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Siege Social : Avenue Léon MBA, Libreville Gabon

SOCLE COMMUN DE CONNAISSANCES ET DE


COMPÉTENCES
« LICENCE1 »
UE : DROIT

SUPPORT DE COURS
« INITIATION AU DROIT DU TRAVAIL »
DROIT DU TRAVAIL

Auteur Équipe pédagogique UNG


Date Travail effectué Mai 2023

Référence UNG_Support_de_Cours_Droit_du Travail


Diffusion Enseignants& Etudiants etStagiaires
Introduction Générale

Le droit du travail, objet de notre enseignement, fait partie intégrante de

l’ensemble disciplinaire constitué par le droit social. Cette branche du droit

privé, mais également très ouverte sur le droit public, englobe outre, le

droit du travail, le droit de la sécurité sociale.

Au demeurant, à l’époque contemporaine, le droit du travail qui vise la

régulation des rapports de travail entre salariés et employeurs, s’insère

désormais dans un cadre plus large que l’on appelle les politiques sociales.

Cette notion désigne l’ensemble des dispositifs publics par lesquels

s’organise la solidarité nationale à travers les différents régimes de

protection sociale, la formation professionnelle, les mécanismes divers

d’aide sociale (assurance-maladie, l’indemnisation du chômage, prise en

charge des personnes économiquement faibles, la dépendance etc). On y

inclut par ailleurs un certain nombre de politiques dites « transversales » :

politique d’insertion professionnelle des jeunes, des immigrés, des

handicapés, des femmes, politique de la ville, etc…)

Le contexte économique, social et idéologique dans lequel évolue le droit

du travail souligne son particularisme et explique ses fondements. De plus,


l’originalité du droit du travail, par rapport aux autres disciplines

juridiques, se manifeste par la diversité de ses sources et des institutions

spécialisées qui contribuent à son application.

Section 1 : Le particularisme du droit du travail

Ce que l’on qualifie habituellement de droit du travail désigne l’ensemble

des règles légales, réglementaires, jurisprudentielles et conventionnelles

qui s’appliquent aux rapports de travail subordonné. Ce rapport met en

évidence l’existence d’un profond déséquilibre entre, une partie forte,

l’employeur qui impose ses conditions et, une partie faible, le salarié, placé

dans une situation d’infériorité économique. C’est le particularisme même

de cette relation inégalitaire et l’ambition d’y apporter des tempéraments

qui éclairent la notion de droit du travail, justifient ses fonctions et

expliquent les caractères intrinsèques de la matière.

§1/La notion de droit du travail

Le droit du travail ne régit pas l’ensemble des activités humaines de

production de bien ou de service donnant lieu à une rémunération ou à

une contrepartie monétaire.


Il y a deux manières de décrire ce qu’est le droit du travail, donc de

délimiter son champ matériel : en préciser l’objet et fixer son domaine

d’application.

A/ L’objet du droit du travail

Le droit du travail organise les rapports de travail au sein de l’entreprise.

Son objet est donc de réglementer, de réguler le travail humain qui

recouvre différentes modalités et a considérablement évolué par rapport à

son acception originelle. Au commencement se trouve la Bible où on

apprend dans la Genèse que pour n’avoir pas respecté la loi divine, Adam

et Eve furent chassés du jardin d’Eden et condamner à travailler la terre

pour se nourrir. Le terme travail dérive d’ailleurs du mot latin tripalium. Il

a d’abord désigné l’attelage qui servait à immobiliser les animaux en vue de

les ferrer ou les soigner, ensuite, un instrument de torture à trois pieds.

Ainsi classiquement, le travail est associé à ma souffrance, perçu comme

une tâche manuelle, un véritable labeur pour ne pas dire une punition ou

une malédiction divine.

De nos jours, le terme travail regroupe désormais toute activité humaine,

physique ou intellectuelle, accomplie pour obtenir les moyens des moyens

de subsistance. L’accomplissement d’une telle activité est certes, une

nécessité sociale et économique, mais c’est aussi l’exercice d’une liberté,


d’un droit fondamental. C’est dans cette logique que la constitution

gabonaise consacre dans son article 1-7° le devoir pour chaque citoyen de

travailler et le droit d’obtenir un emploi. Le constituant exprime ainsi le

principe de la liberté du travail1. Cette appréhension du travail permet de

mieux cerner le domaine du droit du travail.

B/ Le domaine du droit du travail

Le droit du travail ne s’intéresse qu’aux relations de travail dépendant ou

subordonné donc matérialisées par un contrat de travail régi par le code

du travail. Mais Toute activité humaine au service d’un tiers n’est pas

nécessairement une activité salariée.En effet, le droit du travail ne régit

que le travail dépendant ou subordonné par lequel le salarié exerce une

activité sous la direction et l’autorité de l’employeur moyennant une

rémunération. C’est ce sens du mot travail qui sera retenu dans le cadre de

cet enseignement. Il ne vise que les relations de travail salarié relevant du

droit privé. En conséquence, les salariés dépendant d’un statut de droit

public ne sont pas assujettis au droit du travail même si rien ne s’oppose à

ce que certains agents soient liés à l’administration par un contrat de

travail de droit privé2.

1 T. Revet, « La liberté du travail », in Droits et libertés fondamentaux, sous la direction de R. Cabrillac, M-A Frison-Roche, T. Revet,
2e édition Dalloz 1995, p. 427 et s ; A. Arseguel et B. Reynès, « Le refus d’occuper un emploi », in Analyse juridique et valeurs en droit
social, Etudes offertes à J. Pélissier, Dalloz 2004, p. 1 et s.
2 F. Debord, « Les frontières de l’application du droit public et du droit privé au travailleur subordonné », in Analyse juridique et

valeurs en droit social, Etudes offertes à Jean Pélissier, Dalloz 2004, p. 181 et s.
C’est donc la qualification du contrat de travail qui détermine le champ du

droit du travail. En application de ce critère du lien de subordination, sont

exclus du champ du droit du travail : les travailleurs indépendants

(commerçant, agriculteur, artisan…), les professions libérales (médecin,

avocat, architecte…).

Cependant les frontières du droit du travail peuvent être rendues

perméables en raison de la qualification donnée par les parties à leurs

relations. Ainsi, certaines entreprises cèdent souvent à la tentation

d’utiliser du personnel en leur attribuant un statut d’indépendant. Le but

recherché c’est de payer la prestation de travail en dessous du SMIC ou

s’affranchir du paiement des charges sociales, ou faire travailler ce

personne au-delà de la durée légale de travail sans avoir à payer d’heures

supplémentaires ou encore pour ne pas avoir à payer des indemnités de

licenciement en cas de rupture de la relation de travail. Il en résulte une

volonté manifeste d’exclure du salariat certaines catégories de travailleurs

et ainsi à faire apparaître de faux indépendants.

En sens inverse, il peut aussi exister ce qu’on appelle des faux salariés. En

d’autres termes, des travailleurs de haut niveau dont les spécialités sont

très recherchées ou bien encore les dirigeants sociaux qui se font recruter
en qualité de salarié alors même qu’ils ne sont pas dans une situation

juridique de subordination. L’objectif ici c’est de bénéficier des avantages

sociaux et fiscaux qu’offre le statut de salarié.

Face à ce risque de dénaturation de la relation contractuelle et du statut

des personnes engagées, la cour de cassation française a indiqué dans

l’arrêt LABANE du 19 décembre 2000 que : « l’existence d’une relation de

travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la

dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de

fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs ». Trois

enseignements se dégagent de cette jurisprudence.

Le premier c’est que la qualification ne dépend pas de la volonté exprimée

des parties. Ces dernières ne peuvent s’accorder pour se soustraire au

droit du travail qui est un droit d’ordre public. On dit que La qualification

du contrat de travail est indisponible.

Le deuxième enseignement c’est que l’application des règles du droit du

travail ne dépend pas de la dénomination du contrat qui lie les parties et

qu’ils ont pu improprement qualifier de contrat de location, contrat de

prestation de services, contrat d’entreprise ou encore de contrat de société


en participation. Il appartient au juge de restituer à la relation en cause sa

véritable qualification de contrat de travail et appliquer aux parties les

règles du droit du travail.

Enfin, le troisième enseignement c’est que le juge saisi doit apprécier les

conditions réelles d’exécution de la prestation de travail pour vérifier si

elles révèlent l’existence d’un rapport de subordination et notamment s’il

en résulte des ordres, des directives ou d’autres indices mettant en exergue

la réalité du lien de subordination.

Pour ordonner la masse des dispositions qui composent le droit du travail,

on propose classiquement de distinguer les relations individuelles de

travail et les relations collectives de travail. Mais cette distinction manque

de cohérence. D’abord elle semble tracer une ligne de démarcation nette

entre l’individuel et le collectif, alors qu’en fait ils sont étroitement mêlés.

Pae exemple un licenciement massif associe les mécanismes de droit dit

collectif, comme l’intervention des représentants du personnel et des

mécanismes dits de droit individuel, comme la procédure de contestation

de la rupture envisagée. Ensuite cette distinction entretient l’illusion qu’il

existe des relations collectives de travail, alors que ces relations ne sont
que des rapports de négociations, d’affrontement ou de coopération et non

des rapports de travail entre employeurs et représentants des salariés.

Aussi pour cerner l’étendue de la matière, convient-il plutôt de distinguer :

- Le rapport de travail, ou rapport dans le travail, qui découle du

contrat de travail et concerne toutes les règles de formation, d’exécution et

de rupture du contrat de travail : c’est donc l’étude des normes et principes

applicables aux relations interpersonnelles entre le salarié et son

employeur, celles qui sont individualisables.

- Les relations professionnelles qui regroupent les règles qui

concernent les dispositifs par lesquels la parole des salariés est portée, la

défense de leurs intérêts face à l’employeur ou à des groupements

d’employeurs : l’action syndicale, la représentation du personnel dans

l’entreprise et la négociation collective.

- Entre les deux, on cite la discipline de travail qui regroupe les règles

relatives à l’organisation collective du travail (santé et sécurité des

travailleurs, règlement intérieur, aménagement du temps de travail.

La discipline est collective mais ses effets sur les salariés pris

individuellement sont très sensibles.


§2/Les fonctions et les caractères du droit du travail

Les fonctions assignées au droit du travail et ses caractères sont une

composante essentielle de son particularisme comme discipline juridique.

A/ Les fonctions du droit du travail

Il s’agit de répondre à la question de savoir à quoi sert le droit du travail ?

La fonction traditionnelle assignée aux règles du droit du travail reste

incontestablement la protection des travailleurs, considérés comme la

partie faible dans la relation de travail ; protection à la fois physique et

juridique contre le pouvoir patronal. Certains auteurs affirment même qu’il

s’agirait là de l’essence du droit du travail, sa raison d’être.Cette protection

consiste à assurer au salarié des conditions minimales d’hygiène et de

sécurité au travail, les garanties de sa rémunération, la stabilité de son

emploi grâce à l’encadrement de la rupture du contrat de travail ainsi

qu’une participation à l'élaboration et à l'application du droit du travail.


Depuis quelques années, émerge une autre fonction du droit du travail,

pour les chefs d’entreprises et ceux qui les conseils, à savoir qu’il peut être

utilisé comme une technique de gestion de l’entreprise. Il offre en effet des

ressources, des opportunités pour mieux organise et rentabiliser la

relation de travail : aménagement du temps de travail, recours à l’intérim,

licenciement économique, gestion rationnelle du personnel avec des

statuts différents, meilleure répartition des tâches, organisation des

services…

Il ne faut pas oublier que malgré son côté contraignant, le droit du travail

légitime l’existence d’un pouvoir de l’employeur sur le salarié à telle

enseigne qu’il peut modifier unilatéralement, à sa guise et dans son intérêt,

les conditions de travail du salarié.

Le droit contemporain du travail s'orienterait donc, de leguelata comme de

legueferenda, vers la protection de l'entreprise. Les chefs d’dentreprises et

certains auteurs estiment que le droit du travail devrait assurer la

performance, la croissance, la compétitivité de l'entreprise en allégeant ou

en assouplissant ses charges grâce à la notion de flexibilité, c’est à dire

une souplesse accrue au profit de l’employeur, signe d’une ambivalence de


ce droit, désormais apte à prendre aussi en compte les intérêts de

l’entreprise

Finalement qui veut-on protéger ? S'agit-il d'offrir plus de flexibilité aux

employeurs ou de défendre l'emploi ? Certains diront que le second objectif

dépend du premier. Le débat reste ouvert et empiète sur les caractères du

droit du travail.

B/ Les caractères du droit du travail

Le droit du travail est marqué par l’existence de conflits d’intérêts qui

résultent de rapports de force dont le point d’équilibre est par nature

mouvant. Ce qui confère au droit du travail un caractère évolutif,

dynamique.

Car, il organise la vie quotidienne des travailleurs et est influencé par la

situation économique, politique, sociale, qui est instable par nature. Il se

transforme et progresse sous l'impulsion des facteurs techniques,

économiques et sociaux. Il est un instrument de paix sociale car il

influence le mode de vie du salarié (salaire, durée du travail, âge de la

retraite etc..).
Le droit du travail est marqué du sceau de l’ordre public3. Ce caractère

d’ordre public découle de l’article 10 du code du travail selon lequel « toute

renonciation, limitation ou cession par voie d’accord ou autre des droits

reconnus aux travailleurs par le présent code est nulle et de nul effet ».

L’alinéa 2 du même texte déclare nul et de nul effet le licenciement d’un

salarié intervenu en raison de l’exercice d’un droit légalement consacré.

Le caractère d’ordre public du droit du travail se manifeste l’existence d’un

droit pénal du travail. De la sorte, le non-respect de nombreuses

dispositions du code du travail donne lieu à des sanctions pénales. Par

exemple, l’interdiction du travail forcé ou obligatoire édictée par l’article 4

du code est assortie d’une sanction pénale prévue par l’article 16. Il en est

de même de l’obligation faite à chaque employeur de délivrer au salarié

quittant l’entreprise un certificat de travail. L’employeur qui ne s’exécute

pas s’expose à une sanction pénale prévue par l’article 80 du code.

Le droit du travail est un droit de progrès social en ce sens qu’il admet

qu’une norme inférieure déroge à une norme supérieure, lorsqu’elle est

plus favorable aux salariés que celle-ci.. C’est ce que l’on appelle le

principe de faveur, prévu par l’article 13 du code du travail.

3 F. Gaudu, op.cit, p. 363 et s.


Ce principe commande, en cas de conflits de normes, d’appliquer non pas

la norme hiérarchiquement la plus élevée, conformément à la hiérarchie

des normes, mais celle qui est plus avantageuse pour le salarié4. Ce qui

permet notamment aux conventions collectives d’améliorer le statut légal :

la loi l’emporte lorsque le législateur ne fixe pas de minima mais impose

plutôt une règle. A contrario, la convention collective ne peut l’emporter sur

la loi que lorsque celle-ci fixe des minima. L’accord collectif peut alors

consentir au salarié des avantages supérieurs qui primeront alors les

minima légaux. Lorsque des avantages de même finalité sont consentis au

salarié par des textes différents, le principe de faveur conduit non pas au

cumul des avantages mais à l’application de l’avantage le plus favorable.

Par contre, le salarié cumule les avantages n’ayant ni le même objet ni la

même finalité.

Cette possibilité de dérogation « in favorem » s’inscrit dans la logique de

l’ordre public social. Elle a été érigée par la jurisprudence en principe

général du droit, mais semble bien dépourvue de valeur constitutionnelle.

4A. Jeammaud, « Le principe de faveur. Enquête sur une règles émergente », Dr. soc 1999, p. 115 et s ; J. Pélissier, « Existe-t-il un
principe de faveur en droit du travail ? », in Mélanges M. Despax, Presses Universitaires des sciences Sociales de Toulouse, 2002, p.
389 et s.
Outre l’application de la norme la plus favorable, le principe de faveur

conduit aussi à retenir l’interprétation la plus favorable au salarié. La mise

en œuvre de ce principe suppose un doute dans l’interprétation des

dispositions légales, réglementaires ou conventionnelles. Dans ce cas,

l’article 12 du code du travail invite le juge à retenir l’interprétation la plus

favorable au salarié.

Le juge gabonais applique ce principe même dans le cas où l’existence du

contrat de travail suscite la discussion. (voir arrêt TPOM)

Le droit du travail, bien que bénéficiant de l'apport des disciplines

juridiques telles que le droit des obligations, le droit des personnes et des

incapacités, le droit administratif et le droit pénal, est un droit autonome.

Il met en œuvre des techniques originales qui dérogent aux principes du

droit civil. Il a ses propres concepts et surtout ses propres fondements.

Section 2 : Les fondements du droit du travail

Le droit du travail, à travers ses règles, ses principes, ses controverses et

son sens, ne peut être véritablement appréhendé sans connaître l’arrière

fond conceptuel et idéologique qui le sous-tend. Ce qui conduit à l’étude de

ses fondements tant historiques que théoriques.


§1/ Les fondements historiques

Le droit du travail, actuellement applicable au Gabon, est le fruit d’une

longue évolution historique qui puise ses racines dans le statut du travail

dans la France, de l’antiquité à l’ancien régime, et dans les colonies

d’Afrique.

On date à peu près l’apparition timide du droit moderne du travail autour

du milieu du 19ème siècle, après la révolution industrielle et le

développement de la classe ouvrière, qualifiée de prolétariat ou nouveau

salariat. Il est cependant important de situer dans le temps, en France

comme au Gabon, les grandes évolutions à l’origine du droit contemporain

du travail.

A/ Le statut du travail en France et dans les colonies d’Afrique

1/ En France de l’antiquité à la révolution française

Le droit du travail est d’apparition relativement récente. Contrairement à

d’autres disciplines de droit privé, il ne prend pas sa source en droit

romain. Certes, le droit romain connaissait le contrat de louage de services,


mais l’utilisation de ce contrat était rare, la majeure partie de la main

d’œuvre étant fournie par les esclaves. Au moyen âge le servage remplace

l’esclavage et l'homme libre peut "louer son travail" conformément aux

usages en vigueur.

Dans l’ancien régime, les relation de travail commencent à se formaliser et

s’intègrent dans la vie sociale. Dans le monde rural, les ouvriers louent

leurs services auprès d’un maître. Dans les villes, le travail s’exécute dans

le cadre très réglementé des corporations et autres confréries.

Après la révolution française de 1789, on assiste à la libéralisation du

travail et l’interdiction des groupements de défense d’ouvriers.

-- Le décret d'Allarde des 2 et 17 mars 1791 supprime le régime des

corporations et pose le principe fondamental de la liberté du travail. Quant

à la loi le Chapelier des 14et 17 juin 1991, elle interdit purement et

simplement les groupements et les coalitions de plus de 20 personnes. Les

travailleurs sont isolés. Le livret ouvrier est créé par une loi de 1803. Il

permet de contrôler les déplacements et à veiller à l’exécution du contrat

de travail. Il est obligatoire et toutes les appréciations de l'employeur sur

son travailleur y figurent.


Le code civil de 1804 parachève l’œuvre libérale de la révolution française

et soumet les relations de travail à la liberté contractuelle. Il consacre le

contrat de louage de services (Art. 1708 et 1710). En application du

principe de l’autonomie de la volonté, le contenu du contrat est librement

déterminé par les parties.

2/ Dans les colonies d’Afrique

Avant et pendant la colonisation, il n’existait pas dans les pays

africains francophones de règles encadrant les rapports entre employeurs

et employés.

Le régime en vigueur dans les colonies d’Afrique était marqué par

l’esclavage qui a été légalisé par les puissances coloniales parmi lesquelles

la France qui adopta, en 1685, le Code Noir (Colbert). Ce codecomportait

cependantdes prémissesdu droit du travail puisque les esclaves

bénéficiaient du repos dominical et de la limitation de la journée de travail.

De même, le Code interdisait de prononcer une peine de mort ou

d’emprisonnement sans jugement. Mais force est de constater que ces

rudiments du droit du travail n’avaient pour but que de permettre le

rendement maximum des esclaves.


L’esclavage fut aboli dans les colonies par la convention de Bruxelles de

1889-1890. En AOF et en AEF, l’esclavage prit officiellement fin avec le

décret du 12 décembre 1905 modifié par le décret du 8 août 1920. Mais

par la suite le régime du travail forcé fut instauré dans les colonies

d’Afrique. C’est l’OIT qui, par trois conventions, parvint à juguler le travail

forcé. Il s’agit de :

- la convention n° 50 du 20 juin 1936 qui réglemente le recrutement

des travailleurs. Cette convention vise à favoriser l’offre spontanée de

main d’œuvre ;

- la convention n0 64 du 27 juin 1939 qui réglemente les contrats à

long terme. Cette convention permet d’éviter que le travailleur

n’engage ses services à vie ;

- la convention n° 65 du 27 juin 1939 qui réglemente les sanctions

pénales pour manquements au contrat de travail. Il s’agit d’éviter que

l’employeur n’applique des sanctions discrétionnaires.


L’action de l’OIT fut relayée par l’ONU qui condamna fermement le travail

forcé dans la charte des Nations Unies. Il convient de signaler le décret du

18 septembre 1936 qui réglementa le travail des femmes et des enfants.

Jusqu’en 1952, les rapports de travail dans les colonies étaient régis par le

code civil de 1804 qui n’accordait aucune protection particulière aux

ouvriers contre les abus des employeurs. Par la suite, l’OIT élabora un

code social international en faveur des populations dépendantes. Ces

populations bénéficièrent aussi d’une certaine prise de conscience de la

métropole qui autorisa les syndicats et, finalement proclama le principe

général de non-discrimination.

B/ La naissance du droit du travail

A partir de 1830 le terme de « socialisme » se répand pour dénoncer l’écart

qui se creuse entre revenue du travail et ceux du capital. Cette nouvelle

qui met en évidence l’exploitation accrue et l’extrême pauvreté de la classe

ouvrière est désignée sous l’expression de question sociale. La question

sociale résulte de la conjonction du libéralisme et de la révolution

industrielle

Elle se révèle avec la coïncidence entre la classe ouvrière et le groupe

économique et sociologique des indigents, des assistés. Le droit du travail,


et plus globalement le droit social, s’est attaché à étudier cette coïncidence

et à apporter une réponse à la question sociale.

C’est dans ce contexte qu’intervient la première loi protectrice des

travailleurs : la loi du 22 mars 1841 qui limite le travail des enfants dans

les usines : l'âge d'admission (huit ans !) Et la durée du travail des enfants

dans l'industrie (huit heures par jour pour les enfants de 8 à 12 ans... 12 h

pour les enfants de 12 à 16 ans). Elle sera suivie par la loi du 19 mars

1874 qui tente de renforcer la protection des femmes et des enfants dans

l'emploi : les enfants ne peuvent travailler, sauf dérogation, avant l’âge de

12 ans, les filles mineures de 16 à 21 ans ne peuvent travailler plus de 12

heures par jour.

La loi du 25 mai 1864 consacre l’abolition du délit de coalition et la

reconnaissance du droit de grève qui constitue une étape cruciale vers la

création d'un véritable droit du travail. Certains auteurs ont même estimé

que le droit du travail est réellement né en 1864. D’autres font remonter la

naissance du droit du travail à la loi du 21 mars 1884 qui consacre la

liberté syndicale en reconnaissant aux ouvriers le droit de créer des

syndicats.
La loi du 15 décembre 1952 : adoption du code du travail des Territoires

d’Outre-Mer. Ce code s’appliquait immédiatement à tous ceux qui, dans les

TOM, était liés à un employeur par un lien de subordination juridique.

Le 4 janvier 1962 adoption du premier code du travail gabonais5.

Largement inspiré du code de travail de 1952, il sera remplacé par le code

de 19786. Un nouveau code du travail sera voté le 21 novembre 19947 et

modifié par une loi du 12 octobre 2000.

§2/ Les fondements théoriques

Globalement trois grandes doctrines influencent la conception des rapports

de travail.

A/La théorie révolutionnaire

La théorie révolutionnaire repose sur la négation ou la suppression du

salariat, et donc du patronat, car cette dualité révèle la soumission d’une

classe à une autre. Dans cette logique, par ce que le droit du travail

légitime cette soumission, il doit être aboli.

5 Loi n° 88/62 du 4 janvier 1962, Journal Officiel numéro spécial, 1er mars 1962.
6 Loi n° 5/78 du 1er juin 1978, Journal Officiel, n° 25 du 28 novembre 1978.
7 Loi n° 3/94 du 21 novembre 1994 portant code du travail, modifiée par la loi n° 12/2000 du 12 octobre 2000 portant modification

de certains articles du code du travail.


Toutefois, certains auteurs, du courant révolutionnaire, bien que fidèles à

la conception marxistes de la lutte des classes, défendent l’existence du

droit du travail considéré comme un ensemble d’acquis, d’avantages

conquis de haute lutte par la classe ouvrière sur le patronat et l’Etat.

B/La théorie libérale

Dans une conception libérale, le Droit du travail est jugé trop lourd, trop

rigide. On souhaite donc limiter son emprise à quelques règles de base en

privilégiant la capacité contractuelle des salariés et des employeurs à

négocier des conventions ou accords collectifs sectoriels ou d’entreprise. Il

s’agit d’alléger la contrainte que constitue, selon les tenants de cette

idéologie libérale, la réglementation applicable aux relations de travail

salarié. Ce qui passe par la réduction des règles d’ordre public, la

limitation de l’intervention de l’Etat, l’aménagement du temps de travail, la

réduction du salaire direct ou indirect, la possibilité pour chaque

entreprise d’adapter la législation du travail à sa situation personnelle et

surtout la simplification, la facilitation et la sécurisation de la rupture du

contrat de travail. Au centre de cette idéologie se trouve naturellement le

respect de la liberté individuelle, celle de l’employeur et une incidence

économique positive matérialisée notamment par l’augmentation des

embauches donc la baisse du chômage de masse.


Une doctrine libérale plus récente considère que le droit du travail

constitue un coût pour l’entreprise en ce sens que ses multiples

applications légale, réglementaire et jurisprudentielle, toujours incertaines,

contrarient les prévisions d’investissement, de profit et de rationalisation

de l’employeur. L’idée dominante prônée par ce courant néo libéral consiste

à limiter le pouvoir du juge, notamment lorsqu’il contrôle le licenciement

pour motif économique. IL s’agit là encore de favoriser et de sécuriser la

rupture du contrat de travail. De nombreuses manifestations de cette

doctrine existent en droit français. Il suffit de citer une loi du 14 juin 2013

qui écarte l’intervention du juge judiciaire dans le contrôle des

licenciements ; une loi du 18 janvier 2008 qui institue la rupture

conventionnelle du contrat de travail assortie d’une procédure

d’homologation et plus récemment les lois dites MACRON et Travail dans

leur objectif d’instaurer des plafonds d’indemnisation en matière de

licenciement.

Il y a là une ambition contemporaine de faire du droit du travail non pas

seulement un instrument de régulation des rapports de travail entre un

employeur et ses salariés, mais surtout un outil au service de la fluidité, de

la flexibilité du marché du travail.


C/La théorie du bien commun

C’est en réalité un ensemble de doctrines qui conçoivent le rapport de

travail comme un rapport de coopération, où les intérêts des travailleurs et

des patrons sont convergents. L’entreprise sort du stéréotype de la lutte

des classes, pour apparaître comme une entité pérenne dans laquelle les

différents acteurs poursuivent un but commun. Cette théorie ses sources

dans plusieurs courant de pensées : la doctrine sociale de l’église, la

théorie de l’institution défendue par des juristes de droit public,

notamment Maurice HAURIOU et la pensés juridique allemande du début

du 20ème siècle qui a beaucoup influencé l’un des fondateurs du droit du

travail, Paul DURAND.

Selon certaines variantes de cette idéologie, le pouvoir au sein de

l’entreprise est perçu comme un attribut naturel, nécessaire à son

fonctionnement et indispensable au bien commun. On présente la

consécration jurisprudentielle du pouvoir du chef d’entreprise, notamment

le pouvoir de sanctionner considéré comme inhérent à cette qualité,

comme une manifestation éphémère de cette doctrine du bien commun.


Assez récemment, la conception retenue par certains arrêts de la Cour de

cassation française de l’intérêt de l’entreprise, ni intérêt des salariés, ni

celui des associés, a semblé constituer une illustration des doctrines du

bien commun.

Section 3 : Les sources et les institutions du droit du travail

Le cadre théorique des sources du droit du travail est composé de deux

modèles. Le modèle de Kelsen : Le droit du travail est du droit positif. Il

repose sur la hiérarchie des normes selon le système pyramidale de

KELSEN.

Le modèle de Kelsen va être enrichi par le modèle de Santi Romano (théorie

de la pluralité des ordres juridiques). Contrairement à Kelsen, Santi

Romano voit du droit partout. Il reconnaît les ordres juridiques

internationaux et paraétatiques (le monde sportif, l'ordre canonique, ...).

Cette théorie permet de comprendre le droit du travail. Dans un premier

temps, les ordres juridiques sont étanches et, dans un second temps, il y a

un phénomène de réception des ordres juridiques paraétatiques

(conventions collectives de travail) par l’ordre juridique étatique.


L’articulation de ces deux modèles fait donc apparaitre trois catégories de

sources : les sources internationales ou supranationales, les sources

internes ou nationales d’origine publique et les sources internes ou

nationales d’origine privée ou professionnelle.

§1/Les sources internationales

Les sources internationales, qui sont une composante à part entière du

droit du travail, émanent principalement de l’OIT, mais également des

instruments juridiques internationaux classiques.

A/ Le droit du travail des instruments juridiques internationaux

Les instruments des Droits de l’homme influencent considérablement

l’élaboration du droit du travail. Même s’ils ne visent pas uniquement les

relations de travail, ils contiennent des droits fondamentaux applicables à

tous les travailleurs.

Il convient de citer, par exemple, le Pacte international relatif aux droits

civils et politiques adopté par l’assemblée générale de l’ONU le 16 décembre

1966 qui consacre le principe de l’égalité et de non-discrimination, le droit

au travail, la liberté d’organisation et de négociation collective.

Le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels

adopté le même jour avec en vue de mettre en œuvre les principes et droits
énoncés dans la Déclaration Universel des droits de l’Homme du 10

décembre 1948 :

-droit à travailler dans des conditions justes et favorables - droit à la

sécurité sociale - droit à un niveau de vie décent - droit de jouir du

meilleur état de santé physique et mentale possible

La charte africaine des droits de l’homme et des peuples adoptée le

27juin1981 à Nairobi (Kenya) lors de la 18e Conférence de l'Organisation

de l’unité africaine. Elle est entrée en vigueur le 28 octobre 1986 et a été

ratifiée par le Gabon le 20 février 1986.

Article 15 :

« Toute personne a le droit de travailler dans des conditions équitables

et satisfaisantes et de percevoir un salaire égal pour une travail

égal »8.

Article 16 :

« Toute personne a le droit de jouir du meilleur état de santé

physique et mentale qu’elle soit capable d’atteindre »9.

8 A. Jeammaud, « Du principe d’égalité de traitement des salariés », Dr. soc 2004, p. 694 et s ; T. Aubert-Monpeyssen, « Principe « à
travail égal, salaire égal » et politiques de gestion des rémunérations », Dr. soc. 2005, p. 18.
Il oblige aussi les Etats signataires à s’engager à prendre toutes les

mesures nécessaires à la protection de la santé des populations et de leur

assurer l’assistance médicale en cas de maladie.

Mais sur le plan mondial il existe une organisation, rattachée à l’ONU, et

entièrement consacrée au travail, c’est l’organisation internationale du

travail (l’OIT) qui constitue la principale source supranationale en droit du

travail.

B/ Le droit du travail de l’OIT

L’OIT a été créée le 28 juin 1919par le traité de Versailles qui a institué la

SDN (Articles 387 à 427). L’OIT est composée de :

La Conférence internationale du Travail : Deux délégués

gouvernementaux, un délégué des employeurs et un délégué des

travailleurs représentent chaque Etat Membre. La Conférence élabore et

adopte les normes internationales du travail et constitue un forum de

discussion pour les questions clés en matière de travail et de problèmes

sociaux. Elle élit le Conseil d’administration.

9 A. Emane, « La nécessité d’une meilleure prise en compte de la santé et de la sécurité au travail », inédit.
Le Conseil d’administration : Le Conseil d’administration est l’organe

exécutif de l’OIT et se réunit trois fois par an à Genève. Il prend des

décisions relatives à la politique de l’OIT. Il établit le programme et le

budget qu’il soumet ensuite à la Conférence pour adoption. Il élit aussi le

Directeur général. Le Conseil d’administration de l’OIT est composé de 28

membres gouvernementaux, 14 membres employeurs et 14 membres

travailleurs.

Le Bureau international du Travail : Le Bureau international du Travail

est le secrétariat permanent de l’Organisation internationale du Travail. Il

met en œuvre les actions de l’OIT sous le contrôle du Conseil

d’administration et sous la direction d’un directeur général, élu pour un

mandat renouvelable de cinq ans.

L’œuvre normative : Deux types de normes : recommandations et

conventions. Les recommandations : textes se contentant de fixer des

objectifs, sans obligation juridique de mise en œuvre. Les États ont

seulement l'obligation de transmettre le texte de la recommandation, dans

un délai d'un an à compter de son adoption, à l'autorité compétente pour

légiférer. Ils doivent également établir un rapport sur la législation et les


pratiques en vigueur concernant la question qui fait l'objet de la

recommandation. Les conventions : issues des débats portant sur des

propositions émanant du Conseil d'administration et adoption à la majorité

qualifiée des membres.

Les Etats membres ont l’obligation de proposer les conventions adoptées à

l’organe national compétent pour la ratifier et ce dans un délai d’un an. On

compte, à ce jour, près de 190 conventions.

L’OIT a fait adopter une déclaration le 19 juin 1998 qui indique que être

membre de cette organisation implique d’adhérer aux principes et droits

fondamentaux au travail contenus dans 8 conventions de l’Organisation

Internationale du Travail (OIT).

Le Gabon a ratifié sept (7) des huit (8) conventions contenant ces

normes fondamentales du droit travail.

- La convention n° 29 sur le travail forcé de 1930, ratifiée le 14

septembre 1960.

- La convention n° 105 sur l’abolition du travail forcé de 1951, ratifiée

le 29 mai 1961.
- La convention n° 87 relative à la liberté d’association et la protection

du droit syndical de 1948, ratifiée le 14 octobre 1960.

- La convention n° 98 relative à l’organisation et à la négociation

collective de 1949, ratifiée le 29 mai 1961.

- La convention n° 100 sur l’égalité de rémunération de 1951, ratifiée le

13 juin 1961.

- La convention n° 111 concernant la discrimination à l’emploi et à la

profession de 1958, ratifiée le 29 mai 1961.

- La convention n° 182 sur les pires formes de travail des enfants de

1999, ratifiée le 28 mars 2001.

En revanche, le Gabon n’a pas ratifié la convention n° 138 sur l’âge

minimum de l’emploi de 1973.


A ces sources internationales, il faudra, dans un avenir proche, ajouter les

sources communautaires qui prendront la forme de l’Acte uniforme relatif

au droit du travail10.

§2/Les sources internes d’origine publique

Elles découlent de la hiérarchie des normes dans l’ordonnancement

juridique du Gabon.

A/La constitution

Il existe dans la constitution gabonaise des principes libéraux et sociaux

qui forment les bases d’un droit constitutionnel du travail11.

Ainsi, le préambule de la constitution proclame :

 le droit au travail (article 1 -7° selon lequel chaque citoyen a le devoir

de travailler et le droit d’obtenir un emploi). Il s’agit ici de l’exercice de

la liberté du travail en obtenant un emploi ;

10 J. Issa-Sayegh, « La problématique de la construction d’un droit du travail régional dans les pays africains de la zone franc »,
www.ohada.com/doctrine/ohadata D-02-26 ; « Questions impertinentes ( ?) sur la création d’un droit social régional dans les Etats
africains de la zone franc », www.ohada.com/doctrine/ohadata D-02-27 ; P. Kiemdé, « Intégration régionale et harmonisation du
droit social en Afrique : problèmes et perspectives », www.ohada.com/doctrine/ohadata D-05-54.
11 Sur l’ensemble de la question, voir X. Prétot, « Les bases constitutionnelles du droit social », Dr. soc 1991, p. 187 ; G. Lyon-Caen,

« La jurisprudence du Conseil constitutionnel intéressant le droit du travail », D. 1990. chron, p. 289 et s.


 le principe de non-discrimination (Article 1-7° : nul ne peut être lésé

dans son travail en raison de ses origines, de son sexe, de sa race ou

de ses opinions).

 le droit à la sécurité sociale (Article 1-8° : L’Etat, selon ses

possibilités, garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère, aux

handicapés, aux vieux travailleurs et aux personnes âgées, la

protection de la santé, la sécurité sociale…….) ;

 le droit de propriété (article 1-10° : toute personne, aussi bien seule

qu’en collectivité, a le droit à la propriété).

 le droit syndical (article 1-13 : constitution des syndicats dans les

conditions prévues par la loi. Tout homme peut défendre ses droit et

ses intérêts par l’action syndicale et adhérer au syndicat de son

choix) ;

D’autres droits sont reconnus aux salariés par des textes à vocation

universelle auxquels
La constitution gabonaise se réfère en outre directement à la DDHC de

1789, et à la DUDH de 1948. Il s’agit de textes internationaux qui ont

valeur constitutionnelle.

B/Les lois et règlements

L’article 47 de la constitution gabonaise donne compétence au législateur

pour fixer les principes fondamentaux du droit du travail, de la sécurité

sociale et du droit syndical, y compris les conditions d’exercice du droit de

grève. La loi applicable à la relation de travail subordonné se trouve

essentiellement dans le code du travail. Le premier code du travail a été

adopté le 4 janvier 196212, remplacé par le code de 197813. Un nouveau

code du travail a été adopté par la loi du 21 novembre 199414 et modifié

par une loi du 12 octobre 2000.

Il est évident qu’en pratique, le code du travail, qui est la principale source

législative du droit du travail, va bien au-delà d’un simple énoncé des

principes fondamentaux du droit du travail et du droit syndical, puisqu’il

règlemente dans le détail tous les aspects ou presque de la relation de

travail subordonné.

12 Loi n° 88/62 du 4 janvier 1962, Journal Officiel numéro spécial, 1er mars 1962.
13 Loi n° 5/78 du 1er juin 1978, Journal Officiel, n° 25 du 28 novembre 1978.
14 Loi n° 3/94 du 21 novembre 1994 portant code du travail, modifiée par la loi n° 12/2000 du 12 octobre 2000 portant

modification de certains articles du code du travail.


Il convient cependant de relever que le code du travail renvoie

expressément l’application de certaines de ces dispositions au pouvoir

réglementaire. Ainsi, par exemple, des articles 90, 108 ou 110 du code du

travail. Il faut aussi noter, qu’en dehors du code du travail, la relation de

travail subordonné n’échappe pas à l’emprise du code civil ancien, dans

ses dispositions relatives au droit commun du contrat15 et du code civil

gabonais : exemple de l’article 8, alinéa 5, du code civil gabonais en

application duquel la CA de Port-Gentil décide que la convention des

parties ne peut déroger aux dispositions d’ordre public du code du

travail16.

C/La jurisprudence

La jurisprudence joue un rôle important en matière de création ou

d’élaboration du droit du travail17. Au Gabon, la jurisprudence sociale

émane principalement des juges du fond (notamment ceux des juridictions

de Libreville et de Port-Gentil) et de la chambre sociale de la Cour de

cassation. Il convient aussi de citer les décisions rendues par le Conseil

15 P.-Y Verkindt, « Le contrat de travail : modèle ou anti-modèle du droit civil des contrats ? », in La nouvelle crise du contrat (sous la
direction de Ch. Jamin et D. MAzeaud), Dalloz. 2003, p. 197 et s ; X. Lagarde, « Aspects civilistes des relations individuelles de
travail », RTDciv 2002, 435 et s.
16 Cour d’Appel Judiciaire de Port-Gentil, 22 juillet 2008, Affaire K. K et Confédération Syndicale Gabonaise c/Sté Cora Wood
Gabon, inédit.
17 Voir par exemple en droit français, A. Mazeaud, « La jurisprudence sociale créatrice de droit : regard sur la chambre sociale de la

Cour de cassation », in Analyse juridique et valeurs en droit social, Etudes offertes à J. Pélissier, Dalloz. 2004, p. 383 et s.
d’Etat notamment en matière de conflits collectifs du travail ou de

licenciement économique autorisé par l’Inspecteur du travail18.

L’article 11 du code du travail aux termes duquel tous les cas non

expressément prévus par le code du travail seront réglés conformément au

principe de l’équité, invite le juge à rechercher les solutions de certains

litiges du travail dans les principes généraux du droit19. On peut aussi

penser au principe de bonne foi.

§3/Les sources internes d’origine privée ou professionnelle

Les sources internes, privées ou professionnelles, du droit du travail sont

sécrétées par la profession et comprennent les sources conventionnelles,

les usages et le règlement intérieur ainsi que les engagements unilatéraux

de l’employeur.

A/ Les conventions et accords collectifs de travail

Ce sont des règles de droit qui sont issues de la négociation collective entre

les partenaires sociaux : lorsque les syndicats ou groupements

représentant les salariés et les organisations représentant les employeurs

18 Voir par exemple, CE, 24 juin 2005, Affaire E. J et autres c/ Etat Gabonais, inédit : annulation de l’autorisation de licenciement
économique de plusieurs agents du Transgabonais délivrée par l’inspecteur spécial de travail chargé du Transgabonais.
19 G. Lyon-Caen, « Du rôle des principes généraux du droit civil en droit du travail », RTDciv1974. 229 et s.
se réunissent pour négocier des conventions collectives ou des accords

collectifs.

Convention collectives : il s’agit d’un texte conclu par les partenaires

sociaux qui détermine l’ensemble des conditions d’emploi et de travail,

ainsi que les garanties sociales dont bénéficient les salariés. La conclusion

d’une convention ou d’un accord collectif , leur objet, les parties à l’acte,

leur champ d’application dans l’espace ainsi que les conditions

d’application, de révision et de dénonciation seront abordés à l’occasion de

l’étude des rapports professionnels collectifs.

Accord collectif : textes signés par les partenaires sociaux mais qui ne

concernent qu’un point particulier.

Ils sont signés et négocier à différents niveaux :

- Le niveau interprofessionnel (toutes les entreprises seront concernées)

- Accord ou convention de branche (concerne un secteur d’activité bien

précis)

- Le niveau de l’entreprise

- Le niveau de l’établissement
B/Le règlement intérieur et les usages

1) Le règlement intérieur

Est présenté comme une des sources les plus anciennes du droit du travail

qui trouve ses origines dans les règlements d’atelier qui imposaient depuis

le début du 19ème siècle une discipline collective sur les lieux de travail.

Son champ d’action est relativement étendu, même si dans la pratique, il

prescrit surtout les règles relatives à la discipline et aux questions de

sécurité.

A propos de sa nature juridique, le règlement intérieur est considéré

comme un acte réglementaire de droit privé ; car il est une manifestation

du pouvoir réglementaire du chef d’entreprise et il s’applique aux relations

de droit privé.

2) Les usages

A l’instar du droit des affaires, les usages occupent une place importante

comme source du droit du travail. L’usage résulte d’une pratique ancienne,

constante, fixe et générale20, considérée par ces destinataires comme

obligatoire, par laquelle l’employeur accorde un avantage aux salariés.

20Cass Soc, 28 février 1996, Bull Civ V, n° 74.


Une simple tolérance de l’employeur ne saurait constituer un usage21 .Il

doit être instauré intentionnellement par l’employeur : Il n’y a pas d’usage

lorsque l’employeur a commis une erreur dans l’attribution de l’avantage.

Néanmoins, l’employeur peut dénoncer unilatéralement l’usage, sous

conditions :

 L’employeur doit informer individuellement chaque salarié de sa

volonté de dénoncer l’usage.

 Informer les représentants du personnel.

 Respecter un délai suffisant entre le moment où il informe de sa

volonté de dénoncer l’usage et le moment où cet usage disparait

effectivement.

Il peut aussi être dénoncé tacitement quand une convention collective ou

un accord collectif portant sur le même point vient contredire l’usage.

On distingue deux types d’usages en droit du travail :

L’usage professionnel correspond à un avantage conféré à tout ou partie

du personnel, dans une ou plusieurs professions en un lieu précis et qui

est devenu un droit par la force de l’habitude. C’est une forme dérivée de la

21Cass Soc, 9 juillet 1986, Dr. Soc 1987, 367.


coutume. Parmi les usages professionnels on cite souvent la fête de la

Sainte-Barbe, chômée dans les mines. Leur place dans la hiérarchie des

normes est modeste. Ils occupent la dernière place de la pyramide et

disparaissent dans tous les cas en présence d’une norme conventionnelle

même moins favorable.

Les usages d’entreprise prennent la forme de primes, de jours de congés

supplémentaires comme la pratique du treizième mois, la prime de fin

d’année ou l’arbre de noël organisé en faveur des enfants du personnel.

Les usages d’entreprises apparaissent comme des normes résultant du

pouvoir de direction de l’employeur. A ce titre, ils présentent de fortes

ressemblances avec les engagements unilatéraux de l’employeur.

C/Les engagements unilatéraux de l’employeur

Il s’agit d’une dénomination empruntée au droit des obligations. Elle

apparaît en droit du travail français comme une qualification juridique, un

peu fourre-tout, où on y range les promesses ou les avantages inscrits

dans les procès-verbaux ou protocoles d’accord de (de fin de grève, d’échec

de la négociation collective, de réunions avec les représentants du

personnel, certaines notes de services, des déclarations). Les accords dits

atypiques sont également qualifiés d’engagements unilatéraux. Il s’agit


d’accords conclus entre l’employeur et des personnes non habilitées à

signer des accords collectifs. L’engagement unilatéral de l’employeur, à

l’instar de l’usage, n’a de valeur juridique que s’il apporte une garantie ou

un avantage effectif aux salariés.

Les recommandations patronales se rapprochent des engagements

unilatéraux. Il se trouve, en effet, qu’un groupement d’employeurs

demande ou recommande à ses adhérents d’octroyer un avantage à leurs

salariés. Cet avantage prend généralement la forme d’une prime à verser à

l’issue d’un conflit collectif qui a désorganisé un secteur d’activité22. La

recommandation patronale à condition qu’elle soit claire et précise et

qu’elle s’adresse à tous les adhérents, n’est pas qu’une simple

recommandation, mais une véritable règle qui a force contraignante23.

Tous les salariés pourront ainsi exiger l’octroi de l’avantage ou le

versement de la prime.

Titre 1 : La nature et la qualification des relations de travail

22Cf. Par exemple, pour la réclamation du versement d’une prime promise après une grève des
chauffeurs routiers, Soc. 29 JUIN 1999. D. 2000. 79, obs. A. BOUILLOUX.

23 Soc. 6 Janv. 2011, RDT 2011, 388, obs. H. TISSANDIER.


Pour ordonner la masse des dispositions qui composent le droit du travail, on

propose classiquement de distinguer les relations individuelles de travail et les

relations collectives de travail. Mais cette distinction manque de cohérence.

D’abord elle semble tracer une ligne de démarcation nette entre l’individuel et

le collectif, alors qu’en fait ils sont étroitement mêlés. Par exemple un

licenciement massif associe les mécanismes de droit dit collectif, comme

l’intervention des représentants du personnel et des mécanismes dits de droit

individuel, comme la procédure de contestation de la rupture envisagée.

Ensuite cette distinction entretient l’illusion qu’il existe des relations collectives

de travail, alors que ces relations ne sont que des rapports de négociations,

d’affrontement ou de coopération et non des rapports de travail entre

employeurs et représentants des salariés.

Aussi convient-il plutôt de distinguer :

- D’une part, le rapport de travail, ou rapport dans le travail, qui découle du

contrat de travail : Il existe bien des relations interpersonnelles entre les salariés

et les employeurs, celles qui sont individualisables.


- D’autre part, les relations professionnelles qui regroupent les règles qui

concernent la défense de leurs intérêts face à l’employeur ou à des groupements

d’employeurs : l’action syndicale, la représentation du personnel dans

l’entreprise et la négociation collective.

Chapitre 1 : Les relations individuelles de travail


Aux termes de l’article 18 du code du travail gabonais, le contrat de travail est

une convention par laquelle une personne, le salarié, s’engage à mettre son

activité professionnelle sous la direction et l’autorité d’une autre personne,

l’employeur, qui s’oblige à lui payer en contrepartie une rémunération.

De cette définition se dégagent deux critères distinctifs de la relation

individuelle de travail issue du contrat de travail. Il s’agit, d’une part, d’une

relation de travail rémunéré et, un lien de subordination juridique, d’autre part.

Section 1 : Une relation de travail rémunérée


Le travail fournit par le salarié à son employeur est la caractéristique majeure du

contrat de travail. Mais de la combinaison des dispositions des articles 1er et 18

du code du travail, il en résulte que le salarié s’engage à mettre son activité

professionnelle au service de l’employeur, moyennant le versement d’une

rémunération.
§1/ La notion de travail salarié

L’existence d’un contrat de travail suppose l’accomplissement par le salarié

d’une prestation de travail, donc une activité humaine, manuelle, physique ou

intellectuelle. Mais toute activité humaine n’est pas nécessairement un travail

au sens du code du travail. Par ailleurs, l’exécution de la prestation de travail

salarié présente une double dimension, à la fois matérielle et qualitative.

A/ La distinction avec les autres activités humaines

Le salarié met sa force de travail à la disposition de l’employeur pendant une

durée déterminée24. Il s’agit d’une obligation de faire qui s’exécute de manière

successive. La prestation de travail constitue ainsi l’objet principal du contrat de

travail25. Ce qui permet de distinguer le salarié de l’apprenti26 ou du stagiaire27.

Ainsi, l’apprenti et le stagiaire respectivement définis par l’article 1er, alinéas 4

et 5 du code du travail, ne peuvent être assimilés à des salariés.

Mais la frontière du travail salarié et des activités humaines non salariées n’est

pas toujours aussi nette. Il en est ainsi en particulier des activités ludiques

On s’est demandé si jouer et travailler pouvait être compatible ?

24 CSG 10 avril 1980, RJSG, n° 5, p. 11.


25Assplén, 8 janvier 1993, JCP G 1993. II. 22010, concl. M. Jéol, note Y. Saint-Jours.
26 CA Libreville, 22 février 2000, affaire M. P c/ Société P. R, inédit.
27CA Libreville, 27 juin 2000, affaire A. B. S c/ Société S.B.L, inédit. Voir en droit français : Cass soc, 9 mai 2001, D. 2002. 1705,

note E. Alfandari. (rechercher cet arrêt)


La cour de cassation française a eu tendance à répondre par l’affirmative. Il en

est ainsi quand elle a considéré dans un arrêt de la chambre sociale du 3 juin

2009 que constituaient du travail, les activités a priori ludiques et amoureuses

des participants à l’émission télévisée « l’ile de la tentation ». Selon le juge, le

fait que les épreuves des participants au jeu télévisé soient en réalité des mises

en scènes par le producteur justifie la qualification de contrat de travail. Elle se

fonde aussi dans cet arrêt comme dans d’autres sur le fait que la prestation de

travail avait pour objet la production d’un bien ayant une valeur économique. De

la sorte, elle a mis en évidence l’idée que le travail salarié contribue à

l’accumulation du capital, au développement de la richesse d’autrui. Ce qui

permet de retenir, implicitement, une conception large du travail.

B/ La nature et la qualité du travail salarié

Pour exécuter la prestation de travail pour laquelle il a accepté de se mettre au

service de l’employeur, le salarié doit remplir les tâches correspondant au poste

ou aux fonctions pour lesquelles il a été recruté. En raison de son lien de

subordination envers l’employeur, le salarié exécute sa prestation de travail

conformément aux prescriptions générales contenues dans le règlement intérieur

de l’entreprise.
Dans tous les cas, le salarié exécute sa tâche conformément aux ordres,

directives et injonctions de l’employeur. Il doit s’abstenir de tout acte de

violence physique ou verbale à l’égard de ses supérieurs ou des autres salariés.

Sur ce point, le juge gabonais sanctionne systématiquement le salarié qui insulte

ou porte des coups à son supérieur hiérarchique ou à l’un de ses collègues,

Il doit également, dans l’accomplissement de sa tâche, se conformer aux

consignes d’hygiènes et de sécurité qui visent à protéger la santé et l’intégrité

physique des salariés. En outre, l’employeur peut confier au salarié des tâches

nouvelles en rapport avec sa qualification professionnelle.

Sur le plan qualitatif, le salarié exécute sa prestation de manière personnelle,

consciencieuse, exclusive et loyale. Le caractère personnel du travail signifie que

chaque salarié doit lui-même faire le travail et seulement le travail qui lui est

imparti sauf cas de révision du contrat, d'intérim, d'usages et de demande

raisonnable acceptée. Il ne peut pas demander à un tiers de se substituer à lui

dans l’exécution du travail promis. Pour se faire aider par un tiers, il lui faut le

consentement de l’employeur, sans quoi il y’aurait faute constitutive d’un motif

légitime de licenciement.

Le caractère exclusif, consciencieux et loyal de la prestation de travail a été

dégagé par la jurisprudence à partir de la notion d’exécution de bonne foi. Il


signifie que le travailleur doit toute son activité professionnelle, avec tous les

bons soins du « père de famille », toute la diligence et la prudence d’un bon père

de famille, à l'entreprise et ne peut, pendant le contrat même en cours de

suspension, la concurrencer sauf dérogation stipulée au contrat. Le salarié qui

fait concurrence à l’employeur en travaillant pour son propre compte ou pour

une entreprise concurrente commet une faute lourde.

Mais à l’expiration du contrat de travail, le salarié n’est exceptionnellement tenu

de ne pas concurrencer son ex employeur que si le contrat contenait une clause

de non concurrence valable.

Le salarié est tenu également à une obligation de discrétion et de réserve. En

particulier, il ne doit pas divulguer au public les informations confidentielles sur

l’entreprise dont il a eu connaissance à l’occasion de ses fonctions. Il est tenu de

ne pas révéler les secrets de fabrique de l’entreprise, sous peine de sanctions

pénales.

L’obligation de loyauté n’est, cependant pas synonyme d’obligation de fidélité du

salarié à l’employeur. Le salarié garde le droit de travailler pour une autre

entreprise, à condition de ne pas faire concurrence au premier employeur et de


respecter la durée maximale du travail. Certaines entreprises incluent cependant

dans le contrat des clauses d’exclusivité interdisant au salarié de travailler pour

un autre employeur. Ces clauses ne sont valables que si elles sont indispensables

à la protection des intérêts légitimes de l’employeur et proportionnées au but à

atteindre.

Dans tous les cas, le salarié ne met à disposition sa force de travail que parce

qu’il reçoit en contrepartie une rémunération ou un salaire28.

§2/ La rémunération à verser au salarié

Le code du travail n’est applicable qu’au travail en contrepartie duquel un

salaire est versé. En d’autres termes l’absence de rémunération justifie

l’exclusion de la qualification de contrat de travail. Ainsi en a jugé la CA de

Libreville à propos d’un fonctionnaire mis à disposition de l’ASSECNA qui

continuait à percevoir sa solde versée par les services du trésor public29.

Pour le salarié, le salaire représente une créance de nature alimentaire en ce

sens qu’il lui permet ainsi qu’à sa famille de subvenir à leurs besoins essentiels.

Pour l’’employeur, le salaire, est à la fois un coût de production élevé en raison

28CA Port-Gentil, arrêt du 22 novembre 2004, affaire N. L c/ Sté S, inédit.


29 CA Libreville, 26 avril 2000, affaire M. A c/ ASSECNA, inédit.
de l’importance des charges sociales, et un outil de gestion des ressources

humaines (fidéliser les meilleurs salariés, motiver le personnel, limiter les

conflits sociaux).

A partir de ces considérations, il convient de préciser le contenu de la notion de

rémunération du travail avant de montrer qu’elle fait l’objet d’une protection

particulière en droit positif.

A/ La détermination de la rémunération

Par rémunération du travail, il faut entendre les sommes et avantages consentis

au salarié par l’employeur à l’occasion de l’exécution de son travail. Le code du

travail fournit des éléments et indices permettant de déterminer la composition,

la fixation et les modalités de paiement du salaire.

1/ La composition de la rémunération

La rémunération du salarié est constituée de son salaire de base, auquel

s’ajoutent un certain nombre d’élément accessoires, variables, obligatoires ou

facultatifs en fonction des conventions ou accord collectifs de travail applicables

à la relation de travail.

Le salaire de base c’est le salaire stricto sensu visé à l’article 140 du code du

travail. Il représente la somme d’argent que perçoit le salarié en contrepartie

directe de son travail. Il peut être fixe ou comporter une partie variable, en
fonction du rendement constaté, du chiffre d’affaires réalisé ou encore des

bénéfices engrangés par l’employeur.

La notion d’accessoires de salaire apparaît à l’article 130 du code du travail qui

traite des accords collectifs d’établissement. Mais ce texte ne définit pas ce qu’il

faut entendre par accessoires de salaire. Dans la pratique, les accessoires du

salaire comprennent notamment les primes versées aux salariés en contrepartie

du travail effectué ou en raison des conditions d’exécution de la prestation de

travail : prime d’ancienneté, d’assiduité, de rendement, de risque ou de

pénibilité…

Les accessoires du salaire sont aussi, parfois constitués des compléments du

salaire quand on les distingue des primes, et des indemnités. Les compléments

sont des accessoires qui s'ajoutent au salaire de base pour rétribuer un travail

supplémentaire. Ils comprennent le sursalaire réel accordé ou octroyé, la

gratification, la commission et la participation aux bénéfices.

Les indemnités sont des sommes qui n'ont pas pour cause juridique le travail,

mais soit le remboursement de dépenses (la prime de transport), soit la

compensation de préjudice (l'indemnité compensatrice de préavis).


Les pourboires : professions où salarié en contact direct avec la clientèle :

pourboire ajouté à un salaire fixe, ou peut constituer la seule rémunération

perçue. Pourboire supplémentaire remis par le client = une libéralité

Ces primes, commissions, indemnités et pourboires résultent du contrat de

travail, de la convention ou d’un accord collectif de travail ou encore d’un usage

professionnel.

2 La fixation et les modalités de la rémunération

L’employeur est en principe libre de fixer le salaire de ses employés. Il n’en

demeure pas moins qu’il doit respecter un certain nombre de contraintes. La

première contrainte c’est la nécessité pour l’employeur de tenir compte du

montant du SMIG, défini par l’article 149 du code du travail. Le salaire minimum

interprofessionnel garanti « constitue le minimum absolu au-dessous duquel il

est interdit de rémunérer un travailleur Il est fixé par décret », actuellement à

88 000 F CFA.

La seconde contrainte vise à limiter le pouvoir discrétionnaire de l’employeur

dans la fixation du salaire. En effet, dès lors qu’il respecte les minimas légaux

voire conventionnels par catégories professionnelles, l’employeur peut fixer la

rémunération accordée au salarié et procéder à des différenciations. Il doit

cependant s’astreindre au respect de deux principes. Le principe de non-

discrimination et le principe d’égalité des rémunérations = principe d’égalité de


traitement consacré par l’article 140 du code du travail aux termes duquel « A

conditions égales de travail, de qualification et de rendement, le salaire de base

est égal pour tous les travailleurs, quels que soient leur origine, leur opinion, leur

sexe et leur âge. ». C’est l’application du principe « à travail égal, salaire égal »

en vertu duquel tous les salariés qui sont dans une situation professionnelle

identique doivent bénéficier de la même rémunération.

En ce qui concerne les modalités de paiement, l’article 151 du code du travail

oblige l’employeur à payer le salaire dans la monnaie ayant cours légal, c’est-à-

dire le franc CFA. Le salaire est exigible au plus tard le 5 du mois qui suit. Le

salaire horaire ou journalier est en principe payé à intervalles réguliers

n’excédant pas 15 jours.

En cas de rupture du contrat de travail, les salaires et indemnités sont payés au

moment où cesse la prestation de travail. Dans ces différents cas, le salaire

devient exigible au moment où il aurait dû être payé (article 156).

Le salarié reçoit un bulletin individuel de paye. L’employeur doit tenir un

registre de paye où il mentionne le paiement périodique des salaires. En cas de

contestation sur le paiement du salaire, l’employeur ne peut prouver le

paiement que par le bulletin de paie et par la production du registre de paiement


dûment émargé par le salarié ou par certification bancaire30. A défaut de tels

moyens de preuve, le non-paiement est présumé de manière irréfragable en

application de l’article 154 du code du travail31.

La CA de Libreville applique strictement ce texte en condamnant l’employeur à

payer les salaires réclamés s’il n’apporte pas la preuve qu’un cas de force

majeure l’a empêché de produire le registre de paye ou le double émargé du

bulletin de paie32.

En application de l’article 156, la CSG a jugé que le salaire est dû lorsqu’il peut

être exigé conformément à la législation, c’est-à-dire lorsque le salarié a

accompli les services correspondants33.Enfin, l’action en paiement du salaire se

prescrit par 5 ans à compter de la date d’exigibilité34.

B/ La protection de la rémunération

Elle s’opère contre l’employeur et contre les créanciers éventuels du salarié et

même de l’employeur.

1/ La protection contre l’employeur


30 CSG, 4 juillet 1983, RJSG n° 16, p. 26.
31
Cass. Soc. 21/12/2000.Arrêt n°35/2000-2001, Bull.des arrêts de la cour de cassation, n°4 Jan- Fév- Mar 2014, p. 69.
32 CA Libreville, 27 juin 2000, affaire Collège Delta c/ B. C, inédit.
33 CSG, 2 novembre 1987, Revue de Droit Africain du travail « TPOM », n° 739 du 2 juillet 1990, p. 262 et s.
34 CA Libreville, 26 avril 2000, affaire M. A c/ ASSECNA, inédit.
Le salaire est d’abord protégé contre l'employeur. Selon l’article 161 du code du

travail, celui-ci ne peut y opérer que les prélèvement, les remboursements et

retenues prévus par la loi, les conventions collectives ou le contrat individuel de

travail.

Il en est ainsi en ce qui concerne :

- le remboursement des fournitures de prestations en nature ;

- le prélèvement des cautionnements et consignations ;

- le prélèvement des cotisations de sécurité sociale ;

- le prélèvement des cotisations syndicales autorisé par le salarié ;

- la retenue des impôts à la source ;

2/La protection contre les créanciers du salarié et de l’employeur

En application des dispositions de l’article 161 du code du travail, le salaire est

protégé contre les tiers créanciers du travailleur. Ces derniers ne peuvent pas

saisir l’intégralité du salaire du travailleur. La saisie ne peut porter que sur une

portion du salaire que l’on appelle la quotité cessible et saisissable déterminée

selon un barème, conformément aux articles 729 et suivants du code de

procédure civile.
En cas de procédures collectives de l’entreprise et en application de l’article 157

du code du travail, les créances de salaire du travailleur bénéficient d'un

privilège préférable à tous les autres privilèges généraux ou spéciaux jusqu'à

concurrence de la fraction incessible et insaisissable du salaire. Ce privilège

porte aussi bien sur les meubles que sur les immeubles de l'employeur35.

Section 2 : Une relation de travail subordonné


C’est certainement l’élément le plus caractéristique de la relation de travail qui

lie le salarié à son employeur. C’est véritablement ce critère du lien de

subordination qui détermine l’attribution des qualités de salarié et d’employeur,

et, par conséquent, l’application des dispositions du code du travail36.

Après avoir précisé les critères de la subordination juridique, il conviendra d’en

présenter les enjeux, avant d’étudier sa manifestation la plus remarquable à

savoir le pouvoir disciplinaire de l’employeur.

§1/Les critères de la subordination juridique

La notion de subordination juridique est appréhendée en droit positif à travers,


gros modo, trois sériés d’indices qui n’ont pas besoin forcément de se cumuler

A/ L’exercice d’un pouvoir ou d’une autorité

35Cf. Dans ce sens Arrêt n°35/ 2000-2001 du 21/12/2000. Bull. Jan-Fév-Mar 2014, p. 70 ;
qui a reconnu le caractère privilégié de la créance de salaire venant rang préférentiel avant un
créancier hypothécaire, invoqué par un salarié à l’ouverture d’une procédure de liquidation des
biens affectant son employeur.
36 CSG, 29 octobre 1984, RJSG, n° 2, p. 9.
Selon l’article 18 du code du travail, le lien de subordination résulte de

l’exercice par le salarié d’une activité professionnelle sous la direction et

l’autorité de l’employeur. C’est le contrat de travail qui confère à l’employeur

l’autorité nécessaire pour diriger et contrôler le salarié37. Le lien de

subordination est donc la possibilité, le pouvoir de l'employeur de donner des

ordres et des directives au salarié pendant l'exécution de la prestation de travail,

de le contrôler, de le surveiller et de le sanctionner le cas échéant. Il n'existe

que dans le contrat de travail. Il se déduit surtout de deux indices :

- Les directives et le contrôle effectif du travail

Ainsi, il a été jugé que le salarié « placé sous les ordres directs et permanents de

la société pour exercer des tâches déterminées qui excluaient toute initiative de

sa part » accomplit nécessairement un travail subordonné en raison du lien de

subordination juridique qui le lie à la société38. A contrario, ne peut recevoir la

qualification de salarié le P-DG d’une SA qui ne reçoit d’ordres de personne.

L’absence de lien de subordination et d’un emploi effectif, distinct du mandat

social, excluent l’existence d’un contrat de travail39. Il en est de même du

fonctionnaire détaché par l’Etat dans une entreprise publique lequel ne peut

37 Sur l’ensemble de la question, voir A. Jeammeaud, note sous Cass soc, 29 décembre 2000, Dr. soc 2001.227.
38 CSG, 13 février 1984, RJSG n° 3, p. 10 ; CA Port-Gentil, 23 avril 2007, affaire D. D c/ Sté S, inédit.
39CSG, 29 octobre 1984, RJSG n° 2, p. 9. D’une manière générale, au sujet des rapports entre le droit du travail et le droit

commercial, voir Y. Reinhard, « Lien de subordination et droit des affaires », in Analyses juridiques et valeurs en droit social, Etudes
offertes à J. Pélissier, Dalloz 2004, p. 455 et s, spcé. p. 463 et s.
prétendre bénéficier d’un préavis, lorsqu’il réintègre son administration

d’origine40.

- Les conditions matérielles d'exécution de la prestation de travail41

Le salarié est nécessairement assujettis aux horaires décidées par l’employeur,

travaille dans un lieu déterminé et utilise le matériel fourni par l’employeur42. Il

en résulte que l’employeur est celui qui donne les ordres, détermine le lieu de

travail, fournit les outils de travail et fixe la rémunération. La CA de Libreville a

par exemple jugé que le salarié ne peut engager des poursuites contre l’ancien

employeur alors que le lien de subordination était définitivement rompu43. Le

salarié est ainsi invité à engager des poursuites contre l’employeur réel44.

Les clauses du contrat rédigé par l’employeur doivent révéler l’existence d’un

véritable pouvoir juridique qu’il exerce sur le salarié. Alors qu’en principe nul ne

peut se constituer une preuve à soi-même, l’écrit rédigé par l’employeur pourrait

être utilisé contre lui comme moyen de preuve de l’existence du lien de

subordination caractéristique du contrat de travail. C’est dans ce sens que se

sont prononcés la chambre judiciaire de la Cour suprême, dans un arrêt rendu le

13 février 198445 et de la CA de POG, dans un arrêt rendu le 22 novembre 2004.

40CSG, 31 mars 1980, RJSG n° 1, p. 9.


41 CA Libreville, 14 janvier 2000, affaire D. M c/ O.P.T, inédit.
42CSG, 13 février 1984, RJSG n° 3, p. 10 ; CA Port-Gentil, 23 avril 2007, affaire D. D c/ Sté S, inédit.
43 CA Libreville, 19 mai 1998, affaire Société S. c/ T. J, inédit.
44 CA libreville, 27 juin 2000, affaire Société S. c/ P. B., inédit.
45 CSG, 13 février 1984, RJSG n° 3, p. 10.
B/ La participation à un service organisé par autrui

Dans cette hypothèse, le pouvoir s’exerce sur les conditions d’exécution du

travail et révèle que le salarié est intégré dans une organisation contrôlée par

l’employeur. Ainsi, les travailleurs disposant d’une véritable indépendance

technique (comme les enseignants du secteur privé, les médecins officiant dans

une clinique) peuvent néanmoins être soumis au code du travail par ce qu’ils sont

contrôlés. Cette intégration se manifeste notamment par la fourniture du

matériel, le fait que les horaires et le lieu de travail soient imposées. C’est ce

que décide la cour d’appel de Port-Gentil, dans l’arrêt du 22 novembre 2004, en

considérant que l’employeur est celui qui fixe les horaires et le lieu d’exécution

du travail, fournit le matériel, contrôle l’activité et en sanctionne les

manquements éventuels. Tous ces éléments caractérisent le lien de

subordination, dès lors que le contrat liant les parties a été exécuté dans « dans

un service organisé de l’entreprise au seul profit » du cocontractant.

C/ La répartition des risques de l’activité

A l’inverse du travailleur indépendant, le salarié ne supporte pas les risques de

son activité. Le salarié est donc aussi un actif qui participe à une entreprise

organisée pour autrui et non pas seulement par autrui. Le fait qu’il ne bénéficie

pas des fruits de son activité constitue un indice de ce qu’il est placé dans un lien

de subordination. Parfois, c’est à travers la rémunération que les juges se


prononcent sur la répartition des risques d’une activité partagée. Par exemple

une rétrocession de 40% des honoraires perçus permet aux juges de déduire qu’un

étudiant en chirurgie dentaire remplaçant le chirurgien-dentiste dans un cabinet

libéral « participait aux résultats de la marche du cabinet » et n’était donc pas

placé dans un lien de subordination46.

§2/ Les enjeux de la subordination juridique

C’est principalement le lien de subordination qui établit la relation de travail

salarié. Dès lors de l’existence de la subordination juridique dépend

l’application des dispositions protectrices du droit sociale. De plus, c’est encore

le lien de subordination qui permet de distinguer le contrat de travail d’autres

contrats spéciaux (2).

A/ L’application de la législation sociale

L’application de la législation sociale est subordonnée à l’existence d’un contrat

de travail comme l’a rappelé la Cour Judiciaire du Gabon dans un arrêt rendu le

24 janvier 2002. Cette affaire concernait un fonctionnaire qui avait été détaché

46 Soc. 15 mars 2001, N° 99-17.832.


dans une société privée. Le juge de cassation constate que le fonctionnaire en

détachement accomplissait un travail pour le compte de la société à laquelle il

était lié par un lien de subordination. La haute juridiction en déduit logiquement

qu’il y avait lieu à application du code du travail47. Cette position de principe de

la CJG est reprise par les juges du fond qui lient aussi l’application du code du

travail à l’existence d’un lien de subordination caractéristique du contrat de

travail48. Les dispositions du code du travail sont applicables même en présence

d’un contrat journalier49.

Dès lors que l’existence du lien de subordination est établie, toutes les

contestations nées à l’occasion du contrat de travail relèvent de la compétence

du juge social, même si la rémunération du salarié est versée dans le compte

courant de la société moyennant intérêt50. De même, l’absence de subordination

commande l’incompétence du juge social. C’est ce qu’a jugé la CA de Libreville

dans une affaire opposant l’OPT à des agents qui prétendaient être ses salariés51.

S’agissant de la sécurité sociale, le salarié bénéficie, en application de l’article

3-1°) du code de la sécurité sociale d’un régime de sécurité sociale, notamment

47 Cour Judiciaire du Gabon (CJG), 24 janvier 2002, Revue de Droit Africain du travail « TPOM » 983/984, Mars-Avril 2008, p. 53 et
s.
48 CA Libreville), 22 février 2000, affaire M. P c/ société P. R, inédit.
49 CA Libreville, 12 décembre 2000, affaire M. P c/ société S.R.M.G, inédit.
50 TTL, 17 juin 1961, Revue Travail et Profession d’Outre-Mer, n° 110 du 2 janvier 1963, p. 2.453.
51 CA Libreville, 14 janvier 2000, Affaire D. M c/ O.P.T, inédit.
sous la forme de prestations sociales et familiales. En outre, les charges sociales

afférentes sont en partie payées par l’employeur.

B/ La distinction avec les notions voisines

1) Contrat de travail et contrat d’entreprise

L’article 1710 du code civil ancien définit le contrat d’entreprise comme le

contrat par lequel une partie s’engage à fournir à l’autre un travail déterminé

moyennant une rémunération. A l’inverse du contrat du travail qui implique

l’existence d’un lien de subordination, le contrat d’entreprise se caractérise par

une obligation d’exécuter une prestation, un travail en toute indépendance.

Cette indépendance postule un principe de responsabilité : l’entrepreneur est

responsable de la qualité du travail effectué et de son efficacité à la différence

du salarié, sauf l’hypothèse d’une faute lourde.

Toutefois, l’indépendance technique n’est plus, aujourd’hui, un critère

déterminant de la distinction entre les deux contrats. Car, très souvent, un

contrat est improprement qualifié d’entreprise chaque fois que la relation de

subordination est masquée essentiellement pour éviter d’avoir à supporter les

charges sociales pesant sur le travailleur subordonné. Aussi la subordination

juridique de l’entrepreneur est-elle le critère déterminant permettant de

requalifier le contrat en contrat de travail52.

52CSG, 13 février 1984, RJSG n° 3, p. 10.


Mais la distinction entre contrat de travail et contrat d’entreprise n’est guère

aisée lorsque le maître de l’ouvrage donne à l’entrepreneur des instructions plus

ou moins précises et contrôle l’exécution des travaux. Dans cette hypothèse, la

jurisprudence décide qu’il y contrat d’entreprise lorsque le maître de l’ouvrage

se contente de donner l’orientation générale du travail et en fixe les objectifs.

L’entrepreneur conserve alors son indépendance quant aux moyens utilisés pour

l’exécution des travaux. En revanche, lorsque le maître de l’ouvrage donne des

directives ou des ordres concernant directement l’exécution des travaux, il y a

contrat de travail, l’entrepreneur n’étant plus indépendant.

b) Contrat de travail et mandat social

Le mandat social est un contrat par lequel les associés d’une société

commerciale confie à une personne le pouvoir d’administrer ou de gérer la

société en leur nom. On affirme traditionnellement que l’indépendance qui

préside à l’exécution de la mission du mandataire à l’opposé de la subordination

qui caractérise le statut de salarié distingue le contrat de mandat du contrat de

travail.

Mais ce critère de la subordination n’est pas décisif dans la mesure où un

dirigeant social peut cumuler le mandat social avec un contrat de travail. Dans

une telle hypothèse, le régime des deux contrats s’applique en principe de


manière distributive. En effet, lorsque les tâches accomplies en tant que salarié

différent de celles qui sont exercées en tant que mandataire social, les juges

admettent le cumul des deux contrats53. Mais, il convient parfois de bien

dissocier les pouvoirs d’administration ou de gestion exercés par le dirigeant

social avec les tâches qu’il accomplit dans le cadre de l’exécution de son contrat

de travail. C’est ce qu’a jugé la chambre sociale de la Cour suprême dans un

arrêt rendu le 29 octobre 2009 (RJSG n° 2, p. 9 : le dirigeant disposait des

pouvoirs les plus étendus et accomplissait sa tâche sans en référer à personne. Il

n’était soumis à aucun horaire ni à des conditions particulières de travail. Ces

éléments de fait caractérisent l’absence de lien de subordination juridique, le

dirigeant n’occupant pas un emploi effectif distinct de son mandat social54.

Cependant, en cas de contradiction entre les deux catégories de règles, ce sont

celles du droit du travail qui l’emportent en raison de leur caractère d’ordre

public.

c) Contrat de travail et contrat de société

l’affectiosocietatis est une condition d’existence de la société. En effet celle –ci

ne se crée que parce que les associés ont eu la volonté de s’unir ou l’intention de

53 CA du Gabon, 5 février 1963, Revue Travail et Profession d’Outre-Mer, n° 118 du 2 mai 1963, p. 2.617.
54CSG, 29 octobre 1984, RJSG n° 2, p. 9.
s’associer dans un but lucratif55. Ce qui implique une collaboration active et

égalitaire de l’ensemble des associés56.

La collaboration ou la participation aux décisions collectives permettent

d’admettre l’existence d’une société et de la distinguer du contrat de travail. La

situation d’un salarié est caractérisée par sa subordination juridique alors que

l’affectio societatis suppose la collaboration sur un pied d’égalité mais à

concurrence des parts respectives de chacun des associés dans le capital social.

Que se passe-t-il lorsque le salarié jouit d’une rémunération pour partie axée sur

la participation aux bénéfices ? On regarde les conditions de travail : Est-il

indépendant ? Donne-t-il des instructions ? Est-il subordonné ? Le juge dispose

d’un pouvoir d’appréciation souverain.

La distinction entre les deux types de contrat est, en outre, délicate dans le cas

particulier où un associé fait un apport en industrie dans la société en offrant

d’exercer une activité professionnelle au sein de l’entreprise (apport de main

d’œuvre).

L’article 40 ancien de l’Acte uniforme n’autorisait que l’apport de main-

d’œuvre. Dans ces conditions, l’apporteur en industrie était un travailleur. Il

n’est pas pour autant le subordonné de ses coassociés. Il n’existe pas de lien de

subordination à l’égard de la société. Cette conception restrictive a été

55
A. Pirovano, La « boussole » de la société, intérêt commun, intérêt social, intérêt de l’entreprise, D., 1997.chron, 189 ; Cass 3eCiv,
22 juin 1976, D., 1977, p. 619, note P. Diener.
56
Casscom, 3 juin 1986, Rev., soc.1986, 585, note Y. Guyon.
abandonnée par le nouvel article 40 3° selon lequel chaque associé peut

apporter à la société des connaissances techniques ou professionnelles ou de

services par apport en industrie. Contrairement à l’ancien texte, on assiste à un

élargissement de l’apport en industrie au-delà de l’apport de main d’œuvre.

Ainsi, par exemple, en principe, rien ne s'oppose à ce qu'une personne ayant les

qualifications requises pour pouvoir conduire des véhicules destinés au transport

de marchandises ou des personnes, s'engage à exercer cette activité au titre de

son apport en industrie à une société ayant un tel objet. Cette même activité

peut bien sûr également être effectuée sous le couvert d'un contrat de travail. En

définitive, rien ne ressemble plus à un chauffeur routier salarié qu'un chauffeur

routier apporteur en industrie.

§3/ Le pouvoir disciplinaire de l’employeur

L’employeur exerce son pouvoir disciplinaire dès lors qu’il prononce une sanction

pour un fait qualifié de fautif commis par le salarié à l’occasion de son activité

professionnelle. Pourtant, le code du travail est très laconique pour ne pas dire

lacunaire sur le pouvoir disciplinaire de l’employeur. La question n’est abordée

que de manière allusive aux articles 110 à 111 du code du travail qui traitent du

règlement intérieur. C’est donc, en principe, le Règlement intérieur qui fixe


l’étendue du pouvoir disciplinaire de l’employeur. Toutefois, la jurisprudence

tend à enfermer l’exercice de ce pouvoir dans des limites étroitement définies.

A/La faute et les sanctions disciplinaires

La détermination de la faute et des sanctions disciplinaires applicables au salarié

dépend de l’existence dans l’entreprise d’un règlement intérieur. Dans tous les

cas, la faute et les sanctions disciplinaires doivent être définies dans le

règlement intérieur ou déduites de celui-ci par l’employeur.

1/ L’existence du règlement intérieur

Le règlement intérieur est prévu par l’article 110 du code du travail. Il s’agit

d’un document unilatéralement élaboré par l’employeur qui contient des règles

générales et permanentes dont le champ d’application matériel est limité à

certaines matières, à savoir :

- les règles relatives à l’organisation technique du travail ;

- les règles relatives à la discipline ;

- les prescriptions concernant la santé et la sécurité au travail ;


- les modalités de paiement des salaires.

Il est ainsi interdit à l’employeur, sous peine de nullité, de faire figurer dans le RI

des matières autres que celles énumérées par l’article 110, alinéa 1, du code du

travail. Par exemple, l’employeur ne peut inclure dans le RI des dispositions qu’il

estime nécessaire au bon fonctionnement de l’entreprise. La sanction de la

violation de l’article 110, alinéa 2 est la nullité de plein droit des dispositions

autres que celles de l’article 110, alinéa 1.

Quant à son élaboration, le RI est obligatoirement soumis pour avis au Comité

Permanent de Concertation Economique et Sociale ainsi qu’aux délégués du

personnel et pour visa à l’Inspecteur du travail. L’Inspecteur peut exiger le

retrait ou la modification des dispositions contraires aux lois et règlements en

vigueur auxquels il convient d’ajouter les conventions et accords collectifs du

travail.

Le RI doit être affiché dans les lieux du travail et dans les locaux d’embauche.

Des exemplaires du RI sont remis au Comité Permanent de Concertation

Economique et Sociale et aux délégués du personnel.


Le RI n’entre en vigueur que 3 jours après l’affichage. Quant à sa modification,

elle ne peut intervenir que dans les mêmes formes et suivant la procédure de son

élaboration.

Aux termes de L’article 1er de l’arrêté n° 001/MTE du 14 janvier 1982, le RI est

obligatoirement établi dans tout établissement, public ou privé, employant

habituellement plus de 10 salariés. L’employeur doit satisfaire à cette obligation

dans les 3 mois qui suivent l’ouverture de l’entreprise.

Enfin, l’employeur s’expose à des sanctions pénales s’il n’élabore pas ou ne

respecte pas la procédure d’élaboration du RI.

2/ La définition de la faute disciplinaire

La faute disciplinaire n’est pas précisément définie par le législateur qui se

réfère simplement, dans l’article 50, alinéa 3, du code du travail, au

comportement fautif du salarié. Le RI, qui a vocation à prévoir les règles

relatives à la discipline, permet généralement de caractériser certains

comportements fautifs justifiant une sanction disciplinaire. Mais le R I ne saurait

à lui seul définir l’ensemble des fautes susceptibles de déclencher une procédure

disciplinaire.
De la sorte, il faut admettre, d’une manière générale, que seule la violation

d’une obligation professionnelle peut entraîner l’application d’une sanction

disciplinaire. Par conséquent, la faute imputée au salarié doit avoir été constatée

pendant le temps et au lieu du travail. Elle ne saurait, par principe, résulter d’un

comportement extra-professionnel du salarié tiré notamment de sa vie privée et

familiale. La CSG a, par exemple, jugé que le fait pour un salarié de battre son

épouse la nuit à son domicile relève exclusivement de sa vie privée et familiale

et ne peut constituer pour l’employeur un motif légitime de licenciement57.

Or, la frontière entre ce qui relève de la vie privée et du domaine professionnel

est parfois mal aisée à tracer. La jurisprudence, tant gabonaise que française,

semble décider que ce n’est que lorsque le comportement personnel du salarié,

en dehors de son lieu de travail, crée un trouble objectif caractérisé au sein de

l’entreprise, que l’employeur serait fondé à lui infliger une sanction disciplinaire.

Il en est ainsi, par exemple, lorsqu’un médecin invite en discothèque une interne

en sachant qu’elle est de garde et quelles peuvent être les conséquences qui

pourraient en découler pour l’hôpital. C’est aussi le cas d’un enseignant d’un

établissement confessionnel fréquemment aperçu en état d’ébriété et en

compagnie douteuse de ses élèves mineures58 ou de deux salariés qui se battent

57 CSG, 10 mai 1982, RJSG n° 96, p. 121.


58 CSG, 4 juillet 1983, RJSG, n° 16, p. 26.
dans un campement affecté par l’employeur à leur hébergement59. Dans ces cas,

le licenciement du salarié est justifié parce que les faits fautifs, même accomplis

en dehors du temps et du lieu de travail, portent atteinte aux intérêts de

l’entreprise, troublent son organisation ou ternissent sa réputation ou l’image de

l’entreprise.

En outre, l’employeur ne saurait sanctionner un salarié qui exerce un droit

fondamental. Ainsi, en application de l’article 344 du code du travail, aucune

sanction ne peut être prononcée à l’encontre d’un salarié qui a participé à une

grève licite. A l’inverse, a été déclaré légitime le licenciement d’un salarié

ayant participé à une grève illicite60.

On peut s’interroger sur l’existence d’une typologie des fautes disciplinaires ; On

en distingue quatre types, à savoir :

- La faute légère : comportement inhabituel et ponctuel qui ne trouble pas

sérieusement le fonctionnement harmonieux de l’entreprise.

- La faute sérieuse : rend difficile le maintien de la relation de travail et

peut donc entrainer le licenciement du salarié qui doit cependant

59TTL, 30 mai 1980, Revue « TPOM » n° 526 du 2 février 1981, p. 55 ; CSG, 4 mai 1981, RJSG n° 85, p. 108.
60CSG, 26 avril 1982, RJSG n° 114, p. 159 ; 30 juin 1984, RJSG, n° 115, p. 160 ; Cour de cassation du Gabon, 17 juin 1982,
RJSG, n° 116, p. 161.
bénéficier de l’indemnité compensatrice de de congés payés et de préavis,

ainsi que de l’indemnité de licenciement.

- La faute grave : faute sérieuse aggravée à la suite d’un fait isolé ou de

l’accumulation de plusieurs faits plus ou moins graves constituant des

violations des obligations découlant du contrat de travail d’une importance

telle qu’elle rend impossible la poursuite des relations de travail. Elle prive

le salarié de son droit au préavis et de l’indemnité de licenciement.

- La faute lourde : Elle se situe au sommet de la hiérarchie des fautes, en

ce sens qu’elle traduit une « intention de nuire du salarié vis-à-vis de

l’employeur ou de l’entreprise ». Elle prive le salarié fautif du droit au

préavis, de l’indemnité de licenciement ainsi que de l’indemnité

compensatrice de congés payés. En outre, elle autorise l’employeur à

solliciter la responsabilité civile du salarié.

3/ Les sanctions disciplinaires applicables

Il n’existe dans le code du travail, aucune définition générale de la sanction

disciplinaire. On la définit en droit comparé français comme « toute mesure,

autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un

agissement du salarié qu’il considère comme fautif, que cette mesure soit de

nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise,


sa fonction, sa carrière ou sa rémunération »61. La nature et l’échelle des

sanctions susceptibles d’être infligées au salarié doivent être précisées dans le

RI62. De manière générale, ces sanctions correspondent, de la plus faible à la plus

forte, à l’avertissement, au blâme, à la mise à pied, à la mutation, à la

rétrogradation et au licenciement63.

En application de l’article 111 du code du travail, une amende ne peut

constituer une sanction disciplinaire. Par ailleurs, la sanction prise par

l’employeur doit être proportionnelle à la gravité de la faute commise par le

salarié. En outre, en application de la règle pénale non bis in idem, l’employeur

ne saurait sanctionner deux fois la même faute. Par exemple, lorsqu’une faute a

été sanctionnée par un avertissement ou un blâme, l’employeur ne peut plus

licencier le salarié en se fondant sur la même faute64.

Enfin, il faut noter que l’employeur peut parfaitement user de son pouvoir

d’individualisation des sanctions. En effet, à condition de ne pas commettre un

abus de droit ou une discrimination, l’employeur peut prononcer des sanctions

différentes à des salariés ayant commis une faute identique.

B/L’exercice du pouvoir disciplinaire

61Cass soc, 27 février 1985, Bull. civ. V, n° 112, D. 1985.IR. 442, obs Ph. Langlois.
62Y. Saint-Jours, « La faute en droit du travail : l’échelle et l’escabeau », D. 1990, chron, p. 113.
63Cass soc 26 février 1992, Dr. Soc. 1992. 377 ; 27 mai 1992, D. 1992. 411, note J.-P Karaquillo.
64Cass soc, 21 mars 1991, D. 1991.IR.125.
L’idée c’est que le juge doit pouvoir vérifier que la faute disciplinaire et les

sanctions encourues ont bien été définies ou à tout le moins envisagées dans le

règlement intérieur. Il doit surtout contrôler la régularité de la procédure

disciplinaire suivie par l’employeur et le bienfondé de la sanction infligée au

salarié.

A/La procédure disciplinaire

Le code du travail ne contient aucune règle fixant la procédure disciplinaire à

observer par l’employeur. Il appartient à ce dernier de prévoir dans le RI les

garanties procédurales et l’instance habilitée à statuer en cas de poursuites

disciplinaires engagées contre un salarié.

Il n’est pas douteux que les principes d’un procès équitable sur le plan civil et

pénal sont applicables en matière disciplinaire et notamment le principe du

contradictoire et le respect des droits de la défense.

B/Le contrôle judiciaire du pouvoir disciplinaire de l’employeur

Le contrôle exercé par le juge porte à la fois sur la régularité de la procédure

disciplinaire et sur la réalité et la qualification disciplinaire de la faute reprochée

au salarié. Sur le premier point, le juge vérifie préalablement que la mesure


prise par l’employeur constitue bien une sanction disciplinaire et que,

corrélativement, la procédure disciplinaire a été respectée.

Sur le second point, le juge vérifie si les faits reprochés au salarié sont

matériellement constitués et s’ils constituent ou non une faute de nature de

nature à justifier une sanction disciplinaire. Il apprécie surtout de manière

souveraine la proportionnalité de la sanction prononcée avec la gravité de la

faute constatée.

Ceci est particulièrement vrai en matière de licenciement qui n’est légitime que

s’il est fondé sur une cause réelle et sérieuse. De façon constante, le juge

gabonais considère qu’une faute légère ne peut être un motif de licenciement.

Lorsqu’il constate une irrégularité de procédure, l’absence de justification ou

encore le caractère disproportionné de la sanction, le juge peut annuler ladite

sanction qu’il considère comme irrégulière ou abusive. Mais il ne peut la

modifier car il exercerait alors le pouvoir disciplinaire qui est exclusivement

reconnu à l’employeur.

L’annulation éventuelle de la sanction irrégulière ne concerne pas le

licenciement. Même en présence d’irrégularités de procédure ou en l’absence de


cause réelle et sérieuse, le juge ne peut, en principe, qu’allouer des dommages

et intérêts au salarié lésé.

Enfin, c’est en principe à l’employeur de prouver les faits fautifs justifiant la

sanction infligée au salarié. En cas de doute dans l’esprit du juge à la suite des

allégations ou des preuves fournies par l’employeur, ce doute profite au salarié.

Chapitre 2 : Les relations collectives de travail


Section1 : L’encadrement institutionnel des relations collectives de travail
§1/ Les institutions administratives
A/ Le Ministère du travail
B/ L’inspection du travail
§2/ Les institutions consultatives
A/ Le comité technique consultatif pour la sécurité et la santé au travail
B/ Les commissions paritaires
§3/ Les institutions judiciaires
A/ La compétence en matière de contentieux du travail
B/La procédure en matière de contentieux du travail
Section2 : La représentation collective
§1/ La représentation collective des salariés
A/ Le comité d’entreprise
B/ Les délégués du personnel
C/Les délégués syndicaux
§2/ La représentation collective des employeurs
A/ L’organisation de la CPG
B/ Les missions et le fonctionnement de la CPG
C/ La confédération nationale du patronat gabonais (CNPG

Section 3 : La négociation collective


La négociation collective est un des moyens privilégiés utilisés par les partenaires

sociaux afin de parvenir à la normalisation des conditions de travail et la

régulation des rapports d’emploi. Elle vise à mettre en place une réglementation

adaptée aux différents secteurs d’activités ou branches professionnelles. .

Ainsi, des conventions ou des accords collectifs peuvent résulter de cette

négociation directement menée par les acteurs professionnels. Il paraît utile de

préciser les règles de formation de ces actes juridiques collectifs dont la vigueur

normative mérite d’être étudiée.

§1/ La formation des conventions et accords collectifs de de travail

Les conventions et accords collectifs de travail sont en principe librement

conclus par les représentants des salariés et des employeurs qui en déterminent

le contenu normatif devant s’appliquer à leurs relations de travail.

A/La négociation des conventions et accords collectifs

La négociation collective exige qu’on s’interroge sur la qualité et la légitimité

des négociateurs.

La convention collective est négociée par les représentants d’un ou plusieurs

syndicats ou groupements professionnels de travailleurs les plus représentatifs et

une ou plusieurs organisations syndicales d’employeurs, un ou plusieurs

employeurs pris individuellement.


Quant à l’accord collectif, il est négocié entre un employeur ou un groupement

d’employeurs et des représentants du personnel d’un établissement ou des

établissements concernés.

La négociation doit en principe se dérouler de bonne foi cad en vue de parvenir à

un accord acceptable pour toutes les parties et dans leur intérêt réciproque.

Cependant, il faut noter que la question de la représentativité des syndicats ou

groupements participant à la négociation collective n’est pas du tout abordée

dans le code du travail. On en déduit qu’une convention ou un accord collectif

pourrait être conclu par l’employeur ou son représentant avec un syndicat

représentatif même minoritaire.

Pourtant, en principe la validité de la convention ou de l’accord collectif conclu

dépend étroitement de la légitimité du syndicat qui l’a conclu.

B/ La validité des conventions et accords collectifs

Aux termes de l’article 119 du code du travail, la convention ou l’accord collectif

doit faire l’objet d’un acte écrit, mais sans indiquer si l’absence d’écrit constitue

une cause de nullité de la convention ou de l’accord ; ce qui semble aller de soi


car on a du mal à envisage de tels actes négociés par des représentants des

salariés et des employeurs en dehors d’un support écrit comportant la signature

des parties qui l’ont conclu.

Le texte doit en principe faire faire l’objet d’un dépôt et être publié dans les

conditions fixées par un décret après avis de la consultation consultative du

travail, sur proposition du ministre chargé du travail. L’article 122 du code du

travail prescrit la publicité de la convention ou de l’accord collectif, sans frais,

au journal officiel.

Le texte conventionnel doit être signé, selon l’article 120 du code du travail, par

les représentants des organisations syndicales dûment mandatés et doit être

exempts de tout vice de consentement. La négociation collective est en principe

un monopole des syndicats en ce qui concerne la représentation du personnel, si

l’on s’en tient aux dispositions des articles 119 et 130 du code du travail.

B/ Le contenu des conventions et accords collectifs

Le contenu des conventions collectives est en principe librement déterminé par

les parties à la négociation, sous réserve de porter sur un objet précis. En cas de

concours de conventions collectives ou en présence de dispositions plus

avantageuses que celles qui figurent dans la loi, la règle de faveur a vocation à

s’appliquer.
1/ La règle de spécialité

Aux termes de l’article 119 du code du travail, la convention collective portent

sur les conditions de travail et les garanties sociales.

Par conditions de travail, il faut entendre les conditions d’exécution du contrat

de travail, les questions relatives à la qualification professionnelle, à la

rémunération, aux repos et congés, à l’exercice des droits collectifs. Les

garanties sociales quant à elles renvoient à toutes les prestations sociales ou

familiales prévues en faveur des salariés.

Les accords collectifs sont négociés dans le cadre d’une entreprise ou d’un ou

plusieurs établissements. Ils servent à adapter les dispositions de la convention

collective interprofessionnelle, des conventions collectives nationales, régionales

ou locales aux conditions particulières de l’entreprise ou de l’établissement. Ils

portent notamment, en application de l’article 130, alinéa 2 du code du travail,

sur les conditions d’attribution et le mode de calcul de la rémunération au

rendement, des primes à la production individuelle et collective et des primes à

la productivité

Aux termes de l’article 130, alinéa 4 du code du travail, à défaut de convention

collective nationales, interprovinciales, provinciales ou locales, les accords


collectifs d’établissement ne peuvent porter que sur la définition des catégories

professionnelles, la fixation des salaires et des accessoires de salaires.

2/ La règle de faveur

La conclusion d’une convention ou d’un accord collectif de travail permet

d’appliquer la règle de la norme la plus favorable. En effet, les droits résultant

de la relation de travail sont des minima légaux ou conventionnels, les

conventions ou accords collectifs peuvent octroyer aux travailleurs des droits

supérieurs. Dans ce cas, les droits résultant de la convention ou de l’accord

collectif prévalent sur les droits légaux ou issus du contrat individuel de travail.

Mais malgré l’application du principe de faveur les partenaires sociaux ne

peuvent, dans la convention ou l’accord collectif, déroger aux dispositions

d’ordre public prévues par la législation sociale.

§2/ L’application des conventions et accords collectifs du travail

Une fois entrée en vigueur à qui s’applique la convention collective ou l’accord

d’établissement ? Quelles sont ses conditions d’application ? Et dans quelle

mesure ces textes conventionnels peuvent être étendus à des employeurs ou à

des salariés non signataires au moment de leur conclusion ?


A/Les conditions d’application des conventions et accords collectifs du travail

La convention ou l’accord collectif s’appliqueà toutes personnes qui l’ont signée

personnellement ou qui sont membres d’une organisation signataire.

Le texte conventionnel s’ applique immédiatement à partir du jour qui suit

son dépôt, et de manière impérative, à tous les contrats en cours. En principe,

les parties ne peuvent l’écarter, excepté lorsque ces contrats comportent des

clauses plus favorables. Si la clause d’un contrat est contraire à la convention ou

à l’accord collectif, elle est réputée non écrite.

En application de l’article 121 du code du travail, la convention collective

s’applique pendant une durée déterminée (maximum 5 ans) ou indéterminée.

Tout syndicat professionnel ou tout employeur qui n’est pas partie à une

convention collective peut y adhérer ultérieurement.

B/L’extension des conventions et accords collectifs du travail

En application de l’article 125 du code du travail, la convention ou l’accord

collectif de travail peut faire l’objet d’une extension à des employeurs ou à des

employés qui ne sont pas partie à l’accord. Il suffit que les employeurs et les

salariés en cause exercent leurs activités dans le champ d’application

professionnel et territorial de l’accord conclu.


La décision d’extension est prise par décret sur proposition du ministre du travail

et à la demande des organismes professionnels représentatifs des employeurs et

des employés.

La loi impose par ailleurs un contenu pour les conventions collectives susceptibles

d’être étendues. Ces conventions contiennent obligatoirement un certain nombre

de dispositions prévues par l’article 126 du code du travail et concernant

notamment: - le libre exercice du droit syndical ; - les salaires minima

correspondant aux diverses qualifications de la hiérarchie professionnelle de la

branche d’activité considérée ; - les modalités d’exécution et les taux des heures

supplémentaires ; la durée de l’engagement à l’essai ; - les indemnités de

déplacement.

C/L’élargissement des conventions et accords collectifs du travail

La convention ou l’accord collectif de travail est un acte juridique collectif qui

engage les parties l’ayant conclu. Il en résulte que l’accord conclu a un effet

obligatoire car l’employeur est tenu de traduire dans les contrats individuels de

travail les avantages consentis aux salariés en application de l’article 123 du code

du travail.

La convention ou l’accord collectif de travail a aussi un effet normatif. Cela

signifie que l’accord s’applique à tous les contrats de travail antérieurement

conclus par l’employeur,


Il en est de même s’il a adhéré ou s’il est membre d’un syndicat signataire de la

convention ou de l’accord collectif de travail. Cet effet normatif s’applique

même si les salariés ne sont pas syndiqués. Il suffit à cet égard que les droits

découlant de l’accord soient supérieurs aux droits légaux ou conventionnels. Le

caractère normatif de la convention ou de l’accord collectif permet ainsi de

déroger au principe civiliste de l’effet relatif des conventions, puisqu’ils

s’appliquent à tous les salariés qui relèvent de leur niveau de conclusion.

§3/ La révision et la dénonciation des conventions et accords collectifs du


travail

En application de l’article 121, alinéa 4 du code du travail, Les formes et

conditions de la révision ou de la dénonciation de la convention ou de l’accord

collectif sont prévues par les partenaires sociaux eux-mêmes.

La possibilité d’une révision ou d’une dénonciation semble attester que, malgré

son effet normatif, la convention ou l’accord collectif ne crée pas un nouveau

contrat de travail qui se substituerait aux contrats de travail individuels conclus

avec l’employeur.

L’application du principe de faveur n’implique pas la modification des contrats

individuels de travail par la convention ou l’accord collectif de travail. Si l’accord


collectif disparait, et qu’il est remplacé par un nouvel accord qui ne prévoit plus

le même avantage, le contrat de travail reprend sa forme initiale, sans que le

salarié puisse invoquer une modification de celui-ci.

Cette solution signifie qu’il ne s’opère aucune incorporation des normes de la

convention ou de l’accord collectif dans le contrat de travail qui subsiste

juridiquement.
Titre 2 : La formation et la vigueur du contrat de travail

L’existence établie d’une relation de travail subordonnée suppose la conclusion

effective d’un contrat de travail dont le contenu mérite une attention

particulière.

Sous-titre 1 : La formation du contrat de travail


La conclusion du contrat de travail est rarement le fruit d’une recommandation

ou le choix spontané d’un candidat à l’emploi. Elle est généralement précédée

d’une phase dite de recrutement. Le contrat de travail, qui dans la pratique,

revêt une diversité de formes ou de variantes, n’en demeure pas moins soumis,

pour l’essentiel, aux règles de validité des actes juridiques.

Section 1 : Le recrutement

Le recrutement désigne l’ensemble des opérations qui précèdent l’éventuelle

conclusion du contrat de travail. C’est au cours de cette phase que l’employeur

recherche, évalue et sélectionne les candidats à un emploi salarié. Le

recrutement est peu règlementé car il reste dominé par la liberté de l’employeur

d’embaucher le salarié de son choix. Mais cette liberté est limitée par un certain

nombre de restrictions.

§1/ La liberté de l’employeur d’embaucher


En principe, l’employeur comme le salarié, est libre soit d’embaucher soit de

nouer une relation de travail salarié. Cette liberté s’inscrit dans le sillage de la

liberté du travail, la liberté d’entreprendre ou le droit au travail. C’est ainsi que

dans le cadre de cette liberté, le recrutement peut être déclenché à la suite

d’une offre ou d’une demande d’emploi. Il induit, en cas de pluralité de

candidats, un processus de sélection qui commande le choix du futur salarié.

L’employeur doit veiller à ne pas s’engager sans prendre un minimum de

précautions ou de garanties dans la mesure où la promesse d’embauche produit

des effets juridiques plus ou moins contraignants.

A/ L’offre et la demande d’emplois

Le candidat à l’emploi peut faire soit une demande d’emploi soit répondre à une

offre d’emploi émise par un employeur. L’offre d’emploi peut être portée à la

connaissance du public dans les journaux d’annonces légales ou par voie

d’affichage. Pourtant l’ordonnance n° 8/93 du 1er octobre 1993 institue l’ONE

qui organise un service public de l’emploi. Il s’agit d’un organe dont la mission

est d’aider les demandeurs dans la recherche d’un emploi ou leurs projets

d’insertion ou de réinsertion professionnelle. Il réunit au sein de son conseil

d’administration des représentants de l’Etat, des employeurs et des employés.

Pourtant, malgré cette composition tripartite, aucune obligation ne pèse sur les
employeurs afin de les contraindre à proposer leurs offres d’emploi par

l’entremise de l’ONE.

Placé sous la tutelle du ministre du travail et de l’emploi, l’ONE est chargé

d’assister les demandeurs d’emploi ou de formation en vue de leur insertion ou

réinsertion professionnelle. L’ONE conseille également les employeurs pour

l’embauche et le reclassement du personnel.

Certaines mentions doivent figurer dans cette offre. Elles sont notamment

relatives à l’âge minimum, à la description du poste, à la qualification

professionnelle requise, à la rémunération, au lieu de travail et à la catégorie à

laquelle le postulant peut prétendre.

Dans tous les cas, conformément au principe général de non-discrimination à

l’emploi, l’offre d’emploi ne devrait pas comporter des mentions discriminatoires

liées notamment à la race, à l’origine ethnique, au sexe, aux mœurs, à la

situation familiale ou aux convictions religieuses.

Toutefois, des discriminations objectives sont autorisées s’agissant notamment

de la qualification professionnelle ou de l’aptitude physique du candidat à

l’emploi constatée par certificat médical en application de l’article 19 du code

du travail.

B/ La sélection des candidats et le choix du futur salarié


Le contrat de travail comporte un caractère intuitu personae très marqué,

l’employeur est libre de s’entourer des compétences de son choix. Il est

important de noter que toute procédure de recrutement et d’évaluation des

candidats à l’embauche recèle une certaine part de subjectivité. Toute décision

de conclure ou non un contrat est un acte discrétionnaire que l’employeur n’a

pas en principe à motiver. Il n’en demeure pas moins tenu par un principe de

loyale concurrence. Ainsi, l’article 34, alinéa 1 du code du travail interdit à tout

employeur d’embaucher un salarié encore contractuellement lié à un précédent

employeur. C’est la raison pour laquelle tout nouvel employeur est tenu de

vérifier que le salarié qu’il souhaite embaucher est libre de toute obligation à

l’égard d’un autre employeur.

En principe, l’employeur ne peut interdire au salarié d’exercer une activité

professionnelle à l’expiration du contrat. Il s’agit d’une application du principe

de la liberté du travail. Toutefois, ce principe est atténué par l’admission de la

clause de non-concurrence qui limite l’exercice par le salarié d’une activité

concurrente de celle de l’ancien employeur. Dans cette logique, en application

de l’article 34 alinéa 2 du code du travail, il est interdit à un employeur de

recruter un salarié lié par une clause de non concurrence, ayant pris l’initiative

de rompre son précédent contrat de travail ou lorsque la rupture de ce contrat

résulte d’une faute lourde de celui-ci.


En revanche aucun texte national, à notre connaissance, n’impose à l’employeur

de se plier à des exigences de transparence, de pertinence, de finalité quant à

la nature et l’objet des informations sollicitées du demandeur à l’emploi au

moment de l’entretien en vue de son recrutement voire de non-discrimination à

l’issue de l’embauche.

Il n’est cependant pas exclu d’engager une action en responsabilité civile à

l’encontre de l’employeur, un candidat évincé pour un motif discriminatoire ou

abusif pouvant réclamer la réparation du préjudice qu’il subit du fait de la

perte de chance d’obtenir un emploi.

Toutefois, dans la pratique, le choix d’un candidat est généralement dicté par

l’intérêt de l’entreprise ; sa sélection ne devrait s’opérer qu’en considération de

ses aptitudes professionnelles.

C/ La promesse d’embauche

Il s’agit de l’engagement pris par l’employeur d’embaucher un candidat à

l’emploi. Il en est ainsi par exemple lorsque l’employeur confirme par écrit son

intention de recruter tel salarié en lui précisant son futur lieu de travail ainsi

que sa rémunération. En pareil cas la promesse lie l’employeur. On considère que

le contrat de travail est valablement formé. Au cas où l’employeur n’y donne pas
suite, il s’expose au paiement de dommages et intérêts ainsi qu’au paiement

d’une indemnité de préavis, même si la rupture ou la rétractation de

l’employeur est intervenue avant tout commencement d’exécution de la relation

de travail65.

§2/ Les restrictions au libre choix de l’employeur d’embaucher

Principe : En matière d'embauche, l'employeur est libre de choisir ses salariés.

Pour autant cette liberté ne va pas sans limites. Car, car il existe des

restrictions tant légales que conventionnelle à la liberté d’embaucher.

A/ Les restrictions légales

Elles concernent la priorité d’emploi en faveur des handicapés, la priorité de

réemploi en cas de licenciement économique ainsi quedes Interdictions d'emploi.

1) La priorité d’emploi en faveur des handicapés

Il s’agit d’une dérogation à la liberté de l’employeur de recruter les salariés de

son choix prévue par l’article 179 en faveur des personnes handicapées, c’est-à-

dire des personnes dont les possibilités d’obtenir un emploi sont amoindries en

65 Cass. Soc., 4 déc.2001, Bull. Civ. V, n°371 ; 6 mai 2002, n°1497 F-D.
raison de l’altération d’une ou plusieurs fonctions physiques, mentales ou

psychiques.

Toutefois, cette priorité d’emploi ne vaut qu’à qualification égale avec les

personnes valides. A cet égard, l’article 181 précise que l’entreprise doit réserver

un quota d’emplois aux handicapés ayant la qualification professionnelle requise.

L’article 181, alinéa 2, fixe ce quota à un quarantième de l’effectif total de

l’entreprise ou de l’établissement.

Le contrôle de l’exécution de cette prescription est confié à l’inspecteur du

travail. Tout employeur est tenu de lui communiquer, chaque année, le nombre

de salariés handicapés employés dans son entreprise.

2) La priorité de réemploi en cas de licenciement économique

L’article 60 du code du travail OBLIGE l’employeur à employer en priorité les

salariés licenciés pour motif économique. Ces salariés bénéficient d’un droit

prioritaire à l’embauche pendant une période de un (1) an à compter de la date

du licenciement pour motif économique. Les salariés peuvent mettre en œuvre

ce droit prioritaire à l’embauche dès lors qu’il y a réouverture de l’entreprise ou


création d’emplois dans leurs spécialités au sein de l’entreprise qui les a

licenciés.

Cette règle a été mise en œuvre dans une espèce où l’employeur avait procédé à

un licenciement économique et embauché, la même année, 4 nouveaux salariés

dans le service restructuré en violation de la priorité de réemploi en faveur du

salarié ayant fait l’objet d’un licenciement économique66. Le juge applique ce

principe de priorité de réemploi même lorsque l’employeur se contente de

manifester, par exemple en faisant paraître une annonce, son intention de

recruter un autre salarié ayant la même qualification que l’employé licencié pour

motif économique67

En dehors des priorités d’emploi ou de réemploi, le législateur prévoit en outre

des interdictions d’employer

1) Les interdictions d’emploi ou de réemploi

Il y a d’abord celle qui s’applique aux enfants de moins de 16 ans qui, sauf

dérogation légale, ne peuvent, selon l’article 177, conclure un contrat de travail.

66 CSG, 13 juin 1983, RJSG n° 65, p. 87.


67 CSG, 19 mars 1984, RJSG n° 71, p. 93.
Il y a ensuite l’interdiction pour un salarié de cumuler plusieurs emplois lorsque

cela entraine un dépassement de la durée maximale du travail fixée par l’article

165 du code du travail à 40 heures par semaines.

Il y a enfin l’interdiction de cumuler un emploi public et un emploi privé.

B/ Les restrictions conventionnelles

Aux termes de l’article 34, alinéa 1, du code du travail le salarié doit toute son

activité professionnelle à l’entreprise. Ce texte semble autoriser l’insertion dans

le contrat d’une clause d’exclusivité par laquelle l’employeur interdit au salarié

d’exercer, pendant la durée du contrat, toute autre activité salariée.

La clause d’exclusivité diffère fondamentalement de la clause de non-

concurrence quant à sa nature et à ses effets. Sur le premier point, la clause

d’exclusivité est appliquée pendant l’exécution du contrat alors que la clause de

non-concurrence ne s’applique, en vertu de l’article 34, alinéa 2, qu’à la rupture

du contrat de travail. Sur le second point, la clause d’exclusivité interdit au

salarié d’exercer toute activité et non pas seulement les activités concurrentes

de celles de l’employeur.

Section 2 : Le choix du contrat de travail

Le contrat de travail est en principe à durée indéterminée. Mais l’on assiste à la

multiplication des contrats de travail à durée déterminée, des contrats à temps

partiel et du travail temporaire. Selon l’article 22 du code du travail, le salarié


peut conclure un CDI ou un CDD. Il peut aussi exercer son activité professionnelle

dans le cadre d’un contrat d’intérim.

§1/ Le contrat à durée indéterminée

« Le contrat de travail de droit commun est un contrat à durée indéterminée»

A/ Définition

Le CDI est un contrat dont le terme n’est pas fixé d’avance par les parties. Il

peut cesser à tout moment, à l’initiative de l’une ou l’autre partie, sous réserve

de respecter un préavis. Le contrat à durée indéterminée est donc tout contrat

qui ne comporte ni terme, ni précision de la durée de l'engagement qui est par

conséquent indéterminée.

Sa conclusion relève du principe de la liberté contractuelle.

B/ Intérêts et limites

Le CDI a la faveur du juge et du législateur car il assure la stabilité des relations

professionnelles et la permanence de l’emploi. La jurisprudence considère que

tous les salariés sont jusqu'à preuve contraire, liés par des contrats à durée

indéterminée. Le législateur a élaboré l'essentiel des règles du contrat du travail

par référence au contrat à durée indéterminée.


Ses limites : absence de flexibilité, rigidité notamment en ce qui concerne les

règles de rupture.

Ces caractéristiques du CDI diffèrent fondamentalement de celles du CDD.

§2/Le contrat à durée déterminée

Le CDD est défini par l’article 23 comme celui qui comporte un terme certain fixé

d’avance ou d’accord parties68. C’est un contrat précaire qui ne permet pas au

salarié de pérenniser sa présence dans l’entreprise

A/ Le recours au CDD

Le contrat à durée déterminée est, comme son nom l'indique, le contrat dont la

durée est fixée à l'avance par les parties. Est aussi à durée déterminée, le

contrat assorti d'un terme c'est-à-dire d'un évènement futur et certain emportant

sa cessation. C'est le cas par exemple des contrats conclus pour l'exécution d'un

ouvrage déterminé, pour surcroîts d'activité, pour faire face aux aléas de

l'entreprise ou pour le remplacement d'un salarié absent. Tous ces contrats sont

assimilés à des contrats à durée déterminée.

B/ Les modalités et la fin du CDD

Ces modalités diffèrent selon le type de CDD. .

1) Le CDD ayant un terme certain

68 TTL, 16 décembre 1988, Revue de Droit Africain du travail « TPOM » n° 732 du 2 mars 1990, p. 92.
Selon l’article 23 du code du travail issu de l’ordonnance du 25 février 2010 le

CDD ne peut être initialement conclu que pour une durée ne pouvant pas

excéder 2 ans. Ce CDD ne peut être renouvelé qu’une seule fois. Sa durée

maximale, renouvellement compris ne peut donc excéder 4 ans. . L’employeur

est donc tenu de mettre un terme à la relation contractuelle à l’expiration de la

durée prévue au contrat. Le contrat expire de plein droit à l’arrivée du terme

sans qu’il soit besoin que l’employeur respecte une quelconque procédure

(licenciement ou démission) ou qu’il accorde au salarié un préavis. Dès lors,

l’article 24 du code du travail précise que l’employeur qui poursuit la relation de

travail à l’expiration de la durée prévue au contrat a entendu transformer le CDD

en CDI69. Cette conséquence vaut même si le contrat contient une clause

prohibant la reconduction tacite du CDD. En d’autres termes, toute clause d’un

CDD visant à mettre en échec le principe de poursuite de la relation de travail à

l’expiration du terme initial est nulle de plein droit.

Statut

Le salarié sous CDD reçoit le même traitement et la même rémunération que les

salariés sous CDI. Il a également droit aux congés payés en application de l’article

185 du code du travail.

Suspension
69 CSG, 23 août 1982, RJSG n° 12, p. 20 ; 4 juillet 1983, RJSG n° 16, p. 26.
En application de l’article 36 du code du travail, le CDD peut être suspendu en cas

de maladie, de maternité ou d’accident.

Rupture

Aux termes de l’article 47 du code du travail, le CDD peut être résilié par l’une

ou l’autre des parties avant l’arrivée du terme selon les cas prévus au contrat ou

en cas de faute lourde du salarié. Ainsi, la résiliation du CDD peut intervenir dans

3 cas :

 par accord des parties. Cet accord doit être écrit puisque le CDD est

obligatoirement conclu par écrit ;

 en cas de faute lourde de l’une ou l’autre des parties.

Il convient d’y ajouter la force majeure et la résolution judiciaire en application

l’article 1184 du code civil ancien. Selon l’article 44, alinéa 2, du code du

travail, la partie qui prend l’initiative de la rupture doit la notifier à l’autre par

écrit. Lorsque la rupture anticipée est jugée illégitime le salarié a droit à une
indemnisation qui comprend le montant de la rémunération que le salarié aurait

perçue si le contrat était allé à son terme70.

2) Le CDD ayant un terme incertain

C’est le CDD prévu par l’article 25 du code du travail. Il est conclu sans

détermination de durée. Il s’agit d’un contrat occasionnel obligatoirement conclu

par écrit.

Il sert à réaliser une tâche ou un ouvrage et est souvent utilisé dans le

secteur du bâtiment, des travaux publics ou maritimes. C’est donc la nature des

travaux à réaliser qui rend incertain le temps d’exécution du contrat.

Statut

Le travailleur engagé dans un CDD à terme incertain a droit au même traitement

et à la même rémunération que les autres salariés. Il en est de même des congés

payés.

Suspension

Le CDD ayant un terme incertain peut être suspendu conformément à l’article 36

du code du travail.
70 CSG, 27 juin 1983, RJSG n° 14, p. 22.
Rupture

Le CDD ayant un terme incertain cesse à l’achèvement des travaux, sans que les

parties aient à respecter une forme particulière. Cependant, l’article 48 du

code du travail oblige l’employeur à prévenir le salarié en respectant un délai de

préavis conformément à l’article 65.

Résiliation anticipée

Aux termes de l’article 48, alinéa 2, le salarié peut rompre le contrat à son gré

alors que l’employeur peut invoquer à son encontre une faute. Que l’initiative de

la rupture soit prise par l’employeur ou le salarié, l’article 48, alinéa 2, impose

de respecter le délai de préavis prévus par l’article 65.

En application de l’article 44, la partie qui rompt le contrat doit notifier la

rupture à l’autre par écrit. L’exigence d’un écrit vaut également en cas de

rupture consécutive à l’achèvement des travaux.

3) Le contrat journalier ou hebdomadaire


Il est prévu par l’article 26 du code du travail. Il concerne dans la pratique la

main-d’œuvre occasionnelle recrutée, à la journée ou à la semaine, pour

accomplir des tâches ou des travaux ponctuels ou de courte durée. Il en est ainsi

dans le domaine maritime ou du transport des marchandises. La main-d’œuvre

occasionnelle sert alors au chargement ou au déchargement de la marchandise.

Le contrat de travail journalier ou hebdomadaire doit être conclu par écrit. Cet

écrit mentionne la durée du contrat. Aux termes des articles 26 et 152 du code

du travail, la rémunération du travailleur occasionnel est obligatoirement payée

à la fin de la journée ou de la semaine.

Le contrat est renouvelable le lendemain ou la semaine suivante. Il se transforme

en CDI dès lors que son exécution se poursuit par la volonté, même tacite, des

parties au-delà d’un mois71.

§3/ Le contrat d’intérim

Le contrat de travail temporaire ou contrat d’intérim est celui par lequel une

entreprise de travail temporaire (ETT) ou agence « d’intérim » embauche et

rémunère un salarié (salarié temporaire ou intérimaire) afin de le mettre à la

disposition provisoire d’une entreprise utilisatrice.

71 CA Libreville, 7 mars 2000, affaire S.A. S. c/ société S. G, inédit.


Il exige la conclusion de deux contrats : un contrat de mise à disposition entre

l’ETT et l’entreprise d’accueil, d’une part, et un contrat de mission entre l’ETT

et le salarié, d’autre part.

L’activité d’intérim est régie par l’ordonnance n° 20/2007 du 21 août 2007

portant réglementation de l’activité de mise à disposition du personnel en

République gabonaise, modifiée par la loi n° 20/2007 du 15 janvier 2008 portant

ratification de l’ordonnance n° 20/2007 du 21 août 2007.

Cette réglementation permet d’encadre le recours au contrat d’intérim dans des

limite étroitement définies. Elle fixe les règles relatives aux rapports liant les

parties aux différents contrats de l’intérim, le statut du salarié intérimaire et

détermine le statut des entreprises impliquées dans l’exécution du travail

intérimaire.

A/ Le recours au contrat d’intérim

Le recours au travail intérimaire doit être exceptionnel. L’entreprise utilisatrice

ne peut avoir recours au travail temporaire pour remplacer durablement un

poste permanent dans son organigramme ou un salarié dont le contrat de travail

aurait été suspendu à la suite d’une grève.


Ce n’est que dans des cas limitativement énumérés par l’article 6 de

l’ordonnance de 2007 que l’entreprise utilisatrice peut avoir recours à des

travailleurs intérimaires :

 Le remplacement d’un travailleur absent et pendant la durée de son

absence.

 Le remplacement d’un salarié en congé annuel. La durée du

remplacement ne peut excéder la durée du congé.

 la suspension du contrat de travail, à l’exception de la grève.

En cas de maladie, congés payés ou pour évènements familiaux (grossesse…..).

Le législateur veut éviter que, par le recours au travail temporaire,

l’employeur ne parvienne à porter atteinte à l’exercice du droit de grève.

 Le temps d’attente d’un travailleur permanent pour remplacer un

travailleur en fin de contrat.

Il s’agit de l’hypothèse où le salarié effectivement recruté ou en cours de

recrutement n’est pas immédiatement disponible. Le recours au travail


temporaire vise ici à surmonter l’indisponibilité temporaire du travailleur

permanent.

Dans tous les cas prévus par l’article 6, le contrat de travail est conclu pour une

durée initiale ne pouvant excéder 6 mois. Il peut être renouvelé une fois pour

une période de 6 mois.

L’entreprise peut avoir recours aux travailleurs intérimaires pour satisfaire un

besoin ponctuel en application de l’article 7 de l’Ordonnance, dans les cas

suivants :

 un surcroît occasionnel d’activités.

Ce surcroît occasionnel d’activités peut être la conséquence d’une commande

exceptionnelle à l’exportation que l’entreprise ne peut satisfaire sans le

recours à une main d’œuvre temporaire.

 la création d’activités nouvelles dont l’exécution urgente est

limitée dans le temps.

 des travaux urgents pour les besoins de risques professionnels

imminents.
Pour conserver l’intégrité physique de ses salariés ou prendre des mesures

protectrices des biens meubles et immeubles.

 un besoin temporaire de personnel pour des tâches bien définies qui doivent

être ponctuelles, ce qui signifie qu’elles ne peuvent relever de l’activité normale

et habituelle de l’entreprise utilisatrice.

Lorsque le salarié intérimaire est mis à la disposition de l’entreprise en

application de l’article 7, la durée de son contrat est de 2 ans, renouvelable

une fois.

Enfin, il faut noter, pour conclure sur le recours au travail intérimaire, que les

entreprises intervenant dans le cadre de la mise à disposition du personnel sont

soumises à des obligations spécifiques prévues aux articles 15 et 36 de

l’ordonnance de 2007.

Le législateur institue, en outre, un régime de coresponsabilité (articles 16 à 18)

entre l’entreprise d’intérim et l’entreprise utilisatrice. Par ailleurs,

l’inobservation des dispositions légales est assortie de sanctions pénales (Article

10, 19, 20, 21 et s.)


B/ La relation triangulaire issue du travail intérimaire

La mise à disposition du personnel suppose une relation triangulaire entre :

 l’entreprise de mise à disposition ou entreprise de travail temporaire ;

 le salarié mis à disposition ou salarié intérimaire ;

 l’entreprise utilisatrice.

Cette relation triangulaire est matérialisée par deux contrats :

 le contrat de mise à disposition conclu entre l’entreprise d’intérim et

l’entreprise utilisatrice ;

 le contrat de mission conclu entre l’entreprise d’intérim et le salarié mis à

disposition.

1) Le contrat de mise à disposition

Le contrat de mise à disposition est nécessaire conclu par écrit (article 4) et

contient les mentions obligatoires suivantes :

 le motif du recours au travail intérimaire ;

 le nombre de travailleurs concernés et leur qualification ;


 le ou les lieux d’exécution de la mission. Ce lieu est déterminé par

l’entreprise utilisatrice ;

 la durée de la mission ;

 la description des postes à pourvoir ;

 les rémunérations des travailleurs par qualification.

2) Le contrat de mission

Le contrat de mission, obligatoirement conclu par écrit, doit comporter le visa

conforme de l’inspecteur du travail dans le ressort duquel il est établi. Il est

assorti des mentions obligatoires suivantes :

 la raison sociale et l’adresse de l’entreprise de mise à disposition.

 le numéro d’affiliation à la CNSS de l’entreprise de mise à disposition.

Cette mention permet à l’entreprise utilisatrice et à l’inspecteur du travail

de vérifier que l’entreprise de mise à disposition remplit ses obligations à

l’égard des organismes sociaux.


 le numéro de l’agrément délivré par le ministre chargé du travail. A

travers cette mention, l’inspecteur du travail peut vérifier que la

constitution de l’entreprise intérimaire est conforme à la loi.

 le nom et la qualification professionnelle du travailleur. L’exigence de

l’indication de la qualification professionnelle du salarié permet à

l’inspecteur du travail de vérifier que le salarié mis à disposition a une

rémunération égale à celle des salariés ayant une qualification identique

dans l’entreprise utilisatrice.

 le nom de l’entreprise utilisatrice ainsi que son adresse.

 la durée et le lieu d’exécution de la mission.

 le régime du travail avec, le cas échéant, la cadence prévue des

récupérations. Le contrat de mission doit indiquer les jours de repos ainsi

que la période de repos, conformément aux dispositions pertinentes du

code du travail.

 la rémunération détaillée du travailleur. L’inspecteur du travail pourra

alors vérifier que le salarié mis à disposition a un salaire de base au moins

égal à celui prévu pour sa catégorie dans la grille salariale de l’entreprise

utilisatrice.
C/ Le statut du salarié intérimaire

Ce statut mérite d’être examiné au niveau des droits du salarié intérimaire et au

regard des règles de rupture du contrat de mission.

2) Les droits du salarié intérimaire

- Les conditions d’exécution du contrat

Sur le plan disciplinaire,les entreprises de mise à disposition sont soumises aux

dispositions du code du travail relatives au règlement intérieur (article 27).

Les salariés sous contrat de mission sont assujettis au règlement intérieur de

l’entreprise utilisatrice, sauf les cas particuliers expressément prévus par le

règlement intérieur de l’entreprise de mise à disposition (article 28).

Par ailleurs,l’entreprise utilisatrice doit prendre les mesures de prévention pour

la sécurité et la santé au travail visant à assurer la protection du salarié mis à

disposition (article 29, alinéa 1). L’employeur doit respecter les visites médicales

d’embauche et les visites médicales périodiques du salarié (article 29, alinéa 2).
D’une manière générale, le législateur soumet le salarié intérimaire au même

régime de travail que les salariés permanents de l’entreprise utilisatrice (article

30).

Le salarié sous mission à droit à une rémunération et à l’indemnité de précarité.

La rémunération du travailleur intérimaire est composée :

 d’un salaire de base au moins égal à celui prévu pour sa catégorie dans la

grille salariale de l’entreprise utilisatrice (article 13) ;

 des primes et indemnités attachées au poste de travail occupé au sein de

l’entreprise utilisatrice (article 14).

L’indemnité de précarité de l’emploi est versée au salarié dont le contrat de

mission arrive à échéance ou qui est licencié pour un motif autre que la faute

lourde (article 24, alinéa 1). Cette indemnité n’est pas cumulable avec

l’indemnité de licenciement. Le salarié bénéficiera donc de l’indemnité qui lui

est favorable, c’est-à-dire la plus élevée. L’indemnité de précarité n’est pas due

en cas de démission du salarié (article 24, alinéa 2). Elle est égale à 20% du total

de la rémunération brute du salarié pendant la durée de la mission (article 23,


alinéa 1). Lorsqu’un contrat de mission a une durée supérieure ou égale à un an,

l’indemnité de précarité est au moins égale à 20% de la rémunération brute

servie pendant les 12 derniers mois (article 23, alinéa 2).

Le contrat de mission ou la convention collective peut prévoir une indemnité plus

élevée (Article 23, alinéa 3). Le salarié intérimaire a aussi droit aux congés

payés en application de l’article 35 de l’ordonnance qui renvoie aux 185 à 188 du

code du travail.

3) La rupture de la relation de travail intérimaire

La rupture du contrat de mission peut découler d’une résiliation ou de la

démission du salarié intérimaire.

– La résiliation du contrat de mission

Le contrat de mission prend fin à l’arrivée du terme convenu. Mais, en

application de l’article 23, alinéa 1, de l’ordonnance, les conditions de sa

résiliation sont alignées sur celles d’un contrat à durée indéterminée (CDI), telles

qu’elles sont prévues par les articles 49 à 61 du code du travail.


– La démission du salarié mis à disposition

Dans le silence de la loi, il faut tout de même admettre la possibilité pour le

travailleur sous contrat de mission de mettre un terme à la relation de travail

intérimaire dès lors qu’il est recruté dans le cadre d’un contrat à durée

indéterminée avec un autre employeur.

Section 3 : La validité du contrat de travail

La conclusion du contrat de travail, comme tout contrat, obéit aux conditions de

validité de droit commun de l’article 1108 du code civil ancien. La violation de

ces conditions de validité entraine des sanctions.

§1/ Les conditions de validité du contrat de travail

En principe, la formation du contrat de travail n'est soumise qu'à des conditions

de fond. L’observation des conditions de forme n’est exigée

qu'exceptionnellement.

A/Les conditions de fond


Le contrat de travail est soumis aux règles de fond du droit commun des contrats

à savoir la capacité et le consentement libre des parties, l'objet et la cause du

contrat. Ces règles présentent néanmoins des particularités en matière de

contrat de travail

La Capacité:

Pour conclure un contrat, il faut être Capable juridiquement.

On ne peut pas conclure un contrat de travail tant que l’on n’est pas libéré de

l’obligation scolaire (pas avant 16 ans)

Le consentement

En principe, le contrat de travail est librement et définitivement formé par le

consentement valable de l’employeur et du salarié, c’est à dire leur accord de

volontés conscientes.

Mais le contrat de travail émane de l’employeur et le salarié ne fait qu’adhérer

au contrat. Il n’y a pas, dans la majorité des cas, de négociation. Le salarié entre

dans une entreprise et y sera soumis au règlement intérieur.

Néanmoins, l’accord du salarié doit être personnel (on conclut le contrat pour

soi) et exempt de vice.

Limites concernant le Dol:

Le candidat à un droit au mensonge lorsque les questions sont discriminatoires,

ou sans lien avec l'emploi proposé.


En raison de la subordination, le juge admet plus facilement les vices du

consentement au profit du salarié en mettant à la charge de l’employeur un

devoir de se renseigner sur le candidat qu’il recrute.

L'Employeur a le devoir de se renseigner sur les capacités professionnelles du

candidat. La Jurisprudence va prendre en compte la compétence du salarié: si le

salarié a menti sur un élément essentiel du contrat, il n'y aura pas de Dol dès lors

qu'il se révèle être compétent pour occuper l'emploi

B/Les conditions de forme

Aux termes de l’article 19 du code du travail, le contrat de travail est un contrat

dont la forme est libre. Il peut donc être verbal, en application du principe du

consensualisme. Toutefois, ce texte qui consacre le principe du consensualisme

ne s’applique qu’au contrat de travail à durée indéterminée. Tous les autres

contrats prévus par le code du travail exigent pour leur validité la rédaction d’un

acte écrit. Il convient cependant de distinguer l’exigence d’un écrit de

l’accomplissement d’un certain nombre de formalités nécessitées par

l’embauche d’un salarié.

1) La nécessité d’un écrit

La loi n’impose pas d’écrit pour les contrats de travail à durée indéterminée à

temps complet ou plein temps. Mais, il est peut être conseillé aux parties de

rédiger un écrit afin de se ménager une preuve de la convention. D’ailleurs,


Certaines conventions collectives recommandent que le contrat à durée

indéterminée soit conclu par écrit.

Mais, plus nettement pour la validité de certains types de contrats de travail

particuliers, la loi exige exceptionnellement la rédaction d’un écrit afin de

faciliter le contrôle de l’administration. C’est le cas des contrats à durée

déterminée, le contrat d’engagement à l’essai, le contrat d’apprentissage et le

contrat d’intérim ou temporaire. Il en est de même du contrat de travail conclu

avec un salarié étranger, même s’il s’agit d’un CDI.

L’écrit est le seul moyen dont dispose l’employeur pour prouver l’existence de

ces contrats à la différence du salarié qui peut les prouver par tout moyen.

2) L’accomplissement de diverses formalités

On distingue les formalités administratives générales et celles qui sont

spécifiques au travailleur étranger.

- Les formalités administratives générales

Le contrôle administratif de l’emploi concerne l’obligation de déclaration

d’embauche. En application de l’arrêté du 29 septembre 1953 fixant les

modalités d’application de la déclaration des embauches et de cessation des


contrats de travail, cette déclaration doit être effectuée dans les 48 heures de

l’embauche à l’Inspection du travail.

Aux termes de l’article 257 du code du travail, l’employeur doit tenir un

« registre d’employeur » sous le contrôle de l’Inspection du travail. Ce registre

comprend trois parties :

 la première contient des informations sur les travailleurs ;

 la deuxième est spécifique à chaque travailleur. Elle indique sa

catégorie professionnelle, la nature du poste qu’il occupe, le salaire et les

congés ;

 la troisième partie est réservée à l’Inspection du travail. Elle permet

à l’administration d’y faire figurer ses visas, observations ou mises en

demeure.

Enfin, tous les salariés de nationalité gabonaise doivent, en application de

l’article 258 du code du travail, détenir une carte de travail délivrée par

l’Inspection du travail. Cette carte indique leurs noms, prénoms, date et lieu de

naissance, situation de famille, profession et la convention collective applicable.

- Les formalités liées à l’embauche d’un travailleur étranger


Elles visent à permettre le contrôle par l’autorité administrative des flux

d’étrangers employés au Gabon. Outre les formalités qui ont trait au séjour

régulier au Gabon, le recrutement d’un travailleur étranger est subordonné à

l’accomplissement de trois formalités administratives :

● L’autorisation d’emploi

Aux termes de l’article 104, alinéa 1, tout emploi d’un travailleur étranger est

nécessairement précédée d’une autorisation d’emploi délivrée par le ministre du

travail72.

La demande d’autorisation contient un engagement inconditionnel de

rapatriement du travailleur étranger et de sa famille à la cessation du travail. La

première autorisation ne peut être délivrée qu’à un étranger résidant hors du

territoire national. En application de l’article 105, l’autorisation est accordée

pour une période de deux (2) ans renouvelable. La demande de renouvellement

doit être introduite deux mois avant l’échéance de la première autorisation.

L’autorisation est donnée en principe pour un emploi qu’un travailleur national

ne peut occuper, compte tenu de la qualification exigée ou de sa disponibilité


72 CA Libreville, 14 janvier 2000, affaire Hôpital Pédiatrique de Melen c/ N. P, inédit.
(décret n° 277 du 31 mai 1968 et décret n° 663 du 5 juillet 1972, arrêté n°

27/M.T.E du 29 décembre 1989). La délivrance de l’autorisation peut être

assortie de l’obligation de former un travailleur gabonais.

● Le visa du contrat de travail

Le contrat de travail d’un salarié étranger doit obligatoirement être visé par les

services compétents du ministère du travail à la diligence de l’employeur. Cette

formalité a pour de contrôler la conformité du contrat conclu à la législation

sociale. L’employeur engage sa responsabilité s’il emploie un salarié étranger

dont le contrat n’a pas été soumis à la formalité du visa au ministère du travail.

Toutefois, cette responsabilité n’est pas encourue lorsque le défaut de visa est

la conséquence d’une négligence des services de l’inspection du travail qui n’ont

pas examiné la demande de visa introduite dans les délais légaux73

Le visa est accordé pour une période deux ans.

● La carte de travailleur étranger

Le salarié étranger régulièrement recruté doit, en vertu de l’article 259, être

titulaire d’une carte de travailleur étranger délivrée par les services de

l’inspection du travail, à la diligence de l’employeur. La durée de validité de la


73 CSG, 1er mars 1971, Revue Travail et Profession d’Outre-Mer, n° 322 du 16 mars 1972, p. 7.115.
carte est de deux ans renouvelable dans les mêmes conditions que l’autorisation

d’emploi et le visa du contrat de travail.

§2/ La sanction de la violation des conditions de validité du contrat de travail

La violation des conditions de formation du contrat de travail est sanctionnée

par la nullité et/ou la requalification.

A/La nullité du contrat de travail

La nullité est la sanction de droit commun de la formation du contrat. Elle

sanctionne les vices de fond (absence ou vice de consentement, incapacité,

illicéité ou immoralité de l’objet ou de la cause, violation des interdictions ou

des obligations de contracter,) et exceptionnellement les vices de forme (refus

de visa, omission de visa, défaut d’écrit de l’essai) du contrat de travail. Ainsi,

s’agissant du contrat de travail d’un étranger, en cas de refus de visa, le contrat

de travail du salarié étranger est nul et de nul effet. Il en est de même si

l’employeur n’a pas fait de demande de visa74.

74 TTL, 20 mars 1981, Revue de Droit Africain du travail « TPOM », n° 547 du 2 janvier 1982, p. 11.
Un contrat déclaré nul cesse de produire ses effets. Cependant, cette nullité

n’entraîne pas l’anéantissement rétroactif du contrat. Le salarié conserve la

rémunération qu’il a reçue, et peut réclamer les salaires qui ne lui ont pas été

payés et l’indemnité de rupture. L'annulation d’un contrat de travail n'est rien

d'autre qu'une résiliation.

Quand une clause simplement du contrat de travail est illicite, la clause est

déclarée nulle, et, si elle n’est pas déterminante, impulsive dans la conclusion du

contrat, le contrat ne sera pas annulé. La nullité est alors partielle et non totale.

B/La requalification du contrat de travail

La nullité du contrat de travail est dans certains cas suivie de sa transformation

en contrat de travail de droit commun. Il en est ainsi des contrats annulés pour

défaut d'écrit. Ils sont requalifiés, transformés, convertis en contrat à durée

indéterminée. On parle de conversion par majoration.

Mais dans la plupart des cas, la requalification constitue l'unique sanction prévue

par la loi. Ainsi, est purement et simplement requalifié ou réputé à durée

indéterminée, le contrat particulier conclu en violation de son interdiction, en

dépassement de la durée, du nombre de conclusions ou de renouvellements


successifs autorisés, en cas de prolongation des services à l'expiration de la durée

prévue ou sans être déposé.

C’est au salarié de faire la démarche nécessaire pour que le contrat soit réputé à

durée indéterminée.

Chapitre 2 : Le contenu du contrat de travail

Avant ou au moment de la conclusion du contrat de travail, l’employeur peut

prévoir une période d’essai avant d’engager, de façon définitive, le salarié

recruté ou pressenti à occuper à un emploi.Par ailleurs, le contrat de travail

comporte généralement diverses clauses qui peuvent, à certains égards, se

révéler abusives ou dangereuses pour le salarié

Section 1 : La période d’essai

Il s’agit d’une période au cours de laquelle l'employeur et le travailleur, en vue

de conclure le contrat définitif, décident au préalable, d'apprécier notamment le

premier les aptitudes professionnelles du salarié qu’il a recruté et son

rendement, le second, les conditions de travail, de rémunération, d'hygiène et de

sécurité ainsi que leclimat social.


Les articles 28 et suivants du code travail précisent l’existence et l’étendue de la

période d’essai ainsi que le statut du salarié et la rupture du contrat de travail au

cours de cette période test.

§1/ L’existence et l’étendue de la période d’essai

L’existence de la période d’essai ne se présume pas. Elle doit être déterminée

avec certitude. Sa durée doit être spécifiée, au même titre que son

renouvellement.

A/ La détermination de la période d’essai

Il faut aussi distinguer la période d'essai de la période probatoire

La période probatoire intervient lorsqu'un salarié change de fonction. Si la

période probatoire n'est pas concluante, le salarié retrouve ses anciennes

fonctions. Alors qu'une période d’essai non concluante conduit normalement à la

rupture du contrat.

Aux termes de l’article 29, alinéa 1, du code du travail, la période d’esai doit

nécessairement être stipulée par écrit. Si la période d’essai n’est pas stipulée par

écrit, le salarié peut considérer qu’il est définitivement embauché. Pourtant, la


CA de Libreville a jugé que l’absence d’écrit se traduit par la nullité de la

période d’essai et non pas par la conversion en CDI75.

Pour exister, la période d'essai peut être soit matérialisée par une lettre

d’engagement précédant le contrat de travail, soit prévue dans la

correspondance échangée par les parties. Il suffit à cet égard que les deux

parties aient donné leur accord et que le délai stipulé soit conforme au délai

légal. Ainsi en a jugé la Cour Suprême du Gabon dans un arrêt rendu le 14 avril

198076. Elle peut aussi être stipulée dans le contrat de travail, en application de

l’article 29 in fine du code du travail ou prévue par la convention collective

applicable à l’entreprise. Mais, même dans cette hypothèse, l’engagement à

l’essai doit toujours obligatoirement figurer expressément dans la lettre

d’engagement, la correspondance échangée par les parties ou le contrat de

travail. Le TTL de Libreville applique strictement ce principe dans un cas où il

n’est pas établi que le salarié a reçu la lettre d’engagement ni, a fortiori, qu’il

en a accepté les termes77.

B/ La durée et le renouvellement de la période d’essai

Quant à la durée de l’essai, en droit gabonais, les parties ne sont pas libres de

fixer la durée de la période d’essai. Selon l’article 30, alinéa 2, du code du

75 CA Libreville, 18 avril 2000, affaire Société E c/ E. J-C, inédit.


76 CSG, 14 avril 1980, RJSG, n° 8, p. 15 ; Revue de Droit Africain du Travail « TPOM » n° 536 du 2 juillet 1981, p. 278.
77 TTL, 16 décembre 1977, Revue Travail et Profession d’Outre-Mer, n° 464 du 16 mai 1978, p. 199.
travail, ni le contrat individuel de travail ni la convention ne peuvent prévoir une

durée de la période d’essai supérieure à six (6) mois pour les cadres, trois (3)

mois pour les employés, techniciens et agents de maîtrise et d’ un (1) mois pour

les autres salariés78. On en déduit que le contrat individuel de travail ou la

convention collective peut prévoir une période d’essai inférieure à la durée

légale en tenant compte de la catégorie professionnelle du salarié. L’article 30,

alinéa 2, fait ainsi une application implicite du principe de faveur.

Les délais prévus à l’article 30, alinéa 2, intègrent le renouvellement de l’essai.

Ainsi, dans tous les cas, la période d’essai prévue par le législateur est

impérative et les parties ne peuvent y déroger.

A l’expiration de la période d’essai, l’employeur doit se prononcer sur la suite de

la relation contractuelle et donc si le contrat de travail est ou non définitivement

conclu. D’ailleurs, en application de l’article 33 du code du travail, lorsque le

salarié demeure dans l’entreprise à l’expiration de la période d’essai, son

engagement à l’essai se transforme ipso facto en contrat définitif79 Il prend effet

à la date du début de l’essai, aux clauses et conditions prédéterminées.

§2/ Le statut du salarié pendant la période d’essai

78 CA Libreville, 22 août 2000, affaire Société G. C c/ O. C, inédit. Dans cette espèce, la Cour d’appel applique l’article 27 du code
du travail en vigueur jusqu’en 1994. Ce texte fixait la durée de l’essai à 6 mois.
79 CA Libreville, 18 avril 2000, affaire Société E. c/ E. J-C, inédit.
Aux termes de l’article 32 qui renvoie aux dispositions de l’article 36 du code du

travail, l’engagement à l’essai est suspendu en cas de maladie, de maternité ou

d’accident du salarié. Il en résulte donc que la période d’essai interrompue par

la maladie, la maternité ou l’accident du salarié est automatiquement prorogée

de la durée de l’absence afin que le salarié effectue réellement la durée légale

ou convenue. La conséquence c’est que le salarié ne peut être licencié pendant

la suspension du contrat.

C’est ce qui résulte d’un arrêt de la Cour suprême du 4 avril 1977. Dans cette

espèce, la période d’essai de 3 mois avait été suspendue en raison de l’accident

du travail du salarié attesté par un médecin. Le salarié avait été licencié au cours

de la période d’invalidité. Estimant que la période d’essai aurait dû se poursuivre

après la cessation de l’invalidité du salarié, le juge avait déclaré abusif le

licenciement intervenu pendant la période de suspension de l’essai80.

§3/ La rupture du contrat pendant la période d’essai

L’engagement à l’essai d’un salarié peut être rompu à tout moment à l’initiative

de l’une ou l’autre des parties, sans qu’aucun préavis ni indemnité ne puisse être

exigé. Cette liberté et souplesse dans la rupture ne semble pas exclure

totalement la possibilité d’une rupture abusive.

80 CSG, 4 avril 1977, RJSG, n° 10, p. 16.


A/Les modalités de la rupture

Lorsque l’initiative est prise par l’employeur, la rupture doit être portée à la

connaissance du salarié avant l’expiration de la période d’essai. C’est à cette

condition que la rupture intervenue sera considérée comme une rupture de la

période d’essai. L’employeur qui respecte cette condition n’est pas tenu de

fonder la rupture sur une cause réelle et sérieuse. De manière générale, le droit

de résiliation discrétionnaire reconnu à chaque partie la dispense de motiver la

rupture. Ainsi, l’employeur n’est pas assujetti au respect des règles du

licenciement, y compris le préavis. La CA de Libreville juge à juste titre que la

rupture de l’essai ne peut être assimilée à un licenciement81

Toutefois, l’article 45 du code du travail qui prévoit le principe de la liberté de la

rupture n’est pas une disposition d’ordre public.

B/ La rupture abusive

Le droit de résiliation du contrat de travail reconnu à l’employeur pendant la

période d’essai est susceptible d’abus et pourrait donc donner lieu à des

dommages et intérêts. C’est dans ce sens que s’oriente la jurisprudence

française. Il en est ainsi, décide la jurisprudence, lorsque la rupture a été faite

avec précipitation ou légèreté blâmable ou intention malveillante82. L’abus est

également et plus sûrement constaté à chaque fois que le salarié peut prouver

81 CA Libreville, 27 juin 2000, affaire P. B. Y c/ O.P.T, inédit.


82 Soc. 2 févr. 1994. n°90-43.836 ; Soc. 15 nov.2005. n°03-47.546, Bull. Civ., n°321.
que le motif de la résiliation est étranger à l’appréciation de ses capacités

professionnelles83.

Section 2 : Les clauses contractuelles

Les parties à la relation de travail peuvent insérer dans le contrat de travail

différentes clauses contractuelles.Le code du travail n’en réglemente qu’une

seule, à savoir la clause de non concurrence. Pourtant il en existe d’autres

notamment celles dont la vocation est d’accroitre le pouvoir de l’employeur.

§1/ La clause de non-concurrence

En principe, l’employeur ne peut interdire au salarié d’exercer une activité

professionnelle à l’expiration du contrat de travail. Il s’agit d’une application du

principe de la liberté du travail. Toutefois, ce principe est atténué par

l’admission de la clause de non-concurrence qui limite l’exercice par le salarié

d’une activité concurrente de celle de l’ancien employeur. Il convient

d’examiner les conditions de validité et la mise en œuvre de la clause de non-

concurrence.

A/ Les conditions de validité de la clause de non-concurrence

83 Soc. 10 déc.2006, n° 07-42.445, Dr. soc. 2009. 235, Note G. COUTURIER.


L’article 34, alinéa 1 du code du travail interdit à tout employeur d’embaucher

un salarié qui demeure juridiquement engagé à l’égard d’un autre employeur.

De la sorte, un employeur qui envisage d’embaucher un nouveau salarié doit

préalablement s’assurer que ce dernier est libre de toute obligation à l’égard

d’un précédent employeur.

Dans cette logique, en application de l’article 34 alinéa 2 du code du travail, il

est interdit à un employeur de recruter un salarié lié par une clause de non

concurrence, ayant pris l’initiative de rompre son précédent contrat de travail ou

lorsque la rupture de ce contrat résulte d’une faute lourde de celui-ci84. En

outre, l’activité proposée par le nouvel employeur doit être identique à celle de

l’ancien employeur. Il s’agit, selon l’article 34, l’exercice d’une activité portant

concurrence de façon déloyale à l’employeur. C’est à l’employeur de rapporter la

preuve du caractère déloyal de la concurrence. A cet effet, l’ancien employeur

doit prouver que le salarié utilise des procédés irréguliers ou des manœuvres

pour détourner la clientèle. Il peut s’agir d’un dénigrement, d’une publicité

comparative ou, plus généralement, d’une confusion entretenue dans l’esprit de

la clientèle.

Par exemple dans l’arrêt rendu par la chambre judiciaire de la Cour suprême le

21 juillet 1980, le salarié licencié pour faute lourde avait été embauché par un
84 CSG, 21 juillet 1980, RJSG, p. 101 et s.
nouvel employeur auquel il avait apporté les méthodes de vente et des procédés

conçuslorsqu’il était au service de l’ancien employeur. Ces faits suffisent à

établir le caractère déloyal de la concurrence.

B/ La mise en œuvre de la clause de non-concurrence

La mise en œuvre de la clause de non-concurrence est circonscrite dans le temps

et dans l’espace. Selon l’article 34 du code du travail, l’interdiction résultant

d’une clause de non-concurrence ne peut être supérieure à un an et ne peut

s’appliquer que dans un rayon de 5 kilomètres autour du précédent lieu de

travail. De cette double exigence cumulative dépend l’application de la clause de

non-concurrence85.

Le contrat individuel de travail, la convention collective ou les usages peuvent

réduire mais non augmenter la durée de l’interdiction légale ou le champ spatial

de la clause.

En cas d’inobservation de la clause de non concurrence le salarié peut voir sa

responsabilité civile engagée dès lors que l’ancien employeur arrive à prouver

l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre la faute et

le préjudice.86. L’employeur peut aussi faire cesser les actes de concurrence

85CSG, 21 juillet 1980, RJSG, p. 101 et s ; voir en droit français, Cass soc, 10 juillet 2002, D. 2002, Juris, 2491, note Y. Serra.
86 CSG, 21 juillet 1980, RJSG n° 79, p. 101 et s.
déloyale sous astreinte. Dans ce cas, le juge condamne le salarié à résilier le

contrat de travail conclu avec un nouvel employeur ou ordonne la fermeture de

l’entreprise ouverte en violation de la clause de non-concurrence87. Ces sanctions

peuvent être cumulées avec des dommages et intérêts88.

En ce qui concerne le nouvel employeur qui a embauché un salarié en dépit de

l’existence de la clause de non-concurrence, il n’engage sa responsabilité civile

délictuelle à l’égard de l’ancien employeur que s’il avait connaissance de

l’existence de la clause de non-concurrence. Mais même s’il ignorait l’existence

de la clause de non concurrence, la jurisprudence considère que le nouvel

employeur pourrait cependant voir sa responsabilité civile mise en œuvre sur le

fondement de l’article 1383 du code civil ancien, car, il aurait dû se renseigner

avant d’embaucher le salarié. L’idée c’est qu’il a commis une imprudence ou une

négligence en ne prenant pas la peine de vérifier si le salarié qu’il a décidé de

recruter n’était pas encore engagé à son ancien employeur en vertu d’une clause

de non-concurrence89.

§2/Les clauses d’accroissement du pouvoir

D’une manière générale, le contrat de travail est l’œuvre de l’employeur, le

salarié ne fait qu’y adhérer. Il n’est donc pas rare de trouver dans le contrat de

87Cass soc, 24 janvier 1979, D. 1979. 619, note Y. Serra ; Cass soc, 13 janvier 1998, Dr. soc. 1998, p. 279.
88Cass soc, 24 janvier 1979, D. 1979. 619, note Y. Serra.
89Casscom, 11 juillet 2000, RJS 3/01, n° 302.
travail des clauses qui renforcent le pouvoir de l’employeur, au nombre

desquelles les clauses de mobilité et les clauses de variation de la rémunération à

verser au salarié.

A/ Les clauses de mobilité

Elles autorisent l’employeur à modifier le lieu de travail du salarié dans une zone

géographique fixée avec précision dans le contrat de travail. C’est sur cette base

que l’employeur peut muter le salarié dans ses différentes implantations ou

établissements à l’intérieur de la sphère géographique de mobilité définie dans

le contrat de travail.

La clause de mobilité réalise un simple changement des conditions de travail que

l’employeur peut décider unilatéralement dans le cadre de son pouvoir de

direction. Il est donc fondé à licencier le salarié qui refuserait de regagner son

nouveau lieu de travail

B/ Les clauses de variation de la rémunération

La jurisprudence affirme la validité des clauses qui prévoient une variation de la

rémunération versée au salarié dès lors qu’elles sont fondées sur des éléments
objectifs indépendants de la volonté de l’employeur et qu’elles n’ont pas pour

objet de réduire la rémunération au-dessous des minimas légaux et

conventionnels90. Elles prennent, en pratique, la dénomination de clause de

résultats, de quota ou encore de clauses de résultats.

Une telle clause permet de transférer une partie du risque économique sur le

salarié dont la rémunération ou la présence dans l’entreprise va dépendre de

critères économiques déterminés par l’employeur. Parmi ces critères figurent

notamment les objectifs atteints par le salarié. En principe, les objectifs à

atteindre doivent être fixées contractuellement. Dès lors en cas désaccord entre

les parties, c’est au juge d’arrêter lui-même le montant de la rémunération, en

se fondant sur les éléments contenus dans le contrat de travail ou puisés dans les

accords antérieurement conclus. Cependant, ils peuvent être déterminés ou

modifiés unilatéralement par l’employeur, à condition qu’ils soient réalisables et

qu’ils aient été portés à la connaissance du salarié en début d’exercice91.

§3/ Les clauses diverses

On peut citer, parmi les plus courantes, la clause de garantie de l’emploi et la

clause de domiciliation.

90 Soc. 2 juil. 2002, Bull. V., n° 229.


91 Soc. 2 mars 2011, n° 08-44.977.
A/ La clause de garantie de l’emploi

La clause de garantie de l’emploi est parfois stipulée dans le contrat de travail au

profit de salariés hautement qualifiés que l’employeur débauche d’une autre

entreprise. Elle vise à interdire le licenciement du salarié pendant un certain

temps, sauf s’il commet une faute grave. Tout licenciement intervenu en

l’absence de faute grave oblige l’employeur à indemniser le salarié jusqu’au

terme de la période garantie. Ce qui revient à payer au salarié le solde des

salaires restant dus jusqu’à la fin de la période garantie.

B/ La clause de domiciliation

Elle permet à l’employeur d’exiger du salarié qu’il réside à proximité du lieu de

travail. La clause de domiciliation est une limite au principe du libre choix du

domicile. Elle n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts

légitimes de l’entreprise et si elle est proportionnée compte tenu de l’emploi

occupé, du travail demandé et du but recherché.


Sous-Titre 2 : La vigueur du contrat de travail

Le contrat de travail s’inscrit dans la durée. Il s’exécute de manière progressive.

Or, l’exécution du contrat initialement conclu par les parties peut être entravée

par la survenance d’un certain nombre d’événements. La prise en compte de ces

évènements explique les règles relatives à la suspension du contrat de travail

et au maintien du contrat en cas d’évolution de la relation de travail.

Chapitre 1er : La suspension du contrat de travail

L’article 36 du code du travail distingue deux causes de suspension du contrat de


travail, à savoir la maladie et l’accident du salarié et la maternité.

Section 1 : La suspension consécutive à la maladie ou à l’accident du salarié


Le régime juridique de la suspension dans cette hypothèse tend à protéger le

salarié dans deux hypothèses distinctes :

- le salarié est victime d’une maladie ou d’un accident ayant son origine dans le

travail

- En cas de maladie ordinaire ou d’accident non professionnel

On distingue dans cette catégorie trois situations :

La maladie non professionnelle ordinaire : il s’agit d’une maladie qui n’est pas

liée à l’activité du salarié du fait ou à l’occasion du travail et qui doit être

attestée par la production d’un certificat médical justifiant l’indisponibilité ou

l’absence du salarié à son lieu de travail.

La maladie non professionnelle de longue durée : elle est définie par l’article

39 du code du travail comme une affection de longue durée nécessitant un

traitement régulier et reconnue comme telle par le contrôle médical ainsi qu’un

arrêt de travail de longue durée.

La maladie du conjoint ou de l’enfant du salarié,


Aux termes de l’article 36, alinéa 3, du code du travail, le contrat de travail est

aussi suspendu lorsque le conjoint ou l’enfant du salarié souffre d’une maladie

dûment constatée par un médecin.

§1/ Durée de la suspension

En cas de maladie ordinaire ou d’accident non professionnel, l’article 37-3) du

code du travail fixe la durée maximale de la suspension à 6 mois.

S’il agit de l’accident ou de la maladie du conjoint ou de l’enfant, la durée de

suspension est fixée à 15 jours

Lorsque la suspension du contrat de travail résulte de l’accident ordinaire ou de

la maladie non professionnelle, le salarié a droit, en application de l’article 37, à

une indemnité correspondant au montant de la rémunération auquel il aurait pu

prétendre si le contrat n’avait pas été suspendu. Cette indemnité inclut le salaire

et tous ses accessoires. Mais elle n’est due que dans la limite du préavis. Sa

durée dépend donc de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise

La durée de la suspension du contrat de travail pour accident du travail ou

maladie professionnelle n’est pas n’est pas limitée. L’employeur ne peut pas, en

principe, licencier un salarié tant qu’il n’est pas médicalement établi qu’il est

guéri ou qu’il y a consolidation de ses blessures.


§2/ Droits des salariés pendant la suspension

Lorsque la suspension du contrat de travail résulte de l’accident du travail ou de

la maladie professionnelle, le salarié ne bénéficie d’aucune rémunération ni

indemnité versée par l’employeur. En application de l’article 38 b), il est

indemnisé conformément aux dispositions de l’article 58 du code de la sécurité

sociale qui prévoit l’une ou l’autre des prestations suivantes :

- Les soins médicaux ;

- Une indemnité journalière ;

- Une rente d’incapacité en cas d’incapacité totale ou partielle ;

- Une rente de survivant ainsi que le remboursement des frais funéraires s’il

y a décès de la victime.

- Lorsque la suspension du contrat de travail résulte de l’accident

ordinaire ou de la maladie non professionnelle, le salarié a droit, en

application de l’article 37, à une indemnité correspondant au

montant de la rémunération auquel il aurait pu prétendre si le

contrat n’avait pas été suspendu. Cette indemnité inclut le salaire et

tous ses accessoires. Mais elle n’est due que dans la limite du préavis.

Sa durée dépend donc de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise.


-

- Le salarié conserve son ancienneté et bénéficie des congés payés. En

outre, il ne peut être licencié.

- Toutefois, il est de jurisprudence constante que l’employeur qui

apporte la preuve d’une faute commise par le salarié avant ou

pendant la suspension du contrat est en droit de le licencier. Tel est

le cas de la salariée qui conclut un contrat de travail pendant la durée

de la suspension. Le licenciement est encore justifié lorsque le salarié

ne regagne pas son poste de travail à l’issue de la suspension du

contrat de travail ou lorsqu’il ne fournit pas un certificat médical

attestant de sa maladie92.

Section 2 : La suspension consécutive à la maternité de la salariée

La maternité est une cause important de suspension du contrat de travail. Quelle

est la durée de cette suspension et quels sont les droits reconnus à la femme

salariée enceinte ou qui vient d’accoucher

§1/Durée de la suspension

92 Cf. CSG, 5 déc. 1983, RJS du Gabon, p. 33 : Salarié malade. Absence d’information de
l’employeur ; absence de présentation du certificat médical. Maladie cause de rupture.
Licenciement légitime.
Aux termes de l’article 39, alinéa 6, du code du travail, le contrat de travail de

la femme enceinte est suspendu à compter du début du congé de maternité. La

durée de ce congé est fixée par l’article 171 du code du travail à 14 semaines

consécutives dont six semaines avant (congé prénatal) et huit semaines après la

date présumée de l’accouchement (congé post natal).

Lorsque l’accouchement a lieu après la date prévue, le législateur prolonge le

congé prénatal jusqu’à la date de l’accouchement sans que cela ait pour effet de

réduire le congé post-natal.

Lorsque la femme donne naissance à plus d’un enfant à la fois, le congé post-

natal est prolongé de 2 semaines. Le législateur prolonge encore le congé de

maternité de 3 semaines en cas de maladie de la femme enceinte. Il suffit que

cette maladie résulte de la grossesse ou de l’accouchement.

§2/Droits de la salariée pendant la suspension

Pendant son congé de maternité, la femme salariée bénéficie de la gratuité des

frais médicaux ainsi que de l’intégralité du salaire qu’elle percevait au moment

de la suspension. Ces droits sont à la charge de la CNSS.

La femme conserve également les prestations en nature dont elle bénéficiait

dans l’entreprise.
Outre les congés payés qui lui sont obligatoirement octroyés lorsqu’elle en fait la

demande immédiatement après le congé postnatal, la loi accorde à la femme

salariée qui vient d’accoucher un repos d’allaitement de 12 mois réparti comme

suit:

- 2 heures par jour pendant les 6 premiers mois ;

- 1 heure par jour pendant les 6 derniers mois.

Le temps de repos pour allaitement est compris dans la durée du travail et

l’employeur est obligé de le rémunérer.


Chapitre 2 : L’évolution de la relation contractuelle de travail

Modification de la situation juridique de l’employeur et modification du contrat


de travail.

Section 1 : Les transferts d’entreprises

Les hypothèses envisagées sont multiples. Il suffit d’imaginer une société

exploitant un fonds commerce de pâtisserie-boulangerie ou de transport qui cède

son fonds de commerce à un repreneur. Une entreprise de BTP ou de fabrication

de produits chimiques qui assurait elle-même la restauration de ses salariés et

qui décide de sous-traiter le restaurant d’entreprise à une société spécialisée

dans la restauration ; une mairie qui n’est pas satisfaite de la manière dont sont

entretenus les espaces verts et autres jardins municipaux et qui décide de ne pas

renouveler le contrat avec l’entreprise d’entretien et de confier cette activité à

une autre société. Que deviennent les salariés affectés à l’exécution de ces

activités qui passent d’une entreprise à une autre ? La succession d’entreprises

sur une même activité ou le changement d’employeur qui en résulte entraîne-t-il

la rupture du contrat de travail des salariés en poste ?


Cette situation est prévue par l'article 78 du Code de Travail qui dispose que « s'il

survient une modification dans la situation juridique de l'employeur notamment

par succession, vente, fusion, transformation de fonds, mise en société, tous les

contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel

employeur et le personnel de l'entreprise ».

Par cette disposition, le code du travail déroge à la règle de l’effet relatif des

conventions en obligeant le repreneur à continuer une relation de travail à

laquelle il n’était pas partie.

De la sorte, le législateur gabonais consacre une règle ancienne visant à

sécuriser l’emploi chaque fois que l’entreprise change de propriétaire : c’est la

règle de la reprise par le nouvel employeur des contrats de travail en cours en

cas de transfert d’entreprise ou d’activité.

Après avoir précisé les conditions de la poursuite des contrats de travail en cours

au moment du transfert, il conviendra d’en déterminer les effets.

§1/Le domaine d’application

L’application de l’article 78 du code du travail suppose qu’il y ait une opération

quelconque de transfert d’entreprise ou d’activités et que ce transfert porte sur

une entité économique dont l’activité est poursuivie après le transfert.


A/Une opération de transfert d’entreprise ou d’activité

La modification de la situation juridique de l’employeur peut résulter des

opérations ou actes juridiques expressément visés par l’article 78 « succession,

vente, fusion, transformation de fonds ou mise en société ». Mais il s’agit d’une

liste indicative comme l’atteste l’utilisation de l’adverbe « notamment ». Ainsi

d’autres modes de transfert permettent aussi la reprise par le nouvel employeur

des contrats de travail, tels que par exemple une cession partielle d’actifs93., une

location gérance telle que le prévoit l’article 9 de la loi du 13 février 1996 fixant

les règles de privatisation des entreprises du secteur public.

B/Une entité économique transférée

En principe le transfert doit porter sur une entité économique définie comme

« un ensemble organisé de moyens en vue de la poursuite d’une activité

économique, que celle-ci soit essentielle ou accessoire ». Il s’agit donc d’une

entreprise appréhendée comme une « organisation autonome de production de

biens ou de services marchands »94 ou une activité mais aussi des moyens avec

lesquels cette activité économique est réalisée.

93 TTL, 16 avril 1976, Revue de Droit du Travail Africain « TPOM », n° 493 du 2 septembre 1979, p. 344 et s.
94J. Pélissier, A. Supiot, A. JeammaudDroit du travail. 23e édition, Dalloz 2006, n° 336, p. 417.
Ce peut être des moyens corporels (machines, des camions, des locaux…) ou

incorporels (marques, brevets, droit au bail, liste ou listing des clients….). Mais

aussi des moyens humains : c’est ce résulte des arrêts rendus par la Cour d’appel

de POG, le 22 juillet 2008, dans l’affaire CORA WOOD GABON. La question se

pose de savoir si le transfert de l’entité économique implique son maintien après

le transfert.

Le maintien de l’activité économique suppose que le nouvel employeur exerce,

dans le cadre de l’entreprise transférée, la même activité que son prédécesseur.

La jurisprudence française semble aujourd’hui se satisfaire d’un maintien de

l’identité de l’activité économique au seul moment du transfert : il suffit d’une

reprise des moyens corporels et incorporels nécessaires à l’exploitation et les

changements intervenus postérieurement ne sont pas pris en compte.

Les conditions de la poursuite des contrats de travail en cours au moment du

transfert étant définies, il est désormais possible d’en déterminer les effets.

§2/ Le maintien des contrats de travail en cours

L’application de l’article 78 entraîne des effets tant à l’égard des salariés

présents dans l’entreprise au moment du transfert, qu’à celui des employeurs


successifs. D’où découlent son caractère d’ordre public et l’obligation pour

l’employeur d’exécuter lesdits contrats.

A/ Le caractère d’ordre public du maintien des contrats de travail en cours

Aux termes de l’article 78 du code du travail « … tous les contrats de travail en

cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le

personnel de l'entreprise ». Il en résulte que le contrat conclu avec l’ancien

employeur se poursuit avec le nouvel employeur sans que la conclusion d’un

nouveau contrat soit nécessaire. Il ne peut donc y avoir de nouvelle embauche

des anciens salariés.

Les contrats individuels de travail ne sont pas affectés par le « changement de

contractant »95. Il s’agit donc d’une règle d’ordre public qui s’applique

automatiquement, quelles que soient la forme du contrat (CDI, CDD, contrat

d’intérim, contrat d’apprentissage) et l’ancienneté du salarié. Elle s’applique en

outre, lorsque le salarié est en période d’essai ou lorsque son contrat de travail

se trouve suspendu.

En principe, en raison du caractère impératif de la règle énoncée par l’article

78,le salarié ne peut pas s’opposer au transfert de son contrat de travail. Son

refus peut constituer une faute et conduire à son licenciement.

95 D. R. Martin, « Du changement de contractant », D. 2001, chron, p. 3144.


De même, dès que le transfert de l’entreprise devient effectif, le nouvel

employeur dispose de tous les attributs d’un chef d’entreprise. En particulier,

l’exercice du pouvoir disciplinaire qui lui permet de licencier les salariés dont les

contrats ont été maintenus, à condition d’établir l’existence d’une cause réelle

et sérieuse et de se conformer à la procédure légale de licenciement.

C’est le sens du jugement rendu par le Tribunal de Travail de Libreville dans une

affaire où l’employeur, après le transfert, avait licencié un salarié sous contrat à

durée déterminée sans rapporter la preuve d’une faute lourde96. Le Tribunal a

considéré qu’un tel licenciement avait pour effet de faire obstacle, a posteriori,

au principe du maintien des contrats en cours.

B/L’obligation d’exécuter les contrats en cours

La transmission automatique et impérative des contrats de travail en cours oblige

le nouvel employeur à respecter le contenu et les modalités de ces contrats

conclus avec l’ancien employeur. Le nouvel employeur doit en conséquence,

permettre aux salariés d’accéder au lieu de travail, leur donner la possibilité

d’accomplir leur prestation de travail97 et assurer leur rémunération telle que

96TTL, 16 avril 1976, précité.


97T. Révet, « La liberté du travail », in Droits et libertés fondamentaux, sous la direction de R. Cabrillac, M-A Frison-Roche, T. Revet,
2e édition Dalloz 1995, p. 427 et s, spéc p. 443.
prévue au contrat de travail98 en tenant compte de l’ancienneté du salarié

acquise avant le transfert99. Ainsi, qu’elle qu’en soit la source100, le salarié

continue de bénéficier du délai de préavis ou des indemnités de rupture dont on

sait qu’elles sont calculées en fonction de son ancienneté dans l’entreprise.

Il pèse également sur le nouvel employeur l’obligation de payer tous les droits

acquis par le salarié avant le transfert mais qui se réalisent postérieurement à

celui-ci. En vertu de cette obligation, il doit par exemple acquitter les arriérés

de salaire, les primes de fin d’année ou les indemnités de congés payés dus par

l’ancien employeur.

Section 2 : La modification du contrat de travail

La théorie générale du contrat nous enseigne que le contrat, étant un accord de

volontés, il ne peut être modifié que par le consentement mutuel des deux

parties : c’est la règle de l’immutabilité, de l’intangibilité des conventions qui

interdit toute modification unilatérale du contrat.

Toutefois, la nécessité de s’adapter aux mutations technologiques et les

restructurations d’entreprises obligent parfois l’employeur à faire évoluer le

contenu de la prestation de travail définie dans le contrat de travail.

98 G. Pignarre, « L’obligation de l’employeur de mettre un emploi à la disposition du salarié », D. 2001, chron. p. 3547 et s, spéc n°
8.
99CSG, 15 octobre 1984, RJSG, n° 17, p. 28.
100 Ces droits peuvent résulter du contrat, de la convention ou de l’accord collectif de travail.
Il se pose alors la question de savoir quels sont les éléments de la relation de

travail qui peuvent être unilatéralement modifiés par l’employeur sans affecter

la substance même du contrat de travail ?

Pour répondre à cette question, il convient de distinguer la modification du

contrat et le simple changement des conditions de travail. De la sorte, toute

modification de la relation de travail ne réalise pas forcément une modification

des conditions d’emploi et de travail du salarié telles que déterminées dans le

contrat de travail. L’intérêt de la qualification de la modification opérée est

évident : celui de préciser les conséquences juridiques d’un refus éventuel, par

le salarié, d’une modification de la prestation de travail.

§1/ La modification du contrat et le changement des conditions de travail

La jurisprudence gabonaise, suivant en cela une ancienne jurisprudence

française, paraît distinguer deux types de modifications susceptibles d’affecter

le contrat de travail.

Les premières dites substantielles portent sur les éléments essentiels du contrat

ou sur le contrat proprement dit et emportent réduction, suppression des

avantages contractuels du salarié ou exposent celui-ci à plus de pénibilité. Ces

modifications substantielles nécessitent l’accord ou l’acceptation du salarié pour

être mise en œuvre par l’employeur.


En revanche, les secondes sont dites non substantielles, c’est-à-dire que la

modification est légère ou porte sur les conditions de travail. Dès lors, elle

peut être effectuée de manière unilatérale par l'employeur qui l'impose au

salarié. Le consentement du salarié n’est pas nécessaire car la modification

décidée par l’employeur n’affecte pas la substance du contrat de travail

En droit comparé français la terminologie jurisprudentielle a évolué depuis deux

arrêts rendus par la cour de cassation en 1996101. Aux termes de ces arrêts, la

chambre sociale de la cour de cassation française décide de désigner

« modification du contrat de travail » toute modification d’un élément

contractuel, le reste étant dit » changement des conditions de travail ». En

d’autres termes, le juge français oppose désormais la modification du contrat de

travail qui exige l’accord du salarié, au changement des conditions de travail,

qui relève du pouvoir de direction de l’employeur. Peu importe aujourd’hui le

caractère substantiel ou non de la modification pour le salarié. Dans la

mesure où l’élément changé n’est pas considéré comme contractuel, le

changement s’impose au salarié.

Dès lors comment concrètement qualifier la modification de la prestation de

travail ?

101Soc 10 juil.1996. Bull. Civ. V. n°278.


§2/La qualification de la modification de la prestation de travail

Comment déterminer ce qui relève du contenu contractuel de ce qui se rattache

plutôt à un changement de la prestation de travail ?

Les critères de qualification généralement retenus en jurisprudence concernent

la nature du travail effectué, le salaire et le lieu d’exécution de la prestation de

travail.

A/ Le travail effectué

Un salarié est recruté pour exécuter telle tâche définie et ne saurait se voir

imposer des tâches qui n’ont rien à voir avec ces attributions contractuelles. Ce

qui est sûr c’est que la qualification du travail et les responsabilités du salarié

constituent incontestablement des éléments du contrat. Ainsi un salarié

embauché pour telle tâche précise ne peut être muté sur une autre tâche qui

suppose une qualification différente de la sienne, sans son consentement.

C’est dans cette logique que le juge gabonais reconnait à l’employeur le pouvoir

de confier de nouvelles tâches au salarié dès lors qu’elles correspondent à sa

qualification et que le salarié avait d’ailleurs acquis une grande expérience en


la matière. Le refus du salarié d’exécuter les nouvelles tâches justifie alors le

licenciement prononcé par l’employeur102.

Dans le même ordre d’idées, il n’y a pas modification substantielle du contrat de

travail lorsqu’un salarié est convié à former un autre salarié. Le refus du salarié

l’expose au licenciement car, d’une manière générale, l’employeur qui confie

au salarié de nouvelles tâches sans dénaturer sa fonction ne procède pas à

une modification substantielle du contrat de travail.

B/ Le salaire

La jurisprudence affirme régulièrement que le salaire constitue un élément du

contrat de travail qui ne peut être modifié sans l’accord du salarié. La

modification prohibée est celle qui porte sur le montant, la structure et le mode

de rémunération. En clair l’employeur ne peut pas faire varier la rémunération

du salarié sans son consentement. Mais une modification unilatérale opérée par

l’employeur est possible pour la partie non contractuelle de la rémunération

c’est-à-dire celle qui résulte d’un usage, d’une convention collective ou d’un

accord collectif d’entreprise.

C/ Le lieu de travail

La jurisprudence consacre le principe selon lequel le changement de lieu de

travail relève du pouvoir de direction de l’employeur tant que le salarié reste


102 CSG, 21 février 1983, RJSG, n° 38, p. 62.
dans un même « secteur géographique ». En revanche, la mutation du salarié en

dehors de ce secteur géographique est une modification du contrat de travail. La

question est de savoir qu’elle est l’étendue de ce fameux secteur géographique ?

Cette solution de principe admet des tempéraments dans la pratique. Il en ainsi,

par exemple, d’une affectation occasionnelle en dehors des limites du secteur

géographique dès lors qu’elle est justifiée par l’intérêt de l’entreprise et que le

salarié en est informé préalablement dans un délai raisonnable du caractère

temporaire de l’affectation et de sa durée prévisible.

Les fonctions occupées par le salarié peut aussi motiver une atténuation au

principe du respect du secteur géographique contractuellement délimité, et ce

même en dehors de la stipulation d’une clause de mobilité. Par exemple, il a été

jugé dans un arrêt que la « spécificité des fonctions » d’un chef de chantier ayant

le statut d’un cadre peut justifier la possibilité de son déplacement, à titre

exceptionnel, en dehors de sa région de travail habituelle »103.

§3/ Les conséquences juridiques de la modification de la prestation de travail

Ces conséquences varient en fonction de l’attitude du salarié selon qu’il refuse

ou accepte la modification envisagée par l’employeur.

103 Soc.22 janv. 2003, Bull. Civ. V. n°15.


A/ Le refus du salarié

En droit français il est admis que le salarié bénéficie d’un droit au refus de la

modification de son contrat de travail104. Donc le refus du salarié n’étant pas

fautif, suppose la poursuite du contrat initialement conclu. L’employeur a alors

une option : soit il maintient le contrat aux conditions initialement convenues,

soit il procède au licenciement du salarié.

Le refus par le salarié d’un simple changement des conditions de travail peut

entraîner son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse dès lors que

cette décision de rupture du contrat de travail est intervenue de bonne foi et est

conforme à l’intérêt de l’entreprise105.

B/ L’accord du salarié

L’acceptation par le salarié de la modification décidée par l’employeur entraîne

une novation du contrat de travail.

La novation du rapport contractuel ne concerne que l’obligation contractuelle qui

a fait l’objet d’une modification. Il en résulte que l’obligation contenue dans le

104 Cf. Arrêt Raquin. Soc. 8 oct. 1987. Bull. Civ. V. n°541.
105 Soc. 12 juil. 2010, n°08-45516 ; Soc. 23 févr. 2005, 03-42.018.
contrat initial est éteinte au profit de l’obligation nouvelle qui s’impose aux

parties. Celles-ci ne peuvent plus exiger le retour à la situation antérieure.

S’agissant de la preuve de la modification, il est admis que, la novation ne se

présumant pas, elle doit être prouvée par la partie qui s’en prévaut. Cette

preuve peut être rapportée par tous moyens car il n’est pas exigé que

l’acceptation du salarié soit écrite. Il semble, comme en droit comparé

français106, que l’acceptation du salarié ne peut découler de la simple poursuite

de son travail. Elle ne peut pas en principe être tacite. Il en résulte que le

silence du salarié ne peut être analysé comme une acceptation de la modification

de son contrat.

106
Arrêt Raquin. Soc. 8 oct. 1987. Bull. Civ. V. n°541.
Titre 3 : La rupture du contrat de travail

En raison de sa nature, le contrat de travail peut être unilatéralement rompu par

l’employeur ou par le salarié. Toutefois, à la lecture du code du travail, le

licenciement paraît constituer le droit commun de la rupture du contrat de

travail. Il existe tout de même d’autres modes de rupture du contrat de travail.

Chapitre 1er : Le licenciement

Le droit reconnu à l’employeur de rompre le contrat de travail à durée

indéterminée prend la forme soit d’un licenciement pour motif personnel soit

d’un licenciement pour motif économique.

Section 1 : Le licenciement pour motif personnel

§1/La notion de licenciement pour motif personnel


A/Les motifs non disciplinaires
B/Les motifs disciplinaires

§2/La procédure de licenciement


La procédure de licenciement se résume à la convocation du salarié à un

entretien préalable. Ce n’est qu’à l’issue de cet entretien que l’employeur doit

notifier le licenciement au salarié. A côté de cette procédure de droit commun il

convient de signaler la procédure spéciale applicable aux salariés dits protégés.

A/ La convocation à l’entretien préalable

Aux termes de l’article 51 du code du travail, la convocation du salarié à

l’entretien préalable se fait obligatoirement par écrit soit par lettre

recommandée soit par lettre remise en main propre contre décharge, 5 jours

francs au moins avant l’entretien. A défaut d’écrit le licenciement est considéré

comme irrégulier en la forme107. La Cour d’appel de Libreville a par exemple jugé

qu’une convocation verbale ou faite par l’intermédiaire d’un autre salarié n’était

pas conforme aux dispositions de l’article 51108. La lettre de convocation précise

le motif personnel qui pourrait justifier un éventuel licenciement du salarié. La

procédure est irrégulière si l’employeur n’a énoncé aucun motif de licenciement

dans la lettre de convocation109.

La lettre de convocation doit mentionner l’heure de l’entretien. En principe,

l’entretien a lieu pendant le temps de travail.

107CA Libreville, 22 février 2000, Affaire D. V c/ Sté S, inédit.


108 CA Libreville 24 mars 1998, Revue « TPOM » n° 909, janvier 2002, p. 7.
109 CA Libreville, 12 décembre 2000, Affaire M.E. B c/ Sté T, inédit.
Enfin, l’employeur doit indiquer dans la lettre de convocation que le salarié a la

possibilité de se faire assister et, éventuellement, représenter par une personne

de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou au syndicat auquel il

est affilié.

B/ Le déroulement de l’entretien préalable

En application de l’article 51, alinéa 3, l’employeur ou son représentant doit

exposer les motifs justifié l’entretien préalable au licenciement. Il recueille les

explications du salarié ainsi que les arguments de l’assistant du salarié.

La preuve de l’entretien préalable incombe à l’employeur110. Par ailleurs, la CA

de Libreville a jugé que le conseil de discipline peut être assimilé à l’entretien

préalable111 dès lors que les règles de convocation précitées on t été respectées.

Au terme de l’entretien, l’employeur est tenu de rédiger en quatre exemplaires

originaux un procès-verbal sanctionnant l’entretien préalable. Un exemplaire

original est remis au salarié à sa demande. Le juge pourra ainsi vérifier a

posteriori que le principe du contradictoire a été respecté et que l’entretien n’a

porté que sur les motifs énoncés dans la lettre de convocation

C/La notification du licenciement

110 TTL, 22 janvier 1998, Revue « TPOM » n° 879, juillet 1999, p. 131.
111 CA Libreville, 2 juin 1998, Revue « TPOM » n° 902, juin 2001, p. 115.
L’employeur ne peut prendre la décision de licencier avant l’expiration d’un

délai de 5 jours au moins après l’entretien. Le licenciement serait donc irrégulier

s’il était prononcé au cours de l’entretien ou immédiatement après l’entretien112.

L’employeur doit notifier au salarié le licenciement par une lettre remise en

main propre et qui fait état de la cause réelle et sérieuse du licenciement.113.

La jurisprudence considère que le licenciement est irrégulier lorsqu’il y a

contrariété des motifs dans la lettre de licenciement114 ou lorsqu’il n’existe pas

de lettre de licenciement115.

D/La procédure spéciale applicable aux salariés protégés

Les salariés protégés sont ceux dont le licenciement est subordonné à

l’autorisation préalable de l’Inspecteur du travail. Sont concernés par cette

protection spéciale, les représentants du personnel c’est- à- dire, en application

des articles 290 et 300 du code du travail, les délégués du personnel, titulaires et

suppléants, ainsi que les délégués syndicaux116. La protection concerne aussi la

femme enceinte en application des dispositions de l’article 170, alinéa 2, du code

du travail. Dès lors que son état a été médicalement constaté, elle ne peut être

112 CA Libreville, 22 février 2000, Affaire D. V c/ Sté S, inédit.


113 Cour de Cassation, 1re chambre sociale, 2 juin 2004, Affaire Sté G.I.I c. T. P., inédit. Voir aussi CSG, 23 avril 1981, Revue
« TPOM » n° 577 du 16 avril 1983, p. 178.
114 CA Libreville, 18 avril 2000, Affaire B. M. T c/ Sté D. – S, inédit.
115 CA Libreville, 12 décembre 2000, Affaire M. E. B c/ Sté T, inédit.
116CSG, 4 janvier 1971, Revue « TPOM » n° 304 du 2 juin 1971, p. 6.733 ; CA Port-Gentil, 5 janvier 1998, Revue « TPOM » n° 899,

mars 2001, p. 53.


licenciée pendant la grossesse et dans les 15 mois qui suivent l’accouchement

sans l’autorisation préalable de l’Inspecteur du travail.

La demande d’autorisation est introduite par l’employeur dans un délai de 5

jours après l’entretien préalable. Lorsque le salarié protégé a commis une faute

lourde, le délai est ramené à 2 jours. Dans sa demande, l’employeur doit

apporter la preuve du respect de la procédure de licenciement de droit commun

et indiquer la cause réelle et sérieuse du licenciement projeté. Lorsque le salarié

protégé a commis une faute lourde, l’employeur peut, dans un délai de 2 jours

après la connaissance des faits, prononcer sa mise à pied conservatoire en

attendant l’autorisation de licenciement délivrée par l’Inspecteur du travail.

L’inspecteur du travail se prononce dans le délai de 1 mois à compter de la

réception de la demande. Son silence vaut acceptation de la demande.

Pendant la période de saisine de l’IP, le représentant du personnel est suspendu

de ses fonctions et interdit de se présenter dans l’entreprise.

En revanche, tout refus de l’Inspecteur du travail d’accorder l’autorisation de

licenciement oblige l’employeur à réintégrer le salarié et à lui payer les salaires

correspondant à la période de suspension du contrat de travail.


Les décisions de l’Inspecteur du travail sont susceptibles de recours en

application des règles du contentieux administratif.

§3/La nécessité d’une cause réelle et sérieuse

C’est la jurisprudence qui, au cas par cas, donne un contenu concret à la notion

de cause réelle et sérieuse dont la preuve doit être établie pour justifier le

licenciement.

A/ La notion de cause réelle et sérieuse

Le code du travail ne donne aucune définition de la cause réelle et sérieuse. La

jurisprudence, tant française que gabonaise, se contente, pour l’essentiel, au

cas par cas, d’en préciser les traits fondamentaux.

1/ La cause réelle

La cause du licenciement est considérée comme réelle si elle est :

- Objective : cad si elle se traduit par des manifestations extérieures que

l’on peut vérifier. L’employeur doit invoquer, à l’appui du licenciement,

des faits précis, et ne pas se fonder sur des préjugés ou des sentiments

subjectifs.
- Existante : cela signifie que le licenciement doit être fondé sur des faits

qui existent réellement. En d’autres termes, le motif allégué au soutien du

licenciement doit pouvoir être établi.

Exacte : le juge va rechercher si la cause alléguée par l’employeur ne

dissimule pas la véritable cause du licenciement : sous couvent d’un motif

prétendument légitime, le licenciement repose sur un motif dont l’employeur

sait qu’il n’est pas réel. Tel est, par exemple, le cas lorsque l’employeur fonde

le licenciement sur un motif fallacieux alors que le véritable motif doit être

recherché dans la participation du salarié à une grève ou dans l’exercice d’un

droit fondamental comme le droit de réclamer une augmentation de salaire117.

2 / La cause sérieuse

Pour être sérieuse la cause du licenciement doit reposer sur un motif plus ou

moins grave qui rend impossible, sans dommages pour l’entreprise, la poursuite

de la relation de travail. Il y a là un contrôle des juges de la nécessité du

licenciement par rapport au motif invoqué. En matière disciplinaire, cela renvoie

au contrôle de proportionnalité déjà étudié. En cas de motif personnel non

fautif, il s’agit plutôt du contrôle du caractère mesuré du licenciement par

rapport au motif allégué.

117 CSG, 23 novembre 1981, RJSG, n° 97, p. 121.


B/ La preuve de la cause réelle et sérieuse

L’article 53, alinéa 2, du code du travail met à la charge de l’employeur, en cas

de contestation, la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement.

Toutefois, le juge apprécie souverainement les éléments de preuve produits par

l’employeur. Son contrôle porte sur la véracité du motif allégué par l’employeur,

mais également sur l’invocation par l’employeur du véritable motif du

licenciement. Il en est particulièrement ainsi lorsque le salarié est poursuivi pour

infraction pénale. Lorsque l’employeur n’arrive pas à établir les faits devant le

juge pénal, le juge social en déduit que le licenciement est sans cause réelle et

sérieuse118.

Enfin, en application du principe de faveur prévu par l’article 12 du code du

travail le doute sur le caractère réel et sérieux du licenciement profite toujours

au salarié et conduit le juge à considérer que le licenciement est dépourvu de

cause réelle et sérieuse119.

§4/ Les conséquences du licenciement

A l’expiration du contrat de travail, l’employeur est tenu de remettre au salarié :

118 CA Libreville, 12 décembre 2000, Affaire Sté A.- G c/ M. J.-P, inédit (vol non établi) ; CA Libreville, 2 mai 2000, Affaire N. S c/
Sté C.- G, inédit (faux et usage de faux non établi) ; CA Port-Gentil, 30 janvier 2006, Affaire Sté C.-G c/ O. J.-B, inédit
(détournement de marchandises non établi) ; CA Libreville, 12 janvier 1999, affaire M. B. L c/ S.E.EG, inédit (détournement de
fonds non établi).
119 Voir par exemple le cas où aucune des parties ne peut apporter la preuve de l’existence d’un contrat de travail. Se fondant sur

l’article 12 du code du travail, le juge décide que le doute profite au salarié auquel il accorde des indemnités pour rupture abusive.
CA Port-Gentil, 24 novembre 1997, Revue « TPOM » n° 907, novembre 2001, p. 204.
- un certificat de travail ( Art 79)

Ce certificat permet au nouvel employeur de vérifier que le salarié est libre de

tout engagement. Il précise, en outre, la qualification et l’expérience

professionnelles du salarié.

- Un reçu pour solde de tout compte qui est un document récapitulant les

sommes versées par l’employeur lors de la rupture du contrat de travail.

Le code du travail accorde au salarié licencié le bénéfice de droits pécuniaires

sous forme d’indemnitésselon la nature du licenciement.

A/Les droits du salarié régulièrement licencié

Tout salarié régulièrement licencié a, en principe, droit à un préavis (1) ainsi

qu’à d’une indemnité de licenciement et de congés payés (2).

1/ Le préavis

Le préavis correspond au délai que doit observer la partie qui décide de rompre

le contrat à durée indéterminée. Le préavis permet au salarié, à raison de un (1)


jour par semaine, de se mettre à la recherche d’un nouvel emploi120 et à

l’employeur de prendre les dispositions pour le remplacement du salarié.

Le délai de préavis commence à courir le lendemain du jour de la notification du

licenciement, de la démission ou du départ à la retraite.

La durée légale du préavis est fixée par l’article 65 du code du travail en tenant

compte de l’ancienneté du salarié :

- Jusqu’à un an : 15 jours ;

- de 1 à 3 ans : 1 mois ;

- de 3 à 5 ans : 2 mois ;

- de 5 à 10 ans : 3 mois ;

- de 10 à 15 ans : 4 mois ;

- de 15 à 20 ans : 5 mois ;

- de 20 à 30 ans : 6 mois.

Au-delà de 30 ans, le salarié bénéfice d’une majoration de 10 jours par année de

présence dans l’entreprise. Les délais prévus par l’article 65 sont des minima qui

peuvent être conventionnellement majorés.

120 CSG, 15 novembre 1982, RJSG, n° 94, p. 118.


Lorsque le licenciement est prononcé pour motif économique, le salarié bénéficie

d’un préavis de 3 mois en application de l’article 66.

En application de l’article 67 du code du travail, pendant la période de

préavis, l’employeur et le salarié sont tenus au respect de toutes les obligations

réciproques qui leurs incombent. A cet effet, l’employeur doit continuer à verser

la totalité du salaire et tous les autres avantages prévus par le contrat de travail.

Le salarié doit continuer à respecter les obligations contractuelles, par

exemple, le secret professionnel, l’obligation de fidélité et l’exécution loyale de

sa prestation de travail au profit l’employeur.

- La possibilité d’interrompre le préavis

Pendant le préavis, le travailleur congédié qui a au moins effectué la moitié

de son préavis et qui trouve un autre emploi peut quitter son employeur sans lui

être redevable d’une indemnité, sous réserve de le prévenir 48 h auparavant (art

69du code du travail).

Dispense de préavis

Rappelons qui le salarié, qui commet une faute lourde, est dispensé du préavis en

application de l’article 64, alinéa 2, du code du travail.


De même, en application de l’article 174 in fine, la femme, pendant son repos

pour allaitement, peut rompre le contrat de travail sans préavis et sans avoir à

payer une indemnité de préavis.

La dispense de préavis, totale ou partielle, peut être accordée par

l’employeur121. En outre, l’employeur n’est pas non plus tenu de respecter le

préavis lorsque le salarié est dans l’impossibilité de l’exécuter, en raison par

exemple de son état physique122.

2/ Les indemnités de licenciement et de congés payés

L’indemnité de licenciement.

Aux termes de l’article 70 du code du travail, le salarié licencié pour motif

personnel bénéficie, sauf en cas de faute lourde, de l’indemnité de licenciement

s’il justifie de 2 ans au moins de présence dans l’entreprise. Lorsque le

licenciement est prononcé pour motif économique, le délai de présence dans

l’entreprise est ramené à un an. En revanche, le salarié licencié pour faute

lourde perd le bénéfice de l’indemnité de licenciement123.

121CSG, 25avril 1983, RJSG, n° 36, p. 60.


122 CSG, 27 juin 1983, RJSG, n° 61, p. 82 et 83 (1re espèce) ; 27 juin 1983, n° 62, p. 83 et s.
123 CJG, 6 juin 1996, revue « TPOM » n° 868, août 1998, p. 146 ; CSG 21 juillet 1980, Revue « TPOM » n° 569 du 16 décembre 1982,

p. 521 ; CSG 6 juillet 1981, Revue « TPOM » n° 576 du 2 avril 1983, p. 148 ; CA Port-Gentil, 16 février 1998, Revue « TPOM » n°
906, octobre 2001, p. 184 ; CA Libreville, 30 juin 1998, Revue « TPOM » n° 900, avril 2001, p. 65
Montant de l’indemnité

L’indemnité de licenciement est égale à 20% de la moyenne mensuelle du salaire

global des 12 derniers mois par année de présence continue dans l’entreprise. Par

salaire global, il faut entendre le salaire annuel brut, y compris les indemnités et

primes diverses versés au salarié. Ainsi, en plus du salaire de base, il faut

éventuellement inclure les heures supplémentaires et les compléments ou

accessoires du salaire.

Le taux défini par l’article 73 est un minimum qui peut être augmenté par les

conventions collectives ou les contrats individuels de travail.

Indemnité de congés payés

En application de l’article 187, le salarié acquiert le droit aux congés payés après

un (1) an de présence dans l’entreprise. Lorsque la rupture du contrat de travail

intervient avant que le salarié n’ait pu faire valoir son droit aux congés payés, il

a droit à une indemnité compensatrice calculée sur la base des droits acquis.

Cette indemnité est due au salarié quelle que soit la qualification de la faute124.

124CSG,22 décembre 1980, RJSG, n° 81, p. 105 ; 5 décembre 1983 RJSG n° 4, p. 98 ; Cour de cassation, 12 août 2004, Affaire Sté
A-G c/Dame H, inédit.
Montant de l’indemnité

L’indemnité de congés payés est égale à la moyenne correspondante des salaires,

indemnités, primes et commissions diverses dont le salarié a bénéficié au cours

des 12 mois précédant le départ en congé.

B/La sanction du licenciement irrégulier

En application des dispositions des articles 51 à 53 du code du travail,

l’employeur qui envisage de licencier un salarié doit, au préalable, le convoquer

à un entretien par lettre recommandée avec accusé de réception cinq jours

francs avant l’entretien. Le lettre doit mentionner, le lieu, la date, l’heure de

l’entretien et les motifs qui font envisager le licenciement. Au cours de cet

entretien, l’employeur ne peut prendre la décision de révoquer le salarié. De

plus, l’employeur qui décide de licencier doit le notifier au salarié par lettre

remise en main propre. La lettre de licenciement ne peut être remise avant le

troisième jour suivant celui prévu pour l’entretien. Elle doit indiquer

expressément le ou les motifs du licenciement. En cas de litige, la preuve du

caractère réel et sérieux du ou des motifs allégués incombe à l’employeur.

Lorsque l’employeur n’a pas respecté les dispositions des articles 51 à 53 du

code du travail, en application des dispositions de l’article 55 du code du travail,

il devra payer au salarié irrégulièrement licencié une indemnité égale à trois


mois de salaire. Cette condamnation peut se cumuler avec celle qui serait

prononcée en raison du caractère abusif du licenciement.

En outre, l’employeur qui rompt le contrat de travail sans respecter le préavis

ou sans observer intégralement le préavis s’oblige à verser au salarié une

indemnité compensatrice. Cette sanction du non-respect du préavis concerne

aussi bien l’employeur125 que le salarié démissionnaire.

Aux termes de l’article 64, alinéa 2, du code du travail, le salarié perd le

bénéfice de l’indemnité compensatrice de préavis s’il est licencié pour faute

lourde126. Dans ce cas, en effet, son départ de l’entreprise est immédiat127.

Enfin, le salarié ne bénéficie pas de l’indemnité de préavis lorsque, pendant le

préavis, il n’exécute pas les obligations inhérentes au contrat de travail128.

Le montant de l’indemnité de préavis correspond, selon l’article 69, à la

rémunération que le salarié aurait dû percevoir pendant le temps du préavis. Il

faut alors multiplier le montant mensuel de la rémunération par la durée de

125CSG, 19 mars 1984, RJSG, n° 89, p. 113.


126TTL,18 juin 1971, revue « TPOM » n° 318 du 16 janvier 1972, p. 7.034 ; CA Libreville, 27 juin 1988 revue « TPOM » n° 744 du
16octobre 1990, p. 370 ; CSG, 9 juillet 1979, Revue « TPOM » n° 524 du 2 janvier 1981, p. 4.
127CJG, 6 avril 1995, revue « TPOM » n° 871, novembre 1998, p. 204 ; CA Port-Gentil, 16 février 1998, Revue « TPOM » n° 906,

octobre 2001, p. 184 ; CA Libreville, 30 juin 1998, Revue « TPOM » n° 900, avril 2001, p. 65

128 CSG, 25avril 1983, RJSG, n° 36, p. 60.


préavis à laquelle le salarié avait droit129. A ce montant s’ajoutent les avantages

de toute nature dus au salarié pendant le préavis130.

C/La sanction et le régime du licenciement injustifié

Le salarié peut en plus du versement des indemnités de rupture, solliciter et

obtenir de la juridiction compétente, le paiement de dommages et intérêts

lorsque le licenciement est abusif, dans les conditions fixées par les articles 74 à

76 du code du travail.En application de l’article 75 Toute rupture abusive du

contrat de travail donne lieu à la condamnation de l’employeur à payer des

dommages-intérêts au salarié. Selon l’article 75, alinéa 3 du code du travail, le

préjudice subi par le travailleur abusivement licencié s’apprécie en tenant

compte des usages, de la nature des services engagés, de l’ancienneté, de l’âge,

de la situation de famille et des droits acquis à quelque titre que ce soit

« Viole cette disposition, une cour d’appel qui fixe le montant des dommages et

intérêts dus à un travailleur licencié, en affirmant simplement qu’elle dispose

des éléments suffisants d’appréciation sans indiquer lesquels »131.

Le montant des dommages-intérêts doit donc être fixé en tenant compte de tous

les éléments qui peuvent justifier l’existence et déterminer l’étendue du

préjudice causé.

Section 2 : Le licenciement pour motif économique


129
CSG, 25 avril 1983, RJSG, n° 36, p. 60 ; CSG, 19 mars 1984, RJSG, n° 89, p. 113.
130 CSG, 30 mai 1983, RJSG, n° 101, p. 130.
131
Cass. Soc. Gabonaise, Arrêt n°26/2012-2013 du 28 mars 2013, Bull. des arrêts de la cour de cassation du Gabon, N° 6, p.93,
n°8.
Le licenciement pour motif économique est celui qui ne résulte ni du

comportement fautif du salarié ni de son inaptitude professionnelle. Il est en

principe justifié par les difficultés économiques de l’employeur ou son besoin de

s’adapter à l’évolution technologique.

Après avoir étudié la notion de licenciement économique, il sera alors possible

d’analyser les règles juridiques qui encadrent la prise d’une telle décision par

l’employeur.

§1/La notion de licenciement économique

Pour bien cerner la notion de licenciement économique, il faut définir le motif

économique qui doit, par ailleurs, être justifié par une cause réelle et sérieuse

A/ La définition du motif économique

En application de l’article 50, alinéa 4, du code du travail, le motif économique

se rattache à la réorganisation, à la réduction ou à la suppression de l’activité de

l’entreprise ou de l’établissement. On en déduit que le motif économique peut

être lié soit à la mauvaise conjoncture économique que traverse l’entreprise, soit

à la nécessité de réorganiser la structure.


1/ Le motif économique lié à la réorganisation de l’entreprise

Le licenciement pour motif économique peut être décidé dans l’hypothèse

d’une réorganisation de l’entreprise en vue de préserver sa compétitivité et en

aucun cas pour réaliser des économies de salaires. Il en est ainsi lorsque la CSG,

sur la base de la lettre de licenciement adressée au salarié, a décidé que,

contrairement aux affirmations du salarié, le licenciement était fondé sur la

réorganisation de l’entreprise qui a nécessité une importante réduction du

personnel d’encadrement.132.

Le licenciement économique peut aussi être invoqué par l’employeur qui

souhaite, à la suite de difficultés économiques, améliorer le rendement de

l’entreprise pour en assurer la survie. Le TTL de Libreville a par exemple admis la

légitimité du licenciement économique lorsque l’employeur, confronté à des

difficultés économiques, réduit le personnel local de 60 à 30 et le personnel

expatrié de 9 à 2. Afin de sauver l’entreprise133. Il en est de même lorsque

l’employeur réduit le personnel d’encadrement pour limiter les pertes

financières et assurer la survie de l’entreprise134.

132 CSG, 27 mars 1981, Revue « TPOM », n° 544 du 16 novembre 1981, p. 465.
133 TTL, 6 juin 1980, Revue « TPOM », n° 525 du 16 janvier 1981, p. 35.
134 TTL, 27 mars 1981, Revue « TPOM », n° 544 du 16 novembre 1981, p. 465.
2/ Le motif lié à la conjoncture économique

Dans cette hypothèse, le licenciement économique résulte de difficultés

économiques conjoncturelles, ou être la conséquence d’une mutation

technologique, conduisant à la réduction ou à la suppression de certains

compartiments de l’activité de l’entreprise.

La CSG a par exemple jugé que la faillite de la société caractérise les difficultés

économiques justifiant un licenciement pour motif économique135.

La même juridiction a estimé que la conjoncture économique générale peut

justifier la restructuration de l’entreprise qui réduit ses effectifs à la suite de

l’importance baisse d’activités qu’elle a subie136.

La légitimité du licenciement économique peut aussi résulter de la conjoncture

économique régionale. Ainsi en a jugé la Cour de cassation dans un cas où

l’employeur fondait le licenciement sur la dévaluation du Franc CFA.137.

135 CSG, 25 mai 1981, RJSG, n° 66, p. 88.


136 CSG, 23 novembre 1981, RJSG, n° 70, p. 92.
137 Cour de cassation, 5 mai 2004, Affaire Sté B. G c/ G. M, inédit.
Dans tous les cas, les difficultés économiques invoquées par l’employeur doivent

être suffisamment importantes et durables pour fonder le licenciement sur un

motif économique. Pour permettre au juge de vérifier la qualification et la

légitimité du licenciement, les difficultés économiques invoquées par

l’employeur doivent être expressément mentionnées dans la lettre de

licenciement. Il en va de même lorsque le motif économique répond à un besoin

de réorganisation de l’entreprise.

B/ La cause économique réelle et sérieuse

Dès lors que le licenciement a une nature économique, le juge vérifie que le

motif économique invoqué par l’employeur est réel et sérieux. Il s’agit de

s’assurer que le motif économique ne masque pas en réalité un motif d’ordre

personnel.

Le TTL a par exemple jugé que le licenciement de 25 à 30 salariés résultant

d’une diminution drastique du budget de l’entreprise a une cause réelle et

sérieuse138.

La nature économique du licenciement se déduit de la lettre de licenciement qui

doit mentionner les motifs économiques qui fondent le licenciement. Dès lors que

ces motifs sont indiqués dans la lettre, l’employeur ne peut plus en invoquer

d’autres.

138 TTL, 11 juin 1971, Revue « TPOM », n° 320 du 16 février 1972, p. 7.080.
Mais, le salarié peut toujours prouver que le licenciement est fondé sur un

prétendu motif économique. Dans ce cas, le débat judiciaire portera sur la

nature économique du motif du licenciement.

§2/La décision de procéder au licenciement économique

Cette décision obéit à une procédure particulière et donne lieu à l’établissement

d’un ordre de priorité.

A/ L’ordre des licenciements et les obligations de l’employeur

L’ordre des licenciements est déterminé par l’article 59, alinéa 9, du code du

travail, en vertu duquel sont en premier lieu licenciés les salariés présentant les

moindres aptitudes professionnelles pour les emplois maintenus. A aptitudes

professionnelles égales, sont prioritairement licenciés les salariés moins anciens

dans l’entreprise. Pour chaque enfant à charge, l’ancienneté est majorée d’une

année.

Toutefois, l’article 59 ne fait pas obstacle à ce que l’employeur détermine

souverainement l’ordre des licenciements. Cette prérogative découle de son

pouvoir de direction car l’employeur est seul juge des aptitudes professionnelles

des salariés qu’il emploie.


En cas de réorganisation de l’entreprise, la Cour de cassation reconnait

explicitement à l’employeur la faculté d’apprécier les qualités et les aptitudes

professionnelles des salariés pour les emplois maintenus139. L’employeur peut

donc tenir compte de la qualité du travail fourni par chaque salarié dans sa

spécialité pour déterminer les salariés les moins aptes professionnellement140. Il

est ainsi habilité à choisir, dans l’intérêt de l’entreprise, les salariés dont les

emplois seront maintenus en raison de leur compétence et de leur qualification

professionnelle141.

Par ailleurs, l’article 56, alinéa 2, du code du travail interdit à l’employeur qui a

procédé à un licenciement économique de plus de 10 salariés de prononcer de

nouveaux licenciements pour motif économique avant l’expiration d’un délai de 6

mois.

Enfin, en application de l’article 60, lorsque l’employeur décide de la

réouverture de l’entreprise ou de la création d’emplois dans leurs spécialités,

les salariés licenciés bénéficient d’une priorité de réembauchage pendant un

délai d’un an. La CSG a estimé qu’il n’y avait pas réembauchage au sens de

l’article 60 du code du travail lorsque l’employeur fait appel à un salarié

139 Cour de cassation, 5 mai 2004, Affaire Sté B. G c/ G. M, inédit.


140 CSG, 12 mai 1980, Revue « TPOM », n° 536 du 2 juillet 1981, p. 286.
141 CSG, 13 juin 1983, RJSG, n° 69, p. 91.
intérimaire pour accomplir une mission ponctuelle en application d’un CDD de

courte durée142.

B/ La procédure de licenciement

La procédure de licenciement pour motif économique, prévue par les articles 56

et suivants du code du travail, comprend trois étapes.

1/La concertation préalable

En application de l’article 59, l’employeur ne peut procéder à un licenciement

individuel ou collectif pour motif économique qu’après avoir adressé aux

délégués du personnel, aux délégués du syndicat le plus représentatif et aux

membres du Comité permanent de concertation économique et sociale un projet

de licenciement contenant notamment les informations suivantes :

- la cause économique, financière ou technique du projet de licenciement ;

- le nombre, la qualification professionnelle, la nationalité, l’ancienneté, l’âge

et la situation de famille des salariés susceptibles d’être licenciés. Les mêmes

informations doivent être fournies concernant les salariés demeurant dans

l’entreprise

142 CSG, 23 novembre 1981, RJSG, n° 70, p. 92.


- les mesures envisagées pour éviter les licenciements ou en limiter le

nombre ainsi que les mesures de reclassement du personnel dont le

licenciement ne peut être évité ;

- le plan social ainsi que son financement établis en accord avec l’ONE ou tout

autre service de l’emploi public qui en assurera l’exécution au bénéfice des

salariés dont les licenciements ne peuvent être évités.

Les destinataires du projet de licenciement disposent d’un délai de 8 jours pour

l’examiner. A l’issue de ce délai, une réunion de concertation est organisée à

l’initiative de l’employeur. La réunion est sanctionnée par un procès-verbal qui

mentionne, outre les avis, suggestions et propositions des destinataires du projet

de licenciement, le calendrier prévisionnel des licenciements.

2/ L’autorisation préalable

L’employeur doit ensuite transmettre à l’Inspecteur du travail le projet de

licenciement ainsi que le procès-verbal sanctionnant la réunion avec les délégués

du personnel, les délégués syndicaux et les membres du Comité de concertation

économique et sociale. Ces documents accompagnent la demande d’autorisation

de licenciement adressée à l’Inspecteur du travail en application de l’article 56

du code du travail.
Selon l’article 57, la réponse de l’Inspecteur du travail doit être donnée dans un

délai maximum de 30 jours ouvrables à compter de la date de réception de la

demande. Ce délai est ramené à 15 jours ouvrables si l’entreprise fait l’objet

d’une procédure collective (article 59, alinéa 10).

L’Inspecteur du travail peut rejeter le projet de licenciement présenté par

l’employeur. Le refus d’autorisation qui s’ensuit doit être motivé.

La contestation de l’autorisation de licenciement est portée devant la juridiction

administrative143. Le juge social est donc incompétent pour annuler une

autorisation délivrée en violation de la loi144. Toutefois, dès lors que

l’autorisation de licenciement a été annulée par le juge administratif,le juge du

travail en déduit que les licenciements prononcés sur le fondement de cette

autorisation sont nécessairement abusifs. Mais le juge ne va pas jusqu’à ordonner

la réintégration des salariés car le code du travail ne prévoit cette hypothèse

qu’en cas de licenciement d’un salarié dont le contrat de travail a été suspendu

en vertu de l’article 36 du code du travail145.

3/ La notification du licenciement

143TTL, 16 décembre 1988, revue « TPOM », n° 743 du 2 octobre 1990, p. 348.


144CA Libreville, 30 juin 2000, Affaire M. C et autres c/ Air Gabon, inédit.
145CA Libreville, 30 juin 2000, Affaire M. C et autres c/ Air Gabon, inédit.
Selon l’article 59, alinéa 8, du code du travail, les licenciements ne peuvent être

notifiés aux salariés concernés qu’après l’obtention de l’autorisation ou, en cas

de silence, à l’expiration du délai de 30 jours ouvrables fixé par l’article 57.

Toute notification intervenue avant l’autorisation ou l’expiration du délai de 30

jours ouvrables rend le licenciement abusif. En application de l’article 66 du

code du travail, le salarié licencié pour motif économique bénéficie d’un préavis

minimum garanti de 3 mois. Il bénéficie aussi de 6 mois d’allocations familiales.

Tout licenciement individuel ou collectif pour motif économique prononcé en

violation des règles de procédure permet au salarié d’obtenir des dommages et

intérêts en application de l’article 74, des indemnités de rupture et une

indemnité égale à 3 mois de salaire (article 59, alinéa 10). L’employeur encourt

en outre les sanctions de l’article 80, c’est-à-dire une amende de 300 000 à

600 000 F CFA et/ou un emprisonnement de 1 à 3 mois.


Chapitre 2 : Les autres modes de rupture du contrat de travail

A côté du licenciement, il existe d’autres modes de rupture du contrat de travail.

On distingue la démission et le départ à la retraite, en principe à l’initiative du

salarié, et la résiliation ou rupture conventionnelle qui procède tantôt de

l’employeur, tantôt du salarié tantôt d’un commun accord.

Section 1 : La démission

Selon l’article 61 du code du travail, la démission est la rupture unilatérale du

contrat de travail à l’initiative du salarié. La démission ne se présume pas. Elle

doit être notifiée par écrit à l’employeur. Pour protéger le salarié sans remettre

en cause les droits de l’employeur, le législateur fixe les conditions d’exercice et

le régimede la démission.

§1/Les conditions d’exercice de la démission

Un travailleur ne peut demeurer dans les liens de subordination à l’égard d’un

employeur pour une durée indéfinie. La faculté ainsi reconnue au salarié de

rompre unilatéralement le contrat trouve sa justification d’abord dans la

prohibition des engagements perpétuels, mais ensuite dans l’interdiction du

travail forcé voire de l’esclavage. Cette liberté de démissionner obéit cependant


à certains critères et doit être distinguée d’une prise d’acte de la rupture par le

salarié.

A/ Critères de la démission

La démission doit résulter d’une volonté claire et non équivoque du salarié de

rompre le contrat de travail. La volonté de démissionner se manifeste par un

écrit dans lequel le salarié informe l’employeur de sa volonté de mettre un terme

à la relation de travail.

Le juge social applique constamment cette exigence de l’article 61 en vérifiant

que le salarié a adressé à l’employeur une lettre de démission146. Le juge

examine alors la lettre de démission en y recherchant la manifestation de volonté

du salarié de quitter l’entreprise. Ainsi, dans un arrêt rendu le 22 février 2000, la

CA de Libreville constate que le salarié a expressément fait référence à sa

démission dans la lettre qu’il a adressée à l’employeur. Les termes utilisés par le

salarié ne souffrant d’aucune ambiguïté, le juge en a déduit qu’il avait souhaité

mettre un terme au contrat de travail147.

Il en va de même dans le cas où le salarié adresse à l’employeur une lettre de

démision le 18 décembre 1995 avant de se rétracter dans une autre lettre datée

du 19 décembre 1995. La CA de Libreville a pris en compte la première lettre

146 TTL, 9 juillet 1971, Revue « TPOM », n° 320 du 16 février 1972, p. 7.037.
147 CA Libreville, 22 février 2000, Affaire Sté T.T. G c/ M. A, inédit.
dont les termes ne laissaient planer aucun doute sur la volonté du salarié de

rompre le lien de travail148. Cette décision est critiquable car il n’apparaît nulle

part que l’employeur avait accusé réception de la lettre de licenciement dans les

48 heures comme l’exige l’article 61 du code du travail. Faute d’avoir accusé

réception ou de l’avoir fait dans le délai légal, la rétractation du salarié

intervenue le lendemain de la première lettre aurait dû être prise en compte.

D’une manière générale, il résulte de la jurisprudence que dès lors que le salarié

ne subit aucune pression ou contrainte morale de l’employeur, l’acte de

démission qu’il pose est volontaire et sans équivoque. Il s’ensuit que le contrat

de travail est rompu par cet acte délibéré149.

Par un raisonnement a contrario, le juge déduit de l’absence de lettre de

démission l’absence de démission. qui ne peut être déduite du comportement du

salarié. Par exemple, l’employeur ne peut considérer une absence, même

prolongée, comme un acte de démission. Dans une affaire jugée par la CA de

Libreville, l’employeur était poursuivi par une femme de ménage qui prétendait

avoir été licenciée sans que la procédure prescrite par les articles 51 et suivants

du code du travail soit respectée. En réponse, la patronne affirmait que la

salariée avait démissionné puisque, à la suite de réprimandes dont elle avait fait

148 CA Libreville, 27 juin 2000, Affaire R. E c/ Sté M. O. G, inédit.


149 CSG, 24 octobre 1983, RJSG, n° 25, p. 43 ; 9 mai 1983, RJSG, n° 26, p. 44.
l’objet pour mauvaise manière de servir, elle s’était volontairement absentée de

son poste de travail, causant ainsi un préjudice à la patronne qui avait dû, à son

tour, s’absenter de son poste de travail. Ces arguments sont rejetés par la CA de

Libreville qui constate l’absence de lettre de démission, ce qui le conduit à

requalifier la rupture en licenciement150. Cette décision d’appel est conforme à

la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle la démission ne se

présume pas. Elle résulte nécessairement d’une lettre de démission adressée à

l’employeur par le salarié dans les conditions de forme prescrites par l’article 61

du code du travail151.

B/ Démission et prise d’acte de la rupture

La démission doit être distinguée de la prise d’acte de la rupture par le salarié du

contrat de travail. Selon la jurisprudence française, la prise d’acte concerne

d’abord les hypothèses dans lesquelles le salarié déclare considérer le contrat

comme rompu du fait de l’employeur. Cette qualification de prise d’acte vise

ensuite la rupture à l’initiative du salarié, qualifiée de démission mais qui est la

conséquence d’un différend avec l’employeur. Il s’agit donc pour le salarié

d’affirmer la rupture du contrat de travail mais en l’imputant à son employeur,

coupable ou responsable d’un certain nombre de manquements. Ce mode de

rupture se caractérise par le fait que l’initiative appartient au salarié alors que

150 CA Libreville, 18 avril 2000, Affaire A. E c/ A. S. Dans le même sens, CA Libreville, 16 mai 2000, Affaire Etablissement R c/ I.I.
E, inédit.
151 Cour de Cassation, 20 avril 2005, Affaire Sté S. c/ L. C, inédit.
l’imputabilité de la rupture revient à l’employeur152. La prise d’acte produit

généralement les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse lorsque la

décision de rompre est justifiée par les faits reprochés à l’employeur.

Cette évolution jurisprudentielle en droit français rejoint quelque peu la

jurisprudence gabonaise rendue en matière de démission forcée. Il résulte de

cette jurisprudence que l’employeur ne doit pas être à l’origine des faits ayant

conduit le salarié à quitter l’entreprise. Dans l’affirmative, le juge requalifie la

démission en licenciement. Dans cette optique, la CSG a estimé que la démission

du salarié avait été provoquée lorsque l’employeur ne remplissait pas les

obligations essentielles que le contrat de travail mettait à sa charge. En l’espèce,

l’employeur avait confié à un salarié totalisant 10 ans d’ancienneté une tâche

radicalement différente de celle qu’il avait l’habitude d’exercer. Cette

circonstance avait conduit le salarié à présenter sa démission que le juge a

requalifié en licenciement153.

De même, la CSG juge qu’il y a démission forcée ou provoquée lorsque

l’employeur paye au salarié une rémunération inférieure à celle qui était prévue

dans la lettre de renouvellement du contrat de travail. La démission est

provoquée car l’employeur a méconnu une obligation essentielle du contrat de

152
Cass. Soc., 25 juin 2003, n°01-43.578, Dr soc. 2003, p. 817; Cass. soc., 19 janv. 2005.
153 CSG, 9 juillet 1984, RJSG, n° 29, p. 49.
travail154. La CSG considère encore qu’il y a démission forcée lorsque l’employeur

retire des salaires les sommes qui lui sont dues par les salariés. En violant les

dispositions du code du travail interdisant une telle compensation sans l’accord

du juge, l’employeur a contraint les salariés à démissionner et cette démission

doit être requalifiée en licenciement155. Enfin, la démission forcée peut aussi

résulter de la volonté réitérée de l’employeur de maintenir le salarié dans un

état de clandestinité. Dans cette espèce, la CA de POG requalifie en

licenciement la démission du salarié justifiée par le refus de l’employeur de lui

établir les pièces administratives nécessaires à son séjour régulier sur le

territoire156.

§2/Le régime de la démission

Quelles sont les obligations des parties en cas de démission ?

Quels sont les droits du salarié démissionnaire ? En outre, la démission peut-elle

être abusive ?

A/ Les obligations des parties

La démission n’a pas être motivée. Le salarié doit simplement respecter le délai

de préavis tel qu’il est déterminé par l’article 65 du code du travail. Le point de

départ du préavis commence à courir au jour de la réception de la lettre de

154 CSG, 21 mars 1983, RJSG, n° 30, p. 49.


155 CSG, 2 juin 1980, RJSG, n° 35, p. 55.
156 CA Port-Gentil, 24 novembre 1997, Revue « TPOM », n° 907, novembre 2001, p. 204.
démission. Le salarié commet une faute s’il rompt brutalement le contrat de

travail sans laisser à l’employeur le temps de trouver un remplaçant. Il doit alors

payer à l’employeur une indemnité de préavis157.

Dans certains cas, le salarié est dispensé de respecter le préavis. Il peut alors

quitter l’entreprise sans tenir compte du délai fixé à l’article 65. La dispense de

préavis est accordée par le législateur à la femme enceinte qui peut

démissionner, pendant une période de 12 mois à compter de la reprise du travail,

c’est-à-dire pendant le repos pour allaitement, sans avoir à respecter le préavis

et sans devoir à l’employeur une indemnité de préavis pour rupture du contrat.

La dispense de préavis peut aussi être accordée par l’employeur qui autorise le

salarié démissionnaire à quitter immédiatement l’entreprise. Dans ce cas, il doit

lui verser l’indemnité compensatrice de préavis en application de l’article 69 du

code du travail.

De son côté, l’employeur est soumis au respect de certaines formalités

administratives. Il doit porter la démission à la connaissance de l’Inspecteur du

travail.

157TTL, 31 janvier 1972, Revue « TPOM », n° 332 du 2 septembre 1972, p. 7.337 ; CSG, 24 octobre 1983, RJSG, n° 25, p. 43 qui
condamne le salarié à payer à l’employeur une indemnité de préavis s’élevant à F CFA 150 000 pour un préavis de 15 jours.
B/ Les droits du salarié

Le salarié démissionnaire a droit à l’indemnité compensatrice de préavis lorsque

l’employeur l’a dispensé d’exécuter le préavis. Le montant de cette indemnité

est calculé comme en matière de licenciement.

En application de l’article 71, il a aussi droit à une indemnité de services rendus

qui est égale à 20% de la moyenne mensuelle du salaire global des 12 derniers

mois par année de présence continue dans l’entreprise (article 73).

Toutefois, l’article 71 soumet le bénéfice de l’ISR à la réunion des conditions

suivantes :

- le salarié démissionnaire doit avoir totalisé 5 ans au moins de services continus

dans la même entreprise ;

- il doit apporter la preuve que sa démission est la conséquence du

comportement fautif de l’employeur.

En application de l’article 72, l’ISR n’est pas cumulable avec l’indemnité de

licenciement. Le salarié bénéficiera donc de l’indemnité la plus favorable.

C/La démission abusive


Contrairement au licenciement, la démission n’est soumise à aucun formalisme

légal et n’a pas à être motivé. Seul le respect par le salarié du délai de préavis

est requis.

Toutefois, le caractère abusif de la démission résulte des circonstances dans

lesquelles intervient la rupture lorsqu’il est démontré que le comportement du

salarié traduit une intention de nuire ou une légèreté blâmable. Par exemple, la

Cour de cassation française a jugé qu’un mannequin, sur qui reposait un défilé de

haute couture, ne pouvait démissionner la veille de cette manifestation sans

abuser de son droit158.

De même n’est pas abusif le seul fait de ne pas avoir exécuté le préavis159.

Dans tous les cas, c’est à l’employeur de rapporter la preuve du caractère abusif

de la démission. Lorsque cette preuve est établie. Le salarié s’expose au

paiement de dommages-intérêts, calculés selon le préjudice subi par

l’employeur. Lorsque la démission est abusive et que le salarié a été embauché

par un nouvel employeur, ce dernier peut également, sous certaines conditions,

engager sa responsabilité à l’égard de l’ancien employeur.

Section 2 : La résiliation et la rupture conventionnelle

Le salarié peut toujours demander la résiliation judiciaire du contrat de

travail. Il peut aussi accepter une rupture conventionnelle du contrat, soit


158
Cass. soc., 19 juin 1959, Bull. civ.IV, n°779, arrêt Christian DIOR.
159
Cass. soc., 14 oct. 1987, semsoc., Lamy, p.613.
dans le cadre d’une transaction soit à travers un départ négocié avec

l’employeur.

§1/La résiliation judiciaire

On sait que l’article 1184 du code civil ancien permet au créancier de demander

au juge de prononcer la résolution du contrat lorsque le débiteur ne remplit pas

ses obligations. En droit du travail, la jurisprudence160 interdit à l’employeur,

sauf exceptions légales, de solliciter la résiliation judiciaire du contrat de travail.

Cette solution, bien établie en droit français, se fonde sur l’ordre public social.

En effet, le code du travail autorise l’employeur à rompre le contrat de travail

d’un salarié en procédant à son licenciement. La mise en œuvre de ce droit

oblige l’employeur à se conformer à une procédure spécifique et de justifier de

l’existence d’une cause réelle et sérieuse. Or l’action en résiliation judiciaire du

contrat de travail diligentée par l’employeur aboutirait à priver le salarié de la

protection légale instituée en sa faveur.

En revanche, la jurisprudence autorise le salarié à demanderla résiliation

judiciaire du contratde travail. Dans ce cas, le salarié doit prouver les

manquements de l’employeur et son action en résiliation judiciaire obéit à un

régime particulier.

A/ Qualification des manquements de l’employeur


160
Cass.soc., 13 mars 2001, Bull. civ., n°89, Dr. soc. 2001, p. 624.
Les manquements que le salarié peut invoquer à l’appui de son action en

résiliation judicaire doivent présenter « une gravité suffisante » pour justifier

l’anéantissement du contrat. La jurisprudence considère tantôt, que certaines

atteintes constituent, en elles-mêmes, des manquements suffisamment graves

de l’employeur à ses obligations. Il en est ainsi, par exemple, de l’atteinte à la

dignité du salarié161 tantôt que les manquements de l’employeur doivent avoir

empêché la poursuite du contrat. On peut citer par exemple la suspension

unilatérale du contrat de travail162, le défaut de fourniture de travail163 ou encore

le défaut de paiement du salaire164.

B/ Régime de la résiliation judiciaire

L’intérêt du recours à la résiliation judiciaire réside dans le fait que l’action

engagée par le salarié ne rompt pas le contrat de travail. Le salarié va continuer

à recevoir son salaire et son emploi sera maintenu pendant la procédure. La date

de la rupture sera celle du jugement si le salarié est resté à son poste165.

En cas de demande infondée, le juge se bornera à refuser la résiliation, le

contrat sera maintenu et le salarié conservera en principe son emploi, sauf si

bien entendu l’employeur licencie ce salarié qui a osé l’attaquer en justice. Mais,

un licenciement intervenant pour un tel motif pourrait être annulé comme

161
Cass.soc., 7 févr.2002, n°10-18.686.
162
Cass.soc., 26 mars 2014, n°12-21.372.
163
Cass.soc., 13 mai 2015, n°13-26. 849.
164
Cass.soc., 2 juil. 2015, n°14-10. 649.
165
Cass.soc., 11 janv. 2007, n°05-40. 626, RDT 2007, 237, obs. J. PELISSIER, Bull. civ., n°6 .
portant atteinte au droit fondamental du salarié, comme tout justiciable, d’agir

en justice.

§2/La transaction

La transaction est un mode de règlement des litiges emprunté au droit civil. Elle

conduit l’employeur et l’employé à trouver une solution amiable à leur litige en

consentant des concessions réciproques.

Parce qu’elle est empruntée au droit civil, la transaction est une application de

l’article 2044 du code civil ancien. Il s’agit donc d’un accord entre les parties à la

relation de travail. De ce point de vue, la transaction diffère de la rupture

négociée fondée sur l’article 1134 du code civil ancien.

En effet, la transaction vise à mettre un terme à une contestation née ou

prévenir une contestation à naître. En revanche, la rupture négociée met fin au

contrat en cas de rupture amiable. Cette différence d’objet permet d’affirmer

que la transaction succède à la rupture de la relation du travail, notamment en

prévenant les difficultés d’exécution par des concessions réciproques. Il en

résulte que la transaction est consécutive à un licenciement déjà prononcé.

A/ Les conditions de la transaction

Certaines conditions de validité de la transaction découlent de son caractère

contractuel. Par exemple, le consentement des parties doit être libre et


éclairé166. La transaction doit porter sur un objet licite et certain, les parties

doivent avoir la capacité de transiger et se consentir des concessions

réciproques167.

Ces conditions ne sont pas remplies lorsque l’employeur se contente de présenter

au juge un document portant transaction sur lequel ne figure pas le nom du

salarié, le montant de la transaction et la signature des parties168. La transaction

doit revêtir forcément une forme écrite, ce qui permet aux parties de se

ménager une preuve des concessions réciproques. Selon l’article 2052 du code

civil ancien, la transaction ne peut être annulée ni pour erreur de droit ni pour

lésion.

D’autres conditions sont spécifiques à l’application de la transaction en droit du

travail. Elles ont été rappelées par la CA de Libreville dans 2 arrêts rendus le 18

mai 1999 et le 28 décembre 2004.

Dans la première espèce, le juge d’appel affirme que la transaction entre

employeur et employé ne peut intervenir que si le licenciement est régulier et

166
Cass. soc. Gabonaise, arrêt n°2/2010-2011 du 16 déc.2010, Bull. des arrêts de la Cour de cassation N°1, oct-
nov.dec 2012, n°7 p.65 et s. : La transaction par laquelle un salarié donne son accord pour un départ négocié
peut toujours être dénoncée, s’il estétabli que ledit accord a été vicié par des manœuvres dolosives ; Cass. soc.
Gabonaise, arrêt n°44/2011-2012 du 22 mars.2012, Bull. des arrêts de la Cour de cassation N°1, oct- nov.dec
2012, n°8 p.67 et s. : annulation de la transaction pour erreur sur l’objet de la contestation. La Cour retient que
la salariée avaitsigné la transaction sous la pression de son employeur.
167
CA Libreville, 22 janvier 2008, affaire Sté SOCOFI/ G. B, inédit.
168 CA Libreville, 10 juin 2008, affaire S.N.B.G c/ A. Z. G, inédit.
définitif. La CA a jugé la transaction régulière car elle a été conclue après le

prononcé du licenciement par le juge.

Dans la seconde espèce, la CA estime que toute transaction portant sur le

licenciement ou conclue alors que le licenciement n’a pas été prononcé est nulle.

La transaction a été jugée irrégulière car elle portait sur le licenciement, en

violation de l’article 74 du code du travail.

Il résulte de ces décisions que les conditions d’une transaction conforme à la loi

entre employeur et employé relativement au licenciement de ce dernier sont les

suivantes :

 le licenciement doit être régulier ;

 la transaction ne peut intervenir qu’après le prononcé du licenciement.

Autrement dit, le licenciement doit être définitif ;

 La transaction ne peut porter que sur les droits, actions et prétentions du

salarié. Il ne peut pas s’agir d’une convention relative au licenciement, comme

dans la deuxième espèce. Une telle convention est contraire aux dispositions

d’ordre public de l’article 74 du code du travail. Dans tous les cas, la date de la
transaction est cruciale car elle permet de vérifier que la transaction est

intervenue après le licenciement.

B/ Les effets de la transaction

Les parties doivent transiger. Cela signifie qu’elles doivent faire des concessions

mutuelles et réciproques. Dans la pratique, le salarié renonce à toute action

devant la juridiction sociale. L’employeur consent à payer une indemnité

transactionnelle. En cas de contestation il appartient au juge d’apprécier la

réalité et la consistance des concessions réciproques.

D’une manière générale, la transaction a, entre les parties, autorité de laCette

différence d’objet rejaillit sur les droits du salarié car, d’une manière générale,

la transaction confère l’autorité de la chose jugée chose jugée en dernier

ressort. Cela signifie que le salarié comme l’employeur ne peuvent plus contester

les points qui ont fait l’objet de la transaction. C’est la raison pour laquelle les

parties doivent être très attentives à la manière dont la transaction est rédigée

§3/Les départs négociés

Le départ négocié est un mode de rupture de la relation de travail résultant d’un

accord entre l’employeur et le salarié. La rupture négociée ne doit pas être

confondue avec la transaction. En effet, la rupture négociée a pour objet de


rompre le contrat de travail alors que la transaction permet de régler un

différend à la suite d’un licenciement déjà prononcé.

La rupture conventionnelle, dans le cadre d’un départ négocié,répond

généralement à trois objectifs :

- Il s’agit d’abord d’une rupture sécurisée qui est la conséquence logique de la

volonté des parties de se séparer en dehors de tout conflit ;

- Le départ négocié s’inscrit aussi dans une logique de déjudiciarisation de la

relation de travail visant à éviter ou à contourner le recours au juge

judiciaire ;

- Enfin, ce mode de rupture du contrat de travail prend un relief particulier

dans un contexte de suppression d’emploi ou de difficultés économiques afin

de dédramatiser la fin de la relation de travail rendue nécessaire par la

récession, la baisse de l’activité ou une conjoncture économique défavorable.

A/ Les conditions du départ négocié

La rupture négociée est expressément prévue par l’article 47 du code du travail

en vertu duquel le CDD peut être rompu d’accord parties. En présence d’un CDI,
le départ négocié peut être fondée que l’article 1134, alinéa 2, du code civil

ancien.

La référence au droit civil montre que les conditions de validité des contrats en

général sont applicables aux départs négociés.

En outre, le départ négocié n’est valable que s’il est indépendant de tout litige.

En effet, l’existence d’un litige renvoie à l’application des règles de la

transaction. Enfin, la rupture négociée n’est pas soumise au respect des règles du

licenciement.

Toutefois, lorsque les départs négociés s’inscrivent dans le cadre d’un plan

social, ils sont soumis au respect de la procédure de licenciement pour motif

économique.

B/ Le régime juridique du départ négocié

Dans le principe, la rupture négociée n’est soumise à aucun formalisme

particulier. Il est toutefois conseillé de rédiger un écrit qui constate l’accord des

parties et prévient les questions de preuve.


Dès lors que le consentement des parties n’est pas vicié, le départ négocié n’est

soumis à aucune procédure. Par exemple, aucun préavis n’est dû. Il n’en est

autrement que si la rupture négocié intervient dans le cadre d’un plan social,

c’est-à-dire dans un contexte de difficultés économiques.

Enfin, l’accord conclu engage irrévocablement les parties, en application de

l’article 1134 du code civil ancien. Aucune partie ne peut donc remettre en cause

l’acte. En particulier, le salarié ne peut chercher à remettre en cause le contrat

conclu pour bénéficier des règles d’indemnisation prévues en cas de

licenciement.

Section 3 : La retraite

Le départ à la retraite est réglementé par l’article 62 du code du travail. Selon

ce texte, il s’agit de la cessation du contrat de travail du salarié atteint par la

limité d’âge. L’initiative de la rupture peut être prise par l’employeur ou le

salarié. L’article 62 fixe à la fois les conditions et les effets du départ à la

retraite.

§1/ Les conditions du départ à la retraite


Elles tiennent essentiellement à l’âge du salarié. L’article 62, alinéa 2, fixe une

fourchette puisque le salarié doit avoir entre 55 et 60 ans en fonction des

secteurs d’activité. L’article 62 doit être combiné avec l’article 75 du code de la

sécurité sociale qui réserve le bénéfice de l’assurance vieillesse aux salariés

ayant atteint l’âge de 55 ans.

Outre la retraite à 55 ans, l’article 62, alinéa 6, réserve l’hypothèse de la

retraite anticipée. Celle-ci résulte d’une décision des parties à la relation de

travail prise en accord avec la CNSS. Or, l’article 75 du code de la sécurité

sociale offre aux salariés la possibilité de prendre une retraite anticipé à 50 ans

dès lors qu’ils remplissent certaines conditions ( l’amoindrissement de leurs

facultés physiques ou mentales les rend inaptes à l’emploi qu’ils occupent ;

cotisation à la CNSS pendant 20 ans ; totaliser 120 mois d’assurance au cours des

20 dernières années précédant la date d’admission à la pension de retraite).

Enfin, le départ à la retraite peut être négocié dans le cadre d’un plan social.

Dans ce cas, le salarié ne pourra prétendre à la pension vieillesse avant l’âge de

55 ans.
§2/ La forme et les effets du départ

Sur le plan formel, le départ à la retraite doit être notifié par écrit par la

personne qui en prend l’initiative. Il est alors nécessaire de respecter le préavis

tel que déterminé par l’article 65 du code du travail.

Quant à ses effets, le départ à la retraite permet au salarié de prétendre aux

prestations vieillesse servies par la CNSS.


Titre IV : La protection de la personne du salarié

Soumis au pouvoir de direction de l’employeur, le salarié bénéficie d’une

double protection. La protection de son intégrité physiqueface aux rythmes

de travail et aux risques liés à son activité professionnelle. La protection de

son intégrité morale contre les atteintes à l’exercice de ses libertés et droits

fondamentaux.

Chapitre 1 : La protection de l’intégrité physique du salarié

La sauvegarde de l’intégrité physique du salarié impose d’enfermer le temps et la

durée du travail dans des limites étroitement définies afin de préserver la santé

et la sécurité au travail.

Section 1 : Le temps et la durée du travail

De multiples intérêts s’attachent à la détermination du temps du travail. Ce

temps constitue un instrument de mesure du paiement du salaire. Il délimite

surtout la période au cours de laquelle le salarié se trouver placé sous l’autorité

de l’employeur avec toutes les conséquences disciplinaires et sécuritaires qui en


résultent. Dans cette optique, le temps de travail effectif correspond à la durée

légale du travail qui n’exclue pas le recours éventuel à un temps additionnel

convenu par les parties, et donnant droit à une rémunération spécifique.

§1/ La détermination de la durée du travail

La durée légale du travail correspond à la période au cours de laquelle le

salarié doit exécuter sa prestation de travail pour le compte de l’employeur. Ce

temps de présence obligatoire du salarié au service de l’employeur est

entrecoupé ou suivi de périodes de repos et de congés payés.

A/ La durée légale du travail

Aux termes de l’article 165 du code du travail « dans tous les établissements,

même d’enseignement et de bienfaisance, la durée légale du travail ne peut

excéder 40 heures par semaine ». Cette durée est confirmée par le décret n° du

25 février 2010 instituant la journée continue de travail. Ce décret maintient le

principe de la semaine de 40 heures

L’article 165 du code du travail prévoit un régime de droit commun qui a été

précisé par le décret n° 0933.PR/PTEPS du 30 décembre 2009 fixant la

répartition journalière de la durée hebdomadaire du travail en République

Gabonaise. L’article 2 du décret réaffirme le principe de la semaine de 40 heures

sur toute l’étendue du territoire pour les établissements publics ou privés,


d’enseignement ou de bienfaisance. Sont ainsi concernées, les administrations

publiques et les entreprises régies par les règles de droit privé.

En application du décret, la durée journalière du travail est de 8 heures. Cette

durée est impérativement comprise entre 7 H 30 (heure d’embauche) et 15 H 30

(heure de sortie). Chaque travailleur bénéficie d’une pause journalière de 30

minutes. Cette pause est observée entre 11 H 30 et 13 H 30, selon une formule

de roulement appropriée à chaque entreprise. Cette pause est comprise dans les

8 heures de travail et rémunérée comme temps de travail.

En application de l’article 3 du décret, seuls les établissements à feux continus et

ceux dont les implications sociales nécessitent une répartition différentes ne sont

pas soumis à l’exigence de la répartition de la journée de travail sur 5 jours. Pour

ces entreprises, une répartition de la durée légale du travail sur plus de 5 jours

par semaine est admise. Sont notamment concernés par cette dérogation :

• le commerce de détail ;

• les activités et opérations connexes de manutention portuaire ;

• l’hôtellerie ;

• la restauration ;

• les débits de boissons ;


• le gardiennage ;

• la sécurité ;

• le ramassage d’ordures ;

• les établissements hospitaliers, cliniques et les cabinets médicaux ;

• les gens de maison ;

• les professions libérales ;

• les professions de presse.

A ces entreprises, il faut ajouter, en application de l’article 4 du décret du

30 décembre 2009 :

- Les organismes ou sociétés travaillant en « 2 ou 3 huit » ;

- Les organismes ou sociétés nécessitant des gardes ou des permanences.

Toutefois, pour ces entreprises, la modification durable des horaires de

travail est subordonnée à certaines conditions, à savoir :

- l’information des délégués du personnel ;

- l’autorisation préalable de l’Inspecteur du travail.

Les dérogations à la semaine des 40 heures est prévu par l’article 166, alinéa 4,

du code du travail. Selon ce texte, des décrets pris sur proposition du ministre du
travail apporteront des dérogations à la durée hebdomadaire du travail. Ces

dérogations ont été apportées par le décret n° 726/PR du 29 juin 1998 qui en

prévoit 5 types.

●Les dérogations permanentes particulières aux activités à fonctionnement

continu non susceptible d’interruption

Elles concernent toutes les activités qui doivent être exercées en continu, sans

interruption possible ni le jour ni la nuit. Dans ce cas, la durée hebdomadaire de

travail peut atteindre 42 heures sur une période de 12 semaines. Mais la durée

journalière de travail ne peut en aucun cas être supérieure à 8 heures. (Temps

de repos du salarié : 24 heures consécutives par semaine)

Sont particulièrement intéressés par cette dérogation, les entreprises pétrolières

y compris les sous-traitants, les entreprises minières et les usines de raffinage.

●Les dérogations ayant pour objet la récupération des heures perdues en cas

d’interruption collective du travail à la suite d’un accident ou d’un cas de force

majeure non imputable à l’employeur. Ces dérogations sont prévues par le décret

de 1998 qui fixe les conditions de récupération des heures perdues, à savoir :
 un jour dans la semaine ou la semaine suivante ;

 deux jours dans la semaine ou les deux semaines suivantes ;

 trois jours dans la semaine ou les trois semaines suivantes ;

 quatre jours dans la semaine ou les quatre semaines suivantes.

●Les dérogations permanentes permettant l’exécution des travaux

préparatoires ou complémentaires

Elles concernent essentiellement les entreprises de transport qui emploient des

salariés pour effectuer le chargement ou le déchargement des wagons, avions,

bateaux ou camions. Pour ces personnels, la prolongation varie entre 1 à 3 heures

de travail par jour.

Ces heures sont rémunérées au taux horaire normal.

●Les prolongations temporaires de la durée du travail en vue du maintien ou

de l’accroissement de la production ainsi qu’en vue de l’exécution de travaux

urgents ou exceptionnels

A côté de ces dérogations légales, il existe des dérogations prévues par les

pratiques professionnelles qui s’expliquent par l’absence de législation spécifique


dans les secteurs d’activités concernés. Dans ce cas, l’employeur met en œuvre

des solutions pratiques qui permettent d’instaurer des périodes d’alternance

dans le travail. Le salarié travaille alors au-delà de l’horaire légal et bénéficie

d’un temps de repos complet. Ces solutions pratiques sont souvent mises en

œuvre dans les compagnies pétrolières pour les salariés travaillant sur les plates-

formes.

S’agissant du travail de nuit, c’est-à-dire du travail effectué entre 21 heures et

6 heures, l’article 166, alinéa 2, du code du travail prévoit que le travailleur ne

peut travailler plus de 8 heures consécutives. Par ailleurs, l’article 167 interdit

de faire travailler la nuit, dans tous les établissements industriels, publics ou

privés, les femmes sans distinction d’âge et les enfants de moins de 18 ans.

L’interdiction de l’article 167 supporte toutefois des dérogations qui sont

énumérées par l’article 168 du code du travail. Il existe par ailleurs, un décret

n°258/PR/MEEDD du 19 juin 2012 déterminant les modalités d’application du

travail de nuit et des enfants en République Gabonaise, pris en application de

l’article 169 du code du travail qui prévoit que « le travail de nuit des femmes

et des enfants dans l’industrie sera réglementé par décret pris sur proposition du

Ministre en charge du travail conformément aux normes internationales ».


A côté du régime de droit commun, l’article 165, alinéa 3, prévoit un régime

spécifique pour les entreprises agricoles et assimilées. Dans ces entreprises, les

heures de travail sont basées sur 2400 heures par an, à raison de 8 heures par

jour.

Sont concernés par cette obligation :

 les exploitations agricoles, quelle que soit leur nature ;

 les exploitations forestières et activités annexes ;

 les établissements de sciage faisant partie de la même exploitation

forestière, à condition qu’ils tirent de cette exploitation au moins 60% du

bois qu’ils consomment ;

 les exploitations d’élevage ;

 les bureaux, dépôts et magasins de vente se rattachant à des exploitations

agricoles ou forestières lorsque ces exploitations constituent le principal

établissement ;

 les coopératives agricoles ou forestières de culture ;

 les travailleurs agricoles occupés par des entrepreneurs ou particuliers à

l’entretien ou à la mise en état des jardins.

B/ Le temps de repos
C’est la période au cours de laquelle le salarié n’est pas tenu de se consacrer au

travail à lui confié par l’employeur. Le repos est un droit fondamental garanti par

la constitution. Il a pour but de sauvegarder la santé du salarié et de lui assurer

la possibilité de mener une vie personnelle, familiale et sociale normale. A cette

fin, le code du travail fait bénéficier au salarié d’un repos hebdomadaire et des

et des jours fériés.

1/ Le repos hebdomadaire

Le repos hebdomadaire est au minimum de vingt-quatre heures consécutives par

semaine et a lieu en principe le dimanche, conformément aux dispositions de

l’article 183 du code du travail. Mais il existe des possibilités d’aménagement du

principe du repos hebdomadaire prévues par le décret n° 273 du 5 décembre

1962 pour toutes les professions dont le repos hebdomadaire peut être pris un

autre jour que le dimanche.

Il y a d’abord des aménagements au principe même du repos hebdomadaire avec

ou sans repos compensateur en cas de travaux urgents ou s’agissant des

travailleurs de moins de 18 ans, les gardiens ou le personnel d’entretien des

machines par exemple.


Il y a ensuite des aménagements qui affectent le principe du repos dominical. Le

décret du 5 décembre 1962 distingue entre les dérogations de plein droit et les

dérogations facultatives. Les dérogations de plein droit s’appliquent aux hôtels,

restaurants, débits de boisson, hôpitaux, services de garde, magasins

d’alimentation, entreprises de transport, de distribution d’eau et d’électricité,

entreprises de production de froid ou d’enlèvement des ordures. Dans ces

entreprises, le repos dominical est de plein droit organisé par roulement. Quant

aux dérogations facultatives, certaines ont un caractère temporaire. Elles ont été

prévues pour les entreprises qui ne peuvent accorder un repos dominical aux

employés sans causer un préjudice au public. Dans ces entreprises, le repos peut

être accordé pour toute l’année ou à certaines époques de l’année. Dans l’un et

l’autre cas, le décret de 1962 fixe les modalités du repos hebdomadaire dans les

proportions suivantes :

 un autre jour que le dimanche pour tout le personnel ;

 du dimanche midi au lundi midi pour tout le personnel ;

 le dimanche après-midi avec un repos compensateur d’une journée par

roulement et par quinzaine ;

 par roulement pour tout ou partie du personnel.


Dans tous les cas, les dérogations temporaires sont accordées par le ministre du

travail. Elles sont valables un an et renouvelables.

D’autres dérogations facultatives ont un caractère occasionnel. Elles sont mises

en œuvre en cas de travaux urgents. Elles ne sont valables que 3 dimanches par

an.

2/ Les jours fériés

C’est le décret du 29 juin 1998 qui fixe le régime des jours fériés en

républiques gabonaise. Ce texte détermine les fêtes légales au Gabon énumérées

comme suit :

 le 1er janvier ;

 l’Ai Fityri (fin du Ramadan) ;

 Pâques et lundi de Pâques ;

 Le 1er mai ;

 la Pentecôte et le lundi de Pentecôte ;

 l’aid El Kebir (fête du mouton) ;

 le 15 août (l’Assomption) ;

 les 16 et 17 août (fête de l’indépendance) ;

 le 1er novembre (La Toussaint) ;


 le 25 décembre (noël).

Ces jours fériés sont dits chômés et payés car le salarié reçoit de l’employeur une

indemnité compensatrice égale au salaire calculé sur la base de l’horaire normal.

Les heures supplémentaires ne sont pas incluses dans la base de calcul de

l’horaire normal.

Lorsque la fête légale coïncide avec le jour du repos hebdomadaire, l’indemnité

compensatrice n’est pas due. Le salarié qui est obligé de travailler un jour férié

déclaré chômé et payé a droit, en plus de l’indemnité compensatrice, au salaire

correspondant à la journée de travail effectuée.

Enfin, les jours fériés, chômés et payés ne sont pas récupérables

C/ les congés payés

Tout salarié ayant accompli un temps minimal dans l’entreprise a droit, chaque

année, à un nombre de jours de congés payés assortis d’une allocation financière

versée par l’employeur.

1/ Le droit du salarié aux congés payés


Le bénéfice du droit aux congés payés est dû après un service effectif de 12 mois

dans l’entreprise. Ce droit au bénéfice des congés payés doit être distingué du

principe même du droit aux congés payés. En ce sens que, tout salarié qui a

travaillé pendant un mois au moins chez le même employeur a droit à 2 jours

ouvrables de congés payés. Mais il ne peut effectivement en bénéficier qu’après

un séjour d’au moins un an dans l’entreprise.

Le droit aux congés payés se prescrit par 2 ans à compter du moment où le

salarié y a droit. Le délai de prescription peut être suspendu par la force

majeure et la faute de l’employeur.

2/ La durée des congés payés

L’article 185 du code du travail fixe une durée minimale annuelle de congés

payés équivalant à 2 jours ouvrables au moins par mois de travail effectif. Le

salarié âgé de moins de 18 ans a droit à de 2 jours et demi. Les salariés expatriés

peuvent espérer 4 à 5 jours par mois de travail effectif.

Pour le calcul de la durée des congés payés, le jour ouvrable s’entend de tous les

jours, y compris le samedi. Seul le dimanche est exclu du calcul des congés

payés. Cette durée légale de congés est augmentée en fonction de l’ancienneté

du salarié et pour les mères de famille. En application de l’arrêté du 21


novembre 1980, la durée légale de congés payés fixée à l’article 185 du code du

travail est augmentée dans les proportions suivantes :

- 2 jours ouvrables en plus pour le salarié totalisant 5 ans de service

continu dans la même entreprise ;

- 1 jour ouvrable par année supplémentaire au-delà de la 5e année de

service continu dans la même entreprise.

Le contrat individuel ou la convention collective de travail peut prévoir des

dispositions plus favorables au salarié.

Les mères de famille bénéficient, selon l’article 186, alinéa 4, du code du

travail, de 1 jour de congé supplémentaire par an et par enfant à charge de

moins de 16 ans. La mère de famille de moins de 21 ans, a droit à 2 jours

supplémentaires par an et par enfant à charge de moins de 16 ans.

Pour le salarié expatrié, en vertu de l’article 188, alinéa 4 du code du travail, il

convient de prendre en compte pour le calcul de la durée des congés payés, les

délais de route (aller-retour) nécessaires pour se rendre du lieu d’emploi au lieu

d’engagement.
Le calcul de la durée des congés se fait sur la base du temps de travail effectif

accompli par le salarié. Le travail effectif correspond à une période de travail

effectuée dans l’entreprise. Elle comprend la période d’apprentissage, la période

d’essai ou de prévis.

Certaines périodes d’inactivité du salarié sont légalement assimilées à une

période de travail effectif. Il en est ainsi lorsque le contrat de travail est

suspendu en application de l’article 36 du code du travail en cas de maladie, de

maternité ou d’accident ou lorsque l’employeur ou le salarié est appelé sous les

drapeaux ou effectue son service militaire. Dans tous ces cas, l’employeur ne

peut déduire la durée de la suspension du calcul de la durée des congés payés.

D’autres périodes d’inactivité sont conventionnellement assimilées à des périodes

de travail effectif. Ainsi, en application des conventions collectives issues du

droit commun, les périodes qui suivent ne peuvent être déduites du calcul de la

durée des congés payés :

- Les absences justifiées par les activités syndicales du salarié dans la

limite de 6 jours par an ;


- Les congés d’éducation ouvrière ou syndicale du salarié dans la limite

de 10 jours par an ;

- Les congés d’éducation sportive dans la limite de 10 jours par an.

Enfin, il convient aussi d’intégrer dans le temps de travail effectif les congés

payés n’ont pris par le salarié l’année précédente.

Par ailleurs, des situations particulières peuvent conduire à un allongement de la

durée des congés payés. Il en est ainsi lorsque survient un jour férié et chômé

pendant la durée des congés payés. Dans ce cas, le salarié bénéficié de 1 jour

ouvrable supplémentaire. Par contre, si le jour férié et chômé coïncide avec un

jour de repos hebdomadaire, le salarié ne bénéficie pas de 1 jour ouvrable

supplémentaire.

3/ L’allocation de congés payés


Selon l’article 188 du code du travail, le salarié bénéficiaire du droit aux congés

payés doit recevoir une allocation versée par l’employeur. Cette allocation est au

moins égale à la moyenne correspondante des salaires, indemnités, primes (y

compris la prime d’ancienneté) et commissions versés au salarié au cours des 12

mois précédant son départ en congé. A ces éléments, il convient d’ajouter les

gratifications obligatoires dès lors qu’elles sont fixes et régulièrement versées à

tous les salariés, les heures supplémentaires, le sursalaire et l’indemnité

journalière de maladie ou de maternité.

Enfin, en application des dispositions de l’article 188, alinéa 3 du code du travail,

l’employeur est tenu de payer l’allocation de congés payés au salarié en une

seule fois avant son départ en congés. L’allocation de congés payés étant

assujettie au régime fiscal du salaire, l’employeur doit la mentionner sur le

bulletin de paie. Il doit aussi prélever les cotisations dues à la CNSS ainsi que le

montant de la TCS et de l’IRPP.

Au terme du contrat de travail ou lorsqu’il est résilié avant que le salarié n’ait

acquis son droit de jouissance aux congés payés, ce dernier droit bénéficier

d’une indemnité compensatrice de congés payés calculée sur la même base que

l’allocation de congés payés. Cette indemnité est versée y compris au salarié qui

a commis une faute lourde.


En dehors des dérogations et des heures de repos ou de récupération, les heures

de travail effectuées au-delà de la durée légale de travail ou de celle jugée

équivalente obéissent à un régime particulier.

§2/ Les dépassements de la durée réglementée du travail

La fixation de la durée légale de travail à 40 heures permet de définir à partir de

quels seuils sont comptabilisées les heures supplémentaires. Mais le recours aux

heures supplémentaires peut être contourné par les conventions de forfait.

A/Le recours aux heures supplémentaires


L’article 165, alinéa 2, du code du travail définit les heures supplémentaires

comme celles qui sont effectuées au-delà de la durée légale du travail et qui

donnent lieu à majoration de salaire. Toute heure de travail qui dépasse le seuil

des 40 heures hebdomadaires, est, en principe, sauf dérogation légale,

considérée juridiquement comme une heure supplémentaire.

Tous les secteurs d’activités sont concernés par la possibilité d’accomplir les

heures supplémentaires, dans la limite maximum de 20 heures par semaine. Il en

résulte que dans toutes les entreprises, la durée hebdomadaire de travail, heures

supplémentaires comprises, ne peut excéder 60 heures ni 10 heures par jour.

Seul l’employeur peut décider si un salarié va ou non faire des heures

supplémentaires. L’employeur doit consulter les délégués du personnel qui ont 8


jours pour faire connaître leur avis. Muni de cet avis, l’employeur adresse à

l’Inspection du travail une demande motivée de dépassement de la durée légale

du travail.

La demande de l’employeur doit faire ressortir :

 la nature et la cause de la dérogation ;

 le nombre d’ouvriers et d’employés pour lesquels la durée du travail sera

prolongée ;

 les jours où il sera fait usage de la dérogation ;

 les heures de travail et de repos prévus pour le personnel concerné.

Ainsi, le recours aux heures supplémentaires est soumis à une autorisation

préalable de l’Inspection du travail, sous peine de sanction pénale. D’ailleurs,

l’employeur doit afficher dans l’entreprise un tableau récapitulatif des

autorisations accordées et des dates où les dérogations ont été utilisées

Il ne peut pas licencier avant l’expiration d’un délai de 1 mois les salariés ayant

effectué des heures supplémentaires.


Toutes les heures supplémentaires effectuées donnent droit à une majoration de

salaire qui peut être élevée par les conventions ou accord collectifs de travail, en

application de l’arrêté n° 2621 du 8 février 1958. L’arrêté institue deux régimes

de rémunération : le régime général et le régime agricole.

Pour ce qui est du régime général,les heures supplémentaires sont ainsi

rémunérées :

 10% du salaire horaire normal pour les 8 premières heures supplémentaires :

 25% du salaire horaire normal au-delà de la 9e heure supplémentaire pour

les heures effectuées de jour ;

 25% du salaire horaire normal pour les heures effectuées pendant le jour de

repos hebdomadaire ou pendant les jours fériés ;

 50% du salaire horaire normal pour les heures supplémentaires effectuées

de nuit ;

 100% du salaire horaire normal pour les heures effectuées de nuit pendant

les jours de repos hebdomadaire ou les jours fériés.

Pour ce qui est du régime agricole et assimilé, la pondération est la

suivante :
 10% du salaire horaire normal pour les 6 premières heures du jour au-delà

de la durée légale ou de la durée considéré comme équivalent ;

 25% du salaire horaire normal pour les heures suivantes de jour ;

 50% du salaire horaire normal lorsque les heures sont effectuées la nuit ;

 25% du salaire horaire normal pour les heures effectuées pendant les jours

de repos hebdomadaire ou les jours fériés ;

 100% du salaire horaire normal pour les heures de travail de nuit.

Comme pour le régime général, ces majorations peuvent être élevées par les

conventions ou accords collectifs.

Pour le calcul des heures supplémentaires, on tient compte du salaire horaire,

c’est-à-dire du salaire effectif.

B/ Les conventions de forfait


La convention de forfait est un accord conclu par les parties à la relation de

travail en vertu duquel le salarié reçoit une rémunération globale incluant le

salaire principale et, par avance, les heures supplémentaires qui seront

effectuées. La convention de forfait n’obéit à aucune réglementation

spécifique en droit gabonais. Le forfait peut être en heures et ou en jours.

1/ Forfait en heures

Il s’agit en réalité de réaliser une contractualisation des heures

supplémentaires. Le forfait d’heure de travail peut être hebdomadaire,

mensuel ou annuel. Dans tous les cas la convention de forfait doit être écrite.

Lorsqu’elle est annuelle la convention de forfait ne peut, en principe, être

signée que par des cadres dont la nature des fonctions ne permet pas de le

soumettre à un horaire collectif ou par des salariés qui disposent d’une très

large autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps.

2/ Forfait en jours

Le temps de travail est calculé en jour exclusivement sur l’année. Le forfait

repose donc sur un nombre de jours à travailler dans l’année fixé dans la

convention ou par un accord collectif d’établissement.


Section 2 : La santé et la sécurité au travail

Au-delà de la garantie juridique contre la rupture du contrat de travail

organisée, par le code du travail, à travers le régime de la suspension du

contrat de travail, il convient de se demander s’il existe en droit gabonais, un

mécanisme particulier de protection du salarié malade dès lors que sa maladie

a une origine professionnelle ou du salarié accidenté à la suite d’un accident

du travail.

§1/ La santé du salarié au travail

Elle concerne la protection contre les maladies professionnelles et le

traitement juridique des risques psychosociaux auxquels sont exposés les

salariés en milieu professionnel

A/ La protection contre les maladies professionnelles

Aux termes de l’article 1er du décret du 12 juin 1967, constituent des maladies

professionnelles « les manifestations morbides d’intoxication aiguës ou

chroniques » que présente le salarié exposé de façon habituelle « à l’action des

agents chimiques ou pathogènes »169.

169A. Emane « La nécessité d’une meilleur prise en compte de la santé et de la sécurité au travail, inédit ; du même auteur « La
santé au travail sous l’angle de la protection et de la réparation des risques professionnels. Evolution et perspectives », RFAS n° 2-3
2008, p. 279 et s.
Le décret du 12 juin 1967 propose une liste des maladies professionnelles. Il

établit en outre la liste des travaux, procédés, professions qui exposent le salarié

au risque de contracter des maladies professionnelles.Le code de la sécurité

sociale prévoit une mise à jour régulière de cette liste, ce qui n’a jamais été fait.

La maladie professionnelle est déclarée par le médecin traitant du salarié. La

déclaration est faite au ministère de la santé publique qui en informe le

ministère du travail. Le médecin indique dans sa déclaration la nature de la

maladie professionnelle ainsi que l’agent nocif ayant occasionné la maladie.

Le code du travail (Articles 198 et suivants) prévoit un certain nombre

d’obligations pesant sur les employeurs comme sur les travailleurs afin de

préserver ou de prévenir la santé du salarié au travail. Ainsi, l’employeur, en

concertation avec les représentants des salariés, devra « définir, mettre en

application et réexaminer périodiquement un programme de prévention des

risques présents sur les lieux de travail ». Il doit en outre déclarer auprès de

l’inspecteur du travail la nature des risques susceptibles de provoquer des

maladies professionnelles et les mesures de protection et de prévention prises

pour mettre les salariés à l’abri des nuisances résultant de leur activité. Enfin,

aux termes de l’article 211 du code du travail prescrit aux employeurs de

respecter les conditions de propreté, d’hygiène et de salubrité dans l’entreprise,

nécessaires à la santé des travailleurs.


B/ La protection contre les risques psychosociaux

Aucune réglementation n’existe en la matière en droit gabonais. Mais la

notion de risques psychosociaux prend une importance considérable à

l’époque contemporaine au point de devenir une préoccupation majeure de la

santé des salariés en milieu professionnel. La catégorie des risques

psychosociaux désigne généralement le stress au travail, différentes formes

de souffrance ou de maux liés aux comportements des collègues ou du patron,

comme par exemple La violence ou le harcèlement moral que le droit français

rattachent volontiers à l’obligation de sécurité de résultat qui pèse désormais

sur l’employeur.

§2/ La sécurité du salarié au travail

Elle fait également l’objet des dispositions des articles 196 et suivants du

code du travail. Dans ce cadre, l’employeur voit peser sur sa tête une

obligation générale de sécurité destinée à assurer la protection des

travailleurs. A côté de cette obligation légale, semble se développer en

jurisprudence une obligation de sécurité de résultat à la charge de

l’employeur. Mais en droit gabonais, les règles de protection des salariés au

travail concernent en particulier les accidents du travail.

A/La protection contre les accidents du travail


L’accident du travail correspond à tout accident dont est victime le salarié du

fait ou à l’occasion de l’exécution de sa prestation de travail. Tous les faits

survenus au salarié pendant le temps et au lieu du travail sont présumés être des

accidents du travail. Mais cette présomption favorable au salarié est une

présomption simple qui admet dès lors la preuve contraire.

A l’accident de travail est assimilé l’accident de trajet, c’est-à-dire celui qui est

survenu au salarié entre son domicile et le lieu de travail. L’accident de trajet

intègre le parcours aller-retour toutes les fois qu’il n’y a pas eu interruption ou

détournement pour un motif non lié à l’emploi ou personnel au salarié.

Comme l’a jugé le juge gabonais, la preuve de l’interruption ou du détournement

de trajet incombe à l’employeur.

Est également assimilé à un accident du travail, l’accident survenu au salarié

expatrié pendant le voyage pris en charge par l’employeur en vertu des articles

189 et suivants du code du travail.

Déclaration des accidents du travail


Il résulte de l’article 205, alinéa 2, du code du travail que le salarié doit signaler

immédiatement à l’employeur l’accident dont il a été victime du fait ou à

l’occasion du travail. Par ailleurs, aux termes des articles 202 du code du travail

et 57 du code de la sécurité sociale, l’employeur doit, sauf cas de force majeure,

déclarer à la CNSS, dans les 48 heures, l’accident survenu au salarié. C’est à la

suite de cette déclaration que les soins et l’indemnisation du salarié sont pris en

charge par la CNSS.

L’employeur qui ne déclare pas l’accident dans le délai légal devra indemniser le

salarié170. Il en est de même lorsqu’il n’a pas déclaré le salarié à la CNSS, le

privant ainsi, en cas d’accident professionnel, de son droit aux prestations,

prévu par le code de la sécurité sociale en cas d’accident du travail171.

B/ L’obligation jurisprudentielle de sécurité


C’est à la faveur de la reconnaissance juridique en France des maladies

professionnelles causées par l’amiante (fibre minérale utilisée massivement dans

la construction jusqu’en 1997 dont l’inhalation peut causer des cancers du

170 Cf. CSG 6 avr. 1981 RJS du Gabon, p.36 : absence de responsabilité de l’employeur faute
pour le salarié d’avoir établi qu’il l’avait informé de son accident et de son état de santé ; alors
que l’employeur n’avait reçu aucun certificat médical attestant de la réalité de l’accident du
travail qui aurait dû obliger l’employeur à déclarer l’accident à la CNSS ; CSG, 8 févr. 1982 ;
RJS du Gabon ? P. 37 : absence de responsabilité de l’employeur pour non déclaration d’un
accident du travail. Employeur non informé par le salarié de l’accident de trajet dont avait été
victime le salarié.
171 Cf. CSG, 19 mars 1984, p. 38 : absence d’immatriculation à la CNSS. Privation du droit aux

prestations de la CNSS. Responsabilité de l’employeur. Réparation de l’intégralité du préjudice


subi par le salarié (chauffeur victime d’un accident de travail qui a perdu un œil.
poumon..), que s’affirme en jurisprudence l’idée que l’employeur est tenu d’une

obligation de sécurité de résultat à l’égard de son employeur. Il ne peut

s’exonérer de cette responsabilité que s’il établit qu’il a pris les mesures de

prévention nécessaire pour prévenir l’atteinte à la santé ou à la sécurité des

salariés.Ainsi sur le fondement de l’obligation de sécurité, la cour de cassation

interdit à l’employeur de se prévaloir d’une cause réelle et sérieuse lorsqu’il

licencie un salarié déclaré inapte à la suite d’une maladie ou d’un accident dû

au manquement à son obligation de résultat.

Chapitre 2 : La protection des libertés et droits fondamentaux du salarié


Le salarié bénéficie d’un certain nombre de droits fondamentaux et libertés qu’il

peut faire valoir dans la relation de travail qui le lie à l’employeur. Le droit du

travail insiste en particulier sur l’exigence de d’égalité entre tous les salariés,

mais aussi sur le droit de grève qui, malgré sa consécration constitutionnelle, fait

rigoureusement réglementé.

Section 1 : Les droits fondamentaux du salarié et l’exigence d’égalité

Les droits de la personne du salarié sont multiples. On en distingue généralement

deux catégories. La première regroupe les droits fondamentaux du citoyen ou de

la personne humaine que les salariés peuvent invoquer. La seconde catégorie vise

des prérogatives liées à l’exigence contemporaine d’égalité.


§1/ Le droit du salarié au respect de sa vie privée

Le droit du salarié au respect de sa vie privée, comme tout citoyen, est

protégé par les textes internationaux à valeur constitutionnelle. Il concerne

le respect de l’intimité et du secret de la vie privée, d’une part, et le

respect des choix personnels du salarié, d’autre part.

A/Le respect de l’intimité et du secret de la vie privée

Article 12 de la DUDH du 10 décembre 1948

Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son

domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation.

Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de

telles atteintes.
Charte africaine des droits de l’homme et des peuples

ARTICLE 4

La personne humaine est inviolable. Tout être humain a droit au respect de

sa vie et à l'intégrité physique et morale de sa personne: Nul ne peut être

privé arbitrairement de ce droit.

Article 1er de la Constitution gabonaise

5°Le secret de la correspondance, des communications postales, télégraphiques,

téléphoniques et télématiques est inviolable.

6° Les limites de l’usage de l’informatique pour sauvegarder l’homme, l’intimité

personnelle et familiale des personnes, et le plein exercice de leurs droits, sont

fixées par la loi

12° Le domicile est inviolable.

En droit comparé français, c’est dans le célèbre arrêt NIKON172 que la chambre

sociale de la cour de cassation, a consacré le droit du salarié au respect de

l’intimité de sa vie privée, même aux temps et lieu de travail. Les applications

de ce droit fondamental sont multiples : prohibition de l’intrusion de l’employeur


172 Soc. 2 oct. 2001.
dans la vie privée du salarié ( interdiction de poser des questions intimes sans

rapport avec l’emploi au moment de l’embauche ou de l’entretien en vue d’un

emploi), en vertu de ce droit, le salarié peut refuser de travailler à son

domicile, ou d’y installer ses dossiers et ses instruments de travail ; ce droit

permet d’encadrer l’accès de l’employeur à des éléments susceptibles de

révéler la vie privée du salarié ( courriers et documents personnels du salarié,

secret de la correspondance postale ou électronique.

B/ Le respect des choix personnels

Le droit au respect de la vie privée présente une facette plus active. Il permet

d’obliger l’employeur à prendre en compte des éléments de la vie privée et/ ou

familiale du salarié avant d’arrêter une décision ( par exemple, il a été jugé qu’

une clause du contrat de travail imposant à des employés de résider dans

l’immeuble qu’ils étaient chargés d’entretenir, limite leur liberté de choisir leur

domicile, dans la mesure où ses employés pouvaient fort bien réaliser leurs

fonctions tout en résidant à l’extérieur de leur lieu de travail173).

La cour de cassation française a également jugé que le changement d’horaire qui

est en principe un simple changement des conditions de travail, constitue une

modification du contrat de travail, dans la mesure où » il a porté une atteinte

173
Cass. soc. 13 avr. 2005, Dr. soc., 2005. 809, obs. J. SAVATIER, Soc. 28 févr.2012, n°10-18.308
excessive à la vie privée et familiale du salarié174. On voit que l’obligation de

prendre en considération la vie privée et familiale du salarié conduit en l’espèce

à modifier la détermination du contenu du contrat de travail.

§2/ Le droit à la dignité du salarié

La prise en compte des droits fondamentaux dans la relation de travail oblige

l’employeur à respecter la dignité et la vie personnelle du salarié175.

Charte africaine des droits de l’homme et des peuples

ARTICLE 5

Tout individu a droit au respect de la dignité inhérente à la personne

humaine et à la reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes

formes d'exploitation et d'avilissement de l'homme notamment

l'esclavage, la traite des personnes, la torture physique ou morale, et

les peines ou les traitements cruels inhumains ou dégradants sont

interdites.

174
Soc. 3 nov. 2011, n°10-14.702.
175 J. Savatier, « La protection de la vie privée des salariés », Dr. soc 1992, p. 329 et s.
§3/ Le principe de non-discrimination et l’égalité de traitement

L’exigence d’égalité dans les relations de travail subordonné prend d’abord sa

source dans les instruments internationaux de protection des droits de l’homme

relayés par la Constitution Gabonaise.

Article premier de la DUDH

Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits.

ARTICLE 3 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples

1. Toutes les personnes bénéficient d'une totale égalité devant la loi.

2. Toutes les personnes ont droit à une égale protection de la loi.

Article 1er de la Constitution

7° Chaque citoyen a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi. Nul ne

peut être lésé dans son travail en raison de ses origines, de son sexe, de sa race,

de ses opinions.

Cette aspiration à l’égalité des salariés est nettement affirmée par l’article 8 du

code du travail : « Tous les travailleurs sont égaux devant la loi et bénéficient de
la même protection et des mêmes garanties. Toute discrimination en matière

d’emploi et de conditions de travail fondée notamment sur la race, la couleur, le

sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale

est interdite ».

Ce texte garantit à la fois l’égalité de traitement entre salariés (B) et interdit

toutes formes de discriminations à l’égard d’un salarié(A).

A/ Le principe de non-discrimination

L’article 8 du code du travail interdit les discriminations fondées sur les attributs

ou la condition de la personne (race, couleur, sexe, ascendance nationale ou

origine sociale) ou sur des actes qui constituent l’exercice d’un droit ou d’une

liberté fondamental reconnu par la constitution (la religion, l’opinion politique ou

les activités syndicales). Il y a discrimination que lorsque la décision de

l’employeur est fondée sur un critère illicite (race, couleur, sexe, ascendance

nationale ou origine sociale). La démonstration de la prise en compte de ce seul

critère dans la décision de l’employeur suffit à caractériser la discrimination. La

comparaison avec d’autres salariés n’est donc pas systématiquement nécessaire

pour prouver la discrimination.

Mais il n’est pas aisé d’établir l’intention de l’employeur de discriminer. La

solution qui s’offre alors au juge consiste, comme cela a été admis en droit

comparé français et européen, à opérer un partage de la charge de la preuve. Il

revient au salarié qui prétend être victime d’une discrimination d’exposer les
éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination. L’employeur,

quant à lui, pourra soit prouver que les éléments de fait sont insuffisants pour

établir la réalité de la discrimination alléguée, soit démontrer que la mesure

prétendument discriminatoire se justifie par des éléments objectifs étrangers à

toute discrimination.

Sur le plan de la sanction, un acte discriminatoire peut entrainer la

condamnation de l’employeur à verser au salarié victime, des dommages et

intérêts. En cas de licenciement, décidé de manière discriminatoire, on admet

en droit français, que le salarié puisse obtenir en justice sa réintégration, y

compris en référé et sous astreinte.

Dans la pratique, on constate cependant, que les libertés et droits fondamentaux

au travail ainsi que l’exigence d’égalité, ne sont pas toujours effectifs comme

l’atteste le rapport relatif à l’identification des obstacles à leur mise en œuvre176

B/ L’égalité de traitement

En application de l’article 8 du code du travail tous les salariés d’un même

employeur qui effectuent un travail similaire ou un travail de valeur égale

doivent bénéficier de la même protection et des mêmes garanties au travail.

176OIT, Bureau sous régional pour l’Afrique Centrale, PAMODEC, « Etude relative à l’identification des obstacles à la mise en œuvre
des principes et droits fondamentaux au travail au Gabon », Rapport final par le Pr Charles MBA-OWONO, mars 2008.
Cette exigence d’égalité trouve à s’appliquer aussi bien au stade du recrutement

que pendant l’exécution du contrat de travail. Ainsi, au moment du recrutement,

l’employeur ne peut sélectionner les candidats à l’emploi que sur des critères

objectifs. De même, tout au long de la relation de travail, l’employeur doit

respecter l’égalité entre les salariés177. Il est par exemple tenu d’accorder le

même avantage à tous les salariés qui en remplissent les conditions d’octroi ou

un égal accès à une promotion professionnelle.

Ce principe d’égalité ne vise pas à égaliser la situation de tous les salariés ou de

leur accorder les mêmes droits ou des avantages identiques. Il sert seulement à

vérifier que les différences de traitement, décidées par l’employeur entre les

salariés d’une même catégorie professionnelle, sont légitimes et justifiées.

A cet effet, la comparaison est nécessaire pour déterminer si tel salarié est

moins bien traité que tel autre placé dans la même situation professionnelle ou à

compétence égale. Le salarié qui se sent lésé ou désavantagé doit, par des

éléments de fait probants, établir l’apparence d’une différence ou d’une

inégalité de traitement. L’employeur peut toujours soit contester cette

apparence, soit démontrer que malgré une situation identique, la différence de

177 J.-E Ray, « L’égalité et la décision patronale », Dr. soc 1990, p. 83 et s.


traitement est justifiée par des raisons objectives dont la réalité et la pertinence

relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond.

Il convient cependant de ne pas confondre égalité de traitement et lutte contre

les discriminations en milieu professionnel.

Section 2 : Les libertés reconnues au salarié

Ces libertés peuvent avoir un caractère individuel ou collectif. Les libertés à

caractère plutôt individuel sont celles qui sont reconnus à tous les citoyens par la

constitution. Ces libertés s’appliquent donc au travail subordonné. Ainsi, à

l’instar des autres citoyens, le travailleur jouit de la liberté de pensée et

d’opinion, de la liberté d’expression178, de la liberté religieuse ainsi que de la

liberté de réunion et de manifestation.

Les décisions prises par l’employeur en violation des libertés et droits

fondamentaux du salarié sont en principe entachée de nullité. Il n’est cependant

pas interdit de restreindre l’exercice de certaines de ces libertés fondamentales

dès lors que ces restrictions ou limitations sont motivées par la nature de la

178 Soc. 28 avr. 1998. Dr. Soc.428. Arrêt Clavaud. La liberté d’expression reconnue au salarié
leur permet de critiquer leur entreprise. Elle interdit que soient sanctionnées les prises de
position des salariés (Soc. 1er juil. 2015, n°14-13.871). Il faut réserver l’usage abusif de cette
liberté d’expression qui correspond à l’emploi de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs)
tâche à accomplir et/ou ont un caractère justifié et proportionnée notamment au

but poursuivi179.

Les libertés à caractère collectif renvoient, pour l’essentiel, à la liberté

syndicale dont on reconnait la valeur constitutionnelle.

Article 1-13 : constitution des syndicats dans les conditions prévues par la loi.

Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l’action syndicale et

adhérer au syndicat de son choix.

Selon, l’article 14 du code du travail, l’Etat garantit la liberté et l’exercice du

droit syndical. En outre, chaque salarié ou employeur est libre d’adhérer au

syndicat professionnel de son choix. L’alinéa 2 du même texte en tire les

conséquences en interdisant tous les actes d’ingérence ainsi que toute

discrimination de nature à porter atteinte à la liberté syndicale.

Section 3 : Le droit de grève

Le droit de grève est consacré par le préambule de la constitution gabonaise au

titre des libertés et droits fondamentaux issus des instruments internationaux et

179 La question s’est posée en droit comparé français s’agissant de la possibilité ou non pour
l’employeur d’interdire le port de signes religieux dans l’entreprise. Ainsi dans un arrêt
d’assemblée plénière en date du 25 juin 2014, la cour de cassation a jugé légitime le
licenciement d’une salariée portant un foulard religieux en considérant que la restriction à la
liberté de manifester sa religion était justifiée et proportionnée.
régionaux. Conformément à l’article 47 de la Constitution, le code du travail fixe

le régime juridique de l’exercice du droit de grève.

Le droit de grève est reconnu par le code du travail actuellement en vigueur,

lequel a supprimé tous les obstacles contenus dans le code de 1978 et qui

entravaient son exercice effectif180. La mise en œuvre de ce droit constitutionnel

n’en est pas moins enfermée dans des limites étroitement définies tant en ce qui

concerne les conditions de son déclenchement que les effets qui s’y rattachent.

Mais, même licite, il n’est pas exclu qu’une grève dégénère et devienne ainsi

abusive. Dans ce cas, l’employeur a le droit de réagir pour essayer d’assurer la

poursuite ou le rétablissement de son activité.

§1/ Le déclenchement de la grève

Contrairement à la solution retenue en droit français, le déclenchement de la

grève doit être au préalable précédé d’un préavis. De même, l’exigence admise

en droit français ou dans certains pays africains, d’une notification ou dépôt des

revendications professionnelles n’est pas expressément consacrée en droit

gabonais, mais semble s’imposer dans la pratique. Selon l’article 342 du code du

travail que la grève est un droit individuel exercé collectivement qui suppose un

Ch. MBA-OWONO, De la neutralisation à l’encadrement du droit de grève au Gabon, Hebdo Informations, n° 393 du 23 janvier
180

1999.
arrêt total du travail en vue d’obtenir la satisfaction de revendications de nature

professionnelle.

A/ Le dépôt des revendications professionnelles

Pour être licite, la grève doit servir à appuyer des revendications

professionnelles. D’une façon générale, la jurisprudence considère que les

revendications relatives à la rémunération (salaires et accessoires) ont un

caractère professionnel. Il en est de même des revendications relatives aux

conditions de travail et plus globalement les revendications portant sur la

protection de l’emploi et les relations avec l’employeur.

L’exigence du caractère professionnel de la grève est confirmée par l’article 344

du code du travail qui rend illicite la grève à caractère purement politique

Dans tous les cas, le juge ne saurait contrôler l’opportunité de l’exercice du droit

de grève.

Il résulte de la jurisprudence française, que l’exercice du droit de grève

nécessite l’existence de revendications professionnelles dont l’employeur doit

avoir connaissance au moment de l’arrêt de travail. Mais si la présentation des

revendications professionnelles doit être préalable, la grève n’est pas pour

autant soumise au rejet par l’employeur desdites revendications. Il lui serait en

effet facile de retarder sa réponse afin de faire pression sur les grévistes ou de

laisser le mouvement de protestation s’essouffler.


Dans certains pays africains, la notification des revendications professionnelles

est une formalité obligatoire faite à l'inspecteur du travail ou au directeur du

travail par la partie la plus diligente.

Au Gabon, sans être expressément imposé, le déclenchement de la grève est

souvent précédé dans la pratique par le dépôt auprès de l’employeur du cahier

de charges ou liste des revendications des salariés.

B/ Le préavis de grève

Aux termes de l’article 346, alinéa 1er du code du travail, Le déclenchement de la

grève est soumis à un préavis déposé par le syndicat le plus représentatif des

salariés en conflit. Lorsque ces salariés ne sont pas syndiqués, le préavis est

déposé par les représentants qu’ils désignent librement.

En application de l’article 346, alinéa 2 du code du travail, le préavis doit être

adressé au chef d’entreprise 5 jours ouvrables au moins avant le déclenchement

de la grève. Le syndicat ou les représentants des salariés doivent y indiquer le

lieu, l’heure et la durée de la grève.

Par ailleurs, à défaut d’élection, la représentativité d’un syndicat est jugée, tant

par secteur que sur le plan national, selon 3 critères en application de l’article

347 du code du travail, à savoir :


- le nombre de délégués du personnel élus dans l’entreprise ;

- les effectifs du syndicat ;

- l’indépendance du syndicat à l’égard du gouvernement et des partis

politiques.

Selon l’article 346, alinéa 3 du code du travail, le dépôt d’un préavis de grève ne

dispense pas les partenaires sociaux d’ouvrir des négociations. Ils doivent tout

mettre en œuvre pour parvenir à un compromis en application de l’article 348,

notamment en s’adressant à l’inspecteur du travail ou en sollicitant la

nomination par les pouvoirs publics d’un médiateur.

Les dispositions des articles 346, alinéa 3, et 348 du code du travail établissent

ainsi le lien entre la grève et la négociation collective.

C/L’arrêt total du travail à la suite d’un mouvement collectif

Deux critères cumulatifs sont nécessaires pour qu’un mouvement revendicatif

emporte la qualification juridique de grève.

1/ Un arrêt total de travail


Pour être qualifiée de grève, l’action des salariés doit consister en une cessation

totale du travail. La durée de l’arrêt importe peu : une heure, une journée. Il n’y

pas de grève lorsque le travail est exécuté au ralenti, partiellement ou de

manière volontairement défectueuse. On parle dans ces différentes hypothèses

de grève perlée qui correspondent en réalité à une exécution fautive du contrat

de travail susceptible d’entrainer des sanctions disciplinaires. En revanche, sont

des grèves licites, les débrayages répétés, les grèves tournantes (le mouvement

se déplace de façon horizontale par catégorie professionnelle ou de façon

verticale par secteur d’activité) ainsi que les grèves bouchons (le mouvement se

concentre sur un point stratégique de la production). Cependant, ces

mouvements ne doivent pas conduire à une désorganisation de l’entreprise qu’il

ne faut pas confondre avec une désorganisation de la production qui est

inhérente à l’exercice normal du droit de grève.

De même, ne sont pas considérées comme grève au sens juridique du terme, les

grèves dites du zèle qui consiste à appliquer minutieusement ou à la lettre les

consignes : les douaniers qui fouillent systématiquement tous les véhicules

occasionnant ainsi un bouchon monstre et une absence de fluidité de la

circulation aux frontières…

2/ Un mouvement collectif et concerté


Selon l’article 242, la grève est l’arrêt concerté du travail par un groupe de

salariés. Elle doit donc être concertée. Cela signifie que les salariés doivent avoir

une motivation commune : assurer le succès de leurs revendications

professionnelles.

La grève doit aussi être collective. Pour faire grève il faut être au moins deux. Ce

qui permet de distinguer l’exercice du droit de grève de l’insubordination.

L’exigence d’un mouvement collectif n’implique pas l’existence d’une majorité

de salariés grévistes. Même minoritaires dans l’entreprise, les grévistes restent

grévistes.

Il est cependant possible qu’une grève soit observée dans une entreprise par un

seul salarié. Il en est ainsi lorsque le salarié est le seul à répondre dans son

entreprise à un mot d’ordre formulé au plan national ou local. C’est encore le

cas lorsque l’entreprise emploie un unique salarié qui est par conséquent le seul

à même de présenter et de défendre ses revendications professionnelles.

§2/Les effets de la grève

L’exercice licite du droit de grève emporte des effets sur l’exécution du contrat

de travail et sur le payement de la rémunération du salarié.

A/Sur la rémunération du salarié


Aux termes de l’article 351 du code du travail les heures ou les journées de

travail perdus ne sont pas rémunérées, sauf si la grève résulte du non-paiement à

terme du salaire. Comme il ne travaille pas, le salarié n’est pas par conséquent

payé pendant la grève. La réduction du salaire doit en principe être

proportionnelle à l’arrêt de travail.

Si le principe c’est que le temps de grève n’est pas payé, il existe des hypothèses

en vertu desquelles la jurisprudence estime que les salariés ont été contraints

de recourir à la grève à cause du comportement fautif de l’employeur. Il en est

ainsi, selon la jurisprudence en cas de « manquement grave et délibéré » de

l’employeur à ses obligations, par exemple en cas de violation des règles de

sécurité et d’hygiène ou de non-paiement des heures supplémentaires.

B/Sur l’exécution du contrat de travail

Aux termes de l’article 343 du code du travail, la grève n’est pas une cause de

rupture du contrat de travail. Ainsi, sauf en cas de faute lourde, le contrat de

travail ne peut être résilié en raison de la participation d’un salarié à la grève.

Elle est une cause de suspension du contrat de travail. Malgré cette suspension,

selon l’article 349 du code du travail, en cas de grève licite, les salariés sont

astreints à un service minimum obligatoire dans certaines entreprises

déterminées en fonction de leur utilité sociale ou de leur activité.


§3/ L’abus du droit de grève et les réactions patronales

La grève apparait comme un moyen de pression, parfaitement licite permettant

aux salariés de revendiquer de meilleures conditions d’emploi et de travail. Il

convient, par conséquent, de distinguer la grève des mouvements de

contestations illicites dont la mise en œuvre ne cadre pas avec la définition

légale. Il s’agit donc d’un exercice anormal ou abusif du droit de grève qui

permet la riposte de l’employeur.

A/ L’abus du droit de grève

La notion d’abus du droit de grève mérite d’être précisée. Il sera ensuite possible

d’examiner les sanctions applicables en la matière.

1/ La notion d’abus du droit de grève

L’expression abus du droit de grève ou grève abusive n’est pas consacrée par le

code du travail qui retient plutôt le vocable de grève illicite.

C’est en droit comparé français, et singulièrement dans la jurisprudence de la

cour de cassation française, que la notion d’abus du droit de grève ou de grève

abusive a prospéré. En effet, pour la cour de cassation française, la grève devient

abusive si elle aboutit à désorganisé l’entreprise. Cette jurisprudence a suscité la

critique de la doctrine pour deux raisons. Elle considère d’abord que toute grève
a vocation à désorganiser l’entreprise. La désorganisation de l’entreprise est en

effet un des objectifs ou en tout cas l’un des moyens de la grève dans le but de

faire pression sur l’employeur.

La critique doctrinale est ensuite plus sévère lorsque la jurisprudence distingue la

désorganisation de l’entreprise de la désorganisation de la production qui, elle

n’affecterait pas l’entreprise. Les auteurs sont plutôt sceptiques devant de telles

subtilités.

La notion française de grève abusive, paraît du moins en partie, rejoindre celle

de grève illicite consacrée par l’article 344 du code du travail gabonais. Le

caractère illicite révèle en effet un exercice abusif ou anormal du droit de grève.

Aux termes de ce texte, on entend par grève illicite, outre la grève purement

politique, la grève déclenchée sans préavis, la grève avec violence, voies de fait,

menaces, manœuvre dans le but de porter atteinte à l’exercice de l’industrie et

à la liberté du travail, la grève sans service minimum, la grève en cours de

négociation collective ainsi que la grève qui poursuit des objectifs autres que la

défense des droits et intérêts des salariés.

A supposer même que l’abus dans l’exercice du droit de grève soit caractérisé ou

qu’elle soit considérée comme abusive, sa sanction n’est pas clairement

énoncée par la loi ou la jurisprudence.


2/ Les sanctions de l’abus du droit de grève

La sanction de la grève abusive ou illicite est abordée de manière allusive à

l’article 345 du code du travail en vertu duquel « en dehors des cas prévus à

l’article 344, aucun salarié ne peut être sanctionné à cause de sa participation à

la grève ou du rôle qu’il y a joué ».

Cela signifie à contrario que la participation d’un salarié à une grève illicite ou

les actes répréhensibles commis par ce denier au cours de la grève, justifient que

l’employeur puisse prononcer en son encontre des sanctions disciplinaires,

notamment le licenciement pour faute lourde. Il est également possible

d’envisager l’expulsion des salariés en cas d’occupation des locaux par les

salariés grévistes en sollicitant du juge des référés une ordonnance d’expulsion. A

cette fin l’employeur doit établir l’existence d’un trouble manifestement illicite.

B/ Les réactions patronales

L’employeur n’est pas dépourvu de moyens de réaction ou de riposte face aux

salariés grévistes. Parallèlement à la négociation qui est certainement le moyen

le plus simple de mettre un terme au conflit, l’employeur peut essayer de

poursuivre ou d’interrompre momentanément l’activité de l’entreprise. Il peut


aussi recourir, le cas échéant, à d’éventuelles sanctions pour tenter d’anéantir

voire d’atténuer les effets de la grève.

1/La poursuite ou l’interruption de l’activité de l’entreprise

L’employeur peut d’abord envisager le remplacement des salariés grévistes et

réorganiser l’entreprise.

Il peut encore fermer temporairement tout ou partie de l’entreprise. C’est le

lock out que le code du travail interdit en principe.

a/Le remplacement des salariés grévistes et la réorganisation de l’entreprise

Le code du travail ne prévoit aucune disposition à la question de l’éventuel

remplacement par l’employeur des salariés grévistes. De ce point de vue deux

questions se posent en droit positif gabonais. La première est celle de savoir si

l’employeur peut remplacer les salariés grévistes par du personnel intérimaire ou

des salariés recrutés sous CDD ?

Il faut bien avouer que contrairement au droit français, il n’existe aucune

prohibition légale au remplacement des grévistes par des salariés en CDD ou en

contrat d’intérim. C’est donc à la jurisprudence d’apprécier. Il est évident que

l’employeur ne peut pas porter atteinte au droit de grève à valeur


constitutionnelle en procédant au remplacement systématique des salariés

grévistes.

La seconde question est celle de savoir si l’employeur peut recruter de nouveaux

salariés en CDI ? Rien ne semble l’interdire a priori. Mais l’employeur ne pourra

pas considérer que la fin de la grève constitue une cause réelle et sérieuse de

licenciement des salariés nouvellement recrutés pour la circonstance.

Dans tous les cas, le droit de grève ne semble pas atteint lorsque l’employeur

fait appel à des bénévoles pour remplacer les salariés grévistes comme cela a été

admis par la jurisprudence française.

Il n’est pas davantage interdit à l’employeur de tenter de réorganiser son

entreprise en cas de grève pour assurer la continuité de son activité. L’employeur

peut, par exemple, procéder à des affectations internes lorsque la tâche à

accomplir correspond à la compétence ou à la qualification professionnelle du

salarié non gréviste. En raison de son caractère temporaire et à condition qu’elle

n’affecte pas la substance même du contrat de travail de l’intéressé, la mesure

proposée constitue un simple changement des conditions de travail et non une

modification du contrat de travail. Mais le salarié peut toujours décider de

rejoindre le mouvement de grève.


L’employeur peut également avoir recours à des sous-traitants. En effet, si la

grève suspend le contrat de travail de salariés grévistes, elle ne suspend pas les

engagements souscrits par l’employeur auprès de ses clients et de ses

fournisseurs.

b/ La prohibition de principe du lock out

Aux termes de l’article 352 du code du travail, le lock-out est la fermeture

volontaire de l’entreprise ou de l’établissement par l’employeur pour la défense

de ses intérêts.

Selon l’alinéa 2 de ce texte, le lock-out préventif ou défensif dirigé contre une

grève est illicite. Dans ce cas, en effet, l’employeur utilise la technique du lock-

out pour faire échec à la grève. Or, s’agissant d’un droit constitutionnel, le

législateur protège le droit de grève en sanctionnant tous les obstacles au

déclenchement d’une grève licite. L’article 352, alinéa 2 en tire la conséquence

que les heures et les jours de travail perdus en raison du lock-out illicite décidé

par l’employeur sont rémunérés. L’illicéité du lock out réside aussi dans le fait

qu’il porte atteinte aux droits légitimes des salariés non-grévistes, lesquels

seraient injustement privés de salaires. Il constitue, en outre, une inexécution

volontaire par l’employeur de leur contrat de travail.


En outre, en cas de lock-out illicite, tout salarié peut prendre l’initiative de la

rupture du contrat de travail. Cette rupture est imputable à l’employeur et peut

donc donner lieu à la condamnation de l’employeur à payer des dommages et

intérêts aux salariés lésés.

Pourtant envisagé uniquement comme une mesure visant à défendre les intérêts

de l’employeur, en dehors de toute volonté de briser une grève en préparation

ou en cours, le lock-out est licite.

2/ Le recours éventuel à des sanctions

Dans ce cadre, l’employeur peut exercer son pouvoir disciplinaire et mettre

éventuellement en jeu la responsabilité des salariés grévistes.

a/ La mise en œuvre de la procédure disciplinaire

Le déclenchement d’une grève licite ne constitue pas en soi une faute civile. Son

exercice normal ne saurait donc par principe provoquer la mise en œuvre par

l’employeur d’une procédure disciplinaire à l’encontre des salariés grévistes. De

ce point de vue, les salariés qui exercent normalement leur droit de grève

bénéficient d’une sorte d’immunité. La jurisprudence est constante sur ce point

et qualifie d’abusif le licenciement d’un salarié qui a participé à la grève ou qui y

a joué un rôle. Toutefois immunité ne signifie pas impunité.


Comme le précise l’article 343 du code du travail l’exercice du droit de grève ne

peut justifier la rupture du contrat de travail sauf faute lourde imputable au

salarié. Ainsi, à titre exceptionnel, seule la faute lourde peut entrainer la rupture

du contrat de travail d’un salarié gréviste.

Mais un gréviste ne peut se voir imputer une faute lourde que si sa participation

personnelle aux agissements fautifs est clairement établie et si son rôle a été

actif, car il n’existe pas de faute lourde collective.

Il doit s’agir d’un comportement personnel qui réside dans des agissements

individuels détachables du mouvement collectif (Par exemple, des actes de

violence à l’égard des non-grévistes). C’est dans ce sens que s’est prononcée la

chambre sociale de la cour de cassation gabonaise dans un arrêt du 31 octobre

2013181. Dans cet arrêt la cour de cassation approuve un arrêt de la CA de

Libreville qui a conclu au caractère abusif du licenciement d’un salarié gréviste

au motif que l’employeur n’avait pas rapporté la preuve de son implication

personnelle dans les actes de barricades, coupure d’électricité et menaces à

l’endroit de la direction de l’entreprise.

181 Cf. Cass. Soc. 31 oct. 2013, Bull. des arrêts de la Cour de cassation N° 5, p.95.
En dehors de cette hypothèse de faute lourde personnelle au salarié gréviste, le

pouvoir disciplinaire de l’employeur ne peut être déclenché que dans les

hypothèses de grèves illicites ou d’exercice anormal ou abusif du droit de grève.

b/ La mise en jeu de la responsabilité civile délictuelle

Le déclenchement d’une grève parfaitement licite cause nécessairement un

préjudice à l’entreprise variable en fonction de sa durée et du nombre de salariés

grévistes. Mais, quel que soit l’ampleur du préjudice subi, l’employeur ne saurait

en demander réparation aux différents acteurs du conflit. Il en est autrement

lorsque le mouvement de grève est illicite ou abusif ou lorsque même licite, des

salariés grévistes ont commis à cette occasion une faute lourde. Dans ces

hypothèses, outre la responsabilité pénale éventuelle en cas d’infraction

constatée, l’employeur serait fondé à engager la responsabilité civile délictuelle

des salariés grévistes et/ ou des syndicats ayant mené le mouvement de grève.

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