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Lettre de Marcel Mauss adressée à Emile Durkheim au sujet du suicide

anomique.

Ou comment l’auteur de l’Essai sur le don lui préfère l’emploi du

concept de pléonexie.

Au détour d’une page de Sociologie et anthropologie de Marcel Mauss où l’on


trouve l’Essai sur le don, je découvre un mot, celui de pléonexie. Il s’avère
que je travaille cette notion en raison de mes travaux sur l’anomie. Durkheim
définit l’anomie comme « mal de l’infini. » Cette définition, je la remets en
cause. Je n’en expliquerai pas ici les raisons lesquelles feront l’objet d’un livre
sur ce concept phare de la sociologie qui s’intitulera : l’anomie ou la part
maudite de l’Occident. Je cherchais donc un concept plus adéquat pour
qualifier la façon dont Durkheim tentait de déterminer son temps via un
concept, l’anomie dont l’emploi par Guyau met en défaut la façon dont
Durkheim le conçoit. Et ce concept que j’ai découvert grâce aux travaux de
Robert-Dany Dufour remplit cette exigence. Beaucoup s’en arrêtent à cette
définition : la pléonexie, c’est le désir de posséder toujours plus. C’est occulter
sa définition complète laquelle est : le désir de posséder toujours plus par
rapport aux autres. Cette précision n’est pas de la moindre des importances.
Il est établi qu’il existe deux formes de prohibition dans les sociétés
archaïques : la prohibition de l’inceste, bien sûr, et qui a toujours cours, et la
seconde, oubliée par les Modernes, c’est celle de la pléonexie. En effet, ces
sociétés vivent leur existence selon une logique d’une triple obligation de
l’échange : donner, recevoir, rendre. Or il s’avère que la pléonexie non
seulement consiste en ce désir de posséder au-delà de toute limite, mais en
plus le pléonexique est habité par la volonté de prendre et de s’accaparer des
biens d’autrui. Il se caractérise par une sorte de rapacité qui vient mettre à mal
la logique de l’échange des sociétés primitives. Le don est remplacé par le
prendre. Il en résulte le plus grand danger pour ces sociétés, celle ni plus ni
moins de leur dislocation. D’où la nécessité de sa prohibition.

La leçon de sagesse des sociétés primitives.

Pour qualifier la pléonexie, « Rink nous dit que les gens d’une station veillent
jalousement à ce que nul ne possède plus que les autres. Quand le cas se
produit, le surplus, fixé arbitrairement, retourne à ceux qui ont moins. Cette
horreur de la pléonexie est aussi très développée dans les régions centrales. »
(Mauss : 1989 : 467) Les primitifs, est-il dit ont en « horreur » la pléonexie.
Voilà un sentiment fort et qui exprime bien des choses. Il faut aussi remarquer
que ce surplus est l’objet de potlatch.

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