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REPUBLIQUE DU SENEGAL

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MINISTERE DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA REHERCHE

FILIERE ADMINISTRATION ECONOMIQUE ET SOCIALE

LICENCE 1

SOCIOLOGIE GENERALE

Dr Oumou Khairy COULIBALY

Séquence 3 :
Questionnements récurrents et thèmes transversaux et Méthodes
d’investigation
Quelle que soit l’époque et en dépit de la diversité des démarches, postures, courants et écoles
de pensée, les grandes questions que traite la sociologie ne sont finalement pas nombreuses et
et reposent sur quelques thèmes transversaux.
De même, la sociologie se distingue par l’utilisation de méthodes d’investigation spécifiques
pour saisir le social.

Les Questionnements récurrents


En fonction des époques, des sociétés et des courants, les sociologues ont tous essayé de
répondre à ces différentes questions que sont :

 Le lien social : c’est-à-dire comment la société tient-elle ? Comment se fait-il que les
collectivités humaines ne sombrent pas dans la violence généralisée ou n’éclatent pas ?
Comment faire pour éviter la désintégration sociale ? Durkheim, par exemple, a tenté
de répondre à cette question, entre autres bien entendu ;
 La modernité et sa nature : faire émerger l’essence, c’est-à-dire la nature profonde des
sociétés occidentales. Le Capitalisme est une des réponses décrites par des auteurs
comme Max WEBER ou Karl MARX ;
 La domination et le pouvoir : pourquoi les hommes acceptent-ils l’ordre social ?
Pourquoi laissent-ils certains exercer le pouvoir à leur place ? Parmi les sociologues
modernes, Pierre BOURDIEU est celui qui a le plus approfondi l’idée selon laquelle les
mécanismes de domination sont phénomènes centraux de l’organisation sociale.
 L’action : quels sont les ressorts de l’action humaine ?
 Les structures de la société : comment s’organisent les sociétés ?
 Le changement social : comment les sociétés parviennent-elles à changer sans
disparaître, tout en maintenant un certain équilibre ?

Mais les sociologues ont adopté des démarches différentes pour répondre à ces questionnements
communs. C’est cette différence qui est à l’origine des oppositions telles que :
 Matérialisme vs idéalisme
 Objectivisme vs subjectivisme
 Holisme vs individualisme méthodologique
 Explication vs compréhension
 Enquête empirique vs théorie sociale
 Méthodes quantitatives vs méthodes qualitatives

Thèmes transversaux et quelques concepts clés


 Culture, socialisation et identité ;
 Contrôle social, norme et déviance ;
 Stratification et inégalités sociales ;
 Pouvoir politique et société.

Cette liste est bien entendu incomplète mais elle permet au moins d’avoir une idée globale des
interrogations fondatrices et récurrentes de la sociologie
Cela montre par la même occasion que l’objet de la sociologie est à la fois large et vague et,
donc, sujette à l’interprétation que chaque sociologue en fait et qui est liée au sens et à l’aspect
qu’il veut étudier.

Quelques concepts clés


En tant science qui se donne comme but de comprendre et d’expliquer le comportement de
l'Homme dans son milieu social, la sociologie utilise des concepts dont la connaissance de leur
définition est fondamentale pour tout apprenant.

o Culture :
Deux définitions :
• une définition large: celle donnée par Tylor (1871) selon qui la culture désigne «ce tout
complexe qui comprend la connaissance, les croyances, l’art, la morale, le droit, les
coutumes et les autres capacités ou habitudes acquises par l’homme en tant que membre
de la société».
Cette définition renvoie aussi à la tradition anthropologique et oppose la culture à la nature. La
culture, dans ce sens, désigne alors « tout ce qui est créé et transmis par l’homme, tout ce qui
n’est pas donné par la seule nature et par l’hérédité biologique2».
Une conception de cette notion qui renvoie à la rupture entre sexe et « tempérament » par
l’anthropologue Margaret.

• Une définition plus restreinte : qui renvoie à l’acception courante du terme, et désigne
le domaine des arts et des pratiques liées à la production et à la consommation de « biens
culturels » (musique, livres, spectacles, cinéma, etc.).
Mais la sociologie privilégie la définition extensive et la notion de culture désigne un ensemble
de pratiques sociales.
Il existe une pluralité de cultures et elles ne sont ni homogènes, ni figées, loin de là, une culture
ne peut perdurer qu’en se renouvelant.

1
TYLOR, E. (1876 [1871]). La civilisation primitive, Paris : Reinwald, p.1, cité par CUCHE, D. (1996). La notion
de culture dans les sciences sociales, Paris : Editions La Découverte, p.16.
2
ANSART, P. (1999). "Sociologie de la culture." in Dictionnaire de sociologie, sd AKOUN, A. et ANSART, P.
Paris : Le Robert – Seuil, p.126.
o Socialisation :
Selon Guy Rocher ((19683): la socialisation désigne un « processus par lequel la personne
humaine apprend et intériorise tout au cours de sa vie les éléments socioculturels de son milieu,
les intègre à la structure de sa personnalité sous l’influence d’expériences et d’agents sociaux
significatifs et par là s’adapte à l’environnement social où elle doit vivre ».
Mais il faut savoir que Durkheim a été le premier sociologue à s’y intéresser à cette notion.
La Socialisation désigne donc un « ensemble des processus par lesquels l’individu est construit,
façonné, conditionné par la société dans laquelle il vit ».
Il s’agit donc d’un processus au cours duquel il apprend et intériorise des façons de faire, de
penser et d’être qui sont situées socialement. C’est le processus par lequel la société construit
l’individu. Autrement dit, la socialisation est t le mécanisme par lequel la société transmet ses
croyances, valeurs, et normes à ses membres à travers l'apprentissage, la culture en général
grâce à la famille et à l'école mais également par le langage et l'environnement dans lequel
évolue l’individu.

Ainsi, nos manières de penser, d’être, de nous percevoir, de percevoir les autres et de faire ne
sont pas naturelles mais plutôt apprises et transmises lors de notre socialisation.
Exemple : c’est à travers la socialisation que les différences entre les sexes, les rôles du
masculin et du féminin sont appris et intériorisés.

On distingue plusieurs types, ou phases, de socialisation : manifeste et latente ; primaire,


secondaire et continue.

o Norme sociale :
Une norme sociale est conforme à ce qui est communément admis et légitimé par le système de
valeurs propre à chaque groupe social, à chaque société et qui régule les comportements de
l’individu par « des sanctions positives ou négatives, formelles ou informelles, quand il y a
transgression ou non-conformité »4.
Les normes sociales sont ainsi intériorisées par les individus au cours de la socialisation, il
s’agit d’un ensemble de règles sociales qui régissent le vivre ensemble.

o Contrôle social :
Cette notion renvoie à un ensemble des dispositifs employés dans une société pour assurer la
cohésion sociale et le respect des règles édictées.
Ces types de contrôle social extrêmement variés
La notion de contrôle social renvoie à l’existence de normes sociales diverses.

o Stratification sociale :
La société est constituée d’un ensemble de groupes sociaux hiérarchisés. En sociologie,
l’activité économique a été longtemps considérée comme le critère principal de hiérarchisation
des groupes sociaux. Autrement dit, c’est par l’activité économique que les groupes sociaux se
distinguent.

3
ROCHER, G. (1968). Introduction à la sociologie générale, Montréal : HMH, cité par ALPE, Y., LAMBERT, J.-
R., BEITONE, A., DOLLO, C., et PARAYRE, S. (2007). Lexique de sociologie, Paris : Dalloz, p. 269.

4
ALPE, Y., LAMBERT, J.-R., BEITONE, A., DOLLO, C., et PARAYRE, S. (2007). Lexique de sociologie, Paris
: Dalloz, p.204.
Exemple : On peut prendre comme exemple la théorie des classes sociales proposée par
Karl Marx.
Si l’on prend l’exemple de la société sénégalaise, on peut noter l’existence d’autres critères de
hiérarchisation, dont certains priment sur l’activité économique, c’est le cas du système de
Caste.
Il y a aussi le sexe, qui est un autre critère de différenciation et de hiérarchisation les individus
et qui est à l’origine des inégalités sociales entre homme et femme.

Cette notion de stratification sociale pose en même temps les relations entre ces différents
groupes sociaux et renvoie, par la même occasion, à d’autres notions aussi importantes en
sociologie, celles de mobilité sociale, d’inégalités sociales et de reproduction sociale.

Les méthodes d’investigation empirique


La sociologie est donc une discipline plurielle mais au-delà de la diversité des objets, des
questionnements et des approches, la sociologie se définit comme étant une démarche d’analyse
scientifique du social. Comme toute discipline scientifique, elle se caractérise par une démarche
aspirant à l’objectivité et donc à éviter les prénotions et jugements de valeurs sur les
phénomènes qu’elle étudie. Cependant, non seulement la réalité sociale ne se laisse pas
facilement identifier et interpréter mais également en tant que science humaine, la sociologie
est confrontée à cette proximité entre sujet et objet.
Ainsi, pour être reconnue en tant que science et produire un savoir scientifique sur le social, la
sociologie s’est dotée de méthodes d’investigation empirique : les méthodes quantitatives et les
méthodes qualitatives.
La sociologie produit ainsi deux types de données, et les analyse, grâce à ces deux méthodes
mais elle a aussi une ambition théorique de compréhension et d’explication du social.

Les méthodes quantitatives et qualitatives se distinguent de par leurs objectifs, outils et


techniques de collecte et types de données produites. Mais loin d’être antagoniques, ces deux
méthodes sont en réalité complémentaires dans une recherche.

Ainsi, certaines recherches utilisent, à la fois, les méthodes quantitative et qualitative, en


laissant les deux se compléter dans les points forts de l'une ou de l'autre, d’autres privilégient
l’une plutôt que l’autre, d’autres encore utilisent la méthodologie qualitative comme phase
exploratoire d’une recherche quantitative.
Mais le choix de la méthode dépend du problème que l’on veut traiter, des objectifs visés et des
résultats attendus.

1.1. Les méthodes quantitatives


Objectifs
L’objectif des méthodes quantitatives est de dénombrer, fournir des informations chiffrées,
statistiques, quantifiables, afin d’étudier des comportements, des attentes, des opinions auprès
d’un échantillon représentatif et d’expliquer des phénomènes sociaux à partir de la mise en
relation de ces données.
Les résultats obtenus aspirent à la généralisation à l’ensemble de la population. Ce sont les
méthodes quantitatives qui permettent de calculer des taux, par exemple, de scolarisation ; de
répartition d’un phénomène selon des variables telle que le sexe, etc.
En somme, l’approche quantitative décrit et explique les phénomènes sociaux au moyen
d’indicateurs et d’agrégats au niveau de la population.
 Outil de collecte :
Le questionnaire, constitué de plusieurs questions, ouvertes, fermées avec réponses uniques ou
choix multiples, et standardisées, c’est-à-dire qu’elles sont identiques pour tous les répondants.
Le questionnaire est administré à un échantillon, selon différentes méthodes. L’échantillon est
constitué à partir d’une base de sondage, il s’agit d’une partie représentative de l’ensemble de
la population étudiée. L’échantillon doit avoir la même structure que la population entière.

 Analyse des données quantitatives :


Une fois recueillies sur le terrain, les données quantitatives sont traitées à l’aide de logiciels tels
que Sphinx ou SPSS et représentées sous formes de tableaux ou et de graphiques. Leur analyse
consiste à une mise en relation de variables quantifiées, la comparaison des unités pour définir
des lois tendancielles, par exemple.

Mais lorsque le chercheur s'interroge sur un phénomène unique ou sur des trajectoires
biographiques, par exemple, ce sont les méthodes qualitatives qu’il utilise.

1.2. Les méthodes qualitatives


 Objectif
L’objectif principal des méthodes qualitatives est de recueillir les perceptions, les opinions,
motivations, attitudes, etc., des personnes interrogées sur le phénomène étudié et de décrire des
lieux ou activités particulières.
. Elles visent une compréhension plus fine du phénomène étudié. Les méthodes qualitatives
permettent ainsi d’étudier de façon approfondie, sur un nombre limité, toutes les dimensions du
phénomène social qu’on étudie.
Elles consistent ainsi à collecter et analyser des données non chiffrées et non quantifiables afin
de comprendre et d'expliquer des pratiques, des processus, des trajectoires, des représentations,
des acteurs interrogés.
Elles permettent de produire un discours, du verbatim, à partir d’une d’une démarche
compréhensive.
Mais contrairement au méthodes quantitatives, leur but n’est pas la généralisation ni la
représentativité mais plutôt de comprendre en profondeur les faits étudiés.

 Techniques qualitatives de collectes de données


Trois principales techniques de collecte sont utilisées dans les méthodes qualitatives : la
recherche documentaire, l’entretien et l’observation.
Il existe deux types d’entretien : individuel et collectif. De même, on note trois niveaux de
directivité d’un entretien :
 Entretien non directif : le chercheur intervient très peu, il donne juste un thème et laisse
l’enquêté en discuter librement ;
 Entretien directif : il est conduit par le chercheur et les réponses sont générales courtes) ;
 Entretien semi-directif : le plus utilisé dans la recherche en sociologie, il est à la fois
libre et structuré. Le chercheur pose des questions à partir d’une grille préparée au
préalable mais qui n’est pas forcément suivi dans l’ordre des thèmes et des questions.
De même, en fonction des réponses de l’enquêté, le chercheur utilise des questions de
relance pour approfondir et ou parler d’un aspect qui n’était pas prévu dans la grille.

Quant à l’observation, elle peut se faire à découvert, dans ce cas, le chercheur avertit les
enquêtés, ou incognito, appelée aussi immersion, dans ce cas, il observe la population étudiée
à son insu et est présente parmi elle sous un faux prétexte.
L’observation peut être participante, le chercheur est présent et participe à la situation
observée. L’observation peut aussi se faire plus en retrait, dans ce cas le chercheur se met en
retrait de la situation observée.

 Outil de collecte en méthodes qualitatives


Deux principaux outils, le guide (ou grille) d’entretien ou d’observation.
Grille (ou guide) d’entretien est constituée d’une liste de questions ouvertes organisées autour
de thèmes et les réponses attendues de l’enquêté doivent être libres et développées.
De même, contrairement au questionnaire, où les questions sont standardisées, dans un guide
d’entretien, elles peuvent être adaptées au répondant.
La grille, ou guide, d’observation est constituée principalement de thèmes qui permettent au
chercheur d’observer la situation étudiée.

En somme, les méthodes quantitatives et qualitatives permettent de produire des types de


données différents pour répondre à des questions différentes. Si les premières visent la mise en
relation de données statistiques à un niveau macro en vue d’expliquer des phénomènes sociaux,
les secondes privilégient la compréhension et l’analyse fine des motivations, attitudes,
trajectoires et des représentations, etc.

Conclusion générale
Comme toute science, la pensée sociologique est plurielle la sociologie, cependant, il faut noter
que ce trait se pose avec plus d’acuité dans les sciences humaines et sociales.
Elle s’intéresse aux faits de l’individu (chercheur compris) et de la place qu’il s’est construit au
sein de la société.

Mais la manière de penser la société, ses conflits, ses inégalités, son fonctionnement, sa
structuration, le lien social qui le sous-tend, etc., a fortement évolué en sociologie depuis
quelques décennies. Par exemple, alors que l’approche en termes de classes a longtemps
prédominé, la sociologie est de plus en plus attentive à d’autres constructions sociales de la
différence qui sont au fondement de rapports de pouvoir entre groupes sociaux : parmi
lesquelles, le genre.

Par ailleurs, la sociologie, théorie mais aussi pratique, connaît une évolution dans ses pratiques
de recherche et ses métiers.

Ainsi, la pratique et la théorie sociologique dépendent fortement du contexte culturel et des


demandes sociales du moment et de la société concernant. De ce fait, bien que l’essentiel de la
pensée sociologique porte sur le monde moderne et les changements de la société occidentale,
il me semble opportun de réfléchir de sa place et de son intérêt pour une société comme notre
société sénégalaise qui est en pleine mutation et sujette à de nombreux bouleversements
sociaux, politiques, culturels, économiques.

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