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1 Identität und Differenz, Pfullingen, Neske, 1957, p.52 (tr. fr. «Identité et diffé-
2
Identität und Differenz, p.51; tr.fr. Questions I, p.289.
3
Identität und Differenz, p.51; tr.fr. p.289.
4
Id. p.289.
360 Olivier Boulnois
5
Id. p.290.
6
Id. p.290.
7
Questions I, p.40.
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 361
8
Identität und Differenz, p.47.
9
Identität und Differenz, p.47, trad. p.306.
362 Olivier Boulnois
10
Id. p.306.
11
Id. trad. fr. p.291.
12
Id. trad. fr. p. 290.
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 363
13
O. Boulnois, Etre et représentation, Une généalogie de la métaphysique
moderne à l’époque de Duns Scot, Paris, PUF, 1999, ch. IX et Conclusion, p. 457-516;
et, pour les conséquences sur la situation historiographique de la pensée de Heidegger:
«Heidegger, l’ontothéologie et les structures médiévales de la métaphysique», Actes du
Colloque Heidegger e i Medievali (à paraître).
14
Cf. A. de Libera, «Structure du corpus scolaire de la métaphysique dans la pre-
mière moitié du XIIIe siècle», in C. Lafleur, J. Carrier, L’enseignement de la philosophie
au XIIIe siècle, Autour du Guide de l’étudiant du ms. Ripoll 109, Turnhout, Brepols, 1997,
p.61-88.
364 Olivier Boulnois
15
Cf. Zimmermann, Ontologie oder Metaphysik? Die Diskussion über den
Gegenstand der Metaphysik im 13. und 14. Jahrhundert, Texte und Untersuchungen
(2ème éd.), Leuven, Peeters, 1998.
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 365
16
Cf. O. Boulnois, Etre et représentation, op. cit.
366 Olivier Boulnois
17
E. Gilson, L'être et l'essence, Paris, Vrin, 1972 (2ème éd.), p.325.
18
Id. p.326.
19
Id. p.315.
20
Id., p.316, 317.
21
Id. p.317.
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 367
22
Phénoménologie de l'Esprit, préface, trad. J. Hyppolite, I, 18, modifiée.
368 Olivier Boulnois
23
Selon la Lettre sur l'humanisme, Wegmarken, GA 9, 351; trad. R. Munier, Paris,
1964 (modifiée) «Le sacré qui est seul l’espace essentiel de la déité, laquelle à son
tour n’accorde la dimension pour les dieux et le Dieu, ne vient à paraître que lorsque, au
préalable et dans une longue préparation, l’être s’est éclairci et a été éprouvé dans sa
vérité». — Réminiscence du Phèdre, 249 c: les «idées» auxquelles s’applique «la pen-
sée du philosophe» sont celles «auxquelles un dieu doit sa divinité». Mais la théologie
chrétienne ne peut y voir, après J.-Y. Lacoste, qu’un «blasphème poli» («Penser à Dieu
en l’aimant, Philosophie et théologie de Jean-Luc Marion», Archives de Philosophie 50
(1987) 245-270, p. 251).
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 369
24
Nietzsche et l'ombre de Dieu, Paris, PUF, 1998, p.149-158. L’ouvrage n'envi-
sage pas seulement Nietzsche dans l'unité d'une monographie (comme G. Deleuze), ou
en référence à l'histoire de la métaphysique (comme Heidegger), mais en lien avec l'his-
toire de la théologie (de saint Paul et de Luther, notamment).
25
Augustin, Cité de Dieu XVIII, 43 (BA 36, trad. G. Combès, p.639).
370 Olivier Boulnois
26
D. Franck, op. cit. p.168.
27
Cela n'est évidemment pas possible dans le cadre restreint de cet article. Je sou-
haiterais seulement signaler les difficultés, en réservant à plus tard (ou en laissant à
d'autres) la tâche de dessiner à chaque fois une pensée alternative, une bifurcation salu-
taire. On peut en tous cas se demander à chaque fois quel concept de Dieu propose la
théologie correspondante.
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 371
28
1880, 4 (218). Cité p.133.
29
Romains 10, 2.
30
1880, 4 (293), cité p.131-132; cf. 1883, 3 (1), no 285.
31
Die Welt als Wille und Vorstellung, II, 502; trad. fr. p.510. Cf. p.499; trad. fr.
p.506.
372 Olivier Boulnois
32
Cf. W. Pannnenberg, «Gesetz und Evangelium», Bayerische Akademie der
Wissensschaften, 1986 (2) Munich.
33
Die Welt als Wille und Vorstellung, II, 501 (avt-der. §); trad. fr. p.508; cf. aussi
p.410, trad. p. 414.
34
Die Welt als Wille und Vorstellung, II, 411; trad. fr. p.415. Relecture métaphy-
sique de Romains 5, 12-21.
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 373
35
Die Welt als Wille und Vorstellung, II, 507; trad. fr. p.515.
36
P.138.
37
Zarathoustra III, «De la vision et de l’énigme», 2; trad. fr. (modifiée) M. de
Gandillac, Paris, Gallimard, 1978, p.198.
38
Gai savoir III, §.108-109.
374 Olivier Boulnois
pensée doit faire un pas en arrière pour penser l’essence de Dieu en-deçà
du concept qui gouverne toute l’histoire de notre philosophie, ce pas en
arrière porte sur toute la théologie comme discipline. Pour comprendre
comment Dieu se présente à la pensée, il faut interroger toute la structure
de la théologie, ainsi que ses concepts fondamentaux. L’on pourra alors
historiciser les points de contact entre théologie et philosophie, et exa-
miner comment cette dernière se développe.
Construite dans un langage complexe et composé, et non dans une
intuition intellectuelle, notre théologie doit partir du donné de la foi et
s'élaborer par abstraction. Qu'est-ce qui lui donne alors la cohérence
d'une discipline rigoureuse? — L'ensemble de ses propositions ne peut
cesser de flotter dans un entre-deux rhétorique que lorsqu'il se rattache à
un concept de Dieu qui leur confère l'unité39. Ce concept de Dieu ne
précontient pas toutes les propositions théologiques comme s'il suffisait
de le contempler pour en tirer toutes les vérités de la foi, il en est sim-
plement le sujet, ce dont tout le reste se prédique. Ainsi, ce concept de
Dieu dont use la théologie n'est pas une simple donnée brute des
Ecritures (si tant est qu'il en existe), ni une simple élaboration philoso-
phique, mais la rencontre des deux, une interprétation de la révélation:
la pensée que l'homme se forme de Dieu vient recouvrir les noms que
celui-ci donne de lui-même.
Qu'est-ce que le concept de Dieu? Si la connaissance constitue une
intentionnalité assimilatrice, même lorsqu'elle vise le réel dans sa singu-
larité immédiate et sa donation concrète, elle l'atteint de façon médiate,
à travers des déterminations que l'esprit peut considérer en elles-mêmes,
à l'état séparé. Le concept est cette médiation par où la connaissance
vise le réel dans l'élément de la généralité, à travers une représentation.
Fonction par nature non-saturée, indéterminée, donc en droit universelle,
il subsume dans son unité la multiplicité des cas individuels pour les-
quels il est pertinent. Dans le cas de Dieu, objet qui ne peut être donné
dans aucune intuition (à moins de trahir son essence), ce sont ces seules
déterminations abstraites que l'on risque de retenir, si l'on n'aperçoit pas
leur visée propre, leur signification intentionnelle. Dire que Dieu peut
être pensé, et non connu, c'est le viser par un concept, le limiter par
celui-ci. Il est alors appréhendé dans sa déterminité (Hegel), comme
constituant un objet de pensée pour lui-même, alors qu'il n'est pas
39
Voir Duns Scot, Prologue de l’Ordinatio, (trad. G. Sondag, Paris, 1999); je
m'appuie ici sur mon analyse dans Duns Scot, la rigueur de la charité, Paris, 1998.
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 377
40
«Dieu est mort! Dieu reste mort! Et c’est nous qui l’avons tué! Comment nous
consolerons-nous, nous, meurtriers entre les meurtriers!» (Gai savoir III, §.125).
41
Cf. J.-L. Marion, L'idole et la distance, §.1-3, Paris, Grasset, 1977.
378 Olivier Boulnois
42
Eckhart, LW V*, p.209, 7-9.
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 379
43
Proslogion ch. 2 (éd. F.S. Schmitt, p.101; trad. M. Corbin, I, p.245).
380 Olivier Boulnois
44
M. Foucault, «Préface à la transgression», Critique n ° 195-196 (août-sept.
1963) pp.751-769, dans Dits et écrits, I, Paris, Gallimard, 1994, p.235.
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 381
45
Pascal, Lafuma 131 (il s’agit ici du péché originel, mais comme clé de notre
propre existence).
46
In librum Dionysii De Divinis Nominibus, Prologue, Turin-Rome, 1950, p.1.
47
Denys emploie les trois mots théologie affirmative, négative et éminente, comme
autant de degrés d'une progression: nous affirmons de Dieu des perfections, nous les
nions car aucune ne lui convient, mais nous devons ensuite renvoyer l'affirmation comme
la négation dos à dos, et reconnaître qu'il est infiniment au-delà de l'une et de l'autre. —
On trouve un remarquable commentaire de cette thèse (et la réfutation de l’idée de théo-
logie négative) dans l’ouvrage de J.-L. Marion, De surcroît, «Au nom ou comment le
taire», Paris, PUF, 2000, p.155-196.
48
Denys, Noms divins, I, 4 (PG 3, 592 D).
49
Denys, Noms divins, V, 1 (PG 3, 816 B).
382 Olivier Boulnois
mité dans lequel elle jaillit. Elle pose ce paradoxe que l'un est l'image de
l'autre. Nul contenu ne peut l'enfermer, aucune limite ne peut l'enclore.
Il faudrait alors penser Dieu comme un phénomène inapparent: non
pas un signifié, mais un sens; comme une question à nous posée, et non
comme une réponse à nos questions; comme un phénomène qui nous
précède, et qu'on ne peut saisir à partir de l'étant intra-mondain. Non
pas celui que l'on nomme, mais celui qui nous nomme; — celui qui
nous envisage et nous dévisage. Si tous les noms de Dieu ont été épui-
sés par la métaphysique et saisis par le concept, la mort de Dieu ouvre la
possibilité de le penser comme celui qu’on ne peut constituer ni penser
par avance.
4. Hans Urs von Balthasar l’a montré avec force, telle qu’elle se
donne à la théologie chrétienne, la question de la mort de Dieu se pose,
sous la figure d’une révélation, en site trinitaire; il faut donc pour le théo-
logien réarticuler l'expérience de la mort de Dieu dans le jeu entre la dis-
tance du Père et l'abandon du Fils (-Logos) à la Croix50. L'expression de
«mort de Dieu» ne vient-elle pas d'une hymne luthérienne de la
Passion51? Le lien entre la nomination de Dieu et sa mort est ainsi égale-
ment déterminé par une certaine situation théologique. Telle que l’ex-
prime l’hymne luthérienne, la mort de Dieu signifie qu’en Jésus-Christ, la
réalité de Dieu est passée dans la réalité de ce monde, comme si toute la
divinité était concentrée dans la personne du Fils, sans reste. Ainsi, chez
Hegel, le Fils (le Verbe, le Concept) est l’aliénation nécessaire de l’es-
sence divine: «Le Simple est celui qui s’aliène soi-même, va à la mort, et
par là réconcilie avec soi-même l’essence absolue». «Ceci est représenté
comme une opération volontaire, mais la nécessité de son aliénation
réside dans le concept»52. Il importe alors de rappeler contre Hegel que le
Fils n’épuise pas la divinité, que Jésus-Christ n’est pas le Seigneur se
dévoilant, mais qu’il est révélé par le Père, «l’inconnu au-delà du Verbe»
50
Voir notamment, Theologie der drei Tage, Einsiedeln, 1969; trad. fr. Pâques le
Mystère, 1981 (2e éd.), ch.2: «La mort de Dieu, «lieu» du salut, de la révélation et de la
théologie», p.47-80, notamment les pp.49 et ss. sur Jean-Paul (qui est la médiation prin-
cipale de la transmission de la théologie luthérienne de la mort de Dieu à la littérature
française — voir l’exergue empruntée à Jean-Paul du «Christ aux Oliviers», dans Les
Chimères de G. Nerval: «Dieu est mort! le ciel est vide…»).
51
J. Rist (XVIIe s.): «O tristesse, ô cœur ardent! / O grande détresse, Dieu même
gît mort,/ Il est mort sur la croix» (trad. X. Tilliette, Le Christ de la Philosophie, Paris,
1990, p.238).
52
Phénoménologie de l’Esprit, VII, C, «La religion manifeste», III, 3., trad. fr. J.
Hyppolite, Paris, Aubier Montaigne, 1941, pp.280-281.
La nomination de Dieu, de la transgression à la transcendance 383
(Balthasar)53. Bien plus: nul n’a jamais connu Dieu — seul celui qui est
tourné vers lui s’en est fait l’interprète (Jean 1, 18). Davantage encore:
dans le Nouveau Testament, theos nomme le Père seul — et l’acte de foi
primordial («Jésus est Seigneur») signifie à la fois que Dieu réside en
Jésus et que celui-ci est «image du Dieu invisible» (Colossiens 1, 15). La
transcendance de Dieu ne peut s’énoncer qu’à partir du Fils, mais dans la
distance filiale et l’iconicité qui le caractérise.
L'entrée de Dieu dans la philosophie ne peut être séparée de son
entrée dans la théologie sous la forme du concept. Elle nous conduit à
son terme: la mort de Dieu, et nous oblige à reprendre l'interrogation à
partir de l'origine, à partir de la constitution du concept. Le «pas en
arrière» n'est pas un saut dans la foi. Il ne s'agit pas de renoncer à pen-
ser, mais de penser rigoureusement Dieu dans sa transcendance impen-
sable, et pourtant irréfragable et indépassable. Il s'agit de comprendre
que toute l'histoire entrelacée de la philosophie et de la théologie est
l'histoire de l'oubli de la différence entre Dieu et «Dieu» (celui que
nous appelons Dieu, notre concept). D’abord une simple règle de
méthode, cette remarque indique aussi une orientation vers ce qui reste à
penser. On ne peut plus penser Dieu, philosophiquement et théologique-
ment, que dans l’écart et le retrait — en-deçà de tout connaissable et en-
deçà de toute figure visible. Si Dieu n'est ni l'étant infini (Duns Scot), ni
le Dieu qui garantit la morale (Nietzsche), ni celui qui assure un fonde-
ment à l'étant (Heidegger), qu'est-il? Lui-même, tout simplement, en-
deçà du fondement, en-deçà du bien et du mal. Et même si l'on ne pou-
vait dire que cela, tout le reste, il vaudrait mieux le taire.
RÉSUMÉ. — Tout ce qui naît périt. Dieu doit-il à son tour obéir à cette loi?
Appelé à «entrer dans la philosophie» (Heidegger), serait-il du coup destiné à y
mourir (Nietzsche)? 1. La constitution de la métaphysique se dit de plusieurs
manières, ce qu'atteste spécialement l'histoire de la philosophie médiévale. La
diversité des figures historiques concurrentes de la métaphysique oblige à com-
pliquer la présentation heideggerienne. Et paradoxalement, le fait que la figure
53
Cité par J.-Y. Lacoste, «Dieu», Dictionnaire critique de théologie, Paris, PUF,
1998, p.330 a.
384 Olivier Boulnois