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INTRODUCTION

Le management est aussi vieux que le monde. Mais, il est relativement récent sous sa
forme élaborée. En effet, depuis toujours, les hommes s’organisent pour faire face aux défis
leur lancés par la nature et la vie en commun. Certains auteurs pensent que, sur le plan formel,
le beau-père de Moïse, dont parle la Sainte Bible, est un des précurseurs lointains du
management : il lui a appris à organiser ses hommes et à leur déléguer le pouvoir.

A mesure que le machinisme gagnait de l’ampleur et que la technologie se


développait, il apparaissait des penseurs qui élaboraient des principes d’organisation et de
direction des hommes pour réaliser des tâches souvent très pénibles. Ces précurseurs ne sont
pas repris dans ce cours. Cependant ils ont bel et bien existé.

Ce cours, qui a pour but de présenter les différentes théories du management, sous sa
forme moderne, est organisé en sept chapitres. Le premier définit le management, en montre
l’importance et le rapport avec les autres disciplines. Celles-ci, considérées comme
scientifiques, lui apportent un précieux concours. Il répond en outre à la question souvent
posée par bien des gens, y compris les étudiants, et aussi controversée, de savoir si le
management est une science ou pas.

Le deuxième chapitre entre dans les considérations concernant le manager. Il répond à


la question : Qui peut être considéré comme manager ? Il dégage ses profils et ses rôles qui
ont été présentés par différents chercheurs et penseurs, etc.
Le troisième chapitre porte sur les théories (ou écoles) traditionnelles du management,
fait une analyse comparative de ces écoles et présente deux autres théories n’appartenant pas
aux écoles traditionnelles.
Vient enfin la suite de chapitres portant sur ce que les auteurs nomment le processus
du management, que Terry et Franklin ont baptisé « fonctions fondamentales » du
management, à savoir la planification, l’organisation, l’impulsion et le contrôle.
La méthodologie adoptée est très active. Cela signifie qu’il faut travailler le texte,
réaliser les travaux qui seront demandés au fur et à mesure de l’avancement du cours, lire des
livres et venir exposer les synthèses ou tout simplement présenter le titre, la table des
matières, etc Montons maintenant à bord du bateau managérial. A chacune et à chacun, nous
souhaitons un bon voyage.

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CHAPITRE 1 

LE MANAGEMENT : DEFINITION, IMPORTANCE ET RAPPORT AVEC LES


AUTRES DISCIPLINES

Objectifs
A l’issue du chapitre, vous devriez être capable de :
- définir d’au moins une manière le management ;
- faire ressortir les ressemblances entre les définitions rapportées ;
- commenter la définition de B. Galambaud
- faire ressortir l’importance du management ;
- citer les sciences qui apportent leur concours au management et faire voir cet apport.

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1.1. Définition

Le mot management suscite des représentations diverses dans le public. De ce fait,


nous en trouvons diverses définitions en circulation. Nous avons retenu celle de Terry et
Franklin (1985, p. 4), celle que donnent Robbins et De Cenzo (2004, p. 29), complétées par
celle de Levitt. La définition fournie par Terry et Franklin est celle-ci : « Le management est
un processus spécifique consistant en activités de planification, d’impulsion, d’organisation
et de contrôle visant à déterminer et à atteindre des objectifs définis grâce à l’emploi d’êtres
humains et à la mise en œuvre d’autres ressources ». Celle que proposent Robbins et De
Cenzo est la suivante : « Le terme management désigne le processus par lequel des résultats
sont obtenus de façon efficace et performante via et avec autrui ». La définition de ces auteurs
part de ce qu’écrit Bernard Galambaud, « Manager, c’est transformer le travail des autres en
performance durable.»

Le management est un processus, c’est-à-dire un développement dans le temps de


phénomènes consécutifs qui marquent chacun une étape. L’ensemble de ces phénomènes
forme une sorte de « chaîne » fermée. La définition en termes de processus implique que le
management est une activité continue. Mais quelles sont les étapes qui forment ce processus ?
Nous avons : planifier, organiser, diriger (impulser, commander) et contrôler. Il ne faut
toutefois pas perdre de vue que selon la phase du processus de production où se trouve
l’entreprise, ces étapes peuvent ne pas se poursuivre ainsi.

Les termes efficacité et performance sont souvent utilisés l’un pour l’autre, pourtant
ils présentent des nuances. La performance renvoie à la capacité de faire les choses bien et se
rapporte surtout à la relation entre ressources utilisées et résultats obtenus (ou rendement) :
une production accrue avec les mêmes facteurs suppose un gain de performance, tout comme
un même rendement avec moins de ressources. Dans ce sens, le management consiste à
minimiser le coût des ressources.
La performance se réfère au fait d’effectuer une tâche correctement, à la maîtrise de la
relation entre les ressources et le rendement, le tout en cherchant à minimiser le coût du
processus.

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L’efficacité se rapporte à l’atteinte des objectifs. En d’autres termes, l’efficacité est


une mesure se référant au fait d’effectuer les tâches qui s’imposent, d’atteindre des objectifs.

Léopard s’est donné comme objectif de remporter la CAN. Elle a dominé beaucoup
d’autres équipes en 1/8, ¼ et ½ finale. Mais arrivé à la finale, l’Algérie le bas presque
copieusement. Dans ce cas, Léopard a été performant mais pas efficace. Faut-il le blâmer ? A
chacun de vous d’y répondre. Peut-être la solution réside dans l’analyse de la situation :
pourquoi avons-nous réussit là-bas et échoué ici ?

Les deux termes sont interdépendants1 tout en étant distincts : on peut être efficace en
faisant fi des performances. Exemple : Hewlett-Packard a pu mettre au point des toners plus
élaborés pour imprimantes laser en ne tenant pas compte des coûts de main-d’œuvre et
matériels. On peut être efficace sans être performant, c’est-à-dire atteindre des objectifs mais
à des coûts exorbitants. Un management digne de ce nom doit permettre de parvenir à ses fins
(efficacité), mais d’une façon rentable (performance).

Le management a donc pour objectif d’atteindre efficacité et performance.

Revenons à la définition de Galambaud : le manager doit transformer le travail des


autres en performance durable. La phrase est simple et courte, sa réalisation est très difficile.
Les difficultés proviennent de plusieurs facteurs : le manager lui-même : ses compétences, ses
connaissances, ses attitudes, sa personnalité ; les collaborateurs : leurs compétences,
connaissances, attitudes, façon de percevoir les problèmes et situations ; les tâches et les
situations et contextes dans lesquels elles se réalisent, les politiques organisationnelles.
La tâche du manager, quoiqu’excitante, est donc néanmoins complexe et exigeante. Ce
qu’il faut, même si on réussit, c’est d’éviter, autant que faire se peut, l’effet « feu de paille ».
Or, cet effet, semble être la situation ordinaire, « normale » dans bien des cas, si nous
considérons la réalité quotidienne.

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C’est cette interdépendance qui les fait confondre et bien des auteurs tombent dans ce piège. Voici un exemple parmi tant d’autres : « La performance est
une notion passe-partout qui possède de nombreuses significations. Pour le manager, elle renvoie à l’idée de la réalisation effective d’une tâche ou à
l’atteinte d’un objectif. Il s’agit aussi d’un jugement de valeur que la qualité des résultats obtenus. Une lecture naïve de la performance amène à la
considérer comme une mesure objective de l’efficacité et/ou de l’efficience d’une action. » (Barabel et Meier, 2006, p. 345).

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Sur la base de cette conception du management, Terry et Franklin schématisent ce


processus comme suit :

Ressources de base Fonctions fondamentales


Objectifs finals
Les 6 M Le processus de management
Résultats finals

Moyens humains Planification Impulsion


Matières
Machines
Méthodes
Monnaie (capitaux)
Marchés Organisation Contrôle

Fig. 1.1. La signification du management d’après G.R. Terry et S.G. Franklin (1985)

Pour atteindre les objectifs, l’organisation utilise des ressources de base selon un
processus. Même si sur ce schéma les objectifs se trouvent à la fin, tout part de là.

C’est ainsi que Levitt (1978, p. 45) n’hésite pas à dire du management qu’il « consiste
à jauger une situation et à choisir avec soin les objectifs ; à rassembler les moyens et les
ressources ; à concevoir, organiser, diriger et contrôler de manière rigoureuse les activités
nécessaires pour aboutir aux résultats recherchés ; et enfin à animer et à rétribuer ceux qui
font le travail ». Nous retrouvons ici aussi tous les éléments de la définition de Terry et
Franklin.

On parle souvent de la rigueur managériale. La rigueur managériale, selon nous,


dénote la volonté d’aboutir efficacement aux résultats escomptés. La bonne gouvernance dont
on parle tant marque justement ce désir d’arriver aux buts en utilisant au mieux tous les
moyens – financiers, technologiques, humains, etc. – dont on dispose.

Pour en revenir au sens du terme, convenons avec Lussato (1977) que ce terme peut
s’analyser et se comprendre au moins à trois niveaux puisqu’il contient à la fois le « mot-
objet » commandement (relatif à l’action concrète sur les hommes de l’entreprise), le « mot-
outil » organisation (dans son sens restrictif de procédures et techniques d’articulation des
fonctions et des activités), et enfin le « mot-concept » appartenant à la langue théorique :
doctrine désignant l’ensemble de principes qui inspirent l’un et l’autre, et constituent la
charte et la politique de l’entreprise.

Les auteurs du Manuel de gestion (Collectif sous la direction générale de Dayan, 1999,
p. 82) se croient en devoir d’apporter les précisions suivantes : « Remarquons que le français
n’offre pas de traduction correcte à ce mot emprunté à l’anglais. « Gestion » a en effet une
connotation trop quantitative, et « Administration » (pourtant utilisé par les anglo-saxons, par
exemple, dans « Master in Business Administration », le principal diplôme de management
des universités de langue anglaise) est trop marqué par sa sphère publique. Pour autant, on

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peut rappeler que « Management » est un emprunt au vieux français « Ménagement » qui
jusqu’au XVIIIe siècle signifiait « Avoir la responsabilité de quelque chose dont on n’est pas
propriétaire ». Ainsi, il est bien plus correct de prononcer « Management » à la française, et
non en prenant un pseudo-accent anglo-saxon (Mènèdjemeunt) » Et ceci nous renvoie aux
situations courantes où se trouvent habituellement les managers : ils ne sont pas propriétaires,
mais gérants (ou gestionnaires, peu importe). Dans ce sens, ils rendent compte à…

1.2. Importance du management

Sur l’importance du management, Levitt possède la ferme conviction que le facteur


primordial de la réussite de l’heure industrielle n’est pas la technologie, mais le management.
Le management est par excellence la caractéristique fondamentale de la révolution
industrielle. C’est lui qui constitue le moteur principal du progrès tel que ce dernier est
généralement défini… Selon ce théoricien, l’apport original de Henry Ford n’est pas d’avoir
inventé la chaîne de montage d’automobiles en série ; la réussite de H. Ford n’est pas
technologique : elle concerne la gestion, l’application du raisonnement à la fonction qui est le
propre du management de haute qualité. Beaucoup d’autres auteurs souscrivent volontiers à
cette façon de concevoir le management.

En tentant de répondre à l’importance que revêt l’enseignement du management


comme discipline, Robbins et De Cenzo écrivent : « En tant que matière d’enseignement ou
thème de formation continue, le management offre une vision intéressante de nombreux
aspects organisationnels du quotidien, et mérite toute sa place dans un cursus. Tout d’abord,
nous sommes tous directement intéressés par l’amélioration du mode de gestion des
organisations, sachant que nous avons chaque jour affaire à elles. (…) Le management mérite
également d’être étudié pour une autre raison : la vie professionnelle constitue un monde où
les compétences managériales constituent une ressource – clé, que l’on occupe ou non un
poste à responsabilité. En effet, il n’est nul besoin de vouloir devenir manager pour étudier le
mangement. Car le fait même d’entrer dans le monde professionnel, que ce soit dans le
secteur privé, public ou associatif, conduit chacun à s’intégrer tôt ou tard dans une
organisation. A ce titre, il apparaît essentiel, en toutes circonstances, d’apprendre à composer
efficacement avec les autres acteurs, qu’ils soient vos supérieurs, vos collaborateurs ou vos
subordonnés. Quelle que soient votre position, vous disposerez ainsi de clés supplémentaire
vous permettant de décrypter le comportement des managers et donc de mieux comprendre les
rouages internes de l’entreprise. » Ce qui est vrai sur le plan de l’enseignement du
management pour chacun, l’est aussi sur le plan du management en tant que domaine
d’activité professionnelle.

1.3. Management, science ou art ?

On se demande souvent si le management est une science ou un art. On peut discuter


très longuement sur ce qui différencie science et art, mais cela n’est pas notre propos. Ce qu’il
faut dire ici est que cette question semble diviser les théoriciens. Certains croient
fermement que le management est une science (Blake et Mouton, 1985), d’autres pensent
qu’il est un art puisant à des sciences (Serraf, 1985) et d’autres enfin le tiennent à la fois
pour une science et un art (Terry et Franklin, 1985).

Il n’est pas question pour nous de discuter de ces différentes positions. Tout ce que
nous souhaitons est qu’à mesure que l’étudiant avancera dans la connaissance du management

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- qui est aujourd’hui un très vaste domaine de la connaissance humaine – par la formation,
la lecture et éventuellement la pratique, il arrive à se former sa propre opinion sur la
question.

Quoi qu’il en soit, il faut avoir présent à l’esprit que le management est important tant
dans la vie personnelle que sociale. Nous venons de le voir.

1.4. Rapports entre le management et les autres disciplines

Les quelques matières suivantes de sciences humaines et sociales peuvent avoir un


impact direct sur les pratiques de management. Certaines théories et pratiques utilisées par le
management sont issues d’elles. C’est pourquoi le mangement apparaît comme un domaine
interdisciplinaire.

1.4.1. Anthropologie

L’anthropologie se définit comme l’étude des sociétés, expliquant le fonctionnement


des êtres humains et leurs activités. Une distinction peut être faite entre l’anthropologie
sociale, qui cherche à établir les lois de la vie en société sous l’angle du fonctionnement des
institutions et des organisations et l’anthropologie culturelle, qui accorde une importance
particulière aux objets ainsi qu’aux phénomènes de constitution et de transmission de la
culture. Le travail des anthropologues en termes de culture et d’environnement a par exemple
permis à des managers de mieux cerner les différences de valeurs, principes, d’attitudes et
de comportements entre les habitants de divers pays et travaillant dans des
organisations distinctes ; les concepts de ces disciplines sont de même particulièrement
utiles à la compréhension des cultures organisationnelles.

1.4.2. Economie

Elle porte sur l’affectation et la répartition des ressources rares. Elle aide à saisir
l’évolution de la conjoncture et le rôle de la concurrence et des économies de marché dans un
contexte global. Par exemple, pourquoi la plupart des chaussures de sport se fabriquent-elles
en Asie ? Pourquoi le Mexique compte-t-il désormais plus d’usines automobiles que Détroit ?
Les économistes apportent des réponses à ces questions lorsqu’ils débattent de l’avantage
concurrentiel. De la même façon, comprendre le libre – échange et le protectionnisme est
essentiel à tout manager se positionnant sur le marché mondial. Par ailleurs, la science
économique a développé, ces dernières années, de nouvelles approches tout à fait pertinentes
d’un point de vue organisationnel, en particulier autour du rôle des croyances sociales, et
surtout de la confiance dans la régulation des marchés et des comportements de coopération
des acteurs entre eux.

1.4.3. Philosophie

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Les cours de philosophie examinent la nature des choses, notamment l’éthique et les
valeurs. L’éthique établit des normes s’appliquant à la conduite humaine et porte directement
sur la raison d’être des organisations. Elle s’interroge de même sur les comportements qui leur
sont adaptés. L’éthique de la liberté (Locke) pose par exemple comme droits légaux la liberté,
l’égalité, la justice et la propriété privée ; l’éthique protestante (Calvin) encourage les
individus à être économes, travailler dur et réussir ; enfin, l’éthique du marché (Adam Smith)
défend que seuls le marché et la concurrence, et non l’Etat, doivent intervenir comme
régulateurs de l’économie. Ces systèmes éthiques ont dessiné en partie les organisations
d’aujourd’hui en offrant une base d’autorité, en associant des récompenses aux performances
et en justifiant l’existence des affaires et d’une structure corporative. Mais la philosophie, en
tant que démarche et ensemble d’outils d’interrogation sur le monde, constitue aussi pour le
manager un champ de réflexion essentiel touchant aux finalités de son action, à sa raison
d’être en tant que sujet, dans une organisation elle-même porteuse de signification pour celles
et ceux qui y travaillent.

1.4.4. Sciences politiques

Ce terme générique recouvre une discipline carrefour, ou plutôt la rencontre de


plusieurs disciplines (sociologie, psychologie, anthropologie) autour d’un centre d’intérêt
commun, le politique, défini comme l’étude du comportement des individus et des modes de
régulation des groupes dans un environnement institutionnalisé de pouvoir. D’un point de vue
organisationnel, l’apport de cette discipline apparaît essentiel pour la compréhension des
concepts clés tels que la structuration et la résolution des conflits, l’attribution de pouvoir, ou
plus généralement la compréhension des stratégies organisationnelles, tant d’un point de vue
individuel que collectif.

1.4.5. Psychologie

Science cherchant à évaluer, expliquer et parfois modifier le comportement des êtres


humains. Les psychologues s’attachent à comprendre la nature des comportements et des
interactions des individus entre eux et peuvent en cela éclairer les managers sur la diversité
humaine. Aujourd’hui, les dirigeants sont confrontés à une clientèle des plus variés, mais
aussi à un personnel éclectique. Tout le travail d’approche des psychologues (selon le genre et
la culture) permet aux managers de mieux saisir les besoins de leurs clients et de leurs
employés, en constante mutation. Les cours de psychologie servent bien évidemment à mieux
assimiler les notions classiques de perception, de motivation, d’autorité, de confiance, de
conflit, de communication, etc. Mais ils servent aussi, surtout du fait des avancées récentes en
psychologie cognitive, à mieux faire comprendre au manager comment ses collaborateurs
traitent l’information et construisent à partir d’elle le monde dans lequel ils agissent. Les
interactions entre comportement, univers intérieur et environnement, sont au cœur de la
problématique sociocognitive appliquée au monde du travail et des organisations.

1.4.6. Sociologie

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L’objet de cette discipline essentielle du champ des sciences humaines est l’étude des
interactions sociales et culturelles entre acteurs individuels et collectifs. Contrairement à la
psychologie, dont l’objet premier est l’individu, la sociologie oriente sa réflexion sur les
groupes humains, et cherche en priorité à comprendre les déterminants collectifs des attitudes
et comportements des acteurs et des groupes. Il s’agit de l’étude de personnes par rapport à
leurs semblables et certains concepts ou problématiques de la sociologie apparaissent comme
importants pour les managers. En quoi l’évolution de la société (globalisation, diversité
culturelle accrue, nouvelle place des genres, changement du mode de vie familiale) affecte-t-
elle les pratiques organisationnelles ? Quel est l’impact des méthodes de scolarisation et des
tendances d’enseignement sur les compétences des futurs employés ? En quoi les
changements démographiques modifient le marché du travail et la clientèle ? A quoi
ressemblera la société de l’ère de l’information d’ici à dix ans ? Les réponses à ce type de
questions – essentiellement sociologiques dans leur esprit – seront déterminantes pour opérer
des choix stratégiques.

Nous rencontrerons beaucoup de ces apports tout au long de ce cours, et en particulier


au chapitre trois consacré aux différentes théories (ou écoles) managériale

CHAPITRE 2 

LE MANAGER : TYPES, ROLES ET PROFILS

Objectifs

A l’issue de ce chapitre, vous devriez être capable de


- répondre à la question « qui est manager ? »
- décliner les différents types de managers avec leurs spécificités
- montrer leurs rôles selon les auteurs considérés
- présenter leurs profils, soit en termes de compétences, soit en partant d’autres critères.
- présenter les différents styles de personnalités dégagés par la recherche.

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2.1. Qui est manager ?

Bien qu’il ne soit pas facile de répondre de manière concise, à cette question, il nous
semble que deux réalités saillantes se dégagent de la pratique et des théories du management :
(1) le manager est un spécialiste du management ; (2) le manager est tout cadre qui a
une responsabilité, c’est-à-dire qui exerce un certain leadership, une autorité, sur les hommes
notamment. Nous avons vu que « manager, c’est transformer le travail des autres en
performance durable » (Bernard Galambaud). Eh bien, toute personne dans une organisation
qui a cette responsabilité peut être considérée comme manager. Nous y reviendrons en long et
en large dans les pages qui suivent.

2.1.1. Le manager spécialiste

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Le mot manager désigne ici un professionnel qui, généralement, tient un rôle de


conseil : il est un conseiller en management. On le définit comme suit : « Le manager est un
dirigeant qui a acquis une formation spécifique pour animer et mener une équipe de
direction, pour assurer une coordination et un contrôle à tous les échelons de
l’organisation. Le terme a un sens plus complet que directeur ; il implique un
professionnalisme qui le distingue de la position du patron-propriétaire de l’entreprise »
(Serraf, 1985, p. 144).

« Le manager, contrairement au directeur qui est en prise directe avec la réalité et ne
cherche guère à élaborer des théories, ni des techniques, ne se borne pas à intervenir dans la
vie de l’entreprise, mais l’étudie, et en tire des principes d’action et d’organisation. Il est à la
fois un praticien et un théoricien. De l’organisateur il diffère en ce que celui-ci n’intervient
dans l’accomplissement du travail que pour l’étudier ou en proposer les modifications »
(Lussato, 1977).

Ce type de manager est ainsi défini par l’Encyclopédie Encarta :« personne qui gère
les intérêts et la carrière d’un artiste ou d’un sportif en organisant des spectacles, des concerts
ou des matchs ». Ainsi, Fally IPUPA peut dire : « Mon manager est allé en France » ou Koffi
Olomide : « Mon manager m’a conseillé de laisser tomber… » Vous pouvez aussi, selon vos
activités dominantes du moment, avoir votre manager.

2.1.2. Le manager leader

Cette conception large considère que tout cadre investi d’un pouvoir de supervision
est un manager. Ainsi, c’est toute « personne qui a la responsabilité d’une unité de
l’organisation. Cette autorité formelle lui confère une position statutaire d’où découlent
les trois rôles interpersonnels » (Mintzberg, 1984).
Goguelin (1990) abonde dans le même sens quand il propose que « tous les membres
de la hiérarchie sont à la fois des managers, au sens où ils disposent d’un pouvoir qui leur
permet d’être des auteurs et acteurs de leurs propres décisions, et des managés au sens où ils
réalisent dans leurs actes de managés-acteurs la mise en œuvre des décisions des autres ».

« Tout au long de la hiérarchie passent les chaînes de l’autorité. Celle-ci, quelle soit
issue d’un pouvoir de droit, de fait, de reconnaissance, voire d’un pouvoir moral, confère à
chaque manager le droit de commander. Le commandement traduit l’exercice de l’autorité,
elle-même expression de pouvoir » (Goguelin, 1990).

Cette conception est de plus en plus admise aujourd’hui au point que l’impression que
l’on peut avoir est qu’elle tend à supplanter l’autre. Dans ce sens, les managers occupent les
rangs s’étendant d’agents de maîtrise aux cadres supérieurs de l’organisation.

Robbins et De Cenzo (2004, p.28), en répondant à la question « Quels titres donne-


t-on aux managers dans leur organisation ? », montrent qu’ils adhèrent à la conception
large du manager. Ils écrivent à ce propos : « Bien que faciles à repérer, les managers
possèdent des titres très différents. Les agents de maîtrise correspondent généralement
aux surveillants, chefs d’équipe ou coordinateurs. Leur mission consiste à gérer les
activités quotidiennes des employés. Les cadres intermédiaires occupent quant à eux des
niveaux de management oscillant entre le terrain (…) et les hautes sphères. Ils dirigent
d’autres managers, voire des employés, et se chargent de traduire les objectifs de la
direction en données exploitables par les responsables et collaborateurs de niveau

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inférieurs. Au sein des organisations, les cadres intermédiaires sont des chefs d’agence
ou de département, des chefs de projets, des responsables d’unité, des chefs de district
ou de service.

A la pointe de la pyramide se trouvent les cadres dirigeants. Ils sont chargés de


prendre des décisions sur la direction de l’organisation et d’instaurer des règles s’appliquant à
tous les membres. Les hauts dirigeants sont des vice-présidents, P.-D.G., présidents
honoraires, directeurs généraux ou encore membres du comité de direction ».

Terminons par les considérations que nous proposent Barabel et Meier (2006, p.164).
Ces auteurs nous informent que le manager «se caractérise par une mission principale qui
le différencie des autres membres de l’organisation : celle de diriger et de coordonner [c’est
nous qui mettons en gras] un ensemble d’individus sous sa responsabilité. Etre manager, c’est
en premier lieu disposer d’une autorité de commandement. Plus précisément, un manager a en
charge la gestion et le développement d’équipes de travail, en vue de réaliser des objectifs de
performance et d’efficacité fixés par l’organisation et obtenus pour partie par d’autres
personnes que lui. Selon Spielman (1999), la notion de responsabilité (notamment de résultat)
est la frontière délicate qui sépare le manager et l’employé [le mot employé désigne ici une
catégorie professionnelle. Ajouté par nous]. Le manager est celui dont la responsabilité est la
plus engagée vis-à-vis des résultats à obtenir. Ainsi, le terme manager n’implique pas en soi
de position hiérarchique particulière. A n’importe quel échelon de l’organisation,
certains salariés occupent une fonction managériale. En revanche, être manager nécessite
d’avoir obtenu une délégation de pouvoir de la part du chef d’entreprise sur la partie de
l’entreprise pilotée ».

Ce terme tend à remplacer celui de cadre.

Nous nous occupons dans ce cours de ce manager dont la diversité et les qualificatifs
qui lui sont liés ne cessent de croître et de se multiplier.

2.2. Les différents types de managers

Il existe, comme nous l’avons vu avec Robbins et De Cenzo ci-dessus, une multitude
de fonctions de manager dans les organisations (membre de la direction, chef de division,
directeur de département, chef d’équipe…). Cependant, cette population est loin d’être
homogène. Elle peut être différenciée sur deux principaux axes. Le premier axe porte sur la
position du manager dans la structure. Il convient en particulier de savoir si le manager se
trouve dans la ligne hiérarchique (manager hiérarchique) ou s’il dirige une équipe projet
(manager projet). Le deuxième axe concerne le niveau de responsabilité du manager au sein
de la structure.

On distingue généralement trois niveaux de managers : le manager de proximité, le


manager intermédiaire et enfin le manager dirigeant qui appartient souvent à la direction
générale. Le manager de proximité encadre des subordonnés directs. Une partie des managers
intermédiaires a comme particularité de gérer des équipes et sous-unités de l’organisation.
Enfin les dirigeants ont un rôle essentiellement tourné vers la mobilisation de ressources
stratégiques, l’animation d’équipes composites (associant des cadres de l’entreprise et des
cadres externes), ainsi que vers la gestion des savoirs collectifs et des réseaux productifs.

2.2.1. Le manager de proximité (M1)

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Le manager de proximité a comme mission de gérer au quotidien une équipe (réaliser


les plannings, contrôler les activités…). Aussi appelé manager de premier niveau, il anime
hiérarchiquement des équipes ou des groupes de travail ayant acquis, à des degrés différents,
une certaine autonomie dans la réalisation de leurs activités. De par sa situation dans
l’entreprise, le manager de premier niveau est proche du lieu de production ou de
commercialisation. Il doit à la fois prendre en compte les besoins des opérateurs pour négocier
les moyens nécessaires auprès de la direction et traduire les objectifs stratégiques fournis par
le siège en décisions opérationnelles.

Du fait de sa position dans la structure (position intermédiaire entre l’équipe et la


hiérarchie), le manager de proximité est soumis à de nombreux conflits de rôles. Le premier
tient à la nécessité de gérer à la fois des rôles techniques et managériaux et à la tentation de
privilégier les premiers au détriment des seconds. Le second conflit est lié à la nécessité de
contrôler l’activité de ses équipes (objectifs de productivité à atteindre, respect des normes,
…) tout en laissant de l’autonomie aux acteurs et en favorisant la prise d’initiative (logique
de développement des ressources humaines). Le troisième conflit réside dans l’obligation de
concilier logique économique (résultats, performance, coûts, délais) et logique sociale
(respect de la législation et des normes conventionnelles) par nature. En effet, le manager
doit parfois enfreindre les règles légales pour atteindre ses objectifs. De même, il est souvent
chargé d’annoncer les décisions difficiles (licenciement, restructuration, fusion), alors qu’il vit
au quotidien avec son équipe et partage la préoccupation de ses membres. Ces conflits de rôle
rendent la positon de manager de proximité extrêmement difficile et le conduit à consacrer
l’essentiel de son temps à des activités de régulation de problèmes d’organisation (plannings,
affectation des ressources, gestion des aléas, …), de régulation des problèmes humains (stress,
accident du travail, démotivation, insatisfaction) et à la production d’arrangements (gestion de
l’urgence, gestion de crise).

2.2.2. Le manager intermédiaire (M2)

Les managers intermédiaires apparaissent dans les entreprises, à partir du début du


XXe siècle. La forte croissance des firmes conduit ces dernières à multiplier les niveaux
hiérarchiques entre le dirigeant et les employés pour pouvoir gérer des structures de plus en
plus complexes. Alors que la littérature sur les managers intermédiaires est assez abondante
en gestion des ressources humaines (définition de leurs missions, évolutions des
responsabilités) et en sociologie (statuts, identités, crises…), les auteurs en stratégie ont assez
fréquemment ignoré ce niveau de management pour se centrer sur les équipes de direction (cf.
les travaux de Fayol, Barnard ou Mintzberg notamment). Il en ressort que le cadre
intermédiaire se caractérise d’abord par sa position dans une organisation plutôt que par ses
rôles et ses missions. Ainsi, pour Dopson et al. (1992), les managers intermédiaires sont
« tous les managers en dessous de l’équipe de direction et au-dessus du premier niveau de
supervision » alors que Thakur (1988) précise qu’ils se situent « à un niveau en dessous du
vice-président et deux niveaux au-dessus du manager de première ligne ». De fait, ils
représentent la grande majorité des managers. Dans les entreprises, les emplois occupés
portent comme intitulé des titres aussi variés que responsable commercial, directeur d’unité,
directeur régional, responsable d’une division, directeur de filiale ou d’une zone
géographique. Si ces définitions sont utiles, elles situent cependant le manager uniquement
sur un plan vertical.

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Ce qui semble être commun à l’ensemble des managers intermédiaires est le fait
d’avoir en charge la responsabilité d’équipes élargies ou d’une partie de l’organisation
(département, projet, unité, service…) dont il découle le fait de devoir mettre en œuvre
des décisions stratégiques, d’avoir des obligations de résultats (garant du succès ou
responsable de l’échec de l’entité ou du groupe géré) et de devoir gérer un ensemble de
ressources humaines et matérielles (négocier ses moyens avec ses supérieurs et gérer
l’allocation).

Depuis quelques années, certains auteurs insistent sur le fait que le manager
intermédiaire ne doit plus se contenter d’être un simple exécutant, ou un relais de transmission
(risque de démotivation ou de résistance) et qu’il doit au contraire développer son rôle de
stratège (Floyd et Wooldrige, 1994). Le middle manager (autre nom de manager
intermédiaire) se vit de plus en plus comme quelqu’un qui construit des projets, prend des
initiatives et noue des relations avec l’extérieur. En effet, du fait de sa proximité avec le
terrain, le manager intermédiaire peut germer des stratégies émergentes, identifier des signaux
faibles de l’environnement ou encore adapter des règles pour coller au marché.

De même, d’autres travaux insistent sur son rôle d’intermédiaire « inter-


organisationnel » entre l’organisation et l’environnement extérieur. En effet, le manager
intermédiaire se trouve souvent à la frontière de l’organisation et de l’environnement, ce qui
nécessite pour lui de réaliser un arbitrage permanent avec des systèmes de valeurs et plusieurs
finalités (Payaud, 2003).

Le métier de management intermédiaire tend donc à s’enrichir (développement de


nouvelles compétences), alors que dans le même temps de nombreuses études constatent une
réduction des effectifs. Il en résulte une augmentation importante des pressions et du stress
professionnel. Ainsi, Livian et Bourgoyne (1997) dans un ouvrage consacré aux managers
intermédiaires en Europe dressent un portrait d’une population dans une situation difficile.
Pris en tenaille entre les directives ambiguës des dirigeants (décalage important entre les
discours véhiculés et les contraintes quotidiennes subies) et les pressions des acteurs
opérationnels (loi du terrain), ces managers subissent un stress important alors même qu’ils
manquent généralement de reconnaissance sociale et symbolique pour leurs rôles et missions
réalisés.

2.2.3. Le manager dirigeant

Les dirigeants encadrent généralement des équipes élargies composées de managers


(d’où le terme parfois de managers des managers). Comme les autres managers, ils exercent
une activité de pilotage stratégique et opérationnelle mais, à la différence de ces
derniers, ils ne sont pas soumis à une hiérarchie fonctionnelle mais davantage à une
hiérarchie politique, économique et financière (Bonnet et Bonnet, 2003). Ils sont en
charge d’une partie ou de l’intégralité de l’organisation (groupe, division, filiale, zone
géographique, pays, activité) pour laquelle ils sont responsables des résultats. En général,
les dirigeants participent à la formulation de la stratégie de l’entreprise et s’investissent
fortement dans leur travail (nombre élevé d’heures travaillées, déséquilibre vie privée – vie
professionnelle…).Ainsi, selon Bournois (1990), les dirigeants se distinguent des managers
dans la mesure où ils ont une délégation d’autorité beaucoup plus large que les autres de la
part de leur employeur.

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Selon Bournois et Roussillon (1998), les managers dirigeants possèdent comme


points communs de constituer les comités de direction éventuellement élargis, d’être
investis par le conseil d’administration ou le président d’une responsabilité dans le
développement stratégique de l’organisation, de bénéficier d’un haut degré d’autonomie
et d’une réelle capacité de décision et enfin de relever d’un mode de désignation et de
rémunération spécifique. Ils correspondent, pour les grandes entreprises, aux niveaux
hiérarchiques n-1 et n-2 par rapport au président. Dans les structures moyennes, cette
population correspond au comité de direction. Dans les petites structures, seul le chef
d’entreprise correspond à cette appellation avec quelques spécificités telles que le fait de
cumuler bien souvent pouvoir actionnarial et management opérationnel de l’entreprise.

Le PDG occupe une place à part dans la structure car il incarne le dernier niveau
hiérarchique de l’organisation. Dans une étude, Barabel et Meier (2002) ont montré que du
fait de sa position, un PDG a un certain nombre d’obligations liées à la satisfaction de
l’ensemble des différentes parties prenantes de son entreprise. Il doit en particulier répondre
aux exigences des actionnaires toujours plus importantes, résister à la pression des
concurrents qui exigent l’entreprise à repenser en permanence son métier et ses choix
stratégiques, répondre aux exigences des clients surinformés et volatiles, fédérer les
partenaires autour du projet d’entreprise, attirer et fidéliser les meilleurs salariés devenus
nomades, intégrer dans la stratégie les préoccupations sociétales, prendre en compte les
contraintes politiques et institutionnelles. Face à ces contraintes, le PDG prend souvent
l’allure d’un véritable équilibriste mi-stratège/mi-opportuniste cherchant en permanence à
concilier des valeurs et des logiques contradictoires, tant en termes d’horizon temporel qu’au
niveau de la finalité des actions engagées. Ainsi, le travail d’un PDG consiste à chaque instant
à maximiser la satisfaction des acteurs clés dont la pression exercée est la plus forte, tout en
minimisant l’insatisfaction des autres parties pour qu’ils poursuivent la collaboration. Les
PDG doivent donc faire preuve de « complexité comportementale » afin de jouer des rôles
multiples et contradictoires de façon simultanée.

2.2.4. Le manager de projet

De plus en plus aujourd’hui, dans les pays développés, les entreprises ont recours à un
mode de fonctionnement par projets. A l’origine développées aux Etats-Unis à partir des
années cinquante et cantonnées à certains secteurs et certaines thématiques (recherche et
développement, implantation d’outils de gestion…), les équipes projet sont dorénavant
présentes dans des entreprises de toutes tailles et de tous domaines d’activités. Ces nouvelles
formes organisationnelles sont la résultante d’une part de la nature de plus en plus éphémère
des programmes de l’entreprise (lancement d’un nouveau produit, réorganisation d’un service,
nouvelles prestations…) et d’autre part, de leur nature de plus en plus complexe (nécessité de
mobiliser à un instant des compétences transversales et de multiples ressources et moyens).
Ainsi, des acteurs aux profils, expériences, métiers différents (ressources humaines,
techniques, commercial, finance, production, R&D…) sont amenés à travailler ensemble dans
une structure temporaire (durée limitée) afin d’atteindre des objectifs communs. Un projet
peut s’analyser sous plusieurs dimensions : la dimension méthodologique (utiliser les outils
appropriés), la dimension managériale (manager des individus), la dimension technique
(disposer des expertises nécessaires), la dimension stratégique (accéder aux ressources
pertinentes), la dimension politique (rallier les soutiens nécessaires), la dimension
symbolique (créer du sens) et enfin la dimension dynamique (piloter un processus dans
le temps).

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Dans ces nouvelles formes organisationnelles, la position de chef de projet est


particulière. Elle n’est pas toujours associée à des responsabilités hiérarchiques. Un chef de
projet est avant tout chargé de la coordination d’intervenants internes (membres de l’équipe,
fonctions supports) et externes (clients, prestataires) aux exigences et attentes contradictoires.
Le chef de projet se retrouve au cœur de multiples contradictions et c’est vers lui que
convergent les tensions issues de la diversité des acteurs concernés. De plus, le projet est
caractérisé par la liberté de parole et d’action à travers cette structure qui ne respecte pas les
emplacements hiérarchiques. Il nécessite donc des compétences spécifiques de la part du
manager de les gérer au quotidien. En particulier, le chef de projet doit être capable de
jouer sur plusieurs styles de management et ajuster son discours en fonction de ses
interlocuteurs. Il doit aussi par sa force de persuasion, ses qualités relationnelles et ses
outils de pilotage être capable de garantir le succès du projet (gestion optimale des
délais, des coûts, de la qualité…) en s’appuyant notamment sur les compétences
collectives de membres de son équipe. Enfin, le chef de projet gère une équipe à
géométrie variable (membres permanents, membres ponctuels, intervenants extérieurs,
experts, partenaires…). Certains acteurs rentrent dans le projet, d’autres en sortent. Ainsi, le
chef de projet doit réinventer en permanence la bonne dynamique de groupe et intégrer ou
tenir compte du départ d’individus parfois clés ou moteurs.

Les managers ont des rôles multiples qu’ils jouent même si certains peuvent être plus
accentués que d’autres, selon les circonstances, les positions hiérarchiques, les lieux ainsi que
la culture organisationnelle. Nous les voyons systématiquement ci-dessous.

2.3. Rôles des managers

Barabel et Meier (2006) distinguent deux typologies de rôles : les typologies statiques
et les typologies animées. Les premières sont basées sur les auteurs classiques de management
auxquels ils ont ajouté Mintzberg et les secondes sont basées sur les auteurs qui ont critiqué
les auteurs classiques.

2.3.1. Les typologies statiques

2.3.1.1. L’approche classique

Historiquement, les premières conceptions des rôles du manager sont respectivement


énoncées par Fayol en 1916 (repris par Gulick, 1937) et par Barnard (1938).

En premier lieu, Gulick (1937) présente une typologie de six rôles intitulée :
POPDCORB, initiales des différentes activités d’un dirigeant. (POPDCORB = Planification,
Organisation, Personnel, Direction, Coordination, Rapport, Budget). Les rôles regroupent
les différentes attributions théoriques d’un manager qui doit, s’il veut réussir, mener de front
en n’en négligeant aucun. Concrètement, les auteurs distinguent la planification où le
manager doit montrer sa capacité à prévoir le futur de son entité, l’organisation qui consiste à
mettre en place une structure adaptée à la réalisation des actions, la gestion du personnel qui
nécessite de gérer les équipes au quotidien, la direction où le manager doit motiver et
superviser ses équipes, la coordination qui vise l’harmonisation et la mise en cohérence de
l’ensemble des actions menées, le rapport activité qui consiste pour un manager
intermédiaire à tenir au courant son supérieur de ce qui se passe au moyen de dossiers, de
recherches et d’inspection, il lui faut se maintenir lui-même et maintenir ses subordonnés
informés de la situation, et enfin la gestion du budget qui regroupe les activités de contrôle

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permettant de s’assurer de la bonne exécution du plan prévu initialement avec la mise en place
éventuelle d’actions correctrices. Cette typologie va connaître un succès important et durable,
imputable, semble-t-il à sa simplicité et son exhaustivité.

De son côté, Barnard (1938) aborde les rôles du manager de façon totalement opposée.
Il part du constat que les êtres humains sont par nature égoïstes et individualistes et
qu’une organisation doit donc être attractive pour les séduire (système d’incitation
pertinents et équitables) et les conduire à s’engager. De plus, la difficulté d’une
organisation tient dans la nécessité de faire partager à ses membres une vision commune. Cela
tient en partie à la fragilité des systèmes de communication essentiels à l’organisation et à la
complexité et à l’instabilité des motivations des individus. Dans cette configuration, les
managers sont indispensables pour faire fonctionner efficacement l’organisation. Barnard
définit trois rôles généraux du manager. Il doit tout d’abord fournir un système de
communication organisationnelle et s’assurer de son maintien. Il va en particulier définir les
positions organisationnelles (élaboration de la structure de l’organisation) et gérer le
personnel, sélectionner les membres de l’organisation en fonction de leurs qualifications),
piloter les politiques d’incitations, de persuasion et gérer la communication autoritaire
objective (promotion, contrôle, rétrogradation, sanction, renvoi), afin de rendre ces
qualifications efficaces et au service de l’entreprise. Le deuxième rôle du manager consiste à
mettre à la disposition de l’organisation des ressources essentielles (affermir le système des
contributions individuelles). Ce rôle s’articule autour de deux missions. Il doit amener un
nombre suffisant de personnes à s’engager dans une relation coopérative avec l’organisation,
en les attirant dans un espace où elles pourront être recrutés, puis en les persuadant de rester.
Il doit ensuite amener les personnes ayant la collaboration à fournir en quantité et en qualité
un certain nombre d’efforts en adéquation avec les objectifs de l’organisation. Enfin le
dirigeant doit définir la finalité et les objectifs de l’organisation et les faire partager à tous.
Le manager apparaît ainsi comme un bâtisseur qui organise l’entreprise et lui donne les
moyens de réaliser la stratégie qu’il a définie. La conduite opérationnelle et notamment les
rôles d’ordre financier (planification, rapport et budget) définis par Gulick (1937) ne sont pas
cités et sont laissés aux subordonnés. Barnard (1938) fait donc une distinction des rôles, selon
le niveau hiérarchique du dirigeant. Le PDG et les membres de l’équipe de direction ont des
rôles que l’on peut qualifier d’informels où ils disposent d’une certaine autonomie pour
réaliser leurs objectifs alors que les managers intermédiaires ont leur travail dominé par des
rôles formels non négociables associés à leur poste.

2.3.1.2. « La révolution Mintzberg »

Mintzberg (1973) remet en question les typologies dites de « l’école classique ».


Considérant qu’elles ne sont pas suffisamment orientées vers l’action, trop floues pour être
d’une quelconque utilité, ce dernier propose une nouvelle typologie de dix rôles. Ces rôles
découlent directement de la notion d’autorité formelle qui implique des relations
interpersonnelles.

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Selon Mintzberg (1984),ces dix rôles, regroupés en trois catégories : trois rôles
interpersonnels, trois rôles liés à l’information et quatre rôles décisionnels, caractérisent des
managers. Les voici :

Les trois rôles interpersonnels :


 rôle de symbole : le manager a le devoir de représenter son organisation dans toutes
les occasions formelles ;
 rôle d’agent de liaison : le manager interagit avec ses pairs et des personnes
extérieures à l’organisation pour obtenir des faveurs ou des informations ;
 rôle de leader : ce rôle définit les relations du cadre avec ses subordonnés :
motivation, gestion du personnel, etc.

Les trois rôles liés à l’information se présentent comme suit :


 rôle d’observateur actif : le manager reçoit et recherche des informations qui lui
permettent de comprendre son organisation ;
 rôle de diffuseur : le manager transmet certaines informations à son organisation ;
 rôle de porte – parole : le manager communique à l’extérieur des informations sur
son organisation ;

Les quatre rôles décisionnels sont ainsi identifiés :


 rôle d’entrepreneur : dans ce rôle, le manager prend l’initiative de changements ;
 rôle de régulateur : il « monte en première ligne » quand son organisation est
menacée ;
 rôle de négociateur : il traite des situations dans lesquelles il se sent obligé d’entamer
des négociations au nom de son organisation ;
 rôle de répartiteur de ressources : il supervise le système par le biais duquel les
ressources sont réparties.

2.3.2. Les typologies animées

Les auteurs de « typologies animées » critiquent les classifications précédentes. Ils leur
reprochent de ne pas tenir compte de la nature réelle du travail des dirigeants qui est
caractérisé par la complexité, les paradoxes et les contradictions. (Disons en passant que cette
même critique avait été adressée aux auteurs classiques par Mintzberg (1984, pour l’édition
française) !) En effet, les managers sont amenés à concevoir et à jouer des rôles multiples et
contradictoires de façon simultanée. Hart et Quinn (1993), notamment, cherchent à synthétiser
les recherches antérieures (notamment celles de Mintzberg, Donaldson et Lorsch, Katz et
Drucker) et identifient quatre rôles majeurs des managers. Ces rôles sont reproduits dans la
figure suivante:

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Figure 2.1. Rôles des managers (adapté de Hart et Quinn, 1993)


FLEXIBILITE
Modèle des relations humaines Modèle des systèmes ouverts

Domaine : l’organisation Domaine : le futur


Demande : comportement Demande : l’innovation
ROLE : Le motivateur ROLE : Le visionnaire
Rôles de liaison, de diffuseur (M) Rôles d’entrepreneur, de porte-parole, de
Gestionnaire d’hommes (D) leader, d’observateur actif, de liaison (M)
Compétences humaines (K) Homme de front (D)
Valeurs : participation, ouverture, morale, Compétences conceptuelles (K)
engagement Valeurs : innovation, adaptation, croissance,
acquisition de ressources, support externe.
FOCALISATION EXTERNE
FOCALISATION INTERNE

Domaine : le système opérationnel Domaine : le marché


Demande : l’efficience Demande : la performance
ROLE : L’analyste ROLE : le maître des tâches
Rôle de négociateur (M) Rôle de répartiteur des ressources, de
Le marché des produits (D+L) régulateur, de symbole (M)
Compétences techniques (K) Le marché des capitaux (D+L)
Valeurs : recherche d’informations, stabilité, Homme d’action (D)
contrôle Valeurs : accomplissement, productivité,
clarté des objectifs, direction

Modèle des buts rationnels


Modèle des processus internes

CONTROLE

M : Mintzberg (73, 75) ; D : Drucker (73) ; K : Katz (74),Donaldson & Lorsch (83)

Dans son rôle de visionnaire, le dirigeant doit créer un sens de l’identité et de la


mission. Cela passe par une veille interne et externe extrêmement active (homme de liaison).
Dans son rôle de motivateur, il doit donner du sens au projet et mobiliser son équipe. En tant
qu’analyste, le manager recherche l’efficience du système opérationnel interne. Enfin comme
maître des tâches, il vise les meilleurs résultats et performances à court terme. Les rôles sont
liés aux demandes antagonistes formulées par les dirigeants et nécessitent un ensemble de
comportements clés.

Plus généralement, des travaux récents ont mis en avant la posture d’acteur du
manager face aux règles et normes fixées par les organisations. Ainsi, Calvo (2004) montre,
qu’à l’intérieur du cadre normé imposé par une structure, un manager construit ses
rôles d’une part en fonction de ses capacités créatives, d’autre part en fonction des
interactions avec les acteurs organisationnels. Les rôles du manager sont donc en évolution
constante sous son impulsion et ses rencontres. Laroche (2000) apporte l’une des

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contributions les plus intéressantes en montrant que le manager s’inscrit dans une
chaîne de mandant (agit pour le compte de son supérieur et fait faire à son subordonné)
et qu’il doit aussi être analysé comme un managé sous la direction d’un responsable
hiérarchique qui lui a confié un ou plusieurs mandats (voir aussi Goguelin déjà cité). Ce
changement de perception conduit à penser le manager autrement. En effet, la plupart du
temps, les mandats qui lui sont confiés s’avèrent être confus (Girin, 1995), ce qui conduit le
manager à piloter à vue. De plus, son mandataire, garant du travail du manager, n’est pas
inactif. Il va chercher, pour se prémunir contre un risque d’échec de son subordonné, à scruter
les moindres indices sur les actions en cours, pour anticiper les résultats et éventuellement
intervenir. Il en résulte, d’après Laroche, que l’évaluation est centrale pour comprendre le
métier d’un manager. Ce dernier se soucie en priorité d’anticiper, de détecter, et
d’influencer les jugements que l’on peut avoir sur lui. Son travail est centré sur la
maîtrise des indices, voire la production d’indices qui tendent à démontrer son
engagement et sa maîtrise ou encore à éviter les imputations d’éventuels échecs. Il s’agit
essentiellement pour le manager de se mettre en scène. La principale difficulté réside dans
le fait, que face à un environnement devenu incertain et instable, les critères d’évaluation sont
instables. Il doit donc en permanence anticiper sur les critères de jugements qui lui seront
appliqués. De fait, Laroche (2000) constate que le rôle majeur d’un manager est d’être
avant tout un absorbeur des écarts produits par l’action quotidienne (décalage avec les
objectifs, le discours, la réalité). A chaque nouvel événement, le manager se doit de
l’interpréter et de décider s’il constitue une opportunité ou une menace. En fonction de
sa stratégie, le manager va escamoter, minimiser, restituer fidèlement « ou monter en
épingle » l’écart en adoptant une posture différente selon ses interlocuteurs
(collaborateurs, clients, hiérarchie). Ainsi, le manager ne peut s’analyser comme un simple
transmetteur d’informations (venant de la direction, des clients ou des équipes), un agent
rationnel au service de l’entreprise et de ses objectifs mais plutôt comme un individu,
poursuivant une stratégie propre qui le conduit à freiner/accélérer, cacher, transformer ou
améliorer « les dynamiques engendrées par les machines organisationnelles » (Laroche,
2000). Au manager lisse et bien intentionné se substitue ainsi une image plus contrastée faite
de jeux politiques et de représentations.

Malgré cette description quelque peu sombre de sa situation, nous nous rallions à cette
façon de voir qui fait dire à Blake et Mouton que « le rôle d’un manager est d’arriver à créer
une culture qui (1) favorise et maintienne des performances qualitatives et quantitatives
maximales, (2) stimule et utilise la créativité, (3) provoque l’enthousiasme pour l’effort,
l’expérimentation, l’innovation, et le changement, (4) utilise la résolution des problèmes
comme occasion pour apprendre, (5) recherche et trouve de nouveaux défis ». On voit là une
ressemblance avec ce que dit Galambaud

C’est ce qu’un manager doit jouer comme rôles, et il doit les jouer complètement,
pleinement, faute de quoi il risque d’être désavoué et, d’ailleurs, désavouer son statut de
manager. Cela, d’autre part, exige beaucoup de souplesse, de flexibilité dans la politique
organisationnelle.

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2.4. Profils

En parlant de profils, nous voulons signifier compétences et caractéristiques qui


doivent être celles d’un manager. Beaucoup d’auteurs se sont penchés sur ces deux points.

2.4.1. Les compétences clés du manager

Pour être efficace, c’est-à-dire remplir correctement ses rôles, le manager mobilise un
ensemble de compétences. Une compétence peut se définir comme un processus, où
interviennent des capacités (faculté à réaliser différentes activités), des aptitudes (talents
innés applicables dans le travail) et des connaissances (informations spécifiques sur un
sujet), générées par un manager afin de répondre sous forme de rôles aux demandes
formulées par son environnement. Comme l’indique Le Boterf (1994) : « la compétence
n’est pas un état. C’est un processus » où un individu « est capable de mobiliser, de mettre en
œuvre de façon efficace les différentes fonctions d’un système où interviennent des ressources
aussi diverses que des opérations de raisonnement, des connaissances, des activations de la
mémoire, des évaluations, des capacités relationnelles ou des schémas comportementaux ».

La littérature sur les compétences managériales individuelles est relativement


descriptive. Les auteurs se contentent bien souvent de décliner les différents rôles que nous
venons de présenter en les précédant des termes, « capacités à ». Par exemple, certains auteurs
parlent de « capacité à décider » ou encore « capacité à communiquer ». Les travaux de Katz
(1974) échappent à cette critique et identifient trois compétences managériales fondamentales
(techniques, interpersonnelles, conceptuelles) que nous présentons en détail.

2.4.1.1. Les trois familles de compétences selon Katz (1974)

2.4.1.1.1. Les compétences techniques

Elles représentent l’ensemble des outils et techniques que le manager maîtrise et qui
lui sont nécessaires pour exercer son travail. Cependant, ces compétences sont extrêmement
difficiles à définir car elles sont multiples (il peut s’agir de compétences en finance, en
informatique, en marketing, etc.) et varient en fonction de l’entreprise, de l’industrie et de la
situation dans lesquelles opère le dirigeant. Comme pour tous les autres types de
compétences, les compétences techniques sont les fruits de connaissances (expérience,
formation initiale, formation permanente), d’aptitudes et de capacités. La maîtrise des
compétences techniques permet au manager d’exercer efficacement son travail (connaissance
des produits, de l’entreprise, des techniques…).

2.4.1.1.2. Les compétences humaines ou relationnelles (interpersonnelles)

Elles permettent au responsable d’obtenir l’appui et la coopération de ses salariés. Le


manager doit avoir des qualités de leadership pour diriger ses équipes. Certains auteurs
parlent d’un rôle de coach qui vise à développer des compétences de ses salariés, un
mobilisateur pour les intégrer aux objectifs de l’entreprise et leur insuffler le désir de bien
faire le travail. Les compétences relationnelles concernent notamment les capacités à motiver
autrui, à mobiliser en entraînant autrui autour d’objectifs communs mais aussi les aptitudes à

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diriger et fédérer, se faire respecter, à développer autrui, à agir et prendre des initiatives, ainsi
qu’à engager sa responsabilité.

Dans les différentes études réalisées, les compétences humaines sont souvent
assimilées aux capacités communicationnelles nécessaires pour interagir efficacement avec
autrui. Par exemple, sur les six compétences jugées nécessaires par Mintzberg (1973) pour
être un bon dirigeant, les cinq premières sont des compétences communicationnelles (la
capacité à entretenir des relations avec ses pairs, la capacité à bien mener des négociations,
la capacité à motiver des subordonnés, la capacité à résoudre des conflits, la capacité à créer
des réseaux d’information et à diffuser cette information et la capacité à prendre des
décisions dans des conditions extrêmement complexes et à répartir les ressources).

Bass (1990) indique que de nombreux travaux ont montré des relations positives entre
les compétences en communication des dirigeants et leurs performances. A ce propos, Penly,
Alexander, Jernigan et Henwood (1991), dans une étude complète, réussissent à démontrer
que les dirigeants les plus efficaces sont ceux qui obtiennent les meilleurs scores sur les quatre
critères suivants : l’articulation et la clarté des idées lors des communications orales, le degré
d’appréhension du dirigeant à s’exprimer à l’oral, le degré d’appréhension du dirigeant à faire
des communications écrites, la faculté à choisir les supports médiatiques adéquat en fonction
du message à faire passer. Katz mentionne aussi les compétences politiques qui permettent à
un manager de s’assurer une place dans l’organisation et un pouvoir formel ou informel. Ces
compétences permettent au manager de s’assurer des informations privilégiées et d’influencer
en sa faveur certains événements.

2.4.1.1.3. Les compétences conceptuelles ou cognitives

Face à des situations complexes et incertaines, les managers ont besoin de


compétences conceptuelles qui désignent un savoir-faire interprétatif qui les aide à
interpréter les tendances dans leur organisation ou leur environnement afin d’avoir une vision
globale et de pouvoir prendre des décisions éclairées. Ainsi, les compétences cognitives
influencent la façon dont les managers construisent leurs processus mentaux. En effet, les
compétences cognitives sont déterminantes pour le manager pour gérer des situations
paradoxales et contradictoires et elles influencent fortement les choix des managers et
l’analyse qu’ils font de leur environnement. La compréhension des compétences cognitives
des managers relève en partie de la psychologie cognitive. Pour les étudier, Hatchuel
distingue deux types de compétences cognitives : d’une part, les compétences qui permettent
de « savoir comprendre » : ce sont des processus d’ajustement par confrontation de la réalité
perçue avec les représentations que l’on s’en fait, d’autre part les compétences qui permettent
de « savoir combiner » : elles participent à la construction d’un futur souhaitable dans une
logique de projets.

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2.4.2. Les styles de personnalité et qualités d’un manager

2.4.2.1. Les traits de personnalité

Selon certains auteurs, la façon dont un manager réussit dans son emploi dépend en
partie de sa personnalité. Les traits identifiés par les travaux de recherches portent sur les
managers dirigeants (direction générale). Ils sont variés et nombreux. En établissant une
synthèse, dix traits majeurs peuvent être cités :
- le dynamisme (enthousiasme, optimisme, capacité d’adaptation, motivé) : le manager est
associé à une force de travail, une capacité à travailler plus que la moyenne, symbole de
résistance physique et mentale ;
- l’ambition (esprit de compétition, besoin de puissance, goût du pouvoir, besoin de
domination, besoin de réussir, péremptoire) : le manager souhaite atteindre les sommets de
l’organisation. Il est motivé par les responsabilités et les challenges dans la mesure où ils lui
permettent de gravir les échelons hiérarchiques ;
- l’extraversion (sociable, expressif, empathique, coopératif, rassembleur, charismatique) : le
manager est à l’aise dans les communications orales et ses relations aux autres. Il est capable
de donner son point de vue, de s’exprimer facilement et a une capacité d’entraînement ;
- la droiture (consciencieux, responsable, discipliné, rigoureux, intègre, digne de confiance) :
la littérature managériale véhicule fortement les qualités éthiques des managers. Depuis les
travaux de Barnard, elles sont perçues comme une capacité à faire face aux situations de
pouvoir auxquels ils vont être confrontés ;
- la stabilité émotionnelle : dans ses réactions affectives, le manager est calme, patient, il se
contrôle, il accepte la critique et résiste au stress. Cela lui permet de réagir de façon adaptée
aux situations imprévues ou dans l’urgence ;
- l’amabilité : certains travaux mettent en avant les qualités relationnelles du manager. Ce
dernier est souple (peut entendre le discours de l’autre et changer de position), tolérant,
humain et généreux. Cela lui permet de travailler avec succès en équipe ;
- l’ouverture à l’expérience : le manager a le goût du risque. Il est créatif, curieux et
imaginatif. Certains auteurs parlent de manager entrepreneur ;
- le rapport au temps ou Cognitive Time Span : les managers ont une perception du temps sur
le long terme. Ils sont capables de penser et de fonctionner sur de longues périodes sans
recourir à autrui ;
- le degré de tolérance à l’ambiguïté : les managers sont capables d’affronter des
environnements complexes, incertains et flous ;
- le sentiment de maîtriser son destin (confiance en soi) : les managers ont une bonne estime
de soi : à la fois élevée et stable au sens d’André et Lelord (1999).

L’analyse de cette liste permet de constater que les traits de personnalité des dirigeants
à succès sont multiples. Il paraît dès lors improbable de trouver toutes ces qualités chez un
seul homme. De plus, de nombreuses études empiriques ont fourni des résultats
contradictoires. Les mêmes traits de personnalité sont parfois associés à des succès, des
échecs ou ne sont pas considérés comme significatifs (Stodgill, 1974). La principale raison
tient au caractère flou et imprécis des définitions.

Néanmoins, l’approche comportementale est très répandue dans les entreprises où


certaines qualités sont mises en avant comme comportements exemplaires.

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22

2.4.2.2. Les caractéristiques dysfonctionnelles des managers

Une autre façon de s’intéresser à la personnalité du dirigeant est présentée par les
théories psychosociologiques sur le leader. La principale raison qui motive l’étude
psychologique des dirigeants, est très bien expliquée par Selznick (1957) : « Les dirigeants
pour opérer leurs choix en matière d’organisation s’appuient sur les idées qu’ils se font de la
nature humaine. Personne ne peut agir sans se référer à un système, conscient ou inconscient,
de convictions personnelles concernant la nature humaine » (Cf. la théorie X et Y de
McGregor).

C’est ce système qui détermine la façon de voir les choses d’un dirigeant et qui ainsi
motive ses actions. Selon Selznick (1957), l’interprétation psychanalytique de l’homme
repose sur trois prémisses essentielles :
 tout comportement est déterminé, même si l’individu peut exercer son libre arbitre et
choisir son mode de comportement, mais seulement à l’intérieur d’un cadre imposé ;
 l’inconscient est un facteur déterminant important ;
 chaque individu se fait une représentation du monde extérieur qui, associée à ses
pulsions, génère un mode de comportement.

Pour qu’un manager réussisse dans son métier, il lui faut absolument « assumer le
pouvoir qu’il détient. Il doit faire en sorte de trouver le moyen de s’accommoder sereinement
et ouvertement de l’exercice de l’autorité » Or Kets de Vries (1984, 1994, 2002) en observant
les managers se rend compte que de nombreux cadres échouent dans leur métier. Le facteur F
touche de nombreux managers et couvre 9 styles de management. A titre d’illustration, Kets
de Vries distingue le tempérament agressif (les managers sont sans égard pour leurs
hommes), le tempérament paranoïaque (les managers ont une méfiance envahissante et
injustifiée à l’égard d’autrui qui les conduit à méjuger les actes de l’autre), le tempérament
histrionique (les managers sont poussés par le souci désespéré d’attirer l’attention sur eux à
tout prix), les régents (le manager veut avant tout) avoir la main sur ce qui peut affecter son
existence), ou encore le narcissique (le manager place prioritairement toute son énergie sur
lui-même). Dans les faits, les styles purs sont fort rares, les tempéraments sont plutôt
mixtes. Certaines associations sont porteuses d’efficacité pour le dirigeant alors que
d’autres sont au contraire dangereuses pour le manager et son organisation.

Un autre membre de ce courant de pensée sur le manager dysfonctionnel, Kofodimos


(1993) travaille sur des managers aux traits psychologiques différents : les « workaholics »
ou dépendants au travail. Ces dirigeants sont efficaces dans leur travail et réussissent leur
carrière, mais accordent souvent la plupart de leur temps et de leur énergie à celle-ci au
détriment de leur famille et des loisirs. Selon l’auteur, le manque d’équilibre entre ces deux
champs peut finir par leur causer du tort et les rendre moins efficaces. Les raisons
d’implication dans le travail sont simples : ce dernier « donne de bons feed-back
(rémunérations, reconnaissance…) alors que la satisfaction familiale ne se mesure pas

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toujours ». En effet, les dirigeants aiment leur travail car il satisfait leurs besoins
fondamentaux (argent, pouvoir, reconnaissance) alors que vie personnelle est bien incertaine.
Comme le constate Kofodimos (1993), la recherche de la domination est souvent le moteur
pour aller au sommet. Cela a une contrepartie : « la capacité des dirigeants à vivre leur vie
privée peut être diminuée par la recherche surdimensionnée de la domination ». De plus, selon
l’auteur, beaucoup de dirigeants se sentent mal à l’aise lorsqu’il s’agit de témoigner leurs
émotions ou de montrer leur vulnérabilité. Or, le fait de devenir intime implique ce type
d’expérience. Ainsi le travail devient un mécanisme de défense, spécialement visible durant
les crises de la vie, une échappatoire. Le choix selon Kofodimos (1993) est donc le suivant :
la joie de dominer contre les menaces de l’intimité. Pour cet auteur (1993), un dirigeant qui se
sent mal à l’aise dans l’expression de ses sentiments peut être incapables de fournir des feed-
back positifs à ses subordonnés. On rejoint encore une fois les théories de Kets de Vries
(1994) : « Un dirigeant qui refuse les doutes et les vulnérabilités, peut éviter de demander de
l’aide ou un service quand cela va mal ou ne pas tenir compte de ses propres échecs. »

D’une manière générale, ces travaux permettent de nous éclairer sur certains
problèmes dont peuvent souffrir certains managers et d’y être sensibilisés.

2.4.2.3. Les styles du manager selon le contexte

Au-delà des qualités (positives ou négatives) qui permettent de réussir comme


manager, il semble important d’insister sur les travaux de l’école de la contingence (Miller,
Kets de Vries et Toulouse, 1982) ; Gupta et Govindrajan, 1984). A des idéaux types, se
substituent des profils de managers aux styles et à la personnalité correspondant aux
caractéristiques de leur entreprise et/ou de l’environnement à un instant donné.

Par exemple, Beysseyre de Horts et Norroy (2005) montrent que le profil d’un
manager varie en fonction du cycle d’évolution dans lequel se trouve une entreprise. Ainsi, les
organisations vont privilégier les fonceurs (réactivité, prise de décision) lors de la phase de
démarrage, les capitaines d’équipe (organisation, transfert de compétences) en phase de
croissance, les laboureurs (souci de la qualité, recherche de la performance) en phase de
maturité et les fonceurs redresseurs en phase de déclin.

Partant du principe que les managers peuvent difficilement changer et adopter


plusieurs styles, les auteurs de l’école de la contingence misent plutôt sur le recrutement
d’acteurs correspondant à l’idéal-type recherché par l’entreprise à une période donnée et leur
remplacement par de nouveaux acteurs ou la mise en place d’un programme de formation
important pour initier de nouveaux principes managériaux.

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CHAPITRE 3
QUELQUES THEORIES DU MANAGEMENT

Objectifs

A l’issue du chapitre, vous devriez être capable de


- citer, pour chaque théorie ou groupe de théories, le(s) auteur(s)
- éventuellement, montrer le contexte de son élaboration
- présenter les caractéristiques de la théorie
- montrer sa ou leur contribution au management
- éventuellement, dire les critiques qui ont été avancées sur la théorie.

--------------------------------------------------------------------------------------

Le management est aussi ancien qu’il y a des hommes qui travaillent ensemble pour
atteindre des objectifs, nous l’avons dit dans l’introduction. Cependant, la pensée managériale
actuelle a connu un début de systématisation à partir d’une époque et s’est développée
inégalement. Ce développement est l’œuvre de plusieurs penseurs et scientifiques qui ont fait
des contributions remarquables. C’est ainsi qu’on décèle différentes écoles, en dehors des
précurseurs, qui ont participé à des degrés divers à ce développement. Dans ce chapitre, nous
n’étudions que quelques-unes des théories qui ont été élaborées.

3.1. L’école classique du management (ou école du management scientifique)

C’est à cette école que l’on reconnaît la naissance du management moderne. Les
fondements du management moderne sont issus du travail d’un groupe d’auteurs et de
professionnels qui s’attachent à formuler certains principes rationnels susceptibles
d’améliorer l’efficacité des entreprises (d’où aussi l’appellation de l’école de la rationalité
donnée à cette école). Leurs contributions ayant jeté les bases théoriques d’une nouvelle
discipline baptisée management, on parlera à leur égard d’une école classique du
management, laquelle se subdivise en deux sous-catégories : le management scientifique et
la théorie administrative générale. Les théoriciens du management scientifique (Taylor,
Gilbreth, Gantt) envisagent la question du management sous l’angle de l’augmentation de la
productivité ouvrière, tandis que les tenants de la théorie administrative (Fayol, Weber)
s’intéressent à l’organisation globale de l’entreprise et aux moyens de la rendre efficace.
Certains auteurs distinguent la rationalité administrative (H. Fayol) et la rationalité
structurelle (M. Weber) (Barabel et Meier, 2006).

Dans le but d’améliorer la productivité, les premières réflexions portent donc sur la
rationalisation du travail, des structures, de la direction et cherchent à donner une solution
unique et universelle aux problèmes rencontrés par les entreprises dans la gestion de leurs
activités.

3.1.1. Les principes du management scientifique : l’apport de Frederick Winslow Taylor

S’il fallait déterminer la date exacte de la théorie du management moderne, l’année


1911, qui voit la publication des Principes d’organisation scientifique des usines de Frederick
Winslow Taylor (1856 – 1915), aurait de bonnes chances de l’emporter. Cet ouvrage décrit la
théorie du management scientifique, c’est-à-dire l’utilisation d’une méthodologie scientifique

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pour établir la « manière optimale » de réaliser une tâche (le « one best way »). Les études
qu’il a menées avant et après la publication de son livre ont consacré Taylor comme le père
de la théorie du management scientifique. Taylor s’indignait en permanence de
l’inefficacité des ouvriers qui employaient, selon lui, plusieurs techniques radicalement
différentes pour réaliser le même travail et avaient tendance à « flâner ». Selon lui, la
production n’atteignait de ce fait qu’un tiers environ de son maximum potentiel. Aussi décida-
t-il de remédier à cette situation par le biais de l’étude scientifique des emplois ouvriers. Il a
consacré plus de vingt années de recherches intensives à déterminer la manière optimale de
réaliser chaque tâche. Voyons le contexte dans lequel Taylor a évolué.

3.1.1.1. Contexte des travaux

F.W. Taylor (Etats-Unis, 1856 – 1917) a connu un parcours permettant de comprendre


l’origine de ses travaux et son cadre d’analyse. Issu d’une famille aisée, il doit renoncer à des
études prestigieuses pour des raisons de santé (ennuis avec sa vue). Cela le conduit à
commencer sa carrière comme simple ouvrier dans une entreprise métallurgique (Bethlehem
Steel Company). Il va ensuite gravir les échelons hiérarchiques de cette entreprise jusqu’à
devenir ingénieur chef. Ce parcours le conduit à maîtriser les différents aspects du travail
productif (rôle opérationnel et rôle de conception et à développer une vision globale du travail
en atelier.

3.1.1.2. Postulats

En 1911, Taylor publie un traité intitulé Principles of Scientific Management (cf. ci-
dessus la traduction du titre) qui s’appuie sur quatre principaux postulats
 sa foi dans la science qui doit permettre d’arriver à une méthode de management
« scientifique » ;
 la gestion de production est inefficace parce que l’encadrement est incompétent et mal
formé, d’où ce dernier est de peu d’utilité pour donner des conseils aux ouvriers dans
leurs tâches quotidiennes ;
 les entreprises s’en remettent trop à des hommes exceptionnels pour gérer les
dysfonctionnements, alors que les performances pourraient être grandement
améliorées en mettant en place une méthode de travail systématique ;
 le système de rémunération mis en place dans les usines avec un salaire fixe n’est pas
motivant et conduit les ouvriers à limiter leur production (donc il y a absence
d’incitation financière à produire plus).

Cette analyse critique de la situation des hommes au travail conduit Taylor à


considérer que le travail des ouvriers est pénible et ne permet pas aux hommes d’être
pleinement efficaces, en raison des règles empiriques qui freinent le rythme du travail.

3.1.1.3. Principes

Les principes du management scientifique s’expriment par l’association entre la


science et la gestion au niveau de l’organisation du travail. Ils visent à rechercher des
moyens pour permettre à l’homme de réaliser de manière efficace ses tâches sur son
poste de travail. La solution proposée par Taylor au problème de l’inefficacité qui, selon
ses termes, est « le plus grand mal du siècle » est l’application des méthodes scientifiques
à l’analyse et l’amélioration de l’organisation des tâches. Elle revient à définir de façon
très précise la manière dont les tâches doivent être organisées et les rôles que doivent

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occuper les différents acteurs (ouvriers et responsables) pour obtenir une productivité
optimale. Cette démarche s’appuie sur plusieurs principes fondamentaux établis au niveau du
travail dans les ateliers de production :
 la recherche de la meilleure méthode pour réaliser une tâche, à partir de la
détermination scientifique des temps et des modes opératoires (étude et chronométrage
des gestes) et de leur prescription par l’encadrement ;
 le recrutement de l’individu le mieux à même d’accomplir la tâche par une étude
« volontaire » du caractère, tempérament et rendement de chaque ouvrier matérialisée
par cette citation : « le bon salarié à la bonne place ». On dit aussi « l’homme qu’il
faut à la place qu’il faut » qui ne sont rien d’autre que la traduction en français de
l’expression anglaise utilisée par Taylor : « The rigth man on the rigth place ».
Taylor opère ainsi une division du travail horizontale en mettant en place des circuits
de production (organisation de l’atelier en différents postes de production se succédant
de façon logique, spécialisation des tâches ;
 la formation (perfectionnement des connaissances, le suivi et le contrôle du
personnel);
 la mise en place d’un salaire proportionnel au rendement. Taylor fixe un seuil
minimum de production dans la journée en dessous duquel le salarié est renvoyé et qui
donne droit à un salaire fixe. Si le salarié dépasse ce seuil, il va toucher un paiement
différentiel sur la base des pièces produites supplémentaires qui peut lui permettre de
dépasser largement son salaire fixe. Néanmoins, le salaire variable est plafonné car le
salarié risque de mal utiliser son argent (boisson, jeu…). De fait, en cas de surplus de
productivité, les fonds sont alloués aux œuvres sociales de l’entreprise chargées de
pourvoir aux logements et à l’éducation notamment de la famille des ouvriers ;
 la séparation rigoureuse des tâches entre ceux qui conçoivent (les ingénieurs dans les
« bureaux de planification et d’organisation ») et ceux qui exécutent (les ouvriers dans
les ateliers). Cette séparation est qualifiée de « division verticale » du travail. Deux
niveaux d’encadrement sont donc distingués : les contremaîtres chargés de tâches
fonctionnelles et de la supervision des équipes et les membres du bureau d’études
chargés de préparer le travail et son exécution ainsi que la circulation des produits et
des matériaux. Ce service se charge, en outre, de l’embauche, de la paie et de la
discipline.

Le management scientifique repose sur l’idée selon laquelle le processus de


production de l’entreprise peut être organisé et optimisé, afin d’obtenir une meilleure
efficacité dans le travail (le one best way : la meilleure façon de faire). Les propositions de
Taylor qui fondent l’organisation scientifique du travail (OST)2 s’articulent autour de
quatre axes principaux :
 l’implication des dirigeants dans le management qui ne peuvent ignorer les conditions
de travail de leurs employés et doivent à ce titre concevoir et mettre en place des
méthodes qui augmentent leur efficacité. Les dirigeants ont également la
responsabilité de s’assurer de l’utilisation de ces méthodes et de veiller à leur bonne
application ;
 la rationalisation du travail qui doit permettre l’introduction d’une gestion
scientifique du travail dans les ateliers et résoudre ainsi le problème de l’inefficacité
des méthodes empiriques. Il s’agit en particulier d’évaluer la durée nécessaire à
l’exécution de chaque tâche grâce à une étude critique du contenu du travail, à
l’analyse scientifique des mouvements (en trois catégories : recherche, exécution,
2
On entend par Organisation Scientifique du Travail (OST) la gestion et la coordination des tâches en vue d’établir et de maintenir
l’aménagement optimum du travail au sein de l’entreprise, à partir de principes ou de méthodes résultant d’une recherche scientifique.

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attente et repos) et l’étude des temps d’exécution (par observation directe et


chronométrage d’une part et l’utilisation des tables de temps d’autre part). Chaque
poste est optimisé (regroupement de tâches spécifiques)
 la mise en place d’un système de contrôle très strict qui s’assure que les méthodes
sont suivies sans déviation par tous les salariés qui auront à l’exécuter et ceci dans le
temps fixé ;
 l’élimination des comportements de freinage volontaire par la mise en place d’un
système de salaire aux pièces (A Piece Rate System), devant à terme remplacer le
management traditionnel fondé sur une « gestion de l’initiative et de l’incitation ».

Le système de Taylor vise donc à introduire une méthode scientifique dans


l’organisation du travail, en vue d’atteindre le plus haut niveau de productivité et d’efficacité.
Il a pour but de remplacer les vieilles méthodes empiriques (dont la diversité et le processus
d’apprentissage entraîne une grande déperdition des efforts) et la « flânerie systématique » des
ouvriers par une gestion scientifique du travail. En effet, Taylor pense qu’il incombe aux
dirigeants de prendre part à cette mission. Il est de leur responsabilité de réunir, déchiffrer et
classer les informations, et de concevoir, à l’aide de méthodes scientifiques, des principes, des
règles, lois permettant aux ouvriers de mieux accomplir leur travail quotidien. Les principes
directeurs établis doivent être enseignés aux ouvriers et des mesures appropriées doivent être
apprises, pour veiller à leur bonne application. Les managers sont donc censés remplir une
mission nouvelle et vitale, hautement responsable, visant à éviter le freinage volontaire et
l’utilisation des méthodes empiriques. La faible productivité dans les usines résulte en effet
d’un double comportement : celui d’une maîtrise des temps opératoires par les ouvriers qui
par crainte du chômage et par leur tendance naturelle à la paresse freinent volontairement les
cadences de travail ; et celui de l’encadrement qui ignore la gestion quotidienne du travail et
ne s’implique pas dans l’élaboration de méthodes efficaces. Cette situation conduit sur le plan
social à une absence de coopération entre les ouvriers et l’encadrement, qui débouche sur un
manque d’efficacité. Taylor considère que le principal facteur de réussite réside dans la
modification des rapports entre la direction et son personnel dont les intérêts se recoupent. La
réussite d’un tel projet implique à court terme des rôles et des fonctions différentes au sein de
l’organisation, seule manière de parvenir à « une révolution mentale » novatrice du travail de
gestion. En adoptant des règles objectives et indiscutables, en fixant des principes identiques
pour tous, les relations direction/ouvriers ne peuvent que s’améliorer car le taylorisme met fin
aux décisions arbitraires et non transparentes.

Cette conception de l’organisation implique par conséquent la présence d’un contrôle


étroit de l’exécution du travail qui insère l’ouvrier dans un réseau de contraintes qui l’oblige à
agir efficacement ou à démissionner. Pour que ce système puisse être durable et refléter une
conception synergique des relations sociales, il importe en contrepartie que l’ouvrier puisse
s’appuyer sur un système de salaire incitatif qui l’amène à entrer de plein gré dans cette
logique.

3.1.1.4. Prolongement

De nombreux auteurs ont poursuivi les travaux de Taylor (Gantt, 1916 ; Gilbreth,
1919 ; Dinnen, 1955 ; Lowry, Maynard et Stegemerten, 1940 ; Bannes, 1949). Ces auteurs
s’intéressent, à la suite de Taylor, à l’étude des gestes productifs (étude des temps et des
mouvements) ou encore à l’élaboration des méthodes scientifiques de préparation de la
production.

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Plus généralement, le fordisme développé par Ford (1863-1947) aux Etats-Unis dans
son usine de fabrication d’automobiles est perçu comme une amélioration des travaux de
Taylor. Enfin, on peut considérer que l’ensemble des travaux s’intéressant à l’amélioration
des méthodes de production trouvent une certaine filiation chez Taylor (démarche de qualité,
toyotisme, planification stratégique, démarche de reengineering, etc.).

3.1.2. Les principes d’une saine administration (Henri Fayol)

Les écrits de Fayol (1841- 1925) sont contemporains de ceux de Taylor. Mais tandis
que celui-ci s’intéresse au management des ateliers en lui appliquant une méthodologie
scientifique, Fayol traite pour sa part de l’activité de l’ensemble des managers, en
s’appuyant sur son expérience personnelle. Taylor était un scientifique ; Fayol, en tant que
directeur général d’une grande entreprise charbonnière, était quant à lui un homme de terrain.

3.1.2.1. Contexte

Henri Fayol (France, 1841-1925), contrairement à Taylor centre son analyse sur le
métier de dirigeant. Cela tient sans doute à son parcours qui le voit, après avoir débuté à 19
ans comme ingénieur dans une société minière, en devenir le directeur général, poste qu’il
occupe pendant trente ans. Son ouvrage Administration industrielle et générale (1916) est le
fruit de son expérience professionnelle et élabore des principes et des règles de management
qui sont avant tout des conseils pratiques.

3.1.2.2. La structuration des organisations et les rôles et qualités des dirigeants

Fayol estime que toutes les activités dans l’entreprise se répartissent en six catégories :
technique (les activités de production, transformation, fabrication) ; commerciale (achat, vente
et échange) ; financière (recherche et usage optimal des capitaux) ; sécurité (protection des
personnes et des biens) ; comptable (inventaire, bilan, prix de revient, statistique) et
administratives. Ces activités permettent de structurer les organisations (concept de structure
fonctionnelle). Cependant, alors que les cinq premières sont bien connues et appliquées dans
les entreprises, Fayol constate que les fonctions administratives ont été délaissées, notamment
par les grandes écoles d’ingénieurs alors qu’il s’agit des rôles quotidiens d’un dirigeant. Il
propose une décomposition de l’activité administrative en cinq composantes :
 prévoir et planifier (préparer des programmes d’action précis composés d’objectifs
compatibles et convergents s’inscrivant dans la durée tout en préservant la capacité
d’adaptation de l’organisation) ;
 organiser (définir une structure avec une unité de commandement, une définition
claire des responsabilités et des procédures précises) ;
 commander (diriger les équipes en respectant de grands principes de management) ;
 coordonner (mettre en harmonie tus les actes de l’entreprise) ;
 contrôler (vérifier que la mise en œuvre est conforme au programme prévu et prendre
des mesures correctrices).

Cette typologie s’est longtemps imposée comme la structuration classique des rôles
managériaux. Fayol en déduit que la fonction managériale nécessite un grand nombre de
qualités et notamment physiques (santé, vigueur), mentales (la capacité de comprendre, juger
et décider), morales (dignité, énergie, éthique), d’éducation (connaissances générales) et
techniques. De fait, Fayol conseille à tout dirigeant d’avoir une connaissance approfondie de
son personnel, de bien connaître les conventions qui lient l’entreprise à ses agents, de donner

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le bon exemple, d’inspecter périodiquement le corps social, de ne pas se laisser absorber par
les détails et de faire régner l’activité, l’initiative et le dévouement. Au-delà de ces conseils,
l’ouvrage de Fayol porte sur la formule de plusieurs principes de bonne gestion.

3.1.2.3. Les quatorze principes de management

H. Fayol considère que pour être efficace, le management d’une entreprise doit obéir à
certains principes d’administration. Il en énonce quatorze :

Les quatorze principes du management de Fayol :


 Division du travail. Autorité. Discipline. Unité de commandement. Unité de
direction. Subordination des intérêts individuels à l’intérêt général.
Rémunération. Centralisation. Hiérarchie. Ordre. Equité. Stabilité du personnel.
Initiative. Union du personnel.

Barabel et Meier ont fait un regroupement intéressant de ces quatorze principes que
nous vous proposons avec commentaires assortis.

La coordination hiérarchique : la transmission des ordres doit a priori suivre les échelons de
la voie hiérarchique, à travers une supervision directe de l’encadrement sur le personnel
d’exécution (communication verticale descendante). La hiérarchie s’appuie sur un système de
récompense – sanction qui favorise les liens de dépendance et oblige l’individu à se mettre en
conformité avec les usages et les règles établis par l’organisation. H. Fayol préconise donc la
méthode « militaire » même s’il peut également exister des « systèmes de passerelle » entre
chefs de même niveau hiérarchique, lorsque le succès de l’opération d’une exécution rapide.
En cas de conflit entre employés, les perturbations doivent se régler par voie hiérarchique
normale. Lorsque le conflit implique le supérieur hiérarchique, il est d’usage de recourir aux
délégués du personnel. Ces différentes règles permettent de respecter des conditions
d’objectivité et de ne pas transgresser le principe de hiérarchie. Elles visent à réduire les
risques de déviance et d’incohérence, en imposant aux employés un système de contrôle
permanent.

Spécialisation des tâches : comme Taylor, Fayol préconise une spécialisation des tâches qui
repose sur la division du travail. La spécialisation donne la possibilité d’assigner à chaque
individu un rôle précis et d’agencer les relations professionnelles de façon optimale. Elle a
pour but d’arriver à produire plus et mieux avec une fatigue moins importante. Selon H.
Fayol, « l’ouvrier qui fait toujours la même pièce, le chef qui traite constamment les mêmes
affaires, acquièrent une habileté, une assurance et une précision qui accroissent leur
rendement ». Par la spécialisation, les individus disposent d’un cadre rassurant et prévisible
qui permet de disposer d’une plus grande aptitude dans son travail et d’obtenir des
performances plus élevées. Si la division du travail a ses limites, l’expérience associée à
l’esprit de mesure doit apprendre à ne pas les franchir.

Unicité de commandement et de direction : selon H. Fayol, les hommes supportent


difficilement la dualité de commandement, bien qu’elle puisse parfois exister. Il est donc
important d’éviter ce type de situation, pour concentrer le pouvoir de décision et la légitimité
sur un seul homme. L’unicité de commandement est donc un moyen efficace pour stabiliser
une organisation et limiter les risques d’incompréhension. Selon cette conception, chaque
salarié ne doit dépendre que d’un seul chef hiérarchique. Afin de rendre cette tâche réalisable,
le nombre de subordonnés est limité. Le mode d’organisation proposé par H. Fayol présente

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donc comme avantage d’allier la simplicité et la clarté dans la définition des responsabilités.
Pour H. Fayol, au-delà de l’unicité de commandement, il importe d’avoir un seul programme
pour un ensemble donné d’opérations, organisé autour d’un même but avec des orientations
précises. Les individus ont en effet besoin d’un fil directeur pour agir efficacement. L’unité de
direction est donc un facteur essentiel pour canaliser les efforts et rendre cohérentes les
actions.

Ordre et discipline : le management a un rôle essentiel dans le maintien de l’ordre et de la


discipline. H. Fayol insiste sur l’exemple que doivent montrer ceux qui délivrent des ordres.
Une direction efficace doit en effet contribuer à une gestion rigoureuse et harmonieuse de
l’activité, corriger les causes d’inefficacité, en garantissant la stabilité de l’entreprise. De plus,
les managers dans leurs rapports avec leurs subordonnés devront faire preuve d’une
combinaison de justice et de bonté, seule capable de susciter à leur égard loyauté et
dévouement.

Substitution des intérêts particuliers à l’intérêt général : le fonctionnement de


l’organisation demande l’effort de tous qui passe par une coopération entre les équipes de
travail centrée sur la réalisation de l’intérêt général.

Rémunération suffisante et équitable : chaque employé doit recevoir en échange de son


travail une rémunération suffisante et équitable. Le niveau de rémunération dépend des
résultats de l’entreprise (productivité et rentabilité), de l’habileté et de la qualification des
individus et des éléments conjoncturels.

Initiative, stabilité et union du personnel : la stabilité du personnel permet d’envisager des


liens permanents et étroits entre l’homme et son entreprise qui, en résistant au temps,
conduisent à une plus grande fidélité envers l’entreprise. Elle renforce chez l’individu l’idée
que son futur est directement associé au destin de l’entreprise et que la rupture de ces liens
peut entraîner pour lui la perte de ses moyens de subsistance. La stabilité du personnel est
donc une condition essentielle au développement, en assurant à la direction un personnel
fidèle et dévoué. Cette atmosphère propice à une plus grande efficacité est renforcée, lorsque
l’initiative et l’esprit de corps coexistent au sein de l’entreprise.

Les principes développés par H. Fayol répondent à trois objectifs : fixer des critères,
des contraintes et des règles saines de comportement qui assurent une production efficace et
une bonne administration de l’entreprise.

3.1.2.4. Prolongement

Les principes de Fayol vont inspirer de nombreux auteurs et notamment L. Gulick


(1937), Mooney et Reiley (1939), Urwick (1943) aux Etats-Unis qui contribueront au
développement de la théorie administrative, en proposant d’autres principes, comme la
centralisation de la prise de décision ou l’organisation par département.

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3.1.3. Les fondements de l’administration bureaucratique (Max Weber)

3.1.3.1. Contexte

Max Weber (Allemagne : 1864 – 1920) est un des pères de la Sociologie et un auteur
majeur de la théorie des organisations. Contrairement à Taylor et Fayol, il n’a aucune pratique
managériale. Après des études de droit (mais il étudie également l’économie, la philosophie,
l’histoire et la théologie) et avoir été avocat à Berlin, il est nommé professeur de droit à
l’université de Berlin puis professeur d’économie politique. Il se fait connaître par la
rédaction d’ouvrages fondateurs aussi bien en sociologie générale (l’éthique protestante et
l’esprit du capitalisme), qu’en sociologie juridique (Sociologie du droit). Dans le champ
managérial, c’est son ouvrage Economie et société sur les types de domination et le rôle de
l’Etat qui constitue sa principale contribution. Il y présente trois thèmes principaux :
l’identification des caractéristiques clés d’une forme d’organisation particulière (la
bureaucratie), la description des raisons de son développement au cours de l’histoire (faire le
lien entre les formes organisationnelles et les changements sociaux), enfin la démonstration de
la supériorité de la bureaucratie à l’ère moderne sur les autres formes possibles
d’organisation.

3.1.3.2. La bureaucratie

En dehors de toute démarche prescriptive, M. Weber a cherché, à travers ses réflexions


sur la légitimité de l’autorité, à développer une théorie de l’action rationnelle dans les
entreprises. Selon M. Weber, trois critères définissent la rationalité : d’abord une idée de
calcul et d’efficacité (gestion et anticipation), puis une idée d’autonomisation et de
spécialisation des tâches (division du travail), enfin l’universalisation et la formalisation des
rapports sociaux (utilisation de règles et procédures formelles). Selon cette perspective, M.
Weber trace le chemin menant à la rationalisation des organisations, caractérisée par une
logique obéissant au calcul, à la prévision, à l’évaluation et à la volonté d’efficacité. Il montre
ainsi que « le type le plus pur de domination légale est la domination par le moyen de la
direction administrative bureaucratique ». Dans ce système, seul le chef du groupement
occupe la position de détenteur du pouvoir, soit en vertu d’une appropriation, soit en vertu
d’une élection ou d’un successeur désigné. Ses attributions de détenteur du pouvoir
constituent des « compétences légales ».

La totalité de la direction administrative se compose, dans le type le plus pur, de


fonctionnaires individuels, lesquels personnellement libres, n’obéissent qu’aux devoirs
objectifs de leur fonction, dans un cadre hiérarchique solidement établi. Les postes sont
définis en vertu d’un contrat, donc en principe sur le fondement d’une sélection ouverte, selon
la qualification professionnelle révélée par l’examen et attestée par le diplôme. Les
fonctionnaires considèrent leur fonction comme unique ou principale profession et sont payés
par des appointements fixes qui sont avant gradués suivant le rang hiérarchique et les
responsabilités assumées dans le cadre de leur activité. Les acteurs de l’organisation sont en
outre soumis à une discipline stricte et homogène de leur fonction et à un contrôle rigoureux.

Sur le principe, ce type d’organisation est applicable à toutes entreprises et peut donc
concerner aussi bien les entreprises économiques de profit que les entreprises charitables ou
n’importe quelle autre entreprise poursuivant des buts privés idéaux ou matériels. Pour
Weber, la bureaucratie est donc un modèle d’organisation rationnelle et efficace adapté au

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capitalisme occidental. La bureaucratie se caractérise par plusieurs critères : l’individu n’est


pas propriétaire de sa fonction et il ne peut la transmettre. La bureaucratie fonctionne
selon des règles universelles. Les postes sont rigoureusement définis (système de
compétences). A la définition des postes correspond la spécialisation des fonctions et des
compétences de l’individu qui les remplit. La mise en place de l’administration
bureaucratique est par conséquent une puissante manifestation de la rationalisation. Elle
témoigne de la progression de la domination de la qualité qualifiée de légale ou rationnelle
(rationalité en finalité et en valeur) ou encore rationnelle-légale au détriment des légitimités
charismatiques ou traditionnelles souvent présentes dans les structures d’autrefois. Weber
distingue en effet trois types de domination légitime : la légitimité rationnelle-légale repose
sur la croyance en la légalité des règlements arrêtés et du droit de donner des directives qu’ont
ceux qui sont appelés à exercer la domination par ces moyens (domination légale). La
légitimité traditionnelle est fondée sur la croyance quotidienne en la sainteté de traditions
valables de tout temps et en la légitimité de ceux qui sont appelés à l’exercer par ces moyens
(domination traditionnelle). Cette légitimité est fragilisée par sa vision historique qui ne
tient pas compte des évolutions de l’environnement. Enfin, la légitimité charismatique repose
sur la soumission extraordinaire au caractère sacré, à la vertu héroïque ou à la valeur
exemplaire d’une personne (domination charismatique). Dans ce cas, la disparition d’un
« leader » est le problème de la succession qui y est associé peuvent remettre en cause
l’organisation et sa survie.

Dans l’organisation proposée par M. Weber, l’autorité est ici fondée sur une
légitimité rationnelle-légale. L’autorité de type légal-rationnel s’impose en vertu de la
croyance en la validité d’un statut légal et d’une compétence positive fondée sur des
règles établies rationnellement.

A la suite des travaux de Weber, de nombreux chercheurs ont surtout montré les
limites des organisations bureaucratiques (Merton, 1945 ; Gouldner, 1954 ; March et Simon,
1958 ; Crozier, 1977 ; Mintzberg, 1973…) auxquelles ils reprochent en particulier de réduire
l’innovation et la création des individus, de dépersonnaliser les rapports humains, de sous-
estimer la dimension informelle des organisations et de gérer des conflits et des
dysfonctionnements de plus en plus conséquents. En revanche, la plupart de ces auteurs n’ont
jamais remis en cause la dette intellectuelle qu’ils doivent à Weber et l’intérêt majeur de ses
ouvrages.
L’école du management classique nous a laissé un grand héritage :
- l’idée de rechercher une adéquation entre l’individu et son travail, de le former afin de le
rendre plus efficace (optimisation de Taylor) ;
- l’ingénierie industrielle, qui dissèque dans leurs moindres détails les processus de
production ;
- le souci d’adapter le lieu de travail au travailleur, de créer un environnement favorisant la
créativité, l’importance accordée aujourd’hui à la gestion de projet et à la planification ;
- l’utilisation de la vidéo comme moyen d’améliorer le rendement (Gilbreth) ;
- la vision fonctionnelle de l’activité de manager trouve son origine dans le fayolisme ;
- la bureaucratie de Weber représente une tentative d’élaborer un modèle idéal d’organisation,
etc.

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3.2. L’école des relations humaines (ou école des comportements) : Elton Mayo et Fritz
Roethsberger.

Ces auteurs sont connus comme les fondateurs officiels de cette école. Mais, en fait,
beaucoup de scientifiques ont contribué à ce courant. Mayo et Roethlisberger (et le troisième
c’est Dickson) ont mené leurs recherches expérimentales aux usines Hawthorne de la general
electric company entre 1924 et 1927. Ces recherches aboutirent aux résultats montrant que
l’entreprise, outre la production, a une fonction sociale à remplir ; que l’unité de base devant
servir d’objet d’étude à toute recherche industrielle est le groupe primaire plutôt que
l’individu et que les motivations ont plus d’importance que les conditions matérielles
ambiantes.

L’école des relations humaines s’est développée en réaction aux excès du taylorisme
qui dans sa recherche frénétique de la productivité a engendré des comportements contraires à
ses objectifs initiaux avec entre autres un taux d’absentéisme élevé, une rotation importante
du personnel, des accidents du travail en nombre croissant. La vision stratégique implicite de
cette école reste identique à celle de l’école classique, en s’attachant à proposer un cadre
d’analyse unique et universel. Mais l’approche de l’organisation évolue en intégrant une
nouvelle dimension : l’Homme en tant qu’individu et membre d’un groupe. Les postulats de
l’école des relations humaines sont les suivants : l’entreprise est toujours un lieu de
production, où l’acteur de l’organisation a une dimension humaine, ce qui provoque des
réactions, des comportements d’ordre affectif et sentimental, parfois en contradiction avec la
logique rationnelle de l’entreprise. Selon cette perspective, les conditions de travail
matérielles et psychologiques doivent prises en considération pour que les acteurs participent
efficacement au fonctionnement de l’organisation. Il convient en particulier d’intégrer, dans le
fonctionnement de l’entreprise, les différents groupes d’acteurs avec leur dynamique propre.

3.2.1. Les expériences menées au sein de Western Electric : les travaux d’Elton Mayo

3.2.1.1. Contexte

George Elton Mayo (1880-1949) est d’origine australienne. Après avoir suivi des
études de médecine à Edinburgh en Ecosse et de Psychologie en Australie, il devient
professeur de psychologie et de philosophie. En 1922, il émigre aux Etats-Unis et se
spécialise comme chercheur en psychologie industrielle en étudiant notamment le
comportement au travail. Ses principales contributions sont le fruit de recherches empiriques
menées au sein de la Western Electric Co (Chicago, USA). Dans les faits, les recherches de
Mayo ont été relatées quelques années plus tard par deux chercheurs qui y ont participé, F.J.
Roethlisberger et W.J. Dickson, dans leur livre : Management and the worker (1939).

3.2.1.2. Les relations sociales au sein des groupes

Les travaux d’E. Mayo ont permis de mettre en évidence l’existence au sein des
organisations d’un système implicite de relations et d’interaction, basées sur les
comportements et les affinités des individus entre eux (les salariés sont dominés par la logique
du sentiment). Elton Mayo s’est intéressé ainsi aux conditions matérielles de travail
(éclairage, chauffage, bruits, etc.) et leur impact sur la productivité à la Western Electric 1924
à 1932. Dans sa première série d’expériences, Mayo et ses équipes partent du postulat qu’une
amélioration de l’éclairage est présumée causer une productivité accrue. Or, sur le terrain, ils

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s’aperçoivent que la productivité s’améliore aussi bien dans le groupe étudié que dans le
groupe témoin (groupe évoluant dans des conditions de travail stables) et que la productivité
continue à s’améliorer même lorsque l’on fait diminuer l’intensité de la lumière (dégradation
des conditions de travail).

Ces résultats l’amènent à considérer que d’autres facteurs interviennent dans


l’explication de la productivité. En particulier, l’auteur en déduit que la simple connaissance
par un individu du fait qu’il est sujet d’observation modifie son comportement. C’est ce que
l’on a qualifié d’effet Hawthorne : « des modifications peuvent intervenir dans le
comportement et les attitudes des sujets quand ils sont conscients d’avoir été sélectionnés et
distingués des autres pour devenir un sujet d’étude ».

Une seconde série d’observations est alors menée. Il s’agit d’étudier le comportement
d’un groupe de cinq ouvrières suite à différentes décisions (augmenter les salaires, accorder
un temps de pause supérieur, accroître le temps de repos). Là encore, les performances
continuent à s’accroître même lorsque l’on réduit la rémunération des membres du groupe. Le
compte rendu des entretiens menés au sein des usines fait apparaître que l’explication réside
dans les relations à l’intérieur de l’unité de travail. Les ouvriers sont avant tout motivés par
leur appartenance à un groupe social et éprouvent (par conséquent) des besoins de relation et
de coopération. L’auteur en conclut que ce ne sont pas les facteurs matériels qui gouvernent
principalement le rendement mais des éléments de nature psycho-sociale, notamment le
climat social, la qualité des relations interindividuelles et la communication. En effet,
l’employé ne réagit pas en tant qu’individu mais en tant que membre d’un groupe. Au-delà de
l’organisation formelle, il existe donc une organisation informelle qui obéit à une logique de
sentiments et d’appartenance. Les principales conclusions de ses travaux sont alors que la
quantité de travail accomplie par un individu n’est pas déterminée par sa capacité
physique (approche taylorienne) mais par sa capacité sociale, c’est-à-dire son
intégration à un groupe. Les récompenses non financières (estime, relations sociale)
jouent de ce fait un rôle essentiel dans la motivation et limitent l’intérêt d’une
organisation scientifique du travail. Selon cette approche, une des tâches du
management est de créer une coopération entre les acteurs de l’entreprise, en veillant à
insérer chaque employé dans un groupe social donné. Pour y arriver, il est nécessaire de
s’appuyer sur un personnage clé à savoir le leader informel du groupe qui va être
capable de fédérer les acteurs et d’imposer au groupe ses règles de fonctionnement.
Contrairement à la théorie taylorienne, la cohésion et les bonnes relations s’établissent
quand le système de contrôle devient souple. A ce titre, la théorie des ressources humaines
est aussi déterministe que la théorie classique. Elle part du principe qu’il existe un bon modèle
organisationnel qui permet d’obtenir des performances supérieures aux autres systèmes : un
mode de management à l’écoute, bienveillant, laissant des marges de liberté au groupe pour
s’organiser lui-même.

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3.2. 2. Maslow et la hiérarchie des besoins

3.2.2.1. Contexte

Abraham Maslow (Etats-Unis, 1908-1970) est diplômé de psychologie de l’université


du Wisconsin. Il est l’auteur de deux principaux ouvrages : Motivation and Personality (1954)
et Toward a Psychology of being (1968) qui s’intéressent aux facteurs de motivation de
l’homme notamment au travail.

3.2.2.2. La théorie des besoins

Dans le prolongement des travaux d’E. Mayo, A. Maslow met en avant l’analyse des
besoins humains dans les organisations, en s’intéressant aux origines de la motivation de
l’homme de l’homme au travail. Pour ce faire, A. Maslow établit une pyramide des besoins,
en distinguant cinq catégories de besoins hiérarchisés. En effet, les facteurs physiologiques,
psychologiques, sociaux et culturels peuvent être abordés en termes de besoins primaires et
secondaires. Selon ces travaux, un individu peut éprouver de nombreux besoins qui n’ont pas
tous la même importance et peuvent donc être hiérarchisés et ordonnés. On peut ainsi
hiérarchiser cinq besoins fondamentaux3 :
 Les besoins physiologiques (besoins vitaux) ;
 Les besoins de sécurité (physique ou psychique) ;
 Les besoins d’appartenance ;
 Les besoins d’estime et de reconnaissance ;
 Les besoins de réalisation et d’accomplissement (de soi).

Les besoins sont souvent représentés sous la forme d’une pyramide qui témoigne de la
hiérarchisation des besoins et de la relative difficulté de satisfaire les besoins supérieurs.

Selon ces travaux, un individu cherche d’abord à satisfaire le besoin qui lui semble le
plus vital (cf. besoins physiologiques). Dès que ce besoin est satisfait, l’individu cherche, dans
ce cas, à satisfaire le second besoin le plus important. Par conséquent, l’hypothèse centrale
d’A. Maslow est qu’un besoin de niveau supérieur ne se manifeste que lorsque les besoins de
niveau inférieur ont été satisfaits. Dès qu’un besoin est satisfait, il cesse d’être essentiel pour
l’individu et un autre besoin de niveau supérieur apparaît alors, qui sera déterminant aussi
longtemps qu’il n’est pas satisfait. A l’inverse, le retour à l’insatisfaction d’un besoin inférieur
est censé entraîner la disparition des besoins supérieurs.

Comme pour les travaux de Mayo, cette hiérarchie des besoins met en évidence les
limites du stimulant financier et l’impact du contenu du travail en tant que tel
indépendamment des conditions qui l’entourent pour motiver les salariés.

Besoins d’accomplissement [de soi]


3
Alderfer (1972) propose de réduire les cinq besoins en trois grandes catégories : les besoins d’Existence (physiologique et
sécurité), de Sociabilité ou Relationnels (appartenance et estime) et de Croissance ou Developpement (réalisation et
d’accomplissement personnel) : c’est le fameux ERG (Existance, Relation, Growth). De plus, il introduit l’idée que le
manque de satisfaction de certains besoins conduit les individus à opérer des déplacements vers d’autres besoins sans que le
type de besoins soit figé.

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Besoins d’estime/de reconnaissance

Besoins d’appartenance

Besoins de sécurité
Besoins physiologique

3.2.3. Frederick Herzberg et la théorie des deux facteurs

3.2.3.1. Contexte

F. Herzberg (Etats-Unis, né en 1923) est psychologue et médecin. Ses travaux ont été
essentiellement diffusés dans un article paru dans la Harvard Business Review en 1968.

3.2.3.2. Les facteurs de satisfaction et d’insatisfaction

Frederick Herzberg a élaboré sa théorie à partir d’une expérience effectuée à


Pittsburgh. Selon cette théorie, les facteurs qui conduisent à la satisfaction dans le travail
sont différents de ceux qui conduisent à l’insatisfaction. Il est alors possible d’établir une
théorie dite des « deux facteurs », en partant du principe que les réponses des individus
diffèrent selon que l’on s’intéresse à leurs motivations au travail ou aux causes de leurs
mécontentements. Les facteurs qui conduisent à la satisfaction sont qualifiés de « facteurs
de motivation » ou « valorisants » ou « motivateurs », tandis que ceux qui amènent à
l’insatisfaction, sont envisagés comme « facteurs d’hygiène » ou d’ambiance.
L’organisation du travail doit par conséquent apporter une réponse satisfaisante aux deux
séries de besoins pour d’une part, éviter le mécontentement et d’autre part, développer la
satisfaction. Les facteurs d’insatisfaction correspondent à des facteurs extrinsèques au
travail et concernent généralement les relations et conditions de travail : politique de
l’entreprise, système de gestion, mode de contrôle (supervision), politique de rémunération,
gestion des relations sociales, situation contextuelle. Ces facteurs doivent être réduits pour
éviter l’insatisfaction (départ, grève, absentéisme, stress) mais ils ne sont pas, en tant que tels,
une source de motivation pour l’individu. Leur absence constitue seulement un frein au
développement professionnel des individus, en raison d’insatisfactions d’ordre économique
(rémunération) ou technique (insécurité). Les facteurs de satisfaction visent au contraire à
concilier le contenu du travail avec les aspirations profondes de l’individu. Ils sont
considérés comme des facteurs essentiels au développement et à l’épanouissement de
l’individu dans son travail (intérêt pour le travail effectué, réalisation de soi, possibilités de
promotion, capacités d’initiative, prises de responsabilité).

Pour Herzberg, si les facteurs d’insatisfaction peuvent assez facilement être éliminés
dans le cadre de revendications, les facteurs de satisfaction s’avèrent en revanche plus
difficiles à traiter, dans la mesure où ils sont étroitement liés à l’organisation et à la répartition
des tâches dans l’entreprise (contrainte structurelles). Herzberg s’inscrit donc à son tour dans
une relativisation des principes de l’école classique en ne reconnaissant la rémunération

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(principal facteur de motivation chez Taylor) que comme un facteur éventuel d’insatisfaction.
De plus, il est à l’origine des travaux sur l’enrichissement du contenu du travail.

3.2.4. Douglas McGregor et la théorie XY

3.2.4.1. Contexte

McGregor (Etats-Unis, 1906-1964) est docteur en Psychologie de l’université de


Harvard. Il s’intéresse au rôle des dirigeants et publie plusieurs ouvrages sur le sujet dont The
Human Side of Enterprise (1960) ; Leadership and Motivation (1966) et The Professional
Manager (1967). Les travaux de l’auteur reposent sur deux principaux postulats. En premier
lieu, la façon dont une organisation est dirigée dépend des théories implicites que ses
dirigeants se font sur le management : « Derrière chaque décision de commandement ou
d’action, il y a des suppositions implicites sur la nature humaine et le comportement des
hommes. » Deuxièmement, le contrôle est central dans les organisations : le contrôle, parce
qu’il fait appel aux notions d’objectifs et de mesures des résultats, met en jeu des
caractéristiques essentielles du comportement des hommes. Dès lors, il ne peut y avoir de
contrôle sans un minimum d’adhésion des individus et le système de contrôle adopté dans une
organisation n’est pas neutre.

3.2.4.2. Théorie X versus théorie Y

D. McGregor a montré qu’il existe plusieurs formes de directions des entreprises, en


opposant deux attitudes implicites fondant le comportement des dirigeants : la théorie X qui
symbolise le management prôné par l’école classique (Taylor, Fayol, …) et la théorie Y
censée représenter l’école des relations humaines. La théorie X correspond au système de
commandement traditionnel, selon lequel le travail est pénible par nature et demande de la
part de la direction un contrôle permanent des individus, en raison de leur faible motivation à
travailler et à exercer des responsabilités (vision compatible avec l’approche taylorienne du
travail). Cette théorie repose sur trois hypothèses implicites : l’individu moyen éprouve une
forte aversion pour le travail qu’il considère comme pénible. Face à ce manque d’intérêt, il
convient dès lors de contrôler et diriger les individus, si l’on veut qu’ils fournissent les efforts
nécessaires à la réalisation des objectifs. Seuls des moyens coercitifs (sanctions) et des
récompenses d’ordre économique (rémunération) peuvent donc permettre d’atteindre les buts
fixés. La théorie Y propose de montrer que les buts personnels et professionnels des salariés
sont conciliables, en donnant la possibilité à l’encadrement d’organiser et de diriger de
manière différente l’effort humain. Selon cette vision, l’homme peut s’impliquer durablement
dans son travail, à partir du moment où celui-ci lui ouvre des perspectives nouvelles en termes
de développement personnel. La théorie Y repose sur plusieurs principes : tout d’abord, le
travail peut constituer, pour l’individu, une source de satisfaction personnelle. De plus,
l’homme est capable de s’auto-diriger et a les capacités requises pour exercer sa créativité et
assumer des responsabilités professionnelles. Selon cette perspective, il est alors possible de
faire participer activement les hommes dans la réalisation d’un travail, à partir du moment où
l’on modifie certains actes essentiels du management, en privilégiant notamment la direction
par objectifs, l’accompagnement personnel, et la diversité des sources de motivation (en allant
au-delà de la simple récompense économique).

Comme l’ensemble des auteurs de l’école classique, McGregor préconise un


management de type Y plus efficace pour gérer les équipes que le type X.

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Dans des travaux plus récents, mais dans la même tradition que McGregor, Ouchi
(1982) identifie trois types d’organisation sur la base de sept dimensions. L’entreprise de type
A est caractérisé par une prise de décision individuelle avec une orientation à court terme et
une faible préoccupation pour les individus (modèle anglo-saxon). A l’inverse, le type J
(modèle japonais) valorise l’appartenance au groupe et les décisions consensuelles. Le type Z
d’organisation est le fruit d’une combinaison entre le modèle japonais et le modèle anglo-
saxon. Il mêle responsabilité individuelle des collaborateurs et prise de décision et
fonctionnement collectifs.

3.2.5. Les autres contributions de l’école des ressources humaines

D’autres auteurs s’inscrivent dans l’école des ressources humaines. En particulier, on


peut citer les travaux de Lewin et Likert.

3.2.5.1. Les travaux de K. Lewin (Allemagne, 1890-1947, émigré aux Etats-Unis)

Docteur en philosophie et en psychologie, Lewin s’intéresse à de nombreux thèmes de


recherche (dynamique de groupe, problème de leadership, personnalité des individus…). Son
approche se caractérise par une méthode d’investigation très scientifique (expérimentation
précise et contrôlée) et une approche méthodologique particulière (la recherche-action). Dans
le champ du management, Lewin s’intéresse en particulier au style de leadership et
notamment à l’influence d’un style donné sur le fonctionnement et l’efficacité du groupe. Il
identifie trois styles de leadership à partir d’indicateurs tels que la prise de décision, le
système de contrôle, l’implication dans l’équipe de travail ou encore la structuration des
activités. En premier lieu, le style autoritaire consiste à diriger par des ordres impératifs et à
imposer ses décisions avec un manager qui se tient à distance du groupe. Deuxièmement, le
style permissif caractérise un manager, aux compétences techniques reconnues (centré sur les
tâches mais qui s’implique très faiblement dans son groupe (peu centré sur les hommes) et qui
laisse ses membres s’autogérer. Enfin, le style démocratique témoigne d’un manager qui
participe activement à la vie du groupe mais n’impose rien en privilégiant les décisions
collectives.

Le leader démocratique cherche donc à impliquer ses employés dans le processus


décisionnel ; il tend à déléguer son autorité, à encourager la concertation dans
l’élaboration des méthodes de travail et la définition des objectifs, et prend soin de
motiver ses subordonnés en s’appuyant sur leurs réactions. Le style démocratique peut
lui-même se subdiviser en deux catégories : consultatif et participatif. Le leader
démocratique consultatif s’informe de l’opinion de ses employés, écoute leurs
inquiétudes et leurs objections, mais prend seul la décision finale. Il encourage les
contributions dans le but d’enrichir son information. Le leader démocratique
participatif permet souvent à ses employés de participer au processus décisionnel. Ici, les
décisions sont prises par le groupe dans son ensemble, et le leader apporte uniquement
sa contribution personnelle.

Lewin et ses collègues se demandent lequel de ces trois styles de leadership présente la
plus grande efficacité. En s’appuyant sur des enquêtes menées au sein de groupes de jeunes,

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ils établissent que le style non-interventionniste s’avère moins efficace, sur l’ensemble des
critères de performances que les styles autocratique et démocratique. Si les groupes
démocratiques et autocratiques fournissent une quantité de travail équivalente, la qualité de ce
travail et la satisfaction générale se révèlent bien meilleures au sein des groupes
démocratiques. Ces observations semblent indiquer que le style démocratique favoriserait
l’efficacité du travail, tant sur le plan quantitatif que qualitatif.

Certaines études ultérieures consacrées aux leaderships démocratique et autocratique


aboutirent à des résultats plus contrastés. On s’était aperçu ainsi que le style démocratique
générait parfois une meilleure productivité que le style autocratique, sans que cela soit
toujours le cas. Une méthode de la satisfaction des employés a permis d’affirmer ces
observations.
Le niveau de satisfaction des membres d’un groupe s’avérait en règle générale plus
élevé lorsque ces derniers étaient dirigés par un leader démocratique plutôt qu’autocratique.
Cela signifiait-il pour autant que les managers devaient faire en sorte de s’orienter vers ce
style d leadership ? Deux chercheurs, Robert Tannebaum et Warren Schmidt, se sont
employés à répondre à ces questions.

Ils ont mis au point un continuum comportemental des leaders. Ce continuum illustre
l’existence d’un large éventail de comportements allant d’un modèle centré sur le dirigeant à
un modèle centré sur l’employé (non-interventionniste). Pour guider leurs choix
comportementaux, Tannenbaum et Schmidt conseillent aux managers de prendre en compte
leurs forces propres (déterminer notamment s’ils se sentent à l’aise avec le style de leadership
envisagé), celles de leurs employés (entre autres leur désir d’assumer des responsabilités) et
celles de la situation présente (contraintes temporelles, par exemple). Ils soulignent en outre
que les managers ont intérêt à s’orienter, sur le long terme, vers un style de plus en plus centré
sur l’employé, style qui permettrait d’améliorer à la fois la motivation du personnel, la qualité
des décisions, le travail d’équipe, le moral et la progression.

3.2.5.2. Les travaux de R. Likert (Etats-Unis, 1903-1981)

Rensis Likert est un psychologue connu pour son apport à la psychométrie et à la


mesure des attitudes. Dans le champ du management, il est considéré comme le successeur de
Lewin. Ses deux principaux ouvrages sont New Patterns of Management (1961) et The
Human Organization :its management and value  (1967). Il a développé une typologie du
mode de gouvernement des entreprises en s’appuyant sur cinquante et un traits
caractéristiques des organisations (style de direction, processus de communication, style de
prise de décision, processus de contrôle…) qui permettent de distinguer quatre types de styles
de management : le style autoritaire exploiteur qui n’accorde aucune confiance à ses
subordonnés et dirige de ce fait par le contrôle, les sanctions ou encore les menaces. Les
décisions sont extrêmement centralisées ; le style autoritaire paternaliste. La posture du
manager est d’afficher une confiance pleine de condescendance envers ses équipes. Les
décisions sont essentiellement centralisées ; le style consultatif est caractérisé par une
interaction moyenne avec les équipes avec des décisions stratégiques gérées en central et des
décisions collectives décentralisées. Enfin, le style participatif, témoigne d’une confiance
absolue envers ses équipes qui conduit à prendre des décisions collectives et à favoriser des
interactions fréquentes avec une information circulant dans tous les sens. Au terme de son
étude, Likert considère que le style participatif de groupe est plus efficace car il permet aux
individus d’exprimer tout leur potentiel. A l’inverse l’autoritarisme exploiteur est associé à

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des performances médiocres et un taux d’absentéisme élevé, les deux autres styles affichant
des performances moyennes.

Dans la lignée de Likert et de Lewin, de nombreux auteurs se sont essayés aux


typologies de style de management. Parmi les plus célèbres, on distingue d’une part, celle de
Blake et Mouton (1970) qui en croisant deux dimensions (l’intérêt porté sur l’homme et
l’intérêt portant sur les tâches) identifie cinq styles (contrôleur, laissez-faire, compromis,
social, intégrateur) et d’autre part celle de Tannembaum et Schmidt (1958) qui définissent un
continuum de styles de prise de décision allant de la décision autoritaire (prend ses décisions
seul puis l’annonce à ses équipes) à la décision non directrice (le manager laisse les membres
du groupe choisir dans la limite du cadre fixé).

3.3. Les autres écoles managériales

Nous étudions ici seulement deux écoles qui sont susceptibles d’avoir une plus grande
utilité pour vous que les autres.

3.3.1. La théorie de la décision

3.3.1.1. Contexte

Les théoriciens de la décision, aussi appelés l’école « Carnegie » (en référence au


Carnegie Technological Institute de Pittsburgh), développent leurs recherches à partir des
années cinquante. On distingue les travaux fondateurs de Simon (1947) sur la rationalité
limitée des recherches ultérieures de March et Simon (1958) et de Cyert et March (1963) sur
les processus de décision et l’apprentissage organisationnel. Selon Crozier (1963), March et
Simon proposent une synthèse entre l’école des relations humaines et l’école classique : ils
démontrent « parfaitement qu’on ne peut éliminer l’affectivité en réduisant tous les
comportements humains à un schéma mécaniste simple, ni réduire l’efficacité
organisationnelle à un sous-produit de bonnes relations humaines ».

3.3.1.2. Les modèles de rationalité absolue/limitée

L’école de la décision analyse l’organisation comme un lieu de décision et un


processus de prise de décision. Selon ce courant, l’organisation est un lieu permanent de
multiples décisions de nature, d’ampleur et de durée très diverses. Pour comprendre une
décision dans une organisation, il est donc nécessaire d’analyser les processus, à savoir
les différentes étapes qui conduisent à ces choix en relation avec les comportements des
acteurs et les influences et pouvoirs qui s’exercent au sein de l’entreprise. Les théories de
la décision récusent par conséquent les visions mécanistes de F.W. Taylor et de H. Fayol.
Contrairement aux présupposés de l’approche classique, les décisions ne correspondent pas
nécessairement à l’optimisation des variables économiques car de nombreux biais quantitatifs
et psychologiques entrent dans les processus de choix. Ceci est d’autant plus vrai que les
décideurs, à tous les niveaux de la hiérarchie, n’ont qu’une rationalité limitée et choisissent
dans un environnement incertain et difficilement formalisable (certains paramètres ne sont pas
connus et les enchaînements de cause à effet ne sont pas tous connus).

On entend par rationalité, une situation de choix dans laquelle l’acteur rationnel
en face de plusieurs branches alternatives va choisir celle qu’il croit aboutir au meilleur

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résultat global. Une décision est considérée comme absolument ou objectivement


rationnelle lorsque le décideur unique, individuel ou collectif, devant une occasion de
choix examine toutes les actions et comportements possibles et envisageables
(connaissance exhaustive), tient compte de l’ensemble des effets induits qui découleront
de chaque action et comportement, et parvient à sélectionner correctement la branche
d’alternative qui maximise la satisfaction des objectifs ou optimise les résultats par
rapport aux coûts encourus. Un tel décideur doit pour ce faire disposer d’un système de
préférences ou de valeurs ordonné, qui lui permette de définir des objectifs clairement définis,
explicites et stables dans le temps. Cette situation correspond à la rationalité de l’homo
aeconomicus capable sur un critère de choix objectif d’isoler la branche d’alternative qui
maximise sa satisfaction en fonction de son système de préférences.

Pour H.A. Simon, la rationalité ne peut être absolue et est de ce fait limitée par trois
séries de facteurs :
 l’information disponible : le décideur ne peut connaître parfaitement toutes les
informations pour choisir de manière optimale et rationnelle. En effet, la connaissance
complète de toutes les branches d’alternatives est extrêmement difficile, l’éventail des
possibles étant trop vaste. Le décideur ne peut appréhender toutes les dimensions d’un
problème a fortiori complexe, en raison de son caractère fragmentaire et incomplet.
De plus, l’anticipation de la réalisation de toutes conséquences qui suivent chacune
des actions est par définition impossible, leur survenance étant imprévisible.
L’ensemble des données nécessaires à maximiser la satisfaction de l’acteur ne sont pas
disponibles ou trop coûteuses pour qu’elles puissent raisonnablement s’opérer.
 les capacités du décideur : une prise de décision absolument rationnelle ne peut se
réaliser dans la pratique, compte tenu des limites physiques (fatigue, stress, résistance)
et intellectuelles (conceptualisation, mémorisation, prise de recul) des individus et de
leur incapacité cognitive à faire porter sur une seule décision tous les aspects de
valeurs, de connaissances et de comportements qui seraient susceptibles de
l’influencer ;
 les motivations du décideur : le système de valeurs, les buts, le comportement du
décideur influencent ses décisions bien plus que la logique intrinsèque du problème à
traiter. Or le système de préférences de l’individu n’est pas ordonné, ses objectifs ne
sont pas clairement définis et ses rarement explicites. Elles sont non seulement
instables dans le temps mais aussi relatives en fonction de la situation. De même,
l’individu peut émettre des objectifs contradictoires qui ne sont pas mutuellement
exclusifs. Dès lors, l’existence de motivations différentes et instables conduit à traiter
le problème sous un angle différent selon la nature des individus et relativement à la
situation. Il n’y a donc pas de décideur unique car plusieurs individus aux systèmes de
valeurs différents interfèrent dans le processus. Il en résulte l’apparition de décisions
de nature politique où les différents décideurs vont chercher à faire prévaloir leur
système de valeur.

Le décideur doit par conséquent être considéré comme un acteur ayant des
capacités cognitives (réflexes/facultés) et des motivations (valeurs/buts) limitées et
soumis au caractère contraignant de son environnement (connaissance limitée des
situations). Néanmoins, en dépit de ses limites, le décideur reste un acteur rationnel qui devra
faire un choix entre toutes les branches d’alternatives qu’il a à étudier. Naturellement, seul un
certain nombre de comportements lui viendront à l’esprit et la plupart des conséquences qui
découlent de ces actions ne seront jamais analysées et donc évaluées. Confronté à un choix,
l’individu va alors construire un modèle simplifié de la réalité, basé essentiellement sur

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l’observation et ses expériences passées, qui va lui permettre de rendre son


environnement plus contrôlable, moins complexe. Il aura en particulier tendance à se
replier sur des solutions déjà utilisées qui lui apparaissent relativement proches et qui s’étaient
avérées satisfaisantes. Du fait de sa rationalité limitée, l’individu ne va donc pas chercher
la solution optimale (qui consiste à maximiser les rapports coût-bénéfice de son
comportement d’une manière synoptique et globale) mais plutôt adopter un
comportement qui lui assure un niveau minimum de satisfaction de façon séquentielle.
Dès qu’il sent avoir trouvé une solution qui satisfait au mieux son critère, il adoptera,
sans chercher à aller plus loin dans son processus de sélection.

L’homme administratif de H.A. Simon est donc différent de l’homo oeconomicus. Il


ne maximise pas ses critères de choix (optimisation, il n’est pas capable non plus de détailler
l’ensemble de données nécessaires (information parfaite) et d’adopter une préférence totale
(motivation stable). Il s’inscrit avant tout dans une logique de rationalité limitée dans laquelle
il recherche un niveau minimum de satisfaction dans le cadre d’un système de contraintes
donné. Les travaux de Simon sont prolongés par de nombreux auteurs. March (1978) au-delà
de la seule rationalité limitée identifie d’autres formes de rationalité telles que la rationalité
des jeux (les individus poursuivent leurs intérêts, leur décision est le fruit de tactiques et de
calcul) et la rationalité adaptative (les individus adaptent en permanence leur position en
fonction des fluctuations de l’environnement et des informations qu’ils reçoivent).

Dans la continuité de Simon, certains travaux s’intéressent aux systèmes d’information


et de contrôle de décisions prises qui permettent à l’organisation de s’assurer de leur bien –
fondé lors de la phase de mise en œuvre. L’organisation met en place des procédures qui lui
permettent d’obtenir un « feed-back ». En fonction de la nature de ce dernier, plusieurs
options peuvent être prises ; poursuivre la mise en œuvre en cas de feedback positif ; modifier
la décision en cas de feedback négatif ; ignorer le feedback négatif et poursuivre la mise en
œuvre ; ne pas tenir compte d’un feedback négatif jugé comme temporaire et sans
conséquence sur l’entreprise ; ne pas intervenir en cas de feedback négatif et connaître une
crise importante. On peut aussi inscrire les travaux de Norbert Wiener sur la cybernétique
dans la même lignée. Ces recherchent reposent sur quatre principes :
 les systèmes doivent être capables de prévoir, comprendre et d’analyser les données de
l’environnement ;
 les systèmes doivent être capables d’exploiter les informations obtenues en fonction de
leurs normes et procédures internes ;
 les systèmes doivent être capables de mesurer et de détecter les éventuelles variables
entre ces informations et les normes ;
 les systèmes doivent permettre de prendre les mesures correctives en vue de s’adapter.

3.3.2. L’analyse systémique

3.3.3.1. Contexte

Ludwig Von Bertalanffy (1901 – 1972) est d’origine autrichienne. Il obtient en 1926 le
diplôme de Docteur à l’université de Vienne. Chercheur brillant, il s’intéresse à des domaines
aussi variés que la biologie expérimentale et théorique, l’épistémologie, la philosophie ou la
psychiatrie. La plupart de ses travaux ont été consacrés à l’exploration des applications de la
théorie des systèmes à l’ensemble des phénomènes psychologiques et sociaux.

3.3.3.2. Principes

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La théorie des systèmes s’est développée, à partir des années trente. Elle a, en
particulier, été élaborée par L. Von Bertalanffy (1968). Elle se propose de fournir une
approche globale des organisations tenant compte de la complexité croissante de
l’environnement (accélération, changement technologique…) en faisant converger les
apports des différentes sciences (biologie, sciences sociales, physique…). La démarche
consiste à isoler logiquement les composants d’un système pour les étudier
individuellement, puis à reconstituer le système afin d’en avoir une vision globale.
L’analyse systémique assimile l’organisation à un système (ensemble de parties
interdépendantes, agencées en fonction d’un but) complexe ouvert sur son
environnement (Katz et Kahn, 1966) que l’on définit comme l’ensemble des éléments
extérieurs à l’entreprise ayant une influence sur elle et qu’elle peut influencer en retour.
Le système organisationnel est concret, finalisé, organisé, dynamique et régulé et est composé
de sous-systèmes notamment social et technique qui interagissent pour l’accomplissement
des tâches requises par le projet de l’entreprise et l’atteinte d’une certaine performance. Pour
pouvoir survivre, l’organisation noue des relations avec ses parties prenantes externes
(importation et exportation) qui lui permettent de se « nourrir » (acquisition de collaborateurs,
d’actifs corporels et incorporels, de moyens financiers) en vue de réaliser des transformations
(production de biens et de services) dont la valeur créée doit être supérieure aux ressources
consommées. Pour comprendre le fonctionnement du système organisationnel, on doit
s’intéresser aux relations entre les sous-systèmes car le système n’est pas réductible à la
somme de ses parties. C’est dans les interactions qui se créent entre les parties que se joue
l’organisation.

L. Von Bertalanffy (1968) formule certaines caractéristiques d’un système qui


permettent de comprendre son fonctionnement : 1) un système est soumis à des changements
et passe d’un état stable à un autre ; 2) un système est en permanence à la recherche de son
équilibre. Il y parvient en corrigeant certaines variables du système par un processus de
régulation. Ainsi, la loi de croissance de l’entropie (deuxième loi de la thermodynamique)
exprime la tendance de tout système à se désorganiser, à se détériorer et à se dissoudre. Pour
résister à cette évolution, un système a besoin d’entropie négative (neg-entropie) en quantité
au moins égale. De fait, aucune forme organisationnelle n’est définitivement satisfaisante.
Toute situation acquise est menacée. Les managers doivent en permanence recenser les
sources d’entropie afin d’envisager les actions correctives qui s’imposent. Or, plus la variété
du système augmente (système et environnement complexe) plus il devient difficile
d’anticiper et de le piloter. Ainsi, au-delà d’un certain degré de complexité, il devient
illusoire de vouloir comprendre ou contrôler un système (concept de barrière de variété). Or,
pour Emery et Trist (1965), l’environnement est soumis à des changements dont le taux
s’accélère et qui évolue vers une complexité croissante. Ils distinguent quatre types
d’environnement : le type 1 correspond à un environnement stable et aléatoire ; le type 2 est
un environnement stable mais plus complexe et structuré ; le type 3 est un environnement
instable et réactif ; enfin le type 4 est l’environnement du futur. Il s’apparente à un champ de
turbulence, toujours en mouvement. Emery et Trist (1969) font l’hypothèse que seul un effort
collectif de plusieurs organisations peut leur permettre de faire face à cet environnement et de
s’adapter (théorie de l’écologie sociale).

Dans la lignée des recherches sur les systèmes ouverts, on trouve les travaux portant
sur les caractéristiques de l’environnement et notamment les types et les rôles des parties
prenantes. Ils conduisent à analyser l’organisation en étudiant les acteurs et les facteurs qui
composent son environnement. On peut alors distinguer, d’une part, l’environnement

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immédiat de l’organisation composé de ses clients, concurrents, fournisseurs et sous-


traitants et d’autre part son environnement général composé de parties prenantes plus ou
moins immatérielles mais ayant une influence importante sur l’entreprise telle que la politique
économique d’un pays (inflation, taux d’intérêt, niveau de la monnaie, des impôts, des
subventions…), la dimension culturelle et socio-éducative (degré de formation et culture
générale des individus…), les facteurs technologiques, démographiques et politico-juridiques.
Il est alors possible de représenter l’organisation comme un système ouvert en interaction
avec ses différentes parties prenantes (fig. 3.1). Sa survie dépend de sa capacité à nouer des
relations constructives (capacité à fixer des règles du jeu, capacité à nouer des alliances,
capacité à satisfaire des attentes souvent contradictoires).

FIGURE 3.1. L’organisation et ses parties prenantes

Facteurs économiques Marché financier Marché du travail

Clients Concurrence

Démographie L’organisation Pouvoir public

Facteurs socio-culturels

Technologie Ecologie Fournisseurs/sous-


traitants

CHAPITRE 4

LA PLANIFICATION STRATEGIQUE

Objectifs

A l’issue du chapitre, vous devriez être capable de


- expliquer l’appellation planification stratégique
- définir le terme planification et en montrer au moins trois avantages et trois
inconvénients
- différencier les types de plans
- décrire la démarche pour arriver à choisir une stratégie
- réfléchir sur une stratégie qui pourrait être retenue dans le cadre d’une école.

----------------------------------------------------------------------------------

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La planification est la première des fonctions du management. Pour survivre et croître,


toute organisation doit se livrer à un exercice plus ou moins intense de planification. Ce
processus permet non seulement de fixer les objectifs, mais aussi d’intégrer efficacement
toutes les ressources de l’organisation de façon à atteindre ces objectifs de manière rentable.
La planification détermine la dimension et les caractéristiques de l’organisation
capables d’assurer son bon fonctionnement, les types de programmes d’impulsion et
d’activités nécessaires, les systèmes de contrôle permettant de suivre la progression vers
les objectifs. La planification répond aux questions suivantes : Où en sommes-nous ? Où
voulons-nous aller ? Comment y aller ? Est-ce que nous progressons ?

La planification est l’une des tâches les plus compliquées et difficiles à mener à bien
par les dirigeants. L’action est la clé de la réussite, et non la planification ou la réflexion.

4.1. Définition de la planification

La planification consiste à sélectionner des informations et à faire des hypothèses


sur l’avenir afin de définir les activités nécessaires pour atteindre les objectifs de
l’organisation. Elle se compose de nombreuses décisions concernant l’avenir. Elle est une
dépense immédiate de réflexion et du temps qui est un investissement pour l’avenir. Certains
ont dit qu’elle consiste à découvrir les choses aujourd’hui pour permettre d’avoir un avenir
demain.

En somme, la planification passe par la définition des objectifs de l’organisation,


l’élaboration d’une stratégie globale pour les atteindre et la création d’une hiérarchie
complète de plans pour intégrer et coordonner des activités. Elle concerne donc tout autant
les fins (ce qu’il faut faire) que les moyens (la façon de procéder).

La planification peut être plus ou moins formalisée. Certains managers, tout en


planifiant, ne mettent que peu d’idées sur papier et seules quelques personnes connaissent les
objectifs à atteindre, qui sont d’ailleurs rarement verbalisés. Cette approche de la planification
est surtout adoptée par les petites organisations où le manager qui est en même temps
propriétaire possède une vision personnelle de l’horizon visé et du moyen d’y parvenir.

D’autres managers donnent une tournure beaucoup plus formelle à la planification : ils
rédigent les objectifs et les diffusent auprès des membres de l’organisation, en traçant
clairement la route à prendre afin d’atteindre ces objectifs.

4.2. Avantages et inconvénients de la planification

La planification a ses défenseurs et ses détracteurs. Les uns et les autres avancent des
arguments pour ou contre.

4.2.1. Avantage d’une planification

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Les partisans de la planification à tout prix disent que la planification formelle


comporte de nombreux avantages qui devraient inciter les responsables, à tous les niveaux de
l’organisation, à concentrer plus de temps et d’efforts sur cette fonction du management. Des
listes souvent longues qui ont été proposées, nous retiendrons que la planification permet
d’avoir une orientation, de réduire l’impact des changements, de limiter les pertes et les
actions superflues et enfin d’établir des normes facilitant le contrôle.

La planification permet de mettre des efforts en commun en indiquant à l’ensemble


de l’organisation la direction à suivre. C’est en connaissant la cible et la façon de l’atteindre
que les membres de l’organisation sont motivés à coordonner leurs activités, donc à coopérer
et à travailler en équipe.

En obligeant les managers à regarder droit devant, à anticiper les changements et à en


évaluer les conséquences pour formuler des réponses adéquates, la planification réduit le
facteur d’incertitude, sans le supprimer pour autant. Elle annonce également l’impact des
décisions prises en fonction des changements qui se produisent, ce qui est parfaitement adapté
aux environnements chaotiques.

Par ailleurs, planifier revient à éliminer les activités redondantes et superflues


grâce à une coordination avant toute action. Une fois les fins et les moyens identifiés, l’inutile
apparaît clairement.

Enfin, la planification fixe des objectifs ou des normes pour permettre d’exercer
un contrôle. Avec des objectifs détaillés, les performances peuvent être évaluées et en cas
d’écart, une correction devient possible. Mais aucun contrôle ne sera réellement efficace sans
planification préalable.

4.2.2. Inconvénients de la planification

D’un autre côté, les réticents à l’égard de la planification affirment que son utilisation
présente des inconvénients ou du moins se heurte à des limites dont on retient les suivantes :

1. La planification peut être source de rigidité. Les efforts de planification peuvent


enfermer une organisation dans un cadre strict d’objectifs et des dates spécifiques. Au
moment de fixer ces objectifs, l’idée était peut – être que la situation ne changerait pas d’ici à
leur réalisation. Au cas où l’hypothèse se révèle inexacte, les managers se retrouvent en
difficulté s’ils ne savent pas faire preuve de souplesse, voire s’écarter totalement du plan
initial. Il est en effet risqué de vouloir suivre à tout prix un chemin tracé si le passage change.

2. Plans et environnement dynamique sont incompatibles. La plupart des organisations


sont aujourd’hui confrontées à des changements dynamiques. L’environnement ne restant pas
le même, comment établir des plans ? Le caractère aléatoire et imprévisible des affaires rend
indispensables deux qualités : savoir gérer le chaos et transformer les problèmes en
opportunités, d’où le besoin de flexibilité que des plans stricts n’offrent pas.

3. Les plans ne peuvent remplacer l’intuition et la créativité. Une organisation qui


fonctionne le doit généralement à la vision d’une personne. Le fait est qu’avec le temps, cette
vision prend une allure officielle et les efforts de planification répondent à une méthodologie :
rechercher les capacités et possibilités de l’organisation et les analyser de façon mécanique,
ce qui réduit la vision initiale à une routine programmée.

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4. La planification accorde la priorité à la concurrence d’aujourd’hui et non à la survie


de demain. La tendance est de planifier pour exploiter au maximum les possibilités du
moment, ce qui laisse peu de marge pour créer ou réinventer un secteur d’activité. Les plans
élaborés peuvent donc conduire à des impairs et à des dépenses pour compenser un retard
alors que les autres ont plusieurs longueurs d’avance. Parfois, certaines entreprises ont réussi
en se jetant à l’eau et en mettant sur pied des activités au fil de leur progression, sans cadre
d’action précis.

5. La planification renforce la réussite, mais peut faire baisser la vigilance. En gros, si


quelque chose fonctionne bien, il est essentiel de ne surtout pas y toucher. Pourtant, la
pratique ne donne pas toujours raison à cette idée et une réussite initiale peut conduire à un
échec final, dès lors que l’on se situe dans un environnement aléatoire. Certes, il est difficile
de modifier ou d’abandonner ce qui fonctionne, c’est-à-dire de perdre cette tranquillité et
d’affronter l’inconnu. Toutefois, les plans qui marchent procurent parfois un sentiment erroné
de sécurité et une confiance exagérée. Dans ce cas, la porte sur l’inconnu n’est ouverte qu’une
fois au pied du mur. Il est peut-être alors trop tard.

Etant donné les inconvénients de la planification, on est en droit de se demander si elle


améliore les performances de l’organisation. En d’autres termes, on se demande si établir des
plans revient à marquer davantage de problèmes.

En dépit de critiques formulées à l’égard de la planification, il ressort que les


organisations doivent se prêter à ce jeu, sans pour autant y voir une garantie de performance
accrue.

Nombre d’études se sont penchées sur le lien entre planification et performances. Les
conclusions sont les suivantes : oui, planification rime généralement avec augmentation de
bénéfices, meilleure rentabilité et autres avantages financiers. De plus, la qualité et la mise en
œuvre des plans jouent plus sur les performances que leur portée. S’il n’y a pas gain de
performances enfin, seul l’environnement est responsable (par exemple, lois ou contraintes
qui réduisent la marge de manœuvre).

4.3. Types de plans

La classification des plans peut se faire en considérant les critères suivants : leur
portée (stratégique ou opérationnelle), leur durée (court ou long terme), leur spécificité
(directionnel ou spécifique) et leur fréquence (ponctuel ou permanent).

4.3.1. Planification stratégique et opérationnelle

Les plans stratégiques s’adressent à l’organisation dans son ensemble, fixent des
objectifs généraux et cherchent à positionner l’entreprise par rapport à son environnement. Ils
déterminent les efforts à déployer pour atteindre un but et servent de base aux plans
opérationnels dans les échelons inférieurs de l’organisation.

Les plans opérationnels exposent en détail comment parvenir aux objectifs généraux
et se différencient des premiers sur trois points : la durée, la portée et le contenu. Les plans
opérationnels couvrent de courtes périodes (ils sont mensuels, hebdomadaires, voire
quotidiens), les stratégiques se projetant en principe à cinq ans ou plus et portant par ailleurs

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48

sur des données génériques. De plus, les premiers décrivent comment atteindre des objectifs,
les seconds se contentant de les formuler. Les plans opérationnels sont parfois appelés des
tactiques.

4.3.2. Planification à long et court terme

Les analystes financiers ont pour habitude de décrire les bénéfices sur investissements
sur le court (moins d’un an) et le long terme (au-delà de cinq années). Les managers ont
calqué cette terminologie pour les plans qu’ils élaborent.

La différence entre les plans à court terme et à long terme est essentielle quant à
la durée des engagements et au degré de variabilité à gérer qu’ils impliquent. Plus les
plans déterminent les engagements à venir, plus leur durée doit être longue : ils doivent
projeter suffisamment l’entreprise dans le temps pour honorer les engagements pris sur le
moment. De façon générale, une durée mal évaluée nuit à l’efficacité. D’autre part, plus
l’incertitude est grande et plus les plans doivent être de courte durée : si des changements
technologiques, sociaux, économiques ou autres se produisent en peu de temps, il est
impensable d’imposer une orientation rigide car le vrai besoin est une flexibilité accrue.

4.3.3. La planification directionnelle et spécifique

Les plans spécifiques sont préférables aux plans directionnels, en ce sens qu’ils
énoncent des objectifs concis, sans ambiguïté ou risque de malentendus. Par exemple, un
dirigeant cherchant à accroître les ventes de 10% sur un an peut décider une procédure
spécifique, des affectations budgétaires et un calendrier.

Les plans spécifiques présentent cependant des inconvénients par leur besoin de
prévisibilité. En cas d’incertitude requérant une grande souplesse d’action, les plans
directionnels semblent plus appropriés. Par exemple, un plan spécifique peut viser une
réduction de coûts de 10% et une augmentation de 8% des recettes au cours de six mois qui
viennent ; pour sa part, un plan directionnel peut viser une hausse de 6% à 12% des bénéfices
également lors du prochain semestre. La flexibilité est flagrante dans le second cas et peut
l’emporter sur la perte de définition propre à la première option.

4.3.4. La planification ponctuelle et permanente

Certains plans sont conçus pour une application unique, d’autres à plusieurs
reprises. Un plan ponctuel répond à une situation unique (exemple l’achat d’une autre
entreprise) (une opportunité qui se présente).

A l’inverse, les plans permanents concernent des actions qui se répètent dans
l’organisation. Par exemple, l’enregistrement des renouvellements des commandes pour le
semestre suivant obéit à un plan permanent du service commercial ou de l’unité de
production. Les dates changent, les volumes aussi, mais le processus reste le même et peut
être anticipé.

4.4. Le management par objectifs

Il est impensable aujourd’hui de parler de planification sans se situer dans la


perspective du management par objectifs (MPO). Ce processus consiste pour les managers et

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leurs collaborateurs à fixer des objectifs de performances précis : les résultats sont
régulièrement analysés et des récompenses peuvent être attribuées en conséquence. Les buts
ne servent pas de contrôler mais plutôt de motiver.

4.4.1. Qu’est-ce que le management par objectifs

Le management par objectifs remonte à près de cinquante ans et son intérêt tient dans
la transformation d’objectifs collectifs en objectifs spécifiques, tant pour des unités
organisationnelles que pour des individus.

Les objectifs deviennent opérationnels car ils sont tout au long de la ligne
hiérarchique. Les objectifs globaux de l’organisation sont traduits en objectifs propres à
chaque sous-niveau (division, service, individu). Sachant que les responsables d’unités
inférieures définissent leurs propres objectifs, le MPO fonctionne aussi bien dans le sens
ascendant que descendant, d’où une hiérarchie dans laquelle les objectifs d’un niveau sont liés
à ceux du niveau suivant. De cela l’individu tire des objectifs personnels et connaît ainsi sa
contribution à la réussite de son unité. Si tous les employés atteignent leurs buts, l’unité en
fait de même et les objectifs plus généraux deviennent réalité.

Objectifs
globaux de
l’organisation

Objectifs par
division ou
direction

Objectifs par
unité ou département

Objectifs individuels

4.4.2. Le programme MPO

Le programme de MPO comprend quatre ingrédients essentiels : spécificité des


objectifs, prise de décision participative, durée d’application explicite et feedback sur les
performances.

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Avec un MPO, les buts à atteindre doivent correspondre à des formulations concises et
précises. Une simple expression d’attente, par exemple « réduire les coûts », « améliorer le
service ou la qualité », ne suffit pas car elle n’a rien de tangible (c’est-à-dire difficile à
mesurer). Ces attentes doivent plutôt être traduites en véritables objectifs afin de pouvoir faire
l’objet de mesures et d’évaluations. Par exemple, elles signifieront la réduction de 8% des
coûts par département, l’amélioration du service en garantissant le traitement de toutes les
déclarations de sinistre dans les soixante-douze heures suivant réception ou une hausse de la
qualité avec des retours de marchandise inférieurs à 0,5% des ventes.
Dans le cadre de MPO, les objectifs ne sont pas fixés de façon unilatérale par le
manager et imposés ensuite à ses différents collaborateurs. Le schéma s’éloigne de l’approche
traditionnelle pour laisser place à une participation active. Dirigeants, managers et personnels
de terrain décident ensemble des buts à atteindre dans un temps imparti (généralement trois,
six ou douze mois).

Le dernier ingrédient entrant dans la composition de ce type de programme est le


feedback sur les performances et les objectifs. Pour cela, les individus doivent recevoir des
commentaires précis, afin d’être en mesure de contrôler et de corriger leurs actions. En
complément, peuvent aussi se tenir des réunions d’évaluation, à l’occasion desquels chefs et
subalternes analysent la progression et donnent leurs avis.

4.4.3. Le MPO est-il bénéfique ?

Il n’est pas aisé de savoir à quel point l’utilisation du MPO est efficace. On peut
néanmoins se référer aux ouvrages et recherches abordant la relation entre les objectifs et
performances. Si l’acceptation des buts et les compétences de la personne sont tenues à un
niveau constant, des objectifs plus complexes entraînent des performances accrues. Bien que
les objectifs les plus difficiles soient certes moins souvent atteints par ceux les ayant acceptés,
ils débouchent néanmoins sur un niveau de performances toujours supérieur à celui des
individus ayant reçu des objectifs plus faciles.

Par ailleurs, les études en la matière concluent que des objectifs à la fois spécifiques et
difficiles à atteindre sont à l’origine d’un meilleur rendement que ceux plus génériques, du
genre « faites de votre mieux ». Le feedback est un autre facteur influençant les performances
car il permet d’une part de savoir si les efforts déployés sont suffisants et d’autre part
d’augmenter d’un cran la difficulté des objectifs une fois l’un d’eux atteint.

Tous les résultats d’études mentionnés ici sont cohérents avec le double principe
d’objectifs spécifiques et de feedback. Plutôt que de l’énoncer clairement, le MPO sous-
entend que les objectifs doivent être perçus comme faisables, comme réalisables par eux. La
recherche démontre que l’efficacité est plus grande si la difficulté vient pousser les individus
à se dépasser.

Pour ce qui est de la participation, les études montrent qu’imposés ou fixés


« démocratiquement », les objectifs de niveau de difficulté constant amènent des
performances similaires. La participation n’est donc pas un facteur déterminant sur ce point ;
sa caractéristique, en revanche, est qu’elle pousse les individus à adopter des objectifs plus
complexes, ce qui peut stimuler la performance.

Les études portant sur les programmes actuels de MPO confirment leurs conséquences
positives sur les performances et la productivité, notamment grâce à l’engagement du

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management envers ce processus. Si les hauts dirigeants lui accordent toute la place et
s’impliquent personnellement dans sa mise en œuvre, les gains de productivité se révèlent
supérieurs.

4.4.4. Définir les objectifs des collaborateurs

Les collaborateurs de l’entreprise doivent bien cerner les tâches qui leur reviennent.
Par ailleurs, le manager doit en outre contribuer à la réalisation de cette tâche en leur
permettant de se fixer des objectifs de travail. Ces deux idées, qui semblent évidentes, ne se
vérifient pas toujours. La fixation d’objectifs constitue une compétence managériale
essentielle, que tout responsable se doit de perfectionner. Ce processus peut être facilité si le
manager s’efforce de respecter les étapes suivantes :
 Identifier les tâches clefs d’un employé. Pour fixer les objectifs, il faut d’abord savoir
ce que les employés doivent faire. Le mieux pour cela est de se référer à la description
de poste.
 Définir des objectifs spécifiques et stimulants pour chaque tâche clé. Identifier le
niveau de performance attendu de chaque individu. Décider la cible qu’il doit
atteindre. Fixer également une date limite pour chaque objectif, afin de réduire
l’ambiguïté. Ces délais de réalisation ne doivent cependant pas être définis de façon
arbitraire ; ils doivent demeurer réalistes par rapport à la mission à accomplir.
 Permettre à l’employé de participer activement. Si les employés participent à la
définition des objectifs, ils sont plus à même de les accepter facilement. L’attitude de
participation doit néanmoins être sincère. En d’autres termes, le manager doit
démontrer une confiance dans leurs propositions, et ne pas les considérer comme de
simples formalités.
 Définir des priorités pour les objectifs. Il faut prendre soin de classer les objectifs par
ordre de priorité afin de motiver les individus à agir de façon ordonnée, en faisant des
choix. Ces objectifs doivent être ordonnés en fonction de leur degré de difficulté et
d’importance.
 Instaurer des mécanismes de feedback afin d’évaluer la progression. Grâce au
feedback, les employés savent si leurs efforts sont suffisants pour atteindre un objectif.
Il doit être pratiqué par chaque individu et son supérieur, et ce de façon régulière.
 Attribuer des récompenses. Il est naturel que les employés s’attendent à quelque chose
en retour de leurs efforts. Leur niveau de satisfaction aura tendance à augmenter si
l’obtention de récompense est liée à l’atteinte des objectifs.

On peut adopter, dans la fixation des objectifs, une démarche « descendante » ou


« ascendante ». La première peut être illustrée comme suit :
Le Président Directeur Général demande vers la fin de l’année à tous ses vice-présidents :
1. Quelles sont les réalisations remarquables que vous avez obtenues au cours des douze
derniers mois ?
2. Quelles sont les grandes réalisations que vous envisagez pour l’année à venir ?
3. Ces réalisations sont-elles mesurables ? Si oui, expliquez comment vous les
mesurerez.
Chaque vice-présidente envoie ensuite des demandes semblables à ses collaborateurs, ceux-ci
font de même à leur tour, et ainsi de suite jusqu’à la base. Les réponses constituent l’assise qui
permettra de fixer les objectifs. Chaque supérieur examine les réponses de ses subordonnés et
ils fixent ensemble des objectifs pertinents à partir des connaissances, de la compréhension et
de la capacité d’adhésion du supérieur et des subordonnés. Ensuite chaque supérieur se

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concerte avec le niveau hiérarchique suivant. La procédure se répète de niveau en niveau


jusqu’au président.

Dans la démarche ascendante, chaque individu commence par formuler ses objectifs et
les soumet à son supérieur pour modification et approbation commune. Chaque supérieur
agrège ensuite les objectifs, les formule et les soumet au niveau immédiatement supérieur
pour discussion, modification et approbation commune. La procédure se poursuit jusqu’à ce
que le président directeur général décide, avec ses principaux collaborateurs, les objectifs de
la société. Ces objectifs sont ensuite transmis aux directeurs de département, qui déterminent
les objectifs de leur département qui sont nécessaires à la réalisation de l’objectif d’ensemble.
Après approbation par le président, les objectifs du département s’imposent aux unités qui les
composent et les réalisations fixées deviennent la norme qui permettra d’évaluer le directeur
du département.

De la même façon, les objectifs sont fixés pour tous les membres de l’entreprise, à tous
les niveaux de celle-ci. Ne pas oublier : la période future doit être précisée, la tâche à effectuer
pour atteindre l’objectif praticable, suffisante et accessible, la méthode de mesure des
réalisations clairement définie, et les objectifs doivent être compatibles avec les plans qui ont
été établis pour l’ensemble de l’entreprise sur la même période.
C’est une façon de fixer les objectifs.

4.4.5. Limites du MPO

Même s’il est prouvé que les performances élevées vont de pair avec la poursuite d’un
but, le concept d’objectifs ne fait pas forcement l’unanimité. Ainsi, W. Edwards Deming était
un grand détracteur du MPO. Selon lui, les objectifs spécifiques font plus de mal que de bien :
les employés concentrent tous leurs efforts sur ce qui sert d’indicateurs de leur travail et
cherchent davantage la quantité (ce qui est mesuré) que la qualité de rendement. D’autres
esprits critiques voient dans les objectifs spécifiques un encouragement à l’accomplissement
personnel plutôt qu’au travail d’équipe. De plus, Deming pensait que les objectifs
s’apparentent plus à des plafonds qu’à des tremplins : une fois ces derniers atteints, le
personnel a tendance à se détendre, à voir son potentiel limité et à n’être guère motivé pour
chercher continuellement à avancer.

Toutes ces critiques restent assez fondées, même s’il est possible de les mettre en
cause. Les managers doivent donc s’assurer que les employés possèdent plusieurs
objectifs et que la qualité occupe autant de place que la quantité dans leurs efforts. Par
exemple, un expert en sinistres ne doit pas uniquement être jugé sur le nombre de
plaintes traitées, mais aussi sur des erreurs commises. Les managers doivent aborder le
MPO comme une activité continue en révisant régulièrement les objectifs. Il leur faut
aussi récompenser des employés s’étant fixé des buts complexes même s’ils ne les
atteignent pas : au lieu de leur faire penser qu’ils risquent une sanction si une mission
n’est pas totalement remplie, il faut les encourager à choisir des cibles ambitieuses
permettant d’étendre leurs compétences, sans crainte d’échouer. Le mot d’ordre est
donc une mise à jour régulière des objectifs en compagnie des employés et la mise en
œuvre des changements dès lors qu’ils sont justifiés.

4.5. La stratégie, une dimension essentielle de la réussite des organisations4


4
Cette partie n’aurait pas été écrite si dans notre système d’enseignement il n’y avait pas de privés qui créent des établissements qui entrent
en concurrence avec les autres et s’il n’existait pas des réseaux d’enseignement différents qui peuvent en quelque sorte aussi être considérés
comme des concurrents.

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La planification stratégique a remplacé la planification à long terme des années 60 et


70. A partir des années 80, les règles de jeu n’étaient plus les mêmes et les managers ont dû
apprendre comment analyser systématiquement leur entourage, évaluer les forces et
faiblesses des organisations et détecter les marchés sur lesquels dégager un avantage
concurrentiel.

L’avantage d’une planification stratégique est évident : les entreprises qui s’y prêtent
ont généralement une situation financière supérieure aux autres. Cette pratique a d’ailleurs
débordé les limites du secteur privé pour intégrer certaines administrations, des hôpitaux ou
des établissements d’enseignement supérieur.

4.5.1. Choix stratégique : choisir un créneau

Au moment d’élaborer une stratégie, une organisation passe par un processus de


management stratégique en neuf étapes, intégrant la planification, l’implantation et
l’évaluation. A elle seule, la planification stratégique regroupe sept étapes, les deux suivantes
restant néanmoins indispensables pour obtenir un résultat satisfaisant.

L’étape 1. Afin d’élaborer une stratégie, les membres d’une organisation doivent
commencer par identifier la mission, les objectifs et les stratégies actuelles de la mission.
A travers sa mission stratégique (but à atteindre par l’entreprise), toute organisation expose
ses fins ainsi que les activités auxquelles elle se prête. En rédigeant cette déclaration, le
management est obligé de préciser en détail l’étendue des produits et services. Ex. Le
magazine fast company définit sa mission ainsi : « La chronique de changements épiques
balayant le monde des affaires et la transmission aux lecteurs des idées, outils et tactiques
nécessaires à leur épanouissement ».

L’étape 2. Dans toute organisation, le management doit analyser son environnement.


L’analyse de l’environnement externe permet de mieux élaborer les stratégies qui
conviennent. Pour ce faire, il est nécessaire de recueillir et de traiter quantité d’informations
afin d’y déceler des tendances émergentes permettant ensuite de créer un ensemble de
scénarios possibles. La veille concurrentielle constitue l’un des aspects les plus évolutifs de
l’analyse de l’environnement. Elle consiste à rechercher des informations sur les
concurrents : qui sont-ils ? en quoi leur activité peut-elle nous affecter ? Les données
précises sur la concurrence peuvent permettre d’anticiper des actions au lieu d’attendre
qu’elles aient eu lieu pour réagir. La veille concurrentielle n’est pas l’espionnage industriel
puisque publicités, matériel promotionnel, communiques de presse, rapports d’organismes
gouvernementaux, rapports annuels, offres d’emploi, articles de journaux, données sur
Internet et études de marché sont autant de sources à disposition de quiconque. En outre, de
plus en plus d’informations spécifiques sur un secteur et les organisations concernées sont
accessibles via des bases de données électroniques commercialisées par des entreprises
spécialisées. De même, les salons professionnels ainsi que les réunions avec le propre
personnel des ventes sont des mines d’informations. Il y a aussi l’achat de produits
concurrents pour être testés par les employés et en comprendre l’innovation technique.

Toutes les démarches évoquées peuvent révéler des problèmes auxquels une
organisation doit se préparer à faire face. Toutefois, dans un contexte commercial mondial,
l’analyse de l’environnement et l’obtention d’informations peuvent se révéler plus délicates.
Les données pertinentes viennent désormais du monde entier, ce qui rend les techniques

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précédentes insuffisantes. Pour bénéficier davantage de marge, les managers peuvent


désormais s’abonner à de nouveaux services de synthèse, créés par des journaux, des
magazines ou des agences de presse.

L’étape 3. Au terme de l’analyse de l’environnement, le manager doit évaluer les


données obtenues en termes d’opportunités (stratégiques) à exploiter et de menaces à
affronter. Les opportunités sont des facteurs externes positifs et les menaces des facteurs
négatifs.

Toutefois, le même environnement peut être porteur d’opportunités pour une


organisation et supposer des obstacles pour une autre, dans un secteur identique ou similaire,
en raison de leurs ressources ou priorités propres.

Etapes 4. Elle consiste à oublier l’extérieur pour observer attentivement l’intérieur de


l’organisation, à savoir évaluer les ressources internes dont elle dispose : compétence des
effectifs, trésorerie, capacité à développer des produits innovants, perception par la clientèle
de l’image renvoyée et de la qualité des produits et services proposés.

Lors de cette étape, le management doit assimiler que toute entreprise, quelles que
soient sa taille et sa puissance, est en quelque sorte limitée par les ressources et les
compétences à disposition. A l’issue de l’étape 4, les ressources internes telles que capital,
compétences du personnel ou brevets doivent être très clairement recensées, tout comme les
fonctions des départements formation, marketing, comptabilité, ressources humaines, R&D ou
systèmes informatiques. Toutes ces ressources ou capacités représentent des forces
(stratégiques), parmi lesquelles la compétence clé va garantir l’avantage concurrentiel.
L’absence de certaines ressources ou l’existence d’activités pour lesquelles une organisation
n’est pas efficace correspondent à des faiblesses (stratégiques).

L’étape 5. Elle concerne l’assimilation de la culture d’entreprise et l’évaluation des


forces et faiblesses qu’elle présente. Dans une culture forte, la majorité des employés
comprennent les principes de l’entreprise, et le management transmet sans difficulté la
connaissance de la compétence clé aux nouveaux venus. L’inconvénient d’une culture forte
est qu’elle est difficile à faire évoluer et peut devenir un frein au changement des stratégies de
l’organisation. Des organisations brillantes et de culture forte peuvent aussi se retrouver
prisonnières de leurs exploits passés.

Dans ce contexte, on parle de l’analyse SWOT quand une entreprise met en


commun les forces (strenghts), les faiblesses (weakness), les opportunités (opportunities)
et les menaces (threats) afin de trouver un créneau à exploiter. Au terme de l’analyse,
l’organisation repense sa mission et ses objectifs en se demandant s’ils sont réalistes et s’ils
ont besoin d’être modifiés. Si des changements s’imposent quant à l’orientation globale, c’est
de cette analyse qu’ils doivent émerger. Si aucun changement n’est nécessaire, les stratégies
peuvent d’ores et déjà être élaborées par le management.

4.5.2. La formulation d’une stratégie

Tous les niveaux de l’organisation ont besoin de stratégies (étape 7). Pour ce faire, le
management en élabore plusieurs avant de choisir celle s’adressant à chaque niveau et
annonçant la meilleure exploitation des ressources et opportunités à disposition dans
l’environnement. Le plus souvent, quatre stratégies fondamentales sont possibles

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55

4.5.2.1. La stratégie de croissance

Si pour le management « toujours plus » signifie aussi « toujours mieux », cette


stratégie a toutes les chances d’être adoptée. Avec une stratégie de croissance,
l’organisation tente d’augmenter le niveau des opérations, que ce soit une hausse des
recettes des ventes, un personnel plus important ou une meilleure part de marché.
Souvent, l’objectif est atteint en jouant la carte de l’expansion directe, du développement de
nouveaux produits, d’amélioration de la qualité ou de diversification (fusion ou
acquisition d’autres entreprises).
L’expansion directe suppose une augmentation de la taille de la compagnie, de ses
revenus, de ses activités ou des effectifs. Tout l’effort vient de l’intérieur de la structure, sans
recours à des partenaires externes.

Les entreprises gagnent aussi de l’ampleur en fusionnant avec d’autres ou en rachetant


des homologues. Il y a fusion lorsque deux compagnies, généralement de taille similaire,
mettent leurs ressources en commun pour former une nouvelle entité. Dans le cas d’une
acquisition (comparable à une fusion), une compagnie en achète une plus petite pour une
quantité d’argent et/ou de titres afin de s’approprier ses opérations. Ce type d’acquisition
dénote généralement une volonté de se diversifier.

4.5.2.2. La stratégie de stabilité

Une stratégie de stabilité est mieux connue pour ce qu’elle n’est pas, c’est-à-dire
l’absence de changements significatifs. L’organisation vise toujours le même marché et la
même clientèle et conserve sa part de marché. Ce type de stratégie se justifie surtout lorsque
plusieurs facteurs sont réunis : environnement stable, performances satisfaisantes, forces
importantes et absence de faiblesses majeures, opportunités et menaces neutres.

4.5.2.3. La stratégie de repli

Les progrès technologiques, la concurrence mondiale et d’autres bouleversements de


cet ordre ont rendu les stratégies de croissance et de stabilité insuffisantes pour certains, les
contraignants ainsi à opter pour une stratégie de repli pendant un certain temps, stratégie
caractérisée par une réduction des dépenses, la diminution de la taille, l’abandon de lignes de
produits non rentables, etc.

4.5.2.4. La stratégie combinée

Elle consiste à adopter simultanément au moins deux stratégies mentionnées


auparavant. Ce peut être par exemple une recherche de croissance, accompagnée d’une
réduction des coûts.

4.5.3 Le choix d’une stratégie concurrentielle

Le choix d’une stratégie concurrentielle est déterminant pour une entreprise dans son
ensemble et chaque unité doit en tirer des sous-stratégies afin de dégager un avantage
concurrentiel. Aussi les managers doivent-ils chercher à bien positionner les diverses unités
afin de les rendre compétitives, et ce en analysant dans le détail les forces dictant les règles de
la concurrence dans le secteur de l’activité concerné. La théorie de Michael Porter laisse aux

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56

managers l choix entre trois stratégies compétitives génériques, l’idée étant qu’aucune
entreprise ne peut excéder un niveau moyen de rentabilité en essayant d’être présente sur tous
les fronts. Au lieu de cela, l’organisation doit opter pour une stratégie concurrentielle qui lui
offre un avantage différent, en exploitant ses forces et celles du secteur. Selon Porter, le choix
peut se faire entre domination par les coûts, la différenciation et la focalisation.

4.5.3.1. La stratégie de domination par les coûts

Selon Porter, cette stratégie consiste à se positionner comme le fabricant ou le


distributeur le moins cher d’un secteur. La réussite est liée au fait d’être meilleur marché,
tout en offrant un produit ou un service comparable à la concurrence (ou du moins
acceptable). Pour s’assurer cet avantage, le secret est un fonctionnement efficace, des
économies d’échelle, l’innovation technologique, une main-d’œuvre bon marché ou un accès
privilégié à des matières.
4.5.3.2. La stratégie de différenciation

L’entreprise cherche à se distinguer des autres aux yeux des clients, avec une priorité
pour la qualité de premier ordre, un service irréprochable, un design innovant, des capacités
technologiques ou une image inhabituelle. L’attribut choisi doit être différent de ceux des
concurrents et suffisamment convaincant pour justifier un prix dépassant le coût de la
différenciation.

4.5.3.3. La stratégie de focalisation

Les deux premières stratégies visent un avantage concurrentiel dans une large gamme
de segments de marché. Pour sa part, la stratégie de focalisation donne la priorité au coût
ou à la différenciation dans un segment réduit : le management choisit un segment ou un
groupe de segments dans un secteur d’activité (par exemple, variété des produits, type
d’acheteur final, canal de distribution ou emplacement géographique de la clientèle) et adapte
sa stratégie de façon à tout miser sur ce segment. Le but est d’exploiter un segment de marché
étroit ; toutefois, la viabilité de cette stratégie dépend de la taille du segment en question et du
fait que l’organisation puisse assumer les coûts extra engendrés.

En conclusion, il faut dire que le choix de la stratégie est surtout fonction des forces
de l’organisation et des faiblesses de la concurrence. Mieux vaut bannir une position menant
à toutes sortes de conflits avec le reste du secteur et concentrer ses efforts là où les
concurrents ne sont pas. C’est pourquoi la réussite tient au choix de la stratégie adéquate,
compatible avec le profil de l’organisation et l’état du secteur d’activité dans lequel elle opère.
En jouant de la sorte, un avantage concurrentiel de poids peut être décroché.

4.6. Maintenir son avantage concurrentiel

Pour une réussite à long terme via l’une des stratégies de Porter, l’avantage doit
être durable, c’est-à-dire résister aux actions des concurrents autant qu’à l’évolution du
secteur. Telle est toute la difficulté, notamment dans les environnements dynamiques
comme aujourd’hui, à nouvelles technologies, nouvelles préférences des consommateurs, sans
compter que les concurrents essayent souvent de copier un exemple de réussite. Les managers
doivent donc dresser des barrières afin d’empêcher ces tentatives d’imitation grâce aux
brevets, aux dépôts de marques et aux copyrigths. Par ailleurs, si des économies de marché se
montrent profitables, baisser les prix pour gagner en volume peut constituer une bonne

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tactique. De la même façon, les organisations peuvent « s’approprier » des fournisseurs par
les biais de contrats d’exclusivité limitant leur collaboration avec la concurrence, ou encore
faire pression auprès des autorités pour que des réglementations imposent des tarifs
d’importation et dissuadent ainsi les rivaux étrangers. Mais il est néanmoins une chose que le
management ne peut se permettre : faire preuve de suffisance et s’endormir sur ses lauriers, au
risque de perdre son avance sur les autres.

4.7. La mise en œuvre de la stratégie

Une fois les stratégies formulées, l’avant dernière étape (8) du processus consiste à les
mettre en œuvre. Peu importe la qualité d’un plan stratégique s’il ne bénéficie pas d’une
bonne application. Une équipe de direction dotée d’un fort leadership est un ingrédient
nécessaire de la réussite d’une stratégie. Mais il lui faut aussi, dans les étages inférieurs, des
managers intermédiaires motivés afin de mener à bien les décisions spécifiques liées à la mise
en œuvre de la stratégie. Après cela, les résultats doivent être soumis à l’évaluation (étape 9).
A quel point les stratégies ont-elles porté leurs fruits ? Quelles rectifications éventuelles
imposent-elles ?

CHAPITRE 5

L’ORGANISATION
Objectifs

A l’issue de ce chapitre, vous devriez être capable de


- de dire ce que signifie organiser et dégager les éléments clefs de l’organisation
- expliquer les différentes structures vues

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- montrer l’importance des facteurs dits de contingence dans la structuration d’une


organisation
- mettre en relief le rôle de la culture organisationnelle.

-----------------------------------------------------

Pour mettre en œuvre la stratégie adoptée, il faut entre autres savoir s’organiser, bien
s’organiser. L’expérience nous renseigne que l’organisation est souvent escamotée, bien
qu’elle constitue un des pivots importants du processus de management.

5.1. Qu’est-ce qu’organiser ?

Les entreprises, qu’il s’agisse des entreprises industrielles, commerciales, des


administrations, ou des associations, sont constituées d’éléments divers dont elles combinent
l’utilisation pour réaliser ce qu’elles entreprennent. Nous pouvons distinguer :
 Les ressources humaines : propriétaires du capital, dirigeants, cadres, vendeurs,
techniciens, ouvriers, etc.
 Les moyens financiers : fonds de commerce, créances, capital, emprunts, trésorerie,
espèces, etc.
 Les moyens matériels qui comprennent :
 Les immobilisations : terrains, immeubles à usage industriel ou commercial ;
machines, matériels de transport, outillage, mobilier de bureau, installations,
agencements, etc.
 Les valeurs « mobiles » : marchandises (produits finis ou en cours), matières
premières consommables, emballages, fournitures, etc.
Les organisations mettent aussi en jeu d’autres moyens moins visibles constitués par les
méthodes, expériences, informations, connaissances, procédures de fabrication,
techniques, etc. y compris ceux que matérialisent d’éventuels brevets (cf. la partie du schéma
du chap. 1 intitulée les ressources de base : les 6 M).

Organiser l’entreprise, c’est déterminer les modalités d’utilisation des divers


facteurs qui interviennent dans son activité, de façon à ce que leur combinaison soit
« harmonieuse ».

L’organisation, c’est donc l’aménagement de tout ce dont dispose l’entreprise. Il s’agit


de mettre en œuvre tous les éléments dans les meilleures conditions possibles. On organise
lorsqu’on réunit, arrange ou combine des moyens, ou lorsqu’on se prépare à faire de la
meilleure manière possible une opération donnée.

Les critères permettant d’évaluer la pertinence de tel ou tel arrangement dépendent des
objectifs, finalités ou fonctions poursuivis par l’organisation et des contraintes internes et
externes auxquelles elle est soumise. Très souvent on se base sur des critères économico-
techniques : coûts, délais, quantités, qualités, amortissements des investissements. Cependant,
il faut tenir compte aussi des aspects sociaux et humains.

Organiser, c’est alors aussi bien répartir les responsabilités ou les tâches, que de
définir le programme de travail, déterminer l’implantation des locaux, la méthode à
employer pour accomplir une tâche donnée, la machine à utiliser, la forme des
imprimés, le circuit souhaitable des documents, ou la couleur des murs, élaborer le mode
d’établissement des prévisions d’activité ou de financement, choisir une démarche pour

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le recrutement, la formation ou la motivation du personnel. Bref, rien de ce qui peut


améliorer les choses, c’est-à-dire faire atteindre les objectifs ne doit être négligé, n’est
négligeable.

En organisant, on doit laisser une place à la spontanéité. Il faut que l’organisation ait
une flexibilité suffisante pour pouvoir s’adapter aux évolutions permanentes des besoins et
des contraintes.

Les différentes dimensions de l’organisation peuvent se résumer schématiquement


comme suit :

TECHNIQUE HUMAIN
- Machines et outils - Connaissances
- Matériaux et - Capacités
composants - Personnes
- Informations - Motivations
- Méthodes et techniques - Relations
- Groupes

ORGANISATION

ECONOMIQUE
- Argent
- Temps
- Energie
- Espace

L’organisation, c’est la combinaison optimale de ressources accessibles (techniques,


économiques et humaines) pour l’atteinte des résultats visés (techniques, économiques et
humains).

Les aspects divers auxquels s’intéresse l’organisation peuvent être discernés à l’aide
d’un vieux truc : Q. Q. O. Q. C. (QUI ? QUOI ? Où ? QUAND ? COMMENT ?). On peut
y ajouter si c’est nécessaire : P ? (POURQUOI ?).

Réussir l’organisation revient à mettre en œuvre, avec souplesse, ce vieux truc, très
souvent négligé.

5.2. Structures organisationnelles

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Comme déjà dit, une fois les grandes décisions stratégiques arrêtées, les dirigeants de
l’entreprise doivent mettre au point la structure la plus adaptée à la réalisation de leurs
objectifs. L’organisation est la fonction de management ayant pour raison d’être la
structuration organisationnelle, ce terme qualifiant le processus par lequel les managers
établissent ou modifient la structure de leur entreprise. Cela requiert tout à la fois de
choisir la distribution des postes spécialisés, d’établir des règles de conduite pour le
personnel et de fixer les niveaux auxquels les décisions doivent être prises. Les choix de
structuration sont généralement effectués par les hauts dirigeants, qui consultent
éventuellement les responsables de rang intermédiaire ; les agents de maîtrise et les employés
ont plus rarement leur mot à dire sur ce point. Il reste pourtant essentiel d’assimiler ce
processus car nous travaillons tous dans une structure. A ce titre, il nous faut tenter de
comprendre pourquoi il s’agit de celle-ci plutôt que d’une autre. En outre, étant donné
l’évolution de l’environnement et les efforts d’adaptation que les organisations doivent
déployer, mieux vaut également savoir ce que les structures de demain nous réservent.

Gardons de même à l’esprit le fait que les idées de structuration présentées ici peuvent
s’appliquer à n’importe quel type d’organisation, depuis l’entreprise privée en quête de
bénéfices jusqu’à l’association à but non lucratif en passant par le service public.

5.2.1. Les éléments clés d’une structure

Les six éléments de base de toute structure organisationnelle sont : la spécialisation du


travail, la chaîne hiérarchique, l’éventail de contrôle, le choix entre autorité et responsabilité,
l’option de centralisation opposée à celle de décentralisation et enfin la départementalisation.

5.2.1.1. La spécialisation du travail

La spécialisation du travail découpe un métier en une série d’étapes, chacune étant


réalisée par une seule personne. L’idée est que les travailleurs se spécialisent dans une partie
d’une activité au lieu de maîtriser celle-ci dans son ensemble. Ex. sur une chaîne de montage
– électronique ou alimentaire – la spécialisation consistera à installer uniquement des cartes
mères et des disques durs dans des ordinateurs.

Grâce à la spécialisation du travail, la diversité de compétences existant au sein d’une


communauté d’employés est exploitée de façon efficace. Dans la plupart des organisations,
certaines tâches requièrent des capacités très avancées alors que d’autres sont à la portée
d’individus aux compétences plus restreintes. Si tous les employés participaient à l’ensemble
des étapes d’un processus de production par exemple, ils devraient être aptes à la fois pour les
tâches sophistiquées et les tâches élémentaires, ce qui signifierait travailler parfois en dessous
de leur niveau de compétence.

Les premiers adeptes de la spécialisation y voyaient une source de productivité accrue.


Son instauration augmenterait presque toujours la productivité. Malheureusement, les bonnes
choses prennent parfois une tournure excessive et il arrive un point où le manque à gagner au
niveau humain (ennui, fatigue, stress, faible productivité, qualité médiocre, augmentation de
l’absentéisme et rotation fréquente du personnel) dépasse les avantages économiques obtenus.

Dès les années 60, ce point limite a été atteint pour de nombreux emplois, et on a
procédé à un élargissement de la portée des activités professionnelles pour augmenter la
productivité. Toutefois, la spécialisation demeure encore aujourd’hui une réalité bien vivante

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au sein des organisations. Il faut savoir en reconnaître les avantages dans certains types
d’emplois autant que les limitations dans d’autres domaines.

5.2.1.2. La chaîne hiérarchique

Les premiers auteurs en management avançaient qu’un employé doit se référer à un


seul supérieur hiérarchique. En effet, rendre des comptes à plusieurs patrons peut entraîner
une incompatibilité entre les diverses demandes ou priorités. Dans les rares cas où le principe
de chaîne hiérarchique (ou de commandement) ne pouvait être respecté, les théories
exposaient toujours une nette séparation des activités, chacune devant se trouver sous le
contrôle d’un responsable. Le concept de chaîne de responsabilité se justifiait lorsque les
organisations étaient encore relativement simples. Il reste aujourd’hui pertinent dans
beaucoup de situations et nombre d’entreprises continuent à l’adopter. Cependant, le fait de
coller trop au principe de chaîne hiérarchique peut créer un manque de souplesse freinant les
performances de l’organisation.

5.2.1.3. L’éventail de contrôle

Combien d’employés un manager peut-il diriger de manière efficace ? Les auteurs


classiques se sont également penchés sur cette question de l’éventail de contrôle (ou de
subordination), privilégiant une étendue réduite des pouvoirs (en fait un maximum de six
travailleurs), cela afin de conserver une certaine proximité de supervision. Toutefois,
quelques-uns relèvent le niveau occupé dans l’organisation comme une variable contingente à
prendre en considération : plus le responsable gravit les échelons, plus il doit résoudre des
problèmes mal structurés et donc nécessite une portée plus courte que les managers
intermédiaires, ces derniers assumant à leur tour une portée plus courte que les chefs sur
terrain. Malgré cela, des changements se sont produits au cours des dix dernières années quant
aux théories sur l’éventail de contrôle.

Nombreuses sont les organisations qui ont augmenté cet éventail. L’éventail de
contrôle apparaît de plus en fixé en fonction de variables contingentes. Ainsi, il va de soi
que plus les employés sont formés et expérimentés et moins le contrôle direct est
nécessaire, les managers ayant ce type d’employés peuvent se contenter d’un éventail
large. Parmi les autres variables, comptent aussi la similitude entre les tâches effectuées,
leur complexité, la proximité physique des employés, le degré d’application de
procédures standardisées, la sophistication du système de valeurs ainsi que le style de
direction adopté.

5.2.1.4. Autorité et responsabilité

L’autorité désigne le droit inhérent à une position de donner des ordres et de les
voir exécutés. Au tournant du siècle dernier, il s’agissait là d’une pratique clé, considérée
comme le ciment de toute organisation. L’idée était de déléguer l’autorité tout au long de la
pyramide en accordant aux agents de maîtrise certains droits tout en posant des limites à leur
marge de manœuvre. Par conséquent, l’autorité est liée à la place occupée dans
l’organisation et ne fait aucun cas des caractéristiques personnelles du manager.
L’expression « Le roi est mort, vive le roi » résume le concept : quiconque est roi exerce les

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droits propres à ce titre. Si un poste d’autorité se libère, la personne qui l’occupait perd les
droits associés ; l’autorité appartient toujours au poste lui-même et donc à son nouvel
occupant.

Lorsqu’ils délèguent de l’autorité, les managers doivent par la même occasion


accorder une responsabilité proportionnelle. L’octroi de droits oblige à assumer les
obligations d’exécution qui vont avec et le détenteur de l’autorité doit être tenu responsable
des résultats obtenus. Sinon, donner de l’autorité sans responsabilité laisse la porte ouverte
aux abus et personne ne peut être accusé pour une chose sur laquelle aucune autorité n’est
exercée.

Les premiers auteurs en management faisaient la distinction entre deux formes


d’autorité : hiérarchique et fonctionnelle. L’autorité hiérarchique permet à un supérieur
de contrôler le travail d’un employé : cette relation employeur/employé se retrouve tout
au long de la hiérarchie et suit la chaîne de commandement. Les dirigeants sont les
maillons et exercent un pouvoir tel qu’ils peuvent prendre des décisions sans consulter
d’autres membres. Bien évidemment, chaque responsable se trouve lui-même sous la coupe
d’un autre supérieur.

L’autorité est qualifiée de hiérarchique par opposition à une autre forme plus
fonctionnelle. La mission des dirigeants qui l’exercent concerne directement la réalisation des
objectifs organisationnels. Dans une usine par exemple, les supérieurs hiérarchiques
occupent généralement les postes de production et de ventes, alors que les responsables
en ressources humaines et la direction du personnel tombent dans la catégorie
fonctionnelle. Cette classification dépend des objectifs de l’organisation.

Lorsque les organisations prennent de l’ampleur et deviennent plus complexes,


les supérieurs hiérarchiques manquent de temps, d’expertise ou de ressources pour bien
faire leur travail. Pour compenser, ils instaurent alors l’autorité fonctionnelle afin de se
décharger, trouver de l’assistance et obtenir des conseils. L’administrateur d’un hôpital ne
peut par exemple pas s’occuper des achats de matériel et fournitures dont l’établissement a
besoin ; c’est pourquoi il crée un service des achats doté d’une autorité fonctionnelle et dont
le chef possède une autorité hiérarchique sur les membres sous ses ordres. Si ce même
administrateur a le sentiment d’être débordé, il peut également créer un poste d’assistant
(fonctionnel).

Les premiers théoriciens adoraient le concept d’autorité car ils voyaient dans
l’existence de droits propres à une position officielle l’unique source d’influence et
considéraient les managers comme tout-puissants. L’idée pouvait encore se défendre il y a
trente à soixante ans avec des organisations plus simples, un personnel moindre et des
dirigeants dépendant peu de spécialistes techniques. Dans de telles conditions, l’influence se
confond avec l’autorité et est proportionnelle au rang occupé dans la pyramide. Aujourd’hui
les choses ont changé. Théoriciens et praticiens en management admettent désormais
qu’il n’est pas indispensable d’être dirigeant pour avoir de l’autorité et que celle-ci n’est
pas totalement corrélée avec tel ou tel niveau occupé dans l’organisation.

Le concept d’autorité est essentiel au sein des entreprises. Le transformer en priorité


absolue génère toutefois une vision restreinte et peu réaliste de l’influence. Il s’inscrit
maintenant parmi les autres éléments d’un principe beaucoup plus large, celui de pouvoir.

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Autorité et pouvoir sont souvent employés de façon interchangeable alors qu’ils


présentent des différences notables. L’autorité est un droit justifié par la position de son
détenteur dans une hiérarchie. L’autorité accompagne donc le poste occupé. Le pouvoir
désigne la capacité d’un individu à influencer les décisions et englobe donc, entre autres,
le concept d’autorité qui constitue le moyen d’exercer cette influence. En d’autres termes,
les droits formels accompagnant une position organisationnelle donnée ne sont qu’un des
moyens par lesquels un individu peut influencer un processus de décision.

Le pouvoir est un concept tridimensionnel car il inclut, outre les dimensions


hiérarchique et fonctionnelle, une troisième dimension appelée centralité. Alors que
l’autorité est définie par une position verticale, le pouvoir se compose d’une position verticale
et de la distance séparant la personne du centre au cœur de pouvoir de l’organisation. Le
pouvoir provient de domaines variés. Ainsi, on distingue :
 Le pouvoir de coercition : fondé sur la peur
 Le pouvoir de récompense : fondé sur la capacité d’apporter ce que les autres
attendent.
 Le pouvoir de légitimité : fondé sur la position d’un individu dans la hiérarchie.
 Le pouvoir d’expertise : fondé sur l’expertise, un talent particulier ou le savoir d’un
individu/
 Le pouvoir de référence : fondé sur l’identification à une personne qui possède les
ressources ou les caractéristiques personnelles nécessaires.

5.2.1.5. Centralisation et décentralisation

Dans la fonction d’organisation, il est une question qui mérite une réponse précise :
« A quel niveau les décisions sont-elles prises ? ». La centralisation détermine dans quelle
mesure l’autorité est diffusée dans les niveaux inférieurs de l’organisation. Toutefois,
plus qu’un contraire absolu de la décentralisation, il est question entre ces deux concepts
de degré d’importance. Aucune organisation n’est en effet totalement centralisée, ne serait-
ce que par manque d’efficacité que l’application radicale de l’un ou l’autre principe
supposerait. Cela serait le cas si toutes les décisions étaient prises par un nombre réduit de
personnes (centralisation), ou au contraire déléguée à ceux directement concernés par le
problème (décentralisation).

Selon les premiers théoriciens, la centralisation dépendait de la situation, l’objectif


étant l’usage optimal et efficace des effectifs. Les organisations traditionnelles étaient
structurées sous forme de pyramide et concentraient à leur sommet la totalité du pouvoir et de
l’autorité. Aujourd’hui cependant, les organisations sont plus complexes et doivent réagir à
l’évolution de leur environnement. C’est pourquoi nombre de managers pensent que seules les
personnes concernées directement par un problème doivent faire des choix en conséquence,
quelle que soit la place qu’elles occupent dans la hiérarchie.

Désormais, les dirigeants optent pour la dose de centralisation ou de


décentralisation leur permettant le mieux d’appliquer leurs décisions et d’atteindre les
objectifs organisationnels. Toutefois, la recette gagnante pour une organisation ne le
sera pas forcément pour une autre et le degré de décentralisation doit être pensé cas par
cas (cf. théorie de la contingence).

5.2.1.6. Départementaliser une organisation

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Les auteurs pionniers en management avançaient que les activités de l’organisation


doivent être spécialisées et regroupées en départements. La spécialisation du travail donne
naissance à des spécialistes qu’il est nécessaire de coordonner, c’est-à-dire de rassembler
dans des départements sous la direction d’un responsable. Un département se caractérise
par les fonctions qui y sont assumées, le produit ou le service offert, le client ou
consommateur cible, le territoire géographique couvert ou le processus employé pour
transformer les ressources en production. A cette époque toutefois, aucune méthode n’était
plus particulièrement défendue. Tout au plus celle suivie devait-elle refléter un regroupement
participant le mieux à l’accomplissement des objectifs de l’organisation dans son ensemble
ainsi que des unités individuelles la composant.

Comment regrouper les activités ?

L’une des méthodes répandues consiste à regrouper les activités selon les
fonctions réalisées : il s’agit dans ce cas d’une départementalisation fonctionnelle. Un
manager peut ainsi diviser ses effectifs en départements sous les intitulés ingénierie,
comptabilité, systèmes d’information, ressources humaines, achats, ventes, etc. Seules les
fonctions changent, à l’image des objectifs et des opérations de l’organisation. L’avantage
premier est la réalisation d’économies d’échelle, obtenues en plaçant des individus dotés de
compétences et spécialisations communes dans la même unité.

La départementalisation par produit accorde la priorité aux grandes gammes de


produit. Chaque produit se trouve sous la coupe d’un haut dirigeant spécialisé et responsable
de tous les éléments liés à sa gamme (habillement, parfumerie, bricolage, équipement de la
maison). L’avantage du regroupement par produit est la responsabilité accrue des
performances de celui-ci car toutes les activités liées à une même catégorie de produit sont
gérées par un seul dirigeant.

Le type de client que l’organisation cherche à convaincre peut également


déterminer le regroupement des employés en interne. Par exemple, les ventes d’un
fabricant de mobilier de bureau peuvent être ventilées en trois départements : particuliers,
grossistes, collectivités. La départementalisation par client renferme l’idée que les clients
propres à chaque département expriment des problèmes et des besoins communs auxquels des
spécialistes peuvent répondre.

L’organisation peut également être segmentée en fonction du territoire couvert,


par une départementalisation géographique. Ainsi, les ventes peuvent-elles être réparties
par rapport aux points cardinaux. Si la clientèle d’une entreprise est totalement dispersée,
cette approche est utile.

Enfin, il peut s’agir d’une départementalisation par processus, qui regroupe les
activités en fonction du flux de travail ou de clientèle. C’est le cas de la plupart des
administrations publiques. Les unités sont organisées autour de compétences communes,
nécessaires pour effectuer un processus donné. Ex. demandes d’information, traitement des
dossiers, paiement des prestations. Comme chaque processus fait appel à un savoir différent,
cette méthode offre une base pour la catégorisation homogène des activités.

5.3. Elaborer une bonne structure. L’approche par les variables de contingence

La structure la plus adéquate est fonction de facteurs dits de contingence.

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5.3.1. Structure mécaniste et organique

Il s’agit là de deux formes organisationnelles fondamentales. La structure mécaniste


(ou bureaucratique) est le résultat de l’association de six éléments structurels : relations
hiérarchiques strictes, tâches stables et explicites, nombreuses règles, communication
formalisée et verticale, autorité de décision centralisée, structure plus étendue.

En obéissant au principe de chaîne hiérarchique, on garantit l’existence d’une ligne


formelle d’autorité, chaque personne étant contrôlée par un supérieur. Si on limite l’étendue
du contrôle lorsqu’on monte dans la pyramide, on tend à obtenir de grandes structures
impersonnelles. Sachant que la distance séparant la base du sommet augmente, les hauts
dirigeants imposent de plus en plus de règles et réglementations et comme ils ne peuvent
contrôler les activités à des niveaux inférieurs via l’observation directe et garantir ainsi le
respect de pratiques standard, ils remplacent les lignes directrices établies. Les premiers
auteurs en management défendaient un degré élevé de spécialisation du travail comme façon
de créer des emplois simples, répétitifs et normalisés. L’augmentation de la spécialisation a
généré non seulement la mise en place de structures impersonnelles mais aussi le besoin de
disposer de plusieurs couches de management afin de coordonner les départements
spécialisés.

La structure organique est évolutive, aussi souple que la structure


bureaucratique est rigide et stable. Au lieu de s’articuler autour de postes normalisés et
de réglementations, cette structure plus lâche permet de mettre en œuvre les
changements rapides qui s’imposent. Le travail est certes divisé mais les tâches ne sont pas
standardisées ou normalisées, ce qui tend à produire des professionnels techniquement
compétents et formés à l’appréhension et à la gestion de divers types de problèmes. Grâce à
leur formation, ils connaissent les normes de conduite professionnelle et ont donc besoin de
peu de règles officielles et de contrôle direct. La structure organique supposant une
centralisation faible, l’individu peut réagir rapidement aux situations, la direction n’étant pas
censée posséder le savoir que requièrent certaines décisions spécifiques.

Selon quels critères choisir entre ces deux modèles ? L’un est-il plus approprié que
l’autre ? Le mieux est d’observer les variables de contingence pouvant affecter la structure
organisationnelle.

5.3.1.1. Stratégie et structure

La structure n’est rien d’autre qu’un moyen pour la direction d’atteindre ses objectifs.
Ceux-ci découlent de la stratégie globale (mission) de l’organisation, ce qui rend structure et
stratégie indissociables. Par exemple, si l’organisation accorde la priorité à certains services
(tels que la protection policière dans une commune), sa structure encourage les activités
normalisées et efficaces. En revanche, si une entreprise tente de mettre au point une stratégie
de croissance afin de pénétrer des marchés mondiaux, elle a besoin d’une structure flexible,
fluide et évolutive à l’environnement. Aussi la structure doit-elle se calquer sur la stratégie
suivie et ses éventuelles modifications.

5.3.1.2. Taille et structure

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La taille d’une organisation a une incidence majeure sur sa structure. Par exemple, les
grandes organisations (soit des entreprises ou administrations de 2 000 employés ou plus) se
caractérisent plus généralement par une dose supérieure de spécialisation du travail, de
différenciation horizontale et verticale et de règles et procédures que leurs homologues de
petite taille. Cependant, le rapport n’est pas linéaire et cette variable perd en influence au fur
et à mesure que l’organisation grandit. La raison en est qu’à partir de 2 000 employés, une
structure est déjà tendancieusement plutôt mécaniste et 5 00 collaborateurs de plus ne feront
pas grande différence sur ce point ; en revanche, si une organisation qui emploie 3 000
personnes en embauche rapidement 5 00 autres, elle peut s’attendre à évoluer vers une
structure plus mécaniste.

5.3.1.3. Technologie et structure

Toute organisation a recours à une certaine technologie pour transformer des


ressources en production (services ou biens), de même qu’elle atteint ses objectifs à l’aide
d’équipement, de machines, de savoir et d’effectifs qualifiés, rassemblés dans des modèles
d’activités. A chaque organisation correspond donc une technologie donnée.

Avec le temps, plusieurs études sur l’impact de la technologie ont vu le jour. L’étude
de Woodward a mis en lumière le lien entre efficacité et adéquation de la technologie à la
structure. Plus la technologie employée suppose une activité répétitive, plus la structure tendra
à présenter un caractère normalisé et mécaniste. Au contraire, une technologie non routinière
laissera plus volontiers la place à des structures de type organique.

5.3.1.4. Environnement et structure

L’environnement constitue une contrainte pour les décisions stratégiques. De même, la


structure de l’entreprise n’est pas épargnée, l’approche mécaniste correspondant surtout à un
environnement stable, alors que l’approche organique prend tout son sens dans un contexte
dynamique et incertain.
L’existence d’une relation entre environnement et structure permet de comprendre
pourquoi tant de managers ont restructuré leur organisation afin de la rendre efficace, rapide
et flexible. Concurrence mondiale, innovations en chaîne, gestion du savoir et demandes
croissantes d’une qualité accrue et de livraison plus rapide de la part des clients sont autant de
forces environnementales dynamiques. Le plus souvent, les organisations mécanistes n’ont
pas les ressources requises pour réagir rapidement aux changements, ce qui pousse leurs
dirigeants à opter pour une structure plus organique.

5.4. Structuration organisationnelle : quelques applications

Quels types de structures trouve-t-on dans les grandes et les petites ou moyennes
entreprises ? Quelques types sont donnés ici.

5.4.1. La structure simple

La plupart des organisations débutent sous la forme d’un projet peu élaboré. Dans
cette structure – dite simple – le propriétaire est aussi le président et tous les employés s’en
remettent à lui.

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Une structure simple se comprend mieux par ce qu’elle n’est pas que par ce qu’elle
représente, en ce sens qu’elle n’a rien de complexe. Si une organisation semble fonctionner
sans structure apparente, celle-ci doit être de type simple. Elle se caractérise dès lors par
une faible spécialisation du travail, peu de règles régissant les opérations, une autorité
concentrée dans les mains d’une seule personne. La structure simple correspond à une
organisation « plate », ne comptant pas plus de deux ou trois niveaux hiérarchiques et
un groupe flou d’employés disposant des pleins pouvoirs et centralisant toute l’autorité
de décision.

Les petites entreprises sont les plus à même d’être organisées sous forme de structures
simples. Les avantages sont évidents : rapidité, flexibilité, fonctionnement à moindre coût et
responsabilités bien définies. Toutefois, l’approche perd en efficacité dans des organisations
de plus grande envergure car les règles rares pour gérer les opérations et la forte centralisation
entraînent une surcharge d’informations en haut de la pyramide. Plus l’organisation est
importante et plus la prise de décisions devient lente, jusqu’à arriver à un point mort lorsque
le responsable unique tente d’assumer tous les choix. Si la structure n’évolue pas avec la
taille, l’entreprise risque de perdre du terrain, voire d’échouer. L’autre point faible de la
structure simple est la prise de risque qu’elle implique car tout dépend d’une seule personne.
Si le propriétaire/manager a un problème, le centre informatif et décisionnel disparaît avec lui.

5.4.2. La structure bureaucratique

Dans de nombreux cas, les organisations ne restent pas des structures simples et la
décision de changer est souvent prise par choix ou parce que des facteurs de contingence le
motivent. Par exemple, lorsqu’une compagnie voit sa production ou ses ventes augmenter de
façon notable, elle a besoin d’accroître ses effectifs, ce qui entraîne une formalisation des
règles de travail. Des règlements et des procédures sont instaurés, des départements créés et
des niveaux de management ajoutés afin de coordonner les activités de chaque division. C’est
à ce niveau que la bureaucratie voit le jour. Les deux options les plus fréquentes sont nées des
départementalisations par fonction et par produit, donnant ainsi respectivement naissance aux
structures fonctionnelle et divisionnaire (ou divisionnalisée).

5.4.2.1. Structures fonctionnelles

La structure fonctionnelle étend simplement l’organisation pour en faire la forme


dominante. Le management choisit de regrouper des activités similaires et liées entre elles. La
force de la structure fonctionnelle tient aux avantages obtenus du fait de la spécialisation
du travail. En rassemblant des activités proches, on assure des économies d’échelle, on
limite l’emploi redondant de personnel et d’équipements tout en satisfaisant les
employés qui ont alors la chance de parler le même langage que les homologues.
Malheureusement, cette structure fait perdre de vue les intérêts premiers de
l’organisation en faveur d’objectifs. Aucune fonction n’étant en soi directement responsable
des résultats, les membres ayant des fonctions individuelles sont isolés et ne comprennent
guère les activités en œuvre dans les autres fonctions.

5.4.2.2. Structure divisionnaire

La structure divisionnaire désigne une organisation composée d’unités ou de divisions


indépendantes. S’appuyant sur la départementalisation par produit, chaque division opère
généralement de façon autonome avec un responsable à sa tête pour gérer les performances et

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assumer les décisions stratégiques et opérationnelles. Le plus souvent, un siège central est là
pour offrir un soutien (services financiers et légaux, par ex.) et se comporter comme un
observateur externe, coordonnant et contrôlant l’ensemble des divisions. Celles-ci bénéficient
par conséquent d’une autonomie selon des paramètres déterminés. Le principal avantage est
la priorité accordée aux résultats : les responsables assument pleinement la réalisation
d’un produit ou d’un service. Par ailleurs, la structure divisionnaire libère le personnel du
siège des affaires quotidiennes, ce qui lui permet de se concentrer sur la planification
stratégique et à long terme. Seule ombre au tableau, elle entraîne une redondance des
activités et des ressources. La répétition de fonction augmente donc les coûts supportés et
réduit l’efficacité.

5.4.2.3. Existe-t-il une structure présentant tous les avantages de la bureaucratie sans
inconvénients ?

La structure matricielle combine les avantages de la spécialisation fonctionnelle


et la priorité et la responsabilité propres à la départementalisation par produit. Chaque
programme est assumé par un responsable qui confie le projet aux employés des départements
fonctionnels. L’ajout de cette dimension verticale à la présentation traditionnelle horizontale
entrelace des éléments des départementalisations fonctionnelle et par produit, d’où le concept
matrice.

Le trait unique de cette matrice est que les employés possèdent au moins deux
supérieurs : le responsable du département et le chef de produit ou de projet. Ce dernier
exerce une autorité sur les membres fonctionnels intégrés à l’équipe de travail, autorité
partagée toutefois entre les deux supérieurs. En général, le chef de projet dirige les employés
liés aux objectifs spécifiques d’un projet ; en revanche, toutes les décisions portant sur la
promotion, les salaires et les évaluations annuelles continuent d’appartenir au responsable
fonctionnel. Pour garantir un travail efficace, les deux managers doivent communiquer
régulièrement, coordonner leurs ordres et résoudre les conflits ensemble.
L’intérêt majeur d’une structure matricielle est de faciliter la coordination d’une
multitude de projets interdépendants tout en conservant les économies obtenues en regroupant
des spécialistes. Son inconvénient est qu’elle sème la confusion et a tendance à offrir un
terrain particulièrement favorable aux luttes de pouvoir, en laissant de côté le principe de
chaîne hiérarchique.

5.4.2.4. Structure en équipes

Avec une structure en équipes, l’organisation se compose de groupes de travail dont


les membres peuvent prendre des décisions les concernant car il n’existe pas de chaîne
hiérarchique.

Bien que les structures en équipes aient fait leurs preuves, il ne suffit pas de
simplement regrouper des employés entre eux pour constituer dignes de ce nom. Les membres
doivent apprendre à travailler de la sorte, recevoir une formation interfonctionnelle et obtenir
les compensations adéquates.

5.4.3. Vers une organisation virtuelle

Cette organisation n’est en rien délimitée par des frontières ou des catégories, comme
les approches traditionnelles l’exigent. Dans ce cas de figure, les limites historiques d’une

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organisation s’estompent au fur et à mesure qu’augmente l’interdépendance avec


l’environnement. Ces structures sont parfois dites en réseau, apprenantes, sans frontières, ou
modulaires et couvrent tous les aspects organisationnels. Ainsi, au lieu de s’appuyer sur des
spécialités fonctionnelles basées dans des départements se consacrant chacun à des tâches
précises, elles regroupent les employés pour travailler sur l’une ou l’autre des compétences de
base de l’organisation.

Les organisations virtuelles ne sont pas uniquement des organisations plates, car elles
tentent d’éliminer les barrières tant verticales qu’horizontales ou interentreprises.
Fréquemment cependant, cette démarche exige une révolution interne radicale, du fait de
l’abolition de hiérarchies classiques en place depuis plusieurs décennies. Les organisations
horizontales ont besoin d’équipes multidisciplinaires, ayant des pouvoirs de prendre les
décisions nécessaires et pouvant être tenues responsables de résultats. Si les structures
virtuelles ou sans frontières se sont fait une place grandissante dans les organisations, c’est
notamment à cause de la mondialisation des marchés et de la concurrence. Rien de mieux en
effet pour répondre au besoin de réaction et d’adaptation à un environnement complexe
qu’une structure virtuelle. Les progrès technologiques (informatique, logiciels « intelligents »,
télécommunications) ont également contribué à cette expansion en permettant l’avènement du
commerce électronique. Grâce au réseau d’informations, le lieu de travail virtuel est
désormais devenu possible.

5.4.3.1. Créer une organisation apprenante

Le concept d’organisation apprenante ne fait pas référence à une structure donnée,


mais plutôt à un état d’esprit ou une philosophie déterminante pour les structures de
l’organisation. Si elle est réellement apprenante, cela signifie qu’une organisation à la
capacité d’évoluer en permanence grâce à la participation active de tous ses membres afin
d’identifier et résoudre les problèmes liés au travail. Le personnel effectue une gestion du
savoir en ne cessant d’acquérir et de partager de nouvelles connaissances, désireux de s’en
servir pour faire des choix et mener à bien ses activités. Certains théoriciens de la
structuration organisationnelle vont jusqu’à affirmer que seule cette capacité (apprendre et
tirer des leçons sur le lieu de travail) constituera dans l’avenir une source durable d’avantage
concurrentiel.

Les caractéristiques principales de cette organisation s’articulent autour de la structure


organisationnelle, du partage d’information, de la direction et de la culture.

Certains éléments de la structure organisationnelle sont essentiels pour qu’un


apprentissage ait lieu. Entre spécialités fonctionnelles et à divers niveaux de
l’organisation, les membres doivent absolument partager des informations et collaborer
sur des projets. Pour cela, les frontières physiques et structurelles sont abolies, ce qui donne
un environnement ouvert où les employés sont libres de coopérer, de faire de leur mieux et
d’apprendre des autres. Un tel besoin de collaboration fait d’équipes un point incontournable
de l’organisation apprenante. Le personnel travaille en groupes pour tout ce qui doit être
réalisé ; les équipes ont le pouvoir de trancher quant aux méthodes et à la résolution des
problèmes. Grâce à l’octroi de responsabilités et de zones de pouvoir nouvelles, les dirigeants
n’ont plus à se soucier du contrôle et jouent davantage les animateurs, supporters et avocats
de leurs équipes.

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L’apprentissage est impensable sans échange d’informations, en particulier entre


membres. Il faut mettre en place une gestion du savoir, c’est-à-dire partager les données de
façon ouverte, opportune et aussi précise que possible. Sachant qu’il ne compte que peu de
barrières structurelles et physiques, l’environnement favorise la communication ouverte et le
partage extensif d’informations.

Lors du processus de mutation en organisation apprenante, la direction joue un rôle


majeur. L’une de ses fonctions clés va consister à promouvoir la création d’une vision
commune de l’avenir, puis à s’assurer que tous les membres avancent dans cette direction. De
plus, les dirigeants doivent favoriser l’environnement collaborateur si important pour
l’apprentissage. Seule une direction solide et engagée peut permettre à une organisation de
devenir apprenante.

Enfin, la culture organisationnelle occupe elle aussi une place déterminante. Celle
d’une organisation apprenante réunit des personnes en accord avec une vision commune et
acceptant les relations inhérentes entre les processus, les activités, les fonctions et
l’environnement externe de l’organisation. Dans ce cas, il existe un sentiment profond de
communauté, d’attention portée à autrui et de confiance. Le personnel d’une organisation
apprenante peut communiquer ouvertement, partager, expérimenter et apprendre sans craindre
la critique ou la sanction.

Quelle que soit la structure adoptée, les employés doivent y trouver la façon de faire
leur travail de la manière la plus efficace et rentable. La structure doit non pas gêner ou
entraver l’action mais bien au contraire aider les membres à mener à bien leur mission. Après
tout, la structure n’est qu’un moyen d’atteindre un objectif et non une fin en soi.

5.5. La culture organisationnelle

Chaque individu possède ce que les psychologues nomment une « personnalité »,


c’est-à-dire un ensemble de caractéristiques cognitives, affectives et comportementales
relativement constantes et stables. De la même façon, une organisation possède une
personnalité appelée culture organisationnelle.

La culture organisationnelle désigne un système commun de significations partagé par


les membres d’une communauté. Les organisations alimentent une culture en indiquant à leurs
membres comment se comporter. Toutes les organisations ont vu évoluer avec les années des
histoires, des rituels, des symboles matériels ainsi qu’un langage. Dans une grande mesure,
ces valeurs communes déterminent ce que les employés perçoivent et comment ils réagissent
dans leur univers professionnel de référence.
La culture d’une organisation peut s’évaluer selon dix caractéristiques :
1. Sentiment d’identification : mesure dans laquelle les membres s’identifient à
l’organisation dans son ensemble.
2. Priorité au groupe : mesure dans laquelle les activités de travail sont organisées
autour de groupes et d’équipes au lieu d’individus.
3. Intérêt pour les personnes : masure dans laquelle les décisions du management
prennent en compte les conséquences des résultats sur les membres de l’organisation.
4. Esprit d’intégration : mesure dans laquelle les unités de l’organisation sont
encouragées à fonctionner de façon coordonnée et interdépendante.
5. Contrôle : mesure dans laquelle les règles, les procédures, et le contrôle direct sont
utilisés pour superviser le comportement des personnels.

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71

6. Tolérance au risque : mesure dans laquelle les employés sont encouragés à faire
preuve d’initiative, d’innovation et d’anticipation des risques.
7. Critères de récompenses : mesure dans laquelle les avantages (augmentation de
salaire, promotion) sont accordés selon les critères de performance plutôt que
l’ancienneté, le fanatisme ou autre facteur étranger aux résultats obtenus.
8. Tolérance des conflits : mesure dans laquelle le personnel est encouragé à exprimer
ouvertement les conflits et critiques.
9. Orientation moyens/fins : mesure dans laquelle le management accorde la priorité
aux résultats plutôt qu’aux techniques et processus utilisés pour les obtenir.
10. Système ouvert : mesure dans laquelle l’organisation contrôle et réagit aux
changements de l’environnement externe.

La culture d’une organisation est bien souvent à l’image de la vision ou mission que
ses fondateurs lui ont fixée. Mais plus qu’une idée initiale, ces personnes ont aussi des
préférences quant à la façon de la mettre en pratique, libres de toutes traditions ou idéologies
antérieures. La culture de départ est établie en projetant une image de ce que l’organisation
doit devenir. En fait, la taille réduite des nouveaux projets d’entreprise permet souvent à leurs
auteurs d’imposer facilement leur vision au reste des membres. Ainsi, la culture
organisationnelle est le fruit de l’interaction entre (1) les orientations et hypothèses des
fondateurs et (2) ce que les premiers employés tirent de leurs propres expériences.

En fonction de son intensité, la culture d’une organisation peut avoir un impact


important sur sa structure et son évolution. Par exemple, une culture forte peut parfois
remplacer les règles et procédures s’adressant aux employés ; elle suppose généralement
prévisibilité, ordre et cohérence sans devoir mettre par écrit une ligne de conduite. Ainsi, plus
une culture est forte et moins les dirigeants doivent s’attacher à élaborer des directives.
Celles-ci sont en effet intériorisées par les membres de l’organisation au moment où ils en
acceptent la culture. En revanche, dans le cas d’une culture faible et sans valeurs
communes spécifiques, l’incidence sur la structure apparaît comme moins évidente.

Les différentes structures ne conviennent pas toutes pour l’enseignement, il faut en


choisir celles qui soient adaptées. Mais, l’environnement évoluant, on doit faire montre de
créativité et d’innovation même en ce qui concerne l’enseignement car ce qui paraît éloigné,
peut se révéler important et proche lorsqu’on y réfléchit.

CHAPITRE 6

L’IMPULSION

Objectifs

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A l’issue du chapitre, vous devriez être capable


- d’expliquer en quoi consiste chaque théorie de leadership et de motivation vue ; dire
qui en est l’auteur
- expliquer les soubassements et l’importance de la confiance en management
- dire comment sera le management de demain et comment on motivera les travailleurs/

------------------------------------------------------------------------------

L’impulsion, comme nous l’avons dit précédemment, est une fonction qui consiste à
faire que les membres de l’organisation réalisent les tâches prescrites de leur propre chef et
avec enthousiasme.
Cela suppose un commandement efficace ainsi qu’un système de récompenses adéquat. En
d’autres termes, il faut trouver des systèmes de motivation appropriés pour que les membres
arrivent à faire ce qu’ils doivent faire comme il se doit. Les problèmes que nous abordons
dans ce chapitre sont relatifs au leadership et à la motivation. Beaucoup de considérations qui
ont été émises au chapitre 2 s’appliquent ici.

6.1. Leadership

Les managers accomplissent les objectifs à travers leur habileté à guider, motiver et
intégrer les efforts des autres. L’on constate que certains managers réussissent à obtenir des
résultats remarquables, alors que d’autres échouent. Une des explications tient au style de
leadership qu’ils pratiquent.

Cependant, les approches recommandées par les experts quant à la façon d’exercer ce
leadership optimum diffèrent. Il n’y a pas de véritable accord sur ce qu’est le bon leadership.

Nous allons considérer les différentes approches proposées.

6.1.1. La théorie des traits de personnalité du leader

La théorie des traits de personnalité du leader est fondée sur l’identification des
caractéristiques de toutes natures censées distinguer les leaders.

Les recherches visant à isoler les traits ont abouti à des impasses. Les tentatives
d’identifier un ensemble de traits qui permettrait de distinguer à coup sûr les leaders efficaces
des leaders inefficaces ont toutes échoué. Peut-être est-il présomptueux de croire qu’un
ensemble de traits de personnalité unique et déterminé pourrait s’appliquer à tous les bons
leaders, quelques soient la taille de leur organisation, le contexte et les enjeux socio-
économiques, l’époque, etc.

En revanche, l’identification des traits régulièrement associés à la notion de leadership


a donné bien de meilleurs résultats. On a ainsi observé qu’il existait six traits permettant de
différencier les leaders des non-leaders : le dynamisme, le désir de diriger, l’honnêteté et
l’intégrité, l’assurance, l’intelligence et la compétence professionnelle.

Ces traits ne suffisent pas pour autant à expliciter la notion de leadership, car ils ne
prennent pas en compte les facteurs situationnels. Si tel ou tel individu possède les traits
adéquats, cela lui donne juste davantage de chance de devenir un leader efficace. Il lui reste à

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prendre les bonnes décisions. Or, si une décision particulière peut s’avérer judicieuse dans une
situation donnée, elle ne le sera pas forcément dans une autre. De ce fait, et bien qu’elle ait
connu un certain renouveau au cours des deux dernières décennies, on a commencé à rejeter
la théorie des traits de personnalité du leader dès les années 1940. Par contre, et jusqu’au
milieu des années 1960, les recherches sur le leadership ont davantage souligné l’existence de
certaines habitudes comportementales spécifiques en position de leaders.

6.1.2. Les théories des comportements de leadership

Incapables d’expliquer la notion de leadership par le seul biais de traits de


personnalité, les chercheurs se sont mis à étudier le comportement de certains individus
identifiés comme leaders. Ils ont cherché à déterminer si le leader le plus efficace révélait
quelque orientation spécifique, par exemple l’expression de tendances démocratiques ou plus
autocratiques.

On espérait que ces théories comportementales permettraient de fournir une définition


plus précise de la notion de leadership, mais qu’elle donnerait aussi lieu, le cas échéant, à des
implications pratiques plus pertinentes que celles de l’approche par les traits de personnalité.
Si la théorie des traits de personnalité avait prouvé sa validité, elle aurait permis de
sélectionner scientifiquement les personnes capables d’assumer au mieux des postes de
responsabilité au sein des entreprises. A l’inverse, si les études comportementales
révélaient l’existence de déterminants comportementaux spécifiques à l’exercice du
leadership, il devenait possible de former les gens et d’en faire des leaders plus efficaces.
Les programmes de développement managériaux mis en place par les plus grandes entreprises
se fondent sur cette hypothèse.

6.1.2.1. Existe-t-il des comportements de leadership identifiables ?

On doit à Kurt Lewin et à ses collègues de l’université de l’Iowa l’une des premières
études sur le comportement des leaders. [cf. plus haut]. Certaines études ultérieures
consacrées aux leaderships démocratique et autocratique aboutirent à des résultats plus
contrastés. On s’était aperçu ainsi que le style démocratique générait parfois une meilleure
productivité que le style autocratique, sans que cela soit toujours le cas. Une méthode de la
satisfaction des employés a permis d’affirmer ces observations.

Le niveau de satisfaction des membres d’un groupe s’avérait en règle générale plus
élevé lorsque ces derniers étaient dirigés par un leader démocratique plutôt qu’autocratique.
Cela signifiait-il pour autant que les managers devaient faire en sorte de s’orienter vers ce
style d leadership ? Deux chercheurs, Robert Tannebaum et Warren Schmidt, se sont
employés à répondre à ces questions. Nous n’y revenons plus, se reporter au chapitre 3.

6.1.2.2. L’apport des études de l’université d’Ohio

Les théories comportementales les plus complètes et les plus souvent citées résultent
d’un travail de recherche entrepris par l’université d’Ohio à partir de la fin des années 1940.
Ces études visent à déterminer les dimensions distinctes du comportement des leaders. Les
chercheurs s’appuient au début sur une liste de plus de mille dimensions, qu’ils réduisent peu

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à peu jusqu’à définir deux grandes catégories susceptibles de rendre compte de la plupart des
comportements de leaders décrits par les employés. Ils baptisent ces deux dimensions
« structuration » et « considération ».

La structuration mesure la volonté d’un leader à définir et à structurer son rôle


et celui de ses employés en vue d’atteindre un objectif. Elle englobe les comportements
visant à organiser le travail, les relations professionnelles et les objectifs. Un leader présentant
un comportement de structuration élevée confiera ainsi des tâches précises aux membres d son
groupe, attendra de ses employés qu’ils maintiennent un certain niveau de performance et
attachera une grande importance au respect des délais.

La considération se rapporte au fait qu’un leader entretient des relations de travail


caractérisées par l’établissement d’une confiance réciproque et le respect des idées et des
sentiments des employés. Un leader présentant un comportement de considération élevée,
aidera ses subordonnés à résoudre leurs problèmes personnels, se montrera amical et
accessible, et traitera tous ses employés sur un pied d’égalité. Il se montrera attentif à leur
confort, à leur bien-être, à leur statut et à leur satisfaction.

Des recherches approfondies fondées sur ces définitions permettent d’établir qu’un
leader présentant une structuration et une considération élevées (qualifié High – high par les
chercheurs d’Ohio) obtient plus souvent des performances et une satisfaction élevées de ses
employés qu’un leader faiblement évalué sur l’un et/ou l’autre des deux critères ? Pour autant,
le style high – high ne donne pas toujours des résultats aussi positifs. Un comportement
caractérisé par une forte structuration provoque par exemple un accroissement du
ressentiment, de l’absentéisme et des démissions, et diminue la satisfaction professionnelle
des employés affectés à des tâches routinières. D’autres études révèlent qu’une considération
élevée peut avoir une influence négative sur l’appréciation des performances du leader par sa
propre hiérarchie. En conclusion, si les recherches de l’université d’Ohio semblent
indiquer que le style hig-high donne en règle générale de bons résultats, de nombreuses
exceptions viennent démontrer la nécessité d’intégrer à la théorie l’influence des
facteurs de contexte et de situation.

6.1.3.3. L’apport des recherches de l’université du Michigan

Les études sur le leadership menées au sein du Survey Research Center de l’université
du Michigan contemporaines de celles de l’Ohio State, visent des objectifs similaires :
identifier chez les leaders des caractéristiques comportementales liées à l’efficacité. Là
encore, les chercheurs mettent en évidence deux dimensions, assez proches
conceptuellement de celles de considération et de structuration, qu’ils baptisent
respectivement orientation vers l’employé et orientation vers la production. Les leaders
orientés vers l’employé mettent l’accent sur les relations interpersonnelles ; ils accordent un
intérêt particulier aux besoins des employés et acceptent leurs différences individuelles. Les
leaders orientés vers la production privilégient au contraire l’aspect technique ou productif du
travail, se préoccupent de l’accomplissement des tâches assignées au groupe et considèrent
ses membres comme de simples vecteurs.

Les conclusions des chercheurs du Michigan se révèlent extrêmement favorables aux


leaders orientés vers l’employé, susceptibles d’obtenir une productivité plus élevée et une
satisfaction plus grande de leurs subordonnés. Inversement, les leaders orientés vers la

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production enregistrent des niveaux de productivité et de satisfaction professionnelle


beaucoup plus faibles.

6.1.3.4. La grille managériale

De Robert Blake et Jane Mouton, la grille managériale offre une représentation


bidimensionnelle des styles de leadership. Elle s’articule autour de deux styles fondamentaux,
« l’intérêt pour les personnes » et « l’intérêt pour la production » qui s’inspirent fortement des
dimensions de considération et de structuration issues des études de l’Ohio State, ainsi que
l’orientation vers l’employé ou la production mise en évidence par les chercheurs du
Michigan.

La grille définit sur chaque axe neuf valeurs possibles, soit un total de 81 styles de
leadership différents. Elle n’évalue en aucun cas les résultats concrets d’un leader, mais
seulement les facteurs dominants dans sa manière d’envisager l’obtention d’un résultat. Blake
et Mouton en ont ensuite extrait cinq positions clés, qui correspondent aux quatre angles et au
centre de la grille.
L’efficacité d’un manager atteint donc son maximum avec un style 9,9. La grille ne
fournit malheureusement aucune définition de l’efficacité ; elle n’offre qu’une vision
conceptuelle des styles de leadership. Au vu des données disponibles, il s’avère d’ailleurs
difficile d’affirmer que le style 9,9 soit, dans tous les cas, le plus efficace.

6.1.3.5. Que reste-t-il des théories comportementales du leadership ?

Il a été question ici des tentatives les plus connues et les plus importantes visant à
expliquer le leadership en terme de comportement. D’autres s’y sont attaqués, mais ont
rencontré les mêmes difficultés que leurs prédécesseurs : l’impossibilité quasi absolue
d’établir un lien direct entre les schémas comportementaux et les performances des leaders.
Les résultats dépendaient trop de circonstances pour tirer des conclusions définitives. Le
problème venait du fait que l’on ne tenait pas compte des facteurs situationnels, qui peuvent
fortement conditionner la réussite ou l’échec. C’est pourquoi, par la suite, les chercheurs ont
essayé de comprendre l’impact des paramètres situationnels sur l’efficacité de différents styles
de leadership.

6.1.4. Les théories de la contingence

Pour les chercheurs, il devenait évident qu’il était impossible de prévoir le succès d’un
style de leadership donné à partir d’un ensemble de caractéristiques ou tendances
comportementales. L’incohérence des résultats les inciter à s’intéresser de plus près à
l’influence de la situation. Le rapport entre les styles de leadership et l’efficacité suggérait que
le style X pouvait convenir aux conditions a tandis que le style Y s’avérait plus adapté aux
conditions b, le style Z aux conditions c. Mais, que représentaient ces conditions a, b, c ? Dire
que l’efficacité du leadership dépendait de la situation, était une chose, être capable d’en
identifier les éléments en était une autre.

Certaines méthodes d’identification des variables situationnelles ont donné de


meilleurs résultats que d’autres, et ont acquis une grande popularité.

6.1.4.1. Le modèle du leadership contingent de Fiedler

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Ce modèle s’appuie sur l’hypothèse que l’efficacité d’un groupe dépend de


l’adéquation entre d’une part, les procédés d’interaction du leader avec ses subordonnés
et d’autre part, le degré d’influence que lui confère la situation.

Fiedler a mis au point un instrument, le questionnaire du collaborateur le moins


apprécié (CMA), qui sert à déterminer l’orientation comportementale du leader,  soit vers la
tâche (leader fonctionnel), soit vers les relations humaines (leader affectif). Il a ensuite isolé
trois critères situationnels – les relations leader – membres, la structure des tâches et le
pouvoir hiérarchique – susceptibles d’être manipulés en vue d’une parfaite adéquation avec
l’orientation comportementale du leader. Fiedler va au-delà des approches classiques, qu’elles
soient par les traits ou les comportements, dans le sens où il tente d’identifier des situations et
confronte ensuite tests de personnalité et classification situationnelle, pour finalement prédire,
en fonction des deux, l’efficacité d’un style de leadership.

Dans la théorie de Fiedler, les individus sont incapables de changer de style de


leadership. Il existe en définitive deux solutions valables pour améliorer l’efficacité. On peut
d’une part choisir un nouveau leader, plus adapté à la situation. Ainsi, si la situation s’avère
favorable au leader, et que celui-ci appartienne à la catégorie des effectifs, les performances
du groupe peuvent être améliorées en remplaçant le leader par un manager fonctionnel.
L’autre possibilité consiste à adapter la situation au leader, en restructurant les tâches, ou en
augmentant ou diminuant son emprise sur certains facteurs, tels que les augmentations de
salaire, l’avancement ou les sanctions disciplinaires.

Globalement, les principales études qui se sont attachées à mesurer la validité générale
du modèle de Fiedler ont abouti à des conclusions positives. Même si Fiedler n’a pas identifié
toutes les variables susceptibles d’influer sur le leadership, celles qu’il a mises en évidence
permettent apparemment une bien meilleure compréhension des facteurs situationnels. Pour
autant, l’application pratique du modèle pose certains problèmes qui mériteraient d’être
résolus.

6.1.4.2. La théorie de l’objectif – trajectoire

Cette théorie est l’une des approches les plus réputées. Elle s’appelle en anglais « path-
goal theory » et l’autre nom en français c’est « théorie du cheminement critique ». Développé
par Robert House, cet autre modèle de contingence s’appuie sur certains éléments clés issus
de la recherche de l’université d’Ohio State ainsi que sur la théorie des attentes de Vroom.

L’hypothèse consiste à dire qu’il est du ressort du leader d’aider ses subordonnés
à atteindre leurs objectifs, donc qu’il doit à la fois donner des instructions et offrir les
soutiens nécessaires pour s’assurer que ces objectifs sont compatibles avec ceux du
groupe ou de l’entreprise. Le terme « objectif – trajectoire » découle de l’idée que les
leaders efficaces éclairent le chemin afin de permettre à leurs subordonnés de parvenir à
l’accomplissement de leurs objectifs professionnels. Ils rendent le trajet plus facile en
éliminant écueils et chausse-trappes.

Selon cette théorie, le comportement d’un leader demeure acceptable tant que ses
subordonnés y trouvent une source immédiate ou future de satisfaction. Il possède un effet
motivant dans la mesure où il (1) pose l’efficacité comme condition de la satisfaction des
besoins des employés et (2) procure l’encadrement, l’accomplissement, le soutien et les
récompenses indispensables à son obtention. House identifie quatre comportements. Le

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leader directif fait savoir à ses employés ce qu’il attend d’eux, organise la répartition du
travail et donne des directives spécifiques en vue de son accomplissement. Le leader
bienveillant adopte une attitude amicale et se préoccupe des besoins des employés. Ces deux
premiers types de leadership s’apparentent aux dimensions de structuration et de
considération des études de l’université d’Ohio. Le leader participatif consulte ses employés
et tient compte de leurs suggestions avant de prendre une décision. Le leader orienté vers
l’accomplissement fixe des objectifs ambitieux et s’attend à voir ses employés donner le
meilleur d’eux-mêmes. A l’inverse de Fiedler, House part du principe que les leaders sont
flexibles. La théorie de l’objectif-trajectoire admet qu’un même leader puisse suivre l’un ou
l’autre de ces styles, ou même plusieurs, en fonction de la situation.

Cette théorie définit deux classes de variables situationnelles (ou variables de


contingence), susceptibles de moduler la relation entre le comportement du leader et les
résultats : variables environnementales, sur lesquelles l’employé n’exerce aucun contrôle
(structure des tâches, organisation formelle de l’autorité, configuration du groupe de travail),
et celles se rapportant aux caractéristiques propres de l’individu (maîtrise, expérience,
compétence estimée). Les facteurs environnementaux déterminent le type de leadership qui
permettra d’optimiser les résultats des employés, tandis que les caractéristiques individuelles
déterminent la façon dont les employés interprèteront l’environnement et le comportement du
leader. La théorie prévoit que le comportement du leader se révèlera inefficace s’il présente
des redondances avec les facteurs structurels environnementaux, ou s’il manque de cohérence
par rapport aux caractéristiques des subordonnés.

Les recherches visant à valider les hypothèses de la théorie de l’objectif-trajectoire ont


donné des résultats globalement encourageants, malgré quelques expériences négatives. La
plupart des travaux en ont confirmé la logique sous-jacente. Il apparaît en effet que les
performances et la satisfaction d’un employé sont susceptibles d’être favorablement
influencées lorsque le leader compense les lacunes dudit employé ou de l’environnement de
travail. En revanche, si ce même leader passe son temps à expliquer des tâches qui sont déjà
parfaitement comprises ou que l’employé, au vu de ses compétences et de son expérience, se
montre tout à fait capable d’accomplir seul, ce dernier risque de ressentir dans le
comportement directif du leader une redondance, voire une insulte.

6.1.4.3. Le modèle de la participation du leader

En 1973, Victor Vroom et Phillip Yetton développent le modèle de la participation du


leader, traçant un lien entre le comportement du leader et sa participation aux processus
décisionnels. Constatant que la structure des tâches fait appel, selon les cas, à des ensembles
variés d’activités routinières et ponctuelles, ces deux chercheurs affirment que les leaders
doivent adapter leur comportement en fonction des spécificités de la structure. Il s’agit d’un
modèle normatif, basé sur l’application séquentielle d’une série de règles qui permettent de
déterminer la forme et l’ampleur de l’implication décisionnelle suivant le type de situation. Il
se présente sous la forme d’un arbre proposant sept variables de contingence et cinq styles de
leadership : impératif de qualité, impératif d’adhésion, information du leader, structure du
problème, probabilité d’adhésion, conformité de l’objectif, conflit entre personnes,
information des employés, contrainte de temps, dispersion géographique, temps de
motivation, motivation-développement.

Les travaux ultérieurs de Vroom et Arthur Jago les ont conduits à revisiter le modèle
initial. Sa nouvelle version concerne les cinq styles de leadership d’origine mais porte à douze

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le nombre de variables de contingence depuis la prise décision autoritaire, sans consultation,


jusqu’à l’étude collective du problème et à l’élaboration d’une décision consensuelle (cf. ci-
dessus).

Malgré de très encourageantes expériences, le modèle s’avère bien trop complexe pour
être utilisé de manière rigoureuse. Vroom et Jago ont conçu un logiciel qui permet aux
managers de mieux se repérer parmi les multiples embranchements de la seconde version.
Bien que l’on puisse à bon droit considérer cette dernière excessivement sophistiquée, une
telle théorie n’en fournit pas moins de solides informations sur le rôle clé de certaines
variables de contingence. Le modèle de la participation du leader confirme en outre que les
recherches en matière du leadership ont intérêt à s’intéresser plus à la situation qu’à la
personne, et qu’il est sans doute préférable de parler de situations autocratiques ou
participatives plutôt que d’appliquer ces adjectifs aux leaders eux-mêmes. Comme House,
Vroom, Yetton et Jago réfutent la notion d’inflexibilité du comportement. Leur modèle repose
au contraire sur la capacité du leader à adapter son style en fonction des situations.

6.1.4.4. Le leadership situationnel

Le modèle développé par Paul Hersey et Kenneth Blanchard a conquis de nombreux


spécialistes de développement managérial. Baptisé leadership situationnel, il montre
comment un leader doit ajuster son style de leadership aux besoins de ses subordonnés.

Le leadership situationnel est une théorie de la contingence centrée sur les


subordonnés. Pour réussir, le leader doit choisir le bon style de leadership, lequel dépend du
niveau de maturité et donc d’autonomie, de son subordonné. Et que signifie la maturité ?

L’importance accordée aux subordonnés s’appuie sur une réalité tangible : ce sont eux
qui acceptent ou rejettent leur leader. Quoi que ce dernier fasse, leur activité conditionne son
efficacité. La plupart des théories du leadership ont longtemps négligé ou sous-estimé cette
dimension essentielle. La maturité, ou l’autonomie, fait référence à la compétence et à
l’engagement d’un individu vis-à-vis d’une tâche donnée.

Hersey et Blanchard identifient quatre comportements distincts, de la directivité


extrême à la délégation absolue. Le comportement le plus efficace dépend de la compétence et
de la motivation du subordonné. S’il s’agit d’un individu incompétent et désengagé, le modèle
conseille au leader d’afficher à la fois une forte orientation vers les tâches afin de compenser
ses lacunes et une forte orientation vers les relations humaines afin de lui faire adopter les
désirs du leader. A l’autre extrémité, si les subordonnés sont à la fois compétents et engagés,
le leader n’a que peu de choses à faire.

Le leadership situationnel présente un caractère extrêmement intuitif. Il reconnaît


l’importance des subordonnés et défend que les leaders sont capables de compenser leur
manque de compétence ou de motivation. Pour autant, la plupart des recherches visant à
accréditer cette thèse n’ont donné lieu qu’à des conclusions mitigées. Ces échecs pourraient
s’expliquer par certaines ambiguïtés ou incohérences intrinsèques du modèle, à moins qu’ils
ne soient la conséquence d’erreurs méthodologiques. A ce jour, en dépit de son aspect intuitif
et de sa popularité, l’utilisation du leadership situationnel reste en tout cas sujette à caution.

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6.1.5. Nouvelles approches du leadership

Trois nouvelles approches théoriques du leadership sont abordées ici : le leadership


charismatique, le leadership visionnaire, et l’opposition entre leadership transactionnel et
leadership transformationnel. Ces théories adoptent un point de vue plus pragmatique
qu’aucune de leurs devancières (à l’exception des théories des traits de personnalité).

6.1.5.1. Le leadership charismatique

La théorie du leadership charismatique est un prolongement de la théorie de


l’attribution. Elle stipule que les subordonnés, face à certains comportements, attribuent au
leader des comportements extraordinaires ou héroïques. Les études consacrées au leadership
charismatique se sont attachées pour l’essentiel à identifier les comportements qui distinguent
les leaders charismatiques de leurs homologues non charismatiques.

Plusieurs auteurs ont essayé de répertorier les caractéristiques spécifiques du leader


charismatique. Robert House en a démontré trois : une confiance extrême, un
tempérament dominant et de fortes convictions. Warren Bennis a découvert que les
leaders charismatiques partageaient quatre qualités : ils développent un dessein ou une
vision séduisants ; ils savent communiquer cette vision en termes clairs ; ils se montrent
cohérents, tendus vers la réalisation de leur vision : ils connaissent leurs points forts et
savent en tirer parti. L’analyse la plus exhaustive reste celle de Jay Conger et Rabindra
Kamungo. Il ressort de leurs travaux que les leaders charismatiques cherchent à
atteindre un objectif idéal auquel ils sont profondément attachés ; qu’ils sont perçus
comme non-conformistes, convaincants et sûrs d’eux-mêmes, acteurs d’un changement
radical plutôt que gestionnaires du statu quo.

Dans le monde des entreprises, l’influence du leader charismatique sur les


subordonnés semble se dérouler en quatre étapes : l’exposé d’une vision séduisante qui,
en traçant un lien entre situation présente et l’avenir radieux de l’entreprise, éveille chez
les subordonnés un sentiments de communauté ; le leader dévoile alors ses ambitions et
se déclare convaincu des chances de réussite de ses subordonnés ; ces derniers se sentent
ainsi valorisés et plus sûrs d’eux-mêmes ; le leader commence ensuite à véhiculer, par la
parole et les actes, un nouvel ensemble de valeurs et s’impose, à travers son
comportement, comme exemple à suivre. Enfin, le leader charismatique ne recule devant
aucun sacrifice et adopte une attitude non-conformiste qui traduit son courage et sa
détermination.

Les preuves d’une corrélation entre leadership charismatique et l’augmentation des


performances et de la satisfaction des subordonnés ne cessent de s’accumuler. Le charisme du
leader incite les individus à redoubler d’efforts, tandis que l’affection et le respect qu’ils lui
témoignent augmentent d’autant leur satisfaction.

Peut-on apprendre à devenir charismatique ou faut-il pour cela posséder des qualités
innées ? Au niveau international, il faut admettre que le débat reste ouvert entre les experts
qui continuent de penser qu’il est impossible d’apprendre le charisme, et ceux estimant au
contraire que tout manager peut recevoir une formation comportementale adéquate lui
permettant de développer une étiquette du «  leader charismatique ». Néanmoins, le leadership
charismatique n’est pas forcément indispensable s’il s’agit simplement d’obtenir les
meilleures performances possibles de la part des employés. Le charisme s’avère en revanche

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particulièrement bénéfique lorsque les tâches des subordonnés intègrent une composante
idéologique, ou lorsque l’environnement engendre un haut niveau de stress et d’incertitude.
Ce dernier point pourrait expliquer le fait que les leaders charismatiques apparaissent surtout
en politique, dans la sphère religieuse, en temps de guerre, ou lorsqu’une entreprise prend son
envol ou traverse une crise qui pourrait se révéler fatale.

6.1.5.2. Le leadership visionnaire

Si le terme vision est apparu dans la présentation du leadership charismatique, le


leadership visionnaire permet d’aller bien au-delà du charisme. De récentes études en ont
révélé toute l’importance.

Le leadership visionnaire désigne la capacité, pour un manager ou un dirigeant,


de concevoir et d’énoncer une vision réaliste, crédible et attractive du futur d’une
entreprise ou d’une unité organisée, correspondant à une évolution positive de la
situation présente. Cette vision, à supposer qu’elle soit correctement définie et mise en
œuvre, se révèle tellement stimulante qu’elle précipite littéralement le futur en concentrant les
compétences, les talents et les ressources nécessaires à son avènement.

L’examen de ses diverses définitions permet d’établir que la vision se distingue par
bien des aspects des autres formes d’orientation : elle compose une imagerie claire et
séduisante qui suggère une démarche novatrice, tient compte et s’inspire des traditions et
laisse entrevoir les actions à entreprendre pour actualiser le changement. Elle draine l’énergie
et les émotions des individus.  Convenablement présentée, elle suscite le même enthousiasme
qu’un événement sportif, ou toute autre activité de loisirs, et transpose cette énergie et cette
ferveur sur le lieu de travail.

Les propriétés essentielles d’une vision se résument à l’existence d’un potentiel


d’inspiration centré sur la valeur, réalisable, et caractérisé par une imagerie et une articulation
qualitativement supérieures. Une vision doit être capable d’ouvrir des perspectives
inspirantes, singulières, et de proposer un nouvel ordre susceptible d’induire une distinction
organisationnelle. Elle a toutes les chances d’échouer si elle ne permet pas d’envisager un
avenir qui soit clairement et manifestement meilleur pour l’entreprise et pour ses membres.
Afin de séduire, la vision doit correspondre à l’époque et aux circonstances, et refléter la
singularité de l’entreprise. Il faut en outre que les individus puissent croire à son accessibilité.
Elle doit leur paraître ambitieuse, tout en restant à leur portée. Les visons qui présentent à la
fois une articulation claire et une imagerie puissante sont d’autant plus simples à appréhender
et accepter.

Quelles compétences particulières les leaders visionnaires possèdent-ils ? Ils


manifestent trois qualités différentes qui déterminent l’efficacité de leur rôle de visionnaire :
la capacité à expliquer leur vision aux autres. Le leader doit pouvoir exposer clairement, par
oral ou par écrit, les buts poursuivis et les moyens à mettre en œuvre ; capacité à exprimer sa
vision non seulement sous forme verbale, mais également par son comportement. Ceci
implique d’agir de manière à véhiculer et à souligner continuellement le sens de sa démarche ;
enfin, capacité à adapter sa vision à différents contextes, sérier les activités afin qu’elles
puissent s’appliquer à toute une gamme de situations. Elle doit avoir autant de ses pour le
service comptable que pour le service marketing.

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Les chefs d’entreprise sont-ils des visionnaires ?

Pour réussir, les chefs d’entreprise doivent aujourd’hui posséder les qualités d’un
musicien de jazz : improvisation, innovation et créativité.

Pour diriger efficacement son affaire, le chef d’entreprise a tout intérêt à s’inspirer de
l’exemple du jazzman : tirer le meilleur de ses collaborateurs malgré l’imprévisibilité de la
situation. Et c’est en proposant une vision séduisante à ses employés qu’il s’en donne
véritablement les moyens. Sa capacité à développer une vision cohérente, stimulante et
attractive du futur conditionne fortement la réussite du leader.

6.1.5.3. Leadership transactionnel et leadership transformationnel

La plupart des théories du leadership concernent toutes la définition et la


compréhension d’un certain type de leader, le leader transactionnel. Celui-ci oriente et
stimule ses subordonnés en clarifiant les rôles et les tâches qui leur sont assignés, afin de les
pousser à atteindre les objectifs fixés. Un autre type de leader, le leader transformationnel
incite ses subordonnés à transcender leurs intérêts personnels pour le bien de l’entreprise, et
possède la capacité d’exercer sur eux une influence durable et profonde.

Les leaders transformationnels prêtent attention aux préoccupations et aux besoins de


développement de chacun de leurs subordonnés ; ils modifient leur manière d’aborder les
problèmes en les aidant à poser un regard neuf sur leurs difficultés antérieures ; ils sont
capables de les motiver, de les galvaniser et de les amener à redoubler d’efforts pour atteindre
les objectifs du groupe.

Il serait erroné d’opposer le leadership transactionnel au leadership transformationnel.


Le second s’appuie sur le premier. Comparé à l’approche transactionnelle pure, il permet
d’obtenir des employés un niveau d’effort et de performance bien plus élevé. Il représente
également beaucoup plus que le simple charisme. « Le leader purement charismatique attend
de ses subordonnés qu’ils adoptent sa vision du monde, sans aller au-delà ; le leader
transformationnel essaie au contraire de les habituer à mettre en doute les valeurs établies, y
compris celles qu’il a lui-même établies ».

Les preuves de la supériorité du leadership transformationnel sur le leadership


transactionnel sont impressionnantes. Le leadership transformationnel présente une
corrélation plus étroite avec la diminution des taux de turn-over, l’augmentation de la
productivité et l’amélioration de la satisfaction des employés.

6.1.6. Demain, le leadership

L’exposé des multiples rôles, théories et modèles du leadership aura permis de


comprendre que la notion de leadership efficace ne cesse de s’affiner, à mesure que les
chercheurs en approfondissent l’étude. Il convient donc à présent de s’arrêter sur quelques
problématiques actuelles intéressant à la fois les experts du domaine et les chefs d’entreprise :
leadership d’équipe, liens entre leadership et culture nationale, intelligence émotionnelle du
leader, nécessité du leadership et leadership des entrepreneurs.

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6.1.6.1. Le leadership d’équipe

Le leadership s’inscrit de plus en plus dans un contexte d’équipe. La popularité


grandissante de cette forme d’organisation accroît d’autant l’importance du leader. Le rôle qui
lui est dévolu n’a plus rien à voir avec celui d’un agent de maîtrise classique.

Pour la plupart des managers, le défi consiste à devenir un chef d’équipe efficace. Il
leur faut apprendre à partager l’information, à faire confiance aux autres, à déléguer leur
autorité et à intervenir seulement aux moments opportuns. Les leaders efficaces sont parvenus
à maîtriser l’art difficile de l’équilibre. Ils savent quand ils doivent laisser leur équipe se
débrouiller seule et quand c’est à eux d’agir. Les débutants peuvent avoir tendance à resserrer
le contrôle quand leurs collaborateurs réclament plus d’autonomie, ou à les abandonner quand
ils ont besoin d’aide et de soutien.

Une étude a mis en lumière un certain nombre de responsabilités communes à


l’ensemble des leaders : animation, accompagnement, gestion de problèmes de
discipline, évaluation des performances individuelles et collectives, formation et
communication. Plusieurs d’entre elles s’appliquent en réalité à n’importe quel type de
manager. Pour mieux comprendre en quoi consiste le travail d’un chef d’équipe, il est
préférable de le localiser sur deux priorités essentielles : la gestion des frontières externes de
l’équipe et l’accompagnement de son activité. Ces priorités définissent à leur tour quatre rôles
spécifiques.

Les chefs d’équipes sont tout d’abord chargés des rapports avec les entités externes,
parmi lesquelles on trouve notamment la direction générale, les autres équipes de l’entreprise,
les clients et les fournisseurs (cf. les rôles du manager, chap. 1). Le chef représente l’équipe
auprès de ces entités, se fait préciser leurs attentes, capte les ressources nécessaires au
fonctionnement de l’équipe, recueille des informations venues de l’extérieur et partage ces
informations avec ses collaborateurs.
Les chefs d’équipes doivent ensuite résoudre les problèmes. Lorsque l’équipe
rencontre des difficultés et réclame son aide, le chef se doit d’assister aux réunions et de
contribuer à rétablir la situation. Il s’implique rarement sur les aspects techniques ou
opérationnels, car les membres de l’équipe connaissent en général mieux leur travail que le
chef lui-même. Il se charge plutôt de poser des questions pertinentes, d’aider l’équipe à
formuler ses problèmes, ou d’obtenir auprès des entités externes les ressources qui lui font
défaut. Par exemple, en cas de carence de personnel au sein d’une équipe, son chef va en
référer à la direction pour obtenir son aval et entreprendre les démarches nécessaires pour
engager de nouveaux employés.

En troisième lieu, le chef d’équipe s’occupe de gérer les conflits. Lorsqu’un


désaccord survient, il procède à son analyse. Quelle en est l’origine ? Qui concerne-t-il ? Quel
problème soulève-t-il ? En invitant les membres de son équipe à traiter ce genre de questions,
le chef minimise les perturbations internes.
Le chef d’équipe fait enfin office d’animateur. Il clarifie les objectifs et le rôle de
chacun, transmet son savoir, offre son soutien, stimule ses collaborateurs et fait tout ce qui est
en son pouvoir pour leur permettre d’améliorer leur performance.

6.1.6.2. La culture nationale et le leadership

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La culture nationale représente un facteur situationnel de première importance, qui


détermine l’efficacité relative des différents styles de leadership. On peut la considérer
comme une variable de contingence supplémentaire.

La culture nationale influence le style de leadership, dans la mesure où les leaders ne


sont pas libres de leur choix : ils sont tenus de respecter les normes culturelles auxquelles
s’attendent leurs subordonnés.

Pour ajuster à bon escient son style de leadership, il peut s’avérer utile de se reporter
aux dimensions culturelles nationales. Un style interventionniste ou autocratique
s’accordera ainsi parfaitement avec une distance hiérarchique élevée. Cette donnée peut
également constituer un bon indicateur de succès du leadership participatif, dont l’efficacité se
révélera potentiellement maximale dans le pays à faible distance hiérarchique.

6.1.6.3. L’intelligence émotionnelle et le leadership

De récentes études semblent démontrer que le quotient émotionnel permettrait de


prévoir, de la manière la plus fiable qui soit, l’émergence d’un leader.

Les recherches sur les traits de personnalité ont établi que les leaders devaient faire
preuve d’intelligence et posséder des compétences professionnelles adéquates. Pourtant, le
Q.I. et la technicité ne représentent que des « aptitudes minimales ». Elles sont nécessaires à
l’exercice du leadership mais non suffisante. C’est la présence des cinq composantes de
l’I.E. (intelligence émotionnelle) – conscience de soi, maîtrise, motivation, empathie et
sociabilité – qui semble déterminer la capacité d’un individu à s’imposer comme une
référence. Sans I.E., le manager aura beau disposer d’une formation exceptionnelle, posséder
un esprit d’analyse hors normes, une vision à long terme et une réserve inépuisable d’idées
géniales, il n’en deviendra pas pour cela un grand leader. C’est d’autant plus vrai que l’on
s’élève dans la hiérarchie ; plus la position formelle d’un responsable est importante, plus son
niveau d’I.E. va contribuer à son efficacité. Une comparaison entre les dirigeants les plus
performants et la moyenne de leurs confrères a révélé que leur différence d’efficacité était
imputable à près de 90% aux facteurs émotionnels, plutôt qu’à leur simple intelligence
rationnelle.

Il a été prouvé que l’intelligence émotionnelle exerce à tous les niveaux une influence
positive sur les performances professionnelles. Elle semble néanmoins particulièrement
bénéfique dans les emplois qui supposent d’importantes interactions entre les personnes, ce
qui correspond précisément à la définition du leadership. Les grands leaders manifestent leur
I.E. en arborant ses cinq composantes clés : conscience de soi, maîtrise, empathie et
sociabilité.

6.1.6.4. A-t-on toujours besoin de leadership dans une organisation ?

En droite ligne de la théorie de contingence, la conclusion de cette section prend le


parti de réfuter l’idée qu’un style particulier de leadership puisse conserver la même efficacité
quelle que soit la situation. De nombreuses études ont en effet démontré que le
comportement du leader s’avère, dans beaucoup de cas, totalement indifférent. Certaines
variables individuelles, professionnelles ou organisationnelles sont susceptibles de se

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substituer au leadership, voire neutraliser purement et simplement la capacité du leader à


influencer ses subordonnés.

Les neutralisants désamorcent l’impact du comportement du leader quant aux résultats


des employés. Ils inhibent son influence. Les substituts, eux, ne se contentent pas d’inhiber :
ils rendent inutiles. Ils la remplacent. Certaines caractéristiques des employés, telles que
l’expérience, la formation, l’évolution professionnelle ou l’indifférence à l’égard de
l’entreprise, peuvent aussi suppléer ou neutraliser l’effet du leadership. L’expérience et la
formation, notamment, sont à même de remplacer le leader dans sa capacité à structurer les
tâches et à réduire leur ambiguïté. Les tâches routinières et par nature évidentes, ou qui sont
intrinsèquement gratifiantes, peuvent entraîner une diminution des exigences en matière de
leadership. Certaines caractéristiques organisationnelles – formalisation explicite des
objectifs, rigidité des règles et des procédures, cohésion des équipes è peuvent même s’y
substituer.

Penser que les employés sont incapables de s’orienter vers l’accomplissement des
objectifs autrement que sous l’impulsion d’un leader organisationnel constitue un point de vue
simpliste. Il est important d’admettre que le leadership ne représente qu’un variable parmi
d’autres dans l’équation de l’efficacité. Il peut parfois expliquer beaucoup de choses en
matière productivité, d’absentéisme, de turn-over, de loyauté et de satisfaction. Mais dans
certains cas, son apport peut également se révéler très mince.

6.1.7. Bâtir la confiance : l’essence du leadership

6.1.7.1. Qu’est-ce que la confiance ?

La confiance, ou l’absence de confiance, revêtent une importance croissante pour les


entreprises modernes. La confiance désigne une attente positive vis-à-vis d’autrui, dans
l’espoir que celui-ci ne tentera pas – par ses paroles, ses actes ou ses décisions – d’agir de
manière opportuniste. Elle implique avant tout des notions d’intimité et de risque.
L’expression « attente positive » suppose une connaissance de l’autre, et l’existence d’un
degré d’intimité entre les deux parties. La confiance représente un processus historico-
dépendant, fondé sur un échantillonnage pertinent mais restreint de l’expérience vécue. Elle
prend forme, se développe et s’affermit au fil de temps. L’assurance quant à la possibilité
de concevoir une attente positive s’acquiert à mesure que l’on apprend à connaître l’individu
et que la relation s’approfondit.

La notion d’opportunisme se rapporte au risque et à la vulnérabilité que suppose


par nature toute relation de confiance. La confiance implique de se rendre vulnérable,
lorsqu’on dévoile par exemple des informations intimes ou que l’on se fie aux promesses
d’autrui. Elle comprend par définition l’éventualité d’une déception ou d’une tromperie.
Mais il ne représente pas pour autant une prise de risque en soi ; elle constitue plutôt
l’acceptation délibérée d’un risque potentiel. Quand on fait confiance à quelqu’un, on espère
que cette personne ne nous trompera pas. Toutes les situations qui mettent en jeu des relations
de confiance reposent sur un pari semblable.

Les dimensions clés qui sous-tendent la confiance ont été identifiées : l’intégrité, la
compétence, la cohérence, la loyauté et l’ouverture.

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L’intégrité fait référence à l’honnêteté, à la conscience morale et à la sincérité.


Des cinq dimensions de la confiance, celle-ci semble cruciale. « Sans perception du
« caractère moral » et de « l’honnêteté fondamentale » d’autrui, les autres dimensions de la
confiance perdent toute signification ».

La compétence englobe les connaissances et les qualités techniques et


interpersonnelles de l’individu. Cette personne sait-elle de quoi elle parle ? Il est peu
probable qu’on accepte de l’écouter ou de se fier à elle si on ne reconnaît pas ses capacités.
On a besoin de se convaincre qu’elle possède les qualités et compétences requises pour
accomplir ce qu’elle promet.

La cohérence se rattache à la fiabilité, à la prévisibilité et au sens du jugement de


l’individu. L’apparition de l’incohérence entre les mots et les actes diminue la confiance.
Cette dimension concerne particulièrement les managers. « Rien ne se remarque autant (…)
que la contradiction entre ce que préconise le dirigeant et ce qu’il attend réellement de ses
collaborateurs ».

La loyauté représente le désir de protéger l’autre et de lui éviter de perdre la


face. La confiance implique que l’on puisse espérer d’autrui qu’il n’agisse pas de manière
opportune.

L’ouverture constitue la dernière dimension : peut-on attendre de l’autre qu’il dise


toute la vérité ?

6.1.7.2. Peut-il y avoir du leadership sans confiance ?

La confiance apparaît comme l’un des attributs du leadership. Comme l’a noté un
spécialiste : « l’une des fonctions du leader a toujours consisté, et consiste encore, à collaborer
avec d’autres personnes afin d’identifier et de résoudre les problèmes. Cependant, sa capacité
à accéder aux connaissances requises et stimuler la réflexion dépend directement de la
confiance qu’il inspire. Confiance et loyauté déterminent ses possibilités d’acquérir
l’information et de s’assurer la coopération d’autrui ». Quand les subordonnés font confiance
au leader, ils acceptent de s’exposer aux conséquences de ses actes, persuadés que ni leurs
droits ni leurs intérêts ne seront bafoués. L’honnêteté figure régulièrement en tête des
caractéristiques qui fondent la réputation des grands leaders. « L’honnêteté est absolument
nécessaire en matière de leadership. Avant de suivre quelqu’un, que ce soit sur le champ de
bataille ou dans une salle de réunion, les gens cherchent d’abord à s’assurer que cette
personne mérite bien leur confiance ».

Aujourd’hui plus que jamais, l’efficacité des leaders et des managers dépend de leur
capacité à gagner la confiance de leurs subordonnés. Les méthodes modernes de management,
telles que l’autonomisation ou le travail en équipes, exigent de pouvoir s’appuyer sur des
relations de confiance solides. Dans un monde instable et changeant, les gens cherchent à
obtenir des réponses à leurs interrogations par le biais d’un rapport direct, dont la qualité
dépend pour l’essentiel du niveau de confiance.

6.1.7.3. Les trois types de confiance

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Au sein de l’entreprise, les relations s’articulent autour de trois types de confiance,


reposant respectivement sur la dissuasion, l’expérience et l’identification.

6.1.7.3.1. La confiance de dissuasion

Les relations les plus fragiles sont celles qui découlent d’une confiance fondée sur
la dissuasion. Cette forme de confiance repose sur la crainte de représailles en cas de
violation. Les individus engagés dans ce type de rapport redoutent les conséquences
qu’impliquerait un manquement à leurs obligations, et agissent en fonction de cela. La
dissuasion ne fonctionne qu’à partir du moment où la punition est envisageable, où les
retombées sont claires et où les sanctions sont effectivement appliquées.
La plupart des relations reposent, dans un premier temps, sur la dissuasion. Les
premiers stades d’une relation entre manager et subordonné constituent un autre exemple de
confiance fondée sur la dissuasion. Le lien qui fonde cette confiance repose sur l’autorité du
chef, et sur la sanction qu’il est susceptible d’infliger si les obligations professionnelles ne
sont pas respectées.

6.1.7.2. La confiance d’expérience

Au sein d’une entreprise, la plupart des relations mettent en œuvre des rapports de
confiance fondée sur l’expérience. Cette confiance repose sur la prévisibilité
comportementale qui résulte d’une longue période d’interaction. Elle apparaît lorsque la
connaissance de l’autre permet de prédire de façon relativement fiable ses attitudes, son
comportement, ses réactions.

Lorsqu’elle est fondée sur l’expérience, la confiance s’appuie sur l’information plutôt
que sur la dissuasion. La connaissance d’autrui et la prévisibilité de son comportement se
substituent aux contrats, sanctions et dispositions légales qui caractérisent typiquement les
relations de confiance reposant sur la dissuasion. Cette connaissance se développe au fil du
temps, essentiellement en fonction de l’expérience, ferment du sentiment de fiabilité et de
prévisibilité. Plus on connaît quelqu’un, mieux on peut prévoir ce qu’il va faire. La
prévisibilité accroît la confiance – y compris lorsqu’il s’avère impossible de se fier à l’autre -,
car elle permet de prévoir à l’avance sa trahison. Plus on communique avec autrui, plus cette
forme de confiance se développe et se fiabilise.

A cet égard, un comportement inadéquat n’entraîne pas nécessairement une perte de


confiance. Si l’on estime être en mesure d’expliquer ou de comprendre l’apparente
trahison de l’autre, il devient alors possible de l’accepter, de pardonner et de poursuivre
la relation. Dans le cas d’une confiance reposant sur la dissuasion, ce même comportement
risque fort, en revanche, d’entraîner une rupture définitive.

Dans un contexte professionnel, les relations entre manager et collaborateur sont, la


plupart du temps, fondées sur l’expérience et la connaissance réciproque. Les deux parties
possèdent une expérience suffisante l’une de l’autre pour savoir à quoi s’attendre. Une longue
histoire commune, marquée par un dialogue ouvert et honnête, aura plus de chances de se voir
remise en cause au premier écart.

6.1.7.3.3. La confiance d’identification

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On atteint le plus haut niveau de confiance lorsqu’un lien affectif, un lien


émotionnel, s’établit entre les parties. Ce dernier permet d’agir dans l’intérêt de l’autre
et de se mettre à sa place lors des échanges interpersonnels. On parle alors d’une
confiance d’identification. La confiance s’installe quand chacune des parties se montre
capable de comprendre les intentions de l’autre et de mesurer ses désirs ainsi que ses besoins.
Cette compréhension mutuelle se développe tant et si bien que chacun finit littéralement par
acquérir la faculté de suppléer l’autre. Les contrôles deviennent dès lors sans objet ;
l’existence d’une loyauté absolue entre les individus rend superflue toute forme de
surveillance.

Dans l’entreprise, une confiance reposant sur l’identification peut éventuellement


apparaître lorsque deux personnes travaillent ensemble depuis longtemps et ont fini par
acquérir une connaissance intime l’une de l’autre. C’est ce même type de confiance que les
managers cherchent à instaurer au sein de leurs équipes. Dans l’idéal, les équipiers doivent
parvenir à un niveau d’entente qui leur permette d’anticiper ce que leurs collègues s’apprêtent
à faire et les conduise à pallier volontairement l’absence de l’un d’eux.

6.2. La motivation

Nous présentons dans cette section les principales approches de motivation visant à
optimiser le comportement des employés. La motivation des employés a une importance
capitale dans leur comportement. L’animation des collaborateurs repose aussi en partie sur la
motivation.

6.2.1. Motivation et besoins individuels

La motivation professionnelle se définit comme la volonté de fournir un effort


important afin d’atteindre les objectifs fixés par l’entreprise, volonté conditionnée par la
capacité dudit effort à satisfaire un besoin personnel. La motivation est fonction de trois
éléments : l’effort, les objectifs de l’entreprise et les besoins.

L’idée d’effort correspond à une mesure d’intensité. Lorsqu’une personne se sent


motivée, elle travaille plus dur, plus longtemps. Elle s’implique davantage dans la tâche. La
motivation doit être envisagée comme un processus de satisfaction des besoins. Le besoin
désigne un état interne qui éveille le désir d’atteindre un résultat donné. Un besoin non
satisfait crée une tension qui va pousser l’individu dans une direction particulière. Cette
pulsion génère un comportement de recherche visant à découvrir les objectifs
particuliers qui, par leur réalisation, combleront le besoin et réduiront la tension.

On peut dire des employés motivés qu’ils se trouvent dans un état de tension. Pour
soulager cette tension, ils fournissent un effort proportionnel à l’intensité de cette dernière.
Mais dans une optique professionnelle, cet effort tensio-réducteur doit correspondre en
outre aux objectifs de l’entreprise. La définition de la motivation exposée précédemment
implique donc nécessairement que les besoins individuels se montrent compatibles et
cohérents avec les objectifs organisationnels. S’ils ne le sont pas, les efforts fournis par les
individus risquent de se retourner contre les intérêts de l’entreprise. Les situations de genre
s’avèrent bien plus fréquentes qu’on ne le croit.

6.2.2. Les théories classiques de la motivation

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Attaquées de toute part et largement contestées aujourd’hui les trois grandes théories
formulées dans les années 1950 expliquent mieux que toutes les autres la notion de motivation
des employés. Ces théories ont été abordées plus haut (la théorie motivationnelle de A.
Maslow, la théorie X et théorie Y de McGregor, la théorie des deux facteurs d’Herzberg).

6.2.3. Les approches contemporaines de la motivation


Les théories précédentes ont mal résisté à l’examen. Il existe aujourd’hui de nouvelles
théories qui s’appuient sur une documentation solide et offrent une vision à la fois
complémentaire et contemporaine de la motivation des collaborateurs de l’entreprise.

6.2.3.1. La théorie des trois besoins

David Mc Clelland et d’autres chercheurs ont élaboré la théorie des trois besoins, qui
définit l’existence de trois moteurs ou besoins essentiels en matière d’activité
professionnelle :
 Le besoin d’accomplissement (ou de réussite) : l’envie de se surpasser, de s’accomplir
au-delà des normes établies, de se battre pour réussir.
 Le besoin de pouvoir (puissance) : le besoin d’imposer aux autres un comportement
qu’ils n’auraient pas adopté en temps normal.
 Les besoins d’affiliation : le désir d’établir des relations interpersonnelles amicales et
intimes.

Certaines personnes sont animées d’une irrépressible envie de réussir, mais s’attachent
plutôt à leur accomplissement personnel qu’au succès en tant que tel. Elles veulent travailler
mieux et plus efficacement qu’on ne le faisait auparavant. Cette pulsion correspond au besoin
d’accomplissement (ou de réussite). S’appuyant sur ses recherches, Mc Clelland affirme que
les individus entreprenants se différencient par leur désir de mieux faire. Ils recherchent les
emplois (1) qui leur donnent l’occasion de solutionner des problèmes sous leur
responsabilité ; (2) leur permettent d’obtenir une évaluation rapide et précise de leur
performance, afin de savoir s’ils ont beaucoup progressé ; et (3) leur offrent la possibilité de
se fixer des objectifs raisonnablement exigeants. Ils préfèrent s’attaquer à un problème et
assumer leur succès ou leur échec, plutôt que d’en abandonner la responsabilité à quelqu’un
d’autre ou de laisser la chance s’en mêler. Chose importante, ils évitent de se lancer dans des
tâches qu’ils perçoivent comme trop simples ou trop difficiles.

Le besoin de pouvoir correspond au désir d’avoir un impact et d’exercer une


influence sur les gens. Les individus qui présentent un besoin de pouvoir élevé aiment
assumer la direction des événements et peser sur le comportement d’autrui. Ils privilégient les
emplois concurrentiels et prestigieux. Le besoin d’affiliation se rapporte au désir d’être aimé
et accepté. C’et celui auquel les chercheurs se sont le moins intéressés. Les individus qui
témoignent d’un besoin d’affiliation élevé accordent beaucoup de prix à l’amitié, préfèrent le
travail d’équipe à la compétition et cherchent à établir des relations reposant sur une profonde
compréhension mutuelle.

6.2.3.2. La théorie de l’équité

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Développée par J. Stacy Adams, la théorie de l’équité soutient que les individus
évaluent subjectivement ce qu’ils retirent de leur travail (rétributions) par rapport à ce
qu’ils y investissent (contributions) pour comparer ce ratio avec celui d’un référent
pertinent, celui-ci pouvant être un collègue ou l’individu lui-même dans une période
antérieure. Si l’individu juge son ratio équivalent à celui de son référent, il se sent en
situation d’équité. Il estime être traité correctement et considère que la justice prévaut. Si les
ratios ne sont pas équilibrés, le sentiment d’iniquité apparaît : les employés se sentent sous-
payés (ou sur-payés) et cherchent alors à corriger les inégalités.

Le référent auquel les employés décident de se comparer représente une variable


essentielle dans la théorie de l’équité. Il peut appartenir à trois catégories mentales différentes,
intitulées Autrui, Système et Soi. La catégorie autrui rassemble les individus occupant un
emploi similaire dans la même entreprise, voire les amis, les voisins et les confrères. Sur la
base du bouche à oreille, des informations recueillies dans les journaux et des articles de
magazine consacrés aux salaires des cadres ou à la signature d’une nouvelle convention
collective, les employés comparent leur situation à celle des autres.

La catégorie système se rapporte aux politiques et règles salariales de l’entreprise,


ainsi qu’à l’administration de ce système. Elle englobe l’ensemble des méthodes de
rémunération, implicites comme explicites. Les options de l’entreprise en termes de barèmes
font aussi partie des déterminants essentiels de cette catégorie.

La catégorie soi fait référence aux ratios rétributions/contributions propres à


l’individu. Elle renvoie aux expériences personnelles ainsi qu’aux relations interpersonnelles.
Cette catégorie est influencée par des critères aussi divers que les emplois antérieurs ou les
obligations familiales de la personne concernée.

Le choix d’un ensemble particulier de référents dépend des informations disponibles à


leur sujet et de leur pertinence présumée. Lorsqu’ils perçoivent l’existence d’une égalité, les
individus peuvent (1) distordre leurs propres contributions ou rétributions, ou celles des
autres ; (2) amener l’autre à corriger ses contributions ou rétributions ; (3) choisir un nouveau
référent ; et/ou (4) quitter leur emploi.

La théorie de l’équité souligne que les individus se préoccupent de ce qu’ils reçoivent,


dans l’absolu, en récompense de leurs efforts ; mais aussi du rapport entre ce qu’ils reçoivent
et ce que les autres obtiennent. Ils se forgent une opinion fondée sur la comparaison de leur
ration rétributions avec celui d’autrui. Ils évaluent différents paramètres de leur contribution –
efforts fournis, expérience, formation, compétence – rapportés aux divers facteurs de
rétribution – niveau de salaire, augmentations et reconnaissance, entre autres. Lorsque ce ratio
leur apparaît déséquilibré par rapport à celui de leurs référents, ils ressentent une tension.
Moteur de la motivation, cette tension pousse les gens à se battre afin d’atteindre une situation
qui sera perçue comme juste et équitable.

La théorie énonce quatre propositions relatives aux inégalités et qui se sont avérées le
plus souvent exactes. L’expérience confirme régulièrement le bien-fondé de la thèse de
l’équité : la motivation du personnel est considérablement influencée par le niveau, relatif
autant qu’absolu, des rémunérations. Dès qu’ils perçoivent une iniquité, les employés font en
sorte de corriger la situation. Il peut en résulter une perte ou un gain de productivité, une
amélioration ou une dégradation de la qualité du travail, une augmentation de l’absentéisme,
ou des départs volontaires.

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Pour autant, il faut se garder d’en conclure que la théorie de l’équité ne pose
aucun problème. Elle laisse dans le flou certaines questions clés : comment les employés
définissent-ils contributions et rétributions ? Comment les combinent-ils et quel poids leur
donnent-ils dans leurs calculs ? Quand et comment les facteurs évoluent-ils au cours du
temps ? En dépit de ses lacunes, la théorie de l’équité dispose d’une impressionnante
crédibilité scientifique et fournit de précieux renseignements sur la motivation des employés.

6.2.3.3. Le modèle des caractéristiques de l’emploi (MCE)

Le modèle des caractéristiques de l’emploi a été développé par J. Richard Hackman et


Greg Oldham. Pour Hackman et Oldham, tout emploi se définit en fonction de cinq
dimensions centrales :
1. Variété des compétences : le degré de diversité du travail, qui offre l’occasion
d’exploiter des compétences et des statuts multiples.
2. Identité de la tâche : l’obligation d’accomplir une tâche complète et définie.
3. Importance de la tâche : l’impact du travail sur la vie privée et professionnelle des
autres.
4. Autonomie : le degré de liberté et l’indépendance de l’employé quant à l’organisation
de son temps et au choix de ses méthodes de travail.
5. Feed-back : la possibilité pour l’employé d’obtenir une formation claire et immédiate
sur l’efficacité du travail effectué.

Les trois premières dimensions déterminent collectivement l’intérêt du travail :


lorsqu’un emploi réunit ces trois caractéristiques, on peut raisonnablement s’attendre à ce que
l’employé considère son travail comme important, profitable et utile. En outre, l’autonomie
professionnelle éveille chez l’employé un sentiment de responsabilité par rapport aux résultats
obtenus, et le feed-back lui permet de mesurer directement son efficacité.

Du point de vue de la motivation, le MCE souligne que les rétributions intrinsèques


s’obtiennent lorsque l’individu apprend (connaissance des résultats par le biais du feedback),
qu’il a personnellement (perception de la responsabilité liée à l’autonomie) accompli de
manière satisfaisante une tâche qu’il considère comme importante (perception de l’intérêt
du travail liée à la variété des compétences, à l’identité et/ou à l’importance de la tâche). En
proportion de leur poids, ces trois conditions augmentent d’autant la motivation, la
performance et le sentiment de satisfaction, en réduisant dans le même temps le taux
d’absentéisme et la probabilité de démission.

Le MCE offre aux managers un outil précieux pour la structuration du travail,


applicable aux individus autant qu’aux équipes.

6.2.3.4. La théorie des attentes

A ce jour, la théorie des attentes de Vroom constitue, en terme de motivation,


l’explication la plus exhaustive et la mieux établie. Bien qu’elle ait suscité certaines critiques,
la plupart des recherches de terrain en ont confirmé la validité.

La théorie des attentes émet comme hypothèse que l’individu agit dans l’attente d’un
résultat donné et en fonction de l’intérêt qu’il attribue à ce dernier. Elle définit trois variables
ou relations :

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1. Lien effort-performance : la probabilité, aux yeux de l’individu, de réaliser une


performance donnée en fournissant une certaine quantité d’effort.
2. Lien performance - rétribution : la possibilité, évaluée par l’individu, qu’un niveau
de performance donné lui permette d’atteindre un résultat souhaité.
3. Intérêt : l’importance que l’individu accorde au résultat ou à la rétribution susceptible
de découler de son travail ? Cette variable prend en compte les objectifs et les besoins
de l’individu.

Malgré son apparente complexité, cette théorie n’est pas si difficile à appréhender. Les
questions qui suivent suffisent à la résumer : Quelle quantité de travail dois-je fournir pour
atteindre un niveau de performance donné ? Suis-je effectivement capable d’atteindre ce
niveau ? Quelle rétribution vais-je en retirer ? Quel intérêt cette rétribution présente-t-elle
pour moi et va-t-elle m’aider à atteindre mes objectifs ?

Le désir de produire dépend à chaque instant des objectifs particuliers de l’individu et


de sa perception de l’utilité relative de sa performance en tant qu’instrument de la réalisation
de ces objectifs.

Le degré de motivation d’un individu (effort) dépend de son niveau de certitude quant
à sa capacité à accomplir ce qu’il entreprend. S’il atteint son objectif (performance),
l’entreprise le rétribuera-t-elle de manière adéquate ? Et le cas échéant, cette rétribution
satisfera-t-elle ses objectifs individuels (intérêt) ?

La théorie définit implicitement quatre étapes. Premièrement, quelles rétributions


l’employé associe-t-il à son travail ? Celles-ci peuvent être positives : salaire, sécurité,
camaraderie, confiance, avantages, possibilité d’exploiter son talent et ses compétences,
relations de travail agréables. Mais l’employé peut envisager uniquement l’aspect négatif des
choses : fatigue, ennui, frustration, anxiété, intransigeance du management ou menaces de
licenciement. La réalité n’a rien à y avoir : ce qui compte ici, c’est la perception de l’employé,
qu’elle soit exacte ou erronée.

Deuxièmement, quel attrait ces rétributions revêtent-elles aux yeux de


l’employé ? Leur attribue-t-il une valeur positive, négative ou neutre ? Il s’agit là d’un
problème intrinsèque, dont l’issue dépend de l’attitude, de la personnalité et des besoins de
chacun. Les individus qui trouvent telle ou telle rétribution attrayante – qui lui confèrent une
valeur positive – feront en sorte de l’obtenir. D’autres, qui la jugent négativement, préféreront
l’éviter ? D’autres encore choisiront une position neutre.

Troisièmement, quel type de comportement doit-il adopter pour recevoir ces


rétributions ? Il est en effet peu probable qu’elles influent d’une manière ou d’une autre sur
ses performances tant qu’on ne lui aura pas indiqué clairement ce qu’il doit faire pour
l’obtenir. En terme d’évaluation, que signifie par exemple « faire du bon travail » ? Quels
seront les critères utilisés pour juger les performances de l’employé ?

Enfin, quatrièmement, comment l’employé calcule-t-il ses chances d’accomplir ce


qu’on lui demande ? Une fois qu’il a mesuré sa capacité à maîtriser les variables qui
détermineront son succès, quelle probabilité de réussite s’attribue-t-il ?

Cette théorie présente des ressemblances avec certaines théories dites d’apprentissage
social (Bandura, Rotter, etc.).

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Les théories les plus courantes en matière de motivation viennent d’être passées en
revue. Elles présentent des forces et des faiblesses plus ou moins notoires. Lesquelles utiliser
et lesquelles abandonner ?

On considère trop souvent les théories de la motivation indépendamment les unes des
autres. Or, les idées qui les sous-tendent sont souvent complémentaires, et l’on comprend
mieux comment motiver les gens lorsqu’on voit de quelle manière elles peuvent s’imbriquer.

Par exemple, la théorie des attentes prédit que l’employé travaillera d’autant plus qu’il
percevra l’existence d’un lien solide entre l’effort et la performance et la rétribution, et entre
les rétributions et la réalisation des objectifs personnels. Chacun de ces liens est à son tour
influencé par certains facteurs. Pour que de tels efforts se traduisent concrètement en terme de
performance, il faut d’une part que l’individu possède les capacités requises, et d’autre part
que le système d’évaluation lui paraisse juste et objectif. Si l’on désire assurer le lien
performance – rétributions, l’individu doit pouvoir se convaincre que ces rétributions
dépendent effectivement du niveau de performance (plutôt que de l’ancienneté, des relations
ou de tout autre critère). Dans ce cas, le système mis en place par le management l’incitera à
poursuivre et amplifier ses efforts. La théorie des attentes définit un troisième lien, le lien
rétribution – objectifs. C’est ici que les approches en termes de besoins entrent en jeu. La
motivation de l’individu sera d’autant plus grande que les rétributions qu’il obtiendra pour
prix de ses performances satisferont les besoins dominants correspondant à ses objectifs
personnels.

Il ne faut pas oublier les prudentes recommandations de la théorie de contingence qui


attirent notre attention sur les divers facteurs de contingence qui doivent être pris en compte.
Cette théorie du « ça dépend » est très importante.

6.2.4. Comment motiver un effectif diversifié

Pour optimiser la motivation d’une main-d’œuvre de plus en plus diversifiée, les


managers doivent penser en terme de flexibilité. Les employés ont des besoins et des objectifs
différents, qu’ils espèrent satisfaire grâce à leur travail. Si l’on veut pouvoir motiver un
effectif varié, il est nécessaire de disposer du plus large éventail de modes d’incitations
possibles.

Motiver une main-d’œuvre diversifiée implique également que les managers se


montrent suffisamment flexibles pour s’adapter aux différences culturelles. Les théories de
motivation étudiées dans ce chapitre ont été en majorité développées par des psychologues
européens et américains, et corroborées par des recherches menées dans les pays
industrialisés. Leur application à d’autres cultures nécessite un travail d’adaptation. Par
exemple, la hiérarchie des besoins de Maslow. Cette théorie s’insère parfaitement dans la
culture occidentale contemporaine. Le concept d’intérêt personnel correspond à la logique du
capitalisme, de même que la valorisation extrême de l’individu. Mais dans les pays qui
mettent l’accent sur l’effort collectif et l’élimination des incertitudes (Japon, Grèce ou
Mexique par exemple), les besoins de sécurité se retrouvent au sommet de la hiérarchie, loin
devant les besoins d’accomplissement. Au Danemark, en Suède, en Norvège, aux Pays-bas ou
en Finlande, où l’on accorde beaucoup de prix à la qualité de la vie, les besoins
d’appartenance occuperaient le somment de la pyramide.

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93

Alors que la théorie de l’équité rassemble de nombreux partisans aux Etats-Unis, il


semble qu’au sein des cultures collectivistes, les employés s’attendent à ce que les rétributions
reflètent autant leurs besoins individuels que leurs performances. En outre, conformément à
l’héritage du communisme et de l’économie planifiée, leur attitude traduit le sentiment d’un
droit légitime. En d’autres termes, ils conçoivent mal que les rétributions puissent être
inférieures aux contributions.

Les observations contenues dans les paragraphes précédents ne doivent pourtant pas
laisser croire qu’il n’existe aucune constante interculturelle en matière de motivation.
Plusieurs études menées en dehors des Etats-Unis montrent que certains aspects des théories
de la motivation sont directement exportables. Les techniques motivationnelles présentées
dans ce chapitre ont ainsi permis de modifier efficacement, en termes de performances, le
comportement des ouvriers de l’industrie textile russe. Pour autant, ces concepts ne sont pas
universellement applicables. Quel que soit l’environnement, les managers doivent comprendre
qu’il leur est nécessaire d’adapter leurs méthodes de motivation aux particularités culturelles
locales.

6.2.4.2. Comment les managers peuvent-ils améliorer l’équilibre travail/vie privée de


leurs
collaborateurs ?

Beaucoup d’employés travaillent encore entre sept et huit heures par jours, cinq (six
chez nous) jours par semaine. Ce sont des salariés à temps plein, qui se présentent chaque
matin à leur bureau et repartent chaque soir à la même heure. Pourtant, conformément au désir
des managers d’améliorer la flexibilité de leurs entreprises et de promouvoir un meilleur
équilibre entre travail et vie privée, un certain nombre d’aménagements sont apparus : intérim,
horaires à la carte, emploi partagé, télétravail.

Les horaires à la carte permettent aux employés de définir eux-mêmes, dans une
certaine mesure, leurs emplois du temps. Les employés continuent d’assurer chaque
semaine un nombre défini d’heures de travail, mais sont autorisés, dans certaines
limites, à choisir eux-mêmes leurs horaires. Chaque journée se compose d’une plage fixe,
encadrée par deux zones de flexibilité. En incluant la pause déjeuner, cette plage peut être
placée par exemple entre 9 et 15 heures, les bureaux restants ouverts de 6 à 18 heures. Les
employés sont tenus d’être tous présents pendant ces six heures, mais demeurent libres de
répartir les deux qui restent avant ou après la plage fixe. Certains systèmes permettent
d’accumuler des heures supplémentaires et de les convertir chaque mois en une journée de
congé.

Les avantages potentiels sont considérables, pour les employés comme pour
l’employeur : progrès en terme de motivation et de moral, réduction de l’absentéisme induite
par la possibilité de mieux concilier travail et obligations familiales, augmentation des salaires
consécutive aux gains de productivité, et opportunité pour l’entreprise de recruter une main-
d’œuvre plus variée et de meilleure qualité.

Les horaires à la carte présentent comme principal inconvénient de ne pas être


applicables à tous les emplois. Ils fonctionnent pour les personnes qui n’entretiennent qu’une
interaction limitée avec d’autres services, mais conviennent en revanche très mal lorsqu’il
s’agit de personnes occupant des postes clés, devant rester joignables aux heures normales de

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bureau, lorsque le rythme de travail impose un emploi du temps extrêmement serré, ou


lorsque des spécialistes sont appelés à superviser l’activité globale d’une unité.

Le télétravail, travail à domicile sur ordinateur connecté à l’entreprise, donne


l’occasion aux employés d’exercer leur activité à partir de n’importe quel coin du globe. En
exploitant ce potentiel, les entreprises n’ont plus besoin de s’installer à proximité des
gisements de main-d’œuvre. Le télétravail permet en outre à l’entreprise implantée dans une
région où les coûts salariaux lui paraissent trop élevés de faire réaliser sa production où la
main-d’œuvre sera moins coûteuse.

Du côté des employeurs, le principal défi consiste à former les managers pour leur
apprendre à bien maîtriser les problèmes des délais et de qualité. Le télétravail exclut en effet
tout contact direct, et les managers doivent donc trouver d’autres moyens de contrôler, ou
plutôt de piloter le travail à distance.

CHAPITRE 7

LE CONTROLE

Objectifs

A l’issue de ce chapitre, vous devriez être capable de

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- définir le contrôle
- décrire les trois approches du contrôle
- expliquer l’importance du contrôle
- distinguer les trois types de contrôles
- décrire les qualités d’un système de contrôle efficace
- identifier les facteurs de contingence des processus de contrôle

-----------------------------------------------------------------------------------------------
--------------------

7.1. Qu’est-ce que le contrôle ?

Le contrôle désigne la fonction managériale par laquelle s’opère le suivi des activités,
qui vise à garantir leur conformité aux préconisations de départ et à corriger tout écart trop
important. Le terme de contrôle recouvre ce double processus qui d’une part permet d’évaluer
le rendement d’une entité et d’autre part d’intervenir afin d’obtenir les résultats recherchés.
Les managers ne peuvent savoir vraiment si leurs services fonctionnent correctement tant
qu’ils n’ont pas évalué les tâches accomplies ni comparé les performances réalisées avec les
objectifs fixés. Un système de contrôle efficace permet de vérifier que le travail est bien
effectué, de manière à atteindre les objectifs de l’entreprise. L’efficacité du système dépend
directement de sa capacité à favoriser leur réalisation. Plus il y contribue, meilleur il est.

Bien qu’il puisse exister certaines similitudes, l’élaboration des systèmes de contrôle
s’effectue en général selon trois approches différentes : contrôle par le marché, par les
procédures ou par la culture. Le contrôle par le marché privilégie l’utilisation de
mécanismes externes, propres au marché. Les contrôles s’articulent autour des critères tels
que la concurrence sur les prix ou les parts de marché. La plupart des entreprises qui adoptent
cette approche distribuent des produits ou services clairement identifiés et se trouvent
confrontées à une très forte concurrence. Dans ces conditions, les diverses unités de
l’entreprise deviennent autant de sources de profits et sont évaluées en fonction du
pourcentage du bénéfice total qu’elles ont généré. Au vu des chiffres enregistrés, les managers
prennent les décisions qui s’imposent, concernant notamment l’allocation des ressources et les
changements de stratégie.

Le contrôle par les procédures privilégie l’autorité et s’organise autour des normes,
des règlements, des procédures et des politiques administratives. Ce type de contrôle s’appuie
sur une standardisation des activités, une description précise des postes permettant de guider
le comportement professionnel des employés, et d’autres mécanismes administratifs –
rapports budgétaires, notamment – pour garantir que les membres de l’entreprise fournissent
un travail adéquat et atteignent les niveaux de performance établis.

Avec le contrôle par la culture, le comportement des employés se trouve régulé par
les valeurs, normes, traditions, rites et convictions qui définissent la culture de l’entreprise.
Contrairement au contrôle administratif par les procédures, fondé sur des stricts mécanismes
hiérarchiques, le contrôle par la culture confie à l’individu et au groupe le soin d’identifier des
comportements professionnels appropriés ainsi que des niveaux de performance attendus. Le
contrôle par la culture est couramment utilisé au sein des entreprises qui comptent de
nombreuses équipes et connaissent des évolutions technologiques fréquentes.

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Il est important de noter que la plupart des entreprises n’élaborent pas leurs systèmes
de contrôle en s’inspirant exclusivement de l’une ou de l’autre de ces approches. Suivant le
cas, elles privilégient par exemple le contrôle par les procédures ou le contrôle par la culture,
en y ajoutant quelques éléments issus du contrôle par le marché. Quelle que soit l’approche
considérée, le but reste néanmoins de concevoir un système de contrôle approprié,
susceptible d’aider l’entreprise à atteindre ses objectifs de la manière la plus efficace et
la plus performante possible.

7.2. L’importance du contrôle

On peut planifier, on peut mettre en place une structure favorisant une réalisation plus
efficiente des objectifs, on peut diriger et motiver les employés. Pourtant, rien ne garantit que
l’activité soit menée comme prévu ou que les objectifs soient effectivement atteints. Le
contrôle représente l’ultime maillon sur la chaîne des fonctions managériales. Mais sa valeur
réside avant tout dans le lien qu’il entretien avec la planification et la délégation. Un
manager efficace se doit d’opérer un suivi afin de s’assurer que les tâches à effectuer par les
subordonnés sont effectivement effectuées, et que les objectifs qu’ils sont censés atteindre
sont effectivement atteints.

7.3. Les étapes d’un processus de contrôle

Le processus de contrôle comprend trois étapes distinctes : (1) la mesure des


performances réalisées et du rendement ; (2) la comparaison des performances réalisées
par rapport aux normes de référence ; (3) l’action managériale visant à corriger les
écarts ou à modifier les normes. Le processus de contrôle suppose l’existence préalable des
normes de performance, établies par le biais de la fonction de planification. Si le manager
s’appuie sur une définition mutuelle des objectifs qui sont par nature tangibles,
vérifiables et mesurables, dans ce cas-là, ce sont eux qui constituent les normes de
référence permettant de mesurer et de comparer les progrès mesurés. Si la définition des
objectifs n’est pas mise en œuvre, les normes correspondent aux indicateurs de
performance spécifiques utilisés par le management. En tout état de cause, il faut retenir
que les normes de performance sont élaborées au niveau e la fonction planification, qui
précède obligatoirement le contrôle.

7.3.1. La mesure des performances

La mesure des performances exploite couramment quatre sources d’information


principales : l’observation personnelle, les rapports statistiques, les comptes-rendus
oraux et les comptes-rendus écrits. Chacune présente des qualités et des défauts
particuliers ; leur utilisation combinée augmente à la fois le nombre de sources et la
probabilité de recueillir une information fiable.

L’observation personnelle procure une information de première main. Elle


permet de couvrir l’ensemble des activités, des plus importantes aux plus accessoires, et offre
la possibilité de lire entre les lignes. Le manager baladeur caractérise le manager qui s’invite
sur le lieu de travail, dialogue directement avec les employés et se tient ainsi au courant de
l’évolution des choses. Cette méthode permet de détecter certaines omissions, de capter des
omissions ou des tons de voix que d’autres sources ne pourraient pas relever.
Malheureusement, l’information quantitative étant aujourd’hui synonyme d’objectivité,
l’observation personnelle est souvent considérée comme une source de qualité inférieure. Elle

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est trop subjective : ce qu’un manager voit, un autre pourrait très bien ne pas le remarquer.
Elle est en outre consommatrice de temps, et pêche par son importunité – certains employés
risquant en effet d’interpréter la surveillance ostensible du manager comme un signe de
défiance.

Conséquence du développement de l’informatique, les managers fondent de plus en


plus leur mesure des performances sur l’étude de rapports statistiques. L’instrument ne se
limite pas à l’édition de simples données chiffrées. Il peut également prendre la forme de
graphiques, d’histogrammes, ou d’autres formes de représentation numérique que les
managers peuvent mettre à profit pour évaluer les performances. Bien que l’information
statistique soit aisément perceptible et permette de démontrer de manière très efficace les liens
de causalité, elle n’offre cependant que des renseignements restreints sur l’activité considérée.
Les statistiques se concentrent sur certains points précis, en ignorant d’autres facteurs
importants, souvent subjectifs.

L’information peut également provenir de comptes-rendus oraux, recueillis par le


biais de conférences, de réunions, de conversations privées ou de communications
téléphoniques. Lorsque les employés sont dans un environnement culturel adéquat, cette
approche peut constituer le meilleur moyen de contrôler l’évolution des performances. Les
avantages et les inconvénients de cette méthode sont analogues à ceux de l’observation
personnelle. Bien que l’information soit filtrée, c’est une technique rapide qui offre de bonnes
possibilités de feed-back et permet de communiquer par l’expression du visage et le ton de la
voix autant que par les mots. Historiquement, l’un des principaux inconvénients du compte-
rendu oral résidait dans l’impossibilité d’en conserver une trace durable en vue d’une
consultation ultérieure. Mais les progrès techniques réalisés au cours des dernières décennies
autorisent désormais son enregistrement et sa pérennisation.

Les performances peuvent enfin être mesurées par le biais de comptes-rendus écrits.
A l’instar des rapports statistiques, ils représentent une source d’information plus lente, mais
aussi plus formelle que l’estimation orale directe. Ce caractère formel leur confère souvent
une exhaustivité et une concision supérieures aux comptes – rendus oraux. Ils sont en outre
très faciles à classer et à référencer.

Que s’agit-il de mesurer ?

Dans le cadre du processus de contrôle, certains critères de contrôle s’appliquent à


toutes les situations managériales. Ainsi étant donné qu’un manager dirige l’activité d’autres
personnes, des critères tels que la satisfaction des employés ou les taux de turn-over et
d’absentéisme peuvent être mesurés dans tous les cas. La plupart des managers disposent, sur
leur zone de responsabilité, d’un budget libellé en unités monétaires. Le maintien d’un coup
en-deçà des limites du budget représente de ce fait un critère assez couramment utilisé.
Néanmoins, un système de contrôle un tant soit peu exhaustif se doit de reconnaître la
diversité de l’activité de manager. Le directeur de la production d’une usine de blocs-notes
pourra par exemple se fonder sur la mesure de la production journalière, de la production
horaire, du taux de rebut, ou du taux de retour des clients. De son côté, le responsable d’un
service administratif au sein d’une administration publique mesurera le nombre de pages
produites chaque jour, le nombre de tâches effectuées en une heure, ou le temps de traitement
moyen des appels téléphoniques d’usagers. Enfin, le directeur marketing s’intéressera plutôt
aux parts de marché, au nombre de clients par vendeur, ou au taux d’audience des différents
supports publicitaires.

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Certaines activités sont plus difficiles à quantifier. Un manager aura plus de mal à
mesurer la performance d’un chercheur en médecine ou d’un conseiller en orientation que
celle d’un courtier d’assurances. Cependant, la plupart de ces activités peuvent être divisées
en série de segments objectifs qui se prêtent mieux à l’évaluation. Le manager doit déterminer
ce que la personne, le département ou la division apporte à l’entreprise, et convertir cette
contribution en fonction d’un certain barème.

La plupart des emplois et des activités peuvent être exprimés sous une forme tangible
et mesurable. Lorsqu’un indicateur de performance ne peut être défini en termes quantifiables,
les managers doivent recourir à des mesures subjectives. Celles-ci présentent d’importantes
limitations. Mais elles valent toujours mieux qu’une absence totale de références et de
contrôle. S’il s’agit d’une activité importante, le fait qu’elle soit difficile à mesurer ne peut
constituer une excuse valable. Le manager doit mettre en œuvre de critères de performance
subjectifs.

Comment comparer les performances réalisées avec les objectifs fixés ?

L’étape de comparaison permet d’établir le degré de divergence entre les performances


mesurées et les normes fixées. Toutes les activités peuvent donner lieu à certains écarts ; il est
donc crucial de déterminer une marge de variation raisonnablement acceptable. Au-delà
de cette marge, l’écart sera considéré comme problématique et devra retenir l’attention du
manager. Lors de l’étape de comparaison, les managers s’intéressent plus particulièrement à
l’ampleur et à la direction de la variation.

7.3.2. La forme de l’action managériale

La troisième et dernière étape du processus concerne l’action managériale. Les


managers ont trois possibilités : ne rien faire, corriger les performances, ou bien réviser les
normes. Le premier choix n’exigeant pas d’explication particulière, examinons en détail les
deux autres.

Tenter de corriger les performances

Si l’écart résulte d’une dégradation des performances, le manager s’orientera vers une
action corrective. Il pourra notamment envisager d’opérer des changements stratégiques ou
structurels, de modifier les méthodes de rémunération ou les programmes de formation, de
redéfinir les postes ou de renouveler le personnel.

Le manager qui s’engage sur cette voie doit prendre une décision : opter pour une
action corrective immédiate, ou pour une action corrective de fond. L’action corrective
immédiate permet de traiter les problèmes sur le champ et de rétablir aussitôt un niveau de
performance adéquat. L’action corrective de fond examine de quelle manière et pour quelle
raison les performances ont dévié, et s’attache ensuite à supprimer la source de cette
déviation. Il n’est pas rare que les managers estiment ne pas avoir le temps d’entreprendre des
actions correctives de fond, et se contentent ainsi de combattre les incendies successifs à
coups d’actions correctives immédiates. A l’inverse, un manager efficace saura analyser les
variations de performances et prendre la peine, lorsque cela se justifie, de les corriger
définitivement.

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Réviser les normes

Il est également possible que l’écart de performances soit dû à l’édiction d’une norme
irréaliste – c’est-à-dire d’un objectif trop élevé ou trop faible. C’est la norme qu’il convient
dans ce cas corriger, et non les performances. Mais il faut garder à l’esprit que l’individu dont
les résultats ne correspondent pas aux objectifs aura pour premier réflexe de critique la norme
établie. Si on estime qu’elle n’a rien d’extravagant, on doit tenir bon : expliquer sa position,
réaffirmer ses attentes vis-à-vis de l’employé ou du manager, et prendre toutes les mesures
correctives nécessaires pour en assurer la réalisation.

7.4. Les différents types de contrôles

Le management peut implémenter des contrôles situés en amont de l’activité, pendant


le déroulement de l’activité, ou en aval de l’activité. Ils portent respectivement les noms de
contrôles préventif, continu et contrôle rétroactif.

7.4.1. Le contrôle préventif

Le type de contrôle le plus intéressant – le contrôle préventif ou préliminaire, proactif


– permet d’anticiper les problèmes, car il intervient en amont de l’activité. Il est orienté vers
l’avenir. L’essence du contrôle préventif consiste à entreprendre des actions managériales
avant qu’une difficulté ne surgisse. Le manager peut ainsi prévenir les problèmes, au lieu
d’être obligé d’y remédier ultérieurement. Le contrôle préventif s’appuie malheureusement
sur une acquisition rigoureuse et opportune de l’information qu’il est souvent difficile de
mettre en œuvre. Les managers sont donc fréquemment contraints d’utiliser l’un des deux
autres types de contrôle.

7.4.2. Le contrôle continu

Le contrôle continu ou de suivi intervient pendant le déroulement de l’activité. Il


permet au management de résoudre les problèmes en cours de production, avant qu’ils ne
coûtent trop cher. La surveillance directe en représente la forme la plus connue. Lorsqu’un
manager supervise directement l’activité d’un employé, il peut dans le même temps corriger
les problèmes qui surviennent. Le laps de temps qui sépare l’apparition d’un problème et
l’action corrective du manager, se trouve réduit au minimum. Les équipements techniques
(tels que les ordinateurs ou les systèmes à commandes informatisées) peuvent être conçus de
manière à mettre en œuvre un processus de contrôle en continu. Cela fonctionne à la manière
d’un ordinateur qui en traitement de texte signale les fautes d’orthographe et de grammaire au
cours de la frappe. Signalons que de nombreuses entreprises s’appuient également sur le
contrôle en continu pour informer les ouvriers de la qualité plus ou moins conforme de leur
production.

7.4.3. Le contrôle rétroactif

Le type de contrôle le plus répandu repose sur la rétroaction. Il intervient a posteriori,


en aval de l’activité. Les rapports de ventes illustrent parfaitement l’utilisation du contrôle
rétroactif. Ce type de contrôle présente comme principal inconvénient qu’il faut attendre que
le mal soit fait pour avoir connaissance du problème. C’est un peu comme si on verrouillait sa
maison après avoir été cambriolé. Pour de nombreuses activités, le contrôle proactif demeure
cependant la seule solution viable. Les rapports financiers en sont un bon exemple. Dès lors,

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le manager n’a plus d’autre choix que d’essayer d’en déterminer la raison et de rétablir la
situation.

Inversement, le contrôle rétroactif possède deux gros avantages par rapport aux
contrôles préventif et continu. D’une part, il fournit au manager de précieuses informations
sur l’efficacité de la planification. Un faible écart entre performances mesurées et les normes
fixées en démontrera la pertinence générale. Si l’écart est plus important, le manager pourra
s’appuyer sur ces informations pour améliorer sa stratégie. Le contrôle rétroactif permet par
ailleurs d’augmenter la motivation des employés : les gens aiment savoir s’ils ont bien ou mal
travaillé ; le contrôle rétroactif assouvit cette curiosité naturelle quant à leur performance.

7.5. Les implications managériales du contrôle

Le contrôle joue un rôle crucial dans les résultats d’une entreprise et représente une
fonction importante du management. Sans contrôle, les managers n’auraient jamais assez
d’informations pour résoudre les problèmes, prendre des décisions, ou mettre en œuvre des
mesures appropriées. Comment doivent-ils s’y prendre pour exercer cette fonction de la
manière la plus efficace et la plus efficiente possible ? Pour répondre à cette question, il
convient d’examiner les qualités qui caractérisent un système de contrôle efficace, les facteurs
de contingence qui déterminent la conception de ces systèmes, ainsi que les ajustements qu’ils
doivent nécessairement subir en fonction des différences nationales.

7.5.1. Les qualités d’un système de contrôle efficace

Les systèmes de contrôle les plus efficaces partagent un certain nombre de


caractéristiques communes. Si l’importance de ces caractéristiques varie en fonction de la
situation, celles qui suivent devraient garantir dans la majorité des cas l’efficacité du contrôle.

Rigueur : si le système de contrôle génère des informations inexactes, le management risque


de ne pas réagir lorsqu’il le devrait, ou de s’attaquer à un problème qui n’existe pas. Un
système de contrôle rigoureux doit être fiable et produire des données valides.

Rapidité : les contrôles doivent alerter à temps le management pour prévenir toute
dégradation sérieuse des performances. La meilleure information n’a que peu de valeur si elle
est périmée. Un système de contrôle efficace doit donc garantir une transmission rapide des
informations.

Economie : les systèmes de contrôle doivent être économiquement rentables. Ils doivent
justifier leur utilité par rapport aux coûts qu’ils induisent. Pour minimiser les coûts, le
management doit faire en sorte de ne mettre en place que les contrôles strictement nécessaires
à l’obtention des résultats désirés.

Flexibilité : les contrôles doivent être suffisamment flexibles pour s’adapter aux problèmes et
tirer profit de toute nouvelle opportunité. Bien peu d’entreprises évoluent dans un
environnement si stable qu’elles puissent se passer de la flexibilité. Même les structures
hautement mécanisées exigent des contrôles ajustables en fonction du moment et des
circonstances.

Clarté : les contrôles abscons n’ont aucun intérêt. En conséquence, il sera parfois nécessaire
de remplacer certains instruments sophistiqués par d’autres, moins complexes. Un système de

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contrôle difficile à appréhender peut entraîner d’inutiles erreurs, frustrer les employés, et finir
même par être abandonné.

Rationalité des critères : les normes de performance fixées doivent être raisonnables et
accessibles. Si elles sont trop élevées, ou irréalistes, elles n’alimentent plus la motivation. La
plupart des employés refuseront de prendre le risque d’être taxés d’incompétence pour avoir
osé critiquer les exigences démesurées de leurs supérieurs. Dès lors, la déontologie et la
légalité de leur activité peuvent s’en trouver menacées. Les contrôles doivent donc instaurer
des normes ambitieuses qui incitent les gens à se dépasser, sans toutefois les démotiver ni
encourager la fraude.

Localisation stratégique : dans une entreprise, le management ne peut tout contrôler. Et


même s’il le pouvait, l’intérêt de la chose ne justifierait pas les coûts engendrés. Les managers
doivent donc établir des contrôles sur les facteurs qui revêtent une importance stratégique
quant aux performances de l’entreprise. Ces contrôles doivent couvrir les activités les
activités, les opérations et les événements les plus critiques. En d’autres termes, ils doivent
être concentrés là où les écarts ont le plus de chances de survenir, ou risquent de causer les
plus gros dégâts.

Priorité aux exceptions : étant donné qu’ils ne peuvent contrôler l’ensemble des activités, les
managers doivent mettre en place leurs instruments de contrôle de manière à n’être alerté
qu’en cas d’événement exceptionnel. Un tel système assure de ne pas se trouver submergés
d’informations au moindre écart de performance.

Multiplicité des critères : mangers et employés cherchent à faire bonne impression sur les
critères de contrôle. Si les contrôles mis en place par la direction ne mesurent qu’une seule
donnée - les bénéfices, par exemple -, les efforts porteront uniquement sur ce point. Une
mesure diversifiée des performances permettra d’élargir le champ de préoccupations. Les
critères multiples présentent un double avantage. Plus difficiles à manipuler qu’un critère
unique, ils peuvent dissuader les employés qui tenteraient de jouer sur les apparences. En
outre, l’utilisation d’un seul indicateur se montrant rarement propice à une évaluation
objective, les critères multiples permettent d’obtenir une mesure plus précise des
performances.

Action corrective : un système de contrôle efficace ne se contentera pas de signaler


l’apparition d’un écart de performances significatif, mais d’indiquer également l’action qui
devrait être entreprise pour le corriger. Il doit être tout à la fois capable de souligner les
problèmes et de fournir leur solution. Cette forme de contrôle se traduit souvent par la mise en
place de règles conditionnelles – par exemple : si le chiffre d’affaires baisse de plus de 5%,
réduire les frais de fonctionnement dans les mêmes proportions.

7.5.2. Les facteurs clés affectant le contrôle

Bien que la conception d’un système de contrôle efficace puisse s’appuyer sur les
recommandations qui précèdent, sa validité reste soumise à l’influence de certains facteurs
situationnels. Ces facteurs de contingence comprennent la taille de l’entreprise, la position
hiérarchique, le degré de centralisation, la culture interne et l’importance de l’activité.

Les systèmes de contrôle doivent être adaptés à la taille de l’entreprise. Une petite
structure s’orientera ainsi de préférence vers des méthodes informelles et subjectives. Un

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contrôle continu établi sur la surveillance directe offrira probablement la solution la plus
rentable. En fonction de la taille, la surveillance directe s’accompagnera d’un système formel
plus ou moins développé. Les très grandes entreprises mettront généralement en place des
systèmes de contrôles préventif et rétroactif extrêmement formalisés et parfaitement objectifs.

A mesure que l’on s’élève dans la hiérarchie, l’ambiguïté croissante des mesures de
performance impose la multiplication des critères, adaptés aux objectifs de l’unité. Un emploi
subalterne, défini de façon plus concrète, autorisera au contraire une interprétation plus étroite
de la performance professionnelle.

Plus le degré de centralisation est élevé, plus les managers ont besoin d’obtenir un
feedback sur l’efficacité des décisions de leurs employés. La délégation d’autorité ne les
exonérant en rien de leurs responsabilités, ils veulent pouvoir s’assurer que les décisions des
employés sont à la fois efficaces et efficientes.

La culture d’une entreprise peut être fondée sur la confiance, l’autonomie et


l’ouverture, ou s’appuyer sur la peur et la rétorsion. Suivant le cas, le contrôle des
performances s’effectuera sur un mode tantôt autonome et informel, tantôt formel et
autoritaire. A l’instar des styles de leadership, des techniques de motivation, de la
structuration organisationnelle ou du degré d’implication des employés dans les processus
décisionnels, la nature des contrôles doit correspondre à la culture de l’entreprise.

Enfin, l’importance de l’activité détermine, le cas échéant, les contrôles dont elle fait
l’objet. Si le contrôle est coûteux et les répercussions d’une éventuelle erreur négligeables, le
système risque de rester assez rudimentaire. A l’inverse, si les dégâts potentiels l’imposent, on
approfondira au maximum les contrôles – en dépit de leur coût.

7.5.3. Adapter les contrôles en fonction des différences culturelles

Les concepts exposés précédemment s’appliquent à des structures géographiquement


concentrées et culturellement homogènes. Mais qu’en est-il des entreprises multinationales ?
leurs systèmes de contrôle doivent-ils se conformer aux particularités locales ? comment les
managers peuvent-ils assurer cette adéquation ?

Le contrôle du comportement et de l’activité des employés met en œuvre des méthodes


qui peuvent apparaître très différentes d’un pays à l’autre. Dans le cas des entreprises
multinationales, ces différences concernent essentiellement les étapes du processus de
contrôle relatives à la mesure des performances et aux actions correctives. Au sein d’une telle
structure, la maison mère contrôle souvent les filiales d’une manière assez lâche, ne serait-ce
qu’en raison de la distance, qui exclut toute observation directe du travail. Cet éloignement
géographique favorisant les contrôles formels, les multinationales s’appuient fréquemment sur
l’étude de rapports officiels et approfondis. Mais elles peuvent aussi mettre à profit la
puissance des technologies informatiques.

En matière de contrôle, l’impact de la technologie devient particulièrement flagrant


lorsqu’on compare les nations technologiquement avancées -, les entreprises utilisent
désormais, en complément de la normalisation des consignes et de la surveillance directe, des
outils de contrôle indirects – l’analyse informatique, notamment – pour s’assurer du bon
déroulement des activités. Dans les pays défavorisés, ce seront plutôt la surveillance directe et

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la centralisation extrême du pouvoir décisionnel qui constitueront les deux principaux moyens
de contrôle.

Par ailleurs, certaines législations nationales interdisent aux managers de fermer des
usines, de licencier du personnel, ou d’engager de nouvelles équipes de direction venues de
l’étranger, ce qui limite quelque peu les actions correctives envisageables. La comparabilité
des données représente enfin une véritable gageure pour les entreprises multinationales. Deux
unités de production, l’une en Turquie, l’autre en Suède, peuvent ainsi très bien produire la
même chose. Mais l’unité turque risque cependant d’employer une main-d’œuvre beaucoup
plus importante, en raison du niveau plus faible des salaires. Si les dirigeants de l’entreprise
choisissaient de contrôler l’activité en évaluant, par exemple, le coût de production unitaire ou
le rendement par ouvrier, les chiffres ne seraient absolument pas comparables. Dans une
multinationale, les managers doivent absolument tenir compte de ce genre de problèmes.

7.5.4. La fréquence de contrôle

On devine ce qui peut se produire en cas de défaillance des contrôles. Mais en sens
inverse, l’inflexibilité du système ou l’irréalisme des normes entraînent des conséquences
similaires. N’a-t-on pas quelquefois l’impression que le respect scrupuleux des procédures
obsède les membres de certaines entreprises, ou de certaines administrations, au point de leur
faire oublier que leur travail consiste à servir les clients, et non à le harceler ?

La raison en est que les gens perdent alors les objectifs globaux de l’entreprise. Alors
qu’elle devrait gérer le contrôle, ce sont parfois les contrôles qui la dirigent.

Les systèmes de contrôle ne permettent pas de tout surveiller, des problèmes peuvent
survenir lorsque certains ou services s’attachent exclusivement à obtenir de bons résultats sur
les critères retenus. Il s’ensuit un dysfonctionnement, provoqué la plupart du temps par une
mesure incomplète des performances. Si le système de contrôle n’évalue que le rendement, la
qualité s’en trouvera négligée. De même, s’il évalue l’activité plutôt que les résultats, les
employés tâcheront d’abord de faire bonne impression sur ce critère-là.

Pour éviter les sanctions des managers, certains individus peuvent faire en sorte de
fausser les données du système pendant la durée du contrôle. Au lieu de travailler
correctement, ils manipulent les mesures pour donner l’illusion de l’efficacité. L’expérience
montre que la manipulation des contrôles ne constitue pas un phénomène aléatoire. Elle
fonction de l’importance des activités. Celles que l’entreprise juge importantes ont de grandes
chances d’influer significativement sur les rétributions de l’employé, qui serait d’autant plus
tenté d’obtenir une évaluation avantageuse sur les critères correspondants. Quand les
rétributions sont en jeu, les individus cherchent à manipuler les données pour se faire valoir,
que ce soit en falsifiant les chiffres, en accentuant leurs succès, ou en supprimant les preuves
de leurs échecs. A l’inverse, lorsque les rétributions n’entrent en ligne de compte, la
distribution des erreurs de mesure semble répondre aux lois du hasard.

En conclusion, on peut dire que les contrôles présentent à la fois de bons et de mauvais
côtés. La non-flexibilité d’un système risque en effet d’engendrer des dysfonctionnements
plus graves encore que ceux qu’il était censé prévenir.

7.6. Le contrôle dans l’organisation aujourd’hui

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La conception d’un système de contrôle efficace et efficient peut soulever certains


problèmes. Il est évident que les progrès de l’informatique ont largement simplifié les
processus de contrôle. Mais ces mêmes progrès posent également de délicates questions
relatives aux informations que les managers sont habitués à recueillir ou l’ampleur des
contrôles qu’ils sont en droit d’exercer. Un problème est étudié ici : le respect de l’intimité sur
le lieu de travail.

7.6.1. Mon ordinateur m’appartient-il vraiment ?5

Si vous travaillez, pensez-vous avoir droit au respect de votre intimité sur le lieu de
travail ? Que pensez-vous que votre employeur soit susceptible de découvrir à votre sujet ?
Les réponses à ces questions pourraient vous surprendre. Entre autres choses, votre patron
peut lire vos e-mails (y compris des messages personnels ou confidentiels), écouter vos
conversations téléphoniques, ou espionner votre ordinateur. Ces pratiques n’ont rien
d’exceptionnel. Aujourd’hui 14 millions de salariés aux Etats-Unis feraient l’objet d’une
surveillance continue de leurs e-mails et de leur utilisation d’Internet. Par ailleurs, près de
80% des entreprises interrogées par l’American Association avouent surveiller leurs
employés. Depuis octobre 2000, en Grande - Bretagne, les employeurs sont autorisés à
surveiller les courriers électroniques de leurs salariés.

Pourquoi les managers se sentent-ils obligés de surveiller ainsi le personnel ? L’un des
premiers arguments consiste à rappeler que les employés sont embauchés pour travailler, et
non pas pour boursicoter, jouer au faire du shoping sur Internet. L’usage récréatif d’Internet
pendant les heures de travail coûterait chaque année un milliard de dollars en termes de
ressources informatiques et plusieurs milliards en termes de productivité – un gaspillage
considérable pour les entreprises. Mais si les managers contrôlent l’utilisation des e-mails et
des ordinateurs, c’est aussi parce qu’ils ne veulent pas risquer d’être poursuivis en justice,
accusés d’avoir laissé s’installer une ambiance hostile au motif qu’un message insultant ou
qu’une image choquante se serait affichée sur l’écran d’un employé. La possibilité des faits
leur permet au contraire de réagir sur le champ. Les dirigeants veulent être sûrs que des
secrets internes ne sont pas divulgués. Si la protection de la propriété intellectuelle revêt
toujours une grande importance, c’est encore plus vrai dans les industries de pointe. Les
managers doivent être certains que les employés ne peuvent pas, même par inadvertance,
transmettre à l’extérieur des informations qui pourraient être utilisées pour nuire à
l’entreprise.

Les conséquences d’un usage inapproprié de l’ordinateur sur le lieu de travail peuvent
aussi se révéler dramatiques pour les employés et les entreprises elles-mêmes.

Le parlement européen, en novembre 2001, a voté un projet de directive concernant le


traitement des données à caractère personnel ainsi que la protection de la vie privée en matière
de communications électroniques.

En France, toute mise en place d’un système de surveillance ou de contrôle de


l’activité des salariés nécessite la consultation préalable des représentants du personnel ainsi
que l’information des salariés. Par ailleurs, si l’employeur dispose d’un droit de contrôle sur
5
Ceci est donné à titre indicatif pour que l’étudiant pédagogue d’aujourd’hui puisse déjà y réfléchir. En effet, notre système d’enseignement
est aussi appelé à changer à l’instar de beaucoup d’autres dans le monde. Déjà l’ombre de téléenseignement est à nos portes, du moins en ce
qui concerne l’enseignement supérieur. N’avons-nous pas aujourd’hui une option technologie de l’éducation ? Je pense qu’il faut penser son
activité de manière large. Notre enseignement primaire et secondaire peut s’informatiser. On voit déjà des bourgeons par-ci par –là.

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les mails professionnels, il ne saurait prendre connaissance du contenu d’un mail personnel
qu’avec l’accord du salarié.

Malgré l’ampleur des moyens de surveillance dont disposent leurs managers, les
employés américains se sont vu garantir un minimum de protection par la Federal Electronic
Communication Privacy Act de 1986 (EPCA). L’EPCA) interdit toute interception non
autorisée des communications électroniques. Mais il ne rend pas pour autant illégale la
surveillance informatique sur le lieu de travail, puisqu’il autorise toujours les entreprises à
contrôler les communications pour raisons industrielles, ou lorsque leurs employés en ont été
notifiés à l’avance. Dans ce domaine, le problème essentiel consiste à trouver le bon
équilibre entre le besoin d’information des managers et son impact potentiel sur le
moral des employés.

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