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DROIT SOCIAL

Dr Guillaume NEGUELEM

Le droit social a pour vocation la protection de l’homme au travail, particulièrement en


présence d’un lien de subordination juridique, de sorte à ce qu’il ne soit pas réduit au rang
d’outil. Tandis que le droit du travail s’intéresse à la nature juridique de la relation et aux
conditions de travail, la sécurité sociale qui en est le complément indispensable s’appesantie
sur la protection du travailleur face aux risques sociaux.

PARTIE 1/ LA RELATION DE TRAVAIL


Le souci de réguler les rapports de travail dépendant afin d’éviter des explosions sociales qui
bouleverseraient gravement l’ordre public et perturberaient la croissance économique est à
l’origine du droit du travail. Il peut être défini comme étant l'ensemble des règles législatives,
réglementaires et conventionnelles régissant les rapports individuels ou collectifs de travail
dépendant.

Cette définition met en exergue la spécificité de la matière qui se distingue des autres
disciplines juridiques par ses caractères, son objet et ses sources, mais il est surtout le fuit
d’une lente construction.

I- L’HISTORIQUE DU DROIT DU TRAVAIL


Le droit du travail tel qu’il est règlementé aujourd’hui au Sénégal est le fruit d’une longue
évolution en France passée par le prisme de la colonisation.

Dans l’antiquité, en France comme un peu partout dans le monde, la relation de travail
subordonnée était envisagée sous l’angle de l’esclavage. L’esclave était conçu comme un
objet de propriété, un outil de production au service du maître. Tandis que l’esclavage a été
supplanté par le servage au moyen âge européen, il a survécu longtemps dans le cadre de la
traite négrière et de l’économie qui en a résulté. En 1685, le code noir de Colbert règlemente
le statut de l’esclave qui reste néanmoins un bien. Et c’est seulement le 27 avril 1848 que
l’esclavage est définitivement aboli en France par décret.

Quant au servage qui a prévalu au moyen âge, il permettait d’établir une relation particulière
entre le maître et le serf qui était attaché à lui ou à son domaine. Dans le cadre de cette

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relation, le maître devait protection et entretient à son serf qui mettait sa force de travail à sa
disposition. Le serf avait certes une capacité juridique réduite mais était tout de même
considéré comme un être humain à la différence de l’esclave.

Par la suite, le servage a reculé et a été remplacé par le système corporatiste. Les corporations
étaient des associations de marchands ou d’artisans au sein desquelles le travail était organisé
selon trois principes :

- L’inégalité des membres : maîtres, compagnons et apprentis.


- Le monopôle de la profession avec restriction de l’accès au métier.
- L’établissement de règles de la profession.
Après la révolution française de 1789, les corporations ont été abolies et la relation de travail
devait être envisagée sous un nouvel angle. En 1804 le code civil, inspiré des idées
révolutionnaires a abordé cette relation sous l’angle contractuel avec le contrat de louage de
service. Le contrat de louage de service était donc un contrat comme les autres, basé sur les
supposées libertés et égalités des parties. Sauf qu’en matière de travail subordonné, il n’y a ni
liberté, ni égalité des parties. Le code civil s’est donc très vite révélé inadapté à cette relation,
surtout avec l’évolution des modes de production et l’industrialisation naissante. Dès lors, une
misère ouvrière dangereuse pour la stabilité politique a vu le jour et les pouvoirs publics ont
été contraints d’intervenir dans la relation de travail pour encadrer progressivement le travail
des enfants, des femmes, les horaires de travail, les libertés individuelles et collectives du
travailleur. Un véritable droit du travail a vu le jour en France et un peu partout en occident.

Cependant, dans les colonies d’Afrique, si l’esclavage était aboli, il a été immédiatement
remplacé par le travail forcé au bénéfice de l’administration coloniale ou de particuliers. Si le
travailleur africain était rémunéré et était en principe libre, cette rémunération était purement
arbitraire et ne correspondait en rien aux qualifications, tâches et heures de travail. De plus,
dans une société organisée selon des principes discriminatoires, il n’y avait aucune liberté de
choix pour les travailleurs africains.

C’est au prix d’une lutte acharnée mais également au bénéfice d’un contexte mondial
paradoxalement favorable (les guerres mondiales et l’œuvre d’organisation internationales
telles que la SDN et l’OIT) que les travailleurs africains ont accédé à la dignité et qu’un
véritable droit du travail a commencé à se mettre en place au sein des colonies.

Après l’accès à l’indépendance, la plupart des Etats africains se sont doté de législations du
travail propres, certes sommaires mais qui traduisaient leur indépendance fraichement

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acquise. C’est ainsi que le Sénégal a adopté son premier code du travail dès le 15 juin 1961
(loi n°61-34).

II- LES CARACTERES ET L’OBJET DU DROIT DU TRAVAIL


Le droit du travail a pour but d’organiser les rapports sociaux au sein de l’entreprise. Son
objet est le travail dépendant. C’est en cela que ce droit prend parti en faveur du salarié. Il est
donc à la fois un droit partisan, progressiste et autonome.

Un droit partisan : Le droit du travail est un droit partisan en ce sens qu’il est élaboré
essentiellement à destination du salarié. Le droit du travail est, pour l'essentiel, un droit de
protection du salarié en raison de son état de subordination. Cette protection consiste à assurer
au salarié une sécurité de l'emploi et des conditions de travail ainsi qu’une participation à
l'élaboration et à l'application du droit du travail.

Le droit du travail est un droit d’inégalité, non de réciprocité. Le caractère impératif de ses
règles exige d’ailleurs souvent l’édiction de sanctions pénales ayant donné naissance à un
véritable droit pénal du travail.

Mais aujourd'hui, le droit du travail s'oriente également vers la protection de l'entreprise.


Beaucoup de ses règles assurent la performance, la croissance, la compétitivité de l'entreprise
en allégeant ou en assouplissant ses charges grâce à la notion de flexibilité. Le caractère
partisan du droit du travail est donc de plus en plus remis en cause par sa « flexibilité »
croissante, c’est à dire une souplesse accrue au profit de l’employeur, signe d’une
ambivalence de ce droit, désormais apte à prendre aussi en compte les intérêts de l’entreprise.
En effet, pour que le travailleur ait un emploi et le garde, il faut que l’entreprise puisse être
rentable.

La flexibilité rappelle aussi que cette discipline, marquée par les conflits d’intérêts, est la
résultante de rapports de force dont le point d’équilibre est par nature mouvant. Ce qui
confère au droit du travail un caractère évolutif, dynamique, (contingent ou changeant). Il est
instable car il organise la vie quotidienne des travailleurs et est influencé par la situation
économique, politique, sociale, qui est instable par nature. Il se transforme et progresse sous
l'impulsion des facteurs techniques, économiques et sociaux.

Il est un instrument de paix sociale car il influence le mode de vie du salarié (salaire, durée du
travail, âge de la retraite).

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Le droit du travail est un droit de progrès social en ce sens qu’il admet qu’une norme
inférieure déroge à une norme supérieure, lorsqu’elle est plus favorable que celle-ci aux
salariés. Ce qui permet notamment aux conventions collectives d’améliorer le statut légal.
C’est ce que l’on appelle le principe de faveur. Ce principe commande, en cas de conflits de
normes, d’appliquer non pas la norme hiérarchiquement plus élevée, conformément à la
hiérarchie des normes, mais celle qui est plus avantageuse pour le salarié.

Cette possibilité de dérogation « in favorem » est caractéristique de l’ordre public social. Elle
a été érigée par la jurisprudence en principe général du droit, mais n’a pas de valeur
constitutionnelle. Elle connaît aujourd’hui une double limite. D’une part, certaines règles ne
sont susceptibles d’aucune dérogation, parce qu’elles sont le reflet, non de l’ordre public
social, mais de l’ordre public absolu, à indérogabilité absolue (liberté d’entreprise, propriété
privée, responsabilité, prohibition des engagements perpétuels). D’autre part, certains accords
collectifs, dits accords dérogatoires, peuvent aujourd’hui, dans des domaines limitativement
énumérés par la loi (aménagement du temps de travail, par exemple), déroger « in pejus » à
celle-ci, c’est-à-dire au détriment des salariés. La loi devient dans ce cas supplétive. C’est ce
que l’on appelle l’ordre public conditionnel. On peut déroger à la loi, mais seulement par
convention ou accord collectif.

Le droit du travail protège alors le salarié sans faire abstraction de l’entreprise. Il protège
l’ensemble des intervenants pour une relation que l’on veut de plus en plus équilibrée.

Le droit du travail est aussi un droit, jeune et diversifié. Le droit du travail est relativement
récent. En France, son apparition en tant que législation remonte à la fin du XIX siècle.
Jusqu’en 1950, on connaissait la législation industrielle et le droit ouvrier. Au Sénégal,
l’apparition du droit du travail remonte à l’introduction du code du travail d’outre-mer de
1952.

Enfin, c’est un droit diversifié. La population salariée s’est accrue depuis le XIX siècle, et les
dispositions du code du travail ont été étendues à des personnes qui avaient un statut imprécis
(les journalistes par exemple) et à des activités nouvelles (télé services).

Le droit du travail, bien que bénéficiant de l'apport des disciplines juridiques telles que le
droit des obligations, le droit administratif et le droit pénal, est aussi un droit autonome. Il a
ses propres concepts et surtout ses propres sources.

III- LES SOURCES DU DROIT DU TRAVAIL :

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Les sources du droit du travail sont à la fois internes, communautaires et internationales.

Les sources internationales du droit du travail forment un véritable droit international du


travail constitué par les traités internationaux, les instruments des droits de l’homme et les
conventions internationales.

Les traités internationaux sont des accords conclus entre deux ou plusieurs Etats souverains
et fixant des règles obligatoires sur un objet déterminé (la règlementation des titres de séjours
et de travail par exemple). Ils tendent à organiser et à faciliter les relations économiques et
sociales entre les Etats membres. Mais d’autres traités ont pour but de tendre vers une
unification des législations entre les parties signataires. Ils forment ce que l’on appelle le droit
communautaire originaire.

Les instruments des Droits de l’homme constituent également une source importante du droit
du travail. Ils contiennent des droits fondamentaux applicables à tous les travailleurs tels que
le droit à un recours effectif devant les juridictions nationales, le principe de l’égalité et de
non-discrimination, le droit au travail, la liberté d’organisation et de négociation collective.

Les conventions internationales sont des accords conclus sous les auspices ou dans le cadre
des organisations internationales et applicables dans l'ordre juridique interne des Etats qui les
ont ratifiées et publiées, une fois entrées en vigueur (nombre de ratifications). Les conventions
internationales de travail, sont principalement élaborées au sein de l’OIT par la conférence
internationale du travail.

Cet organisme tripartite, composé de représentants des Etats membres, des salariés et des
employeurs et créé en 1919, est doté d’un secrétariat permanent (Bureau international du
travail). Il élabore des recommandations, facultatives, et des conventions, obligatoires pour les
Etats qui les ratifient. L’application des conventions par les Etats donne lieu à des contrôles
par des comités d’experts, notamment à la suite de réclamations déposées par les intéressés.

Au niveau national les sources du droit du travail se composent de sources étatiques et de


sources non étatiques. Les principales sources étatiques du droit du travail sont la constitution,
les lois et règlements et la jurisprudence.

La constitution est la norme (texte) juridique fondamentale élaborée par le pouvoir


constituant et destinée à organiser les institutions politiques ou pouvoirs de l'Etat et à garantir
les droits des citoyens et les libertés fondamentales. L'actuelle constitution du Sénégal
instituée par la loi référendaire n° 2001-03 du 22 Janvier 2001 proclame ou reconnaît

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notamment dans son préambule et ses articles 8 et 25 un certain nombre de droits sociaux
fondamentaux et de principes particulièrement nécessaires à notre temps comme le droit au
travail, le droit de grève, le droit syndical, la liberté de travailler, le droit de participer à la
détermination des conditions de travail, le principe fondamental de non-discrimination, le
principe d’une sécurité sociale.

La loi était la source essentielle du droit du travail. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le
droit du travail s’appelait « législation du travail ». Les lois du travail sont principalement
rassemblées dans le code du travail. Le Code du travail sénégalais a successivement été
institué par la loi du 15 Décembre 1952 (code du travail d'Outre-mer), la loi N° 61-34 du 15
Juin 1961 plusieurs fois modifiée (ancien code du travail) et enfin la loi n° 97-17 du 1er
Décembre 1997 (nouveau code du travail encore en vigueur). Cependant, de nombreuses lois
demeurent encore extérieures à cette codification.

Le règlement a actuellement pris une importance considérable en droit du travail. Les


règlements, sous forme de décrets ou d’arrêtés sont généralement pris en application d’une loi
pour donner les détails des orientations fixées par celle-ci.

Dans une acception large, la jurisprudence désigne l'ensemble des solutions rendues par les
juridictions sur une question de droit donnée. Mais au sens technique, précis et moderne du
terme, on entend par jurisprudence, la série des décisions concordantes rendues sur une
question de droit déterminée ou encore la solution suggérée par un ensemble de décisions de
justice suffisamment concordantes rendues sur une question de droit et sous l’autorité de la
cour de cassation.

Au Sénégal, la jurisprudence a un rôle marginal en droit du travail. Elle n’est source de droit
du travail que dans les cas exceptionnels où la loi est obscure, absente ou vieille. A l’inverse,
en France, la jurisprudence est particulièrement riche et audacieuse en cette matière. Elle
devance souvent la loi et c’est sous son impulsion que le droit du travail évolue et affine ses
concepts. Ce qui rend quelques peu la matière instable.

A côté de la jurisprudence, on a les principes généraux du droit qui se définissent comme des
règles générales et obligatoires découvertes par le juge à partir de l'esprit général du système
juridique (exemple : le principe de faveur).

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Les sources internes ou nationales non étatiques sont les sources professionnelles du droit du
travail. Elles sont sécrétées par la profession et comprennent les sources conventionnelles, les
usages, le règlement intérieur et le contrat de travail.

Les sources conventionnelles du droit du travail sont des accords d’entreprise ou


d’établissement et des conventions collectives ordinaires, extensibles ou nationales
interprofessionnelles librement négociés entre employeur ou groupement d’employeurs et
organisations syndicales ou professionnelles des salariés. Elles peuvent, en améliorant les
conditions des salariés, déroger à la loi qui fixe un plancher, les conditions minimales des
salariés en-dessous desquelles il est en principe interdit de descendre. Le salarié ne peut dans
son contrat de travail renoncer à un avantage consenti par la loi ou la convention collective
même si cela est dans son intérêt pour obtenir ou conserver un emploi.

Les usages sont des pratiques constantes, fixes, générales, suivies dans la région, la profession
(usage professionnel) ou l'entreprise (usage d'entreprise) et communément admise, considérée
comme obligatoire.

Ils sont visés par le législateur dans diverses matières notamment dans la définition des cas de
recours aux contrats à durée déterminée ou de la durée du préavis en cas de démission. La
jurisprudence les assimile à des engagements unilatéraux de l'employeur qui accordent aux
salariés des droits et avantages et disparaissent, s’effacent sans leur accord. Ainsi le salarié
peut réclamer l’application d’un usage à l’employeur. Celui-ci peut dénoncer l’usage c’est à
dire revenir unilatéralement sur un avantage acquis par les salariés à condition de donner un
préavis aux représentants du personnel et une notification à chaque salarié.

Le règlement intérieur est un document par lequel le chef d’établissement fixe les règles
générales en matière d’organisation technique du travail, d’hygiène de sécurité et de discipline
dans son entreprise, son établissement ou son atelier.

Le contrat de travail constitue le cadre juridique élémentaire de la relation de travail en ce


qu'il définit les obligations de base de chacune des parties. Il est en théorie directement
discuté, conclu entre un employeur et un salarié. Mais, tout le contrat n'entre pas dans le
champ de la discussion des parties. Il s'apparente à un contrat d'adhésion dont les stipulations
sont plus imposées qu'elles ne sont négociées.

Les sources du droit du travail font l’objet d’un classement hiérarchique. La hiérarchie
s’établit comme suit : la constitution, les sources internationales (les traités et accords

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internationaux ratifiés, les conventions internationales de l’OIT ratifiées), les sources
communautaires (les règlements et les directive communautaires), les lois, les principes
généraux du droit, les règlements (les décrets, les arrêtés), les conventions collectives
(nationales, extensibles, ordinaires, les accords collectifs d’entreprise et les accords collectifs
d’établissement), les usages (professionnels, d’entreprise), le règlement intérieur et le contrat
de travail.

La constitution est placée au-dessus des traités par les juridictions internes. Mais la thèse
inverse semble être consacrée par les instances internationales. Il convient de rappeler aussi
qu’en vertu du principe de faveur, une norme inférieure peut déroger à une norme supérieure,
dès lors que cette dérogation est favorable au salarié. Ce qui confère à la hiérarchie des
sources du droit du travail une connotation particulière.

La relation de travail a une dimension individuelle (chapitre 1) et une dimension collective


(chapitre 2). La dimension collective est relative aux relations qui se nouent entre un
employeur, un ou plusieurs groupements d’employeurs, d’une part et un ou plusieurs
groupements de salariés d’autre part. Cette relation est basée sur la négociation d’accords et
de conventions destinés à améliorer les conditions de travail et le climat social de manière
générale. Mais elle peut aussi s’exprimer par des conflits donnant lieu à des épreuves de force
retentissantes. Quant aux relations individuelles, ce sont celles qui se nouent entre
l’employeur et chaque travailleur pris individuellement et qui a pour base le contrat de travail.

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CHAPITRE 1/ LA RELATION INDIVIDUELLE DE TRAVAIL

La relation individuelle est celle qui se noue entre chaque travailleur et son employeur sur la
base du contrat de travail. Il s’agit donc d’une relation contractuelle (section1) mais dont les
conditions d’exécution sont fortement encadrées en raison de la particularité de ce lien
contractuelle (section 2), qui peut cependant évoluée dans le sens de la modification, de la
suspension ou même de la rupture (section 3) et générer un contentieux (section 4).

Section 1/ LE CONTRAT DE TRAVAIL

Paragraphe 1- Les critères du contrat de travail

Le code du travail ne définit pas le contrat de travail mais cette définition peut être déduite de
l’article L.2 al. 2 qui définit le travailleur. D’après ce texte, « Est considéré comme travailleur
au sens de la présente loi, quels que soient son sexe et sa nationalité, toute personne qui s’est
engagée à mettre son activité professionnelle, moyennant rémunération, sous la direction et
l’autorité d’une autre personne, physique ou morale, publique ou privée. Pour la
détermination de la qualité de travailleur, il ne sera tenu compte ni du statut juridique de
l’employeur, ni de celui de l’employé ». De cette définition peuvent être dégagés les critères
de contrat.

En effet, le contrat de travail porte sur la fourniture d’une prestation de travail sous
subordination juridique contre une rémunération. En cela, il peut être identifié et distingué des
autres contrats impliquant une fourniture de travail selon trois critères cumulatifs, même si le
dernier de ces critères semble prépondérant : la prestation de travail, la rémunération et le lien
de subordination juridique.

A- La prestation de travail
Dans un contrat de travail, le salarié s’engage à fournir ses services personnels. La nature de
la prestation importe peu. Tout travail de l’homme est concerné. Ce peut être une activité
manuelle, intellectuelle ou artistique. La prestation de travail est un élément nécessaire du
contrat de travail dont elle constitue aussi l'objet. Le travailleur est recruté pour l'accomplir.
Elle consiste principalement en une obligation de faire. Mais le travailleur doit, en plus,

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s’abstenir de tout acte qui entraverait la bonne exécution de son travail. Il en est ainsi de
l’obligation de non concurrence, de celle de garder le secret professionnel, ou simplement la
discrétion, celle de ne pas accepter des dons ou promesses de dons pour faire ou ne pas faire
un acte qui relève de son travail. Ces obligations de ne pas faire ne sont cependant que des
accessoires de son obligation principale.

La prestation doit être accomplie volontairement et personnellement, même si l’employeur est


en droit de donner des ordres pour son exécution.

Il faut également remarquer que la prestation de travail est successive. C’est pourquoi le
législateur a prévu une procédure pour la révision du contrat de travail. En cas de nullité, le
contrat ne saurait être considéré comme anéanti rétroactivement. Mais la prestation n'est pas
propre au contrat de travail. Elle existe dans d’autres types de contrats tels que le contrat de
prestation de services, le contrat d’entreprise etc…

B- La rémunération
La rémunération est aussi un élément nécessaire du contrat de travail qui est un contrat à titre
onéreux c’est-à-dire procurant à chacune des parties un avantage économique. Sa
dénomination importe peu (salaire, commission, traitement etc…) mais la rémunération doit
exister et être conforme à la loi et aux conventions applicables, le cas échéant. Elle ne doit pas
être exclusivement constituée d'indemnité ou de pourcentage du chiffre d'affaires réalisé par
l’intéressé. En effet, même si certains éléments de la rémunération peuvent être liés aux
résultats, une part fixe est exigée, de sorte à ce qu’il n’y ait pas de transférer du risque
d’entreprise sur les salariés, ni que leur rémunération ne soit abaissée en dessous des minimas
conventionnels et légaux.

La rémunération est certes un élément nécessaire du contrat de travail mais elle ne caractérise
pas le contrat de travail, elle se trouve également dans de nombreux contrat ayant pour but la
fourniture d’une prestation de travail (contrat de commission, d’agence commerciale, de
prestation de services, d’entreprise etc…). De plus, même dans des situations où le travail n’a
pas pour contrepartie une rémunération où lorsque celle-ci n’est pas conforme, le contrat de
travail existe dès lors que ses critères essentiels sont réunis. Le travailleur aura donc droit un
rappel de salaire après qualification ou requalification de la relation en contrat de travail.

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C- Le lien de subordination juridique
Le lien de subordination est la possibilité, le pouvoir de l'employeur de donner des ordres et
des directives au salarié pendant l'exécution de la prestation de travail, de contrôler et de le
surveiller l’exécution des tâches imparties et de sanctionner les fautes ou les écarts, le cas
échant. Il n'existe que dans le contrat de travail. Il se déduit surtout des conditions d'exécution
de la prestation de travail, des éléments de fait. Mais il n’exclut pas la simple indépendance
technique du salarié. Son existence fait présumer celle du contrat de travail. C’est ce qui
explique que les juges cherchent systématiquement si cette condition existe lorsqu’il y a
contestation entre les parties sur l’existence du contrat de travail. De façon primaire, le lien de
subordination est caractérisé par l’exercice effectif de trois pouvoirs par l’employeur :

- Le pouvoir de direction : qui consiste à donner des ordres et des instructions dans
l’accomplissement des tâches dévolues au travailleur ;
- Le pouvoir de contrôle : qui consiste à surveiller l’accomplissement des tâches par le
travailleur ;
- Le pouvoir de sanction : qui consiste à sanctionner les fautes et les écarts du travailleur
dans le cadre de son activité professionnelle.
Pour certaines catégories de salariés tels que les ouvriers et les employés, le lien de
subordination juridique s’exerce très concrètement ; ils reçoivent régulièrement des
instructions dans l’exécution des tâches qui leur sont confiées et peuvent également faire
l’objet d’une certaine surveillance. Pour d’autres catégories de salariés, les cadres supérieurs
ou ceux qui ont des connaissances techniques ou académiques leur assurant une certaine
autonomie dans l’exercice de leur activité, le lien de subordination peut être quelque peu
délicat à caractériser. Dès lors, on essaie de l’identifier à travers un faisceau d’indices tels que
le fait d’être soumis à des horaires, de travailler dans un lieu déterminé par l’employeur, de
devoir respecter certaines modalités d’exercice de son activité (délais de production, remise
périodique de comptes rendus, de rapports…), la fourniture par l’entreprise du matériel ou des
outils nécessaires à l’exécution du travail également. Aujourd’hui, l’exercice de l’activité
professionnelle au profit d’autrui, dans le cadre d’un service organisé par lui, suffit à
caractériser l’existence d’un lien de subordination juridique permanant. Ce qui rend parfois
confus la distinction entre dépendance économique et subordination juridique.

Avec le temps et l’évolution de la doctrine, le lien de subordination juridique est considéré


comme le critère essentiel et même suffisant du contrat de travail. C’est celui qui traduit le
mieux l’essence de la relation de travail salariée.

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Paragraphe 2/ Les conditions de validité du contrat de travail
Comme tout contrat, le contrat de travail est soumis à des conditions de fond pour sa validité
mais il présente toutefois certaines particularités. De plus certaines exigences formelles
doivent également être respectées.

A- Les conditions de fond


Le contrat de travail obéit aux conditions de formation de tout contrat qui sont la capacité et le
consentement des parties, une cause et un objet du contrat.

1- La capacité
La capacité contractuelle est l’aptitude de la personne à consentir valablement à un contrat. Le
principe est que toute personne est capable à défaut d’interdiction légale. C’est ainsi que les
mineurs et les majeurs souffrant de troubles ou de déficiences mentaux n’ont pas la capacité
de contracter. Il s’agit d’une incapacité de protection qui les exclut du commerce juridique en
raison de leur inexpérience ou de l’altération de leurs facultés. Néanmoins, en droit du travail,
les mineurs d’un certain âge peuvent consentir à un contrat de travail. Cet âge minimal est
fixé à 15 ans par le code du travail sauf dérogations spéciales édictées par arrêté du ministre
chargé du travail (art L.145 CT). Nonobstant cette limite d’âge abaissée, les jeunes gens avant
l’âge de 18 ans ne peuvent être employés pour effectuer des travaux dangereux, pénibles ou
pour le travail de nuit. Quant aux incapables majeurs, rien n’est dit de façon spécifique sur
leur compte dans le code du travail.

D’autres personnes ne peuvent conclure un contrat de travail, non pas parce qu’elles en sont
juridiquement incapables mais simplement parce que cela leur est interdit. Il s’agit des
incompatibilités de statut qui interdisent à certaines personnes d’être salariées. C’est le cas des
fonctionnaires qui ne peuvent, selon l’article 9 du statut général des fonctionnaires, « exercer,
à titre professionnel, une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit ». De même,
des personnes déjà salariés d’une institution ne peuvent cumuler plusieurs emplois salariés
sauf dérogation stipulée au contrat (art L.35 CT). Le cas échéant la limite d’heure de travail
ne doit pas être dépassée sous peine de basculer dans le travail au noir.

2- Le consentement
L’article 58 du COCC édicte qu’il n’y a point de contrat sans consentement émanant de l’une
ou l’autre partie. Le consentement est la manifestation de volonté en vue de l’adhésion aux
stipulations contractuelles. Même en cas de contrat d’adhésion, comme cela est généralement

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le cas en matière de contrat de travail, le consentement de chacune des parties est exigé et doit
être exprimé sans équivoque. Généralement il est manifesté par la signature apposée au
contrat, néanmoins le consentement peut s’exprimer de différentes manières, notamment en
l’absence d’un contrat écrit. Dans certains cas, il peut même être tacite et résulter par exemple
de la poursuite d’une relation de travail au-delà du terme prévu.

3- L’objet
L’objectif d’un contrat de travail est de créer des obligations entre parties de sorte que ces
obligations fondent l’objet du contrat de travail. Le contrat de travail suppose donc un objet
déterminé ou du moins déterminable, possible et licite. En principe, les parties au contrat
peuvent déterminer librement l’objet. Cela étant, cette liberté est limitée étant donné que les
parties doivent respecter les règles relatives à l’ordre public et aux bonnes mœurs, ainsi que
les dispositions légales impératives. On peut donc retenir que l’objet du contrat de travail est
la fourniture d’une prestation de travail à titre professionnel. Le défaut d’objet ou l’objet
illicite, notamment, au regard des dispositions impératives du droit du travail, sont des causes
de nullité du contrat de travail.

La subordination juridique qui caractérise ce contrat ne permet donc pas à l’employeur de


faire effectuer toutes sortes de tâches au salarié. En plus des restrictions dans l’intérêt général,
il faut signaler que le travailleur ne peut être employé que pour des tâches prévues à son
contrat ou qui relèvent de sa qualification professionnelle. Le salarié n’est donc pas un
serviteur à qui l’on peut demander tout et n’importe quoi ; il est donc en droit de refuser
certaines sollicitations qui n’entrent pas dans le cadre de ses attributions normales sans que
cela ne puisse constituer une faute de sa part. Les attributions du salarié et les tâches imparties
sont souvent listées dans la fiche de poste qui est annexée au contrat de travail et acquiert une
nature contractuelle dès lors qu’elle est portée à la connaissance du salarié qui a eu la
possibilité de s’y prononcer avant conclusion du contrat.

4- La cause
La cause est le pourquoi du contrat, elle ne présente pas de spécificité en matière de contrat de
travail. Pour l’employeur, la cause de son engagement est la prestation de travail attendue,
pour le travailleur, la cause de son engagement est la rémunération versée en contrepartie de
cette prestation. Néanmoins la cause du contrat ou la cause des obligations des parties permet
la mise en œuvre de l’exception d’inexécution qui permet la paralysie du contrat dans des
situations conflictuelles lorsque l’une des parties n’exécute pas convenablement ses
obligations.
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B- Les conditions de forme
Même si l’article L.31 CT dit que les contrats de travail sont passés librement et dans les
formes qui conviennent aux parties sauf dérogation prévue par le code du travail, hormis le
contrat à durée indéterminée à temps plein, tous les contrats de travail doivent être passés par
écrit. Et même lorsque l’écrit n’est pas une obligation, il s’agit d’une nécessité pour la
protection des parties et notamment de la partie la plus faible.

En plus, certaines formalités supplémentaires sont exigées à l’occasion de la conclusion d’un


contrat de travail. Le travailleur embauché doit effectuer une visite médicale destinée à
déterminer son aptitude physique et mentale à exercer le travail demandé mais aussi à
l’informer des risques relatifs à son poste de travail.

L’employeur est également tenu de procéder à la déclaration auprès des services de


l’inspection du travail et des institutions de sécurité sociale de tout nouveau travailleur recruté
dans l’entreprise avec les éléments d’identification de la personne et de son poste de travail
(art. L.222 code du travail). A défaut, il se rend coupable de dissimulation d’emploi.

Enfin, un bulletin de paie doit être remis au salarié au moment du versement du salaire afin de
permettre au salarié d’avoir connaissance de tous les éléments composant sa rémunération
(salaire de base, sursalaire, indemnités, primes, heures supplémentaires, divers prélèvements
etc…).

Paragraphe 3/ Les typologies du contrat de travail

A- Le contrat à durée indéterminée

Le législateur sénégalais ne donne pas de définition du contrat de travail à durée indéterminée


(CDI), il nous dit simplement ce qui n’est pas un CDI : « Tout contrat de travail qui ne répond
pas aux définitions du contrat à durée déterminée, du contrat d'apprentissage ou du contrat
d'engagement à l'essai doit être considéré comme contrat à durée indéterminée » (art L.49
CT). Ce procédé peut sembler curieux mais se justifie par le fait que le législateur ne souhaite
pas enfermer le CDI dans une définition qui compromettrait le mécanisme de la
requalification de diverses relations de travail n’obéissant pas aux règles posées. En effet, la
requalification en CDI est une forme de sanction qui frappe les autres formes de contrat de
travail lorsque certaines règles sont violées par l’employeur ; aussi il n’a pas semblé opportun
pour le législateur d’enfermer le CDI dans une définition. Mais on peut dire que le CDI est le

14
contrat de travail conclu entre un employeur et un salarié sans limite de délai ; il peut être à
temps plein ou à temps partiel.

Cette forme de contrat est le principe en droit du travail car il assure la stabilité de la relation
professionnelle et la permanence de l’emploi. Les autres formes de contrat sont élaborées par
référence au CDI et lorsqu’il est conclu à temps plein, c’est le seul contrat pour lequel l’écrit
n’est pas nécessaire. Ou pour dire les choses autrement, tout contrat de travail qui n’est pas
conclu par écrit est réputé être un CDI à temps plein.

L’engagement indéfini étant proscrit en droit, chacune des parties disposent de la possibilité
de rupture unilatérale du CDI. Pour le travailleur, cela renvoie à la démission et, pour
l’employeur, c’est le licenciement, sans parler du départ négocié qui est une rupture concertée.

B- Le contrat à durée déterminée

Le contrat à durée déterminée (CDD ) est un contrat dont le terme est déterminé par avance
par les parties. Il doit impérativement être passé par écrit sinon il est réputé être conclu pour
une durée indéterminée. Lorsque la durée du contrat est supérieure à trois (3) mois,
l’employeur doit déposer le contrat devant l’inspecteur du travail pour contrôle avant le début
de l’exécution. La durée maximale prévue par la loi est de deux ans, sauf lorsque le CDD n’a
pas un terme fixé à l’avance mais qui est tributaire de la réalisation d’un ouvrage ou d’un
évènement futur. Lorsque le terme est précis, le CDD peut être renouvelé une fois (art L.44
CT), soit un maximum de quatre ans et il est également possible de conclure jusqu’à deux
CDD avec le même employeur. Il y a cependant des formes de CDD qui peuvent être
multipliées quasi-indéfiniment en raison des circonstances dans lesquelles il y est fait recours.
Il s’agit des CDD signé avec :

1- un travailleur engagé à l'heure ou à la journée pour une occupation de courte durée


n'excédant pas une journée;
2- un travailleur saisonnier engagé pour la durée d'une campagne agricole, commerciale,
industrielle ou artisanale;
3- un docker engagé pour des travaux de manutention à exécuter à l'intérieur de l'enceinte
des ports ;
4- un travailleur engagé en complément d'effectif pour exécuter des travaux nés d'un
surcroît d'activité de l'entreprise;

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5- un travailleur engagé pour assurer le remplacement provisoire d'un travailleur de
l'entreprise en suspension légale de contrat de travail, telle que définie par l'article
L.70, à l'exception du 1° et du 6° (art L.42 CT).

De plus, la limitation des CDD ne s’applique pas aux travailleurs engagés par des entreprises
relevant d’un secteur d’activité dans lequel il est d’usage de ne pas recourir au CDI en raison
des caractéristiques de l’activité exercée, lorsque l’emploi de ces travailleurs est par nature
temporaire (art L.42 CT). Ainsi, même si la protection du travailleur implique la limitation des
possibilités de recours à ce contrat précaire, le législateur sénégalais, dans une optique
pragmatique visant à préserver la viabilité des entreprises et les besoins du marché du travail
permet, dans certains cas, une succession de CDD.

Néanmoins, le CDD ne peut être conclu pour occuper un emploi permanent par nature au sein
de l’entreprise, pour remplacer des travailleurs en grève ou dans les six mois qui suivent un
licenciement pour motif économique.

En principe, il ne peut être mis fin au CDD avant son terme qu’en cas de faute lourde du
travailleur, de cas de force majeure ou d’accord partie. En dehors de ces cas, le CDD prend fin
à la date prévue pour son terme et le travailleur a droit à une indemnité de fin de contrat égale
à 7% du montant de la rémunération brute perçue durant tout le contrat.

C- Le contrat de travail temporaire

Le travail temporaire est la seule pratique licite de prêt de main d’œuvre à but lucratif. Selon
le rapport de présentation du décret n°2009-1412 du 23 décembre 2009 fixant la protection
particulière des travailleurs employés par des entreprises de travail temporaire et les
obligations auxquelles sont assujetties ces entreprises, le contrat de travail temporaire se
singularise par l’existence d’une relation triangulaire : une entreprise de travail temporaire
recrute du personnel salarié et le met à la disposition d’une autre entreprise utilisatrice, pour
l’exécution d’un travail précis.

Le travailleur est recruté par une entreprise de travail temporaire par un contrat d’intérim
(contrat de travail à durée déterminée) et mis à la disposition de l’entreprise utilisatrice au
moyen d’un contrat de ‘‘mise à disposition’’ (contrat commercial entre les entreprises). Avant
la conclusion de ce contrat, l’entreprise de travail temporaire doit justifier de sa régularité
auprès des institutions de prévoyance sociale. Le contrat de mise à disposition doit
obligatoirement être écrit et déposé en cinq (5) exemplaires auprès de l’inspecteur du travail.

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La particularité de ce contrat tient à la nature tripartite de la relation engendrée. Le travailleur
intérimaire est salarié d’une entreprise mais accomplit ses prestations de travail pour une autre
entreprise. Ce qui provoque un éclatement des éléments caractéristiques du lien de
subordination juridique. L’entreprise utilisatrice a, sur le travailleur, un pouvoir de direction et
de contrôle, indispensable à l’accomplissement des prestations de travail à son profit, mais pas
le pouvoir de sanction qui reste l’apanage de son véritable employeur. Dans les faits, si le
travailleur temporaire commet une faute dans l’exécution de son contrat, l’entreprise
utilisatrice s’en réfère à l’entreprise de travail temporaire qui pourra ainsi lui infliger une
sanction.

Ce contrat ayant souvent été de théâtre d’abus sur le travailleur temporaire, la règlementation
de 2009 a tenté de renforcer sa protection mais les résultats restent discutables. En principe, sa
rémunération est égale à celle des salariés permanents de l’entreprise utilisatrice ayant la
même qualification et occupant un emploi identique mais dans les faits, on remarque que le
travailleur temporaire est souvent sous-payé au motif de l’ancienneté. De plus, l’entreprise de
travail temporaire peut parfois prétendre à un pourcentage sur sa rémunération au titre de sa
commission, or celle-ci doit être payée exclusivement sur la base du contrat de mise à
disposition que lie l’entreprise de travail temporaire et l’entreprise utilisatrice.

Par ailleurs, pour éviter le recours abusif aux travailleurs temporaires, la loi limite les cas de
recours à ceux prévus pour le CDD. Car, en fin de compte, il s’agit de contrats de travail à
durée déterminée appelé contrat de mission. La durée de ce contrat ne peut excéder 2 ans.

D- Les contrats d’apprentissage et de stage

Les contrats d’apprentissage et de stage sont des contrats d’un genre particulier qui combinent
travail et formation.

1- Le contrat d’apprentissage

Le contrat d’apprentissage est un contrat de travail dans lequel, en plus de la rémunération


versée par l’employeur, celui-ci s’engage à assurer une formation professionnelle méthodique
et complète à un jeune travailleur dénommé apprenti qui, en retour, s’engage à travailler pour
ledit employeur. Il est prévu par le code du travail (art L.73 et L.74 CT) mais a fait l’objet
d’une règlementation sommaire qui a été complétée par le décret n°2016-263 du 22 février
2016 fixant les règles applicables au contrat d’apprentissage. Ce contrat doit être passé par

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écrit et déposé devant l’inspecteur du travail dans le mois qui suit sa date de prise d’effet sous
peine de requalification en CDI. Ne peut recevoir d’apprentis que le maître ayant 21 ans
révolus, et n’ayant pas de condamnation pénale de plus de trois mois d’emprisonnement ou
pour délit contre les mœurs. Contrairement aux usages consistant à faire travailler de très
jeunes enfants en qualité d’apprenti, selon la loi, ne peut être engagé comme apprenti que le
jeune ayant atteint l’âge légal pour le travail. Le maître qui emploie plus de dix ouvriers ne
peut recevoir un nombre d’apprenti supérieur à la moitié de leur effectif.

Le contrat de d’apprentissage ne peut excéder quatre ans (renouvellement y compris). Le


maitre doit tenir un livret individuel d’apprentissage où sont mentionnées toutes les
compétences acquises par l’apprenti. L’apprenti a droit à une allocation sous forme de
participation du maître à ses frais de déplacement et de restauration. Autant dire qu’il ne s’agit
pas véritablement d’une rémunération, d’autant plus que le montant n’est pas déterminé, ne
serait-ce que de façon approximative ou indiciaire. Il est simplement mentionné que
l’allocation tient compte, d’une part, des avantages que l’apprenti tire de l’enseignement du
métier et, d’autre part, des soins et suggestions que cet enseignement présente pour le maître.

2- Le contrat de stage

Le stage, bien que très couramment pratiqué, n’avait pas été règlementé par le code du travail
de 1997. Ce qui a laissé libre cours à des pratiques des plus discutables et notamment une
exploitation des stagiaires qui étaient employés pour des postes permanents au sein de
l’entreprise avec une rémunération dérisoire (lorsqu’il y en avait une) et une précarité absolue.
Face à ces pratiques, le gouvernement a finalement réagit par la promulgation du Décret
n° 2015-777 du 02 juin 2015 fixant les règles applicables au contrat de stage.

Désormais, le contrat de stage doit obligatoirement être conclu par écrit et sa durée
(renouvellement y compris) ne peut excéder deux ans. La violation de ces règles entraine
automatiquement la requalification du contrat en CDI et aucune entreprise ne peut recevoir un
nombre de stagiaire supérieur au quart de l’effectif des travailleurs dans chaque catégorie
d’emploi objet du stage. Dans la relation de travail, le stagiaire a un statut semblable aux
autres salarié (discipline, congé etc…). de plus, le stagiaire a droit à une rémunération appelée
allocation mensuelle qui doit être au moins égale au salaire minimum de la catégorie d’emploi
de référence.

Ce dispositif visant à préserver le stagiaire des abus risque cependant, paradoxalement,


d’obstruer l’accès au stage pour les jeunes diplômés en quête d’expérience professionnelle.

18
Afin de tempérer la rigueur du nouveau statut des stagiaires pour l’entreprise, il est prévu que
l’employeur qui reçoit plus de dix stagiaires est admis au bénéfice d’allègements de charges.

Le décret distingue quatre types de contrats de stage :

1- Le stage d’incubation : est celui par lequel l’entreprise reçoit et prépare le stagiaire à
mener une activité professionnelle comme entrepreneur ;
2- Le stage d’adaptation : est celui par lequel l’entreprise assure au stagiaire l’acquisition
d’une expérience pratique en rapport avec sa formation ;
3- Le stage pré-embauche : est celui par lequel le stagiaire est préparé en vue d’une
embauche définitive ;
4- Le stage requalification : est celui par lequel l’entreprise donne à un jeune diplômé
formé pour un métier donné, une qualification lui permettant d’exercer un autre métier
(diversification des compétences).

E- Le tâcheronnat

Le tâcheronnat est une forme particulière de relation de travail précaire. Il instaure une
relation tripartite entre un entrepreneur et un tâcheron d’une part et le tâcheron et des ouvriers
d’autre part. Les ouvriers sont liés au tâcheron par des contrats de travail à durée déterminée.

Prévu par le code du travail, la règlementation de ce contrat n’a été précisée qu’avec l’arrêté
ministériel n°30 du 07 janvier 2005 (JO n°6204 du 05 févier 2005). Cet arrêté définit le
contrat de tâcheronnat comme « celui par lequel, une personne physique s’engage vis à vis
d’une autre à exécuter une tâche ou réaliser un ouvrage en recrutant elle-même la main
d’œuvre nécessaire à cette fin » (art 1er). L’article L.77 CT définit le tâcheron comme un
maître ouvrier inscrit au registre des corps et métiers qui recrute à titre occasionnel des
ouvriers, et qui leur fournit l’outillage et les matières premières en vue de la réalisation d’un
ouvrage déterminé. Le tâcheron est considéré comme un sous-traitant qui emploie et rémunère
un personnel qu’il choisit lui-même. Le tâcheron se trouve dans la situation de sous-
entrepreneur mais il existe une garantie de l’entrepreneur principal en cas d’insolvabilité du
tâcheron. L’on distingue selon que les ouvriers travaillent ou non sur un site appartenant à
l’entrepreneur principal :

- Lorsque les ouvriers travaillent dans un atelier, magasin ou chantier de l’entrepreneur,


ce dernier est substitué au tâcheron pour l’ensemble de ses obligations envers les

19
travailleurs comme s’il était leur véritable employeur (salaires, congés payés,
obligations fiscales et sociales etc…).
- Lorsque les ouvriers ne travaillent pas sur un site tenu par l’entrepreneur, ce dernier
n’est substitué au tâcheron que pour le paiement des salaires, allocations de congés
payés et du versement de la part patronale des cotisations sociales.

Néanmoins il faut préciser que l’entrepreneur ne joue que le rôle de garant vis-à-vis des
travailleurs. Si l’insolvabilité du tâcheron est avérée et que l’entrepreneur exécute ses
obligations à sa place, il pourra ultérieurement se retourner contre lui pour remboursement.

Compte tenu de la nature tripartite de la relation, des confusions peuvent être faites sur les
qualités des uns et des autres, c’est pourquoi le législateur impose au tâcheron une obligation
de transparence. Cette obligation concerne en premier lieu sa qualité ; le tâcheron doit
indiquer sa qualité de tâcheron par voie d’affiches permanentes sur les lieux de travail. Cette
affiche précise également le nom et l’adresse de l’entrepreneur pour qui il travaille. En second
lieu, l’obligation de transparence concerne sa rémunération et celle de ses travailleurs. Il doit
afficher sur les lieux de travail les dates de paiement des salaires à ses ouvriers et c’est à la
même occasion et en présence de ses ouvriers que l’entrepreneur paie le tâcheron lui-même.

Les différentes affiches doivent obligatoirement être envoyées à l’inspecteur du travail en


même temps qu’une déclaration précisant les noms, adresse, qualité et l’adresse des différents
chantiers du tâcheron avant l’exécution de ses contrats.

Le contrat de tâcheronnat doit obligatoirement être passé par écrit, visé par l’inspecteur du
travail et comporter les mentions suivantes :

- les noms, adresse et raison sociale des contractants ;

- la nature et l’étendue des prestations ou services objet du contrat ;

- la durée de ces prestations et services ;

- le lieu d’exécution de ceux-ci et la situation des différents chantiers du tâcheron ;

- le nombre approximatif de travailleurs à occuper ;

- l’échéancier des paiements.

SECTION 2/ Les conditions de travail


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Paragraphe 1/ La durée du travail
La durée hebdomadaire du travail est fixée à 40 heures au Sénégal (Art L.135 CT) sauf
exception dans certains secteurs déterminés par arrêté ministériel. La rémunération du
travailleur est en principe calculée sur la base de ce temps de travail qui est donc de 173,33
heures pour les travailleurs mensualisés et qui leur donne donc droit à un salaire plein et entier
(8 heures X 5 jours X 52 semaines, le tout divisé par 12 mois). Seul le temps de travail effectif
doit être comptabilisé dans la durée du travail du salarié. En effet, il faut distinguer le temps
de travail effectif du temps de présence au sein de l’entreprise. Le temps de travail effectif
correspond au temps durant lequel le salarié se tient à la disposition de son employeur prêt à
recevoir ses instructions (qu’il soit effectivement travaillé ou non, ce qui est rémunéré c’est la
disponibilité du salarié). Parfois le salarié est présent au sein de l’entreprise mais il n’est pas
ou plus à la disposition de son employeur (pause, temps d’habillage).

Cette durée hebdomadaire de 40 heures n’est toutefois qu’un maximum légal ; le contrat de
travail ou des conventions et accords collectifs peuvent prévoir des durées inférieures donnant
doit à un salaire entier. Néanmoins, lorsque la durée de travail est inférieure d’au moins 1/5 à
la durée légale du travail, l’on considère que le travailleur est à temps partiel (soit une durée
hebdomadaire inférieure ou égale à 32 heure). La rémunération du travailleur à temps partiel
est proportionnellement inférieure à celle de ses collègues qui sont à temps plein par rapport à
son temps de travail.

Lorsque le salarié travaille au-delà de la durée légale du travail, il effectue des heures
supplémentaires. Ces heures supplémentaires doivent être rémunérées en dehors de sa
rémunération normale qui correspond à son temps de travail. La rémunération des heures
supplémentaires se fait obligatoirement avec une majoration. Celle-ci est revalorisée par la
CCNI de 2020 à 15% pour les 8 premières heures et à 40% au-delà et 60% pour les heures
effectuées de nuit (article 49 CCNI) mais le contrat de travail ou des conventions et accords
collectifs peuvent prévoir un taux de majoration supérieur. Dans le cadre d’une année civile, il
peut être demandé au travailleur d’effectuer un volume d’heures supplémentaires appelé
contingent annuel d’heures supplémentaire qui est limité à 100 heures par travailleur après
simple information de l’inspecteur du travail. Si l’employeur entend dépasser ce contingent, il
doit déposer une demande auprès de l’inspecteur du travail et en informer les représentants du
personnel. Les représentants du personnel disposent de 8 jours pour donner leur avis (en cas
de silence, l’avis est réputé favorable), après l’expiration de ce délai, l’inspecteur du travail

21
dispose à son tour de 8 jours pour rendre sa décision. L’autorisation n’est accordée que pour
10 heures hebdomadaires par travailleur et pour une durée maximale de 6 mois.

Certains aménagements du temps de travail entrainent le salarié à travailler au-delà de la


durée légale mais cela n’entraine pas nécessairement des heures supplémentaires. En premier
lieu des heures de travail perdues du fait d’évènements extérieures qui entraine un arrêt
collectif du travail tels que des coupures d’électricité ou des ‘‘ponts’’, par exemple, peuvent
être récupérés et aboutir à l’augmentation du temps de travail d’une heure par jour et dans la
limite de 3 heures par semaine sans pour autant constituer des heures supplémentaires.

Ensuite, certains travailleurs peuvent avoir des horaires individualisés les faisant travailler au-
delà de 40 heures certaines semaines et moins de 40 heures pour d’autres sans que cela ne soit
considéré d’une part comme des heures complémentaires et d’autre part comme du temps
partiel.

Enfin, dans certains secteurs où les travailleurs, au cours de la journée, ont des périodes
d’inactivité alors même qu’ils sont sur le lieu de travail et à la disposition de l’employeur, l’on
peut déterminer un volume horaire supérieur à 40 heures hebdomadaire mais que l’on va
considérer comme étant l’équivalent de 40 heures en raison de ces périodes d’inactivité, c’est
le régime de l’équivalence mis en place par l’article 4 décret n° 70-183 du 20 février 1970
fixant le régime général des dérogations à la durée légale du travail. Ces travailleurs qui
effectuent globalement des horaires supérieurs à 40 heures seront rémunérés sur la base de 40
heures. Par exemple, un travailleur qui est sous un régime d’équivalence de 48 heures
hebdomadaire ne pourra prétendre au paiement d’heure complémentaire qu’à partir de la
49ème heure de travail.

Paragraphe 2/ Le repos, les congés et absences

A- Le repos

La durée journalière de travail est de 8 heures consécutives, avec les heures supplémentaires
cela peut aller jusqu’à 10 heures. Exceptionnellement, dans certains secteurs d’activité l’on
peut être autorisé à travailler jusqu’à 12 heures dans le cadre d’un travail en continu. Le repos
obligatoire entre deux journées de travail est fixé à 12 heures consécutives et entre deux

22
semaines de travail, ce repos est de 24 heures qui se cumulent au 12 heures entre deux
journées pour donner un total de 36 heures.

Toutefois, durant son repos, le travailleur peut être placé en période d’astreinte qui n’est pas
assimilée à un temps de travail. L’astreinte est définie comme étant une période pendant
laquelle le travailleur, sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, a
l’obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d’être en mesure d’effectuer une
intervention dont le but essentiel est d’assurer la sécurité des personnes ou le dépannage
d’installations, hors entretien courant. La durée de cette intervention étant considérée comme
un temps de travail effectif. En effet, seule la durée de l’intervention est considérée comme
temps de travail et ouvre droit à une rémunération pour les heures travaillées. Néanmoins, le
travailleur placé en astreinte bénéficie d’une indemnité compensatrice pour les contraintes
liées à la privation de mobilité.

B- Les congés

D’après le code du travail, le travailleur a droit à des congés payés après 12 mois de service
effectif, à raison de 2 jours ouvrables par mois (L.148 CT). Ce droit à des congés est
augmenté pour les mères de famille à raison de 1 jour par enfant de moins de 14 ans et pour
tous les salariés en fonction de leur ancienneté. La difficulté avec le code du travail est que
Même si l’article L.150 n’autorise le départ en congé du salarié qu’après 12 mois de service
(période de référence ou de fabrication), en réalité le congé est pris après 11 mois de service,
complétés par le mois de congés précédent qui est assimilé à du temps de travail. Ainsi, le
salarié pourra bénéficier de 24 jours de congé à raison de 2 jours par mois. Les congés
peuvent être pris en une seule fois, le plus souvent à la période estivale (entre le 1er mai et le
31 octobre) mais une pratique de plus en plus répandue tend au fractionnement des congés
entre la période estivale et un autre moment de l’année.

Le salarié a également la possibilité de reporter ses congés et de ne pas les prendre tout de
suite au terme de la période de référence. En effet, il est possible, de commun accord entre
l’employeur et le salarié de reporter la prise des congés dans la limite de 3 ans. Néanmoins, un
congé obligatoire de 6 jours au moins doit être pris chaque année.

Durant son mois de congé, le salarié perçoit une rémunération égale à un mois de salaire ou
plus précisément à 1/12ème des sommes perçues durant la période de référence. Lorsque le

23
contrat de travail est rompu pour quelques raisons que ce soit, au cours de la période de
référence, les indemnités de congé correspondantes sont calculées et versées au salarié.

C- Les absences du travailleur


Au cours de l’année, les aléas de la vie faisant, le travailleur peut être amené à s’absenter de
son poste de travail pour diverses raisons. Certaines de ces absences lui permettent de
conserver sa rémunération intacte alors que d’autres entrainent une retenue sur salaire.

1- Les absences pour évènements familiaux

En premier lieu, le travailleur peut bénéficier d’autorisations d’absence exceptionnelles pour


participer à des évènements familiaux. Dans la limite de 15 jours par an, ces absences
n’entrainent aucune retenue sur salaire à condition qu’elles soient dûment justifiées (art 27
CCNI). Il s’agit des absences pour :

- Mariage du travailleur ......................................................................................................3


jours

- Mariage d'un de ses enfants, d'un frère ou d'une sœur........................................................1


jour

- Décès d'un conjoint ou d'un descendant en ligne directe..................................................4


jours

- Décès d'un ascendant en ligne directe, d'un frère ou d'une sœur......................................2


jours

- Décès d'un beau-père ou d'une belle-mère .......................................................................2


jours

- Naissance d'un enfant.........................................................................................................1


jour

- Baptême d'un enfant ..........................................................................................................1


jour

- Première communion.........................................................................................................1
jour

- Hospitalisation d'un conjoint ou d'un enfant du travailleur............................................... 2


jours

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En dehors de ces cas, le travailleur peut bénéficier d’absences de courte durée et
proportionnelles à l’évènement pour faire face à des évènements graves et fortuits touchant
directement son foyer. Il doit cependant en avertir son employeur au plus tard dans les 4 jours
suivant la survenance de l’évènement, ce qui entraine alors la suspension du contrat de travail
et de la rémunération.

Dans la pratique l’on note une tendance à l’exagération du côté des travailleurs qui sollicitent
nombres d’autorisation pour des évènements touchant à la famille élargie ou à des amis et les
pratiques africaines les tolèrent largement sans opérer de retenue sur salaire. Mais cette
complaisance de l’employeur ne constitue en aucune manière un droit pour le salarié qui
devra toujours faire preuve de parcimonie.

2- Absences pour maladie ou accident

Le travailleur qui doit s’absenter de son poste de travail est traité différemment selon l’origine
de la maladie ou de l’accident.

S’il s’agit d’un accident ou d’une maladie qui n’a pas de lien avec le travail, le contrat de
travail est suspendu pendant une période maximale de 6 mois pouvant éventuellement être
augmentée en fonction de l’ancienneté du travailleur (jusqu’à 8 mois pour une ancienneté de 7
à 15 ans, et 10 mois au-delà selon l’article 86 CCNI). Durant le premier mois de son absence
pour le salarié ayant moins de 5 ans d’ancienneté et durant les deux premiers mois pour celui
qui a plus de 5 ans d’ancienneté, le salarié perçoit son salaire normal. Au-delà, le salarié reçoit
la moitié de son salaire entre 3 et 5 mois en fonction de son ancienneté. Ces délais passés, le
travailleur devra se tourner vers les organismes de sécurité sociale.

Si la maladie ou l’accident a une origine professionnelle, le travailleur est mieux traité. Le


contrat de travail est suspendu jusqu’à la consolidation des blessures ou la guérison. Le
travailleur bénéficie de l’intégralité de sa rémunération durant une période de 6 à 10 mois en
fonction de son ancienneté dans l’entreprise. Cette rémunération est constituée par les
indemnités journalières des institutions de sécurité sociale complétées par une allocation de
l’employeur afin de maintenir le montant de sa rémunération habituelle. Si au terme de la
période de suspension du contrat le travailleur réintègre l’entreprise et retrouve son poste ou
un poste équivalent. Lorsque le travailleur n’est plus à même d’occuper son poste précédent
dans des conditions normales la CCNI invite l’employeur, avec l’aide des délégués du

25
personnel à procéder à un reclassement de ce dernier (art. 88). Mais cette disposition manque
de précision quant aux modalités du reclassement et à d’éventuelles sanction en cas de
manquement de l’employeur. De plus, la CCNI n’envisage pas l’adaptation de l’emploi au
salarié dont les aptitudes sont durablement affectées par une maladie ou un accident.

3- Absences pour autres motifs


Le travailleur peut également bénéficier d’autorisations d’absence dans la limite de 15 ou 30
jours annuelle pour participer à des formations, stage ou compétitions sportives. Il peut
également bénéficier d’absence d’une durée maximale de 15 jours pour assister à des congrès
et activités syndicales pour lesquels il dispose d’un mandat régulier. Pour ces absences,
aucune rémunération n’est prévue.

Les conventions et accords collectifs, ainsi que les usages et le contrat de travail peuvent
prévoir d’autres cas d’absence avec ou sans rémunération. De même que l’employeur peut,
discrétionnairement autoriser certaines absences de manière ponctuelle mais il devra prendre
garde à ne pas pratiquer de discrimination dans ces autorisations.

Paragraphe 3/ La rémunération du travailleur


A- Notion et détermination du salaire
La rémunération est la contrepartie perçue par le travailleur pour les prestations accomplies au
bénéfice de l’employeur. En principe, elle est librement déterminée par les parties mais en
raison de la sensibilité de la question sur le plan social et des contraintes économiques de
l’entreprise, le montant et le paiement de la rémunération sont de plus en plus règlementés.
C’est ainsi que le principe de non-discrimination est affirmé par tous les textes qui traitent de
la question du salaire (à travail égal, salaire égal). De même, il est déterminé un salaire
minimum interprofessionnel garanti (SMIG) qui représente le salaire minimum en dessous
duquel aucun travailleur ne peut être payé. Le taux horaire du SMIG a été pendant plus de 20
ans de 209.10 FCFA, ce qui, appliqué au volume horaire mensuel de 173.33 heures, donnait
un salaire minimum de 36.243 FCFA pour les travailleurs mensualisés. Les conventions
collectives prévoient généralement des minimas plus élevés en fonction des secteurs d’activité
et des catégories de travailleurs. Et, conformément au principe de faveur, le contrat de travail
ne peut que prévoir des montants plus élevés pour chaque salarié en fonction de sa
classification professionnelle.

26
Ce SMIG a été largement dépassé par l’évolution sociale et économique et est devenu
dérisoire. Malgré les vives protestations des travailleurs, la situation a stagné jusqu’à la
signature en mai 2018 d’un protocole d’accord relatif à sa revalorisation et à celle du et du
Salaire minimum agricole garanti (SMAG), aux termes de deux années de négociations, entre
les organisations syndicales et patronales les plus représentatives.

Le SMIG horaire a été valorisé à 302,890 francs CFA à compter du 1er juin 2018, soit une
hausse de 44,8 %. Il est ensuite passé à 317,313 francs CFA à compter du 1er janvier 2019,
puis à 333,808 francs CFA à compter du 1er décembre 2019. Quant au SMAG, il est passé à
213,92 francs CFA à compter du 1er juin 2018 alors qu’il était à 182,96 FCFA jusque-là.

La rémunération du travailleur se calcule selon trois modalités : au temps, au rendement, au


chiffre d’affaire.

- La principale modalité est le salaire au temps, calculé d’après le temps de travail. Le


plus souvent, ce salaire est mensualisé et payé à la fin de chaque mois de travail mais
il peut également être payé à la journée ou à l’heure. Il a l’avantage d’assurer une
rémunération régulière et stable au travailleur et a la faveur des autorités publiques.
- En second lieu il y a le salaire à la pièce ou au rendement qui est calculée d’après la
productivité du salarié (normes quantitatif et/ou qualitatif). En raison des aléas d’un
tel mode de calcul de la rémunération, il est reçu avec méfiance par le législateur.
C’est ainsi que les articles L.110 et L.111 du code du travail l’encadrent strictement en
prévoyant que les modalités de calcul du salaire au rendement doivent être établies de
telle sorte que le travailleur moyen puisse avoir un revenu au moins égal à un
travailleur à temps effectuant un travail analogue. De plus, l’employeur est obligé
d’afficher les modalités de calcul aussi bien sur les lieux de travail que sur ceux où
s’effectue le paiement. L’article 47 de la CCNI rajoute que le salarié au rendement doit
recevoir une rémunération au moins égale au minimum de la catégorie dont il relève et
que sa durée de travail ne peut être supérieure à celle de son chantier ou de son atelier.
Enfin, l’employeur doit prendre des dispositions pour éviter le surmenage des salariés
au rendement et leur donner des éléments permettant de calculer leur salaire
préalablement à l’exécution des taches.
- Enfin, le salaire peut être versé en fonction du chiffre d’affaires. Des objectifs sont
fixés au salarié et sa rémunération est calculée sur un pourcentage en rapport avec le
chiffre d’affaires rapporté à l’entreprise. Ce mode de calcul entraine également la
méfiance du législateur. En effet, il ne doit pas avoir pour effet d’abaisser la
27
rémunération en dessous du SMIG ou du minima conventionnel. Le mode de calcul
doit être basé sur des éléments objectifs, indépendants de la volonté de l’employeur et
ce dernier doit effectivement donner au salarié les moyens d’atteindre lesdits objectifs.
Enfin, ce mode de calcul ne doit pas avoir pour effet de transférer le risque de
l’entreprise sur le salarié. Généralement le salaire selon le chiffre d’affaires ne
constitue qu’un complément de rémunération destiné à augmenter la motivation des
salariés.

B- Le paiement du salaire
Le salaire est payé en monnaie ayant cours légal au Sénégal (Franc CFA). Il est payé au plus
tard dans les 8 jours qui suivent la fin du mois de travail qui y donne droit pour le salarié
mensualisé, dans les 4 jours qui suivent la fin de la quinzaine pour les salariés payés à la
quinzaine, dans les 2 jours qui suivent la fin de la semaine pour les salariés payés à la semaine
et à la fin de la journée pour les journaliers. Le salaire est, en principe, payé sur les lieux de
travail et pendant les heures de travail et entre les mains du travailleur lui-même. Mais avec la
bancarisation, ce principe est de plus en plus relatif.

Le paiement du salaire donne lieu à un formalisme qui consiste à en laisser une trace écrite. Il
s’agit de l’émission d’un bulletin de paie par l’employeur et de la tenue d’un registre par lui.

Le bulletin de paie doit faire le détail de tous les éléments constituant la rémunération du
travailleur ainsi que les charges (salaire de base, différentes primes et indemnités, de même
que les cotisations dont le montant a été prélevé sur le salaire etc…). Toutes les mentions
figurant au bulletin de paie sont reprises, pour chaque salarié, sur le registre de paie et émargé
par chaque salarié au moment du paiement. Le registre de paie et le bulletin de paie font
présumer le paiement des sommes qui y figure mais en cas de contestation par le salarié,
l’employeur sera admis à prouver l’effectivité du paiement par d’autres moyens (attestations
bancaire, témoignage etc…).

C- Caractères et protection du salaire


Le salaire a un rôle social fondamental en ce qu’il constitue souvent le seul moyen de
subsistance du travailleur ; il a un caractère alimentaire. De ce fait, il bénéficie d’un certain
nombre de protections qui ne profitent pas à toutes les créances de sommes d’argent.

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C’est ainsi que le salaire ne peut être saisi que dans une quotité déterminée : l’article L.131 du
code du travail renvoie aux dispositions de l’article 381 al 1er CPC qui fixent cette quotité
comme suit :

- 10% jusqu’à 20.000 francs par mois;

- 20% de 20.001 à 30.000 francs par mois;

- 30% de 30.001 à 100.000 francs par mois;

- 40% de 100.001 à 200.000 francs par mois;

- 100% au-delà de 200.000 francs par mois.

De même, en cas de faillite de l’employeur, les salariés sont des créanciers privilégiés qui
bénéficient d’un traitement de faveur leur permettant de recouvrer le plus possible et au plus
vite ce qui leur est dû.

Il est également interdit à l’employeur d’infliger des amendes aux salariés ou de se faire payer
les sommes qui lui sont dues par ses salariés par le biais de la compensation qui, en principe,
joue de plein droit entre deux dettes exigibles. En effet, ne pourront être prélevées du salaire
que des sommes autorisées par la loi et dans les limites et pour les causes qu’elle fixe.

L’action en paiement du salaire et de ses accessoires se prescrit par 5 ans à partir du moment
où ils sont exigibles, néanmoins, en cas de reconnaissance expresse ou même implicite par
l’employeur, de même qu’en cas de refus de prêter le serment à lui déféré, ce délai est
prolongé jusqu’à 10 ans.

Paragraphe 4/ Le pouvoir de direction de l’employeur


L’employeur est le chef de l’entreprise et à ce titre il dispose d’un pouvoir de direction qui se
traduit dans le contrat de travail par le lien de subordination juridique. Plus largement, ce
pouvoir lui permet de recruter les employés de son choix, de les faire travailler dans les
conditions qu’il détermine et de les licencier au besoin. Toute la vie de travail est donc
innervée par le pouvoir de direction de l’employeur. Ce pouvoir permet à l’employeur
d’organiser le travail, de déterminer la conduite à observer sur le lieu de travail et de
sanctionner les écarts.

29
A- Pouvoir d’organisation de l’entreprise
Le pouvoir de direction se manifeste lors du recrutement du travailleur par un droit à la
subjectivité qui est reconnu à l’employeur. Certes, l’interdiction des discriminations permet de
réguler quelques peu le processus mais au final l’employeur recrute le candidat de son choix
et en cas de pratiques discriminatoires, le candidat évincé ne pourra éventuellement prétendre
qu’à des dommages et intérêts et non voir le juge condamner l’employeur à l’embaucher.

Ce pouvoir de direction se traduit au quotidien par l’organisation du travail. En effet,


l’employeur, en tant que maître à bord, organise le fonctionnement de son entreprise, les
modes de production, la stratégie économique, l’organisation du temps de travail et plus
globalement des conditions de travail etc… La démocratie sociale veut que de plus en plus
des organes représentatifs des travailleurs soient consultés pour certaines décisions mais le
plus souvent ce n’est qu’à titre informatif et l’employeur n’est pas lié par l’avis émis.

Dans le cadre de l’organisation du travail, l’employeur peut modifier les conditions de travail
qui étaient fixées au contrat de chaque salarié. En effet, les changements de conditions de
travail sont des modifications du contrat qui ont peu d’incidence sur la relation de travail et
qui n’entrainement pas d’aggravation notable des conditions de travail (exemple : changement
de bureau, réaménagement des heures de pause).

Le passage du travail dans les locaux de l’entreprise au télétravail constitue toutefois une
modification du contrat de travail qui ne peux être imposée au salarié. Toutefois, durant l’état
d’urgence sanitaire consécutif à la pandémie de Covid 19, l’ordonnance n°001-2020 a permis
le passage obligatoire en télétravail dans les entreprises dont l’activité pouvait se poursuivre
suivant cette modalité. Il s’agissait d’une mesure destinée à éviter les licenciements pour
motif économique et le chômage technique en temps de crise. Mais quoi qu’il en soit,
l’employeur doit mettre en place un système de contrôle du temps ou de la charge de travail
des salariés en télétravail afin de le rendre compatible avec la vie privée et familiale (droit à la
déconnexion).

B- Pouvoir règlementaire
Le règlement intérieur est un ensemble de règles écrites élaborées par l’employeur et
s’imposant au personnel mais dont le contenu est défini limitativement. En effet, d’après
l’article L. 100 CT, le contenu du règlement intérieur est limité aux règles relatives à
l’organisation technique du travail, à la discipline et aux prescriptions concernant l’hygiène et

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la sécurité, nécessaires à la bonne marche de l’établissement. Le pouvoir règlementaire étant
par nature restrictif des libertés, il ne peut être accordé à une personne privée (l’employeur)
qu’avec une extrême prudence. C’est ainsi que la loi détermine de le contenu du règlement
intérieur et prévoit expressément que toutes clauses étrangères au contenu fixé sont
considérées comme nulles de plein droit.

Les règles relatives au règlement intérieur ont été précisées par l’arrêté n° 11512 MFPTEOP-
DTSS en date du 11 décembre 2009. Les modalités de communication, de dépôt et
d’affichage du règlement intérieur, ainsi que le nombre de travailleurs de l’établissement au-
dessus duquel l’existence de ce règlement intérieur est obligatoire.

Le règlement est obligatoire dans les établissements comptant au moins 10 salariés. Il est
rédigé unilatéralement par l’employeur mais ce dernier a l’obligation de consulter les
délégués du personnel, s’il y en a, et de recueillir leur avis. Ce n’est qu’après avoir reçu l’avis
des délégués du personnel, le cas échéant, que l’employeur transmet le règlement intérieur à
l’inspecteur du travail avec les observations formulées par les délégués du personnel et les
réponses de l’employeur. Dans les 15 jours qui suivent la transmission du dossier, l’inspecteur
du travail communique son avis à l’employeur avec, au besoin, une demande de retrait ou de
modification de certaines dispositions du règlement intérieur. Dans les 15 jours qui suivent
l’avis de l’inspecteur du travail, l’employeur dépose deux exemplaires du règlement au greffe
du tribunal du travail en prenant en compte les remarques de l’inspecteur le cas échéant. Un
exemplaire est transmis à l’inspecteur par le greffe du tribunal. Et ce n’est qu’à ce moment
que le règlement peut être affiché et entrer en vigueur au sein de l’entreprise. Il est affiché à
l’entrée de l’entreprise, dans les locaux où se fait l’embauche et dans les lieux de travail ainsi
qu’à tout autre endroit indiqué pour en assurer une large diffusion auprès du personnel.

Le règlement peut ultérieurement être modifié mais toujours en suivant la procédure ci-haut
décrite.

C- Le pouvoir disciplinaire
Tous les pouvoirs de l’employeur n’auraient aucun sens si en fin de compte il ne pouvait pas
sanctionner les écarts de conduite au sein de son entreprise. C’est ainsi qu’il lui est reconnu un
pouvoir disciplinaire. Ce pouvoir s’exerce toutefois dans des conditions déterminées par la loi
et les abus sont sanctionnés par le juge.

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La faute est définie par l’article 119 COCC comme étant le manquement à une obligation
préexistante de quelque nature qu’elle soit. Cette définition ne permet pas, toutefois, de cerner
la notion de faute qui peut consister en un acte inapproprié ou en une omission. Quoi qu’il en
soit la faute s’apprécie au cas par cas en considération des circonstances de chaque espèce. En
droit du travail il existe une classification graduée des fautes pouvant être reprochées au
travailleur :

- La faute légère : c’est celle qui relève d’une négligence, d’un manquement de
moindre gravité et n’appelle que des sanctions légères. Par exemple un retard
occasionnel de 10 minutes. Mais la répétition de faute légères peut être plus lourd de
conséquences et dénoter d’une insuffisance professionnelle ou d’une inaptitude du
travailleur à occuper son emploi (motif de licenciement).
- La faute sérieuse : la faute sérieuse est celle qui caractérise un manquement dans
l’exécution du contrat de travail par le salarié. C’est lorsqu’il manque aux obligations
imposées par son poste. Exemple : une secrétaire de direction qui oublie de
transmettre des courriers ou qui commet des fautes d’orthographe répétées dans la
rédaction des correspondances, absence injustifiée.
- La faute grave : la faute grave est celle d’une gravité telle que le maintien de la
relation contractuelle est impossible en raison du climat de défiance et de la perte de
confiance qui s’en suit. Elle se traduit par un comportement ou un manquement
particulièrement inapproprié de la part du salarié. Exemple : insubordination, injures,
comportement ou déplacé etc…
- La faute lourde : elle est caractérisée par une intention de nuire de la part du salarié.
C’est lorsque le travailleur agit intentionnellement dans le but de causer un préjudice à
son employeur et à l’entreprise. C’est par exemple le travailleur qui dénigre
publiquement l’entreprise dans laquelle il travaille, ou qui même une activité parallèle
concurrente à celle de son employeur. C’est aussi le cas du travailleur qui commet un
vol au préjudice de l’entreprise, qui se montre agressif et/ou menace ses collègues et
supérieurs.
Lorsque le travailleur commet une faute il s’expose à des sanctions de la part de son
employeur. Ces sanctions doivent être proportionnelles à la gravité de la faute commise.
L’article 41 CCNI énonce les sanctions applicables au personnel sans les classifier mais
globalement, l’on distingue les sanctions mineures et les sanctions lourdes.

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- Les sanctions mineures : ce sont les sanctions qui n’ont pas d’incidence directe sur la
présence du salarié dans l’entreprise, sa carrière ou sa rémunération. Il s’agit de la
réprimande, de l’avertissement verbal ou écrit et de la mise à pied disciplinaire de 1 à
3 jours. La mise à pied disciplinaire est une sanction qui éloigne temporairement le
salarié de l’entreprise avec privation de salaire pour les jours non-travaillés à titre de
sanction. Elle doit être distinguée de la mise à pied conservatoire qui éloigne le salarié
de l’entreprise le temps de statuer sereinement sur une sanction à son encontre à la
suite d’une faute. Ces sanctions mineures se prescrivent par 6 mois et dès lors elles ne
peuvent plus être invoquées à l’encontre du salarié.
- Les sanctions lourdes : ces sanctions ont pour effet d’éloigner le salarié de
l’entreprise (définitivement ou temporairement) ou affectent sa carrière ou sa
rémunération. Il s’agit du licenciement disciplinaire et de la mise à pied de 4 à 8 jours.
Il n’existe pas en droit sénégalais des sanctions disciplinaires telles que la
rétrogradation ou la mutation et il est strictement défendu d’infliger des sanctions
financières au salarié. Les sanctions lourdes se prescrivent par 1 an.
Il est prévu une procédure disciplinaire sommaire par l’article 41 précité de la CCNI qui
insiste sur le respect du contradictoire et l’information de l’inspecteur du travail. En effet,
avant de prononcer une sanction, l’employeur doit mettre le salarié en mesure de fournir des
explications verbales ou écrite en se faisant assister par un délégué du personnel ou un
mandataire syndical selon son souhait. Par la suite, l’employeur prend sa décision qu’il est
obligé de motiver et de signifier par écrit au salarié, ampliation faite à l’inspecteur du travail.

SECTION 4/ Les évènements affectant le contrat de travail

Paragraphe/ La modification du contrat de travail

L’on considère qu’il y a modification du contrat de travail lorsque l’une des parties propose
d’en changer une ou plusieurs dispositions substantielles. Autrement, il n’y aurait non pas
modification de contrat mais simplement changement des conditions de travail. Compte tenu
du lien de subordination juridique et du pouvoir de direction de l’employeur, c’est à lui qu’il
appartient de changer les conditions de travail. Lorsqu’il prend une telle initiative, le salarié
est obligé de se conformer à ses directives au risque de commettre une faute pouvant justifier
son licenciement. Il s’agit par exemple d’un décalage des horaires de travail de quelques
minutes, un changement de bureau dans le même bâtiment ou dans un bâtiment se situant à

33
proximité. Dans ces cas, la modification effectuée n’affecte pas les dispositions essentielles du
contrat et le consentement du salarié n’est pas requis.

Par contre, la véritable modification du contrat est celle qui affecte les éléments essentiels de
celui-ci : la rémunération, la qualification professionnelle et les attributions du salarié, le lieu
de travail, la durée du travail etc… Cette modification ne peut se faire que de commun accord
entre les parties. Ainsi, l’employeur comme le salarié peuvent refuser la proposition faite par
l’autre partie.

Si l’employeur refuse la modification proposée par le salarié, ce dernier a le choix entre


poursuivre l’exécution du contrat dans les termes initiaux ou prendre la responsabilité de la
rupture du contrat. L’employeur pour sa part ne peut proposer une modification substantielle
du contrat, emportant réduction de certains avantages pour le salarié, que pour des raisons
tenant à l’incapacité physique du travailleur, à la situation économique ou à la réorganisation
de l’entreprise. Cette proposition doit obligatoirement faire l’objet d’une proposition écrite.
Le salarié est libre d’accepter ou de refuser. En cas de refus, l’employeur peut poursuivre la
relation contractuelle ou procéder au licenciement du salarié en respectant les procédures
prévues pour ce faire et en versant l’indemnité de licenciement au salarié. Si le salarié
accepte, la modification ne sera effective qu’après signature d’un avenant au contrat de travail
et après expiration d’un délai équivalent à celui du préavis selon l’article 33 de la CCNI.
Lorsque le déclassement est proposé en raison de l’inaptitude physique du salarié, celui doit
au préalable avoir subi un examen médical concluant en la nécessité du changement d’emploi.

Le salarié peut également se voir affecté temporairement à un emploi de catégorie supérieure


ou inférieure à celui pour lequel il a été recruté sans pour autant que cela ne constitue une
modification de son contrat de travail. En cas de nécessité du service ou pour éviter des
perturbations graves de l’emploi, l’employeur peut, après consultation des délégués du
personnel, s’il y en a, affecter momentanément un salarié à un emploi de catégorie inférieure
pour une période maximale de 6 mois. Cette affectation provisoire n’a cependant aucun
incident sur la rémunération du salarié qui est maintenu en l’état.

Inversement, un salarié peut provisoirement être affecté à un emploi de catégorie supérieure.


Cette mutation provisoire est limité dans le temps à 15 jours pour les ouvriers spécialisés, un
mois pour les ouvriers professionnels, employés, agent des maîtrise, techniciens et assimilés,
trois mois pour les cadres et assimilés. Le salarié muté n’a pas automatiquement le bénéfice
de la rémunération et des avantages liés au poste qu’il occupe provisoirement. Il conserve en

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principe sont traitement habituel. Mais si l’intérim se poursuit au-delà des délais limites, le
salarié est définitivement reclassé dans le nouvel emploi avec tous les avantages dus. Le
reclassement n’est cependant pas automatique si le titulaire du poste est absent pour cause de
maladie, d’accident ou de congé. Dans ces cas toutefois, l’intérimaire aura accès à tous les
avantages financiers liés au poste si le remplacement se poursuit au-delà des durées
maximales.

Il n’y a pas également de modification du contrat de travail lorsqu’il y a changement dans la


situation ou la personnalité juridique de l’employeur dès lors que l’entité économique que
constitue l’entreprise conserve son identité. En effet, en cas de succession, reprise sous une
nouvelle appellation, vente, fusion, transformation de fonds, mise en société par exemple, les
contrats de travail se poursuivent avec le nouvel acquéreur. Néanmoins, pour des besoins de
réorganisation de l’activité, le nouvel acquéreur peut procéder à des licenciements pour motif
économique dans les conditions que nous verrons ultérieurement.

Paragraphe 2/ La suspension du contrat de travail

Le contrat de travail est appelé à se dérouler dans la continuité mais il y a des évènements ou
des circonstances qui entrainent une suspension du contrat. C’est-à-dire une période pendant
laquelle les parties sont dispensées d’exécuter leurs obligations principales.

A- Les évènements entrainant une suspension du contrat de travail

Beaucoup d’évènements peuvent entraîner la suspension du contrat de travail ; certains


tiennent au travailleur mais d’autres sont liés à l’employeur.

1- Les causes de suspension liées au travailleur

La disponibilité : c’est la situation du travailleur qui, sur sa demande, est autorisé par son
employeur à suspendre momentanément son contrat de travail pour des convenances
personnelles. La particularité de cette suspension du contrat de travail c’est que le travailleur
est libre d’exercer une activité rémunérée au bénéfice d’un autre employeur. Les parties sont
libérées de leurs obligations, sous respect de certaines obligations pouvant être résumées par
la notion de loyauté (non-concurrence, confidentialité etc…). C’est pourquoi l’obtention de la
disponibilité est laissée à la discrétion de l’employeur qui peut l’accorder ou non. Les parties
pourront convenir librement de la durée de la disponibilité.

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La maladie et accident : ces évènements, lorsqu’ils sont constatés par un médecin entraînent
une suspension du contrat peu importe qu’ils soient d’origine professionnelle ou non. La
durée maximale de la suspension est en moyenne de 6 mois mais en fonction de son
ancienneté le salarié peut bénéficier d’un délai plus important. Au-delà de ce délai,
l’employeur peut rompre le contrat de travail en procédant à un licenciement.

La grève : lorsqu’elle est déclenchée dans le respect des formes (après une tentative de
conciliation et un préavis de 30 jours), la grève entraîne une suspension du contrat de travail.
L’employeur ne peut donc pas prononcer de sanctions disciplinaires contre les travailleurs
grévistes pendant cette période mais il n’est pas non plus tenu de leur verser leur
rémunération.

Les congés payés : correspondent à une période de suspension annuelle du contrat de travail
afin de permettre au travailleur de prendre des vacances.

Le mandat de député et le service militaire : suspendent également le contrat de travail


pour lui permettre de servir son pays soit pour un mandat électif (député), soit pour le service
militaire qui n’est plus obligatoire désormais.

La mise à pied : c’est une mesure prononcée par l’employeur envers le travailleur à qui une
faute est reprochée. Le travailleur est temporairement écarté de l’entreprise (entre un et huit
jours) soit à titre de sanction (mise à pied disciplinaire), soit simplement le temps de statuer
sur le sort du travailleur (mise à pied conservatoire).

Le congé maternité : à l’occasion de la maternité, la femme salariée bénéficie de 14


semaines consécutives de congé dont 6 avant l’accouchement et 8 après. Ce congé peut être
prolongé en cas de grossesse pathologique ou de naissances multiples.

Les absences autorisées ou justifiées : ces absences qui ont pour cause des évènements
familiaux ou des besoins de formation ou de stage (Les congés et absences du travailleur).

Pendant la détention préventive du salarié : c’est la mise sous verrou du travailleur le


temps du procès pénal où le travailleur est accusé ou détenu. Le travailleur, bien qu’incarcéré,
bénéficie encore de la présomption d’innocence et son contrat de travail n’est que suspendu et
non rompu.

2- Les causes de suspension liées à l’employeur

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Le chômage technique : c’est l’interruption collective du travail justifiée par une cause
conjoncturelle ou un accident. L’employeur se trouve alors contraint de fermer
temporairement l’entreprise ou un ou plusieurs ateliers ou de procéder à la réduction du temps
de travail de tout ou partie du personnel. Cette mesure pouvant impacter sérieusement les
droits des travailleurs et libérer l’employeur d’une partie de ses obligations, sa mise en œuvre
doit faire l’objet d’une surveillance étroite. En principe, elle doit être prévue par une
convention collective qui en fixe les conditions. Quoiqu’il en soit, l’employeur ne pourra y
recourir qu’après consultation des délégués du personnel et information de l’inspecteur du
travail si une convention collective ne l’a pas prévu. La consultation des délégués du
personnel ne semble toutefois que formelle, car s’il est certain qu’ils peuvent donner leur avis,
cet avis ne peut être contraignant pour l’employeur.

Durant cette période, le salarié est toutefois tenu de rester à disposition de son employeur et
pourra être appelé à exécuter des missions ponctuelles. Ce dispositif permet un maintien des
emplois nonobstant une conjoncture difficile pour l’entreprise qui pourra demander un soutien
des autorités publiques.

Le service militaire de l’employeur : de même que le contrat est suspendu par le service
militaire du salarié, il est également suspendu par le service militaire effectué par l’employeur.

Le lock-out : c’est la fermeture de l’entreprise décidée par l’employeur en réponse à un


mouvement de grève. Comme le chômage technique, le lock-out est une mesure à surveiller
de près au risque de voir l’employeur en abuser. Par principe, cette mesure est interdite par la
loi, car il permet à l’employeur de se dérober de son obligation de fournir du travail à ses
employés, notamment à ceux non-grévistes, et donc de les rémunérer. Cependant, lorsque la
fermeture de l’entreprise est justifiée par une menace contre les installations ou l’intégrité
physique du personnel au cours de la grève, le lock-out devient légal.

B- Les effets de la suspension du contrat


1- La rémunération

En principe la rémunération n’est pas due en cas de suspension du contrat de travail ; étant la
contrepartie de la prestation de travail, la rémunération ne devrait pas être versée en cas
d’absence du travailleur. Néanmoins elle est maintenue dans certains cas ou, du moins, le
travailleur peut percevoir une indemnité compensatrice.

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La rémunération est intégralement maintenue pendant la durée du congé payé et pendant la
durée de l’absence pour maladie ou accident professionnels. Elle est partiellement due
pendant la durée de l’absence pour maladie ou accident non liées au travail : elle décroit avec
la durée de l’absence jusqu’à s’interrompre purement et simplement au-delà d’une certaine
durée. La femme lors de son congé de maternité continue à percevoir sa rémunération
normale. En cas de fermeture temporaire d’établissement par l’employeur ou de service
militaire du travailleur, ce dernier perçoit une indemnité dont le montant ne peut être
supérieur à celui du préavis de rupture du contrat (généralement un mois de salaire). Le
chômage technique quant à lui donne droit à une indemnité dont le montant est fixé par le
droit conventionnel. A défaut de droit conventionnel applicable, l’inspecteur du travail incite
l’employeur à prendre un engagement unilatéral pour indemniser les travailleurs.
Généralement l’indemnité avoisine la moitié de la rémunération normale perçue par les
travailleurs.

Dans le contexte spécial de la Covid19, le chef de l’Etat a pris l’ordonnance n°001-2020,


aménageant des mesures dérogatoires au licenciement et au chômage technique durant la
période de la pandémie. Cette ordonnance prévoit, durant le chômage technique, le maintien
d’une rémunération au moins égales au SMIG et à 70% du salaire moyen net perçu sur les 3
derniers mois de service supporté par l’entreprise, en contrepartie d’un accompagnement de
l’Etat.

De façon générale, la rémunération est maintenue durant toutes les absences rémunérées mais
pour les autres, le contrat de travail ou le droit conventionnel applicable peut prévoir une
indemnité compensatrice.

2- L’ancienneté

L’ancienneté par contre est en principe maintenue sauf dans les cas exceptionnels prévus par
la loi. Il s’agit du cas de fermeture d’établissement pour départ de l’employeur sous les
drapeaux, du service militaire effectué par le travailleur, la durée de la détention préventive, la
durée du mandat de député.

3- La reprise du travail

A la fin de la période de suspension du contrat de travail, le salarié doit retrouver son poste
ou, si l’absence a été d’une durée relativement importante, un poste équivalent avec une
rémunération au moins égale à celle qu’il percevait avant la suspension de son contrat.

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Paragraphe 3/ La rupture du contrat de travail

Le contrat de travail peut prendre fin pour diverses raisons. Il s’agit du licenciement et de la
fermeture de l’entreprise qui sont imputables à l’employeur et d’autres relèvent du salarié, à
savoir la démission et la retraite.

A- Le licenciement du salarié

Le licenciement est la rupture du contrat de travail à durée indéterminée décidée par


l’employeur. Il peut être motivé par la faute ou un autre motif lié au salarié, ou résulté des
difficultés économiques rencontrées par l’entreprise.

1- Le licenciement pour faute

C’est le licenciement qui est motivé par un manquement reproché au salarié. Il peut s’agir de
la faute sérieuse, de la faute grave ou de la faute lourde. Dans tous les cas la procédure
disciplinaire doit être respectée pour procéder à ce type de licenciement. A l’issue de cette
procédure, une lettre de licenciement doit être signifiée au salarié, précisant le motif du
licenciement et indiquant un délai de préavis le cas échéant. Ce délai est d’un mois pour les
ouvriers, deux mois pour les agents de maîtrise et assimilés, trois mois pour les cadres et
assimilés (article 75 CCNI). Durant le préavis, les parties exécutent leurs prestations comme à
l’accoutumé. Le salarié dispose toutefois de deux jours libres par semaine de travail afin de
rechercher un nouvel emploi. L’employeur peut dispenser le salarié d’effectuer le préavis et
requérir son départ immédiat. Dans ce cas, il doit verser l’indemnité de préavis au salarié
lorsqu’elle est due. De même, le salarié qui refuse d’effectuer son préavis peut se voir
condamné au paiement de cette indemnité.

En cas de saisine du juge, il appartiendra à l’employeur de prouver le motif légitime du


licenciement ; s’il n’y parvient pas, le licenciement sera déclaré abusif et le travailleur aura
droit à des dommages et intérêt en réparation. En effet, comme dans tout contrat à durée
indéterminée, les parties disposent du droit de rupture unilatérale, mais s’agissant du contrat
de travail et de la relation déséquilibrée qu’il engendre, le salarié doit y être particulièrement
protégé. C’est pourquoi il pèse sur l’employeur une obligation de motivation de la rupture ; ce
motif devant être légitime. C’est ce qui ressort de l’article L.56 du code du travail lorsqu’il
dispose que « Les licenciements effectués sans motifs légitimes, de même que les
licenciements motivés par les opinions du travailleur, son activité syndicale, son

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appartenance ou sa non-appartenance à un syndicat déterminé, en particulier, sont abusifs ».
Cette liste n’est pas exhaustive mais nous donne une idée assez claire du licenciement abusif.

Il faut préciser que l’abus ne se limite pas aux motifs du licenciement, il peut également être
constaté dans les circonstances du licenciement. Ainsi, un licenciement même légitimement
motivé peut être abusif s’il est effectué d’une manière vexatoire ou brutale par exemple.

Les circonstances du licenciement doivent être distinguées du formalisme imposé en la


matière. En effet, l’article 51 prévoit expressément que le licenciement qui ne respecte pas les
formes prescrites (entretien préalable, notification écrite et motivation) n’est pas pour autant
abusif dès lorsqu’il est fondé sur un motif légitime. Il sera tout de même qualifié d’irrégulier
et ouvrira droit au versement d’une indemnité pour le salarié.

Sauf en cas de licenciement justifié par une faute lourde, le salarié licencié à droit à une
somme forfaitaire au titre d’indemnité de licenciement après une année de service dans
l’entreprise. Son montant dépend du contrat de travail et des conventions collectives
applicables. La CCNI prévoit tout de même un barème supplétif des conventions de branche
ou accords d’entreprise. Selon l’article 80 de la CCNI, pour chaque année de présence dans
l’entreprise, l’indemnité est calculée sur la base d’un pourcentage déterminé du salaire
mensuel global moyen perçu durant les 12 derniers mois de présence dans l’entreprise
(ensemble des sommes perçues constituant une contrepartie de travail). Ce pourcentage varie
en fonction de l’ancienneté du salarié. Et les fractions d’année sont prises en compte dans le
calcul.

- 25% pour les 5 premières années


- 30% de la 6ème à la 10ème année
- 40% pour la période s'étendant au-delà de la 10ème année.

2- Le licenciement pour motif personnel non-fautif

Moins connu que le licenciement pour faute, le licenciement pour motif personnel non-fautif
recoupe différentes situations assez courantes dans le monde du travail. En effet, le
licenciement pour motif personnel peut être fondé sur une insuffisance professionnelle du
salarié, une mésentente avec son employeur, une maladie ou l’inaptitude.

En cas de maladie ou d’inaptitude, l’employeur doit faire un effort de reclassement vis-à-vis


du salarié qui peut reprendre une activité malgré la réduction durable de ses facultés. Cet

40
effort de reclassement peut consister en l’affectation à un nouveau poste ou en l’adaptation du
poste, de la durée et/ou des horaires de travail, l’aménagement de la possibilité de travailler à
domicile etc… Mais cet effort de reclassement n’est pas vraiment assorti d’obligations en
droit sénégalais outre les cas de maladie et d’accident du travail. Il repose essentiellement sur
le bon vouloir de l’employeur qui pourra faire une proposition de modification du contrat de
travail dans ce sens, comme il en ressort de l’article L.67 du code du travail. C’est pourquoi
dans la pratique, il est rare que l’employeur s’en donne la peine alors que l’inaptitude du
salarié médicalement constatée lui donne la possibilité de procéder simplement au
licenciement.

L’insuffisance ou l’inadaptation professionnelle est la situation du travailleur qui manque de


performance dans l’accomplissement des tâches qui lui sont confiées ou qui n’atteint pas les
objectifs qu’on lui a fixé. Sans être fautif, ce salarié n’est pas performant. Cela peut se
caractériser par une multitude de fautes légères, une évaluation professionnelle décevante.
Mais encore faut-il que l’employeur mette à la disposition du salarié les moyens nécessaires
pour atteindre les objectifs assignés.

Pour ce type de licenciement, le salarié a droit à des indemnités de licenciement et à un


préavis. Ce licenciement est risqué pour l’employeur car il peut être délicat de rapporter la
preuve de l’insuffisance du salarié en dehors de la commission de fautes légères répétées et
dégénérant en faute sérieuse. En réalité, il ressort de la situation que c’est l’employeur qui
s’est trompé dans le recrutement en embauchant un employé qui ne serait pas à la hauteur des
attentes. Vu que la législation ne retient pas expressément ce type de licenciement,
généralement, l’on s’appuie sur des fautes de moindre gravité mais qui sont répétées et la non-
atteinte des objectifs fixés pour établir l’insuffisance du salarié.

3- Le licenciement économique

Ce licenciement est motivé par des difficultés économiques qui imposent à l’employeur
d’abaisser sa masse salariale ou de réorganiser son entreprise, entrainant la suppression de
certains postes, pour la survie de l’entreprise ou le maintien de sa compétitivité. La difficulté
économique admise est celle qui impose des licenciements pour la pérennité de l’entreprise ou
la préservation de sa compétitivité. Ainsi, des licenciements ne pourraient être menés sur ce
fondement simplement pour augmenter les profits de l’employeur et c’est ce qui justifie le
contrôle strict effectué sur ce licenciement.

41
Lorsqu’une telle situation se présente, l’employeur doit réunir les délégués du personnel et
rechercher avec eux des alternatives au licenciement. Le compte rendu de la réunion et
transmise à l’inspecteur du travail qui peut faire ses observations dans les 15 jours. Lorsque
des licenciements paraissent nécessaires, l’employeur peut faire des propositions en ce sens en
précisant les critères retenus pour l’ordre de licenciement. Il communique ses propositions par
lettre aux délégués du personnel. Le code du travail retient comme principal critère l’aptitude
professionnelle et, accessoirement, l’ancienneté qui est majorée en fonction de la situation
familiale. Sept jours après sa lettre aux délégués du personnel, l’employeur les convoque pour
une ultime réunion au sortir de laquelle il peut procéder aux licenciements envisagés.

Le salarié licencié pour motif économique a droit à un préavis de licenciement et des


indemnités de licenciement. Pour chaque année d’ancienneté, le salarié reçoit une indemnité
calculée sur un certain pourcentage du salaire moyen perçu sur ses 12 derniers mois de
présence (art 30 CCNI) plus une indemnité spéciale égale à 1 mois de salaires non-imposé.

B- La démission

La démission est la rupture du contrat de travail dont le salarié a pris l’initiative. Elle fait
l’objet d’une règlementation laconique dans le code du travail. En effet, dans le contrat à
durée indéterminée, le travailleur est libre de rompre le contrat à tout moment. Il n’est même
pas exigé qu’il motive sa décision, il doit simplement la notifier à l’employeur et respecter le
même délai de préavis que ce qui est exigé de l’employeur en cas de licenciement.
Néanmoins, le salarié doit faire attention aux circonstances dans lesquelles la démission
intervient même si les formes sont respectées. En effet, si la démission intervient à un moment
particulièrement inopportun pour l’entreprise, l’employeur peut poursuivre le salarié pour
rupture abusive de contrat. C’est le cas lorsque le comptable d’une entreprise démissionne
justement à la période où les comptes de l’entreprise doivent être établis et déposés. De plus,
le salarié démissionnaire peut être tenu de respecter une clause de non-concurrence.

C- Le départ négocié

Entre le licenciement et la démission se trouve le départ négocié ou rupture conventionnelle


du contrat de travail. Il intervient généralement en cas de dégradation du climat de travail
entre l’employeur et le salarié ; plutôt que de risquer un procès, les parties conviennent d’une
rupture d’un commun accord. Ici le litige n’est que latent, il n’est pas encore ouvert. C’est ce
qui distingue l’accord de départ de celui de conciliation.

42
L’accord de départ consiste généralement en une renonciation par le salarié du droit d’intenter
une action en justice contre le versement d’une indemnité par l’employeur. Cette indemnité
étant supérieure à celle légalement ou conventionnellement prévue pour le licenciement mais
pouvant être inférieure aux dommages et intérêts pour licenciement abusif, elle apparaît
comme une alternative correcte pour les deux parties. Ainsi, la résolution amiable du contrat
qui en résulte est souvent préférable aux aléas d’une procédure judiciaire pour les deux
parties.

D- La retraite du salarié

Le contrat de travail peut prendre fin à l’initiative de l’employeur ou du salarié lorsque ce


dernier atteint un certain âge. On parle alors de retraite. L’âge de la retraite est fixé à 60 ans au
Sénégal. Le salarié bénéficie d’une indemnité spéciale de départ à la retraite qui est versée par
l’employeur en plus de la pension de retraite. L’âge de la retraite était jusqu’à une date récente
fixée à 55 ans, c’est pourquoi l’article L.69 du code du travail prévoyait qu’une fois l’âge de
la retraite atteint, la relation contractuelle peut se poursuivre jusqu’à l’âge de 60 ans. L’âge
normal de la retraite ayant été porté à 60 ans, l’article L.69 a été modifiée par la loi n°2020-15
du 14 mai 2020 pour permettre une prorogation de la relation de travail jusqu’à l’âge de 65
ans pour des professions déterminées par décret (à venir).

E- La fermeture de l’entreprise

Enfin, le contrat de travail est automatiquement rompu par la fermeture de l’entreprise pour
quelque raison que ce soit. En effet, si l’entreprise cesse son activité, le contrat devient caduc
et n’aura plus d’objet.

SECTION 5/ Le contentieux individuel de travail

Paragraphe 1/ La notion de litige individuel

Le litige individuel est un conflit ayant pour objet la méconnaissance par une partie d’un droit
ou avantage individuellement reconnu par le droit du travail à l’autre partie qui en demande la
réparation. En outre, Il suppose nécessairement l’existence d’un contrat de travail entre le
travailleur et l’employeur et reste individuel quel que soit le nombre de salariés qui agissent
contre l’employeur. L’élément caractéristique de ce litige est que l’une des parties réclame ou
se prévaut de droits conférés par son contrat de travail.

43
Il s’agit donc principalement des différends entre employeur et travailleur, qu’importe la
typologie du contrat de travail en cause ; mais aussi de ceux nés entre travailleurs d’une même
entreprise ou entre employeurs à l’occasion du travail ; entre les institutions obligatoires de
sécurité sociale, leurs bénéficiaires et les assujettis à l’occasion de l’application du régime de
sécurité sociale.

Tous ces litiges de travail sont résolus soit par la tentative de conciliation administrative, soit
par la saisine d'une juridiction spéciale, le tribunal du travail.

Paragraphe 2/ La tentative de conciliation devant l’inspecteur du travail

La conciliation est un mode de règlement amiable des litiges par lequel des parties mettent fin
à un litige opposant les deux parties par le biais d’un accord négocié entre elles. Cet accord
est obtenu par voie de négociation et de concessions mutuelles avec l’aide d’un tiers. En droit
du travail, ce tiers est une autorité administrative et l’article L.241 prévoit à cet effet que
« Tout travailleur ou tout employeur pourra demander à l’Inspecteur du travail et de la
Sécurité sociale, à son délégué ou à son suppléant de régler le différend à l’amiable ». La
procédure administrative de conciliation est facultative au Sénégal ; la partie la plus diligente
peut choisir de saisir directement le juge si elle le souhaite.

L’inspection du travail est saisie par écrit. Même si la conciliation est une procédure amiable
gouvernée par la liberté des parties prenantes, lorsque l’inspection du travail est saisie par une
partie, l’autre partie est tenue de se présenter à la convocation qui lui sera adressée par
l’inspection au risque de se voir infliger une amende de 5.000 FCFA.

L’inspecteur du travail n’est pas un juge ; c’est un conciliateur. Il ne tranche pas le litige ; il
aide les parties à parvenir à une solution acceptable ou équitable pour toutes qui sera constatée
par un procès-verbal de conciliation signé par lui et les parties. Néanmoins, de par sa mission
historique, il ne se comporte pas comme un conciliateur ordinaire. Il veille à la défense des
intérêts du travailleur qui est la partie faible du contrat de travail. Ainsi, l’inspecteur fait
connaître aux parties les droits que le travailleur tient des dispositions légales et
règlementaires. Il doit refuser d’entériner un accord portant atteinte aux droits incontestables
du travailleur et peut ne pas entériner un accord lésionnaire ou un accord qui semble léser les
intérêts ou droits contestables et contestés du salarié.

44
Lorsque la tentative de conciliation aboutit à un accord sur tous ou certains points litigieux,
l’inspecteur dresse un procès-verbal de clôture dit de conciliation (succès) comprenant :

- l’énoncé des différends chefs de réclamation ;


- les points sur lesquels la conciliation est intervenue et, s’il y a lieu, les sommes
convenues pour chaque chef de réclamation ;
- les chefs de réclamation dont il a été fait abandon ;
- en cas de conciliation partielle, les demandes qui n’ont pas été comprises dans la
conciliation.

En cas de non conciliation, le procès-verbal de non conciliation est également dressé. Il rend
possible la saisine du tribunal mais cela n’est ni automatique, ni susceptible d’être exercée
directement par l’inspecteur. Néanmoins si l’une des parties le souhaite, l’inspecteur du travail
doit transmettre, à sa demande, le dossier complet du litige au Président du tribunal du travail
territorialement compétent. Ce qui équivaut à la saisine de cette juridiction.

Paragraphe 2/ Le règlement du litige devant le tribunal du travail

Le tribunal du travail est la juridiction spécialisée pour le conflit individuel de travail. C’est
une juridiction d’exception, c’est-à-dire qu’il a une compétence d’attribution comme il en
ressort de l’article L.229 précité. La singularité de la relation de travail rend nécessaire la
soustraction du litige qui en découle de la compétence des juridictions de droit commun.

A- Composition du tribunal de travail

Il existe dans chaque chef-lieu de région du Sénégal un tribunal du travail aux termes de
l’article 2 de la loi n° 84 -19 du 2 février 1984.

Le tribunal du travail est composé de magistrats, d’auxiliaires de justice et de non magistrats.


Il est présidé par un magistrat professionnel qui assure la présidence des audiences, de
l’administration et des finances du tribunal. Il est secondé par un vice-président et des juges
qui sont tous qui sont tous des magistrats professionnels. En fonction du volume de
contentieux, le tribunal est subdivisé en plusieurs sections professionnelles.

L’une des particularités de cette juridiction est qu’elle comprend également des magistrats
non-professionnels que sont les assesseurs. Les assesseurs titulaires et suppléants apportent
leurs expériences des usages et particularités du monde du travail à ces magistrats car ils sont

45
directement issus des milieux professionnels concernés. Ils sont nommés par arrêté du
ministre chargé du travail sur les listes présentées par les organisations syndicales de
travailleurs et d’employeurs. Leur mandat est de trois ans renouvelables.

Pour chaque affaire, le président du tribunal désigne sur cette liste un assesseur travailleur et
un assesseur employeur, en fonction de leur profil et de celui des parties en conflit, qui vont
siéger avec le magistrat professionnel. Ces assesseurs ne doivent pas faire état d’un conflit
d’intérêt par rapport à la cause. Auquel cas ils doivent être récusés selon l’article L.250. Des
indemnités de séjour et de déplacement peuvent leur être allouées. S’agissant des assesseurs
travailleurs, l’exercice de leurs fonctions ne saurait être une cause de sanction par leur
employeur. Ils bénéficient à cet égard du statut de salarié protégé.

L’auxiliaire de justice du tribunal du travail est le secrétaire désigné par arrêté du ministre de
la justice et qui est une sorte de greffier.

Enfin, dans chaque tribunal, il existe une formation de référé composé du président ou du juge
délégué par lui et du secrétaire. La formation de référé est en charge des affaires urgentes et
répond aux sollicitations qui lui sont adressées par la prescription de mesure de sauvegarde,
de préservation ou de remise en l’état, le temps que l’affaire soit sereinement jugée au fond
par le tribunal dans sa composition collégiale.

B- Procédure et déroulement de l’instance devant le tribunal du travail

Le tribunal du travail est saisi par une déclaration écrite faite au greffe. Le tribunal
territorialement compétent est celui du lieu du travail, toutefois, en cas de résiliation de son
contrat, le travailleur aura le choix entre le tribunal du lieu du travail et celui de sa résidence
habituelle au Sénégal (art L.231).

Le tribunal peut être saisi directement par la partie la plus diligente ou après échec de la
tentative de conciliation devant l’inspecteur du travail. Lorsque le tribunal est saisi, il adresse
une convocation aux parties dans les 5 jours de sa saisine. Dans cette convocation les parties
sont citées à comparaître devant le président du tribunal, dans un délai ne pouvant excéder 12
jours, aux fins d’une ultime tentative de conciliation (art L. 243). Ce délai peut être augmenté
des délais de distance le cas échéant.

Contrairement à la tentative de conciliation devant l’inspecteur du travail, celle devant le


président du tribunal du travail est obligatoire sous peine de nullité de la procédure. Toutefois,

46
il ne s’agit que d’une tentative qui est largement formelle. En effet, ce qui est obligatoire c’est
que le président offre une ultime opportunité de conciliation aux parties. Néanmoins si l’une
des parties ne comparaît pas, la procédure suit son cours et aura des issues différentes selon
que c’est le demandeur ou le défendeur qui est absent. Si c’est le demandeur qui est absent à
la convocation, cela est interprété comme un désistement, aussi l’affaire est radiée du rôle et il
ne pourra recommencer la procédure qu’une seule fois pour la même cause entre les mêmes
parties. Néanmoins, s’il justifie d’un empêchement légitime dans les jours qui suivent la
conciliation, une nouvelle convocation pourra être envoyée. Lorsque c’est le défendeur qui est
absent à la convocation, cela est interprété comme étant un refus de conciliation mais en plus,
le défendeur s’expose à un jugement par défaut sur les seules déclarations de son adversaire si
celui-ci le sollicite. Lorsque le défendeur a reçu personnellement la convocation, le juge est
plus enclin à un jugement immédiat. Mais lorsque la convocation a été simplement servie à
domicile, le plus souvent, le juge demandera à ce que le défendeur soit à nouveau convoqué à
une date ultérieure et l’audience en renvoyée.

La procédure devant le tribunal du travail est en principe orale, mais lorsque la complexité de
l’affaire le requiert, les parties peuvent déposer et échanger des conclusions. Une mise en état
est alors organisée.

Les parties doivent en principe comparaître en personne mais elles peuvent se faire
représenter ou assister. Le représentant naturel aux fins d’un contentieux est l’avocat. Il peut
représenter une partie sans avoir à justifier d’un mandat spécial. Par contre, les autres
personnes doivent impérativement disposer d’un mandat spécial pour la cause. Ce mandat
doit, en outre, leur donner le pouvoir de se concilier le cas échéant. Outre l’avocat, peuvent
représenter ou assister les parties devant le tribunal du travail un travailleur ou un employeur
appartenant à la même branche d’activité. Peut également les représenter ou assister un
représentant de centrale syndicale à laquelle est affilié le syndicat dont est membre la partie
qui veut se faire représenter. S’il n’existe pas de représentant de centrale syndicale, les parties
peuvent se faire représenter par un représentant syndical agréé auprès du tribunal du travail
(chaque syndicat professionnel a droit à un seul représentant syndical auprès de chaque
tribunal du travail). De plus, l’employeur peut se faire représenter ou assister par un salarié de
l’entreprise (le plus souvent un salarié du service juridique et contentieux).

Si la tentative de conciliation aboutit, elle donne lieu à la rédaction d’un procès-verbal de


conciliation signé par les parties et le président du tribunal. Ce procès-verbal a force
exécutoire au même titre qu’un jugement passé en force de chose jugée. Si la tentative échoue
47
partiellement ou totalement, s’ouvre immédiatement la phase contentieuse. Précisons qu’en
cas de conciliation partielle, les points sur lesquels l’accord est intervenu ne pourront plus
faire l’objet de débat.

Si l’affaire est en état d’être jugée, le tribunal entend les parties et examine les pièces qu’elles
produisent. L’audience est publique, et la procédure est accusatoire mais le président prend les
mesures qui lui paraissent nécessaire pour une bonne instruction de l’affaire. Il peut ainsi
exiger la production de certains documents, au besoin sous astreinte ou demander qu’une
enquête soit menée sur le terrain. Si la complexité de l’affaire le permet, elle est jugée séance
tenante et le jugement peut alors être prononcé. Mais cette issue est extrêmement rare, le juge
se donne le temps de la réflexion et convoque les parties à une audience ultérieure pour le
prononcé de son verdict. Généralement, une mise en état a lieu et les parties déposent et
échangent pièces et écritures avant la clôture de la mise en état et convocation à l’audience de
jugement.

Le tribunal du travail juge en premier et dernier ressort lorsque le chiffre de la demande


n’excède pas dix fois le montant du SMIG ou lorsque la décision tend à la condamnation de
l’employeur à délivrer, au salarié, des pièces exigées par la loi (art L.262). Sinon les
jugements du tribunal peuvent être frappés d’appel dans les 15 jours du prononcé du jugement
contradictoire ou de l’expiration des délais d’opposition pour les jugements par défaut (le
délai d’opposition est de dix jour à compter de la signification à personne ou à compter du
jour où la partie condamnée a pu avoir connaissance du jugement si la signification n’a pas
été faite à personne).

Les jugements du tribunal du travail peuvent être assortis de l’exécution provisoire nonobstant
l’appel ou l’opposition si la partie qui a gagné en a fait la demande. Cette exécution provisoire
peut être ordonnée sans caution ni autres garanties jusqu’à hauteur de 20 fois le montant du
SMIG. Au-delà de ce montant, l’exécution provisoire n’est ordonnée que sous réserve de la
constitution d’une caution (art L.260). Ce système d’exécution provisoire est destiné à assurer
un minimum de subsistance au salarié dont le contrat a été rompu et qui risque de se retrouver
sans ressources. Tant et si bien que l’exécution peut être ordonnée au-delà de la limite ci-haut
définie sans constitution d’une caution lorsqu’il s’agit de condamnation au paiement de
salaire non contesté.

L’appel des jugements du tribunal du travail est interjeté devant la Cour d’Appel. Cet appel,
lorsqu’il est interjeté dans les formes et délais, suspend l’exécution sauf exécution provisoire,

48
porte l’intégralité du litige jugé en première instance à la connaissance de la Cour d’Appel et
cette dernière a la faculté de s’emparer des demandes soumises au tribunal du travail mais qui
n’ont pas reçu de réponse de sa part.

Enfin, le pourvoi en cassation est introduit devant la Cour Suprême.

49
CHAPITRE 2/ LA RELATION COLLECTIVE DE TRAVAIL

La relation collective de travail est celle qui se noue entre un employeur ou un groupement
d’employeurs, d’une part, et une collectivité de travailleurs ou leur représentants, d’autre part.
Cette relation n’est pas basée sur le contrat de travail mais sur l’intérêt collectif des
travailleurs à différents niveaux (entreprise, branche, interprofessionnel). Autre fois proscrite
par le délit de coalition (1791), l’abrogation de ce dernier en 1864 et la reconnaissance de la
liberté syndicale en 1884 a permis l’émergence des relations collective de travail, au-delà du
seul rapport contractuel liant chaque travailleur à son employeur.

Il en va de la nature déséquilibrée de la relation de travail qui impose que les salariés puisse se
regrouper et agir de concert pour constituer un contrepoids au pouvoir de direction de
l’employeur. Ainsi le droit sénégalais reconnaît la liberté syndicale dans l’article 8 et 12 de la
constitution et, plus spécifiquement, la liberté d’adhésion et d’action syndicale, ainsi que le
droit à l’expression collective des salariés au sein de l’entreprise est consacré par l’article 25.
L’article L.5 du code du travail reprend le droit à l’expression collective et y rajoute un droit
d’expression individuel au sein de l’entreprise. Ce droit s’exerce directement par les salariés
ou par le biais de leurs représentants (section 1), il se traduit en principe par la négociation
collective (section 2) mais peut également déboucher sur un conflit collectif (section 3).

Section 1/ Les acteurs des relations collectives

Les salariés s’expriment collectivement à travers des représentants de deux ordres différents :
les syndicats et les institutions représentatives du personnel (IRP).

Paragraphe 1/ La représentation syndicale des acteurs

A- Le principe de la liberté syndicale

Les syndicats sont des groupes de personnes dotés de la personnalité morale ayant
exclusivement pour objet la représentation et la défense des intérêts économiques, industriels,
commerciaux, agricoles et artisanaux selon l’article L.6 du code du travail. Ils ont la forme
juridique d’association et leur vocation est professionnelle. Ils regroupent ainsi des personnes
exerçant la même profession, des métiers similaires ou des professions connexes concourant à
l’établissement de produits déterminés, ou la même profession libérale.

50
L’article 8 de la constitution énonce entre autres libertés fondamentales, la liberté
d’association, de réunion et la liberté syndicale. Cette liberté syndicale a un double sens.

Il s’agit d’une part de la liberté de créer des associations syndicales ou professionnelles qui est
reconnue à tout travailleur ou employeur et de la liberté d’adhérer au syndicat de son choix
pour peu que l’on soit dans son champ professionnel.

La liberté de création de syndicat est reconnue à tous ceux qui exerces une activité
professionnelle. Il suffit d’être deux pour créer un syndicat et il peut y avoir une pluralité de
syndicats dans un même champ professionnel ou dans une même entreprise. Le syndicat est
librement constitué sur simple dépôt de statut à l’inspection du travail qui se chargera de
vérifier la conformité de la constitution avant de transmettre un rapport et un exemplaire des
statuts au procureur de la république et au Ministre de l’intérieur. Le procureur pour sa part se
chargera de vérifier la régularité des statuts et la situation des fondateurs du syndicat avant
d’en dresser un rapport à transmettre au Ministre de l’intérieur. Ce dernier pourra in fine
délivrer le récépissé qui constate la création légale du syndicat.

Quant à l’adhésion au syndicat, elle est également libre pour tout employeur ou salarié âgé
d’au moins 16 ans. Il s’agit d’une liberté individuelle que chaque individu exerce en âme et
conscience. Ce qui permet à toute personne d’adhérer et de se retirer du syndicat de son choix
à tout moment. Et nul ne saurait faire l’objet d’un traitement discriminatoire en raison de son
appartenance ou non à un syndicat.

B- Le représentativité et rôle des syndicats

Les syndicats ont pour vocation la défense des intérêts professionnels. Dans ce sens, ils
représentent leurs membres auprès des autorités publics et auprès des employeurs notamment
dans le cadre de la négociation collective. Or la multiplicité des syndicats et leur libre création
ne permet pas à tous les syndicats de participer à la négociation collective. Ainsi la notion de
représentativité permet de faire le tri entre les syndicats éligibles pour certaines actions et
ceux qui ne le sont pas.

La représentativité est une mesure de la légitimité d’un syndicat à négocier et contracter aux
noms de travailleurs ou d’employeurs. Selon l’alinéa 5 de l’article L.85 du code du travail,
elle est appréciée à travers les critères suivants :

- les effectifs et les résultats des élections des délégués du personnel ;


- l’indépendance ;

51
- les cotisations ;
- l’expérience du syndicat, l'étendue et la nature de son activité.

Cette énumération n’est cependant pas limitative et les critères sont plus ou moins d’égale
importance, mis à part l’effectif et les résultats des délégués du personnel qui semble
prépondérants. Au niveau de la négociation d’entreprise, la représentativité est appréciée par
l’employeur sous le contrôle du tribunal de grande instance. Au niveau national, la
représentativité est appréciée par le Ministre chargés du travail sur la base des critères ci-
dessus et sur avis de l’inspection du travail. Cependant, la représentativité des centrales
syndicales de travailleurs est appréciée à l'issue d’élections générales de représentativité
organisées simultanément sur toute l'étendue du territoire selon des modalités définies par
arrêté du Ministre chargé du Travail après avis du Conseil consultatif national du Travail et de
la Sécurité sociale.

Les syndicats et, particulièrement ceux représentatifs, sont chargés de négocier les conditions
de travail dans les entreprises et de convention collectives, de procéder à des études et
enquêtes, d’organiser des manifestations et des actions sociales au bénéfice des travailleurs.
Sur le plan judiciaire, ils peuvent agir dans le cadre de la défense des intérêts collectifs de
leurs membre (faire respecter des engagements contractés dans une convention collective par
exemple) ou agir dans l’intérêt individuels de leurs membres soit par la représentation ou
l’assistance en justice.

Paragraphe 2/ Les délégués du personnel

A- Statut et rôle des délégués du personnel

Les délégués du personnel sont les représentant élus des salariés au sein de l’entreprise. Leur
nombre varie en fonction de l’effectif de l’entreprise (ou de l’établissement). Il est obligatoire
d’organiser des élections du personnel dans toute entreprise ou établissement occupant
habituellement 11 salariés (CDI, stagiaires, apprentis, CDD de plus de 6 mois et CTP).

Les élections sont organisées à l’initiative de l’employeur tous les 3 ans avec l’accord des
syndicats sur les modalités ou, à défaut, avec l’autorisation de l’inspecteur du travail. Les
salariés de l’entreprise votent dans deux collèges électoraux distinct : le collège
d’encadrement qui regroupe les cadres de l’entreprise et le des ouvriers et employés. Sont
électeurs tous les salariés de l’entreprise âgés d’au moins 18 ans et justifiant d’une ancienneté

52
d’au moins trois mois. Sont éligibles à ces élections les salariés âgés d’au moins 21 ans, de
nationalité sénégalaise ou ressortissant dans pays qui applique la réciprocité au sénégalais.
Les candidats aux élections doivent également justifier d’une ancienneté de 12 mois. Ne sont
pas éligibles les salariés les ascendants, descendants ou collatéraux de l’employeur.

Le vote se déroule suivant un scrutin de liste à deux tours. Et ne peuvent présenter de liste au
premier tour que les syndicats représentés dans l’entreprise (qu’ils soit représentatifs ou pas).
Si le premier tour n’a pas permis de pourvoir tous les sièges disponibles ou si le quorum n’est
pas atteint (50% des électeurs), un second tour est organisé et des candidatures libres y sont
admise (les syndicats perdent leur monopôle). Pour chaque siège doit être élu un délégué
titulaire et un suppléant. En cas de rupture du contrat de travail ou de démission du syndicat
en cours de mandat, le mandat, le délégué élu perd son siège.

Les délégués du personnel portent les revendications et doléances collectives ou individuelles


des salariés auprès de l’employeur, même si chaque salarié est libre de les porter
personnellement et directement. Ils sont consultés par l’employeur dans la prise de certaines
décisions (règlement intérieur, licenciements économiques par exemple), même si leur avis de
lie pas l’employeur, il constitue un élément d’éclairage. Ils aident également l’inspecteurs du
travail dans le contrôle et l’application des règles relatives à l’hygiène et la sécurité au travail.
Ils l’accompagnent notamment dans ses visites dans l’entreprise et peuvent lui dénoncer toute
infraction à la règlementation. Ils aident également à l’amélioration des conditions de travail
et à la formation des salariés dans les domaines d’hygiène et de sécurité au travail. Même s’ils
sont en étroite relation avec les syndicats, ils ne se confondent pas à eux. Car les délégués du
personnel sont les représentants des salariés d’une entreprise ou d’un établissement, alors que
les syndicats sont des entités extérieures pouvant simplement avoir une représentation au sein
de l’entreprise.

Pour l’exercice de leur mission, les délégués du personnel disposent d’un crédit d’heure de
délégation de 15 heures mensuelles, payées comme étant du temps de travail effectif.
L’employeur peut contrôler que ces heures ont bien été employés à l’exercice de leur mission,
sans toutefois que cela ne conduise à entraver leur mission ou à contrôler les activités
accomplies dans le cadre de cette mission. Il s’agit d’un contrôle formel, destiné
essentiellement à la comptabilisation des heures. Les délégués doivent disposer d’un local
dans l’entreprise pour la tenue de leurs réunions et doivent être reçus collectivement au moins
une fois par l’employeur et toutes les fois qu’ils en feront la demande 2 jours à l’avance en
précisant l’objet de la rencontre. Ils doivent disposer de tableaux d’affichage dans l’entreprise
53
aux fins de communication avec le personnel et doivent avoir accès à l’intranet de l’entreprise
et/ou à la messagerie électronique.

B- Protection des délégués du personnel

Du fait de l’exercice de leur mission, les délégués du personnel peuvent être des cibles
privilégiées de représailles de la part de l’employeur. Aussi, il leur est reconnu une protection
spéciale contre l’exercice du pouvoir disciplinaire de l’employeur et spécifiquement en
matière de licenciement. Le licenciement d’un délégué du personnel ne peut être effectué que
sur autorisation de l’inspecteur du travail. Ce dernier intervient pour s’assurer que le
licenciement envisagé est bien basé sur un motif objectif, sans rapport avec la qualité et
l’exercice de la mission de délégué du personnel. Ainsi, l’article L.214 du code du travail fait
obligation à l’employeur de requérir l’autorisation de l’inspecteur du travail avant de
prononcer tout licenciement contre un délégué du personnel. L’employeur qui demande
l’autorisation de licenciement à l’inspecteur doit aviser le délégué concerné et ce n’est qu’à
partir de cette notification que commence à courir un délai de 15 jours dont dispose
l’inspecteur pour rendre son avis.

L’inspecteur qui est saisi par l’employeur doit requérir les déclarations du délégué concerné
afin de se faire une religion. Sa décision d’autorisation ou de refus doit être motivé. À défaut
de décision expresse dans le délai de 15 jours, l’autorisation est tacitement accordée. Le
licenciement prononcé sans consultation de l’inspecteur du travail ou contre l’avis de
l’inspecteur est nul et ouvre droit à réintégration pour le délégué avec paiement des salaires
qui auraient dû être payés entre le licenciement nul et la réintégration. L’employeur qui
s’abstient de réintégrer le salarié 15 jours après décision l’enjoignant à le réintégrer doit lui
payer une indemnité supplémentaire dont le montant croit avec l’ancienneté du salarié :

- 12 mois de salaire brut lorsqu’il compte 1 à 5 ans d’ancienneté ;


- 20 mois de salaire brut lorsqu’il compte 5 à 10 ans d’ancienneté ;
- 2 mois de salaire brut par année de présence, avec un maximum de 36 mois, lorsqu’il
compte plus de 10 ans d’ancienneté.

Le paiement de cette indemnité laisse subsister le caractère nul du licenciement qui peut se
solder par le paiement de dommages et intérêt évalués souverainement par le tribunal du
travail, lorsque le refus de réintégration par l’employeur est définitif.

54
Section 2/ La négociation collective

La négociation collective est l’un des éléments singularisant le droit social. A l’origine il
s’agissait d’accord de sortie de crise à l’issue des conflits collectifs, puis progressivement, la
négociation est devenue une source du droit du travail. Par la négociation collective, les
employeurs et salariés, à différentes échelles, négocie et concluent des contrats sur tous ou
certains points des relations et conditions de travail. Cette source de droit se singularise en ce
qu’elle émane directement des acteurs, appelés partenaires sociaux. Il était au départ question
de permettre à ces partenaires sociaux, d’adapter les prescriptions générales issues de la loi
aux réalités de chaque secteur d’activité. Puis certaines questions ont été progressivement
laissées à la négociation collective. En France, ce mouvement est allé jusqu’à faire de la
négociation collective la principale source du droit du travail, laissant à la loi un caractère
essentiellement supplétif, sauf sur des points relevant de l’ordre public.

Au Sénégal, la hiérarchie classique entre les sources de la règle de droit demeure. La


négociation collective prend place en dessous de la loi et des règlements, avec cependant
l’application du principe de faveur qui permet à la norme inférieure d’être appliquée devant la
norme supérieure lorsqu’elle est plus favorable aux salariés. La négociation collective couvre
différents champs (paragraphe 1) et obéit à des règles de formation précises (paragraphe 2).

Paragraphe 1/ Le champ de la négociation

La négociation collective couvre différents champs sur le plan professionnel et géographique.

A- Le champ professionnel

La négociation collective couvre différents champs professionnels qui partent de l’entreprise


jusqu’à l’interprofessionnel en passant par la branche.

Au niveau de l’entreprise la négociation collective prend la forme d’accord d’entreprise (ou


accord d’établissement en cas d’établissements distincts dans l’entreprise). Cet accord est
applicable uniquement dans l’entreprise où il a été négocié entre l’employeur et les
organisations syndicales représentatives dans l’entreprise.

La négociation de branche couvre tout un secteur d’activité et toutes les entreprises comprise
dans le secteur indiqué sont susceptibles d’être couvertes par le texte négocié. Un secteur
d’activité regroupe les entreprises dont l’activité principale est identique, similaire ou connexe

55
selon la nomenclature des entreprises (branche du commerce, branche de l’industrie, branche
des services, branche de l’enseignement, branche du tourisme etc...). Lorsqu’une entreprise
exerce plusieurs activités, elle est classée par rapport à son activité principale. Cette
négociation a lieu entre les organisations syndicales représentatives au niveau de la branche et
les organisations patronales du secteur.

La négociation interprofessionnelle pour sa part transcende tous les secteurs d’activité, de


sorte que toute entreprise est susceptible d’être couverte. Elle recoupe le plus souvent le
secteur géographique national.

B- Le champ géographique

Comme pour le champ professionnel, il existe également trois champs géographiques. Le


champ le plus réduit étant celui de l’entreprise. Le second champ est régional et peut couvrir
les champs professionnels de branche et interprofessionnel. Ne seront donc concernées que les
entreprises de la région concernée. Et pour finir le champ national couvre toutes les
entreprises du pays. Cette négociation n’étant ouverte qu’aux organisations syndicales
représentative au niveau national dans la branche concernée ou interprofessionnel.

C- L’adhésion

Pour qu’une convention ou accord collectif soit applicable à une entreprise, il faut qu’elle
appartienne à son champ professionnel et géographique. Mais en plus, cette entreprise doit y
adhérer, car les conventions et accord restent des contrats, nonobstant leur dimension
collective. A cet égard, ils sont soumis au principe de la relativité des contrats. Cette adhésion
dépend de l’employeur qui doit, soit prendre part personnellement à la négociation, soit faire
partie d’une organisation patronale qui a pris part aux négociations. À défaut, l’employeur
doit ultérieurement adhérer, soit en intégrant une organisation signataire, soit directement en
notifiant par écrit au greffe du tribunal son intention d’adhérer au texte qui y est déposé et en
informant les signataires.

D- L’extension et l’élargissement

Les conventions collectives étant des contrats, elles ne s’appliquent qu’aux parties présentent
à la signature ou qui y ont adhéré ultérieurement. L’application de la convention dans une
entreprise dépendant de la signature de l’employeur, il n’est pas rare de rencontrer des
employeurs réfractaires, privant leurs salariés de toute couverture conventionnelle. C’est
pourquoi il est prévu une procédure d’extension, faisant changer de dimension à la convention

56
collective. L’extension est un acte (arrêté du ministre chargé du travail) qui permet de rendre
une convention collective obligatoire pour toute entreprise se situant dans son champ
professionnel et géographique, indépendamment de la signature de l’employeur (art. L.88).
Autrement dit, elle lui confère un caractère général au même titre qu’une loi.

Cette extension est l’œuvre du ministre sur sa propre initiative ou à la demande des
organisations syndicales et patronales représentatives. Mais pour que l’extension soit
envisagée, il faut que la convention ait fait l’objet de négociation en commission mixte
paritaire regroupant un nombre égal de représentant des travailleurs et des employés sous
l’égide du ministère chargé du travail. Ces conventions ont un contenu qui est strictement
encadré par la loi. L’article L.86 du code du travail distingue les clauses obligatoires des
clauses facultatives. En effet, ces conventions étant susceptibles d’avoir une portée générale,
elles se doivent d’avoir un contenu relativement exhaustif.

Paragraphe 2/ Les règles de conclusion des accords collectifs

La négociation collective est soumise à des règles de fond et de forme.

A- Les conditions de fond

La négociation collective a lieu entre employeurs et salariés. Les salariés sont représentés par
des organisations syndicales ou autres groupements professionnels dotés de la personnalité
juridique. Ces organisations sont seules habilitées, selon le niveau, à négocier et conclure des
conventions au nom des salariés. Les employeurs sont représentés par des organisations
patronales mais lorsque la négociation est limitée à l’échelle d’une entreprise, l’employeur
seul engage l’entreprise dans la négociation.

La négociation est soumise à principe de la liberté contractuelle autorise les parties à négocier
sur tous les aspects (collectifs et individuels) de la relation et des conditions de travail. Il est
cependant admis que lorsqu’elle débouche sur une convention collective, elle doit être
relativement exhaustive (contrat de travail, congés, conditions d'emploi, formation
professionnelle, conditions de travail et des garanties sociales des salarié, classifications
professionnelles, ancienneté et avancement etc…), tandis que les accords collectifs n’abordent
qu’une ou plusieurs questions précisées dans leur objet. De plus, les accords doivent
également contenir des clauses sur leur durée, éventuel renouvellement et dénonciation.

La liberté de négocier est cependant limitée par des règles relevant de l’ordre public. Il existe
deux sortes d’ordre public en droit social. D’une part, l’ordre public social qui ne permet aux

57
normes inférieures de déroger aux normes supérieures que dans un sens plus favorable au
salariés (ex : le salaire minimum conventionnel ne peut qu’être supérieur au SMIG). D’autre
part, l’ordre public absolu qui interdit toute dérogation, même dans un sens plus favorable aux
salariés (interdiction des discriminations, interdiction d’indexation des salaires sur le SMIG
etc…).

B- Les conditions de forme

Les conventions et accords collectifs doivent être conclus par écrit et signés par les personnes
habilitées. Le texte signé doit être déposé au greffe du tribunal du travail contre remise d’un
récépissé qui lui permet d’entrer dans l’ordonnancement juridique. Dès lors, le texte doit être
affiché et communiqué à ses destinataires. Il doit être affiché dans les locaux de toutes les
entreprises où il s’applique et le greffe du tribunal du travail doit en délivrer copie à toute
personne intéressée qui le demande.

Section 3/ Les conflits collectifs de travail

Les relations collectives de travail ont pendant longtemps été envisagées uniquement sur le
plan conflictuel et c’est justement à l’occasion de ces conflits que le droit conventionnel est
né. Il faut cependant en préciser la notion (paragraphe 1), avant de voir la procédure de
résolution de ces conflits (paragraphe 2).

Paragraphe 1/ La notion de conflit collectif

Le conflit collectif est celui qui oppose une collectivité de salarié (représenté ou non par des
syndicats) et un ou plusieurs employeurs sur la base de revendications professionnelles. Cette
collectivité de salarié peut appartenir à une seule entreprise ou à des entreprises d’une ou de
plusieurs branches. Les revendications doivent mettre en exergue des intérêts collectifs de ces
salariés, de sorte que le succès des revendications profite à tous les salariés. Une
revendication professionnelle constituant une demande d’amélioration de la situation des
travailleurs par rapport à la relation de travail ou à leur protection sociale (prime de transport,
augmentation de salaire, création d’une crèche etc…). Ces revendications peuvent également
se limiter à réclamer l’application de certaines dispositions méconnues par les employeurs.

Ainsi, le conflit qui oppose une collectivité de salariés à un employeur n’est pas un conflit
collectif les salariés réclament des droits qu’ils tiennent de leurs contrats de travail (arriérés de

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salaires, paiement d’heures supplémentaires etc.…). Ce conflit demeure individuel même si
les requêtes des salariés peuvent faire l’objet de jonction.

Ces conflits collectif s’exprimes le plus souvent par la grève. La grève est la cessation
collective et concertée du travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles. C’est
un droit individuel d’exercice collectif. Chaque salarié est donc libre de participer ou pas à un
mouvement de grève, de se joindre à un mouvement entamé par d’autres ou de se retirer d’un
mouvement. L’exercice du droit de grève par les salariés doit demeurer compatible avec le
droit au travail des non-gréviste, la liberté d’entreprendre et le droit de propriété de
l’employeur qui sont au même titre que le droit de grève des droits fondamentaux protégés par
la constitution. Ainsi la grève ne doit s’accompagner ni de violence, menace, destruction de
bien, entrave à la liberté de travail etc…

Paragraphe 2/ La résolution du conflit collectif

Bien qu’étant une liberté fondamentale, l’exercice du droit de grève est soumis au respect des
lois qui l’encadrent. Il s’agit essentiellement des articles L. 271 à L.276 du code du travail qui
organisent l’exercice du droit de grève et la procédure de résolution des conflits collectifs.

Lorsqu’un désaccord existe entre employeurs et salariés à propos de revendications


professionnelles, il appartient à la partie le plus diligente de saisir l’inspecteur du travail ou le
directeur général du travail et de la sécurité sociale, lorsque le conflit s’étend au-delà d’une
seule région, pour lui solliciter une conciliation. La procédure à suivre sera celle prévue par la
convention applicable le cas échéant. À défaut de procédure conventionnelle, la résolution du
conflit passera par la procédure légale.

Dans les 48 heures de sa saisine, l’inspecteur ou le directeur général du travail convoque les
parties pour une tentative de conciliation. Si cette conciliation aboutit dans les 10 jours, elle
donne lieu à la rédaction et à la signature d’un procès-verbal de conciliation. À défaut, un
préavis de grève ou de lock-out de 30 jours peut être déposé et à l’issue de ce délai, la grève
ou le lock-out peuvent être déclenchées. Cette procédure permet d’éviter des simples
mouvements d’humeur et la grève apparaitra comme un ultime recours à l’issue d’un délai de
réflexion conséquent.

Une fois le conflit déclaré, les négociations peuvent se poursuivre et aboutir à une conciliation
mais pour améliorer les chances de sortie de crise, des procédures de médiation ou d’arbitrage
peuvent être engagées.

59
DEUXIEME PARTIE/ LA PROTECTION SOCIALE
DES TRAVAILLEURS
La protection sociale est l’ensemble des dispositifs d’accompagnement permettant de faire
face aux conséquences de la survenue d’un risque ou d’un besoin social entraînant une perte
de revenus ou une augmentation des dépenses. Au Sénégal, cette protection sociale est quasi-
limitée à la sécurité sociale hormis un timide dispositif de couverture maladie universelle et
des systèmes privés d'assurance maladie qui se développent peu à peu.

La sécurité sociale est avec le droit du travail l’une des deux composantes du droit social. Ce
droit qui a pour vocation la protection de l’homme au travail, particulièrement en présence
d’un lien de subordination juridique, de sorte à ce qu’il ne soit pas réduit au rang d’outil.
Tandis que le droit du travail s’intéresse à la nature juridique de la relation et aux conditions
de travail, la sécurité sociale qui en est le complément indispensable s’appesantie sur la
protection du travailleur face aux risques sociaux.

Les dispositifs de protection sociales sont fondés sur une idée de solidarité face aux risque
sociaux encourus par les travailleurs quels qu’ils soient (aussi bien au sens large qu’au sens de
l’article L.2 du code du travail). En effet, la personne active qui contribue à l’essor du
collectif peut être confrontée durant sa vie à certains évènements susceptibles de diminuer sa
capacité de travail et partant, ses revenus. A défaut d’un système efficace destiné à prendre en
charge ces ‘‘risques sociaux’’ (vieillesse, maladie, accident, chômage, naissances et éducation
des enfants etc…) la personne peut sombrer dans le dénuement et voir sa vie et celle de sa
famille basculée.

Dans nos sociétés africaines, un système de solidarité familiale, intergénérationnel ou


collatéral, permettaient de prendre en charge les risques sociaux mais l’évolution de ces
sociétés, l’isolation des individus, la redéfinition de la cellule familiale, tout simplement
l’occidentalisation rend de moins en moins efficace la solidarité familiale. Aussi, le besoin
d’institutionnaliser la sécurité sociale est de plus en plus criant.

Ce qui permet de définir la sécurité sociale comme un service public d’État qui assure la
gestion de l’ensemble des risques sociaux. Les risques sociaux sont les évènements précités
qui peuvent engendrer une perte de revenus professionnels ou un accroissement de charges.
Les risques sont regroupés en branches et il existe différents régimes de protection sociale
destinés à différentes catégories de travailleurs. Au Sénégal, cependant, seul les salariés,

60
fonctionnaires et accessoirement les gens de mer sont couverts par des régimes dignes de ce
nom mais tous les risques sociaux ne sont pas pris en charge.

Historiquement, la sécurité sociale est assez récente et le système de service public à


tardivement suppléé la solidarité familiale. En effet, ce n’est qu’au 19ème siècle que la sécurité
sociale telle que nous la connaissons s’est dessinée et elle s'est véritablement structurée après
la 2ème guerre mondiale. En France, c’est Colbert qui, en véritable précurseur, avait mis en
place un régime de retraite pour les marins dans sa célèbre ordonnance sur le commerce de
1673. Puis viennent un peu partout en Europe des systèmes d’assurance sociales ciblant des
risques précis.

C’est principalement sous l’impulsion des luttes ouvrières que la sécurité sociale s’est
structurée et développée. En effet, l’ouvrier qui n’a que sa force de travail à offrir dans le
système capitaliste est particulièrement vulnérable face à certains risques sociaux tels que les
accidents mortels ou invalidants, la redoutable retraite qui signifiait la perte totale de revenus.
D’abord des systèmes de mutualisation des risques et de solidarité corporatiste ont initié la
protection sociale des ouvriers avant que l’Etat n’intervienne avec une assurance contre les
accidents du travail. A la contribution de l’Etat s’est ajouté l’intervention obligatoire des
employeurs en cas d’accident du travail sur le fondement de la responsabilité civile
automatique. Ce régime de responsabilité sans faute a été institué par la loi du 09 avril 1898
concernant les responsabilités des accidents dont les ouvriers sont victimes dans leur travail.
En effet, la faute a cessé d’être le seul fondement de la responsabilité civile et s’est vu
adjoindre le risque ; le risque encouru par les travailleurs dans leur activité et qui profite à
l’employeur, naturellement tenu à réparation (voir la théorie du risque développée par
Saleilles et Josserand. Puis se sont développés des assurances sociales couvrant de plus en
plus de risques jusqu’au 4 octobre 1945 avec la création d’un régime général de la Sécurité
sociale.

Au Sénégal, les agents expatriés de l’administration coloniale relevaient du même régime de


sécurité sociale que les métropolitains jusqu’en1950 où la loi Lamine Gueye donne aux agents
autochtones les mêmes avantages. L’adoption du code du travail d’Outre-mer a permis
également aux travailleurs du secteur privé de bénéficier d’allocations familiales en 1952. De
plus en plus de prestations familiales ont été accordées mais c’est seulement en 1959 qu’un
régime général de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles est
institué et géré par la caisse de compensation des prestations familiales et des accidents du
travail en remplacement des systèmes isolés relevant d’assurances privées ou directement
61
gérés par les employeurs. Cette caisse, constituée sous la forme d’un organisme privé chargé
de mission de service public devient un établissement public à caractère industriel et
commercial en 1966. Il s’en est suivi l’adoption d’un code de la sécurité sociale le 31 juillet
1973 avec la loi n°73-37. Ce code qui a fait l’objet de nombreuses modifications depuis son
adoption (dont notamment celle issue de la Loi n° 97-05 du 10 mars 1997) constitue la base
du système de sécurité sociale au Sénégal.

En raison de la structure sociale et économique qui fait une part très importante au secteur
informel, de la faiblesse des subventions publique et du taux de chômage très élevé, le risque
chômage est exclue du système de protection social au Sénégal, ne sont donc couverts que les
risques : accidents et maladies professionnels ; maladies ; vieillesse ; maternité ; charges
familiales.

Pour couvrir ces risques le système de sécurité sociale s’appuie sur deux types d’institutions :

• Les organismes privés chargés d’une mission de service publique, placés sous la
tutelle du ministère chargé du travail et de la sécurité sociale que sont la Caisse de
Sécurité Sociale (CSS) et l’Institution de Prévoyance Retraites du Sénégal (IPRES) ;

• Les Institutions de Prévoyance Maladie (IPM) et des Mutuelles de Santé.

En plus de ce dispositif relevant du service public de la sécurité sociale, des initiatives privées
se multiplient par des offres émanant des compagnies d’assurance pour couvrir le risque
maladie, retraite et certaines charges familiales. Ces assurances fonctionnent sur le système de
capitalisation et de la mutualisation des risques. Les travailleurs de tous secteurs peuvent y
adhérer librement en choisissant les formules qui conviennent à leurs besoins et capacité de
cotisation. Sont ainsi proposés des plans épargne retraite, épargne éducation des enfants et
assurance maladie suivant le modèle des mutuelles de santé. Ces dispositifs viennent
compléter le système général pour les travailleurs qui y sont obligatoirement assujettis et le
suppléer pour ceux qui ne sont pas couvert (notamment les travailleurs indépendants).

Dans le cadre de ce cours, l’accent sera mis sur les travailleurs du secteur privé, au sens de
l’article 2 du code du travail. C’est donc de la protection du travailleur sous subordination
juridique relevant du secteur privé ou sous contrat de droit privé avec une institution publique
(couramment appelé contractuel) dont il s’agira. Des régimes particuliers mais embryonnaires
couvrent des travailleurs relevant de certains secteurs particuliers tels que les gens de maison

62
et de mer. Ces régimes particuliers ne retiendront pas notre attention qui sera focalisé sur le
régime général.

Les différentes branches de sécurité sociale seront examinées suivant les organismes qui les
prennent en charge. Ainsi, dans les accidents du travail, maladie professionnelle et prestations
sociales relevant de la Caisse de Sécurité Sociale feront l’objet du premier chapitre, viendront
ensuite les branches retraite et décès gérées par l’IPRES au deuxième chapitre et, enfin,
l’assurance maladie relevant des IPM dans le troisième et dernier chapitre.

63
CHAPITRE 1/ Les accidents de travail, maladies professionnelles et
prestations familiales

Les accidents du travail, maladies professionnelles et les prestations familiales sont prises en
charge par la Caisse de Sécurité Sociale au Sénégal.

SECTION 1/ Les accidents et maladies liés au travail

Bien qu’étant tous deux liés au travail, l’accident et la maladie se distinguent dans leur régime
juridique. Ils sont néanmoins tous les deux pris en charge par la CSS qui intervient dans une
optique réparatrice mais également préventive en pilotant la mise en place dans les entreprises
d’institutions spécialisées. Il s’agit du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de
travail (CHSCT) et la médecine du travail.

Le CHSCT est un organe composé de représentants élus du personnel et de l’employeur. Ce


comité est chargé d’assurer une réflexion et une veille permanente sur les conditions de travail
au sein de l’entreprise et particulièrement en ce qui concerne les mesures d’hygiène et de
sécurité.

Quant à la médecine du travail, il s’agit d’un service médical spécialisé dans la question du
travail. Ce service contrôle l’aptitude des travailleurs à occuper leur poste de travail, il
intervient dans la prévention et la correction des risques du travail etc… Les médecines du
travail sont soit organisées dans le cadre de l’entreprise, soit en tant que service commun à
plusieurs entreprises évoluant dans le même domaine. Et la création d’un service social
devient obligatoire à partir d’un effectif de 500 salariés.

PARAGRAPHE 1/ L’accident de travail

En cas de maladie ou d’accident d'origine professionnelle, le travailleur bénéficie d'une


sécurisation de son contrat de travail. Le contrat de travail est suspendu jusqu’à la
consolidation des blessures ou la guérison. Le travailleur bénéficie de l’intégralité de sa
rémunération durant une période de 6 à 10 mois en fonction de son ancienneté dans
l’entreprise (art. 87 CCNI). Cette rémunération est constituée par les indemnités journalières
des institutions de sécurité sociale complétées par une allocation de l’employeur afin de
maintenir le montant de sa rémunération habituelle. Si, au terme de la période de suspension
du contrat, le travailleur réintègre l’entreprise et retrouve son poste ou un poste équivalent.

64
Lorsque le travailleur n’est plus à même d’occuper son poste précédent dans des conditions
normales la CCNI invite l’employeur, avec l’aide des délégués du personnel à procéder à un
reclassement de ce dernier (art. 88), ce qui peut entrainer un changement des conditions de
travail ou même une modification du contrat de travail conformément à l'article 113 du code
de sécurité sociale. Mais si le reclassement n'est pas possible au sein de l'entreprise, le contrat
de travail pourra être rompu sur autorisation de l'inspecteur du travail qui devra pourvoir au
reclassement du travailleur hors de l'entreprise dans un poste réservé aux mutilés du travail.

Notion d’accident du travail

La notion d’accident de travail est plus large qu’il n’y parait. Selon l’article 33 du code de
sécurité sociale, « est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause,
l’accident survenu à un travailleur :

1° par le fait ou à l’occasion du travail ;

2° pendant le trajet de sa résidence au lieu de travail et vice versa, dans la mesure où le


parcours n’a pas été interrompu ou détourné pour un motif dicté par l’intérêt personnel ou
indépendant de l’emploi ;

3° pendant les voyages et les déplacements dont les frais sont mis à la charge de l’employeur
en vertu des articles 108, 150 et 151 du Code du travail. »

L'accident est caractérisé par la soudaineté et la violence d'une cause extérieure


provoquant une lésion corporelle sur la personne du salarié. Si le préjudice se réalise
progressivement, il s'agira d'une maladie et non d'un accident.

On distingue ainsi l’accident de travail à proprement parlé dont la cause immédiate est
l’exercice de l’activité professionnelle. Cet accident survient durant le temps de travail (le
temps durant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur, prêt à recevoir des
instructions et à les exécuter), dans les locaux de l’entreprise ou des locaux extérieurs où le
salarié est amené à exécuter des tâches confiées par l’employeur. Exemple : constitue un
accident de travail, celui subi par un ouvrier blessé sur un chantier alors qu’il était au service
de l’entreprise. Mais n’est pas réputé accident de travail celui survenu dans les locaux de
l’entreprise à un salarié en congé qui est venu rendre visite à ses collègues.

En plus de l’accident de travail à proprement parlé, le code de sécurité sociale retient


également l’accident de trajet. Qui est celui survenu sur le trajet menant le salarié de sa
résidence à son lieu de travail ou le lieu commandé par l’employeur, puis une fois son travail
65
achevé, de son lieu de travail à sa résidence. Il a lieu non seulement sur un parcours défini
mais doit également avoir un lien suffisant avec le travail (effectué à cause ou à l'occasion du
travail). L'accident survenu durant un trajet effectué pendant le temps de travail et pour des
raisons professionnelles est cependant qualifié d'accident de travail. Car le travailleur est déjà
placé sous subordination juridique et cet accident survient à l'occasion du travail.

L’accident de trajet soulève de nombreuses difficultés pratiques dans sa qualification. La


jurisprudence retient à cet effet le trajet le plus direct entre le domicile et le lieu de travail
selon le moyen de transport utilisé. Ce trajet protégé est l'itinéraire normal entre la résidence
et le lieu de travail et effectué dans un délai normal eu égard aux horaires de travail. Tout
détour et toute interruption, non commandés par des nécessités professionnelles sort, en
principe, le salarié du trajet protégé. Mais la jurisprudence française, notamment, a considéré
certains arrêts et détours comme étant légitimes et donc demeurant dans le trajet protégé. Il
s’agit entre autres des arrêts et détours pour faire des courses relevant de la vie quotidienne et
familiale (supermarché, pharmacie, récupérer des enfants à la sortie de l’école, restaurant à la
pause déjeuner, etc…).

Enfin, toute la période des déplacements professionnels est couverte par le régime des
accidents de travail. Il s’agit du salarié qui est hors de la localité où il réside habituellement
pour les nécessité professionnelles (séminaires, mission etc…). Durant cette période, la
protection couvre non seulement le temps de travail effectif ou celui assimilé, mais aussi le
temps de repos englobant, éventuellement des activités ludiques. La responsabilité de
l’employeur est donc renforcée durant les déplacements professionnels. Il faut également y
inclure l'accident survenu pendant le déplacement lui-même qui, à cette occasion, est un
accident du travail et non un accident de trajet.

Contrairement au droit français, le droit sénégalais ne tire aucune conséquence de la


distinction entre accidents de travail et de trajet, de sorte que son intérêt s'en trouve réduit.

L'incidence de la faute dans la réalisation de l'accident

Le régime de responsabilité pour accident professionnel est basé sur le risque, néanmoins, la
faut y joue un rôle crucial. Si l'accident est dû à une faute, de la qualification de celle-ci et de
l'identification de son auteur découlent de conséquences.

La faute intentionnelle ou inexcusable de la victime la prive des indemnités journalières et


l'expose à une diminution de sa rente (art.61 et 62 du code de sécurité sociale).

66
Lorsque l'accident est causé par une faute inexcusable de l'employeur ou de l'un de ses
préposés, les indemnités dues à la victime ou à ses ayants droit sont majorées. Le montant de
la majoration est à la charge exclusive de l'employeur, sans qu'il puisse se prémunir de cette
responsabilité par la souscription d'une assurance. C'est son patrimoine personnel qui doit
répondre de cette responsabilité (art. 63 code de sécurité sociale).

Si la faute de l'employeur ou de l'un de ses préposés est par contre qualifiée d'intentionnelle,
outre la prise en charge de la victime par le régime de l'accident du travail, cette dernière et
ses ayants droit peuvent exercer une action en responsabilité civile selon les règles du droit
commun contre l'auteur, dans la mesure où le régime de l'accident du travail n'a pas réparé
l'intégralité du préjudice. La caisse de sécurité sociale qui fournit à la victime des prestations
et indemnités est admise à exercer une action récursoire contre l'employeur (art. 64 code de
sécurité sociale). Le même droit est ouvert à la caisse en cas d'accident causé par un tier.

L'action en réparation peut être portée devant la juridiction pénale lorsque le faute est
constitutive d'une infraction. Dans ce cas, la caisse de sécurité sociale doit nécessairement être
appelée à la cause. A défaut, elle peut formuler une tierce opposition contre le jugement.

La procédure en cas d’accident du travail

Lorsque l’accident de travail survient, l’employeur ou son représentant qui en est informé doit
immédiatement faire procurer les soins de première urgence au salarié, notamment lorsque
l’accident survient dans ses locaux. D’où la nécessité d’un service médical ou d’une
infirmerie et du personnel formé à cet effet à tout le moins.

Il doit aviser le médecin de l’entreprise ou à défaut le praticien le plus proche. Et faire


procéder à l’évacuation de la victime dans l’établissement hospitalier le plus proche ou
adapté. Ces soins de première urgence, ainsi que le salaire du jour de l’accident restent
exclusivement à la charge de l’employeur.

Par la suite, l’employeur doit déclarer l’accident à l’Inspecteur du Travail dans un délai de 48
heures, ampliation faite à la CSS, avec notification de cette déclaration au salarié concerné.

Doivent être joints à la déclaration :

• un certificat médical établi par le médecin traitant, indiquant l’état de la victime, les
conséquences de l’accident ou, si les conséquences ne sont pas exactement connues, les suites
éventuelles et, en particulier, la durée probable de l’incapacité de travail ;

67
• une attestation indiquant le salaire perçu par le travailleur pendant les trente jours
précédant l’accident et le nombre de journées et heures de travail correspondant à cette
période.

La CSS étant l’institution prenant en charge l’accident, son accord préalable est demandé par
le médecin traitant pour toute prestation complémentaire à ceux nécessité par la prise en
charge immédiate de la victime. Ce système visant à éviter une explosion des dépenses de la
caisse peut néanmoins retarder l’accomplissement de certains actes nécessaires pour défaut de
prise en charge (opération chirurgicale, rééducation etc…). C’est pourquoi le défaut de
réponse de la caisse au bout de 15 jours équivaut à une acceptation tacite.

Lorsqu’il y a guérison ou consolidation, le médecin traitant adresse immédiatement un


certificat médical à la CSS précisant la date de la guérison ou consolidation et, le cas échéant,
le taux d’incapacité permanente de travail.

A toute étape, la CSS peut demander à la victime de se soumettre à un examen médical


effectué par son médecin conseil ou un médecin commis par elle. En cas de refus de la
victime, la CSS peut suspendre le versement des indemnités.

La prise en charge de la victime d’accident de travail

En cas d’accident du travail, le contrat de travail est suspendu jusqu’à la consolidation des
blessures ou la guérison du salarié (art. 88 CCNI). Il est donc interdit à l’employeur de le
licencier. La prise en charge de l’accident de travail est essentiellement financière et partagée
entre l’employeur et la CSS.

Au titre des prestations en nature, la CSS prend en charge l'intégralité des frais médicaux
de la victime, les frais de transport et de séjour nécessités par les besoins du suivi médical,
dans la limite fixée par la convention collective applicable. De même que les frais pour la
fourniture et l'entretien des équipements et prothèses que nécessite l'état de la victime. Dans le
prolongement, la CSS prend également en charge les frais de réadaptation fonctionnelle et
professionnelle. Et en cas de décès de la victime, la CSS s'occupe également des frais
funéraires et des frais de transport du corps. Sur le plan théorique, les conséquences médicales
de l'accident du travail sont bien prises en charge de sorte à assurer une sérénité à la victime le
temps de sa guérison. Mais dans les faits les lenteurs administratives obligent la victime et sa
famille à avancer les frais avant d'entamer un véritable parcours du combattant pour le
remboursement.

68
La prise en charge est surtout financière.

En cas d’incapacité temporaire de travail (ITT), elle comprend tout d’abord le paiement
d’une indemnité journalière compensatrice de salaire versée par la CSS. Cette indemnité
est égale à la moitié du salaire/revenu journalier du lendemain de l’accident jusqu’au 28ème
jour qui suit, et aux 2/3 à compter du 29ème jour jusqu’à la guérison ou la consolidation de
l’état du salarié (art.72 code de sécurité sociale). Cette indemnité journalière est plafonnée et
ne peut dépasser à 7.560 Fcfa qui correspond à 1% du plafond du revenu/salaire annuel utilisé
pour le calcul des cotisations pour les accidents du travail.

L’indemnité est complétée par une allocation de l’employeur, durant une période variant
en fonction de l’ancienneté du salarié, pour lui assurer un plein salaire (art 88 CCNI). Cette
période est de :

• 3 mois pour le salarié ayant moins de 1 an d’ancienneté ;

• 4 mois pour le salarié ayant une ancienneté de 1 à 5 ans ;

• 5 mois pour le salarié ayant plus de 5 ans d’ancienneté.

En cas d’incapacité permanente partielle (IPP) de travail, la victime a droit à une rente
égale au revenu annuel multiplié par le taux d'incapacité préalablement réduit de moitié pour
la partie de ce taux qui ne dépasse pas 50 % et augmenté de moitié pour la partie excédant
50 %.

Le salaire ou revenu annuel est la rémunération effective perçue par la victime sur les douze
mois précédant sont arrêt de travail consécutif à l'accident de travail.

- Un taux d'IPP de 30% correspond à une rente de 15% du salaire de référence (30%/2).

- Un taux d'IPP de 70% correspond à une rente de 55% du salaire de référence (50X0,5
+ 20%X1,5).

Si le degré d'incapacité de la victime est total (100 %) et requiert l'assistance constante d'une
tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie, le montant de la rente est majoré
de 40 %.

Si l'incapacité est supérieure à 10 % ou s'il s'agit d'un accident mortel, la rente doit être
calculée sur un revenu annuel compris entre 1 130 290 Fcfa et 3 805 696 Fcfa. Il s'agit d'un
planché et d'un plafond de sorte que si le revenu annuel est inférieur à cette fourchette, il est

69
porté à hauteur du planché et, à l'inverse s'il est supérieur, il est rabaissé au niveau du plafond.
S'il est dans la fourchette, le montant exacte du revenu annuel sera pris en compte.

Le taux d'incapacité est fixé par les médecins conseils de la CSS et est révisé tous les 2 ans.
Le paiement de la rente est trimestriel et peut, sur demande, être mensuel si le taux
d'incapacité est d'au moins 75 %, mais en cas d'incapacité égale à 100 %, le paiement est
obligatoirement mensuel. La rente est incessible et insaisissable dans son intégralité, tandis
que l'indemnité journalière n'est protégée que dans la limite fixée par l'article 381 du code de
procédure civile qui détermine la quotité incessible et insaisissable du salaire.

En cas d'accident entraînant le décès, les ayants droit de la victime perçoivent une rente
dont le pourcentage du salaire/revenu annuel de la victime diffère selon leur statut.

• Epoux 30%, ramené à 20% si séparation de corps ou divorce avec pension


alimentaire et partage de la rente en cas de pluralité d'épouses ;

• 1 enfant 15% ;

• 2 enfants 30% ;

• 3 enfants 40% et 10% pour chaque enfant supplémentaire ;

• 10% par ascendant pour un maximum de 30% si plusieurs ascendants.

A noter que l'ensemble des rentes ne doit pas dépasser 85 % du salaire/revenu annuel de
référence. Si tel est le cas, il est procédé à une réduction proportionnelle pour chacun des
ayants droit.

PARAGRAPHE 2/ La maladie professionnelle

La maladie professionnelle est celle qui est contractée du fait du travail ; celle qui a un lien
direct avec le travail. Elle est consécutive à l’exposition plus ou moins prolongée à des risques
inhérents à l’exercice habituelle de l’activité professionnelle. La grande difficulté est de
distinguer une telle maladie de celle qui résulte de la pratique d’un sport ou de l’absence
d’activité sportive, de l’alimentation, du cadre et des habitudes de vie hors du lieu du travail
etc… C’est pourquoi le choix a été fait d’en établir une liste officielle qui retient des
affections particulières en lien avec des activités professionnelles bien déterminée.

Ainsi, l’article 34 du code de sécurité sociale précise que les maladies professionnelles sont
énumérées dans des tableaux arrêtés conjointement par le ministre chargé du travail et celui

70
de la santé publique (arrêté interministériel n°006048/MTFP/DTS du 24 juillet 1991 portant
tableau des maladies professionnelle). Les tableaux précisent la dénomination de la maladie,
les délais de déclaration ou de prise en charge ainsi que les travaux susceptibles d'exposer à
ces maladies. Ce système à l'avantage de poser une présomption au bénéfice du salarié exposé
à un facteur de risque, le dispensant de rapporter la preuve de l'origine professionnelle de sa
maladie. Les formulations sont assez générales et peuvent recevoir une grande variété
d'affections. Cependant, il manque une procédure de reconnaissance individuelle des maladies
professionnelles permettant au travailleur qui sont en mesure de prouver que la dégradation de
leur état de santé est liée à leur activité professionnelle d'obtenir une prise charge, sans que
leur affection ne figure sur le tableau. Notre système est pour l'heure trop rigide et peut
entrainer l'exclusion de certaines situations évidentes.

Pour faciliter l’établissement de ces tableaux, l’article 35 du code de sécurité sociale présume
le caractère professionnel des catégories de maladies suivantes :

• les manifestations morbides d’intoxication, aigu ou chronique présentées par le


travailleur exposé d’une façon habituelle à l’action de certains agents nocifs. Des tableaux
donnent, à titre indicatif la liste des principaux travaux comportant la manipulation ou
l’emploi de ces agents ;

• les infections microbiennes, lorsque les victimes ont été occupées d’une façon
habituelle à certains travaux limitativement énumérés ;

• les infections présumées résulter d’une ambiance ou d’attitudes particulières


nécessitées par l’exécution de travaux limitativement énumérés ;

• les infections microbiennes ou parasitaires susceptibles d’être contractées à l’occasion


du travail dans les zones qui seraient reconnues particulièrement infectées.

La procédure et la prise en charge sont les mêmes que pour l’accident de travail et la date de
la première constatation médicale est assimilée à la date de l’accident.

Section 2/ Les prestations familiales

Les prestations familiales sont des prestations dont l’objet est d’apporter une aide
compensatrice d’une partie des dépenses engagées pour la subsistance et l’éducation des
enfants.

71
Paragraphe1/ Les bénéficiaires

Il s’agit essentiellement de prestations en espèce versées au salarié mais avec une condition
d’ancienneté. Car seul les salariés ayant exercé au moins trois mois d’activité (de cotisation) y
ont droit à raison d’un minimum de 18 jours ou 120 heures de travail dans le mois (sont ici
visés les travailleurs à temps partiel). Il faut préciser que durant les périodes de suspension du
contrat de travail prévues à l'article L.70 du code du travail les droits aux prestations
familiales sont maintenus et durant celles assimilées à du temps de travail effectif,
l'ancienneté est comptabilisée pour le bénéfice des droits. Il s'agit entre autres de l'absence
pour maladie pour une période limitée ; pour maladie professionnelle ou accident du travail,
pour congé maternité et pour les congés payés.

Les prestations sont versées suivant un critère de résidence. Le régime s’adresse aux
personnes résidant sur le territoire national et exécutant leur contrat de travail au Sénégal de
façon habituelle. Mais les travailleurs qui sont amenés à exécuter leur contrat ou un stage de
formation ou de perfectionnement d’une durée maximale de 6 mois restent couverts par le
régime. De même, les travailleurs ayant leur résidence habituelle dans un autre Etats qui sont
amenés à exécuter leur contrat sur le territoire sénégalais bénéficient également des
prestations lorsque leur séjour au Sénégal est d’une durée supérieure à 6 mois. Les enfants à
charge doivent également résider sur le territoire sénégalais pour bénéficier des prestations.

Dans tous les cas, sont exclus du régime général et ne bénéficient pas des prestations
familiales les travailleurs bénéficiant d’un régime particulier plus favorable (ex : les
travailleurs d’organisations internationales).

Il faut cependant faire certaines distinctions dans les conditions d’octroi selon le sexe et la
capacité. Ainsi, peuvent bénéficier des prestations familiales :

• les travailleurs salariés ;

• les femmes salariées non mariées ;

• les femmes salariées mariées dont le mari n'exerce aucune activité professionnelle
rémunérée ;

• les veuves d'un allocataire ;

• les travailleurs présentant une incapacité permanente totale à la suite d'un accident du
travail ou d'une maladie professionnelle ;

72
• les personnes en incapacité de travail et les chômeurs durant de moins de 6 mois.

Pour les personnes en incapacité de travail et les chômeurs de moins de 6 mois, le bénéfice
des allocations n’est que temporaire et sa durée dépend de leur propre durée de cotisation
avant l’incapacité ou le chômage.

• 1 mois de droits maintenus, si le travailleur a effectué préalablement 6 mois de travail


salarié ;

• 2 mois de droits maintenus, si le travailleur a effectué préalablement 12 mois de travail


salarié ;

• 6 mois de droits maintenus, si le travailleur a effectué préalablement plus de 12 mois


d'activité salariée.

On ne peut s’empêcher de remarque le cas de la femme mariée dont le mari exerce une
activité professionnelle rémunérée. Elle ne bénéficie pas des prestations familiales car ces
dernières sont déjà versées au ménage de par le biais de son conjoint. Les prestations étant à
destination de la famille, il faut éviter les doublons par le versement aux deux conjoints. La
femme ne pourra donc être allocataire qu'après avoir rapporté la preuve que son conjoint n'est
ni salarié, ni fonctionnaire.

Les enfants à charge

Ne peut prétendre aux bénéfices des prestations familiales que celui qui a effectivement un ou
plusieurs enfants à charge. Il s’agit de la personne qui assure d’une manière générale et
permanente le logement, la nourriture, l’habillement, l’éducation de l’enfant. L’enfant devant
être soit :

• Légitime (issu du mariage du travailleur) et régulièrement enregistré à l’état civil ;

• Adopté conformément à la loi ;

• Naturel mais reconnu par ses auteurs.

• Placé sous tutelle par une décision de justice

Paragraphe 2/ Les prestations familiales

73
Les prestations dues au titre de la branche familiale sont essentiellement d'ordre financières,
mais quelques prestations en nature sont également assurées.

A- Les prestations financières


• les allocations prénatales,

• les allocations de maternité,

• les indemnités journalières de congé de maternité,

• les allocations familiales.

Le montant de base des allocations prénatales, de maternité et des allocations familiales est
fixé à 2 600 FCFA par mois, par enfant sans limitation du nombre d'enfants pour les
allocations prénatales et les allocations de maternité et dans la limite de 6 enfants pour les
allocations familiales.

Les prestations sont dues après établissement d’une demande sur un imprimé fourni par la
Caisse de Sécurité Sociale accompagné de pièces d’état civil justifiant de la situation du
demandeur.

Les allocations prénatales

Elles sont dues à toute femme salariée dont le mari n'exerce aucune activité professionnelle,
ou à toute conjointe d'un travailleur salarié, ainsi qu'à toute femme salariée non mariée. Elles
sont destinées à soutenir la femme dans les charges occasionnées par la grossesse et le suivi
médical de celle-ci.

Si une déclaration de grossesse accompagnée d'un certificat médical est adressée à la CSS
dans les trois premiers mois de la grossesse, les allocations sont dues, en principe, pendant les
neuf mois précédant la naissance.

Pour pouvoir bénéficier des allocations prénatales, la femme enceinte doit passer 3 visites
médicales obligatoires :

• la 1ère avant le 3e mois de grossesse,

• la 2e vers le 6e mois de grossesse,

• la 3e au 8e mois de grossesse.

74
Les allocations prénatales sont payées à la mère sur présentation des volets du carnet de
grossesse et, à raison de :

• 2 mensualités (2 x 2 600 FCFA) avant le 3e mois de grossesse,

• 4 mensualités (4 x 2 600 FCFA) vers le 6e mois,

• 3 mensualités (3 x 2 600 FCFA) vers le 8e mois.

Toute visite médicale non effectuée fait perdre le bénéfice de la fraction de prestations
correspondantes.

L’indemnité journalière de congé maternité

Cette indemnité est destinée à la femme salariée et remplace le salaire durant la période de
congés maternité.

La femme salariée enceinte a droit à des indemnités journalières égale à 100 % du dernier
salaire journalier perçu. L'indemnité est versée pendant les 14 semaines de son congé de
maternité (6 semaines avant l’accouchement et 8 semaines après). Cette durée peut être
prolongée de 3 semaines en cas de grossesse pathologique ou de naissances multiples.

Le paiement de ces indemnités est conditionné par :

• La production d’un certificat médical constatant la grossesse ;

• La justification de la qualité de travailleur ;

• Une notification de l’employeur attestant de prise effective du congé de maternité ;

• La production du bulletin de paie du mois précédant l’arrêt de travail.

L’indemnité est égale au salaire journalier perçu sur les 30 derniers jours avant la prise
effective du congé, en y intégrant d’éventuelles indemnités de fonction. Elle est versée soit
par période de 30 jours, soit à l’expiration des 6 semaines avant l’accouchement, puis les 8
semaines après, soit à la fin du congé de maternité. Mais dans la pratique, l’employeur
continue à verser le salaire mensuel et est remboursé par le mécanisme de la subrogation dans
les droits de la femme auprès de la CSS, à condition d’être lui-même en règle avec cette
dernière.

Les allocations de maternité

75
Les conditions requises sont les mêmes que pour les allocations prénatales et leur versement
couvre une période de deux ans. Ces allocations ont pour vocation de soutenir la famille dans
les charges résultant de la petite enfance.

Versées à la naissance de chaque enfant viable et inscrit sur les registres de l'état civil, ces
allocations sont payées à la mère sur présentation du certificat d'accouchement et des volets
du carnet de maternité attestant que les visites médicales du nourrisson ont bien été
effectuées :

• tout les 2 mois pendant la 1ère année de l'enfant,

• tout les 3 mois pendant sa 2e.

Elles sont versées de la manière suivante :

• 6 mensualités (6 x 2 600 FCFA) à la naissance ou immédiatement après la demande,

• 6 mensualités (6 x 2 600 FCFA) à 6 mois,

• 6 mensualités (6 x 2 600 FCFA) à 12 mois,

• 3 mensualités (3 x 2 600 FCFA) à 18 mois,

• 3 mensualités (3 x 2 600 FCFA) à 24 mois.

En cas de naissances multiples, chaque naissance est considérée comme une naissance
distincte.

Les allocations familiales

Les allocations familiales prennent le relais des allocations de maternité et sont destinés aux
personnes ayant à leur charge des enfants de 2 à 14 ans en principe. Elles sont destinées à
compenser une partie des charges financières engagées pour l'entretien et l'éducation des
enfants. Le paiement de l’allocation est subordonné à la présentation des pièces suivantes :

• Un extrait de naissance de l’enfants ;

• Un certificat de charge et d’entretien ou un certificat de vie ou d’entretien ;

• Un certificat de visite médical ou un certificat de scolarité ou d’apprentissage selon


l’âge et la situation de l’enfant ;

76
• Un certificat médical constatant l’infirmité ou la maladie incurable pour les enfants de
14 à 21 ans dans ces situations.

Les allocations sont versées à partir du second anniversaire de l'enfant et jusqu'à l'âge de :

• 14 ans en principe,

• 18 ans s'il est placé en apprentissage,

• 21 ans en cas de poursuite d'études ou d'infirmité ou de maladie incurable.

Le nombre d'enfants ouvrant droit aux allocations familiales est limité à 6. La politique
sénégalaise va donc dans le sens d'un contrôle de la natalité. Et l'allocation n'est pas due pour
les enfants à charge bénéficiant d'une bourse complète. Le versement de l'allocation doit être
effectué à intervalles réguliers limitée à trois mois au maximum.

B- Les prestations en nature


En plus des prestations en espèces, des prestations en nature sont servies aux épouses et
enfants du travailleur ou à toute personne qualifiée qui aura la charge de les affecter
exclusivement aux soins de l’enfant. Il s’agit essentiellement de la prise en charge gratuite
sous réserve du paiement d’un ticket modérateur (le ticket modérateur est la part des frais qui
est à la charge du bénéficiaire de la prestation et qui permet de contrôler le recours aux des
usagers aux services de santé) pour les prestations suivantes :

• Soins médicaux ;

• Consultations pédiatriques et gynécologiques ;

• Vaccination ;

• Suivi alimentaire ;

• Planification familiale ;

• Fourniture de médicaments génériques à bas prix ;

• Analyses médicales.

Il s’agit donc du suivi de la grossesse, de l’enfantement et de la petite enfance. Ces prestations


perdent toutefois de leur intérêt au regard des progrès de la couverture maladie universelle et
surtout du fait que la quasi-gratuité est limitée à des structures précisées.

77
78
CHAPITRE 2/ La Retraite et le Décès

Section 1/ Présentation générale de la retraite

Paragraphe 1/ Définition et gestion de la retraite

La retraite est la rupture du contrat de travail en raison de l'âge du salarié, ouvrant droit au
versement d'une pension et à des indemnités. Au moment de la mise à la retraite, le salarié
perçoit une indemnité calculée sur la base du salaire global mensuel moyen perçu par le
salarié durant les 12 derniers mois d'activité, à raison d'un pourcentage pour chaque année de
présence dans l'entreprise. L'article 84 de la CCNI fixe les modalités de calcul comme suit :

- 25% par année de présence pour les 5 premières années ;

- 30% par année de présence entre la 6ème et la 10ème année ;

- 45% par année de présence entre la 11ème et la 20ème année ;

- 50% par année au-delà de la 20ème année.

Il s'agit là d'une simple indemnité de fin de contrat pour cause de retraite. Mais la prise en
charge de la retraite est véritablement assurée par le versement de la pension.

Une pension de retraite est une somme d’argent qui est généralement reçue mensuellement
par un individu, après sa retraite d’un emploi salarié. Elle est obtenue grâce aux cotisations
versées par le travailleur et/ou son employeur au système dans lequel le salarié est affilié, et
elle est soit investie soit utilisée pour maintenir le niveau de vie après cessation de l’activité
professionnelle. Un calcul économique permet de déterminer pendant la carrière du salarié les
allocations qui lui seront versées à la retraite. La méthode de calcul manque toutefois de
transparence dans notre pays et on ne peut que difficilement évaluer la retraite avant qu’elle
ne soit effective.

Au Sénégal, le système de retraite des salariés est géré à titre de monopole par l'IPRES. Il est
ainsi fait obligation à tout employeur, au sens du droit du travail, d'adhérer à l'IPRES et d'y
affilier tous ses salariés. Ainsi identifié dans les registres de l'IPRES, il appartient à
l'employeur de verser les cotisations au nom du salariés mensuellement (si l'effectif
permanent de l'entreprise est supérieur ou égal à 20 salariés) ou trimestriellement (si l'effectif
permanent de l'entreprise est inférieur à 20 salariés). Ce versement englobe aussi bien la part
salariale que patronale.

79
Les salariés quant à eux, ont la qualité de participant aux régimes de retraite. Ils doivent pour
cela être âgés d'au moins 18 ans et avoir travaillé pendant au moins 30 jours pour un adhérant.
L'âge légal du travail au Sénégal étant de 15 ans, il semblerait que les 3 premières années de
travail ne donnent aucun droit au titre de la retraite. Peut toutefois demeurer participant le
salarié qui a perdu son emploi et qui continue à cotiser volontairement. Il doit cependant
rapporter la preuve de la cessation d'activité, avoir régulièrement cotisé au régime général
pendant au moins 5 ans et être âgé d'au moins 40 ans au moment de la cessation d'activité
salariée.

Enfin, les bénéficiaires du système de retraite sont les salariés à la retraite eux-mêmes, ainsi
que leurs conjoints survivants et les enfants à charge en cas de décès.

Paragraphe 2/ Les systèmes de financement de la retraite

Il existe deux systèmes de financement de la retraite : la répartition et la capitalisation.

Dans le système par répartition, les cotisations actuelles des salariés servent à financer les
pensions des citoyens qui sont à la retraite en ce moment. Dans le système par capitalisation,
les salariés épargnent pour financer leur propre retraite le moment venu. Chacun est alors libre
de décider quelle part de ses revenus il entend affecter au financement de sa retraite et
comment la placer. Cette épargne peut se faire via son entreprise, auprès de sa banque ou d'un
fonds de pension privé. Une fois à la retraite, on obtient alors l'argent issu de ce qu'on a
épargné durant sa vie active.

Le système le plus couramment utilisé (au Sénégal et en France notamment) est celui de la
répartition assurant la solidarité intergénérationnelle. Mais il peut être fortement éprouvé par
les évolutions de la courbe démographique et de l’état du marché de l’emploi. Le système de
capitalisation est manifestement plus rentable, surtout lorsque le capital est investi. Il permet
au participant de retirer beaucoup plus que le montant nominal de ses cotisations au moment
de la retraite et d’éviter des situations de déficit de financement au gré du marché de l’emploi
et de la démographie. Cependant, cela ne va pas sans risque ; le capital n’est pas garanti. En
théorie, il n’est donc pas impossible de se retrouver avec un capital moins important que ce
que l’on a épargné. La crise de 2008 a ainsi forcé de nombreux retraités américains à
reprendre le chemin du travail car les fonds dans lesquels ils avaient investi leur capital étaient

80
tombés en faillite. Ainsi, dans les faits, la plupart des systèmes de retraite dans le monde
combinent répartition et capitalisation à des degrés divers.

Ainsi au Sénégal, même si le régime général et complémentaire sont basés sur la répartition, il
est possible pour le participant de le compléter par la capitalisation en souscrivant une
cotisation volontaire auprès de compagnies d’assurance comme AXA Assurances.

Section 2/ Les régimes de retraite

Les travailleur admis à la retraite peut bénéficier de prestations versées par l’IPRES
(paragraphe 2) lorsqu’il remplit les conditions fixées pour le régime général et,
éventuellement, pour le régime cadre s’il relève de cette catégorie (paragraphe 1).

Paragraphe 1/ La présentation des régimes et conditions d'accès

A- Le régime général et le régime complémentaire des cadres


Au Sénégal, la pension de retraite est attribuée à tout employé déclaré à l’IPRES et ayant
cessé toute activité salariale. Le pensionné peut bénéficier d’un ou deux régimes de pension
de retraite en fonction de sa situation durant la période active de sa vie :

• Une pension de retraite au régime général avec des dispositions spécifiques


applicables aux employés de maison ;

• Une pension de retraite au régime complémentaire des cadres (qui ne concerne que les
cadres dont le montant des revenus mensuels sont supérieurs à 432 000 FCFA).

D'après l'article 1er du règlement n°2 de l'IPRES, le salarié est considéré comme cadre,
lorsqu’il :

• possède une formation technique, administrative, juridique, commerciale ou financière


résultant, soit d’études sanctionnées par un diplôme d’enseignement supérieur, soit d’une
formation ou d’une expérience professionnelle étendue ;

• occupe dans l’entreprise, l’administration, la collectivité publique ou l’établissement


public et par délégation de l’employeur, un emploi comportant des pouvoirs de décision,
d’autorité et de contrôle sur des collaborateurs de toute nature. Si l’emploi ne comporte pas
l’exercice du commandement, le cadre doit être investi de responsabilités équivalentes.

81
B- Les conditions d'obtention de la pension de retraite
Pour prétendre à une pension de retraite de l'IPRES, il faut cumuler les conditions suivantes :

• avoir 60 ans (55 ans en cas de travail pénible) ;

• avoir cessé toute activité salariée ;

• comptabiliser au moins 1 000 points de retraite ou avoir cotisé pendant au moins


10 ans.

La pension peut également être liquidée par anticipation à partir de 55 ans avec application
d'un coefficient de réduction. Le taux de réduction est de 5% pour chaque année avant 60 ans.
L'assuré qui continue de travailler après 60 ans accumule des points supplémentaires de
retraite qui auront pour effet d’améliorer sa pension. Pour le salarié qui remplit la condition de
cotisation, la pension est calculée sur les 10 meilleures années de service.

L'assuré qui obtient moins de 1 000 points de retraite ou moins de 120 mois de cotisations
bénéficie d'un versement unique d’un montant de 1.226.000 fcfa au maximum.

L'adhésion au régime cadre est obligatoire pour tous les cadres percevant plus de 432.000
FCFA par mois. Les conditions d'obtention de la pension au titre de ce régime sont identiques
à celles du régime général. Mais en cas d'anticipation, la pension de retraite complémentaire
est réduite de 1 % pour chaque trimestre avant 60 ans.

Paragraphe 2/ Les prestations versées au titre la retraite

A- La pension de retraite
Le montant de l'allocation de retraite est calculé sur la base des points inscrits au compte du
bénéficiaire. Lorsque les cotisations sont versées, elles sont converties en points en divisant le
montant de la cotisation par la valeur du point au moment du versement.

La pension annuelle est calculée selon la formule suivante :

(Points de cotisations + points gratuits – points de minoration + points de majoration) x


valeur du point

Le point de retraite

82
Un point de retraite est l’unité de compte que reçoit un participant en contrepartie des
cotisations versées pour son compte. Les points sont obtenus en divisant la cotisation
contractuelle par le salaire de référence de l’exercice.

La cotisation contractuelle est la cotisation après déduction des frais de fonctionnement de


l’IPRES (9% au régime général et 4% au régime cadre). Tandis que le salaire de référence et
la valeur du point sont fixés périodiquement de commun accord entre l’IPRES, l’Etat et les
partenaires sociaux en fonction d’indicateurs tels que le taux d’inflation. Depuis le 1er avril
2022, la valeur annuelle du point est fixée à 270,00 au régime général et 180,00 au régime
cadre, soit une augmentation de 10% par rapport à la valeur retenue depuis 2016. Le salaire de
référence est, quant à lui, fixé à 1.318 au régime général et 720 au régime cadre. Ces données
changent donc régulièrement d’une année à une autre mais ne sont pas tenues à disposition du
grand publique ; d’où une certaine opacité dans le calcul de la pension de retraite.

Une majoration de la pension de 5 % peut être versée pour chaque enfant à charge de moins
de 21 ans au moment du départ à la retraite, jusqu'à concurrence de 3 enfants. Le montant de
la pension de vieillesse minimum est de 35 000 FCFA par mois. On est passée du versement
trimestriel à un versement bimensuel et finalement à un versement mensuel depuis 2017.

Il est indiscutable que le niveau des pensions de retraite est très bas au Sénégal et que les
retraités qui n’auront compté que sur le service public de la sécurité sociale verront leur
niveau de vie chuter drastiquement à la retraite ; d’autant plus que leur salaire était important,
eu égard aux plafonnements des cotisations, au prélèvement de l'IPRES pour ses frais de
fonctionnement. Afin de rehausser le niveau des pensions retraite des salariés sénégalais, il est
impératif d’envisager les actions suivantes :

• Il s’agira tout d’abord de relever les plafonds pris en compte dans les cotisations des
régimes de base (un effort a été constaté à cet effet ces dernières années) ;

• Il conviendra ensuite d’encourager vivement les entreprises à souscrire à des régimes


de retraite complémentaires pour leurs salariés. C’est le cas par exemple pour la SONATEL
qui a mis en place un fonds de retraite financé par les cotisations des salariés, l’abondement
de la Direction Générale et les dividendes issues du placement en bourse (plan épargne
retraite) ;

83
• Il importera surtout de dynamiser le recours volontaire aux régimes de retraite par
capitalisation. En abondant les fonds, les entreprises encouragent leurs salariés à se constituer
une épargne confortable pour leurs retraites.

B- La pension de réversion pour les survivants

1- Le conjoint

L'allocation de réversion peut être servie à la veuve qui était mariée depuis au moins 2 ans
avec le défunt, à partir de :

• 50 ans,

• 45 ans avec application d'un coefficient d'anticipation,

• sans condition d'âge si la veuve a au moins 2 enfants à charge de moins de 21 ans. Le


service de l'allocation est suspendu dès que les enfants cessent d'être à charge et reprend
lorsque la veuve a 50 ans.

Pour les veufs, l'allocation de réversion est versée à partir de :

• 55 ans ;

• 53 ans si le veuf est atteint d'une invalidité entraînant une inaptitude au travail et était
à la charge de la défunte. Son versement est suspendu si le veuf cesse d'être invalide.

Le conjoint survivant bénéficie de 50 % de la pension que recevait ou aurait dû recevoir le


conjoint décédé. En cas de demande anticipée de la pension, une réduction de 5 % pour
chaque année d'anticipation entre 45 et 50 ans est appliqué à la veuve.

2- Les orphelins

L'orphelin âgé de moins de 21 ans, bénéficie de 20 % de la pension du parent décédé. Cette


pension est versée jusqu'à concurrence de 5 orphelins.

Les droits sont répartis proportionnellement au nombre d'orphelins s'ils sont plus de 5.
L'orphelin de père et de mère qui peut prétendre à des droits des 2 ascendants bénéficie de la
réversion la plus élevée.

TABLEAU DES COTISATIONS SOCIALES 2022

Cotisation au 1er Avril 2022


Branches Part Part Total Plafond
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employeur salariale mensuel en
FCFA
Prestations familiales 7% - 7% 63 000
Accidents du travail 1 %, 3 % ou - 1 %, 63 000
Maladies professionnelles 5% 3 % ou
selon 5%
risques
encourus
Vieillesse, décès (IPRES) 8,4 % 5,6 % 14 % 432 000
Vieillesse complémentaire 3,6 % 2,4 % 6% 1 296 000
(cadres) perçue sur les revenus
supérieurs à 432 000 FCFA
Maladie entre 2 % et entre 2 % entre 250 000
7,5 % et 7,5 % 4 % et
15 %

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CHAPITRE 3/ LA MALADIE

Le risque maladie est pris en charge au Sénégal par différentes institutions parmi lesquelles
les IPM (Institutions de Prévoyance Maladie) sont les plus visibles et opérantes. Elles sont
secondées par les Mutuelles de Santé. Les assurances jouent un rôle résiduel identique à celui
des Mutuelles de Santé mais en application d'un contrat d'assurance qui peut être individuel
(l'assuré et ses ayants droit) ou collectif (les salariés d'une entreprise).

Section 1/ Les Institutions de Prévoyance Maladie

L'IPM est une Institution de prévoyance sociale en charge de la couverture maladie des
travailleurs et des membres de leur famille. La création d'une IPM d'entreprise ou l'affiliation
à une IPM interentreprises est une obligation qui pèse sur l'employeur, au même titre de
l'obligation d'affiliation à la Caisse de Sécurité Sociale et à l'IPRES. Ainsi est mis en place un
régime de Couverture Maladie Obligatoire (CMO).

Dans le cadre de ce dispositif, il est fait obligation à toute entreprise comportant au moins 300
travailleurs de créer une IPM en son sein. Si cet effectif n’est pas atteint, l’obligation est faite
d’adhérer à une IPM déjà existante ou à une IPM interentreprises. Mais en vérité, peu
d’entreprise, même ayant atteint cet effectif disposent d’IPM d’entreprise en raison des
formalités de création et de fonctionnement mais également par rapport à la faible
performance de l’institution lorsque le nombre d’adhérents et de participant est modeste (la
mutualisation des risques est optimisée par un grand nombre de participant au système mis en
place). L’adhésion à une IMP interentreprise semble donc être la norme.

Une fois constituée au cours d’un Assemblée Générale et agréée par l’autorité de tutelle,
l’IPM doit mettre en place ses organes que sont :

• le Collège des représentant (employeurs et salariés) ;

• le Conseil d’Administration ;

• le Bureau Exécutif.

Une fois créée, l’IPM assure la prise en charge partielle des frais occasionnés par la maladie
non professionnelle du travailleur et des membres de sa famille. Cette prise en charge est
assurée à un taux variant entre 50 et 80% suivant les options choisies par le participant par le

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système du tiers payant. Le paquet de soins inclut la médecine générale, les soins médicaux,
les soins des médecins spécialistes, les analyses, radios et médicaments, les hospitalisations,
interventions chirurgicales, les soins dentaires, l’optique médicale etc… sous réserve de
certaines exclusions. La liste des Fournitures et Services ne donnant pas lieu à la prise en
charge est fixée par arrêté interministériel. Il s'agit :

- Des médicaments de confort et objet à usage médical ;

- Des massages, rééducations, de la chirurgie esthétique, des soins de pédicure,


manicure et de la gymnastique corrective etc...;

- De la chirurgie réparatrice d'infirmité ou de malformation congénitale, excepté pour


les enfants de moins de 15ans.

Dans d'autres cas, ce n'est pas la prestation qui est exclue en soit mais plutôt la circonstance
dans laquelle le mal est survenu qui justifie l'exclusion. Il s'agit :

- Des accidents de travail et maladies professionnelles relevant de la CSS ;

- Des cas de suicide, tentative de suicide ou mutilation volontaire ;

- Des rixe ou émeutes ;

- Des dommages corporels résultant de la pratique d'un sport.

Enfin, le nom paiement par le participant de toute somme due à l'IPM pendant deux mois lui
fait perdre la protection. Mais cette hypothèse ne se réalise pratiquement pas dans la mesure
où le paiement de la cotisation du participant est effectué par son employeur (l'adhérant) qui a
l'obligation de prélèvement à la source et de reverser à l'IPM.

Le participant ne peut obtenir la gratuité partielle des soins qu’au près des structures affiliées
au réseau de leur IPM. Le ticket modérateur restant à leur charge. La tarification des médecins
privés est encadrée par un arrêté interministériel qui confère aux IPM un tarif hautement
préférentiel.

Le financement est assuré par une cotisation mensuelle patronale et salariale de 4 à 15%
appliquée sur une assiette de 250 000 f CFA maximum. Cette cotisation est complétée par des
contributions des membres d’honneur et des subventions, dons et legs, ainsi que des produits
de placement effectués par l’IPM.

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Ces IMP ont des performances très variées en raison de leur gestion et de leur niveau de
financement. Elles assurent aujourd’hui l’essentiel de la couverture maladie dans le secteur
privé et laissent toujours la liberté aux participants d’adhérer à une mutuelle complémentaire
qui couvrira le ticket modérateur. Cette complémentaire santé peut être souscrite soit au sein
l’IMP à travers les différentes options proposées (impliquant une majoration de la cotisation)
ou en dehors auprès d’une mutuelle de santé ou d'une assurance.

En tant qu’institutions privées chargées d’une mission de service public, les IPM bénéficient
de prérogatives de puissance publique leur permettant de recouvrer les cotisations dues au
moyen de contraintes émises par elles-mêmes et visées par le président du tribunal du travail
compétent, après mise en demeure restée infructueuse au bout de 15 jours.

Sont recensées actuellement sur le territoire sénégalais 156 IPMS d’entreprises et inter-
entreprises agréées par l’ICAMO (Institution de Coordination de l’Assurance Maladie
Obligatoire).

Section 2/ Les Mutuelles de Santé

Les mutuelles sont des sociétés de personnes à but non lucratif organisant la solidarité entre
leurs membres, et dont les fonds proviennent principalement des cotisations des membres.
Elles ont vocation à être sans objet de bénéfice et ont un rôle avant tout social. Elles sont
régies au Sénégal par la Loi n°2003-14 du 4 juin 2003 relative aux Mutuelles de santé et le
Règlement n°07/CM /UEMOA / 2009, du 26 juin 2009 portant réglementation de la mutualité
sociale au sein de l’UEMOA.

Elles fonctionnent selon les principes coopératifs, dans un esprit marqué par la solidarité, la
liberté, l’égalité, la démocratie et l’indépendance. Elles peuvent être ainsi constituées sous
forme d'association ou même de société coopérative, étant entendu que le but ne doit pas être
lucratif. Ces mutuelles sont chargées :

• d’assurer la prise en charge de tout ou partie des soins de santé;

• d’assurer l’amélioration des conditions de santé de ses bénéficiaires;

• de faciliter l’accès pour tous à des soins de santé de qualité ;

• de stimuler l’amélioration de la qualité des soins;

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• de participer aux activités de promotion et d’éducation à la santé;

• de promouvoir et de développer leurs propres services de santé.

Leur objet est plus large que celui des IPM, ce qui leur permet même de sortir parfois du
cadre strict de la santé pour effectuer des œuvres sociales assez variées.

Pour exercer leur mission, les mutuelles de santé sont dotées d’une organisation comprenant :

• l’Assemblée Générale ;

• le Conseil d’Administration ;

• le Bureau Exécutif ;

• la Commission de Contrôle.

Elles peuvent constituer entre elles des Unions de Mutuelles de Santé et ces dernières peuvent
se regrouper en Fédération d’Union de Mutuelles de Santé. Leur financement est
principalement assuré par les cotisations des adhérents complétées éventuellement par des
dons legs et subventions ainsi que des emprunts à titre exceptionnelle. Elles sont soumises à
l’établissement d’une comptabilité stricte dont les normes sont fixées par décret.

L’adhésion aux Mutuelles de Santé est libre. Elles sont principalement destinées aux
personnes ne bénéficiant pas de la CMO (couverture maladie obligatoire), notamment les
travailleurs indépendants, les étudiants, les bénéficiaires de bourses de sécurité familiale etc…
La couverture assurée à l’adhérant bénéficie également à son conjoint et aux enfants à charge,
au sens des régimes de prestations familiales. Mais le bénéfice des prestations est conditionné
à un délai de stage et de cotisation d’un mois à compter de l’adhésion. Les personnes
bénéficiant de la CMO peuvent également adhérer à une mutuelle pour la prise en charge du
ticket modérateur et des prestations non couvertes par la CMO à condition que la mutuelle
elle-même les prenne en charge (il s’agira donc d’une complémentaire santé).

Ces mutuelles ne prennent en charge que les soins dispensés au niveau des structures de santé
publiques ou ayant signé une convention. Les prestations dispensées dans des structures
publiques et les médicaments génériques peuvent être couverts à 80 % par les
mutuelles (50 % dans les pharmacies privées). Les personnes couvertes par le programme
Bourse de Sécurité Familiale bénéficient d'une prise en charge de 100 % des frais dispensés.

Elles couvrent :

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• les consultations médicales ;

• les examens paramédicaux ;

• les accouchements ;

• les hospitalisations ;

• les examens complémentaires ;

• les soins spécialisés ;

• les évacuations ;

• les médicaments.

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