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UV6 – Droit du travail et de la sécurité

sociale – Cours 1 Droit du travail

Dispositions de l’examen
Le code du travail est admis à l’examen
Attention particulière est à porter sur la deuxième partie du cours, la cessation du contrat de travail

De qui on va parler dans ce cours ?


On ne va pas parler des fonctionnaires de l’Etat, ni des employés communaux, mais essentiellement
des salariés du secteur privé.

Qu’est-ce qu’un salarié ?

C’est une personne qui est liée à une autre personne, qui est appelée employeur, par un contrat de
travail.

Qu’est-ce qu’un contrat de travail ?

Le code de travail ne contient pas de définition claire de ce qu’est un contrat de travail. La notion est
définie par la jurisprudence. Il y a avait notamment des cas où une personne se prétendait salariée.
L’ « employeur » se défendait qu’il n’était pas lié à la personne par un contrat de travail et qu’en
conséquent, le tribunal du travail (à l’époque : tribunal arbitral) n’était pas compétent pour trancher
le litige, car le type de relation liant les deux personnes est une relation différente.
Le tribunal arbitral a dû voir si la relation de travail en question correspondait à la notion de contrat
de travail. De cette affaire, le tribunal a dégagé trois éléments constitutifs d’un contrat de travail :
1. Il faut une prestation de travail de la part de la personne qui sera, le cas échéant, appelée
salariée. Cette prestation de travail doit être réalisée en faveur d’une autre personne qui est
l’employeur.
2. En contrepartie de la prestation de travail, il y a une rémunération qui est versée au salarié
par l’employeur.
3. Cette prestation de travail doit s’exercer dans le cadre d’un lien de subordination qui permet
à l’employeur de donner des instructions au salarié, de vérifier son travail, et, le cas échéant,
de sanctionner.
Le troisième élément est celui dont il y a le plus de discussions, et la problématique existe toujours
à l’heure actuelle. A chaque fois qu’il y a des discussions sur la notion de contrat de travail,
notamment sur la compétence du tribunal de travail à statuer sur un litige, on se réfère à ces trois
éléments constitutifs du contrat de travail.
Exemple : La jurisprudence connaît un cas dans lequel il fallait juger si un gérant (qui s’occupe de
la gestion journalière de la société et la représente) d’une Sàrl est un salarié de l’entreprise. Le
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gérant effectue des prestations de travail, et il est payé. Mais la question est : est-ce qu’il se trouve
dans un lient de subordination par rapport à la société? La jurisprudence a tranché dans le sens que
le gérant qui est responsable de la gestion journalière de la société et représente la société ne peut
pas être dans un lien de subordination par rapport à la société qui serait son supérieur. Car en effet,
il se trouverait dans un lien de subordination avec lui-même.
La même situation et problématique se présente pour un administrateur-délégué d’une SA. Lui aussi,
il preste un travail contre une rémunération.
Il y a eu le même type de discussion dans les domaines suivants :
1. Le sport pour les entraîneurs et les sportifs professionnels d’un club
2. Les chauffeurs professionnels dans une entreprise de transport
A plusieurs reprises, la jurisprudence a décidé que de telles personnes sont des indépendants car
les chauffeurs roulent avec leurs propres camions et de ce fait ne se trouvent pas dans un lien de
subordination. Tout ne dépend pas des documents qui ont été écrits entre les parties. S’il existe un
contrat de travail, c’est un élément en faveur d’un contrat de travail, mais ce n’est pas déterminant.
Le salarié, la personne qui est affiliée auprès de la sécurité sociale, est aussi un élément non
déterminant.
Les juges doivent apprécier au cas par cas concrètement chaque situation individuelle du prétendu
salarié. Est-ce qu’il y a des éléments dans la vie quotidienne qui démontrent que cette personne se
trouve dans un lien de subordination ?
Cette appréciation au cas par cas a révélé, au fil des années, des situations peu claires, hybrides.
On a vu des administrateurs-délégués qui étaient investis par un mandat social qui n’est pas un
contrat de travail, mais un mandat relevant du droit des sociétés. Un tel administrateur-délégué
était encore en charge, à côté de la gestion journalière, de certains aspects spécifiques ou de
certains domaines spécifiques de la vie de l’entreprise. La jurisprudence a alors dégagé la notion de
fonction technique distincte du mandat social. L’administrateur-délégué exerce dans ce cas des
fonctions techniques distinctes de la gestion journalière de l’entreprise, il peut par exemple être en
charge du marketing ou de la comptabilité. Il s’agirait là d’une fonction technique distincte du mandat
social et selon la jurisprudence, du moment où il y a une telle fonction technique distincte,
l’administrateur-délégué se trouve, pour ce volet particulier de son travail, dans un lien de
subordination par rapport à la société.
La tendance actuelle va dans le sens d’une protection du prétendu salarié. Les juridictions se font
de plus en plus difficiles de dénier tout contrat de travail même entre un administrateur-délégué et
la société.
L’intérêt pour l’entreprise dans pareil cas est important car un administrateur délégué peut être
révoqué « ad nutum » de son mandat social. Il peut être révoqué avec effet immédiat à tout moment,
sans justification, sans indemnité, sans notification. Une telle relation donne une grande flexibilité à
l’entreprise. Par contre, si cette même personne a un contrat de travail, qui la lie à l’entreprise, il y a
les règles du droit de travail qui interviennent. Les salariés bénéficient de certaines protections, et
ne peuvent pas dans toute circonstance être licenciés avec effet immédiat sans indemnité, sans
motivation. D’où l’intérêt d’un tel litige devant les juridictions entre un prétendant salarié, qui veut
bénéficier des protections du droit de travail, et un employeur, qui dit qu’il n’est pas salarié, pour ne
pas devoir lui accorder cette protection.

Quel est le tribunal compétent ?


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A l’époque, c’était le tribunal arbitral. Aujourd’hui, c’est le tribunal de travail.

Histoire du droit du travail au Luxembourg


Le droit du travail au Luxembourg s’est caractérisé pendant très longtemps par une différentiation
très nette entre deux catégories de salariés :
1. Les ouvriers : les personnes qui exerçaient des activités, si non exclusivement, du moins
principalement, manuelles.
2. Les employés privés : les personnes qui exerçaient des activités, si non exclusivement, du
moins principalement, intellectuelles.
Cette différentiation était assez conséquente, à tel point qu’il y avait des lois spécifiques pour régir
les contrats de travail des ouvriers et d’autres lois qui régissaient les contrats de travail des employés
privés.
Les ouvriers étaient toujours moins bien traités que les employés.
Cette différentiation se ressentait également au niveau des juridictions. Il y avait des juridictions
spécifiques pour tout litige entre employeurs et ouvriers, c’étaient à l’époque les conseils de
prud’hommes. En parallèle, il y avait d’autres juridictions qui traitaient des litiges entre employeurs
et employés privés. C’était le tribunal arbitral.
La différentiation entre employé privé et ouvrier fut souvent une source de problèmes. Un ouvrier
qui pensait exercer des activités si non exclusivement, du moins principalement intellectuelles, était
arrivé à saisir le tribunal arbitral. Devant ce tribunal, il se révélait cependant qu’il devait être qualifié
d’ouvrier. Le tribunal arbitral s’est alors déclaré incompétent pour traiter sa demande. L’ouvrier a dû
introduire une toute nouvelle procédure devant un conseil de prud’hommes. Il y a déjà eu des cas
où un ouvrier a de cette manière dépassé les délais pour agir contre son employeur devant le conseil
de prud’hommes.
Cette différentiation se retrouvait également au niveau de la sécurité sociale, il y avait des caisses
de maladies pour les ouvriers, et en parallèle, il y avait une caisse de maladies des employés privés.
Il y avait un régime des taux d’affiliation différents, des taux de cotisation qui divergeaient entre les
employés privés et les ouvriers.
Dans les années 80, on a estimé qu’il fallait abolir cette différentiation. Est intervenue alors une loi
du 24 mai 1989 sur le contrat de travail. Elle avait comme objet une refonte complète du droit du
travail au Luxembourg, mais aussi d’abolir dans une très grande mesure la différentiation entre
ouvriers et employés privés. La loi utilise ainsi le terme général de « salarié » pour une personne qui
se trouve dans le lien d’un contrat de travail. N’empêche que même la loi de 1989 n’est pas arrivée
à instituer un régime unique pour les ouvriers et les employés privés. Il restait certaines
différentiations entre les deux catégories de salariés, toujours au détriment des ouvriers.
Le 6 décembre 1989 est alors intervenue une loi qui a aboli la différentiation entre conseil de
prud’hommes et tribunal de travail. Le tribunal de travail est devenu la juridiction unique qui pouvait
statuer sur tous les litiges en matière de droit du travail. Ainsi disparaissait le problème de
compétence ou d’incompétence des juridictions pour statuer sur tel ou tel litige suivant s’il s’agissait
d’un employé privé ou d’un ouvrier.
Le droit du travail a évolué au fil du temps et est devenu de plus en plus complexe. On se retrouvait
devant une panoplie de lois différentes, qui n’étaient pas nécessairement coordonnées l’une par
rapport à l’autre. Elles étaient accompagnées de règlements grand-ducaux d’exécution.
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On a alors pris la décision de codifier le droit du travail. On rassemblait tous les textes en matière
de droit du travail dans un seul ouvrage. Cet ouvrage regroupe toutes les lois avec des articles
continus qui régissent tous les aspects du droit du travail.
C’est ainsi qu’est né par la loi du 31 juillet 2006 le code du travail. L’ouvrage législatif n’est pas
encore tout à fait terminé après 5 ans. Pour la partie législative, tous les articles commencent par
un « L » dans le code du travail. Il était en effet prévu de mettre tous les règlements d’exécution de
ces lois sous forme d’une partie du code du travail. Cela aurait été la partie règlementaire du code
du travail où tous les textes devraient alors être coordonnés, et tous les articles devraient être
numérotés. Tous ces articles devraient alors commencer par un « R ». Cette partie réglementaire
n’existe toujours pas à l’heure actuelle, de sorte qu’il faut encore chercher encore de nos jours dans
différents ouvrages comme le mémorial tous les règlements d’exécution du moment que certaines
dispositions légales renvoient à des règlements d’exécution. Ces règlements ne se trouvent pas
dans le code du travail.
On a maintenu la volonté d’uniformiser le droit du travail pour abolir la différentiation entre ouvriers
et employés privés.
Introduction du statut unique par la loi du 13 mai 2008. Cette loi a aboli toutes les différentiations
entre employés privés et ouvriers qui subsistaient encore de sorte qu’aujourd’hui, il n’y a plus, en
matière de droit du travail, une seule catégorie de personnes, à savoir le salarié. La loi a également
aboli toutes les différentiations en matière de sécurité sociale en introduisant ce que l’on appelle
aujourd’hui la caisse nationale de santé (CNS) qui regroupe toutes les caisses de maladie qui
existaient auparavant.
Il y a eu tellement de discussions autour de ce statut unique parce qu’auparavant, pour les ouvriers,
les employeurs devaient payer des cotisations plus importantes. Maintenant se posait la question,
quel taux de cotisation appliquer ? Soit le taux inférieur qui existait avant pour les employés privés,
soit le taux le plus élevé, c’est-à-dire celui des ouvriers d’auparavant ? La caisse n’était pas d’accord
avec le taux plus faible, les entreprises ne voulaient pas le taux le plus élevé. Ces dernières
craignaient pour la compétitivité. Il fallait donc trouver un système capable de satisfaire tout le
monde.
Un autre aspect pointu furent les heures supplémentaires. Les ouvriers, à l’époque, avaient droit,
pour chaque heure supplémentaire prestée, à un supplément de rémunération de 25 %. Les
employés privés, quant à eux, avaient droit à un supplément de 50 %. Quel taux utiliser pour le statut
unique ? Les employés disaient qu’il était hors de question de réduire leur taux de 50 % à 25 %. Les
employeurs, par contre, ne voulaient pas augmenter le taux de 25 % à 50 % pour tous les salariés.
Finalement, on s’est mis d’accord sur un régime compensant une heure supplémentaire soit par 150
% de temps libre (une heure supplémentaire donne droit à 1,5 heures de temps libre payé), soit par
une rémunération supplémentaire de 40 %.

Le code du travail
Le code du travail tel qu’il se présente aujourd’hui comporte des articles numérotés l’un à la suite de
l’autre, précédés par la lettre « L » pour montrer que c’est une loi. Une bonne partie du code du
travail nous provient d’une simple disposition de la loi du 24 mai 1989 sur le contrat de travail. Quand
on a introduit le code du travail, on s’est dit qu’on a suffisamment de travail avec la codification de
celui-ci qu’on ne va pas encore changer les règles applicables au contrat de travail et par
conséquent, on a pris la loi du 24 mai 1989 et on l’a transposée telle quelle dans le code du travail.

I) La conclusion d’un contrat de travail


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Origine de la numérotation des articles

La lettre « L » vient de la partie législation du code du travail. Le code du travail est regroupé en 6
livres. Le chiffre de la centaine fait référence vers le livre dans lequel se trouve l’article. Exemple :
L. 326-1. L’article relève du livre 3 du code du travail, qui traite de la protection, de la sécurité et de
la santé des travailleurs.
Chaque livre est divisé en titres. C’est le chiffre de la dizaine. 326 veut donc dire troisième livre, titre
2.
Ensuite, chaque titre comporte des chapitres. Les unités nous renseignent vers le chapitre. 326 :
Livre 3, titre 2, chapitre 6.

Art. L. 326-1 du Code du Travail

L’article traite de l’examen médical d’embauche. L’examen a pour finalité de vérifier si le salarié a
les aptitudes physiques pour le poste auquel il prétend. L’examen était conçu pour avoir lieu avant
le commencement du travail, mais au vu du grand nombre de salariés et le nombre restreint de
médecins du travail, on est arrivé à une situation où les examens médicaux d’embauche ne se font
pas tous avant l’entrée en service du salarié, mais peuvent également se faire en cours d’exécution
du contrat de travail. Si lors de cet examen médical, le médecin du travail arrive à la conclusion que
le salarié n’a pas les aptitudes physiques pour le poste, le contrat de travail est résilié d’office en
raison de l’inaptitude du salarié au poste.

Art. L. 121-4 – Exigences de forme

Paragraphe 1 : Un contrat de travail doit être fait par écrit. Il faut d’autant d’originaux que de parties,
donc deux, dont l’un pour le salarié et l’autre pour l’employeur.
Paragraphe 2 : L’article prévoit les mentions qui doivent obligatoirement figurer dans un contrat de
travail. Le lieu de travail peut varier, et on trouve très souvent dans les contrats de travail des clauses
dites de « mobilité géographique ». Ces clauses prévoient que le salarié travaille à un certain endroit,
mais que ce lieu de travail peut être modifié par l’employeur suivant les besoins de l’entreprise.
Au Luxembourg, chaque salarié a droit à 25 jours de congé payés par an.
Il y a cependant déjà eu des cas d’employeurs qui n’ont pas établi de contrat de travail écrit. Quelle
est alors la sanction ? Il faut dire qu’il n’y a pas beaucoup de sanctions prévues (sauf pour le contrat
de travail à durée déterminée et la période d’essai). En cas d’absence de contrat de travail écrit, il y
a quand même contrat de travail entre les parties. Le salarié preste, il est payé, il se trouve dans un
lien de subordination, et l’employeur doit également respecter sa partie du contrat : donner du travail
au salarié et le payer.
L’art. L. 121-4 règle essentiellement un problème de preuve en disant que s’il n’y a pas de contrat
de travail écrit, la preuve de l’existence de la relation de travail et de son contenu peut être rapportée
par tous moyens de preuve.
On a déjà vu des dossiers devant les juridictions où une personne se prétendait salariée, mais le
prétendu employeur le niait. Sur base de cet article, le salarié peut alors par tous moyens de preuve,
par exemple documents, témoignages, fiches de salaire, extrait de comptes badge d’entrée etc.
prouver qu’il a travaillé, qu’il a été payé et que l’employeur lui a donné des ordres et a surveillé son
travail. Bref, les éléments constitutifs d’un contrat de travail sont bel et bien donnés en espèce.
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Art. L. 122-1 – Contrat à durée déterminée

Si un employé se fait engager par un employeur, se pose alors la question de la modalité du contrat
de travail. Est-ce qu’on va conclure un CDI ou un CDD ? Le principe, en droit luxembourgeois, est
que le contrat de travail, en règle générale, doit être conclu à durée indéterminée. Un CDD est
l’exception.
L’article nous donne les hypothèses sous lesquelles un contrat peut être conclu à durée déterminée.
Le CDD ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et non durable. Il ne peut avoir
pour objet de pourvoir durablement à un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
Le paragraphe 2 nous donne des exemples de tâches précises et non durables :
1. Remplacement d’un salarié temporairement absent : un salarié malade pendant un certain
temps ou une salariée en congé de maternité et en congé parental après celui-ci.
L’employé(e) remplacé va revenir après sa maladie, son congé de maternité ou son congé
parental. L’employeur ne peut pas nécessairement se permettre d’avoir engagé deux
salariés sous CDI.
2. L’emploi à caractère saisonnier : exemple : dans un bistro, l’exploitant a besoin de plus de
personnel pendant les mois d’été car alors, il peut ouvrir sa terrasse. Ce type d’emploi à
caractère se trouve également dans les entreprises de voyage, les entreprises de transport
aérien (Luxair) etc. Cactus, par contre, engage plus de personnes pour les fêtes de fin
d’année.
3. Des emplois pour lesquels dans certains secteurs d’activité il est d’usage de ne pas recourir
à un CDI. On renvoie vers un règlement grand-ducal qui nous cite le domaine des artistes,
des employés de la télévision : acteurs, maquilleurs, mais aussi, inattendus pour le
Luxembourg, les surveillants de plage.
4. L’exécution d’une tâche occasionnelle et ponctuelle dans le cadre d’un projet particulier de
l’entreprise. Sous certaines conditions de forme, les personnes engagées pour réaliser ce
projet peuvent recevoir un CDD.
5. L’exécution d’une tâche précise et non durable en cas d’un accroissement temporaire
d’activité ou en cas de démarrage ou extension de l’entreprise
6. Travaux urgents pour faire face aux accidents
7. Etc.
Le principe est la préférence du CDI, avec une exception pour les tâches précises et non durables.
On retrouve cependant toujours des CDD où le salarié met en question la nature du contrat et
considère que le contrat n’aurait pas dû être conclu à durée déterminée, parce qu’il ne répond pas
à l’exécution d’une tâche précise et non durable qui ne correspond pas à l’activité normale et
permanente de l’entreprise.
Exemple : procès contre l’Université de Luxembourg : l’Université avait conclu avec une professeur
des CDD consécutifs. Il y a des dispositions particulières pour les professeurs et les chercheurs. En
tout état de cause, en février, l’Université a dit à cette personne qu’elle n’allait pas renouveler le
contrat en septembre, ni sous forme d’un CDI, ni sous forme d’un CDD, donc que tous les liens
contractuels allaient cesser en septembre. La salariée est allée devant la justice, et le verdict est
tombé récemment : le tribunal a retenu que le contrat de travail qui était conclu entre parties devait
être requalifié en CDI, parce qu’il ne contenait pas la définition exacte de l’objet, il ne précisait pas
la tâche précise et non durable dont était investie la salariée.
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Il y a quelques années, il y a eu une vague de procès de chargés de cours, qui avaient été engagés
par des communes à durée déterminée chaque fois pour une année scolaire. Après un grand
nombre de procès, la majorité de ces contrats a été requalifiée en CDI. Il y a notamment eu des
problèmes de forme.
Le CDD est donc l’exception, et c’est interprété de manière restrictive. Il faut respecter certaines
conditions pour que le CDD soit valide, il doit contenir les mentions obligatoires, il doit y avoir une
tâche précise et non durable. Si une entreprise de peinture engage un nouveau peintre à durée
déterminée sans aucune spécification, sans mention d’une tâche précise et durable, et que par
surcroît, la tâche à accomplir s’inscrit dans l’activité normale et permanente de l’entreprise, le contrat
sera certainement requalifié en CDI.

Art. L. 122-2 – Forme du CDD

Pour être valable en tant que tel, un CDD doit comporter certaines mentions spécifiques au-delà de
certaines mentions obligatoires de tout contrat de travail. Cet article nous dit qu’un CDD doit
comporter, outre la définition de son objet (càd la tâche précise et non durable) :
1. Lorsqu’il est conclu pour une durée précise, il doit mentionner la date d’échéance du terme.
Un salarié est engagé pour trois mois à partir du premier janvier, le contrat doit alors porter
comme date d’échéance le 31 mars.
2. Lorsqu’il est impossible de déterminer une date d’échéance, il faut au moins indiquer la durée
minimale pour laquelle le contrat est conclu. Par exemple, pour le remplacement d’un salarié
malade, on ne peut pas connaître la durée de la maladie, il faut au moins indiquer la durée
minimale.
3. Pour le remplacement d’un salarié absent, la loi exige qu’on indique dans le CDD le nom du
salarié remplacé.
4. Si les parties conviennent d’une période d’essai, il faut la mentionner dans le contrat.
5. Le cas échéant, le CDD peut contenir une clause de renouvellement à durée déterminée.
L’article nous précise que si le contrat ne répond pas à ces exigences, il est présumé être conclu
pour une durée indéterminée. La preuve contraire n’est pas admissible. Tout CDD qui ne correspond
pas aux exigences légales est requalifié en CDI.

Art. L. 122-3 et L. 122-4 – Limitation de l’exception du CDD dans le temps

Cette exception du CDD doit être limitée dans le temps. L’Art. L. 122-3 nous indique qu’il faut un
terme fixé avec précision.
Le CDD ne peut pas excéder une durée de 24 mois, renouvellements compris. Un CDD peut être
renouvelé, mais au maximum deux fois. On pourrait concevoir un contrat de travail à durée
déterminée dans la situation où le contrat est initialement conclu pour six mois et qu’après les six
mois, il se révèle que le projet pour qui le contrat a été conclu n’a pas encore été terminé. On peut
renouveler le contrat s’il y a une clause de renouvellement. On peut le renouveler 2 fois, de sorte
qu’il comprend trois périodes, avec un maximum de 24 mois, renouvellements compris.
Le contrat saisonnier bénéficie d’exceptions à ce sujet.
Une autre exception existe : le Ministre du Travail peut, sous certaines hypothèses, autoriser le
relèvement de la période maximale de 24 mois. Cela peut se faire dans l’intérêt de salariés exerçant

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des activités qui requièrent des connaissances hautement spécialisées et une expérience
professionnelle confirmée.
L’art L. 122-4 prévoit qu’un contrat conclu entre un même employeur et un même chercheur peut
avoir une durée de 60 mois renouvellements compris.

Art. L. 122-5 – Renouvellement du CDD

Le contrat à durée indéterminée peut être renouvelé plus de deux fois dans certains cas d’exception.
Exemples : enseignants-chercheurs de l’Université, les intermittents de spectacle, les chargés de
direction etc.

Art. L. 122-6 – Poursuite de la relation après l’échéance du terme

Si la relation de travail se poursuit après l’échéance du terme, le contrat devient un CDI.

Art. L. 122-7 – Expiration du CDD

Cet article a comme but de prévenir des abus des employeurs.


Il se peut présenter la situation où un employeur engage un salarié à durée déterminée et qu’à la fin
de ce contrat, il n’est pas satisfait du travail presté. Il engage alors un autre salarié à durée
déterminée. Si celui-ci ne lui convient pas non plus, il en engage un troisième. L’article veut prévenir
de tels agissements et prévoit en particulier qu’à la fin du CDD, on ne peut pas engager un autre
salarié sous le régime de CDD pour le même poste. Une exception à ce principe est constituée par
le respect d’une période de carence, qui est un tiers du contrat initial.
Si on a un CDD de trois mois, qui se termine, on ne peut pas engager au lendemain quelqu’un
d’autre pour le même poste sous de régime de CDD. Il faut dans ce cas respecter une période de
carence qui vaut le tiers de la durée du contrat initial. Il faut attendre un mois avant de pouvoir
engager un nouveau salarié sous le régime de CDD pour le même poste.
Là aussi, il existe des exceptions. L’exception probablement la plus utilisée est le cas où on a conclu
un CDD pour remplacer un salarié temporairement absent. Le salarié remplacé revient, le
remplaçant quitte l’entreprise car son contrat de travail se termine. Le salarié remplacé tombe
cependant de nouveau malade après seulement deux jours. Alors, il est possible d’engager pour le
même poste un salarié sous le régime d’un CDD, sans devoir respecter la période de carence. Les
dispositions en matière de période de carence ne s’appliquent pas non plus à des contrats
saisonniers et l’exécution de travaux urgents.

Art. L. 122-8 – Période d’essai en cas de poursuite de la relation de travail au-


delà du terme

Si la relation de travail se poursuit à la fin du contrat à durée déterminée, et qu’un nouveau contrat
a été conclu, ce dernier ne peut pas prévoir de période d’essai. Le principe, en matière de période
d’essai, est qu’elle est convenue au moment de l’entrée en service du salarié, on ne peut plus la
renouveler ou la prolonger.

Art. L. 122-9 – Sanctions


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Tout contrat conclu en violation des dispositions légales est requalifié en CDI. Le salarié est alors
remis dans le régime ordinaire, qui est le CDI.

Art. L. 122-12 et L. 122-13 – Cessation du CDD

Le CDD se termine à l’échéance du terme.


Si on a prévu un CDD sans échéance précise, pour la réalisation d’un projet, le contrat se termine à
la réalisation du projet. En cas de remplacement d’un salarié, le contrat se termine lorsque le salarié
remplacé revient.
Art. L. 122-13 traite de la résiliation du contrat de travail à durée déterminée pendant le contrat de
travail. Sauf motif grave, qui justifierait la résiliation avec effet immédiat du contrat, l’employeur ne
peut pas résilier le CDD.
La sanction prévue en cas de non respect de cette dernière disposition légale est le versement de
dommages et intérêts au salarié par l’employeur. Les dommages et intérêts correspondent alors à
un forfait : tous les salaires qui auraient dû être payés jusqu’à la fin du contrat de travail à durée
déterminée. La limite de ces dommages et intérêts est deux mois de salaire (correspondant au
préavis du CDI).
Sauf motif grave, l’employé ne peut pas non plus résilier le CDD avant son terme. Là aussi, la loi
prévoit une sanction pour le salarié : il doit payer à son employeur des dommages et intérêts. Dans
ce cas, les dommages et intérêts doivent correspondre au préjudice réellement subi pas l’employeur.
La limite des dommages et intérêts est alors le salaire correspondant à la durée du préavis qui aurait
dû être observé si le contrat avait été conclu à durée indéterminée. Ce délai de préavis est d’un
mois.
On note la différence de traitement : le salarié a droit à un forfait, tous les salaires jusqu’à la fin du
contrat avec un maximum de deux mois, sans devoir établir qu’il a subi un préjudice. L’employeur
doit prouver qu’il a subi un préjudice avant tout dédommagement. S’il arrive à prouver l’existence du
préjudice, il y a encore la limite d’un salaire mensuel. Des cas où des employeurs réclament des
dommages et intérêts à leurs employés sont plus rares que les cas inverses. En effet, pour les
employeurs, il y a le risque que les frais d’avocat dépassent l’enjeu du litige.

Art. L. 122-11 – Période d’essai d’un CDD

Un CDD peut être assorti d’une période d’essai, qui est soumise aux mêmes règles que dans le
contexte du CDI.

Contrat de travail à durée indéterminée

Ce contrat doit également répondre aux conditions de forme de l’art. L. 121-4.

Art. L. 121-5 – Période d’essai d’un CDI

Finalité de la période d’essai : prévoir une période d’observation des deux parties. L’employeur veut
s’assurer que l’employé qu’il vient d’engager fait bien son travail. Si le salarié ne lui convient pas,

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l’employeur veut pouvoir se séparer de lui de façon plus flexible, sans trop de délais, sans trop de
formalisme, et, le cas échéant, sans devoir payer d’indemnité.
De son côté, le salarié se fait engager par une entreprise qu’il ne connaît pas nécessairement, il ne
sait pas si le travail va lui convenir. Ainsi, lui aussi a intérêt, le cas échéant, à pouvoir mettre un
terme à ce contrat de travail de manière flexible, sans trop de délais.
La période d’essai permet donc aux deux parties de voir s’il y a lieu de maintenir le contrat de
manière définitive ou non.
Une période d’essai n’est valable que si elle est mentionnée par écrit dans le contrat de travail. Une
période d’essai conclue oralement n’est pas valable. La formulation d’une autre preuve quelconque
pour démontrer l’existence de la période d’essai n’est pas admissible. Non seulement faut-il un écrit,
mais celui-ci doit être signé au plus tard au moment de l’entrée en service du salarié.
La période d’essai est une période précaire essentiellement pour le salarié et elle doit par
conséquent être limitée dans le temps. La période d’essai doit avoir une durée de deux semaines
au moins, et elle ne peut excéder 6 mois. Il y a une exception vers le bas et une exception vers le
haut à cette dernière règle. Exception vers le bas : la période d’essai ne peut dépasser trois mois si
le niveau de formation professionnelle du salarié n’atteint pas celui du certificat d’aptitude technique
et professionnelle de l’enseignement secondaire technique (CATP) ou tout équivalent étranger. Ce
qui a dû arriver est pourtant arrivé. Un employeur avait conclu une période d’essai de 5 mois avec
un tel employé. Qu’est-ce qu’on fait ? Est-ce qu’on la considère comme nulle parce qu’elle n’est pas
conforme à la loi ? Ou est-ce que l’on réduit la période d’essai jusqu’à ce qu’elle coïncide avec les
dispositions légales ? C’est la dernière hypothèse qui a été retenue par la jurisprudence. La période
d’essai de 5 mois pour quelqu’un qui n’a pas de CATP est valable, mais uniquement pour 3 mois. Il
y a la même problématique pour une période d’essai qui dépasse les 6 mois. Une période d’essai
peut atteindre jusqu’à 12 mois pour les salariés dont le salaire mensuel brut de début atteint un
certain niveau. Ce niveau est déterminé par règlement grand-ducal, celui du 11 juillet 1989. La
période d’essai peut aller jusqu’à 12 mois si le salarié atteint un salaire mensuel brut de début de
21 622 francs luxembourgeois à l’indice 100. Avec le nouvel indice du 1er octobre 2011, qui est de
737,83 et après conversion des francs luxembourgeois en euros, on arrive à un salaire mensuel brut
de début de 3 954,73 euros. Un salarié qui touche plus que cette somme et qui a le CATP peut
convenir avec son employeur une période à l’essai jusqu’à 12 mois.
Une période d’essai inférieure à un mois doit être exprimée en semaines entières. Comme le
minimum est de 2 semaines, une période d’essai inférieure à un mois est soit 2, 3 ou 4 semaines.
Les périodes d’essai qui excèdent un mois doivent être exprimées en mois entiers. Il y avait un cas
où un employeur avait convenu, avec son employé, une période d’essai de 4 mois et demi. Une telle
période d’essai n’est pas conforme aux dispositions légales. On pourrait qu’elle n’est pas valable,
qu’elle est nulle. Alternativement, est c’est ce qui a été retenu par la jurisprudence, on peut dire que
les parties étaient quand même d’accord sur la durée de la période d’essai. Il faut respecter leur
volonté, mais il faut l’inscrire dans les dispositions légales. C’est pourquoi une période d’essai de 4
mois et demi est valable pour 4 mois seulement. Elle est réduite pour être conforme avec les
dispositions légales.
La période d’essai ne peut pas être renouvelée. Elle doit être signée par écrit au plus tard au moment
de l’entrée en service du salarié, et elle est arrêtée définitivement à ce moment-là. Elle ne peut pas
être renouvelée. A la fin de la période d’essai, l’employeur doit donc prendre la décision définitive
s’il veut garder le salarié ou non. Alors le contrat deviendra un contrat de travail définitif ou
l’employeur devra se séparer du salarié et engager quelqu’un d’autre. Il y avait un cas où un
employeur disait à son employé, après l’écoulement d’une période d’essai de trois moins, qu’il
souhaitant prolonger la période à six mois, mais le tribunal a dit non. Une période d’essai ne peut
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être ni renouvelée, ni prolongée. Elle est définitivement arrêtée au plus tard au moment de l’entrée
en service du salarié. Elle ne peut plus être modifiée par la volonté des parties.
Il y a une exception à cette règle. C’est l’hypothèse de la suspension de l’exécution du contrat. S’il
y a suspension du contrat, la période d’essai est prolongée d’une durée égale à celle de la
suspension avec un maximum d’un mois. Cette disposition légale provient d’une jurisprudence qui
s’était établie dans les années 70-80. A l’époque, il y avait un procès où un employé avait convenu
avec son employeur une période d’essai de trois mois. Le salarié a travaillé un mois, ensuite il est
tombé malade. Il n’est revenu que beaucoup plus tard. L’employeur disait que la finalité de la période
d’essai n’avait pas été atteinte. Il avait convenu une période d’essai de trois mois avec l’employé
pour vérifier s’il lui convenait. Comme le salarié était absent, il ne pouvait pas le faire. Le tribunal
avait retenu que dans l’hypothèse d’une maladie du salarié, la période d’essai devait être prolongée
d’une durée de celle de la maladie.
Le législateur a repris cette idée en 1989, et elle se trouve aujourd’hui dans le code du travail. Mais
la prolongation est limitée à un mois. Exemple : période d’essai de 6 mois, le salarié travaille 1 mois,
il devient malade pendant 2 semaines, alors, la période d’essai ne se terminera pas après six mois,
mais après six mois plus deux semaines. Si par contre, il devient malade pendant 2 mois, la
période d’essai se terminera après le 7e mois (et non le 8e). On rajoute donc à la période d’essai
initiale une période égale à celle de la maladie, mais cette période est de maximum un mois.
Exemple : période d’essai du premier janvier au 30 juin (6 mois). Le salarié est malade pendant 8
mois, après avoir travaillé 5 mois. Est-ce qu’à ce moment-là, on ajoute un mois à la période d’essai,
c’est-à-dire on la prolonge du 30 juin au 31 juillet ? Oui, on ajoute seulement un mois au terme initial
de la période d’essai. On n’attend pas le retour du salarié, mais on rajoute un mois au plus à la fin
de la période d’essai convenue initialement. Cela n’a pas manqué de poser problème en
jurisprudence pour un salarié qui était malade.
Il y a eu un cas avec une période d’essai d’un CDI dûment fixée à 3 mois. Le salarié a travaillé
pendant une semaine, puis n’est plus revenu au travail. Même après la fin du troisième mois, il n’est
pas revenu. Pendant le mois de prolongement de la période d’essai, le salarié ne revenait pas non
plus. En cas de maladie, le salarié bénéficie d’une protection contre le licenciement. La décision a
alors été prise de licencier le salarié. Il s’appelait Kirsch, l’affaire remonte à 1975. Le salarié a alors
cité l’employeur, P&T, en justice en disant qu’il bénéficiait d’une protection contre le licenciement,
que le licenciement était abusif et qu’il avait droit à des dommages et intérêts. Les P&T ont alors
expliqué la situation au tribunal, qu’il était impossible de vérifier si le salarié convenait au poste, car
il était malade pendant pratiquement toute la période d’essai, et même pendant le mois de
prolongation de celle-ci. La jurisprudence a donc connu la juxtaposition de deux principes. D’une
part, il y a la protection contre le licenciement de l’employé malade. D’autre part, l’employeur,
pendant la période d’essai, peut résilier le contrat à tout moment sans trop de forme, sans trop de
contraintes quant aux délais et sans motivation. La jurisprudence a dit : les P&T étaient en droit de
résilier le contrat de travail pendant la période d’essai. Le principe de la liberté de la résiliation
pendant la période d’essai prévaut dans ce cas-là sur la protection du salarié contre le licenciement.
Les hypothèses ont été analysées à d’autres reprises par la jurisprudence, et la jurisprudence est
bien établie dans ce sens. L’employeur doit respecter les dispositions légales, à savoir il doit
accorder au salarié la prolongation de la période d’essai. Mais si ce dernier est toujours malade dans
le mois de la prolongation, l’employeur peut le licencier pour pouvoir bénéficier de la flexibilité qui
est inhérente à la période d’essai.

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UV6 – Droit du travail et de la sécurité
sociale – Cours 2 Droit du travail
L’employeur peut résilier le contrat de travail en période d’essai avec effet immédiat pour
motif grave dans le chef du salarié à tout moment. La seule exigence qui existe est que la résiliation
doit se faire par écrit en indiquant dans la lettre de licenciement les motifs qui sont à la base
de la résiliation.
Le salarié peut lui-aussi résilier le contrat de travail pendant la période d’essai avec effet
immédiat pour motif grave dans le chef de l’employeur. La jurisprudence admet qu’il ne doit
pas justifier sa décision dans la lettre de démission avec effet immédiat.
La résiliation d’un contrat de travail, pendant la période d’essai, peut aussi être faite moyennant
un préavis. Ce type de résiliation doit toujours se faire par écrit, n’importe si la décision émane de
l’employeur ou de l’employé. La durée du préavis dépend de celle de la période d’essai. En cas de
période d’essai exprimée en semaines (période d’essai de deux semaines à un mois), le délai de
préavis compte autant de jours que la durée de l’essai compte de semaines. La résiliation avec
préavis ne peut pas intervenir pendant les deux premières semaines de la période d’essai.
Si la période d’essai excède un mois, sa durée doit être exprimée en nombre de mois entiers. Alors,
le délai de préavis est de quatre jours par mois d’essai convenu dans le contrat, avec un minimum
de quinze jours et un maximum d’un mois.
Ces délais sont les mêmes pour l’employeur et le salarié.
En matière de jurisprudence, il y a eu un cas avec une période d’essai de trois mois (du premier
janvier au 31 mars). L’employeur décidait le 30 mars de résilier le contrat avec préavis de 15 jours,
ce qui dépassait la date de la fin de la période d’essai, qui était le 31 mars. La question qui se posait
était alors : est-ce qu’à ce moment-là, l’employeur peut encore se prévaloir des règles applicables
en période d’essai, et notamment le délai de préavis de 15 jours ? Déjà dans les années 80, sous
l’ancienne législation, qui a été confirmée par la loi de 1989, la jurisprudence maintient que le
délai de préavis doit se situer intégralement dans la période d’essai. En d’autres termes, le
délai de préavis doit expirer au plus tard le dernier jour de la période d’essai. Dans le cas décrit, il
faut donc que le licenciement avec préavis commence au plus tard 15 jours avant le 31 mars. Cette
jurisprudence a été confirmée récemment par un arrêt de la cour d’appel du 5 mai 2011. La partie
qui veut mettre fin au contrat pendant la période d’essai doit obligatoirement résilier le contrat autant
de jours que comporte le délai de préavis avant l’expiration de la période d’essai.
Comme dans le cas décrit, le délai de préavis prendrait fin après le période d’essai, un tribunal
refuserait le licenciement. Cela aurait deux conséquences : non seulement, le délai de préavis
sera plus long (de deux mois, comme lors d’un licenciement hors période d’essai et non pas de 15
jours), mais l’employeur devra encore motiver sa décision de licenciement. Un des avantages
considérables pour l’employeur est qu’en période d’essai, du moment qu’il résilie avec préavis, il n’a
pas à justifier sa décision de licencier le salarié. La jurisprudence accorde un pouvoir discrétionnaire
de résilier le contrat de travail pendant la période d’essai à tout moment, sous condition de respecter
le préavis.
Cette jurisprudence a comme conséquence que l’employé n’a pas la durée entière de la période
d’essai à sa disposition pour faire ses preuves, mais seulement la période moins le délai de
préavis. Dans notre cas, ce ne seront pas trois mois entiers, mais seulement deux mois et demi.

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Si par contre, le salarié a été malade, ne serait-ce que quinze jours, la période d’essai ne se
terminera pas le 31 mars, mais elle est prolongée d’une durée égale à celle de la maladie avec un
maximum d’un mois. Pour 15 jours de maladie, elle se terminera le 15 avril. L’employeur, en cas de
résiliation de contrat au 30 mars, arriverait encore de faire rentrer le délai de 15 jours dans la période
d’essai ainsi prolongée.
Si l’employeur entend résilier le contrat de travail pendant la période d’essai, que ce soit avec
effet immédiat ou avec préavis, il n’a pas besoin de respecter la procédure de l’entretien
préalable.

II) La cessation du contrat de travail


Si le salarié a réussi la période d’essai, on se trouve définitivement dans le cadre d’un contrat de
travail à durée indéterminée.
Qu’est ce qui se passe maintenant en cas de résiliation unilatérale du contrat de travail par
l’employeur ?

Art. L. 124-2 – Entretien préalable

Quelle est l’idée à la base de cet entretien préalable ? En 1989, lorsque le législateur a introduit
cette procédure d’entretien préalable dans la législation, on pensait à la situation où l’employeur, le
preneur de décision, prend une décision de licenciement sans nécessairement avoir tous les
éléments en main. Notamment, les éléments de défense du salarié pourraient faire défaut, parce
que l’employeur n’a pas entendu le salarié, ou parce que le contact entre le preneur de décision et
le salarié n’existe pas compte tenu de la taille de l’entreprise. On voulait donc introduire pour de
telles entreprises une procédure obligatoire pour l’employeur d’entendre le salarié avant de le
licencier. Un employeur qui emploie plus de 149 employés doit convoquer le salarié qu’il entend
licencier à un entretien préalable au licenciement. Cette procédure est obligatoire pour tout
entreprise employant au moins 150 salariés, tant pour le licenciement avec effet immédiat que pour
le licenciement avec préavis.
On dispose d’un cas jurisprudentiel sur le supermarché de Diekirch contre Meyer du 30 novembre
1995 (arrêt de la cour d’appel). Ce marché fait partie du groupe Cactus. La société en question
employait moins de 150 salariés. Le supermarché a procédé au licenciement de monsieur Meyer
sans entretien préalable. L’employé licencié a alors attaqué la société en disant qu’il aurait dû avoir
un entretien préalable au licenciement. L’employeur rejetait cela en disant qu’il employait moins de
150 personnes. Les juridictions ont donné raison au salarié. Elles ont constaté que « Dikkricher
Supermaarkt » fait partie du groupe Cactus, au niveau duquel il y a une certaine unité au niveau de
la direction. Toutes les sociétés faisant partie du groupe sont dirigées par les mêmes personnes. De
plus, toutes ces sociétés exercent des activités économiques similaires, voire identiques, ou du
moins complémentaires. Toutes les sociétés de Cactus appliquent par surcroît une seule et même
convention collective. Les conditions de travail de tous les employés du groupe Cactus sont si non
identiques, du moins similaires. A l’époque, les ressources humaines de tout le groupe Cactus
étaient centralisées. Les juridictions ont alors conclu que le groupe Cactus constitue une unité
économique et sociale. L’unité économique est caractérisée par une concentration des pouvoirs de
direction et une activité identique ou similaire des employés des différentes sociétés faisant partie
du groupe. L’unité sociale se caractérise par les conditions de travail identiques, ou du moins
similaires, de tous les salariés de cette unité. Si on est en présence d’une telle unité économique et
sociale, les juridictions ont retenu que l’employeur n’est pas la petite société Dikkricher Supermaarkt

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en tant que telle, mais bien le groupe Cactus. Déjà à l’époque, ce groupe employait plus de 3 000
salariés.
Par un arrêt du 4 mars 1999, dans une affaire Noach contre la société Promarkt Elektrohandel, la
cour d’appel maintenait ce que l’on avait décidé dans l’affaire « Dikkricher Supermaarkt » précitée.
Or, dans ce deuxième cas, Noach n’arrivait pas à prouver l’unité économique et sociale du groupe
Promarkt allemande avec la société luxembourgeoise pour laquelle il travaillait. Il ne pouvait pas
démontrer que les employés allemands travaillaient dans les mêmes conditions que ceux de
Promarkt Elektrohandel Luxembourg.
Toutefois, le principe de l’unité économique et sociale a été reconfirmé par la jurisprudence. Cette
notion existe toujours à l’heure actuelle.
La procédure de l’entretien préalable est soumise à un certain formalisme. Il faut que
l’employeur qui compte au moins 150 salariés convoque le salarié par lettre recommandée ou lettre
remise en main propre contre signature sur une copie. C’est une modalité de preuve pour supporter
que l’employeur a notifié l’entretien préalable au salarié. La preuve est alors soit le récépissé de la
poste quand il y a une lettre recommandée, ou encore la signature de l’employé sur la copie de la
lettre. Cette lettre doit renseigner le salarié sur l’intention de licenciement de l’employeur et qu’il est
donc convoqué à un entretien préalable pour licenciement.
La date de l’entretien peut être fixée au plus tôt le deuxième jour ouvrable qui suit la convocation à
l’entretien préalable. La lettre de convocation doit par conséquence indiquer la date de l’entretien,
ainsi le lieu et l’heure où il se déroulera. La lettre doit en outre renseigner l’employé sur la
possibilité de se faire assister lors de cet entretien par un membre du personnel de
l’entreprise ou par un membre d’une organisation syndicale. Cette organisation syndicale
doit être représentative sur le plan national, ce qui est le cas de deux, respectivement trois,
syndicats actuellement. Il s’agit de l’OGBL et du LCGB. Dans le secteur des assurances et des
banques, il y a l’ALEBA. Le syndicat doit aussi être représenté au sein de la délégation du
personnel.
Par contre, le salarié ne peut pas se faire assister par son époux(se) ou un autre membre de sa
famille, ni, ce qui suscite parfois des discussions, par un avocat.
L’employeur, quant à lui, peut se faire assister par un membre d’une organisation patronale ou par
un membre du personnel, notamment le supérieur hiérarchique du salarié. Le directeur de
l’entreprise, respectivement l’employeur, peut se faire représenter par le responsable des
ressources humaines.
La loi ne prévoit pas la possibilité pour l’employeur de se faire assister par un avocat.
Une question qui se posait en jurisprudence est celle d’un report de l’entretien préalable par le
salarié. La jurisprudence n’est pas unanime à ce sujet. Il y a des décisions qui lui accordent cette
possibilité, notamment s’il n’a même pas encore reçu la lettre de convocation. Ou alors, il veut se
faire assister par un membre du personnel ou un représentant d’une organisation syndicale qui ne
sont pas disponibles pour le jour et l’heure prévus pour l’entretien. Certaines juridictions disent alors
que l’employeur commet un abus de droit s’il refuse de reporter l’entretien. D’autres décisions disent
que la loi est muette sur le report d’un entretien préalable. Si la loi est muette, l’employeur n’a pas
d’obligation de le reporter.
Lors de l’entretien préalable, l’employeur a l’obligation d’informer le salarié sur le motif qui l’amène
à envisager le licenciement du salarié. Il doit lui donner la possibilité, ainsi qu’à la personne qui
l’accompagne, de prendre position. Une fois l’entretien préalable terminé, la loi impose un certain
délai de réflexion à l’employeur. La notification du licenciement peut se faire au plus tôt le lendemain

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de l’entretien préalable. L’employeur ne doit pas laisser le salarié dans l’incertitude trop longtemps.
C’est pourquoi la notification de licenciement doit avoir lieu au plus tard huit jours après l’entretien.
Si l’employeur ne respecte pas cette procédure de l’entretien préalable, le licenciement est irrégulier
en la forme.
Un licenciement prononcé par l’employeur peut être affecté de trois vices.
1. Un licenciement peut être nul et non avenu. Dans ce cas, la situation est telle comme si le
licenciement n’avait jamais eu lieu, et le salarié doit être réintégré dans l’entreprise.
2. Un licenciement peut être abusif. Dans un tel cas, le licenciement existe bel et bien. Il sort
ses effets, le contrat de travail se termine, mais le salarié a droit à des dommages et intérêts.
Un licenciement est abusif s’il est contraire à la loi.
3. Un licenciement peut être irrégulier en la forme. Il viole une formalité substantielle de la
procédure de licenciement. La procédure de l’entretien préalable est une formalité
substantielle de la procédure de licenciement. C’est pourquoi son non-respect est classé
dans cette troisième catégorie de vices. Le licenciement persiste, mais l’employeur est
condamné à payer au salarié une indemnité pour irrégularité formelle. Cette indemnité est
due s’il y a violation de la formalité. Elle n’est due que si parallèlement, le licenciement n’est
pas abusif, parce que contraire à la loi. L’indemnité pour irrégularité formelle ne peut excéder
un mois de salaire. Elle est fixée par le tribunal. Elle peut être inférieure à un mois de salaire.
Il y a déjà eu un cas où l’indemnité a été fixée à 10 EUR. Dans le cas cité, le licenciement
était justifié. Il n’était donc pas abusif, et le salarié n’avait pas droit à des dommages et
intérêts.

Art. L. 124-3 – Forme d’un licenciement avec préavis par l’employeur

Il faut nécessairement un écrit, c’est-à-dire une lettre de licenciement. Un licenciement oral n’est pas
valable. La lettre doit être recommandée, ou, si elle est remise en main propre, le salarié doit signer
une copie.
Beaucoup d’avocats n’aiment pas la remise en main propre de la lettre. Car pendant une maladie,
les salariés bénéficient d’une protection contre le licenciement. Si maintenant, l’employeur remet la
lettre de licenciement à l’employé et demande la signature d’une copie de celle-ci, ce dernier peut
être tenté de se déclarer malade. Il refuse alors la réception de la lettre de licenciement, et, le cas
échéant, la réception de la lettre de convocation à l’entretien préalable. Le licenciement est alors
bloqué. Par contre, si l’employeur dispose de l’accusé de réception d’une lettre recommandée et le
salarié se déclare malade après, la protection ne jouera pas, et le licenciement produira ses effets.
La lettre de licenciement doit contenir le délai de préavis. Hors période d’essai, ce délai dépend de
l’ancienneté de service du salarié. On répartit cette ancienneté en tranches de 5 ans. Entre 0 et 5
ans d’ancienneté, le délai de préavis est de 2 mois au moins. Le tableau suivant montre le délai de
préavis à respecter par l’employeur par tranche d’ancienneté du salarié.
Ancienneté Délai de préavis
0 à 5 ans 2 mois
5 à 10 ans 4 mois
Supérieure à dix ans 6 mois

Ces délais de préavis sont des délais minimaux. Est-ce qu’on peut les prolonger ? La réponse est
oui, le délai de préavis peut toujours être prolongé. Un exemple-type se trouve dans la convention
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collective des employés de banque et des assurances : on a convenu de doubler le délai de préavis
pour des licenciements pour raison économique.
Il y avait même un cas où, suite à un contrat de travail conclu dans les années 80, le délai de préavis
était fixé à quatre ans (48 mois). Après 10 ans, l’employeur envisageait de licencier le salarié après
10 ans. Se posait alors la question s’il faut seulement respecter le délai de préavis légal de 6 mois
applicable au salarié ou le délai tel qu’écrit dans le contrat. L’employeur choisissait la première
option. Le salarié a alors demandé une indemnité pour non respect du préavis. Il prétendait que
l’employeur lui devait le salaire pour 42 mois, les congés payés auquel il avait droit pendant ces 42
mois, un prorata des 13e mois de la période de 42 mois en question, les assurances
complémentaires, les indemnités pour utilisation de la voiture, des pensions complémentaires etc.
Au total, cela faisait une somme de 500 000 EUR. En première instance, le tribunal de travail avait
décidé que le contrat devait être respecté par l’employeur. La cour d’appel a cependant réformé le
jugement en disant qu’une telle clause de préavis est exorbitante, à tel point qu’elle empêche
l’employeur de licencier son salarié. L’employeur avait en effet argumenté que la clause était
contraire à son droit de licencier le salarié à tout moment. Il s’abstiendrait de licencier le salarié au
vu du délai extrêmement long du préavis, qui le forcerait de payer 48 mois de salaires. La cour
d’appel a conclu que la clause était contraire à l’ordre public et au principe de la libre résiliation du
contrat. Le salarié a fait appel à la cour de cassation, qui a estimé que la cour d’appel avait violé la
loi. La cour de cassation a alors réformé l’arrêt de la cour d’appel. Elle estimait que même un délai
de préavis est valable et doit être respecté par l’employeur. On peut donc prolonger le délai de
préavis, même de façon exagérée. Par contre, le délai de préavis ne peut pas être diminué.
De plus, le délai de préavis prend cours le 15 du mois si la notification du préavis se fait avant ce
jour, sinon, le délai prend cours le premier du mois qui suit.
Lorsque le délai de préavis commence au 1er du mois suivant, sa fin se situe toujours à la fin du
dernier mois de préavis, n’importe le nombre de jours de ce mois et des autres mois se trouvant
dans le délai de préavis.
Par contre, il y a eu de longs débats et des jurisprudences dans les deux sens sur la question
suivante : qu’est-ce que l’on entend par notification du licenciement ? Il y a alors deux possibilités :
c’est soit le moment auquel l’employeur exprime sa volonté de licencier, et cela se concrétise au
moment où il poste la lettre de licenciement, ou encore le moment où le salarié reçoit la lettre de
licenciement ou du moins le moment où il est avisé par la poste de l’envoi d’une lettre recommandée
de licenciement.
Si on poste la lettre de licenciement le 14 du mois, est-ce que la notification a alors lieu le 14 avec
un préavis qui commence le 15 ou est-ce qu’il faut se placer au moment où le salarié reçoit la lettre,
(et il la reçoit au plus tôt le 15), auquel cas le préavis commencera le premier du mois qui suit ? La
première thèse s’appelle la « théorie de l’émission », la deuxième s’appelle la « théorie de la
réception ». Pendant très longtemps, on considérait que l’on se plaçait au moment où l’employeur
postait la lettre de licenciement. Mais au début des années 2000, notamment dans un arrêt du 10
mai 2001, dans une affaire de Pierpont contre Electronic Data Systems, on appliquait la théorie de
la réception. Au cours des années suivantes, on pouvait trouver toutes sortes de décisions. La
divergence des vues était telle que même les deux chambres de la cour d’appel n’étaient pas
d’accord entre elles. La première chambre de la cour d’appel qui traite des litiges en matière de droit
du travail est la 8e chambre, qui appliquait la théorie de la réception. L’autre chambre, la troisième,
appliquait la théorie de l’émission. L’incertitude juridique était donc complète. La dernière
jurisprudence est un arrêt de la cour d’appel du 21 janvier 2010, rendu par la 3e chambre de la cour
d’appel, qui a encore une fois confirmé qu’il fallait appliquer la théorie de l’émission. Dans l’affaire
précitée, l’employeur avait posté la lettre de licenciement le 31 octobre. L’employé l’a reçue le 2 ou

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le 3 novembre. Est-ce que le délai de préavis prend maintenant cours le 1er ou le 15 novembre ? La
cour d’appel a choisi le 1er novembre.
En cas de non respect du délai de préavis, le licenciement ne peut être considéré ni comme nul, ni
comme abusif. Il n’est pas non plus irrégulier en la forme. En conséquent, la seule sanction
applicable est que l’employeur devra payer au salarié une indemnité correspondant au salaire dû
pendant le délai de préavis non respecté. Exemple : si le délai légal est de 2 mois, et l’employeur
licencie avec un préavis d’un seul mois, il doit payer une indemnité correspondant à un mois de
salaire.

Art. L. 124-7 – Indemnité de départ

En outre, en cas de licenciement moyennant préavis de 2, 4 ou 6 mois, le salarié a droit à une


indemnité de départ. Ici aussi, on répartit l’ancienneté du salarié en tranches de cinq ans.

Ancienneté Indemnité de départ


0 à 5 ans néant
5 à 10 ans 1 mois de salaire
10 à 15 ans 2 mois de salaire
15 à 20 ans 3 mois de salaire
20 à 25 ans 6 mois de salaire
25 à 30 ans 9 mois de salaire
Supérieure à 30 ans 12 mois de salaire

Quel est le salaire pris en considération ? Ce n’est pas le salaire du mois du licenciement, mais on
fait la moyenne de la rémunération touchée par le salarié sur les 12 mois qui précèdent le mois de
la notification du licenciement. Ceci peut inclure le 13e mois, ou du moins un prorata de celui-ci et
d’autres avantages qui ont été accordés régulièrement au salarié. En revanche, les gratifications
sont exclues.
Cette indemnité de départ est exemptée de cotisations sociales, car elle ne correspond pas à
une prestation de travail effective. Elle est en outre exemptée d’impôts, sauf pour les employés
qui ont droit, au moment du licenciement, à une pension de vieillesse ou à une pension de vieillesse
anticipée. L’employé touche alors un ou plusieurs mois de salaires bruts sans retenue d’impôts et
sans cotisations, il reçoit du brut pour le net.
A quel moment cette indemnité doit-elle être payée ? Elle doit être payée au moment où le salarié
quitte effectivement le travail. Il y a des divergences de vues comment il faut interpréter cette
disposition. Il y a certaines décisions de certaines juridictions qui disent que l’indemnité de départ
est payable à la fin du préavis. D’autres sont d’avis que l’indemnité de départ doit être payée au
moment où le salarié quitte effectivement le travail. Ce moment peut être antérieur à l’écoulement
du préavis. C’est notamment le cas si l’employeur accorde au salarié la « dispense de travail ».
Le montant de cette indemnité peut affecter de manière significative la trésorerie d’une entreprise,
surtout s’il s’agit d’une petite entreprise. En conséquence, le législateur a estimé qu’il faut un régime
dérogatoire pour les entreprises employant moins de 20 salariés. L’employeur qui emploie moins de
20 salariés peut opter, dans la lettre de licenciement même, soit pour le versement de l’indemnité
de départ, soit pour une prolongation du délai de préavis. Dans une telle hypothèse de prolongation

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du préavis, la prolongation a une durée correspondant à autant de mois que l’indemnité de départ
compte de mois de salaire. Le tableau suivant illustre cette situation.

Ancienneté Prolongation du préavis Durée totale du préavis


0 à 5 ans néant 2 mois
5 à 10 ans 1 mois 5 mois
10 à 15 ans 2 mois 8 mois
15 à 20 ans 3 mois 9 mois
20 à 25 ans 6 mois 12 mois
25 à 30 ans 9 mois 15 mois
Supérieure à 30 ans 12 mois 18 mois

En cas de prolongation du préavis, le salarié licencié travaille et au moins fournit quelque chose en
contrepartie de l’indemnité de départ.
Même si cela n’est pas explicitement indiqué dans la loi, il paraît évident que si l’employé change
l’indemnité de départ en mois de préavis, l’indemnité de préavis se transforme en salaire. Ce salaire
est alors cotisable à la sécurité sociale au imposable au titre de l’impôt sur le revenu. Les salariés
perdent ainsi l’avantage du brut pour net attaché à une indemnité de départ normale. De plus, cette
forme d’indemnité n’est pas payée en une seule fois, mais elle est étalée dans le temps et versée
mensuellement.

Art. L. 124-5 – Motivation du licenciement par l’employeur

Le principe est que tout licenciement doit reposer sur des motifs valables. Une lettre de
licenciement avec préavis ne doit pas indiquer les motifs du licenciement. Certes, l’employeur peut
quand même motiver le licenciement dans la lettre, mais il n’y est pas obligé légalement.
La loi accorde au salarié la possibilité de demander les motifs du licenciement. Il dispose d’un délai
d’un mois à compter de la notification du licenciement pour demander les motifs du licenciement.
Dans ce contexte, la notification doit être comprise au sens de la théorie de réception. Le salarié
doit savoir qu’il a été licencié, il doit avoir réceptionné la lettre de licenciement pour que prenne cours
le délai d’un mois lui accordé pour demander les raisons de son licenciement. La demande doit être
faite sous forme de courrier lettre recommandée.
Les motifs doivent alors être fournis par lettre recommandée de l’employeur au salarié. Le délai de
réponse est d’un mois. Ce délai prend cours au moment où l’employeur a réceptionné la lettre de
demande de motifs. Si l’employeur ne fournit pas les motifs du licenciement, ce dernier est
censé intervenir ou être intervenu sans motif. Il est alors considéré comme abusif. Cela donne
droit à des dommages et intérêts pour le salarié.
Les motifs pour le licenciement doivent être réels, précis et sérieux. Ce sont ces trois points que les
juridictions, saisies d’un litige relatif à un licenciement, vont vérifier. Elles vont commencer avec la
précision des motifs. Bon nombre de procès sont gagnés par le salarié parce que les motifs n’ont
pas été énoncés de manière précise. Les juridictions interprètent de manière très stricte la notion de
précision des motifs. Des termes vagues et généraux comme « tu travaillais mal », « tu es trop
souvent malade » ou « tu es licencié pour des raisons économiques » ne sont pas assez suffisants.
Si par exemple le salarié a été absent trop souvent, il faut indiquer de manière précise à quelles
18
dates il était absent, pendant combien de jours et en quoi cette absence a gêné l’entreprise. Si le
licenciement a eu lieu pour des raisons économiques, il faut décrire en détail la situation économique
de l’entreprise, les mesures de restructuration envisagées et en quoi celles-ci concernent le salarié.
S’il y a plusieurs salariés qui font le même travail, et qu’il faut licencier un de ce groupe, il faut
préciser pourquoi tout justement cette personne a été licenciée, et pas une autre.
D’ailleurs, en matière de licenciement pour effet immédiat, les exigences en termes de précision des
motifs du licenciement sont les mêmes que pour un licenciement avec préavis. Dans ce contexte, il
y avait un cas où le licenciement était justifié par « l’attitude agressive du salarié » au travail. Devant
le tribunal, le salarié prétendait ne pas comprendre ce qu’on lui reprochait. Il argumentait qu’il n’était
pas précisé en quoi son comportement agressif avait consistait, à quel moment il avait montré une
telle attitude, et envers qui il s’était comporté de telle façon. Le tribunal lui a donné raison. Ce qui
s’était passé, c’est qu’il avait attaqué son supérieur hiérarchique avec une scie électrique. Cela était
un motif de licenciement valable, mais il aurait fallu indiquer cela dans la lettre de licenciement, en
mentionnant la date de l’attaque, la nature exacte des faits etc., car une telle agression rendait en
effet impossible la continuation de la relation de travail.
La lettre de licenciement rédigée en bonne et due forme est un élément clé pour l’employeur afin de
ne pas se voir condamné à payer des dommages et intérêts à un employé dont il a l’intention de se
débarrasser pour des raisons justifiées. En effet, la lettre de licenciement est envoyée une seule
fois. Au moment où le salarié a saisi le tribunal, il n’est plus possible de donner des précisions
supplémentaires, car c’est trop tard. Dans l’affaire de la scie électrique, l’employeur a encore essayé
de décrire au tribunal ce qui s’était passé, mais ce dernier a dit que cela ne se trouve pas dans la
lettre et par conséquent, il ne pouvait pas le prendre en considération.
La loi prévoit certes la possibilité, pour l’employeur, de donner des précisions plus tard, mais les
juridictions sont extrêmement réticentes à accepter de telles précisions complémentaires. Le tribunal
argumente souvent que de par la seule lettre de licenciement, le salarié, et, le cas échéant, le
tribunal, doivent comprendre tous les reproches. Tous les détails et la portée de ces faits doivent
être indiqués. Le salarié doit être mis dans une situation où il peut saisir l’opportunité d’intenter un
procès ou non. Il peut aussi apporter la preuve du contraire des faits qu’on lui reproche. Si les
reproches sont formulés trop vaguement, il est impossible d’apporter la preuve du contraire. Par
contre, si les faits sont détaillés quant à leur nature et la date de leur survenance, le salarié a
l’opportunité de démontrer qu’il n’a pas commis les erreurs qu’on lui reproche.
De plus, le tribunal prend en compte les antécédents et l’ancienneté de service du salarié. Un salarié
avec une ancienneté élevée a probablement fait preuve de bons et loyaux services pendant toutes
ces années et par conséquent, les motifs invoqués contre un tel salarié doivent être encore plus
sérieux que ceux invoqués contre un employé qui vient à peine compléter sa période d’essai. Dans
un cas, un employé avait volé une plante à son lieu de travail. Le tribunal considérait à l’époque que
cela ne constituait pas un motif suffisamment sérieux pour un licenciement.
Est-ce qu’un employeur doit par ailleurs donner un avertissement avant de procéder à un
licenciement ? La réponse est négative, il n’existe aucune disposition légale qui traite des
avertissements. Il s’agit d’une création des employeurs.
Les avertissements ont toutefois un très grand avantage pour l’employeur. Un tel acte constitue une
sorte de casier du salarié. Cela permet à l’employeur de contrecarrer l’argument des bons et loyaux
services pendant une longue période. On peut alors retracer, lors du licenciement, les motifs qui ont
mené à la décision finale.
Néanmoins, l’avertissement comporte aussi un grand désavantage. Les juridictions considèrent les
avertissements comme une sanction. Et un seul fait ne peut être sanctionné de deux façons
différentes. On ne peut pas aujourd’hui se limiter à un avertissement et invoquer le même fait demain
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pour justifier une décision de licenciement. Il faut présenter d’autres faits, en sus de l’avertissement,
survenus ultérieurement à celui-ci, afin de motiver un licenciement. Ces nouveaux faits ne peuvent
pas déjà avoir donné lieu à une autre sanction, tel qu’un avertissement. Dans la lettre de motivation
du licenciement, l’employeur doit alors dire qu’il a déjà donné une ou plusieurs chances au salarié
et que malgré cela, ce dernier a encore commis des manquements. Comme il n’a pas saisi
l’opportunité de s’améliorer, il n’est plus possible de poursuivre la relation de travail.

UV6 – Droit du travail et de la sécurité


sociale – Cours 3 Droit du travail
Art. L. 124-9 – Dispense de travail pendant la période du préavis

L’employeur peut dispenser le salarié de toute prestation de travail pendant le délai de préavis. Le
choix appartient à l’employeur de laisser travailler le salarié pendant le délai de préavis, pendant
lequel le contrat de travail perdure encore. Si l’employeur décide de dispenser l’employé de sa
prestation de travail, il reste toujours obligé de continuer à payer la rémunération au salarié. Selon
la loi, la dispense de travail ne doit comporter aucun désavantage au salarié et aucune perte
financière par rapport à la situation dans laquelle il se trouverait s’il travaillait. La dispense de travail
doit être notifiée par écrit dans la lettre de licenciement même afin d’éviter des problèmes de preuve.
L’employeur peut signaler la dispense également dans un autre courrier adressé ultérieurement au
salarié, car il peut décider à tout moment de dispenser le salarié de la prestation de travail.
Un problème qui a dû être résolu par la jurisprudence est le problème du congé. Chaque salarié, au
Luxembourg, a droit à au moins 25 jours de congé payés par an. Ces jours s’accumulent au cours
des mois, ce qui donne 2,08 jours de congé par mois de travail. Est-ce que le salarié, pendant le
délai de préavis, avec dispense de travail, a encore droit à ses jours cumulés de congé ? Selon
certains, le congé est une contrepartie pour le travail presté par le salarié, qui a le droit de se reposer
pour les efforts effectués. Dans ce sens, on peut dire que le salarié ne travaille pas, ne se fatigue
pas pendant la dispense de travail, et n’a de ce fait pas besoin de repos. La jurisprudence a toutefois
retenu un autre point de vue dans un arrêt de 1993. La dispense de travail ne doit comporter aucun
désavantage au salarié par rapport à la situation s’il avait travaillé. S’il travaille, il a droit au congé.
En conséquent, il a droit à 2,08 jours de congé par mois de travail, même pendant le délai de préavis
avec dispense de travail.
Ainsi, un salarié licencié avec un préavis de 6 mois, avec dispense de travail complète, accumule
encore des jours de congé pendant cette période en raison de 2,08 jours par mois. Comme il ne
pourra pas prendre ces jours de congé en nature, car il est dispensé du travail, il a droit à ce que les
jours de congé lui soient payés à la fin du contrat de travail sous forme d’indemnité pour congé non
pris.
Le salarié a droit à son salaire pendant le délai de préavis, même s’il est dispensé du travail. Le
législateur a néanmoins voulu éviter que le salarié puisse alors toucher deux salaires. En effet, il se
pourrait que le salarié soit en préavis chez un premier employeur et prenne un nouvel emploi auprès
d’un autre employeur pendant la période de dispense chez le premier, ce qui est permis par la loi.
Selon les dispositions légales, si le salarié prend un nouvel emploi, pendant le délai de préavis avec
dispense de travail, l’ancien employeur ne doit plus payer que le complément différentiel entre les
deux salaires, pour autant qu’il y ait une différence entre ceux-ci.

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Exemple : l’employeur A licencie le salarié avec un préavis de six mois. Ce dernier gagnait 100 par
mois. Après 4 mois, il reprend un nouvel emploi chez un employeur B. Il reste deux mois de préavis
à payer pour l’ancien employeur. De son côté, le salarié reçoit un salaire mensuel de 80 chez
l’employeur B. Pour les deux mois de préavis restants, A n’est plus obligé de payer deux fois 100,
mais il ne paie que le complément différentiel entre les deux salaires, c’est-à-dire 2 fois 20.
La loi ne prévoit pas d’obligation, pour le salarié, d’informer son ancien employeur du fait qu’il a
repris un nouvel emploi. Ainsi, il existe quand même des employés qui cumulent deux salaires. Le
problème se constate dans le cadre d’un éventuel litige pour licenciement abusif. Le salarié doit en
effet exposer, devant le tribunal, sa situation financière après le licenciement s’il veut obtenir des
dommages et intérêts. Souvent, l’ancien employeur ne découvre qu’à l’occasion d’un tel litige que
l’employé licencié a déjà trouvé un nouvel emploi pendant le délai de préavis. La jurisprudence
admet unanimement que l’employeur A est alors en droit d’obtenir le remboursement de ce qu’il a
payé en trop.
De l’autre côté, il y a également des salariés qui informent leur employeur. Dans un cas, le salarié
informait son employeur par courrier qu’il avait trouvé un nouvel emploi. Cependant, il n’avait pas
indiqué son nouveau salaire. L’ancien employeur ne pouvait alors pas calculer le complément
différentiel. Le salarié avait simplement évoqué que son nouvel emploi comportait un salaire inférieur
à son salaire précédent. L’avocat avait proposé à l’ancien employeur d’arrêter tout paiement et de
demander au salarié de justifier le nouveau salaire. Après plusieurs courriers, le salarié a enfin
indiqué son nouveau salaire. C’est à ce moment-là que l’employeur a été capable de calculer le
complément différentiel.

Art. L. 124-8 – Congé spécial pendant le délai de préavis

Pendant le délai de préavis sans dispense de travail, le salarié peut demander du congé spécial
pour recherche d’un nouvel emploi. Pendant le préavis, il peut s’absenter six jours au maximum pour
se présenter chez un éventuel nouvel employeur. L’ancien employeur doit lui payer ces jours comme
des jours de travail à deux conditions :
1. Il faut que le salarié justifie qu’il est inscrit comme demandeur d’emploi auprès de
l’administration de l’emploi ou d’un organisme correspondant étranger.
2. Il doit aussi s’être présenté effectivement chez un nouvel employeur.

Art. L. 124-4 – Résiliation du contrat de travail avec préavis par le salarié

Le salarié peut également résilier le contrat de travail moyennant préavis. Il y a droit à tout
moment.
Ici aussi, en ce qui concerne la forme, il faut un écrit. L’écrit doit se présenter soit sous la forme
d’une lettre recommandée à l’employeur, soit sous la forme d’un écrit remis en main propre avec
signature sur une copie de la lettre.
Le salarié doit aussi respecter un certain délai de préavis. Ce dernier est fonction de l’ancienneté,
et tout comme en cas de licenciement avec préavis, il y a des tranches de cinq ans pour apprécier
l’ancienneté. Le délai de préavis de l’employé est toujours de la moitié du délai de préavis
qu’aurait dû respecter l’employeur lors d’un licenciement. Le tableau suivant résume cette
situation.

Ancienneté Délai de préavis


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0 à 5 ans 1 mois
5 à 10 ans 2 mois
Supérieure à dix ans 3 mois

Si le salarié ne respecte pas ce délai de préavis, l’employeur est en droit de réclamer une indemnité
pour préavis non respecté. Le montant est alors fixé au salaire qui aurait dû être payé pendant ce
délai de préavis non respecté.
La question qui se pose est que si le salarié dispose, tout comme l’employeur, de la faculté de
prolonger le délai de préavis de démission. En particulier, est-ce que la salarié a droit à être payé
plus que ce qui est légalement requis en cas de démission ?
Cette dernière question a dû être tranchée en jurisprudence, et la décision était que le salarié ne
peut pas imposer à l’employeur un délai de démission plus long. La situation dans l’affaire en
question a été un peu particulière, parce que le salarié qui a voulu quitter l’entreprise avait essayé
de négocier avec son employeur, mais ils ne sont pas arrivés à un accord. Le salarié avait alors
présenté sa démission à l’employeur en mars, avec un préavis qui se terminerait au 12 décembre.
A cette dernière date, le salarié aurait atteint dix ans d’ancienneté dans l’entreprise, ce qui lui aurait
permis de participer au plan de pension de l’entreprise. L’employeur voulait rester avec le délai de
préavis légal de deux mois, qui se terminerait en mi-mai. Le salarié disait alors qu’il avait été licencié,
car l’employeur aurait terminé le contrat de travail avait qu’il l’ait terminé par lui-même. La cour
d’appel a finalement conclu que le salarié ne peut pas imposer un délai de préavis plus long à son
employeur.
Il n’est également pas permis d’imposer contractuellement au salarié un délai de préavis plus
long. Dans certains contrats de travail, l’employeur a accordé un délai de licenciement plus long.
En contrepartie, il est alors convenu que le salarié lui-aussi respecte un préavis plus long. Une telle
clause est nulle parce qu’on ne peut pas imposer au salarié des obligations plus lourdes que ce qui
est légalement prévu dans la loi.
Le délai de démission couvre le même période que le délai de licenciement. Il commence donc le
15 du mois si la démission a été notifiée avant ce jour, dans le même mois. Sinon, le délai va
commencer le premier du mois qui suit.
Le salarié peut par surcroît demander la dispense de travail, mais l’employeur n’est pas obligé de la
lui accorder. La dispense de travail pendant le délai de préavis reste une prérogative de
l’employeur. L’article L. 124-9, qui traite de la dispense de travail, dispose qu’en cas de démission
du salarié, la dispense de travail demandée par le salarié et accordée par l’employeur constitue une
résiliation d’un commun accord du contrat de travail.
Un salarié avec une ancienneté de plus de 10 ans a un délai de préavis de 3 mois. Il demande la
dispense de travail à son employeur. Si elle est accordée, cela est assimilé à une résiliation d’un
commun accord du contrat de travail. La loi ne précise pas à quelle date le contrat est alors censé
être résilié. Il est logique de situer ce moment au jour auquel la dispense de travail prend effet.

Art. L. 124-10 – Résiliation avec effet immédiat pour motif grave

Qu’est ce qu’on entend par un motif grave qui justifie la résiliation, avec effet immédiat, d’un contrat
de travail ? Il s’agit d’un fait ou d’une faute qui rend impossible immédiatement et définitivement le
maintien du contrat de travail.

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Dans la jurisprudence, on trouve des absences injustifiées, des refus d’ordres répétés, des rixes sur
les lieux de travail, des viols ou tentatives de viols et diverses autres formes d’attaques physiques
d’un salarié sur un collègue de travail comme motifs gravent qui justifient la résiliation, avec effet
immédiat, de la relation de travail. De plus, il y a encore eu des actes de concurrence déloyale à
l’égard de l’employeur. Une personne qui travaille dans une entreprise de traduction, qui a en
parallèle créé sa propre entreprise de traduction, qui s’adresse à la même clientèle que l’employeur
et offre les mêmes services que celui-ci, commet des actes de concurrence déloyale. De tels actes
sont des motifs graves de résiliation avec effet immédiat du contrat de travail. Dépendant des
circonstances, le vol dans l’entreprise peut aussi être constitutif d’un motif grave.
Les exemples précédents constituent des résiliations avec effet immédiat du contrat de travail pour
motif grave dans le chef du salarié. Or, le motif grave peut se situer également dans le chef de
l’employeur. La jurisprudence connaît des cas où l’employeur n’a pas payé le salaire. Le défaut de
payer le salaire justifie une résiliation avec effet immédiat du contrat de travail par le salarié pour
motif grave dans le chef de l’employeur.

Résiliation du contrat de travail avec effet immédiat pour motif grave par
l’employeur

1. Conditions de forme
Il faut un écrit, une lettre recommandée ou une lettre remise en main propre contre signature
sur une copie.
Dans ce cas, les dispositions en matière d’entretien préalable sont également applicables.
Un tel entretien est obligatoire pour des employeurs avec au moins 150 salariés.
A la différence du licenciement avec préavis, le licenciement avec effet immédiat doit être
motivé dans la lettre de licenciement même. Tous les motifs doivent être évoqués et décrits
avec précision.
2. Délai
On parle ici de licenciement avec effet immédiat pour des fautes tellement graves qu’elles
rendent immédiatement et définitivement impossible la poursuite de la relation de travail.
L’employeur qui souhaite licencier le salarié se doit alors de réagir vite. Il dispose d’un délai
d’un mois à partir de la prise de connaissance des faits ou fautes pour les invoquer lors du
licenciement. Si ce délai d’un mois n’est pas respecté, l’employeur est censé avoir pardonné
au salarié. On appelle cela le pardon patronal. Le fait n’est alors plus considéré comme
suffisamment grave pour rendre impossible avec effet immédiat le maintien de la relation de
travail. Or, si les faits sont pardonnés à un certain moment, il se peut quand même qu’ils se
poursuivent ultérieurement. La loi précise dans pareil cas que les faits qui n’ont pas été
invoqués dans un délai d’un mois peuvent revivre par la suite pour se cumuler avec d’autres
faits. Cela rend les nouveaux faits plus graves encore, car il y a déjà eu des faits antérieurs
par surcroît.
Si la loi prévoit un délai d’un mois, il ne faut pas nécessairement aller au bout de ce mois
pour licencier. Au contraire, il y a eu un cas où l’employeur licenciait le salarié 3 semaines et
demie après avoir eu connaissance des faits. Le tribunal disait que comme il avait encore su
tolérer le salarié pendant tout ce temps après la connaissance des faits, il avait des doutes
quant au sérieux des motifs, et que le fait reprochait fût vraiment de nature à rendre, avec
effet immédiat, impossible le maintien de la relation de travail. L’employeur a donc intérêt à
réagir assez rapidement, bien que le législateur ait prévu un certain délai pour faire des

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enquêtes et pour vérifier la réalité des choses dont il a eu connaissance le cas échéant.
L’employeur peut aussi utiliser le délai afin de consulter en avocat en cas de besoin. Enfin,
le délai lui permet de rédiger une lettre de licenciement en bonne et due forme, avec
indication de tous les détails qui entourent le fait grave reproché au salarié.
3. Mise à pied conservatoire
L’employeur a la possibilité d’écarter le salarié fautif de l’entreprise avant le licenciement
avec effet immédiat en bonne et due forme. S’il reproche un fait grave au salarié, en attendant
qu’il dispose de tous les renseignements, qu’il ait le temps de rédiger une lettre de
licenciement, et, le cas échéant, qu’il ait eu l’occasion de consulter un avocat, il se peut qu’il
soit nécessaire qu’il écarte le salarié de l’entreprise.
L’employeur prononce alors la mise à pied conservatoire du salarié. Ce dernier n’a plus
besoin de venir travailler dans ce cas. La mise à pied est conservatoire parce que l’employé
doit maintenir la rémunération pendant cette période. La mise à pied peut être prononcée
sans autre forme. Il ne faut pas nécessairement un écrit, la notification orale suffit. A cet
égard, la mise à pied représente un risque considérable. Si l’employeur la prononce
oralement, le salarié pourrait argumenter qu’il s’agit en fait d’un licenciement oral avec effet
immédiat. Le licenciement nécessite cependant un écrit. Un licenciement oral avec effet
immédiat est donc abusif. L’employeur se voit alors exposé au risque que la mise à pied soit
requalifiée en un licenciement oral. Un conseil à donner aux employeurs est alors de bien
peser les mots et de notifier clairement au salarié qu’il s’agit d’une mise à pied en attendant
la lettre de licenciement.
Un autre risque de la mise à pied conservatoire est que le salarié concerné puisse être tenté
de se déclarer malade. Ainsi, il pourra bénéficier d’une protection contre le licenciement. En
effet, si l’employeur prononce une mise à pied, le salarié en question peut se douter qu’il
sera bientôt licencié. En réaction à cela, ce dernier pourra prétendre être malade. Face à
cette situation, l’employeur ferait mieux de ne pas user de la faculté de la mise à pied
conservatoire, et de préparer derrière le dos de l’employé la lettre de licenciement le plus
rapidement possible et de la loi envoyer au plus vite pour l’écarter de cette manière-là de
l’entreprise. Si l’employeur prononce une mise à pied, et que le salarié se déclare malade,
celui-ci bénéficie d’une protection contre le licenciement.
La mise à pied est également une période d’incertitude pour le salarié, c’est pourquoi le
licenciement doit être effectué dans un délai de 8 jours au plus tard après la mise à pied.

4. Effets du licenciement avec effet immédiat


Le contrat de travail est résilié le jour de mise à la poste ou de remise en main propre de la
lettre de licenciement. Il n’y a pas de période de préavis, le salarié n’a pas droit à un délai
quelconque. Il n’a pas non plus droit à une indemnité de départ. Le seul droit qu’il a est le
paiement des salaires dus jusqu’au jour du licenciement, et, éventuellement, le prorata du
13e mois jusqu’au jour du licenciement. De plus, il a droit à une indemnité compensatoire de
congé non pris. Le calcul des jours de congé s’arrête lui aussi le jour du licenciement. A partir
du licenciement, le salarié n’est plus en droit de venir travailler, et l’employeur peut le
renvoyer chez lui s’il se présente quand même dans l’entreprise. Au pire des cas, il faut faire
appel aux forces de l’ordre, à la police, pour renvoyer l’ex-salarié chez lui.

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5. Un licenciement avec effet immédiat ne permet pas au salarié habitant au Grand-duché de
Luxembourg, de toucher des indemnités de chômage. Le salarié licencié avec préavis peut
se présenter devant l’administration de l’emploi et après l’écoulement du préavis, il touchera
des indemnités de chômage de plein droit.
En cas de licenciement avec effet immédiat, il n’y a qu’une seule possibilité de toucher quand
même des indemnités de chômage. Il faut faire deux choses : attaquer l’employeur en justice
pour licenciement abusif et, en parallèle, demander au président du tribunal de travail, de le
relever de l’interdiction de toucher des indemnités de chômage. Dans pratiquement tous els
cas, le président du tribunal de travail le relèvera alors de l’interdiction de toucher des
indemnités de chômage. Cependant, le salarié qui touche des indemnités de chômage de
cette manière-là s’expose au risque de devoir rembourser les indemnités de chômage
touchées si, dans le cadre du procès pour licenciement abusif, le tribunal arrive à la
conclusion que le licenciement est justifié, qu’il y a bien eu faute grave dans le chef du salarié.
Si un licenciement avec effet immédiat n’est pas justifié, l’employeur s’expose à des
sanctions. L’employé devra être mis dans la même situation comme s’il avait été licencié
avec préavis. Il préservera tous ses droits, notamment son droit à une indemnité
correspondant au préavis qui aurait dû être respecté (2, 4 ou 6 mois de salaire). Il aura
également une indemnité de départ. Par surcroît, il se verra accorder des dommages et
intérêts.

Résiliation du contrat de travail avec effet immédiat par le salarié

1. Forme
Il faut un écrit, sous forme d’une lettre recommandée ou d’une lettre remise en main propre
contre signature sur une copie par l’employeur.
La jurisprudence a tendance de dire que le salarié ne doit pas motiver sa démission avec
effet immédiat dans la lettre de démission. Néanmoins, si l’employeur conteste la validité de
la démission avec effet immédiat, le salarié devra pouvoir justifier pourquoi il a démissionné
avec effet immédiat. S’il n’arrive pas à justifier, sa démission ne sera pas valable. Il aurait
tout au plus pu démissionner moyennant préavis, et l’employeur est en droit de demander
une indemnité de préavis non respecté.
2. Délai
Le délai d’un mois après la prise de connaissance des faits, dans lequel le motif grave
justifiant le licenciement par l’employeur doit être invoqué par celui-ci, joue aussi pour le
salarié. Celui-ci ne pourra pas invoquer aujourd’hui un motif grave dont il aurait eu
connaissance dans le chef de son employeur il y a plusieurs mois. Le salarié se doit de réagir
endéans un mois de la prise de connaissance. Sinon, il y a le pardon salarial qui joue.

Art. L. 121-6 – Interdiction de licencier pour cause de maladie

Lorsque le salarié est malade, cet article lui impose deux obligations. S’il les remplie, il bénéficie
d’une protection contre le licenciement.
1. Le premier jour de son absence, le salarié doit informer sont employeur de son incapacité
de travail. Cette notification peut être donnée même oralement par le salarié lui-même ou
par une tierce personne (collègue de travail, conjoint, mère/belle-mère ou père/beau-père
par exemple). La loi ne précise pas de délai pour ce premier jour. Elle ne dit pas s’il faut
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informer l’employeur avant le début du travail, ou l’heure de début théorique normal du travail.
Le salarié dispose d’une journée entière pour informer son employeur.
Certains contrats de travail imposent au salarié d’informer dans les deux ou trois heures de
la prise théorique de travail. Une telle clause n’est pas valable. Elle impose au salarié une
obligation qui est plus lourde que ce qui est légalement prévu, car la loi lui accorde un jour
entier. A partir du moment où le salarié a informé son employeur de son incapacité de travail,
se met en place une protection que l’on peut qualifier de provisoire contre le licenciement.
La loi nous dit que l’employeur informé le premier jour ne peut pas licencier le salarié.
A contrario, quand le salarié n’a pas informé l’employeur, il n’est pas protégé. Il s’expose au
risque d’être licencié le lendemain. Tant qu’il n’a pas respecté son obligation de notification,
la protection ne joue pas.
La protection provisoire couvre les trois premiers jours de l’absence.
2. La deuxième obligation du salarié intervient en conséquent le troisième jour de son absence.
Le salarié doit soumettre à l’employeur, au plus tard le troisième jour de son absence, un
certificat médical. Le certificat médical peut déjà être remis le premier ou le deuxième jour
de l’absence, mais au plus tard le troisième jour.
L’employeur doit avoir reçu le certificat médical le troisième jour. Il ne suffit pas de poster
le certificat le troisième jour, l’employeur doit l’avoir réceptionné le troisième jour.
Si le salarié remplit cette deuxième obligation, la protection provisoire pour les trois premiers
jours devient une protection « définitive » pour toute la durée du certificat médical. A
l’expiration de ce certificat médical, il y a un nouveau premier jour auquel le salarié devrait
revenir travailler. S’il est toujours malade ou incapable de travailler, il doit de nouveau remplir
son obligation du premier jour. Il y aura alors une nouvelle protection provisoire jusqu’à la
remise du certificat médical le troisième jour de la nouvelle période de maladie. Une nouvelle
protection définitive se mettra en place pour la durée du nouveau certificat.
La protection contre le licenciement a toutefois des limites, car elle ne joue que pour un maximum
de 26 semaines de maladie continue. Le lendemain de la 26e semaine, et même si le salarié
continue à être malade et continue à remplir ses obligations d’information de l’employeur, la
protection contre le licenciement s’arrête.
Ce mécanisme avec une protection provisoire suivie d’une protection définitive a encore été confirmé
par un arrêt du 14 juillet 2011. Un salarié avait informé son employeur le premier jour, mais il avait
soumis le certificat seulement le 4e jour. L’employeur l’avait alors licencié le 4e jour. La cour d’appel
a donné raison à l’employeur, comme le salarié n’avait pas respecté ses obligations légales. Puis,
la cour a dû trancher la question si le dépôt tardif du certificat constituait un motif grave de
licenciement. La cour d’appel a répondu par la négative à cette dernière question. En conséquent,
à chaque fois que se pose un problème de maladie, il y a deux questions à vérifier. Est-ce qu’il y a
une protection contre le licenciement ? Et, s’il n’y a pas de protection, quels sont alors les motifs du
licenciement ?
S’il y a protection contre le licenciement, et si l’employeur licencie quand même le salarié, cela
est d’office considéré comme abusif. Le licenciement est abusif, parce qu’il viole alors la
protection contre le licenciement, peu importe les motifs du licenciement. Même si le salarié a
tué son employeur, le motif ne compte pas, car le salarié est protégé contre le licenciement du fait
qu’il a rempli ses obligations d’information de son employeur en cas de maladie.
S’il n’y a pas de protection, on revient vers un licenciement « normal », qui doit être motivé avec
des motifs précis, réels et sérieux.

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Dans les cas où il n’y a pas de protection, il y a plusieurs hypothèses envisageables. Si l’employé
informe l’employeur le premier jour, mais ne remet pas de certificat médical le troisième jour, la
protection s’arrête le troisième jour. Si le salarié n’informe pas le premier jour, et l’employeur ne fait
rien pendant les trois premiers jours de l’absence, mais le troisième jour, le certificat est remis, le
salarié a rempli son obligation légale de soumettre son certificat le troisième jour. Il bénéficie de la
protection contre le licenciement à partir du jour de remise du certificat.
La situation devient plus complexe si le salarié n’informe pas le premier jour, mais remet un certificat
médical ce jour-même. A condition que la soumission du certificat se soit faite avant le troisième jour
de la maladie, le salarié bénéficie de la protection à partir du moment où l’employeur a le certificat
en main, bien qu’il ne l’ait pas informé oralement auparavant. On revoit ce genre de situation souvent
dans le cas de prolongation d’un certificat de maladie.
La durée de la protection est limitée à 26 semaines. La protection joue pour toutes sortes de
licenciement. Elle vaut tant pour le licenciement avec préavis que pour le licenciement avec effet
immédiat pour motif grave.
Qu’en est-il du délai d’un mois dont dispose l’employeur pour sanctionner le salarié ? On se trouve
en effet face à un texte légal qui impose à l’employeur d’invoquer le fait grave dans un délai d’un
mois à partir de la prise de connaissance, et un autre texte qui dispose que le licenciement est
interdit parce que le salarié bénéficie d’une protection contre le licenciement pour cause de maladie.
Si maintenant la maladie dure plus longtemps qu’un mois, on pourrait alors reprocher à l’employeur
de ne pas avoir sanctionné dans un délai d’un mois. La jurisprudence est unanime dans sa réponse
à ce problème. Du moment qu’un texte légal interdit à l’employeur de licencier un employé, on ne
peut pas lui reprocher de ne pas avoir respecté le délai d’un mois. Donc, le délai d’un mois est
suspendu jusqu’à la fin de la protection contre le licenciement.
La loi a encore dû trancher sur la question de la convocation à l’entretien préalable. Celle-ci n’est
pas équivalente à un licenciement. On peut s’imaginer qu’un salarié, qui est convoqué à un tel
entretien, et qui sent le vent tourner et s’attend à être licencié, soit tenté de se porter malade. La loi
nous indique que la déclaration de maladie faite après la réception de la lettre de convocation à
l’entretien préalable, ne comporte pas de protection contre le licenciement. L’employeur a déjà
entamé la procédure de licenciement en convoquant le salarié à l’entretien préalable, et celui-ci ne
peut plus se prévaloir d’une protection contre le licenciement à partir du moment où il est informé de
la convocation à l’entretien préalable.
Ce qui a dû arriver est alors arrivé. Il y a eu une affaire impliquant un salarié prétendant que
l’employeur avait posté la lettre de convocation à l’entretien préalable le 8 novembre. Le salarié était
à son poste de travail ce jour-là, et le lendemain 9 novembre, le salarié avait téléphoné à son
employeur pour se déclarer malade. Il disait que pendant qu’il téléphonait afin de notifier sa maladie,
le facteur avait sonné pour lui remettre la convocation à l’entretien préalable. En conséquent, comme
il était en train de téléphoner à l’employeur avant réception de la lettre de convocation, il interprétait
le texte de la loi de manière stricte. Comme il informait l’employeur juste avant, voire au moment
même de la réception de la lettre, qu’il était malade, le salarié se disait protégé contre le
licenciement. Le tribunal, quant à lui, a appliqué une interprétation assez large du texte légal par
rapport au terme « réception ». Le tribunal s’est rabattu sur une autre disposition légale, stipulant
que l’employeur informé de la maladie ou tenant en main le certificat médical, n’est pas en droit de
licencier. Mais au moment où l’employeur a posté la lettre de convocation à l’entretien préalable, il
n’était pas informé de la maladie, ni n’avait de certificat. Il était donc autorisé à entamer la procédure
en convoquant le salarié à l’entretien préalable, et le salarié en question ne bénéficiait pas d’une
protection contre le licenciement.

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Dans une autre hypothèse, un employeur avait envoyé sa secrétaire à la poste avec la lettre de
convocation à l’entretien préalable. Pendant que celle-ci se trouvait à la poste, le salarié a téléphoné
pour se déclarer malade. Là aussi, on a retenu que l’employeur, au moment où il avait signé la lettre
et où il avait entamé la procédure en envoyant sa secrétaire à la poste, il n’avait pas connaissance
de l’état de maladie du salarié. De ce fait, il était autorisé à entamer la procédure en convoquant le
salarié à l’entretien préalable.
Si l’employeur viole la protection contre le licenciement, le principe est que le licenciement est
alors considéré comme abusif. Auparavant déjà, on a évoqué qu’un licenciement peut être entaché
de trois vices : il peut être nul, abusif ou irrégulier en la forme. Ici, on est en présence d’un
licenciement abusif. La conséquence en est que le licenciement entraînera la résiliation du
contrat de travail. Le salarié aura néanmoins droit à des dommages et intérêts.
Il y a une hypothèse particulière où le licenciement ne sera pas abusif, mais où il sera nul. C’est
quand le salarié a fait objet d’une hospitalisation urgente. Dans ce cas, quand il est licencié, et s’il
remet dans les huit jours du licenciement un certificat attestant de son hospitalisation urgente, le
licenciement qui lui aura été notifié est nul.

Art. L. 415-11 – Interdiction de licencier un délégué du personnel

Pendant toute la durée de leur mandat, les délégués du personnel bénéficient d’une protection
contre le licenciement. Un délégué du personnel a comme charge de défendre les intérêts de ses
collègues de travail. Cette tâche pourrait l’exposer à des situations où il s’affronte avec son
employeur. Pour éviter que ce dernier le sanctionne à cause de propos critiques vis-à-vis de
l’entreprise ou de l’employeur, il bénéficie d’une protection contre le licenciement.
La protection est valable tant pour les délégués effectifs que pour les délégués suppléants.
La protection contre le licenciement des délégués du personnel ne veut pas dure que ceux-ci
peuvent agir comme bon leur semble pendant 5 ans, c’est-à-dire la durée de leur mandat (plus 6
mois après la fin du mandat, voir art. 415-12). Si le délégué du personnel commet une faute grave,
l’employeur ne peut certes pas le licencier, en d’autres termes résilier lui-même le contrat de travail
de manière unilatérale. En revanche, l’employeur peut prononcer la mise à pied du délégué du
personnel. Il le revoie alors chez lui. Parallèlement, l’employeur devra alors demander au tribunal
de travail de résilier par voie judiciaire le contrat de travail pour faute grave commise par le délégué
du personnel. Si l’employeur ne peut pas licencier le salarié, le tribunal de travail a le pouvoir de
résilier le contrat de travail d’un délégué du personnel s’il constate qu’il y a eu faute grave dans le
chef de ce dernier.
La mise à pied du délégué du personnel n’est pas conservatoire. A partir du moment de la mise à
pied du délégué, l’employeur arrête la rémunération. Le délégué du personnel mis à pied n’a pas
non plus droit au chômage. Son contrat de travail n’est pas résilié, puisqu’il n’est pas licencié, ce qui
justifie la non attribution de l’indemnité de chômage. Il est du jour au lendemain « sans le sou ». La
loi lui accorde quand même la possibilité de demander au président du tribunal de travail ce que l’on
appelle le « maintien de la rémunération ». La mise à pied reste en vigueur, mais le président du
tribunal de travail peut condamner l’employeur à maintenir la rémunération comme si le salarié-
délégué du personnel travaillait normalement. Une telle demande doit être introduite dans les huit
jours de la mise à pied. On a alors l’éventualité de deux procédures judiciaires parallèles. D’une part,
l’employeur ayant prononcé la mise à pied du délégué du personnel doit demander en justice la
résiliation du contrat de travail (appelons cela l’action principale). D’autre part, le salarié demande
le maintien de la rémunération. La rémunération est alors maintenue jusqu’à ce que le tribunal ait
statué dans l’action principale. Si maintenant le tribunal décide qu’il n’y a pas faute grave, le contrat
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de travail ne sera pas résilié. Par surcroît, la mise à pied est annulée. Le salarié-délégué du
personnel doit être réintégré dans l’entreprise. En d’autres termes, si on écarte un délégué du
personnel aujourd’hui et si, à l’issue des procédures judiciaires, la conclusion est qu’il faut le
réintégrer dans l’entreprise parce qu’il n’y a pas eu de faute grave, le risque pour l’employeur est
surtout de nature psychologique. Il devra en effet réintégrer un salarié qu’il avait mis à pied
auparavant. Cela est d’autant plus pénible que la procédure judiciaire a été longue (de plusieurs
années par exemple). Si la mise à pied est annulée à cause d’une absence de faute grave, le salarié
devra être payé pour toute la période de la mise à pied. Même s’il n’a pas demandé ou pas obtenu
le maintien du salaire, l’employeur devra lui verser tous les salaires dus à partir de la mise à pied en
cas d’annulation de celle-ci.
Dans l’affaire principale, il se peut cependant que le tribunal constate qu’il y a eu faute grave. La
conséquence en est que le tribunal va résilier le contrat de travail. La résiliation se fera avec effet
rétroactif au jour de la mise à pied. Si le salarié a obtenu le maintien de la rémunération, tous les
salaires qu’il a touchés pendant la mise à pied lui ont été payés de manière indue. Il devra
rembourses tous ces salaires indûment touchés. Le risque financier pour le délégué du personnel
est donc important, puisqu’il devra, après la fin de la procédure juridique (qui peut durer plusieurs
années), tous les salaires touchés pendant la période de mise à pied. Dans quelle mesure
l’employeur arrivera-t-il à recouvrer tous ces salaires ? Cela est une autre question, mais du moins
en théorie, il a droit au remboursement de tous ces salaires.
Il y a un règlement communautaire qui dit que les actions introduites par le salarié contre son
employeur doivent être introduites devant la juridiction du lieu de l’établissement de l’employeur.
Le même règlement prévoit pourtant que les actions introduites par l’employeur contre son salarié
doivent être introduites devant les juridictions du lieu de domicile du salarié. L’affaire principale
précédente devra donc être introduite devant le tribunal du lieu du domicile du salarié. Si le salarié
est un frontalier (de Metz par hypothèse), l’employeur luxembourgeois devra introduire son action
non pas devant le tribunal de travail luxembourgeois, mais devant le conseil de prud’hommes de
Metz.

Art. L. 415-12 – Extension de l’art. L. 415-11

Cet article étend la protection contre le licenciement au-delà de la durée de mandat. La protection
joue aussi pour les délégués du personnel qui ne sont pas réélus. La protection est encore valable
6 mois après la fin du mandat du délégué du personnel.
La protection contre le licenciement d’un délégué du personnel peut, sous certaines hypothèses,
s’étendre vers la période avant le mandat, c’est-à-dire avant les élections. En effet, les candidats
aux élections des délégués du personnel bénéficient aussi d’une protection contre le licenciement.
La protection joue pendant trois mois. Un candidat aux élections sociales qui n’est pas élu ne peut
pas être licencié pendant trois mois. S’il est élu, la protection se prolonge alors sur toute la durée de
son mandat de cinq ans. A la fin de ces cinq ans, il y a de nouvelles élections. Le délégué du
personnel en question n’est plus réélu. Son mandat de délégué prend fin, mais il bénéficie encore
d’une protection contre licenciement pendant six mois après la fin de son mandat.
En 2003, dans le contexte des élections et des candidatures aux élections sociales, un problème
est survenu et s’est encore concrétisé davantage lors des dernières élections sociales qui ont eu
lieu en 2008. En effet, toutes les entreprises élisent leurs délégués du personnel le même jour, et
cela se fait tous les cinq ans. Les prochaines élections auront lieu en novembre 2013. La loi prévoit
que le candidat aux élections sociales bénéficie d’une protection contre le licenciement. A partir de
quel moment peut-on se porter candidat à des élections sociales ? En 2008, les élections ont eu lieu
au mois de novembre. Toute une procédure doit se dérouler avant les élections. Elle commence par
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l’information donnée par l’employeur au personnel qu’il y aura des élections sociales. La loi prévoit
que cela doit se faire 4 semaines avant la date fixée pour les élections. En 2008, un employeur
n’avait pas encore annoncé les élections sociales cinq semaines avant la date des élections. Il a
convoqué deux employés à l’entretien préalable au licenciement. En réaction à cette convocation,
les deux salariés ont posé candidature aux élections sociales. Se posait alors la question si oui ou
non, l’employeur pouvait continuer la procédure et licencier les personnes, qui étaient candidats aux
élections sociales et bénéficiaient d’une protection contre le licenciement. L’employeur a continué la
procédure de licenciement, et l’affaire a paru devant le tribunal. En un premier temps, le président
du tribunal a appliqué une logique comparable à celle d’un entretien préalable par rapport à une
déclaration de maladie. Auparavant, nous avons vu que du moment où l’employeur a lancé la
procédure de l’entretien préalable, une déclaration faite après la convocation n’emporte plus de
protection. Le tribunal de travail, en première instance, a appliqué le même raisonnement.
L’employeur ayant lancé la procédure de l’entretien préalable avant la déclaration de candidature
aux élections sociales, celle-ci ne peut empêcher la poursuite de la procédure de licenciement. Ainsi,
la protection contre le licenciement ne jouerait pas. Les deux employés ont fait appel. Le président
de la cour d’appel constatait qu’il n’y avait pas de disposition comparable à celle au sujet de la
protection de licenciement en cas de maladie relative à la candidature aux élections sociales dans
la loi. La décision de la première juridiction a donc été écartée. Le président de la cour d’appel a
alors dû se pencher sur la question à partir de quel moment on peut se poser candidat aux élections
sociales. En particulier, peut-on se poser candidat aux élections deux années avant le déroulement
de celles-ci et ainsi bénéficier d’une protection contre le licenciement de trois mois ? Et peut-on par
la suite réitérer la candidature afin de profiter de cette protection jusqu’au moment des élections ?
Or, la cour a conclu que le système ne pouvait pas fonctionner de cette façon. Finalement, on est
arrivé à la conclusion qu’une candidature ne peut être valablement posée qu’au moment où la
procédure des élections est lancée. Concrètement, la candidature ne peut être posée qu’à partir du
moment où l’employeur a officiellement annoncé les élections sociales. C’est aussi à partir de ce
moment seulement où les candidats peuvent se prévaloir d’une protection contre le licenciement.
La protection contre le licenciement vaut pour les deux types de licenciement, à savoir le
licenciement avec préavis et le licenciement avec effet immédiat. Quelle est la sanction si
l’employeur licencie un délégué du personnel ? La sanction est la nullité du licenciement. La nullité
doit toutefois être demandée par le délégué du personnel. Il doit la demander en justice dans un
délai de quinze jours à compter de la notification du licenciement. La jurisprudence a alors dû
apporter une réponse à la question que si un délégué du personnel qui n’a pas demandé la nullité
de son licenciement dans les quinze jours peut agir en dommages et intérêts pour licenciement
abusif, comme tout salarié ordinaire ? Est-ce qu’il peut renoncer à sa protection contre le
licenciement inhérente à son statut de délégué du personnel, et remplacer la nullité par un
licenciement abusif ? La jurisprudence retient que les délégués du personnel n’ont qu’une seule
chance. Ils ne sont autorisés que de demander la nullité de leur licenciement dans un délai de quinze
jours. S’ils n’usent pas de cette faculté, ils ne disposent de plus aucun recours contre le licenciement.
Cette position peut être expliquée par le fait que les délégués du personnel ont reçu un mandat de
leurs collègues de travail de défendre leurs intérêts. La confiance de leurs collègues est à la base
de leur protection contre le licenciement. Un délégué n’a pas droit de renoncer à la nullité du
licenciement pour des raisons purement pécuniaires. Un tel délégué ne mérite pas la protection
contre le licenciement par voie de nullité, qui est quand même un instrument de protection efficace.

UV6 – Droit du travail et de la sécurité


sociale – Cours 4 Droit du travail
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Art. L. 337-1 – Femme enceinte

Le régime dans ce cas est similaire à celui du délégué du personnel. Le licenciement est interdit,
que ce soit le licenciement avec préavis ou le licenciement avec effet immédiat. La sanction est alors
la nullité du licenciement. Néanmoins, l’employeur a la possibilité de la mise à pied de la salariée
enceinte et de demander au tribunal de constater une faute grave de la salariée pour ensuite résilier
par voie judiciaire le contrat de travail.
La protection de la femme enceinte vaut à partir de la remise à l’employeur du certificat de grossesse
et jusqu’à douze semaines après l’accouchement. Si la salariée a été licenciée sans avoir remis un
certificat de grossesse à son employeur, elle peut, dans un délai de huit jours, soumettre un certificat
de grossesse, auquel cas son licenciement deviendra nul.

Art. L. 234-48 – Congé parental

Le congé parental a été mis en place pour permettre aux parents de s’occuper de leurs enfants, soit
directement à la suite du congé de maternité, soit jusqu’à l’âge de 5 ans de l’enfant. Il s’agit d’un
congé parental à temps plein. Pendant six mois, le parent ne travaille pas du tout. La possibilité
de prendre ce congé parental de six mois vaut pour la mère et le père. Il est également possible de
prendre le congé parental à mi-temps, auquel cas le congé prendra une durée d’un an.
Pendant le congé parental, le/la salarié(e) est protégé(e) contre le licenciement, mais cette
protection ne vise que le licenciement avec préavis. La sanction applicable est la nullité du
licenciement. Le licenciement avec effet immédiat pour motif grave est donc possible pendant
le congé parental.

Art. L. 234-54 – Congé pour raisons familiales

Ce type de congé est prévu pour permettre aux parents de s’occuper de leurs enfants gravement
malades. Ce congé est limité à deux jours par an et par enfant. La protection contre du
licenciement ne joue que pour le licenciement avec préavis. Un licenciement avec préavis qui
surviendrait serait alors considéré comme abusif. Le licenciement avec effet immédiat pour motif
grave est donc possible pendant le congé pour raisons familiales.

Art. L. 166-2(8) – Licenciement collectif

Un licenciement collectif a lieu lorsque l’employeur envisage de licencier, dans une période de
trente jours, au moins sept salariés pour raisons économiques. Ou, dans une période de 90
jours, au moins quinze salariés pour raisons économiques. Si l’employeur envisage un tel
licenciement, il doit préalablement négocier avec les représentants du personnel un plan social. Ce
plan doit notamment viser à diminuer le nombre de licenciements prévus et il doit tendre à trouver
des solutions pour maintenir les salariés dans l’emploi, par exemple en les faisant embaucher par
une autre entreprise. Enfin, le plan social aura pour objet de déterminer les indemnités de
licenciement que l’employeur paiera aux salariés au-delà de leurs droits purement légaux, tels que
le préavis et l’indemnité de départ. La loi prévoit un délai de quinze jours pour la négociation d’un
plan social. L’employeur doit négocier avec les délégués du personnel et les représentants du
syndicat signataire de la convention collective applicable à l’entreprise. Si, dans les quinze jours,
aucun accord n’a pu être atteint, le dossier est transféré à ce que l’on appelle « l’Office National de
conciliation ». Ce dernier organisme dépend du Ministère du Travail, et il est chargé de concilier les
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parties dans le sens de les aider à trouver un accord sur le plan social. La loi prévoit un délai de
quinze jours de négociations devant l’Office National de conciliation. Si les parties trouvent un accord
sur le plan social, que ce soit dans la première phase que l’on vient de mentionner ou la deuxième,
on signe le plan social, est l’employeur peut alors licencier les salariés qu’il avait prévus de licencier.
En revanche, si aucun accord au niveau du plan social n’a pu être atteint, ni pendant la première
période de quinze jours, ni devant l’Office National de conciliation, ce dernier va dresser ce que l’on
appelle un « procès verbal de non-conciliation ». Une fois ce procès-verbal signé, l’employeur peut
procéder au licenciement, même en l’absence d’un plan social.
L’article 166-2(8) prévoit que pendant toute la durée de la négociation, et jusqu’à la signature du
plan social, respectivement la signature du procès verbal de non-conciliation, il est interdit à
l’employeur de licencier pour raisons économiques. Un licenciement qui interviendrait pendant
cette période-là serait nul. Des licenciements pour raisons personnelles restent possibles. Un
licenciement pour raisons économiques comporte toujours un préavis. Cela ne constitue pas
un motif grave dans le chef du salarié, donc un licenciement pour raisons économiques est un
licenciement moyennant préavis.

Art. L. 551-2(2) – Saisine de la commission mixte de reclassement

L’art. L. 551-10 est aussi applicable dans ce contexte.


On peut, en simplifiant à outrance, diviser les salariés en trois catégories. Il y a d’abord les salariés
valides, qui sont capables d’effectuer tout travail. D’autre part, il y a les salariés dont les aptitudes
physiques sont tellement restreintes qu’ils ne sont pas capables de travailler du tout. Ce sont les
salariés invalides qui touchent une pension d’invalidité. Entre ces deux types de salariés, il y a les
salariés qui peuvent encore travailler, mais dont les aptitudes physiques sont restreintes, de sorte
qu’ils ne peuvent plus exécuter le travail qu’ils avaient jusque-là. Il existe un organisme chargé
d’analyser les cas de ces derniers salariés. Il est appelé « commission mixte de reclassement ».
Cette commission vérifie le dossier de chaque salarié et décide ensuite ce qui va advenir à celui-ci.
Il ne peut pas toucher de pension d’invalidité, mais il ne peut pas non plus exercer le poste qu’il
occupait auparavant. La commission mixte peut prendre deux décisions :
1. Elle peut décider que le salarié doit être reclassé en externe. Cela implique qu’il quitte
l’entreprise dans laquelle il travaillait jusqu’alors. Il sera pris en charge par l’Administration
de l’emploi qui essaiera de lui trouver un poste adapté à ses aptitudes physiques dans une
autre entreprise. En conséquent, le contrat de travail chez l’ancien employeur est résilié de
plein droit. Le salarié quittera l’entreprise, il ne sera plus lié par le contrat de travail avec son
ancien employeur.
2. L’autre décision possible pour la commission mixte de reclassement serait un reclassement
en interne. Il sera alors reclassé à l’intérieur de l’entreprise où il travaille actuellement. Ceci
engendrera pour l’employeur l’obligation de proposer un nouveau poste de travail adapté à
ses aptitudes physiques au salarié. Ce nouveau poste peut être un poste tout à faut différent
au poste antérieur. Il se peut aussi que le nouveau poste soit tout simplement un
aménagement du temps de travail. Par exemple, le salarié a toujours travaillé à temps plein.
Ses aptitudes physiques ne lui permettent plus de subir la charge du travail, et il travaillera,
dans le futur, seulement à temps partiel, sur le même poste dans la même entreprise. Dans
certaines circonstances, l’employeur peut être obligé de maintenir le salarié dans l’entreprise
et de lui proposer un nouveau poste.
L’art. L. 551-10 prévoit que l’employeur ne peut pas licencier le salarié en question entre le jour de
la saisine de la commission mixte jusqu’au jour de la décision de cette commission. L’article ne
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précise pas la sanction en cas de non respect de cette disposition. Le texte est conçu de manière
assez générale. On peut l’interpréter dans le sens que la protection vaut aussi bien pour le
licenciement moyennant préavis que pour le licenciement avec effet immédiat. Le licenciement
devait être déclaré abusif. Intervient alors la décision de la commission mixte.
En cas de reclassement externe, le problème est résolu pour l’employeur, puisque le salarié va
quitter l’entreprise. Si le reclassement est interne, qui oblige l’employeur à maintenir le salarié en lui
proposant un nouvel emploi, l’art. L. 551-2(2) indique que le salarié bénéficie d’une protection contre
le licenciement pendant une période de douze mois. Cela est censé éviter que l’employeur se
débarrasse du salarié après la décision de reclassement interne. Cette protection ne vise que le
licenciement avec préavis et le licenciement serait nul. Un licenciement avec effet immédiat pour
motif grave reste possible.

Art. L. 124-11 et L. 124-12 – Résiliation abusive

Un licenciement est abusif s’il est contraire à la loi ou qui ne repose pas sur des motifs réels et
sérieux de licenciement liés à l’aptitude du salarié, à sa conduite ou à des raisons économiques.
Tout licenciement ne reposant pas sur des motifs assez précis ne serait pas justifié. L’imprécision
de motifs est équivalente à l’absence de motifs.
Que doit faire le salarié dans pareil cas, et quels seront ses délais d’action ? L’art. L. 124-11 lui
accorde un délai de trois mois pour réagir face à son licenciement. Ce délai court à partir du
licenciement (sous-entendu le licenciement avec effet immédiat) ou de sa motivation (licenciement
avec préavis, avec demande des motifs par le salarié).
Le salarié doit, pendant ce délai de trois mois, agir judiciairement contre son employeur. Ce délai
est prévu sous peine de forclusion, ce qui veut dire qu’une fois le délai passé, le salarié ne pourra
plus agir judiciairement contre son employeur.
L’art. 124-11 nous indique encore que ce délai pourra être interrompu. Il sera remplacé par un
nouveau délai d’un an, si dans les trois mois du licenciement ou de la motivation de celui-ci, le salarié
introduit auprès de son employeur une réclamation écrite contre le licenciement. Dans ce cas, il aura
un nouveau délai d’un an à compter de la protestation. Après ce délai d’un an, le salarié ne pourra
plus agir contre son employeur pour obtenir indemnisation pour licenciement abusif.
Exemple : aujourd’hui, on motive le licenciement de la secrétaire. A compter du jour de la réception
de la lettre, elle dispose d’un délai de trois mois pour introduire une action en dommages et intérêts
devant le tribunal. Si la salariée n’agit pas pendant ce délai, elle serait forclose et ne pourra plus
demander des dommages et intérêts. Si elle a reçu la lettre le 17 novembre, elle devra intenter une
action au plus tard le 17 février, le 18, ce serait trop tard. A partir du 18 février, l’action serait
irrecevable. Si, par contre, le 5 janvier, la salariée écrit un courrier afin de protester contre le
licenciement et indique de demander des dommages et intérêts parce que son licenciement serait
abusif, il s’agira d’une réclamation contre le licenciement. Cela interrompra le délai de trois mois, qui
sera remplacé par un nouveau délai d’un an, qui se terminera quant à lui le 5 janvier de l’année
suivante. Pendant ce délai, elle devra introduire une demande en justice pour obtenir indemnisation
du licenciement abusif. Ce délai passé, l’introduction d’une action serait tardive, la salariée serait
forclose à agir, et sa demande deviendrait irrecevable.
Qui a la charge de la preuve dans le cadre d’une procédure judiciaire ? La loi indique que c’est
employeur qui a la charge de la preuve des motifs qu’il a invoqués à l’appui du licenciement. Si le
salarié conteste, ce qui pratiquement toujours le cas, il incombe à l’employeur d’indiquer les motifs

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de manière précise et de justifier leur sérieux. Il doit de plus prouver la réalité des motifs, le cas
échéant par une documentation à l’aide de témoins.
Si l’employeur échoue, parce que les motifs ne sont pas suffisamment précis ou sérieux, ou encore
parce qu’il n’arrive pas à prouver la réalité de motifs qui l’ont poussé au licenciement (il a peut-être
inventé les motifs de toutes pièces), la conséquence en sera que le licenciement est considéré
comme abusif.
Quelle est la sanction d’un licenciement abusif pour l’employeur ?

Licenciement abusif avec effet immédiat

1. Licenciement avec effet immédiat : indemnité compensatoire de préavis et indemnité de


départ
Un salarié est licencié avec effet immédiat. Ce salarié n’aura pas droit à l’indemnité de préavis, ni à
l’indemnité de départ. Si le licenciement est déclaré abusif, on lui allouera tout d’abord tous les droits
qu’il avait eus s’il avait été licencié avec préavis. Il recevra donc une indemnité pour compenser la
perte de préavis, une « indemnité compensatoire de préavis non respecté ». Si le salarié a moins
de 5 ans d’ancienneté, il a droit à une indemnité de deux mois de salaire. Avec une ancienneté de
plus de 10 ans, il aura droit à une indemnité compensatoire de 6 mois de salaire.
Les choses se compliquent si le salarié habite au Luxembourg, et s’il touche de ce fait le chômage
à Luxembourg. Car un salarié licencié avec effet immédiat n’aura pas droit à une indemnité de
chômage, sauf si une décision de justice lui accorde tout de même une telle indemnité. On est dans
cette dernière hypothèse. Si le salarié a touché le chômage au Luxembourg, le législateur considère
qu’il y a deux victimes du licenciement abusif : le salarié licencié lui-même, ainsi que l’Administration
de l’Emploi, respectivement l’Etat, qui a dû payer, par la faute de l’employeur, des indemnités de
chômage. Cette deuxième victime a aussi droit à être indemnisée du préjudice subi. Un salarié qui
aurait eu droit à un préavis de six mois, il aura touché une indemnité de chômage pendant cette
période fictive de préavis. On va déduire du paiement que l’employeur devra faire au salarié les
indemnités de chômage que celui-ci aura touchées pendant cette période. Au Luxembourg, le
chômage est de 80 % du salaire antérieur (avec des limites vers le haut). Si le salaire a été de 3000
EUR, le chômage sera de 2400 EUR. Cela équivaut à une perte de 600 EUR par mois par rapport
à son salaire normal. Il aura, à titre d’indemnité compensatoire de préavis, 6 fois 3000 mois 6 fois
2400 EUR (ou 6 fois 600 EUR), donc 3600 EUR pour la période de préavis non respectée.
Le salarié a tout reçu ce qu’il aurait eu en cas d’un licenciement avec préavis. Ses salaires, sur 6
mois, auraient été de 18 000 EUR au total. Il recevra 14 400 EUR de l’Etat et 3 600 EUR de son
employé.
Le salarié à en plus droit à une indemnité de départ. Avec une ancienneté entre dix et quinze ans, il
aurait droit à une indemnité de départ de deux mois. L’Etat luxembourgeois n’a pas de recours sur
cette indemnité, c’est-à-dire sur cette somme, l’Etat n’aura aucun droit. Ce montant reviendra
entièrement au salarié.
2. Dommage moral
Imaginons que l’employé ait eu un choque après le licenciement abusif. Il se fait des soucis sur son
avenir professionnel, et il faudra le compenser pour ce dommage moral.
Il n’y a pas de grille pour déterminer le montant de l’indemnisation appropriée dans ce cas. Tout est
question de l’appréciation souveraine du tribunal. Les éléments qui seront pris en compte par le
tribunal pour fixer ce montant sont les suivants :

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 l’âge du salarié,
 l’ancienneté,
 l’attitude du salarié après le licenciement (s’il a cherché de manière active un
nouvel emploi, il s’est soucié plus de son avenir que s’il n’avait pas agi ainsi, et
en conséquent, il aura une indemnité plus élevée).
Grâce à ces critères, le tribunal déduira un certain montant de dédommagement moral. Comme
c’est à la discrétion du tribunal, on peut trouver des cas avec des indemnités symboliques,
notamment si l’employé est très jeune et n’a pas de grande ancienneté, et par surcroît, n’a pas su
prouver qu’il s’est fait beaucoup de soucis sur son avenir professionnel. Par contre, le montant le
plus élevé jusqu’à présent a été de 100 000 EUR. En moyenne, c’est un à deux mois de salaires.
L’employeur est condamné de payer au salarié ce dédommagement moral, et l’Etat n’a pas de
recours sur ce montant.
3. Dommage financier ou matériel
Un salarié licencié ne trouve souvent pas de nouvel emploi aussi bien rémunéré que son emploi
précédent, voire se retrouve au chômage. De ce fait, il subira un dommage financier ou matériel.
Le tribunal va prendre en compte tous les éléments du dossier afin de déterminer le montant de
cette indemnité. Les éléments les plus importants sont :
 l’âge du salarié,
 son ancienneté,
 les efforts faits pour trouver un nouvel emploi.
On va déduire de tous ces éléments une « période de référence ». Sur cette période, on concrétisera
le dommage financier subi par le salarié.
Interviennent encore deux principes dans cette appréciation :
 celui qui a causé un dommage doit indemniser tout le dommage qui est
directement lié à la faute ;
 la victime du dommage doit contribuer à diminuer son dommage.
Le salarié peut diminuer son dommage en cherchant activement un nouvel emploi. La période de
référence est un certain intervalle de temps, qui, selon l’avis du tribunal, permet de concilier ces
deux principes. Il s’agit d’une période raisonnable pour permettre au salarié de retrouver un nouvel
emploi. Si le salarié ne fait pas d’effort, c’est de sa faute, et la période de référence ne sera pas
aussi importante que s’il avait fait beaucoup d’efforts. Un ex-salarié, qui cherche un nouvel emploi
mais n’en trouve pas, est réputé avoir subi un dommage lié directement à la faute de l’employeur.
Une fois la période de référence déterminée (en mois), le tribunal va calculer les salaires que le
salarié aurait touchés sur cette période s’il n’avait pas été licencié. Ensuite, le tribunal va analyser
la situation financière réelle du salarié sous cette même période de référence. La différence entre
ces deux montants constituera le dommage matériel qui est directement causé par l’employeur.
Dans notre exemple (salaire de 3 000 EUR, chômage de 2 400 EUR, préavis de six mois), le tribunal
pourrait accorder un délai de dix mois au salarié pour retrouver un nouvel emploi. Sur les dix mois,
il aurait touché 30 000 EUR. Au niveau de sa situation financière réelle, il a touché des indemnités
de chômage. Il lui a aussi déjà été attribué une indemnité compensatoire de préavis qui a annulé,
ou du moins diminué, le dommage sur une période de six mois. Sur les dix mois initiaux, il en restera
quatre mois pour lesquels le salarié n’a pas encore été indemnisé. Sur les quatre mois, il aurait
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touché 12 000 EUR, mais sur ces quatre mois, il aurait touché du chômage à raison de 2 400 EUR
par mois. Le préjudice sera de 2 400 EUR. L’employeur est alors condamné à payer au salarié ce
préjudice réellement subi.
Le salarié reçoit en tout 12 000 plus 18 000, c’est-à-dire 30 000 EUR, c’est le montant qu’il aurait
touché s’il n’avait pas été licencié. En sus, il aura le dédommagement moral et l’indemnité de départ.
Quelle est alors la situation de l’Etat luxembourgeois ? Il a subi un préjudice en payant des
indemnités de chômage sur la période de référence. Il a en effet payé des indemnités sur les dix
mois de la période de référence. Pour les premiers six mois, on a vu qu’il sera remboursé. Restent
9 600 EUR pour les quatre autres mois. Ces quatre mois lui seront également remboursés,
finalement, il ne subira pas de préjudice. Il sera intégralement remboursé.
L’employeur, quant à lui, il aura payé 30 000 EUR pendant dix mois, dont une partie au salarié et
l’autre à l’Etat. Par ailleurs, il devra payer un dommage moral et l’indemnité de départ, qui
constitueront une sanction supplémentaire.
Néanmoins, le tribunal ne va pas dans toutes les hypothèses indemniser le salarié jusqu’à ce
qu’il ait trouvé un nouvel emploi. Il se peut que dans notre exemple, le salarié n’ait toujours pas
trouvé de nouvel emploi après l’écoulement de la période de référence de dix mois. Mais le tribunal
va alors dire que le salarié n’a pas fait des efforts suffisants pour trouver un nouvel emploi. Il
argumentera qu’en faisant plus d’efforts, le salarié aurait pu retrouver un nouvel emploi dans les dix
mois suivant le licenciement. Le tribunal va arrêter le dédommagement et la période de référence.
Au-delà de ces dix mois, le salarié va encore toucher des indemnités de chômage, et il subira alors
une perte mensuelle de 600 EUR, qui ne sera plus pris en charge par l’employeur. Cette perte ne
sera plus imputable à ce dernier, mais liée à la carence de l’employé de chercher un nouvel emploi.
L’Etat, qui continuera à payer des indemnités de chômage, ne sera pas non plus indemnisé par
l’employeur. L’obligation de payer des indemnités pour l’Etat sera alors non pas due à la faute de
l’employeur, mais à la carence du salarié qui n’a pas tout mis en œuvre afin de trouver un nouvel
emploi endéans la période de carence. Cependant, l’Etat n’a pas droit de recours contre le salarié
devenu chômeur pour les indemnités de chômage payées.
Exemple de l’examen passé :
Mme X est employée chez Leaks avec une ancienneté de 23 ans, l’employeur emploie plus de 150
personnes. Le salaire mensuel est de 5 000 EUR. Elle a été licenciée avec effet immédiat sans que
la lettre de licenciement n’indique les motifs du licenciement. Cette lettre ne contient donc pas de
motifs précis, réels et sérieux, qui devraient pourtant y figurer. Le licenciement est donc abusif.
En justice, on a attribué des indemnités de chômage de 4 000 EUR à Mme X. De la période du 1er
septembre 2009 au 1er août 2010, elle a touché ces indemnités jusqu’au moment où elle a trouvé
un nouvel emploi, mieux rémunéré (1er août 2010). Le tribunal a certes constaté qu’elle avait trouvé
un nouvel emploi au 1er août 2010, mais il a quand même considéré qu’elle n’avait pas fait assez
d’efforts pour se reclasser. En conséquent, il a arrêté la période de référence au 30 juin 2010. La
période de référence s’est donc étendue du 1er septembre 2009 au 30 juin 2010. Mme X a touché
des indemnités de chômage, que l’Etat réclame en remboursement.
Tout d’abord, Mme X aura alors droit au préavis. Sur base d’une ancienneté de 23 ans, elle aurait
eu droit à six mois de préavis. Elle aura droit à 30 000 EUR. Pendant cette même période, elle aura
touché des indemnités de chômage à raison de 6 fois 4 000 EUR, c’est-à-dire 24 000 EUR. Elle aura
une indemnité compensatoire de préavis non respecté de 6 000 EUR.
Elle aura aussi une indemnité de départ de 6 mois de salaire, soit 30 000 EUR. Ce montant reviendra
entièrement à Mme X. L’Etat n’y a pas droit de recours. Il n’a que recours à des périodes qui
correspondent à une contrepartie de salaire. L’indemnité compensatoire équivaut à la partie de
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salaire payée pendant la période de préavis non accordée. L’indemnité de départ, ainsi que le
l’indemnité pour dommage moral, ne correspondront pas à une contrepartie du travail presté.
La période de référence a été fixée à dix mois (septembre 2009 à juin 2010). Six mois seront déjà
couverts par le préavis non respecté, en resteront donc 4. Le dommage financier sera alors constitué
par la différence entre le salaire qu’elle aurait touché pendant 4 mois, moins les indemnités de
chômage touchées pendant cette période, c’est-à-dire 4 000 EUR.
Au total, Mme X aura touché 6 000 pour le préavis non respecté, 30 000 d’indemnité de départ et
4 000 de dommage matériel. Sous l’hypothèse qu’il n’y a pas de dommage moral, ce seront 40 000
EUR au total.
L’Etat luxembourgeois aura doit au remboursement des indemnités de chômage payées pour la
période de préavis non respectée, c’est-à-dire six fois 4 000 EUR, il recevra 24 000 EUR. Comme
la période de référence totale est de dix mois, il reste quatre mois à indemniser, donc 16 000 EUR.
L’Etat aura au total 40 000 EUR.
L’employeur devra payer au total 80 000 EUR. Sans l’indemnité de départ, on serait à 50 000 EUR.
Cela constitue la somme de ce qui aurait dû être payé pendant la période de préavis non respecté :
le salaire dû pendant cette période de six mois et des quatre salaires correspondant à la partie de
la période de référence au-delà du préavis.
La possibilité de recours pour se laisser rembourser les indemnités de chômage n’existe que
pour l’Etat luxembourgeois. L’ADEM n’intervient que pour les employés habitant au Luxembourg.
Pour un frontalier, le problème des indemnités de chômage ne se pose pas. Dans une telle
hypothèse, l’intégralité de l’indemnité de préavis non respecté revient au salarié. Si Mme X précitée
avait eu son domicile en France, elle aurait eu droit à 30 000 EUR pour le préavis, et elle aurait pu
cumuler ce montant avec les indemnités de chômage en France.
Pour tout ce qui dépasse le préavis, on tient compte de la situation financière réelle de la salariée.
Là, la frontalière n’aurait eu que quatre fois son salaire théorique et le chômage reçu en France. Le
chômage en France aurait été de lois inférieur au chômage luxembourgeois. Le dédommagement
au titre de dommage matériel aurait été plus important. En agissant de la sorte, pendant dix mois,
elle n’aurait pas subi de préjudice du tout.

Licenciement abusif avec préavis

En cas de licenciement avec préavis, l’employeur accorde au salarié le préavis et lui paie le salaire
mensuel pendant toute cette période. Si l’affaire vient devant le tribunal, l’employeur aura rempli son
obligation de payer le salaire pendant le préavis. Alors, ne se posera plus de problème quant à
l’indemnité de préavis. De plus, on peut partir de l’hypothèse que l’employeur a payé l’indemnité de
départ.
A quoi aura droit le salarié, comme dans ce cas, et contrairement au licenciement abusif avec effet
immédiat, il aura quand même touché certaines indemnités ?
1. Dédommagement moral
Le dédommagement est, comme déjà évoqué plus haut, laissé à l’appréciation souveraine du
tribunal.
2. Dommage matériel
Ici aussi, le salarié sera dédommagé sur une période de référence que l’on considère raisonnable
pour permettre au salarié de retrouver un nouvel emploi. Pour la partie de cette période de référence

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qui se situe après le préavis, on vérifie quel salaire le salarié aurait eu s’il n’avait pas été licencié.
On compare cela à sa situation financière réelle et la différence sera le dommage matériel.
Exemple :
Soit un salarié avec une ancienneté de 22 ans. Il a un salaire de 5 000 EUR, ainsi qu’un chômage
de 4 000 EUR. Il a touché son indemnité de départ et son préavis. Le tribunal a fixé une période de
référence de 5 mois après la fin du préavis. Pendant ces 5 mois, le salarié subira une perte de 1 000
EUR par mois, donc en 5 mois 5 000 EUR au total. Le cas échéant, il aura, en plus du
dédommagement matériel, encore un dédommagement pour dommage moral.
Il serait également possible que le tribunal fixe la période de référence non pas à partir de la fin du
préavis, mais à partir du licenciement. Exemple : 11 mois à partir du licenciement. Il faudra alors
tenir compte des six mois de préavis pendant lesquels le salarié aura encore été payé. Le
dédommagement matériel se fera en conséquent seulement sur cinq mois, comme dans le cas décrit
avant.

La question de la dispense de travail

La jurisprudence n’est pas très claire sur la question si le salarié est dispensé de travailler pendant
toute la période de préavis. Si on part de l’hypothèse que le salarié de travaille pas pendant la
période de préavis, il a également plus de temps pour chercher un nouvel emploi. Certains juges
fixent la période de référence à partir du licenciement, elle comprendra donc la période de préavis.
Le dommage matériel devra alors être calculé en prenant la différence entre la période de référence
totale moins le délai de préavis.

La possibilité de faire une transaction

Au Luxembourg, l’employeur est encore soumis au risque de recours de l’Etat. Il ne devra non
seulement indemniser le salarié, mais aussi l’Etat. Ce droit de l’Etat luxembourgeois n’existe que s’il
y a procédure judiciaire. Au cas contraire, l’Etat ne pourra pas revendiquer, à l’égard de l’employeur,
une quelconque indemnisation. Cela amène souvent l’employeur de s’efforcer de trouver un
arrangement à l’amiable avec le salarié licencié. Au lieu de se lancer dans une procédure judiciaire,
qui ne fera qu’enrichir les avocats, ils essaieront une solution entre eux. Un tel accord est
parfaitement faisable et, d’un point de vue juridique, le document signé dans ce cas par les parties
s’appelle « transaction ». C’est un contrat destiné à mettre un terme à un litige entre des parties,
respectivement d’éviter la naissance d’un litige. Dans le cadre d’une telle transaction, chacune des
parties fait des concessions. Une telle transaction exclut le recours de l’Etat, parce qu’il n’y aura pas
de procédure judiciaire. Elle diminue le risque de l’employeur dans le sens qu’il évitera des
revendications de la part de l’Etat. Certes, avec une procédure judiciaire, il aurait même pu s’en
sortir avec une situation plus avantageuse que lors de la transaction dans la relation avec l’employé.
Mais comme l’Etat aura probablement aussi droit à des indemnités, l’employeur devra alors payé
plus au total que dans le cas d’une transaction. Une transaction est, en fin de compte souvent
favorable pour les deux parties, et un tel accord est parfaitement valable.
La transaction doit être écrite et comporter des concessions des deux parties. Ainsi, elle pourra
parfaitement éviter une procédure judiciaire.
Pendant très longtemps, dans la jurisprudence, un problème se posait quant au moment où le salarié
avait commencé une action judiciaire, auquel cas l’Etat pourra intervenir. Pendant un certain temps,
on convenait de considérer que si lors de la procédure, les parties arrivent à trouver un accord, le
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procès s’arrête. En conséquent, l’Etat n’aura droit à rien du tout. Alternativement, on peut dire que
dès lors que le procès est engagé, on se trouve dans une situation avec trois parties (employeur,
salarié et Etat). La procédure ne pourra alors que se terminer avec un accord entre les trois. Il ne
sera plus possible de trouver un arrangement entre l’employeur et le salarié seuls. Il faudra
nécessairement que l’Etat intervienne dans la transaction, qui sera alors tripartite.
Actuellement, la jurisprudence a la tendance à trancher dans le sens que l’employeur et le salarié
peuvent s’arranger entre eux, ce qui met un terme au procès et exclura l’Etat lors d’un
licenciement avec préavis. En revanche, en ce qui concerne le licenciement avec effet
immédiat, il y aura obligatoirement intervention de l’Etat comme troisième partie. Il faudra
nécessairement une transaction tripartite. Si tel n’est pas le cas, la procédure n’est pas arrêtée,
mais elle devra être continuée jusqu’à ce qu’une décision judiciaire intervienne qui respecte tant les
droits du salarié que les droits de l’Etat. A moins que les parties se ravisent et terminent le procès
avec une transaction tripartite.
La raison de la différenciation est qu’un salarié licencié avec préavis a droit d’office à des indemnités
de chômage après l’écoulement de la période de préavis. Il suffit de s’inscrire auprès de l’Adem. Par
contre, le salarié licencié avec effet immédiat n’a pas droit au chômage. Pour pouvoir toucher des
indemnités, il devra les demander au président du tribunal. Il devra alors obligatoirement lancer une
procédure. En conséquent, la procédure doit être menée à terme, sauf arrangement entre les trois
parties.

Possibilité de réintégration du salarié dans l’entreprise

Lors d’un licenciement, le contrat de travail est rompu, et il reste rompu. Le tout se résout en
dommage et intérêts. Le salarié n’a pas droit à être réintégré.
Toutefois, l’art. L. 124-12 prévoit quand même la possibilité exceptionnelle d’envisager une
réintégration. Cette possibilité est soumise aux conditions suivantes :
1. Le licenciement doit être abusif. S’il est déclaré justifié, la question de réintégration du salarié
ne se pose pas.
2. Le salarié doit formuler une demande en réintégration.
3. Le tribunal doit être de l’avis que raisonnablement, rien ne s’oppose à une réintégration du
salarié.
Dans une telle hypothèse, le tribunal peut (mais il ne doit pas) suggérer à l’employeur d’accepter la
réintégration de l’employé. L’employeur peut (mais il n’y est pas obligé non plus) accepter la
réintégration du salarié. Si le tribunal a fait la suggestion, et que l’employeur l’ait accepté, le salarié
est réintégré et l’employeur est libéré de payer des dommages et intérêts pour licenciement abusif.
Si l’employeur refuse de réintégrer l’employé, il doit payer les dommages et intérêts pour
licenciement abusif plus une sanction parce qu’il n’a pas accepté la suggestion du tribunal. La
sanction supplémentaire correspond à un mois de salaire.

Irrégularité formelle du licenciement

On a déjà vu que la sanction, lors du licenciement du salarié par l’employeur, en cas d’absence
d’entretien préalable, est l’irrégularité formelle du licenciement. Si le licenciement est déclaré
abusif, le salarié aura droit aux dommages et intérêts dont on vient de parler. Quant au tribunal,
celui-ci ne s’occupera pas de l’existence d’une éventuelle irrégularité formelle. Par contre, si le
tribunal arrive à la conclusion que le licenciement n’est pas abusif, le salarié n’aura pas droit à des
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dommages et intérêts. La loi impose alors au tribunal de vérifier l’irrégularité formelle du
licenciement. S’il y a irrégularité formelle, l’employeur sera sanctionné. Il devra payer au salarié une
indemnité, qui s’élèvera à un mois de salaire au maximum.
Le licenciement abusif exclut l’examen de l’irrégularité formelle. Celle-ci n’est vérifiée que si le
licenciement n’est pas abusif.

Art. L. 124-13 – Résiliation d’un commun accord

Jusqu’à présent, on n’a vu que la résiliation unilatérale du contrat de travail. Il y a toujours eu


l’initiative de l’une des deux parties : soit, l’employeur a licencié le salarié, soit ce dernier a
démissionné.
Par contre, en cas de résiliation d’un commun accord du contrat de travail, les deux parties se sont
mises d’accord afin de mettre un terme à la relation de travail. La seule exigence de forme est alors
celle d’un écrit. Il faut deux originaux, autant qu’il y a de parties. Les parties sont libres de déterminer
le contenu de cet écrit. Ils peuvent notamment y prévoir le moment de la prise d’effet de la résiliation
d’un commun accord du contrat de travail. L’employeur peut aussi accorder une indemnité bénévole
au salarié.

Art. L. 125-1 – Décès

Lorsque l’employeur personne physique décède, le contrat de travail qu’il avait avec son salarié
s’arrête. Si on est en présence d’une entreprise qui fait faillite, il y a des règles particulières qui
déterminent les droits du salarié. Mais en tout état de cause, le contrat de travail se termine par la
faillite de l’employeur.
Bien sûr, le contrat de travail se termine également si le salarié décède, car il n’y a plus personne
pour exécuter son travail.

Art. L. 125-2 à L. 125-4 – Cessation de plein droit

Ces articles prévoient des hypothèses où le contrat de travail n’est ni résilié de manière unilatérale,
ni de commun accord, ni par le décès ou la faillite de l’une des parties. Le contrat de travail est résilié
de plein droit parce qu’intervient un événement particulier, qui suffit au législateur de considérer que
l’on met un terme au contrat de travail.

Déclaration d’inaptitude (art. L. 125-2)

Si le médecin du travail arrive à la conclusion que le salarié n’est pas apte pour le poste, le contrat
de travail se termine de plein droit.

Pension de vieillesse (art. L. 125-3)

Le contrat de travail se termine de plein droit le jour de l’attribution au salarié d’une pension de
vieillesse, et au plus tard à l’âge de 65 ans.

Pension d’invalidité (art. L. 125-4.1)

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Le contrat de travail se termine le jour de l’attribution au salarié d’une pension d’invalidité. Dans cette
hypothèse, le salarié ne peut plus travailler du tout, et il touche une pension d’invalidité.

Epuisement des droits du salarié par indemnité pécuniaire de maladie (art. L.


125-4.2)

Un salarié malade touche une indemnité pécuniaire de maladie (équivalente au salaire). Cette
indemnité est, dans une première phase, payée par l’employeur, pour ensuite être prise en charge
par la CNS. Le code de la sécurité sociale prévoit une limite dans le temps pour toucher les
indemnités pécuniaires de maladie. Le maximum d’indemnités pécuniaires de maladie est fixé à 52
semaines sur une période de 104 semaines. Il ne faut pas nécessairement 52 semaines d’affilé. En
cas d’épuisement des indemnités pécuniaires de maladie, la CNS en informe le salarié et
l’employeur par voie de courrier. Le contrat de travail est alors résilié de plein droit, ce qui libère
l’employeur de toute obligation envers le salarié.

Reclassement (art. L. 125-4.3)

Le contrat de travail est résilié de plein droit en cas de reclassement externe du salarié. Le contrat
de travail avec l’employeur actuel est résilié, le salarié est pris à charge par l’ADEM jusqu’à ce qu’on
lui ait trouvé un nouvel emploi dans une autre entreprise.

Dispositions spécifiques des travailleurs handicapés (art. L. 125-4 (4) et (5))

Ces deux paragraphes visent l’hypothèse si un travailleur handicapé n’est plus reconnu comme
handicapé et si la personne en question est obligée de se réorienter vers le marché de travail
ordinaire par la Commission d’orientation ou par les juridictions compétentes.

UV6 – Droit du travail et de la sécurité


sociale – Cours 1 Droit de la sécurité
sociale
Introduction
Procédure non contentieuse : c’est la procédure qui se déroule non pas devant les juridictions, mais
devant les administrations. Si ces voies de recours non contentieuses ont toutes été utilisées, on se
dirige vers la procédure contentieuse où on saisit une juridiction spéciale qui est compétente dans
ce domaine.
Travailleurs migrants : tous les travailleurs, à part les frontaliers, qui ont effectué pendant plusieurs
années des activités professionnelles dans divers Etats-membres de l’Union européenne.

Bibliographie

 Code de la sécurité sociale


 Loi sur le chômage (qui ne se trouve pas dans le code, mais dans son annexe)

41
 « Droit de la sécurité sociale au Luxembourg », publié par l’Inspection de la sécurité sociale
(2010)

Informations sur l’examen


 Questions théoriques et cas pratiques
 Attention particulière à la législation européenne
 Document autorisé à l’examen : code de la sécurité sociale

1) Historique et définition de la sécurité sociale

1.1. Définition

La définition de la sécurité sociale doit être vue conjointement avec celle de certaines notions
voisines, comme la protection sociale et l’aide sociale.
La protection sociale est la notion la plus large, car elle couvre aussi la notion de sécurité sociale
et celle de l’aide sociale. La sécurité sociale, ensemble avec l’aide sociale, est ainsi partie de la
protection sociale. Une définition internationalement reconnue de la protection sociale est la
suivante : « toute intervention d’organismes publics ou privés destinée à alléger la charge que
représente la survenance de certains risques ou besoins pour les ménages et les particuliers à
condition qu’elle n’ait pas de contrepartie et ne relève pas de dispositions personnelles ».
L’aide sociale (cf. loi 18 décembre 2009 organisant l’aide sociale) est définie dans l’article 2 de la
loi du 18 décembre 2009. L’aide sociale assure aux personnes dans le besoin et à leurs familles
l’accès aux biens et aux services adaptés à leur situation particulière afin de les aider à acquérir ou
à préserver leur autonomie. Elle intervient à titre subsidiaire et peut compléter les mesures sociales
et les prestations financières prévues par d’autres lois et règlements, que le bénéficiaire est tenu
d’épuiser.
Si elle intervient « à titre subsidiaire » veut dire qu’elle est le dernier filet de secours social.
Exemple : le revenu minimum garanti (RMG) n’est pas un revenu que le bénéficiaire reçoit tel quel.
Si le revenu d’une personne n’est clairement pas suffisant pour mener une vie en dignité humaine
et avec une certaine autonomie, l’Etat va lui payer un revenu complémentaire, dont les règles sont
régies par la loi, pour que cette personne ou famille puisse vivre une vie digne. Si dans une famille,
le père est au chômage, la mère ne travaille pas et le père, par surcroît, est dans une situation
d’incapacité de travail, il touche des indemnités de maladie/d’incapacité. Ces indemnités ne suffisent
probablement pas à subvenir aux besoins de sa famille. Dans ce cas-là, l’aide sociale va permettre
à cette famille, subsidiairement, donc en dernier recours en quelque sorte, de survivre grâce à une
aide au logement, une aide à l’enfance, une assistance sociale et médicale etc.
La loi précitée n’a pas introduit l’aide sociale pour la première fois au Luxembourg, c’est pourquoi
elle est intitulée loi « organisant » l’aide sociale, et non pas « créant » la sécurité sociale. La loi
organise l’aide sociale et reconnaît, ce qui constitue une nouveauté, le droit à l’aide sociale. Avant,
dans beaucoup de textes, surtout internationaux, on reconnaissait déjà les droits sociaux
fondamentaux, comme le droit à la sécurité sociale, le droit à la protection et à l’aide sociales. Ce
droit se retrouve maintenant aussi dans les dispositions légales luxembourgeoises.
Le droit de la sécurité sociale est l’ensemble des normes juridiques visant à protéger tout ou partie
de la population contre les conséquences de certains événements qualifiés de risques sociaux qui
42
sont la maladie, la maternité, l’invalidité, la vieillesse, le décès, l’accident du travail et la maladie
professionnelle, le chômage et les charges familiales.
La protection sociale au niveau européen est également très importante. Elle est considérée comme
l’un des piliers du modèle social européen. Le modèle sociale européen peut être distingué
d’autres modèles ou systèmes sociaux (ou moins sociaux) qui ne sont pas européens, comme par
exemple le système américain. Aux Etats-Unis, le système social fonctionne tout à fait différemment
qu’en Europe. Le modèle européen est basé sur le principe de la solidarité, que ne connaissent pas
(ou ne veulent pas connaître) les Etats-Unis pour des raisons politiques, culturelles, sociales etc.
Quels sont les autres piliers du modèle social européen ?
 Un droit du travail protecteur du salarié
 Un système de négociations collectives
 Existence d’un certain interventionnisme de l’Etat
Droit social couvre aussi bien le droit de la sécurité sociale que le droit du travail.
Le droit du travail contient les règles juridiques qui règlent le rapport entre d’une part l’employeur,
et d’autre part les salariés. Le droit de la sécurité sociale règle surtout le rapport entre l’Etat, les
institutions de la sécurité sociale et les affiliés. Il y a des domaines qui font partie des deux droits.
Le chômage fait partie de la sécurité sociale parce que le chômage est un risque social. Il touche
également au droit du travail. Se posent les problèmes de perte du travail qui est réglé par le droit
du travail.

1.2. Historique de la sécurité sociale

La sécurité sociale telle qu’elle existe aujourd’hui n’est pas très ancienne, elle est âgée d’une bonne
centaine d’années. Le besoin de sécurité sociale est venu avec l’industrialisation de notre société.
L’industrialisation a commencé au milieu du 19e siècle, surtout dans le textile, puis dans la sidérurgie.
Il y a eu de plus en plus d’ouvriers travaillant dans ces industries dans des conditions de travail peu
confortables si on les compare avec celles d’aujourd’hui. Tout le monde, même les employeurs,
reconnaissaient qu’il y avait des limites physiques pour les travailleurs, et il fallait encadrer tout cela
et offrir certaines protections aux salariés. Les employeurs n’avaient certes pas mauvaise
conscience envers les ouvriers, mais ils voulaient faire en sorte qu’ils restent en bonne santé et
puissent travailler plus longtemps. Au début, il y avait une sorte de mutualités, soit dans une ou
plusieurs entreprises ou un ou plusieurs secteurs qui se sont organisés entre eux pour protéger leurs
ouvriers. Au début étaient seulement visés les ouvriers, les personnes qui exerçaient une activité
salariée, et personne d’autre.
C’est donc avec l’industrialisation que la sécurité sociale s’est développée. Les bases de notre
système de sécurité sociale ont été établies en Allemagne. En Allemagne, les lois de Bismarck sur
les assurances sociales constituent le fondement de notre système de sécurité sociale actuelle.
Bismarck a fait voter 3 lois dans l’espace de 6 ans :
1. La loi sur l’assurance maladie en 1883
2. La loi sur les accidents de travail en 1884
3. La loi sur l’assurance invalidité et vieillesse en 1889
43
Ces trois lois étaient, en Europe, les premières dispositions légales existant en la matière. Ces lois
ont été développées, modifiées et revues ultérieurement. Leur champ d’application a été limité aux
ouvriers de l’industrie dont les salaires ont été inférieurs à un certain plafond. Initialement, ces lois
avaient un champ d’application très limité. Après, le champ d’application de ces lois a été élargi et
les pays voisins ont adopté des lois similaires (Autriche, Pays-Bas, Luxembourg). Le Luxembourg
faisait partie du « Deutscher Zollverein », de l’union douanière avec l’Allemagne. La politique au
Luxembourg suivait donc de très près ce qui se passait en Allemagne, notamment en matière de
législation sociale. Les mêmes problèmes liés à l’industrialisation que connut l’Allemagne se
posaient aussi au Luxembourg, dans les mines, la sidérurgie etc. Les sidérurgies au Luxembourg
florissaient et les besoins en protection sociale étaient les mêmes. Au lieu de réinventer la roue, le
Luxembourg a plus ou moins copié les lois de Bismarck.
Les lois de Bismarck constituent donc le modèle de base de la sécurité sociale. Après, il y a eu un
deuxième élan qui a également très fortement contribué à la sécurité sociale en Europe. C’est le
rapport « Beveridge ». Un lord anglais avait publié en 1942 un rapport sous le titre « social insurance
and allied services ». Le rapport était destiné à fournir au gouvernement anglais des
recommandations en vue d’améliorer le système des assurances sociales. Il visait à instaurer un
système de protection à vocation universelle s’appliquant à l’ensemble des citoyens et des
risques sociaux. Contrairement aux lois Bismarck, qui ne visaient que les ouvriers de l’industrie, et
encore seulement ceux qui gagnaient un revenu en-dessous d’un certain plafond, le rapport
Beveridge destinait l’ensemble des citoyens. Le rapport visait l’ensemble des citoyens et des risques
sociaux. Ce rapport a directement inspiré la législation anglaise de 1945 à 1948, et donc ensemble
avec les lois de Bismarck, le rapport de Beveridge a fortement contribué à l’élaboration internationale
de la doctrine sur la sécurité sociale et à la reconnaissance de celle-ci comme composante
essentielle de la justice sociale et des droits de l’homme. L’Europe, l’Allemagne d’une part et
l’Angleterre d’autre part, a fortement contribué à développer la sécurité sociale, d’abord en Europe,
puis dans le Monde. Le texte du rapport de Beveridge a été repris par la convention de l’Organisation
Internationale du Travail (OIT) et par d’autres conventions internationales.

1.3. Sources européennes et internationales de la sécurité sociale

Après ces deux textes de base, il y a eu d’autres textes d’origine européenne et internationale :
 la déclaration universelle des Droits de l’Homme (10 décembre 1948) : art. 22, toute
personne en tant que membre de la société a droit à la sécurité sociale ;
 convention de l’OIT sur la sécurité sociale (interdiction du travail de nuit des femmes, du
travail des enfants dans les premières conventions de l’OIT) ;
 charte sociale européenne du Conseil de l’Europe qui consacre de nouveau le droit à la
sécurité sociale ;
 différents traités européens qui consacrent le droit à la sécurité sociale et donnent certains
pouvoirs (quoique limités) en matière de sécurité sociale à certaines organisations
européennes ;
 charte communautaire des droits fondamentaux ;
 le nouveau traité de l’Union européenne qui introduit la charte des droits fondamentaux de
l’Union au sein du traité lui-même. La charte a été un texte de référence auparavant, un texte
politique reconnaissant un droit à la sécurité et la protection sociales etc., ce texte fait
maintenant partie intégrante du droit communautaire. Toutes les juridictions européennes et
nationales peuvent maintenant se baser sur ces textes, sur ces grands principes des droits
44
sociaux fondamentaux lorsqu’elles prennent des décisions. En matière de législation dans le
domaine de la sécurité sociale des travailleurs migrants (travailleurs se déplaçant au sein de
l’Union européenne), jusqu’à l’adoption du nouveau traité, il y avait une obligation de vote à
l’unanimité des pays membres en particulier pour les dispositions légales en matière de
sécurité sociale sur les travailleurs migrants. Le nouveau traité a abandonné cette obligation
de l’unanimité et l’a remplacée par un vote à la majorité qualifiée. Désormais, les dispositions
en matière des travailleurs migrants peuvent être votées à la majorité qualifiée. Ce sont deux
grands avantages introduits par le nouveau traité de l’Union européenne en matière de
sécurité sociale.

1.4. Sources luxembourgeoises de la sécurité sociale

 La constitution qui parle elle aussi de la sécurité sociale comme étant un droit
 En 1876 et 1877 les premières réglementations sur le travail des femmes et des enfants
 En 1891, il y a que la création d’un cadre légal pour les sociétés de secours mutuel
 Loi sur l’assurance maladie en 1901 (inspirée de Bismarck)
 Loi sur l’assurance accident en 1902 (inspirée de Bismarck)
 La loi créant une inspection du travail (aujourd’hui l’inspection du travail et des mines), qui
est censée veiller au respect du droit du travail notamment par les employeurs (1912)
 Loi sur l’assurance invalidité (1911)
 1925 : Code des assurances sociales, précurseur du code de la sécurité sociale actuel
 2008 : une loi a changé l’intitulé du Code des assurances sociales, et l’a rebaptisé Code de
la sécurité sociale
 Il a une multitude de lois et de règlements grand-ducaux qui ne sont pas intégrés dans le
Code lui-même (ex. la loi sur le chômage, la loi sur la mutualité des employeurs, la loi sur les
juridictions sociales etc.)
 Règlements européens (transposées automatiquement en droit national, contrairement aux
directives)
 Conventions bilatérales (si le pays de détachement n’est pas membre de l’Union
européenne, le règlement européen ne vaut rien, il faut alors voir si le Luxembourg n’a pas
signé de convention bilatérale en matière de sécurité sociale avec le pays en question), avec
le Canada, les Etats-Unis et d’autres pays

1.5. L’avenir de la sécurité sociale

Quels sont les facteurs déterminants de la sécurité sociale ?


1. Le chômage, car il touche à la fois les recettes (moins d’impôts si beaucoup de chômage) et
les dépenses (indemnités de chômage, dépenses d’aide sociale) de la sécurité sociale
2. La pauvreté, souvent liée au chômage, avec une fréquence surprenante de gens qui vivent
près du seuil de pauvreté au Luxembourg
3. L’augmentation des dépenses de santé va alourdir les finances de la sécurité sociale,
notamment les coûts de nouveaux traitements médicaux, de la recherche, de nouvelles

45
maladies (liées au stress, nouveaux virus), de maladies liées à la pollution, du vieillissement
de la population
4. Augmentation de la proportion des personnes âgées et très âgées (plus de 80 ans) dans la
population totale, avec dégradation du rapport entre les personnes cotisantes et les
retraitées. Jusqu’à maintenant, ce rapport a été de 5 cotisants par retraité, mais dans le futur,
cela deviendra de plus en plus problématique, car il y aura de plus en plus de retraités et
peut-être un jour, on aura autant de retraités que de cotisants
Quelles sont les solutions ?
1. Augmentation de l’âge de départ à la retraite (au Lux, l’âge restera de 65 ans, mais on
va diminuer la pension de ceux qui partent en retraite avant)
2. Régimes de pension complémentaires : (plusieurs piliers de la pension pour permettre
des pensions complémentaires) plans de pension complémentaires des sociétés
3. Augmentation des cotisations
4. Cotisations spéciales, par exemple sur la valeur ajoutée des entreprises (critiques disent
que cela va réduire la compétitivité des entreprises, que cela va alourdir les coûts des
entreprises), ou une « TVA sociale », prendre une partie de la TVA pour financer la
sécurité sociale (critiques disent que cela va créer des distorsions et nuire à la
compétitivité des entreprises, ou encore un écotaxe basée sur les émissions de dioxyde
de carbone

UV6 – Droit du travail et de la sécurité


sociale – Cours 2 Droit de la sécurité
sociale
2) Organisation de la Sécurité Sociale Luxembourgeoise

2.1. Principes de l’organisation

Il y a deux grands principes qui distinguent l’administration sociale d’autres administrations ou


institutions luxembourgeoises.

2.1.1. Le principe de l’autonomie financière et administrative

Les institutions de la Sécurité Sociale luxembourgeoise disposent toutes d’un patrimoine qui garantit
à lui seul leurs engagements. Elles déposent ce patrimoine auprès d’instituts financiers.
Les institutions de la Sécurité Sociale ont une grande autonomie dans la gestion de leurs avoirs, ce
qui ne veut pas dire qu’elles peuvent faire tout ce qu’elles veulent avec leur argent, qui provient
directement ou indirectement des cotisations. Ces institutions sont placées sous la surveillance du
gouvernement, du ministre ayant sous sa tutelle de la Sécurité Sociale dans la plupart des
46
cas (mais pas toujours). Dans certains cas de figure, le ministère de tutelle est celui du travail,
par exemple lorsqu’il s’agit des questions de préretraite et d’indemnités de chômage. De même,
pour les prestations familiales, ce ne sont ni le ministère du travail, ni celui de la Sécurité Sociale,
mais c’est le ministère de la famille qui est le ministère de tutelle.

2.1.2. Le principe de la gestion par les partenaires sociaux

Qui sont les partenaires sociaux ? Ce sont les employeurs et leurs représentants d’un côté et les
employés et leurs représentants (les syndicats) de l’autre.
Les institutions de la Sécurité Sociale sont gérées par des organes élus composés par des
représentants des employeurs et des assurés dans le régime des salariés et des
représentants des seuls assurés dans les régimes des indépendants. Dans les cas des
indépendants, il n’est pas pertinent de parler de « salariés », puisqu’un indépendant est en même
temps salarié et employeur.
Dans les organes des différentes institutions, par exemple les comités de directeurs, on va retrouver
cette parité de présence des partenaires sociaux en ce qui concerne leur composition.
La gestion des institutions de la Sécurité Sociale se fait essentiellement par deux organes.
1. En bas, on a une Assemblée Générale (la désignation dépend de la terminologie choisie),
une Commission ou une Délégation, cela dépend de l’institution. Exemple : dans
l’assurance accident, on a une Assemblé Générale.
2. En haut de la pyramide, il y a un Comité des Directeurs ou un Conseil d’Administration.
La dénomination de cet organe peut changer, mais les attributions sont toujours les mêmes.
2.2. Structure de la Sécurité Sociale

Il faut faire la distinction entre quatre types d’organes ou d’institutions.

1. Les institutions de la Sécurité Sociale


Elles sont spécialisées dans un certain domaine, comme la santé, la dépendance, assurance
accident, maladie….
2. Les administrations de la Sécurité Sociale
Celles-ci sont plus généralistes que les institutions, elles s’occupent, comme leur nom le dit,
de l’administration de la Sécurité Sociale.
3. Les organes consultatifs de la Sécurité Sociale
Les organes sont appelés à donner un avis aux ministres de tutelle respectifs, normalement
le ministre de la Sécurité Sociale.
4. Les organismes compétents en matière d’assistance sociale

2.2.1. Les institutions de la Sécurité Sociale

1. La Caisse Nationale de Santé


Elle est, comme son nom l’indique, compétente dans la gestion de l’assurance maladie et
maternité d’une part, et dans la gestion de l’assurance dépendance d’autre part. L’assurance
dépendance n’est pas très ancienne. Elle date de la fin des années 90. Une telle assurance
n’existe pas dans tous les pays européens. Elle existe en Allemagne (Pflegeversicherung),
47
qui a d’ailleurs inspiré le système luxembourgeois. Norbert Blüm, ministre de travail sous le
chancelier Kohl, a introduit cette assurance en Allemagne. En France, on réfléchit à la mise
en place d’une assurance dépendance. Il faut cependant songer aux coûts de cette
assurance, car il faut des cotisations pour la financer. C’est un enjeu politique important.
L’assurance dépendance est importante à cause du vieillissement progressif de la
population. Qui dit vieillissement de la population, dit sensibilité accrue des personnes les
plus âgées, qui risquent de tomber malades plus souvent. Elles sont dépendantes
physiquement, voire mentalement dans certains cas. Au Luxembourg, il n’existait que très
peu d’institutions pour ces personnes-là, comme des maisons de soin, avant l’introduction
de l’assurance dépendance. Les entreprises « help » et « Hëllëf doheem » font partie de
l’assurance dépendance où des informiers/ières se déplacent chez des personnes
dépendantes pour les aider dans les actes de la vie quotidienne qu’elles ne savent plus faire
elles-mêmes.
Au Luxembourg, on voit déjà une multiplication de la construction de maisons de soin.
Jusqu’à présent, il y a en effet eu un manque d’infrastructures dans ce domaine.
La Caisse Nationale de Santé, telle qu’elle existe aujourd’hui, est le fruit d’une fusion entre
l’ancienne Caisse de Maladie des Employés privés (CMEP) et l’ancienne Caisse de Maladie
des Ouvriers. Il y a quelques années, il existait encore la distinction entre les employés privés
(« white collar workers ») et les ouvriers (« blue collar workers »).
C’était une sorte de petite révolution. On fusionnait les deux statuts. Les différences entre
les deux groupes de travailleurs étaient considérées comme injustifiées, voire
discriminatoires. Aujourd’hui, le travailleur manuel en tant que tel n’existe pratiquement plus.
Cela est dû à l’avancement des technologies, ce qui impose aussi aux ouvriers de maîtrise
certains instruments techniques.
Ce statut unique a eu des conséquences en matière de droit de travail, par exemple pour le
maintien du salaire pendant les premiers 77 jours de la maladie et la protection contre le
licenciement etc. Le statut unique a aboli les différences de traitement dans ces deux
domaines.
En matière de sécurité sociale, les cotisations et les charges sociales étaient différentes
selon qu’on était employé privé ou ouvrier. Comme le risque de se blesser était beaucoup
plus élevé pour l’ouvrier, le pourcentage de charges sociales dans l’assurance maladie et
accident était beaucoup plus élevé pour lui que pour l’employé privé. Or, si on veut fusionner
les deux statuts, il faut harmoniser non seulement de droit du travail, mais également celui
de la Sécurité Sociale. Dans ce dernier domaine, il fallait notamment harmoniser les charges
sociales. Sur ce point, il y a eu des discussions politico-syndicales assez violentes et
finalement, on a abouti à un accord. Le taux commun ainsi déterminé implique pour les
ouvriers que leur taux de cotisation va baisser par rapport à celui qui existait avant. Les
employés privés, par contre, doivent payer plus de cotisations sociales qu’avant.
Au niveau structurel, le statut unique a également entraîné des modifications. Différentes
caisses ont été abolies, parce qu’elles faisaient encore la différence entre ouvriers et
employés privés.
Avant, il y avait également l’Union des Caisses de maladie, qui a été abolie et remplacée par
la Caisse Nationale de Santé.
La CNS a un grand nombre d’attributions. Elle est gérée par un comité directeur. Il appartient
à la caisse, respectivement au comité, de statuer sur le budget annuel global de l’assurance
maladie/maternité. Le comité a aussi comme charge de fixer ou refixer le taux de cotisation.
48
Cela est important, car c’est la cotisation qui « fait vivre » la caisse. Il établit les statuts réglant
tout ce qui concerne les prestations. Il y a les prestations en nature, qui sont les soins, les
médicaments. Les prestations en liquide sont les indemnités de maladie, la prise en charge
de la rémunération en cas de maladie du salarié. Bien entendu, la CNS doit toujours
respecter les lois et règlements applicables en la matière lors de la rédaction de ses statuts.
En ce qui concerne l’assurance dépendance, la principale mission de la CNS est de prendre
des décisions individuelles en matière de prestations.
2. La mutualité des employeurs
Cette institution est aussi très récente. Elle est le fruit du statut unique. Avant la réforme,
lorsqu’un employé tombait malade, l’employeur devait continuer à payer son salaire pendant
le mois du jour de la survenance de la maladie et pendant les trois mois suivants. En cas
d’absence plus longue de l’employé, c’était la Caisse de maladie des employés privés qui
reprenait la charge de payer des indemnités pécuniaires de maladie à l’employé. Pour les
ouvriers, c’était différent. Là, la Caisse de maladie intervenait dès le premier jour d’absence
pour maladie. Il n’y avait pas d’obligation de maintien du salaire pour l’employeur vis-à-vis
des ouvriers. La seule obligation de l’employeur était de payer des avances, qui lui étaient
remboursées par la Caisse de maladie des ouvriers. L’intervention pécuniaire de la Caisse
était donc indirecte, mais complète.
Avec la fusion, tout cela a changé, et on est de nouveau en présence d’un sujet à débats
intenses au niveau politico-syndical. En effet, les employeurs d’ouvriers ne voulaient pas
renoncer à la prise en charge immédiate des salaires des travailleurs manuels par la Caisse.
La solution finale prenait alors la forme suivante : l’obligation de maintien du salaire vaut pour
tous, employés et ouvriers. Le salaire doit être maintenu pendant au moins 77 jours
d’absence continue pour maladie. Pour les (anciens) ouvriers, cela impliquait beaucoup de
changement, car l’intervention de la caisse, en cas de maladie, était fortement retardée par
rapport à l’ancien système. Pour pallier à cette nouvelle situation, les partenaires sociaux ont
créé la Mutualité des employeurs. Cette Mutualité est un fonds qui est, en grande partie,
financé par les employeurs, mais également par d’autres sources, notamment l’Etat. Son but
est de rembourser à l’employeur, qui est obligé à continuer à payer le salaire pendant 77
jours minimum, 80 % de la rémunération qui a été versée pendant cette période au salarié
absent pour cause de maladie. Dans certains cas de figure, la loi prévoit même un
remboursement à 100 %, par exemple en cas de congé pour des raisons familiales, congé
d’accompagnement en fin de vie et pendant la période d’essai. Cette caisse a surtout comme
but d’alléger la charge pour les employeurs qui emploient beaucoup de salariés du type
anciennement appelé ouvrier.
Qui dit Mutualité, fonds et argent dit aussi financement. La Mutualité des Employeurs est
financée par ceux-ci sur base d’un taux de cotisation, qui peut prendre quatre niveaux
différents. Le taux concret choisi varie en fonction de 4 classes de risques. Le critère de
détermination est le taux d’absentéisme des salariés dans les entreprises. Le législateur a
donc créé quatre classes de risque, et à chacune d’entre elles est lié un taux de cotisation
spécifique. Dans la première classe, la classe un, le taux de cotisation est le moins élevé, et
il augmente jusqu’à la classe quatre. Chaque entreprise reçoit tous les ans un bilan de la
Mutualité des Employeurs, qui, ensemble avec la CNS, fait les statistiques sur l’absentéisme
dans l’entreprise. Elle utilise les certificats de maladie comme base pour collecter les
statistiques. Plus il y a d’absentéisme dans une entreprise, plus élevé sera son taux de
cotisation. Ce moyen de financement est celui qui est le plus important pour cette Mutualité.
Puis, il y a encore l’intervention de l’Etat. De plus, jusqu’au 31 décembre 2013 au moins,

49
de ce que l’on appelle « différentiel du taux des cotisations ouvrières » pendant une
période transitoire de cinq ans. Le statut unique est bénéfique pour les ouvriers, dans le
sens qu’il a contribué à faire baisser leurs charges sociales. Or, à ce moment-là, les
partenaires sociaux ont pris la décision qu’en final, ce ne seraient pas les anciens ouvriers
qui bénéficieraient de cette diminution des taux, mais bien les employeurs.
3. Caisse Nationale d’Assurance-pension
Là aussi, avant l’introduction du statut unique, il existait bel et bien des caisses de pension,
mais sous d’autres dénominations. De plus, les ouvriers et les employés privés avaient une
caisse différente. Après la fusion des deux régimes, une caisse commune a vu le jour sous
le nom « Caisse Nationale d’Assurance-pension ». Celle-ci est placée sous la responsabilité
de son propre Comité directeur, tout comme la CNS. La caisse a de nombreuses attributions,
dont la plus importante est de statuer, dans les limites des lois et règlements, sur les
prestations légales en matière de pensions.
4. Assurance accident
Cette assurance gère, comme son nom le dit, l’assurance accident. Elle comporte deux
sections : une section industrielle (AAI) et une section agricole et forestière (AAA).
Chacune de ces deux sections est administrée par une Assemblée générale et un Comité
Directeur. Ici, on les deux, la première est en bas, le dernier en haut. Pour la CNS et la
CNAP, il n’y pas d’Assemblée générale. Les prédécesseurs de ces deux caisses avaient
par contre les deux organes.
Il y a grosso modo trois risques qui sont concernés par l’assurance accident : l’accident de
travail proprement dit, l’accident de trajet et les maladies professionnelles.
5. La Caisse Nationale des Prestations Familiales (CNPF)
Elle est compétente pour la gestion des allocations familiales, des allocations de naissance
et de maternité, des allocations d’éducation, de rentrée scolaire ainsi que du congé parental.
6. Centre Commun de la Sécurité Sociale (CCSS)
Il s’agit du « cerveau » de la Sécurité Sociale. C’est un centre d’informatique, d’affiliation et
de perception des cotisations. Il est commun à toutes les institutions de la Sécurité Sociale
citées jusqu’à présent. Il est chargé notamment de l’affiliation des entrées. Quand une
entreprise embauche un nouveau salarié, il faut faire une déclaration d’entrée. Ce sont des
formulaires spécifiques, qui vont être envoyés dans un délai spécifique au CCSS. Il faut
également faire une désaffiliation, c’est-à-dire une déclaration de sortie des travailleurs
auprès de ce centre le cas échéant. Il s’occupe également de la perception et du
recouvrement forcé des cotisations, légalement dues aux chambres professionnelles.
En outre, il organise la collecte et le traitement des données informatiques pour les
différentes institutions de la Sécurité Sociale. Ainsi, le CCSS constitue le premier point de
contact entre l’affilié et la Sécurité Sociale. Il va classer le travailleur dans la catégorie dans
laquelle il appartient : travailleur dépendant ou indépendant, travailleur agricole, commerçant
etc.

2.2.2. Les administrations de la Sécurité Sociale

1. Inspection Générale de la Sécurité Sociale (IGSS)


Elle contribue à l’élaboration des mesures législatives et réglementaires en matière de
Sécurité Sociale sur demande du gouvernement ou du ministre de la Sécurité Sociale. C’est
50
un « think-tank », elle a des pouvoirs plus généraux. Elle doit assurer le contrôle des
institutions sociales. Sa mission la plus importante est toutefois de recueillir les données
statistiques en matière de Sécurité Sociale nécessaires tant sur le plan national que
sur le plan international. Ces statistiques jouent un rôle important dans les changements
de lois et dans la réflexion sur les solutions à apporter aux problèmes qui se posent en
matière de Sécurité Sociale.
L’IGSS représente la Sécurité Sociale du Luxembourg sur le plan européen et international.
Elle travaille sur les textes européens sur la Sécurité sociale et sur des conventions
bilatérales en cette matière.
Elle est aussi l’organisme de tutelle pour les plans de pensions complémentaires. Si une
entreprise veut mettre en place ou modifier un tel plan, il faut le visa de l’IGSS. Cette
compétence de l’IGSS est la suite d’une loi de la fin des années 90.
2. Contrôle Médical de la Sécurité Sociale (CMSS)
Sa principale attribution est la constatation de l’incapacité de travail et, le cas échéant, la
fixation de son degré provisoire ou définitif par rapport à la capacité de travail normale.
Elle est également responsable des examens de contrôle périodiques en relation avec
l’incapacité de travail, l’hospitalisation et les cures. Elle autorise la prise en charge des
traitements médicaux, médico-dentaires et paramédicaux pour autant qu’elle est prescrite
par les lois. Par exemple, en cas de soins dentaires, il faut envoyer à la CNS de devis, et
c’est le CMSS qui va décider de la prise en charge et de son taux du traitement en question.
En ce qui concerne le contrôle des incapacités de travail, ils peuvent être exercés par le
CMSS, même pendant la période de maintien du salaire. Cela aussi a été une solution de
compromis, car les employeurs, lors des négociations du statut unique, ont dit qu’à l’égard
de leur obligation de maintenir le salaire pendant 77 jours, même s’il y a remboursement de
80 %, il faut un certain contrôle. On a alors abouti à un accord, prévoyant que le CMSS sera
déjà compétent pendant la période de 77 jours. Pendant cette période, il n’y a pas de
préjudice pour la Trésorerie de l’Etat, parce que la caisse n’a pas encore pris en charge le
salaire de l’employé. Indépendamment de cela, le CMSS a déjà la compétence de contrôle
pour les incapacités de travail qui sont indemnisées par l’employeur.
3. Cellule d’évaluation et d’orientation
Sa mission principale est de constater l’état de dépendance et de déterminer les aides et les
soins requis.
4. Administration de l’Emploi (ADEM)
C’est le service de prestations de chômage et de préretraites. Elle a également différentes
autres missions, par exemple la surveillance de la situation et de l’évolution du marché de
l’emploi. Elle doit organiser le recrutement des travailleurs d’origine étrangère, notamment
de ceux qui proviennent de pays hors de l’Union européenne.
Une autre de ses responsabilités inclut l’orientation professionnelle des jeunes salariés, le
recrutement et l’emploi des travailleurs handicapés et le reclassement de travailleurs à
capacité de travail réduite. Cette dernière catégorie est composée de personnes qui ne sont
pas suffisamment malades pour être déclarées invalides, mais qui ne sont pas non plus aptes
à exercer leur dernier poste de travail. Pour ces personnes, il existe deux procédures : le
reclassement interne et externe. Un reclassement interne est une réaffectation de ces
personnes par l’employeur au sein de son entreprise à des postes différents, à des conditions
différentes. Le suivi de financement d’une telle mesure est faute par l’ADEM. Le
51
reclassement externe a lieu parce que l’employeur n’a pas l’obligation de reclasser la
personne. Cette dernière sera alors prise en charge par l’ADEM de la même manière que
les demandeurs d’emploi au niveau financier. Elle touchera un revenu de remplacement,
mais sans être apte au marché de travail puisqu’elle est incapable d’exercer leur travail à
100 %. Cette personne se retrouvera sur une liste de l’ADEM pendant plusieurs années,
parfois même jusqu’au moment où elle a droit à une pension de vieillesse anticipée.

2.2.3. Les organes consultatifs de la Sécurité Sociale

1. Comité quadripartite
Il est convoqué annuellement par le Ministre de la Sécurité Sociale. Ce comité réunit le
gouvernement, représenté par les Ministres de la Sécurité Sociale, de la Santé et des
Finances, les représentants des organisations professionnelles les plus représentatives des
salariés (syndicats), les représentants professionnels des employeurs et les groupements
professionnels signataires des conventions en matière de Sécurité Sociale (médecins dans
les hôpitaux). Le comité est censé examiner l’évolution des recettes et des dépenses en
matière de santé et proposer des mesures à prendre sur le plan légal, réglementaire
conventionnel ou statutaire dans le domaine de l’assurance maladie. Il peut également
proposer toute autre mesure destinée à améliorer l’efficacité du système de santé au
Luxembourg. C’est donc un comité consultatif, qui est convoqué annuellement par le Ministre
de la Sécurité Sociale.
2. Commission consultative de l’assurance dépendance
Elle donne des conseils et des avis en matière d’assurance dépendance au Ministre
compétent, c’est-à-dire celui de la Sécurité Sociale.
3. Commission de qualité des prestations
Elle a pour mission d’élaborer des propositions de lignes directrices et de standards de
référence, notamment en matière de qualité des aides et des soins.
4. Action concertée de l’assurance dépendance
Ces deux derniers organes ont aussi un caractère consultatif. Leur mission est de rendre des avis,
soit annuellement, soit sur demande du Ministre.

2.2.4. Les organismes compétents en matière d’assistance sociale

1. Fonds national de solidarité


Il a pour vocation s’assurer l’exécution des obligations définies par la loi en matière de RMG.
2. Service national d’action sociale
Il a également certaines attributions en matière de l’aide sociale.
3. Services régionaux d’action sociale
Ces services sont utiles parce qu’ils permettent d’être proches des personnes qui sont dans
une situation de besoin.
4. Offices sociaux
On les trouve dans les grandes villes.

52
3) Personnes protégées par la Sécurité Sociale
Il faut faire une distinction entre les personnes qui sont protégées parce qu’elles ont un statut de
travailleur (on n’inclut pas les fonctionnaires dans cette catégorie de personnes) et celles que l’on
peut appeler les co-affiliés. Ces dernières personnes bénéficient de droits dérivés parce que leur
conjoint(e) ou leur(s) parent(s) sont des affiliés à titre de travailleur, et elles sont alors également
protégées par la Sécurité Sociale. Les enfants à charge, même ceux qui n’habitent plus chez leurs
parents à cause de leurs études, sont indirectement protégés par la Sécurité Sociale.
Les travailleurs dans le secteur privé sont protégés directement. On distingue entre deux
catégories : les travailleurs dépendants et indépendants. Les travailleurs dépendants sont les
employés ou, terme plus correct, les salariés. Parmi les indépendants, on peut identifier trois sous-
groupes :
1. Ceux qui font du commerce, c’est-à-dire les commerçants, les artisans et les industriels
nécessitant une autorisation d’établissement de la part du Ministre des classes moyennes
pour l’exercice de leurs activités professionnelles.
2. Les indépendants travailleurs intellectuels : les professions libérales, les artistes, les
consultants …
3. Les indépendants du secteur agricole au sens large, qui sont les cultivateurs, les
horticulteurs, les sylviculteurs, les viticulteurs, les maraîchers …

3.1. Affiliation obligatoire

Le droit de la Sécurité Sociale subordonne toute activité professionnelle à l’assurance sociale. Les
revenus professionnels des salariés, le salaire, sont cotisables, tout comme les revenus
professionnels des indépendants. Les revenus des indépendants sont les honoraires (pour les
médecins et les avocats) et les tantièmes (pour les administrateurs de sociétés). Les revenus de
remplacement (indemnités de chômage, les bénéficiaires du RMG et de pensions) sont également
soumis à des cotisations, même si ces personnes ne doivent plus cotiser pour l’assurance accident.
En effet, un retraité ou un chômeur ne risquent pas d’avoir un accident de travail. Par contre, ils
restent affiliés dans la CNS.
Bref, l’affiliation est obligatoire pour chaque personne qui exerce une activité professionnelle
sur le territoire luxembourgeois.
Se pose maintenant la question des administrateurs et des administrateurs-délégués.
L’administrateur-délégué d’une société, sur qui repose également l’autorisation
d’établissement de la société, est également concerné par le droit de la Sécurité Sociale en
tant qu’indépendant. Par contre, si l’autorisation d’établissement n’a pas été émise au nom
de cet administrateur, il n’est pas concerné par la Sécurité Sociale comme un travailleur
indépendant, mais comme un travailleur salarié. C’est dans ce dernier cas que la situation devient
compliquée, car en droit de travail, il reste un indépendant. La raison en est qu’un
administrateur-délégué est un mandataire social, et de ce fait, il ne se trouve pas dans un lien
de subordination par rapport à la société. Il ne peut en effet pas donner des ordres à lui-même,
et ainsi, du point de vue du droit du travail, il ne peut jamais être assimilé à un salarié. La solution
appliquée par le droit de la Sécurité Sociale pour un administrateur-délégué paraît illogique à
cet égard.
Pour l’administrateur tout court, la situation en matière de Sécurité Sociale est parfaitement
claire. Initialement, il était assimilé à un salarié. Actuellement, suite à une circulaire interne
53
confidentielle de la Sécurité Sociale, on a décidé de considérer un simple administrateur d’une
SA comme un indépendant. Cette solution est logique.

3.2. Affiliation volontaire

Dans cette matière, on distingue entre l’assurance maladie-maternité et l’assurance-pension.


Dans le domaine de l’assurance maladie-maternité, il y l’assurance continuée et l’assurance
facultative.

3.2.1. L’assurance continuée

Une personne qui perd la qualité d’assuré (à cause d’une perte d’emploi) ou la protection en
qualité de membre de famille (par exemple par un divorce) peut quand même demander de
continuer son affiliation. Cette demande doit être présentée au CCSS sous peine de forclusion
dans un délai de 6 mois suivant la perte de l’affiliation. Comme la personne était affiliée avant la
perte de son adhésion à la Sécurité Sociale, et qu’elle continue quand même, à base volontaire,
d’être affiliée après cet événement, cette forme d’assurance volontaire est appelés « assurance
continuée ». Elle doit alors continuer à payer ses propres cotisations (la part salariale), ainsi que la
part patronale, mais au moins, elle reste affiliée à la Sécurité Sociale.

3.2.2. L’assurance facultative

Ce type d’assurance touche toutes les personnes qui résident au Luxembourg et qui ne peuvent
bénéficier autrement d’une protection en matière d’assurance maladie. Ces personnes ont
également la faculté de s’assurer volontairement.
Les conditions sont alors plus sévères que pour l’assurance continuée. Le droit n’est ouvert qu’après
un stage d’assurance de trois mois à partir de la présentation de la demande au CCSS. Seulement
après ces 3 mois, on peut profiter d’une couverture sociale. Pendant les trois mois déjà, il faut payer
des cotisations, alors qu’on ne profite pas d’une couverture sociale pendant cette période.

3.2.3. Assurance volontaire dans le domaine de l’assurance pension

Les deux principes susmentionnés sont également applicables à l’assurance pension. Il existe
cependant une troisième possibilité d’assurance volontaire en cette matière : c’est l’achat rétroactif
de périodes. Car dans l’assurance pension, au moment où on part en retraite, il se pose toujours la
question si on remplit les conditions d’affiliation. En particulier, est-ce-que le retraité a 480 mois
d’affiliation à la caisse de pension ? Cette question est d’autant plus pressante si on veut bénéficier
d’une pension anticipée avant l’âge de 65 ans. Celui qui n’arrive pas à ces 480 mois peut couvrir ou
compléter les périodes en question par un achat rétroactif de périodes d’assurance. Cette
possibilité existe uniquement pour l’assurance pension.

3.3. Le principe de l’unicité de l’affiliation

Cela veut dire qu’une personne ne peut être affiliée qu’à une seule catégorie de caisse. Le CCSS
détermine, sur base de l’activité principale (mesurée en heures ou en revenu), la catégorie
54
(travailleur dépendant ou indépendant etc.) dans laquelle sera classé le travailleur. Toutefois, il est
totalement exclu qu’une personne soit affiliée à plusieurs statuts différents.
Il y a eu un règlement récent en 2008 qui détermine la caisse de maladie compétente en cas de
cumul d’activités relevant de caisses ou de régimes différents. C’est le règlement du 16 décembre
2008. Dans ce règlement, il y a un article sur la maladie et un autre sur la pension. Si les assurés
exerçant une activité relevant de l’une des caisses de maladie visées à l’art. 44 sous 1) à 3) du Code
de la Sécurité Sociale (caisse de maladie des fonctionnaires) exercent par ailleurs une activité
relevant de la CNS, la première reste compétente pour le service des prestations visées à l’art. 48
du même code.
En cas d’exercice d’activités relevant de différentes caisses de maladie visées à l’art. 44 sous 1) à
3) du Code de la Sécurité Sociale le service des prestations visées à l’art. 48 est assuré par la caisse
de maladie compétente en raison de l’occupation comportant le nombre d’heures le plus élevé. S’il
y a concurrence entre différentes caisses de fonction publique, c’est le nombre d’heures le plus
élevé qui détermine la caisse compétente.
Cette unicité d’affiliation se retrouve aussi au niveau international. Quand il s’agit la Sécurité Sociale
nationale compétente, lorsque des personnes exercent des activités professionnelles dans plusieurs
Etats-membres différents de l’Union européenne, le principe est appliqué de manière même plus
sévère suite à l’introduction d’un nouveau règlement européen. L’ancien règlement prévoyait que
par exemple dans le cas où un travailleur exerçait une activité d’indépendant en Belgique et une
activité de travailleur dépendant au Luxembourg, il devait être affilié comme un travailleur
indépendant en Belgique et parallèlement au CCSS comme travailleur dépendant qu’au
Luxembourg. C’était une exception au principe de l’unicité. Le nouveau règlement a mis à plat cette
possibilité et a consacré le principe de l’unicité sans autorisation d’exception. L’exception provient
de la fameuse annexe 7 de l’ancien règlement où il y a toute une liste d’exceptions au principe de
l’unicité.

UV6 – Droit du travail et de la sécurité


sociale – Cours 3 Droit de la sécurité
sociale
3.4. Dispense de l’assurance

Activité professionnelle occasionnelle

Sont dispensées de l’assurance obligatoire (maladie et vieillesse-invalidité) les personnes qui


exercent une activité professionnelle uniquement d’une façon occasionnelle et non habituelle et ce
pour une durée déterminée à l’avance qui ne doit pas dépasser trois mois par année de calendrier.
Cela constitue une exception au principe que toute personne exerçant une activité professionnelle
doit être affiliée auprès de la sécurité sociale.

Affiliation à un régime de sécurité sociale étranger

Des personnes exerçant pendant une durée ne dépassant pas une année une activité
professionnelle au Luxembourg et affiliées à un régime de sécurité sociale étranger peuvent, sur
55
demande, être dispensées de l’assurance. Avec le nouveau règlement, ce délai peut être prolongé
à 24 mois.
Une personne qui est détachée d’un autre pays membre de l’Union européenne au Luxembourg,
pendant une période maximale de 24 mois, peut rester affiliée auprès de la sécurité sociale de son
pays d’origine.

Personnes exerçant des activités indépendantes

Des personnes exerçant des activités indépendantes à titre principal ou accessoire, et dont le revenu
professionnel en retiré ne dépasse pas le tiers du salaire sociale minimum par an, à savoir à peu
près 7 200 EUR.
Toutefois, une demande de dispense doit toujours être adressée au CCSS, personne ne peut juger
soi-même si on dépasse un seuil ou non pour éviter des surprises.

3.5. Exemption de l’assurance

Les personnes qui sont soumises à un autre régime, en raison de leur activité au service d’un
organisme international. Ces personnes sont soumises à un régime différent. Par exemple, les
personnes travaillant pour les institutions européennes sont soumises au régime propre à celles-ci.
Ces personnes sont alors, au Luxembourg, exemptées de l’assurance luxembourgeoise, parce
qu’elles sont affiliées à un autre régime de sécurité sociale.

3.6. Exclusion de l’assurance

Les personnes qui ont dépassé l’âge de 65 ans ne sont plus soumises à l’assurance pension, voire
sont totalement exclues de cette assurance.

3.7. Procédure d’affiliation

Tout employeur qui emploie un salarié a l’obligation d’affiliation de ce salarié dans un certain délai.
Il doit faire une déclaration d’entrée auprès du CCSS dans un délai de huit jours. Si le délai n’est
pas respecté, la sanction sera une amende. Pour un salarié dépendant, le délai débute lors de
l’entrée en service, pour un indépendant, il commence à partir de l’exercice de l’activité
professionnelle. Un indépendant doit faire la déclaration d’entrée lui-même, pour un salarié
dépendant, c’est l’employeur qui s’en chargera. Le CCSS procède alors à l’affiliation de l’assuré et
transmet toutes les données concernant l’assuré aux institutions de sécurité sociale compétente.
Puis, le CCSS envoie à chaque assuré la carte de légitimation avec son numéro d’immatriculation.
Le salarié reste affilié jusqu’à ce qu’il y ait une sortie, moyennant une déclaration de sortie faite par
l’employeur lorsqu’il s’agit d’un salarié. A partir de ce moment-là, le salarié reste encore couvert
pendant un certain délai (trois mois) contre certains risques, mais son affiliation cessera. Le salarié
pourra alors opter pour une assurance volontaire et ainsi continuer son affiliation sur base d’un
salaire social minimum pour qu’il puisse continuer à bénéficier d’une couverture de sécurité sociale,
mais il n’est pas obligé. Un salarié au chômage reste affilié pendant toute la période de chômage à
la sécurité sociale luxembourgeoise. L’Etat (ou l’Adem) sera en quelque sorte l’employeur, et les
56
cotisations sociales seront prélevées sur les indemnités de chômage comme si le chômeur touchait
un revenu.

4) Principaux risques sociaux

4.1. Maladie et maternité

4.1.1. Prestations en nature

Les prestations peuvent être en nature, c’est-à-dire être constituées de soins médicaux ou
dentaires, d’examens ou d’analyses en laboratoire ou encore de cures ou rééducations. Les
médicaments sont également considérés comme des prestations en nature.

4.1.2. Indemnités pécuniaires de maladie

Il s’agit d’indemnités que la CNS verse aux salariés qui sont malades à partir du moment où il y a
prise en en charge par la CNS de l’employé malade. Cela veut dire que la prise en charge n’a pas
lieu tout de suite. En effet, avant l’introduction du statut unique, il y avait des divergences entre le
système destiné aux employés privés et celui destiné aux ouvriers. Pour les derniers, il y avait prise
en charge immédiate par la Caisse de maladie des ouvriers, alors que pour les employés privés, il
y avait le principe de la continuation du salaire. Pour les derniers, le salaire payé par l’employeur
continuait à être versé pendant les trois premiers mois de maladie, et c’est seulement à partir du
premier jour du 4e mois où la caisse prenait en charge les indemnités pécuniaires du salarié. Pour
l’ouvrier, c’est certes l’employeur qui a dû avancer les indemnités pécuniaires de maladie, mais il
était remboursé.
Actuellement, le principe de maintien de salaire par l’employeur vaut pour tout le monde. Art. L. 121-
6, 3, 2 du Code de travail, « le salarié incapable de travailler a droit au maintien intégral de son
salaire et des autres avantages résultant de son contrat de travail jusqu’à la fin du mois de calendrier
au cours duquel se situe le 77e jour d’incapacité de travail pendant une période de référence de
douze mois de calendrier successifs. Un nouveau droit à la conservation du salaire n’est ouvert
qu’au début du mois suivant celui pour lequel cette limite n’est plus atteinte ».
Une fois la période de maintien du salaire écoulée, il y aura prise en charge par la CNS. A partir de
ce moment-là, on parle d’indemnités pécuniaires de maladie, qui ne sont alors plus des montants
résultant du maintien du salaire. Le salaire pris en compte est le salaire contractuel individuel ou
collectif. Seuls les droits acquis sont pris en compte, pas des éléments volontaires comme les
gratifications.
Cela pose problème au niveau des heures supplémentaire. Si un salarié malade reçoit le salaire de
base pendant la maladie, il subira des pertes financières dans la mesure où pendant les périodes
où il travaillait, il augmentant son salaire total en prestant des heures supplémentaires. Cela n’est
bien entendu plus possible en cas de maladie. Si, devant une juridiction, le salarié arrive à prouver
que pendant la période où il était malade, il était prévu qu’il travaillerait de nuit, l’employeur doit

57
calculer le revenu de remplacement en tenant compte de cette hypothèse. Ainsi, le salarié n’aura
pas de préjudice matériel trop élevé pendant la maladie. Pour les heures supplémentaires, cela
s’applique également. Des jugements en cette matière ont pris la moyenne des trois derniers mois
de salaire pour déterminer le salaire de référence qui sera payé par l’employeur en cas d’incapacité
du salarié jusqu’à la prise en charge par la CNS. On se trouve effectivement dans une zone grise.
En ce qui concerne l’indemnité pécuniaire de maladie, le calcul est différent. Les éléments suivants
entrent dans la base de calcul de cette IPM ?
 La rémunération de base
 Les compléments et accessoires payables mensuellement et en espèces (ce qui exclut les
avantages en nature, comme la voiture de société)
 Indemnités de préavis
Les heures supplémentaires prestées sont exclues dans le calcul le l’IPM expressis verbis. Les
suppléments pour travaux de nuit et les 13e et 14e mois sont également exclus. Toutes les
gratifications payables de manière non mensuelle sont aussi exclues.
En ce qui concerne les prestations en cas de maternité, on a deux types de prestations : en espèces
(congé de maternité et l’indemnité pécuniaire de maternité payée par la CNS pendant le congé de
maternité). Le congé prénatal de huit semaines avant l’accouchement est obligatoire. Après, il y a
le congé post-natal obligatoire de huit semaines après l’accouchement. Cela est le congé de
maternité minimal. Le congé post-natal peut être mené à douze semaines dans des cas
d’accouchements prématurés, d’accouchements multiples et en cas d’allaitement.
La Commission européenne a proposé d’étendre le congé maternel minimal à 18 semaines.
Au niveau des prestations en nature, les assurées bénéficient de soins médicaux (sage-femmes),
autres types d’assistance médicale, séjour à l’hôpital, fournitures pharmaceutiques, produits
diététiques pour nourrissants etc.

4.2. Accident de travail

D’un point de vue statistique, le Luxembourg se trouve dans la moyenne de l’Union européenne
concernant les accidents de travail. Une particularité au Luxembourg est que les accidents de travail
sont, pour le quart du total, des accidents de trajet. Ceci est dû au grand nombre de frontaliers, qui
doivent se déplacer davantage que les travailleurs locaux.
Qu’est-ce qu’un accident de travail ?

Accident de trajet

Il s’agit d’un accident survenu sur le parcours normal et direct effectué par le salarié pour se
rendre de son domicile au lieu de travail respectivement sur le trajet de retour. Il doit exister entre le
trajet effectué et l’emploi assuré un lien de connexité. Un accident survenu lors d’un déplacement
pendant les heures de travail n’est pas un accident de trajet (exemple : du siège d’un client chez un
autre client). Ce dernier cas est un accident de travail proprement dit.

Accident de travail proprement dit

Ce type d’accident survient par le fait du travail ou à l’occasion du travail. Il faut alors exister, au
moment de l’accident, un lien de connexité entre l’emploi assuré et l’activité ayant donné lieu à
58
l’accident, de même qu’entre le fait accidentel et la blessure. Il faut notamment que l’occupation
lors de laquelle l’accident est survenu ait eu lieu dans l’intérêt de l’entreprise dans laquelle l’assuré
est occupé. Par ailleurs, l’assuré doit se trouver au moment de l’accident dans un lien de
subordination à l’égard de l’employeur. L’accident doit donc survenir du fait de l’exécution du contrat
de travail.
Tout cela semble évident, mais imaginons qu’une entreprise organise un fête d’été pour l’ensemble
du personnel. Si un salarié se blesse à cette occasion, la question est de savoir s’il s’agit d’un
accident de travail puisque l’événement a eu lieu dans le cadre d’une activité effectuée ensemble
avec des collègues de travail, organisée par l’employeur. Or, on est en présence d’un événement
extraprofessionnel, et on peut en conclure que ce n’est pas un accident de travail. Lors de l’activité,
il n’y avait pas de lien de subordination.
La situation change lorsque l’employeur oblige les salariés à un événement de team-building ou à
des activités similaires. Là, on admet, et la sécurité sociale l’a confirmé récemment, que si la
présence est obligatoire, on est dans un lien de subordination. En conséquence, il s’agit d’un
accident de travail.

Maladie professionnelle

La maladie professionnelle se définit comme une maladie qui, selon les connaissances médicales,
est causée par des influences spécifiques auxquels certains groupes de personnes du fait de leur
travail sont plus particulièrement exposés, que le gouvernement a spécialement désignée dans une
liste et que l’assuré a subie de façon déterminante dans l’exercice d’un travail assuré dans le pays.
Il existe une liste établie par le gouvernement contenant les maladies professionnelles reconnues
en tant que telles.
Pour l’instant, il n’y a pas de preuve que toutes les maladies qui sont liées au stress (suicide) sont
dues au travail. C’est pourquoi ne stress n’est pas classé comme une maladie professionnelle.

Prestations en cas d’accident de travail

1. Incapacité temporaire
Les prestations dont bénéficiera l’assuré en cas d’accident de travail sont les soins médicaux
(médicaments, hospitalisation, examens médicaux…). Puis, il y a les prestations en espèces.
Contrairement aux indemnités pécuniaires en cas de maladie, on va plus loi pour les accidents de
travail. La victime de l’accident aura une indemnité pécuniaire calculée de la même manière qu’en
cas de maladie, avec une limite de 52 semaines. Cela vaut pour une incapacité de travail temporaire.
A la fin de l’indemnité pécuniaire précitée, une rente temporaire peut être accordée à l’affilié. La
rente est fixée selon le degré d’incapacité sur la base du montant dû en cas d’incapacité totale. C’est
le médecin de contrôle qui va fixer le degré d’incapacité. La fixation de ce taux est souvent contestée,
et il est source de nombreux litiges devant les juridictions sociales.
La rente est temporaire parce que l’incapacité de travail est temporaire.
2. Incapacité définitive
L’accident a causé une incapacité définitive de travailler de l’assuré. L’incapacité définitive peut être
totale ou partielle. Une rente sera attribuée à l’affilié en fonction d’un degré d’incapacité déterminé
par un examen médical. Le degré d’incapacité est un élément médical. Dans le calcul de la rente
intervient en sus un élément mathématique, qui est en fait la base de calcul.

59
La rente est calculée sur base du revenu professionnel de l’assuré des 12 mois de calendrier
précédant celui de la survenance de l’accident. En cas d’incapacité totale, la rente est égale à 85,6
% du revenu annuel fixé de manière telle que décrite précédemment.
Quant à l’incapacité partielle, la rente est alors fixée sur la base du montant de la rente plénière. On
parle de rente partielle.
Dans le cadre d’une réforme de l’assurance accident, il y a l’intention d’introduire un taux unique de
cotisation de 1,25 % pour l’ensemble des entreprises du secteur privé. Pour le moment, les taux
varient entre 0,45 % et 6 % suivant les risques dans le secteur déterminé. Les 6 % seront appliqués
à des entreprises de toiture, compte tenu des risques élevés lors de l’exécution de ce type de
travaux. Dans le secteur tertiaire (banques, assurances) par contre, les risques sont moins élevés.
Un taux de cotisation unique permettrait de parfaire la solidarité entre cotisants dans la branche de
l’assurance accident. Ce taux devra de plus faciliter l’introduction d’un système de bonus/malus
souhaité par le législateur. Le taux unique simplifiera le financement de l’assurance. Il ne faudra plus
fixer un taux différent pour chacune des 21 classes de risque.

4.3. Invalidité

Lorsqu’un salarié n’est plus apte à travailler, on parle souvent d’invalidité. Cela n’est pas si simple
que cela. Dans le passé, il y avait des personnes qui n’étaient plus aptes à travailler étaient déclarés
invalides. La jurisprudence, en personne de la cour de cassation, a, face à cette zone grise, décidé
qu’il ne suffit pas d’être inapte à exercer son dernier poste de travail, mais il faut être inapte à exercer
tout autre poste de travail qui correspond aux aptitudes de l’affilié en question. Dans le temps, des
salariés n’ayant plus droit à des indemnités de maladie, demandaient des pensions pour invalidité.
Ils ont été déboutés de cette action. Après 52 semaines, ces salariés se retrouvaient sans rien, car
leur contrat de travail cessait alors de plein droit. Ils ne pouvaient pas non plus demander un nouvel
emploi via l’Adem, parce qu’ils furent inaptes à travailler. Ils n’étaient pas suffisamment inaptes pour
être déclarés invalides, mais trop malade pour être considéré comme apte à un nouvel emploi. Ils
se retrouvaient avec le revenu minimum garanti. Après, on a changé la législation.
L’article 187 du Code de la sécurité sociale a été modifié. « Est considéré comme atteint d’invalidité
l’assuré qui, par suite de maladie prolongée, d’infirmité ou d’usure a subi une perte de sa capacité
de travail telle qu’il est empêché d’exercer la profession qu’il a exercée en dernier lieu ou une autre
occupation correspondant à ses forces et aptitudes ». Cette dernière partie de la définition a été
ajoutée.
Qu’est-ce qui se passait alors avec les personnes mentionnées auparavant, qui n’étaient classées
ni invalides, ni aptes. Par la loi du 1er janvier 2005 qui concerne l’incapacité de travail et la réinsertion
professionnelle, le législateur a prévu que le salarié qui a fait une demande pour une pension
d’invalidité, et auquel on refuse la pension, pourra aller chez le médecin de travail. Celui-ci va
examiner si cette personne pourra continuer à travailler ou non. Le médecin va faire un rapport dans
lequel il s’exprimera sur les conditions suivant lesquelles le salarié pourra encore continuer à exercer
ses activités professionnelles. Le port de certaines charges et l’exercice d’activités précises pourront
être interdits au salarié par le médecin. Le rapport sera présenté à la commission mixte de
reclassement. Cette commission existe auprès de l’ADEM. Elle va prendre, sur base su rapport, une
décision qui aura comme conséquence soit un reclassement interne du salarié (chez son employeur
aux conditions retenues par le médecin du travail), soit un reclassement externe (le contrat de travail
prendra fin prématurément, le salarié sera considéré comme un demandeur d’emploi pris en charge
par l’ADEM). Si l’employeur a moins de 25 salariés, il n’est pas obligé de reclasser en interne le
salarié. Celui-ci sera d’office reclassé en externe, ce qui aura comme avantage que le contrat de
60
travail cessera de plein droit. Si l’employeur a plus de 25 salariés, il sera en principe obligé de
reclasser en interne aux conditions fixées par la commission (diminuer l’horaire de travail, interdiction
de certaines tâches etc.). Il sera très difficile pour l’employeur de refuser ce reclassement. Il ne peut
pas refuser s’il ne remplit pas de taux d’occupation de personnes handicapés au sein de son
entreprise. S’il remplit ce taux, il pourra refuser, sous condition de prouver que le reclassement
interne du salarié mettra en danger la survie même de l’entreprise, voire affecte le bilan et le compte
de résultats de l’entreprise dans une proportion telle que la situation financière de l’entreprise sera
fortement dégradée au regard des états financiers de l’entreprise.
Si le médecin conclut par exemple que le salarié ne peut plus travailler à temps plein, mais devra
travailler à 50 %, l’employeur est obligé au reclassement interne de ce salarié. Celui-ci continuera à
occuper le même poste, mais à temps partiel. L’Adem prendra en charge le différentiel de salaire
ainsi créé.

4.4. Pension de vieillesse

Art. 183 Code de la sécurité sociale : « a droit à une pension de vieillesse à partir de l’âge de 65
ans, tout assuré qui justifie de 120 mois d’assurance au moins ».
Art. 184 : « a droit à une pension de vieillesse anticipée à partir de l’âge de 60 ans, l’assuré qui
justifie de 480 mois au moins».
Il existe aussi une pension anticipée à l’âge de 57 ans, auquel cas les 480 mois d’assurance doivent
être appréciés à titre de travail effectué et non pas à titre de périodes assimilées à des périodes
d’activité (le service militaire, les années d’études…).
Le rachat de périodes est également possible si on veut partir en retraite à 60 ans, contrairement à
la retraite anticipée à 57 ans.

4.5. Préretraite

Elle concerne les personnes qui ne remplissent pas encore les conditions afin de bénéficier d’une
pension de vieillesse classique ou anticipée. On veut quand même leur permettre d’arrêter leur
carrière professionnelle et ce pendant une période maximale de trois ans qui précède le droit à la
pension classique ou anticipée. Ces personnes ne sont plus très loin de l’âge de pension légal. La
préretraite a été mise en place fin des années 70, lors de la grande crise sidérurgique, où il fallait
absolument éviter un grand nombre de licenciements. Cette forme de préretraite a survécu jusqu’à
nos jours.
Il y a plusieurs types de préretraites.
 Préretraite solidarité : il faut être âgé d’au moins 57 ans. Il faut, dans les trois années qui
suivent, que l’affilié en question ait droit à une pension de vieillesse anticipée ou classique.
La condition à cette préretraite est que l’employeur embauche un demandeur d’emploi en
contrepartie. Le salarié parti touchera une indemnité de préretraite, dont une grande partie
sera prise en charge par l’Etat. Il faudra en outre une convention entre le ministre du travail
et l’employeur en question (ou une condition collective). Le salarié doit lui aussi être d’accord.
La salarié touchera cette indemnité de préretraite jusqu’au moment où il aura droit à l’octroi
d’une pension de vieillesse classique ou anticipée. L’indemnité de préretraite sera de 85 %
de la dernière rémunération du salarié pendant la première année. Pendant la deuxième
année de la préretraite, elle sera de 80 %, et pendant la 3e et dernière année, elle sera de
75 %. L’indemnité est plafonnée à cinq fois le salaire social minimum. Le comité de
61
conjoncture, un organe du ministère de l’économie, va fixer un taux de remboursement qui
est de 70 %. Il pourra varier en fonction de la situation économique de l’employeur.
 Préretraite progressive : il s’agit d’une transformation d’un emploi à temps plein en emploi
à temps partiel. A l’instar de la préretraite solidarité, l’employeur devra embaucher un
nouveau salarié (apprenti, demandeur d’emploi) pour combler la lacune.
 Préretraite des travailleurs postés et des travailleurs de nuit : on parle ici de gens qui
ont pendant toute leur vie professionnelle, ou une partie importante de celle-ci, travaillé à des
postes de nuit ou des postes à équipes successives.
 Préretraite ajustement : elle peut s’appliquer aux personnes âgées de 57 ans qui sont
employées par des entreprises qui sont sujettes à des problèmes de restructuration ou de
fermeture. Si le salarié en question se trouve menacé par le licenciement, l’employeur peut
opter pour la préretraite ajustement, moyennant l’accord de l’affilié. Il faut en sus l’accord du
ministre de travail et la fixation d’un taux de remboursement par le comité de conjoncture.
Si l’employeur en difficultés a fait un plan de maintien dans l’emploi, il pourra bénéficier d’un
taux de remplacement de l’Etat très élevé, dans certains cas au-dessus de 70 %.

5) Procédures en cas de contestation


On distingue entre deux types de procédures : la procédure non contentieuse et la procédure
contentieuse. La dernière se déroule devant les juridictions, tandis que la première se déroule devant
un autre organe (normalement un organe supérieur de l’institution de la sécurité sociale qui a émis
la décision.

5.1. Procédure non contentieuse

Procédure réglée par le droit administratif

La procédure non contentieuse est une notion provenant du droit administratif. Ce droit est une
branche légale qui règle le rapport entre l’administration et le citoyen. Les tribunaux ont décidé que
la procédure non contentieuse applicable en droit administratif est applicable également en matière
de droit de la sécurité sociale. Les principes de cette procédure sont les suivants :
1. Procédure consultative préalable : lorsque l’administration ou l’institution de la sécurité
sociale prend une décision, très souvent, la décision est, de par la loi, subordonnée à une
autre autorité, qui aura souvent un caractère consultatif. Dans le droit de la sécurité sociale,
c’est le contrôle médical de la sécurité sociale, qui donne un avis avant que le CCSS ou la
CNS ne prennent une décision.
2. Obligation pour l’organisme en question de motiver sa décision : l’affilié doit être
informé sur les motifs d’une décision à son égard et sur les informations qui ont mené à la
décision.
3. Le citoyen a le droit d’être entendu : il a le droit de donner ses observations à
l’administration.
4. L’administration doit indiquer les voies de recours : lors de la communication de sa
décision, l’administration se doit d’indiquer les voies de recours à l’affilié. Celui-ci doit savoir
à qui il peut s’adresser s’il veut faire recours contre une décision. En l’absence d’indication

62
de voie de recours, et si le recours est soumis à un délai, la sanction est que le délai ne va
jamais commencer à courir. L’administré aura droit au recours encore des années après.
5. Collaboration procédurale de l’administration : si l’administré s’adresse à un organisme
non approprié pour son cas, celui-ci doit transmettre le courrier à qui de droit.

Comment fonctionne le recours ?

Le recours non contentieux (ou gracieux) peut se faire par l’affilié par un simple envoi de courrier de
contestation soit à l’administration qui a rendu la décision, qui doit alors éventuellement reconsidérer
sa décision. Si la loi le prévoit, il y a encore des voies de recours spécifiques, telles que le recours
devant le comité des directeurs. Ceci est le cas lors d’un recours contre la CNS. Après ce recours
seulement, c’est le comité qui va rendre une décision susceptible de recours juridictionnel. Cela est
indiqué dans les voies de recours figurant sur la décision initiale.

5.2. Procédure contentieuse

Le conseil arbitral des assurances sociales (équivalent au tribunal de travail en matière de droit
du travail) est la première instance pour des litiges en matière de sécurité sociale. Ce conseil rend
un jugement, qui est susceptible d’un appel, dans un délai de 40 jours, devant le conseil supérieur
des assurances sociales. Ce dernier conseil est l’équivalent de la cour d’appel, et il rend un arrêt.
Cet arrêt est encore susceptible de cassation. Il n’y a cependant pas de cour de cassation spéciale
pour le droit de la sécurité sociale, c’est la cour de cassation de droit commun qui est compétente.

6) Droit européen de la sécurité sociale

6.1. Législation applicable aux travailleurs migrants

L’art. 11 du règlement 883/2004 du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de
sécurité sociale. Cet article consacre l’unicité d’affiliation.
L’art. 12 concerne le détachement au sein de l’Union européenne. Une personne exerçant une
activité salariée dans un Etat membre pour le compte d’un employeur pour qui il travaille en règle
générale, et que cet employeur le détache pour effectuer un travail pour son compte dans un autre
Etat membre, cette personne reste soumise à la législation du premier Etat membre, à condition que
la durée prévisible de ce travail n’excède pas 24 mois et que la personne ne soit pas envoyée en
remplacement d’une autre personne. Il faut donc s’agir d’un vrai détachement, mais pas d’une
expatriation.
Un détachement implique que le salarié en question reste dans un lien de subordination avec son
employeur d’origine.
L’appréciation de cette question est simple dans le cas d’une entreprise de construction autrichienne
qui envoie un ouvrier au Luxembourg. Celui-ci va alors exercer des activités de construction pour le
compte de son employeur d’origine autrichienne au Luxembourg. Dans le cas d’une banque, la
situation est plus compliquée. Si la banque autrichienne envoie un salarié dans une filiale
luxembourgeoise, on peut effectivement poser la question pour qui il travaille : pour la maison mère
autrichienne ou la filiale au Luxembourg ? Car maintenant, le lien de subordination avec l’employeur
d’origine est rompu. La sécurité sociale pourra alors dire qu’il n’y a plus détachement, mais bien
expatriation. Il y a un contrat de facto avec l’employeur luxembourgeois, donc il faut affilier le salarié
au Luxembourg.
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L’art. 13 concerne des activités exercées dans deux ou plus Etats membres. « Une personne qui
exerce normalement une activité salariée dans deux ou plus Etats membres, est soumise tout
d’abord à la législation de l’Etat membre de résidence si elle exerce une partie substantielle de son
activité dans cet Etat membre ou si elle dépend de plusieurs entreprises ou de plusieurs employeurs
qui ont leur siège social ou leur siège d’administration dans différents Etats membres ».
Soit une résidente française qui travaille au Luxembourg, une femme de nettoyage travaillant pour
une société au Luxembourg. L’employeur luxembourgeois a maintenant aussi un magasin entre
Thionville et Metz. La personne en question va également travailler dans ce magasin. Selon cet
article, la femme de ménage devrait, en principe, être affiliée en France. A fortiori, selon la législation
antérieure, le critère principal fut l’Etat de résidence. Or, dans le nouvel article, le mot « substantiel »
a été ajouté. Se pose maintenant la question si l’intéressée passe la majeure partie de son temps
de travail dans le magasin français. Le terme « substantiel » est à interpréter dans sens de « plus
de 50 % ». S’il s’avère effectivement que la personne passe plus de 50 % de son temps de travail
dans le magasin français, elle exerce une partie substantielle de son activité dans son Etat de
résidence. Dans ce cas, elle ne peut plus rester affiliée au Luxembourg, où elle a été affiliée
initialement.
Le deuxième cas de figure visé par l’art. 13 est plus rare dans la pratique. Imaginons un salarié qui
a deux employeurs, dont l’une au Luxembourg et l’autre en Belgique. Le salarié habite en France,
et il doit donc être affilié dans ce dernier pays, alors qu’il n’y travaille pas.
« La personne qui exerce normalement une activité professionnelle dans deux ou plus Etats
membres est soumise à la législation de l’Etat membre dans lequel l’entreprise ou l’employeur qui
l’emploie a son siège ou son domicile si la personne n’exerce pas une partie substantielle de son
activité dans l’Etat membre de sa résidence. »
Exemple : l’employeur est en Allemagne, la personne en question exerce ses activités au
Luxembourg, en France et en Belgique. Le pays de résidence est la France. Si la personne n’exerce
pas une partie substantielle de ses activités en France, elle doit être affiliée dans le pays du siège
de l’employeur. C’est donc la sécurité sociale allemande qui sera compétente. Sauf s’il s’avère que
la personne en question exerce son activité principale en France.

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