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Filière : Sciences Economiques et Gestion


Parcours : Economie & Gestion
Session d’automne 2020/2021
Semestre 5 - Sections : 1, 2, 3 & 4
Enseignant : A. EL HIRI

Module :

Les Politiques Economiques

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Section II : La politique budgétaire


La politique budgétaire constitue, avec la politique monétaire, l'un des principaux
leviers de la politique économique de l'État. Elle consiste à utiliser certains instruments
budgétaires (dépenses publiques, endettement public, prélèvements fiscaux) pour influer sur
la conjoncture économique.
Jusqu'à la crise des années 1930, la gestion des finances publiques a eu pour principal
objectif d'assurer le financement des services publics. Le volume des dépenses de l'État n'était
alors pas considéré comme une variable susceptible d'influencer le niveau d'activité de
l'économie. L'analyse de l'économiste britannique John Maynard Keynes a modifié cette
conception en soulignant l'impact de la politique budgétaire sur le niveau d'activité
économique d'un pays. Par conséquent, la plupart des pays développés ont mené depuis les
années 1930 des politiques de relance budgétaire lors des périodes de récession ou de moindre
croissance. A compter de la crise consécutive au choc pétrolier de 1973, les théoriciens
néolibéraux ont cependant souligné les limites de la politique budgétaire et notamment, les
effets néfastes des déficits et de la dette publique.
I-Les stabilisateurs budgétaires automatiques
Les recettes et les dépenses publiques exercent spontanément une action contra cyclique
sur l'activité économique, c'est-à-dire d'atténuation des aléas de la conjoncture économique.
En effet, si une grande partie des dépenses publiques sont indépendantes des variations
à court terme de l'activité économique (ex: les dépenses de rémunération et de retraite des
fonctionnaires), certaines d'entre elles sont, en revanche, mécaniquement liées à la
conjoncture. C'est notamment le cas des dépenses d'indemnisation du chômage ou des
prestations sociales versées sous condition de ressources, qui augmentent quand l'activité
économique se dégrade. On considère ainsi que l'élasticité des dépenses publiques à la
conjoncture est comprise entre 0,1 et 0,3, autrement dit, les dépenses publiques ont tendance à
augmenter spontanément de 0,1 à 0,3 point lorsque la croissance ralentit d'un point.
Lorsque l'activité économique ralentit, les dépenses publiques ont tendance à s'accélérer
tandis que les entrées de recettes ralentissent mécaniquement, ce qui provoque une
détérioration du solde budgétaire. Dès lors, le montant des recettes fiscales diminue et le
volume de dépenses publiques augmente. La détérioration de l'activité économique provoque
alors un transfert de revenus des administrations publiques vers les ménages et les entreprises,
ce qui atténue mécaniquement l'effet du ralentissement économique sur les revenus de ces
derniers.
A l'inverse, en période de forte expansion économique, les prélèvements fiscaux et
sociaux augmentent mécaniquement, tandis que les dépenses diminuent, ce qui a tendance à
freiner la croissance de la demande intérieure.
Par conséquent, les recettes et les dépenses publiques fonctionnent comme des «
stabilisateurs automatiques » puisqu'elles contribuent à amortir les variations conjoncturelles
de l'activité économique. Cependant, ce mécanisme de stabilisation automatique ne
fonctionne pleinement que si les ménages et les entreprises ne modifient pas leur
comportement de consommation, et si les taux d'intérêt ne sont pas affectés par la croissance
de la dépense publique en période de récession.

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II-Les politiques budgétaires volontaristes


En cas de forte dégradation de la conjoncture économique, les gouvernements peuvent
être tentés de mener une politique budgétaire volontariste. Une telle politique consiste à
soutenir l'activité économique à court terme, en faisant jouer le « multiplicateur keynésien ».
On appelle « multiplicateur keynésien », le mécanisme macroéconomique mis en exergue par
Keynes, qui permet de compenser la faiblesse des dépenses privées par un accroissement des
dépenses publiques.
En effet, une augmentation des dépenses publiques engendre des revenus
supplémentaires qui sont pour partie consommés, pour partie épargnés, et pour partie
récupérés par les administrations publiques sous la forme d'impôts et de cotisations sociales.
Or, la partie de ces revenus supplémentaires qui est consommée vient nourrir la
demande intérieure adressée aux entreprises. Ces dernières peuvent dès lors augmenter leurs
investissements, leurs emplois, et distribuer des revenus supplémentaires. Le surcroît de
dépenses publiques provoque par conséquent un effet cumulatif (un effet multiplicateur) qui
stimule d'autant plus l'activité économique que les revenus sont peu épargnés, peu imposés, et
que la demande de consommation s'adresse principalement aux entreprises nationales.
Les gouvernements peuvent également soutenir l'activité en réduisant les charges
fiscales et donc en augmentant le revenu des personnes privées. Cette politique stimule
l'activité économique, mais dans une moindre proportion que la dépense publique, car une
partie de ce revenu supplémentaire est immédiatement épargnée par les ménages et les
entreprises.
Dans sa théorie générale de l’intérêt, la monnaie et l’emploi (1936), John Maynard
Keynes fait l’hypothèse qu’une fraction stable de toute augmentation du revenu courant
disponible est consacrée à la consommation. Si tel est le cas, on peut montrer qu’une hausse
initiale de la production provoquée par des dépenses publiques exerce un effet stimulant sur le
PIB qui est un multiple de l’effet initial.
A- Le mécanisme
Soit une augmentation initiale de 100 milliard (Mds) des dépenses de travaux publics.
Le PIB augmente directement de 100 Mds. D’une manière ou d’une autre, ces 100 Mds se
retrouvent dans les revenus des différents agents économiques (salaires des travailleurs et
profits des entreprises réalisant les travaux). Le revenu supplémentaire injecté dans
l’économie nationale est identique au PIB supplémentaire.
Si la propension des ménages à consommer les revenus supplémentaires est égale à
80%, les 100 Mds de revenus injectés dans l’économie se répartissent en 20 Mds d’épargne et
80 Mds de demande supplémentaire en biens de consommation.
La demande supplémentaire engendre une deuxième vague d’effets stimulants : il faut
produire les biens de consommation demandés et le PIB augmente donc de 80 Mds. La valeur
de cette production nouvelle est transformée en revenus distribués aux agents.
Avec une propension marginale à consommer de 80%, les 80 Mds de revenus
supplémentaires se répartissent en 16 Mds d’épargne et 64 Mds de consommation.
Le PIB est donc à nouveau stimulé (3e vague) : la production de biens de consommation
augmente de 64 Mds, ce qui entraîne une distribution équivalente de revenus nouveaux et
donc une nouvelle demande et une nouvelle production de biens de consommation. Ainsi, de
nombreuses vagues d’effet successives vont permettre au total au développement du PIB
largement supérieur à la hausse initiale de 100 Mds. Toutefois, ces effets stimulants ne se

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multiplient pas à l’infini : ils sont de plus en plus faibles parce qu’à chaque vague d’effet
l’épargne réduit le revenu qui reste disponible pour alimenter la demande de nouveaux biens.
B- Le calcul du multiplicateur

a- Définition des variables


C = Consommation privée.
c = Propension marginale à consommer (en % du PIB).
I = Investissement privé.
G = Dépenses publiques de consommation (coût de fonctionnement des
administrations et services publics) et d’investissement (équipements et travaux publics).
F = Transfert publics (subventions, prestations sociales, etc).
T = Impôts.
b- Le multiplicateur des dépenses publiques
Le PIB est égal à la demande intérieure totale :
PIB = C + I + G 
La consommation varie directement en fonction du PIB (qui est identique au revenu
national en économie fermée) :
C = c.PIB 
Dans l’équation  on peut donc remplacer C par c.PIB et on obtient :
PIB = c.PIB + I + G.
On soustrait ensuite c.PIB des deux côtés de l’égalité, ce qui donne :
PIB – c.PIB = I + G ou encore : PIB (1 – c) = 1 + G,
et en divisant les deux côtés par (1 – c) on a :
PIB = [1/(1 – c)]. (I + G).
Donc, quand les dépenses publiques varient d’un montant quelconque ΔG (le symbole
Δ signifie « variation »), la variation du PIB est égale à :
Δ PIB = [1/(1 – c)] Δ G 
L’effet initial sur le PIB est égal à Δ G (montant de la production supplémentaire de
services publics ou d’investissements publics). Mais l’effet total sur le PIB (Δ PIB) est égal à
l’effet initial multiplié par le coefficient entre crochets dans l’équation  : ce coefficient est le
multiplicateur keynésien.
Dans le cas ou c = 0,8, (1 – c) = 0,2 est égal à 5 : la variation totale du PIB est 5 fois
supérieure à l’effet initial des dépenses publiques. Si c = 0,66, le multiplicateur est égal à 3, si
c = 0,9, le multiplicateur est égal à 10, etc.
c- Le multiplicateur des transferts et des impôts
Dans le cas d’une augmentation des dépenses publiques, l’effet initial sur le PIB est
égal à la valeur des dépenses publiques supplémentaires parce qu’elles constituent
directement une production supplémentaire (effet initial = Δ G). En revanche, si le
gouvernement choisit de relancer la demande par une hausse des transferts ou une baisse des

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impôts, l’effet initial est plus faible parce que ces mesures n’ont pas d’effet direct sur le PIB :
elles augmentent le revenu disponible mais seule une fraction de ce revenu supplémentaire
sera consommée et aura donc un effet sur le PIB. L’effet initial est donc égal à la variation des
transferts ou des impôts multipliée par la propension à consommer.
c1-Le multiplicateur des transferts publics
L’effet initial sur le PIB est : c.ΔF. L’effet multiplicateur total est donc :
ΔPIB = [1/(1 – c)] c.ΔF,
Ce qui donne : ΔPIB = [c/(1 – c)] ΔF.
Dans le cas où c = 0,8, (1 – c) = 0,2 et 0,8/0,2 est égal à 4, au lieu de 5 pour une
variation d’un montant équivalent des dépenses publiques de consommation ou
d’investissement.
c2-Le multiplicateur des impôts
Les impôts comme les transferts modifient le revenu disponible : l’augmentation des
prestations sociales de 100 Mds a les mêmes effets sur le revenu qu’une baisse d’impôt de
100 Mds ; une réduction des subventions publiques a le même effet qu’une hausse équivalente
des impôts. Le multiplicateur des impôts a donc la même valeur absolue que celui des
transferts mais un signe inverse : l’effet initial d’une hausse des impôts est une baisse du PIB.
Le multiplicateur des impôts s’écrit : ΔPIB = [- c /(1 – c)] ΔT

Dans une économie ouverte, on complète le modèle de l’économie présenté ci-dessus


par les variables suivantes :
X = Exportations (demande étrangère).
M = Importations.
X – M = Demande étrangère nette.
m = Propension marginale à importer (en % du PIB), fraction de chaque augmentation
du revenu intérieur qui est consacrée à des achats de produits étrangers (importations).
Dans une économie ouverte, le PIB est égal à la demande intérieure plus la demande
étrangère nette :
PIB = C + I + G + X – M 
La consommation est donnée par la relation : C = c.PIB 
On suppose qu’il existe une relation stable entre les importations et le PIB : M =
m.PIB 
En combinant les relations ,  et  on a :
PIB = c.PIB + I + G + X – m.PIB,
Ce qui donne : PIB – c.PIB + m.PIB = I + G + X,
Ou encore : PIB (1 – c + m) = I + G + X
Et finalement, en divisant par (1 – c + m) des deux côtés on a :
PIB = [1/(1 – c + m)]. (I + G + X).

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Le multiplicateur en économie ouverte est donc [1/(1 – c + m)]. Il est toujours plus
faible que le multiplicateur en économie fermée : la propension à importer vient augmenter le
dénominateur. Par exemple, avec une propension à consommer de 0,8 et une propension à
importer de 0,25, le multiplicateur est égal à : [1/(1 – 0,8 + 0,25)] = 1/0,45 = 2,22 (au lieu de 5
en économie fermée).

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