription au registre national des auto-
entrepreneurs à l'instar du code de commerce concernant le
registre de commerce ! La question reste, faute d'inscription
au registre de commerce est-ce que l'auto-entrepreneur est
quand même un commerçant ? En tout cas puisqu'aucune
réponse à cette question ne figure dans le texte, légalement
parlant, l'auto-entrepreneur ne peut guère prétendre au statut
de commerçant.
cependant, en cas de dettes liées à son activité, tous ses
biens meubles et immeubles peuvent faire l'objet d'une saisie
à l'exception de sa résidence principale.
42
- V. la circulaire de la direction générale des impôts concernant le régime fiscal 2014
appliqué aux auto-entrepreneurs, L'ECONOMISTE du 30 janvier 2014, P. 16
43
- Il convient de noter que c'est un impôt libératoire de l'impôt sur le revenu.
44
V. L'ECONOMISTE du 23 janvier 2015, p.2
45
- 500.000 dirhams pour les activités industrielles, commerciales et artisanales et
200.1 dirhams pour les prestations de services.
Un observateur nous fait remarquer que "certains seront tentés de faire
en sorte de revenir au plafond pour continuer à payer des taux réduits, on
poussera encore les gens vers le noir"46
46
- L'ECONOMISTE du 23 janvier 2015, p.2.
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39
dans leur action et se faire représenter par un syndic. Tout d’abord, une
procédure de redressement est tentée et, en cas d’échec, il est procédé soit à
la cession (vente de l’entreprise), soit à la liquidation des biens du commerçant.
Par contre, un non commerçant qui refuse de payer ses dettes, ne peut
être assujetti à ces procédures collectives, il est déclaré en état de déconfiture.
Chaque créancier exerce son action de manière individuelle. Celui qui
l’assignera en paiement le premier, sera payé en priorité, après avoir exercé
ses droits sur le patrimoine du débiteur (c’est pourquoi on parle dans ce
domaine du prix de la course).
4° / La prescription
Dans le domaine civil, le délai de prescription est de 15 ans.
Mais en matière commerciale ce délai n’est que de 5 ans. Ce court
délai s’explique :
- d’une part, par l’application du principe de la liberté de la preuve entre
les commerçants ;
- d’autre part, par le fait que, par la tenue de leur comptabilité, les
commerçants sont en mesure de se rendre compte de l’état de leurs créances.
Par conséquent, le délai de 5 ans est largement suffisant pour pouvoir les
réclamer.
48
V. article 546 du code de commerce.
Remarquons enfin que l’alerte préventive demeure, en pratique, très
souvent d’un effet utopique en raison de l’optimisme exagéré ou de
l’acharnement illusoire des dirigeants d’entreprise sur une amélioration future 49.
§ II - LA PREVENTION EXTERNE
La prévention externe intervient après que le recours à la méthode de
prévention interne est épuisé sans pouvoir aborder sur quelques résultats.
Cette deuxième étape de prévention se caractérise également par sa
nature non conflictuelle ou non contentieuse. Elle constitue une procédure
judiciaire dénuée des pouvoirs naturels du juge de dire le droit et de prononcer
des sanctions.
A - DÉCLENCHEMENT DE LA PROCÉDURE DE PRÉVENTION EXTERNE
Lorsque l’assemblée des actionnaires ne réussit pas à prendre une
décision permettant de redresser la situation ou en cas d’échec des mesures
prises lors de la procédure de prévention interne, la continuité de l’exploitation
demeure compromise, le commissaire aux comptes ou le chef de l’entreprise
est tenu d’informer le président du tribunal de la situation.
Il convient de noter, à cet égard, qu’aucun délai n’est prévu pour la
saisine du président du tribunal. D’après la doctrine, il est possible d’en déduire,
compte tenu de l’urgence censée caractériser ces situations, que cette saisine
doit être faite immédiatement et sans délai 50.
Une fois saisi, le président du tribunal convoque le chef de l’entreprise
pour envisager des mesures propre à redresser la situation de l’entreprise. À
l’issue de cet entretien, le président du tribunal peut, malgré toute disposition
contraire, obtenir communication des renseignements susceptibles de l’informer
sur la situation économique et financière de l’entreprise débitrice. Et ceci à
travers le commissaire aux comptes, les administrations (Impôts, Douanes..),
organismes publics (CNSS, Bank Al Maghrib,..), par le représentant du
personnel ou par toute autre personne.
49
DRISSI ALAMI MACHICHI (M.), Droit commercial fondamental au Maroc, Imprimerie
de Fédala, 2006, p. 533.
50
EL HAMMOUMI (A.), Droit des difficultés de l’entreprise : La prévention des
difficultés, le redressement judiciaire, la liquidation judiciaire, Librairie Dar Assalam, 3e
éd., Rabat, 2008, p. 30.
Soulignons enfin que le président du tribunal est seul compétent pour
déclencher la procédure de prévention externe, soit sur saisine du chef de
l’entreprise ou du commissaire aux comptes, soit d’office.
B- DÉSIGNATION D’UN MANDATAIRE SPÉCIAL
Si le président du tribunal juge que les difficultés de l’entreprise peuvent
être aplanies grâce à l’intervention d’un tiers pouvant réduire les oppositions
éventuelles des partenaires habituels de l’entreprise, il désigne, d’office ou sur
demande du chef de l’entreprise, ledit tiers en qualité de mandataire spécial et
lui assigne une mission et un délai pour l’accomplir.
51
Id, p. 33.
52
Le code de commerce marocain ne donne malheureusement pas de définition de la
notion de cessation des paiements, il se limite à fixer sa date, contrairement au code
de commerce français qui la définie expressément, dans son article L. 631-1 comme
suit « Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur
mentionné aux articles L.631-2 ou L.631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au
passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements.». Le même
article dans sa rédaction nouvelle depuis le 15 février 2009 ordonnance n° 2008-1345
ajoute «... Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il
bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible
avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements. »
Le chef d’entreprise doit en ce sens adresser une requête au président
du tribunal où il expose sa situation financière, économique et sociale ainsi que
les mesures de règlement qu’il envisage, les délais de paiement ou les remises
de dettes qu’il estime nécessaires pour ce redressement. Dès réception de la
requête, le président du tribunal fait convoquer dans son cabinet, par le greffier,
le chef de l’entreprise pour recueillir ses explications.
Le président du tribunal peut à cet effet charger un expert d’établir un
rapport sur la situation économique, sociale et financière de l’entreprise. Il peut
aussi obtenir tout renseignement, de la part des établissements bancaires ou
financiers, de nature à donner une exacte information sur la situation de
l’entreprise.
Ce droit de communication peut être exercé nonobstant toute disposition
législative contraire, de sorte qu’aucune des personnes ou organismes
énumérés ci- dessus ne peut opposer le secret professionnel à l’enquête du
président. Cela implique aussi que le fisc sera appelé à déclarer sa créance qui
entre en ligne de compte dans le cadre de cette procédure 53.
Ainsi, s’il apparaît que les propositions du chef de l’entreprise sont de
nature à favoriser le redressement de l’entreprise, le président du tribunal ouvre
le règlement amiable. Il désigne, à cet effet, un conciliateur et le charge de cette
mission pour une période qui ne peut dépasser 3 mois, passible d’une
prorogation d’un mois au plus à la demande de ce dernier.
b - Accord conclu entre le débiteur et ses créanciers
En application des dispositions de l’art. 554, le rôle du conciliateur sera
de favoriser le fonctionnement de l’entreprise et de rechercher la conclusion
d’un accord avec les créanciers. Le président du tribunal communique au
conciliateur les renseignements dont il dispose et, le cas échéant, le rapport
d’expertise visé dans l’art. 552 (sur la situation financière de l’entreprise).
Le conciliateur peut en ce sens saisir le président du tribunal s’il estime
qu’une suspension provisoire des poursuites serait de nature à faciliter la
conclusion dudit accord. Après avoir recueilli l’avis des principaux créanciers, le
(Acte par lequel un créancier accorde une réduction totale ou partielle de la dette à
son débiteur)
53
CHERKAOUI (H.), Droit commercial, Imprimerie Najah Al Jadida, 3e éd., 2010, p.
274.
président du tribunal rend une ordonnance 54 fixant la suspension pour une
durée n’excédant pas le terme de la mission du conciliateur.
Si un accord est conclu avec tous les créanciers, il est homologué par le
président du tribunal et déposé au greffe. Au cas où il y aurait un accord conclu
avec les principaux créanciers, le président du tribunal peut également
l’homologuer et accorder au débiteur les délais de paiement prévus par les
textes en vigueur pour les créances non incluses dans l’accord.
L’accord entre le chef de l’entreprise et les créanciers est constaté dans
un écrit signé par les parties et le conciliateur. Il est déposé au greffe.
c - Effets du règlement amiable
L’accord suspend pendant la durée de son exécution, toute action en
justice, toute poursuite individuelle tant sur les meubles que sur les immeubles
du débiteur dans le but d’obtenir le paiement des créances qui en font l’objet. Il
suspend également les délais impartis aux créanciers à peine de déchéance ou
de résolution des droits afférents à ces créanciers.
Si l’accord n’est pas exécuté, le tribunal prononce sa résolution ainsi que
la déchéance de tout délai de paiement accordé.
54
L’ordonnance rendue par le président du tribunal suspend et interdit toute action en
justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement à
ladite décision et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme
d’argent ou à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme
d’argent. Elle arrête et interdit également toute voie d’exécution de la part de ces
créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles.
Master GFCF Professeur Chakib
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55
Dans le cas de société membre d’un groupe, le principe de l’indépendance juridique
des filiales, à l’égard de la société mère et dans les rapports des filiales entre elles,
impose que des procédures distinctes soient ouvertes. Les groupements d’intérêt
économique (GIE), qu’ils soient civils ou commerciaux, sont également soumis à un
régime identique à celui des sociétés commerciales. V. à ce propos CHERKAOUI (H.),
Op.cit., p. 280.
46
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56
Cf. CHERKAOUI (H.), Op.cit., p. 278 et s.
57
La cessation de paiements se distingue de l’insolvabilité. En effet, l’insolvable est le
débiteur qui ne paie pas, sous-entendu qu’il ne peut pas payer car son passif dépasse
son actif. Au contraire, le commerçant ou la société peut être solvable en ce sens que
son actif est supérieur à son passif.
58
Soulignons qu’en pratique, comme le défaut de paiement ne peut être relevé que
pour des dettes certaines, liquides et exigibles, les preuves apportées sont toujours les
mêmes : protêt des effets de commerce, impossibilité de payer les dettes des
emprunts obligataires, disparition du commerçant et fermeture de ses magasins...etc. ;
Cf. CHERKAOUI (H.), Op.cit., p. 282.
47
procédure de traitement, ainsi qu’elles se rapportent au jugement d’ouverture
(3) et à son contenu.
1 - Tribunal compétent
Le tribunal compétent est celui du lieu du principal établissement du
commerçant ou du siège social de la société.
Soulignons cependant que cette disposition légale remonte à une date
antérieure à la promulgation de la loi sur les tribunaux de commerce 59 de 1997.
C’est pourquoi elle ne précise pas qu’actuellement le tribunal compétent en
matière de difficultés d’entreprise est le tribunal de commerce 60.
Ce même tribunal qui a ouvert la procédure reste compétent pour toutes
les actions qui s’y rattachent. S’il se révèle que la procédure doit être étendue à
une ou plusieurs autres entreprises par suite de confusion de leurs patrimoines,
le tribunal initialement saisi reste compétent61.
2 - Saisine du tribunal
Le tribunal peut être saisi par le débiteur ou sur assignation d’un
créancier, comme il peut se saisir d’office ou sur requête du ministère public.
*La déclaration du débiteur
Le chef de l’entreprise qui se trouve dans l’état de cessation des
paiements doit demander l’ouverture d’une procédure de traitement par écrit au
greffe du tribunal dans le délai de 15 jours après le constat de cet état de
cessation62. Cette demande qui énonce les causes de la cessation des
paiements doit, en outre, être accompagnée de certains documents énumérés
dans l’article 562.
La déclaration de l’état de cessation des paiements incombe aux
dirigeants de droit63, ou de fait, ainsi qu’aux représentants permanents des
personnes morales dirigeantes. Ces personnes s’exposent à la déchéance
59
Dahir n° 1-97-65 du 4 chaoual 1417 (12 février 1997) portant promulgation de la loi
n° 53-95 instituant des juridictions de commerce, B.O n° 4482 du 15/05/1997, p. 520.
60
DRISSI ALAMI MACHICHI (M.), Op.cit., p. 550.
61
Article 570 du C.com.
62
V. article 561 du C.com.
63
Il s’agit des présidents (PDG), administrateurs, membres du directoire, directeurs
généraux et des gérants.
commerciale64 au cas où elles auraient omis de faire la déclaration dans le délai
prescrit65.
*L’assignation des créanciers :
Tout créancier de l’entreprise a le droit de demander l’ouverture des
procédures quelle que soit la nature de sa créance, compte tenu des
dispositions de l’article 563 du code de commerce. Ainsi, le défaut de paiement
d’une dette qu'elle soit civile ou commerciale permet de déclencher les
procédures de traitement.
L’action du créancier revêt un caractère particulier, elle tend au fait à
constater l’état de cessation des paiements du débiteur. Le créancier n’a donc
pas besoin d’un titre exécutoire. Le créancier qui agit ne peut prouver cet état
que par voie d’assignation, son action n’est enfermée dans aucun délai. Elle
peut donc être exercée tant que cette situation d’insolvabilité dure.
*La saisine d’office du tribunal :
L’article 563 dispose dans son deuxième alinéa que le tribunal peut aussi
se saisir d’office ou sur requête du ministère public, notamment en cas
d’inexécution des engagements financiers conclus dans le cadre de l’accord
amiable.
Ce droit reconnu au tribunal d’ouvrir d’office une procédure de traitement
ne signifie pas que le tribunal ne doit pas entendre le débiteur avant de statuer.
En effet, le législateur, à travers l’article 567, a posé une règle selon laquelle le
tribunal statue sur l’ouverture de la procédure après avoir entendu ou dûment
appelé le chef de l’entreprise en chambre du conseil. Comme il peut entendre
toute personne dont l’audition lui paraît utile.
Cette réserve posée par l’article 567 peut être également comprise dans
un sens d’éviter qu’une décision soit rendue à la suite d’une information
insuffisante66.
64
V. articles 711 à 720 du C.com.
65
Remarquons, qu’outre leur exposition à la déchéance commerciale, les dirigeants de
l’entreprise peuvent se voir ouvrir à leur encontre une procédure de redressement ou
de liquidation judiciaire. C’est ce qu’on appelle l’extension des procédures aux
dirigeants. Comme ils peuvent encourir dans les cas les plus graves les peines de
banqueroute qui arrivent jusqu’à 5 ans d’emprisonnement en plus d’une amende. V.
articles 721 à 723 du C.com.
66
MOTIK (M.), Droit commercial marocain, Imprimerie El Maarif Al Jadida, Rabat,
2001, p. 249.
3 - Le jugement d’ouverture
Le jugement d’ouverture de la procédure fixe la date de cessation des
paiements (a). Dans le même jugement, le tribunal désigne (b) le syndic et le
juge-commissaire. Ce dernier se chargera de nommer un à trois contrôleurs
parmi les créanciers de l’entreprise. Ce jugement qui ouvre la procédure doit
être publié (c) dans un délai fixé par la loi, et peut faire l’objet de recours (d).
c - La fixation de la date de cessation des paiements
L’article 680 nous informe que la date de cessation des paiements est
fixée par le jugement d’ouverture de la procédure. Elle ne peut être antérieure
de plus de 18 mois à la date d’ouverture de la procédure.
Le même article ajoute que dans le cas où le jugement ne détermine pas
la date de cessation des paiements, cette dernière sera réputée être intervenue
à la date du jugement même.
Cette date peut être reportée une ou plusieurs fois à la demande du
syndic. La demande de modification de date devant être présentée au tribunal
avant l’expiration du délai de 15 jours à partir du jugement qui arrête le plan de
continuation ou de cession, ou, dans le cas de liquidation judiciaire, après le
dépôt de l’état des créances.
B - LES ORGANES DE LA PROCÉDURE
*Le juge-commissaire : C’est un juge du tribunal. Il est chargé de veiller
au déroulement rapide de la procédure et à la protection des intérêts en
présence. Dans ce cadre, il statue par ordonnance sur les demandes,
contestations et revendications relevant de sa compétence ainsi que sur les
réclamations formulées contre les actes du syndic. Ses ordonnances sont
immédiatement déposées au greffe. Elles font l’objet d’un recours devant la
Cour d’appel67.
Il a, en outre, le pouvoir d’ordonner ou d’autoriser un grand nombre
d’actes qui dépassent la compétence du syndic ou du débiteur.
Pour permettre au juge-commissaire de remplir sa mission, la loi prévoit
également que le procureur du Roi lui communique, sur sa demande ou
d’office, tous les renseignements qu’il détient et qui peuvent être utiles à la
procédure.
67
V. article 697 du C.com.
*Le syndic : La fonction de syndic est exercée par le greffier. Toutefois, le
tribunal peut, le cas échéant, la confier à un tiers 68. Il est chargé de mener les
opérations de redressement ou de liquidation judiciaire à partir du jugement
d’ouverture jusqu’à la clôture de la procédure.
Compte tenu des dispositions de l’article 642, le syndic a seul la qualité
pour agir au nom et dans l’intérêt des créanciers. À l’égard du débiteur, le rôle
du syndic varie suivant la nature de la procédure :
* Dans le redressement judiciaire, l’article 576 précise que le jugement
qui désigne le syndic, le charge de :
- Soit surveiller les opérations de gestion ;
- Soit d’assister le chef de l’entreprise pour tous les actes
concernant la gestion ou certains d’entre eux ;
- soit d’assurer seul, entièrement ou en partie, la gestion de
l’entreprise.
* Dans la liquidation judiciaire, le débiteur est représenté par le
syndic du fait du dessaisissement qui l’empêche d’accomplir un acte
juridique de quelque nature qui soit opposable aux créanciers.
À tout moment, le tribunal peut modifier la mission du syndic à sa
demande ou d’office. Il peut même le remplacer à la demande du juge-
commissaire, soit d’office, soit sur réclamation du débiteur ou d’un créancier.
*Les contrôleurs69 : Le juge-commissaire désigne un à trois contrôleurs
parmi les créanciers qui lui en font la demande, dont au moins un parmi les
créanciers titulaires de sûretés et un autre parmi les créanciers chirographaires.
Ils peuvent être des personnes physiques ou morales.
Dans le cas du redressement judiciaire, les contrôleurs assistent le
syndic dans ses fonctions et le juge-commissaire dans sa mission de
surveillance de l’administration de l’entreprise.
Dans la liquidation judiciaire, leur mission se limite au contrôle des
opérations de liquidation.
68
V. article 568, al. 3 du C.com.
69
En pratique, la fonction de contrôleur est assurée par le chef de fil des créanciers qui
est généralement une banque qui détient la créance la plus importante à l’encontre de
l’entreprise débitrice. Remarquons également dans le même sens que les fonctions de
contrôleur sont gratuites. Le contrôleur peut se faire représenter par l’un de ses
préposés ou par un avocat. Cf. EL HAMMOUMI (A.), Op.cit., p. 77 et s.
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70
DRISSI ALAMI MACHICHI (M.), Op.cit., p. 558.
71
V. article 569, al. 3 C.com.
72
Il faut noter que l’effet exécutoire du jugement d’ouverture de la procédure se justifie
par la nécessité de prendre d’urgence, dans l’intérêt des créanciers, des mesures qui
empêchent le débiteur de compromettre ou de faire disparaître ce qui reste de son
actif. Cf. CHERKAOUI (H.), Op.cit., p. 289.
52
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73
V. articles 728 à 732 du C.com.
74
V. article 6 du code de procédure civile.
75
La décision fixant le sort de l’entreprise est prise par le tribunal seul, mais afin de
respecter le principe du contradictoire, le tribunal ne peut statuer qu’après avoir
entendu ou dûment appeler ces organes. V. à ce propos GUYON (Y.), Droit des
affaires, tome 2 : Entreprises en difficultés, redressement judiciaire – faillite,
ECONOMICA DELTA, 9e éd., Paris, 2003, p. 210 et s.
53
Remarquons à cet égard que le tribunal dispose d’un pouvoir souverain.
Il peut en effet approuver ou rejeter les conclusions du rapport du syndic, qui
peut lui-même proposer un redressement ou une liquidation. Le tribunal peut
également, quand le syndic propose une liquidation, décider la prolongation de
la période d’observation si celle-ci n’est pas expirée, afin de permettre
l’établissement d’un plan de continuation.
La décision du tribunal donne au plan un caractère définitif.
Il ne faut, toutefois, pas confondre le jugement qui a arrêté le plan ou
prononcé la liquidation judiciaire, avec celui qui a ouvert la procédure. Les
décisions prises dans le jugement qui arrête le plan sont irréversibles.
Précisons enfin, que les personnes qui exécuteront le plan, même à titre
d’associé, ne peuvent pas se voir imposer des charges autres que les
engagements qu’ils ont souscrits au cours de sa préparation 76.
§ III - Modalités du traitement
Compte tenu des dispositions de l’art. 568, le redressement judiciaire est
prononcé (A) s’il apparaît que la situation de l’entreprise n’est pas
irrémédiablement compromise. Dans le cas contraire, la liquidation judiciaire
sera prononcée (B).
A- LE REDRESSEMENT JUDICIAIRE DE L’ENTREPRISE
Sur la base du rapport établi par le syndic, le tribunal décide soit la
continuation de l’entreprise (a) s’il existe de fortes chances de redressement,
soit sa cession (b) à un tiers.
a - Le redressement par la continuation
La continuation de l’entreprise est prononcée lorsqu’il existe des
possibilités sérieuses de redressement et de règlement du passif.
1 - Le plan de continuation77
Le plan de continuation arrêté par le tribunal indique les conditions et les
moyens de la continuation. Il indique ainsi, le cas échéant, les modifications
apportées à la gestion de l’entreprise selon les modalités d’apurement du
passif. Le tribunal peut arrêter le plan, même si la vérification des créances
76
V. article 591 du C.com.
77
Dans la pratique française, la continuation reste la solution retenue par un peu plus
de la moitié des plans de continuation, ce qui ne représente toutefois que 3 % des
procédures, puisque la plupart des temps celles-ci se terminent par une liquidation ;
Cf. GUYON (Y.), Op.cit., note 7, p. 294 ; Infostat Justice n° 19, janv. 1991.
n’est pas encore terminée, en raison des contestations portées devant la
justice. La durée du plan est fixée par le tribunal sans pouvoir excéder 10 ans.
Le plan mentionne également les modifications des statuts nécessaires à
la continuation de l’entreprise. Le syndic convoque à cet effet l’assemblée
compétente pour les mettre en œuvre.
Aussi, la continuation est accompagnée, s’il y a lieu, de l’arrêt, de
l’adjonction, ou de la cession de certaines branches d’activités. Remarquons ici
que l’adjonction reste peu probable car l’entreprise se trouve déjà en difficulté,
sauf dans le cas où certaines branches peuvent constituer un complément
nécessaire et avantageux pour celles déjà existantes 78.
Lorsque l’entreprise a fait l’objet d’une interdiction d’émettre des chèques
en raison de faits antérieurs au jugement d’ouverture, le tribunal peut prononcer
la suspension des effets de cette mesure pendant la durée d’exécution du plan
et du règlement du passif.
Le tribunal peut, par ailleurs, dans le jugement qui arrête le plan ou le
modifie décider que les biens qu’il estime indispensables à la continuation de
l’entreprise ne pourront être aliénés sans son autorisation, pour une durée qu’il
fixe. L’inaliénabilité est inscrite au registre du commerce de l’entreprise. Tout
acte passé en violation de cette inaliénabilité sera annulé à la demande de tout
intéressé présentée dans le délai de 3 ans à compter de la conclusion de l’acte
ou de sa publication79.
Précisons enfin, qu’une quelconque modification dans les objectifs et les
moyens du plan ne pourra être décidée que par le tribunal à la demande du
chef de l’entreprise et sur rapport du syndic.
2 - Apurement du passif dans le plan de continuation
Le tribunal donne acte des délais et remises accordés par les créanciers
au cours de la consultation menée par le syndic 80; ce qui allège le passif de
l’entreprise et permet son maintien. Le cas échéant, le tribunal pourra réduire
ces délais et remises afin de rapprocher les sacrifices consentis par les
créanciers ; Les créanciers qui n’ont accepté ni délai ni remises, ne pourront,
pour leur part, se voir imposer par le tribunal de remise contre leur gré.
78
Cf. CHERKAOUI (H.), Op.cit., p. 314.
79
Article 595 du C.com.
80
V. à cet effet articles 585 à 589 du C.com.
En revanche, le tribunal peut imposer à tous les créanciers qu’ils soient
privilégiés81 ou chirographaires des délais uniformes de paiement, sous réserve
pour les créances à termes, des délais supérieurs stipulés par les parties avant
l’ouverture des procédures. Ces délais peuvent même excéder la durée du
plan. Le premier paiement doit intervenir dans le délai d’un an 82.
En cas de vente d’un bien grevé d’un privilège spécial, d’un
nantissement ou d’une hypothèque, les créanciers bénéficiaires de ces sûretés
ou titulaires d’un privilège général, sont payés sur le prix après le paiement des
créanciers qui les priment. Ce paiement anticipé s’impute sur le principal des
premiers dividendes à échoir et les intérêts y afférent sont remis de plein droit.
b - La cession de l’entreprise
La cession a pour but d’assurer le maintien d’activités susceptibles
d’exploitation autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et
d’apurer le passif. Elle peut être totale ou partielle.
La cession est opérée suivant certaines modalités (1) fixées par la loi.
Elle produit des effets (2) tant bien à l’égard du cessionnaire qu’à l’égard des
créanciers.
1 - Modalités de la cession
Les offres de cession sont communiquées au syndic dans le délai qu’il a
fixé. Il en informe les contrôleurs. Toute offre doit indiquer : 1° les prévisions
d’activité de financement ; 2° le prix de cession et ses modalités de règlement ;
3° la date de réalisation de la cession ; 4° le niveau et les perspectives d’emploi
justifiés par l’activité considérée ; 5° les garanties souscrites en vue d’assurer
l’exécution de l’offre ; 6° les prévisions de vente d’actifs au cours des deux
années suivant la cession83.
Le juge qui examine cette offre en audience peut, à cet égard, demander
des explications complémentaires. Le syndic donne au tribunal tout élément qui
permet de vérifier le caractère sérieux de l’offre. Le tribunal retient, par la suite,
l’offre qui permet dans les meilleures conditions d’assurer le plus durablement
l’emploi attaché à l’ensemble cédé et le paiement des créanciers.
81
Les privilèges généraux portent sur l'ensemble des biens du débiteur, tandis que les
privilèges spéciaux ne concernent que quelques biens spécifiques.
82
V. article 598 du C.com.
83
Article 604 du C.com.
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84
V. article 617 du C.com.
85
Remarquons que plus de 90 % des procédures se terminent par une liquidation et
57
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2016-2017 El Oufir
les chirographaires (créanciers) touchent rarement plus de 5 % du montant de leur
créance. V. GUYON (Y.), Ibid., note 1, p. 329 ; Infostat Justice n° 19, janv 1991.
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58
commissaire choisit l’offre la plus sérieuse permettant d’assurer l’emploi et le
paiement des créanciers88. Quant aux autres biens de l’entreprise, le juge-
commissaire ordonne leur vente aux enchères publiques ou de gré à gré après
avoir entendu le chef de l’entreprise et recueilli les observations des
contrôleurs.
c - Apurement du passif dans le plan de cession
Dans le cas où plusieurs distributions de sommes précèdent la
répartition du prix des immeubles, les créanciers privilégiés et hypothécaires
admis concourent aux répartitions dans la proportion de leurs créances totales.
Après la vente des immeubles et le règlement définitif de l’ordre entre les
créanciers hypothécaires et privilégiés, ceux d’entre eux qui viennent en rang
utile sur le prix des immeubles pour la totalité de leur créance ne perçoivent le
montant de leur collocation hypothécaire que sous la déduction des sommes
par eux reçues. Les sommes ainsi déduites profitent aux créanciers
chirographaires89.
Dans le cas de créanciers privilégiés ou hypothécaires, non remplis sur
le prix des immeubles, ceux-ci concourent avec les créanciers chirographaires
pour ce qui leur reste dû.
Enfin, le montant d’actif, distraction faite des frais et dépens de la
procédure, des subsides accordés par le juge-commissaire au chef de
l’entreprise ou aux dirigeants ou à leur famille et des sommes payées aux
créanciers privilégiés, est réparti entre tous les créanciers au marc le franc de
leurs créances admises. La part correspondant aux créances sur l’admission
desquelles il n’aurait pas été statué définitivement et, notamment, les
rémunérations des dirigeants sociaux tant qu’il n’aura pas été statué sur leur
cas, est mise en réserve90.
Enfin, à tout moment, le tribunal peut prononcer, même d’office, le chef
d’entreprise appelé sur rapport du juge-commissaire, la clôture de la liquidation
judiciaire lorsqu’il n’existe plus de passif exigible ou que le syndic dispose des
sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers, ou lorsque la poursuite
des opérations de liquidation devient impossible du fait de l’insuffisance d’actif.
88
Article 623 du C.com.
89
Article 630 du C.com.
90
V. article 634 du C.Com.
DEUXIÈME PARTIE :
91
- C’est le cas d’un commerçant qui veut se rendre à l’étranger pour conclure des opérations
commerciales ; il va fournir les fonds nécessaires à son banquier (en monnaie locale) contre
lesquels il lui remet une lettre adressée à son banquier correspondant dans le pays où le
commerçant compte se rendre. Une fois sur place, ce dernier présente la lettre à la banque
destinataire pour se faire payer la somme mentionnée dans la monnaie de ce pays. D’où le nom
de lettre de change.
que soient les personnes qui l’utilisent (commerçants ou non) et quel que soit
l’objet de la créance pour laquelle elle a été émise (civile ou commerciale).
La lettre de change est actuellement réglementée par les articles 159 à
231 du code de commerce de 1996.
Nous étudierons successivement l’émission de la lettre de change,
l’acceptation, les garanties de paiement, la circulation, le paiement, les
obstacles au paiement, enfin les recours faute de paiement.
§ 1 – L’EMISSION DE LA LETTRE DE CHANGE
Pour émettre une lettre de change, il faut respecter ses conditions de
validité qui sont soumises à des sanctions.
A – CONDITIONS DE VALIDITE
a – La capacité
La faculté de souscrire une lettre de change est soumise à une condition
de fond : tout signataire doit avoir la capacité de faire le commerce car, en vertu
de l’article 9 du code de commerce, la lettre de change est toujours un acte de
commerce.
b – Les mentions obligatoires
Titre solennel, la lettre de change n’est valable comme telle que si elle
contient un certain nombre de mentions obligatoires :
- La dénomination «lettre de change» insérée dans le texte,
- Le mandat pur et simple de payer une somme d’argent : « Payez »,
- L’indication de la date et du lieu où la lettre est créée,
- La signature du tireur,
- Le montant à payer,
- L'échéance,
- Le nom du tiré,
- Le lieu de paiement,
- et le nom du bénéficiaire.
Signalons que la domiciliation n’est qu’une mention facultative qui rend la
traite payable au domicile d’un tiers et qui permet de faire effectuer le paiement
des échéances d’un prêt, d’un achat à crédit ou même les factures périodiques
par la banque.
B – SANCTION DE LA VALIDITÉ DE LA LETTRE DE CHANGE
a – Les omissions dans les mentions obligatoires
A défaut de contenir les mentions obligatoires, le titre est nul (article 160)
et ne vaut que comme un engagement ordinaire (telle qu’une cession de
créance ou une reconnaissance de dette s’il en remplit les conditions). Le
porteur de bonne foi perd ainsi toutes ses garanties cambiaires de paiement.
b – L’incapacité
L’article 164 code de commerce prévoit que «la lettre de change
souscrite par un mineur non commerçant est nulle à son égard, sauf les droits
des parties conformément au droit commun», c’est-à-dire le droit de le
poursuivre civilement dans la mesure où il reste tenu de son enrichissement.
Mais la signature du mineur sur une lettre de change ne porte pas
atteinte à la validité des autres signatures en raison du principe de
l’indépendance des signatures.
§ 2 – L’ACCEPTATION
A – FORMES ET MODALITES
L’acceptation est l’engagement du tiré donné sur la lettre par signature
de payer son montant à l’échéance à la personne qui en sera le porteur légitime
auquel il ne pourra opposer aucune exception (par exemple défaut de provision,
compensation92 à l’égard du tireur ou d’un précédent porteur, etc.).
L’acceptation est exprimée par le mot « acceptée » et la signature du tiré
au recto, mais souvent elle résulte de sa simple signature.
En principe, la présentation de la lettre de change à l’acceptation n’est
pas obligatoire ; cependant, une lettre sans acceptation est difficilement
négociable car le tiré pourrait refuser de payer.
Le plus souvent, elle est présentée à l’acceptation par le tireur lui-même
pour pouvoir la négocier facilement puisque, à l’égard du porteur, elle constitue
une garantie d’être payé à l’échéance.
92
- La compensation est l’extinction réciproque de deux dettes.
B – CONSEQUENCES DE L’ACCEPTATION
a – Provision et valeur fournie
1 – Constitution de la provision
La créance du tireur sur le tiré s’appelle la provision. La provision est une
créance en somme d’argent ou en marchandises que le tireur détient sur le tiré.
Celui-ci est débiteur de la provision dès son acceptation (sa signature).
L’absence de provision ne frappe pas le titre de nullité, mais le rend
inopérant. Dans la pratique, c’est l’existence de la provision qui détermine
l’acceptation du tiré.
2 – Propriété de la provision
La remise du titre par le tireur au porteur confère à ce dernier la propriété
de la provision, laquelle peut être à nouveau transmise par endossement à un
nouveau bénéficiaire, et ainsi de suite, jusqu’à présentation de l’effet pour
escompte ou encaissement.
3 – La valeur fournie
Si le tireur a émis la traite au profit du bénéficiaire, c’est que ce dernier a
une créance chez le premier ; autrement dit, le tireur est débiteur du
bénéficiaire, celui-ci a du lui fournir une valeur en échange de laquelle le tireur
lui a remis la traite. Cette créance s’appelle «la valeur fournie ».
b – Inopposabilité des exceptions du tiré au porteur
Le tiré accepteur ne peut pas opposer au porteur les exceptions que lui-
même aurait pu opposer au tireur ou aux porteurs précédents (article 171).
Exemples :
- L’exception de compensation à l’égard du tireur ou d’un porteur
antérieur,
- L’exception basée sur l’absence de cause (inexécution de l’obligation
du tireur), etc.
Dans tous les cas, le porteur ne peut se prévaloir de l’inopposabilité des
exceptions que si le tiré a accepté la traite.
c – Les exceptions opposables au porteur
Cette règle de l’inopposabilité des exceptions n’est cependant pas
absolue ; autrement dit, il existe bien des exceptions que le tiré peut opposer au
porteur. Tels sont les cas lorsque :
- le tiré a une exception personnelle contre le porteur (compensation par
exemple) ;
- le tiré prouve que le porteur « a agi sciemment » à son détriment ; par
exemple, sachant que le tiré lui opposerait une exception de
compensation, le tireur, en connivence avec un tiers, endosse la traite au
profit de ce dernier, ce nouveau porteur serait de mauvaise foi, car il
aurait agi sciemment au détriment du tiré ;
- le tiré découvre des exceptions résultant du droit cambiaire (défaut
d’une mention obligatoire, une incapacité, etc.).
d – Les effets de complaisance et de cavalerie
Cette règle suivant laquelle la provision n’est indispensable qu’à
l’échéance a donné naissance à des pratiques contraires au but recherché par
le législateur.
Une première pratique consiste en ce qu’on appelle « les tirages en l’air
» : c’est le fait de tirer des lettres de changes sur des personnes imaginaires,
c’est une pratique susceptible de sanctions pénales.
Mais la pratique la plus répandue pendant les périodes de crises
financières est celle des effets de complaisance et de cavalerie.
La pratique de la traite de complaisance se résume de la manière
suivante : un commerçant qui a un besoin urgent de liquidités tire une lettre de
change et la présente à un ami commerçant, le tiré qui est insolvable mais qui
accepte da la signer « par complaisance » bien qu’il n’ait aucune dette à son
égard. Aussitôt, le tireur la fait escompter par son banquier et bénéficie ainsi
d’un crédit à court terme.
A l’échéance, aucun problème ne se poserait si le tireur verse au tiré les
fonds nécessaires, ou si le tiré solvable paie la traite en consentant ainsi un
crédit au tireur. Dans ces cas la traite de complaisance est tout à fait licite, c’est
ce qu’on peut appeler les « bons effets de complaisance ».
Mais la situation risque de se compliquer si, à l’échéance, le tireur ne
dispose pas de fonds à verser au tiré. Dans ce cas, il tire une autre lettre qu’il
fait accepter par le même tiré ou par un autre commerçant et la fait escompter
pour obtenir les fonds à fournir au premier tiré et ainsi de suite... Par ce
chevauchement, ces effets de complaisance deviennent ce qu’on appelle « des
effets de cavalerie ».
Le plus souvent, durant les périodes de difficultés économiques, ces
tirages se font de manière réciproque, c’est-à-dire que les commerçants tirent
indéfiniment les uns sur les autres ; on est alors en présence de ce qu’on
appelle « les tirages croisés ».
§ 3 – LES GARANTIES DE PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE
Pour une efficacité nécessaire au paiement du titre, le législateur prévoit
des mesures de garantie qui font tout l’intérêt de la lettre de change ; il s’agit du
principe du transfert de la propriété de la provision, de la solidarité et de l’aval.
A – LE TRANSFERT DE LA PROPIETE DE LA PROVISION
« La propriété de la provision est transmise de droit aux porteurs
successifs de la lettre de change » dit l’article 166 alinéa 4.
C’est le fameux principe de «la propriété de la provision » qui constitue
une garantie solide de paiement. Il résulte en effet de ce principe qu’une fois la
lettre émise, le tiré (qui en a connaissance par l’acceptation) ne peut plus
valablement payer le tireur (son créancier) ; sinon, il sera tenu à l’échéance de
payer, une seconde fois, le porteur.
En outre, en vertu de ce principe :
- Le décès ou l’incapacité du tireur après l’émission sont sans influence
sur le droit du porteur sur la propriété de la provision ;
- Le redressement ou la liquidation judiciaire du tireur n’ont pas d’effet
sur le droit du porteur de la lettre de change qui devient créancier direct
du tiré ;
- Les créanciers du tireur ne peuvent former une saisie-arrêt entre les
mains du tiré sur la somme de la lettre de change ;
- Enfin, le tireur ne peut former opposition au paiement de la lettre qu’en
cas de perte ou de vol de celle-ci ou de redressement ou de liquidation
judiciaire du porteur (article 189).
B – LA SOLIDARITE
C’est un principe général du droit commercial qui s’applique à la garantie
de paiement de la lettre de change. Tous ceux qui ont tiré, accepté, endossé ou
avalisé une lettre de change, c’est-à-dire tous les signataires, sont
Solidairement tenus de son paiement envers le dernier porteur qui, suivant ce
principe légal, peut réclamer à l’un ou plusieurs d’entre eux son montant total.
Le signataire poursuivi ne peut opposer au porteur les exceptions
fondées sur ses rapports avec le tireur ou avec les porteurs antérieurs.
Ce même droit (la solidarité) appartiendra à celui qui a remboursé la
lettre de change.
C – L’AVAL
Le donneur d’aval (avaliseur ou avaliste) est celui qui se porte caution de
la créance. Il garantit personnellement le paiement de tout ou partie de la lettre
de change.
L’aval est donné sur la lettre avec la mention « bon pour aval» et la
signature ; il peut être donné aussi sur une allonge ou par un acte séparé.
L’avaliseur est la caution solidaire du signataire en faveur duquel il s’est
engagé (l’avalisé). Il doit préciser pour quel signataire il s’engage, à défaut il est
réputé donné au tireur (article 180).
S’il a payé pour l’avaliser défaillant, il a un droit de recours non
seulement contre lui, mais contre tout autre signataire de la lettre en vertu du
principe cambiaire de la solidarité.
§ 4 – LA CIRCULATION DE LA LETTRE DE CHANGE
En tant que titre à ordre, la lettre de change est un effet destiné à circuler
en permettant la circulation de capitaux sans risque. Cette circulation s’opère
par la technique de l’endossement, c’est-à-dire par une mention écrite portée
au dos du titre et la signature.
Mais l’endossement ne permet pas seulement de transférer la propriété
de la lettre, il peut servir aussi pour donner la traite en garantie ou la remettre
pour encaissement par procuration.
A – L’ENDOSSEMENT TRANSLATIF DE PRORIETE
Cet endossement a pour effet de transférer la propriété de la lettre de
change de l’endosseur à l’endossataire (créancier de l’endosseur). Il se fait par
simple signature au dos. L’endossement peut être :
- Nominatif : il porte la mention « payez à l’ordre de X », le nom du
bénéficiaire est alors précisé ;
- Ou en blanc : il résulte de la simple signature au dos du titre, sans
indication du bénéficiaire et permet le transfert par tradition manuelle,
c’est-à-dire par simple remise matérielle du titre. Le porteur peut remplir
le blanc en y inscrivant son propre nom ou celui d’un nouveau
bénéficiaire (souvent le banquier) ;
- ou encore au porteur : il vaut comme un endossement en blanc 93.
Cependant, il convient de préciser que le tireur a la possibilité d’exprimer
sa volonté de ne pas transmettre la lettre ; il lui suffit d’insérer dans la traite les
mots : « non à ordre » ou « non endossable », auquel cas le titre ne peut se
transmettre que par cession de créance selon l’article 195 DOC, il sera alors
dépourvu des effets du droit cambiaire.
Comme l’endosseur est aussi garant de l’acceptation et du paiement, il
peut également interdire un nouvel endossement.
B – L’ENDOSSEMENT PAR PROCURATION
Il résulte de l’endossement accompagné de la mention « valeur en
recouvrement » ou « pour encaissement » ou « par procuration ». Il donne
mandat à l’endossataire, qui est le plus souvent un banquier, de recouvrer le
montant de l’effet. Il laisse subsister les exceptions opposables à l’endosseur.
Il faut bien distinguer l’encaissement de l’escompte. A l’encaissement, la
banque ne paie le porteur qu’après avoir encaissé l’effet, alors qu’à l’escompte
la banque crédite le porteur avant échéance du titre. Dans le premier cas, il
s’agit d’un encaissement sans risque pour le banquier et dans le second cas, il
s’agit d’un crédit qu’il consent au bénéficiaire.
C – L’ENDOSSEMENT PIGNORATIF
On le reconnaît à la mention « valeur en garantie » ou « en gage » suivie
de la signature. Il permet de donner la lettre au porteur, à titre de gage, c’est-à-
dire en garantie de la créance. L’endossataire n’est que le possesseur du titre, il
ne peut l’endosser car il n’en a pas la propriété, et s’il le fait, il ne sera
considéré que comme un endossement à titre de procuration (article 172 al. 4).
D’un autre côté, selon l’article 172, l’endossataire peut exercer tous les
droits dérivant de la lettre de change, ce qui veut dire que si son débiteur
(l’endosseur) ne lui règle pas la dette à son terme, il peut présenter la lettre au
tiré à l’échéance pour se faire payer de sa créance. Le tiré ne peut lui opposer
les exceptions de l’endosseur.
93
- Rappelons que s’il est possible d’endosser une lettre de change au porteur, il est interdit de
l’émettre au porteur.
§ 5 – LE PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE
A – L’ECHEANCE
L’échéance est la date de paiement de la lettre de change. Celle-ci peut
être tirée :
- « à vue » ou sans indication d’échéance : la traite est payable à la
présentation, c’est-à-dire dès le jour de son émission ; dans ce cas, elle
doit être présentée au paiement dans le délai d’un an à partir de sa date,
le tireur peut abréger ce délai ou en stipuler un plus long, quant aux
endosseurs, ils ne peuvent que l’abréger (article 182).
- À un délai de vue : elle est payable après un délai préfixé qui court de
l’acceptation, par exemple : dans 5 jours, 2 semaines, 2 mois, etc. de
l’acceptation par le tiré.
- À un délai de date : le délai court de la date d’émission de l’effet, par
exemple : payez dans 20 jours.
- À jour fixe : elle est payable à la date indiquée.
Le juge ne peut accorder de délais de grâce (article 231).
B – LA PRESENTATION AU PAIEMENT
a – Lieu et date de la présentation
La présentation doit être effectuée au lieu désigné, au jour de l’échéance
ou l’un des 5 jours ouvrables qui suivent. Sans mention particulière de lieu,
c’est le domicile du tiré qui détermine le lieu de paiement.
La mention de domiciliation, très fréquente, permet de fixer le lieu de
paiement à un endroit convenu, autre que celui du tiré. Dans la pratique, il s’agit
le plus souvent du domicile de la banque, celle-ci n’acceptant l’escompte que
lorsque le titre est domicilié.
b – La perception du montant de la créance
Tout porteur en apparence régulier peut se présenter pour obtenir
paiement de la lettre de change. Corrélativement, il suffit que le payeur soit de
bonne foi pour qu’il soit libéré. Le tiré doit simplement s’assurer de la régularité
des endossements en leur forme sans qu’il soit contraint de vérifier les
signatures (article 186).
§ 6 – LES OBSTACLES AU PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE
A – L’OPPOSITION AU PAIEMENT
La loi interdit l’opposition, sauf dans trois cas : perte ou vol de la traite et
la situation de règlement judiciaire du porteur (article 189).
Il appartient au porteur ayant perdu le titre de faire opposition auprès du
tiré afin d’empêcher le paiement du titre à tout porteur illégitime : celui qui aura
trouvé le titre. Le paiement à qui de droit ne pourra alors se faire que :
- sur autorisation du président du tribunal,
- après avoir fait opposition aux mains du tiré,
- donné caution,
- et justifié de sa propriété de la lettre de change (article 192).
Dans le deuxième cas, le syndic du porteur en règlement judiciaire
pourra faire opposition au tiré et se faire payer à lui-même pour intégrer la
créance dans l’actif de la procédure collective.
B – LE REFUS DE PAIEMENT
En cas de refus de paiement du tiré, le porteur qui bénéficie de garanties
étendues peut exercer un recours contre tous les signataires de la lettre de
change tenus à en garantir le paiement. Il doit faire dresser un protêt « faute de
paiement ».
a – Le protêt
C’est un acte authentique dressé par un agent du greffe du tribunal qui
constate officiellement le refus de paiement et les motifs du refus.
Le protêt doit contenir la transcription littérale de la lettre de change, de
l’acceptation, des endossements et des recommandations qui y sont indiquées,
la sommation de payer le montant de la lettre, les motifs du refus de paiement
et indiquer la présence ou l’absence de celui qui doit payer.
Celui qui a fait dresser protêt avise également son endosseur dans les 6
jours, lequel avise à son tour son endosseur dans les 3 jours et ainsi de suite
jusqu’au tireur. Aucun formalisme n’est requis pour l’avis. De son côté, l’agent
notificateur doit, dans les 3 jours qui suivent le protêt, prévenir le tireur par la
poste et par lettre recommandée.
b – Le cas de dispense du protêt
Cependant, si la lettre porte la mention « retour sans frais » ou « sans
protêt », le porteur est dispensé de la procédure du protêt. S’il le fait quand
même, il en supporte les frais. Cette clause évite au porteur les lenteurs et les
coûts non négligeables de cette procédure.
§ 7 – LES RECOURS
Il convient de distinguer le porteur diligent du porteur négligent. Le
premier est celui qui présente la lettre de change dans les délais légaux et fait
dresser à temps un protêt en cas de non-paiement ; le second est celui qui n’a
pas observé ces prescriptions.
A – LES RECOURS DU PORTEUR DILIGENT
À l’échéance, le porteur diligent, qui a présenté la traite et fait dresser
protêt, peut obtenir remboursement du montant de la lettre, des intérêts, des
frais de protêt et des avis en actionnant les signataires ou l’un d’eux devant le
tribunal ; le même droit de recours appartient à tout signataire qui a remboursé
le porteur ;
B – LES DECHEANCES DU PORTEUR NEGLIGENT
Le porteur négligent perd tous les recours cambiaires contre tous les
signataires de la traite (article 206), sauf :
- Contre le tireur qui n’a pas fourni provision : la déchéance à son égard
n’aura lieu que s’il justifie avoir constitué provision ;
- Contre le tiré accepteur car, ayant reçu provision, il ne peut se dérober
de son engagement sous prétexte de la négligence du porteur ;
- Enfin, contre l’avaliste qui a donné aval pour le compte du tiré car, sans
cette précision, il est censé l’avoir donné pour le compte du tireur.
C – LES PRESCRIPTIONS DES RECOURS
Ce sont des délais très brefs fixés par le législateur en dehors desquels
aucune action cambiaire ne peut plus être exercée ; on dit qu’elle est prescrite.
En matière de lettre de change :
- L’action cambiaire contre le tiré accepteur se prescrit par 3 ans à
compter de l’échéance,
- Celle du porteur contre les endosseurs et contre le tireur par 1 an à
dater du protêt,
- Enfin les actions des endosseurs entre eux et contre le tireur se
prescrivent par 6 mois à dater du jour du paiement de la lettre.
Section 3 – LE CHÈQUE
Nous envisagerons d’abord, les aspects techniques, ensuite, les
systèmes de protection du chèque.
§ 1 – LES ASPECTS TECHNIQUES
A – NATURE ET FONCTION DU CHÈQUE
Le chèque est un effet par lequel le tireur dispose de ses fonds déposés
chez le tiré (qui est obligatoirement une banque), en effectuant des retraits à
vue, soit à l’ordre de lui-même, soit à l’ordre du bénéficiaire.
Obligatoirement tiré sur un banquier, il est payable à vue (dès sa
présentation) et à ce titre il ne peut comporter une mention d’échéance de
paiement.
Néanmoins, le chèque n’est pas une monnaie ; sa remise n’est pas
libératoire tant qu’il n’est pas encaissé et n’opère pas novation de la créance94.
Par ailleurs, contrairement à la lettre de change, il n’est pas commercial
par la forme ; il est commercial ou civil suivant la nature de l’opération en
exécution de laquelle il a été émis.
B – LES CONDITIONS FORMELLES
Pour être valable, le chèque doit remplir des conditions de forme exigées
par la loi (voir spécimen suivant).
a – Les mentions obligatoires
Les mentions obligatoires que doit comporter le chèque sont :
- La dénomination de « chèque » ;
- L’ordre de paiement pur et simple (payez) ;
- La somme à payer en chiffres et en lettres ;
- Le nom du tiré (la banque) ;
- Le lieu du paiement (adresse de l’agence bancaire) ;
- Le lieu et la date de création ;
- Le nom et la signature du tireur.
Suivant l’article 240 est nul le chèque qui ne correspond pas aux
formules délivrées par les banques ou dans lequel l’une des mentions
obligatoires fait défaut, mais il peut être considéré comme un titre ordinaire pour
servir de preuve à une créance lorsqu’il réunit les conditions de ce titre.
94
- Le chèque n’est pas novatoire (art 305 code 1996), c’est à dire que la remise d’un chèque
en paiement d’une dette ne remplace pas l’obligation qui lui a donné naissance ; celle-ci
subsiste avec toutes ses garanties jusqu’à ce que le chèque soit payé.
b – Les mentions facultatives
Ce sont les mentions que les parties demeurent libres de porter sur le
chèque :
- Le nom du bénéficiaire : Contrairement à la lettre de change, il n’est
pas obligatoire de mentionner le nom du bénéficiaire sur le chèque (article 243),
car le chèque peut être émis au porteur ou en blanc, sans aucune indication, il
est alors considéré émis au porteur ; il peut aussi être stipulé payable à
personne dénommée ou à son ordre (chèque nominatif), dans ce cas le
bénéficiaire ne peut le transmettre que par endossement ;
- La clause non endossable ou non à ordre : Cette clause ne peut être
utile que lorsque le chèque est nominatif ; puisque le chèque au porteur ou à
blanc est transmissible par simple tradition. Le chèque qui porte la mention non
endossable ne peut être transmis que comme un titre civil ;
- Le barrement : Il consiste à tracer sur le recto du chèque deux barres
parallèles, il ne sera alors payé qu’à un banquier ou à un client du banquier.
Ainsi, le porteur d’un tel chèque ne pourra se faire payer qu’en l’endossant par
procuration à son banquier qui approvisionnera son compte du montant du
chèque encaissé par ledit banquier. Les banques effectuent entre elles les
paiements des chèques en procédant à leur compensation et donc par monnaie
scripturale, ce qui évite les mouvements numéraires.
Comme il ne peut être payé qu’à une banque, le chèque barré a été
conçu pour éviter les risques de perte ou de vol des chèques ; mais l’effet de
cette technique reste limité puisqu’il est possible d’endosser le chèque barré au
profit d’un bénéficiaire de bonne foi.
Le barrement est général lorsqu’il ne comporte aucune mention entre les
deux barres, il est spécial, se le nom d’une banque y est mentionné.
- La certification : (le chèque certifié) Elle remplace l’acceptation en
matière de lettre de change. Comme le chèque est payable à vue, il n’a pas
besoin d’être accepté ; l’article 242 interdit expressément l’acceptation du
chèque. La certification est faite par la banque tirée qui porte au recto du
chèque la mention « certifié » et sa signature. Elle doit alors bloquer la provision
correspondant au montant du chèque au profit du porteur, mais seulement
jusqu’au terme du délai de présentation qui est de 20 jours suivant l’article 268
du nouveau code.
C – LE CHÈQUE, INSTRUMENT DE PAIEMENT FACULTATIF
Malgré l’usage répandu du chèque qui constitue, au Maroc, le second
moyen de paiement après les espèces, le droit n’oblige nullement l’acceptation
du chèque comme mode de paiement, à l’exception de certains cas très rares
dans notre législation. Tout commerçant ou particulier peut fort bien le refuser et
exiger la monnaie officielle ayant cours légal.
En effet, par dérogation au principe de l’usage facultatif du chèque,
l’article 306 du nouveau code de commerce a rendu obligatoire le paiement par
chèque barré ou par virement bancaire toute opération entre commerçants pour
faits de commerce d’une valeur supérieure à 10 000 dhs C’est pourquoi
d’ailleurs, le législateur a fait obligation aux commerçants d’ouvrir un compte
chèques (article 18).
D – LA PROVISION DU CHÈQUE
La provision est une somme d’argent mise à la disposition du tireur chez
le tiré au moment de la création du chèque.
a - Le contenu de la provision
La provision du chèque peut être constituée par le dépôt de fonds chez
la banque (c’est-à-dire par le versement de sommes d’argent), la remise
d’effets de commerce à l’encaissement, elle peut aussi résulter d’une ouverture
de crédit.
b - Le moment de l’existence de la provision
Contrairement à la lettre de change dont la provision n’est exigible qu’à
l’échéance, suivant les termes de l’article 241 le chèque doit avoir provision dès
le moment de la création du titre.
Or, cette disposition exigeant l’existence de la provision au moment de la
création du chèque se trouve être, sinon en contradiction, du moins dépassée
par la nouvelle tendance de la politique pénale du même code de commerce
qui ne requiert la constitution de la provision qu’au moment de la présentation
du chèque au paiement (art. 316). Par conséquent, la loi n’exige plus une
provision préalable à l’émission du chèque.
c- Le transfert de la propriété de la provision
L’émission du chèque a pour effet de transférer la propriété de la
provision détenue par le banquier au bénéficiaire du chèque. Cette propriété
passera ensuite à tout nouveau porteur, que ce soit par tradition ou par
endossement. L’article 256 dispose en effet que l’endossement transmet tous
les droits résultant du chèque et notamment, la propriété de la provision.
E – JUSTIFICATION D’IDENTITE
L’article 251 a consacré officiellement l’obligation pour toute personne
qui « remet » un chèque en paiement de justifier de son identité au moyen d’un
document officiel portant sa photographie.
Comme le texte parle de « toute personne » qui remet un chèque en
paiement, il serait judicieux de savoir de quelle personne il s’agit ?
S’agit-il du tireur, qui doit justifier de son identité, lorsqu’il remet le
chèque en paiement à son créancier ?
Ou est-ce qu’il s’agit du porteur lorsqu’il présente le chèque à la banque
pour recouvrement ?
Nous pensons qu’il ne peut s’agir que du tireur pour les raisons
suivantes :
- D’une part, parce que le texte parle de la personne qui « remet » le
chèque en paiement dans le sens de l’émission car, si le législateur avait
l’intention de viser le bénéficiaire, il aurait parlé de « toute personne qui
présente un chèque au paiement » ;
- D’autre part, ce qui conforte encore cette position, c’est que l’article 251
figure parmi les dispositions du chapitre I relatif à la création du chèque
et non pas dans le chapitre IV relatif à la présentation et au paiement du
chèque.
F – LA CIRCULATION DU CHÈQUE
Rappelons que le chèque au porteur ou à blanc se transmet par tradition.
S’il est nominatif, il convient de distinguer :
+ s’il est non à ordre ou non endossable, il ne peut se transmettre que
par cession de créance ;
+ s’il est à ordre, il est transmissible par endossement :
- Soit par endossement translatif de propriété : dans ce cas
l’endosseur a le choix de l’endosser au porteur ou à blanc (auquel
cas il peut circuler par tradition) ou même nominatif.
- Soit par endossement à titre de procuration, exactement comme
pour la lettre de change (en pratique, en cas de remise à
l’encaissement par la banque).
Mais l’endossement du chèque ne peut jamais être fait en garantie (à
titre pignoratif).
§ 2 – LES SYSTEMES DE PROTECTION DU CHEQUE
En tant qu’effet de commerce, le chèque bénéficie naturellement de la
protection du système cambiaire, mais il se distingue en outre par une
protection traditionnelle et spéciale d’un système pénal auquel s’est greffé
récemment un autre système, mais bancaire cette fois.
A – LE SYSTEME CAMBIAIRE
Le porteur impayé peut en effet exercer ses recours cambiaires contre
tous les signataires du chèque (e) ; mais pour cela il doit se montrer diligent et
accomplir certaines obligations de vigilance que la loi lui impose, à savoir
présenter le chèque au paiement (a) et, à défaut de paiement, faire dresser
protêt (b), donner les avis (c) tout en respectant les délais de prescription (d).
a – La présentation au paiement
Elle peut se faire dès le jour de l’émission puisque le chèque est payable
à vue. Le porteur dispose néanmoins d’un certain délai pendant lequel il doit
présenter le chèque au paiement sous peine de perdre son droit au recours
cambiaire.
Les délais sont actuellement de 20 jours de l’émission pour les chèques
émis au Maroc, et de 60 jours pour les chèques émis à l’étranger (article 268).
Après l’expiration du délai de présentation, s’il a provision, le tiré est tenu
quand même de payer (article 271) sous peine d’une amende de 5000 à 50 000
dhs (article 319). Les peines étant délictuelles, la prescription d’une telle
infraction est donc délictuelle (5 ans).
Si la provision est insuffisante, le tiré a désormais l’obligation de
proposer au porteur le paiement jusqu’à concurrence de la provision
disponible ; dans ce cas, ce dernier ne peut pas refuser ce paiement et doit
délivrer une quittance au tiré et mention de ce paiement partiel doit être faite sur
le chèque (art. 273).
Il faut dire qu’actuellement dans la pratique, les banques refusent tout
paiement, même s’il ne s’agit que d’une insuffisance dérisoire. Et comme cette
obligation, à la différence de la précédente, est dépourvue de sanction, elle n’a
pas beaucoup de chance d’être appliquée.
b – Le protêt
A défaut de paiement, le porteur doit faire dresser protêt, comme en
matière de lettre de change, pour pouvoir exercer son recours cambiaire.
Le protêt doit être fait avant l’expiration du délai de présentation ; et si
celle-ci a lieu le dernier jour du délai, il peut être établi le premier jour ouvrable
suivant.
c – Les avis
Le porteur a ensuite un délai de 8 jour ouvrable qui suivent le jour du
protêt pour donner avis du défaut de paiement à son endosseur et au tireur. En
cas de clause de retour sans protêt, ce délai court du jour de la présentation.
Chaque endosseur doit aviser son endosseur dans les 4 jours ouvrables
qui suivent la réception de l’avis en remontant jusqu’au tireur.
De son côté, le secrétariat – greffe du tribunal est tenu de prévenir le
tireur des motifs du refus de paiement par lettre recommandée dans les 4 jours
du protêt, à condition, dit le texte, que le chèque contienne le nom et l’adresse
du tireur95 !
d – Les délais de prescription
Il s’agit de la prescription des recours cambiaires qui est une prescription
extinctive ou libératoire, c’est-à-dire qui éteint l’action cambiaire qui résulte de
l’engagement par chèque.
L’article 295 a prévu trois délais de prescription en fonction des parties
en présence :
- Pour les actions du porteur contre les endosseurs, le tireur et les autres
obligés la prescription est de 6 mois à partir de l’expiration du délai de
présentation.
95
On sait que, en pratique, à la rigueur certains commerçants marquent le numéro de la carte
d'identité nationale et le numéro de téléphone du tireur sur le dos du chèque, mais jamais
l'adresse de ce dernier n'est marquée ni par la banque, ni par les commerçants.
- Pour les actions des divers obligés les uns contre les autres la
prescription est également de 6 mois à partir du jour où l’obligé a
remboursé ou du jour où il a lui-même été actionné en justice.
- Enfin, pour l’action du porteur contre le tiré le délai de prescription est
devenu d’1 un à partir de l’expiration du délai de présentation (au lieu de
3 ans précédemment prévu par le dahir de 1939).
e – Les recours cambiaires
Lorsque le porteur aura accompli ses obligations de vigilance, il peut
alors exercer ses recours cambiaires contre toutes les personnes obligées en
vertu du chèque. Celles-ci sont en effet tenues solidairement envers le porteur
(art. 287). Ce dernier peut agir contre ces signataires individuellement ou
collectivement et sans avoir à respecter l’ordre dans lequel ils se sont obligés.
Cependant, en cas de déchéance, le porteur négligent ne perd pas tous
ses droits, il conserve :
- Une action de droit commun contre les différents obligés ;
- Une action cambiaire contre le tiré qui a provision ;
- Une action cambiaire contre le tireur qui n’a pas fait provision. Or, celui-
ci reste passible du pénal. Mais il convient de signaler que ces règles ne
s’appliquent que pour l’exercice de l’action cambiaire car, pour l’exercice
de l’action pénale :
- Le porteur n’a pas besoin de faire dresser protêt ;
- Et l’action publique ne s’éteint pas par les délais de prescription de
l’action cambiaire. Étant donné que nous sommes dans le domaine
délictuel, l’infraction ne s’éteindra que par la prescription correctionnelle
de 5 ans.
En pratique, tous les porteurs de chèques sans provision préfèrent
recourir au pénal vu son caractère répressif par rapport au système cambiaire,
mais actuellement le système bancaire s’est imposé préalablement au système
pénal.
B – LE SYSTEME BANCAIRE
Ce système s’est désormais greffé sur le système pénal avant sa
consécration officielle par le législateur. Il est appliqué au Maroc depuis le 1 er
juin 1990, date de la mise en vigueur de la fameuse convention interbancaire
du 29 novembre 1989. Les différences techniques et répressives mises à part,
l’esprit du code de 1996 ne se distingue guère de celui de la convention
interbancaire.
a – Les obligations des banques
1 – Lors de l’ouverture des comptes
Nos textes actuels obligent désormais les banques, préalablement à
l’ouverture des comptes, de vérifier l’identité des postulants (personnes
physiques ou morales) par le moyen de documents officiels.
L’établissement bancaire doit ensuite, et préalablement à la délivrance
du premier chéquier, consulter Bank Al-Maghrib (B.M.) sur les antécédents
bancaires du postulant (les incidents de paiement et leurs suites).
2 – Lors des incidents de paiement
En cas d’incident de paiement, c’est-à-dire de refus de paiement d’un
chèque pour défaut de provision suffisante, la banque tirée doit adresser une
lettre d’injonction au tireur par laquelle, elle l’invite :
- à lui restituer, ainsi qu’à toutes les banques dont il est le client, les
formules de chèques en sa possession et en celle de ses mandataires ;
- et de ne plus émettre pendant 10 ans des chèques autres que les
chèques de retrait et les chèques certifiés.
La banque doit aussi en informer les mandataires du titulaire du compte
et, s’il s’agit d’un compte collectif, les autres titulaires du compte ; car ces
derniers subissent aussi, de plein droit les mêmes mesures tant en ce qui
concerne le compte objet de l’incident qu’en ce qui concerne les autres
comptes collectifs (art. 315).
Le tiré qui a refusé le paiement doit alors déclarer l’incident à B.M.
L’article 309 al. 1 oblige les banques, lorsqu’elles refusent de payer un
chèque, de délivrer au porteur un certificat de refus de paiement.
b – La réparation de l’incident
La loi permet au titulaire du compte qui reçoit l’injonction de retrouver la
faculté d’émission des chèques à condition de régulariser l’incident et de payer
une amende forfaitaire.
1 – La régularisation
Pour recouvrer sa faculté d’émission, le tireur a le choix entre deux
procédés de régularisation :
- soit la régularisation directe : c’est-à-dire le règlement du montant du
chèque impayé entre les mains du porteur, il doit alors présenter le
chèque acquitté au tiré ;
- soit la régularisation indirecte : en constituant une provision suffisante
et disponible pour le règlement du chèque par les soins du tiré.
2 – L’amende forfaitaire
Après la régularisation, le tireur doit s’acquitter d’une amende forfaitaire
dont le taux dépend du nombre de répétition des incidents de paiement : (art.
314)
- à la 1ère injonction, le taux de l’amende est de 5 % du montant du
chèque impayé.
- à la 2nde injonction, ce taux est de 10 %.
- et, à partir de la 3ème injonction, il est de 20% 96.
Mais, la régularisation n’empêchera pas le tireur d’être poursuivi
pénalement.
Néanmoins, pour assurer le respect de ce système bancaire, le
législateur a assujetti les banques à un véritable système de responsabilité.
c – La responsabilité des banques
Cette responsabilité est assortie de deux sortes de sanctions, des
sanctions pénales et des sanctions de garantie.
1 – Les sanctions pénales
Les violations des obligations bancaires sont érigées en infractions
passibles d’une amende de 5000 à 50 000 dhs, notamment :
- le défaut de déclaration à B.M. des incidents de paiement et des
émissions au mépris de l’interdiction ;
96
- V. arrêté du ministre de l'économie et des finances du 12 août 1998 fixant les modalités
d'acquittement de cette amende. (B.O. n° 4618 du 3/9/1998, p. 497). Suivant ce texte, l'amende
forfaitaire doit être acquittée par l'intéressé à la perception de son choix au vu de l'injonction à
lui faite par la banque tirée. Cette injonction tient lieu de bulletin de versement, elle doit
comporter un certain nombre de mentions notamment le rang de l'injonction. Cette dernière
doit être établie en double exemplaire dont l'original est destiné à justifier la recette réalisée et
le second exemplaire est remis à l'intéressé après paiement pour justifier l'acquittement de
l'amende auprès de la banque.
- le refus de délivrer le certificat de refus de paiement ;
- la délivrance de formules de chèques à un interdit bancaire ou judiciaire
ou à son mandataire ;
- le défaut d’adresser une injonction en cas d’incident de paiement
invitant son auteur à restituer les formules de chèques et de ne plus
émettre de chèques pendant 10 ans.
Il appartient alors à B.M. de centraliser les renseignements concernant
ces infractions commises par les banques et de les communiquer au procureur
du Roi.
2 – Les sanctions de garantie
À défaut pour le banquier de respecter ses obligations, il devient garant
des émissions sans provision. Il doit payer jusqu’à concurrence de 10 000 dhs
par chèque malgré l’absence ou l’insuffisance ou l’indisponibilité de la provision
:
- Tout chèque qu’il a délivré à un interdit bancaire ou judiciaire, ou à un
nouveau client avant d’avoir consulté B.M. ;
- Et tout chèque dont il n’a pas réclamé la restitution suite à un incident.
Le banquier tiré qui a payé le chèque est alors subrogé dans les droits
du porteur à concurrence de la somme avancée.
d – Le rôle de Bank Al-Maghrib
Elle exerce son rôle par une sorte de « casier bancaire » (à l’instar du
casier judiciaire) détenu par le Service Central des Incidents de Paiement (le
S.C.I.P.). Car, en vertu de l’article 322, les banques sont tenues de déclarer à
B.M. tous les incidents de paiement survenus dans leurs agences. Il en est de
même pour les tribunaux lorsqu’ils prononcent une interdiction d’émettre des
chèques.
Ainsi, le S.C.I.P. centralise tous les antécédents des clients ayant fait
l’objet d’une déclaration et se charge de les communiquer aux banques.
Ce service détient d’ailleurs aussi tous les renseignements sur les
violations par les banques de leurs obligations de contrôle et de leurs
obligations de sanction.
C – LE SYSTEME PENAL
a – Les infractions en matière de chèque
1 – L’omission de constituer ou de maintenir la provision
Il s’agit de la fameuse émission de chèque sans provision du dahir de
1939 qui est l’infraction la plus courante en matière de chèque. Par sa nouvelle
formule, le législateur de 1996 a complètement modifié la physionomie de cette
infraction.
Alors que les articles 70 dahir de 1939 et 543 du code pénal
sanctionnaient celui qui, de mauvaise foi, a émis un chèque sans provision
préalable et disponible ou avec une provision inférieure au montant du chèque,
l’article 316-1° du nouveau code incrimine le tireur qui a omis de constituer ou
de maintenir la provision du chèque en vue de son paiement à présentation.
2 – L’opposition irrégulière
L’opposition est l’acte par lequel le tireur fait défense au tiré de payer un
chèque qu’il a émis.
Sous le dahir de 1939, l’opposition était permise dans seulement deux
cas : la perte du chèque et la faillite du porteur. L’article 271 du code de 1996 a
ajouté trois autres cas légaux d’opposition : le vol, l’utilisation frauduleuse et la
falsification du chèque. Par conséquent, celui qui fait opposition en dehors des
cas prévus par le législateur encourt les mêmes peines de l’émission sans
provision.
3- L’acceptation et l’endossement des chèques de garantie
L’article 316-6°/ sanctionne « toute personne qui, en connaissance de
cause accepte de recevoir ou d’endosser un chèque à la condition qu’il ne soit
pas encaissé immédiatement et qu’il soit conservé à titre de garantie ».
On notera enfin que pour faire respecter les interdictions bancaire et
judiciaire par les titulaires de comptes interdits, le code de 1996 a incriminé
l’émission de chèque au mépris d’une interdiction d’un emprisonnement d’un
mois à 2 ans et d’une amende de 1.000 à 10. 000 dhs malgré l’existence de la
provision. Et si la provision fait défaut, ces peines sont portées au double (art.
318).
b – Les sanctions pénales
L’article 316 prévoit des sanctions communes à toutes les infractions en
matière de chèque à savoir, l’emprisonnement de 1 à 5 ans et une amende de
2.1 à 10.000 dhs sans qu’elle puisse être inférieure à 25% du montant du
chèque ou de l’insuffisance de la provision.
En outre, le tribunal peut prononcer une interdiction d’émission de
chèque de 5 ans avec injonction de restituer les formules de chèques au
banquier (art. 317).
Il peut aussi ordonner, aux frais du condamné, la publication des extraits
de la décision d’interdiction dans les journaux.
En ce qui concerne la récidive, toutes les infractions en matière de
chèque sont considérées comme constituant un même délit (art. 323).
Le sursis ne peut être accordé que pour les peines d’emprisonnement
(art. 324), il n’est donc pas applicable à l’amende.
Le tireur d’un chèque sans provision ne peut bénéficier des
circonstances atténuantes que s’il constitue ou complète la provision dans les
20 jours de la présentation.
CHAPITRE II - LE FONDS DE COMMERCE
Le fonds de commerce (F.C.) est désormais défini par l’art. 79 du code
de commerce de 1996 comme étant « un bien meuble incorporel constitué
par l’ensemble des biens mobiliers affectés à l’exercice d’une ou de
plusieurs activités commerciales ».
Nous examinerons, d’abord, les éléments du F.C., ensuite les contrats
qui portent sur le F.C. et les règles destinées à le protéger.
97
- Le nom patronymique est hors du commerce, c’est-à-dire ne peut être cédé.
98
- La nouvelle loi sur les sociétés commerciales a supprimé la raison sociale, en ce
qui concerne les sociétés de personnes, qui était désignée, non par l’objet social,
mais par le ou les noms d’associés.
aura pour effet d’exclure la cession du nom commercial avec le F.C., dans ce
cas, le vendeur n’a plus le droit de céder l’usage du nom à un autre
commerçant, sous peine de concurrence déloyale.
# Le nom commercial fait par ailleurs l’objet d’une protection particulière
par le législateur.
3 - L’enseigne : C’est un signe distinctif qui sert à individualiser un
établissement commercial.
- L’enseigne peut prendre la forme d’un emblème figuratif, exp. la
coquille de Shell, le petit homme de neige de Michelin…
- Ca peut être une dénomination de fantaisie, exp. Hôtel au Lion d’Or,
1000 chemises, Au Rabais…, ou un nom d’une personne exp. Chez Bahaa’,
Chez Smaïl… ou le nom du quartier de l’emplacement du commerce, exp.
Café des Oudayas, Hôtel de la Tour Hassan…
- Souvent l’enseigne reprend le nom commercial présenté sous une
forme graphique originale, exp. le signe graphique de la CTM …
L’usage d’une enseigne semblable à celle d’un commerçant du même
lieu et faisant le commerce de produits semblables de manière à détourner sa
clientèle constitue une concurrence déloyale qui peut donner lieu à une action
en dommages-intérêts (Art. 84-2° DOC).
4 - Les licences : L’art. 80 parle des licences, mais il s’agit aussi des
autorisations et des agréments. Elles sont accordées par les autorités
administratives concernées pour l’exploitation de certains F.C., suivant le
domaine d’activité : tourisme, transport, hôtellerie, restauration, cinéma, vidéo,
boissons alcooliques…
5 - Le droit au bail : Ce droit n’a d’intérêt que dans le cas où le
commerçant n’est pas propriétaire du local dans lequel il exerce son commerce.
Il est désigné dans la pratique par l’expression de « propriété commerciale », ce
qui exprime la protection accordée par le législateur aux locataires de locaux à
usage commercial contre les éventuels abus des propriétaires des murs qui
pourraient avoir des conséquences néfastes sur le commerçant. De plus, il est
difficile de concevoir une vente d’un F.C. sans local.
Le droit au bail est demeuré réglementé par le dahir du 24 mai 1955, ses
règles assurent au commerçant le droit au renouvellement du bail et, à défaut,
le droit à une indemnité.
6 - Les droits de propriété industrielle :
L’art. 80 dresse toute une énumération de ces droits ; il s’agit des brevets
d’invention, des licences, des marques de fabrique, de commerce et de service,
des dessins et modèles industriels « et, généralement, conclue cet article, tous
droits de propriété industrielle, littéraire ou artistique qui y sont attachés ».
Ces droits continuent à être protégés par des textes spéciaux : les droits
de propriété industrielle sont réglementés par le dahir du 23 juin 1916 99, quant
aux droits de la propriété littéraire et artistique, qui sont assimilés aux droits
industriels, ils restent régis par le dahir du 29 juillet 1970 100.
Ces droits constituent un monopole du commerçant dans son
exploitation commerciale et, comme ils font partie du F.C., ils peuvent être
cédés avec ce dernier, mais pour les exclure il faut prévoir une clause expresse
dans le contrat de vente du F.C..
102
- C'est-à-dire les propriétaires successifs du fonds de commerce.
103
- C'est-à-dire dans les 15 jours de l'acte.
cas où il y verrait un intérêt. A défaut de paiement, elle lui permettra d’obtenir
l’effacement rétroactif du contrat de vente du FC pour inexécution par
l’acquéreur de son obligation de payer le prix.
Pour pouvoir exercer cette action, le vendeur doit la mentionner et la
réserver expressément lors de l’inscription de son privilège.
c - Les règles protectrices des droits des créanciers du vendeur
Lors de l’exercice de son activité, il est naturel que le commerçant soit
amené à recourir au crédit, que ce soit dans ses relations avec ses fournisseurs
ou avec les établissements de crédit. Il est donc normal qu’il doit procéder,
préalablement à la vente de son FC, à l’apurement de sa situation vis- à- vis de
ses créanciers ; ce qui n’est pas toujours le cas. C’est en prévision de certaines
pratiques malhonnêtes que le législateur a instauré des règles pour protéger
ces créanciers. Ces règles sont normalement destinées à sauvegarder les
intérêts des créanciers chirographaires, mais rien n’empêche, en droit, les
créanciers gagistes de s’en prévaloir ; alors que leur protection est assurée par
le droit de suite, il leur est inutile de recourir à l’application de ces règles104.
Dans le but de protéger les droits des créanciers, trois mécanismes
complémentaires sont mis au point par le législateur : la publicité de la vente du
FC, l’opposition et la surenchère.
1 - La publicité
- Dépôt : Pour que les créanciers soient mis au courant de l’opération de
vente du FC, l’art. 83 du nouveau code impose tout d’abord, une fois l’acte de
vente enregistré, de déposer une expédition de l’acte notarié ou un exemplaire
de l’acte sous seing privé dans les 15 jours de sa date au secrétariat-greffe du
tribunal dans le ressort duquel est exploité le fonds ou le principal
établissement du fonds si la vente comprend des succursales.
- Publication au RC : Ensuite, un extrait de cet acte doit être publié au
RC.
- Publications au BO et journaux d’annonces légales. : Enfin, une
double publication doit être entreprise :
104
- Cass. civ. 21 décembre 1937, D.H. 1938, p. 65.
Master GFCF Professeur Chakib
2016-2017 El Oufir
105
- Trib. Casablanca, 27 février 1937, G.T.M. 10/4/1937, p. 111.
93
surenchérisseur106 et proposer de payer le prix déclaré majoré d’un sixième du
prix des éléments incorporels.
Lors de la surenchère, à défaut d’un plus fort enchérisseur, le fonds est
adjugé au créancier surenchérisseur du sixième.
§ II - LE NANTISSEMENT DU FC
Le code de commerce réglemente le nantissement du FC sans
déposséder le commerçant qui continue de l’exploiter.
Du reste, pour que le nantissement du FC puisse produire pleinement
ses effets, ses conditions (A) et ses formalités (B) doivent être rigoureusement
respectées.
A - LES CONDITIONS
Tous les éléments du FC énumérés à l’art. 80 sont susceptibles d’être
compris dans le nantissement à l’exclusion des marchandises, le législateur
entend garder cet élément du fonds aux créanciers ordinaires.
B- LES FORMALITÉS
Exactement comme pour l’acte de vente, le nantissement du FC doit être
dressé par un acte authentique ou sous seing privé et déposé au tribunal dans
lequel le fonds est inscrit dans les 15 jours de sa date.
Ce dépôt sera suivi de l’inscription d’un extrait de l’acte au RC, mais
aucune publication dans le BO ou les journaux n’est exigée.
Cette inscription du nantissement au RC doit, à peine de nullité, être
prise à la diligence du créancier gagiste dans les 15 jours de l’acte constitutif,
autrement dit, à défaut de cette inscription, le nantissement sera purement et
simplement inopposable aux autres créanciers du propriétaire du FC. Cette
inscription conserve le privilège pendant 5 ans et doit être renouvelée à
l’expiration de ce délai, sinon son effet prend fin et il est procédé à sa radiation
d’office par le greffier (Art. 137).
§ III - LES REGLES COMMUNES A LA VENTE ET AU NANTISSEMENT DU
FC
En dehors de l’action résolutoire qui est propre au vendeur du FC, le
législateur a institué des règles communes à la vente et au nantissement qui
106
- En réalité, cette procédure a pour objectif de lutter contre les pratiques de
dissimulation du prix réel de la vente.
ont pour effet de protéger les droits du vendeur et du créancier nanti ; il s’agit
en l’occurrence du droit de suite et du droit de préférence.
A - LE DROIT DE SUITE
En vertu du premier alinéa de l’art. 122 c.com. « les privilèges du
vendeur et du créancier gagiste suivent le fonds en quelques mains qu’il
passe ».
Il s’agit donc de ce droit qui permet aux créanciers privilégiés inscrits et
non payés de saisir le FC entre les mains de n’importe quelle personne et à
quelque titre que ce soit, qu’il s’agisse du propriétaire ou d’un nouvel acquéreur
en vue de le faire vendre aux enchères publiques.
B - LE DROIT DE PRÉFÉRENCE
Ce droit permet aux créanciers privilégiés, suite à la vente du FC aux
enchères publiques, de se faire payer sur le prix de la vente par priorité sur les
autres créanciers.
§ IV - LA GERANCE LIBRE
La gérance libre (ou gérance location) permet au propriétaire de donner
la gérance du fonds à une personne en vertu d’un contrat de location
moyennant un loyer qui peut prendre parfois la forme d’une participation aux
bénéfices. Dans ce cas, le gérant locataire bénéficie de la qualité de
commerçant et assume seul les risques de l’exploitation.
Le code de commerce de 1996 a réglementé pour la première fois la
gérance libre (articles 152 à 158) ; cette réglementation traite de la publicité du
contrat tout en veillant à la protection de tous les intérêts en présence.
A - LES REGLES RELATIVES À LA PUBLICITE
Ayant la qualité de commerçant, le gérant libre doit bien entendu
satisfaire à toutes les obligations du commerçant et notamment se faire
immatriculer au RC (art. 153 al. 1 c. com.). Mais la publicité dont il est question
au chapitre relatif à la gérance libre est de toute autre nature, elle a pour
objectif de faire connaître aux tiers que la propriété du fonds n’appartient pas au
gérant.
Pour ce faire, le législateur prévoit trois procédés de publicité :
# Tout d’abord, un extrait du contrat de gérance libre doit être publié
dans les 15 jours de sa date au BO et dans un journal d’annonces légales. Il
reste qu’il est dans l’intérêt du bailleur du fonds d’effectuer cette publicité dans
la mesure où il demeure, jusqu’à la publication et pendant les 6 mois qui
suivent, responsable solidairement avec le gérant des dettes contractées par
ce dernier à l’occasion de l’exploitation du fonds (art. 155).
# Il appartient, en outre, au bailleur du fonds de procéder aux formalités
relatives au RC ; il a le choix entre deux inscriptions :
- soit demander sa radiation du RC ;
- soit requérir la modification de son inscription personnelle avec la
mention expresse de la mise en gérance libre.
Autrement, le bailleur reste solidairement responsable des dettes de son
locataire tant qu’il n’a pas requis ces inscriptions (art. 60 et 155).
# Enfin, quant au gérant, il doit indiquer sur tous ses documents
commerciaux ainsi que sur toutes les pièces signées par lui ou en son nom,
son numéro d’immatriculation au RC avec mention du tribunal où il est inscrit et
sa qualité de gérant libre du fonds sous peine d’une amende de 2 000 à 10 000
dhs.
B - LES EFFETS DE LA LOCATION-GERANCE
Il s’agit en l’espèce, des effets du contrat de location qui mettent
certaines mesures à la charge du locataire et du bailleur.
- Le premier doit payer le loyer qui peut consister en une participation
aux bénéfices, exploiter le fonds dans les meilleures conditions, ne pas en
changer la destination, c’est-à-dire continuer le même commerce que le
bailleur.
En outre, n’étant pas propriétaire du fonds, le gérant ne peut le vendre ni
le donner en nantissement ; il ne peut non plus en sous louer la gestion sans le
consentement du bailleur étant donnée la nature intuitu personae du contrat.
- En contrepartie, le bailleur a pour obligation de mettre tous les
éléments du fonds à la disposition du gérant et ne doit pas en troubler la
jouissance, notamment par la concurrence…
3ÈME PARTIE – LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
Il n'est pas de doute que les commerçants, personnes physiques, jouent
un rôle considérable dans notre vie économique, mais le pouvoir économique
des entreprises individuelles reste très limité en comparaison avec celui des
sociétés qui puisent leur force de la réunion des associés et de leurs capitaux,
avec des projets économiques plus ambitieux et des bénéfices souvent plus
avantageux.
Les sociétés commerciales sont non seulement plus puissantes dans le
commerce et l'industrie, mais des secteurs d'activités des plus importants ne
peuvent être exploités que par des sociétés anonymes, tels que la banque et
les assurances du secteur commercial.
II – LÉGISLATION
Notre législation des sociétés commerciales est désormais contenue
dans deux lois :
- la loi n° 17/95 relative aux SA, promulguée par dahir du 30 août 1996 107 ;
- et la loi n° 5/96 relative aux autres sociétés, promulguée par dahir du 13
février 1997108.
107
- BO n° 4422 du 17/10/1996, p.661. Cette loi a été modifiée par la loi 20-05 promulguée par
dahir n° 1-08-18 du 23 mai 2008, B.O. n°5640 du19/06/2008 ; la loi 21/05 promulguée par
dahir du 14 février 2006 modifiant la loi 5/96, B.O. n° 5400, du 2 mars 2006 et son article 19 a
été modifié par la loi 23-01 promulguée par dahir n°1-04-17 du 21/4/2004 modifiant la loi
relative au CDVM du 21/9/1993, B.O. du 6/5/2004.
108
- BO n° 4478 du 1/5/1997, p. 482.Cette loi a été modifiée par la loi 21-05 du 14/2/2006 BO
n° 5400 du 2/3/2006 et par la loi 24-10 du 2 juin 2011 BO n° 5956 bis du 30/6/2011.
CHAPITRE 1 - LE CONTRAT DE SOCIÉTÉ
Section 1 – LES CONDITIONS DE FORMATION DES
SOCIÉTÉS
§ 1 – LES CONDITIONS DE FOND
En vertu de l’article 982 «la société est un contrat par lequel deux ou
plusieurs personnes mettent en commun leurs biens ou leur travail, ou tous les
deux à la fois, en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter».
Il se dégage de cet article que le contrat de société est soumis à trois
conditions de fond qui concernent les associés, les apports, le partage des
bénéfices.
A – LES ASSOCIES
S'agissant d'un contrat, les associés doivent d'abord remplir les
conditions relatives à la capacité avant de s'intéresser au nombre d'associés
exigé par la loi.
a - La capacité
Il s’agit bien entendu de la capacité de s’obliger, à savoir l’aptitude à
contracter société.
Pour la souscription ou l'acquisition des parts ou actions de sociétés, les
mineurs incapables109 doivent être représentés par leur tuteur légal (père ou
mère) ou, après autorisation du juge, par leur tuteur testamentaire ou datif,
puisque l'acte de société est considéré par le D.O.C. comme un acte de
disposition (art. 11 al. 2).
A l'âge de 16 ans, le mineur émancipé peut être actionnaire d'une SA ou
d'une commandite par actions, commanditaire dans une commandite simple, ou
associé d'une SARL.
Cependant, dans les sociétés de personnes qui nécessitent la qualité de
commerçant, l’entrée d’un mineur, même émancipé, est subordonnée aux
conditions spéciales du droit commercial. Le mineur ne peut donc être associé
109
Qui n'ont pas atteint l'âge de la majorité légale qui est actuellement de 18 années
grégoriennes révolues.
dans une société en nom collectif, ou commandité dans une société en
commandite simple ou par actions que s'il est autorisé à faire le commerce.
b – Le nombre d'associés
Selon le principe posé par l'article 982 D.O.C. une société peut être
constituée au moins par deux associés.
Quant aux sociétés commerciales, le nombre minimal d’associés varie
selon le type de société : 5 pour la SA, 3 commanditaires au moins et un ou
plusieurs commandités pour la société en commandite par actions, deux pour la
SARL et un seul pour la SARL à associé unique et ce, et deux associés pour la
SNC.
B – LES APPORTS
On distingue trois types d’apports.
a. Les apports en numéraire
Ce sont les espèces (argent) apportées par les associés pour constituer
la société. Chaque associé remet aux fondateurs sa quote-part financière lors
de la constitution de la société.
b. Les apports en nature
Ils sont constitués par différents types de biens, autres que le numéraire,
susceptibles d’être capitalisés.
Ces apports peuvent prendre la forme d’immeubles (bâtiments, terrains,
etc.) ou de meubles corporels (ordinateurs, bureaux, machines, véhicules, etc.),
ou incorporels (brevets, fonds de commerce, logiciels, etc.)
Ces apports doivent faire l’objet d’une évaluation. Pour cela les associés
doivent, dans les sociétés autres que les sociétés de personnes, faire appel à
des commissaires aux apports chargés de donner, sous leur responsabilité,
une valeur à ces apports.
c. Les apports en industrie
Ils sont constitués par le savoir-faire de certains associés et ne sont
possibles que dans les sociétés de personnes et, dans certaines conditions,
dans les SARL. N’étant pas saisissables, ils n’entrent pas dans la constitution
du capital social (ce sont des apports non capitalisés).
En revanche, ils donnent droit à une part des bénéfices et rendent leur
titulaire responsable des dettes de la société à concurrence de l’évaluation de
la valeur de son apport.
C – LE PARTAGE DES BENEFICES
La société est constituée dans le but de faire des bénéfices ou de
profiter d’une économie. Ainsi, chaque associé recevra une part des bénéfices
au prorata de ses apports. Ces règles s’appliquent également à la contribution
des associés aux pertes.
§ 2 – LES CONDITIONS DE FORME
Pour exister, une société doit remplir des conditions de forme
particulières ; elles sont identiques, à peu de chose près, pour toutes les
sociétés.
A – LES STATUTS
C’est l’acte fondateur de la société ; il consiste dans la rédaction et la
signature des statuts.
En principe, en vertu de l’article 987 D.O.C., le contrat de société est
simplement consensuel, c'est-à-dire que seul le consentement des parties est
nécessaire pour constituer une société ; cependant, s'agissant des sociétés
commerciales, il est obligatoire que les statuts soient établis par écrit.
Les statuts peuvent prendre la forme d’acte sous seing privé ou d’acte
authentique. Ils contiennent des indications sur :
- l’identité de la société (forme, objet social, siège social, durée, capital
social, etc.),
- celle des associés apporteurs (nom, domicile, types d’apport, montant,
etc.),
- ainsi que les règles de fonctionnement qui la régissent (gérance, tenue
des assemblées, partage des bénéfices, etc.).
B - SOUSCRIPTION DU CAPITAL ET LIBERATION DES APPORTS
Une société ne peut être constituée que si tous les titres émis sont
souscrits par les associés.
a - La libération des apports en numéraire
La libération est l’exécution de la souscription par la réalisation de
l’apport promis, soit en numéraire, soit en nature.
En principe, la libération des apports se fait en totalité dès la constitution
des sociétés. Cependant, les actions en numéraire des S.A. et les parts en
numéraire des SARL (si capital il y a) doivent être libérées lors de la
souscription au moins du quart de leur valeur nominale, mais il peut être prévu
que la libération doit être intégrale dès la souscription.
Sinon, s'agissant de la S.A., la libération des 3/4 restants doit intervenir
en une ou même en plusieurs fois suivant la décision du conseil
d’administration ou du directoire dans un délai qui ne peut dépasser 3 ans à
compter de l’immatriculation de la S.A. au RC.
Et pour la SARL, la libération du surplus peut intervenir en une ou
plusieurs fois sur décision du gérant dans un délai qui ne peut excéder 5 ans à
compter de la date d’immatriculation.
b - La libération des apports en nature
Les apports en nature doivent être intégralement libérés lors de la
constitution de toute sorte de société commerciale.
Ces apports doivent être transférés à la société en formation, mais après
avoir été vérifiés.
S'agissant des S.A., les fondateurs désignent un ou plusieurs
commissaires aux apports qui établissent un rapport sur l'évaluation des
apports en nature.
S'agissant de la SARL les commissaires aux apports sont obligatoires:
- quand la valeur d’un des apports dépasse 100 000 dh;
- et si le total des apports en nature est supérieur à la valeur de la moitié
du capital social (article 53).
Concernant les sociétés de personnes, l'évaluation des apports ne pose
pas de problème vu la responsabilité illimitée des associés.
C - LE DEPÔT DES FONDS EN BANQUE
Cette formalité n'est prévue que pour les sociétés qui exigent un capital
minimum, notamment la S.A. (art. 22) ; la SARL n’est actuellement soumise à
cette formalité que lorsque le capital prévu par les associés dépasse 100 000
dhs selon la loi 24-10) (art. 51). Cette formalité a pour objectif d’éviter la
création de sociétés à capitaux fictifs.
En effet, les fonds provenant des souscriptions en numéraire doivent être
obligatoirement déposés par les fondateurs au nom de la société en formation,
dans les 8 jours de leur réception, dans un compte bancaire bloqué avec la liste
des souscripteurs indiquant les sommes versées par chacun d’eux.
D - LA DECLARATION DE SOUSCRIPTION ET DE VERSEMENT
Cette formalité ne concerne que les S.A. Lorsque le capital est
intégralement souscrit et les versements exigés sont effectués de manière
régulière, les fondateurs doivent établir une déclaration constatant ces
opérations soit par acte notarié, soit par acte sous seing privé ; dans ce dernier
cas, l’acte doit être déposé au greffe du tribunal du lieu du siège social 110.
E – LES FORMALITES DE DEPÔT AU TRIBUNAL
Les fondateurs de la société doivent déposer au tribunal du lieu du siège
social un certain nombre de pièces notamment :
- deux copies ou deux exemplaires des statuts certifiés conformes par le
représentant de la société ;
- les actes de nomination des premiers dirigeants,
- le cas échéant, le rapport du commissaire aux apports etc.
F – LA PUBLICITE DE LA CONSTITUTION
Afin d’assurer une plus grande transparence de la vie des sociétés et de
protéger leurs partenaires commerciaux, des conditions de publicité ont été
rendues obligatoires.
Après le dépôt des statuts et autres pièces au tribunal, les fondateurs
doivent faire une demande d’immatriculation au registre du commerce qui
permettra à la société d’acquérir la personnalité morale.
Ensuite, dans les 30 jours de l'immatriculation de la société au registre
du commerce, les fondateurs doivent faire publier un extrait des statuts dans un
journal d’annonces légales et au bulletin officiel. Cet extrait doit mentionner les
renseignements essentiels sur la constitution de la nouvelle société (forme,
dénomination, siège social, durée, montant du capital, etc.) ; il doit également
contenir le numéro de l'immatriculation de la société au registre de
commerce111.
110
- On constatera que, contrairement à l’article 1 alinéa 9 de la loi de 1922, la DSV n’est plus
obligatoirement notariée.
111
Loi 21/05 promulguée par dahir du 14 février 2006 modifiant la loi 5/96, B.O. n° 5400, du 2
mars 2006 et loi 20/05 concernant la S.A.
Section 2 – ATTRIBUTS DES SOCIÉTÉS
Il s’agit d’étudier successivement les caractéristiques de la société.
§ 1 – LA DENOMINATION SOCIALE
Comme toutes les personnes juridiques, les sociétés s’identifient par un
nom ; c’est la dénomination sociale, qui peut être choisie sans limitation de
possibilités.
Certaines sociétés ont une raison sociale telles que les sociétés civiles. Il
s’agit d’une identification qui comprend tout ou partie des noms des associés
suivis de «et compagnie», exemple : société BENCHEKROUN, BENJELLOUN
et compagnie.
Actuellement les sociétés de personnes ne sont plus obligées d'adopter
une raison sociale ; quant aux autres sociétés commerciales, elles doivent,
obligatoirement, avoir une dénomination sociale.
§2 – LE SIEGE SOCIAL ET LA NATIONALITE
L'intérêt de la question est double : au niveau national et au niveau
international.
A – AU NIVEAU NATIONAL
Le siège social, qui doit être mentionné dans les statuts, représente le
domicile de la société :
- il permet de la localiser pour accomplir certaines opérations
(correspondances, impôts, etc.),
- les actions en justice contre la société doivent être intentées devant le
tribunal de son siège social,
- il permet aussi de déterminer le lieu des formalités de dépôt et de
publicité.
- il détermine en outre la nationalité de la société qui est celle du pays où
se situe son siège social. L’importance de la nationalité est considérable
puisqu’elle définit les lois applicables à la société (formation, fonctionnement,
etc.).
B– SUR LE PLAN INTERNATIONAL : SOCIÉTÉS INTERNATIONALES ET SOCIÉTÉS
multinationales
Il existe cependant des sociétés qui ne sont régies par aucune loi
nationale, il s'agit des sociétés internationales qui sont comparées par
certains auteurs aux personnes physiques apatrides, avec cette différence
qu'elles sont créées par des conventions internationales (entre Etats) et régies
par leurs seuls statuts sans être rattachées à une loi nationale. On peut citer
comme exemples le S.A.S. (Scandinavian Air Lines System), la S.F.I. (Société
financière Internationale) etc.
A la différence des sociétés internationales, les sociétés
multinationales ont plusieurs nationalités. Ce sont des sociétés qui forment un
groupe (comprenant une société mère et des filiales 112) implanté sur le territoire
de plusieurs Etats et chaque unité du groupe bénéficie d'une autonomie
juridique. Il s'agit en fait d'une seule personne morale à laquelle les différents
États attribuent la nationalité.
En réalité, malgré ces différentes nationalités, presque toutes les
multinationales sont des sociétés qui n'ont qu'une seule nationalité, celle de la
société dominante dont les dirigeants possèdent le pouvoir réel de décision ;
c'est le groupe (composé de toutes les unités) qui est qualifié de
"multinationale". On citera comme exemples General motors, I.B.M., Nestlé, Air
Afrique, etc.
§3 – LE PATRIMOINE
Le patrimoine de la société se compose de l’actif, constitué par les
apports en numéraire et en nature des associés et par les biens acquis par elle
à l’occasion de son activité (meubles et immeubles), ainsi que du passif, qui
comprend l’ensemble des dettes de la société (les emprunts, les créances des
fournisseurs, les impôts, etc.)113
La société a un patrimoine qui lui est propre. On parle d'autonomie du
patrimoine, car il ne se confond pas avec celui des associés. Ainsi, l’actif de la
société n’appartient pas aux associés qui sont seulement titulaires de droits
pécuniaires et non pécuniaires envers la société par la possession de parts ou
d’actions.
Les créanciers personnels des associés ne pourront en aucun cas saisir
le patrimoine social pour éteindre leurs créances. D’autre part, le passif de la
112
Alors qu'une filiale n'a pas de personnalité morale distincte de la société, une succursale est
une annexe de l'entreprise gérée par la société mais qui a une personnalité morale propre.
113
- Il ne faut pas confondre patrimoine social et capital social. Alors que le premier comprend
et l’actif et le passif de la société, le capital social représente le montant des apports effectués
par les associés au profit de la société, il peut être augmenté par de nouveaux apports ou par
incorporation de réserves, il peut même parfois être réduit.
société ne peut être imputé sur le patrimoine des associés à l’exception des
sociétés de personnes dans lesquelles la responsabilité des associés est
indéfinie.
114
C'est-à-dire sans avoir l'intention de créer une société en participation.
115
- C’est pourquoi le législateur n’en exige aucune formalité de publicité. Ce caractère occulte
ne joue qu’à l’égard des tiers et non pas vis-à-vis de l’administration fiscale ; la société doit se
faire déclarer.
B –SOCIETE CREEE DE FAIT / SOCIETE DE FAIT
- La société de fait est une société dont les associés ont voulu agir en
tant qu’associés, mais dont la société a continué de fonctionner tout en étant
entachée d’un vice de constitution, par exemple défaut d’un élément constitutif
essentiel qui entraîne l’annulation du contrat de société.
Avant sa nullité cette société a pu prendre une des formes des sociétés
(par exemple une SA, une SARL, etc.), elle a pu être immatriculée au registre
de commerce et partant avoir déjà acquis la personnalité juridique.
Cette nullité n'a cependant d'effet que sur l'avenir, les actes
antérieurement effectués sont valables, cette nullité étant inopposable aux tiers.
- La société créée de fait est une société dont les associés se sont
comportés, en fait, comme des associés sans qu’ils en soient conscients, c'est-
à-dire sans avoir voulu créer une société. C’est une société dont tous les
éléments fondamentaux du contrat de société sont réunis mais, contrairement à
la société de fait, elle n'a jamais acquis la personnalité morale.
Après sa découverte, cette société sera considérée comme société de
droit commun, mais si elle exerce une activité commerciale, elle sera
considérée comme une société en nom collectif entraînant la responsabilité
indéfinie et solidaire des associés.
Elle ne nécessite pas de capital minimal. Les apports peuvent être faits
en numéraire, en nature ou en industrie ; ils donnent droit à l’attribution de parts
sociales d’égale valeur choisie par les associés.
Toutefois, la responsabilité des associés constitue une contrepartie à la
faiblesse de ce capital ; en effet, ces derniers sont responsables indéfiniment et
solidairement des dettes de la société.
B – LA CAPACITÉ DES ASSOCIÉS
L’article 3 de la loi 5/96 considère que tous les associés de la SNC ont la
qualité de commerçant. Partant, la capacité commerciale est requise des
associés. De fait, certaines catégories de personnes ne peuvent être associées
dans la SNC ; ce sont :
- les mineurs, même émancipés, s’ils ne sont pas autorisés à faire le
commerce ;
- les majeurs interdits ;
- les personnes dont la profession n’est pas compatible avec la qualité
de commerçant (avocat, fonctionnaire, etc.) ;
- les personnes dont l’activité commerciale se trouve interdite à raison
d’une incapacité ou d’une déchéance.
§ 2 – LA GESTION DES SOCIÉTÉS EN NOM COLLECTIF
A – LES CONDITIONS DE LA GÉRANCE
Le fonctionnement de la société est assuré par un ou plusieurs gérants
nommés dans les statuts (gérant statutaire) ou par acte ultérieur.
Sans stipulation des statuts, tous les associés sont gérants116.
Si le gérant est associé, sa nomination requiert l’unanimité ; dans le cas
contraire, les statuts fixent librement les conditions de sa nomination.
Le gérant peut être une personne physique ou morale, dans ce dernier
cas, la personne morale doit désigner son représentant qui sera responsable
de la même manière que les personnes physiques.
Le gérant doit avoir la capacité de faire le commerce, qu'il soit associé
ou non ; mais n’est pas obligatoirement commerçant dans le cas où il ne ferait
pas partie de la société (il n'est dans ce cas que mandataire).
Il lui est possible de cumuler plusieurs mandats de gérant dans plusieurs
sociétés ; mais il lui est interdit d'exercer une activité similaire à celle de la
société, sauf s'il est autorisé par les associés.
Sa rémunération est fixée par les statuts ou par décision ultérieure des
associés.
116
Il faut par exemple mentionner dans les statuts que "la société sera dirigée par un ou deux
ou trois…gérants nommés par assemblée générale…" ; à défaut d'une disposition de ce genre,
tous les associés seront considérés des gérants.
B – LES POUVOIRS DU GÉRANT
Il est habituel de distinguer les pouvoirs du gérant dans ses rapports
avec les associés et dans ses rapports avec les tiers.
a - Les pouvoirs du gérant face à ses associés
Dans les rapports avec les associés, le gérant peut accomplir tous les
actes de gestion dans l’intérêt de la société ; toutefois, les statuts prévoient
souvent une limitation de ses pouvoirs en soumettant certains actes à
l’autorisation préalable des associés (vente d’immeubles, dépenses excessives,
constitutions de sûretés, etc.).
b - Les pouvoirs du gérant face aux tiers
Dans ses rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les
actes qui entrent dans le cadre de l’objet social, par conséquent, et
contrairement à la SARL, la société n'est pas tenue par les actes du gérant qui
dépassent l'objet social. Les clauses statutaires limitant les pouvoirs des
gérants sont inopposables aux tiers.
§ 3 - LES REGLES CONERNANT LES ASSOCIÉS
A – LA CESSION DES PARTS
L’associé qui veut vendre ses parts sociales doit obtenir l’autorisation de
tous les autres associés. En effet, dans les sociétés de personnes où les
associés sont peu nombreux, ces derniers doivent se protéger contre l’intrusion
de personnes indésirables dans la mesure où «l’intuitu personae» est très fort.
Lorsque l’agrément est refusé, l’associé doit rester dans la société ou
provoquer sa dissolution par une décision de justice pour "justes motifs".
B - LA RESPONSABILITÉ DES ASSOCIÉS
117
En cas de non-paiement des dettes par la société et 8 jours après la
mise en demeure de celle – ci par acte extrajudiciaire 118, les créanciers peuvent
poursuivre les associés en paiement de l’intégralité du passif.
La responsabilité étant solidaire et indéfinie, les associés peuvent être
tenus de payer l’ensemble des dettes sur leurs biens personnels et un associé
risque, s’il est solvable, de payer les dettes des autres associés insolvables
117
- Ce délai peut être prolongé par ordonnance du président du tribunal, statuant en référé,
une seule fois et pour la même durée (article 3 alinéa 2).
118
- Il s’agit d’un acte dressé par un auxiliaire de justice (avocat, huissier de justice, etc.) en
dehors de toute procédure, c'est - à - dire avant toute action en justice.
(c'est-à-dire toute la dette sociale). Il aura toutefois par la suite la possibilité de
se retourner contre eux pour récupérer les sommes payées indûment (action
récursoire).
119
Y compris la question relative au dépassement de l'objet social et des limites statutaires.
dénomination sociale et ils sont les seuls à pouvoir s'occuper de la gestion de
la société.
Quant aux commanditaires, ils ne peuvent jamais être chargés de la
gestion puisqu'aux termes de l'article 25 "l'associé commanditaire ne peut faire
aucun acte de gestion engageant la société vis-à-vis des tiers, même en vertu
d'une procuration" sous peine de répondre solidairement et indéfiniment avec
les commandités des dettes sociales qui résultent des actes prohibés ou même
de l'ensemble des dettes si ces actes sont nombreux ou importants. Leur
pouvoir se limite donc aux décisions collectives.
CHAPITRE 3 – LA S A R L
Actuellement, elle est régie par les articles 44 à 87 de la loi 5/96.
La SARL est considérée comme une société hybride dans la mesure où
elle possède certaines caractéristiques des sociétés de personnes et d’autres
des sociétés de capitaux.
Depuis la loi 5/96, il est devenu possible de créer une SARL à «associé
unique».
121
- On verra plus loin qu'il en est de même en ce qui concerne les SA pour le président du
conseil d'administration, le directeur général, les directeurs généraux délégués, le président et
le vice-président du conseil de surveillance ainsi que pour les membres du directoire.
122
- Cette possibilité de nommer un gérant étranger est très utile lorsque tous les associés sont
des personnes morales.
de la société comme ils le souhaitent. Il existe deux types d’assemblées
(ordinaire et extraordinaire).
A – L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ORDINAIRE ANNUELLE
Elle doit se tenir dans les 6 mois qui suivent la clôture de l’exercice.
L’assemblée est convoquée soit par le gérant, soit par un commissaire
aux comptes en cas de problème.
Elle a pour fonction principale l’approbation des comptes annuels, mais
de nombreuses autres décisions peuvent être prises par les associés à cette
occasion (nomination et révocation du gérant, etc.).
Le nombre de voix dont bénéficie chaque associé est équivalent au
nombre de parts détenues123 et les décisions sont prises par un ou plusieurs
associés représentant plus de la moitié des parts sociales.
B – L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE EXTRAORDINAIRE
Ce deuxième type d’assemblée permet de modifier les statuts.
L’assemblée générale extraordinaire concerne toutes les décisions
importantes qui doivent être prises à une forte majorité. Toute modification des
statuts sera décidée par les associés représentant au moins les trois quarts du
capital social (article 75).
Cette majorité est nécessaire car les décisions prises peuvent entraîner
des conséquences graves pour la société, et par conséquent pour les intérêts
des associés (changement de dénomination, de siège social, fusion,
dissolution, etc.).
§ 3 – LA RESPONSABILITE DES ASSOCIÉS
Contrairement à la SNC, la responsabilité des associés est limitée à
leurs apports. Dans ces conditions, le montant de leurs pertes ne peut
dépasser ce qu’ils ont engagé dans la société.
Dans la pratique, les dettes étant reportées chaque année sur l’exercice
suivant, cette responsabilité ne sera réellement mise en jeu qu’à la dissolution
de la société ou après le paiement des dettes (l’apurement du passif social) ;
chaque associé retrouvera alors tout ou partie de son apport (ou même quelque
fois rien), mesurant ainsi l’étendue de sa responsabilité.
123
C'est-à-dire que chaque associé dispose d'un nombre de voix égal à celui des parts sociales
qu'il détient.
CHAPITRE 4 – LA SOCIETE ANONYME
La SA représente l’archétype des sociétés de capitaux. Apparue au
XIXème siècle à une époque d’expansion économique due à la révolution
industrielle, où la recherche et la mise en commun de capitaux importants
étaient indispensables afin de créer des entreprises de grande taille rendues
obligatoires par les avancées technologiques générées par le progrès
scientifique.
Actuellement nous disposons d’une loi spéciale consacrée à la seule SA,
il s’agit de la loi n°17-95 promulguée par dahir n° 1-96-124 du 30 août 1996 124.
124
- B.O. n° 4422 du 17/10/1996, p. 661.
3 – Les apports : Les associés qu’on nomme des actionnaires peuvent
faire des apports en numéraire et en nature 125, les apports en industrie étant
interdits.
La contrepartie des apports est représentée par des titres négociables
qu’on appelle des actions ; ces dernières peuvent être cotées en bourse. Par
conséquent, toute personne peut acheter ou céder librement les actions qu’elle
détient sur ce marché par l’intermédiaire des sociétés de bourse 126.
4 – L’objet social : La forme de la SA est imposée pour certaines activités
économiques : l’activité bancaire, les entreprises d’investissement, les
entreprises de crédit immobilier.
Section 2 – LA GESTION DE LA SA
La nouvelle loi offre désormais un choix entre deux types de gestion de
la SA : un mode traditionnel avec un conseil d’administration et son président,
et un type nouveau, avec un directoire et un conseil de surveillance, repris sur
la législation française elle-même inspirée du droit allemand.
En introduisant ce nouveau type de gestion, le législateur français avait
pour but de faire introduire dans le directoire (qui est - contrairement au conseil
d’administration ouvert aux non – actionnaires) les salariés de l’entreprise et
plus particulièrement les hauts cadres. Il est cependant étonnant qu’en France
plus de 99% des SA utilisent le mode traditionnel d’administration et moins de
1% ont recours au nouveau système avec directoire et conseil de surveillance.
Les SA ont le libre choix entre ces deux modes de gestion.
Nous envisagerons donc dans cette section d’abord, le type traditionnel
d’administration, ensuite, le type moderne.
125
V. introduction
126
La loi 20/05 a interdit de soumettre la négociabilité des actions cotées en bourse à
l'agrément des actionnaires (art.255).
sont inscrites à la cote de la bourse des valeurs, ce maximum est porté à 15
administrateurs.
Les membres du conseil font partie de la société, ce sont donc des
actionnaires.
Ils doivent posséder la capacité civile sans avoir la qualité de
commerçant ; néanmoins, comme pour les gérants, d’autres conditions sont à
respecter.
Ce sont des personnes physiques ou morales qui, dans ce cas, doivent
se faire représenter par un représentant permanent; il n’est pas obligé que les
administrateurs soient de nationalité marocaine ; ils peuvent cumuler, sans
limite, plusieurs mandats d’administrateur.
Un salarié de la société peut être nommé administrateur, à condition que
127
son contrat de travail, stipule l’article 43, corresponde à un emploi effectif
sous peine de nullité de sa nomination, d’autant plus qu’il ne doit pas perdre les
bénéfices de son contrat de travail, autrement dit, il doit continuer à percevoir
son salaire, d’acquérir l’ancienneté.
Mais le nombre des administrateurs salariés de la société, en vertu d’un
contrat de travail, ne peut toutefois pas dépasser le 1/3 des membres du
conseil d’administration ; on remarquera cependant que la loi ne prévoit pas de
sanction en cas de dépassement ! Il y a lieu de penser que les nominations
excédentaires peuvent être frappées de nullité.
b – Les pouvoirs du conseil d’administration
Actuellement, le conseil d'administration se contente de :
- déterminer les orientations de l'activité de la société et veiller à leur
application ;
- régler, par ses délibérations, les affaires de la société ;
- et procéder aux contrôles et vérifications qu'il juge opportuns.
- peut se saisir de toute question intéressant la bonne marche de la
société.
127
- C’est-à-dire qu’il faut qu’il y ait un lien de subordination entre le salarié et la société et,
suivant la jurisprudence française, le contrat de travail doit être « sérieux et sincère ». Mais,
comme le législateur n’a pas exigé un délai minimum d’ancienneté du contrat de travail, rien
n’interdit à l’intéressé de décrocher de la société un contrat de travail juste avant sa
nomination au poste d’administrateur.
Il est actuellement possible pour les administrateurs de participer à
distance aux réunions du conseil d'administration par les moyens de
visioconférence128 et même de prendre part au vote de certaines décisions (art.
50)129.
B – LA DIRECTION GENERALE DE LA SOCIETE : LE PDG OU LE DG
128
Surtout pour les sociétés qui ont plusieurs filiales.
129
En effet, certaines décisions importantes ne peuvent être prises par voie de visioconférence,
telles que l'élection du président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, la
nomination du directeur général et des directeurs généraux délégués ou du directoire ainsi que
leur révocation, l'établissement du rapport annuel de gestion.
130
- En cas de silence des statuts, stipule l'article 67dans sa nouvelle rédaction, la direction
générale est assurée par le président du conseil d'administration.
131
- Une fois le choix fait, le conseil d'administration doit en informer la prochaine assemblée
générale et procéder aux formalités de dépôt, de publicité et d'inscription au registre de
commerce.
132
- Si le directeur général est un administrateur, la durée de ses fonctions ne peut pas excéder
celle de son mandant.
2 - Pouvoirs
Le directeur général assume sous sa responsabilité la direction générale
de la société. Il la représente dans ses rapports avec les tiers.
Le directeur général est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir
au nom de la société. Il engage la société même pour les actes qui dépassent
l’objet social. Les limites statutaires ou celles fixées par le conseil
d'administration sont inopposables aux tiers.
L'étendue et la durée des pouvoirs des directeurs généraux délégués
vis-à-vis de la société sont déterminées par le conseil d'administration sur
proposition du directeur général. Mais à l'égard des tiers, ils disposent des
mêmes pouvoirs que le directeur général.
b – Le président du conseil d'administration
1. Statut
L’article 63 exige que le président soit élu par le conseil d’administration
exclusivement en son sein ; il doit donc obligatoirement, à peine de nullité de sa
nomination, être un administrateur de la société et être une personne physique ;
la durée de sa présidence ne peut excéder celle de son mandat
d’administrateur, mais il est rééligible133.
Il peut également être révoqué "ad nutum" par le conseil d'administration.
Comme il est administrateur, il peut aussi être révoqué en tant que tel par
l'assemblée générale et il sera indirectement mis fin à sa fonction de président.
La révocation ou la cessation de fonction du président, pour être
opposable aux tiers, doit faire l'objet d'une inscription au registre de commerce.
2. Pouvoirs
Le président du conseil d'administration, s'il n'est pas en même temps
PDG, il n'est plus investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes
circonstances au nom de la société, il ne représente plus la société dans ses
rapports avec les tiers ; il se contente désormais de :
- représenter le conseil d'administration ;
- organiser et diriger ses travaux, et en rendre compte à l'assemblée
générale ;
133
- A la différence de la loi française qui fixe à 2 le nombre de mandats que le président peut
exercer simultanément dans des SA, la loi 17/95 n’interdit guère le cumul de mandats, elle ne
prévoit non plus aucune limite d’âge, alors qu’en France cette limite est de 65 ans à défaut de
disposition statutaire.
- veiller au bon fonctionnement des organes de la société et de s'assurer
que les administrateurs sont en mesure de remplir leur mission.
Ce n'est que dans le cas où les statuts gardent le silence sur le choix
laissé au conseil d'administration relatif à la formule de gestion, c'est-à-dire le
recours à la nomination d'un directeur général, que le président se charge de la
direction générale de la société, mais dans ce cas, sous le nom de Président
Directeur Général (PDG).
Et lorsque le président assure la direction générale de la société, ce sont
alors les mêmes dispositions concernant les pouvoirs du directeur général qui
s'appliquent.
§ 2 – LA S.A AVEC DIRECTOIRE ET CONSEIL DE
SURVEILLANCE A – LE DIRECTOIRE
a – Conditions
Le directoire ne peut comprendre plus de 5 membres appelés directeurs,
7 si les actions de la société sont cotées à la bourse, mais lorsque le capital ne
dépasse pas 1 500 000 dh, les fonctions du directoire peuvent être exercées
par un directeur unique.
Ils sont nommés par le conseil de surveillance pour une durée de 4 ans
à défaut de dispositions statutaires (art. 81).
Ce sont obligatoirement des personnes physiques (sous peine de nullité
de leur nomination) qui, à la différence des administrateurs, peuvent être
choisies en dehors des actionnaires. Ils peuvent donc être choisis parmi les
salariés de la société, c'est d'ailleurs l'essence même de ce mode
d'administration.
Afin d’assurer l’indépendance du directoire par rapport au conseil de
surveillance, une règle est posée par la loi sur les SA : le non-cumul de
fonctions dans les deux organes. L’article 86 interdit formellement, en effet, aux
membres de ce dernier de siéger au directoire et s’il arrive qu’un membre du
conseil de surveillance soit désigné au directoire, sa nomination ne serait pas
nulle, mais il serait simplement et automatiquement mis fin à son mandat au
sein du conseil de surveillance dès son entrée en fonction.
Et, lorsqu'une personne morale membre du conseil de surveillance est
représentée par une personne physique, il est interdit à cette dernière de faire
partie du directoire.
C’est l’acte de nomination établi par le conseil de surveillance qui fixe le
montant et le mode de rémunération de chacun des membres du directoire.
Lorsqu’un salarié devient membre du directoire, il ne perd pas le
bénéfice de son contrat de travail, par conséquent, rien n’empêche à ce qu’il
perçoive un salaire en plus de sa rémunération en tant que membre du
directoire.
b – Cessation des fonctions
Par dérogation à la règle du parallélisme des pouvoirs, les membres du
directoire, qui sont nommés par le conseil de surveillance sont révoqués par
l’assemblée ordinaire des actionnaires ; ils ne peuvent cependant être révoqués
par le conseil de surveillance que si les statuts le prévoient.
Contrairement encore aux administrateurs, qui peuvent être révoqués ad
nutum, la révocation des membres du directoire donne lieu à des dommages
intérêts si elle n’intervient pas pour justes motifs.
c – Pouvoirs du directoire
Ils sont identiques à ceux du directeur général (étendue, dépassement
de l’objet social, engagement de la société, limitations statutaires).
La société est représentée par un président du directoire nommé et
révoqué en tant que tel par le conseil de surveillance.
B – LE CONSEIL DE SURVEILLANCE
a – Conditions
Les mêmes règles gouvernent le conseil d'administration et le conseil de
surveillance en ce qui concerne la capacité, la rémunération, le nombre minimal
et maximal de conseillers (entre 3 et 12), les conditions de nomination, la durée
de leur mandat, la tenue des réunions…
Comme les administrateurs, les membres du conseil de surveillance
peuvent être révoqués à tout moment par l’assemblée générale ordinaire. Ils
ont aussi le droit de démissionner dans les mêmes conditions.
Les membres du conseil de surveillance peuvent être des personnes
morales, à condition d'être représentées par une personne physique.
b – Pouvoirs
La fonction principale du conseil de surveillance réside dans le contrôle
permanent de la gestion de la société par le directoire (art. 104). Il peut, à toute
époque de l’année, demander communication et copie de tous les documents
qu’il juge utiles afin de les consulter ou de les vérifier.
Il reçoit un rapport trimestriel et des documents annuels (notamment
l'état de synthèse) du directoire et possède des pouvoirs spécifiques
(autorisations spéciales, nominations des membres du directoire, répartition
des jetons de présence, etc.).
b - Quorum et majorité
Il est de la moitié des actions ayant droit de vote sur première
convocation et du quart sur deuxième convocation ; sinon, comme la loi ne
permet pas de réduire ce quorum, cette deuxième assemblée est reportée à
une date qui ne peut dépasser les deux mois de celle à laquelle elle avait été
convoquée.
La majorité des deux tiers des voix dont disposent les actionnaires est
nécessaire pour prendre une décision.
Enfin, comme pour les SARL, la responsabilité des associés est limitée
aux apports et ne devient effective qu’à la dissolution de la société.
§ 2 - LES TITRES EMIS PAR LES SA
Ce sont les valeurs mobilières ; elles sont en principe négociables, c'est-
à-dire qu’elles peuvent être cédées librement et sans formalités particulières,
sauf exceptions prévues par les statuts134.
On distingue essentiellement les actions et les obligations, sans oublier
les nouveaux certificats d'investissement.
134
Rappelons que les statuts ne peuvent soumettre les actions cotées en bourse à l'agrément de
la société.
A - LES ACTIONS
Ce sont des titres qui permettent à l’actionnaire d’être titulaire de droits
pécuniaires (dividendes, boni de liquidation) et non pécuniaires (droit de vote,
de communication, d’information, etc.).
On distingue plusieurs catégories d’actions telles que :
- les actions à vote double : qui confèrent à leurs titulaires le double des
voix accordées aux actions ordinaires, ces actions ont pour but de récompenser
les actionnaires fidèles, c'est-à-dire dont les actions sont entièrement libérées
et pour lesquelles il est justifié d'une inscription nominative depuis deux ans au
moins au nom du même actionnaire. Ce droit de vote double est attribué soit
par les statuts, soit par une assemblée générale extraordinaire (art. 257);
- les actions à dividende prioritaire sans droit de vote : dont les titulaires
ont une priorité par rapport aux titulaires d’actions ordinaires pour la distribution
d’un premier dividende135 et, en contrepartie, ils sont privés du droit de participer
aux assemblées générales et d’y voter ;
- les actions d’apports : c'est-à-dire des apports en nature ; etc.
B - LES OBLIGATIONS
Ce sont des titres négociables qui représentent une créance à long
terme sur la société et donnent droit à la perception d’intérêts (alors que les
actionnaires ne sont pas assurés de toucher un dividende annuel). La valeur
nominale des obligations ne peut être inférieure à 50 dh, et à 10 dh pour les
sociétés dont les titres sont cotés en bourse (art.292 al.2)136.
Leurs titulaires ne disposent pas du droit de vote.
Les sommes obtenues par la société au moyen de cette technique
particulière de crédit, lui permettent d’investir.
L’obligation joue donc un rôle important dans la vie financière des
sociétés ; c’est pourquoi, afin d’attirer des capitaux, les sociétés ont été
conduites à créer des types d’obligations donnant droit à des avantages
spécifiques.
135
- Il s’agit d’un dividende qui est prélevé sur le bénéfice distribuable de l’exercice avant toute
autre affectation. Ce dividende se situe donc au 4 ème rang après les prélèvements de frais
de constitution, l'augmentation du capital, la réserve légale et les pertes des exercices
antérieurs.
136
Le même argument des pouvoirs publics vu supra à propos de la valeur nominale actuelle
des actions vaut pour les obligations, surtout concernant les obligations convertibles en
actions, nous dit la note de présentation du projet de loi.
Ainsi, certaines obligations ne donnent droit qu’à un intérêt fixe, d’autres
offrent, en plus, une participation aux bénéfices (obligations participantes), de
même qu’il existe des obligations convertibles en actions et des obligations
avec bons de souscription d’actions, qui permettent à leur titulaire de devenir
actionnaires de la société émettrice137.
- Les obligations convertibles en actions (OCA) : ce sont des obligations
qui permettent à leurs titulaires de demander, à tout moment ou à certaines
périodes déterminées fixées par le contrat d'émission, à les convertir en
actions. C'est la raison pour laquelle leur taux d'intérêt est plus faible que celui
des obligations ordinaires.
- Les obligations à bons de souscription d'actions (OBSA) : ce sont des
obligations auxquelles, lors de leur émission, sont attachés des bons qui
donnent droit à la souscription à un certain nombre d'actions, dans des
conditions et des délais fixés préalablement. Le bon de souscription a une
autonomie par rapport à l'obligation ; il peut non seulement permettre la
souscription d'actions, mais il peut être cédé à un tiers. Leur taux est également
inférieur à celui des obligations ordinaires.
À la différence des obligations convertibles, les titulaires des OBSA ne
sont pas obligés, à l'arrivée des délais de libération des actions, d'opter entre la
conservation de leur situation d'obligataire et l'acquisition de la qualité
d'actionnaire. Autrement dit, les OBSA ne prennent pas fin avec la libération
des actions objet des bons de souscription ; dans les délais fixés, le titulaire des
OBSA reste obligataire même après avoir acquis la qualité d'actionnaire en
cumulant ainsi les deux qualités jusqu'à la fin du délai de remboursement des
obligations.
Dans les deux cas (OCA ou OBSA), il y a augmentation du capital, la
valeur des actions étant celle de la date des libérations, elle est généralement
prévue dans le contrat d'émission.
C - LES CERTIFICATS D’INVESTISSEMENT
De nos jours, on trouve sur le marché de nombreux titres utilisés par les
sociétés afin de se procurer des capitaux ; parmi ces titres on peut citer les
certificats d’investissement.
137
- Ces nouvelles obligations, bien que non réglementées par la loi, elles sont susceptibles de
connaître un grand essor en pratique.
Ce sont des actions démembrées qui ont pour fonction de procurer des
dividendes à de nouveaux actionnaires qui ne possèdent pas de droit de vote,
ce dernier étant représenté par des certificats de vote, ils sont répartis entre les
anciens actionnaires pour éviter des changements de majorité.
I – DROIT MAROCAIN
II – DROIT FRANÇAIS
- ANDRIEUX (Ph) et RAVEL (J), Code annoté des sociétés commerciales, 3ème
éd., Paris, Ed. Groupe revue fiduciaire, avril 1995.
- BESARD (P), La société anonyme, Paris, Montchrestien, 1986.
- COZIAN M (†), VIANDIER A. et DEBOISSY Fl., Droit des sociétés, 25e éd.,
2012, Lexis-Nexis, coll. Les Manuels.
- DIDIER D. et DIDIER Ph., Droit commercial, Les sociétés, t. 2, Economica,
2011
.
- DONDERO B., Droit des sociétés, 2ème éd., 2011, Hypercours, Dalloz.
- SINE (L), Droit des sociétés, 2ème éd. Paris, Dunod, 1999.
- VALLANSAN (J) et DESMORIEUX (E), Société en participation et société créée de
fait, aspects juridiques et fiscaux, Paris, éd. GLN JOLY, 1996.
PREMIÈRE PARTIE....................................................................................................................8
DEUXIÈME PARTIE.................................................................................................................62
C – L’AVAL..............................................................................................................................68
§ 4 – LA CIRCULATION DE LA LETTRE DE CHANGE.............................................68
A – L’ENDOSSEMENT TRANSLATIF DE PRORIETE..........................................................69
B – L’ENDOSSEMENT PAR PROCURATION........................................................................69
C – L’ENDOSSEMENT PIGNORATIF.....................................................................................70
§ 5 – LE PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE....................................................70
A – L’ECHEANCE....................................................................................................................70
B – LA PRESENTATION AU PAIEMENT...............................................................................70
a – Lieu et date de la présentation........................................................................................70
b – La perception du montant de la créance.........................................................................71
§ 6 – LES OBSTACLES AU PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE......................71
A – L’OPPOSITION AU PAIEMENT.......................................................................................71
B – LE REFUS DE PAIEMENT...............................................................................................71
a – Le protêt........................................................................................................................71
b – Le cas de dispense du protêt..........................................................................................72
§ 7 – LES RECOURS......................................................................................................72
A – LES RECOURS DU PORTEUR DILIGENT.....................................................................72
B – LES DECHEANCES DU PORTEUR NEGLIGENT..........................................................72
C – LES PRESCRIPTIONS DES RECOURS...........................................................................73
SECTION 2 – LE BILLET A ORDRE......................................................................................73
§ 1 – SPECIFICITES......................................................................................................73
A – Définition............................................................................................................................73
B – Nature du billet à ordre.......................................................................................................73
C – Régime cambiaire...............................................................................................................74
§ 2 – CONDITIONS DE VALIDITE...............................................................................74
A – LES CONDITIONS DE FORME.......................................................................................74
a – La dénomination «billet à ordre»...................................................................................74
b – La promesse pure et simple de payer.............................................................................75
B – LES CONDITIONS DE FOND..........................................................................................75
a – La capacité.....................................................................................................................75
b – Absence de la notion de provision.................................................................................75
c – Absence de la notion d’acceptation................................................................................76
SECTION 3 – LE CHÈQUE......................................................................................................76
§ 1 – LES ASPECTS TECHNIQUES..............................................................................76
A – NATURE ET FONCTION DU CHÈQUE..........................................................................76
B – LES CONDITIONS FORMELLES....................................................................................76
a – Les mentions obligatoires..............................................................................................77
b – Les mentions facultatives..............................................................................................77
C – LE CHÈQUE, INSTRUMENT DE PAIEMENT FACULTATIF.........................................78
D – LA PROVISION DU CHÈQUE.........................................................................................78
a - Le contenu de la provision..............................................................................................78
b - Le moment de l’existence de la provision......................................................................79
c- Le transfert de la propriété de la provision......................................................................79
E – JUSTIFICATION D’IDENTITE.........................................................................................79
F – LA CIRCULATION DU CHÈQUE.....................................................................................80
§ 2 – LES SYSTEMES DE PROTECTION DU CHEQUE.............................................80
A – LE SYSTEME CAMBIAIRE.............................................................................................80
a – La présentation au paiement..........................................................................................81
b – Le protêt........................................................................................................................81
c – Les avis..........................................................................................................................81
d – Les délais de prescription..............................................................................................82
e – Les recours cambiaires...................................................................................................82
B – LE SYSTEME BANCAIRE...............................................................................................83
a – Les obligations des banques...........................................................................................83
1 – Lors de l’ouverture des comptes..............................................................................83
2 – Lors des incidents de paiement................................................................................83
b – La réparation de l’incident.............................................................................................84
1 – La régularisation......................................................................................................84
2 – L’amende forfaitaire................................................................................................84
c – La responsabilité des banques........................................................................................85
1 – Les sanctions pénales..............................................................................................85
2 – Les sanctions de garantie.........................................................................................86
d – Le rôle de Bank Al-Maghrib..........................................................................................86
C – LE SYSTEME PENAL.......................................................................................................86
a – Les infractions en matière de chèque.............................................................................86
1 – L’omission de constituer ou de maintenir la provision.............................................86
2 – L’opposition irrégulière...........................................................................................87
3- L’acceptation et l’endossement des chèques de garantie............................................87
b – Les sanctions pénales....................................................................................................87
2 - L’opposition.............................................................................................................97
3 - La surenchère...........................................................................................................97
§ II - LE NANTISSEMENT DU FC................................................................................97
A - LES CONDITIONS............................................................................................................98
b - Les formalités.......................................................................................................................98
§ III - LES REGLES COMMUNES A LA VENTE ET AU NANTISSEMENT DU FC....98
A - Le droit de suite...................................................................................................................98
B - Le droit de préférence..........................................................................................................99
§ IV - LA GERANCE LIBRE..........................................................................................99
A - LES REGLES RELATIVES À LA PUBLICITE.................................................................99
B - LES EFFETS DE LA LOCATION-GERANCE................................................................100
CHAPITRE 3 – LA S A R L...................................................................................................116
BIBLIOGRAPHIE....................................................................................................................133