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Chapitre 1

Introduction générale
« Turbolenza » par léonard Da Vinci

‘’the smallest eddies are almost numberless, and large things


are rotated only by large eddies and not by small ones, and
small things are turned by small eddies and large”
« La nuit étoilée » par Van Gogh
Les tourbillons aux échelles de la
circulation atmosphérique
Cyclone Ivan menançant Cuba et la Floride, progressant à
une vitesse de 14 km/h avec des vents à 260 km/h et des
rafales à plus de 315 km/h (13 sept. 2004)
Eruption volcanique
(Tavurvur, Papouasie-Nouvelle-Guinée, 8 août 1996)
Avalanche
Résultats expérimentaux illustrant la
transition à la turbulence
Expérience de Reynolds Osborne Reynolds
1842-1912
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Expérience de Reynolds
Reynolds (1883) :
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Expérience de Reynolds
Injection d’un colorant dans un écoulement de type canal. Le
canal a une largeur caractéristique égale à L, le fluide est injecté
avec une vitesse débitante U. Sa viscosité est n.

Trois états pour l’écoulement :


laminaire, transitionel, turbulent

La turbulence apparaît lorsque la source d’ énergie qui met le


fluide en mouvement est suffisamment intense devant les effets
visqueux que le fluide oppose pour se déplacer.
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Ecoulement en conduite

 Le nombre de Reynolds est donc une grandeur sans dimension.


 La transition d’un régime laminaire à un régime turbulent
s’observe pour Re  2000 = Rec (nombre de Reynolds critique)

laminaire turbulent Re
0 Rec On peut étendre le domaine où le
régime est laminaire au delà de Rec,
à condition de prendre certaines
précautions (éviter les perturbations)

 En tout état de cause, on sait que l’écoulement est laminaire si


son nombre de Reynolds est inférieur à 2000 (quelles que soient
les perturbations subies par le système).
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Ecoulement en conduite
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Ecoulement en conduite

1 Laminaire
1
2
3 } Turbulent

100

Re
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Ecoulement en conduite
Écoulement laminaire
- - P R e  2300

Q=<U > A -P


x Poiseuille :   64R 1
e
(courbe 1)

dp  1 
    U  PP
2
Écoulement turbulent
dx d 2
dp d 1 410 3  R e  105
P    c f   U 2
dx 4 2 Blasius :   0.3164R 0.25
e
(courbe 2)

cf  R e  10 5
8
1
Prandtl:  2log(R e  )  0.8 (courbe 3)

Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Ecoulement en conduite
Enregistrements de vitesse instantanée en conduite circulaire en
régime de transition (a) laminaire , (b) turbulent (J.Rotta-1956).
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Ecoulement en conduite
Exercice
À titre d'exemple considérons une conduite lisse de section
circulaire de diamètre 0.100 m où circule de l'eau (masse
volumique 1000 kg/m3 et viscosité cinématique 10-6 m2s-1) avec
une vitesse débitante de 1.00 ms-1
1. Vérifier que l’écoulement est turbulent et calculer le gradient
de pression (perte de charge) par unité de longueur. Que
serait ce gradient de pression si l'écoulement restait laminaire.
2. Calculer les contraintes et les gradients de vitesse à la paroi
dans les deux cas
3. estimer l’énergie dissipée par unité de temps et par unité de
masse de fluide dans les deux cas
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Transition dans la couche limite
Dans l'écoulement de couche limite se développant le long d'une
paroi (plaque plane par exemple), le nombre de Reynolds local
augmente avec l'abscisse de sorte qu'il y a cohabitation des
régimes laminaire (stable), instable, transitionnel et turbulent.

U x
Re 
n
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Transition dans la couche limite
Les expériences Schubauer et Klebanoff illustrent le changement
important du profil de vitesse moyenne comparativement à la
solution de Blasius
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Transition dans la couche limite
Effet de l'apparition de la turbulence sur l'épaississement de la
couche limite

U

nx

5
R ex .10
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Transition dans la couche limite
Modification importante de la traînée de la plaque plane quand
apparaît la turbulence.
x
FDX  2   P (x' )dx'
0 FDX 0.5
Ecoulement laminaire, solution de Blasius C DX   1.328R ex
xU 2
(courbe 1)
0..20
Écoulement turbulent, proposé par Prandtl C DX  0.074R ex
(Courbe 3)
0.445
Écoulement turbulent, loi logarithmique : C DX 
(Courbe 3) (logR ex) 2.58
Écoulement en régime de transition et turbulent 0.445 A
(Courbe 4) C DX  2.58 
(logR ex) R ex
Résultats expérimentaux illustrant
la transition à la turbulence
Transition dans la couche limite
Effet de de la turbulence sur la traînée de la plaque plane
10
9
8
7
6 Plage de résultats expérimentaux
5
10  C DX
3
4

3
2.5 4
1
2 2
3
1.5

1
2 3 4 56 8 2 3 4 6 8 2 3 4 6 8 2 3 4 6 8 2 3 4
10 5 10 6 10 7 10 8 10 9
R ex
Résultats expérimentaux illustrant la
transition à la turbulence
Déplacement du point de décollement
Les expériences de visualisation de l'écoulement d'eau autour
d'une sphère, (1980 -ONERA), mettent bien en évidence le
déplacement du point de décollement vers l'aval quand la couche
limite devient turbulente
décollement turbulent : visualisation par
bulles d’air

décollement laminaire : visualisation


par injection de colorant bulles d'air)
Résultats expérimentaux illustrant la
transition à la turbulence
"crise de traînée"
La réduction du sillage proche diminue la traînée de forme sur la
sphère ; il se produit alors ce qu’il est convenu d’appeler « la crise
de traînée »
Résultats expérimentaux illustrant la
transition à la turbulence
"crise de traînée" ("drag crisis")
Coefficient de traînée sur la sphère: l'apparition de la turbulence
dans la couche limite réduit brusquement la traînée de forme

CD

Re
Autres types d’instabilités
Les exemples de transition d'un écoulement laminaire à un
écoulement turbulent correspondent à l'apparition d'instabilités qui
marquent la rupture entre les forces stabilisatrices (viscosité) et
les forces déstabilisatrices (inertie).

La transition apparait à partir d'un certain nombre de Reynolds et


s'accompagne de la formation de tourbillons.

Il existe d'autres types d'instabilités associées à d'autres


phénomènes et qui mettent en jeu d'autres forces.
Autres types d’instabilités
Conclusion
Les trois types d'instabilités étudiées présentent un certains
nombre de point communs:
• Elles correspondent à des ruptures d'équilibres entre forces
stabilisatrices et déstabilisatrices
• Cette rupture n'apparaît qu’au delà d'un certain seuil du
paramètre adimensionnel caractéristique
• Elles se traduisent par l'apparition de structures
tourbillonnaires au sein du fluide
Caractéristiques et phénoménologie
des écoulements turbulents
Caractère principal : imprévisibilité .
Il est possible de prévoir si un écoulement sera turbulent ou non.
Par contre, estimer en tout point et à tout instant la vitesse
exacte du fluide est impossible.

Deuxième point essentiel : mélange et dissipation .


La turbulence amplifie le mélange et la dissipation d’énergie.

Troisième aspect important :


existence de nombreuses échelles spatiales et temporelles

Enjeux scientifiques et technologiques : compréhension et


modélisation de la turbulence, calcul et prédiction des
écoulement et des transferts turbulents, et éventuellement
maîtrise et contrôle du phénomène.
Caractéristiques et phénoménologie
des écoulements turbulents

Definition of turbulent flow (Hinze)


“Turbulent fluid motion is an irregular condition of flow in which
the various quantities show a random variation in time and
space, so that statistically distinct average values can be
discerned”
Caractéristiques et phénoménologie
des écoulements turbulents
Signification physique du nombre de
Reynolds

Il s’agit donc du ratio entre deux temps caractéristiques : le


temps visqueux qui correspond au temps nécessaire au fluide
pour gommer une perturbation quelconque qui apparaît dans
l’écoulement et le temps cinétique correspondant au temps mis
par une particule fluide pour traverser la longueur caractéristique
de la géométrie.
Caractéristiques et phénoménologie
des écoulements turbulents
Signification
physique du
nombre de
Reynolds
Caractéristiques et phénoménologie
des écoulements turbulents
Dynamique des structures tourbillonnaire
Les structures tourbillonnaires prennent naissance sur des
surfaces particulières de l’écoulement délimitant des zones de
fluide de propriétés distinctes : instabilités de front
L’instabilité de Kelvin Helmholtz illustre le comportement d’un
profil de vitesse : on considère le cas d’une couche de mélange
plane tel que :
• les vitesses sont parallèles mais de module différent
• le champ est irrotationnel à l’extérieur de la couche.
Caractéristiques et phénoménologie
des écoulements turbulents
Dynamique des structures tourbillonnaire
Si une perturbation de la nappe (couche de mélange) apparaît,
la partie haute subit une accélération et une dépression alors
que la partie basse subit une surpression et un ralentissement. Il
en résulte un déséquilibre : la distance crête à crête diminue et
la vorticité augmente entraînant l’enroulement de la nappe.
Caractéristiques et phénoménologie
des écoulements turbulents
Dynamique des structures tourbillonnaire
Caractéristiques et phénoménologie
des écoulements turbulents
Dynamique des structures tourbillonnaire
Ecoulements libres :
expériences de jets
Non-linéarité des équations de
Navier-Stokes

Le terme d’accélération convective u.∇u est à l’origine des


nombreuses échelles que l’on observe en écoulement turbulent.
Petit exemple pour illustrer le rôle de ce terme
u u
On considère l’équation simplifiée u 0
t x
En prenant comme condition initiale : u ( x, t 0 )  A cos(kx )
Et en écrivant le développement limité:
u
u ( x, t )  u ( x, t 0 )  ( t  t 0 )  O( t  t 0 ) 2
: t t0
Non-linéarité des équations de
Navier-Stokes
On obtient :
u
u ( x, t )  u ( x, t 0 )  ( t  t 0 )  O( t  t 0 ) 2
t t0

u ( x, t )  u ( x, t 0 )  ( t  t 0 )A 2 k cos(kx ) sin(kx )  O( t  t 0 ) 2
A2
u ( x, t )  u ( x, t 0 )  ( t  t 0 ) k sin(2kx )  O( t  t 0 ) 2
2
Et qui indique l’apparition d’une harmonique supérieure dans la
solution. Plus généralement, dans un contexte tridimensionnel les
termes non-linéaires provoquent l’apparition d’harmoniques et de
sous harmoniques qui signifient l’apparition de transfert de
mouvement et d’énergie entre différentes échelles
Non-linéarité des équations de
Navier-Stokes
Exercice:
Même problème pour un mouvement 2D

Montrer que l’on obtient dans ce cas:

Qui montre la création d’harmoniques supérieures, i.e. de


grands nombres d’onde ou bien encore de petites structures, et
aussi la création de sous-harmoniques.
Non-linéarité des équations de
Navier-Stokes
Richardson
Big whirls have little whirls that feed on their
velocity Little whirls have lesser whirls and so
on to viscosity
« Turbolenza » par léonard Da Vinci
‘’the smallest eddies are almost numberless, and
large things are rotated only by large eddies and
not by small ones, and small things are turned by
small eddies and large”
Non-linéarité des équations de
Navier-Stokes

Question:
Limite pour la taille des plus grands nombres
d’onde ou des plus petites structures dans un
écoulement turbulent ?
La turbulence est du ressort de la
mécanique des milieux continus
Limite pour la taille des plus petites structures dans un écoulement turbulent ?

Les plus petites échelles avant dissipation, ont un rôle très important.
Le transfert vers les grands nombres d’onde est limité par la viscosité
moléculaire : les particules fluides ne peuvent conserver leur différence de
vitesse
Echelles de Kolmogorov
La turbulence est du ressort de la
mécanique des milieux continus
Limite pour la taille des plus petites structures dans un écoulement turbulent ?
Dans un gaz, c'est le libre parcours moyen qui fixe la limite de
l'hypothèse du continu. La théorie cinétique des gaz permet de donner,
pour l’air, l’approximation suivante du libre parcours moyen :
n
lm 
c

n est la viscosité cinématique [m2/s] (voir paragraphe suivant), c la


célérité du son [m/s]

Lorsque la pression est suffisamment basse, la distance moyenne entre


molécules devient parfois de même ordre de grandeurs que les
dimensions caractéristiques de l’écoulement. Cela se produit par
exemple pour les engins spatiaux rentrant ou sortant de l’atmosphère.
Dans ces conditions l’hypothèse du continue n’est plus valable.
La turbulence est du ressort de la
mécanique des milieux continus

L’hypothèse du continu n’est pas valable aussi pour les


écoulements turbulents où les plus petites échelles des
fluctuations turbulentes atteignent des échelles
comparables au libre parcours moyen.
Considérons à cet effet un tourbillon de taille r dont la
vitesse caractéristique est Vr (vitesse circonférentielle). On
suppose que le mouvement à l’intérieur du tourbillon est
bloqué lorsque les forces de viscosité commencent à
l’emporter sur les forces d’inertie. Cela est réalisé lorsque le
nombre de Reynolds (sans unités) est de l’ordre de l’unité.
La turbulence est du ressort de la
mécanique des milieux continus
Limite pour la taille des plus petites structures dans un écoulement
turbulent ?
r Vr
Re  1
n

n
La plus petite échelle de turbulence est donc: r
Vr
On voit donc que les plus petites échelles de la turbulence sont de
même ordre de grandeur que le libre parcours moyens lorsque les
fluctuations de vitesse sont de même ordre de grandeur que la célérité
du son. Cela peut se produire dans des écoulements supersonique et
l’on considère que l’hypothèse du milieu continue reste valable jusqu’à
Mach 15
La turbulence est du ressort de la
mécanique des milieux continus
Retour sur l’exercice de la turbulence en conduite
À titre d'exemple considérons une conduite lisse de section
circulaire de diamètre 0.100 m où circule de l'eau (masse
volumique 1000 kg/m3 et viscosité cinématique 10-6 m2s-1) avec
une vitesse débitante de 1.00 ms-1
1. En supposant que les fluctuations de vitesse des plus petites
structures sont de l’ordre de 3 mm/s, qu’elle est la taille des
plus petites structures
2. On veut étudier le signal turbulent, quelle est la fréquence
minimale qu’il faudrait utiliser pour l’acquisition du signal
Le cours : Turbulence
Objectifs du cours
Découvrir et comprendre la physique des écoulements turbulents

Etablir les bases pour une description statistique indispensable à la


modélisation

Donner un aperçu de la simulation numérique et des techniques


expérimentales pour les écoulements turbulents
Contenu du cours
- introduction aux écoulements turbulents
- les échelles de la turbulence
- description statistique de la turbulence
- écoulements turbulents de référence : turbulence homogène,
écoulements cisaillés, écoulements de paroi
- Modèles de turbulence

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