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Système digestif Charles Nicaise

Version du 06/11/2015 MMEDB203 – SMEDB203

Chapitre 5

Système Digestif
Préambule

Malgré l'image d'une discipline historiquement très descriptive, l'histologie a évolué


et n'a jamais été aussi importante qu'aujourd'hui dans un cursus (bio)médical. Le
diagnostic de maladies repose de plus en plus sur l'analyse de fragments tissulaires
(biopsie exploratoire, examen ex-tempore durant une résection chirurgicale,
prélèvement post-mortem) au moyen de techniques avancées d'histologie. Pour bien
comprendre les causes, les mécanismes et les conséquences des maladies, il est
impératif de connaître l'histologie des organes dans un contexte normal. La
connaissance de la biologie cellulaire et moléculaire ajoute une nouvelle dimension à
l'histologie et permet de mieux comprendre les pathologies qui seront abordées plus
tard dans le cursus de l'étudiant.

Les notes de cours complètent l’enseignement dispensé en auditoire et les supports


fournis sur WebCampus. Elles contiennent toutes les informations sur la morphologie
des organes/des tissus dans un contexte normal et les relations à leur(s) fonction(s).
Ces notes sont assez complètes et font parfois appel à des notions abordées dans
d’autres disciplines comme l’embryologie, l’anatomie, la biochimie ou la physiologie.
Elles visent non pas à assommer l’étudiant par de nombreuses informations
multidisciplinaires mais plutôt à le pousser à essayer de comprendre les liens entre
structure et fonction, à le sensibiliser au fait que toutes les disciplines sont
interdépendantes et qu’elles ne peuvent s’aborder isolément. Le but recherché est que
l’étudiant puisse se forger sa propre vision du fonctionnement d’un organe ou d’un
système de manière transdisciplinaire à partir d’une bibliothèque de cours
monodisciplinaires.

AVERTISSEMENT ! Les présentes notes de cours constituent une version


temporaire, non illustrée et non corrigée.

Ressources bibliographiques :

* Histologie humaine, Alan Stevens & James Lowe, De Boeck, 2e édition, 1997
* Histologie humaine, Alan Stevens & James Lowe, Elsevier Masson, 3e édition, 2006
* Histologie et biologie cellulaire : Une introduction à l'anatomie pathologique,
Abraham L. Kierszenbaum, 1ère édition, 2006
* Anatomie pathologique : Atlas de Wheater, Stevens, Lowe & Young, De Boeck,
2004
* Les bases de l’immunologie fondamentale et clinique, Abul K. Abbas & Andrew H.
Lichtman, Elsevier Masson, 4e édition, 2013
* Immunologie, Roitt, Brostoff & Male, De Boeck, 1997

2
5 Le système digestif

5.1 Introduction

Le système digestif est une succession de régions anatomiques spécialisées


ayant pour but de fragmenter les aliments, les attaquer par diverses sécrétions
enzymatiques transformant grosses molécules en plus petites, ultimement les absorber
vers les circulations lymphatiques/sanguines et éliminer ce qui n’est pas digérable.
Les petites molécules seront les acides aminés, les petits peptides, les hydrates de
carbone, les sucres et les graisses, qui sont majoritairement absorbés au niveau de
l’intestin grêle, transportés via la circulation portale vers le foie où ils seront utilisés
comme éléments de base dans la synthèse des protéines, des glucides et des lipides.
Les cavités digestives et le tube digestif peuvent être vus comme un long tube
musculaire tapissé d’un épithélium dont la morphologie varie en fonction de la région
et de la fonction anatomique. A quelques exceptions près, la structure musculaire est
partout similaire.
Le système digestif peut être divisé en 4 compartiments fonctionnels : (1) la
cavité buccale, (2) les voies de passage (œsophage et canal anal) où aucune
modification n’est apportée aux aliments, (3) le tube digestif en lui-même, lieux de
digestion et d’absorption par excellence des nutriments et (4) les organes associés au
tube digestif déversant diverses sécrétions (foie, vésicule biliaire, pancréas).

5.2 La cavité buccale

5.2.1 Fonction

La cavité buccale est le lieu de la fragmentation des aliments sous l’effet de la


force de broyage exercée par les dents, fixées aux mâchoires, elles-mêmes mues par
les puissants muscles masticateurs. La fragmentation des aliments est accompagnée
d’une prédigestion des aliments par le déversage des sécrétions des glandes salivaires.
Les aliments sont dès lors ramollis, humidifiés, fragmentés constituant le bol
alimentaire qui sera dégluti et emmené vers l’oropharynx, poussé par la langue. Il
passera ensuite vers la première voie de passage : l’œsophage.
La cavité buccale est aussi un organe sensoriel puisque des nombreux récepteurs
du goût sont disséminés sur la langue et ses papilles gustatives. Enfin, quelques
nodules lymphoïdes, appartenant à l’anneau de Waldeyer, sont retrouvés à proximité
de l’oropharynx ; c’est le cas des amygdales vélopalatines, palatines et linguales (voir
chapitre sur le Système Immunitaire).

5.2.2 Les lèvres

La cavité buccale est limitée extérieurement par les lèvres dont on distingue 3
parties : la lèvre externe, le vermillon et la lèvre interne.
La lèvre externe est une peau fine et pileuse renfermant glandes sébacées et
glandes sudoripares eccrines. Le vermillon est une zone transitionnelle, tenant son

3
nom de sa couleur (rouge vermillon) entre la lèvre externe et la lèvre interne. Au
niveau du vermillon, l’épithélium est de type malpighien non kératinisé avec un
système de crêtes dermo-épidermiques très développé, chaque crête renfermant des
boucles capillaires, responsables de la couleur rouge prononcée des lèvres. A la
jonction lèvre externe – vermillon s’abouchent quelques glandes sébacées, appelées
glandes ou grains de Fordyce). Leur particularité est que leur canal excréteur s’ouvre
directement à la surface cutanée plutôt quand dans un follicule pileux. La face interne
des lèvres, plus humide, est revêtue également d’un épithélium malpighien non
kératinisé, mais dont le système de crêtes dermo-épidermiques est moins développé.
Le tissu de soutien sous-jacent contient des amas de glandes salivaires accessoires 1,
libérant leurs sécrétions essentiellement muqueuses par de courts canaux excréteurs.
Profondément se localisent des muscles striés squelettiques, orientés de manière
concentrique faisant partie des muscles orbiculaires de la bouche et permettant
l’ouverture/la fermeture des lèvres.
5.2.3 La cavité buccale proprement dite

La majorité de la muqueuse intra-buccale est recouverte d’un épithélium


malpighien non kératinisé : joue, palais, plancher de la bouche. Cependant des zones
kératinisées ne sont pas rares aux endroits de frictions répétées. De nombreuses
petites glandes salivaires se disséminent dans la sous-muqueuse : glandes jugales au
niveau de la joue, glandes palatines au niveau du palais et glandes sublinguales
accessoires au niveau du plancher.
A proximité du frein de la langue s’abouchent les canaux excréteurs des glandes
sublinguales principales et des glandes sous-maxillaires. C’est au niveau de la
muqueuse buccale jugale que s’abouchent les canaux excréteurs des glandes
parotides.
Dans certaines parties de la cavité buccale, les tissus profonds sont constitués
d’os : le voile du palais est une lamelle osseuse contre laquelle la langue peut
s’appuyer et malaxer efficacement le bol alimentaire ; les dents sont des structures
assimilées à des os et sont implantées de manière rigide dans les maxillaires inférieurs
et supérieurs. A ces endroits, des fibres de collagène de la sous-muqueuse arriment
fermement la muqueuse au périoste du tissu osseux ou au parodonte de la dent.

5.2.4 La langue

La langue est un organe musculaire très mobile présentant une face supérieure
et une face inférieure. La face inférieure est tapissée d’un épithélium malpighien non
kératinisé en continuité avec l’épithélium du plancher buccal. La face supérieure,
souvent en contact avec le voile du palais, est couverte d’un épithélium malpighien
majoritairement kératinisé muni de spécialisations (2/3 de sa surface) : des récepteurs
sensoriels.

1
Ces glandes sont souvent biopsiées pour établir le diagnostic de l'amylose, de la sarcoïdose et de
certaines maladies auto-immunes comme la maladie de Sjögren. Pratiqué sous anesthésie locale, cet
acte nécessite une incision au niveau de la lèvre inférieure afin que le chirurgien puisse procéder aux
prélèvements sur environ cinq glandes salivaires accessoires. La pose de points de suture est ensuite
réalisée pour faciliter la cicatrisation. Facile et courante, la biopsie des glandes salivaires n'engendre
que de très faibles complications qui se limitent à quelques petits hématomes sur la muqueuse labiale
inférieure.

4
La musculature est de type striée squelettique, sous le contrôle volontaire,
puisque la langue est impliquée non seulement dans la mastication mais aussi dans la
phonation. Les fibres musculaires sont orientées dans toutes les directions
(longitudinale, transversale et oblique), d’où la grande liberté de mouvements de la
langue. Il n’est pas rare de trouver des amas de tissu adipeux entre les bandes
musculaires et de nombreux îlots de glandes salivaires mineures. Les glandes
salivaires mineures déversent leurs sécrétions au fond de sillons de la face supérieure
de la langue.
La face supérieure de la langue est divisée en deux zones principales : le 1/3
postérieur et les 2/3 antérieurs, séparés par une ligne en forme de V. Cette ligne est
formée d’une série de 6 à 10 protrusions en dômes appelées papilles caliciformes (ou
vileuses ou circumvallées). Comme leur nom l’indique, quand on observe ces papilles
en coupe transversale, elles ressemblent à des calices, délimités par deux sillons et
dont les bords latéraux contiennent les bourgeons du goût. Au fond des sillons
s’ouvrent de petites glandes linguales séreuses appelées glandes de Von Ebner.
Les 2/3 antérieurs de la face supérieure sont rugueux par la présence de
nombreuses papilles filiformes et fungiformes dont l’extrémité est kératinisée. Les
papilles filiformes sont les plus nombreuses. Elles sont formées de la simple
surélévation de l’épithélium lingual par un axe conjonctivo-vasculaire ; elles sont
longues et minces et kératinisées à leur extrémité.
La couche de kératine peut être Elles sont dépourvues de bourgeons du goût. Les
épaisse par endroits, chargée et papilles fungiformes, comme leur nom
colorée par la nourriture. Les l’indique, ont une forme de champignons et sont
papilles filiformes et fungiformes
ménagent de nombreux espaces
dispersés aléatoirement entre les papilles
pouvant contenir d’abondantes filiformes2. L’épithélium des papilles
colonies bactériennes. fungiformes contient des bourgeons du goût à
leur sommet qui détectent des goûts spécifiques
selon leur localisation anatomique.
Le 1/3 postérieur est recouvert d’un épithélium malpighien non kératinisé
légèrement bombé par la présence dans la sous-muqueuse sous-jacente de tissu
lymphoïde ; il s’agit des amygdales linguales. Pour rappel, ce tissu lymphoïde, riche
en lymphocytes et en plasmocytes, fait partie du MALT et de l’anneau de Waldeyer
(O-MALT). De plus l’épithélium présente assez fréquemment des invaginations en
forme de sillons au fond desquelles s’abouchent des glandes salivaires accessoires.

Les bourgeons du goût sont des récepteurs


sensoriels localisés dans l’épithélium de la langue et L’appréciation des saveurs
les plus subtiles fait appel à
des papilles (excepté les filiformes). La fonction de la combinaison du signal
ces bourgeons est de détecter les 5 goûts de base : le olfactif (au niveau de la
sucré, le salé, l’amer, l’acide et l’umami3. Chaque muqueuse olfactive) avec le
bourgeon occupe la hauteur de l’épithélium et est signal gustatif (au niveau des
formé d’un groupement de 50 à 150 cellules bourgeons du goût).
fusiformes. La surface luminale des cellules s’ouvre
dans l’épithélium par le pore gustatif au niveau duquel
on trouve de microvillosités. On dénombre 3 types cellulaires :
- les cellules souches du bourgeon, localisées du côté basal
2
On peut citer un 4e type de papille, les papilles foliaires, peu développées chez l’homme, bien
développées chez le singe, le cheval et le lapin.
3
Le goût umami ou savoureux, est le 5e goût et a été décrit pour la première fois par un chimiste
japonais. L’umami représente le goût donné par le glutamate de sodium et les nucléotides.

5
- les cellules de soutien, sécrétant des GAG au niveau du pore gustatif
- les cellules sensorielles munies de microvillosités et contenant au pôle basal
de leur cytoplasme des vésicules synaptiques. Ces cellules sont associées du
côté basal à des fibres nerveuses afférentes véhiculant l’information le long
du nerf facial ou glosso-pharyngé. La membrane plasmique des cellules
sensorielles contient des canaux ioniques réagissant aux goûts salé ou acide4
et des récepteurs transmembranaires couplés aux protéines G pour les goûts
sucré et amer.

5.2.5 Les glandes salivaires


5.2.5.1 Morphologie générale

Les glandes salivaires sont toutes sans exception des glandes exocrines
annexées à la cavité buccale. Les glandes salivaires principales sont les glandes
parotides, sous-maxillaires et sublinguales, disposées de manière bilatérale.
Les trois glandes salivaires principales sont localisées « à distance » de la cavité
buccale et s’abouchent à celle-ci au moyen de longs canaux excréteurs. Pour rappel,
de nombreuses glandes salivaires accessoires sont disséminées dans la sous-muqueuse
de la cavité buccale et déversent leurs sécrétions par de courts canaux. Les glandes
sous-maxillaires aussi appelées glandes submandibulaires ou sous-mandibulaires
déversent la salive à la base du frein de la langue par l'intermédiaire du canal de
Wharton. Les glandes sublinguales déversent la salive par l'intermédiaire des canaux
de Walther et de Rivinius. Les glandes parotides, les plus volumineuses, sont situées
au-dessous et en avant des oreilles. Chaque parotide déverse la salive au niveau de la
joue interne par le canal de Sténon.

D’un point de vue morphologique, les glandes salivaires principales sont toutes

Pour rappel, les glandes exocrines peuvent être classées selon :


- la morphologie de leur canal excréteur : « simple » ou « ramifié »
- la morphologie de leur unité fonctionnelle sécrétoire : « tubuleuse » ou « acinaire »
- leur produit de sécrétion : « séreux » (riche en eau, électrolytes), « muqueux » (riche
en glycoprotéines), ou mixte
- leur mécanisme de sécrétion : « mérocrine », « holocrine » ou « apocrine ».

des glandes tubulo-acineuses. Elles diffèrent l’une de l’autre par leur produit de
sécrétion et par quelques aspects histologiques.
Les glandes salivaires principales sont enfermées dans une capsule conjonctivo-
fibreuse et se divisent en lobules. Les vaisseaux sanguins et les nerfs pénètrent dans la
glande par le hile et se ramifient dans les lobules. L'unité sécrétrice du parenchyme
lobulaire est l'adénomère ou « salivon ». Il est constitué de cellules épithéliales
sécrétrices formant l’acinus salivaire, dont la lumière, virtuelle, se prolonge par un
canal intercalaire. Le canal intercalaire est bordé de cellules épithéliales de forme
pavimenteuse ou cubique. Les canaux intercalaires de plusieurs acini se réunissent
4
Les saveurs acides et salées sont le fait d’ions H + et Na+, respectivement. Ces ions interagissent avec
les canaux ioniques à la surface des cellules gustatives. Cette interaction va induire une modification
directe du potentiel électrique de la cellule gustative et générer un influx nerveux transmis au cerveau.

6
pour former le canal strié ou canal de Pflüger. Le canal strié est bordé de cellules
épithéliales de forme cubo-cylindrique et a la particularité (d’où son nom de « strié »)
d’héberger de nombreuses mitochondries dans les replis membranaires du pôle basal
des cellules épithéliales. Les cellules épithéliales canalaires sont unies les unes aux
autres au moyen de jonctions serrées très imperméables car impliquées dans la
réabsorption d’ions. Le canal strié repose sur une membrane basale et une discrète
couche de tissu conjonctif le séparant dues acini salivaires. Ce canal strié correspond à
un canal intralobulaire de par sa position anatomique. Chaque canal strié se déverse
dans un canal interlobulaire qui circule dans des cloisons conjonctives interlobulaires
plus épaisses. In fine, chaque canal interlobulaire abouche au canal excréteur principal
de la glande salivaire qui lui-même débouche dans la cavité buccale (Warthon, Sténon
ou Walther et Rivinus). Les canaux interlobulaires et excréteurs sont très souvent
stratifiés (pseudo- ou bi-stratifés). Séparant les cellules épithéliales acinaires de la
membrane basale, des cellules myo-épithéliales jouent un rôle dans l'expulsion des
produits de sécrétion contenu dans la lumière acinaire. En effet ces cellules
myoépithéliales sont similaires aux cellules musculaires lisses et possèdent des
propriétés contractiles. Les cellules myoépithéliales et l’acinus sont entourés d’une
lame basale unique.

On classe les glandes salivaires selon le produit de sécrétion des cellules


épithéliales acinaires qu'elles renferment :
- parotides : presque exclusivement des cellules séreuses;
- sous-maxillaires : mixte, avec prédominance de cellules séreuses;
- sublinguale : mixte, avec prédominance de cellules muqueuses;

Les cellules séreuses élaborent une salive riche en eau et en protéines mais
dépourvue de mucine. Les cellules ont une forme pyramidale et se dispose en « parts
de tarte », dont le centre est occupé par une lumière quasi-virtuelle. Le cytoplasme des
cellules épithéliales séreuses est riche en grains de sécrétion qui s’accumulent dans le
pôle apical où ils seront libérés par exocytose. Le noyau des cellules séreuses est
basal, de forme arrondie.
Les cellules muqueuses élaborent une salive visqueuse riche en mucines. Les
cellules ont globalement aussi une forme pyramidale mais de bien plus grande taille
que leur contrepartie séreuse. Leur cytoplasme contient d’abondants grains de
sécrétion présentant l'apparence de gouttelettes chromophobes. Le noyau des cellules
muqueuses est basal, de forme anguleuse car repoussé par l’accumulation et le
volume des grains de sécrétion.

5.2.5.2 La salive primaire et définitive

La salive est un liquide biologique complexe élaborée par l’assemblage des


sécrétions en provenance des différentes glandes salivaires : 20 % d'origine
parotidienne, 65 % d’origine sous-maxillaire à l’état de base 5 (la production des
autres glandes étant négligeable). Un être humain en produit de 0.5 à 1 L
quotidiennement. La salive n'est pas un simple ultrafiltrat du plasma : la salive
définitive est une solution aqueuse hypotonique (99 % d’eau) contenant électrolytes
5
En cas de stimulation ex : mastication, ce sont les glandes parotides qui contribuent le plus au volume
salivaire.

7
(Na+, K+, Cl-, HCO3-), urée, glucose, amylase, lipase, lactoferrine, IgA, lysozyme,
sialoperoxydase. Elle contient aussi des facteurs de croissance agissant de manière
paracrine ex : EGF (epidermal growth factor) et NGF (nerve growth factor).
On lui connaît trois fonctions principales6 :
- la lubrification de la muqueuse buccale facilitant la phonation et la déglutition ;
- la pré-digestion des aliments, sous l’action de l’amylase, clivant l’amidon
(hydrates de carbone), et de la lipase salivaire entamant l’hydrolyse des lipides
alimentaires ;
- un rôle bactériostatique, par la sécrétion d’IgA
neutralisantes7, de lysozyme, de lactoferrine
L’histatine inhibe la
(chélateur de fer), des cystatines, de l’histatine ou croissance de Candida
de sialoperoxydase, cette dernière permettant la albicans, une levure
production de radicaux libres. commensale saprophyte de
la bouche retrouvée chez
La production de salive est sous le contrôle du 80% de la population. Un
dysfonctionnement de la
système nerveux autonome. Une stimulation production de salive par les
orthosympathique favorise la production d’une salive glandes salivaires peut
riche en glycoprotéines tandis qu’une stimulation provoquer des caries, des
parasympathique stimule une salive riche en eau. La infections opportunistes à
salive primaire, c-à-d celle produite au niveau de levures et des inflammations
de la cavité buccale.
l’acinus, est iso-osmotique, elle ne subira aucun
changement dans le canal intercalaire. Par contre, au
niveau du canal strié, elle subira un remaniement ; les ions Na+ et Cl- sont activement
réabsorbés par transport actif (via Na+/K+ ATPase) au niveau des cellules épithéliales
canalaires « striées », des ions HCO3- y seront sécrétés, pour au final générer une
salive définitive hypotonique (<100 mOsm).

5.2.5.3 Particularités des glandes salivaires

Les glandes parotides possèdent un réseau de canaux intercalaires assez longs,


et donc facilement identifiables en microcopie optique, tandis que les glandes
sublinguales ont les canaux intercalaires les moins bien développés.
Les glandes sublinguales ne possèdent pas de capsule à proprement parlé mais
plutôt des septa de tissu conjonctif divisant le parenchyme en lobes.
Assez facilement repérables en microscopie, les glandes sous-maxillaires
possèdent des acini mixtes séro-muqueux. Au sein de ces unités mixtes, les cellules
séreuses forment une demi-lune qui coiffe les cellules muqueuses : les croissants de
Gianuzzi. Les sécrétions des cellules séreuses sont véhiculées vers la lumière au
moyen de petits canalicules intercellulaires passant entre les cellules muqueuses.

6
On soupçonne également d’autres rôles comme par exemple le contrôle du biofilm buccal (plaque
bactérienne dentaire).
7
Les IgA proviennent de plasmocytes localisés dans le tissu conjonctif entourant les acini. Comme
dans le GALT, la cellule épithéliale acinaire fixe au pôle basal l’IgA via sa pièce sécrétoire (récepteur
poly-Ig) et par un mécanisme de transcytose elle libère l’IgA dans la lumière de l’acinus. La pièce
sécrétoire permet une certaine résistance face à la protéolyse digestive.

8
5.2.6 Les dents
5.2.6.1 Anatomie générale d’une dent adulte

La dentition définitive8 de l’Homme comprend 16 dents supérieures et 16 dents


inférieures, soit 32 dents au total, chacune incluse dans l’os maxillaire respectif. Les
dents sont des structures fermement ancrées aux maxillaires, extrêmement
minéralisées ce qui leur confère leur dureté et leur rôle de fragmentation des aliments.
Il existe plusieurs types de dents classées selon leur forme et leur fonction associée :
les incisives, fines, coupent les aliments ; les canines, pointues, perforent et retiennent
les aliments ; les prémolaires et molaires, tels des broyeurs à surface large, écrasent
les aliments.
Une coupe longitudinale passant par le centre de la dent permet d’identifier la
partie visible de la dent : la couronne, de la partie invisible ancrée : la racine9. La
zone de jonction entre la couronne et la racine est appelée le collet.
La couronne est la partie « émergée » de la dent, recouverte de couches
fortement calcifiées d’email et de dentine10. La racine constituée
L’email est le essentiellement de dentine s’ancre sur l’os maxillaire au moyen
tissu le plus du cément (qui supplante l’email au niveau de la racine) et du
dur du corps ligament alvéolo-dentaire. Au sein de la racine, la dentine
humain, suivi ménage en son centre un espace : la chambre pulpaire. La
de la dentine. chambre pulpaire contient un tissu conjonctif lâche, le tissu
pulpaire, dans lequel circulent vaisseaux sanguins et
terminaisons nerveuses. Ces structures vasculaires et nerveuses
cheminement depuis le canal radiculaire et s’ouvrent à la pointe de la racine au niveau
du foramen apical sur l’os maxillaire. Les vaisseaux sanguins apportent l’oxygène et
les nutriments nécessaires aux tissus mous de la dent, ce sont des tissus vivants !,
notamment aux odontoblastes pulpaires synthétisant la dentine11. Des terminaisons
nerveuses sont responsables de la sensibilité de la dent (cf douleurs lors de caries
dentaires).
L'émail est la partie externe de la couronne dentaire et celle directement visible
par le dentiste. Cette substance, qui recouvre la dentine sous-jacente, est la plus dure
et la plus minéralisée de l'organisme. L’émail d’une dent adulte ne peut se régénérer
car les cellules l’ayant synthétisé pendant son développement, c-à-d les améloblastes,
ont disparu lors de l’éruption dentaire.

La haute minéralisation de l'émail (cristaux d’hydroxyapatites) le rend susceptible aux


processus de déminéralisation qui survient pendant les épisodes de carie dentaire. La cause
principale des caries est l'ingestion de sucres, utilisés par les bactéries commensales buccales.
Quand le saccharose, le plus commun des sucres, couvre la surface de la dent, les bactéries
buccales vont le métaboliser et générer de l'acide lactique diminuant ainsi le pH buccal. Les
cristaux d'hydroxyapatite de l'émail sont alors déminéralisés, permettant une invasion
bactérienne plus importante et plus en profondeur dans la dent. La bactérie la plus impliquée
dans la carie dentaire est Streptococcus mutans.
8
La dentition définitive est précédée par les dents lactéales (20 dents de lait) provisoires apparaissant
vers l’âge de 6 mois et tombant vers 8-10 ans.
9
Les (pré)molaires possèdent plusieurs racines.
10
La dentine est aussi appelée ivoire.
11
Tout au long de la vie, les odontoblastes continuent à synthétiser de la dentine, réduisant
progressivement le volume de la chambre pulpaire.

9
5.2.6.2 Développement de la dent : odontogénèse et amélogénèse

Pendant le développement embryologique, des cellules issues de l’ectoderme,


de la crête neurale (neuro-ectoderme) et du mésenchyme interagissent pour former la
future dent :
- les odontoblastes dérivent de la crête neurale ; ils synthétiseront la dentine
- les améloblastes12 dérivent de l’ectoderme ; ils synthétiseront l’email
- les cémentocytes dérivent du mésenchyme ; ils synthétiseront le cément

La dent se développe à partir du dialogue moléculaire qui s’établit entre


l’ectoderme et le mésenchyme primitif : le développement dentaire est contrôlé par
des interactions épithélio-mésenchymateuses. Les deux constituants de l’organe
dentaire (email/dentine) n’évoluent pas de façon autonome mais de façon
intégrée par échange d’informations. Important à retenir, il susbiste(ra)
continuellement une lame basale entre le tissu d’origine épithélial et le tissu d’origine
mésenchymateux (donc l’email et la dentine seront séparés par une lame basale).
Au sein du mésenchyme primitif, les molécules de signalisation activine A,
FGF (fibroblast growth factor) et le BMP-4 (bone morphogenic protein-4) sécrétées
par des cellules mésenchymateuses sous-jacentes, vont provoquer le bourgeonnement
de l’épithélium ectodermique de la mandibule13, pour former un « germe dentaire
épithélial ». Il se forme au total 20 germes, un pour chaque dent provisoire (Panneau
A). Petit à petit, les cellules épithéliales prolifèrent et s’invaginent de plus en plus
profondément dans le mésenchyme et adopte la forme d’une cupule. Le bourgeon
reste attaché à l’épithélium ectodermique au moyen de la lame dentaire (Panneau B).
Au sein du mésenchyme, des cellules neuro-ectodermiques vont migrer et se
condenser sous le bourgeon dentaire épithélial. Ces cellules neuro-ectodermiques
sécrètent du BMP-2, BMP-4 et BMP-7 qui rend le bourgeon d’une forme
particulière : en forme de cloche (Panneau C). Le centre de la cloche est occupé par
des cellules épithéliales étoilées peu denses (« la gelée de l’émail ») tandis que les
bords sont occupés par un épithélium cubique monostratifié appelé épithélium
dentaire. L’épithélium dentaire du bord supérieur de la cloche correspond à
l’épithélium adamatin externe tandis que le bord intérieur de la cloche est occupé par
l’épithélium adamatin interne. Les cellules épithéliales réticulaires étoilées et
l’épithélium adamantin forment ensemble l’organe de l’email.
Dans la concavité de la cloche, des cellules d’origine neuro-ectodermique (les
futurs odontoblastes) viennent au contact des cellules de l’épithélium adamatin
interne, desquelles elles restent séparées par une lame basale. Ces cellules neuro-
ectodermiques s’arrangent en palissades face à l’épithélium adamantin interne et se
différencient en préodontoblastes. Les préodontoblastes deviennent cylindriques et se
disposent en palissade formant l'épithélium odontoblastique. En miroir, les cellules de
l'épithélium adamantin interne deviennent des cellules cylindriques en palissade et se
différencient en préaméloblastes. Cette disposition particulière en miroir des
préodontoblastes et des préaméloblastes est appelée « murs épithéliaux » (panneau
D).
La zone mésenchymateuse située en dessous de la couche de préodontoblastes
est appelée papille dentaire. Elle se fait progressivement englobée par invagination
12
Améloblaste est synonyme d’adamantoblaste.
13
On peut mettre ce processus de bourgeonnement en parallèle avec la génèse du poil, où les cellules
mésenchymateuses sous-jacentes induisent le bourgeonnement des cellules épithéliales sus-jacentes
sous l’effet des BMP.

10
des bords libres de la cloche. Cette zone deviendra plus tard la pulpe dentaire après
envahissement par un réseau de vaisseaux sanguins et des terminaisons nerveuses.
Une fois que les deux mono-couches (préodontoblastes et préaméloblastes)
superposées sont en contact, chaque type cellulaire va mutuellement induire la
différenciation de l’autre type cellulaire. Les préodontoblastes deviennent
odontoblastes et les préaméloblastes deviennent améloblastes. A ce moment-là,
chaque cellule commence à synthétiser sa matrice extracellulaire propre et à
s’éloigner l’une de l’autre: l’email est déposé par les améloblastes, la prédentine par
les odontoblastes (Panneau E). Les odontoblastes commencent à produire de la
prédentine (« odontogénèse »), qui elle-même stimule les améloblastes à produire de
l’email (« amélogénèse »). C’est ainsi que l’email et la dentine sont apposés l’un à
l’autre dans une dent définitive et sont séparés par une lame basale.
Au moment de l’éruption de la dent hors du mésenchyme, la couche externe
d’améloblastes meurt par apoptose et disparaît. Seule la matrice extracellulaire
sécrétée par l’améloblaste, l’émail, subsistera (Panneau F).
Annexé à la dent de lait en développement se trouve le bourgeon de la dent
définitive (Panneaux C-F).
La jonction amélodentinaire correspond à la jonction entre dentine et email. On
y trouve une lame basale et des fibres de collagène de type I insérées directement dans
l’email et dans la dentine (Lin et al., J Histochem Cytochem, 1993). Ces fibres font
l’union entre les deux matrices extracellulaires hétérogènes et les rend solidaires l’une
de l’autre.

Développement de la dent. LD, lame dentaire ; OE, organe de l’émail ; EOD, épithélium
odontoblastique ; EAD, épithélium adamantin.

Les odontoblastes sont des cellules épithéliales sécrétoires qui synthétisent et


déposent dans le milieu extracellulaire la dentine. Cette production de dentine se fait
tout au long de la vie au sein de la chambre pulpaire de la dent définitive, ce qui en

11
réduit le volume. C’est une cellule cylindrique émettant un prolongement
cytoplasmique apical soutenu par un réseau de microtubules intracellulaire, du côté de
la couche de dentine. Tout au long de sa vie, l’odontoblaste reste en contact étroit
avec la matrice qu’il synthétise, donc avec la dentine. Tous les prolongements
cytoplasmiques apicaux odontoblastiques mis bout à bout sont à l’origine de l’aspect
morphologique particulier de la dentine et à l’origine des tubules de la dentine14. Ces
tubules sont formés suite au dépôt péri-tubulaire de dentine au fur et à mesure que
l’odontoblaste s’éloigne du front de migration. Ces tubules intradentinaires sont
appelés canalicules ou fibres de Tomes. Chez l’Homme, les prolongements
cytoplasmiques s’étendent sur 25 à 30% de la longueur des tubules, ailleurs ils sont
vides formant des tunnels en communication avec la couche d’émail sous-jacente. Les
odontoblastes interagissent les uns avec les autres au moyen de complexes
jonctionnels. Dans la région apicale de l’odontoblaste, on retrouve un réticulum
endoplasmique rugueux et un appareil de Golgi très développés (synthèse et export de
protéines) ainsi que des granules sécrétoires. Ces granules sont aussi appelées
vésicules matricielles et contiennent des protéines de matrice, du procollagène, des
ions calcium et phosphate. Les odontoblastes synthétisent d’abord la prédentine, qui
se minéralise au fur et à mesure pour former la dentine.

La synthèse de dentine par les odontoblastes induit l’amélogénèse par les améloblastes. Ces deux
cellules vont respectivement s’éloigner l’une de l’autre en suivant des sens de migration opposés. En
s’éloignant elles déposent des vésicules matricielles contenant de la prédentine pour les odontoblastes,
de l’email pour les améloblastes. En s’éloignant aussi, elles laissent « trainer » derrière elles leurs
prolongements cytoplasmiques apicaux générant cet aspect strié dans la dentine : les tubules
intradentinaires ; et dans l’email : les prismes de l’email. A, améloblastes ; PD, prédentine ; OD,
odontoblastes ; DP, pulpe dentaire.

La prédentine est une matrice organique non minéralisée composée de fibres de


collagène type I déposés de manière linéaire et de glycosaminoglycans 15. La
prédentine va progressivement se minéraliser sous l’effet de la précipitation d’ions
14
Ces tubules sont à l’origine de l’hypersensibilité dentaire. Il n’est pas rare d’y rencontrer des
terminaisons nerveuses amyéliniques baignant dans un liquide au sein des tubules intradentinaires. Ces
fibres sont stimulées par des mouvements de fluide dans les tubules, sous l'effet de stimuli thermiques,
tactiles, osmotiques ou chimiques.

12
Les fibres de collagène de type I sont d’abord déposées sous la forme de
procollagène (contenu dans les vésicules matricielles). Le procollagène est clivé
calcium et phosphates autour des vésicules matricielles sécrétées, pour former
ultimement la dentine. La dentine est donc en plus composée d’une matrice
inorganique de sels minéraux d’hydroxyapatites et de fluoroapatites. Dans la dentine,
la portion organique représente 20 à 30% et la portion minéralisée jusqu’à 80%. Un
front de minéralisation, comme dans l’ostéoïde, sépare la prédentine de la dentine.

Synthèse de la dentine par les odontoblastes et migration en sens opposé.

Les améloblastes sont des cellules épithéliales sécrétoires qui synthétisent et


déposent dans le milieu extracellulaire l’émail. Remarque importante, cette population
cellulaire n’est observée que pendant le développement de la dent ; après l’éruption de
la dent, les améloblastes dégénèrent et il est impossible de remplacer l’émail.
L’améloblaste est une cellule cylindrique émettant un prolongement cytoplasmique
apical16 soutenu par un réseau de microtubules, en contact avec l’émail sous-jacent.
Les améloblastes interagissent les uns avec les autres au moyen de complexes
jonctionnels. Dans la région apicale de l’améloblaste, on
retrouve un réticulum endoplasmique rugueux et un
La périphérie de la
appareil de Golgi très développés (synthèse et export
dent est faite d’émail
de protéines) ainsi que des granules sécrétoires. Ces
au niveau de la
granules sont aussi appelées vésicules matricielles et
couronne et de cément
contiennent des protéines de matrice dont
au niveau de la racine.
l’amélogénine et l’énaméline.
15
Les odontoblastes produisent de nombreuses autres protéines matricielles dites non-collagéniques,
les plus abondantes étant celles de la famille des SIBLINGs qui sont au nombre de cinq : la
sialophosphoprotéine dentinaire, la phosphoprotéine matricielle dentinaire, la sialoprotéine osseuse,
l’ostéopontine et la phosphoglycoprotéine extracellulaire matricielle.
16
Dans certains livres de référence, les prolongements cytoplasmiques apicaux des améloblastes sont
aussi appelés fibres de Tomes.

13
L’émail est une substance quasi entièrement minéralisée par des cristaux
d’hydroxyapatites (Ca10(PO4)6(OH)2 et déposée sous forme de bâtonnets serrés de
section hexagonale, appelés prismes de l’email. L’émail contient ainsi près de 99 %
de sels de calcium et moins de 1 % de matrice organique. Les prismes, très allongés,
s’étendent depuis la jonction émail-dentine jusqu’à la surface de la couronne de la
dent ; ils consistent en groupes de longs et fins cristaux d’hydroxyapatite disposés
parallèlement dans le sens de la longueur ; leur diamètre est de l’ordre de 4 à 8 m.
Les cristaux de l’émail interprismatique sont orientés différemment. La matrice
organique (1%) est de la matrice sécrétée par les améloblastes avant la minéralisation
de l’émail ; elle est faite d’amélogénine, qui disparaît pendant la formation de l’émail,
d’énaméline et de polysaccharides.

Synthèse de l’émail par les améloblastes et migration en sens opposé.

Le cément est un tissu minéralisé semblable à l’os tapissant la dentine au niveau de la


racine. Comme l’os, il est majoritairement constitué de fibres de collagène de type I
calcifiées entre lesquelles des cellules se sont faites piégées à l’intérieur de lacunes :
les cémentocytes. Comme les ostéocytes, les cémentocytes communiquent l’un avec
l’autre au moyen de jonctions communicantes. Toutefois, à l’inverse de l’os, le
cément est avasculaire. Une couche de cémentoblastes, analogues aux ostéoblastes,
est située à la face externe du cément, adjacente au ligament alvéolo-dentaire, et
continue d’élaborer du cément pendant toute la vie de la dent. Dans la partie
supérieure de la racine, on trouve peu de cémentocytes et cémentoblastes, c’est le
cément acellulaire. Dans la partie inférieure de la racine, les cémentocytes et
cémentoblastes sont plus nombreux, c’est le cément cellulaire.

5.2.6.3 Le parodonte

14
La parodonte ou périodonte est l’espace conjonctif qui amarre la racine de la
dent à l’os de l’alvéole et nourrit les tissus avoisinants. Il est fait de tissu conjonctif
lâche vascularisé et innervé, parcouru par de nombreux trousseaux de tissu fibreux
dense correspondant au ligament alvéolo-dentaire (ou ligament périodontique). Le
ligament alvéolo-dentaire est un ligament suspenseur fait de fibrocytes et fibres de
collagène type I denses ancrant la dent au tissu conjonctif du parodonte. L’ancrage
dans la dent est assuré par des fibres de collagène insérées littéralement dans le
cément de la racine, appelées fibres de Sharpey. Ces fibres sont responsables d’un
attachement solide au tissu parodontal et à l’os mais autorise aussi une certaine
mobilité de la dent dans son alvéole.

Les gencives sont tapissées d’un épithélium malpighien en continuité avec la


muqueuse alvéolaire recouvrant l’os maxillaire. La majorité de la surface gingivale
possède un épithélium malpighien kératinisé de manière incomplète
(parakératinisation) dont l’ancrage se réalise au moyen de hautes crêtes dermo-
épidermiques. Au niveau du collet de la dent, il existe un petit sillon, le sillon
gingival, recouvert lui d’épithélium malpighien mince non kératinisé.

Le sillon gingival est souvent le lieu d’une accumulation d’aliments et d’une prolifération
bactérienne, provoquant une inflammation locale. Cette inflammation peut s’étendre à la gencive,
pathologie appelée gingivite, ou au ligament alvéolo-dentaire provoquant la pathologie
appelée parodontite. Une parodontite chronique entraîne la destruction du ligament et la dent
devient branlante dans son alvéole.

15
5.3 Organisation générale des voies de passage et du tube digestif

5.3.1 Muqueuse, sous-muqueuse, musculeuse et adventice

Les voies de passage sont des endroits où aucune modification n’est apportée au
bolus alimentaire, tandis que le tube digestif est le lieu même de la digestion, de
l’absorption des aliments/des liquides ingérés et de l’absorption des liquides sécrétés.
Ce tube comprend l’estomac, l’intestin grêle, divisé successivement en duodénum,
jéjunum, iléon, et finalement le gros intestin lui aussi divisé en caecum, appendice,
côlon et rectum.
Tant les voies de passage que le tube digestif peuvent être schématisées comme
un conduit dont la paroi présente une organisation générale semblable en 4 couches
concentriques :
- la muqueuse, directement en contact avec le bolus alimentaire
- la sous-muqueuse
- la musculeuse
- l’adventice ou séreuse

La muqueuse comprend l’épithélium de revêtement, le chorion sous-jacent et une


couche de musculaire muqueuse17. La muqueuse est celle qui varie le plus de part
son allure ou de part les cellules épithéliales qui la compose. Au niveau des voies de
passage, cet épithélium est de type malpighien alors qu’au niveau du tube digestif à
proprement parlé, il est de type cylindrique monostratifié contenant des proportions
variables de cellules sécrétrices ou absorbantes. Le chorion18 est un tissu conjonctif
lâche dans lequel circulent vaisseaux sanguins et lymphatiques, structures nerveuses
et cellules immunitaires: macrophages, lymphocytes et plasmocytes (DALT). Ces
cellules immunitaires se regroupent parfois en amas lymphoïdes plus importants (cf
Système Immunitaire et GALT) surtout au niveau de l’intestin grêle (les plaques de
Peyer) ; en effet le tube digestif est une interface importante entre le milieu extérieur
et le milieu interne et souvent le siège de réactions immunitaires. Le chorion est
synthétisé par des fibroblastes résidents sécrétant fibres de collagène de type I, IV et
en substance fondamentale. Au delà du chorion, se trouve une fine couche de muscle
lisse appelée musculaire muqueuse, dont la morphologie varie aussi en fonction de la
région anatomique digestive.

Dans les régions digestives dédiées à la sécrétion ou à


l’absorption, en d’autres termes dans les zones Les glandes muqueuses ou
d’échange, la surface du tube digestif est accrue par la sous-muqueuses
présence d’invaginations ou d’évaginations. augmentent la capacité
L’épithélium de revêtement très souvent s’invagine sécrétoire du tube digestif
pour former des glandes qui s’étendent jusque dans la tandis que les évaginations
ou replis de la surface
muqueuse (glandes de la muqueuse) ou jusque dans la digestive augmentant la
sous-muqueuse (glandes de la sous-muqueuse). Au capacité d’absorption du
niveau du duodénum en particulier, des canaux tube digestif.

17
La musculaire muqueuse est appelée muscularis mucosae en latin.
18
Vous trouverez aussi la dénomination lamina propria pour désigner tout tissu conjonctif lâche situé
sous les épithéliums et qui tapisse notamment les muqueuses digestives, respiratoires ou urogénitales.

16
s’abouchent dans la lumière intestinale. Ceux-ci véhiculent les sécrétions en
provenance du foie, de la vésicule biliaire ou du pancréas.
Gardons à l’esprit qu’un des principaux rôles du tube digestif est d’absorber les
nutriments se trouvant dans le bol alimentaire. Il est dès lors intéressant pour lui de
maximiser la surface d’échange entre lumière digestive et compartiment interne, et
donc maximiser la surface d’absorption. Au niveau de l’intestin grêle, lieu
d’absorption par excellence, nous verrons que la muqueuse, voire la sous-muqueuse,
projette vers la lumière en formant des replis caractéristiques appelés villosités
intestinales.

La sous-muqueuse contient des vaisseaux sanguins de gros calibre, des vaisseaux


lymphatiques, des nerfs et des plexus nerveux spécialisés connectés au SNA. C’est un
tissu conjonctif synthétisé par des fibroblastes sécrétant collagène et substance
fondamentale. On y retrouve aussi des cellules immunitaires en transit et des amas
lymphoïdes plus importants comme les plaques de Peyer (celles-ci sont parfois
tellement volumineuses qu’elles se trouvent à cheval sur la muqueuse et la sous-
muqueuse).

La musculeuse est disposée en feuillets distincts, généralement deux, orientés en


directions différentes. Cete musculeuse est faite de cellules musculaires lisses,
innervées par le SNA et des plexus nerveux, la couche interne de cellules se dispose
en couche « circulaire » spiralée très serrée alors que la couche externe se dispose en
couche « longitudinale », également spiralée mais très peu serrée.
La fonction de la musculeuse est d’assurer le péristaltisme (du grec, peri, autour et
staltis, contraction), c-à-d la progression du bol alimentaire le long du tube digestif
par contraction séquentielle musculaire. Ce péristaltisme est finement synchronisé,
puisqu’une vague de contraction se déplace d’amont en aval en « poussant » le
contenu de la lumière digestive vers le compartiment anatomique aval relâché.
Attention au niveau de l’œsophage supérieur ou du canal anal (voies de passage), du
muscle strié squelettique se mêle au muscle lisse.
Localement, cette musculeuse peut s’épaissir pour former des sphincters. Ces
sphincters, en se contractant, agissent comme des valves régulant le passage d’un
compartiment à l’autre. Exemples : le sphincter pylorique situé à la jonction
gastroduodénale régule la vidange de l’estomac ; le sphincter oesogastrique empêche
le reflux du contenu gastrique vers l’œsophage.

L’adventice est la couche extérieure du tube digestif. Elle est constituée d’un tissu
conjonctif lâche synthétisé par des fibroblastes. Il n’est pas rare d’y trouver des
adipocytes. Elle contient les nerfs innervant et les vaisseaux sanguins vascularisant
l’ensemble du tube digestif. Une partie du tube digestif est dite rétropéritonéale mais
l’essentiel est péritonéal. Dans cette partie péritonéale, l’adventice est recouverte par
une couche externe de cellules mésothéliales (épithélium pavimenteux simple)
appelée péritoine viscéral. Via une membrane conjonctive tapissée de mésothélium
appelée mésentère, le tube digestif péritonéal est rattaché au péritoine pariétal au
niveau de la paroi abdominale postérieure. Le péritoine viscéral et le péritoine pariétal
sont en continuité grâce au mésentère et tous les deux recouverts de cellules
mésothéliales. L’adventice recouverte de mésothélium (ex : estomac, majorité de
l’intestin grêle et du côlon) est communément appelé séreuse.

17
5.3.2 Vascularisation générale du tube digestif

Les vaisseaux sanguins et lymphatiques de la paroi digestive parviennent à


l’adventice en circulant dans le mésentère. Les artères se ramifient en 3 réseaux
vasculaires au sein de la paroi : (1) le plexus sous-séreux, (2) le plexus
intramusculaire et (3) le plexus de la sous-muqueuse. Les artérioles du plexus sous-
muqueux alimentent un lit de capillaires fenestrés, partant perpendiculairement et
disposés entre les invaginations ou les évaginations de la muqueuse digestive. Ces
capillaires sont souvent anastomosés. Des veinules collectrices partent de la
muqueuse vers la sous-muqueuse, deviennent veines qui quittent le tube digestif en
circulant dans le mésentère. Les veines mésentériques se rassemblent en veine porte
menant au foie (cf système porte hépatique).

5.3.3 Innervation générale du tube digestif

Le tube digestif est innervé par le SNA. Il comprend une composante


intrinsèque et une composante extrinsèque. La composante intrinsèque est un
ensemble de nerfs et plexus ganglionnaires interconnectés localisés soit dans la sous-
muqueuse et appelés plexus de Meissner soit entre les couches de la musculeuse et
appelés plexus d’Auerbach. Ces plexus regroupent des neurones moteurs et
sensoriels reliés par des interneurones. Les plexus d’Auerbach et de Meissner
reçoivent une innervation également extérieure « extrinsèque » en provenance
d’axones préganglionnaires du système parasympathique et d’axones post-
ganglionnaires du système sympathique. En intégrant les signaux de l’innervation
intrinsèque et de l’innervation extrinsèque, le tube digestif est à même de réguler les
contractions péristaltiques de la musculeuse, les mouvements de la musculaire
muqueuse et les fonctions sécrétoires des glandes muqueuses ou sous-muqueuses.
Par exemple, une stimulation du système parasympathique cholinergique
provoque l’augmentation du péristaltisme et de l’activité sécrétoire. Une stimulation
du système sympathique adrénergique provoque une diminution du péristaltisme.
C’est grâce à cette innervation que de nombreuses informations motrice ou
sensitives sont véhiculées : douleurs, sentiments de satiété, plénitude du rectum.

18
5.4 L’œsophage

5.4.1 Fonction et notions anatomiques

L’œsophage est typiquement une voie de passage qui s’étend du pharynx à


l’estomac. Il véhicule la pâte alimentaire fragmentée en provenance de la cavité
buccale vers l’estomac où la vraie digestion sera entamée. L’œsophage est un tube
musculaire de 25 cm de longueur chez l’humain 19, la plupart du temps collabé par la
tension de sa paroi musculaire et sa richesse en fibres élastiques. Anatomiquement, il
se situe postérieurement à la trachée, descend dans le thorax et traverse le diaphragme
respiratoire pour pénètrer l’estomac.

5.4.2 Structure
5.4.2.1 Muqueuse

La muqueuse est tapissée d’un épithélium malpighien non kératinisé chez l’être
humain en temps normal20. La région basale de l’épithélium comporte ci et là des
cellules épithéliales très riches en glycogène, apparaissant claire en microscopie. Le
chorion sous-jacent contient des fibroblastes synthétisant des fibres de collagène et
une matrice acellulaire de GAG, on y trouve aussi des cellules immunitaires telles
éosinophiles, mastocytes, lymphocytes et plasmocytes. La musculaire muqueuse est
d’épaisseur variable le long de l’œsophage mais plus épaisse et mieux organisée près
de la jonction oesogastrique.
Il existe des glandes muqueuses de type tubulo-acineuses dans le 1/3 inférieur
de l’œsophage. Ces glandes exocrines ont pour fonction de produire un mucus
lubrifiant la surface de l’épithélium et facilitant la déglutition.

5.4.2.2 La sous-muqueuse

La sous-muqueuse est un tissu conjonctif riche en fibres de collagène et fibres


élastiques contenant larges vaisseaux sanguins, plexus nerveux, cellules immunitaires
et glandes sous-muqueuses.
La richesse en fibres élastiques de la sous-muqueuse est responsable de la
formation de plis longitudinaux qui donnent à la lumière de l’œsophage un aspect
étoilé. Lors du passage du bol alimentaire, les fibres élastiques se distendent et la
lumière s’arrondit, faisant disparaître ces plis. Après le passage du bol alimentaire, les
fibres élastiques se remettent en tension et redonnent l’aspect étoilé de la muqueuse.
Les glandes de la sous-muqueuse sont des glandes exocrines élaborant une
sécrétion séro-muqueuse riche en mucines acides et en lysozyme. Chaque glande
adopte une structure tubulo-acineuse et s’ouvre dans la lumière au moyen d’un canal
traversant la musculaire muqueuse et le chorion. Leurs sécrétions participent aussi à la
lubrification de la lumière oesophagienne.

19
Les contractions de la musculaire sont si puissantes que les aliments y sont propulsés vers l’estomac
en deux secondes !
20
Lors d’agressions physiques ou chimiques répétées, les cellules épithéliales de la muqueuse
oesophagienne peuvent se métaplasier.

19
Les lymphocytes, plasmocytes et éosinophiles sont abondants dans la sous-
muqueuse et se localisent plus densément autour des glandes, de leurs canaux ou
s’organisent en petits amas lymphoïdes, surtout près de la jonction oesogastrique.
Petite particularité au niveau de la vascularisation du bas oesophage, à
l’extrémité inférieure de l’œsophage, un plexus veineux sous-muqueux draine le sang
vers le système porte hépatique.

En cas d’augmentation de la pression dans le système porte hépatique, causé par exemple par
une résistance vasculaire trop importante au niveau du parenchyme hépatique (rencontré lors de
la cirrhose hépatique), le plexus veineux oesophagien ne parvient pas à drainer correctement le
sang hors de la zone. Ceci se traduit par une accumulation de sang dans les plexus, une dilatation
excessive des parois veineuses de la sous-muqueuse oesophagienne et la formation de varices
oesophagiennes. La rupture de ces varices entraîne une hémorragie dans l’œsophage, cause
fréquente de vomissements de sang observés dans les maladies chroniques du foie.

20
5.4.2.3 La musculeuse

La morphologie de la musculeuse varie selon les niveaux. Au niveau du 1/3


supérieur de l’œsophage, la majorité de la musculature est faite de muscle strié
squelettique dérivé des muscles pharyngés. Une transition graduelle s’opère vers le
muscle lisse au 1/3 moyen où l’on observe la coexistence de fibres musculaires lisses
et striées. Enfin au 1/3 inférieur, on ne trouve que des fibres musculaires lisses,
organisées en deux couches, une interne circulaire et une externe longitudinale.

5.4.2.4 L’adventice

L’adventice ne présente aucune particularité p/r à la description faite dans les


généralités du tube digestif. A noter qu’une séreuse entoure l’œsophage uniquement
dans sa partie intra-abdominale.

21
5.5 La jonction oeso-gastrique

Cette jonction est une zone de transition entre une voie de passage (œsophage)
et le début du tube digestif (l’estomac). On y observe une transition morphologique au
niveau de l’épithélium de recouvrement : d’un épithélium malpighien non kératinisé
vers un épithélium cylindrique caractéristique du tube digestif.
Au niveau de cette jonction, les glandes oesophagiennes et les amas lymphoïdes
sous-muqueux sont particulièrement développés.
Le sphincter oesogastrique est assuré par la musculeuse légèrement plus
développée, qui maintient l’orifice gastrique fermé et par là empêche le reflux du
contenu gastrique dans l’œsophage.

Rem : La région cardiale de l’histologiste ne correspond pas à celle de


l’anatomiste : en effet pour ce dernier, le cardia est la zone séparant l’oesophage
tubulaire de l’organe cavitaire qu’est l’estomac ; pour l’histologiste, le cardia est la
zone de transition entre l’épithélium pavimenteux stratifié de type oesophagien et
l’épithélium glandulaire, cylindrique simple.

La jonction oesogastrique est le siège de fréquentes pathologies. En cas de dysfonction du


sphincter, l’épithélium malpighien du bas œsophage peut être exposé aux acides et enzymes de
l’estomac, phénomène connu sous le nom de reflux gastro-oesophagien. Ceci est à l’origine
d’ulcérations, d’une inflammation (« oesophagite ») de la muqueuse et de douleurs (sensation de
brûlures dans l’œsophage). En cas d‘agressions chroniques, l’épithélium malpighien se
métaplasie en un épithélium de type gastrique (cylindrique mucosécrétant). C’est le stade
d’œsophage de Barrett. On pense actuellement que les îlots d’épithélium cylindrique de
l’œsophage de Barrett constituent le déclencheur à l’apparition de certains types de cancers
oesophagiens.

A partir de l’estomac et ce jusqu’au rectum, l’épithélium digestif recouvre toute


la muqueuse du tube digestif et est constitué de cellules épithéliales cylindriques
simples munies de diverses spécialisations en rapport avec leur fonction :
certaines mucosécrétantes (lubrification, protection), d’autres munies de
microvillosités (absorption), ou encore s’organisant en glandes à activité
sécrétoire (sécrétions d’acides, d’enzymes).

22
5.6 L’estomac
5.6.1 Fonction et notions anatomiques

L’estomac est une poche musculaire dont le rôle est d’homogénéiser et de


digérer partiellement les aliments semi-solides déglutis. Les contractions de la paroi
musculaire et les sécrétions acides et enzymatiques stomacales contribuent à cette
fonction. Les aliments sont progressivement transformés en un fluide épais appelé
chyme qui sera conduit vers le duodénum.
L’estomac peut être divisé en 4 régions anatomiques : (1) le cardia, petite zone
s’étendant sur 3 cm juste après la jonction oesogatrique, (2) le fundus s’étendant sur la
gauche de l’orifice oesogastrique, (3) le corps de l’estomac et (4) l’antre pylorique (du
grec pyloros, portier).

5.6.2 Organisation générale de la muqueuse gastrique et variations


anatomiques

La muqueuse de l’estomac forme des replis grossiers appelés rugae et donnant


l’aspect plissé lors d’un examen macroscopique. Ces replis sont percés
d’innombrables trous ouverts sur les cryptes gastriques ou fovéoles ou infundibula
s’invaginant en profondeur. L’épaisseur de la muqueuse peut se subdiviser en 3
régions : la zone superficielle, la zone du collet et la zone profonde. C’est surtout la
structure de la zone profonde qui va varier selon la région stomacale (cardia, fundus,
corps et antre pylorique).
La zone superficielle est tapissée d’une couche de cellules épithéliales
cylindriques simples mucosécrétantes (cellules muqueuses ou celles à mucus) qui
s’invagine vers la zone du collet. Plus on se rapproche de la zone du collet, plus les
cellules deviennent cubiques. La zone superficielle est morphologiquement constante
partout dans l’estomac.
La zone du collet ou isthme est étranglée et contient des cellules épithéliales
muqueuses mêlées à des cellules souches en cours de prolifération ou de maturation.
Ces cellules souches constituent une population cellulaire de remplacement visant à
renouveler soit les cellules épithéliales superficielles muqueuses, soit les cellules du
fond des cryptes.
La zone profonde est formée de glandes gastriques contenant des populations
cellulaires uniques à l’estomac : majoritairement des cellules pariétales et des cellules
principales, les deux autres types cellulaires étant les cellules souches et les cellules
neuroendocrines (voir infra). Au niveau du cardia et de l’antre pylorique, les glandes
sont ramifiées et occupent 25 à 50% de la hauteur de la muqueuse. On les appelle
respectivement glandes cardiales et glandes pyloriques. A contrario, au niveau du
corps de l’estomac, les glandes gastriques sont tubulaires, descendent jusqu’à la
musculaire muqueuse, occupant ainsi jusqu’à 75% de la hauteur de la muqueuse !
Ceci est à mettre en relation avec l’intense activité sécrétoire s’y déroulant, lieu de la
digestion. Les glandes gastriques du fundus et du corps sont les productrices
principales des sucs gastriques (pepsine + HCl). Il n’y en a pas moins de 15 millions
dans un estomac humain.

23
5.6.3 Types cellulaires de la muqueuse
5.6.3.1 Les cellules à mucus

Les types cellulaires retrouvés au niveau de la muqueuse gastrique sont à mettre


en relation avec leur rôle dans la physiologie de l’estomac. L’estomac doit non
seulement digérer les aliments au moyen des sécrétions acides et enzymatiques qu’il
produit, mais aussi se protéger lui-même contre les sucs gastriques corrosifs. Il réalise
cela en sécrétant une barrière muqueuse produite par les cellules à mucus de la zone
superficielle.
Les cellules à mucus superficielles sont des cellules épithéliales cylindriques à
noyau basal et cytoplasme clair contenant de petites vacuoles à mucines déversées par
exocytose à la surface de l’estomac. Au fur et à mesure de la descente vers la zone du
collet, elles deviennent moins nombreuses et deviennent cubiques. Ces cellules
possèdent un réticulum endoplasmique granuleux et un appareil de Golgi développés.
Très important, elles sont unies les unes aux autres par des jonctions serrées apicales.
Leur surface luminale est parcourue de microvillosités recouvertes de glycocalyx.
Les cellules muqueuses peuvent être mises en évidence par une coloration au
Periodic-Acid-Schiff (PAS) colorant mucopolysaccharides et glycoprotéines. Les
mucines sont en effet des glycoprotéines de haut poids moléculaire.
Une couche uniforme de mucus, contenant 95% d’eau et 5% de mucines, forme
un gel muqueux tapissant la surface épithéliale et agit comme une barrière protectrice
sur environ 100 nm d’épaisseur, c’est la barrière muqueuse gastrique. Ce
revêtement muqueux capte les ions bicarbonate sanguins, relargués par les cellules
pariétales (suite à la décomposition du H2CO3 en H+ + HCO3-), qui neutralisent le
microenvironnement acide adjacent (dans la pellicule muqueuse, le pH est aux
alentours de 7 tandis que quelques nm plus loin il tombe à pH 2 !). Les cellules à
mucus expriment de facto des transporteurs au HCO3-21. A noter que la sécrétion de
mucus et de HCO3- est stimulée par les prostaglandines.
Particularité régionale, les cellules à mucus des glandes pyloriques sécrètent en
plus du lysozyme, une enzyme bactériolytique.
Les cellules à mucus ont une durée de vie de 3 jours, en conséquent elles
doivent être rapidement remplacées, leur pool est alimenté par différenciation de
cellules souches migrant du collet vers la superficie.

Helicobacter pylori est une bactérie relativement bien adaptée à son environnement : elle est
capable de survivre dans l’environnement acide de l’estomac grâce à l’expression d’une uréase
produisant des ions ammonium NH 4+, neutralisant autour d’elle l’acidité gastrique. Elle possède
aussi la capacité de se lier aux cellules épithéliales muqueuses de l’estomac au moyen de leur
adhésine. L’attachement à la cellule permet à H. pylori d’obtenir des nutriments à partir de la
cellule épithéliale. En se nourrissant, la bactérie produit des protéases cytotoxiques provoquant
in fine la mort de la cellule épithéliale. Cette bactérie fragilise ainsi la barrière muqueuse
gastrique, exposant la muqueuse gastrique à l’environnement acide corrosif. La présence d’H.
pylori est liée à une incidence plus élevée d’ulcères gastroduodénaux.

21
Xu et al. SLC26A9 is expressed in gastric surface epithelial cells, mediates Cl -/HCO3- exchange, and
is inhibited by NH4+. Am J Physiol Cell Physiol. 2005.

24
5.6.3.2 Les cellules souches

Les cellules souches prédominent au niveau de la zone du collet. Elles sont


capables de proliférer pour s’auto-renouveler ou de se différencier en différents
types cellulaires de l’épithélium gastrique. Elles sont capables de migrer
superficiellement pour générer des cellules à mucus ou migrer vers le fond des
glandes pour générer des cellules principales ou pariétales. Elles peuvent également se
différencier en cellules neuro-endocrines. Leur rôle est important puisqu’elles
participent au turn-over des cellules épithéliales de la muqueuse gastrique. En effet les
cellules à mucus ont une durée de vie de 3 jours et les cellules principales/pariétales
de 190 jours chez l’homme. Dans les états d’agression chronique ex : ulcères ou
gastrite chronique, le nombre et l’activité mitotique des cellules souches peuvent très
fortement augmenter pour compenser les pertes épithéliales.
Morphologiquement, elles se présentent comme de petites cellules à noyau
ovalaire basal et ne présentant aucun spécialisation cytoplasmique à l’état
indifférencié.

5.6.3.3 Les cellules principales

Les cellules principales et les cellules pariétales sont les types cellulaires
prédominants dans les glandes gastriques du fond et du corps de l’estomac.
Les cellules principales ou cellules à pepsines produisent du pepsinogène
(PM 42.5 kDa), précurseur inactif d’une enzyme protéolytique, la pepsine (PM 35
kDa), clivée lorsque le pH est inférieur à 5. La pepsine peut elle-même cliver le
pepsinogène en pepsine (auto-catalyse). La pepsine est une enzyme capable de cliver
les grosses protéines en petits peptides. Elle est largement responsable de la
transformation du bol alimentaire semi-solide en un chyme liquide.
Les cellules principales sécrètent aussi de la lipase, la lipase gastrique, qui
hydrolyse les triglycérides en acides gras. La capacité enzymatique de la lipase
gastrique22 est cependant bien inférieure à celle de la lipase pancréatique.
Les cellules principales sont préférentiellement distribuées dans la partie
inférieure des glandes gastriques. C’est une cellule épithéliale pyramidale présentant
un large noyau basal et renfermant de nombreuses granulations éosinophiles du côté
apical (les granules de pepsinogène). De manière originale, le côté basal est lui plutôt
basophile étant donné la richesse de réticulum endoplasmique granuleux.
Cette cellule possède à la membrane plasmique, du côté basal, un récepteur à
l’acétylcholine (AChR), qui en cas d’activation par son ligand l’acétylcholine (ACh)
stimule la production et le relarguage de pespinogène dans la lumière gastrique.
On n’observe peu ou pas de cellules principales au niveau des glandes cardiales
et pyloriques. Leur durée de vie avoisine les 190 jours, après quoi elles meurent et
sont remplacées.

5.6.3.4 Les cellules pariétales

Les cellules pariétales ou oxyntiques élaborent des ions H+ et Cl- qui se


combinent dans la lumière gastrique en acide chlrohydrique HCl, amenant le pH

22
Son expression débute dès la naissance alors que la lipase pancréatique apparaît plus tard. Cela
permet une bonne digestion du lait maternel dès les premiers jours de vie.

25
intragastrique à des valeurs comprises entre 0.9 et 2.0. Les cellules pariétales sécrètent
aussi le facteur intrinsèque23, impliqué dans l’absorption intestinale de la vitamine
B12.
Les cellules pariétales sont préférentiellement localisées dans la partie
supérieure des glandes gastriques. C’est une imposante cellule épithéliale pyramidale
dite « bordante » car bombée et débordante dans la lumière de la crypte. Elle possède
un noyau central et un cytoplasme clair vacuolaire. En microscopie électronique, on
peut distinguer de très nombreuses mitochondries (40% du volume cellulaire !), peu
d’appareil de Golgi ou de réticulum. Par contre, il existe un important système
d’invaginations issu de la surface luminale (apicale) de la cellule. La surface apicale
présente aussi des microvillosités, servant à augmenter la surface de contact entre la
cellule et le milieu extérieur.
Les invaginations donnent naissance aux canalicules s’enfonçant dans le
cytoplasme, à proximité desquels sont stockées de nombreuses tubulo-vésicules
intracytoplasmiques. C’est à la membrane plasmique des tubulo-vésicules que la
protéine H+/K+ ATPase est exprimée. Cette protéine est responsable de l’extrusion
d’un ion H+ contre un ion K+, dépendant de l’ATP. En cas de stimulation de la cellule
pariétale, les tubulo-vésicules fusionnent avec les canalicules, augmentant le pool de
pompes H+/K+ ATPase exprimé à la surface luminale24.
La richesse en mitochondries traduit la nécessité de générer d’importantes
quantités d’ATP pour alimenter les pompes à protons H +/K+ ATPase. La
concentration en H+ dans l’estomac est un million de fois supérieur à celle du sang,
c’est pourquoi des mécanismes actifs doivent être entrepris pour générer et transporter
ces ion H+ vers la lumière gastrique. Les cellules pariétales sont riches en anhydrase
carbonique catalysant la formation d’H2CO3 à partir du CO2 sanguin et de l’H20.
L’H2CO3 se dissocie instantanément dans le compartiment cytoplasmique en H+ et
HCO3-. L’HCO3- réintègre le sang (pour rappel il sera capté par les cellules à mucus
toutes proches pour intégrer le film de la barrière muqueuse gastrique) tandis que
l’ion H+ est pompé au travers de la H +/K+ ATPase vers la lumière. Les ions Cl -
proviennent de la dissociation du NaCl et sont aussi transportés par un transport actif
dans la lumière du canalicule.

Il est parfois nécessaire de diminuer l’acidité gastrique, dans des pathologies comme le reflux
gastro-oesophagien ou les ulcères gastriques. Le praticien dispose de plusieurs options
thérapeutiques ciblant des protéines clefs localisées au niveau des cellules pariétales.
L’oméprazole est un inhibiteur des pompes à protons H +/K+ ATPase. La cimétidine est un anti-
histaminique antagoniste du récepteur H2 à l’histamine. Ces deux médicaments vont diminuer la
sécrétion d’HCl par les cellules pariétales.

Cette cellule possède à la membrane plasmique, du côté basal, un récepteur à


l’acétylcholine (AChR), un récepteur H2 à l’histamine et un récepteur à la gastrine,
qui en cas d’activation par le ligand respectif (l’ACh, l’histamine ou la gastrine),

23
Le facteur intrinsèque (FI) est une glycoprotéine sécrétée par les cellules pariétales de la muqueuse
de l'estomac, indispensable à l'absorption de la vitamine B12 présente dans les aliments (foie, viandes,
laitages, œufs, poissons ; les besoins quotidiens de 2-5 mg/jour chez l’adulte sont largement couverts
par la nourriture). Le FI lie la vitamine B12 au niveau de la lumière gastrique et reste lié jusqu'à l'iléon.
Le complexe vitamine B12 – FI se fixe sur un récepteur spécifique appelé cubuline de la bordure en
brosse des entérocytes de l’iléon terminal puis est endocyté. Attention chez certaines espèces animales
ce sont les cellules principales qui sécrètent le facteur intrinsèque.
24
L’ H+/K+ ATPase représente 80% des protéines de la membrane plasmique des microvillosités.

26
stimule la sécrétion d’HCl dans la lumière gastrique. Petite précision, l’ACh seule
stimule la sécrétion d’HCl et l’histamine potentialise l’effet de l’ACh.
On n’observe peu ou pas de cellules pariétales au niveau des glandes cardiales
et pyloriques. Leur durée de vie avoisine les 190 jours, après quoi elles meurent et
sont remplacées.

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) tels que l’aspirine jugulent l’inflammation en
agissant sur le métabolisme de l’acide arachidonique (AA). Les AINS non spécifiques inhibent
les cyclooxygénases (COX-1 et COX-2) et réduisent la synthèse de médiateurs inflammatoires
dérivés de l’AA comme les prostaglandines. Cependant au niveau de l’estomac, les
prostaglandines générées par la COX-1 sont impliquées dans le maintien de la fonction de la
barrière muqueuse gastrique, notamment en stimulant la sécrétion de mucus et de HCO 3-. La
prise chronique d’AINS affaiblit dès lors la protection muqueuse de l’estomac et le rend plus
susceptible aux attaques acides et aux ulcères. C’est pourquoi, dans les états inflammatoires
chroniques, il est recommandé de prescrire des AINS spécifiques de COX-2, qui permettront de
diminuer la synthèse de médiateurs inflammatoires tout en n’ayant aucun effet sur COX-1.

27
5.6.3.5 Les cellules neuro-endocrines

L’histamine ou la gastrine précédemment mentionnées sont des hormones


synthétisées par des cellules neuro-endocrines du tube digestif. De par leur
localisation digestive, ces cellules sont aussi dénommées entéro-endocrines. Les
cellules neuro-endocrines ne synthétisent pas que l’histamine ou la gastrine ; de
nombreuses autres hormones peptidiques synthétisées par différents types de cellules
neuro-endocrines réparties tout au long du tractus digestif régulent les fonctions
digestives.
Au niveau de leur pôle basal, les cellules neuro-endocrines de l’estomac sont au
contact de terminaisons nerveuses du SNA qui libèrent des neurotransmetteurs tels
que l’ACh ou le GRP (gastrin-releasing peptide ; peptide libérant la gastrine, GRP est
synonyme de bombésine). Cette stimulation produit la libération d’hormones
peptidiques différentes selon les cellules neuro-endocrines.
Morphologiquement, elles sont petites et rondes, dispersées parmi les autres
cellules épithéliales de la muqueuse gastrique surtout dans les zones profondes et celle
du collet. Elles sont difficilement identifiables en microscopie optique ; par contre en
microscopie électronique, on observe que leur cytoplasme renferme les granules
neuro-endocrines caractéristiques à centre dense entourés d’une membrane, ces
granules contiennent les hormones peptidiques. La position des vésicules est
particulière : au niveau du pôle basal, en adéquation avec leur rôle d’hormones devant
passant la membrane basal pour gagner les capillaires et la circulation sanguine. Les
hormones peptidiques sont transportées via le sang vers les cellules cibles où elles
inhibent/stimulent une fonction cellulaire (voir 1.7.)
Plusieurs types de cellules neuro-endocrines se distribuent dans la muqueuse
gastrique : les cellules G, les cellules D, les cellules ECL, les cellules à VIP, les
cellules à bombésine et les cellules à sérotonine. Les cellules G et D sont
préférentiellement localisées dans l’antre pylorique. Les cellules G sécrètent de la

Les hormones peptidiques gastro-intestinales régulent les fonctions du tube digestif : (1)
métabolisme de l’eau et des électrolytes, (2) sécrétion enzymatique, (3) péristaltisme, (4)
renouvellement de la muqueuse digestive, (5) libération en cascade d’autres hormones
peptidiques du tube digestif.

gastrine en réponse à la liaison de l’hormone GRP. Pour rappel, la gastrine a pour


cellules cibles les cellules pariétales. Les cellules D sécrètent de la somatostatine qui a
pour cibles les cellules G où elle inhibe le relarguage de gastrine. Les cellules ECL
sécrètent de l’histamine en réponse à une stimulation cholinergique (ACh). Pour
rappel, l’histamine a pour cellules cibles les cellules pariétales.
5.6.3.6 Le chorion de la muqueuse

Le chorion est un tissu conjonctif lâche entourant les glandes gastriques. Il est
riche en fibres de collagène et réticulaire synthétisées par des fibroblastes. De
nombreuses cellules immunitaires infiltrent le chorion : lymphocytes, éosinophiles,
mastocytes et plasmocytes.
Le chorion contient les boucles capillaires (capillaires fenestrés) vascularisant
les glandes gastriques et convoyant les ions HCO 3- relargués par les cellules pariétales
vers les cellules à mucus.

28
5.6.4 La sous-muqueuse

La sous-muqueuse est un tissu conjonctif dense riche en fibres de collagène et


fibres élastiques. Il contient artérioles, vaisseaux lymphatiques, plexus veineux et
plexus de Meissner.

5.6.5 La musculeuse

La musculeuse de l’estomac fait exception puisqu’elle est constituée de trois


couches de muscle lisse orientées de manière circulaire, oblique et longitudinale.
L’importance des couches musculaires et leur disposition reflètent l’activité de
brassage développée au niveau de l’estomac.
Au niveau du pylore, la couche musculaire circulaire s’épaissit pour former le
sphincter pylorique, contrôlant la vidange de l’estomac vers le duodénum proximal.

29
5.7 Les cellules neuro-endocrines gastro-intestinales

Des hormones peptidiques sont synthétisées par des cellules neuro-endocrines


réparties dans la muqueuse du tube digestif depuis l’estomac jusqu’au côlon.
Différentes populations de cellules neuro-endocrines synthétisent un large panel
d’hormones, qui passent dans le sang et atteignent leur cible cellulaire localement ou à
distance (action paracrine ou endocrine).
Parmi les hormones peptidiques les mieux représentées au sein du tube digestif,
nous trouvons la somatostatine, le VIP (vasointestinal polypeptide), la sécrétine, la
gastrine, la cholécystokinine, le peptide inhibiteur gastrique, la motiline. Les cellules
neuro-endocrines sont tellement nombreuses au sein du tube digestif que le tube
digestif est considéré comme l’organe endocrinien le plus développé de l’organisme.
Ces cellules appartiennent au système APUD (amine uptake and
decarboxylation) à cause de leur propriété à capter les amines biogènes ou les acides
aminés entrant dans la composition des hormones peptidiques. Toutefois, toutes les
cellules entéro-endocrines n’utilisent pas des précurseurs aminés et le terme APUD
est de plus en plus supplanté par SNED pour système neuro-endocrinien diffus25.

Cellule Cellule cible Effet


Médiateur
Stimulus neuro-
neuro-endocrine
endocrine
Cellule pariétale Stimulation de la
GRP production d’HCl
Cellule G
(= bombé- gastrine Croissance de la muqueuse
(estomac)
sine) digestive
Cellule 
Libération d’insuline
pH
Cellule D
pylorique somatostatine Cellule G Inhibition du relarguage de
(estomac)
acide gastrine
Cellule pariétale Potentialise l’effet de la
Cellule ECL
ACh histamine gastrine (production
(estomac)
d’HCl)
Acini Stimule la sécrétion
pH pancréatiques pancréatique (enzymes +
Cellule S HCO3-)
duodénal sécrétine
(duodénum) Stimule la sécrétion de
<4.5 Cellule
principale pepsinogène
Présence Vésicule biliaire Contraction de la vésicule
de graisse Cellule I Cholécystokinine Acini biliaire
dans (duodénum) (CCK) pancréatiques Stimule la sécrétion
l’intestin pancréatique

25
Des cellules appartenant au SNED sont retrouvées aussi dans la muqueuse bronchique (cellules
neuro-endocrines synthétisant de la sérotonine ou de la bombésine) ou disséminées dans le tissu
pancréatique (cellules , , , ).

30
Sources et rôle de la gastrine, CCK et sécrétine dans la digestion.

La leptine est une hormone impliquée dans la régulation de la prise de nourriture. C’est une petite
protéine codée par le gène OB et synthétisée majoritairement par les adipocytes en réponse à une
prise de nourriture ou une élévation de la masse graisseuse (elle est aussi synthétisée par les
cellules neuro-endocrines de l’estomac). Elle est appelée “hormone de la satiété” car inhibe la
sensation de faim. Les souris leptin -/- ou « ob/ob » sont anormalement obèses. Il est de plus en plus
reconnu que les individus obèses sont résistants à l’action de la leptine.

31
5.8 L’intestin grêle

5.8.1 Fonction et notions anatomiques

L’intestin reçoit le chyme acide gastrique après ouverture du sphincter


pylorique. Il complète la digestion entamée dans l’estomac en sécrétant des enzymes
qui terminent les processus de clivage des grosses molécules en molécules plus
simples. L’intestin est le lieu par excellence de l’absorption des acides aminés, des
sucres et des graisses. On retrouve également associé à la muqueuse intestinale du
GALT et du D-ALT impliqué dans la surveillance immunitaire locale et le contrôle de
la flore bactérienne.
L’intestin grêle peut être divisé en trois portions anatomiques dont les limites
sont assez imprécises : le duodénum, le jéjunum et l’iléon. A l’état contracté, il
mesure 3 m de long, à l’état relâché jusqu’à 6 m. Le duodénum mesure 25 cm de long
et adopte une forme de C dans lequel la tête du pancréas s’emboîte. Les canaux
biliaires et pancréatiques s’abouchent dans le duodénum. Le jéjunum mesure 2,5 m et
l’iléon mesure 3,5 m, il se termine au niveau de la valvule iléo-caecale.

5.8.2 Organisation générale de la muqueuse intestinale et variations


anatomiques

Pour répondre à cette fonction d’absorption, l’intestin présente de nombreuses


spécialisations architecturales de sa paroi destinées à accroître la surface d’échange.
Comme précédemment, la paroi est organisée en 4 couches : muqueuse, sous-
muqueuse, musculeuse et séreuse. Tandis que la musculeuse et la séreuse sont
morphologiquement identiques pour les 3 segments intestinaux, il existe des
variations anatomiques au niveau de la muqueuse et de la sous-muqueuse.
La surface d’échange entre la lumière intestinale et la paroi est
considérablement augmentée par une complexification de son niveau de plissement.
Plusieurs niveaux de plissements peuvent être distingués :
- les plis circulaires ou valvules conniventes (identifiables macroscopiquement)
- les villosités intestinales, greffées sur les plis
- les glandes intestinales, appelées glandes/cryptes de Lieberkuhn
- les microvillosités portées par les cellules épithéliales absorbantes de la
muqueuse, c-à-d les entérocytes

Les plis circulaires apparaissent dans le duodénum, à 5 cm de l’embouchure


avec l’estomac, se continuent dans le jéjunum et diminuent progressivement de taille
jusqu’à disparaître à la moitié de l’iléon. Un pli circulaire est une évagination
macroscopique de la muqueuse et sous-muqueuse vers la lumière intestinale. La
villosité intestinale est une évagination digitiforme de la muqueuse vers la lumière
intestinale. La crypte de Lieberkuhn est une invagination de la muqueuse à l‘intérieur
de la paroi intestinale, formant une glande tubuleuse simple entre deux villosités
adjacentes et atteignant la musculaire muqueuse. Enfin les microvillosités sont des
spécialisations apicales des entérocytes visant à encore plus accroître leur surface
d’échange.

32
Les variations anatomiques d’un segment intestinal à l’autre tiennent dans la
forme des villosités intestinales, la présence de glandes supplémentaires sous-
muqueuses dans le duodénum (les glandes de Brünner, voir 1.8.3.) et la présence d’un
GALT très développé au niveau de l’iléon (les plaques de Peyer précédemment
abordées dans le Système Immunitaire).

Variations histologiques entre le duodénum, le jéjunum et l’iléon. Dans le duodénum, les villosités
intestinales sont courtes et en forme de feuille. On trouve en plus des glandes tubulo-acineuses prenant
naissance dans la sous-muqueuse : les glandes de Brünner. Le jéjunum présente les plis et villosités les
plus développés. L’iléon possède des villosités plus courtes que celles du jéjunum et les plaques de
Peyer à cheval sur la muqueuse et la sous-muqueuse. Adapté du Kierszenbaum.

33
5.8.3 Types cellulaires de la muqueuse intestinale

La muqueuse intestinale adopte une morphologie particulière, dite plissée, où


l’on peut reconnaître trois zones : les villosités intestinales, la zone du collet et les
cryptes de Lieberkuhn. La muqueuse intestinale est tapissée d’un épithélium
cylindrique simple (cf épithélium digestif). Les types cellulaires rencontrés le long de
l’épithélium intestinal sont : l’entérocyte, la cellule caliciforme, la cellule de Paneth,
la cellule neuro-endocrine, la cellule souche, le lymphocyte intraépithélial et la cellule
M. Les deux dernières cellules ne seront pas décrites puisqu’apparentées au Système
Immunitaire.

5.8.3.1 Les entérocytes

L’entérocyte est une cellule épithéliale absorbante disposée le long de


l’épithélium intestinal. C’est le type cellulaire le mieux représenté au niveau de la
muqueuse de l’intestin grêle. Morphologiquement, c’est une grande cellule
cylindrique à noyau rond basal. Leur pôle apical est extrêmement spécialisé : il est
muni d’une bordure en brosse 26 incluant 2000
à 3000 microvillosités hautes et serrées Un déficit génétique en lactase
recouvertes de glycoprotéines. Cette couverture dérégule l’absorption du lait riche
glycoprotéique est appelée le glycocalyx. Le en lactose, entraînant une diarrhée
glycocalyx comporte des enzymes digestives osmotique au niveau du gros
intestin et la fermentation du
insérés à la membrane comme la lactase, la lactose par les bactéries
lipase, la sucrase, l’entérokinase, diverses commensales du côlon (production
peptidases et la phosphatase alcaline27. Chaque de gaz) ; c’est l’intolérance au
entérocyte est uni à son voisin par des lactose.
complexes de jonction contenant desmosomes
et jonctions serrées surtout du côté apical.
L’interaction entre deux entérocytes est d’autant plus importante que des
interdigitations latérales sont émises latéralement d’un entérocyte à l’autre. Plus bas,
les complexes de jonctions sont moins serrés et ménagent des espaces entre deux
entérocytes appelées espaces intercellulaires latéraux.
La structure des microvillosités est maintenue par un agencement du
cytosquelette. Une zone plus claire, à la base de la microvillosité, riche en filaments
intermédiaires (kératines) et en spectrine supporte
La longueur d’une l’érection de la microvillosité. L’axe de la
microvillosité varie de 0.5 à microvillosité est maintenu perpendiculaire à la
1 μm. Chaque entérocyte cellule par un réseau de 20 à 40 filaments
étant surmonté d’environ d’actine (actine-F) solidarisés à la membrane
3000 microvillosités, cela cytoplasmique par de la myosine I et de la
lui permet d’augmenter sa calmoduline. Les filaments d’actine sont
surface d’échange d’un solidarisés les uns aux autres par de la viline et
facteur 30 ! de la fimbrine.

26
Synonyme de plateau strié.
27
L’être humain n’est pas pourvu d’enzyme dégradant la cellulose (cellulase). La cellulose fait partie
des fibres alimentaires non digérées.

34
Les entérocytes sont munis à leur surface apicale de transporteurs spécifiques
pour les acides aminés et les hydrates de carbones obtenus après clivage protéolytique
à partir des protéines et des sucres complexes. Par exemple, le glucose est transporté
de la lumière vers le cytoplasme de l’entérocyte par l’intermédiaire de la protéine
SGLT-1 (sodium-glucose linked transporter-1). Ce transporteur fait entrer
concomitamment deux molécules de sodium et une molécule de glucose28.
L’entérocyte est muni de deux autres transporteurs au glucose : GLUT-2 (baso-
latéral) et GLUT-5 (apical). En ce qui concerne les acides aminés, il existe des
transporteurs au niveau de la membrane apicale et basolatérale spécifiques pour
chaque classe d’acides aminés : aromatiques, aliphatiques, basiques,... Les lipides sont
quant à eux dégradés en acides gras ou monoglycérides au niveau de la lumière
duodénale sous l’action de la lipase pancréatique. Les acides gras et
les monoglycérides émulsifiés par les sels biliaires (< vésicule biliaire < foie) et
diffusent au travers des membranes plasmiques des entérocytes sous forme de
micelles. Ils sont ensuite estérifiés en triglycérides au niveau du réticulum
endoplasmique lisse. De là, ils partent vers l’appareil de Golgi où ils seront complexés
avec des apolipoprotéines. Ces complexes apolipoprotéines-lipides sont appelés
chylomicrons et sont exportés vers l’espace extracellulaire latéral des entérocytes
(interdigitations latérales). Ils rejoindront finalement le vaisseau lymphatique central
dans l’axe de la villosité appelé chylifère.
5.8.3.2 Les cellules caliciformes

Les cellules caliciformes sont des cellules épithéliales cylindriques simples


muco-sécrétantes dispersées parmi les entérocytes. Le cytoplasme apical renferme
d’innombrables vacuoles de mucines (glycoprotéines), libérées à la surface de
l’épithélium par exocytose. Ce tapis de mucus sert à protéger la surface épithéliale de
l’abrasion mécanique, empêcher l’adhésion bactérienne et lubrifier la lumière
intestinale. Le mucus étant riche en mucopolysaccharides, il peut être mis en évidence
par une coloration au PAS.
La cellule est riche en réticulum endoplasmique granuleux, traduisant son
activité de synthèse protéique.
Elles sont peu nombreuses au niveau du duodénum mais se densifient au niveau
du jéjunum et au plus on se rapproche du gros intestin.
5.8.3.3 Les cellules entéro-endocrines

Au niveau intestinal, les cellules neuro-endocrines sécrètent principalement de


la sécrétine et de la CCK (voir 1.7.). Elles sont localisées préférentiellement dans le
1/3 inférieur des cryptes de Lieberkuhn. Leur morphologie est identique aux cellules
entéro-endocrines des glandes gastriques (voir 1.6.3.5.).
5.8.3.4 Les cellules de Paneth

Les cellules de Paneth font partie du système de défense local contre les micro-
organismes. Elles sécrètent des substances bactériostatiques : dans ses granules
intracytoplasmiques sont contenus du TNF-, de la phospholipase A2 (PLA2), du

28
A noter qu’il peut aussi transporter du galactose.

35
lysozyme et des défensines29. Le lysozyme et les défensines sont capables d’attaquer
certaines parois bactériennes ou parasitaires pour les perméabiliser.
Ces cellules de Paneth sont des cellules épithéliales de forme pyramidale,
localisées préférentiellement à la base des cryptes de Lieberkuhn et présentant un
réticulum endoplasmique granuleux développé ainsi que de grosses granulations
éosinophiles intracytoplasmiques.
5.8.3.5 Les cellules souches

Les cellules souches sont capables d’auto-renouvellement et de différenciation


vers les types cellulaires de l’épithélium intestinal : entérocytes, cellules caliciformes,
cellules de Paneth et cellules neuro-endocrines. Ce sont surtout les entérocytes et les
cellules caliciformes qu’il faut remplacer car leur durée de vie est courte : 5 à 7 jours.
Indifférenciées, les cellules souches sont localisées principalement dans le 1/3
inférieur des cryptes et au cours de leur différenciation, elles vont remonter le long de
l’épithélium des villosités.
Avant de prendre leur forme mature, les cellules souches se différencient en
cellules dites intermédiaires engagées vers l’une des 4 voies de différenciation
possibles. Par exemple, des cellules souches engagées vers la différenciation en
cellules de Paneth exprimeront les marqueurs spécifiques Lgr4 et Lgr5 30.
5.8.3.6 Chorion

Le chorion au centre des villosités intestinales contient des fibres de collagène


et de réticuline, une matrice de GAG synthétisées par des fibroblastes. En dedans,
circulent capillaires sanguins et lymphatiques. Le
capillaire lymphatique central à l’axe de la villosité
Pendant la digestion, la
est appelé chylifère, parce qu’il véhicule les lymphe intestinale se charge
chylomicrons absorbés depuis les entérocytes. en triglycérides et en acides
L’extrémité du chylifère est borgne au sommet de la gras libres. D’aspect
villosité. habituellement clair, la
Le chorion contient aussi du D-ALT : lymphe devient laiteuse car
chargée en graisse et porte le
éosinophiles, macrophages, mastocytes, nom de “chyle” récoltée
lymphocytes, plasmocytes sécréteurs d’IgA (pour dans les chylifères.
rappel les entérocytes captent les IgA à leur face
baso-latérale et les véhiculent par transcytose vers la
lumière intestinale où ils seront relargués munis de leur pièce sécrétoire).
Particularité loco-régionale : au niveau de la partie terminale de l’iléon, dans le
chorion de la muqueuse voire dans la sous-muqueuse, on trouve des follicules
lymphoïdes confluant sous forme de plaques ovoïdes sur une distance de quelques
centimètres ; à la surface, les villosités intestinales sont rares et parsemées ; ces
formations sont dénommées « plaques de Peyer » et appartiennent au système
immunitaire (voir Chapitre Système Immunitaire). Ces structures lymphoïdes
contiennent des lymphocytes B, des lymphocytes T ainsi que des cellules
présentatrices d’antigènes. Toutes coopèrent pour le cas échéant déclencher une
réponse immunitaire en cas de reconnaissance d’antigènes délétères au niveau
29
Les défensines peuvent se polymériser à la paroi bactérienne et former des canaux ioniques pour
perméabiliser les membranes plasmiques cibles. Le lysozyme clive le peptidoglycane des bactéries
Gram +.
30
Des souris invalidées pour Lgr4 (Lgr4 -/-) ou Lgr5 (Lgr5-/-) ne possèdent pas de cellules de Paneth
dans leurs cryptes de Lieberkuhn.

36
luminal. En effet, les cellules présentatrices d’antigènes émettent des prolongements
cytplasmiques en contact avec la lumière digestive. Des cellules M, réparties entre les
entérocytes, sont elles aussi capables de « sonder » la lumière digestive à la recherche
d’antigènes et les transmettre à leur face luminale vers les cellules lymphoïdes des
plaques de Peyer.

5.8.3.7 Musculaire muqueuse

La musculaire muqueuse n’a rien de particulier d’un point de vue


morphologique p/r à la structure générale. Elle est constituée d’une fine couche
continue de fibres musculaires lisses innervées par les plexus de Meissner.
Particularité loco-régionale du duodénum : la musculaire muqueuse est
discontinue de par l’effraction des glandes de Brünner de la sous-muqueuse vers la
muqueuse (voir 5.8.4).
5.8.4 La sous-muqueuse

La sous-muqueuse intestinale n’a rien de particulier d’un point de vue


morphologique p/r à la structure générale. Elle contient des vaisseaux sanguins et
lymphatiques, des plexus nerveux (plexus de Meissner) et des amas lymphoïdes du
GALT.
Particularité loco-régionale du duodénum : les glandes de Brünner se localisent
dans la sous-muqueuse et pénètrent la muqueuse au travers de la musculaire
muqueuse. Les glandes de Brünner sont des glandes tubulo-acineuses produisant un
mucus alcalin (pH 8.8 à 9.3) neutralisant la chyme acide en provenance de l’estomac.
Leurs sécrétions alcalines contiennent des mucines et du pepsinogène. Le pH alcalin
est optimal à l’activation des enzymes pancréatiques. Ces glandes déversent leurs
sécrétions dans la lumière duodénale après avoir emprunté un court canal excréteur
traversant la muqueuse.
5.8.5 La musculeuse

La musculeuse intestinale n’a rien de particulier d’un point de vue


morphologique p/r à la structure générale : deux épaisses couches de fibres
musculaires lisses disposées en une couche circulaire interne et une couche
longitudinale externe, et innervées par des plexus d’Auerbach et de Meissner. Cette
musculeuse a pour fonction à la fois de brasser localement le bol alimentaire et le
propulser vers le segment suivant, processus appelé péristaltisme.

La fonction d’absorption de l’intestin grêle dépend de l’intégrité des villosités


intestinales (figure a). En leur absence, un syndrome de malabsorption est observé,
caractérisé par des diarrhées chroniques non sanglantes, perte de poids et fatigue
généralisée. La malabsorption est à mettre en relation avec l’atrophie villositaire. Une
cause majeure d’atrophie villositaire est la maladie coeliaque ou « intolérance au
gluten », liée à une inflammation chronique de type allergique contre une protéine du
blé : le gluten (contenu par exemple dans le pain). Le diagnostic de maladie coeliaque
s’établit sur base de plusieurs éléments : une prise de sang permet de mettre en évidence
des anticorps IgA anti-gliadine, anti-endomysium et anti-transglutaminase tissulaire,
confortée par une biopsie intestinale montrant un aplatissement/atrophie des villosités
(figure b). Le traitement est relativement simple puisqu’une simple éviction de
l’allergène permet de recouvrer la structure normale des villosités.
37
5.9 Le gros intestin

5.9.1 Fonction et notions anatomiques

La fonction principale du gros intestin est de transformer les résidus liquides en


un matériau solide, non digestible, les fèces. Cette transformation passe par une
réabsorption intense d’eau et de NaCl. Etant donné que les fèces se solidifient au
fur et à mesure de l’avancée dans le gros intestin, il est nécessaire de lubrifier la paroi
intestinale. Dès lors, nous retrouverons une densité importante de cellules
caliciformes sécrétant du mucus. Le gros intestin est subdivisé en 3 segments
successifs : (1) le côlon (distingué anatomiquement en côlons ascendant, transverse,
descendant et sigmoïde), (2) le caecum muni d’un diverticule : l’appendice
vermiculaire et (3) le rectum ou ampoule rectale.

Les propriétés d’absorption du gros intestin sont utilisées en clinique et en ambulatoire. Le


côlon est capable d’absorber de nombreuses substances comme les sédatifs, les anesthésiques,
les stéroïdes, les analgésiques. Exemple : le suppositoire contenant du paracétamol. Cette
propriété est intéressante lorsqu’un médicament ne peut être administré per os, notamment en
cas de vomissements.

5.9.2 Organisation générale de la muqueuse et variations anatomiques

A la différence de l’intestin grêle, le gros intestin ne présente ni plis ni villosités


intestinales au niveau de sa muqueuse. La muqueuse colique présente de nombreux
orifices dus à l’invagination de l’épithélium colique et formant des glandes tubulaires
simples descendant profondément jusqu’à la musculaire muqueuse. Ces glandes sont
appelées cryptes ou glandes de Lieberkuhn (comme dans l’intestin grêle).
Quelques variations histologiques mineures peuvent être remarquées p/r au
modèle de base de la paroi digestive et selon le segment. L’appendice est un
diverticule du caecum riche en GALT ; les follicules lymphoïdes inclus dans la
muqueuse sont particulièrement proéminents et déforment la muqueuse et la sous-
muqueuse. Dans la musculeuse du côlon, la couche externe longitudinale se dispose
en 3 bandes discontinue appelées taenia coli. C’est la contraction de ce taenia coli qui
est responsable de l’aspect « bosselé » macroscopique caractéristique du côlon : les
haustrations.

5.9.3 Types cellulaires de la muqueuse

La muqueuse comprend un épithélium cylindrique simple soutenu par une


membrane basale le séparant du chorion en dessous duquel on retrouve la musculaire
muqueuse. L’épithélium colique est revêtu de 4 types cellulaires : les cellules
caliciformes, les entérocytes, les cellules souches et les cellules neuro-endocrines. De
rares cellules de Paneth s’observent au niveau du caecum.

38
5.9.3.1 Les cellules caliciformes

Les cellules caliciformes sécrètent un mucus riche en mucines destinés à


lubrifier la surface luminale et aider les fèces à progresser dans le dernier tronçon
digestif. Elles sont très nombreuses au niveau de l’épithélium de surface et de
l’épithélium glandulaire.
D’un point de vue morphologique, elles sont similaires aux cellules caliciformes
de l’intestin grêle. A mesure que les cellules caliciformes de l’épithélium superficiel
colique meurent, elles se font remplacées par celles migrant depuis les cryptes
(générées à partir du pool de cellules souches). A mesure qu’elles migrent vers le
haut, elles libèrent leur contenu muqueux vers la lumière et intègrent l’épithélium de
surface sous la forme de cellules épithéliales cylindriques hautes et simples.
5.9.3.2 Les entérocytes

Les entérocytes coliques sont quasiment identiques à ceux retrouvés dans


l’intestin grêle à ceci près que leurs microvillosités sont plus courtes et ne contiennent
aucune enzyme digestive dans le glycocalyx.
Etant donné qu’elles sont responsables de la réabsorption d’eau et de NaCl,
comme toute cellule impliquée dans les flux d’eau et d’ions (cf les tubules rénaux),
elles ménagent des interdigitations baso-latérales portant des pompes Na+/K+ ATPase.
5.9.3.3 Les cellules souches

Comme ailleurs, les cellules souches sont à l’origine des autres types
cellulaires ; elles peuvent se différencier en cellules caliciformes, en entérocytes, en
cellules neuro-endocrines ou en cellules de Paneth. Les cellules souches sont
préférentiellement localisées dans le fond des cryptes de Lieberkuhn.

5.9.3.4 Les cellules neuro-endocrines

Comme ailleurs, les cellules neuro-endocrines relarguent vers la circulation des


médiateurs hormonaux type peptides ex : somatostatine, substance P et glucagon. Les
cellules neuro-endocrines sont préférentiellement localisées dans le fond des cryptes
de Lieberkuhn.

5.9.3.5 Chorion de la muqueuse et musculaire muqueuse

Le chorion contient des fibroblastes synthétisant fibres de collagène, de


réticuline, des GAG. Il est infiltré de cellules immunitaires appartenant au D-ALT et à
certains endroits, ces cellules immunitaires s’organisent en îlot lymphoïde (GALT).
Ces amas lymphoïdes peuvent parfois être si volumineux qu’ils traversent la
musculaire muqueuse et s’étendent dans la sous-muqueuse.

5.9.4 La sous-muqueuse

La sous-muqueuse colique n’a rien de particulier d’un point de vue


morphologique p/r à la structure générale. Elle contient des vaisseaux sanguins et

39
lymphatiques, des plexus nerveux (plexus de Meissner) et des amas lymphoïdes du
GALT.

5.9.5 La musculeuse

La musculeuse colique est également faite de deux épaisses couches de fibres


musculaires lisses disposées en une couche circulaire interne et une couche
longitudinale externe, si ce n’est que la couche externe longitudinale se dispose en 3
bandes discontinue appelées taenia coli. C’est la contraction de ce taenia coli qui est
responsable de l’aspect « bosselé » macroscopique caractéristique du côlon : les
haustrations. La musculeuse est innervée par les plexus d’Auerbach et de Meissner 31.
Cette musculeuse a pour fonction de propulser les fèces semi-solides vers l’ampoule
rectale (péristaltisme).

5.9.6 La séreuse

L’adventice du côlon est recouverte de mésothélium jusqu’à la fin du rectum, et


constitue donc une séreuse. Le tissu conjonctif de l’adventice présente des poches de
tissu adipeux : les appendices épiploïques.

L’appendice vermiculaire est un diverticule aveugle du caecum et du côlon. Elle présente la


même structure de paroi que le reste du côlon si ce n’est que la muqueuse est richement
infiltrée de lymphocytes et contient de volumineux follicules lymphoïdes. La fonction de
cette extrémité aveugle n’est pas bien connue. Certains scientifiques pensent qu’elle abriterait
des bactéries impliquées dans la digestion et constituerait un réservoir de bactéries
commensales (Bollinger et al. Biofilms in the large bowel suggest an apparent function of the
human vermiform appendix. J Theor Biol. 2007). Ceci est largement sujet à débat …
Chez l’enfant, le tissu lymphoïde y est très développé, il involue avec l’âge et se fait
remplacer par du tissu fibreux. En cas de réponse immunitaire locale, le tissu lymphoïde peut
croître et être à la base d’une inflammation locale de la paroi de l’appendice ; c’est
l’appendicite. Cette pathologie est une urgence chirurgicale puisque la paroi distendue et
affaiblie peut à tout moment se rompre et déverser des matières fécales dans l’abdomen.

Une fois par jour, en moyenne, le rectum se remplit de matières fécales. La pénétration des
selles dans le rectum provoque une distension de l’ampoule rectale, ce qui active des cellules
nerveuses baroréceptrices contenues dans les plexus d’Auerbach et de Meissner. Ces plexus
véhiculeront une information sensitive vers le cerveau qui perçoit la « plénitude du rectum » et
la nécessité d’exonérer.

31
Dans la maladie de Hirschprung ou mégacôlon congénital, une mutation entrave la migration des
cellules nerveuses au sein du système nerveux entérique du côlon. Les plexus nerveux d’Auerbach et
de Meissner sont absents du segment distal du côlon, ce qui empêche le péristaltisme colique, ralentit
considérablement le transit intestinal et aboutit à une distension du côlon. Les symptômes cliniques
sont donc une constipation sévère.

40
5.10 Le canal anal

5.10.1 Fonction et notions anatomiques

Le canal anal est typiquement une voie de passage. Le canal anal s’étend de la
jonction ano-rectale à l’anus. C’est un canal long de 3-4 cm dont l’ouverture est
contrôlée par deux sphincters musculaires. Via l’ouverture de ces sphincters, les
résidus alimentaires temporairement stockés dans l’ampoule rectale vont pouvoir être
éliminés : c’est le phénomène de défécation ou d’exonération.
Au niveau de la jonction ano-rectale, nous observerons une transition d’un
épithélium digestif vers un épithélium malpighien non kératinisé.

5.10.2 Structure

Les 4 couches concentriques caractéristiques de la paroi digestive s’étiolent et


laissent place à une autre organisation tissulaire.
La muqueuse du canal anal est macroscopiquement plissée sous la forme de 8 à
10 colonnes anales. La base des colonnes anales est appelée ligne pectinée. La ligne
pectinée est en réalité la jonction ano-rectale. A la base de chaque colonne anale
s’ouvrent de petites cryptes renfermant les glandes muqueuses anales32. Ces glandes
sont tubulaires ramifiées et sécrètent un mucus lubrificateur au moment de
l’exonération.
Au niveau du canal anal, les cryptes de Lieberkuhn (épithélium digestif,
cylindrique simple) précédemment observées dans le rectum disparaissent.
L’épithélium devient pluristratifié pavimenteux et non kératinisé. La transition nette
s’opère au niveau de la ligne pectinée (jonction).
La couche interne circulaire de la musculeuse rectale s’épaissit pour former un
premier sphincter : le sphincter anal interne. Il est sous contrôle du SNA et donc
involontaire. Le sphincter anal externe est quant à lui dérivé des muscles du
plancher pelvien et est constitué de fibres musculaires striées squelettiques, sous
contrôle volontaire.
La peau anale est un épithélium malphighien kératinisé contenant des follicules
pileux et des glandes sudoripares eccrines et faussement apocrines. Ces glandes sont
appelées les glandes périanales.
Deux plexus veineux sont responsables du retour du sang au niveau du canal
anal : les plexus hémorroïdaux interne et externe. Le plexus hémorroïdal interne se
situe au-dessus de la ligne pectinée, dans la continuité de la sous-muqueuse digestive
et le plexus hémorroïdal externe se trouve, lui, à la jonction canal anal-peau anale.

Les hémorroïdes, saillie des veines hémorroïdales hors du canal anal, sont causés par une
dilatation et une hypertrophie des veines hémorroïdales suite à une élévation chronique de la
pression sanguine pelvienne ex : grossesse, constipation.

32
Lors du passage des fèces au travers du sphincter anal, une pression est exercée sur les glandes
muqueuses anales qui mécaniquement déversent leurs sécrétions muqueuses lubrifiantes.

41
5.11 Les organes annexes au tube digestif

Les glandes salivaires (voir 5.2.5), le pancréas et le foie sont des glandes
exocrines annexées au tube digestif déversant des sécrétions impliquées dans la
digestion ou la solubilisation des nutriments. La vésicule biliaire est un organe annexé
au tube digestif dont le rôle est de stocker et concentrer la bile fabriquée par le foie.
A noter que le foie et le pancréas sont des glandes amphicrines c-à-d à la fois
exocrine et endocrine.

5.11.1 Le pancréas exocrine

5.11.1.1 Fonction et notions anatomiques

Le pancréas est un organe allongé formé de 4 parties : la tête, l’isthme, le corps


et la queue. La tête occupe la concavité de l’anse duodénale et la queue se termine
près du hile de la rate. Les unités sécrétoires exocrines du pancréas, les acini
pancréatiques, se déversent via un système canalaire dans le canal pancréatique puis
dans le canal biliaire pour finalement s’ouvrir dans la lumière duodénale au niveau de
l’ampoule de Vater. Les sécrétions pancréatiques ont pour but neutraliser le chyme
acide venant de l’estomac et de continuer la digestion, puisque contenant de
nombreux enzymes protéolytiques (protéases, amylase, lipase, …).

5.11.1.2 Structure histologique

Le pancréas exocrine est une glande tubulo-acineuse composée, à l’intérieur de


laquelle sont dispersées des formations glandulaires endocrines nommées « îlots de
Langerhans ». La partie exocrine occupe 98% du volume du pancréas et la partie
endocrine seulement 2%. Le parenchyme glandulaire est divisé en lobules par de fines
travées conjonctives issues de la capsule fibreuse de l’organe ; ils contiennent des
vaisseaux sanguins et lymphatiques ainsi que des nerfs.
L’histologie du pancréas exocrine est semblable à celle des glandes salivaires
parotides à quelques différences près. Le pancréas exocrine est la partie glandulaire
acineuse composée et comporte donc les acini pancréatiques et les canaux excréteurs.

Les acini pancréatiques sont faits de cellules épithéliales glandulaires de forme


pyramidale possédant toutes les caractéristiques morphologiques des cellules
sécrétrices de protéines : abondance en réticulum endoplasmique granuleux et
appareil de Golgi développé. Les cellules épithéliales acinaires sont unies les unes aux
autres par des complexes jonctionnels comprenant jonctions serrées apicales et
centrées sur une lumière virtuelle. Le contenu enzymatique des vésicules de sécrétion
est fait de protéases (trypsinogène, chymotrypsinogène, carbosylpolypeptidase), de
lipase et d’amylase, de ribonucléases, de cholestérolestérase ; tous ces enzymes sont
déversés dans la lumière de l’acinus par un mécanisme d’exocytose. Les granules
contenant les enzymes pancréatiques sont parfois appelés granules de zymogène et
sont localisés du côté apical de la cellule acinaire.
La stimulation de la sécrétion enzymatique acinaire est sous contrôle du SNA
parasympathique cholinergique (AChR) et hormonal via la cholécystokinine (CCK).

42
A la différence des glandes salivaires, il n’y a pas de cellules myoépithéliales
autour des acini !

Le système canalaire recueille les sécrétions des acini pancréatiques et les convoient
jusqu’à la lumière duodénale. Les incidences de coupe passant par le centre des acini
dévoilent des cellules dites « centro-acineuses » qui appartiennent aux origines des
canaux intercalaires. Les canaux excréteurs forment un système de conduits ramifiés.
Faisant suite aux acini sous le nom de canaux intercalaires, ils deviennent ensuite
intralobulaires puis des canaux interlobulaires qui se réunissent enfin en canaux
collecteurs (canal de Wirsung et canal de Santorini). A l’instar des glandes salivaires,
il n’y a pas de canaux striés ! La paroi des canaux pancréatiques est faite d’un
épithélium simple, pavimenteux au départ puis cubique et prismatique ensuite,
entouré d’une gaine conjonctive d’épaisseur croissante. On trouve des cellules
épithéliales de type caliciformes (sécrétant des mucines) et neuro-endocrines
dispersées dans l’épithélium canalaire. Les cellules épithéliales formant la paroi de
ces canaux élaborent et déversent dans leur lumière une sécrétion aqueuse, riche en
bicarbonates et dépourvue d’enzymes. Les ions bicarbonates HCO3- sont issus de la
décomposition du H2CO3 fabriqué grâce à l’anhydrase carbonique à partir d’H20 et de
CO2. La sécrétion aqueuse et d’ions bicarbonates est sous le contrôle hormonal de la
sécrétine.

L’ensemble, sécrétions acinaires plus sécrétions canalaires, forme le « suc


pancréatique » finalement déversé dans le duodénum. Les sécrétions pancréatiques
issues des cellules acinaires sont sous forme de proenzymes inactives : ils ne seront
rendus actifs qu’au sein de la lumière duodénale, activés de manière pH-dépendant
(pH alcalin) et grâce à l’entérokinase exprimée sur la bordure en brosse des
entérocytes.

43
5.11.2 Foie
5.11.2.1 Fonctions et notions anatomiques

Le foie est un vaste organe aux multiples fonctions de synthèse. Chez l’homme,
c’est la glande la plus volumineuse, constituée de 4 lobes mal définis. Telle une usine,
il utilise des molécules simples en provenance de la circulation portale riche en
nutriments absorbés au niveau du tube digestif, comme matières premières pour
synthétiser de plus grosses molécules.
Toutes les fonctions biochimiques de synthèse sont supportées par une seule et
même cellule appartenant au parenchyme hépatique : l’hépatocyte. Les fonctions
exocrines de l’hépatocyte sont reflétées par la synthèse et l’excrétion de la bile ou de
la bilirubine. En même temps, l’hépatocyte participe à l’élimination ou la conjugaison
des métabolites (ex : médicaments) ou de toxiques (ex : alcool, drogues). Les
fonctions endocrines sont illustrées par sa capacité de synthèse d’hormones comme
l’EPO, la TPO et l’insulin-like growth factor-1 (IGF-1)33. En outre, le foie joue un
rôle essentiel dans le métabolisme protéique : il assure la déamination des acides
aminés, produit l’urée à partir de l’ammoniac sanguin ; il fabrique les acides aminés
non essentiels et synthétise la majorité des protéines plasmatiques : albumine,
transferrine34, protéines de la coagulation telles que le fibrinogène et la prothrombine.
Le foie stocke les vitamines A, D, B12 et du fer. Le foie participe au métabolisme
glucidique par ses capacités de néoglucogénèse, de glycogénèse et de glycogénolyse.
Le foie participe au métabolisme lipidique en synthétisant du cholestérol et stockant
des acides gras. Enfin, le foie participe aux défenses immunitaires grâce à ses
capacités de synthèse de la c-reactive protéine sérique (en réponse à une
inflammation) et les capacités de phagocytose non spécifique de ses macrophages
résidents (les cellules de Kupffer).
Le foie est encapsulé par une capsule contenant des fibres de collagène et des
fibres élastiques, elle est appelée capsule de Glisson.

L’albumine, synthétisée par le foie, constitue 50% des protéines plasmatiques. Elle est
responsable de la pression oncotique du plasma. En cas de déficience de production, lors
d’affections hépatiques, la pression oncotique diminue et entraîne une fuite de l’eau du plasma
vers les tissus périphériques ; c’est l’œdème. En cas d’insuffisance hépatique, la production des
protéines de coagulation peut être compromise et augmenter donc le risque d’hémorragies.

5.11.2.2 Vascularisation et circulations hépatiques (biliaire et sanguine)

Le sang parvient au foie par deux vaisseaux sanguins pénétrant son hile :
- la veine porte (80% du flux) drainant du sang désoxygéné en provenance du tube
digestif (sang riche en nutriments), de la rate (sang riche en hémoglobine et
dérivés issus de l’élimination intrasplénique des G.R.) et du pancréas,
33
La production de l’IGF-1 par le foie est stimulée par l'hormone de croissance (GH). L'IGF-1 stimule
la croissance du cartilage de conjugaison des os longs par action sur la prolifération des chondrocytes
différenciés, entrainant un élargissement du cartilage de conjugaison et l'allongement de l'os. De plus
les IGF favorisent la croissance de tous les tissus, stimulent la synthèse protéique et améliorent
l'absorption de Ca2+.
34
La transferrine est une bêta globuline, de poids moléculaire 76 kDa, synthétisée par le foie; elle est
constituée d'une seule chaîne polypeptidique porteuses de 2 sites de captation du fer. La fonction de la
transferrine est le transport du fer de l'intestin vers les réserves hépatiques et vers les réticulocytes.

44
- l’artère hépatique (20%) drainant du sang riche en oxygène en provenance du
tronc coeliaque et de l’aorte.

La veine porte et l’artère hépatique vont s’arboriser parallèlement à l’intérieur


du parenchyme hépatique et circuler à l’intérieur d’épaisses travées conjonctives
appelées espaces portes. Les veinules portales terminales et les artères portales
terminales génèrent des embranchements latéraux pénétrant la gaine conjonctive de
l’espace porte et s’ouvrant sur les sinusoïdes hépatiques, bordés de travées
d’hépatocytes. Une anastomose va s’opérer entre la veinule et l’artère terminale, qui
chemine sous la forme de capillaire sinusoïde le long des travées hépatocytaires. Les
sinusoïdes sont entourés en tout point par des travées hépatocytaires. Les capillaires
sinusoïdes d’un lobule hépatique convergent vers une vein(ul)e centro-lobulaire. Les
veinules centro-lobulaires de chaque lobule fusionnent et rejoignent les veines sus-
hépatiques pour ensuite rejoindre la veine cave inférieure.

Microcirculation sanguine au niveau du lobule hépatique. Nous avons indiqué les sens de circulation
artérielle (flèche pointillée) et veineuse (flèche continue). Au niveau du parenchyme hépatique, les
artères et veines terminales s’anastomosent et se prolongent par un capillaire sinusoïde. Les capillaires
sinusoïdes convergent vers la veine centro-lobulaire. La circulation biliaire se fait dans les canalicules
et canaux biliaires à contre-sens (en vert).

Une grande quantité de lymphe est produite au niveau du parenchyme


hépatique. Elle est drainée depuis le parenchyme vers les espaces portes, dans le sens

45
opposé au sang. Les vaisseaux lymphatiques intraportaux augmentent
progressivement de taille, fusionnent les uns avec les autres pour émerger au niveau
du hile et drainer la lymphe vers le canal thoracique.
Les hépatocytes produisent de la bile qui sera excrétée par leur face biliaire vers
des espaces intercellulaires entre hépatocytes appelés canalicules biliaires, invisibles
en microscopie optique, Les canalicules se jettent dans des cholangioles qui circulent
entre les travées d’hépatocytes puis dans des ductules terminaux qui rejoindront
l’espace porte en traversant la gaine conjonctive au niveau du passage/canal de
Hering. L’espace porte est donc une triade faite d’une branche terminale de
l’artère hépatique, une branche terminale de la veine porte et d’un canal biliaire.

Simplification de la microcirculation sanguine hépatique. La branche terminale de la veine porte amène


du sang désoxygéné du tube digestif, de la rate et du pancréas. La branche terminale de l’artère
hépatique amène du sang oxygéné. Tous deux cheminent dans les espaces portes. Ils trouent la gaine
conjonctive de l’espace porte pour se jeter dans le parenchyme où artère et veine s’anastomosent en un
capillaire sinusoïde longeant les travées d’hépatocytes. Le sinusoïde débouche sur une veine centro-
lobulaire rejoignant la veine sus-hépatique qui quittera le foie.

Organisation de l’espace porte, des travées d’hépatocytes et de la veine centro-lobulaire. Les flèches
indiquent les sens de circulation : rouge pour le sang oxygéné de l’artère hépatique, bleue pour le sang
veineux, vert pour la circulation biliaire. Notez la triade dans l’espace porte : branche terminale de la v.
porte, branche terminale de l’a. hépatique et c. biliaire.

5.11.2.3 Représentations des unités fonctionnelles hépatiques

46
Pour comprendre l’histologie du foie, il faut comprendre la circulation hépatique
sanguine et biliaire mais aussi l’organisation en unité(s) fonctionnelle(s) hépatique(s).
Plusieurs représentations organisationnelles sont décrites dans la littérature médicale
et peuvent être considérées :

Le lobule hépatique « classique » : unité fonctionnelle centrée sur la veine centro-


lobulaire.
Nous avons vu précédemment que le sang circule depuis l’espace porte périphérique
vers la veine centro-lobulaire. A contrario, la bile générée au niveau du parenchyme
circule à contre-sens et rejoint les espaces portes. Le lobule hépatique est une
représentation d’une unité hexagonale centrée sur la veine centro-lobulaire autour de
laquelle rayonnent les lames hépatocytaires et s’organisent les triades portales à
chaque sommet.
Cette vision est particulièrement facile à comprendre à l’observation de coupes de foie
de porc où la lobulation paraît évidente grâce à la présence d’épaisses cloisons
conjonctives unissant les espaces portes entre eux. Chez l’homme ces cloisons sont
discrètes, quelques fibres collagéniques peuvent y être distinguées.

Le lobule portal : unité fonctionnelle centrée sur l’espace porte.


Cette vision découle du lobule hépatique, où le canal biliaire portal occupe cette fois
la place centrale. Un lobule portal inclut donc les portions des lobules adjacents dont
les canalicules biliaires se jettent dans un même canal biliaire. C’est une unité
triangulaire centrée sur le canal biliaire portal et dont les angles sont occupés par les
veines centro-lobulaires.

L’acinus hépatique de Rappaport: unité fonctionnelle basée sur les gradients


métaboliques entre l’espace porte et sa veine centro-lobulaire, décrite pour la première
fois par Rappaport. Le parenchyme hépatique est irrigué par une branche de l’artère
hépatique amenant du sang oxygéné qui s’appauvrit au fur et à mesure de son avancée
vers la veine centro-lobulaire. La direction du flux artériel va déterminer un gradient
métabolique (teneur en O2, en nutriments ou en métabolites) depuis l’espace péri-
portal vers la zone de drainage ; trois zones seront distinguées virtuellement. La zone
I, péri-portale, bien oxygénée, contient des hépatocytes synthétisant du glycogène et
les protéines plasmatiques35. La zone II est la région intermédiaire spécialisée dans le
métabolisme oxydatif et la néoglucogenèse. La zone III, péri-centro-lobulaire,
contient des hépatocytes riche en estérases impliqués dans les réactions de
conjugaison, de détoxification 36. C’est la région où la concentration en O 2 est la plus
basse et donc qui est susceptible de souffrir en cas d’hypoxémie.

Les anatomo-pathologistes utilisent ces différentes nomenclatures ex : nécrose centro-


lobulaire, nécrose de la zone III acinaire, inflammation péri-portale, stéatose dans la
zone III …

35
La première couche d’hépatocytes péri-portaux est appelée plaque limitante. C’est la première
population d’hépatocytes altérée lors d’une inflammation primitive des espaces portes.
36
Dans le cas d’intoxication médicamenteuse, c’est la zone centro-lobulaire qui est principalement
touchée. Par exemple, lors de l’intoxication au paracétamol, on observe de larges plages de nécrose
centro-lobulaire.

47
Les trois unités fonctionnelles hépatiques : le lobule hépatique, le lobule portal et l’acinus hépatique.

5.11.2.4 Les sinusoïdes hépatiques

Nous avons vu précédemment que dans le parenchyme hépatique les


hépatocytes se collent les uns derrière les autres et se disposent en travées
monocellulaires rayonnant à partir de la veine centro-lobulaire. Les travées
hépatocytaires sont aussi appelées lames hépatocytaires ou travées de Remack,
formant les parois bordant les capillaires sinusoïdes ou sinusoïdes hépatiques. Les
hépatocytes ne sont cependant pas directement en contact avec la lumière capillaire ;
il existe une couche discontinue d’endothélium séparée des hépatocytes par un mince
espace: l’espace péri-sinusoïdal de Disse. L’espace de Disse est le siège des transferts
métaboliques entre hépatocyte et sinusoïde. Cet espace étroit de 0.2 à 0.5 m contient
quelques fibres de collagène I, III (réticuline) et IV. L’endothélium est de type
fenestré, reposant sur une lame basale discontinue et interagissant avec les fibres
collagéniques de l’espace de Disse. L’espace de Disse est en communication avec un
vaisseau lymphatique circulant dans l’espace porte au travers d’un passage appelé
espace de Mall.
Les sinusoïdes véhiculent un mélange de sang oxygéné (< a. hépatique) et de
sang désoxygéné (< v. porte) qui s’appauvrit au fur et à mesure de sa progression vers
la veine centro-lobulaire. Les sinusoïdes hépatiques sont des capillaires fenestrés,
donc bordés de cellules endothéliales. De temps à autre, les sinusoïdes sont aussi
tapissés des macrophages résidents du foie : les cellules de Kupffer.

5.11.2.5 Les hépatocytes

Les hépatocytes sont les cellules fonctionnelles et métaboliquement actives du


foie. Elles assurent toutes les fonctions précédemment citées (voir 5.11.2.1).
Morphologiquement, ce sont des cellules polyédriques hautement polarisées. Etant
donné leur intense activité de synthèse protéique, elles présentent un grand noyau
central à chromatine peu condensée, un appareil de Golgi, du réticulum
endoplasmique granuleux et lisse très développés. Dans leur cytoplasme, on retrouve
aussi d’importantes réserves de glycogène (métabolisme glucidique), des gouttelettes

48
lipidiques (métabolisme lipidique), des peroxysomes37 (métabolisme de ac. gras) et de
nombreuses mitochondries.
Pour rappel, les hépatocytes s’organisent en colonnes monocellulaires. Cette
organisation particulière permet aux hépatocytes d’être en contact avec les sinusoïdes
hépatiques, où les échanges métaboliques auront lieu, on parlera de face sinusoïdale.
Les hépatocytes possèdent aussi une face canaliculaire (=biliaire) et une face
intercellulaire (=hépatocytaire). Les faces sinusoïdale, canaliculaire et intercellulaire
représentent respectivement 70%, 15% et 15% de la surface membranaire de
l’hépatocyte.
La face sinusoïdale de l’hépatocyte est séparée du sinusoïde par l’espace de
Disse. La membrane plasmique de l’hépatocyte face sinusoïdale est surmontée de
microvillosités, permettant d’augmenter la surface d’échange. A la base des
microvillosités, on peut identifier des puits à manteau preuve de phénomènes
d’endocytose.
La face canaliculaire de l’hépatocyte est celle par laquelle la bile est sécrétée.
Les faces canaliculaires de plusieurs hépatocytes adjacents ménagent une lumière
formant le canalicule biliaire s’écoulant entre les travées hépatocytaires. A la face
canaliculaire, les hépatocytes sont unis au moyen de jonctions serrées et présentent
des microvillosités irrégulières. Les canalicules ont un diamètre de 0.5 à 2.5 m.
Les faces intercellulaires sont celles qui se trouvent entre deux hépatocytes
adjacents et qui ne sont ni sinusoïdales ni canaliculaires. Les membranes cellulaires se
font face et interagissent l’une avec l’autre au moyen de jonctions communicantes.
5.11.2.6 Autres types cellulaires du parenchyme hépatique

La cellule ovale ou cellule souche. Une population de cellules indifférenciées à


propriété régénérative existe au sein du parenchyme hépatique. Leur aspect
morphologique est à l’origine de leur nom de « cellules ovales », elles sont localisées
à proximité du canal de Herring. Ces cellules sont capables d’autorenouvellement et
de différenciation en hépatocytes ou en cellules épithéliales de canaux biliaires. Elles
peuvent être identifiées par leur expression des protéines Epcam et pan-cytokératines.
A noter que ces cellules ne confèrent qu’une capacité de régénération limitée au foie !

La cellule de Kupffer. Les cellules de Kupffer sont des phagocytes spécialisés du


foie ; elles sont considérées comme les macrophages résidents du foie. Elles sont
localisées le long des sinusoïdes hépatiques. Leur rôle est de phagocyter tout matériel
exogène ayant pénétré la circulation hépatique ; elles peuvent aussi détruire les
hématies sénescentes.

Les cellules de Kupffer sont impliquées dans les dommages hépatiques liés à l’alcoolisme. Lors
d’expositions chroniques à l’alcool, elles se mettent à sécréter de cytokines pro-inflammatoires
(IL-1, TNF-) et des facteurs de croissance (TGF-) capables d’activer de manière paracrine les
cellules stellaires (de Ito) hépatiques.

37
Les peroxysomes sont ubiquitaires chez les eukaryotes. Ce sont des organites intracytoplasmiques
limités par une membrane. Ils ont été découvert en 1965 par un belge Christian de Duve (UCL, Prix
Nobel de Médecine, 1974 avec Albert Claude et Georges Palade). Bien que ressemblant a des
lysosomes, les peroxysomes ne sont pas formés dans l’appareil de Golgi mais par auto-réplication. Ils
ont un diamètre de 0.2 – 1 µm et sont le plus abondant dans le foie. Ils permettent le catabolisme des
acides gras et la détoxification de substances telles que le peroxyde d’hydrogène grâce a des catalases.

49
La cellule de Ito. Les cellules de Ito sont appelées cellules étoilées ou stellaires de
par leur aspect morphologique. Elles se localisent dans les espaces de Disse où leur
rôle physiologique se limite à stocker la Vitamine A sous forme estérifiée. Il n’est pas
étonnant de retrouver dès lors des gouttelettes lipidiques dans leur cytoplasme.

En réponse aux cytokines relarguées par les cellules de Kupffer, les cellules de Ito se
transforment en cellules productrices de matrice extracellulaire : elles vont sécréter dans les
espaces de Disse et les espaces péri-portaux des fibres de collagène type I, de laminine, des
protéoglycans, aboutissant à une fibrose hépatique typique d’une cirrhose. En même temps,
elles se changent en un phénotype proche du myofibroblaste comprimant la lumière
sinusoïdal et augmentant la résistance vasculaire intrahépatique. La rigidification et la
compression sinusoïdales sont à l’origine de la résistance vasculaire intrahépatique et de
l’hypertension portale observés au cours de la cirrhose.

A. Foie normal, B. Cloisons fibreuses d’un foie cirrhotique (coloration au Trichrome).


Adapté de Nicaise et al., Hepatology, 2008.

Le
métabolisme de l’éthanol :

L'éthanol (CH3-CH2-OH) est la substance « active » des boissons alcooliséees que


nous consommons. Après consommation, il est rapidement absorbé au niveau de
l’estomac et de l’intestin grêle. Il est transporté par la circulation portale vers le foie
où il est métabolisé par les hépatocytes en acétaldéhyde par une première enzyme,
l’alcool déshydrogénase ou ADH. C’est une enzyme rapide mais qui est rapidement
saturée. L’acétaldéhyde généré sera métabolisé au niveau des mitochondries
hépatiques par l’acétaldéhyde déshydrogénase ou ALDH en acétyl-coenzyme A, une
forme activée de l’acétate. L’acétaldéhyde est en lui-même bien plus toxique que
l'éthanol, et est responsable de la plupart des effets cliniques dus à l'alcool, comme la
gueule de bois. L’acétaldéhyde provoque des altérations mitochondriales, une
déstabilisation du cytosquelette, des modifications protéiques aboutissant à des lésions
hépatocytaires.
Au cours de l’alcoolisme chronique, on observe des accumulations de gouttelettes
lipidiques intracytoplasmiques dans les hépatocytes. Ces gouttelettes proviennent du
métabolisme et du stockage d’acides gras générés à partir de l’acétyl-coenzyme A. On
parle de stéatose alcoolique.

Le foie gras est une application alimentaire de la propriété des hépatocytes à stocker les
triglycérides. Le foie gras est en réalité un foie « malade » atteint de stéatose (infiltration
graisseuse). Au cours des gavages successifs chez le canard ou l’oie, les hépatocytes métabolisent
la nourriture et se chargent en énergie, d’abord sous forme de réserves de glycogène puis sous
forme de gouttelettes lipidiques.
50
Une deuxième voie de métabolisation de l’éthanol passe par le système microsomal
d’oxydation de l’éthanol (MEOS – microsomal ethanol oxidative system) utilisant le
cytochrome P450 isoforme 2E1 comme enzyme oxydative. Cette voie est plus lente
mais non saturable. Au niveau du réticulum endoplasmique lisse, l’éthanol est
également dégradé en acétaldéhyde sous l’action du CYP2E1, mais en générant des
radicaux libres oxygénés. Ces radicaux libres endommagent les protéines
intracellulaires et les membranes, ce qui altère les fonctions hépatocytaires.

Près de 50% des Asiatiques présentent un variant génique (polymorphisme génétique) au niveau
du gène ALDH ce qui entraîne un déficit de l’enzyme ou une enzyme moins active. En cas
d’alcoolisation, les individus porteurs du variant sont incapables de métaboliser l’acétaldéhyde en
acétate et vont donc montrer rapidement des signes d'intolérance.

Le métabolisme de la bile :

La bile est un produit de sécrétion de l’hépatocyte collecté au niveau des canalicules


biliaires et excrété via les voies biliaires intra- et extra-hépatiques. La bile possède 3
fonctions principales :
- excrétion de cholestérol, de phospholipides, des sels biliaires, de la bilirubine
conjuguée et d’électrolytes (+ eau)
- les sels biliaires contribuent à la solubilisation et l’absorption des graisses au
niveau de l’intestin grêle
- excrétion des toxiques ou des métaux lourds après métabolisation ou conjugaison

Le transport de la bile ou d’autres toxiques de l’hépatocyte vers la lumière biliaire est


assurée par plusieurs transporteurs dépendant de l’ATP exprimés à la membrane
plasmique face canaliculaire. Ces transporteurs à ATP appartiennent à la famille des
transporteurs ABC caractérisés par des domaines de liaison à l’ATP hautement
conservés, les ATP binding cassettes. Historiquement, le 1er transporteur ABC à avoir
été découvert est la protéine issue du gène mdr pour multidrug resistance protein.
Il existe plusieurs transporteurs type ABC au niveau de l’hépatocyte :
1) MDR1/2/3 responsables du transport du cholestérol et des phospholipides
2) MOAT (multispecific organic anionic transporter), responsable du transport
de la bilirubine glucurono-conjuguée
3) BAT (bile acids transporter), responsable du transport des acides/sels biliaires

Les transporteurs mdr sont fortement exprimés par les cellules cancéreuses qui les utilisent pour
« pomper » les médicaments hors de la cellule. Ceci est un de leurs moyens pour résister aux
chimiothérapies anticancéreuses.

A la face canaliculaire, l’hépatocyte exprime aussi des ecto-enzymes (nucléotidases,


peptidases, ATPases) et un échangeur ionique HCO3-/Cl- rendant les sécrétions
biliaires alcalines.

Le métabolisme de la bilirubine :

51
La bilirubine est un produit du catabolisme de l’hème et provient pour sa majeure
fraction de la dégradation intrasplénique des G.R. La bilirubine est libérée par les
macrophages spléniques où elle se lie à l’albumine et est transportée vers le foie par la
circulation portale. Les hépatocytes captent les complexes bilirubine-albumine et
détachent la bilirubine de sa protéine transport. A l’intérieur du cytoplasme
hépatocytaire, la bilirubine se complexe à la ligandine qui l’amène dans le réticulum
endoplasmique lisse. La bilirubine est alors glucurono-conjuguée grâce à la
glucuronyl-transférase ; elle sera excrétée vers le système canalaire biliaire au travers
du transporteur MOAT.

Notions cliniques :
La bilirubine libre est la bilirubine non complexée, donc ni liée à l’albumine ni
glucurono-conjuguée. La bilirubine est liposoluble et toxique en grande quantité. Elle
peut pénétrer le cerveau au travers de la barrière hémato-encéphalique (liposolubilité)
et provoquer des lésions neurologiques irréversibles. Une augmentation du taux
plasmatique de bilirubine libre témoigne d’une production excessive de bilirubine par
exemple dans le cas d’anémie hémolytique.

La bilirubine conjuguée, elle, est hydrosoluble. C’est la forme d’élimination de la


bilirubine. Une augmentation du taux plasmatique de bilirubine conjuguée signifie
une anomalie siégeant en aval du système de glucurono-conjugaison, observé par
exemple en cas d’obstruction des voies biliaires.

Le cycle entéro-hépatique de la bilirubine :


La bilirubine glucurono-conjuguée est excrétée via la bile dans le duodénum. Elle
reste intacte jusqu’à atteindre l’iléon terminal où elle sera clivée par les bactéries de la
flore commensale qui généreront de l’urobilinogène. La majeure partie de
l’urobilinogène est excrétée par les fèces mais une petite partie (20%) est réabsorbée
par l’intestin et retourne vers le foie. Le foie le retransforme et le ré-excrète dans le
système biliaire; c’est le cycle entéro-hépatique. Une autre partie de l’urobilinogène
atteint le rein où celui-ci est capable d’oxyder l’urobilinogène en urobiline qui sera
éliminée dans les urines et donnera la couleur jaune caractéristique des urines.

52
5.11.2.7 Les voies biliaires

Le système collecteur de la bile comprend trois niveaux :

1) les voies biliaires intrahépatiques :


- les canalicules biliaires circulant entre hépatocytes rejoignent des cholangioles
puis des ductules terminaux passant au travers des canaux de Herring pour se jeter
dans les canaux biliaires intraportaux;
- les canaux biliaires intraportaux fusionnent en canaux biliaires intralobulaires (ou
trabéculaires) entourés d’un riche plexus veineux permettant la réabsorption de
solutés, les cellules des canaux biliaires assurent également la sécrétion de
substances telles que la céruloplasmine ou des bicarbonates ;

D’un point de vue histologique, les voies biliaires intrahépatiques sont tapissées d’un
épithélium cubo-cylindrique simple. Cet épithélium est inclus et soutenu par le tissu
conjonctif dense de l’espace porte. Le calibre des canaux biliaires augmente au fur et
mesure que l’on se rapproche du hile.

2) les voies biliaires extrahépatiques : les canaux biliaires intrahépatique


fusionnent en canal hépatique commun au niveau du hile du foie. Le canal
hépatique commun fusionne avec le canal cystique pour former le canal
cholédoque. Le canal cholédoque véhicule la bile en y ajoutant du mucus
venant des glandes muqueuses siégeant dans le chorion des voies biliaires
extra-hépatiques. La contraction ou le relâchement du sphincter d’Oddi permet
la régulation du passage de la bile dans l’intestin.

3) la vésicule biliaire, lieu de stockage et de concentration de la bile

D’un point de vue histologique, les voies biliaires extrahépatiques et la vésicule


biliaire sont tapissées d’un épithélium cylindrique simple dont la majorité des cellules
épithéliales possèdent des microvillosités et quelques cellules sont de type caliciforme
à sécrétion muqueuse. L’épithélium repose sur un chorion riche en fibres conjonctivo-
élastiques et contenant quelques cellules musculaires lisses38.

A l’extrémité du canal cholédoque, près de l’ampoule de Vater, un épaississement et


une circularisation des fibres musculaires lisses survient pour former le sphincter
d’Oddi. Le sphincter d’Oddi contrôle le flux biliaire vers le duodénum. Fermé, il
dévie naturellement la bile vers la vésicule biliaire et en cas d’ouverture (relâchement
des fibres musculaires lisses provoqué par le SNA), il permet l’écoulement de la bile
vers le duodénum.

38
L’épithélium et le chorion forme une première tunique appelée « muqueuse ». Les quelques cellules
musculaires lisses forment une deuxième tunique appelée « musculeuse ». Le tout est enveloppé d’une
troisième tunique conjonctive appelée « séreuse ». Cette organisation est plus flagrante au niveau de la
dilatation des voies biliaires : la vésicule biliaire.

53
5.11.3 Vésicule biliaire
5.11.3.1 Fonctions

La vésicule biliaire stocke, concentre et libère la bile. La bile primaire y est


concentrée entre 5 à 20 fois par réabsorption d’eau et d‘électrolytes. La vidange de la
vésicule biliaire met en jeu la contraction de la musculeuse propre et l’ouverture du
sphincter d’Oddi. Cette vidange est sous le contrôle de 2 systèmes : le SNA
parasympathique et l’action humorale des cellules du système neuro-endocrinien
diffus synthétisant la cholécystokinine (étymologiquement, « mouvements de la
vésicule biliaire »).
5.11.3.2 Structure histologique

La vésicule biliaire peut être vue comme un renflement sacculaire des voies
biliaires extrahépatiques. La paroi de la vésicule biliaire est relativement proche
histologiquement de la paroi digestive si ce n’est l’absence de musculaire muqueuse
et de sous-muqueuse. La paroi est ainsi constituée de 3 tuniques :

La muqueuse. Il s’agit d’un épithélium cylindrique simple reposant sur un chorion


fait de tissu conjonctif lâche. Les cellules épithéliales présentent des microvillosités
apicales, des interdigitations et des complexes de jonctions ainsi que de nombreuses
vésicules apicales. L’espace intercellulaire est élargi à la base. Les membranes des
espaces intercellulaires latéraux sont riches en Na+/K+ ATPase, permettant de pomper
les ions Na+ et d’attirer l’eau par gradient osmotique (cf mécanismes de réabsorption
des ions au niveau des tubules rénaux). Les jonctions épithéliales sont surtout de type
serrées ce qui permet de maintenir un gradient osmotique nécessaire à la réabsorption
d’eau. L'aquaporine-1 est fortement exprimée à la membrane plasmique apicale des
cellules épithéliales. Dans le chorion circulent de vastes plexus vasculaires récupérant
les mouvements d’eau et d’électrolytes. La muqueuse s’invagine parfois en
profondeur et forme les replis ou sinus de Rokitansky-Aschoff, ce qui augmente les
capacités de réabsorption. Dans la région du col de la vésicule biliaire, le chorion
renferme des glandes tubulo-acineuses de type muqueux.
Il n’est pas rare de trouver du D-ALT contenant lymphocytes et plasmocytes
responsables d’une sécrétion d’IgA dans la lumière vésicale.

La musculeuse. La musculeuse est composée de fibres musculaires lisses se


disposant vaguement en deux couches.

L’adventice ou séreuse. Selon la face de la vésicule biliaire, une tunique conjonctive


entoure la musculeuse et la muqueuse et présente ou non des cellules mésothéliales.

La bile définitive est un liquide biologique épais jaune-verdâtre alcalin (pH compris entre 7,6 et
8,62) qui favorise la solubilisation des lipides. La vésicule biliaire sécrète 20 à 50 ml de bile par
jour dans le duodénum. La bile contient des sels biliaires, de la bilirubine (glucurono-conjuguée)
et des électrolytes. Les sels biliaires permettent l’émulsification des graisses sous forme de
micelles permettant l’accès à la lipase pancréatique. La bile assure l’élimination de l'excès de
cholestérol et l'excrétion de déchets métaboliques comme la bilirubine. Elle assure une fonction
de détoxication : les hépatocytes dégradent certains médicaments, l'alcool, des drogues, dont les
dérivés se retrouveront, via la bile, dans les fèces.

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