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Manon

RIGHINI
manon.righini1@etu.univ-lorraine.fr
Année universitaire 2022-2023

Revue
bibliographique sur
l’étude du génie
génétique

Devoir de rattrapage
Professeur encadrant : M. Athanase Visvikis / athanase.visvikis@univ-lorraine.fr
Introduction :

L’ingénierie génétique est une technique permettant de manipuler l'ADN d'un


organisme vivant pour lui donner des caractéristiques spécifiques selon des attentes plus ou
moins précises. Le génie génétique est utilisé dans de nombreux domaines, notamment
l'agriculture, la médecine ou encore la recherche scientifique. Dans l'agriculture par exemple,
ces techniques sont utilisées pour créer des plantes qui sont plus résistantes aux maladies, aux
insectes jusqu’aux conditions environnementales défavorables dans le but de créer des
organismes génétiquement modifiés plus communément appelés OGM 1. L’ingénierie
génétique s’applique également aux gènes de l’Homme déterminant les caractéristiques
physiques et fonctionnelles d'un organisme comme la couleur des yeux, la taille ainsi que la
résistance aux maladies... En modifiant ces gènes, les scientifiques peuvent créer des
organismes avec des caractéristiques spécifiques ou même améliorer les caractéristiques
existantes comme pourrait le faire la sélection naturelle mais de façon plus rapide et dans
certain cas plus efficace. Dans la médecine, la modification génétique peut être utilisée pour
traiter ou prévenir des maladies génétiques des plus communes au plus rares en remplaçant ou
en corrigeant les gènes défectueux à l’origine du dysfonctionnement survenant chez les
patients. La modification génétique peut être réalisée de plusieurs manières, notamment en
utilisant des vecteurs viraux qui sont des virus génétiquement modifiés qui peuvent être
utilisés pour transporter des gènes spécifiques dans les cellules cibles, ou des techniques
d'édition de gènes telles que des transposons ou les systèmes utilisant des enzymes de
restrictions dites programmables.

A l’heure actuelle, la modification génétique est très controversée car elle soulève des
préoccupations éthiques, environnementales et de sécurité. Il est donc important de
réglementer à la fois l'utilisation mais aussi le type de modifications génétiques de façon à
garantir des risques réduits quant à l’utilisation de ces techniques. Par exemple, certains
organismes génétiquement modifiés peuvent se propager dans l'environnement et affecter la
biodiversité ou la santé des écosystèmes voire de l’Homme. En raison des préoccupations que
suscitent le génie génétique, une réglementation dans de nombreux pays et des normes strictes
sont de rigueur et doivent être respectées avant que les organismes génétiquement modifiés ne
soient autorisés à être produits et utilisés. La modification génétique est une technologie en
constante évolution qui est de plus en plus appliquée en laboratoire, avec de nouvelles
avancées et de nouveaux développements qui se produisent régulièrement2.

Au cours de cette revue, les techniques d’édition des génomes utilisant des éléments
transposables et des nucléases vont être décrits dans leur application pour la recherche
scientifique. Ces techniques sont principalement utilisées dans la médecine visant à une
application clinique sur des patients atteints de maladie génétique ou bien même de rétrovirus
ayant la capacité d’intégrer le génome de l’hôte infecté comme par exemple le Virus de
l'Immunodéficience Humaine (VIH). Dans un premier temps, c’est le mécanisme de Sleeping
Beauty, transposon ayant été reconstruit à partir d’élément inactif, qui sera abordé, décrivant
le mécanisme, les améliorations apportées au fil du temps et finalement les potentielles
applications cliniques qui pourraient être étudiées par la suite. Ensuite, une approche des
quatre différents types de nucléases va être décrite. En premier, ce sont les méganucléases qui
seront brièvement abordées. Par la suite, ce sont les nucléases dont il est possible de
programmer en fonction de la demande et générer grâce à des vecteurs d’expression qui
seront étudiées. Parmi ce type de nucléases, on retrouve les Zinc Finger nucleases, les
Transcription activator-like effector nucleases et enfin le mécanisme de Cluster Regularly
Interspaced Short Palindromic Repeats associé à des endonucléases. Pour chaque catégorie de
nucléases, le mécanisme ainsi que les potentielles applications sont décrites visant à mettre en
avant les avantages et l’évolution du génie génétique au cours du temps.

I/ Sleeping Beauty : le transposon reconstruit :

Pour modifier l’ADN, de nombreuses méthodes ont été


découvertes et améliorées dans le but, qu’un jour, celles-ci puissent
être utilisées dans le cadre de la recherche scientifique.Parmi ces
méthodes, on retrouve La Belle Au Bois Dormant plus connue sous le
nom de Sleeping Beauty (SB). SB est un transposon basé sur des
Figure 1 : séquences anciennes et inactives isolées du génome de
Pleuronectes platessa Pleuronectes platessa (Figure 1), un poisson que l’on retrouve de
https://es.wikipedia.org/ l’Atlantique jusqu’à la Méditerranée3. En 1997, le système de
wiki/Pleuronectes_platessa
transposon SB a été reconstruit et amélioré à partir du transposon
inactif, le Tc1/mariner retrouvé dans cette espèce de poisson et
nommé Sleeping Beauty d’après le célèbre conte de fée, la belle au bois dormant. Cet élément
nouvellement réactivé a été le premier transposon à être démontré capable d'une transposition
efficace dans les cellules vertébrées, permettant ainsi de nouvelles voies pour le génie
génétique, y compris la thérapie génique4. 

A. Le mécanisme de transposition Sleeping Beauty  :

Le mécanisme de transposition de SB est composé d'un transposon d'ADN synthétique


utilisé dans le but de d'introduire des séquences ADN à un autre emplacement dans un
chromosome dans le but, par exemple, d’introduire des gènes et de découvrir leur fonction.
Les transposons d'ADN sont de petits segments discrets d'ADN ayant la capacité de s’exciser
et de s’insérer dans un génome et étant flanqués par des séquences terminales répétées et
inversées qu’on nomme TIR, pour Terminal Inverted Repeats. Le mécanisme de SB dispose
de la capacité de changer la position de la région bornée par les TIR dans le génome via un
système de «couper-coller» appelé la transposition4. Ce mécanisme consiste en l’excision
d’un segment d'ADN défini qui va ensuite être déplacé vers un autre site d'une molécule
d'ADN. Le transposon original se composait d’un gène de la transposase flanqué par les TIR.
À l'extrémité de chaque région TIR, on retrouve une courte duplication de site Tandem
appelée TSD. Lorsque la transposition se produit, deux transposases reconnaissent ces
séquences TIR au niveau de sites de liaisons et se rejoignent médiant ainsi l’excision de
l’élément, c’est-à-dire le clivage de l’ADN double brin. Le complexe transposase – ADN –
transposase va ensuite être réintégré ailleurs dans le génome dans des motifs d'ADN
spécifiques créant de courts TSD lors de l'intégration. Dans le mécanisme qui a été reconstruit
(Figure2a), deux vecteurs ont été créées l’un étant porteur du gène de la transposase et l’autre
d’un gène d’intérêt flanqué par les TIR. Ainsi, un ADN d'intérêt cloné entre les séquences
TIR d'un vecteur de transposition peut être utilisé pour une insertion génomique. Cette

insertion se fait de manière régulée, stable et efficace mais dans une région imprécise du
génome souvent composé de nombreuses bases de thymine et adénine. (Figure 2b).

B. Les modifications apportées au système SB :

Les transposons fournissent une expression stable des gènes qu’ils comportent.
Cependant, pour appliquer cela à la recherche scientifique et dans le cas de grande
mutagenèse par exemple, des vecteurs porteurs de ces transposons ont été améliorés
permettant ainsi d’obtenir des clonages faciles et orientés mais aussi de suivre  les cellules
transfectées par un traçage à partir de la protéine de fluorescence, la GFP, et de ces mutants

Figure 3 :

Deux variants de transposons issus de la reconstruction de Tc1/mariner ayant été transformés et présentant les
différentes possibilités de nomenclature pour leur application tel que différentes protéines de fluorescence
GFP (verte), RFP (rouge), ou encore BFP (bleu).
Eric Kowarz, Denise Löscher, Rolf Marschalek.Biotechnol. J. 2015, 10, 647–653

(Figure 3).
D’autres aspects du transposon d’origine ont été améliorés tel que la transposase dont
la totalité de ses acides aminés ont été mutés en vue de provoquer un changement de l’activité
catalytique. À la suite de cela, une SB de deuxième génération environ trois fois plus active a
été conçue et son application a été testée dans des essais cliniques. La version de la
transposase la plus hyperactive ayant été produite est la SBX100 qui, comme son nom
l’indique, présente cent fois plus d’activité par rapport à la transposase d’origine4. Cette
transposase a d’ailleurs la particularité de permettre la transgénèse au sein de lignées
germinales dans les modèles de mammifères tels que les souris ou les rats.

En règle générale, le système de transposon SB dans les cellules fournit deux


composants de type vectoriel sous forme de plasmide. Cependant, le plasmide d’expression de
la transposase peut être remplacé par un ARNm synthétisé dans des réactions de transcription
in vitro permettant ainsi d’augmenter la biosécurité de cette approche car l’ARNm ne risque
pas d’être intégré dans l’ADN chromosomique. Néanmoins, il n’est pas possible d’intégrer la
séquence génomique codant pour l’ARNm directement dans le génome de la cellule cible. En
effet, cela peut conduire à un risque quant à son application dans la thérapie génique
puisqu’un tel événement pourrait engendrer une expression prolongée et incontrôlable de la
transposition entraînant une remobilisation continue du transposon SB dans la molécule
d’ADN. 

Certaines pistes d’amélioration ont également été découvertes dans le cadre de la


thérapie génique. Une étude portant sur le développement des vecteurs SB dans le but d’une
application clinique a été faite et propose l’utilisation de vecteurs en Mini-Cercle (MC) en
tant que porteurs des composants du transposon SB. Cette méthode permet de réduire
significativement la taille du vecteur en supprimant la plupart des séquences principales des
plasmides parentaux. (Figure 4). Il a été montré dans cette étude que l’avantage premier est le
taux de survie cellulaire qui est jusqu’à trois fois meilleur.  En plus de la diminution de la
cytotoxicité, la transformation du génome est plus efficace et stable qu’avec des vecteurs
conventionnels. Cela étant dû à leur petite taille permettant de traverser les membranes
cellulaires plus efficacement5.

Figure 4 :
Les éléments d'ADN minicercle sont générés par recombinaison intramoléculaire à partir d'un plasmide
parental médié par une intégrase. La construction de mini cercle peu être un système inductible par arabinose
de façon à exprimer simultanément l'intégrase qui produit des molécules d'ADN de minicercle et
l'endonucléase qui dégrade ensuite l'épine dorsale de l'ADN parental empêchant ainsi une réponse
immunitaire.
https://www1.biocat.com/categories/cloning-expression/mammalian-expression/minicircle-technology
À la suite de toutes les améliorations qu’a subit le système SB, celui-ci est un candidat
idéal dans le cadre de transfert de gène. Contrairement au vecteur viraux, les vecteurs de
transposons peuvent être maintenus et propagés sous forme d’ADN plasmidique ce qui les
rend simples et peu coûteux à fabriquer. Cette méthode dispose également d’une spécificité de
sites qui se fait au niveau d’un dinucléotide TA dispersé dans la molécule d’ADN. En
revanche, l’un des facteurs de risque les plus importants pouvant être rencontrés à cet élément
est la génotoxicité, c’est-à-dire les dommages mutationnels qui peuvent être engendrés et
pouvant créer des pathologies.

C. Applications potentiels de l’outil génétique de transposition  :

De nombreuses applications à
cette méthode ont d’ors et déjà été
proposées telle que la détection de
cancer. Lors d’une étude, ce transposon a
été utilisé en tant qu’outil génétique chez
les souris afin de muter au hasard des
tumeurs induites chez les souris
permettant ainsi de comprendre quels
gènes sont à l’origine du cancer. Cela a
permis de prouver que certaines voies
devaient être inhibées dans le but «
d’apprivoiser » les cellules cancérigènes.
Figure 5 :
Une autre application possible ayant déjà
Schéma représentant un mode d’application du été citée dans cette revue est la thérapie
transposon SB dans la thérapie génique. Les génique (Figure 5) qui nécessite d’intégrer de
vecteurs de transpositions sont implantés dans des manière stable l’information génétique. La
cellules somatiques adultes par nucléofection et les dernière version de vecteur de SB répond à
cellules porteuses du transposons vont ensuite
cette exigence et les variants les plus actifs du
pouvoir être réintroduitent chez des souris ou même
chez des patients pour un traitement clinique. transposon dispose d’une fréquence
https://www.youtube.com/live/ d’intégration des gènes dans les cellules
zrDUtZyIOqc?feature=share humaines qui est comparable à celle des
vecteurs viraux6.

D. D’autres transposons découverts :

Bien que le transposon SB est actuellement le plus étudié pour des applications
cliniques, d’autres transposons ont également été découverts et reconstruits. Par exemple, les
éléments d'insectes PiggyBac et Minos qui catalysent une transposition efficace dans les
cellules de mammifères. Ou encore l'élément amphibien reconstruit FrogPrince ainsi que
l'élément Hsmar1 humain et le transposon de poisson zèbre Harbinger3_DR  se sont avérés
également actifs chez les espèces de vertébrés4. Cependant, pour qu’un transposon soit
applicable dans un organe modèle donné, il lui faut une niveau suffisant d’activité de
transposition chez l’espèce donnée et des propriétés de sélection du site cible du transposon
pour apporter une spécificité. Ce n’est pas encore le cas pour la plupart de ces systèmes qui
sont toujours étudiés dans le but de s’en servir comme c’est déjà le cas pour SB, dans des
applications cliniques et dans la recherche scientifique7.

II/ Les nucléases :

Les technologies d'édition du génome basées sur les nucléases permettent des
changements précis et directs dans l'ADN génomique de diverses espèces, des procaryotes
aux eucaryotes y compris les cellules humaines. Pour introduire les nucléases programmées, il
existe différentes méthodes toujours en recherche d’amélioration. Parmi celles-ci on retrouve
l'administration de nucléases par l'ARNm in vitro transcrit 13 (IVT). Cette méthode présente
plusieurs avantages, tels que l'expression transitoire avec une administration efficace in vivo
et in vitro sans pour autant avoir à intégrer génétiquement le gène de l’enzyme. De plus, pour
la plupart de ces enzymes de restriction programmées, les chercheurs constatent une efficacité
d'édition élevée couplée à une précision de reconnaissance des séquences d'ADN génomique
des cellules de plantes, d’animaux et de bactéries. A l’origine, la recombinaison homologue
(RH) était la principale méthode utilisée et connue en génétique pour l’insertion et/ou la
délétion de séquence en vue d'étudier les fonctions des gènes. Pour se faire, le mécanisme
nécessite d’introduire un vecteur porteur de séquences homologues et donc identiques aux
bornes de la région devant être modifiée. (Figure 6) Cependant, cette méthode s’avère être
faiblement efficace limitant son application9.

Figure 6 : Schéma représentant la recombinaison homologue.

Dans un premier temps la cassure est reconnue. Ensuite, un


ADN donneur à proximité de cette cassure va s’hybrider par
homologie de séquences à l’ADN d’origine. L’information
contenue entre ces régions va être transmise de l’ADN donneur
à l’ADN défectueux. Enfin, selon le mode d’application, la
région rouge peut permettre soit une réparation, soit l’insertion
de gène soit quelques bases de façon a éliminer des gènes de
l’ADN d’origine.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Édition_génomique#/media/
Fichier:Nuclease-cut-fr-text-to-path.svg

En revanche, les nucléases visant à l'édition du génome peuvent être conçues pour
reconnaître et couper en vue de produire des protéines non fonctionnelles et donc, par
conséquent, générer un knock out génique. De plus, il est possible d’utiliser le mécanisme de
jonction d'extrémités non homologues, en anglais Non-Homologous End-Joining (NHEJ) pour
restaurer partiellement la fonction des protéines10. Le mécanisme de NHEJ repose sur une
ligation directe des extrémités non homologues d’une cassure double brin. C’est un
mécanisme simple, rapidement mis en place par la cellule et qui dépend des protéines Ku70 et
Ku80 qui forment un hétérodimère se fixant sur les extrémités d’une cassure double brin.
Ainsi, l’hétérodimère lié à l’ADN va être reconnu par le complexe MRX (Mre11- Rad50-
Xrs2), et le complexe Ligase (Ligase4 et ses co-facteurs) qui permet le raboutage des
extrémités (Figure 7). Cependant, cette voie est sujette aux erreurs pouvant potentiellement
engendrer des mutations plus graves qu’à l’origine et c’est pourquoi, en général, c’est la voie
RH qui est employée.

Figure 7 :
Schéma représentatif du système de
jonctions d’extrémités non
homologues mis en place pour
réparer une cassure double brin à
partir des protéines Ku70 et Ku80 et
de la ligaseIV.

https://en.wikipedia.org/wiki/Non-
homologous_end_joining#/media/
File:1756-8935-5-4-3-l.jpg
Modifié par Manon RIGHINI

Il existe quatre groupes de nucléases d'édition du génome en fonction de leurs


structures : les méganucléases (MN), les nucléases à doigts de zinc (ZFNs), les nucléases
effectrices de type activateur de transcription (TALEN) et les nucléases associées à CRISPR,
CRISPR-Cas. Les 3 dernières générations de nucléases (ZFNs, TALENs et CRISPR/Cas)
sont dites « programmables » car il est possible de définir la séquence d'ADN ciblée de façon
très précise. Elles sont également plus étudiées puisqu’elles sont jugées plus efficaces et plus
simple d’utilisation permettant, en fonction du mode d’utilisation : le knock out, knock in ou
encore la correction de gène. (Figure 8)

Figure 8 :
Schéma représentant les trois
dernières générations de
nucléases (Zinc Fingers, TALE et
CRISPR/Cas9) et leur potentielles
applications : perturbation
correction et insertion de gènes

https://www.researchgate.net/
figure/Genome-Editing-Mediated-
by-Site-Specific-Nucleases-The-
zinc-finger-nuclease-
ZFN_fig1_330664079

A) Méganucléases :

Identifiées dans les années 1990, les MNs sont des enzymes de restriction connues
pour leur longue séquence de reconnaissance pouvant aller jusqu’à 40 pb rendant ainsi la
séquence cible théoriquement unique. De plus ces enzymes présentent une faible cytotoxicité
permettant leur utilisation dans de nombreux de type de cellules. Les endonucléases de
homing sont les plus connues et appartiennent à la famille LAGLIDADG 8 (Figure 9) (dont le
nom représente une séquence en acide aminés conservée entre les différentes enzymes) 11.
Parmi celles-ci on peut citer I-SceI issue de mitochondries de Saccharomyces cerevisiae, I-

CreI issue des chloroplastes de l’algue verte Chlamydomonas reinhardtii ou encore I-DmoI
découverte dans l’archéobactérie Desulfurococcus mobilis, qui sont les endonucléases les
mieux caractérisées et donc les plus utilisées dans la recherche scientifique. Conformément à
ce qui peut être possible avec une seule MN, la modification génétique induite est limitée à un
répertoire. Bien qu’il en existe un très grand nombre de ces enzymes et que le site de
reconnaissance puisse subir quelques variations, il est très compliqué de trouver une MN
permettant de cibler spécifiquement une séquence.

C’est pourquoi, en ingénierie génétique, ces


enzymes sont conçues à partir de domaine de Figure 9 : MNs
existantes et modifiées (limitées à de petites Schéma représentant la méganucléase
variations) dans le but de cibler une séquence I-CreI identifié dans les chloroplastes
d’ADN. A l’heure actuelle, plus de 20 domaines de l’algue verte Chlamydomonas
de
reinhardtii issue de la famille des
MNs ont été identifiés ce qui a permis jusqu’à LAGLIDADG, endonucléases de
présent de mettre au point des MNs spécifiques homing. de
séquences génétiques de virus, de plantes et https://www.creative-biolabs.com/ même
de créer une MN capable de cliver le gène XPC gene-therapy/engineered- de
l’homme, à l’origine d’une maladie meganucleases-homing-
endonucleases.htm
monogénique grave prédisposant aux cancers de la
peau et brûlures lors de l’exposition au soleil, le
Xeroderma pigmentosum8. Cependant, bien que très spécifique, le nombre d’enzymes connues
à l’heure actuelle est trop faible pour cibler n’importe quelle séquence. D’autres méthodes,
demandent moins de temps et d’efforts et sont basées sur l’association d’une nucléase non
spécifique et de domaines de liaison capables de se lier à des séquences spécifiques. Ces
technologies semblent être une meilleure alternative pour la recherche scientifique.

B) Nucléase en doigt de Zinc :


a. Mécanisme principal :

Figure 10 :
Structure de la protéine du doigt de Zinc Cys2-His2
constitué d’une hélice alpha et d’un feuillet Beta
maintenue dans cette conformation grâce a un ou
plusieurs atomes Zinc jouant le rôle de composant
structurel .
Molecular Biology of the Cell. 4th edition.
Alberts B, Johnson A, Lewis J, et al.
New York: Garland Science; 2002.

Les Zinc Fingers Nucleases (ZFNs) ont été créés en fusionnant les domaines de liaison
à l'ADN du doigt de zinc des protéines Zinc Finger (ZF) avec le domaine de clivage de
l'endonucléase FokI. La spécificité de la séquence des ZFNs provient de la région de la
protéine du doigt de zinc qui contient de trois à six doigts Cys2-His2 (Figure 10a), dont
chacun reconnaît un code de trois nucléotides12.

Deux protéines ZF le lie de part et d’autre de l'ADN permettant à l'endonucléase FokI


de former un dimère et de cliver l'ADN dans la région cible. La particularité principale des
Doigts de Zinc, en comparaison avec TALEN est la structure des sites de liaison qui adopte
une conformation de pouce (Figure 11). Ces enzymes, qui ressemble grandement dans leur
mode de fonctionnement au mécanisme de TALEN (que nous verrons pas la suite) ont la
possibilité, selon leur utilisation, de permettre le knock-in ou le knock-out. Pour se faire, le
système nécessite une lignée de cellules dans laquelle l’édition sera réalisée ainsi qu’un
plasmide porteur de la séquence ZFN. Quand ces deux éléments sont réunis, il faut alors
transfecter les cellules avec le plasmide et exprimer celui-ci. La séquence va alors être
transcrite puis traduite en l’enzyme de restriction, ZFN 12. Les protéines produites vont ensuite
intégrer le noyau (en admettant qu’il y en ait un selon le type d’organisme) puis se lier au
gène cible et générer une cassure sur les deux brins et à bout franc. Les cellules vont alors
tenter de réparer ce clivage par NHEJ et donc engendrer un knock out de celui-ci(Figure 7).
Dans le cadre de l’étude de gène il est possible, à partir de ce mécanisme, d’introduire une
séquence d'ADN codant pour une gène X au sein du génome. C'est la technique knock in
utilisant cette fois ci le mécanisme de RH(Figure 6).

Figure 11 :
Mécanisme des Zinc finger nuclease pour engendrer une cassure double brin et représentation du
repliement en forme de doigt des domaines de liaisons pour la reconnaissance de trois nucléotides selon
la séquence.
https://www.nature.com/articles/nrg2842
b. Étude clinique utilisant les ZFNs :

La méthode de l’édition de génome ZFN est une technique prometteuse dans le cas de
traitement de maladie monogénique. Une autre approche, consistant à l'édition de gènes,
utilisant les ZFNs in vivo est décrite dans le modèle de Murin du syndrome de Hurler
(MPS1H)12. MPS1H est la forme la plus sévère de mucopolysaccharidose, une maladie rare
mais grave caractérisée par une accumulation de l’acide mucopolysaccharide, plus connu sous
le nom de glycosaminoglycanes (GAG), due à un défaut d’assimilation par l’hydrolase
lysosomale – α – L – Iduronase (IDUA) ce qui induit la maladie dite systématique et
progressive. La durée de vie d’un patient atteint de MPS1H est courte. Cependant, par
l’application des ZFNs il est désormais possible d’allonger celle-ci en éditant le gène
défectueux. Pour se faire, une copie qui a pour but de corriger le gène de l’ IUAD est créé
puis mise en place au niveau du locus de l'albumine dans les cellules hématopoïétiques, locus
décrit comme très efficace. Cela entraine une expression enzymatique sécrétée dans la
circulation, pour ensuite être absorbée en quantité suffisante pour corriger la voie métabolique
et ainsi la maladie. Cependant, bien que les mutations W402X et Q70X du gène de l’IUAD
soient les plus fréquentes et à l’origine de la forme la plus sévère de la maladie, représentant
plus de 50% des mutations12. Celles-ci surviennent de façon aléatoire, et une grande
proportion d'allèles nécessite d'être étudiée dans le but de créer une enzyme corrective d'une
mutation en particulier ce qui demande beaucoup d'effort et de temps . De plus, bien que
plutôt efficace, dans le cas d’une perfusion de l’enzyme défaillante, celle-ci doit être faite de
façon hebdomadaire et bien que l’enzyme recombinante soit efficace, elle n’est pas capable de
passer la barrière cérébrale, où l’accumulation de GAG reste un problème pour les patients
atteints de cette maladie. Jusqu’à présent, la greffe de cellules souches hématopoïétiques était
utilisée comme traitement mais cette approche n’est que très peu fiable et conserve un fort
taux de mortalité. Des études sont toujours en cours pour potentiellement améliorer cette
approche mais les ZFNs nécessitent beaucoup d’efforts et de temps avant d’obtenir de
meilleurs résultats. Toutefois, les nucléases à doigts de Zinc restent prometteuses pour la
recherche clinique de nombreuses maladies où d’autres approchent sont envisagées comme
l’utilisation d’un ARNm de ZFNs visant à cibler un gène défectueux, comme c’est
actuellement en cours pour cibler le génome viral du VIH13.

C) Nucléases effectrices de type actvateur de transcription :


a. Généralités :

Décrites pour la première fois en 2009, les Transcription activator-like effector


nucleases plus connues sous le nom de TALEN sont des nucléases effectrices de type
activateur de transcription semblables aux ZFNs. Ce sont des enzymes de restriction ayant été
conçues par fusion entre un domaine de liaison à l'ADN, appelé TALE, et un domaine
catalytique des endonucléases FokI ayant la capacité de cliver l'ADN 8. À l’origine, les TALEs
ont été identifiés à partir des protéobactéries Xanthomonas. Tous les TALE sont composés
d'un domaine de localisation N-terminal, d'un signal de localisation nucléaire C-terminal
(NLS) avec un domaine d'activation transcriptionnelle acide et d'un domaine central de liaison
de l'ADN de répétition en tandem (DBD) 14 (Figure 12). Le domaine de liaison à l'ADN se
compose de monomères, dont chacun se lie à un nucléotide dans la séquence nucléotidique
cible. Chaque monomère correspond à une répétition conservée en tandem de 34 résidus
d'acides aminés. Les deux résidus situés aux positions 12 et 13 sont très variables et
permettent la reconnaissance d'un nucléotide spécifique. Des rapports récents ont montré que
l'identité de ces deux résidus détermine la spécificité de liaison nucléotidique de chaque
répétition TALE dans un chiffrement simple qui spécifie la base cible de chaque RVD (NI =
A, HD = C, NG = T, NN = G)15.

La spécificité de liaison à l'ADN des TALENs est plus facile à concevoir et à utiliser
puisque les séquences répétées du domaine de liaison ne se lient qu’à un seul nucléotide
tandis que les ZFNs se lient à 3 nucléotides, ce qui explique que les TALENs peuvent être
appliqués plus largement aux sciences de la vie que les ZFNs. Cependant, dans un cas comme
dans l’autre, il est difficile de créer un plasmide et cela demande beaucoup d'effort et de temps
(comme par exemple le clonage c que l’on abordera par la suite) pour arriver au résultat
escompté. Le mécanisme d’application de ces enzymes est également très semblable à celui
des ZFNs. La séquence TALEN va être transcrite puis traduite et les protéines vont pénétrer
dans le noyau (si tenté qu’il y en ait un) et de la même façon que pour les ZFNs , la cassure à
bout franc permet soit un knock-in, soit un knock-out ou encore une correction de gène. Le
système TALE, y compris la TALE et la nucléase FokI, est ainsi devenu un outil puissant pour
les opérations du génome. En particulier, TALEN est une technologie de pointe pour le
traitement biomédical. Le système TALE a une capacité de ciblage élevée. Des produits
génétiquement modifiés TALEN ont montré des avantages significatifs et une étude clinique
basée sur des patients atteints de cancers et traités en 2015 sont encore complètement exempts
de cancer à ce jour8.

b. Golden Gate  :

Pour assembler les différents fragments d’une TALEN permettant la reconnaissance


d’une séquence, il est possible d’utiliser le clonage Golden Gate (GG). Le GG est une
méthode de clonage moléculaire qui permet d'assembler rapidement et efficacement dans le
but de créer des vecteurs recombinants complexes pouvant comporter plusieurs gènes, des
promoteurs, des terminateurs ou encore des étiquettes 20. Pour le clonage GG, les enzymes de
restriction et de ligature sont utilisées de manière séquentielle pour assembler les fragments
d'ADN dans un vecteur d'expression. Les fragments d'ADN sont alors clonés en utilisant une
série de réactions de coupure et de ligature, où les fragments sont assemblés en tandem. Pour
le clonage GG, ce sont les enzymes de restrictions coupant hors du site de reconnaissance qui
sont utilisées comme par exemple Bbs1, Esp3I ou encore Bsa117. (Figure 13).

Figure 13 :
Séquence reconnue par l’enzyme de restriction et la localisation de la coupure sur chaque brin d’ADN.
https://international.neb.com/products
Cela permet, en utilisant des vecteurs de clonage porteurs des sites de restrictions de
ces enzymes, de créer des extrémités cohésives spécifiques pour permettre de cloner, par la
suite, dans un ordre précis différents fragments en une seule étape. Bien entendu, il faut
prendre en compte que la technique peut prendre du temps (généralement en 3h et 5h) de
manière à optimiser les résultats17. (Figure 14). Cette méthode est très utilisée dans le cas des
nucléases TALE ou bien même dans les nucléases ZF. Cependant, elle peut également être
appliquée à d’autres systèmes d’ingénierie génétique comme le mécanisme de type Cluster
Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats, CRISPR16.

Figure 14 :
Schéma représentant le clonage Golden Gate. Dans un premier temps, les séquences sont insérées dans le
vecteur ici appelé « destination vector » (DV) porteur des sites de restriction type BsaI. Les nucléotides
coupés (NNNN) sont prédéfinis au moment de la conception du DV et les extrémités cohésives résultantes
permettent d’ordonner l’assemblage des fragments dans le « vector assembled » (VA). Ce vecteur est le
résultat de l’étape de coupure et de ligation qui se fait simultanément et dont l’ordre dépend des nucléotides
NNNN.

D) CRISPR :
a. Découverte et mécanisme :

La capacité de moduler et de modifier l’information génétique est très importante


lorsque l’on souhaite étudier la fonction de gènes et découvrir des mécanismes biologiques.
Depuis 1971, date à laquelle a eu lieu la première démonstration de production de fragments à
partir d'enzymes de restriction, les scientifiques exploitent les molécules d'ADN des
procaryotes dans le but de permettre l'évolution du génie génétique en découvrant de
nouveaux mécanismes encore inconnus. Parmi les différents outils de modification du
génome, on retrouve les transposons ou encore les nucléases dites programmables tels que les
méganucléases, TALEN ou encore ZFNs dont le mécanisme a été détaillé précédemment.
C’est en 1987 que les premières séquences palindromiques répétées ont été découvertes dans
le génome d’Escherichia coli. Le système est composé de séquences spécifiques que l’on
appelle des palindromes, qui sont des séquences de 20 à 50 paires de bases intercalées par des
Spacers, séquences de 20 à 58 paires de bases qui sont toutes différentes les unes des autres
que ce soit au niveau de leur taille ou encore dans leur séquence. En analysant ces séquences
Spacers18, les chercheurs ont remarqué qu’elles provenaient de bactériophages, prouvant ainsi
l’appartenance de ce mécanisme au système immunitaire procaryote, analogue de l’immunité
adaptative de l’homme. En amont de ces séquences, des gènes nommés Cas pour Crispr
Associated (Figure 15) ont été identifiés. Ils possèdent 2 fonctions distinctes : certaines sont
des hélicases, enzymes capables d’induire l’ouverture de l’ADN double brin, et d’autres des
nucléases, pouvant créer des cassures au niveau de l’ADN19.

Bien plus que de simples séquences palindromiques, il a fallu attendre de nombreuses


années avant de comprendre le rôle que pouvaient jouer ces régions dans les organismes
procaryotes. Dans la nature, le système CRISPR correspond à un mécanisme de l'immunité
adaptative clivant les acides nucléiques envahissant la cellule, système analogue à l’immunité
adaptative de l’homme. Ce mécanisme existe dans diverses espèces bactériennes et même
certaines archées. Il existe différents types de CRISPR et, parmi les plus connues, on retrouve
CRISPR de type I qui comprend des complexes effecteurs multi-protéique et le système de
type II qui quant à lui ne possède qu'une seule protéine effectrice. En tout, on retrouve 6 types
de système CRISPR et au moins 29 sous-types et d’autres encore qui n’ont pas été découverts
à ce jour13.

Les mécanismes CRISPR sont dérivés des procaryotes et ont été transformés dans le
but de manipuler, annoter et détecter des séquences d'ADN et d'ARN dans les cellules
vivantes de diverses espèces. Contrairement à d'autres méthodes, cette endonucléase n'a pas
de spécificité de séquence d'ADN. Après l'hybridation des séquences Spacers de l'ARNcr, une
séquence cible positionnée proche d'un motif Protospacer-Adjacent Motif (PAM), la nucléase
Cas va fendre l'ADN et ainsi cliver la séquence spécifique au niveau du locus PAM. L'édition
du génome par CRISPR/Cas, peut utiliser la jonction d'extrémités non homologues (Figure 6)
ou la réparation homologue dirigée (Figure 5) pour la réparation de l'ADN. Tous les types de
mécanisme CRISPR associés à des protéines Cas (CRISPR/Cas) s'appuient sur de l'ARN
CRISPR (ARNcr) ou dans certains systèmes, comme c’est le cas avec le système
CRISPR/Cas9, un ARN guide (ARNg) apportant une spécificité au système13.

b. CRISPR/Cas9 : CRISPR de type 2 

C’est seulement en 2012 que le mécanisme CRISPR/Cas9, une méthode de


modification de l’ADN multi-fonctionnelle, a été découvert chez Streptococcus pyogenes.
Révélé par J. DOUDNA et E. CHARPENTIER, ce système utilise l’endonucléase Cas9. En
effet, la spécificité est médiée par deux ARNs non-codants : un crARN contenant des
séquences guides des nucléases et un tracARN transactivateur complémentaire à la séquence
répétée. Ceci forme un complexe que l’on désigne d'ARN guide spécifique étant
complémentaire de la séquence cible, reconnaissant 20 paires de bases. Pour une application
dans la recherche scientifique, une chimère de ces deux ARNs a été créée dans le but de
rendre le processus plus facile d’utilisation. De ce fait, les sites cibles ne sont finalement
limités que par un motif PAM localisé à l’extrémité 5’ et formé de trois nucléotides 3’ – NGG
– 5’ (Figure 16).

Figure 16 :
Schématisation du mécanisme de CRISPR/Cas9
avec reconnaissance du motif PAM par l’enzyme et
hybridation de la séquence d’ARNg sur l’ADN
cible engendrant une cassure double brin.

https://www.cell.com/trends/genetics/fulltext/
S0168-9525%2820%2930098-6

L’enzyme Cas9 possède 2


domaines enzymatiques : un domaine
HNH permettant de cliver la séquence
d’ADN complémentaire qui s’associe avec
l’ARN guide et un domaine appelé RuvC1
qui clive la séquence non complémentaire
(Figure 17). Le résultat de l’activité
d’endonucléase de la protéine Cas9 du
système CRISPR est une cassure double
brin de l’ADN qui a lieu entre la séquence
reconnue et le motif PAM localisé en 5’
provoquant le silence du gène viral. La

Figure 17 :
Schématisation de l’enzyme Cas9 et des domaines de clivage RuvC1 et HNH coupant respectivement l’ADN
hybrider à l’ARNg et l’ADN complémentaire. Mise en évidence de la cassure double brin entre la séquence de
reconnaissance de 20 nucléotides et le motif PAM.
https://blog.hoelzel-biotech.com/2017/09/19/crispr-cas9-methode/
séquence 3’ – NGG – 5’ permettant la reconnaissance a été améliorée
vers d'autres motifs tels que GAA ou encore GAT. Ces variantes
permettent de devenir de plus en plus spécifiques et pour un plus grand
nombre de région20.
Au cours de la dernière décennie, la technologie CRISPR/Cas9 a transformé
l'ingénierie du génome. La découverte et le développement de cette méthode a permis
d’aboutir rapidement à un large éventail d'application d'ingénierie génétique qui est largement
utilisée de nos jours en raison de sa simplicité. Modifié et assimilé, le système Cas9 a été
conçu de telle façon qu'il soit possible de réaliser des délétions comme des insertions. Mais on
retrouve d’autres types de systèmes CRISPR dont l’utilisation est différente mais
l’aboutissement est, en règle générale, relativement similaire13.

c. CRISPR/Cas12a :

Comme Cas9, le système CRISPR/Cas12a comporte une endonucléase de la classe 2.


Cela signifie qu’elle ne nécessite qu’une seule protéine effectrice. Cependant, contrairement à
Cas9, Cas12a génère une coupure cohésive avec un surplomb en 5’ au niveau du site cible de
l’ADN permettant ainsi d’insérer des fragments dans une orientation précise dépendante de la
région où a lieu le clivage et du motif reconnu. De plus, cette endonucléase n’utilise pas
d’ARNtrac et a la possibilité de cliver des ARNcr dans le but de créer son propre ARNcr.
Cette particularité permet au système CRISPR/Cas12a une utilisation d’un seul ARNcr
personnalisé, lorsque plusieurs ARNcr sont en jeu, facilitée. Extrait de Acidaminoccocus spp
ou encore de Lachnospiraceae spp, la séquence des différents orthologues retrouvée dans
différentes espèces possède des séquences PAM de type 5' – TTTV – 3’ où V = A,C ou G). Ce
motif a été soumit à l'ingénierie génétique pour augmenter le nombre de variants et ainsi la

Figure 18 :
Schéma permettant de comparer, de mécanisme de type I : le système CRISPR/Cas9 et le système CRISPR/Cas12a. Pour
chaque cas, la position du clivage est exposé par rapport au site de reconnaissance PAM.
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/fa/Cas12a_vs_Cas9_cleavage_position.svg

spécificité21. (Figure 18).


d. Autres mécanismes CRISPR :
i. CRISPR/Cas3 cascade :
Nous présentons ici un système de classe 1 qui comprend un domaine multimérique de
ciblage de l’ADN appelé cascade associé à l’endonucléase Cas3. Ce type de système est le
plus retrouvé dans la nature et de même que pour les 2 mécanismes présentés précédemment,
le système CRIPSR/Cas3 Cascade doit d’abord fixer l’ADN grâce à la reconnaissance d’un
Spacer et d’un motif PAM. Le recrutement de Cas3 génère, quant à elle, une cassure sur un
seul des brins à partir de l'activité endonucléase 3'-5' de l’enzyme (Figure 19). Le mécanisme

Figure 19 :
Schéma représentant l’enzyme Cas 3 Cascade sa reconnaissance
et mode de coupure sur le brin d’ADN.
de CRISPR/Cas3 permettant la coupure sur un seul des brins est utilisé comme outil
antimicrobien dirigeant vers une dégradation du génome21.

ii. CRISPR/Cas13 :
Initialement appelé C2c2, le système
CRISPR/Cas13 est guidé par un ARN vers un ARN et non un ADN comme dans les cas vus
précédemment. CRISPR/Cas13 est un système de classe 2 type VI dans laquelle l’activation
de la protéine CRISPR est faite grâce à un ARN simple brin. La particularité principale du
type VI est la reconnaissance du motif permettant la fixation. En effet, dans la majorité des
cas, l’enzyme reconnaît non pas un motif PAM mais protospacer flanking sequence21 (PFS)
(Figure 20). Pour certaines Cas13, l’enzyme peut couper une seule base une fois que la
reconnaissance de l’ARN a eu lieu. Par exemple pour Cas13a, l'enzyme va couper les bases
de l’Uracile de l’ARN. Seulement, cette enzyme à ses limites et pour Cas13, le clivage des
ARN s'étend au ARN non ciblés à proximité une fois activé. Ce système a été utilisé dans des
cellules procaryotes, où l'effet de clivage des ARN proches a été observé, cependant cela n'a
pas été le cas dans les cellules eucaryotes. Le mécanisme d'activation n'est pour le moment
pas encore connu mais des pistes d’application de cette enzyme dans des cas cliniques
commencent à voir le jour comme pour les virus à ARN par exemple21.

Figure 20 :
Représentation schématique comparant le complexe CRISPR/Cas9 dont l’ADNg s’hybride à un ADN viral
double brin et le complexe de CRISPR/Cas13 s’hybridant à un ARN simple brin et reconnaissant un motif PFS.
https://link.springer.com/article/10.1007/s11248-021-00247-w/figures/2
Conclusion :

Le génie génétique est une technologie qui a révolutionné la biologie moléculaire en


permettant aux chercheurs de manipuler l'ADN d'un organisme selon des attentes plus ou
moins précises. Ces techniques ont permis de nombreuses avancées dans des domaines tels
que la médecine, l'agriculture ou encore la biotechnologie. Bien que l’on puisse constater une
nette évolution dans ces thématiques au cours des dernières années, les préoccupations
éthiques qui découlent des expérimentations, et notamment en ce qui concerne les risques de
manipulation génétique sur les organismes et les écosystèmes, rendent l’application de ces
méthodes controversée et plutôt réduite. Les avantages potentiels de ce domaine de recherche
ne sont, à ce jour, pas équitablement répartis, ce qui amène à soulever des questions de justice
sociale à travers le monde. Le génie génétique est une science pouvant potentiellement
résoudre de grands défis de notre époque à condition de respecter les réglementations en
vigueur qui, pour le moment, freine l’avancée dans les divers domaines du génie génétique.

En conclusion, nous avons vu au cours de cette revue différentes techniques de


modification du génome. Les mécanismes de transposition tels que de SB ou encore PiggyBac
sont une source de diversité génétique permettant des réarrangements génomiques essentiels à
l’évolution. Leur application a un potentiel dans la médecine et la recherche mais le
mécanisme nécessite encore d’être amélioré car il ne dispose pas d’un ciblage de régions. En
comparaison au transposon SB, les nucléases TALEs, ZFs ou encore celles de type CRISPR
permettent de modifier le génome à des endroits précis. Mais comme nous l’avons dit
précédemment, la spécificité des TALENs est plus facile à concevoir et à utiliser puisque les
domaines de liaisons ne se lient qu’à un seul nucléotide contre trois pour les ZFNs, ce qui
explique que les TALENs puissent être appliquées plus largement au génie génétique. Bien
que la précision des TALENs soit élevée et supérieure à celle des ZFNs, il y a toujours un
risque de modifications non intentionnelles et d'effets indésirables sur l'environnement et les
organismes. Toutes les méthodes que nous avons abordées ont leurs propres avantages et
inconvénients, mais la technologie la plus courante est le système CRISPR et en particulier
celui associé à l’enzyme Cas9. La méthode CRISPR/Cas9 offre de nombreux avantages par
rapport aux autres technologies de modification génétique, notamment sa simplicité et sa
rapidité d'utilisation.

En somme, la méthode CRISPR/cas9 comme toutes les autres sont des technologies
prometteuses dans le domaine de la biologie moléculaire mais leur utilisation se doit d’être
réglementée. Malgré les questions éthiques soulevées, il est important de continuer d’étudier
les différents génomes retrouvés dans la nature pour, peut être un jour, disposer d’un outil
encore plus efficace que CRISPR/Cas9.
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