Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
EL MEKKAKI AHMED
EL MEKKAKI AHMED
Professeur de droit public
Sélectionner le thème
1
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
Plan du cours
INTRODUCTION
Chapitre I : L’ETAT
Chapitre II : LA CONSITUTION
2
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
3
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
4
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
Bibliographie générale
Manuels et ouvrages
- ARDANT (Philippe), MATHIEU (Bertrand), Droit constitutionnel et institutions
politiques, Paris, LGDJ : Lextenso éditions, 30e éd, 2018.
- BERANGER (Denis), Le droit constitutionnel, Paris, PUF, « Que sais-je », 7e éd,
2017.
- BLACHER (Philippe), Le droit constitutionnel, Paris, Hachette, coll. «Les
fondamentaux», 5e éd, 2018.
- BODINEAU (Pierre), Verpeaux (Michel), Histoire constitutionnelle de la France,
Paris, PUF, « Que sais-je ? », 4e éd, 2014,
- BOUDON (Julien), Manuel de droit constitutionnel, t. 1 : théorie générale, histoire,
régimes étrangers, Paris, PUF ? 2015
- BORELLA (François), Éléments de droit constitutionnel. Paris, Presses de Sciences
Po, 2008.
- CARCASSONNE (Guy), GUILLAUME (Marc), La Constitution, Paris, Points : 2017,
14e éd.
- CHAGNOLLAUD (Dominique), de MONTALIVET (Pierre), Droit constitutionnel
contemporain 1; Paris, Dalloz ; coll. « Cours », 2019, 10e éd.
- CHAGNOLLAUD t (Dominique), Baudau (Aurélien), Droit constitutionnel
contemporain 2; Paris, Dalloz ; coll. « Cours », 2019, 9e éd.
- CHAGNOLLAUD (Dominique), TROPER (Michel), Traité international de droit
constitutionnel, t. 1 : théorie de la Constitution, Paris, Dalloz, 2012.
- CHAGNOLLAUD (Dominique), TROPER (Michel), Traité international de droit
constitutionnel, t. 2 : distribution des pouvoirs, Paris, Dalloz, 2012.
- CHAGNOLLAUD (Dominique), TROPER (Michel), Traité international de droit
constitutionnel, t. 3 : suprématie de la Constitution, Paris, Dalloz, 2012.
- CHANTEBOUT (Bernard) , Droit constitutionnel, Paris, Sirey : 2015, 32e éd.
- CHEVALLIER (Jacques), L'État, Paris, Dalloz : 2011, 2e éd.
- CHEVALLIER (Jacques), L'État post-moderne, Issy-les-Moulineaux, LGDJ-
Lextenso : 2014, 4e éd.
- CHEVALLIER (Jacques), L'État de droit, Issy-les-Moulineaux, LGDJ-Lextenso :
2017, 6e éd.
5
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
6
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
Dictionnaires et lexiques :
- Avril Pierre, Jean Gicquel, Lexique- Droit constitutionnel, Paris, PUF, « Que sais-je
», 2016.
- Duhamel Olivier et Mény Yves (sd), Dictionnaire constitutionnel, PUF, 1992.
- Hermet Guy, Birnbaum Pierre, Bruaud Philippe, Badie Bertrand, Dictionnaire de
la science politique et des institutions politiques, Armand-Colin, coll. Cursus,
2e éd., 1996.
- Michel de Villiers, Armel Le Divellec, Dictionnaire du droit constitutionnel,
Dictionnaires Sirey, 11e éd. 2017.
Revues
Pouvoirs (Revue fondée en 1977, publiée par les éditions du Seuil) ;
Revue du droit public et de la science politique (fondée en 1894, publiée par la
LGDJ)
Revue française de droit constitutionnel (fondée en 1990, publiée par les PUF)
Revue française de science politique (fondée en 1951, publiée par les Presses de la
Fondation nationale des sciences)
SITES INTERNET
Légifrance (http://www.legifrance.gouv.fr),
"Jurifrance" (http://www.jurifrance.com).
Conseil constitutionnel français (http://www.lamyline.com)
http://www.droit.org,
7
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
https://www.cairn.info/revue-francaise-de-droit-constitutionnel-2005-3-page-
451.htm
https://dice.univ-amu.fr/sites/dice.univ-amu.../plaquette_td_constit._-_2017-
2018.pdf
https://books.openedition.org/iheid/85
COURS-DE-DROIT.NET › DROIT-CONSTITUTIONNEL-COURS-GRATUIT-A-TELECHARGER-D…
8
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
INTRODUCTION
1
Le système politique est un mode d'organisation d'un État. Il comprend notamment le régime politique, la
structure économique, l'organisation sociale, etc. Il est formé d'un ensemble d'institutions politiques (appareils étatiques,
agences gouvernementales, ministères), d’acteurs politiques (partis politiques, syndicats, organisations non-
gouvernementales) …) et des normes et de croyances politiques (idéologies, doctrines, lois, règles). Les systèmes
politiques sont nombreux, les principaux étant la démocratie, l'autoritarisme et le totalitarisme.
9
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
Ainsi, par rapport aux autres branches du droit, le droit constitutionnel est
une discipline relativement récente, puisque la première chaire de ce droit ne fut
créée qu’en 1834, à la Faculté de droit de Paris, et qui fut confié à l’italien M.
Pellegrino Rossi4. Son apparition en tant que discipline juridique autonome,
intervient donc à la suite des révolutions américaine (1775-1783) et française
2
http://www.cours-univ.fr/cours/licence/droit/licence-droit-droit-constitutionnel.html
3
Jean-Louis Mestre, « Les emplois initiaux de l'expression « droit constitutionnel », Revue française de
droit constitutionnel, 2003/3 (n° 55). PUF, pp.451-472.
www.cairn.info/zen.php?ID_ARTICLE=RFDC_055_0451
4
En effet, c’est sur l’initiative de F. Guizot qu’a été créée en 1834 cette chaire du droit constitutionnel à
la faculté de Paris. Cependant, à l’époque, on se limitait à l’étude de la Constitution : l’organisation et la
formation des pouvoirs publics et leurs relations. C’est à cette époque que sont nées les grandes notions du droit
constitutionnel : la séparation des pouvoirs, le régime représentatif, etc… Il n’y avait pas de droit constitutionnel
en dehors de la Constitution.
10
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
5
En fait, jusqu’à la fin du XIXe siècle, son enseignement était confiné à un public de doctorat. Cependant, avec le
triomphe de la République en France, celle-ci décida de le généraliser aux étudiants de première année de Licence en
l’inscrivant au programme de la Licence (cours semestriel) par la réforme du 24 juillet 1889.
6
Ce phénomène, qualifié habituellement de constitutionnalisme, désigne l'idéologie selon laquelle il faut une
constitution pour réaliser des valeurs liées au libéralisme. Il s’identifie aussi à un mouvement historique ayant permis
l’élaboration des Constitutions comme barrières au pouvoir des gouvernements.
7
En tant que corps de règles obligatoires, le droit constitutionnel présente, avec le droit international public, cette
particularité de réglementer le pouvoir suprême, à savoir l’organisation et le fonctionnement de l’Etat souverain. Tous les
autres droits régissent des pouvoirs inférieurs et, de ce fait, en cas de violation du droit, des sanctions sont possibles. Mais,
lorsqu’il s’agit du pouvoir suprême, cela n’est pas toujours évident.
8
François Borella, « La situation actuelle du droit constitutionnel », Revue française de droit
constitutionnel, 2012/1 (n° 89), pages 3 à 10.
11
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
9
Selon cette conception, le droit constitutionnel se définit soit par des traits formels, soit par des traits matériels.
Suivant la définition « formelle », le droit constitutionnel se confond avec le droit des constitutions, en ce sens que cette
discipline étudie principalement les dispositions juridiques contenues dans la constitution, texte juridique communément
considéré comme la loi fondamentale de l’Etat, s’imposant à tous et supérieure à toutes les autres règles de droit (lois,
règlements, etc.). Dès lors, les études constitutionnelles porte essentiellement sur les règles de droit relatives à l’organisation
et au fonctionnement des pouvoirs publics supérieurs de l’Etat (énumération et description des différents pouvoirs : exécutif,
législatif, judiciaire) et à leurs rapports réciproques. En revanche, suivant la définition « matérielle », le droit constitutionnel
comprend l’ensemble des normes juridiques qui régissent le statut, l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics
supérieurs de l’Etat. Ici, c’est donc le contenu des règles juridiques plus que leur forme qui prime.
10
Selon cette conception, le droit constitutionnel ne se présente plus uniquement comme une discipline qui se
limité à la seule analyse des textes, mais qui s’intéresse aussi au contexte politique et social qui permet de comprendre
l’origine et le fonctionnement d’un système politique. Autrement dit, en l’étudiant, on débouche inéluctablement sur l’étude
de la science politique, car on doit désormais tenir compte des phénomènes qui excèdent le droit positif ( tels, par exemple, le
système des partis et leur rôle dans les élections ; la structure de la majorité, le rôle des idéologies et des groupes de pression
dans la vie politique, etc. ).
11
L. Favoreu, « Le droit constitutionnel, droit de la constitution et constitution du droit », Revue française de Droit
constitutionnel, n° 1, 1990, pp. 71-89.
12
V. Renouveau du droit constitutionnel : Mélanges en l'honneur de Louis Favoreu, Paris, Dalloz, 2007 ; Stéphane
PINON, Le « nouveau droit constitutionnel » à travers les âges, v.
www.droitconstitutionnel.org/congresParis/comC2/PinonTXT.pdf
12
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
- Le droit constitutionnel est aussi un droit des libertés fondamentales, car il régit les
relations entre les individus et la puissance publique, en conférant à ceux-là un certain
nombre de droits et libertés fondamentaux, reconnus et consacrés par la plupart des
constitutions modernes (v. art. 19 et s. de la Constitution marocaine). Il s’agit, selon L. Favoreu
du « droit constitutionnel substantiel » assurant la protection des droits et libertés.
13
L. Favoreu, « Le droit constitutionnel, droit de la constitution et constitution du droit », op. cit
14
Ce triple objet est la conséquence de l'évolution de la discipline dans les pays occidentaux qui se décline en trois
temps, trois périodes : celui des « obsédés textuels », le deuxième temps, celui des politistes et enfin l'état actuel, celui du «
droit constitutionnel nouveau qui est arrivé » V. Dominique TURPIN, Droit constitutionnel. Paris, PUF, 2007 ; L.
FAVOREU et autres, Droit constitutionnel, (manuel précité) ; Jacques Chevallier. « Droit constitutionnel et institutions
politiques : les mésaventures d’un couple fusionnel ». La République. Mélanges en l’honneur de Pierre Avril, Montchrestien,
pp.183-199, 2001.
https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01728067/document
13
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
15
En effet, dans de nombreux pays, la Constitution agit et intervient directement dans les domaines du droit public
(droit administratif, droit fiscal notamment) mais aussi dans ceux du droit privé. Ainsi, en France par exemple, beaucoup de
décisions du Conseil constitutionnel ont pour objet de contrôler la constitutionnalité de lois concernant les personnes privées
en matière civile, commerciale, sociale, etc. Il en est découlé alors une constitutionnalisation de l'ensemble des branches du
droit. Par ailleurs, la reconnaissance constitutionnelle aux justiciables de soulever devant un juge, à l'occasion d'un litige,
l'inconstitutionnalité de la loi qui lui est appliquée, à charge pour le juge, de saisir de cette question le Conseil d'État et la
Cour de cassation qui, s'ils l'estiment fondée, la soumettront au Conseil constitutionnel qui pourra, le cas échéant, abroger la
disposition législative contestée. C’est l’exception d'inconstitutionnalité.
14
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
CHAPITRE II
L’ETAT
Si l’idée d’Etat est très ancienne, puisqu’elle remonte loin dans l’histoire
(l’Antiquité, par exemple, a connu la « polis » ou la Cité-Etat, telles
Thèbes, Sparte, Athènes, Rome, etc.), ce n’est qu’à partir du XVIe siècle que la
notion moderne de l’Etat (avec E majuscule) s’est introduite dans le vocabulaire
politique européen (Stato : en italien, Staat : en allemand et State : en anglais)16.
Elle désigne désormais la structure institutionnelle qui régit la vie d’une
population vivant sur un territoire géographique donné, qui la contraint et qui
l’administre, se caractérisant par une souveraineté interne et externe.
16
Cette réapparition est due essentiellement à l’essor intellectuel de la Renaissance, notamment en Italie où
Machiavel, l’un des premiers qui en fait l’analyse notamment dans le Prince (1513). Elle coïncide en fait avec l’éclatement
des empires en entités politiques souveraines, lesquelles refusaient de se soumettre à l’autorité d’autres entités politiques :
« Le Roi de France est Empereur en son Royaume », selon l’adage des légistes français. V. http://www.droit.univ-
nantes.fr/ressources/leclerc/Chp1-PatrimoineEurope_S1.pdf
17
Actuellement, le nombre des Etats dans le Monde se situe aux alentours de 200. Ils sont très différents quant à
leur population, leur territoire, leurs institutions politiques, leur degré de développement. (Exemples : USA: 9,15
Mkms2, 267 millions, Vanuatu : 12 000 kms2, 200 000 hts, Monaco : 195 hectares, 5070 monégasques, 29 000 hts).
15
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
16
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
§ 1-. La population
A. Population et nation
La nation21 est une notion relativement récente, car autrefois, les gens se
définissaient plutôt par leur religion, que par leur nation. Elle désigne
19
Ainsi, en 1694, l'Académie française définissait la nation comme l'ensemble des habitants d'un même
État, d'un même pays, vivant sous les mêmes lois et utilisant le même langage.
20
Son étymologie est liée à la notion de naissance (nascere). Ainsi, à l’époque médiévale, l’idée de
nation renvoie ainsi à un groupe d’hommes à qui l’on attribue une origine commune. Mais la conception
moderne de la nation dépasse largement le cadre ethnique ou tribal. Elle trouve plutôt sa source dans un
ensemble complexe de liens qui fondent le sentiment d’une appartenance commune. Elle est ainsi à la fois
extérieure aux individus, en même temps qu’elle est intériorisée et transmise d’une génération à l’autre. Pour
s’imposer, elle suppose également l’existence d’une volonté durable de vivre au sein d’un même ensemble. V.
http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/approfondissements/idee-nation.html
21
Hervé BEAUDIN, L’IDÉE DE NATION, Thèse de doctorat en philosophie, Sorbonne, 2012. « Tout
État-nation repose sur trois critères, qui doivent être réunis : 1) Un critère ethnoculturel (un peuple doté d’une
17
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
généralement « un groupement humain dans lequel les individus se sentent unis les
uns aux autres par une communauté de traditions, de culture et d’aspirations et se
conçoivent comme différents des individus appartenant aux autres groupements
nationaux »22.
langue, d’une religion et d’une histoire partagée) ; 2) Un critère géopolitique (le territoire) ; 3) Un critère
sociopolitique (la citoyenneté) s’appliquant à un peuple »
22
V. André Hauriou, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, Montchrestien, 3eme éd.,
1968, p. 96. Il s’agit donc d’un groupement humain qualifié. La nation se distingue ainsi de la population, terme
qui désigne un ensemble de personnes qui habitent un espace, un territoire : ville, village, pays, etc. Elle
s’identifie souvent au peuple.
En fait, la notion de peuple doit être comprise dans sa dimension interne selon laquelle est peuple l’ «
ensemble des individus soumis à un Etat ; totalité des personnes formant la population d’un même Etat et
soumises ensemble à son autorité ». CORNU (G.) (dir.), Vocabulaire juridique, Paris, Quadrige, 9ème édition
mise à jour, 2011, p. 756
Il existe aussi une dimension ou une assertion internationale de la notion de peuple qui signifie alors l’ «
ensemble des individus composant une nation ; ensemble de personnes ayant en commun certains caractères qui
les distinguent des autres hommes et peuvent amener à souhaiter qu’ils aient en propre leur Etat ou choisissent
librement celui auquel ils se rattachent ». C’est le cas dans le cadre du droit des peuples à disposer d’eux-
mêmes. Ibid.
23
FRANK BARON, L’IDEE DE NATION, VIE-PUBLIQUE.FR,2018. HTTPS://WWW.VIE-PUBLIQUE.FR/DECOUVERTE-
INSTITUTIONS/INSTITUTIONS/APPROFONDISSEMENTS/IDEE-NATION.HTML; THOMAS FLEINER-GERSTER, THÉORIE GÉNÉRALE
DE L’ÉTAT, HTTPS://BOOKS.OPENEDITION.ORG/IHEID/1781?LANG=EN
24
Johann Gottfried von Herder (1744-1803) propose une définition de la nation fondée sur le sol et
une langue commune, et Johann Gottlieb Fichte (1762-1814), dans ses Discours à la nation allemande (1807),
insiste sur l’idée de peuple et l’importance de la langue.
18
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
25
L'ONU estime qu'environ 800 000 Rwandais, en majorité Tutsi, ont perdu la vie d’avril à juillet 1994
dont la moitié d’entre eux étaient des enfants (génocide commis par des extrémistes Hutus). Evidemment, un
génocide n'est pas qualifié comme tel en raison du nombre de morts, mais sur une analyse juridique de critères
définis par la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948 de
l'ONU. Selon l’art. II de ce texte, le génocide « s'entend de l'un quelconque des actes ci-après, commis dans
l'intention de détruire, ou tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel : …».
26
Ernest Renan, dans sa célèbre conférence de 1882 intitulée "Qu’est-ce qu’une Nation ?", pose comme
critères de l’appartenance nationale, "le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage
qu’on a reçu indivis." Selon lui, "l’existence d’une nation est un plébiscite de tous les jours."
19
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
B. Etat et Nation
27
Jean et Jean-Éric Gicquel, Droit constitutionnel et institutions politiques, Montchrestien-Lextenso éditeurs, 21e
éd., 2007, p. 55.
28
En effet, en Allemagne, l’existence d’une langue et d’une culture communes a permis de concevoir la nation en
l’absence de toute unité politique avant 1871. De même, en Italie, le sentiment national a servi de ciment idéologique
préalable à l’unification de l’État.
29
En effet, dans ces deux pays, c’est l’action centralisatrice et unificatrice du pouvoir royal qui a contribué de
manière décisive à l’émergence de la nation. Mais le sentiment national, présent chez une élite restreinte, s’est diffusé assez
lentement. Il faut en effet attendre la fin du XVe siècle pour que l’idée de nation devienne incontournable en France et en
Angleterre. La guerre de Cent ans a soudé les populations dans l’adversité et contribué de manière décisive à l’émergence de
l’identité nationale. V. http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/approfondissements/idee-nation.html
20
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
Par contre, dans d’autres pays, tout s’est passé comme si l’édification de
l’Etat précédait et modelait la constitution de la nation, à partir d’agrégats
généralement hétérogènes d’ethnies, de peuples, de groupes humains, méritant
difficilement le titre de nation au sens européen30. On cite plus fréquemment, à
cet égard, l’exemple des Etats-Unis, dont la conscience nationale ne s’est forgée
qu’après l’adoption de la Constitution fédérale de 1787.
30
Cf., H. LEFEVRE, De l’Etat,
31
Par exemple, le principe des nationalités qui est apparu au XIXe s. (principe consacrant le droit de toute nation de
se constituer en Etat indépendant) a engendré de nombreux conflits internationaux en Europe. Appliqué partiellement dans ce
continent, ce principe n’a cependant jamais été admis en tant que règle générale par le droit international.
21
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
africaines non prises en compte lors du tracé des frontières coloniales, conservé
en l’état lors des indépendances, en application du principe de l’intangibilité des
frontières consacré par la Charte de l’Organisation de l’Unité africaine (O.U.A.)
adoptée le 25 mai 1963 à Addis-Abeba32.
§ 2.- Le territoire34
32
Par ailleurs, conséquemment à la Seconde guerre mondiale et à la guerre froide, certaines nations ont été
fractionnées en deux Etats ayant des régimes politiques opposés. Il en était ainsi de la nation allemande, qui a été partagée
pendant 40 ans entre la République fédérale allemande (R.F.A) et la République démocratique allemande (R.D.A.), de la
nation vietnamienne qui fut divisée en 1954 entre la République démocratique du Vietnam (Nord-Vietnam) et la République
du Vietnam ( Sud- Vietnam ) et ce jusqu’en 1975 , sans oublier le cas de la nation coréenne qui est toujours scindée en
deux : entre la Corée du nord et la Corée du sud.
33
Jadis lien personnel unissant des sujets à leur roi, ce lien abstrait rattache désormais les individus à l’Etat, qui
l’octroie unilatéralement selon ses règles juridiques internes. Il rattache également chaque individu aux autres membres de la
société nationale33. Il peut être acquis dès la naissance ou au cours de la vie. A cet égard, on distingue les pays qui
privilégient le droit du sang (jus sanguinis), c’est-à-dire la filiation, et ceux qui préfèrent se fonder sur le droit du sol (jus
soli). Il peut aussi y avoir ultérieurement changement de nationalité : c’est l’hypothèse exceptionnelle de la naturalisation,
procédure par laquelle un étranger peut sur sa demande, d’acquérir une nationalité à la suite de la discrétionnaire de l’Etat qui
l’octroie. Mais quelle que soit la manière dont on acquiert la nationalité elle implique toujours certains droits et obligations,
tels les droits politiques (l’aptitude d’être élu, droit de vote, etc.)33, le libre accès aux fonctions et aux emplois publics, la
protection diplomatique par l’intermédiaire des ambassades et des consulats entretenus par les Etats à l’étranger, les
obligations militaires ou civiles, etc. (v. par exemple, art. 18 et s. de la Constitution marocaine).
34
Julio Barberis, « Les liens juridiques entre l'Etat et son territoire : perspectives théoriques et évolution du droit
international », AFDI, Année 1999 45 pp. 132-147
22
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
A. Le territoire terrestre
23
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
B. L’espace maritime35
C. L’espace aérien
35
Ce territoire est régi principalement par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS),
adoptée en novembre 1982 à Montego Baye, en Jamaïque. Celle-ci comporte 320 articles et prévoit la création de trois
instances internationales: le Tribunal international du droit de la mer, la Commission des limites du plateau continental
(CLCS) et l’Autorité maritime internationale.
36
Rappelons à cet égard que le Parlement marocain a adopté, le mercredi 22 janvier 2020 à l'unanimité, deux
projets de loi permettant la mise à jour de l’arsenal juridique marocain relatif à l’espace maritime du Royaume. Il s’agit du
projet de loi n° 37.17 modifiant et complétant le Dahir portant loi n° 1.73.211 du 26 Moharrem 1393 (2 mars 1973) fixant la
limite des eaux territoriales, ainsi que du projet de loi n° 38.17 modifiant et complétant la loi n° 1.81 instituant une zone
économique exclusive de 200 miles marins au large des côtes marocaines. Ainsi, désormais, cet espace s'étend de Tanger à
Lagouira et se compose de quatre zones délimitées comme suit: la mer territoriale (12 MM), la zone contiguë (24MM), la
zone économique exclusive (200 MM) incluant le plateau continental (de 350 MM au minimum)
37
Dans cette zone, l’État riverain peut interdire la navigation de navire militaire étranger mais doit laisser la
navigation civile s’y dérouler normalement.
38
Cela correspond à la ZEE. Cependant, ce que le droit de la mer nomme depuis 1982 le «plateau continental» est
une nouvelle zone de souveraineté comportant le sol et le sous-sol de la plate-forme continentale dans le prolongement des
côtes, et donc pouvant s’étendre au-delà de la ZEE. À l’intérieur de cette zone, l’État dispose de droits sur le fond marin et
son sous-sol, et non sur la colonne d’eau. Il décide donc de l’exploitation et de la gestion des ressources (en hydrocarbures
par exemple). Chaque État côtier dispose dans tous les cas d’un plateau continental (dans son sens juridique) de 200 miles
marin. Cependant l’article 76 de l’UNCLOS permet l’extension du plateau. La Convention de Montego Bay offre donc la
possibilité aux États côtiers d’étendre leur pouvoir et leur souveraineté encore plus loin sur la mer.
39
La convention de Montego Bay précise à cet égard que « la souveraineté de l’Etat côtier s’étend à l’espace
aérien au-dessus de la mer territoriale » (art. 2, § 2).
40
Le droit de l'espace extra-atmosphérique est régi par le Traité de l’Espace. Néanmoins, la limite verticale entre
l'espace aérien et l'espace extra-atmosphérique n'a jamais été défini par une convention internationale. Ce serait
probablement 100 km, qui définit la limite de l'espace selon la Fédération aéronautique internationale.
24
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
§ 3.- Le gouvernement
Pour qu’il y ait Etat, il ne suffit pas d’avoir une population établie sur un
territoire déterminé. Encore faut-il que cette population et ce territoire soient
soumis à une forme particulière de pouvoir politique, c’est-à-dire un
gouvernement (pris ici dans son sens large). Il s’agit là du troisième critère
auquel une entité doit satisfaire pour être considérée comme un Etat.
41
Il s’agit de la Convention internationale portant règlementation de la navigation aérienne : conclue le 13 octobre
1919 et entrée en vigueur en 1922. Entre autres, il en est découlé la création de la Commission internationale de navigation
aérienne, la CINA.
42
http://www.cesa.air.defense.gouv.fr/IMG/pdf/PLAF_No6_Col_Dupont.pdf
En revanche, l’État peut interdire tout survol de son espace aérien par des aéronefs militaires (la France par
exemple a refusé le survol de son territoire par les avions américaines pour bombarder Tripoli en Libye en 1986 ; quant à la
Turquie, il a même abattu un avion de chasse russe qui avait survolé son espace aérien en 2015).
25
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
43
Cependant, l’évolution contemporaine invite à nuancer ce constat d’indifférence du droit quant à la forme
gouvernementale. En effet, depuis quelques années, on assiste à l’émergence d’une forte tendance visant à introduire, en droit
international, le principe de légitimité démocratique des gouvernements, sous l’effet des implications logiques de la
consécration internationale des principales libertés publiques, envisagées comme droits de l’homme. Même si cette tendance
se heurte encore aux réticences de certains pays du Tiers monde, elle s’est vue renforcée avec la fin de la guerre froide et la
disparition du conflit idéologique longtemps persistant entre les pays socialistes et les pays occidentaux Ainsi, en 1994, les
NU en ont pris fait et cause pour la 1ère fois dans une crise purement interne, en exigeant la restauration de la démocratie à
Haïti, après le coup d’Etat militaire qui avait déposé le « président légitimement élu » (Rés. 940 du CS du 13 aout 1994).
44
Ainsi, d'après Max Weber (1864-1920) dans Le Savant et le politique, « l'État est une entreprise politique à
caractère institutionnel dont la direction administrative revendique avec succès, dans l'application de ses règlements, le
26
COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL (Théorie générale)
effectivement, car tout Etat qui laisse se développer des pouvoirs de contrainte,
qui lui échappent, abdique.
monopole de la contrainte physique légitime sur un territoire donné », c'est-à-dire qu'il est le seul a pouvoir faire respecter les
lois à travers l'armée, la justice et la police.
27