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COURS DE DROIT DU TRAVAIL

M. Ndour Juriste d’entreprise et


Enseignant Vacataire
Tel : 77-511-73-72
Email: ndour85ousseynou@gmail.com

Chapitre introductif :

L’étude du Droit du Travail renvoie, dans son aspect introductif, à trois (3) questions
fondamentales qui sont respectivement :

 Quel est le Champ d’Application du Droit du Travail ?


 Quelle a été l’Evolution du Droit du Travail Sénégalais ?
 Quelles sont les Orientations contemporaines du Droit du Travail ?

1 – Le Champ d’Application du Droit du Travail

Le Droit du Travail peut être défini comme l’ensemble des normes régissant les rapports
entre employeurs et salariés (ou employés). Mais tous les rapports de travail ne sont pas
sous l’emprise du Droit du Travail. Il y a en effet, des travailleurs qui échappent à
l’application du Droit du Travail. Il s’agit :

 Des Fonctionnaires qui sont soumis au statut général de la Fonction Publique ;


 Des travailleurs qui sont assimilés aux fonctionnaires, notamment les Militaires ou les
Enseignants du Supérieur qui relèvent de statuts particuliers ;
 Il en va de même pour toutes les autres catégories de travailleurs soumises à une
réglementation spéciale ;
 Enfin, le Droit du Travail avait exclu de son champ d’application les Stagiaires mais
avec la Loi numéro 2015-04 du 12février 2015 a introduit le contrat de stage dans le code du
travail.
Finalement, on peut retenir que le Droit du Travail ne s’applique dans une large mesure
qu’aux seuls salariés du Secteur Privé ou des Secteurs qui utilisent les méthodes du
Secteur Privé.
Ce Droit du Travail ainsi délimité a une histoire.

2 – L’Evolution du Droit du Travail Sénégalais

Elle peut être sommairement résumée en trois (3) étapes. Les deux (2) premières
correspondent à une époque partagée avec l’ensemble des pays africains sous domination
française :
C’est d’abord la période de l’Esclavage et du Travail Forcé, hypothèse où le travailleur est
soit considéré comme un objet, soit placé sous contrainte. Dans les deux (2) cas, c’est la
négation du travail qui correspond à la période obscure du Droit du Travail Africain.
La deuxième étape renvoie à l’avènement du Code du Travail des territoires d’Outre-mer de
1952. Il s’agit là d’une avancée remarquable parce que, pour la première fois, les travailleurs
africains étaient soumis à un corpus de règles déterminant leurs conditions de travail, leur
statut en tant que salariés. Mais, en dépit des avantages consacrés, le Code de 1952
renfermait au moins deux principaux inconvénients. En effet, il était à la fois Partiel et Partial.

• D’abord il était partiel parce que des pans entiers du travail n’avaient pas été
réglementés, notamment la situation de la femme ou de l’enfant au travail ou encore les droits
collectifs des salariés, compte non tenu de l’absence de règles relatives à l’hygiène et à la
sécurité.
• Ensuite le Code de 1952 était partial parce que discriminatoire. Il ne s’appliquait
qu’aux travailleurs autochtones. Les travailleurs d’origine européenne étaient soumis quant
à eux au Code Général du Travail de la Métropole.

Et pourtant, malgré ce double inconvénient, c’est le Code de 1952 qui va demeurer en vigueur
dans tous les pays africains jusqu’à l’indépendance.
Enfin troisième étape : avec la liberté retrouvée, chaque pays s’est doté de sa propre
législation nationale fortement inspirée du Code de 1952.

3 – Les Orientations Contemporaines du Droit du Travail Sénégalais


Pendant longtemps, le Droit du Travail a été présenté, analysé et enseigné comme étant un
Droit Protecteur. C’est en effet un droit partisan parce que l’essentiel de ses règles sont
orientées vers la protection des salariés. C’est parce que ces derniers sont réputés faibles. En
effet, le contrat de travail est un contrat de dépendance par excellence. Le salarié a accepté à
l’avance de se placer sous les ordres de son employeur, et ce dernier détient , une
panoplie de prérogatives qui lui permettent de faire fonctionner son entreprise. C’est
donc dire que les rapports de travail sont par essence inégalitaires. C’est ce qui justifie dans
une certaine mesure l’orientation protectrice du Droit du Travail, dans un souci de
rééquilibrer les rapports de travail. Ce caractère protecteur peut être attesté par diverses
illustrations que l’on retrouve dans le Code du Travail. C’est ainsi par exemple que, si le
salarié peut démissionner librement, l’employeur lui, est soumis à des contraintes quant à
l’exercice de son droit de licencier. C’est dans la même perspective qu’il est reconnu aux
Délégués du Personnel des pouvoirs exorbitants en leur conférant un statut dérogatoire qui
leur octroie presque, une immunité totale dans leur mission de défense des intérêts des
salariés. C’est aussi dans la même mouvance que l’on permet aux salariés de contester l’ordre
public établi en cessant de travailler collectivement sans encourir de sanctions, même s’ils
violent leurs obligations conventionnelles. Mais enfin et surtout, tout le Droit du Travail est
gouverné par un principe fondamental que l’on appelle l’Ordre Public Social ou le Principe
de Faveur en vertu duquel on considère que toutes les règles du Droit du Travail constituent
un plancher minimum auquel on peut toujours déroger dans un sens favorable au salarié,
même en violant la hiérarchie des normes. C’est donc pour tout cela que l’on affirmait le
caractère protecteur du Droit du Travail.
Mais depuis quelques années, il s’est développé une théorie que l’on appelle la Flexibilité de
l’Emploi qui est venue refouler l’orientation partisane du Droit du Travail. Le postulat de
cette théorie est empreint d’une certaine évidence. C’est l’entreprise qui génère l’emploi. Il
n’y a pas d’emploi sans entreprise. Par conséquent, tout ce qui affecte celle-ci rejaillit
nécessairement sur celui-là. Dès lors, il y a lieu de protéger l’entreprise si on veut préserver
les emplois. Par voie de conséquence, il y a lieu d’inverser la démarche en mettant
l’accent désormais sur la protection de l’entreprise.
Comment faire pour protéger l’entreprise dans un environnement mondialisé, à rude
concurrence et à rude compétitivité ? Il faut rendre performante l’entreprise pour qu’elle
puisse compétir et concurrencer les autres entreprises de même dimension. Il faut commencer
par lui alléger ses charges et le Droit du Travail fait partie de ces charges parce qu’il contient
des règles marquées d’un profond formalisme qui constituent autant de contraintes pour
l’entreprise et qui sont de nature à inhiber ses actions. Il faut alors flexibiliser, c’est-à-dire
assouplir les règles du Droit du Travail pour permettre à l’employeur une plus grande marge
de manœuvre dans la gestion de son entreprise. Telle est l’économie de la théorie de la
Flexibilité de l’Emploi, et elle a été entendu par les autorités publiques qui l’ont
expressément consacrée dans le Code du Travail de 1997. En effet, il résulte de l’exposé des
motifs de cette loi qu’il faut assurer l’épanouissement de l’entreprise en libéralisant le Droit
du Travail et en essayant de ne pas déprotéger les travailleurs. C’est un équilibre bien difficile
entre ce qui est économiquement possible et ce qui est socialement souhaitable. Il faut
reconnaître bien souvent que l’économique prend le pas sur le social. Et c’est ainsi
qu’apparaît aujourd’hui la physionomie du Droit du Travail sénégalais qui doit être
apprécié sous ce double regard : celui de la protection des salariés et celui de la flexibilité de
l’emploi. C’est cette orientation contemporaine qui se constate aussi bien au plan des relations
individuelles de travail qu’à celui des rapports collectifs.

PREMIERE PARTIE : LES RELATIONS INDIVIDUELLES DE TRAVAIL

A l’origine, l’emploi a une dimension individuelle. C’est le "face à face" entre l’employeur
et le salarié. Ce schéma a pour support le Contrat de Travail. C’est donc par là qu’il faut
envisager la physionomie de l’emploi dans le cadre de l’accès à l’emploi. Une fois acquis,
l’emploi doit être exécuté, et comme il n’est pas perpétuel, il faudra aussi envisager sa
disparition.

Titre 1 : L’Accès à l’Emploi

Cela renvoie à deux (2) hypothèses :

 1ère Hypothèse : Sous quel visage se présente l’Emploi ? C’est le problème de


l’identification de l’emploi, donc de sa physionomie.
 2ème Hypothèse : Comment se forme l’Emploi ? C’est le problème de son acquisition.

Chapitre 1 : La Physionomie de l’Emploi : Le Contrat de Travail

C’est le Contrat de Travail qui détermine l’application du Droit du Travail. Or,


paradoxalement, le Contrat de Travail n’est défini nulle part dans le Code. Tout au plus, la Loi
définit-elle ce qu’est un Travailleur. C’est toute personne qui exécute une prestation
déterminée moyennant rémunération au profit et sous l’autorité d’une autre personne. A partir
de cette définition, il est possible de relever que dans le Contrat de Travail, il y a trois (3)
critères mais qu’il peut exister diverses formes d’emplois.

Section 1 : Les Critères du Contrat de Travail

Les deux (2) premiers critères sont nécessaires, mais insuffisants. Il s’agit de la Prestation de
Travail et de la Rémunération. Le Critère décisif, c’est le Lien de Subordination.
Paragraphe 1 : La Prestation de Travail et la Rémunération

A / La Prestation de Travail

C’est ce sur quoi porte le Travail. C’est l’objet du Contrat de Travail. Le salarié en effet a été
embauché pour exécuter une tâche précise, une prestation de travail déterminée. Cette
prestation peut être matérielle ou intellectuelle. Elle doit être exécutée personnellement par le
salarié, parce que le Contrat de Travail est un contrat Intuitu Personae. Le salarié a été recruté
en raison de ses aptitudes professionnelles personnelles. Par conséquent, il ne peut se faire
remplacer par autrui. Cette prestation de travail doit aussi être exécutée de façon loyale et
consciencieuse. Il serait déloyal pour un salarié de concurrencer son employeur.
Enfin, la prestation de travail s’exécute dans le temps parce que le Contrat de Travail est un
contrat à exécutions successives. Tout Contrat de Travail renferme une prestation de travail,
mais celle-ci est insuffisante à elle seule pour attester de l’existence d’un contrat de travail,
parce qu’il y a d’autres contrats où l’on retrouve cette prestation de travail et qui, pourtant ne
sont pas des contrats de travail.

B / La Rémunération

C’est la Contrepartie du travail effectué. C’est l’équivalent que le salarié reçoit en contrepartie
de la prestation exécutée. En Droit du Travail, c’est le Salaire qui constitue son appellation
générique. Et dans tout contrat de travail, il y a nécessairement une rémunération, parce que le
contrat de travail est un contrat à titre onéreux. Par ailleurs, la rémunération en Droit du
Travail obéit à un régime spécial parce que le salaire a un caractère alimentaire. C’est à ce
titre qu’il fait l’objet d’une protection particulière qui sera étudiée plus tard. Mais la
rémunération, quoique importante, ne suffit pas à caractériser le Contrat de Travail parce
qu’on la retrouve dans tous les contrats à titre onéreux.

Paragraphe 2 : Le Lien de Subordination

C’est le critère décisif. C’est le lien en vertu duquel une personne est en droit de donner des
ordres et des instructions à une autre sur un travail confié à cette dernière. Il y a donc un
rapport de dépendance entre celui qui exécute le travail et celui au profit de qui le travail est
exécuté. C’est parce que le salarié a accepté dès la conclusion, de se placer sous les ordres de
son employeur. Il lui est assujetti. Toutes les fois où l’on constate ce lien d’autorité et de
dépendance entre deux (2) personnes, il est fort possible que l’on soit en face d’un contrat de
travail avec la réunion des deux (2) autres éléments constitués par la prestation de travail et la
rémunération. C’est essentiellement ce lien de subordination qui permet de distinguer le
contrat de travail d’autres contrats voisins, notamment du contrat d’entreprise ou du contrat de
société. En effet, dans le contrat d’entreprise, l’entrepreneur dispose d’une certaine
indépendance qui est inconciliable avec le contrat de travail. De même, dans le contrat de
société, les associés sont dans une situation d’égalité que l’on ne retrouve pas dans les
rapports entre employeur et salarié. Dans le contrat de mandat, l’objet du mandat ne peut être
qu’un acte juridique, alors que dans le contrat de travail, il peut s’agir aussi bien d’un acte
matériel que d’un acte juridique.

Finalement ce qu’il faut retenir, c’est que le lien de subordination est certes décisif, mais il
doit cependant être conforté par d’autres éléments, par un faisceau d’indices qui attestent de
l’existence du Contrat de Travail. Et ce contrat peut être prouvé par tout moyen, parce que le
contrat de travail est un contrat consensuel. C’est donc le contrat de travail qui fait accéder à
l’emploi, mais il existe diverses formes d’emplois.

Section 2 : Les Diverses Formes d’Emplois

En réalité, il n’y en a que deux (2) : soit le contrat est permanent, soit il est précaire. Mais il
se peut, quelle qu’en soit sa forme, que l’emploi soit précédé de certaines situations
préparatoires. Ce sont les situations de pré emploi.

Paragraphe 1 : Les Situations de pré emploi

Il s’agit de situations qui sont à la périphérie de l’emploi et qui ne sont pas nécessaires pour
accéder à un emploi. Il y en a deux (2) : c’est le contrat d’apprentissage et le contrat
d’engagement à l’essai.

1 – Le Contrat d’Apprentissage

Il s’agit d’un contrat de travail de type particulier en vertu duquel l’employeur s’engage à
dispenser une formation professionnelle à l’apprenti qui reçoit en plus une allocation et qui
accepte d’être sous l’autorité de l’employeur pendant la durée de la formation. Le contrat
d’apprentissage doit être constaté par écrit. A défaut, il est considéré comme un contrat à
durée indéterminée. Le contrat d’apprentissage doit être déposé auprès de l’inspecteur du
travail qui y appose son visa. A défaut, il est nul. A l’issue de la formation, l’apprenti peut
être soumis à un examen, et il peut lui être délivré, le cas échéant, un certificat d’aptitude
professionnelle. La formation d’apprentissage ne garantit pas l’emploi, tout au plus, elle le
facilite.

2 – Le Contrat d’Engagement à l’Essai


Il s’agit d’un contrat dans lequel les parties décident de s’apprécier mutuellement avant de
s’engager définitivement. L’employeur va apprécier les aptitudes professionnelles du salarié,
et le salarié, les conditions de travail et le climat social qui prévaut au sein de l’entreprise. Le
contrat doit être constaté par écrit à peine de nullité. Et si l’essai n’est pas précisé, le contrat
est réputé un contrat à durée indéterminée. Mais en aucun cas la durée de l’essai ne peut
dépasser six (6) mois, renouvellement compris. Au-delà, le contrat devient un contrat à
durée indéterminée. A l’issue de l’essai, soit celui-ci est concluant et le salarié est
définitivement embauché à durée déterminée ou à durée indéterminée, soit l’essai n’est pas
concluant et le contrat est rompu sans délai.

En conclusion, ni le contrat d’apprentissage, ni le contrat d’engagement à l’essai ne sont


nécessaires pour avoir un emploi, parce qu’on peut être directement recruté soit en qualité de
permanent, soit dans le cadre d’un contrat précaire.

Paragraphe 2 : Le Contrat Permanent et le Contrat Précaire

1 – Le Contrat Permanent

On le qualifie de Permanent parce qu’il assure la stabilité de l’emploi. C’est le Contrat à


Durée Indéterminée et c’est le contrat de Droit Commun parce que c’est à partir de ce contrat
que l’essentiel des règles du Droit du Travail ont été élaborées. Mais la permanence du contrat
ne signifie pas qu’on ne peut pas perdre son emploi. Tout au plus, cela veut dire que, du fait
de l’indétermination de la durée, on présume que ce contrat va, pendant un certain temps, être
exécuté sans discontinuité. Et comme on ne peut s’engager à vie, on reconnaît à chacune des
parties, un droit de résiliation unilatéral. Du côté de l’employeur, c’est la manifestation du
droit de licenciement qui est fortement encadré afin d’assurer la stabilité de l’emploi. Pendant
longtemps, c’est ce contrat à durée indéterminée qui constituait le modèle. Mais aujourd’hui,
la tendance semble s’être inversée parce qu’il y a un essor du contrat précaire.

2 – Le Contrat Précaire

Le Prototype du contrat précaire est symbolisé par le Contrat à durée déterminée, mais depuis
quelques années, sont apparues de nouvelles formes d’emplois précaires.

a – Le Contrat à Durée Déterminée


C’est le contrat dont la durée est fixée à l’avance, soit de façon précise – le terme est alors
certain -, soit de façon imprécise – c’est alors un terme incertain.
La particularité du contrat de travail à durée déterminée, c’est qu’il est naturellement,
intrinsèquement précaire. En effet, dans le contrat à durée déterminée, le salarié sait à
l’avance qu’il va perdre son emploi à l’échéance convenue, et il l’a accepté. Cette précarité ne
joue pas en faveur du salarié. C’est pourquoi pendant longtemps, le Législateur a essayé
d’assurer malgré tout, la stabilité de ce contrat par deux (2) voies différentes :

 La première voie, c’est la limitation des causes de rupture anticipée du contrat à durée
déterminée. En effet, le contrat ne peut être rompu avant terme que dans des situations
exceptionnelles. Donc en dehors de ces situations, le salarié sait que son contrat ira jusqu’à
son terme, que son contrat sera stable pendant toute cette période. La première situation
exceptionnelle, c’est le cas de force majeure qui peut rompre le contrat avant terme. La
deuxième situation, c’est la faute lourde de l’une des parties, c’est-à-dire la faute la plus grave
dans la hiérarchie des fautes. La troisième situation, c’est l’accord entre les parties, c’est-à-
dire la résiliation amiable.
 La deuxième voie, c’est une originalité dans la sanction. C’est ce que l’on appelle la
Conversion par Majoration. Le contrat à durée déterminée en effet, ne peut être renouvelé
plus d’une fois, et il ne peut non plus être conclu entre les mêmes personnes plus de deux fois.
Sinon, c’est-à-dire en cas de deuxième renouvellement ou de troisième contrat, la Loi
considère que ce contrat irrégulier est devenu automatiquement un contrat à durée
indéterminée qui lui assure la stabilité de l’emploi.

Mais avec la Flexibilité de l’emploi, on a amplifié les hypothèses où le recours au contrat à


durée déterminée, même de façon indéfinie, n’opère pas Conversion par Majoration. La
technique de la conversion par majoration limitait l’usage abusif des contrats de travail à
durée déterminée sauf dans trois hypothèses : le recrutement des dockers, des saisonniers et
des journaliers. Ces trois catégories de travailleurs pouvaient être recrutés de façon indéfinie
sans avoir la possibilité de devenir des salariés permanents. Le nouveau Code du Travail a
ajouté trois autres dérogations : c’est d’abord le recrutement pour remplacement d’un salarié
en suspension légale de contrat, le recrutement pour surcroît d’activité et le recrutement dans
les secteurs où il n’est pas d’usage de recruter des permanents. Les deux dernières dérogations
sont excessivement permissives parce qu’il ne s’exerce aucun contrôle sur la réalité du
surcroît d’activité, et on ne connaît pas encore la liste de ces entreprises où il n’est pas
d’usage de recruter des salariés permanents. C’est pourquoi aujourd’hui, on a tendance à
convenir que la précarité de l’emploi est avérée et que l’employeur a retrouvé toute liberté
quant à la gestion de la main d’œuvre, grâce au recours systématique au contrat à durée
déterminée. Et pour se donner bonne conscience, le Législateur prévoit une indemnité de
précarité de 7% des sommes que le salarié a perçues pendant la durée de son contrat.

En conclusion, ce qu’il faut retenir c’est que désormais, l’employeur jouit d’une très grande
liberté pour recourir au Contrat à Durée Déterminée sans que celui-ci ne devienne, malgré les
renouvellements successifs, un Contrat à Durée Indéterminée. C’est donc dire que la précarité
de l’emploi tend de plus en plus à devenir le principe, et ce d’autant plus qu’on a créé d’autres
formes d’emplois atypiques.

NB : La Conversion par Majoration est le principe par lequel on part d’un statut inférieur pour
aboutir à un statut supérieur.

b - Les Nouvelles Formes d’emplois


Le Code de 1997 a amplifié l’étendue des emplois précaires avec notamment le travail
temporaire, le travail à temps partiel et la possibilité offerte désormais à l’employeur de
déroger à l’horaire collectif de travail.

D’abord le Travail Temporaire : C’est une hypothèse singulière de rapport de travail


triangulaire. Il y a en effet un employeur de droit – c’est l’entreprise de travail temporaire qui
va recruter un salarié – travailleur temporaire. Et ce salarié va être mis à la disposition d’une
autre entreprise utilisatrice. On dit que le travailleur temporaire est en mission, et la durée de
sa mission dépend des rapports entre l’entreprise de travail temporaire et l’entreprise
utilisatrice. Le travailleur temporaire est écartelé entre les deux (2), et le travail temporaire
opère éclatement de la collectivité du travail. Les droits du travailleur temporaire sont
difficilement préservés dans ces conditions.
Il y a ensuite le Travail à Temps Partiel : Il est prévu par l’article L137 aux termes
duquel sont considérés comme horaires à temps partiel les horaires inférieurs d’au moins un
cinquième (1/5) à la durée légale de travail ou à la durée fixée conventionnellement.
Effectivement, le salaire des travailleurs à temps partiel va être fonction du temps de travail
effectué.
Il y a une troisième possibilité offerte à l’employeur, c’est celle de déroger à l’horaire collectif
de travail soit en procédant à un travail par cycle, soit en bénéficiant d’un contingent annuel
d’heures supplémentaires sur arrêté ministériel après simple information de l’inspecteur du
travail et des délégués du personnel.

L’inconvénient de ces formes de travail, c’est qu’elles ne font l’objet d’aucune réglementation
parce que les textes d’application sont attendus depuis 1997 et malgré leur absence, ces
formes d’emplois sont fréquemment utilisés par tous les employeurs. Dans ces conditions, on
peut estimer que la précarité de l’emploi est amplifiée. Tel est aujourd’hui le regard que l’on
peut avoir sur la physionomie de l’emploi en droit sénégalais du travail. Mais quelle que soit
la forme que revêt l’emploi, il est soumis à certaines conditions lors de sa création.

Chapitre 2 : La Formation de l’Emploi ou du Contrat de Travail


C’est par le Contrat de Travail que l’on acquiert le statut de salarié. Mais encore faudrait-il
que ce contrat soit régulièrement formé, parce que certaines conditions sont exigées. A défaut,
le contrat est irrégulier et, en tant que tel, il peut être sanctionné.

Section 1 : Les Conditions de Formation du Contrat de Travail

Il y a des conditions de fond et des conditions de forme.

Paragraphe 1 : Les Conditions de Fond

On retrouve toutes les conditions de fond requises pour la formation des contrats, notamment
le consentement, la capacité, l’objet et la cause. Mais le contrat de travail présente certaines
spécificités au moins à un double niveau.
D’abord en matière de capacité, parce qu’un mineur peut être salarié, un mineur peut avoir un
emploi même si le travail des enfants est munitieusement réglementé, surtout qu’il existe des
conventions internationales ratifiées par le Sénégal.
La deuxième spécificité, c’est au niveau de la liberté contractuelle. Il y a en effet des
hypothèses dans lesquelles l’employeur est tenu de recruter, alors que la liberté contractuelle
signifie aussi la liberté de ne pas contracter. En droit du travail, on porte atteinte à cette liberté
lorsqu’il y a une priorité d’embauchage ou de réembauchage à la charge de l’employeur. Cela
signifie dans ces hypothèses que l’employeur est tenu de recruter telle personne au risque de
voir sa responsabilité engagée. C’est le cas notamment lorsqu’il y a licenciement pour motif
économique, les salariés ainsi licenciés bénéficient d’une priorité de réembauchage pendant
un délai de deux (2) ans.

Paragraphe 2 : Les Conditions de Forme

Il faut commencer par rappeler une évidence que l’on a souvent tendance à occulter ou à
méconnaître. C’est que pour exister, un contrat de travail n’a pas besoin d’être constaté par
écrit. Il peut même être verbal parce qu’il s’agit d’un contrat consensuel que rappelle l’article
L31 du Code du Travail : "Les contrats de travail sont passés librement et dans les formes
qu’il convient aux parties contractantes d’adopter". Tel est le principe : aucune forme n’est
exigée. Toutes les fois où l’existence du contrat est contestée, le Juge est appelé à vérifier si
on ne retrouve pas les critères du contrat. Et même lorsqu’il existe un écrit, le Juge n’est pas
tenu de considérer qu’il s’agit d’un contrat de travail. Donc l’écrit ne lie pas le Juge. Mais
parfois, c’est le Législateur lui-même qui renvoie à un certain formalisme. Le formalisme peut
consister à un écrit comme c’est le cas pour le contrat d’engagement à l’essai ou pour le
contrat à durée déterminée ou encore pour le contrat d’apprentissage, ou enfin lorsqu’il s’agit
d’un contrat qui installe le salarié hors de sa résidence habituelle (Article L33 du Code). Par
ailleurs, il arrive que cet écrit soit accompagné d’autres formalités. Ce peut être d’abord le
visa de la Direction de l’Administration du Travail. Le contrat est régulièrement formé
lorsque toutes ces conditions ont été respectées. A défaut, il peut être frappé de sanction.

Section 2 : La Sanction du Contrat de Travail Irrégulier

Deux sanctions sont envisageables : l’une est classique, c’est la Nullité du Contrat de Travail ;
l’autre est plus originale, c’est la technique de la Conversion par Majoration.

Paragraphe 1 : La Sanction Classique : La Nullité du Contrat de Travail

La violation de certaines conditions entraîne la nullité du contrat de travail. Mais il y a des


causes de nullité que seul le salarié peut invoquer. C’est notamment le cas de l’absence ou de
l’omission de visa parce qu’il s’agit d’obligation qui incombe à l’employeur. Sous réserve de
cette précision, il faut rappeler que la nullité est une sanction énergique. Mais la particularité
du contrat de travail, son caractère successif fait que la nullité ne rétroagit pas. Elle ne produit
d’effets que pour l’avenir. Mais la nullité est une sanction inadéquate parce qu’elle fait perdre
au salarié son emploi. C’est certainement ce pourquoi on a songé à la Conversion par
Majoration.

Paragraphe 2 : La Sanction Originale : La Conversion par Majoration

Le contrat est irrégulier mais il subsiste et il se transforme dans sa nature. C’est notamment le
cas lorsque le contrat à durée déterminée n’a pas fait l’objet d’écrit, ou lorsqu’il a été
renouvelé plus d’une fois. La sanction de cette irrégularité est de faire du contrat irrégulier un
contrat à durée indéterminée. Le salarié quitte un statut précaire pour un statut permanent.
C’est une mutation qui s’opère. C’est ce que l’on appelle la Conversion par Majoration qui
permet non seulement de régulariser un acte irrégulier, mais aussi d’en faire un acte supérieur.
Le contrat de travail à durée déterminée irrégulier devient un contrat de travail à durée
indéterminée. C’est en cela que c’est original d’autant plus que la Conversion par Majoration
maintient l’emploi contrairement à l’annulation du contrat.

Titre 2 : L’Exécution de l’Emploi


C’est le Contrat de Travail qui crée des obligations à la charge des parties qui doivent
s’exécuter. Mais le Contrat de travail n’est pas éternel. Tôt ou tard, il finira par disparaître.
C’est la perte de l’emploi. Mais en cours d’exécution, l’emploi peut être soumis à quelques
vicissitudes.

Chapitre 1 : Les Vicissitudes de l’Emploi

On peut ici envisager deux (2) situations : c’est d’abord la Modification dans la Situation
Juridique de l’employeur et la Révision du Contrat de Travail, c’est ensuite toutes les causes
de suspension qui affectent l’exécution de l’emploi.

Section 1 : La Modification dans la Situation Juridique de l’employeur et


la Révision du Contrat de Travail.

Paragraphe 1 : La Modification dans la situation Juridique de l’employeur

Il faut supposer que l’entreprise soit vendue à un tiers acquéreur. La question est alors de
savoir ce que deviennent les contrats antérieurement conclus.
En Droit des Obligations, la réponse est certaine parce que l’acquéreur de l’entreprise est un
tiers, plus exactement, c’est un ayant cause à titre particulier. Par voie de conséquence, il n’est
pas tenu de maintenir des contrats qu’il n’a pas conclus. C’est le Principe de la Relativité des
Conventions. Cela signifie concrètement que lorsqu’il y a cession d’entreprise, pour le Droit
des Obligations, tous les emplois sont suspendus parce que le nouvel employeur n’est pas tenu
de maintenir les salariés de son prédécesseur.
Le Droit du Travail ne pouvait tolérer ou admettre une telle situation. C’est pourquoi dès
l’origine, il a adopté une position dérogatoire par rapport au Droit Commun. C’est l’article
L66 du Code du Travail qui dispose : "S’il survient une Modification dans la situation
juridique de l’employeur, notamment par vente, fusion, succession, transformation de fonds,
les contrats en cours se maintiennent avec le nouvel employeur comme si la modification
n’était pas intervenue". Il s’agit là par conséquent d’une solution remarquable par sa portée,
parce qu’elle permet de maintenir l’emploi là où le Droit des Obligations ne le pourrait pas.
C’est pourquoi on dit que l’article L66 est un texte au service d’une ambition, celle d’assurer
la stabilité, la permanence de l’emploi, en dépit du changement d’employeur. En d’autres
termes, les employeurs changent et l’emploi demeure.
Mais ce texte n’est pas en réalité à la dimension de son ambition, parce que la stabilité de
l’emploi qu’il assure est toute relative. Encore faudrait-il au préalable relever ses conditions
d’application ?

A / Les Conditions d’Application

La première condition, c’est qu’il faut une modification dans la situation juridique de
l’employeur, c’est-à-dire il faut qu’un employeur soit remplacé par un autre, soit à la suite
d’un contrat, soit par l’effet de la Loi. L’article L66 donne quelques exemples de
modifications : c’est la vente, la fusion, la succession ou encore la transformation de fonds.
Mais il ne s’agit là que d’exemples indicatifs à cause de l’utilisation de l’adverbe
"notamment".
Aujourd’hui on considère qu’il y a modification dans la situation juridique de l’employeur
toutes les fois où le changement d’employeur a lieu du fait d’un contrat ou du fait de la Loi.
La deuxième condition, c’est qu’il faut que les contrats soient en cours. Peu importe à cet
égard qu’il s’agisse du Contrat à Durée Déterminée ou du Contrat à Durée Indéterminée, de
Contrat d’engagement à l’essai ou même de contrat en suspension.
La dernière condition, c’est qu’il faut que l’entreprise poursuive ses activités, activités
identiques, similaires ou connexes.
Telles sont les conditions d’application de l’article L66.

B / La Stabilité Relative de l’Emploi

L’effet principal de l’article L66, c’est de maintenir l’emploi en dépit du changement


d’employeur. Il s’agit d’un effet remarquable, mais dont la portée est relativement réduite en
raison de la stabilité toute relative qu’apporte le texte. En effet, il y a au moins trois
principales raisons qui font que l’article L66 n’est pas à la dimension de son ambition.
La première raison, c’est qu l’article L66 ne maintient que les contrats individuels de travail,
or aujourd’hui, de plus en plus, l’essentiel des avantages consentis aux salariés résulte des
conventions collectives que l’article L66 ne maintient pas. Le risque est alors de ne maintenir
qu’un emploi réduit, un emploi diminué. C’est pourquoi en Droit Français, l’article L122-12 a
été modifié avec un nouvel alinéa permettant de maintenir les accords collectifs pendant un
an, le temps pour le nouvel employeur d’adhérer à l’ancienne Convention Collective, ou d’en
conclure une autre pour préserver les droits des salariés.
Mais il y a une seconde raison qui fragilise l’article L66, c’est que les licenciements qui sont
intervenus en violation de ce texte sont considérés par la Jurisprudence comme des
licenciements abusifs, des licenciements illégitimes. C’est cette sanction qui est inappropriée,
qui est inadéquate par rapport à l’ambition de l’article L66. En effet, si ce texte a pour finalité
le maintien de l’emploi, sa violation aurait dû être sanctionnée par la nullité et avec l’effet
rétroactif, le salarié serait maintenu dans son emploi. Mais en allouant au salarié
irrégulièrement licencié une indemnité, le Juge consacre la perte de l’emploi.
Il y a une troisième raison qui fragilise l’article L66. C’est que l’article L66 crée en réalité un
mirage, une illusion d’optique parce qu’il ne maintient l’emploi que le temps de la
modification. En effet, le nouvel employeur, comme tout employeur, a le droit de procéder
immédiatement à des licenciements.

Finalement, on peut donc convenir que l’article L66 maintient un emploi réduit et assure
relativement peu la stabilité de l’emploi.

Paragraphe 2 : La Révision du Contrat de Travail

La question est de savoir si une partie au contrat peut modifier unilatéralement un ou plusieurs
éléments de ce contrat. Là aussi, il faut revenir au Droit Commun des Obligations. Dans cette
Discipline, on sait que le contrat ne peut être révisé que d’un commun accord. Mais en Droit
du Travail, il y a une spécificité parce qu’il y a des modifications que l’employeur peut
imposer et que le salarié ne peut refuser au risque de perdre son emploi, parce que de telles
modifications relèvent du pouvoir de l’employeur qui est un pouvoir inhérent à sa qualité. Le
salarié en effet a accepté dès le début, de se placer sous la subordination, sous l’autorité de
l’employeur qui est en droit de lui donner des ordres et des instructions sur le travail qui lui
est confié. Les modifications non substantielles relèvent de l’appréciation souveraine de
l’employeur qui peut y procéder sans délai et si le salarié s’y oppose, il commet une faute
susceptible d’entraîner une sanction. En revanche, lorsque les modifications envisagées sont
substantielles, l’employeur est tenu de solliciter l’accord du salarié. On revient donc au Droit
commun des obligations.
La question est de savoir ce qu’il faut entendre par modification substantielle qui requiert
l’assentiment du salarié. Il y a une seule certitude sur ce point : toute baisse de salaire est une
modification substantielle. Pour le reste, on va opérer une comparaison entre la situation
actuelle du salarié et ce qu’elle sera après la modification. Si celle-ci est plus pénible,
renferme plus de sujétion ou de contrainte, c’est que cette modification est substantielle. Le
Code de 1997 a prévu une réglementation nouvelle quant au régime de la modification.

 D’abord toute modification envisagée doit faire l’objet d’une notification écrite ;
 Par ailleurs lorsque la modification est acceptée, elle ne devient effective qu’à l’issu
d’un délai équivalent à celui du préavis ;
 Enfin lorsque la modification envisagée doit faire l’objet d’une notification écrite,
cette rupture est imputable à l’employeur qui devra respecter les règles relatives au
licenciement. Mais cette rupture n’est pas nécessairement injustifiée. Elle ne devient abusive
que si la modification elle-même était abusive.
Il faut signaler pour finir que s’il s’agit d’une inaptitude physique, la rupture ne peut
intervenir qu’à la suite d’un certificat médical qui la constate.

Section 2 : La Suspension du Contrat de Travail

En principe, le Contrat de Travail doit être exécuté sans discontinuité. Mais divers aléas de la
vie viennent parfois remettre en cause ce principe de l’exécution continue. C’est la Théorie de
la Suspension du Contrat de Travail qui repose sur une diversité de causes qui entraînent
certains effets.

Paragraphe 1 : La Diversité des Causes de Suspension

Il y a des causes qui tiennent à l’employeur, d’autres au salarié.

1 – Les Causes liées à l’employeur ou à l’entreprise

C’est d’abord le départ de l’employeur sous les drapeaux.


C’est ensuite le lock-out, c’est-à-dire la décision de fermeture de l’entreprise à l’occasion
d’un conflit collectif. En d’autres termes, c’est la grève de l’employeur.
C’est aussi le chômage technique et la mise à pied économique. Le chômage technique est
une interruption de l’activité consécutive à une défaillance technique (exemple : délestage de
la Sénélec, rupture de matières premières …). Il s’agit de situations objectives dans lesquelles
même si l’employeur voulait poursuivre l’activité, il ne le pourrait pas, parce que le chômage
technique est une mesure subie, contrairement à la mise à pied économique qui est une
décision voulue par l’employeur qui cherche à lutter contre les difficultés économiques parce
qu’il aurait pu, à la place, licencier des salariés. Donc la mise à pied économique est une
stratégie patronale, l’employeur suspend son activité parce qu’il attend des jours meilleurs.
Mais dans le Code du Travail de 1997, on assimile Chômage Technique et Mise à Pied
Economique, et la Loi prévoit d’en aviser l’inspecteur du travail.

2 – Les Causes liées au Salarié

Elles sont plus nombreuses. Il y a d’abord la maladie professionnelle ou non professionnelle,


c’est ensuite le départ sous les drapeaux du salarié, c’est aussi le salarié qui devient député,
c’est le congé de formation ou les congés payés, la détention préventive.
C’est toute autre absence justifiée ou autorisée par l’employeur : le congé de maternité, et
aujourd’hui la disponibilité qui a été introduite par le Code de 1997, mais qui existait déjà
pour les fonctionnaires. C’est la situation du salarié qui demande d’arrêter son activité pour
convenance personnelle pendant un certain temps. La disponibilité a un caractère personnel et
elle est appréciée souverainement par l’employeur qui peut la refuser.

Paragraphe 2 : Les Effets de la Suspension

La suspension produit un effet normal mais qui, parfois est atténué. L’effet normal, c’est que
la suspension met en veilleuse l’exécution du Contrat de Travail. Les salariés sont dispensés
d’exécuter la prestation de travail et l’employeur est dispensé de payer le salaire. Tel est le
principe qui gouverne la Théorie de la suspension. Mais ce principe est quelquefois atténué
dans un souci de protection du salarié.
D’abord il y a des situations de suspension dans lesquelles le salarié perçoit une rémunération
que l’on peut appeler Salaire d’Inactivité. C’est le cas pour la femme en congé de maternité
qui reçoit une allocation forfaitaire notamment de la Caisse de Sécurité Sociale. C’est aussi le
cas du salarié accidenté de travail, et enfin les parties elles-mêmes peuvent convenir d’une
rémunération en cas de suspension comme c’est prévu pour le chômage technique.
C’est ensuite le fait que l’on prenne en compte le temps de suspension dans le calcul de
l’ancienneté du salarié, à l’exclusion du temps de détention préventive notamment.

En conclusion, les vicissitudes de l’emploi participent du dynamisme des relations


professionnelles. Mais elles n’altèrent en rien les obligations qui incombent aux parties.

Chapitre 2 : Les Obligations des Parties au Contrat de Travail

Le contrat de travail est un contrat synallagmatique, donc chaque partie est tenue
d’obligations.

Section 1 : Les Obligations du Salarié

Le salarié a une obligation principale : exécuter consciencieusement et loyalement la


prestation de travail, ce qui postule qu’il ne peut concurrencer son employeur. Au-delà de
cette prestation, il faut envisager le temps de travail et les effets qui en découlent, notamment
les congés.
Paragraphe 2 : Le Temps de Travail

Cela renvoie à la Durée du Travail et à la Période de Travail.

A / La Durée du travail

Il y a une Durée Légale au-delà de laquelle on effectue des Heures Supplémentaires, et cette
durée est entrecoupée de Repos Obligatoires.

1 – La Durée Légale de Travail

Elle est de 40 heures par semaine, soit 8 heures par jour en cinq jours ouvrables. Il appartient
à l’employeur de répartir cette durée dans la semaine. Et parfois il peut y avoir des accords
avec les salariés dans ce sens. Mais il y a des secteurs dans lesquels la durée légale n’est pas
de 40 heures parce qu’on est obligé de faire appel à un système d’équivalence qui peut
dépasser les 40 heures. Exemples : Dans l’hôtellerie, la Restauration, la Coiffure … Dans ce
cas, c’est l’Administration qui prend un arrêté et qui fixe le temps de travail en vigueur, en
fonction des besoins de ces secteurs.

2 – Les Heures Supplémentaires

Toute heure de travail effectuée au-delà de la 40ème heure constitue une heure
supplémentaire. En principe, l’accomplissement d’heures supplémentaires nécessite une
autorisation préalable de la part de l’Inspecteur du Travail. Par ailleurs, les heures
supplémentaires sont rémunérées à un taux majoré. Ce taux peut varier d’une convention à
une autre.

3 – Le Repos Hebdomadaire

Il est obligatoire, et en principe, il est dominical. Mais il y a une double dérogation non
seulement au principe du repos, mais aussi au repos du dimanche. Cela veut dire que l’on peut
se reposer un autre jour que le dimanche ; cela veut dire que l’on peut ne pas se reposer du
tout, toute la semaine. Il peut s’agir d’entreprises "feu continu" ou des travaux d’urgence.
Mais en tout état de cause, le repos doit être compensé autrement : soit par un autre jour de
repos, soit par un allongement des jours de congés, soit par le paiement d’heures majorées
pour la période travaillée.

B / La Période de Travail

La question est de savoir ici, si le travail doit se faire le jour ou la nuit. Le travail diurne est le
principe. D’ailleurs la réglementation porte sur le travail nocturne qui présente beaucoup plus
de pénibilité. C’est pourquoi le travail de nuit est interdit à certaines catégories de travailleurs,
notamment les femmes et les enfants. En principe, les heures travaillées la nuit doivent être
majorées dans leur rémunération, même pour ceux dont c’est le régime habituel.

Paragraphe 2 : Le Droit aux Congés

Le Droit aux congés est une résultante du temps de travail. Il est en effet fonction du temps
effectivement travaillé pendant la période de référence qui est de douze (12) mois. C’est cette
période de référence qui détermine le nombre de jours de congés. Et en principe ce nombre est
équivalent au douzième de la période de référence, ce qui donne généralement un mois. Ce
droit aux congés est intangible et d’ordre public, on ne peut pas y renoncer. Par ailleurs, il est
interdit au salarié en congés de trouver un autre emploi pendant sa période de congés. Le
départ aux congés donne droit à une allocation qui, généralement est l’équivalent d’un mois
de salaire. Mais les conventions collectives peuvent prévoir une allocation supérieure.

Section 2 : Les Obligations de l’Employeur

L’employeur doit, au sein de son entreprise, respecter toutes les règles relatives à l’hygiène et
à la sécurité. Au-delà de cet aspect de portée générale, l’employeur est tenu d’une obligation
essentielle, celle de payer le salaire. Mais il arrive aussi parfois qu’il soit tenu de certaines
prestations en nature.

Paragraphe 1 : Le Salaire

C’est la contrepartie du travail effectué. Sa particularité en Droit du Travail, c’est qu’il a un


caractère alimentaire qui justifie la protection particulière dont il fait l’objet. Il faut par
ailleurs souligner les règles qui gouvernent la détermination du salaire et les éléments qui
constituent le salaire.

A / La Détermination du Salaire
Il faut souligner un principe fondamental : en matière de fixation du salaire, c’est celui de la
Non Discrimination en vertu duquel, "à travail égal, salaire égal", abstraction faite de toute
différenciation selon l’origine, la nationalité ou le sexe. C’est un principe proclamé par une
convention internationale ratifiée par le Sénégal, rappelé dans la Constitution, confirmé par le
Code du Travail, et pourtant toujours encore violé.
Un autre principe qui gouverne la fixation du salaire, c’est le SMIG (Salaire Minimal
Interprofessionnel Garanti) qui est une décision unilatérale des autorités étatiques indiquant le
seuil minimum de salaire admis, toléré. Cela veut dire qu’on ne peut payer en deçà de ce
salaire même au salarié qui n’a aucune qualification. C’est pourquoi ce salaire est sensé lui
permettre de satisfaire la totalité de ses besoins alimentaires. Par ailleurs, le salaire est
composé d’un ensemble d’éléments qu’il faut identifier. Cela va du salaire de base qui est
déterminé par rapport à la qualification. Il peut être complété par un sursalaire et par une
diversité d’indemnités et de primes, notamment la prime de rendement, la prime de panier, la
prime de sujétion … et chacun de ces éléments doit faire l’objet d’une ventilation dans une
rubrique déterminée. Et c’est l’ensemble que l’on considère comme salaire.
Le paiement de ce salaire doit intervenir durant les heures de travail. Il ne peut jamais se faire
dans un débit de boissons, sauf pour ceux qui y travaillent habituellement. Il doit avoir lieu de
façon périodique – à la semaine, par quinzaine ou au mois. Au Sénégal, c’est la forme par
mois que l’on appelle mensualisation qui est en vigueur.
Le salaire se paie en principe avec un bulletin de paie, un virement bancaire ou postal ou
encore un émargement sur un registre de paiement. A défaut, le Droit du Travail présume de
façon irréfragable que le salaire n’a pas été payé et l’employeur peut alors être amené à payer
une seconde fois.

B / La Protection du Salaire

En raison de son caractère alimentaire, le salaire est protégé contre tous, même contre le
salarié. Ce dernier, en effet, ne peut faire des cessions de salaire selon le Droit Commun, et
même s’il respecte la réglementation, il ne peut le faire que dans la limite de la quotité
cessible encore appelée Quotité Disponible. En schématisant, on peut considérer que c’est le
tiers du salaire, les deux tiers constituant la fraction insaisissable, incessible qui doit permettre
au salarié de se loger, de se vêtir et de se nourrir.
Les créanciers non plus ne peuvent opérer une saisie-arrêt que dans la limite de cette quotité
cessible.
Quant à l’employeur, il lui est d’abord interdit d’opérer des retenues autres que celles qui sont
légalement autorisées. Il ne peut pas non plus sanctionner le salarié par des amendes, les
sanctions pécuniaires sont en effet interdites. En outre, lorsque le salarié accepte sans réserve,
ni protestation le bulletin de paie, la Loi décide que cela ne vaut pas renonciation de sa part,
c’est-à-dire qu’il peut toujours contester ce qui lui a été payé.
Par ailleurs, lorsque le salarié souscrit une mention "pour solde de tout compte", la Loi prévoit
que cela lui est inopposable.
Enfin, l’action en prescription du salaire se fait au bout de cinq (5) ans.
Il faut signaler, pour finir, la protection du salarié contre les créanciers de l’employeur qui
pourraient venir en concours avec le salarié. Le Code du Travail accorde au salarié des
privilèges, c’est-à-dire un droit de préférence accordé en raison de la qualité de la créance ; ce
qui permet au salarié de supplanter certains créanciers de l’employeur qui viendraient en
concours avec lui.

Paragraphe 2 : Les Prestations en Nature

Il arrive que l’employeur soit tenu de certaines prestations en nature. C’est notamment le cas
lorsqu’il doit fournir un logement au salarié et à sa famille. C’est en effet un droit pour le
salarié d’être logé par ses employeurs lorsqu’il a été déplacé de sa résidence habituelle, sauf
s’il existe la clause de mobilité.
Il arrive aussi que l’employeur tienne un économat, c’est-à-dire une structure qui a vocation à
fournir des produits et denrées alimentaires aux salariés de l’entreprise. Mais cela suppose
certaines conditions :

 D’abord les salariés ne sont jamais tenus de s’y approvisionner ;


 Ensuite la vente des produits et denrées alimentaires doit se faire au comptant et sans
bénéfice ;
 Enfin les salariés doivent avoir un droit de regard sur la gestion et la comptabilité de
l’économat.

En conclusion, l’obligation principale de l’employeur reste le salaire. Il peut s’y ajouter des
prestations en nature, et en tout état de cause, l’employeur est tenu de se conformer aux
prescriptions à l’hygiène et à la sécurité du travail.

Chapitre 3 : La Perte de l’Emploi

L’emploi n’est jamais une donnée acquise définitivement. Il peut se perdre fatalement ou
volontairement.
Section 1 : La Perte Volontaire de l’Emploi

Le Contrat de Travail peut être rompu par manifestation de volonté unilatérale de l’une des
parties, ou à la suite d’un commun accord.

Paragraphe 1 : La Perte par Volonté Unilatérale

La qualification de cette rupture dépend de celui qui en a pris l’initiative. S’il s’agit de
l’employeur, on parle de Licenciement. S’il s’agit du salarié, on parle de Démission.

A / Le Licenciement

Le droit de licenciement, c’est l’exercice par l’employeur de son droit de rupture unilatérale
qui appartient à chaque partie à un contrat à durée indéterminée (article L49 du Code du
Travail). "Le contrat à durée indéterminée peut toujours cesser par la volonté de l’une des
parties". Ce droit de licenciement est un droit intangible, cela signifie qu’on ne peut l’écarter
par des clauses contraires.
Sous réserve de cette précision, il y a deux (2) formes de licenciement. D’une part, le
licenciement ordinaire ou de droit commun, et d’autre part le licenciement pour motif
économique.

1 – Le Licenciement Ordinaire ou de Droit Commun

C’est celui qui repose sur des motifs personnels au salarié par opposition au motif
économique. C’est le licenciement le plus fréquent. C’est le licenciement de droit commun. Il
est encadré par la Loi de 1997, mais avec une très grande permissivité, une très grande facilité
dans son exercice. Il y a des règles qui touchent à la forme du licenciement et il y a d’autres
qui sont relatives au fond.
D’abord la Réglementation Formelle : En schématisant, on peut dire qu’il y a trois (3) étapes.
C’est d’abord la Notification écrite du licenciement, c’est-à-dire la procédure qui consiste à
aviser le salarié de son licenciement prochain. La deuxième étape, c’est l’indication du motif,
c’est-à-dire pourquoi le salarié va-t-il être licencié. La troisième étape, c’est l’obligation pour
l’employeur de respecter un délai de préavis avant que le licenciement ne devienne effectif.
Le préavis, c’est le temps qui court entre la notification et l’effectivité du licenciement. Ce
temps peut varier entre un et trois mois en fonction des accords collectifs. Et pendant ce
temps, l’employeur et le salarié sont tenus chacun de respecter ses obligations, parce que le
contrat est encore en vigueur. Mais durant le préavis, le salarié a chaque semaine deux (2)
jours pour aller chercher un nouvel emploi, en prévision de son prochain licenciement futur.
Et ce temps consacré à la recherche d’un nouvel emploi est considéré comme temps de travail
effectif (article L52, alinéa 2). Mais l’innovation majeure apportée par le Code de 1997, c’est
l’assouplissement des règles du licenciement, plus exactement la sanction des règles de forme.
En effet, désormais lorsque l’employeur ne procède pas à une notification écrite, ou lorsqu’il
omet d’indiquer le motif du licenciement, la Loi décide que la violation de ces conditions de
forme n’entraîne pas, ne donne pas au licenciement un caractère abusif (article L51) : "Si le
licenciement d’un travailleur survient sans observation de la formalité de la notification écrite
ou de l’indication d’un motif, ce licenciement irrégulier en la forme ne peut être considéré
comme abusif". Tout au plus, ajoute la Loi, le Tribunal peut-il accorder une indemnité pour
sanctionner l’inobservation des règles de forme. Il s’agit là manifestement d’une rupture, mais
une rupture qui consacre un recul, parce que, de tout temps, la Jurisprudence considérait que
la violation des règles de forme faisait du licenciement un licenciement abusif, illégitime.
Quant à la Réglementation de fond, c’est que l’employeur doit justifier d’un motif légitime
qu’il lui appartient de prouver. Donc, il y a un renversement du fardeau de la preuve au
bénéfice du salarié. En ce qui concerne le motif, il peut se présenter sous des formes variées.
Ce peut être un motif disciplinaire - parce que le salarié a commis une faute, mais ce peut être
aussi détaché de toute faute – exemple de l’inaptitude professionnelle-, ou même une perte de
confiance de l’employeur vis-à-vis du salarié.
Lorsque le salarié a été licencié sans motif légitime, il peut obtenir des dommages et intérêts
qui viennent s’ajouter à son indemnité de licenciement et, le cas échéant, à son indemnité
compensatrice de préavis. La faute lourde est cependant privative des indemnités de rupture
constituées par l’indemnité de licenciement et l’indemnité compensatrice de préavis.
Au départ du salarié de l’entreprise, l’employeur doit mettre à la disposition du salarié un
certificat de travail avec des indications précises, notamment la date d’embauche, les
différents emplois occupés, la catégorie professionnelle d’appartenance, et la date du
licenciement. Mais en aucun cas le certificat de travail ne peut comporter une mention
susceptible de porter préjudice au salarié (article L59 du Code de Travail).

2 – Le Licenciement pour Motif Economique

Il est réglementé par les articles L60 à L64. Il est défini comme étant tout licenciement
individuel ou collectif effectué par un employeur et motivé par une difficulté économique ou
une réorganisation intérieure (article L60). Le licenciement pour motif économique présente
une particularité certaine. On peut dire que c’est l’hypothèse où le salarié va perdre son
emploi sans qu’on puisse lui reprocher quelque chose, sauf d’appartenir à une entreprise qui
rencontre des difficultés économiques. Donc a priori, le licenciement pour motif économique
peut sembler inéquitable, compte non tenu du fait qu’il peut se révéler arbitraire quant au
salarié à licencier. C’est précisément en raison de cette inéquité originelle et de son caractère
arbitraire potentiel que le Législateur, pendant longtemps a essayé de limiter le recours par
l’employeur au licenciement économique. C’est dans cette perspective qu’il avait mis en place
un mécanisme d’autorisation préalable auquel était soumis l’employeur avant tout
licenciement économique. En effet, l’employeur devait demander à l’inspecteur de travail
l’autorisation de licencier pour motif économique. Mais, au préalable, il devait établir un
ordre de licenciement pour ce qui est du choix des salariés à licencier. Et la Loi avait prévu les
critères dans ce sens. L’employeur devait d’abord choisir les salariés les moins aptes
professionnellement. A égalité de qualification professionnelle, intervient un second critère,
celui de l’ancienneté. A égalité d’ancienneté, celui des charges de famille, selon qu’on est
célibataire ou marié, monogame ou polygame, avec ou sans enfant à charge.
Par ailleurs, l’employeur devait aussi réunir les délégués du personnel pour voir s’il n’était
pas possible de trouver des mesures de substitution tendant à éviter le licenciement. C’est
seulement après avoir respecté toute cette procédure qu’il fallait saisir l’inspecteur du travail
qui pouvait refuser. La décision de l’inspecteur pouvait faire l’objet d’un recours en
annulation devant le Ministre du travail et celle du Ministre, devant le Conseil d’Etat pour
excès de pouvoir. Tout licenciement qui intervenait sans autorisation ou après annulation de
l’autorisation, était nul et de nul effet. Et le salarié avait droit à une indemnité égale au salaire
qu’il aurait perçu s’il n’avait pas été licencié. C’est cette procédure protectrice que le Code de
1997 a abrogée en facilitant davantage le licenciement pour motif économique. Désormais, on
n’a plus besoin d’une autorisation. Il faut certes respecter les critères et consulter les Délégués
du Personnel. A partir de là, l’employeur en avise l’inspecteur du travail qui n’a aucun
pouvoir de veto pour s’opposer au licenciement envisagé. Tout au plus, selon la Loi, il peut
exercer ses bons offices. Mais si l’employeur estime maintenir sa décision, il peut procéder
immédiatement au licenciement et envoyer la liste des salariés licenciés et le compte rendu de
la réunion avec les Délégués du Personnel à l’inspecteur du travail dans le délai d’une
semaine.
En dehors de l’indemnité de préavis et de licenciement, les salariés victimes du licenciement
pour motif économique ont droit à une indemnité équivalente à un mois de salaire brut non
imposable. Par ailleurs, ils ont droit à une priorité de réembauchage pendant une période de
deux (2) ans.
En conclusion, le Loi de 1997 a fortement libéralisé le droit du licenciement tant ordinaire
qu’économique, sous le manteau de la flexibilité de l’emploi.

B / La Démission

C’est la Rupture initiée par le salarié en vertu de son droit unilatéral de rupture.
Théoriquement, il devrait y avoir un parallélisme des formes, c’est-à-dire que le salarié
devrait logiquement respecter la même procédure que l’employeur, avec notamment la
notification écrite et l’indication du motif, sans oublier le respect du délai de préavis. Mais ici,
dans les faits, le Juge est relativement complaisant, il est moins regardant sur la forme de la
démission. D’ailleurs il essaie même de vérifier si effectivement le salarié a démissionné,
parce que la démission ne doit pas être équivoque. Il ne faudrait pas non plus que l’employeur
ait incité le salarié à démissionner. Sinon, le Juge a tendance à y voir un licenciement déguisé
et imputer cette rupture à l’employeur.
Donc dans un souci de protection du salarié, le Juge procède à un glissement vers un
licenciement déguisé.
En conclusion, la volonté unilatérale est à même de rompre le contrat de travail, à fortiori
lorsqu’il s’agit d’une commune volonté.

Paragraphe 2 : La Rupture Amiable du Contrat de Travail

On l’appelle aussi la Résiliation Amiable, la Rupture Négociée ou le Départ Volontaire. Il


s’agit en effet de l’hypothèse dans laquelle les deux (2) parties décident de mettre un terme à
leurs relations professionnelles. Tant que la pratique était demeurée isolée, elle ne soulevait
guère de discussion, mais dès qu’elle a pris une certaine ampleur, des inquiétudes se sont
manifestées jusqu’à contester sa légitimité, sa validité, parce qu’on disait qu’en réalité, les
départs négociés sont des départs imposés, dans lesquels le consentement était vicié, et au
surplus, c’était un moyen commode pour l’employeur de contourner les licenciements
économiques qui nécessitaient une autorisation. Enfin, faisait-on remarquer, les départs
négociés n’étaient pas prévus par le Code du Travail. Par voie de conséquence, on devait
déclarer illégitime tout départ négocié.
Mais ces divers arguments ne sauraient prospérer, parce qu’impertinents. D’abord on
comprendrait difficilement qu’une seule partie puisse rompre le contrat par sa volonté
unilatérale et qu’on l’interdise aux parties qui expriment une volonté concordante.
En outre, on peut justifier les départs négociés au-delà du Code du Travail, parce que le droit
commun des obligations consacre le principe selon lequel le contrat peut être révisé ou résilié
d’un commun accord.
Enfin et surtout, parce que le Code de 1997 a expressément consacré la rupture amiable du
contrat dans deux (2) dispositions différentes. D’abord dans le Contrat à Durée Déterminée où
l’article L48 prévoit que ce contrat peut être rompu en cas d’accord des parties constaté par
écrit. La deuxième disposition qui reconnaît la légitimité des départs négociés, c’est l’article
L64 qui prévoit expressément que le protocole amiable de départ librement et loyalement
négocié entre l’employeur et le salarié dispense du respect de la procédure prévue pour les
licenciements pour motif économique. Donc finalement aujourd’hui, personne ne devrait
pouvoir contester la légalité, voire la légitimité des départs négociés.

Section 2 : La Perte Involontaire de l’Emploi

L’emploi peut être aussi perdu de façon involontaire, c’est-à-dire sans qu’il y’ait besoin de
manifester une volonté dans ce sens. Si l’on exclut l’hypothèse du décès du salarié, on peut
retenir à titre d’exemple la Mise à la Retraite, et l’impossibilité de poursuivre les relations
professionnelles par suite d’un Cas de Force Majeure.

Paragraphe 1 : La Retraite
Le départ à la retraite est un mode autonome de rupture du contrat de travail. Ce n’est ni un
licenciement ni une démission, encore moins une rupture amiable. Il s’agit d’un âge à partir
duquel on estime que les relations de travail ne doivent plus se poursuivre, essentiellement sur
la base d’une philosophie de solidarité, mais aussi par la prise en compte de la santé du
salarié. L’aspect solidarité renvoie à l’idée que les plus âgés doivent faire place aux plus
jeunes quant à l’accès à l’emploi, et cela participe de la politique de l’emploi. Quant à l’état
de santé du salarié, on convient généralement qu’à partir d’un certain âge, après plusieurs
années de labeur, le corps a besoin de se reposer. Mais aujourd’hui aucun de ces aspects ne
gagne en unanimité. En effet, le temps est à la revendication d’un âge plus reculé pour aller à
la retraite. Les progrès de la science y sont aussi pour quelque chose.
Dans la fonction publique, l’âge de la retraite est aujourd’hui fixé à soixante ans. Dans le
secteur privé, il y a encore quelques résistances, mais le Code du Travail prévoit que les
parties peuvent convenir de poursuivre leurs relations professionnelles, mais qu’il ne saurait
dépasser soixante ans pour les salariés.
En principe, le départ à la retraite s’accompagne, dans le secteur privé, d’une allocation de
retraite qui généralement est calculée en fonction de l’ancienneté du salarié dans l’emploi.
Mais le montant de cette allocation peut varier d’une Convention à une autre. Par ailleurs, le
départ à la retraite fait naître une pension de retraite constituée par les cotisations versées
pendant le temps d’activité et majorées d’un coefficient déterminé.

Paragraphe 2 : Le Cas de Force Majeure

Il ne s’agit pas d’une hypothèse d’école, même si cela peut paraître invraisemblable. Il s’agit
de circonstances insurmontables qui mettent un terme définitif aux relations de travail. C’est
l’application de la Théorie de la Force Majeure aux relations professionnelles : « A
l’impossible, nul n’est tenu ». Donc les parties vont être déliées de leurs obligations
respectives, sans qu’il y ait d’indemnités à payer, ce qui se traduit par une perte d’emploi
brutale pour les salariés. D’où l’impérieuse nécessité de rendre obligatoire l’assurance de
toutes les entreprises qui exercent au Sénégal pour couvrir certains risques parmi lesquels le
cas fortuit.
DEUXIEME PARTIE : LES RELATIONS COLLECTIVES DE TRAVAIL

Les relations professionnelles ne se ramènent pas seulement aux rapports individuels entre
l’employeur et le salarié. L’emploi a, en effet, une dimension collective.
D’abord les salariés ont besoin de se regrouper pour constituer une force de gégociation face à
l’employeur. C’est la Représentation Collective.
Par ailleurs, l’emploi se déroule avec un support matériel. C’est l’Entreprise.
Enfin, les salariés ont plus de chance de réussir lorsqu’ils sont en conflit avec l’employeur,
sous une forme collective. Ce sont les Conflits Collectifs de travail.

Titre 1 : La Représentation Collective

Chapitre 1 : L’Institution des Délégués du Personnel

En Droit Sénégalais du travail, c’est la seule institution représentative du personnel au sein de


l’entreprise. Il convient de mettre en relief leur désignation et leur mission, avant de mettre
l’accent sur la protection exorbitante dont ils bénéficient.

Section 1 : Désignation et Mission des Délégués du Personnel

Paragraphe 1 : La Désignation des Délégués du Personnel

Ils sont désignés de façon démocratique à la suite d’élections, mais les candidatures
individuelles ne son admises qu’à défaut de candidatures présentées par les organisations
syndicales. Pour être électeur, il faut être titulaire d’un contrat de travail depuis au moins six
mois. Et pour être éligible, il faut bénéficier d’une ancienneté d’au moins un an. Les candidats
sont présentés à travers deux collèges : le collège des cadres et techniciens assimilés et le
collège des ouvriers et employés.
Les modalités matérielles des élections sont de la responsabilité de l’employeur. On élit à la
fois des délégués titulaires et des délégués suppléants, en nombre égal. Le contentieux des
élections est de la compétence du Tribunal Régional.

Paragraphe 2 : La Mission des Délégués du Personnel

Il faut d’abord préciser que l’élection des délégués du personnel ne peut avoir lieu que dans
les entreprises ayant au moins dix salariés. Les délégués du personnel sont élus pour trois (3)
ans renouvelables, de façon indéfinie. Une fois élus, ils deviennent les interlocuteurs
privilégiés de l’employeur tant pour les revendications individuelles que pour celles
collectives, et l’employeur est tenu de les recevoir au moins une fois par mois, ou sur leur
demande.
Pour l’exercice de leur mission, les délégués du personnel bénéficient d’un crédit de deux
heures par semaine qui sont considérées comme temps de travail effectif, et rémunérées en
tant que tel.
L’employeur est tenu de mettre à leur disposition un local fonctionnel. Par ailleurs, les
délégués du personnel veillent à la bonne application des dispositions conventionnelles,
légales et réglementaires. A ce titre, ils sont des auxiliaires de l’Inspecteur du Travail et du
Juge, à qui ils peuvent signaler toute irrégularité. En outre, le délégué du personnel a des
prérogatives ponctuelles, notamment dans l’hypothèse où il est obligatoirement consulté pour
donner son avis à propos par exemple de l’élaboration du règlement intérieur ou des
licenciements pour motif économique.
Enfin, le Code de 1997 a introduit une innovation majeure en habilitant les délégués du
personnel à conclure des accords collectifs d’établissement, brisant ainsi le monopole syndical
en matière de négociations collectives.
C’est compte tenu de toutes ces prérogatives fondamentales qu’il a paru nécessaire au
Législateur d’accorder au délégué du personnel une protection exorbitante de droit commun.

Section 2 : La Protection du Délégué du Personnel

Il s’agit à titre principal d’une protection contre le licenciement qui finalement, a connu une
extension certaine.

Paragraphe 1 : La Protection contre le Licenciement


En Droit Sénégalais du Travail, le délégué du personnel est le seul salarié que l’employeur ne
peut licencier de façon autonome. Il faut en effet, avant tout licenciement d’un délégué du
personnel, une autorisation accordée par l’Inspecteur du travail. Et la décision de l’Inspecteur
peut faire l’objet d’un recours gracie devant le Ministre de Tutelle, et l’acte du Ministre lui-
même peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat.
Il faut signaler que l’inspecteur du travail peut refuser l’autorisation demandée même pour des
raisons d’opportunité.
Tout licenciement d’un délégué du personnel qui intervient sans autorisation ou malgré le
refus d’autorisation ou après annulation de l’autorisation est un licenciement nul et de nul
effet. Et le délégué du personnel irrégulièrement licencié a droit à une indemnité égale au
salaire qu’il aurait perçu s’il n’avait pas été licencié, compte non tenu du fait que l’employeur
est obligé de le réintégrer. Et en cas de résistance dans la réintégration, l’employeur va être
tenu de payer une autre indemnité qui peut aller jusqu’à cinquante mois de salaire en fonction
de l’ancienneté du délégué.
Et cette protection contre le licenciement profite non seulement aux délégués titulaires, mais
aussi aux délégués suppléants, voire aux délégués candidats et aux délégués qui ont perdu
leurs fonctions, jusqu’aux nouvelles élections.
On peut donc convenir que les délégués du personnel bénéficient d’une quasi immunité
pendant tout leur mandat, immunité confortée par l’extension de la protection.

Paragraphe 2 : L’Extension de la Protection

Les délégués du personnel bénéficient aussi d’une protection pénale qui a pour corollaire
l’interdiction à l’employeur de toute entrave directe ou indirecte à l’exercice des fonctions.
Dans cette hypothèse, l’employeur encourt des amendes. Mais la Jurisprudence est allée
beaucoup plus loin parce qu’elle n’a accepté comme mode de rupture du contrat du délégué
du personnel que le licenciement autorisé par l’Inspecteur du Travail. Cela signifie
concrètement que l’employeur ne peut même pas demander au Juge de résilier le contrat
lorsque le délégué commet un manquement grave.
Par ailleurs, l’employeur ne peut porter atteinte à l’exercice par le Délégué du Personnel de
son mandat. Finalement, le Délégué du Personnel bénéficie d’une quasi immunité et parfois,
même au-delà de son mandat.

Chapitre 2 : Les Syndicats

Le Syndicat est un groupement ayant pour objet la Défense et la Représentation des intérêts
des membres de la Profession. L’étude du Droit Syndical peut être envisagée à un double
égard. C’est d’une part par rapport à la Constitution du Syndicat ; c’est d’autre part par
rapport à l’Activité du Syndicat.

Section 1 : La Constitution du Syndicat

Elle obéit à des règles qui, toutes sont imprégnées d’un principe fondamental que l’on appelle
Liberté Syndicale.

Paragraphe 1 : Le Principe de la Liberté Syndicale

C’est un principe qui renferme plusieurs significations. Cela signifie en premier lieu qu’il
n’existe pas de syndicalisme obligatoire. Aucun salarié ne peut se voir imposé une adhésion
syndicale. On est libre de se syndiquer ou de ne pas se syndiquer. On est aussi libre de se
retirer d’un syndicat sans avoir à donner des justifications. Par ailleurs, la Liberté Syndicale
postule le Pluralisme Syndical, c’est-à-dire la possibilité de choisir son Syndicat.
En outre, c’est l’interdiction qui est faite à l’employeur de prendre en compte l’appartenance
ou non d’un salarié à un Syndicat, soit pour le recruter, soit pour le sanctionner.
Mais la Liberté Syndicale signifie aussi que les Autorités Publiques ne peuvent s’immiscer ni
dans la Constitution, ni dans le Fonctionnement, ni dans la Dissolution du Syndicat. Par voie
de conséquence, le Pouvoir Exécutif ne peut dissoudre un Syndicat (Convention n° 121 de
l’OIT).

En conclusion, il faut retenir que c’est ce Principe de la Liberté Syndicale qui gouverne tout le
Droit Syndical.

Paragraphe 2 : Les Règles de Constitution du Syndicat

On peut les envisager à trois (3) niveaux : d’abord au niveau des conditions de fond, ensuite
au niveau des conditions de forme et enfin la sanction encourue en cas de violation.

A / Les Conditions de Fond

Qui peut se syndiquer ?


Tout salarié, même mineur peut se syndiquer. Mais pour être dirigeant, il faut être de
nationalité sénégalaise, à moins qu’il y ait une convention de réciprocité. Il faut aussi être
domicilié au Sénégal, savoir parler et comprendre français, et ne pas être privé de ses droits
civils ou civiques.

B / Les Conditions de Forme

Les dirigeants doivent présenter des statuts en trois exemplaires, en français avec indication
des coordonnées des dirigeants, le siège social du Syndicat et les circonstances dans lesquelles
il a été créé. Ce dossier est transmis à l’Inspecteur du Travail qui, lui-même le communique
au Procureur de la République qui est chargé de faire un rapport et d’opérer un contrôle de
régularité. Ensuite, le dossier est transmis au Ministre de l’Intérieur qui, au vu du rapport,
apprécie s’il doit délivrer ou non un récépissé. Mais le Ministre de l’Intérieur ne peut refuser
la délivrance du récépissé que pour des motifs de légalité.
Si le récépissé est délivré, copie est faite non seulement aux dirigeants, mais aussi à
l’Inspecteur du Travail. A partir de ce moment, le Syndicat acquiert la Personnalité Juridique.

C / La Sanction en Cas d’Irrégularité

Lorsqu’une irrégularité a été commise au moment de la Constitution et qu’elle ne soit relevée


que plus tard, la Constitution étant irrégulière, la formation du Syndicat peut être annulée. Il
appartient au Procureur de la République ou toute personne intéressée d’agir pour demander
l’annulation de la délivrance du récépissé.
Lorsqu’aucune irrégularité n’est commise, le Syndicat est habilité à fonctionner, à avoir des
activités.

Section 2 : L’Activité Syndicale

L’activité syndicale est multidimensionnelle. Le syndicat, en tant que sujet de droit, peut faire
tous les actes reconnus aux sujets de droit sous certaines réserves. Il a un patrimoine, il peut
acheter et vendre, mais sans rechercher de bénéfices.
Mais au-delà de ce cadre général d’activité, le syndicat a essentiellement pour mission de
représenter et de défendre ses membres et la profession.

Paragraphe 1 : La Mission de Représentation

Pour les salariés, c’est le seul organe habilité à négocier à conclure des accords collectifs, sous
la seule réserve des Délégués du Personnels pour les accords collectifs d’établissement. Mais
le syndicat peut aussi représenter ses membres au niveau de la Justice, notamment lorsqu’il
bénéficie d’un mandat spécial. Mais il n’a pas besoin de mandat pour représenter la
profession. Il est habilité à le faire devant toutes les Juridictions. En outre, le syndicat peut
encadrer ou orienter une grève, mais il n’en détient pas le droit. L’exercice du droit de grève
n’est pas lié au syndicat.
Les syndicats doivent aussi parfois être consultés en leur qualité de représentant sur toutes les
affaires ayant des incidences professionnelles. Mais il faut parfois aussi que le syndicat soit
représentatif. La question est alors de savoir quels sont les critères de la Représentativité.
Il existe plusieurs critères de représentativités, sans qu’il y ait une hiérarchie entre eux.

 C’est d’abord l’effectif du syndicat ;


 C’est ensuite les cotisations effectivement perçues ;
 C’est enfin les résultats aux élections des Délégués du Personnel, l’audience du
syndicat, son expérience et récemment des élections nationales pour les Confédérations.

La Confédération, c’est le regroupement de plusieurs syndicats représentant des professions


différentes. C’est un regroupement horizontal par opposition à la Fédération qui est un
regroupement de syndicats s’intéressant aux mêmes professions ou à des professions
similaires ou connexes.
Les Confédérations sont aussi appelées Centrales Syndicales.

Paragraphe 2 : La Défense

Il s’agit ici des actions revendicatives que les syndicats peuvent mener soit de façon isolée,
soit en se regroupant. Le regroupement peut être ponctuel, occasionnel, pour une action
déterminée, comme il peut être institutionnel. Cette défense des intérêts de la profession peut
avoir un caractère conflictuel et dégénérer en mouvement de grève. Il peut aussi s’agir d’une
action de nature judiciaire, l’essentiel, c’est qu’elle touche à des aspects d’ordre professionnel.
C’est le Principe de la Spécialité que le syndicat ne peut dépasser, notamment le syndicat ne
peut mener des actions à caractère politique. Mais parfois, il arrive que la distinction du
politique et du professionnel ne soit pas visée. Tout est alors une question d’appréciation faite
par le Juge, mais bien souvent par les autorités politiques.
Ce qu’il faut retenir là, c’est que la défense des intérêts professionnels est l’objet essentiel des
syndicats qui doivent bénéficier à l’amélioration des conditions de travail des salariés.
En conclusion, la cessation d’activité du syndicat pour réalisation de son objet ou par suite
d’une décision judiciaire entraîne la dissolution du syndicat. Mais en tout état de cause, les
biens du syndicat dissout ne peuvent être répartis entre les membres. Ils doivent être dévolus
conformément aux statuts ou à d’autres organes, à d’autres structures de même nature.

Titre 2 : La Négociation Collective et les Conflits Collectifs

Chapitre 1 : La Négociation Collective

L’étude de la Négociation Collective renvoie à celle des sources professionnelles du Droit du


Travail. Aujourd’hui en effet, on peut convenir que l’essentiel des avantages consentis aux
salariés résultent des Accords Collectifs, c’est-à-dire d’accords entre les partenaires sociaux
sur les conditions de travail. La règle de droit n’est plus imposée, mais elle est négociée, et
elle participe de son effectivité. Sous cette réserve, le droit de la négociation collective
renvoie à une diversité d’accords collectifs d’une part, et d’autre part à l’application de ces
accords.

Section 1 : La Diversité des Accords Collectifs

On peut retenir qu’il y a d’une part la Convention Collective Ordinaire ou de Droit Commun,
et d’autre part la Convention Collective Susceptible d’extension et l’Accord Collectif
d’Etablissement.

Paragraphe 1 : La Convention Collective Ordinaire ou de Droit Commun

C’est l’Accord Collectif de base. Il est conclu d’une part entre un employeur ou un
groupement d’employeurs, et d’autre part par une organisation professionnelle de salariés.
L’objet de la Convention Collective Ordinaire est relatif aux conditions de travail. Au niveau
de l’élaboration, il n’y a pas de symétrie entre l’employeur et les salariés. Un employeur seul
peut signer une Convention Collective Ordinaire, alors que du côté des salariés, il faut
nécessairement une organisation professionnelle. Par ailleurs, il faut relever que la
Convention Collective doit être rédigée en français en trois (3) exemplaires. C’est cette
Convention Collective Ordinaire qui est le Droit Commun des accords collectifs. Mais de plus
en plus, elle est supplantée par la Convention Collective Extensible ou Etendue.
Paragraphe 2 : La Convention Collective Extensible et l’Accord Collectif
D’Etablissement

A / La Convention Collective Extensible

Sa particularité, c’est qu’elle va s’appliquer même à des personnes qui ne l’ont pas signé ou
qui n’y ont pas adhéré. En effet, à partir de son extension par arrêté ministériel, la Convention
va s’appliquer même à des tiers dès l’instant que ces tiers sont visés dans l’arrêté d’extension.
L’arrêté est pris par le Ministre du Travail, à la suite d’une réunion d’une Commission Mixte
comprenant à la fois des représentants des employeurs et des représentants des salariés et de
l’Etat. Mais il faut que les organisations représentatives de l’Etat soient représentatives. La
question est de savoir quels sont les critères de la représentativité.
Il faut, à côté de cette convention susceptible d’extension, adjoindre le Convention Collective
Nationale Interprofessionnelle (CCNI) qui a pour ambition de s’appliquer à toutes les
entreprises installées sur le territoire sénégalais.

B / L’Accord Collectif d’Etablissement

C’est l’accord qui est signé au sein de l’entreprise même, plus exactement au sein de
l’Etablissement. Cet accord a une double particularité :

 D’abord il peut être conclu par des Délégués du Personnel : c’est une innovation de la
Loi de 1997 portant Code du Travail ;
 Par ailleurs, il ne fait qu’adapter la stipulation des Conventions Collectives qui lui sont
supérieures.

Finalement, il faut reconnaître que c’est sous cette diversité que se présente la physionomie
des accords collectifs en Droit Sénégalais.

Section 2 : L’Application des Accords Collectifs

Il faut l’envisager à un double niveau :

 D’une part l’Application Territoriale et Professionnelle ;


 D’autre part l’Application dans le temps.
Paragraphe 1 : L’Application Territoriale et Professionnelle

En ce qui concerne l’Application Territoriale, cela relève de la volonté des parties. La


Convention peut être nationale ; elle peut être régionale comme elle peut être locale.
En ce qui concerne l’Application Professionnelle, elle est librement déterminée par les parties
en ce qui concerne la convention ordinaire, mais en ce qui concerne la Convention Extensible,
elle ne peut viser qu’une branche d’activités. Quant à l’accord collectif d’établissement, son
domaine territorial et professionnel est réduit parce qu’il ne peut jouer qu’un rôle
d’adaptation.
Mais il y a lieu de signaler que dans la Convention Collective Extensible, il y a des clauses
obligatoires, notamment celles qui sont relatives à la Liberté Syndicale, au Droit aux Congés
Payés ou encore aux Heures Supplémentaires.

Paragraphe 2 : L’Application dans le Temps

La Convention Collective a d’abord des effets à la fois obligatoires, et il se pose bien souvent
un problème d’avantages acquis.

1 – Les Effets de la Convention Collective

C’est d’abord l’effet obligatoire. Les parties à la convention sont tenues de respecter leurs
engagements, elles sont tenues d’y veiller consciencieusement.
Il y a ensuite un effet automatique, c’est-à-dire que la Convention Collective s’applique de
façon automatique à tous les contrats en cours dès l’instant que l’employeur y est assujetti.
Il y a enfin un effet impératif, c’est-à-dire que la Convention Collective se substitue à toutes
les stipulations des Conventions Collectives qui lui sont contraires, à moins que celles-ci ne
soient plus avantageuses.
Mais quand peut-on dire qu’une stipulation est beaucoup plus avantageuse que d’autres ?
Cela revoie au problème des avantages acquis.

2 – Les Avantages Acquis

Il faut supposer l’hypothèse d’un salarié recruté en 1990 et qui doit partir en retraite en 2007.
A l’époque de son recrutement, la Convention Collective en vigueur prévoyait une indemnité
de départ à la retraite de trois (3) millions. En 2006, une nouvelle Convention Collective
prévoit une indemnité de rupture quel qu’en soit le motif, fixée à un (1) million. Le salarié qui
va à la retraite en 2007 estime qu’il a droit à l’indemnité de trois (3) millions au motif qu’il en
a acquis l’avantage. Sa prétention est-elle fondée ?
A ce problème particulier, le Droit Civil a apporté son soutien en recourant à la notion de
créance certaine, liquide et exigible. L’indemnité de départ à la retraite est certaine parce
qu’elle existe dès que le salarié fait son séjour dans l’entreprise. Elle est aussi liquide parce
qu’on connaît son montant. C’est seulement son exigibilité qui était différée jusqu’à l’âge de
la retraite. Donc à partir de là, on peut convenir que le salarié pouvait y prétendre comme
avantage acquis. Mais encore faudrait-il qu’il y ait dans la nouvelle Convention Collective
une clause qui prévoit ce maintien des avantages acquis. A défaut, la prétention ne peut
prospérer. Au-delà de cette précision, il faut ajouter que l’appréciation de l’avantage doit se
faire de façon globale et non par rapport à une situation individuelle.

Chapitre 2 : Les Conflits Collectifs

Les relations professionnelles peuvent avoir une dimension conflictuelle parce que les salariés
et les employeurs n’ont pas souvent des intérêts convergents. Et lorsque la négociation
n’aboutit pas positivement, on passe à des extrêmes que sont la Grève et le Lock-out qui sont
pourtant soumis sensiblement au même régime juridique.

Section 1 : Le Lock-out et la Grève

Paragraphe 1 : Le Lock-out

C’est la décision de fermeture de l’entreprise à la suite ou à l’occasion d’un conflit collectif.


C’est donc une réaction de l’employeur par rapport à un conflit collectif. C’est pourquoi on a
tendance à considérer le Lock-out comme la grève de l’employeur, et c’est aussi pourquoi on
a contesté sa Validité, sa Légitimité essentiellement au motif que la reconnaissance du Droit
de Grève est incompatible avec la reconnaissance du Lock-out. En effet, le droit de grève,
c’est le droit de nuire à l’employeur en paralysant l’entreprise. Si dans le même temps
l’employeur ferme l’entreprise, la grève n’a pas d’objet. C’est cette philosophie qui existe
dans le Droit Français où le Lock-out est en principe interdit, sauf hypothèse exceptionnelle
où des raisons de sécurité l’exigent.
En Droit Sénégalais, la solution est inverse. Le Lock-out est un droit pour l’employeur
comme la grève est un droit pour le salarié. C’est ce qu’on appelle la Théorie de l’Egalité des
Armes consacrée par le Droit Allemand, mais aussi par le Code du Travail Sénégalais qui la
reconnaît expressément, d’une part en affirmant que le Lock-out est une cause de suspension
du contrat de travail, d’autre part en précisant que le Lock-out et la grève sont soumis au
même régime. Donc au Sénégal, personne ne peut contester la légitimité du Lock-out qui a
ainsi accédé à une vie juridique.

Paragraphe 2 : Le Droit de Grève

C’est un droit à valeur constitutionnelle. Mais la nouvelle constitution en a quelque peu limité
la portée parce qu’elle affirme qu’en aucun cas le Droit de Grève ne peut mettre en péril
l’entreprise.
Par ailleurs, la grève se définit comme la Cessation Collective et Concertée du travail en vue
de la satisfaction de revendications professionnelles. Donc il faut au moins être deux, sauf
hypothèse exceptionnelle. Il faut une cessation concertée, mais on n’a pas besoin d’une
assemblée générale.
La grève peut être inopinée, elle peut se décider sur le tas et surtout la grève appartient aux
syndicats. C’est simplement un droit individuel, mais d’exercice collectif. On peut aller en
grève sans jamais avoir été syndiqué.
Mais la grève, c’est aussi pour des revendications professionnelles, ce qui exclut les
revendications politiques. La difficulté, c’est que parfois, il n’est pas aisé de faire la
distanciation entre le politique et le professionnel. Exemple : Une grève nationale contre la
baisse du pouvoir d’achat est dirigée contre qui ? Contre les entreprises, mais aussi contre le
Gouvernement.
La grève peut être une grève perlée, c’est-à-dire que les salariés peuvent partir en grève de
façon rotative, à tour de rôle. Elle est valable.
Par contre la grève de zèle est illégale parce que ce n’est pas une grève. La grève suppose une
cessation d’activité et non un ralentissement ou une accélération de l’activité.
Il y a essentiellement que la Grève, comme le Lock-out doit être précédée d’un préavis d’un
mois. Et pendant cette période, des négociations doivent être engagées conformément à la
Convention Collective ou à défaut, à l’initiative de l’Inspecteur du Travail qui doit être
obligatoirement informé de tout conflit collectif. Et c’est seulement en cas d’échec que la
grève, comme le Lock-out peut être déclenchée.

Section 2 : Les Effets de la Grève et du Lock-out


Paragraphe 1 : La Grève et le Lock-out Licites

Dans ce cas, le contrat de travail est suspendu. Les parties sont délivrées de leurs obligations
respectives pendant la durée du conflit. Pas de travail, mais aussi pas de salaire, même en cas
de grève licite. Et en aucun cas la participation à de tels conflits licites ne peut entraîner des
sanctions.

Paragraphe 2 : La Grève et le Lock-out Illicites

Participer à une grève illicite constitue une faute lourde qui prive de toute indemnité en cas de
licenciement. C’est donc dire que la participation à une grève illicite constitue un juste motif
de licenciement, et le salarié ne peut prétendre à aucune indemnité, ni de licenciement, ni de
préavis. Et la rupture peut être immédiate.
Par contre, si le Lock-out est illicite, l’employeur va être condamné à payer une indemnité
égale au salaire que les travailleurs auraient perçu si l’entreprise n’avait pas été illégalement
fermée par l’employeur. Par ailleurs, l’employeur n’est plus éligible aux Chambres de
Commerce et aux Commissions Consultatives du Travail et de la Sécurité Sociale. Il ne peut
non plus concourir à un marché de l’Etat ou de ses démembrements.
En conclusion, il faut signaler, pour le Droit de Grève, l’interdiction absolue d’entraver la
liberté de travail des non-grévistes, de même que l’occupation des lieux de travail.

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