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COURS DU DROIT DES

PROCEDURES COLLECTIVES

Extraits du cours du Dr Komi Aimé MESSAN de


l’Université de Kara
AVERTISSEMENTS (suite et fin)

La diffusion d’un cours polycopié ne remplace ni le cours magistral, ni la


séance de travaux dirigés. Ce n’est qu’en assistant aux cours que l’étudiant
verra la matière s’animer et qu’il pourra comprendre certaines notions
élémentaires grâce aux exemples qui y seront développés ; ce n’est qu’en
participant aux TD que l’étudiant maîtrisera la technique du commentaire
d’arrêt, de cas pratique et de dissertation, et approfondira les thèmes abordés
dans l’amphithéâtre.

La diffusion d’un cours polycopié ne remplace évidemment pas non plus le


travail personnel. Ce cours polycopié n’est qu’un squelette qui demande à être
enrichi par des connaissances personnelles et des lectures solitaires. A ce
titre, les références bibliographiques contenues dans ce document doivent,
naturellement, être lues.

Enfin, il serait vain d’attendre de ce cours une vérité absolue. Il n’est qu’une
présentation nécessairement partiale du droit des procédures collectives. Il
est dès lors possible que certains développements heurtent d’autres
enseignements que recevront les étudiants. Cela doit les encourager à exercer
leur esprit critique et à se forger leur propre opinion : le but d’un cours
magistral n’est pas d’abreuver les étudiants de connaissances ni de leur
donner du « prêt à penser », mais de leur apprendre à réfléchir et à
développer leur propre analyse.

Il n’y a en droit aucune vérité ; il n’y a en droit que des arguments. Le bon
juriste est celui qui écoute et sait convaincre. L’art de la conviction suppose
toutefois la maîtrise de certaines notions fondamentales partagées par la
communauté des juristes. Les acquérir est l’objet de ce cours.

L’intelligence est une faculté humaine.

BON TRAVAIL !
Introduction

1. Contexte. Ce cours du« droit des entreprises en difficulté », souvent intitulé cours
du « droit des procédurescollectives »ou autrefois du « droit des faillites »regroupe
l’ensemble des dispositions qui régissent les défaillances d’entreprises. Les
expressions « droit des procédures collectives » et « droit des entreprises en
difficulté »sont équivalentes1 et se substituent à celle plus connue et plus
traditionnelle de « droit des faillites » qui puise, au contraire, ses origines dans le
droit romain le plus ancien.

Cette évolution de la terminologie révèle, en réalité, un profond bouleversement de


cette matière qui primitivement constituait le droit du règlement des dettes d’un
commerçant et qui, aujourd’hui, est devenu un droit économique destiné à régler
les difficultés des entreprises en état de cessation des paiements ou simplement,
qui rencontrent des difficultés financières.

Le droit des faillites, qui a toujours existé en droit français et rendu applicable dans
les Etats francophones d’Afrique, s’est construit par opposition à la déconfiture
civile. En effet, lorsqu’un commerçant ne paie pas ses dettes, il est mis en place une
procédure judiciaire de règlement collectif et égalitaire des créanciers. Au contraire,
en droit civil, si un particulier ne paie pas son créancier, celui-ci peut exercer des
poursuites en paiement, voire des procédures civiles d’exécution, mais « le paiement
demeure le prix de la course ». A la faillite, procédure organisée, s’oppose donc la
déconfiture civile, système de poursuite individuelle laissée à la diligence de chaque
créancier.

Le droit des procédures collectives se caractérise aujourd’hui par la volonté de venir


en aide aux entreprises qui connaissent des difficultés pour assurer le paiement de
leurs dettes. C’est donc l’émergence d’un droit de l’entreprise en difficulté que
consacre le législateur OHADA à travers l’Acte uniforme portant organisation des
procédures collectives d’apurement du passif, inspiré essentiellement par la loi
française du 25 janvier 19852, adoptée après la faillite des grands groupes comme
Creusot-Loire.

La réforme actuelle, sans reproduire exactement les textes qui l’ont inspirée, en a
repris la philosophie et les traits essentiels. Ses objectifs sont largement orientés
vers la prévention et le traitement des difficultés de l’entreprise dans le but
d’assurer sa sauvegarde et maintenir l’emploi, le désintéressement de ses créanciers
et dans une large mesure la punition de certaines de ses parties prenantes qui se
seraient rendues coupables des agissements jugés contraires à ces différents
objectifs.

1 La première (« Droit des procédures collectives ») désigne l’aspect procédural et la seconde (« Droit des
entreprises en difficulté ») met l’accent sur l’aspect substantiel. V. dans ce sens A. BOLZE, Les
procédures collectives et sûretés, éd. Dyna’sup, 2006, p.158.
2 La loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des

entreprises.

1
« Il n’est pas étonnant que le droit se préoccupe de la santé de l’entreprise et, s’il y a
lieu, propose des solutions spécifiques à la prévention ou au traitement de ses
difficultés »3. Il en est ainsi parce que la notion d’entreprise fait référence à « des
réalités économiques, juridiques, politiques et sociales, nationales ou internationales,
et bien que n’étant pas en soi un sujet de droit, elle en est un acteur central utilisateur
de ressources naturelles et de capitaux, créateur de richesse et pourvoyeur d’emplois,
et faisant désormais partie prenante à l’organisation de la société
contemporaine »4.L’entreprise est une entité économique et sociale qu’il faut
préserver.

La notion d’entreprise est différemment appréhendée selon « le domaine considéré et


la méthode scientifique qui s’y attache »5.D’un point de vue microéconomique, la
notion d’entreprise fait, lacto sensu, référence à « une organisation économique ou
une activité de production, de transformation ou de distribution de biens grâce à un
ensemble de moyens en hommes, matériels, finance, relations et un centre d’intérêt
pour le/les créateur(s), les employés, les fournisseurs, les clients, les bailleurs de
fonds ; l’Etat et les citoyens en bénéficiant directement ou indirectement »6. Elle est,
en effet, une structure économique qui regroupe des moyens humains, matériels,
immatériels et financiers, qui sont combinés de manière organisée pour fournir des
biens ou des services à des clients dans un environnement concurrentiel ou non
(marché ou monopole) avec un objectif de rentabilité.

Les entreprises sont des espèces commerciales, des individus du monde des affaires
qui, comme tout être vivant, naissent, vivent et meurent. Ellen’est pas n’importe
quelle espèce. L’entreprise est, comme l’écrit M. Octave GELINIER, «un système
complexe (hommes, techniques, etc.), doté d’une personnalité morale qui lui permet de
s’engager par contrat, doté d’un patrimoine qui gage sa parole, sans pouvoir de
contraindre le client à acheter car il y a concurrence, capable, pour répondre aux
besoins humains, de produire des richesses (biens et services) plus qu’il n’en
consomme, de s’adapter aux changements de l’environnement (notamment
concurrentiel), de survivre et de se développer, autonome et responsable, avec
possibilité de disparition »7.Il n’est donc pas étonnant que le droit se préoccupe de la

3 Dominique VIDAL, Droit des entreprises en difficulté : Prévention– Conciliation– Sauvegarde–


Redressement– Liquidation– Sanction, 3e éd., Gualino, Lextenso éditions, 2010, n° 1, p. 15.
4 Dominique VIDAL, Droit des entreprises en difficulté : Prévention – Conciliation –Sauvegarde –

Redressement – Liquidation – Sanction, op. cit., n° 1, p. 15.


5 Voir Dominique VIDAL, Droit des entreprises en difficulté : Prévention – Conciliation –Sauvegarde –

Redressement – Liquidation – Sanction, op. cit., 2010, n° 43, p. 40. Selon l’auteur, « le droit fiscal y voit
un centre de coûts et de profits, le droit de la concurrence un cadre de décisions stratégiques, le droit du
travail un espace de pouvoir, le sociologue un lieu de vie, etc. ».
6 Pierre DECHEIX et Marie-Laure CASENAVE DECHEIX, « Colloque de l’institut international de Droit

d’expression française (Libreville, Gabon, mai 1990) »,in Revue internationale de droit comparé, 1991, p.
682 ; [En ligne] : http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-
3337_1991_num_43_3_2298. Consulté le 12/10/2010.
7 Octave GELINIER, « Entreprises patrimoniales et éthique », Académie des Sciences morales et

politiques, Séance du lundi 31 mai 1999 ; [En ligne] : http://www.asmp.fr. Consulté le 03/02/2012.
Selon l’INSEE, « L’entreprise est une entité économique, juridiquement autonome, organisée pour
produire des biens et des services pour le marché. Sont distinguées :
- l’entreprise individuelle (personne physique) qui ne possède pas de personnalité juridique
distincte de celle de la personne de son exploitant ;
- l’entreprise sociétaire, Société anonyme (SA) et Société à responsabilité limitée (SARL) ».

2
santé de l’entreprise et, s’il y a lieu, propose des solutions spécifiques à la
prévention ou au traitement de ses difficultés.

Il y a, certes, une personne ou un groupe de personnes, physique ou morale,


publique ou privée à la base de la création d’une entreprise. Mais dès qu’elle naît,
l’entreprise n’appartient plus dans l’absolu à son ou ses initiateur(s). Les associés
ou actionnaires initiaux ou postérieurs, l’Etat à travers ses administrations
déconcentrées ou décentralisées, le fisc, les salariés, les banques, les sociétés
d’assurances, les fournisseurs, etc. ont des intérêts bien fixés dans la vie de
l’entreprise et, par suite, dans le sort auquel la conduit sa gestion. S’agissant de
l’intérêt que suscite au droit fiscal la vie des entreprises, RIPERT et ROBLOT ont pu
écrire que : « L’importance de l’activité commerciale des sociétés et le nombre d’actes
juridiques auquel donnent lieu la constitution et le fonctionnement des groupements
ont incité le droit fiscal à trouver dans les sociétés de nombreuses sources de
recette »8. C’est pourquoi il a été établi un cadre juridique pour l’expression de ces
intérêts et un mécanisme d’arbitrage de leur affrontement.

Des matières particulières fixent, sur des fondements précis, le cadre juridique
d’expression des intérêts de tous ordres au sein de l’entreprise. Aussi, le droit du
travail et celui de la sécurité sociale règlent-ils les rapports sociaux. La création des
sociétés commerciales, leur fonctionnement, leur transformation, fusion ou
disparition ainsi que les relations des différents acteurs au sein de la société
sontréglés par l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du
groupement d’intérêt économique ; les relations commerciales étant soutenues par
l’Acte uniforme relatif au droit commercial général.

Beaucoup plus particulière et potentiellement explosive est l’expression des


prétentions que suscite une entreprise en difficulté. Seul, le débiteur devra faire
face à l’ardeur de chacun de ses créanciers à recouvrer sa créance et se mettre à
l’abri des conséquences désastreuses d’une insolvabilité de son partenaire. Du
coup, entre les créanciers eux-mêmes, c’est la course au paiement, le plus
rapidement possible et à l’aide de méthodes peu orthodoxes. Inégalité, iniquité et
injustice caractériseraient le comportement de chacun de ces créanciers en vue de
la satisfaction des intérêts propres. A terme, cela ruinerait toute perspective de
recouvrement et précipiterait plus rapidement et gravement l’entreprise dans le
gouffre. On a alors pensé à mieux organiser le traitement de l’entreprise en difficulté
et à dégager des règles propres appelées à conduire cette organisation.

Cette définition retenue par l’INSEE dans le Répertoire Sirène, ne tient pas compte de l’aspect de
l’entreprise qui est relatif à son environnement économique et aux différentes interactions existantes.
L’insuffisance dont souffre cette définition de l’INSEE est relevée dans « L’entreprise et son
environnement économique » ; [En ligne] :
http://profr.deboeck.com/resource/extra/9782804156503/COGEEN_-_Ch1.pdf. Consulté le
03/03/2012. Caractérisée principalement par sa structure, sa politique générale et ses différentes
fonctions, l’entreprise se définit donc dans toute sa complexité comme un système ouvert sur son
environnement.
8 Georges RIPERT et René ROBLOT, Traité de droit commercial, Tome 1-Volume 2, les sociétés

commerciale ; L.G.D.J., 18e éd., Paris 2002, p. 5, n° 1056-8.

3
2. Concepts et domaine. Les procédures collectives constituent, en substance, le
traitement prescrit aux entreprises en difficulté. Ce sont l’ensemble des
mécanismes juridiques permettant de régler les difficultés financières et
économiques des entreprises. Ces procédures sont dites collectives en ce qu’elles
conduisent à réunir les créanciers en une masse, d’une part, et en ce qu’elles visent
à satisfaire collectivement les intérêts mis en péril par les difficultés de l’entreprise
débitrice, d’autre part. Au terme de la législation réformée en vigueur aujourd’hui, il
existe quatre types de procédures collectives (art. 1er, alinéa 1er, de l’AUPC) : les
procédures collectives préventives de conciliation etde règlement préventif, et les
procédures curatives de redressement judiciaire et de liquidation des biens. Les
buts poursuivis par le législateur à travers ces procédures sont : la préservation des
activités économiques et des niveaux d’emplois des entreprises débitrices, le
redressement rapide des entreprises viables et de liquidation de celles non viables
dans des conditions propres à maximiser la valeur des actifs des débiteurs pour
augmenter les montants recouvrés par les créanciers et d’établir un ordre précis de
paiement des créances garanties et non garanties (art. 1er, al. 1er, de l’AUPC).

La conciliation est « une procédure préventive, consensuelle et confidentielle, destinée


à éviter la cessation des paiements de l’entreprise débitrice afin d’effectuer, en tout et
partie, sa restructuration financière ou opérationnelle pour la sauvegarder ». Cette
restructuration s’effectue par le biais de négociations privées et de la conclusion
d’un accord de conciliation négocié entre le débiteur et ses créanciers ou, au moins
ses principaux créanciers, grâce à l’appui d’un tiers neutre, impartial et
indépendant appelé conciliateur (art. 2, al. 1er, de l’AUPC). Le règlement préventif
est « une procédure destinée à éviter la cessation des paiements de l’entreprise
débitrice et à permettre l’apurement de son passif au moyen d’un concordat préventif
»9 (art. 2, al. 2e, de l’AUPC). Le redressement judiciaire serait, quant à lui, « une
procédure collective destinée au sauvetage de l’entreprise débitrice en cessation des
paiements mais dont la situation n’est pas irrémédiablement compromise, et à
l’apurement de son passif au moyen d’un concordat de redressement »(art. 2, al. 3e,
de l’AUPC). Enfin, la liquidation des biens est « une procédure collective destinée à la
réalisation de l’actif de l’entreprise débitrice en cessation des paiements dont la
situation est irrémédiablement compromise pour apurer son passif » (art. 2, 4e, de
l’AUPC). L’art. 1-2 de l’AUPC dispose que « Sans préjudice de l’application des
procédures visées à l’art. 1er, toute entreprise a la faculté de demander, avant la
cessation de ses paiements, l’ouverture d’une procédure de médiation selon les
dispositions légales de l’Etat partie concerné ».

A l’instar du droit français, l’ensemble des procédures collectives d’apurement du


passif et, peut-on dire, le droit des entreprises en difficulté a un versant
nécessairement judiciaire. L’instance judiciaire est placée au cœur du règlement

9 Si l’on considère la cessation des paiements comme le critère de mise en route des procédures
collectives, le règlement préventif n’en constituerait pas un, stricto sensu. Il intervient en l’absence
même de la cessation des paiements. Dans ce sens, voy. Filiga Michel SAWADOGO, OHADA : Droit des
entreprises en difficulté, coll. Droit uniforme africain, Juriscope, Bruxelles, 2002, p. 2, n° 3. Mais
prenant en considération la finalité de toute procédure collective qui consiste en l’apurement du passif
d’un débiteur, on peut, avec raison, intégrer le règlement préventif dans les procédures collectives.

4
des difficultés de l’entreprise. Et à l’intérieur du système judiciaire, le Président du
tribunal compétent constitue le moteur de toutes les procédures. Ce n’est pourtant
pas qu’un règlement amiable serait exclu. Il est parfaitement envisageable que
débiteur et créanciers s’accordent pour rechercher et trouver une solution amiable
aux difficultés de l’entreprise. C’est même la réponse idéale. Mais il est souvent
difficile de réaliser un pareil accord compte tenu du caractère contradictoire des
intérêts en présence.

Les procédures collectives portent sur les personnes physiques ou morales


commerçantes, les personnes morales de droit privé non commerçantes, les
entreprises publiques ayant la forme d’une personne morale de droit privé. Sont
exclus, en principe, du bénéfice des procédures collectives : les acteurs du secteur
informel ; les sociétés de fait, les sociétés créées de fait (l’immatriculation au
registre du commerce faisant défaut pour ces types de société) ainsi que les
personnes morales de droit public.

3. Histoire du droit. Les commerçants ont très tôt compris que le recours
individuel à l’encontre de l’un des leurs en difficulté était sans issue et impertinent.
Certes, celui qui avait failli à ses engagements était considéré comme un fraudeur
et devait subir une série de déchéance organisée sous la dénomination de la « faillite
». Particulièrement, on brisait symboliquement son étal, son banc commercial, d’où
la « banqueroute », « bancarotta ». Mais s’agissant de la liquidation du patrimoine du
failli, elle était organisée par l’ensemble des créanciers qui votait un accord de
règlement dénommé concordat. Celui-ci est une convention collective signée avec le
débiteur portant sur le règlement à moindre frais de leurs créances en évitant la
lourdeur d’une procédure de liquidation de biens. Une procédure collective de la
vente des biens du débiteur à l’initiative et au profit de ses créanciers pouvait être
ainsi organisée.

La finalité essentielle de cette procédure était le paiement des créanciers. Le


principe, l’égalité de traitement de tous les créanciers d’autant que la procédure prît
très tôt un caractère corporatiste. L’ordonnance de Colbert de 1673 a, pour la
première fois en France, organisé les faillites et banqueroutes. Cette ordonnance a
procédé à l’unification de la matière et réglementé, par exemple, les nullités pour
fraude de la période suspecte, les conditions d’ouverture de la faillite. Elle a édicté
de nombreuses sanctions de nature personnelle et pénale dont la contrainte par
corps et même la peine capitale.

Le droit des faillites, qui a donc toujours existé en droit dans les Etats francophones
d’Afrique, s’est construit par opposition à la déconfiture civile. En effet, lorsqu’un
commerçant ne paie pas ses dettes, est mise en place une procédure judiciaire de
règlement collectif et égalitaire des créanciers. Au contraire, en droit civil, si un
particulier ne paie pas son créancier, celui-ci peut exercer des poursuites en
paiement, voire des procédures civiles d’exécution, mais « le paiement demeure le
prix de la course ». A la faillite, procédure organisée, s’oppose donc la déconfiture
civile, système de poursuite individuelle laissée à la diligence de chaque créancier.

5
Les excès nés du libre traitement des difficultés des entreprises par les
commerçants eux-mêmes ont conduit le législateur à intervenir progressivement
dans la matière de sorte à en faire une discipline particulière. Du droit de la faillite,
le législateur français est progressivement arrivé à consacrer celui des entreprises
en difficulté en procédant par refonte entière de la matière et en changeant
d’orientation quant à la finalité de la procédure. En France, cette évolution a connu
différentes étapes. Le Code de commerce de 1807 a repris les solutions du droit
corporatiste et imposé la présence du juge dont il renforce les prérogatives. Les
principaux objectifs sont le paiement des créanciers et la répression du débiteur.
Une loi du 4 mars 1889 vient alléger la situation de ce dernier. Cette évolution sera
poursuivie par le décret du 20 mai 1955 qui prit le critère de bonne ou mauvaise foi
pour frapper ou non d’indignité le débiteur par la procédure de faillite. Une réforme
intervient en France en 1967 (loi n° 67-563 du 13 juillet 1967 sur le règlement
judiciaire et la liquidation des biens, la faillite personnelle et les banqueroutes).
Cette réforme envisage deux procédures, le règlement judiciaire et la liquidation des
biens dont le choix repose sur des critères économiques et non moraux. Adoptant
une orientation préventive, l’ordonnance n°67-820 du 23 septembre 1967 envisage
de « faciliter le redressement économique et financier de certaines entreprises » en
instituant une procédure de suspension provisoire des poursuites applicables à
certaines entreprises en « situation financière difficile mais non irrémédiablement
compromise ».

Le droit des procédures collectives fut introduit en Afrique francophone en l’état de


la réforme intervenue en 1955. Hormis les évolutions législatives constatées dans
certains Etats, le droit africain est resté statique jusqu’à l’avènement de l’Acte
uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif. Le
contexte de l’économie dirigiste expliquait, en partie, cette sclérose législative. La
part prépondérante des entreprises publiques, et le peu de cas fait aux entreprises
privées contribuaient au déclin du droit des sociétés, notamment, des procédures
collectives d’apurement du passif.

A propos de ces procédures, il est à noter qu’au fur et à mesure que la situation
économique et financière de l’entreprise se dégrade, il y a un interventionnisme
progressif du juge dans la résolution des difficultés qu’elle rencontre.Selon le
Professeur DJOGBENOU, « l’intervention du législateur s’est notamment manifestée
par le rôle accru qu’il accorde au juge, le but étant la sauvegarde d’une unité du tissu
économique et la préservation du crédit par la protection des créanciers : les
procédures collectives finissent par devenir des procédures correctrices des
difficultés. On a cru voir ainsi surgir de véritables « juges managers », voire une «
magistrature économique ». C’est que dans ses différents visages (le tribunal dans sa
formation commerciale, le Président du tribunal, le juge-commissaire, le procureur de
la République) le juge, véritable médecin de l’entreprise, ausculte, prescrit, soigne et,
au pire des cas, constate le décès et en délivre l’attestation ».

4. Intérêts de cette matière.Le « droit des procédures collectives » présente une


très grande importance pratique pour des raisons à la fois économiques et
juridiques. D’un point de vue économique, le nombre des entreprises qui

6
disparaissent chaque année dans l’espace OHADA ne cesse d’augmenter. La
disparition atteint plusieurs secteurs économiques avec son cortège de
licenciements. Les exemples ne manquent pas : les compagnies aériennes Air
Afrique et Air Sénégal, la SOTOCO et le groupe SGGGau Togo, etc. Elle peut
entraîner, en conséquence, le dépeuplement de certaines régions. En général, il est
également relevé dans l’espace OHADA, plus d’entreprises liquidées que
redressées10.

Au-delà des cas de défaillances judiciairement constatés, il y a lieu de tenir aussi


compte des entreprises qui, sans avoir cessé leurs paiements, connaissent de
sérieuses difficultés financières et celles qui, bien qu’étant en état de cessation des
paiements continuent de vivoter tant bien que mal grâce à certains moyens
dilatoires jusqu’au redressement de la barre à la suite du gain d’un marché
important par leurs dirigeants, ou jusqu’à leur complète disparition.

D’un point de vue juridique, les contentieux des procédures collectives font appel à
des questions qui embrassent généralement plusieurs disciplines juridiques : droit
civil, droit pénal, droit de procédure civile, droit des contrats, droit des biens, droit
de l’environnement, etc. C’est souvent à l’occasion des décisions d’ouverture d’une
procédure collective que se soulèvent des questions intéressant ces diverses
disciplines juridiques. Le droit des procédures collectives fait généralement appel à
des solutions particulières et dérogatoires à celles des autres branches du droit.

5. Sources. Branche du droit des affaires, le droit des procédures collectives y tient
une place particulière. Compte tenue de son importance économique et sociale, le
législateur lui fournit ses ressources fondamentales. C’est donc, naturellement,
dans la loi que ses règles sont posées. En droit français, les sources principales
sont issues des réformes de 1984 et de 1985. Celles intervenues en 1994 renforcent
la nouvelle orientation. Désormais, ce droit porte, non sur la faillite, mais sur les
entreprises en difficultés qu’il entend traiter et espérer non leur règlement, mais
plutôt leur redressement. En Afrique francophone les efforts d’unification des règles
matérielles ont débouché sur la mise en vigueur de l’Acte uniforme OHADA portant
sur les procédures collectives d’apurement du passif (J.O. OHADA n° 7, 1erjuillet
1998, p. 1 et s.). La nouvelle législation a repris pour l’essentiel, les solutions
consacrées par les réformes intervenues en France. La doctrine, florissante, et la
jurisprudence importante finissent d’influencer cette matière qui intéresse
essentiellement le juriste d’affaire.

6. Plan. Le présent enseignement ambitionne d’offrir une étude synthétique des


procédures collectives. Le législateur OHADA est mu par deux objectifs
primordiaux : la prévention des difficultés de l’entreprise et, si elles apparaissent
patentes, leur correction et leur traitement. Les différentes procédures emportent
diverses conséquences juridiques tant à l’égard de l’entreprise en difficulté qu’à
l’égard de ses partenaires.Précisons néanmoins que les procédures collectives

10 Pour le Professeur SAWADOGO, « Les entreprises en difficulté, on en trouve un peu partout en


Afrique ; des entreprises en difficulté qui se redressent, on en cherche », Voir Filiga Michel SAWADOGO,
in Code vert, commentaire de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif, 4e éd., 2012, p. 1127.

7
d’apurement du passif ne sont pas à confondre avec les sanctions qu’elles peuvent
générer11. On pourrait envisager d’appréhender la matière suivant ces deux volets.
C’est le choix qui nous convient d’effectuer. Il permet d’étudier, en premier lieu, la
prévention et le traitement des difficultés de l’entreprise (Première partie) puis, en
second lieu, les sanctions générées par les procédures collectives (Deuxième partie).

GLOSSAIRE :

Les expressions définies ici figurent à l’article 1-3 de l’AUPC. Aux fins du présent Acte
uniforme, les expressions suivantes s’entendent comme suit :

 « cessation des paiements » : l’état où le débiteur se trouve dans l’impossibilité de


faire face à son passif exigible avec son actif disponible, à l'exclusion des situations où
les réserves de crédit ou les délais de paiement dont le débiteur bénéficie de la part de
ses créanciers lui permettent de faire face à son passif exigible ;
 « différend » : toute difficulté, conflit, contestation, contentieux, litige, réclamation ou
demande de nature commerciale ou civile, notamment en matière contractuelle,
survenant entre les parties à l'égard de leur relation juridique ;
 « entreprise » : toute personne physique ou morale soumise aux dispositions du
présent Acte uniforme conformément à l'article 1-1 ci-dessus ;
 « établissement » : tout lieu d'exploitation ou d'opérations où le débiteur exerce de
façon non transitoire une activité économique de production, de transformation, de
commercialisation ou de fourniture de biens ou de services avec des moyens humains
et matériels ;
 « État étranger » : tout État non partie au Traité de l'OHADA ;
 « État partie » : tout État partie au Traité de l'OHADA ;
 « journal d'annonces légales » : d'une part, le journal officiel, les journaux habilités à
cet effet par les autorités compétentes, le Bulletin national des registres du commerce
et du crédit mobilier, et, d'autre part, les quotidiens nationaux d'information générale
justifiant d'une vente effective par abonnement, dépositaires ou vendeurs, sous les
conditions supplémentaires de paraître depuis plus de six (06) mois et de justifier
d'une diffusion à l'échelle nationale ;
 « juridiction étrangère » : autorité, judiciaire ou autre, compétente pour contrôler,
surveiller ou connaitre d'une procédure collective ouverte dans un État étranger ;
 « mandataire judiciaire » : l'expert au règlement préventif et le syndic de
redressement judiciaire ou de liquidation des biens ;
 « petite entreprise » : toute entreprise individuelle, société ou autre personne morale
de droit privé dont le nombre de travailleurs est inférieur ou égal à vingt (20), et dont le
chiffre d'affaires n'excède pas cinquante millions (50.000.000) de francs CFA, hors
taxes, au cours des douze (12) mois précédant la saisine de la juridiction compétente
conformément au présent Acte uniforme ;
 « procédure collective étrangère » : une procédure collective judiciaire,
administrative ou autre, y compris une procédure provisoire, régie par la loi relative à
l'insolvabilité ou aux procédures collectives d'un État étranger, dans le cadre de
laquelle les biens et les affaires du débiteur sont soumis au contrôle ou à la
surveillance d'une juridiction étrangère aux fins de redressement du débiteur ou de la
liquidation de ses biens ;
 « procédure collective étrangère non principale » : une procédure collective
étrangère, autre qu'une procédure collective étrangère principale, ouverte dans un État
étranger où le débiteur dispose d'un établissement, tel que défini ci-dessus, et qui n'est
pas le centre de ses intérêts principaux ;

11 Celles-ci peuvent être civiles : c’est le cas de la faillite personnelle (art. 194 et s. AUPC) ; ou pénales :
c’est le cas de la banqueroute et des infractions assimilées (art. 226 et suivants AUPC).

8
 « procédure collective étrangère principale » : une procédure collective étrangère
ouverte dans un État étranger où le débiteur a le centre de ses intérêts principaux, y
compris son siège, son centre d'exploitation, son principal établissement ou, le cas
échéant, sa résidence habituelle ;
 « procédure collective principale » : une procédure collective ouverte conformément
au présent Acte uniforme sur le territoire d'un État partie où le débiteur a son principal
établissement ou, la personne morale, son siège ;
 « procédure collective secondaire » : une procédure collective ouverte en application
du présent Acte uniforme sur le territoire d'un État partie où le débiteur n'a pas son
principal établissement ou la personne morale son siège, après l'ouverture d'une
procédure collective principale sur le territoire d'un État partie ;
 « procédure collective territoriale » : une procédure collective ouverte,
conformément au présent Acte uniforme, sur le territoire d'un État partie où le débiteur
n'a pas son principal établissement ou la personne morale son siège tant que la
procédure collective principale n'est pas ouverte sur le territoire d'un État partie ;
 « représentant étranger » : une personne ou un organe, désigné même à titre
provisoire, autorisé dans une procédure collective étrangère à administrer le
redressement ou la liquidation des biens ou des affaires du débiteur, ou à agir en tant
que représentant de la procédure collective étrangère ;
 « salaires super privilégiés » : les rémunérations de toute nature, quelle que soit leur
appellation, qui, dans la limite de la fraction insaisissable définie par les lois et
règlements de chaque État partie, sont dues aux travailleurs et apprentis au titre des
douze (12) mois de travail précédant la décision d'ouverture d'une procédure collective
de redressement judiciaire ou de liquidation des biens.

9
Bibliographie
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PARTIE I : LA PREVENTION ET LE TRAITEMENT DES


DIFFICULTES DE L’ENTREPRISE
Le législateur OHADA a opéré une refonte complète du droit des procédures
collectives à travers l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif (AUPC). Contrairement aux lois françaises de 1838 et 1889
qui sont en vigueur jusqu’à une date récente dans tous les Etats francophones
d’Afrique exceptés le Mali, le Sénégal et le Gabon, l’Acte Uniforme va donner de
réelles chances de redressement à l’entreprise confrontée à des difficultés
financières. Cette réorganisation de la législation à travers l’Acte uniforme relatif
aux procédures collectives d’apurement des passifs paraissait s’imposer compte
tenu de la vétusté des textes, de la difficulté de la jurisprudence à pouvoir les
adapter aux préoccupations actuelles de la tendance de nos Etats à emboiter le pas
au droit français. Toutes les mesures susceptibles de sauver l’entreprise en
difficulté seront mises en œuvre à moins que l’examen de la situation de celle-ci
révèle qu’elle n’a plus de chance sérieuse de continuer ses activités. Dans ce dernier
cas, la liquidation des biens peut être prononcée.

Le 10 septembre 2015 le législateur OHADA a procédé à une réforme de l’Acte


uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif
(l’AUPC) à Grand-Bassam en Côte d’Ivoire. Au regard de l’AUPC initial du 10 avril
1998, le nouvel Acte uniformede 2015 entré en vigueur le 24 décembre 2015affiche
des objectifs encore plus ambitieux et concrets, toujours plus adaptés aux réalités
et aux besoins des pays de l’espace OHADA. L’AUPC innove également par la
détermination de son champ d’application, l’institution de la faculté pour toute
entreprise de demander, avant toute cessation de ses paiements, l’ouverture d’une
procédure de médiation selon les dispositions légales de l’Etat partie concerné (art.
1-2, al. 1er, de l’AUPC), l’institution d’une procédure simplifiée de règlement
préventif, de redressement judiciaire ou de liquidation des biens (art. 1-2) ainsi que
l’institution de la procédure préventive de conciliation.

Dans l’article 1er, l’AUPC révisé de 2015 affirme clairement la volonté du législateur
OHADA :

- « préserver les activités économiques et les niveaux d’emplois des entreprises


débitrices, de redresser rapidement les entreprises viables et de liquider les
entreprises non viables dans les conditions propres à maximiser la valeur des
actifs des débiteurs pour augmenter les montants recouvrés par les créanciers et
d’établir un ordre précis de paiement des créances garanties ou non garanties ;
- définir la réglementation applicable aux mandataires judiciaires ;

12
- définir les sanctions patrimoniales, professionnelles et pénales relatives à la
défaillance du débiteur, applicables aux dirigeants de toute entreprise débitrice et
aux personnes intervenant dans la gestion de la procédure ».

A ces fins, la nouvelle réglementation se situe délibérément en amont et en aval de


la cessation des paiements (c’est-à-dire l’état où le débiteur se trouve dans
l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, à
l'exclusion des situations où les réserves de crédit ou les délais de paiement dont le
débiteur bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face à son
passif exigible) en instituant quatre (4) étapes successives de traitement de
l’entreprise en difficulté financière : la procédure de conciliation, la procédure de
règlement préventif, la procédure de redressement judiciaire et la procédure de
liquidation des biens.

Les deux premières sont celles que l’on qualifie des mesures de prévention générale
des difficultés éventuelles qui menacent toute personne physique ou morale ayant
une activité économique. Le souci du législateur ici est, à l’évidence, d’agir alors
qu’il est encore temps d’intervenir avant que la situation économique et financière
du débiteur ne soient irrémédiablement compromises.

La troisième étape est celle de la concrétisation des difficultés ; elles sont effectives.
Le mal est réel et il faut le traiter. Pour cela, le législateur a prévu des mesures de
sauvetage et d’apurement du passif du débiteur au moyen d’un concordat de
redressement. Il s’agira pour le débiteur d’inviter tous ses créanciers aux fins de
déterminer ensemble, au travers d’un accord, les méthodes et les moyens de
résolution de la crise.

La quatrième étape est celle de la liquidation. Elle intervient lorsqu’il apparaît à


l’ouverture ou au cours du déroulement de l’une des trois premières procédures
qu’aucun espoir de redressement ne peut être envisagé sérieusement. Dans ce cas,
l’entreprise est mise en liquidation des biens.

C’est donc le critère de la cessation des paiements (c’est-à-dire l’état où le débiteur


se trouve dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif
disponible, à l'exclusion des situations où les réserves de crédit ou les délais de
paiement dont le débiteur bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de
faire face à son passif exigible) qui sépare les procédures préventives des difficultés
(chapitre 1) des procédures curatives de traitement des difficultés (chapitre 2).

13
Chapitre 1 : Lesprocédures collectives de prévention des
difficultés : les procédures préventives de
conciliation et de règlement préventif

Les difficultés de l’entreprise procèdent de signaux dont l’examen et le traitement


permettent de prévenir les pathologies plus graves. Les facteurs de fragilité de la
santé économique et financière de l’entreprise c’est peut-être la comptabilité qui
n’est pas tenue ou qui l’est insuffisamment, ou c’est le personnel qui est pléthorique
et inadapté, parce que recruté avec complaisance, ou ce sont les rémunérations et
les avantages salariaux qui sont excessifs, ou c’est le patrimoine de la société qui
est confondu avec ceux des dirigeants sociaux ; l’incapacité ou l’incompétence des
dirigeants sociaux ; l’insuffisance de fonds propres ; le mauvais fonctionnement des
organes sociaux voire leur inexistence de fait, etc.

Les manifestations des difficultés de l’entreprise débutent le plus souvent par une
simple rupture du service de caisse qui peut aller en s’aggravant si aucune mesure
préventive de sauvetage n’est suffisamment prise à temps pour redresser la
barre.« La prévention est au cœur des préoccupations législatives »12.Lorsque les
difficultés de l’entreprise s’accentuent sans pour autant mettre en péril la
continuation de l’entreprise, il peut être procédé à une correction rapide de la
situation par des procédures préventives de conciliation et de règlement préventif.
Le législateur définit la procédure de conciliation à l’art. 2, alinéa 1er, de l’AUPC
comme « une procédure préventive, consensuelle et confidentielle, destinée à éviter la
cessation des paiements de l’entreprise débitrice afin d’effectuer, en tout et partie, sa
restructuration financière ou opérationnelle pour la sauvegarder », etla procédure de
règlement préventif est définie à l’alinéa 2 de l’art. 2 de l’AUPC comme « une
procédure collective destinée à éviter la cessation des paiements de l’entreprise
débitrice et à permettre l’apurement de son passif au moyen d’un concordat
préventif ».

L’idée est qu’une entreprise dont les difficultés sont réelles mais ne paraissent pas
irrémédiables peut encore être sauvée si les créanciers acceptent de consentir
quelques sacrifices (remises de dettes ou prolongation de délais). La liberté
contractuelle peut permettre à une entreprise en difficulté de se rapprocher de ses
créanciers et de solliciter un accord fixant les modalités de règlement du passif et
interdisant aux créanciers signataires de poursuivre le débiteur, qui en contrepartie
s’engage à respecter les obligations qu’il a contractées lors de la signature de
l’accord et notamment d’honorer ses dettes à des périodes déterminées. Cependant,
il reste que la recherche d’un accord amiable totalement abandonnée au bon vouloir
des parties n’est pas facile à obtenir ou à mettre en œuvre, cela pour trois raisons.

12Roussel-Galle (Ph.), « OHADA et difficultés des entreprises, Etude critique des conditions et effets de
l'ouverture de la procédure de règlement préventif », 1ère partie, in Revue jurisprudentielle commerciale,
2001, pp. 9-19 ; et 2e partie, pp. 62-69, p. 9.

14
Première raison : l’égalité entre les créanciers n’est pas garantie puisque chacun
va s’efforcer d’obtenir mieux que l’autre, et la moindre inexécution peut être
l’occasion de tout remettre en cause en invoquant la résolution de l’accord.

Deuxième raison : il faut avoir à l’esprit que la situation de l’entreprise en difficulté


sollicitant l’accord de ses créanciers n’est pas confortable. Son crédit est ébranlé et
les démarches effectuées auprès de ses partenaires constituent en quelque sorte un
aveu qui peut susciter leur inquiétude. Les créanciers alertés seront plutôt enclin à
déclencher une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens.

Troisième raison : la conclusion d’un accord peut prendre du temps et il est facile
d’imaginer que dans cet intervalle de temps une entreprise sûre d’obtenir un accord
avec ses créanciers veuille survivre artificiellement en ayant recours à des moyens
dilatoires et ruineux susceptibles d’aggraver sa situation.

Pour éviter tout cela, le législateur du 10 septembre 2015 a mis en place deux
procédures permettant de procéder à une correction rapide de la situation des
difficultés de l’entreprise si celles-ci s’accentuent sans pour autant mettre en péril
la continuation de l’entreprise : cesont les procédures préventives de conciliation et
de règlement préventif. Le législateur OHADA définit la procédure de conciliation
comme « une procédure préventive, consensuelle et confidentielle, destinée à éviter la
cessation des paiements de l’entreprise débitrice afin d’effectuer, en tout et partie, sa
restructuration financière ou opérationnelle pour la sauvegarder ». Cette
restructuration s’effectue par le biais de négociations privées et de la conclusion
d’un accord de conciliation négocié entre le débiteur et ses créanciers ou, au moins
ses principaux créanciers, grâce à l’appui d’un tiers neutre, impartial et
indépendant appelé conciliateur (art. 2, al. 1er, de l’AUPC). Il définit la procédure de
règlement préventif comme« une procédure destinée à éviter la cessation des
paiements de l’entreprise débitrice et à permettre l’apurement de son passif au moyen
d’un concordat préventif »13 (art. 2, al. 2e, de l’AUPC).

Ces deux procéduresjouent en réalité deux fonctions indissociablement liées : une


fonction préventive et une fonction curative. La fonction préventive est imposée par
les conditions des procédures tandis que la fonction curative est liée à leur finalité.

L’objectif de ces procédures préventives de conciliation et de règlement préventif est


clairement affiché : éviter la cessation des paiements de l’entreprise débitrice et
procéder à sa restructuration financière et opérationnelle ou apurer le passif. Les
outils sont également dégagés : l’accord de conciliation négocié entre le débiteur et
ses créanciers ou, au moins ses principaux créanciers, grâce à l’appui d’un tiers
neutre, impartial et indépendant appelé conciliateur, et le concordat préventif. Il

13 Si l’on considère la cessation des paiements comme le critère de mise en route des procédures
collectives, la conciliation, et, dans une large mesure, le règlement préventif n’en constitueraient pas
un, stricto sensu. Il intervient en l’absence même de la cessation des paiements. Dans ce sens, voy.
Filiga Michel SAWADOGO, OHADA : Droit des entreprises en difficulté, coll. Droit uniforme africain,
Juriscope, Bruxelles, 2002, p. 2, n° 3. Mais prenant en considération la finalité de toute procédure
collective qui consiste en l’apurement du passif d’un débiteur, on peut, avec raison, intégrer le
règlement préventif dans les procédures collectives.

15
reste la contrepartie que concède à l’entreprise débitriceles articles 5-12 et 9, al. 1er,
de l’AUPC : l’interruption ou l’interdiction de toute action en justice ou la
suspension ou l’interdiction des poursuites individuelles. Il convient de déterminer
les conditions d’accès à ces procédures de prévention (Section première) avant de se
fixer sur la procédure qui conduit chacune d’elles (Section II).

Section 1 : Les conditions d’ouverture des procédures de prévention de


conciliation et de règlement préventif ou les conditions d’accès
aux procédures de conciliation et de règlement préventif

Cesont les articles 1-1, 5-1 et 6 de l’Acte uniforme portant organisation des
procédures collectives d’apurement du passif qui énoncent les conditions d’accès
aux procédures de prévention de conciliation et de règlement préventif. Parmi les
conditions d’ouverture, il est fait le départ entre celles qui sont liées à la situation
financière de l’entreprise, celles relatives à la forme sociale ainsi que celles relatives
à la perspective de règlement des difficultés. Aussi, convient-il d’isoler les conditions
liées à la personne du commerçant ou de l’entreprise débitrice des autres
conditions. Toutes ces conditions peuvent être classées en deux catégories : les
conditions de fond et les conditions de forme

§ 1 : Les conditions de fond

Pour l’essentiel, ces conditions sont relatives au statut personnel des assujettis à
ces procédures(A) et la situation économique et financière de ceux-ci (B).

A- Les conditions relatives au statut personnel ou les personnes relevant


des procédures de prévention

Les procédures de conciliation et de règlement préventif sont ouvertes à deux


grandes familles de débiteurs. L’article 1-1de l’AUPC, qui énumèreles personnes
relevant des procédures de prévention ou des procédures collectives en général,
dispose que : « Le présent Acte uniforme est applicable à toute personne physique
exerçant une activité professionnelle indépendante, civile, commerciale, artisanale ou
agricole, à toute personne morale de droit privé.

Les procédures de conciliation, de règlement préventif, de redressement judiciaire et


de liquidation des biens sont applicables aux personnes morales de droit privé qui
exercent une activité soumise à un régime particulier lorsqu’il n’en est pas disposé
dans la réglementation spécifique régissant ladite activité. Les activités soumises à
un régime particulier au sens du présent Acte uniforme et des textes les régissant
sont, notamment, celles des établissements de crédit au sens de la loi bancaire, des
établissements de micro finance et des acteurs des marchés financiers ainsi celles
des sociétés d’assurance et de réassurance des Etats parties au Traité de l’OHADA ».
Deux catégories de personnes sont ainsi appelées au bénéfice des procédures
collectives (en l’occurrence, des procédures de prévention) : les personnes physiques
(1) et les personnes morales (2).

16
1- Les personnes physiques

Aux termes des dispositions de l’ancien article 2- 1 de l’AUPC, « le règlement


préventif est applicable à toute personne physique ou morale commerçante ». L’art. 1-
1 du nouvel Acte uniforme de 2015 a étendu les procédures collectives aux
personnes physiques exerçant une activité professionnelle indépendante, civile,
commerciale, artisanale ou agricole. Ce texte semble viser des commerçants,
personnes physiques, qui pourraient être soumisaux articles 1er et 2 de l’Acte
uniforme sur le droit commercial général. De même, les personnes physiques
exerçant leur activité de manière professionnelle et indépendante y sont assujetties.
Il résulte de ce texte que les procédures échappent aux mineurs et aux majeurs
incapables, notamment ceux qui sont soumis au régime de la tutelle. Mais, les
mineurs émancipés ont la qualité de commerçant en droit OHADA puisque, au titre
de l’article 7 al. 1er, de l’Acte uniforme sur le droit commercial général, le mineur
émancipé peut avoir la qualité de commerçant. Sur ce fondement, le mineur
émancipé commerçant est éligible aux procédures de prévention.

Dans le régime de la communauté, le conjoint de l’époux commerçant peut être


saisi par aux procédures de prévention, les biens communs étant le gage général
des créanciers de l’époux commerçant.

Peuvent aussi demander le bénéfice des procédures de prévention des époux ou des
concubins qui exercent une exploitation en commun. On peut considérer que
chacun d’eux accomplit des actes de commerce de manière répétée. Deux
procédures devraient être ouvertes. Mais en cas de confusion de patrimoine, les
tribunaux organisent néanmoins une procédure unique.

2- Les personnes morales de droit privé

Ce sont d’abord les personnes morales. Ce sont ensuite des personnes morales de
droit privé.

a- Les personnes morales

Il s’agit de tout groupement, ayant un objet civil ou commercial et doté de la


personnalité juridique. Le texte vise d’abord les sociétés. Il s’agit, notamment, des
sociétés commerciales : sociétés de personnes et société de capitaux ; les
groupements d’intérêt professionnel. Le texte semble viser aussi les sociétés non
commerciales pourvu qu’elles aient également une personnalité juridique : les
associations déclarées, les syndicats professionnels, les associations sportives, les
syndicats de copropriétaires, les associations coopératives, etc. Les groupements
sans personnalité morale sont exclus du bénéfice de la procédure. Les sociétés en
participation ne peuvent pas bénéficier desprocédures de prévention. Mais leur
gérant, commerçant, pourrait y être soumis. Les sociétés crées de fait qui n’ont pas
pu acquérir la personnalité morale sont également exclues de la mesure. Il en est
ainsi des associations non déclarées, des groupes de sociétés ou une indivision. Il
faut encore préciser, qu’en ce qui concerne les sociétés régulièrement constituées,
que les procédures de préventionsont possibles pendant tout le temps où elles ont

17
la personnalité morale, c’est-à-dire du jour de leur immatriculation au registre de
commerce et du crédit mobilier au jour de leur radiation. C’est ainsi que l’on
considère qu’une société dissoute, mais non encore liquidée puisse faire, en théorie,
l’objet d’une procédure collective, notamment des procédures de prévention. Mais
cette considération n’est cependant que théorique puisque l’un des
butsdesprocédures de préventionest la survie de la société. Or, cet aspect échappe à
la société dissoute.

b- Les personnes morales de droit privé

C’est cette précision qui permet d’exclure des procédures collectives et des
procédures de préventionen particulier, les personnes morales de droit public.
Seules les personnes morales de droit privé peuvent demander l’ouverture
desprocédures de prévention. Celles-ci ne s’appliquent pas à l’Etat, aux collectivités
locales, aux régions ou aux départements, aux établissements publics, notamment
les universités publiques. Au cas où une personne morale de droit public serait en
cessation de paiement, son passif est pris en charge par l’Etat. Mais les entreprises
publiques ayant la forme d’une personne morale de droit privé y sont assujetties.

Il semble donc possible que les cabinets ou sociétés d’avocats, de notaires,


d’experts, etc., soient reçues à une telle procédure. Il est vrai que les règles
générales posées par l’Acte uniforme sur les procédures collectives rentreraient en
concurrence avec les règles spéciales posées par les législations nationales
d’organisation de ces professions.

On voit bien, que les procédures collectives, notamment les procédures de


prévention, en ce qu’il est porteur de faveurs importantes, couvre très largement les
unités commerciales ou les structures assimilées. Le législateur n’a pas voulu
restreindre le champ d’application ratione personae, son objectif étant de contribuer
à l’assainissement de l’espace économique.

Les procédures collectives (en l’occurrence les procédures préventives) sont


également applicables aux personnes morales de droit privé qui exercent une
activité soumise à un régime particulier lorsqu’il n’en est pas disposé dans la
réglementation spécifique régissant ladite activité. Les activités soumises à un
régime particulier au sens du présent Acte uniforme et des textes les régissant sont,
notamment, celles des établissements de crédit au sens de la loi bancaire, des
établissements de micro finance et des acteurs des marchés financiers ainsi celles
des sociétés d’assurance et de réassurance des Etats parties au Traité de l’OHADA.
Il y a donc ici la volonté du législateur de 2015 d’étendre les procédures collectives
à plusieurs assujettis par rapport au législateur de 10 avril 1998.

Cette énumération appelle quelques observations qui sont relatives à certaines


exclusions, puis à l’extension possible de la procédure à d’autres personnes.

Les observations tenant à certaines exclusions. En premier lieu, on peut


s’interroger sur la justification de l’exclusion des personnes morales de droit public
de l’accès aux procédures collectives de manière générale et au règlement préventif

18
à titre particulier. Cela s’expliquerait par l’insaisissabilité de principe des biens des
personnes publiques. Mais c’est une approche qu’il faudra nuancer. Le processus
de décentralisation en cours dans la majorité des Etats membres de l’OHADA érige
les municipalités en personnes morales distinctes de celle de l’Etat. C’est ainsi que
le maire agit pour le compte de sa commune et que celle-ci, par l’organe du maire,
peut être poursuivi devant les juridictions civiles et commerciales. La commune
expose son patrimoine dans le cadre de ses relations avec les tiers. Mais il faut
néanmoins reconnaître, à cet égard, que le critère de service public pourrait heurter
l’admission d’une commune aux procédures collectives, notamment aux procédures
de prévention.

Il y a lieu de souligner que le législateur OHADA semble exclure des procédures


collectives et, particulièrement des procédures de prévention, les entreprises du
secteur informel. Or, celles-ci sont les plus nombreuses dans les Etats membres de
l’OHADA. Mais on peut aussi considérer que les dispositions de l’Acte uniforme ont
été fixées dans un esprit de stimulation de la formalisation de ces entreprises.

Les observations relatives à l’extension éventuelle de la procédure. Une


procédure de prévention ne peut, en principe, être ouverte qu’à l’égard d’une
personnephysique exerçant une activité professionnelle indépendante, civile,
commerciale, artisanale ou agricolecommerçant, personne physique ou une
personne morale de droit privé, et à sa demande. Mais la jurisprudence avait pour
habitude d’étendre, sur le fondement du droit commun, la procédure collective
ouverte à l’encontre d’une personne physique ou morale, à d’autres personnes
physiques ou morales au motif qu’elles ont confondu leurs patrimoines ou, en ce
qui concerne les personnes morales, que l’une ou plusieurs d’entre elles sont
fictives. Il faut distinguer cette situation au cas où la procédure est étendue aux
dirigeants sociaux appelés, à titre personnel, à contribuer aux dettes sociales, en
raison des fautes de gestion qu’ils auraient commises.

Cette procédure d’extension présente des intérêts pratiques. En effet, elle permet de
soumettre plusieurs sociétés d’un même groupe à la compétence d’un tribunal
unique et d’ouvrir une procédure collective même à l’égard de débiteurs qui n’ont
pas la qualité de commerçants ou qui n’ont pas cessé leur paiement. Elle permet
surtout de retenir une solution unique à travers une même procédure pour
plusieurs sociétés d’un même groupe ou, de manière générale, pour plusieurs
personnes physiques ou morales en raison de la confusion de leur patrimoine.

Les personnes visées à cet art. 1-1 de l’AUPC devront également remplir d’autres
conditions pour être éligibles aux procédures collectives, notamment aux
procéduresde prévention de conciliation et de règlement préventif.

B- Les conditions tenant à la situation économique et financière du


débiteur

Les personnes assujettiesaux procédures de prévention de conciliation et de


règlement préventifne doivent pas être en cessation de paiement. L’ancien article 2-
1, al. 2in fine, de l’AUPC parlant du règlement préventifdispose bien qu’il s’agit de

19
toute personne qui « connaît une situation économique et financière difficile mais non
irrémédiablement compromise ». En d’autres termes, il s’agirait du débiteur in bonis
dont l’actif est susceptible de couvrir le passif mais qui connaît des difficultés
passagères de règlement. Elles consistent en ce que l’entreprise manque de liquidité
pour faire face à ses dépenses immédiates. C’est en raison de ce que, si ces
difficultés n’étaient pas levées, il finirait par être en état de cessation des paiements
que la mesure préventive lui est ouverte. Selon l’art. 5-1 de l’AUPC, il faut que le
débiteur ou l’entreprise débitrice connaisse des difficultés avérées ou préventives
mais qui ne sont pas encore en état de cessation des paiements.

Alors que le redressement judiciaire et la liquidation des biens supposent la


cessation des paiements, la conciliation et le règlement préventif suppose donc
l’absence de cette situation. On observe bien que la ligne de distinction est la
cessation des paiements, c’est-à-dire l’insuffisance ou le défaut d’actif disponible
pour faire face au passif exigible. Lesprocédures de prévention de conciliation et de
règlement préventifinterviennent donc avant la cessation éventuelle des paiements
qu’elles tendent à prévenir et éviter. Mais ici, les difficultés sont plus importantes et
nécessitent une intervention plus que ponctuelle du conciliateur ou du juge.

§ 2 : Les conditions de forme

Il convient d’examiner d’abord les conditions de forme d’ouverture de la procédure


de conciliation avant celles d’ouverture du règlement préventif. Mais avant, il
convient de signaler que les procédures collectives, notamment les procédures de
prévention relèvent de la juridiction compétente en matière de procédures
collectives. Le nouvel Acte uniforme dit dans son art. 3, al. 3e qu’il « appartient à
chaque Etat partie, le cas échéant, de désigner la ou les juridictions qui ont seules
compétence pour connaître des procédures régies par le présent Acte uniforme ». La
juridiction compétente à laquelle le législateur OHADA fait mention sans autre
précision, serait soit le Tribunal de première instance, soit le Tribunal de grande
instance statuant en matière commerciale ou non, ou, pour les Etats qui l’ont
institué distinctement, le Tribunal de commerce, ou encore une juridiction
d’exception avec une formation de juges spécialisée dans les procédures collectives.

Tout compte fait, il s’agira de la juridiction du lieu du siège social du débiteur,


personne morale ou de la juridiction dans le ressort de laquelle le débiteur,
personne physique a son principal établissement. La juridiction compétente a une
fonction de haute administration de la procédure. Elle connaît toutes les
contestations nées de la procédure et de celles qui ont une influence quelconque
sur la procédure, sauf les contestations que la loi attribue elle-même aux
juridictions pénales, administratives et sociales (art. 3, al. 2e, de l’AUPC).

I- Les conditions de forme d’ouverture de la procédure de conciliation

Les conditions de forme sont des conditions relatives à la requête et à la juridiction


compétente pour connaître la procédure de conciliation.

20
A- L’auteur de la requête aux fins d’ouverture de la procédure de
conciliation

Aux termes des dispositions de l’article 5-2 de l’AUPC, le Président de la juridiction


compétente est saisi par une requête du débiteur ou par une requête conjointe de
ce dernier avec un ou plusieurs de ses créanciers.

La question peut se poser de savoir qui est le débiteur. Le débiteur est la personne
physique exerçant une activité professionnelle indépendante, civile, commerciale,
artisanale ou agricole, à toute personne morale de droit privé. Il est également
l’organe de représentation légale de la personne morale (le Président directeur
général ou le Directeur général dans les sociétés anonymes, les Gérants dans les
autres sociétés comme les SARL, les SNC, les SCS, etc.). Il peut s’agir également du
Président de l’organe d’administration des associations, des groupements et des
fondations.

B- Le contenu de la requête aux fins d’ouverture de la procédure de


conciliation

La requête (c’est-à-dire la demande adressée au Président du tribunal par le


débiteur aux fins de bénéficier de la procédure de conciliation) doit être
accompagnée d’une série de documents, datant de moins de trente (30) jours. Ces
documents sontmentionnés à l’art. 5-2, al. 2e, l’AUPC. Ce sont :

10) une attestation d’immatriculation, d’inscription ou de déclaration d’activité à un


registre ou à un ordre professionnel ou, à défaut, tout autre document de nature à
prouver la réalité de l’activité exercée par le débiteur ;

20) le cas échéant, les états financiers de synthèse comprenant le bilan, le compte
de résultat, un tableau financier des ressources et des emplois, l’état annexé et, en
tout état de cause, le montant du chiffre d’affaires et des bénéfices ou des pertes
des trois derniers exercices ;

30) un état de la trésorerie et un état chiffré des créances et des dettes avec
indication des dates d’échéance ;

40) un document indiquant le nombre des travailleurs déclarés et immatriculés, à la


date de la demande ;

50) une attestation émanant du débiteur par laquelle il déclare sur l’honneur ne pas
être en état de cessation des paiements et précise, en outre, qu’il n’est soumis à une
procédure de règlement préventif, de redressement judiciaire ou de liquidation des
biens qui ne serait pas clôturée ;

60) si le débiteur propose un conciliateur, un document indiquant les noms,


prénoms, qualités et domicile de la personne proposée et une attestation de cette
dernière indiquant ses compétences professionnelles ;

21
70) le cas échéant, un document indiquant les noms, prénoms et domicile des
créanciers qui se joignent à la demande du débiteur et le montant de leurs créances
et des éventuelles sûretés dont elles sont assorties.

Ces documents exposeront la santé financière et économique de l’entreprise


débitrice et ses perspectives de redressement. Ces documents doivent être datés,
signés et certifiés conformes et sincères par le requérant. Dans le cas où l’un des
documents ci-dessus cités ne peut être fourni, ou ne peut l’être qu’incomplètement,
la requête doit contenir les motifs de cet empêchement.

II- Les conditions de forme d’ouverture du règlement préventif

Il sera question ici de l’auteur de la requête et du contenu de la requête aux fins


d’ouverture de la procédure de règlement préventif.

A- L’auteur de la requête

Aux termes de l’art. 6 de l’AUPC, le règlement préventif est ouvert au débiteur qui,
sans être en état de cessation des paiements (c’est-à-dire l’état où le débiteur se
trouve dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif
disponible, à l'exclusion des situations où les réserves de crédit ou les délais de
paiement dont le débiteur bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de
faire face à son passif exigible), justifie des difficultés financières ou économiques
sérieuses. La juridiction compétente est saisie par une requête du débiteur ou par
une requête conjointe de ce dernier avec un ou plusieurs de ses créanciers, déposée
au greffe contre récépisséau greffe de ladite juridiction14.

L’ancien article 5 de l’AUPC exclut les créanciers qui n’auraient d’ailleurs aucun
intérêt à solliciter l’ouverture de la procédure du règlement préventif puisque l’une
des conséquences de cette procédure est le prononcé de la suspension des
poursuites. Il exclut également le Ministère public, qui pourtant dispose souvent
des informations sur les difficultés des entreprises. Le Président du tribunal ne
peut pas non plus se saisir d’office. Pour le Professeur SAWADOGO, « le débiteur
seul peut demander à la juridiction compétente d’ouvrir à son profit le règlement
préventif à cause du fait qu’il n’a pas encore cessé ses paiements. Les créanciers
n’ont de ce fait pas connaissance de ses difficultés ni d’intérêt direct à provoquer
l’ouverture de la procédure. Il n’en serait pas de même du Ministère public chargé de
la défense de l’intérêt général »15.Le nouvel Acte uniforme énonce, par contre, que le
débiteur peut saisir la juridiction compétente par une requête conjointe avec un ou
plusieurs de ses créanciers. Disposeront-ils des informations utiles pour le faire ?
Le feront-ils seulement sur les aveux de leur débiteur ?Et dans quel intérêt ?

B- Le contenu de la requête

14 Si le débiteur est défaillant, la loi peut mandater une autre personne. Peuvent être admises à
requérir l’ouverture de la procédure les sociétés mères en faveur de leurs filiales, et vice versa.
15Filiga Michel SAWADOGO, Commentaires de l’art. 5 de l’AUPC, OHADA, Traité et Actes uniformes

commentés et annotés, 4e éd., 2012, p. 1153.

22
La requêtedoit exposer la situation économique et financière difficile de l’entreprise
ainsi que ses perspectives de redressement et d’apurement de son passif. Cela
répond à l’objectif visé par la procédure de règlement préventif : éviter la cessation
des paiements ou la cessation d’activité de l’entreprise et permettre l’apurement du
passif au moyen d’un concordat préventif. Le débiteur doit y indique les créances
pour lesquelles il demande la suspension des poursuites individuelles16. Le but
recherché est de solliciter du Président du tribunal qu’il prononce la suspension des
poursuites et engage les créanciers à conclure avec lui un concordat de règlement
préventif.

Afin de permettre au Président du tribunal d’apprécier quant au fond la demande,


la requête doit être accompagnée du dépôt d’une série de quatorze (14)
documentsénumérés à l’art. 6-1 de l’AUPC, datant de moins de trente (30) jours
dont les documents obligatoires sans lesquels la requête aux fins d’ouverture de la
procédure du règlement préventif est irrecevable sont :

- Une attestation d’immatriculation, d’inscription ou de déclaration d’activitéà


un registre ou à un ordre professionnel ou, à défaut, tout autre document de
nature à prouver la régularité de l’activité exercée par le débiteur ;
- les états financiers de synthèse comprenant, notamment, le bilan, le compte
de résultat, un tableau financier des ressources et des emplois,l’état annexé
et, en tout état de cause, le montant du chiffre d’affaires et des bénéfices ou
des pertes des trois derniers exercices ou, à défaut, tout autre document de
nature à établir la situation financière et économique du débiteur si la
requête est introduite par un débiteur répondant à la définition de la petite
entreprise conformément à l’article 1-3;
- un état de la trésorerieun état chiffré des créances et des dettes avec
indication des noms, qualités et adresses des créanciers et des dates
d’échéance ou, à défaut, tout autre document de nature à établir la capacité
du débiteur de faire face à son passif exigible avec son actif disponiblesi la
requête est introduite par un débiteur répondant à la définition de la petite
entreprise conformément à l’article 1-3;
- un document indiquant le nombre des travailleurs et le montant des salaires
et des charges salariales à la date de la demande ou à défaut, tout autre
document de nature à permettre d’identifier et de dénombrer les travailleurs
du débiteur et d’estimer le montant des salaires et des charges salarialessi la
requête est introduite par un débiteur répondant à la définition de la petite
entreprise conformément à l’article 1-3;
- une attestation émanant du débiteur par laquelle il déclare sur l’honneur ne
pas être en état de cessation des paiements ;
- une attestation indiquant qu’il ne bénéficie pas d’un accord de conciliation
en cours d’exécution et, en tout état de cause, qu’il n’est soumis à une

16 Pour le Professeur SAWADOGO, cela suppose que le débiteur connaît l’étendue de son passif et va
opérer une discrimination en fonction des caractéristiques de ses dettes : montant élevé ou faible,
exigibilité immédiate ou à terme, existence ou non d’une sûreté, importance du bien servant d’assiette
à la sûreté. V. Filiga Michel SAWADOGO, OHADA - Droit des entreprises en difficulté, op. cit., n° 70, p.
60.

23
procédure de règlement préventif, de redressement judiciaire ou de
liquidation des biens, qui ne serait pas clôturée et qu’il remplit les condition
de l’article ;
- l’inventaire des biens du débiteur avec indication des biens mobiliers soumis
à revendication par leurs propriétaires et de ceux affectés d’une clause de
réserve de propriété ou, à défaut, un inventaire provisoiresi la requête est
introduite par un débiteur répondant à la définition de la petite entreprise
conformément à l’article 1-3 ;
- s’il s’agit d’une personne morale, la liste des membres solidairement
responsables des dettes de celle-ci, avec indication de leurs noms, prénoms
et domiciles ainsi que des noms et adresses de ses dirigeants ;
- un projet de concordat.

Tous ces documents sus-énumérés doivent être fournis à peine d’irrecevabilité de


plein droit de la requête. La requête doit être également accompagnée des
documentsdatant de moins de trente (30) jours comme :

- l’état détaillé, actif et passif, des sûretés personnelles et réelles données ou


reçues par l’entreprise et ses dirigeants ;
- l’état chiffré des créances et des dettes avec indication du nom et du domicile
des créanciers et des débiteurs ;
- un document indiquant les noms, prénoms et adresses des représentants du
personnel ;
- si le débiteur propose une personne à la désignation en qualité d’expert au
règlement préventif conformément au premier alinéa de l’art. 8, un document
indiquant les noms, prénoms, qualités et domicile de cette personne et une
attestation de cette dernière précisant qu’elle remplit les conditions prévues
aux articles 4-1 et 4-2 pour les fonctions de mandataires.

Ces documents doivent être datés, signés et certifiés conformes et sincères par le
requérant, et dans le cas où l’un de ces documents ne peut être fourni, ou ne peut
l’être qu’incomplètement, la requête doit contenir les motifs de cet empêchement.

Le législateur fait obligation au débiteur de produire ces pièces qui pourront


permettre de former une opinion sur la situation de l’entreprise, de se rendre
compte des intérêts en présence afin de mieux les protéger, ou, à tout le moins, de
juger de l’apparente actualité et réalité de la situation présentée par le débiteur.

Dans la requête, le débiteur expose ses difficultés financières ou économiques ainsi


que les propositions de redressement de l’entreprise et d’apurement de son passif.
Aux termes des dispositions de l’art. 6, al. 3, de l’AUPC, aucune requête en
ouverture d’un règlement préventif ne peut être présentée par le débiteur :

- si un concordat préventif ou de redressement est encore en cours


d’exécution ;
- avant l’expiration d’un délai de trois (3) ans à compter de l’homologation d’un
précédent concordat préventif ;

24
- avant l’expiration d’un délai de dix-huit mois à compter de la fin d’un
règlement préventif n’ayant pas abouti à un concordat préventif.

Au nombre des documents obligatoires exigés à peine d’irrecevabilité de la requête


figure le projet de concordat.

Ce projet de concordat doit faire mention des mesures et conditions envisagées pour
le redressement de l’entreprise17. Par exemple :

- les modalités de continuation de l’entreprise, telles que la demande de


délais et de remises, la cession partielle d’actif avec indication précise
des biens à céder ; la cession ou la location-gérance d’une branche
d’activité formant un fonds de commerce ; la cession ou la location-
gérance de la totalité ou d’une partie de l’entreprise, sans que ces
modalités soient limitatives et exclusives les unes des autres ;
- les noms, prénoms, qualités et adresses des personnes tenues
d’exécuter le concordat et l’ensemble des engagements souscrits par
elles et nécessaires au redressement de l’entreprise ;
- les modalités du maintien et du financement de l’entreprise, du
règlement du passif né antérieurement à la décision d’ouverture du
règlement préventif ainsi que, s’il y a lieu, les garanties fournies pour
en assurer l’exécution ; ces engagements pouvant consister en la
souscription d’une augmentation du capital social par les anciens
associés ou par de nouveaux, une conversion de créances en capital,
l’ouverture de crédits par les établissements bancaires ou financiers
ou par toute autre personne, y compris tout nouvel apport en
trésorerie ou sous forme de nouveau bien ou service dans les
conditions de l’art 11-1 ainsi que le montant de l’apport ou la valeur
du bien ou service ; la poursuite de l’exécution de contrats conclus
antérieurement à la requête, la fourniture de cautions ;
- le niveau et les perspectives d’emplois, ainsi que les licenciements
pour motif économique envisagés qui doivent intervenir dans les
conditions prévues par les dispositions du droit du travail ;
- le remplacement des dirigeants.

Il s’agit d’un véritable plan de redressement qui contient, pour l’essentiel, des
mesures tendant à la continuation de l’activité, à l’assainissement ou de
renflouement de l’entreprise.

17 Voir l’article 7 de l’AUPC. Pour le Professeur SAWADOGO, il s’agit d’une liste non exhaustive des
mesures d’assainissement ou de renflouement de l’entreprise et de règlement de son passif
susceptibles d’être proposées. Le délai relativement bref imposé pour le dépôt de l’offre ou proposition
de concordat semble réserver le règlement préventif aux entreprises bien structurées et qui savent ce
qu’elles veulent. Voir Filiga Michel SAWADOGO, L’Acte uniforme portant organisation des procédures
collectives d’apurement du passif, Programme de formation en ligne avec le soutien du fonds
francophone des inforoutes, www.ohada.com.

25
Après l’examen des conditions d’ouverture des procédures de prévention des
difficultés, il convient alors de se fixer sur le déroulement de chacune de leur
procédure.

Section 2 : Le déroulement des procédures de préventions des difficultés

Il sera envisagé ici le déroulement de la procédure de conciliation et celui de la


procédure de règlement préventif.

Paragraphe 1 : Le déroulement de la procédure de conciliation

Après le dépôt des documents aux fins d’ouverture de la procédure de conciliation


mentionnés à l’art. 5-2 de l’AUPC, la procédure de conciliation est ouverte par le
Président de la juridiction compétente, statuant à huis clos, pour une durée
n’excédent pas trois (3) mois mais qu’il peut, par une décision spécialement
motivée, proroger d’un mois au plus tard à la demande du débiteur, après avis du
conciliateur. A l’expiration de ces délais, la conciliation prend fin de plein droit et il
ne peut être ouvert une nouvelle procédure de conciliation avant l’expiration d’un
délai de trois (3) mois (art. 5-3 de l’AUPC).

A- L’ouverture de la procédure

Le Président de la juridiction compétente désigne le conciliateur dans la décision


d’ouverture. Le conciliateur doit avoir le plein exercice de ses droits civils, justifier
de sa compétence professionnelle et demeurer indépendant et impartial vis-à-vis
des parties concernées par la conciliation. Il a pour mission de favoriser la
conclusion, entre le débiteur et ses principaux créanciers ainsi que, le cas échéant,
ses contractants habituels, d’un accord amiable destiné à mettre fin aux difficultés
de l’entreprise. Il peut, à cette fin, obtenir du débiteur tous les renseignements
utiles (art. 5-5 de l’AUPC).

Le conciliateur rend compte régulièrement, au Président de la juridiction


compétente, de l’état d’avancement de sa mission et formule toutes les observations
utiles. S’il a connaissance de la survenance de la cessation des paiements, il en
informe sans délai le Président de la juridiction compétente.

Les modalités de rémunération du conciliateur sont déterminées par le président de


la juridiction avec l’accord du débiteur au jour de l’ouverture de la conciliation. Les
critères sur la base desquels elle est arrêtée, son montant maximal chiffré et le
montant des provisions sont précisés dans un document signé par le débiteur et le
conciliateur et annexé à la décision d’ouverture. Si au cours de sa mission, le
conciliateur estime que le montant initialement déterminé est insuffisant, il doit en
informer sans délai le président de la juridiction qui fixe les nouvelles conditions
avec l’accord du débiteur. A défaut d’accord, il est mis fin à la mission du
conciliateur. La rémunération du conciliateur est à la charge du débiteur et fait
l'objet d'une ordonnance de taxe.

Pendant la durée de son exécution, l’accord interrompt ou interdit toute action en

26
justice et arrête ou interdit toute poursuite individuelle, tant sur les meubles que
les immeubles du débiteur, dans le but d’obtenir le paiement des créances qui en
font l’objet. L’accord interrompt, pour la même durée, les délais impartis aux
créanciers parties à l’accord à peine de déchéance ou de résolution des droits
afférents aux créances mentionnées par l’accord. Les personnes ayant consenti une
sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie et les coobligés
peuvent se prévaloir des dispositions de l’accord.

Si le débiteur est mis en demeure ou poursuivi par un créancier appelé à la


conciliation pendant la période de recherche de l’accord de conciliation, le Président
du tribunal peut, à la demande du débiteur, et après avis du conciliateur, reporter
le paiement des sommes dues ou ordonner la suspension des poursuites engagées
par un créancier. Ces mesures prennent fin de plein droit lorsque la conciliation
prend fin et, en tout état de cause, à l’expiration du délai prévu à l’article 5-3,
alinéa 1er. L’ordonnance du Président du tribunal prononçant ces mesures est
déposée au greffe et ne fait l’objet d’aucune publicité. Elle est communiquée au
créancier concerné, sans délai, et elle rappelle l’obligation de la confidentialité à
laquelle celui-ci est tenu.

Aux termes des dispositions de l’art. 5-10, al. 1er, de l’AUPC, « A la requête de la
partie la plus diligente, l’accord signé peut être :

- déposé au rand des minutes d’un notaire ;


- ou homologué ou exequaturé par la juridiction ou l’autorité compétente
statuant à huis clos ; sans préjudice de l’application de l’art. 5-11 (c’est-
à-dire en cas d’ouverture d’une procédure de liquidation des biens
postérieurement à la conclusion d’un accord de conciliation homologué
ouexequaturé par la juridiction ou l’autorité compétente), l’homologation
ou l’exequatur est de droit et ne peut être refusé que si l’accord est
contraire à l’ordre public ; le greffier appose la formule exécutoire ; des
copies valant titre exécutoire peuvent être délivrées aux parties à
l’accord ; la décision d’homologation ou d’exequatur ne fait l’objet
d’aucune publicité et ne reprend pas le contenu de l’accord qui reste
confidentiel ».

La décision homologuant ou exequaturant l’accord n’est pas susceptible de recours.


Elle met fin à la conciliation. Le cas échéant, la conciliation prend fin par la
signature de l’accord et, en tout état de cause, à l’expiration des délais prévus pour
la conciliation (c’est-à-dire trois (3) mois avec possibilité de prorogation de délai
d’un mois).

B- La fin de la procédure de conciliation

A tout moment, s’il est informé par le conciliateur de la survenance de l’état de


cessation des paiements ou par tout autre moyen, le Président de la juridiction
compétente met fin sans délai à la conciliation ou à la mission du conciliateur,
après avoir entendu le débiteur et le conciliateur (art. 5-6 de l’AUPC).

27
En cas d’impossibilité de parvenir à un accord, le conciliateur présente sans délai
un rapport écrit au Président. Celui-ci met fin à sa mission et à la conciliation,
après avoir entendu le débiteur.

A tout moment, en l’absence de cessation des paiements, le débiteur peut demander


à ce qu’il soit mis fin à la mission du conciliateur et à la conciliation, auquel cas le
Président de la juridiction compétente y met fin sans délai.

Si la résolution est prononcée, les créanciers recouvrent l’intégralité de leurs


créances, déduction faite des sommes perçues. La juridiction ou l’autorité ayant
connu de la conciliation est seule compétente pour connaître de toute inexécution
de l’accord et pour en prononcer la résolution. Elle est saisie par l’une des parties à
l’accord.

L’ouverture d’une procédure de règlement préventif, de redressement judiciaire ou


de liquidation des biens met fin de plein droit à la conciliation et, le cas échéant, à
l’accord.

Dans ce cas, les créanciers recouvrent l’intégralité de leurs créances, déduction


faite des sommes perçues.

Aux termes des dispositions de l’art. 5-11, en cas d’ouverture d’une procédure de
liquidation des biens postérieurement à la conclusion d’un accord de conciliation
homologué ou exequaturé par la juridiction ou l’autorité compétente, les personnes
qui avaient consenti dans l’accord un nouvel apport en trésorerie au débiteur en
vue d’assurer la poursuite de l’activité de l’entreprise débitrice et sa pérennité sont
payées au titre de privilège selon les rangs prévus par les articles 166 et 167
del’AUPC). De même, les personnes qui fournissent un nouveau bien ou service en
vue d’assurer la poursuite de l’entreprise débitrice et sa pérennité bénéficient du
même privilège pour le prix de ce bien ou de ce service. Mais les apports consentis
dans le cadre d’une augmentation du capital social du débiteur, de même que les
créances nées antérieurement à l’ouverture de la conciliation ne bénéficient pas de
ce privilège.

Comme la conciliation est une procédure préventive, consensuelle et confidentielle,


destinée à éviter la cessation des paiements de l’entreprise débitrice, la décision
ouvrant la conciliation ou rejetant la demande d’ouverture ne fait l’objet d’aucune
publication.

Paragraphe 2 : La décision du Président du tribunal saisi d’une requête aux


fins d’ouverture du règlement préventif

Si le projet de concordat préventif lui paraît sérieux, le président de la juridiction


compétente ouvre la procédure et désigne un expert au règlement préventif, qui
satisfait aux conditions et critères prévus pour la fonctions de mandataires
judiciaires, pour lui faire rapport sur la situation financière et économique de
l'entreprise débitrice et les perspectives de redressement, compte tenu des délais et

28
remises consentis ou susceptibles de l'être par les créanciers et toutes autres
mesures contenues dans le projet de concordat préventif.

La décision d'ouverture du règlement préventif suspend ou interdit toutes les


poursuites individuelles tendant à obtenir le paiement des créances nées
antérieurement à ladite décision pour une durée maximale de trois (03) mois, qui
peut être prorogée d'un (01) mois dans les conditions prévues à l'article 13, alinéa
218, sans préjudice de l'application de l'article 14 alinéa 319.

A- La suspension des poursuites individuelles

La requête qui satisfait aux conditions d’ouverture du règlement préventif conduit le


Président de la juridiction compétente à rendre une décision qui facilite les
négociations entre le débiteur et ses créanciers. L’une des conséquences de la
décision ou de l’ordonnance rendue par le Président de la juridiction compétente est
la suspension des poursuites individuelles.

La décision de suspension des poursuites individuelles prend la forme d’une


ordonnance en raison de ce qu’elle émane du Président du tribunal, saisi par voie
de requête. Cette décision suspend les procédures déjà introduites et interdit toute
procédure nouvelle. Elle est provisoire puisque les poursuites pourront reprendre à
la fin de l’opération de redressement ou en cas de rejet du concordat proposé, à
moins que la procédure se poursuive par le redressement judiciaire ou la
liquidation des biens. Cette ordonnance qui prévient les poursuites individuelles
qu’elle suspend, produit un certain nombre d’effets mentionnés aux articles 9, 10 et
11 de l’AUPC.

La suspension des poursuites individuelles concerne aussi bien les voies


d'exécution que les mesures conservatoires, y compris toute mesure d'exécution
extrajudiciaire.

Elle s'applique à toutes les créances chirographaires et à celles garanties par un


privilège général, un privilège mobilier spécial, un gage, un nantissement ou une
hypothèque, à l'exception des créances de salaires et d'aliments.

Elle ne s'applique pas aux actions tendant à la reconnaissance des droits ou des
créances contestées, ni aux actions cambiaires dirigées contre les signataires
d'effets de commerce autres que le bénéficiaire de la suspension des poursuites
individuelles.

18Ce rapport doit être établi dans les trois (03) mois de la décision d'ouverture du règlement préventif,
ce délai pouvant être prorogé, à titre exceptionnel, une seule fois pour une durée d'un (01) mois, sur
décision spécialement motivée du président de la juridiction compétente à la demande de l'expert ou
du débiteur.
19La juridiction saisie doit se prononcer immédiatement ou au plus tard dans un délai de trente (30)

jours à compter de sa saisine. Le règlement préventif continue de produire ses effets, en particulier
concernant la suspension des poursuites individuelles des créanciers, jusqu'à ce que la juridiction
statue. Si celle-ci n'est pas saisie dans les conditions de l'alinéa 1er ou si elle ne se prononce pas dans
les trente (30) jours à compter de sa saisine, le règlement préventif prend fin de plein droit, les
créanciers recouvrant l'exercice de tous leurs droits et le débiteur recouvrant la pleine administration
de ses biens.

29
Les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou
ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent se prévaloir des dispositions du
présent article.

Les délais impartis aux créanciers à peine de déchéance, prescription ou résolution


de leurs droits sont suspendus pendant toute la durée de la procédure en cours.

Premièrement, elle suspend toutes les poursuites individuelles (actions, voies


d’exécution, mesures conservatoires) tendant à obtenir le paiement des créances
désignées par le débiteur et nées antérieurement à ladite décision. Toutefois, elle ne
s’applique pas aux actions tendant à la reconnaissance des droits ou des créances
contestées (Voir CA d’Abidjan, Chambre civile et commerciale, arrêt n° 633 du 11
juin 2004, Société DAFNE et un autre c/ SGBCI CI)20, aux actions cambiaires
contre les signataires d’effets de commerce autres que le bénéficiaire de la
suspension des poursuites individuelles, aux actions en revendication, aux
poursuites pénales en raison de l’autonomie du droit pénal et aux créances
régulièrement nées après la décision de suspension. Elle ne suspend pas aussi le
cours des intérêts légaux et conventionnels, les intérêts moratoires et les
majorations. Seulement, bien que continuant à courir, ces intérêts et majorations
ne sont pas exigibles. Sauf les créanciers de salaires21, tous les créanciers, qu’ils
soient chirographaires ou munis de privilèges généraux ou de sûretés réelles
spéciales (telles que un privilège mobilier spécial, un gage, un nantissement ou une
hypothèque) sont concernés.

Deuxièmement, aux termes de l’article 10 de l’AUPC, les délais impartis aux


créanciers parties à l’accord à peine de déchéance, de prescription ou de résolution
de leurs droits afférents aux créances mentionnées par l’accord, sont aussi
suspendus durant toute la durée d’exécution de la décision de la suspension des
poursuites individuelles conformément à l’adage « contra non valentemagere non
curritprescriptio »22. Ces droits sont ainsi protégés contre une éventuelle inexécution
de l’accord concordataire.

Troisièmement, l’ordonnance de la suspension des poursuites individuelles entraîne


certaines interdictions. Aux termes de l’art. 11 de l’AUPC, sauf autorisation motivée
du Président de la juridiction compétente, la décision de la suspension des
poursuites individuelles et non du « règlement préventif »23 interdit au débiteur,
sous peine d’inopposabilité de :

20Ohadata j-05-261, [En ligne] :http://www.ohada.com. La chambre civile et commerciale de la Cour


d’appel d’Abidjan estime que « s’il est admis que l’ordonnance de suspension de poursuite individuelle
rendue par le président du tribunal dans le cadre d’une procédure de règlement préventif interdit d’initier
une action en paiement de créance, cette ordonnance ne fait pas obstacle à l’action en reconnaissance de
créance ».
21 Les créanciers de salaires ne sont pas concernés à cause du caractère alimentaire de leur créance.
22 Contre celui qui ne peut pas agir en justice, la prescription ne court pas.
23 La phase au cours de laquelle la décision de suspension des poursuites individuelles est prise n’est

pas encore le règlement préventif bien qu’elle fait partie du processus qui y conduit. Voir dans ce sens
le Professeur SAWADOGO qui considère cela comme une erreur. V. Filiga Michel SAWADOGO, OHADA
- Droit des entreprises en difficulté, op. cit., n° 74, p. 65.

30
- payer, en tout ou en partie, les créances nées antérieurement à la décision de
suspension des poursuites individuelles et visées par celle-ci ;
- de faire un acte de disposition étranger à l’exploitation normale de l’entreprise ;
- de consentir une sûreté ;
- de désintéresser les cautions qui ont acquitté des créances nées antérieurement
à la décision de la suspension des poursuites individuelles.

Le législateur a ainsi prévu une série de mesures pour rassurer les créanciers qui
acceptent de conclure avec le débiteur un accord amiable qui pourrait l’aider à
surmonter les difficultés qu’il rencontre. Encore faudrait-il que cet accord soit
conclu et surtout que l’entreprise présente des perspectives de redressement. C’est
dans ce but que le législateur a prévu la nomination d’un expert par le Président de
la juridiction compétente.

Le juge nomme, dans la même décision, un expert qui devra lui soumettre, dans un
délai de deux mois, sauf prorogation, un rapport sur la situation économique et
financière de l’entreprise. Le délai de deux mois court à partir de la notification de
la décision de suspension des poursuites comportant nomination d’expert dans les
huit (8) jours qui suivent sa reddition. Le rapport est déposé, en deux exemplaires,
au greffe du tribunal dont l’un est transmis au président et le second au parquet.

B- La nomination d’un expert

En rendant une décision de suspension des poursuites individuelles, le Président de


la juridiction compétente désigne un expert qui aura pour mission de lui établir un
rapport sur la situation économique, sociale et financière de l’entreprise, les
perspectives de son redressement compte tenu des délais et remises consentis ou
susceptibles de l’être par les créanciers et toutes autres mesures contenues dans le
projet du concordat (art. 8 de l’AUPC).

L’expert désigné est informé de sa mission par lettre recommandée ou par tout
autre moyen laissant trace écrite du Président de la juridiction compétente ou du
débiteur dans le délai de huit (8) jours suivant la décision de suspension des
poursuites individuelles. Il est soumis aux dispositions des articles 41 et 42 de
l’AUPC24. L’expert ne doit donc être ni un parent ni un allié du débiteur jusqu’au
quatrième degré inclusivement. Cette règle a pour but d’empêcher qu’un proche
parent ou un allié du débiteur n’user de sa qualité d’expert pour le favoriser. Le
président de la juridiction compétente peut lui accorder dans sa décision de
désignation, une provision sur sa rémunération conformément à l'article 4-18.

Dès qu'il est informé de sa désignation, l'expert au règlement préventif atteste qu'il
remplit les conditions énoncées par les articles prévus pour les mandataires
judiciaires. A tout moment, durant le déroulement du règlement préventif, s'il lui
apparaît qu'il ne remplit plus ces conditions, il en informe sans délai le président de
la juridiction compétente, qui met fin à sa mission et nomme un remplaçant.

24 Ces articles 41 et 42 sont relatifs à la nomination et à la révocation du syndic.

31
L’expert a pour mission principale d’établir un rapport sur la situation économique,
sociale et financière de l’entreprise. Ce rapport doit contenir le concordat préventif
proposé par le débiteur ou conclu entre lui et ses créanciers. Il entend le débiteur et
les créanciers et leur prête ses bons offices pour parvenir à la conclusion d’un
accord sur les modalités de redressement de l’entreprise et l’apurement de son
passif (art. 12-3 de l’AUPC). Il doit aussi signaler à la juridiction compétente les
manquements du débiteur aux interdictions (pour ces interdictions, voir l’art. 11 de
l’AUPC). Pour lui permettre de bien accomplir sa mission, il lui est reconnu un droit
à l’information large.

L'expert au règlement préventif apprécie la situation du débiteur. A cet effet, il peut,


nonobstant toute disposition législative ou réglementaire contraire, obtenir
communication par les commissaires aux comptes, les comptables, les
représentants du personnel, les administrations publiques, les organismes de
sécurité et de prévoyance sociales, les établissements bancaires ou financiers ainsi
que les services chargés de centraliser les risques bancaires et les incidents de
paiement, des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la
situation financière et économique du débiteur (art. 12 de l’AUPC).

L'expert au règlement préventif rend compte régulièrement, au président de la


juridiction compétente, de l'état d'avancement de sa mission et formule toutes
observations utiles. S'il a connaissance de la survenance de la cessation des
paiements, il en informe sans délai le président de la juridiction compétente.

En cas de survenance de la cessation des paiements, le débiteur en informe sans


délai le président de la juridiction compétente.

Tout intéressé qui aurait connaissance de la cessation des paiements du débiteur


peut en informer le président de la juridiction compétente.

A tout moment, s'il est informé de la survenance de l'état de cessation des


paiements, le président de la juridiction compétente met fin sans délai au règlement
préventif et à la mission de l'expert, après avoir entendu ou dûment appelé ce
dernier ainsi que le débiteur et toute personne qu'il juge utile d'entendre.

S'il lui apparaît que l'adoption d'un concordat préventif est impossible, l'expert au
règlement préventif en informe le président de la juridiction compétente. Après
l'avoir entendu ainsi que le débiteur et, s'il le juge utile, les créanciers ou certains
d'entre eux, le président de la juridiction compétente décide de poursuivre la
procédure ou d'y mettre fin.

L'expert établit un rapport contenant l'accord conclu entre le débiteur et ses


créanciers ainsi que le projet de concordat préventif.

Ce rapport doit être établi dans les trois (03) mois de la décision d'ouverture du
règlement préventif, ce délai pouvant être prorogé, à titre exceptionnel, une seule

32
fois pour une durée d'un (01) mois, sur décision spécialement motivée du président
de la juridiction compétente à la demande de l'expert ou du débiteur.

L'expert est tenu de respecter les délais prévus, sous peine d'engager sa
responsabilité auprès du débiteur ou des créanciers.

Dans le délai précité, l'expert remet un exemplaire de son rapport au débiteur et en


dépose deux au greffe de la juridiction compétente. Un des deux exemplaires
déposés est transmis au ministère public par le greffe.

Dès le dépôt du rapport de l'expert, le président de la juridiction compétente saisie


convoque sans délai le débiteur à comparaître à une audience non publique pour y
être entendu. Il convoque également à cette audience l'expert ainsi que tout
créancier qu'il juge utile d'entendre. Le débiteur peut saisir lui-même la juridiction
compétente.

Paragraphe 3 : La décision du règlement préventif

Le Président du tribunal compétent est au cœur de la procédure. C’est lui qui est
saisi par le débiteur pour arbitrer entre ses créanciers et lui, en vue de la
conclusion d’un accord de règlement de ses dettes appelé concordat préventif contre
le bénéfice d’un moratoire. L’exécution de cet accord est également placée sous le
contrôle du même juge. Le juge intervient alors aussi bien en amont qu’en aval du
processus.

Le débiteur et le ou les créanciers sont convoqués, par lettre au porteur contre


récépissé ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par tout
moyen laissant trace écrite, trois (03) jours au moins avant la tenue de l'audience.

La juridiction saisie doit se prononcer immédiatement ou au plus tard dans un


délai de trente (30) jours à compter de sa saisine. Le règlement préventif continue
de produire ses effets, en particulier concernant la suspension des poursuites
individuelles des créanciers, jusqu'à ce que la juridiction statue. Si celle-ci n'est pas
saisie immédiatement ou si elle ne se prononce pas dans les trente (30) jours à
compter de sa saisine, le règlement préventif prend fin de plein droit, les créanciers
recouvrant l'exercice de tous leurs droits et le débiteur recouvrant la pleine
administration de ses biens.

A- Le concordat préventif et son homologation

Avec les bons offices de l’expert désigné, le débiteur procède à la négociation avec
ses créanciers aux fins de parvenir à la conclusion d’un accord. Si les mesures
proposées par le débiteur pour le redressement de son entreprise ou pour la sortie
de celle-ci des difficultés qu’elle rencontre sont acceptées par les créanciers, la
phase de l’homologation du concordat s’ouvre. Seulement, il peut arriver que le

33
débiteur ne parvienne pas à un accord avec ses créanciers25. Mais dans le cas où le
concordat préventif comporte une demande de délai n’excédant pas deux ans, la
juridiction compétente peut rendre ce délai opposable aux créanciers qui ont refusé
tout délai et toute remise sauf si ce délai met en péril l’entreprise de ces créanciers
(voir l’art. 15de l’AUPC). Il suffirait dans ce dernier cas que le créancier apporte la
preuve que le fait de ne pas recevoir le paiement est de nature à le conduire à la
cessation des paiements. Les créanciers de salaire, à cause du caractère alimentaire
de leurs créances, ne peuvent consentir aucune remise ni se voir imposer un délai
qu’ils n’ont consenti eux-mêmes. Durant le temps de la formation du concordat et
de son homologation, le débiteur continue de bénéficier de la suspension des
poursuites individuelles.

B- La décision du tribunal

Aux termes des dispositions de l’art. 15 de l’AUPC, la juridiction compétente statue


en audience non publique.Si elle constate la cessation des paiements, elle statue,
d'office, sur le redressement judiciaire ou la liquidation des biens sans préjudice
des dispositions des articles 29 et 33 ci- dessous.Lorsque la situation du débiteur le
justifie, elle homologue le concordat préventif, en constatant les délais et remises
consentis par les créanciers et en donnant acte au débiteur des mesures proposées
pour le redressement de l’entreprise. Les délais et remises consentis par les
créanciers peuvent être différents.

En cas de conversion d’une procédure de redressement judiciaire en liquidation des


biens, les personnes qui avaient consenti dans le concordat de redressement
judiciaire un nouvel apport en trésorerie au débiteur en vue d'assurer la poursuite
de l'activité de l’entreprise débitrice et sa pérennité sont payées au titre du privilège
selon les rangs prévus par les articles 166 et 167 (voir l’article 11-1 de l’AUPC26).

Les personnes qui fournissent un nouveau bien ou service en vue d’assurer la


poursuite de l’activité de l'entreprise débitrice et sa pérennité bénéficient du même
privilège pour le prix de ce bien ou de ce service.

25 Voir TGI de Ouagadougou (BF), jugement n° 286 du 03 novembre 2004, requête de la société
Boulangerie 2000 aux fins de règlement préventif, Ohadata J-05-233, op. cit., [En
ligne] :http://www.ohada.com.En l’espèce, tous les créanciers ayant rejeté l’offre de concordat
préventif, le tribunal fut obligé d’annuler l’ordonnance de suspension des poursuites antérieurement
prise.
26Selon l’article 11-1« En cas d'ouverture d'une procédure de liquidation des biens postérieurement à

l'homologation du concordat préventif par la juridiction compétente dans les conditions prévues à l'article
15 ci-dessous, les personnes qui avaient consenti dans ce concordat un nouvel apport en trésorerie au
débiteur en vue d'assurer la poursuite de l'activité de l'entreprise débitrice et sa pérennité sont payées au
titre du privilège selon les rangs prévus par les articles 166 et 167 ci-dessous.
Les personnes qui fournissent dans les mêmes conditions, un nouveau bien ou service en vue d'assurer
la poursuite de l'activité de l'entreprise débitrice et sa pérennité bénéficient du même privilège pour le
prix de ce bien ou de ce service.
Cette disposition ne s'applique pas aux apports consentis dans le cadre d'une augmentation du capital
social du débiteur.
Les créanciers du débiteur ne peuvent en aucun cas bénéficier de ce privilège pour des créances nées
antérieurement à l'ouverture du règlement préventif ».

34
Cette disposition ne s’applique pas aux apports consentis dans le cadre d'une
augmentation du capital social du débiteur.

Les créanciers du débiteur ne peuvent en aucun cas bénéficier de ce privilège pour


des créances nées antérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire.

Si des personnes bénéficient du privilège de cet art. 11-1, la juridiction qui


homologue le concordat préventif vérifie qu’il répond aux conditions prévues
auditarticle et que l’octroi de ce privilège ne porte pas atteinte aux intérêts des
créanciers. Elle mentionne dans sa décision ledit privilège et les montants garantis.

La juridiction compétente homologue donc le concordat préventif si :

- les conditions de validité du concordat préventif sont réunies ;


- aucun motif tiré de l'intérêt collectif ou de l'ordre public ne paraît de nature à
empêcher le concordat ;
- les délais consentis n'excèdent pas trois (03) ans pour l'ensemble des
créanciers et un (01) an pour les créanciers de salaires.

Au cas où des créanciers auraient refusé de consentir des délais ou remises au


débiteur, le président de la juridiction compétente fait ses bons offices entre ces
créanciers et le débiteur. Il entend ces derniers sur les motifs de leur refus et
provoque une négociation entre les parties en vue de leur permettre de parvenir à
un accord.

Si malgré les bons offices du président, les parties ne parviennent pas à trouver un
accord et dans le cas où le concordat préventif comporte seulement une demande
de délai n’excédant pas deux (02) ans, la juridiction compétente peut rendre ce délai
opposable aux créanciers qui ont refusé tout délai et toute remise sauf si ce délai
met en péril l’entreprise de ces créanciers.

Les créanciers de salaires et ceux d’aliments ne peuvent consentir aucune remise,


ni se voir imposer un délai qu’ils n’ont pas consenti eux-mêmes.

Si la juridiction compétente estime que la situation du débiteur ne relève d’aucune


procédure collective ou si elle rejette le concordat préventif proposé par le débiteur,
le règlement préventif prend fin sans délai. Cette décision remet les parties en l’état
antérieur.

L’accord entre le débiteur et ses créanciers ne produira tous ses effets que s’il est
homologué.

La décision de la juridiction compétente homologuant le concordat préventif met fin


à la mission de l’expert et à la procédure de règlement préventif, sous réserve des
formalités prévues à l'article 17. Toutefois, la juridiction compétente peut désigner,
d'office ou à la demande du débiteur ou d'un créancier, un syndic et/ou un ou des
contrôleurs chargés de surveiller l'exécution du concordat préventif homologué

35
dans les mêmes conditions que celles prévues pour le concordat de redressement
judiciaire homologué. La juridiction compétente peut désigner l'expert au règlement
préventif en qualité de syndic.

Elle désigne également un juge-commissaire. Celui-ci contrôle les activités du


syndic ou des contrôleurs chargés de surveiller l’exécution du concordat préventif
homologué, s'il en a été nommé, et rédige un rapport à l’intention de la juridiction
compétente tous les trois (03) mois et à tout moment à la demande de cette
dernière.

L’art. 16 de l’AUPC dispose que l’homologation du concordat préventif rend celui-ci


obligatoire pour tous les créanciers antérieurs à la décision d’ouverture du
règlement préventif, que leurs créances soient chirographaires ou garanties par une
sûreté dans les conditions de délais et de remises qu'ils ont consenties au débiteur
sans préjudice des dispositions de l'article 15. L'homologation du concordat rend
celui-ci également obligatoire pour les personnes coobligées ou qui ont consenti une
sûreté personnelle ou affecté ou cédé un bien en garantie lorsqu'elles ont acquitté
des dettes du débiteur nées antérieurement à cette décision.

Les créanciers munis d’un privilège général, d'un privilège mobilier spécial, d’un
gage, d’un nantissement ou d’une hypothèque ne perdent pas leurs garanties.
Toutefois, ils ne peuvent les réaliser qu’en cas d’annulation ou de résolution du
concordat préventif auquel ils ont consenti ou qui leur a été imposé.

A l’exception des personnes physiques, les coobligés ou les personnes ayant


consenti une sûreté personnelle ou affecté ou cédé un bien en garantie ne peuvent
se prévaloir des délais et remises du concordat préventif.

La prescription demeure suspendue à l’égard de tous les créanciers qui, par l'effet
du concordat préventif, ne peuvent exercer leurs droits ou actions, y compris toute
mesure d’exécution extrajudiciaire.

Le concordat préventif suspend également, pour la même durée, les délais impartis
aux créanciers parties audit concordat à peine de déchéance ou de résolution des
droits afférents aux créances mentionnées par ledit concordat.

Dès que la décision homologuant le concordat préventif est passée en force de chose
jugée, le débiteur recouvre la liberté d’administration et de disposition de ses biens.

L’expert désigné rend compte par écrit de sa mission au président de la juridiction


compétente dans le délai d’un (01) mois à compter de la décision statuant sur
l’homologation du concordat préventif ou de la décision mettant fin au règlement
préventif.

Le président de la juridiction compétente vise le compte rendu.

36
A défaut de retrait, par le débiteur, des papiers et effets remis par lui à l'expert,
celui-ci en est dépositaire pendant deux (02) ans à compter de son compte rendu.

Le syndic ou le ou les contrôleurs désignés en application de l’article 16 contrôlent


l’exécution du concordat préventif. Ils signalent sans délai tout manquement au
juge- commissaire.

Ils rendent compte par écrit, tous les trois (03) mois, au juge-commissaire du
déroulement des opérations et en informent le débiteur. Ce dernier dispose d'un
délai de quinze (15) jours pour formuler, s’il y a lieu, ses observations et
contestations.

Le syndic ou le ou les contrôleurs qui cessent leurs fonctions déposent leurs


comptes au greffe dans un délai de trente (30) jours suivant ladite cessation.

La rémunération du syndic en qualité de contrôleur est fixée par la juridiction qui


l'a nommé selon le barème établi pour les mandataires de justice.

A la demande du débiteur et sur rapport du syndic chargé du contrôle de


l'exécution du concordat préventif, s'il en a été désigné un, la juridiction compétente
peut décider toute modification de nature à abréger ou à favoriser cette exécution.

Les décisions de la juridiction compétente relatives au règlement préventif sont


exécutoires par provision.

Les décisions rejetant la demande d'ouverture du règlement préventif ou mettant fin


au règlement préventif, ou rejetant l’homologation du concordat préventif sont
susceptibles d’appel formé par le débiteur devant la cour d'appel, dans un délai de
quinze (15) jours à compter de leur prononcé.

La décision d’ouverture du règlement préventif est susceptible d’appel de la part des


créanciers et du ministère public, formé devant la cour d’appel, dans un délai de
quinze (15) jours à compter de la première publicité s’ils estiment que l’entreprise
est en cessation des paiements.

La décision homologuant le concordat préventif est susceptible d’appel de la part


des du ministère public et des créanciers, formé devant la cour d'appel, dans un
délai de quinze (15) jours à compter de son prononcé pour le premier et à compter
de la première publicité pour les suivants (c’est-à-dire pour les créanciers). La
juridiction d’appel statue dans un délai de trente (30) jours à compter de sa saisine.

Si la juridiction d’appel constate la cessation des paiements, elle fixe provisoirement


la date de celle-ci et prononce le redressement judiciaire ou la liquidation des biens
et renvoie impérativement la procédure devant la juridiction compétente pour être
statué, notamment, sur la désignation juge-commissaire.

37
Dans les trois (03) jours de la décision de la juridiction d’appel, le greffe de cette
juridiction en adresse un extrait au greffe de la juridiction du premier degré qui
procède à la publicité prescrite par l’article 17.

Le refus d’homologation du concordat. Aux termes des dispositions de l’ancien


art. 15 de l’AUPC, le concordat préventif n’est pas homologué dans trois cas bien
définis. La juridiction compétente refuse d’homologuer le concordat lorsque :

- la situation du débiteur ne relève d’aucune procédure collective, c’est-à-


dire non seulement le débiteur n’est pas en état de cessation des
paiements mais aussi ses difficultés ne sont pas de nature à justifier
l’introduction d’une requête aux fins d’ouverture du règlement préventif.
Dans ce cas, elle rejette le concordat préventif et annule la décision de
suspension des poursuites individuelles. Cette annulation remet les
parties au concordat préventif (le débiteur et les créanciers) en l’état
antérieur à cette décision ;
- les conditions mises à l’homologation ne sont pas remplies ;
- elle constate que le débiteur est déjà en état de cessation des paiements,
elle prononce, d’office et à tout moment, le redressement judiciaire ou la
liquidation des biens en lui accordant un délai de trente (30) pour faire la
déclaration et la proposition de concordat de redressement. En effet, si
l’offre de concordat n’est pas sérieuse et ne présente pas de réelles
possibilités d’exécution, le débiteur peut s’exposer soit à la procédure du
redressement judiciaire soit à la procédurede liquidation des biens qui
sont des procédures collectives plus graves.

En cas du prononcé de l’annulation ou de la résolution du concordat préventif, le


Tribunal doit prononcer le redressement judiciaire ou la liquidation des biens s’il
constate la cessation des paiements, ou annuler la décision de suspension des
poursuites individuelles si le débiteur n’a pas cessé ses paiements.

Paragraphe 4 : Le règlement préventif simplifié

Aux termes des dispositions de l’art. 24-1, « Tout débiteur répondant à la définition
de la petite entreprise (c’est-à-dire toute entreprise individuelle, société ou autre
personne morale de droit privé dont le nombre de travailleurs est inférieur ou égal à
vingt (20), et dont le chiffre d'affaires n’excède pas cinquante millions (50.000.000) de
francs CFA, hors taxes, au cours des douze (12) mois précédant la saisine de la
juridiction compétente) peut demander l’application de la procédure de règlement
préventif simplifié ».

Le débiteur souhaitant bénéficier du règlement préventif simplifié doit soumettre


une requête dans les conditions fixées par l’article 6, en tenant compte notamment
des dérogations accordées aux petites entreprises.

Nonobstant la disposition précédente, la procédure peut être ouverte même si


aucun projet de concordat préventif n’a été fourni.

38
Conjointement à la requête prévue à l’article 6, le débiteur qui remplit les conditions
d’application du règlement préventif simplifié produit une déclaration sur l’honneur
l’attestant.

La décision de la juridiction compétente de faire application du règlement préventif


simplifié n’est susceptible d’aucun recours. De même, les délais sont ici réduits. En
effet, les délais de trois (03) mois et d’un (01) mois, fixés par les articles 9, al. 1er, et
13, al, 2, sont respectivement réduits à deux (02) mois et à quinze (15) jours.

Si le projet de concordat préventif prévu à l'article 13 n’a pas été déposé par le
débiteur au moment de la demande d’ouverture, il est établi par ce dernier avec le
concours de l’expert au règlement préventif.

Ce projet précise les mesures et conditions envisagées pour le redressement de


l’entreprise débitrice, notamment les modalités d’apurement du passif et, en
particulier, la demande de délais et de remises, les personnes tenues d’exécuter le
concordat préventif, ainsi que, s’il y a lieu, les garanties fournies pour en assurer
l’exécution.

En tout état de cause, ce projet précise les éléments permettant d’établir la viabilité
financière et économique du débiteur.

39
Chapitre 2 : Lesprocédures collectives de traitement des
difficultés de l’entreprise : les procédures
curatives de redressement judiciaire et de
liquidation des biens

Il arrive, bien souvent, que les difficultés de l’entreprise soient telles que toute
prévention devienne impossible. Ces difficultés ne sont plus à craindre, c’est-à-dire
virtuelles. Elles sont réelles, c’est-à-dire actuelles. L’entreprise devient alors une
proie beaucoup plus facile à la merci des créanciers. Dans le souci de sauver
l’entreprise ou ses activités et/ou dans celui d’organiser un meilleur paiement des
créanciers, le législateur OHADA transforme le juge en une sorte de force
d’interposition entre l’entreprise en difficulté et ses créanciers. Aux termes des l’art.
2-2° de l’AUPC, « le redressement judiciaire est une procédure destinée à la
sauvegarde de l’entreprise et à l’apurement de son passif au moyen d’un concordat
de redressement » tandis que la liquidation des biens est définie par l’art. 2-3°
comme« une procédure qui a pour objet la réalisation de l’actif du débiteur pour
apurer son passif ».

Ces deux procédures considérées comme des procédures de traitement sont


ouvertes à la suite de la cessation des paiements par une décision judiciaire. Elles
produisent des effets conformément aux objectifs que le législateur leur a assignés.
Les règles communes aux procédures judiciaires (Section première) peuvent être
isolées des régimes spécifiques à chaque procédure (Section seconde).

Section 1 : Les règles communes aux procédures judiciaires de traitement des


difficultés

L’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens


est subordonnée à la réunion de certaines conditions. Outre les conditions relatives
au statut personnel des assujettis tel que décrit dans le chapitre précédent, il faut
que le débiteur visé soit en état de cessation des paiements et comme le précise
l’ancien art. 32, al. 1er, de l’AUPC : « … une décision de la juridiction compétente ».
Ces règles communes se déclinentdonc en premier lieu, en des règles de fond, liées
à la cessation des paiements (§ 1) puis, en second lieu, en des règles de procédure
(§ 2).

§ 1 : Les règles de fond : la cessation de paiement

Seules les entreprises débitrices qui ont cessé de payer leurs créanciers peuvent
relever des procédures collectives de traitement ou des procédures curatives de
traitement. D’après l’ancien art. 25 de l’AUPC, « Le débiteur qui est dans
l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible doit faire
une déclaration de cessation des paiements aux fins d’obtenir l’ouverture d’une
procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens, quelle que soit la

40
nature de ses dettes ».Il faudra d’abord rechercher le contenu de la notion de
cessation des paiements (A) avant d’établir les fonctions qu’elle exerce (B).

A- La notion de cessation des paiements

La notion de cessation des paiements apparaît comme une notion comptable. Selon
l’ancien art. 25 de l’AUPC, elle résulte de l’impossibilité pour le débiteur de faire
face à son passif exigible avec son passif disponible. Le législateur OHADA,
s’inspirant de son homologue français la définit dans le nouvel Acte uniforme en
son art. 1-3 comme « L’état où le débiteur se trouve dans l’impossibilité de faire face
à son passif exigible avec son actif disponible, à l'exclusion des situations où les
réserves de crédit ou les délais de paiement dont le débiteur bénéficie de la part de
ses créanciers lui permettent de faire face à son passif exigible ».L’art. 25 du nouvel
Acte uniforme dispose que : « La procédure de redressement judiciaire ou de
liquidation des biens est ouverte à tout débiteur en état de cessation des paiements.
La cessation des paiements est l'état où le débiteur se trouve dans l'impossibilité de
faire face à son passif exigible avec son actif disponible, à l'exclusion des situations
où les réserves de crédit ou les délais de paiement dont le débiteur bénéficie de la
part de ses créanciers lui permettent de faire face à son passif exigible.
Le débiteur qui est en cessation des paiements doit faire une déclaration aux fins
d'obtenir l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des
biens quelle que soit la nature de ses dettes.
La déclaration de cessation des paiements doit être faite par le débiteur au plus tard
dans les trente (30) jours qui suivent la cessation des paiements et déposée au greffe
de la juridiction compétente contre récépissé.
Sans préjudice des dispositions de l'article 3327, le débiteur précise dans sa
déclaration s'il demande l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de
liquidation des biens ».

En droit français, l’ordonnance du 18 décembre 2008 qui a modifié l’art. L. 631-1


du Code de commerce en ajoute les dispositions suivantes : « le débiteur qui établit
que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses
créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible
n’est pas en cessation des paiements ».

La cessation des paiements est l’impossibilité où se trouve le débiteur de faire face à


son passif exigible par son actif disponible. Elle n’est pas à confondre avec la
situation voisine que constitue l’insolvabilité. La cessation de paiement suppose en
effet le non paiement d’une dette certaine, liquide et exigible28 alors que
l’insolvabilité recouvre l’insuffisance de l’actif (disponible ou non) à répondre du
passif (exigible ou non) : le passif dépasse l’actif. Une entreprise peut relever des

27 L’art. 33 de l’AUPC dit que « La juridiction compétente qui constate la cessation des paiements
prononce soit l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, soit l'ouverture de la liquidation des
biens ».
28 Selon une opinion de la Cour de cassation française, rapportée par F.M. SAWADOGO inop. cit., p.

101 n° 113, pour conduire à la cessation des paiements, la dette ne doit pas être seulement exigible,
elle devra être exigé : « le passif à prendre en considération pour caractériser l’état de cessation des
paiements est le passif exigible et exigé, dès lors que le créancier est libre de faire crédit au débiteur ».
Cass. Com., 28 avril 1998, R.J.D.A., 1998, 773 et s.

41
procédures collectives si elle ne dispose pas de quoi régler son passif échu alors
même que ses ressources globales permettraient de payer les dettes.

Cette définition de la notion de cessation des paiements est d’abord


jurisprudentielle avant d’être légale. Le législateur exige un signe net de défaillance
et non une possibilité de défaillance qui ne correspond ni à une situation
irrémédiablement compromise exigée par la jurisprudence avant 1967, ni à des
difficultés passagères ou momentanées. Critère traditionnel d’ouverture de la
procédure collective, la cessation des paiements suppose en elle-même, la
réalisation de deux conditions : l’exigibilité du passif et l’insuffisance de l’actif
disponible.

1- L’actif disponible

On appelle actif disponible, la trésorerie d’une entreprise. Il est constitué des


sommes dont l’entreprise peut disposer immédiatement, en raison de ce qu’elles
sont liquides ou que leur conversion en liquide pourrait être faite à tout moment.
On peut y regrouper les sommes disponibles en caisse, le solde créditeur des
comptes bancaires, les effets de commerce ou les valeurs mobilières côtés en
bourse, etc. L’actif disponible n’intègre pas en principe les actifs réalisables à court
terme, mais en pratique, un tribunal pourra difficilement prononcer le
redressement judiciaire à l’encontre d’une entreprise qui peut rapidement mobiliser
les soldes nécessaires au règlement de son passif. L’indisponibilité de l’actif ou son
insuffisance peut se manifester de plusieurs manières.

Premièrement, en cas de cessation matérielle des paiements. Exemples : le débiteur


émet des chèques sans provision, accepte des effets qui finissent pas être protestés,
ou, cas extrême, ferme son entreprise et disparaît. Dans tous ces cas, le montant de
la dette restera impayé. Mais une difficulté accidentelle et temporaire de trésorerie
n’est pas caractéristique d’une cessation de paiement. Il appartient au juge, suivant
chaque espèce, de déterminer la situation de l’actif. Il caractérisera alors la
cessation des paiements à la date du jugement.

Deuxièmement, l’insuffisance de l’actif ou son indisponibilité peut être induite dans


les cas de cessation déguisée des paiements. Le débiteur donne l’impression de faire
face à ses échéances alors même que la situation réelle de sa trésorerie est obérée.
Il utilise par exemple des moyens frauduleux pour se procurer de la liquidité.
Exemple : il vend des marchandises à perte, contracte des emprunts qu’il ne pourra
manifestement pas honorer, délivre des effets de complaisance, etc.

2- Le passif exigible

Le passif est considéré comme exigible lorsqu’il n’a pas été payé, alors qu’il aurait
dû l’être. Pour que cette condition se réalise, la dette impayée doit être
particulièrement caractérisée, peu importe par ailleurs sa nature.

a- Les caractères de la dette

42
La dette doit être liquide, c’est-à-dire être évaluée en argent ou résulter d’un titre
qui contient cette évaluation.

La dette doit être également exigible, c'est-à-dire échue et, par conséquent,
susceptible d’exécution forcée. On ne peut donc pas faire grief à un débiteur de
refuser de payer une dette non échue. Mais la dette échue n’est plus exigible s’il
intervient un report d’échéance. Le délai de grâce accordé constitue un obstacle à
l’ouverture des procédures collectives judiciaires. De même, le passif rendu exigible
par le prononcé de la liquidation ne peut pas être pris en considération. Mais il ne
suffit pas que la dette soit exigible, il faut encore qu’elle soit exigée. La survenance
du terme ne suffit pas, à elle seule, à déclencher les procédures. Il faut que la
créance soit réclamée. Pour cela, le créancier doit mettre en demeure le débiteur.
C’est la mise en demeure qui permet de découvrir la défaillance du débiteur.

Enfin, la dette doit être certaine, c’est-à-dire incontestable et non discutée.

b- La nature de la dette

Suivant les termes de l’article 25 de l’Acte uniforme sur les procédures collectives
d’apurement du passif, la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation
des biens est ouverte, « quelle que soit la nature de la dette ». On en déduit que la
dette dont le paiement est échu peut être de nature civile ou commerciale. Cette
formulation permet désormais de déclencher l’une ou l’autre de ces procédures à
l’occasion du non paiement d’une dette civile comme les impôts ou d’une dette
commerciale comme les redevances de la sécurité sociale.

La cessation des paiements permet de faire connaître l’état réel de la trésorerie de


l’entreprise. Encore une fois, il ne faut pas confondre la situation de la trésorerie
avec la solvabilité de l’entreprise. Celle-ci pourrait bien être solvable mais en état de
cessation des paiements. Il suffit que l’actif disponible ne suffise point à satisfaire le
passif exigible. Dans bien des cas, la cessation des paiements exprime la situation
dans laquelle se trouve une entreprise qui n’est pas en mesure de réaliser à temps
ses actifs pour faire face à son passif. La notion d’exigibilité prend ici une
dimension importante puisque c’est elle qui détermine à situer si la trésorerie peut
faire face aux dettes échues.

L’état de cessation des paiements permet donc de prévenir les risques sérieux
d’insolvabilité. Elle autorise à mettre l’entreprise sous surveillance lorsqu’il est
permis d’espérer son redressement, ou envisager sa disparition lorsque sa situation
est irrémédiablement obérée. Dans tous les cas, elle déclenche un processus
judiciaire de protection de tous les intérêts en présence : ce sont les procédures de
redressement judiciaire ou de la liquidation des biens.

B- La constatation de la cessation des paiements

Les procédures de traitement ne peuvent être ouvertes que si le tribunal compétent


constate la cessation des paiements. Cela suppose que la preuve de la cessation des
paiements soit rapportée et que la date de l’arrêt des paiements soit déterminée.

43
1- La preuve de la cessation des paiements

Elle peut être rapportée par tous moyens, y compris la voie électronique, les
témoignages et les présomptions lorsqu’il s’agit des dettes commerciales (art. 5 de
l’AUDCG29). Lorsque les dettes en cause sont de nature civile, la preuve doit se faire
selon les règles du droit civil, c’est-à-dire un écrit ou un autre procédé de preuve
parfaite.

La preuve de cessation des paiements ne suffit pas, il faut établir en plus


l’impossibilité de faire face au passif exigible avec l’actif disponible. En pratique,
cela va résulter de l’aveu du débiteur lui-même : il ne conteste pas l’existence d’un
passif, il ne justifie pas avoir obtenu un moratoire et il ne produit pas de document
comptable récent permettant d’examiner sa situation financière actuelle. Certains
chefs d’entreprise sont plutôt enclins à camoufler ou à dissimuler leur situation
réelle en refusant par exemple de communiquer des détails sur leur situation. Il
appartiendra alors aux créanciers de prouver l’état de cessation des paiements.
Ceux-ci pourront s’appuyer notamment sur le protêt faute de paiement ou des
chèques sans provision, etc.

Le tribunal doit constater l’état de cessation des paiements mais si le débiteur lui-
même a sollicité l’ouverture de la procédure, il ne pourra pas prétendre par la suite
que l’impossibilité de régler le passif n’a pas été constatée par le Juge.

Dans tous les cas, l’appréciation de la situation de l’entreprise a lieu au moment où


le tribunal statue. Cela signifie que si la situation de cessation des paiements
existait au moment de la saisine et qu’elle a disparu au moment où le tribunal
statue soit parce que le débiteur a apuré le passif, soit parce que les créanciers ont
consenti les délais de paiement, la procédure ne pourra pas être ouverte.

Le Juge français estime la règle vaut même pour les juridictions d’appel. Ainsi, dans
un arrêt du 06 octobre 1992, la chambre commerciale de la Cour de cassation a pu
affirmer que doit être cassé, l’arrêt qui confirme le jugement de mis en
redressement judicaire alors qu’au moment où elle statue, la Cour d’appel a
constaté que la société n’était pas en arrêt des services de caisse.

2- La date de cessation des paiements

La date de cessation des paiements est déterminée par le Tribunal. Cette date peut
être difficile à fixer lorsque les paiements interrompus ont été repris par la suite.
L’art. 34, al. 1er, de l’AUPC dispose que « La juridiction compétente doit fixer
provisoirement la date de cessation des paiements, faute de quoi celle-ci est réputée
avoir lieu à la date de la décision qui la constate ». La loi laisse au tribunal la faculté
de modifier la date initialement fixée en cours de procédure et de reporter
éventuellement en arrière.En effet, la date de cessation des paiements peut ne pas

29ART. 5 de l’AUDCG : « Les actes de commerce se prouvent par tous moyens même par voie électronique
à l'égard des commerçants.
Tout commencement de preuve par écrit autorise le commerçant à prouver par tous moyens contre un
non-commerçant ».

44
être celle indiquée par le débiteur ou même celle du jugement qui la constate mais
une date antérieure qui est fixée au maximum à une date antérieure de dix-huit
mois à partir du jour du jugement d’ouverture. Sauf cas de fraude, elle ne peut être
reportée à une date antérieure à la décision définitive ayant homologué le concordat
préventif (art. 34, al. 2, de l’AUPC).

La juridiction compétente qui modifie, dans les limites fixées à l’alinéa précédent, la
date de cessation des paiements par une décision postérieure à la décision
d'ouverture statue par une décision spécialement motivée.

Toute demande tendant à faire fixer la date de cessation des paiements à une autre
date que celle fixée par la décision d'ouverture ou une décision postérieure n’est pas
recevable après la convocation de l'assemblée concordataire prévue à l’article 122
ou après expiration d'un délai d'un an à compter de la décision prononçant la
liquidation des biens.

La période écoulée entre la date de cessation des paiements retenue par le Juge et
le jugement d’ouverture est la période suspecte. En effet, selon l’article 67, « la
période suspecte commence à compter de la date de la cessation des paiements et
prend fin à la date de la décision d'ouverture du redressement judiciaire ou de la
liquidation des biens ».

La période suspecte ne se justifie logiquement qu’avec l’ouverture des procédures de


redressement judiciaire et de liquidation des biens. Cette période est instaurée dans
le but de permettre la reconstitution de l’actif de l’entreprise par la remise en cause
de la validité de certains actes conclus par le débiteur en cessation des paiements.
L’idée qui sous-tend l’instauration de cette période suspecte est la crainte que le
débiteur aux abois ne puisse facilement organiser son insolvabilité soit en
dissimulant une partie de ses biens, soit en avantageant certains de ses créanciers
(en rompant ainsi l’égalité entre les créanciers).

3- Les nullités de la période suspecte

Pendant la période suspecte, tous les actes non conformes à la gestion normale de
l’entreprise et susceptibles de causer un préjudice aux autres créanciers sont
déclarés inopposables. Les articles 68 à 71 de l’AUPC traitent les inopposabilités de
la période suspecte. Les actes accomplis par le débiteur ou les dirigeants
d’entreprise pendant cette période sont suspects de fraude, et sont par voie de
conséquence, inopposables à la masse des créanciers. Ils sont considérés comme
portant atteinte à l’actif disponible de l’entreprise. Les anciens auteurs dénonçaient
« le caractère frauduleux des actes faits pendant cette période, qu’ils appelaient
proximumtempusdecoctionis »30.

Le syndic seul a la qualité pour agir en déclaration d’inopposabilité des actes faits
pendant la période suspecte devant la juridiction ayant prononcé l’ouverture de la

30 Georges RIPERT et René ROBLOT, Traité de Droit commercial, Tome 2, par Philippe DELEBECQUE
et Michel GERMAIN, op. cit., n° 3108, p. 1075.

45
procédure collective. Cette action peut être exercée jusqu’au dépôt de l’arrêté des
créances (art. 70 de l’AUPC). D’une manière générale, l’inopposabilité profite à la
masse des créanciers. Si l’inopposabilité atteint un paiement, l’accipiens devra
restituer la somme reçue. Il se retrouvera créancier antérieur. L’inopposabilité joue
rétroactivement, et le créancier devra déclarer ou produire sa créance au passif du
débiteur. S’il s’agit d’un contrat commutatif déséquilibré, le cocontractant doit
restituer le bien et produire au passif du débiteur pour la juste valeur de la
prestation fournie, ou il doit payer le complément du juste prix, si le contrat a été
exécuté. Mais si le contrat n’a pas été exécuté, il ne peut plus l’être.

L’acte à titre gratuit déclaré inopposable est privé d’effet s’il n’a pas été exécuté.
Dans le cas contraire, le bénéficiaire de la libéralité doit rapporter le bien dont la
propriété a été gratuitement transférée (art. 71 – 2°, al. 1er, de l’AUPC). En cas de
sous-aliénation à titre gratuit, le sous-acquéreur, même de bonne foi, est soumis à
l’inopposabilité et au rapport du bien ou au paiement de sa valeur à moins que le
bien ait disparu de son patrimoine par suite d’un cas de force majeure (art. 71 – 2°,
al. 2, de l’AUPC). En tout état de cause, le bénéficiaire principal de l’acte à titre
gratuit reste tenu du paiement de la valeur du bien si le sous-acquéreur ne peut ou
ne doit rapporter le bien (article 71 – 2°, al. 4, de l’AUPC).

Par contre, les actes à titre onéreux déclarés inopposables sont privés d’effets s’ils
n’ont pas été exécutés (art. 71 – 5°, al. 1er, de l’AUPC). S’il s’agit d’une aliénation
exécutée, l’acquéreur doit rapporter le bien et produire sa créance au passif du
débiteur. En cas de sous-aliénation à titre gratuit, le sous-acquéreur est tenu de
restituer le bien sans recours contre la masse alors que s’il y a eu sous-aliénation à
titre onéreux, le sous-acquéreur est tenu de rapporter le bien et de produire sa
créance au passif du débiteur si, au moment de l’acquisition du bien par lui, il avait
eu connaissance du caractère inopposable de l’acte de son auteur (art. 71 – 5°, al.
2, de l’AUPC). Si en cas de sous-aliénation à titre onéreux, le sous-acquéreur avait
connaissance de la cessation des paiements du débiteur, il sera soumis au rapport
ou au paiement de la valeur du bien acquis par lui (art. 71 – 2°, al. 3, de l’AUPC).

Aux termes des dispositions l’article 71-5°, alinéa 3, de l’AUPC, si le débiteur a reçu
tout ou partie de la prestation du cocontractant qui ne peut être restitué en nature,
le créancier doit produire sa créance pour la valeur de la prestation fournie.
Certaines inopposabilités sont de droit, et les autres facultatives.

a- Les inopposabilités de droit

L’article 68 de l’AUPC énumère les actes qui sont inopposables de droit à la masse
des créanciers. Il s’agit d’une série d’actes qui, selon MM. Georges RIPERT et René
ROBLOT, « ne peuvent pas ne pas être frauduleux s’ils ont été accomplis pendant la
période suspecte ». Il revient à la juridiction compétente seule de prononcer les
inopposabilités de droit. Pour ce faire, elle doit vérifier si l’acte visé entre dans
l’énumération de l’article 68, et s’il est effectivement accompli dans la période
suspecte.

46
Le législateur OHADA énumère limitativement les actes inopposables de droit à la
masse. Ce sont :

- les actes à titre gratuit translatifs de propriété mobilière et immobilière. Ils


regroupent les libéralités sous toutes ses formes (les donations par acte
authentique ou don manuel, les donations indirectes ou déguisées ou la
remise de dette à titre gratuit, les exagérations des primes) que peut
consentir le débiteur ou les dirigeants d’entreprise31 ;
- les contrats commutatifs déséquilibrés, les paiements de dettes non
échues. Ils concernent essentiellement le contrat de vente et le partage, ou
d’une manière générale tous les contrats dans lesquels l’avantage attendu
par chaque partie est connu et peut être exactement évalué dès la
conclusion de l’acte (art. 1104, al. 1er, du Code civil français) ou dans
lesquels les obligations du débiteur excèdent notablement celles de l’autre
partie (art. L. 632-1 I 2° du Code de commerce français). Les
inopposabilités de ces actes se fondent sur l’idée de la lésion. Le juge
appréciera souverainement le caractère lésionnaire du contrat commutatif,
c’est-à-dire qu’il recherchera si l’acte conclu ne cache pas une donation
déguisée ou si les prestations promises ne portent pas atteinte à la règle
de l’égalité entre les créanciers. Les contrats aléatoires, en raison de l’aléa
qui rend impossible l’appréciation de l’équivalence des prestations
promises, sont en principe exclus de cette catégorie d’actes frappés
d’inopposabilités. Seulement, le droit positif français est nuancé en ce qui
concerne certains contrats aléatoires, tels que la vente avec constitution
de rente viagère. La Cour de cassation française avait admis que
l’opération n’était pas à l’abri de la lésion lorsque des circonstances
spéciales donnent au juge le moyen de déterminer la valeur des
obligations soumises à l’aléa32 ou lorsque le montant des arrérages de la
rente est au plus égal au revenu de l’immeuble vendu33. Le juge dans son
appréciation sera amené à prononcer la nullité de toutes les opérations
qui ne sont aléatoires qu’en apparence, et ne comportent pas un véritable
aléa, si elles sont accomplies en période dite suspecte ;
- le paiement des dettes non échues.Cette opération du débiteur en
situation économique et financière difficile est frappée d’inopposabilité
parce qu’elle est suspecte de fraude. Elle est d’ailleurs contraire à la
stratégie du redressement de l’entreprise qui traverse des difficultés. La
décision de payer une dette non encore échue au moment où l’entreprise

31 En France, l’admission des constitutions de dot au titre des actes à titre gratuit translatifs de
propriété a fait l’objet d’une jurisprudence fluctuante. D’abord, avant la loi du 13 juillet 1967, une
ancienne jurisprudence, favorable aux époux dotés, s’était affirmée à la fois sur l’exercice de l’action
paulienne et sur l’inopposabilité de la période suspecte. La constitution de dot était considérée comme
une donation dans les rapports entre le constituant et l’enfant doté, mais elle était traitée comme un
acte à titre onéreux dans les rapports du donateur et de ses créanciers. Ensuite, la loi de 1967 avait
renversé cette jurisprudence en considérant les constitutions de dot parmi les actes à titre gratuit,
inopposables à la masse. Enfin, tout comme le droit OHADA, la nouvelle loi ne fait aujourd’hui aucune
mention relativement aux constitutions de dot en période dite suspecte. Il reviendrait alors au juge
d’apprécier si la constitution de la dot revêt un caractère frauduleux, et est de nature à porter atteinte
à l’actif disponible de l’entreprise.
32Cass. civ., 28 février 1951, Gaz. Pal., 1951, 1, 247 ; 22 avril 1955, Bull. civ., I, n° 161.
33Cass. req., 29 décembre 1930, DH, 1931, 53 ; 5 février 1964, Gaz. Pal., 1964, 2, 93.

47
est dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible par son actif
disponible cache indubitablement l’intention de favoriser l’accipiens. Seul
le paiement des effets de commerce (lettre de change, billet à ordre ou
chèque) effectué depuis la cessation des paiements pour régler une dette
non échue échappe à cette règle. Mais, s’il est établi que le tireur d’une
lettre de change, ou le bénéficiaire d’un chèque ou le premier endosseur
du billet à ordre connaissait la cessation des paiements du tiré soit au
moment de l’émission, soit au moment du paiement de l’effet, la masse des
créanciers peut exercer à son égard une action en rapport ;
- les paiements de dettes échues opérées de façon anormale. En période dite
suspecte, le débiteur peut procéder au paiement de ses dettes arrivées à
échéance, encore faut-il qu’il le fasse par des moyens normaux. Est
normal, le paiement par lequel le débiteur remet au créancier les valeurs
qu’il lui doit. Par une interprétation a contrario de l’article 68-4°, les
paiements des dettes échues, effectués pendant la période suspecte seront
opposables à la masse des créanciers s’ils le sont en espèce, par effet de
commerce, virement, prélèvement, carte de paiement ou de crédit,
compensation légale, judiciaire ou conventionnelles de dettes ayant un
lien de connexité entre elles ou tout autre mode normal de paiement. La
liste des moyens normaux de paiement est loin d’être exhaustive. La
formule générale « tout autre mode normal de paiement » comprendrait
tous les procédés modernes de règlement ;
- les constitutions de sûretés réelles (sur les biens du débiteur) pour la
garantie de dettes antérieures. Pour éviter la rupture de l’égalité entre les
créanciers, le législateur OHADA, à la suite de son homologue français,
déclare inopposable de droit toute constitution de sûreté réelle pour la
garantie d’une dette antérieure. Le domaine de cette inopposabilité des
sûretés réelles consenties pour la garantie des dettes antérieures est bien
défini par le législateur. Il s’agit des sûretés conventionnelles, c’est-à-dire
l’hypothèque conventionnelle, le nantissement conventionnel et le gage.
Pourront aussi être inclus dans cette liste l’antichrèse34 et le warrant sur
les marchandises déposées dans un magasin général35. En droit positif
français, les inopposabilités des sûretés conventionnelles consenties en
période dite suspecte pour la garantie des dettes antérieures s’étendent à
toutes sortes de warrants : les warrants à domicile et le nantissement de
créances professionnelles de la loi du 2 janvier 1981. L’hypothèque qui
résulte de plein droit du jugement condamnant le débiteur (hypothèque
judiciaire) rentre aussi dans ce domaine de l’inopposabilité des sûretés
réelles consenties pour la garantie des dettes antérieures. La constitution
de sûreté est, bien sûr, indispensable pour la garantie des crédits
sollicités, mais une sûreté consentie ultérieurement après l’octroi des
crédits cache indiscutablement une intention de fraude ou une volonté de
favoriser le créancier bénéficiaire ;

34Cass. req., 29 novembre 1932, Journ. Faillites, 1938, 562.


35Cass. req., 2 mars 1938, D.H., 1938, 340.

48
- les mesures conservatoires. Il n’est pas question ici des saisies
conservatoires « dont l’avenir est, de toute façon, compromis par l’arrêt des
poursuites individuelles résultant du jugement d’ouverture »36. Mais, ces
inscriptions se rapportent aux hypothèques forcées judiciaires ou aux
nantissements forcés judiciaires qui sont destinés « à garantir une créance
non assortie de titre exécutoire et mise en péril »37.

Certains de ces actes inopposables de droit sus-énumérés ont un caractère aussi


général qu’ils peuvent concerner toute une série d’actes inopposables s’ils sont
accomplis en période suspecte.

b- Les inopposabilités facultatives

Les actes qui peuvent être frappés d’inopposabilités facultatives s’ils sont accomplis
en période suspecte sont contrairement à ceux frappés d’inopposabilités de droit,
les actes qui ne revêtent aucun caractère anormal. Le fondement des
inopposabilités facultatives est l’article 69 de l’AUPC. Il s’agit ici d’une simple
faculté ou possibilité dont dispose la juridiction compétente de déclarer
inopposables à la masse des créanciers, sous certaines conditions, certains actes
qui en réalité, n’ont rien d’anormal.

S’agissant des inopposabilités facultatives, les juges disposent en principe d’une


large liberté d’appréciation même si les conditions pour les déclarer inopposables
sont remplies. Par contre, concernant les inopposabilités de droit, les juges n’ont
aucun pouvoir d’appréciation. Il faut que l’acte en question soit accompli pendant la
période suspecte, à l’exception des actes à titre gratuit qui peuvent être déclarés
inopposables s’ils ont été accomplis dans les six mois précédant la cessation des
paiements. Le législateur exige en outre du créancier qu’il ait eu connaissance de
l’état de cessation des paiements du débiteur lorsqu’il a accompli l’acte. L’acte doit
également avoir causé un préjudice à la masse des créanciers.

Les inopposabilités facultatives sont prononcées toutes les fois que les conditions
des inopposabilités de droit ne sont pas réunies. Ainsi, l’Acte uniforme mentionne-t-
il deux séries d’inopposabilités facultatives : l’une concerne les actes à titre gratuit,
et l’autre les actes à titre onéreux. En principe, les actes à titre gratuit translatifs de
propriété mobilière et immobilière sont inopposables de droit s’ils sont accomplis
pendant la période dite suspecte. La suspicion de fraude qui entoure de tels actes
est tellement grande que le législateur donne à la juridiction compétente la
possibilité de remonter jusqu’à six mois avant la cessation des paiements pour les
déclarer (facultativement) inopposables à la masse des créanciers. Cette règle de
l’article 69-1-1° de l’AUPC reprend ainsi l’article 29, alinéa 3, de la loi française du
13 juillet 1967, et l’article 957 du Code sénégalais des obligations civiles et
commerciales.

36 Philippe PETEL, n° 374, cité par Jean René GOMEZ, OHADA – Entreprise en difficulté, lecture de
l’Acte uniforme de l’OHADA portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif à la
lumière du droit français,op. cit., n° 98, p. 128.
37 Joseph ISSA-SAYEGH, Commentaire introductif des hypothèques forcées judiciaires, inOHADA,

Traité et actes uniformes commentés et annotés, op. cit., p. 963.

49
Les actes à titre onéreux facultativement inopposables à la masse des créanciers
sont de trois ordres. Il s’agit d’abord de la constitution de sûretés réelles mobilières
ou immobilières, consenties ou obtenues pour des dettes concomitantes lorsque
leur bénéficiaire a eu connaissance de la cessation des paiements du débiteur. Sont
ensuite visés, les actes à titre onéreux autres que ceux frappés d’inopposabilités de
droit. Enfin, les paiements volontaires des dettes échues peuvent être inopposables
à la masse des créanciers si ceux qui ont perçu ces paiements ont eu connaissance
de la cessation des paiements du débiteur. Les inopposabilités facultatives
relativement aux dettes échues concernent les paiements opérés par des procédés
normaux comme les paiements par des effets de commerce qui sont néanmoins
entachés de quelques injustices, d’où la possibilité d’exercer une action en rapport.

§ 2 : Le jugement d’ouverture

La juridiction compétente ne peut pas prononcer l’ouverture de la procédure si le


débiteur ne relève pas de l’une des deux procédures possibles ou s’il n’y a pas de
cessation des paiements. Dès lors que les conditions de fond sont réunies, la
juridiction compétente doit rendre une décision d’ouverture.

La nature de ce jugement est controversée. On parle de jugement déclaratif dans la


mesure où il constate un état de cessation des paiements antérieurs. Le Professeur
SAWADOGO estime que cette qualification est inexacte et on doit reconnaître avec
lui que le jugement d’ouverture ne se contente pas de constater une situation
préexistante. Bien au contraire, il crée une situation juridique nouvelle à travers la
mise en place d’organes et la modification des droits et obligations à la fois du
débiteur et des créanciers. Ce jugement doit être publié dans le but d’informer les
créanciers, les personnes qui ont traité avec le débiteur ou qui s’apprêtent à traiter
avec lui.

Cette publicité est faite d’abord au RCCM et ensuite insérée par extrait au journal
officiel.

Le jugement d’ouverture a un contenu imposé. Il choisit la procédure applicable,


fixe la date de cessation des paiements et nomme les organes de la procédure.

A- Les modes de saisines

Trois catégories de personnes peuvent prendre l’initiative du déclenchement de la


procédure du redressement judiciaire ou de la liquidation des biens. Ce sont le
débiteur, les créanciers et le tribunal lui-même.

1- La saisine par le débiteur

Selon l’art. 25 de l’AUPC, le débiteur qui est dans l’impossibilité de faire face à son
passif exigible avec son actif disponible doit faire une déclaration au greffe de la
juridiction compétente au plus tard dans les trente (30) jours qui suivent cette
cessation des paiements contre récépissé aux fins d’obtenir l’ouverture d’une
procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens : c’est la saisine
par déclaration du débiteur appelée couramment dépôt de bilan.

50
Cette déclaration doit être déposée au greffe du tribunal par le débiteur lui-même
ou par le représentant légal de la personne moral ou par toute autre personne
munie d’un mandat spécial.

La déclaration est assortie d’un certain nombre de documents énumérés à l’art. 26


de l’AUPC. Ce sont, entre autres :

- une attestation d'immatriculation, d'inscription ou de déclaration d'activité


à un registre ou à un ordre professionnel ou, à défaut, tout autre
document de nature à prouver la régularité de l'activité exercée par le
débiteur ;
- les états financiers de synthèse comprenant, le bilan, le compte de
résultat, un tableau financier des ressources et des emplois, l'état annexé
et, en tout état de cause, le montant du chiffre d'affaires et des bénéfices
ou des pertes des trois (03) derniers exercices ou, à défaut, tout autre
document de nature à établir la situation financière et économique du
débiteur si la déclaration est faite par un débiteur répondant à la
définition de la petite entreprise;
- l'état détaillé, actif et passif, des sûretés personnelles et réelles données ou
reçues par l'entreprise et ses dirigeants;
- l'inventaire des biens du débiteur avec indication des biens mobiliers
soumis à revendication par leurs propriétaires et de ceux affectés d'une
clause de réserve de propriété ou, à défaut, un inventaire provisoire des
biens du débiteur si la demande est introduite par un débiteur répondant
à la définition de la petite entreprise ;
- la liste des travailleurs avec l'indication du montant des salaires et des
charges salariales impayés à la date de la demande ou, à défaut, tout
autre document de nature à permettre d'identifier et de dénombrer les
travailleurs du débiteur et d'estimer le montant des salaires et des charges
salariales impayés si la déclaration est faite par un débiteur répondant à
la définition de la petite entreprise ;
- un document indiquant les noms, prénoms et l'adresse des représentants
du personnel ;
- s'il s'agit d'une personne morale, la liste des membres solidairement
responsables des dettes de celle-ci, avec indication de leurs noms et
domiciles, ainsi que les noms, prénoms et adresses de ses dirigeants ;
- le cas échéant, un projet de concordat de redressement judiciaire.

Tous ces documents doivent être datés, signés et certifiés conformes et sincères par
le déclarant. L’objet de ces documents est d’informer le tribunal sur la situation de
l’entreprise.

L’article 27 de l’AUPC précise qu’en même temps que la déclaration et au plus tard
dans soixante (60) jours qui suivent le la décision d'ouverture du redressement
judiciaire, le débiteur doit déposer un projet de concordat. Ce projet de
concordatprécise les mesures et les conditions envisagées pour le redressement de
l’entreprise.

51
La déclaration de l’art. 25 est obligatoire et le débiteur qui s’abstient de le faire
pourra être poursuivi pour faillite personnelle. En effet, aux termes de l’art. 196-5,
à toute époque de la procédure, la juridiction compétente prononce la faillite
personnelle des personnes qui ont commis des actes de mauvaise foi ou des
imprudences inexcusables et qui ont enfreint gravement les règles et usages du
commerce, tels que définis par l’art. 197.

L’art. 197 présume actes de mauvaise foi la poursuite abusive d’une exploitation
déficitaire qui ne pourrait conduire l’entreprise qu’à la cessation des paiements.

2- L’assignation par le créancier

L’art. 28 prévoit que la procédure collective peut être ouverte sur la demande d’un
créancier quelle que soit la nature de sa créance pourvu qu’elle soit certaine, liquide
et exigible.

Cette faculté reconnue au créancier de provoquer l’ouverture de la procédure se


justifie dans la mesure où dès l’origine la faillite était considérée comme une
procédure de paiement. Il va de soi que le créancier a le plus souvent intérêt à
demander rapidement l’ouverture de la procédure afin d’éviter que le débiteur ne
continue à abuser de son crédit.

Dans son assignation, le créancier doit préciser le montant de la créance et viser le


titre sur lequel il se fonde. Il faut observer que l’assignation abusive engage la
responsabilité civile de son auteur sur le fondement de droit commun. Cela suppose
notamment que le débiteur rapporte la preuve que le créancier qui a déclaré la
procédure à la légère lui a causé préjudice.

3- La saisine d’office

La saisine d’office suppose que l’entreprise se retrouve en état de cessation des


paiements mais que ni le débiteur, ni les créanciers ne demandent l’ouverture de la
procédure. Le tribunal informé par le représentant du Ministère public, les
commissaires au compte, les associés des personnes morales, les représentants du
personnel, peut se saisir d’office si les faits qui lui sont indiqués sont de nature à
motiver cette saisine.

B- Le contenu du jugement d’ouverture

Outre la constatation de la cessation des paiements ainsi que de sa date, le


jugement contient le choix de la procédure et la nomination des organes.

1- Le choix de la procédure

L’art. 33 de l’AUPC énonce clairement que la juridiction compétente qui constate la


cessation des paiements prononce soit le redressement judiciaire, soit la liquidation
des biens.

Un des critères de choix de l’une ou l’autre de ces deux procédures de traitement


est la gravité de la situation du débiteur. Selon ce critère, serait passible de la

52
procédure de redressement judiciaire l’entreprise en cessation des paiements mais
dont la situation n’est pas irrémédiablement compromise tandis que la procédure
de liquidation des biens serait ouverte aux seules entreprises dont la situation est
complètement obérée ou désespérée.

Le législateur OHADA a préféré un autre critère fondé en grande partie sur la


volonté des dirigeants de redresser l’entreprise. Cette volonté devra se traduire dans
la proposition d’un concordat sérieux. Le tribunal évalue le concordat de
redressement, et si celui-ci lui paraît sérieux, il prononce le redressement judiciaire.
Il faut noter ici que cette décision n’est pas figée. Elle peut évoluer comme le précise
l’art. 33, al. 4, de l’AUPC aux termes duquel « à toute époque de la procédure de
redressement judiciaire, la juridiction compétente peut convertir celle-ci en liquidation
des biens s’il se révèle que le débiteur n’est pas ou n’est plus dans la possibilité de
proposer un concordat sérieux ».

En cas de conversion d'une procédure de redressement judiciaire en liquidation des


biens, les personnes qui avaient consenti dans le concordat de redressement
judiciaire un nouvel apport en trésorerie au débiteur en vue d'assurer la poursuite
de l'activité de l'entreprise débitrice et sa pérennité sont payées au titre du privilège
selon les rangs prévus par les articles 166 et 167.

Les personnes qui fournissent un nouveau bien ou service en vue d'assurer la


poursuite de l'activité de l'entreprise débitrice et sa pérennité bénéficient du même
privilège pour le prix de ce bien ou de ce service.

Cette disposition ne s'applique pas aux apports consentis dans le cadre d'une
augmentation du capital social du débiteur.

Les créanciers du débiteur ne peuvent en aucun cas bénéficier de ce privilège pour


des créances nées antérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire.

2- La nomination des organes

Parmi les organes nommés, il y a les organes judiciaires et les organes non
judiciaires. Les organes judiciaire sont la juridiction compétente, le juge
commissaire, et le ministère public. Les organes non judiciaires sont le syndic et les
contrôleurs.

a- La juridiction compétente

Le tribunal est paradoxalement le premier organe de la procédure que le jugement


n’a en principe pas besoin de nommer puisqu’il a reçu de la loi une compétence
d’attribution.

La juridiction compétente, à laquelle le législateur communautaire fait appel de


manière assez vague, est localisée à l’intérieur des Etats à travers, soit le tribunal
de première instance, soit le tribunal de grande instance, ou, pour les Etats qui

53
l’ont institué distinctement, le tribunal de commerce. Il s’agit de la juridiction du
lieu du siège social. La juridiction compétente a deux catégories de fonctions :

- une fonction de haute administration de la procédure. Cela se traduit


d’abord par la nomination et la révocation des organes de la procédure.
Elle nomme et révoque les autres organes de la procédure, notamment le
juge-commissaire et le syndic. Elle peut également révoquer les
contrôleurs sur proposition du juge commissaire qui procède à leur
nomination. Ensuite, par l’autorisation des opérations les plus
importantes telles que l’apposition des scellés, aliénation d’une partie
importante de l’actif ou encore la continuation de l’activité en cas de
liquidation des biens mais seulement pour les besoins de la liquidation, si
cette continuation ne met pas en péril l’intérêt public ou celui des
créanciers. Enfin par l’homologation du concordat de redressement (art.
127) et la conversion du redressement judiciaire en liquidation des biens.

- une fonction de centralisation des protestations. Le tribunal est


compétent pour connaître de toutes les contestations nées ou qui naissent
à l’occasion de la procédure collective et de celles sur lesquelles la
procédure collective exerce une influence juridique (admission de créance,
apposition de scellés, recours contre les décisions du juge-commissaire,
reddition des compte du syndic, inopposabilités de la période suspecte ;
restrictions aux droits des créanciers privilégiés, des propriétaires ou du
conjoint ; les sanctions relatives à la faillite personnelle ou l’expansion des
procédures collectives aux dirigeants, etc.). Il est également compétent
pour connaître des contestations qui concernent la faillite personnelle et
les autres sanctions à l’exception de celles qui sont attribuées aux
juridictions administratives, pénales et sociales.

b- Le juge-commissaire

Le juge-commissaire veille au déroulement rapide de la procédure et assure la


protection des intérêts en présence. Désigné parmi les juges au tribunal, il est placé
sous l’autorité de celui-ci.

Il recherche et recueille toutes les informations utiles à la conduite de la procédure


et aux décisions appropriées. C’est ainsi qu’il a le droit d’entendre tous les
protagonistes de l’environnement de l’entreprise : le débiteur, les dirigeants sociaux,
leurs préposés, les créanciers, les conjoints ou les héritiers connus du débiteur
décédé en état de cessation de paiement, etc. Il a également le droit d’obtenir
communication de toutes informations utiles auprès des comptables, des
commissaires aux comptes, des organismes publics, des caisses de prévoyance et
de sécurité sociales, les banques et toutes autres institutions dispensatrices de
crédit, etc. Il établit un rapport sur l’état des contestations à la juridiction
compétente.

Le juge-commissaire contrôle l’action du syndic dont il reçoit le rapport. C’est lui


qui propose au tribunal le remplacement ou l’adjonction d’une autre personne au

54
syndic. Il peut déterminer les conditions de continuation de l’entreprise, choisir le
mode de réalisation des immeubles ; détermine les clauses et conditions auxquelles
la vente aura lieu… Il ordonne, s’il y a lieu, la répartition des deniers entre les
créanciers, en fixe la quotité et veille à ce que tous les créanciers en soient avertis.
En cas de redressement judiciaire, il autorise le syndic à accomplir seul les actes
nécessaires à la sauvegarde du patrimoine de l’entreprise au cas où le débiteur ou
les dirigeants de la personne morale refusent d’y procéder. Il autorise les
licenciements envisagés. Il procède, parmi les créanciers, à la nomination de ceux
qui sont chargés de contrôler la procédure. Il peut également ordonner leur
révocation et pourvoir à leur remplacement.

Le juge-commissaire prend ces décisions par voie d’ordonnances. Celles-ci peuvent


faire l’objet d’un recours devant la juridiction compétente, dans un délai de huit (8)
jours à partir de leur prononcé, par déclaration au greffe du tribunal. Le tribunal
peut également se saisir d’office.

c- Le ministère public

En raison de ce que les procédures collectives intéressent l’ordre public et


pourraient avoir des répercussions pénales, le ministère public reçoit du juge-
commissaire les informations relatives à la procédure. En retour, le juge
commissaire reçoit du parquet les renseignements nécessaires à l’administration de
la procédure. Il veille particulièrement à l’exécution des sanctions prononcées
contre le débiteur ou les dirigeants sociaux. Le ministère public se présente comme
la conscience morale de la procédure et le bras armé qui frappera les commerçants
mis au ban de leur corps.

d- Le syndic

Le syndic est désigné par le jugement d’ouverture de la procédure. Il peut s’agir


d’un syndic unique ou d’un collège de syndics.

Dans le cadre de la liquidation des biens, le rôle fondamental du syndic est de


protéger le patrimoine du débiteur. Il procèdera alors à l’apposition des scellés. Il
procèdera à l’inventaire des actifs, établira le passif, prendra les mesures
conservatoires nécessaires à la protection des intérêts des créanciers ; initiera, à cet
effet, les actions en justice qu’il juge appropriées. Il administre les biens du débiteur
en procédant au recouvrement des créances de ce dernier. Mais c’est pour mieux
liquider l’actif, aux fins d’apurement du passif. Dans le cas du redressement
judiciaire, le syndic ne fait qu’assister le débiteur. Il joue plutôt un rôle de curateur.

Le syndic établit un rapport sommaire sur la situation de l’entreprise, dans le mois


de sa désignation, sauf prorogation. Ce rapport est adressé au juge-commissaire.
De même, il fait un rapport à l’assemblée des concordataires sur l’état de
redressement de l’entreprise en mettant l’accent sur les formalités qui ont été
remplies, les opérations qui ont eu lieu ainsi que sur les résultats obtenus pendant
la continuation de l’activité.

55
Lorsque, dans sa mission, le syndic commet une faute civile, il engage sa
responsabilité de même nature à l’égard du débiteur, de la masse des créanciers,
d’un créancier pris individuellement ou d’un tiers. Mais il peut engager sa
responsabilité pénale si la faute est de cette nature, en vertu du texte de l’article
243 de l’Acte uniforme.

e- Les contrôleurs

Dans la masse des créanciers, le juge-commissaire désigne un ou plusieurs


contrôleurs. Cependant, leur nombre ne doit pas dépasser trois. Il peut s’agir des
personnes physiques ou morales. Ils peuvent être choisis respectivement parmi les
créanciers munis de sûretés réelles spéciales, mobilières ou immobilières, les
représentants du personnel et les créanciers chirographaires.

Les contrôleurs sont chargés de la surveillance et du contrôle de la procédure. Ils


procèdent à la vérification de la comptabilité ainsi que l’état de la situation
présentée par le débiteur. Ils peuvent demander l’état de la procédure, produire
toutes observations appropriées au syndic ou au juge-commissaire. Ils sont
consultés sur la continuation de l’activité ou la liquidation des biens.

§ 3 : Les effets des procédures de traitement

L’ouverture des procédures collectives stricto sensu produit des effets aussi bien à
l’égard du débiteur qu’à l’égard des créanciers.

A- Les effets sur le débiteur

L’art. 52, al. 1er, de l’AUPC dispose que « la décision qui prononce le redressement
judiciaire emporte, de plein droit, à partir de sa date, et jusqu’à l’homologation du
concordat ou la conversion du redressement judiciaire en liquidation des biens,
assistance obligatoire du débiteur pour tous les actes concernant l’administration et
la disposition de ses biens, sous peine d’inopposabilité de ces actes ». Et l’art. 53, al.
2e, de l’AUPC dispose que « La décision qui prononce la liquidation des biens emporte,
de plein droit, à partir de sa date, et jusqu’à la clôture de la procédure,
dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens
présents et de ceux qu’il peut acquérir à quelque titre que ce soit, sous peine
d’inopposabilité de tels actes, sauf s’il s’agit d’actes conservatoires ».

1- Le dessaisissement

L’effet le plus important des procédures collectives de traitement sur le débiteur est
le dessaisissement de ses biens. Le débiteur peut, toutefois, accomplir, valablement,
seul, les actes conservatoires et ceux de gestion courante entrant dans l’activité
habituelle de l’entreprise, conformément aux usages de la profession, à charge d’en
rendre compte au syndic (voir les art. 52, al. 2e, et 53, al. 2e, in fine, de l’AUPC).

Le dessaisissement frappe le débiteur dans ses biens. Mais la portée de la mesure


varie suivant que l’on est en présence de la liquidation des biens ou du
redressement. Dans le premier cas, le syndic est substitué au débiteur et le

56
remplace dans la gestion du patrimoine commercial. Le dessaisissement a alors un
effet puissant. En ce qui concerne le redressement judiciaire, le dessaisissement a
plutôt un effet relatif. Le syndic assiste le débiteur dans la gestion de ses biens.

Malgré ces effets, il convient de souligner que le dessaisissement ne frappe pas les
biens insaisissables ou alimentaires. Sur proposition du syndic, le juge-
commissaire pourra autoriser le débiteur à extraire les objets mobiliers nécessaires
à l’entretien de sa personne et de sa famille, ainsi que les objets mobiliers
nécessaires à l’activité professionnelle du débiteur ou à son entreprise lorsque la
continuation de l’activité est autorisée (art. 60 de l’AUPC). De même, le juge-
commissaire peut ordonner qu’un prélèvement soit effectué sur l’actif en guise de
secours alimentaires au profit du débiteur (art. 64 de l’AUPC).

Outre les biens, le dessaisissement s’applique aussi à tous les actes que le débiteur
peut passer. Le débiteur ne peut, en conséquence, consentir aucune aliénation, ni
passer aucun contrat, ni exercer d’actions en justice, ni procéder à aucun paiement
libératoire, même par compensation, sauf entre deux dettes connexes. Toutefois,
dès lors qu’elle est opposable à la masse, la compensation opère même si une des
dettes a pris naissance après le jugement déclaratif et surtout lorsque la condition
de connexité est satisfaite38. Le dessaisissement ne concerne pas non plus les
opérations antérieures au jugement déclaratif.

Il y a des limites au principe de dessaisissement du débiteur. L’Acte uniforme fait


mention de trois séries d’actes que le débiteur peut accomplir seul : les actes
conservatoires, les biens insaisissables et les droits et actions à caractère purement
personnel.

La première exception au principe du dessaisissement du débiteur concerne les


actes conservatoires. L’article 53, alinéa 2 autorise le débiteur à les accomplir seul.
Il peut ainsi, par exemple, exercer une action en sommation de payer39, interrompre
une prescription ou exercer des voies de recours40. Cette autorisation s’explique par
le fait que de tels actes sont utiles aux créanciers parce qu’ils permettent d’assurer
la conservation ou la préservation des biens dans le patrimoine du débiteur (qui est
le gage commun des créanciers).

La deuxième exception concerne les droits et actions à caractère personnel. Ces


droits et actions, en raison de leur caractère purement personnel, ne peuvent être
exercés que par le débiteur ou contre lui. Même si l’acte en question produit des
conséquences pécuniaires, le débiteur peut agir seul toutes les fois qu’il intéresse sa
personne, son honneur ou ses moyens d’existence. C’est, par exemple, le cas de
l’action en divorce ou les actions patrimoniales ayant un caractère moral tel que la
séparation des biens. La Cour de cassation française a, dans une décision en date
du 3 mai 2006, jugé que « la faculté d’accepter une succession ou d’y renoncer est un

38 Cass. com., 6 mars 1961, RTD Com. 1962, p. 480, obs. HOUIN.
39Cass. 3eciv., 29 mai 1969, RTD Com. 1971, p. 479, obs. HOUIN.
40 Paris, 12 juillet 1988, D. 1989, somm. P. 10, obs. F. DERRIDA ; sur la possibilité d’interjeter appel à

condition que le liquidateur soit associé à la procédure.

57
droit attaché à la personne, le débiteur en liquidation judiciaire l’exerce seul »41. Elle
avait également estimé que l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire
n’interdisait pas au débiteur l’exercice d’une « activité professionnelle ».

L’exercice d’une activité salariée est permis mais les salaires perçus par le débiteur
seront atteints par le dessaisissement, sous réserve de la fraction insaisissable : la
fraction saisissable sera affectée au désintéressement des créanciers de la
procédure à la suite d’une saisie-attribution sur salaire que devra pratiquer le
liquidateur. Le débiteur peut aussi agir seul en se constituant partie civile pour
établir la culpabilité de l’auteur d’un crime ou d’un délit, à condition qu’il
s’abstienne de solliciter une réparation civile42.Il peut interjeter appel contre le
jugement d’ouverture, contre le jugement refusant d’homologuer le concordat, ou
celle qui convertit le redressement judiciaire en liquidation des biens. Il peut
contester des créances.

La troisième exception au principe de dessaisissement du débiteur concerne les


biens déclarés insaisissables. Il s’agit d’une manière générale des objets mobiliers et
des effets indispensables au débiteur et à sa famille, les objets soumis à
dépérissement prochain ou dépréciation imminente, les objets nécessaires à
l’activité professionnelle du débiteur ou à son entreprise. Il en sera de même des
créances alimentaires, des indemnités, des rentes, des pensions, des salaires et
traitements, sous réserve de la fraction insaisissable, que peut percevoir le débiteur.
Ces biens ne doivent pas être placés sous scellés.

2- Les effets du dessaisissement

Le dessaisissement produit à la fois des effets négatifs (inopposabilités) et des effets


positifs (« ensaisinement » de la masse).

a- Les effets négatifs : l’inopposabilité à la masse

Les actes accomplis seulpar le débiteuralors qu’il était dessaisi sont inopposables à
la masse des créanciers. Cette inopposabilité a un caractère plus général que celle
de la période suspecte puisqu’elle s’applique en principe à tous les actes et quelle
que soit la bonne et mauvaise foi du cocontractant. L’inopposabilité s’applique
même si le cocontractant a ignoré le jugement.

L’inopposabilité implique que celui qui a payé au débiteur doit payer une nouvelle
fois entre les mains du syndic ; celui qui a acheté un bien au débiteur et en a pris
livraison doit le rendre au syndic ; celui qui a été payé par le débiteur doit restituer
la somme perçue au syndic.

41Cass. com., 3 mai 2006, D. 2006, 2331, obs. F-X LUCAS et P.-M. LE CORRE ; JCP E 2006, 2348,
note J.-P. GARÇON. La Cour énonce que l’exercice de cette faculté par le seul débiteur en liquidation
judiciaire est sans préjudice de la mise en œuvre éventuelle par le liquidateur, en sa qualité de
représentant des créanciers, de l’action prévue par l’article 788 du Code civil. Cet article 788 dispose
que les créanciers de celui qui renonce au préjudice de leurs droits, peuvent se faire autoriser en
justice à accepter la succession du chef de leur débiteur, en son lieu et place. Dans ce cas, la
renonciation n’est annulée qu’en faveur des créanciers, et jusqu’à concurrence seulement de leurs
créances : elle ne l’est pas au profit de l’héritier qui a renoncé.
42Cass. crim., 16 décembre 1980, D.S. 1981, IR. 217, obs. DERRIDA.

58
L’inopposabilité a un caractère définitif à l’égard de la masse : le créancier qui a
méconnu les règles du dessaisissement est un créancier hors la masse. Ainsi, celui
qui a acheté un bien au débiteur, non seulement doit le rendre au syndic,
représentant la masse, mais en plus, il ne peut pas produire pour obtenir le
remboursement du prix payé au débiteur.

Il existe néanmoins des atténuations de faible intérêt :

- le débiteur est valablement engagé à titre personnel. Le cocontractant a un


recours contre lui. Mais ce recours ne sera utile qu’une fois le débiteur
revenu à meilleure fortune après la clôture de la procédure ;
- l’application de la règle classique, en fait de meubles, possession vaut titre
de l’article 2279 du Code civil, qui constitue une certaine protection du
cocontractant.

b- Les effets positifs du dessaisissement : l’« ensaisinement » de la masse

L’intensité de l’ « ensaisinement » varie selon qu’il s’agit de la liquidation des biens


ou du redressement judiciaire. Dans le redressement judiciaire, il y a une simple
assistance du débiteur et dans la liquidation des biens, il y a représentation de
celui-ci.La loi française du 25 janvier 1985, qui a largement inspiré le législateur
OHADA, a apporté une profonde modification aux règles relatives à la gestion de
l’entreprise en cas d’ouverture des procédures collectives. Alors que sous l’empire
de la loi française du 13 juillet 1967, l’ouverture d’une procédure collective de
règlement judiciaire ou de liquidation des biens emportait dessaisissement
automatique du débiteur quant à l’administration et la disposition de ses biens,
cette loi de 1985 a, par exemple, « substitué au dessaisissement automatique un
dessaisissement à la carte »43. En effet, si dans la liquidation des biens, le débiteur
est dessaisi, l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire n’emporte pas
dessaisissement automatique du débiteur, mais plutôt une assistance obligatoire
(art. 52 et 53 de l’AUPC).

i- La représentation du débiteur en cas de liquidation des biens

Il est à noter que dans la procédure de liquidation des biens, le redressement ou le


sauvetage de l’entreprise en tant que tel est exclu. La continuation des activités
après jugement d’ouverture peut toutefois être autorisée par la juridiction
compétente mais seulement pour les besoins de la liquidation et uniquement si
cette continuation ne met pas en péril l’intérêt public ou celui des créanciers (art.
113 de l’AUPC).

Lorsque l’entreprise est en liquidation des biens, le dirigeant perd les rênes de ses
affaires. Il est dessaisi et représenté par le syndic pour tous les actes exigés par son
activité professionnelle mais aussi personnelle. Le débiteur ne participe plus à la
gestion de l’entreprise. L’entreprise est gérée par le syndic, du moins s’il y a
continuation d’activité. Si le syndic refuse d’accomplir un acte ou d’exercer un droit

43Marie-Laure COQUELET, Entreprises en difficulté, Instrument de paiement et de crédit, op. cit., n°


160, p. 132.

59
ou une action concernant le patrimoine du débiteur, celui-ci ou les dirigeants de la
personne morale ou les contrôleurs, s’il en a été nommé, peuvent l’y contraindre par
décision du juge-commissaire obtenue dans les conditions prévues par les articles
40 et 43 de l’AUPC (art. 53).

Le syndic va recouvrer les créances du débiteur au fur et à mesure qu’elles arrivent


à échéance. La déchéance du terme ne joue pas contre les débiteurs. Le syndic va
également exercer des actions en justice : en reconnaissance de droits, en
paiement, en responsabilité civile aggravée ou non.

Il bénéficie d’un entier pouvoir de liquidation après l’inventaire.

Relativement à la vente des biens du débiteur, deux hypothèses sont à envisager.


S’il s’agit de la vente séparée des biens du débiteur, le juge-commissaire décide si la
vente séparée des différents biens du débiteur se fera à l’amiable, aux enchères
publiques ou grâce à des intermédiaires. Les marchandises et effets mobiliers sont
vendus librement mais de préférence aux enchères publiques. Pour le fonds de
commerce, il faut une autorisation du juge-commissaire. Les immeubles ne peuvent
être vendus qu’avec l’autorisation du juge-commissaire qui fixe les modalités de la
vente (enchères publiques, adjudication ou gré à gré) ainsi que les conditions ou
éléments essentiels de la vente (fixation du prix ou de la mise à prix). S’il s’agit de la
cession à forfait de tout ou partie de l’actif, il faut une autorisation du juge-
commissaire.

ii- L’assistance du débiteur en cas de redressement judiciaire

L’alinéa 1er de l’article 52 de l’AUPC pose le principe de l’assistance du débiteur


dans la procédure de redressement judiciaire en termes suivants : « la décision qui
prononce le redressement judiciaire emporte, de plein droit, à partir de sa date, et
jusqu’à l’homologation du concordat ou la conversion du redressement judiciaire en
liquidation des biens, assistance obligatoire du débiteur pour tous les actes
concernant l’administration et la disposition de ses biens, sous peine d’inopposabilité
de ces actes »44.

En cas d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, le débiteur conserve


la direction de son entreprise mais, en raison du doute qui existe sur les qualités de
sa gestion du fait de la situation de cessation des paiements, il est assisté par un
syndic. Tous les actes importants et nécessaires à la continuité de l’activité ou à la
relance de l’entreprise requièrent le concours du syndic et du débiteur. Cela se
traduirait en pratique par un système de double signature, surtout lorsque
l’entreprise est en grande difficulté, et tous ces actes qui requièrent l’assistance du
syndic seront, sous réserve de l’accord de celui-ci, effectués, en principe, par le
débiteur. Le syndic est, à travers cette mission d’assistance, associé à la gestion de
l’entreprise.

44 En cas d’ouverture de la procédure de liquidation des biens, le débiteur est, par contre, dessaisi de
l’administration et de la disposition de ses biens présents et de ceux qu’il peut acquérir à quelque titre
que ce soit. Il est pour cela représenté par le syndic.

60
Le débiteur est obligatoirement assisté pour deux séries d’actes : premièrement
pour tous les actes d’administration de ses biens et secondairement pour tous les
actes de disposition de ses biens. Toutefois, comme le syndic peut ne pas toujours
arriver à apprécier efficacement l’importance de certains actes, pourtant nécessaires
à la gestion quotidienne de l’entreprise, le législateur autorise dans certains cas le
débiteur à accomplir seul certains actes en dépit de la cogestion dans le but de
permettre à l’entreprise de continuer ses activités.

En vertu de l’article 52, alinéa 2, de l’AUPC, le débiteur peut accomplir valablement,


seul, les actes conservatoires et ceux de gestion courante entrant dans l’activité
habituelle de l’entreprise, conformément aux usages de la profession, à la charge
d’en rendre compte au syndic. En effet, dans le but « d’éviter la paralysie dans la
gestion des biens, qui pourrait naître de l’inaction du débiteur ou du syndic »45,
chacun d’eux peut faire des actes conservatoires. De même, le syndic peut se faire
autoriser par le juge-commissaire à agir seul si le débiteur ou les dirigeants
refusent de faire un acte nécessaire à la sauvegarde du patrimoine du débiteur.
Inversement, le débiteur ou les contrôleurs peuvent contraindre le syndic à
accorder son assistance pour accomplir des actes d’administration ou de
disposition par décision du juge-commissaire. Par ailleurs, même en cas d’accord
du syndic et du débiteur, l’autorisation du juge-commissaire est nécessaire pour les
actes susceptibles de compromettre la survie de l’entreprise, tels que la cession
d’une immobilisation indispensable à l’exploitation.

Les actes conservatoires sont des actes nécessaires à la conservation des droits de
l’entreprise contre les débiteurs de celle-ci, à la préservation de ses capacités de
production et à la sauvegarde du patrimoine du débiteur comme le renouvellement
des stocks, les mises en demeure, etc. De même, si le débiteur ou les dirigeants
refusent de faire un acte nécessaire à la sauvegarde du patrimoine du débiteur, le
syndic peut se faire autoriser à l’accomplir seul.

Ni le législateur OHADA, ni son homologue français n’a défini la notion d’acte de


gestion courante. La jurisprudence française considère que « constitue un acte de
gestion courante, les actes qui par leur nature, leur importance et leurs modalités sont
conformes à l’objet de l’entreprise, c’est-à-dire à son activité habituelle ». Constituent,
par exemple, des actes de gestion courante, les commandes passées par le débiteur
seul pour les besoins de l’activité de l’entreprise46, la souscription d’un contrat
assurance47, la cession de créances par voie de bordereau Dailly48. Par contre, ne
rentrent pas, par exemple, dans cette catégorie des actes de gestion courante (ou
constituent des actes étrangers à la gestion courante) la conclusion d’un contrat de
travail49, la signature d’un bail se rapportant à des locaux appartenant à

45 Jean René GOMEZ, OHADA – Entreprise en difficulté, lecture de l’Acte uniforme de l’OHADA portant
organisation des procédures collectives d’apurement du passif à la lumière du droit français,op. cit., n°
87, p. 116.
46Com., 6 février 2001, RJDA 2001, n° 708.
47Cass. civ. 1re, 23 septembre 2003, Act. proc. coll. 2003, n° 241.
48 Versailles, 13 juin 1996, RJDA 1996, n° 1533.
49Cass. soc, 30 mai 2001, Act. proc. coll. 2001, n° 203, obs. C. REGNAULT-MOUTIER.

61
l’entreprise50. Les actes de gestion courante doivent ainsi être des actes
indispensables au maintien de l’exploitation.

Le débiteur conserve des pouvoirs propres pour l’accomplissement de certains actes


en dehors des actes conservatoires et ceux de gestion courante qu’il peut accomplir
seul ou que le syndic peut être autorisé à accomplir seul. Il sera, par exemple, le
seul à pouvoir exercer les droits et actions à caractère personnel, tels que les
actions d’état (divorce, reconnaissance ou désaveu de paternité) ou les actions en
réparation d’un préjudice moral.

Comme les biens d’une personne morale sont facilement identifiables et comme
l’émiettement des pouvoirs de gestion des dirigeants ou leur éviction n’influence pas
de manière manifeste la survie de la personne morale, la cogestion de l’entreprise
ou la représentation du débiteur en cas d’ouverture des procédures collectives
semble ne présenter de portée aussi significative lorsque le débiteur est une
personne morale et surtout lorsqu’il s’agit d’une société pluripersonnelle.

iii- La poursuite de l’activité

L’ouverture des procédures de traitement des difficultés des entreprises n’emporte


pas automatiquement la fin des relations contractuelles dans lesquelles l’entreprise
s’était engagée. Le redressement de l’entreprise exige la poursuite de l’exploitation,
et logiquement la poursuite des contrats. L’objectif poursuivi ici est de ne pas
étouffer l’entreprise qui doit continuer à vivre. Certains contrats peuvent devenir
trop lourds pour elle. L’entreprise peut avoir intérêt à les rompre. En principe, un
contrat conclu valablement va continuer à exister mais c’est une simple faculté.
C’est l’article 107 de l’AUPC qui pose ce principe fondamental de l’exigence des
contrats en cours nonobstant toute clause contraire. La décision de continuation
des contrats en cours peut être expresse ou tacite.

La décision expresse de continuation des contrats en cours. Quelle que soit la


procédure ouverte, seul le syndic (qui est un organe « ambivalent » représentant le
débiteur et les créanciers) dispose de la faculté d’exiger l’exécution des contrats en
cours en fournissant la prestation promise au cocontractant du débiteur (art. 108
de l’AUPC). Même en liquidation des biens, cette faculté de continuation des
contrats en cours peut être exercée juste pour les besoins de la liquidation en vue
d’obtenir de meilleurs produits pour le désintéressement des créanciers ou
l’apurement du passif de l’entreprise (art. 250 de l’AUPC). Le syndic doit, tous les
trois mois, communiquer les résultats de l’exploitation au Président de la juridiction
compétente et au représentant du Ministère public.

L’option de la continuation des contrats en cours appartient au syndic, et, lui seul
peut l’exercer.Le droit d’option se définit comme « une prérogative juridique qui
permet à son titulaire de pouvoir, par un acte unilatéral de volonté, modifier une

50 Versailles, 9 avril 1998, RJDA 1998, n° 1250.

62
situation juridique incertaine et cela suivant une alternative précise et prévisible »51.
Cette option du syndic doit en principe être exercée d’une manière expresse, et
surtout de sorte à ne pas maintenir le cocontractant dans l’expectative. En réalité,
le législateur n’impose aucun délai au syndic pour exercer cette option, et son
silence ou sa renonciation tacite ne signifie pas non plus résolution automatique du
contrat.

Ainsi, pour protéger le cocontractant, l’article 108, alinéa 3, de l’AUPC prévoit-il que
le contrat est résilié de plein droit après une mise en demeure adressée au syndic
qui est restée plus d’un mois sans réponse. Et si le syndic n’use pas de sa faculté
d’option ou de fournir la prestation promise dans le délai imparti par la mise en
demeure, son inexécution peut donner lieu, outre la résolution, à des dommages-
intérêts (art. 109, al. 1er, de l’AUPC).

En droit français, l’organe habilité à exercer l’option (en l’occurrence


l’administrateur ou, à défaut, le débiteur ou le liquidateur) peut solliciter du juge-
commissaire un différé d’option en lui demandant de lui accorder un délai
supplémentaire pour opter. Le juge-commissaire peut lui accorder une prorogation
de deux mois maximum pour prendre parti sur la continuation du contrat.
Toutefois, l’ordonnance autorisant le différé d’option devra être rendue avant
l’expiration du mois imparti pour répondre à la mise en demeure adressée par le
cocontractant.

Hormis les contrats conclus en considération de la personne du débiteur et ceux


prévus expressément par la loi de chaque Etat-partie, la cessation des paiements
déclarée par décision de justice n’est pas une cause de résolution. Cette règle
traditionnelle empêche en réalité le cocontractant du débiteur de se ménager une
sortie susceptible de le soustraire de l’obligation de se soumettre à l’exercice de
cette faculté, et toute clause qui aurait un tel effet est réputée non écrite.

Cependant, la résolution prononcée en vertu d’une clause résolutoire n’échappe à


cette règle que si elle est acquise avant l’ouverture de la procédure, c’est-à-dire si la
résolution prononcée par une décision est passée en force de chose jugée (décision
non sujette à l’exercice d’une voie de recours ordinaire). Fort de cela, une résolution
prononcée avant l’ouverture de la procédure mais frappée d’un appel en cours à
l’ouverture de la procédure ne permet pas au contrat visé d’échapper à l’exercice de
cette faculté d’exigence de la continuation des contrats en cours.

La poursuite des contrats en cours est une condition essentielle du traitement des
difficultés de l’entreprise. Comme le dit si bien M. Antoine BOLZE, « le jugement
d’ouverture d’une procédure collective crée un sentiment d’anxiété chez les créanciers
qui estiment plus prudent de rompre toute activité avec le débiteur »52. Or, les
ruptures des différents contrats de l’entreprise ne pourraient qu’aggraver sa santé
économique et financière. Ainsi, le législateur OHADA, à la suite de son homologue

51 NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral, LGDJ, 1967,
préface P. RAYNAUD, n° 31, cité par Pierre-Michel LE CORRE et Emmanuelle LE CORRE-BROLY, Droit
du commerce et des affaires, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 167, p. 153.
52 Antoine BOLZE, Procédures collectives et sûretés, op. cit., p. 143.

63
français, trouve-t-il indispensable de maintenir ce mécanisme traditionnel des
procédures collectives dans le but d’assurer la survie de l’entreprise par la
continuation de ses activités.

Certes, le législateur n’exige pas expressément que le contrat dont la continuation


est sollicitée par le syndic soit nécessaire à la poursuite de l’exploitation. Toutefois,
il va de soi que de tels contrats ne soient inutiles au sauvetage de l’entreprise. C’est
justement ce qu’a clairement énoncé la chambre commerciale de la Cour de
cassation française dans sa décision du 19 mai 200453.

La règle de la continuation des contrats en cours est le corollaire de celle de


l’interdiction de payer les créances antérieures. En effet, la règle de l’interdiction de
payer les créances antérieures n’aurait de sens que si les contrats qui sont en cours
le jour de l’ouverture des procédures sont continués. Autrement, la résolution ou la
rupture des relations contractuelles en cours permettrait de contourner la règle de
l’interdiction de payer les créances antérieures à l’ouverture d’une procédure.

Si en droit OHADA, seul le syndic dispose de cette faculté, en droit français, c’est
l’administrateur qui est le titulaire de l’option sur la continuation du contrat en
cours, et à défaut d’administrateur judiciaire, l’option appartient au débiteur qui
doit avoir l’avis conforme du mandataire judiciaire. Toujours en droit français, en
phase de liquidation judiciaire, le titulaire de cette option est le liquidateur, sauf si
un administrateur judiciaire est mis en place, auquel cas il est le titulaire de
l’option.

La continuation des contrats en cours concerne en principe tous les contrats en


cours d’exécution, sauf ceux expressément écartés par l’Acte uniforme, c’est-à-dire
les contrats conclus intuitu personae et ceux prévus expressément par la loi de
chaque Etat-partie. Quels sont les contrats que les Etats parties peuvent donc
prévoir comme prenant fin en raison de l’ouverture d’une procédure collective ?

Le législateur OHADA ne donne aucune autre indication concernant les contrats


pouvant être compris dans cette exception à la règle de continuation des contrats
en cours. D’ailleurs, aucune limitation à cette règle ne nous paraît opportune. En
réalité, toute limitation à cette règle serait de nature à la vider de son contenu. La
seule limitation appropriée s’agirait évidemment et principalement des contrats
dont le cocontractant du débiteur serait l’administration. Cette dernière au nom de
ses prérogatives de puissance publique peut, à tout moment de la procédure,
rompre ses relations contractuelles avec son cocontractant sans être inquiétée de la
condamnation au paiement des dommages-intérêts pour rupture abusive.

Cette règle traditionnelle de continuation des contrats en cours est une règle
dérogeant au principe civiliste selon lequel le cocontractant peut soulever
l’exception d’inexécution de l’autre partie pour refuser ses propres prestations.
Dans quel cas un contrat peut-il être considéré comme « un contrat en cours » ?

53 Com. 19 mai 2004, n° 01-16.900, NP, Rev. proc. coll. 2004, p. 224, n° 3, obs. Ph. ROUSSEL-GALLE.

64
Avant toute chose, il faut que le contrat en question soit « susceptible d’une
exécution d’obligations à la charge du cocontractant » ; autrement, « si le
cocontractant du débiteur n’a plus d’obligation à exécuter, le contrat ne peut plus être
considéré comme étant en cours »54. En outre, lorsque le contrat n’aura laissé que
« des obligations de garantie »55 ou des obligations non essentielles, le contrat ne
sera plus être considéré comme étant en cours.

Selon la jurisprudence française, « un contrat est dit en cours lorsque celui-ci est en
cours d’exécution au jour du jugement d’ouverture ». Cette définition inclut en
principe les contrats à exécution successive, tels que les contrats de bail, de
concession, de franchise ou de crédit-bail. Elle exclut corrélativement les contrats
en cours de formation au jour du jugement d’ouverture, les contrats arrivés à leur
terme à cette date, les contrats résolus ou résiliés soit à la suite d’un jugement
ayant force de chose jugée, soit en raison du jeu d’une clause résolutoire 56.

L’application de la règle aux contrats à exécution instantanée peut susciter quelque


réflexion. En principe, ces catégories de contrats, en raison de leur nature, ne
devraient pas être concernées par cette règle de la continuation des contrats en
cours. Cependant, lorsqu’un contrat à exécution instantanée n’a pas encore
totalement produits ses effets au jour du jugement d’ouverture, il sera considéré
comme étant en cours.

Un contrat est en réalité en cours s’il n’a pas encore été exécuté, c’est-à-dire si « la
prestation principale et caractéristique » n’a pas encore été fournie au débiteur au
jour du jugement d’ouverture. Par exemple, le contrat de vente serait en cours si
l’obligation de délivrance n’est pas intervenue au jour du jugement d’ouverture. De
même, une vente avec clause de réserve de propriété ne serait pas en cours si
l’obligation de délivrance est déjà intervenue au jour du jugement d’ouverture57.

Selon MM. RIPERT et ROBLOT, « un contrat est en cours lorsqu’il n’a pas épuisé ses
effets fondamentaux au jour du jugement et plus précisément dont la prestation
caractéristique n’est pas accomplie »58. D’après le critère de la Cour de cassation
française, le contrat est en cours « s’il laisse encore subsister ses effets essentiels à
la charge du cocontractant du débiteur au jour du jugement d’ouverture ». Elle a

54 Pierre-Michel LE CORRE et Emmanuelle LE CORRE-BROLY, Droit du commerce et des affaires, Droit


des entreprises en difficulté, Sirey Université, 2e éd., 2006, n° 163, p. 149.
55 B. SOINNE, Traité des procédures collectives,Litec, 2e éd., 2002, n° 1327, cité Pierre-Michel LE

CORRE et Emmanuelle LE CORRE-BROLY, Droit du commerce et des affaires, Droit des entreprises en
difficulté, op. cit., n° 163, p. 149.
56 Voir supra p. 274. Selon la jurisprudence française, la clause résolutoire « acquise avant le jugement

d’ouverture confère un droit acquis à celui qui en bénéficie » (voir Com. 21 janvier 1992, JCP E 1992, I,
136, obs. Ph. PETEL). Cependant, une clause résolutoire acquise en raison de la déclaration de
cessation des paiements, même avant le jugement d’ouverture, ne produira aucun effet (Com. 2 mars
1993, D. 1993, 572, note Ph. DEVESA).
57Cass. Com., 5 mai 2004, nos 01-17.201 et 01-17.590, D. 2004, AJ, 1525, obs. A. LIENHARD.
58 Georges RIPERT et René ROBLOT, Traité de Droit commercial, Tome 2, par Philippe DELEBECQUE

et Michel GERMAIN, op. cit., n° 3047, p. 1028. Voir aussi Cass. Com., 14 décembre 1993, Bull. civ.,
IV, n° 477.

65
précisé que le contrat de vente à terme est un contrat en cours, lorsque le transfert
de propriété ne s’est pas opéré, faute de paiement59.

Dans le même sens, le contrat de prêt serait par exemple en cours si, à l’ouverture
de la procédure, les fonds ne sont pas intégralement versés à l’emprunteur. Mais si
les fonds ont été complètement remis à l’emprunteur avant l’ouverture de la
procédure, le prêt est totalement libéré, et le prêteur n’aura qu’à déclarer sa créance
à la procédure60. Par ailleurs, cette règle peut aussi être appliquée aux concours
bancaires. Les concours bancaires sont très indispensables pour le sauvetage de
l’entreprise en difficulté. L’ouverture d’une procédure collective n’empêche donc pas
en principe la poursuite de ces concours, sauf si l’entreprise se trouve dans une
situation irrémédiablement compromise.

A quel moment le cocontractant pouvait-il considérer le contrat qui le lie au


débiteur comme résilié si le syndic ne manifeste sa volonté expresse de le
continuer ? La continuation n’est pas automatique61. Pour le législateur OHADA et
pour le législateur français sous l’empire des textes en vigueur avant la réforme de
1994, le cocontractant ne peut certes pas rester indéfiniment dans l’expectative,
mais encore faut-il qu’il prenne l’initiative de mettre le syndic en demeure, par lettre
recommandée ou par tout moyen laissant trace écrite, d’exercer son option ou de
fournir la prestation promise62, dans un délai de trente (30) jours, sous peine de
résolution de plein droit du contrat63. Et s’il veut se dégager du contrat qui le lie au
débiteur, il doit l’assigner en résolution de ce contrat car la résolution ne résulte
pas de la renonciation tacite du syndic à la continuité du contrat64.

Aux termes des dispositions de l’alinéa 3 de l’article 108 de l’AUPC, le syndic peut,
par une décision expresse ou tacitement par la fourniture de la prestation promise,
exercer l’option de poursuivre les contrats en cours. Après avoir opté pour la
continuation du contrat en cours, le syndic peut décider de mettre fin au contrat à
exécution ou paiement échelonné dans le temps, s’il s’aperçoit qu’il ne dispose pas
ou ne dispose plus de fonds lui permettant d’assurer le paiement du terme suivant,
ou s’il se rend compte que le contrat dont la continuation est sollicitée n’est plus
indispensable pour l’exploitation.

La décision tacite de continuation des contrats en cours. Le législateur OHADA


ne subordonne la décision de continuer le contrat ni à aucune forme, ni au respect
d’un certain délai. Ainsi, la continuation des contrats en cours ne découle-t-elle pas
uniquement et nécessairement d’une décision expresse. Elle peut aussi résulter
d’une volonté tacite. Le syndic peut, en effet, tacitement continuer un contrat en
fournissant des prestations promises. De toutes les façons, outre une décision

59Cass. Com., 1er février 2000, Act. proc. coll. 2000/5, n° 52 ; D. 2000, act. jurispr. 144, obs. A.
LIENHARD.
60 Toulouse, 2e ch., 10 février 2000, Rev. proc. coll. 2002, p. 191, obs. Ph. ROUSSEL-GALLE.
61Filiga Michel SAWADOGO, OHADA –Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 191, p. 182.
62 Georges RIPERT et René ROBLOT, Traité de Droit commercial, Tome 2, par Philippe DELEBECQUE

et Michel GERMAIN, op. cit., n° 3054, p. 1035.


63 Voir l’article 108, al. 3, de l’AUPC.
64 Georges RIPERT et René ROBLOT, Traité de Droit commercial, Tome 2, par Philippe DELEBECQUE

et Michel GERMAIN, idem, n° 3054, p. 1035.

66
expression, le syndic doit tout faire pour éclairer le cocontractant que le contrat
sera continué. Dans ce cas, le législateur OHADA est très précis : la décision tacite
doit découler de la fourniture par le syndic de la prestation promise.

A titre d’exemple, le syndic qui continue à payer spontanément les loyers prévus au
contrat manifeste sa volonté non équivoque de continuer le contrat de bail 65.
Inversement, quelle que soit l’importance du contrat en cours, le syndic ne
prendrait pas la décision de le continuer s’il refuse de payer ou de fournir sa propre
prestation due. Cependant, son silence ne libère pas pour autant le cocontractant.

En cas du silence du syndic, il revient alors au cocontractant de prendre l’initiative


de s’informer. S’il veut se dégager du contrat, il doit mettre le syndic en demeure
d’exercer son option ou de fournir la prestation promise. Et si la mise en demeure
adressée au syndic est restée plus d’un mois sans réponse, le contrat est résolu de
plein droit.

Cette solution du législateur OHADA est contraire à celle issue de la réforme


française de 1994. En effet, depuis cette réforme, « le législateur conclut, le plus
souvent, à une résiliation de plein droit, lorsque l’administrateur ne prend pas partie
dans le délai requis »66. Dans ce cas, sur la demande de tout intéressé, le juge-
commissaire constate la résiliation de plein droit des contrats, ainsi que la date de
celle-ci.

Que la continuation des contrats en cours émane soit d’une décision expresse ou
tacite, soit à la suite de l’exercice de l’option après une mise en demeure, sauf le cas
où le syndic obtiendrait du cocontractant du débiteur des délais de paiement, la
prestation fournie par celui-ci se règle au comptant si elle porte sur le paiement
d’une somme d’argent. De même, si le contrat est synallagmatique, et le syndic n’a
pas fourni la prestation promise, le cocontractant peut soulever l’exception
d’inexécution. Mais, si le cocontractant s’exécute sans avoir reçu la prestation
promise, il devient créancier de la masse.

En effet, en cas de décision de poursuite des contrats en cours, les paiements se


font en principe comptant même si le contrat continué prévoyait un règlement à
terme ou des facilités de paiement67. L’alinéa 2 in limine de l’article 108 de l’AUPC
dispose dans ce sens que « si le contrat est synallagmatique et si le syndic n’a pas
fourni la prestation promise, l’autre partie peut soulever l’exception d’inexécution ». Le
paiement au comptant du cocontractant peut gravement peser sur le redressement
de l’entreprise. Il faut donc pour cette raison que le contrat dont la continuation est
demandée par le syndic soit nécessaire à la poursuite de l’exploitation et soit utile
au sauvetage de l’entreprise.

Pour le législateur OHADA, les créances nées entre le jugement d’ouverture et la


date d’option sont considérées comme des créances de la masse. Selon les

65 Com. 20 mai 1997, D. Affaires 1997, 862, obs. A. LIENHARD.


66
Georges RIPERT et René ROBLOT, Traité de Droit commercial, Tome 2, par Philippe DELEBECQUE et Michel
GERMAIN, op. cit., n° 3054, p. 1035.
67
Marie-Laure COQUELET, Entreprises en difficulté-Instruments de paiement et de crédit, op. cit., n° 210, p. 166.

67
dispositions de l’article 108, alinéa 2 in fine, de l’AUPC « Si l’autre partie s’exécute
sans avoir reçu la prestation promise, elle devient créancière de la masse ». Cette
solution du législateur OHADA est inspirée par la jurisprudence française
antérieure à 1985. Par ailleurs, le cocontractant ne peut pas compenser les
acomptes reçus pour des prestations non encore fournies par lui avec des
dommages-intérêts dus pour la résolution. La juridiction compétente saisie de
l’action en résolution contre le syndic peut toutefois prononcer la compensation
avec les sommes reçues pour des prestations non encore fournies ou l’autoriser à
différer la restitution de ces sommes jusqu’à ce qu’il ait été statué sur les
dommages-intérêts68.

Le cocontractant qui s’exécute sans avoir reçu de paiement dispose en retour d’une
certaine préférence aux dépens des créanciers antérieurs à l’ouverture de la
procédure, c’est-à-dire les créanciers « dans la masse ». La logique de cette solution
réside dans le fait qu’aucune personne n’aurait normalement accepté de continuer
ou d’engager une nouvelle relation contractuelle avec une entreprise en difficulté
économique et financière tout en sachant qu’il est fort probable qu’elle ne puisse
être payée.

Si malgré la situation économique et financière difficile de l’entreprise le


cocontractant accepte de poursuivre le contrat nécessaire à la continuation de
l’exploitation en s’exécutant, il doit être payé comptant. Mais si ces créances ne
sont pas payées à l’échéance, elles les seront avant celles antérieures au jugement
d’ouverture, c’est-à-dire les titulaires desdites créances seront à défaut du paiement
au comptant traités comme des créanciers de la masse pour bénéficier une certaine
préférence aux dépens des créanciers antérieurs à l’ouverture de la procédure. Il
s’agit au fait d’une politique destinée à encourager les apporteurs d’argent frais qui
avaient pris le risque de continuer les relations avec l’entreprise après l’ouverture
de la procédure collective aux issues incertaines.

B- Les effets sur les créanciers

L’article 72, al. 1er, de l’AUPC dispose que : « La décision d’ouverture constitue les
créanciers en une masse représentée par le syndic qui, seul, agit en son nom et dans
l’intérêt collectif et peut l’engager ». Les créanciers sont donc, par l’effet du jugement
d’ouverture, constitués en masse, c’est-à-dire en un groupement de personnes,
physiques ou morales. Cette masse est constituée par tous les créanciers dont la
créance est antérieure à la décision d’ouverture, même si l’exigibilité de cette
créance est fixée à une date postérieure à cette décision (art. 72, al. 2e, de l’AUPC).

Pour les intérêts de la procédure, c’est-à-dire la défense de ceux des créanciers, la


masse constitue une personne morale qui agit par l’organe du syndic. L’admission
au sein de la masse est effectuée à l’issue de la procédure de vérification des
créances. Chaque créancier est appelé à produire sa créance à partir du jugement
d’ouverture, notamment à partir de sa publication. La publication de la décision
d’ouverture est assurée au moyen d’insertion dans un journal d’annonce légale et

68
Voir l’article 109, al. 2, de l’AUPC.

68
au journal officiel. La production est admise jusqu’au trentième jour qui suit la
deuxième insertion.

Le syndic avertit les créanciers connus, c’est-à-dire ceux dont les noms figurent au
bilan ou ceux dont les créances ont été inscrites. Cet avertissement intervient au
cas où, en dépit de la publication de la décision d’ouverture, ceux-ci ne se seraient
pas présentés.

Sauf décision de relevé rendue par le juge-commissaire, les créanciers qui


n’auraient pas produit leur créance sont frappés de forclusion et, par suite, leurs
créances ne sauraient être prises en considération. Les créances produites sont
vérifiées et les contestations élevées sont tranchées par le juge-commissaire, les
parties non satisfaites pouvant se pourvoir devant le tribunal saisi sur opposition
de l’ordonnance du juge-commissaire.

Les droits de certains créanciers peuvent souffrir d’une révision par l’effet du
jugement d’ouverture. En effet, les droits de ces créanciers pourraient être frappés
d’inopposabilité s’ils avaient été consolidés pendant la période suspecte.

La décision d'ouverture du redressement judiciaire suspend toute action contre les


personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant
affecté ou cédé un bien en garantie à compter dudit jugement et durant l'exécution
du concordat de redressement judiciaire.

Toutefois, les créanciers bénéficiant de ces garanties peuvent prendre des mesures
conservatoires.

Après l’exposé des caractéristiques communes aux procédures collectives au sens


strict, il convient, à présent, d’examiner les sorts spécifiques attachés à chacune
des procédures.

Section 2 : Les régimes spécifiques de chacune des deux procédures de


traitement

Ces régimes diffèrent selon qu’il s’agit de la procédure de redressement judiciaire


(Paragraphe premier) ou de la liquidation des biens (Paragraphe II).

§ 1 : Les spécificités de mise en œuvre de la procédure du redressement


judiciaire

Nous versons ici la mise en œuvre de la procédure de redressement proprement dite


et celle de la procédure de redressement simplifiée.

A- La procédure de redressement judiciaire proprement dite

Le traitement judiciaire des difficultés de l’entreprise ou son sauvetage à la suite de


l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire exige généralement diverses
mesures d’ordre juridique, technique et financier. Il s’agit essentiellement de
l’obtention de remises et délais de paiement de la part des créanciers et les cessions

69
d’actifs. En cas d’ouverture de la procédure du redressement judiciaire, toutes ces
mesures ne sont prises que dans le cadre d’un concordat69. Le concordat de
redressement se présente comme un passage obligé pour parvenir au sauvetage de
l’entreprise en cas d’ouverture de la procédure du redressement judiciaire. Son rôle
est d’assurer la survie de l’entreprise par la présentation par le débiteur d’un plan
de règlement du passif et du redressement de l’entreprise. Il peut se poser la
question de la détermination de la nature juridique du concordat : est-ce un acte
unilatéral ou un contrat ?70

L’analyse de certains aspects du concordat, notamment son élaboration par le


débiteur ou le chef d’entreprise conformément aux nouvelles attitudes managériales
qu’il propose pour la sortie de l’entreprise des difficultés qu’elle traverse, le
rapproche de l’acte unilatéral. Le législateur confie, en effet, au débiteur, excepté le
cas où son remplacement par le syndic est envisagé pour les besoins de
redressement, le soin d’élaborer seul l’offre de concordat. Après l’élaboration de la
proposition de concordat, les créanciers seront invités à la voter.

Considéré comme une convention conclue entre le débiteur et ses créanciers, et


homologué par le tribunal, le concordat de redressement représente le plan de
règlement du passif ainsi que du redressement de l’entreprise. Le concordat est une
sorte de contrat entre les créanciers et le débiteur, un moratoire permettant un
apurement progressif du passif, et ayant pour but de remettre le débiteur à la tête
de son patrimoine. C’est « une convention conclue entre le débiteur et ses créanciers,
chirographaires et privilégiés, avec homologation de justice destinée à garantir son
sérieux et sa viabilité, convention par laquelle le débiteur présente un plan de
règlement du passif et de redressement de l’entreprise qu’il exécutera une fois remis
à la tête de ses affaires »71. Il est un acte collectif homologué par la justice après sa
formation et son vote par une majorité qualifiée des créanciers, et qui prévoit soit
un règlement intégral des créances, soit un remboursement partiel immédiat, soit
les deux. Après son adoption, le concordat s’impose à tous les créanciers, même
aux récalcitrants et aux absents. L’Acte uniforme distingue deux catégories de
concordat : le concordat ordinaire et le concordat comportant une cession d’actif.
Est ordinaire ou simple, le concordat qui ne comporte que des demandes de délai
de paiement et de remises de dettes, afin de favoriser le fonctionnement de
l’entreprise. C’est le droit commun du concordat qui se pratiquait déjà sous les
législations antérieures applicables dans les divers Etats parties au Traité de
l’OHADA72.

69 Il s’agit ici du concordat de redressement judiciaire ou tout du concordat de redressement par


opposition au concordat préventif qui prévaut en cas de règlement préventif.
70 Pour plus de détails sur cette question relative à la nature juridique du concordat, voir Paul KANE

EBANGA, La nature juridique du concordat de redressement judiciaire dans le Droit des affaires
OHADA, Doctrine Ohadata D-08-23.pdf ; voir aussi Filiga Michel SAWADOGO, OHADA - Droit des
entreprises en difficulté,op. cit., n° 277, p. 269 et suiv.
71Filiga Michel SAWADOGO, OHADA - Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 277, p. 270.
72 Jean René GOMEZ, OHADA – Entreprise en difficulté, lecture de l’Acte uniforme de l’OHADA portant

organisation des procédures collectives d’apurement du passif à la lumière du droit français,op. cit., n°
292, p. 322. Voir par exemple l’article 996 du Code des obligations civiles et commerciales du Sénégal.

70
Le projet du concordat doit être fait avant le jugement d’ouverture. C’est lorsque la
juridiction compétente considère que le projet est sérieux qu’elle ouvre la procédure
de redressement judiciaire. Dans les cas contraires (absence de dépôt des
propositions concordataires par le débiteur ou propositions non sérieuses, ou
encore retrait des propositions faites par le débiteur), la juridiction compétente
prononce l’ouverture de la liquidation des biens ou convertit le redressement
judiciaire en liquidation des biens. En vue de permettre au redressement envisagé
d’atteindre ses objectifs, le concordat est soumis à un processus spécifique
d’élaboration et de ratification. Il s’agit du vote par les créanciers et de
l’homologation du concordat par la juridiction compétente.

Dans les quinze (15) jours qui suivent l'expiration du délai prévu à l'article 88, le
juge-commissaire saisit le président de la juridiction compétente qui fait convoquer,
par avis insérés dans les journaux d'annonces légales de l'Etat Partie concerné et
par lettre au porteur contre récépissé ou par lettre recommandée avec demande
d'avis de réception ou par tout moyen laissant trace écrite adressés
individuellement par le greffier, les créanciers dont les créances ont été admises à
titre chirographaire, définitivement ou par provision. Lorsque le concordat de
redressement judiciaire comporte des offres de cession totale ou partielle d'actif, le
délai pour la convocation de l'assemblée concordataire est porté à un (01) mois.

S’agissant du concordat de redressement, deux cas de figures peuvent se


présenter : le concordat ordinaire et le concordat comportant une cession.

La cession totale ou partielle d'actif peut concerner tout ou partie des biens
corporels ou incorporels, meubles ou immeubles. La cession d'entreprise ou
d'établissement est toute cession de biens susceptibles d'exploitation autonome
permettant d'assurer le maintien d'une activité économique, des emplois qui y sont
attachés et d'apurer le passif. Lorsque la cession totale ou partielle d'actif ou
d'entreprise ou d'établissement est envisagée dans le concordat de redressement
judiciaire, le syndic doit établir un état descriptif des biens meubles et immeubles
dont la cession est envisagée, la liste des emplois qui y sont attachés, les sûretés
réelles dont ils sont affectés et la quote-part de chaque bien dans le prix de cession.

Le syndic fait à l'assemblée un rapport sur le projet de concordat de redressement


judiciaire et le bilan économique et social, les formalités qui ont été remplies, les
opérations qui ont eu lieu ainsi que sur les résultats obtenus depuis la décision
d'ouverture.

A l'appui de ce rapport est présenté un état de situation établi et arrêté au dernier


jour du mois écoulé. Cet état mentionne l'actif disponible ou réalisable, le passif
chirographaire et celui garanti par une sûreté réelle spéciale ou un privilège
général.

Le rapport du syndic est remis signé à la juridiction compétente qui le reçoit après
avoir entendu le juge-commissaire en ses observations sur les caractères du

71
redressement judiciaire et sur l'admissibilité du concordat.Le ministère public est
entendu en ses conclusions orales ou écrites.

Après remise du rapport du syndic, la juridiction compétente fait procéder au


vote.Le vote par correspondance et le vote par procuration sont admis.

Les créanciers titulaires d'une sûreté réelle spéciale qui n'ont pas fait la déclaration
prévue à l'article 120 peuvent prendre part au vote sans renoncer à leur sûreté et
consentir des délais et remises différents de ceux proposés par le débiteur.

Les créanciers chirographaires et ceux munis de sûreté réelle n'ayant pas fait la
déclaration prévue à l'article 120 sont présumés accepter le concordat si, dûment
appelés, ils ne participant pas au vote de l'assemblée concordataire.

Le projet de concordat de redressement judiciaire définitif est voté par la majorité en


nombre des créanciers admis définitivement ou provisoirement représentant la
moitié, au moins, du montant total des créances.

Si une (01) seule de ces deux (02) conditions est acquise, la délibération est
continuée à huitaine pour tout délai et sans autre formalité. Dans ce cas, les
créanciers présents ou régulièrement représentés ayant signé le procès-verbal de la
première assemblée, ne sont pas tenus d'assister à la seconde ; les résolutions par
eux prises et les adhésions données restent définitivement acquises.

Le vote intervient à la suite de l’accomplissement des formalités de publicités des


propositions concordataires déposées par le débiteur. Il est procédé à cette publicité
dans les journaux d’annonce légale. Les créanciers dont les créances sont
reconnues ou admises, chirographaires ou munis de sûretés sont invités à
l’assemblée des créanciers convoquée par la juridiction saisie. Il s’agit bien des
créanciers dans la masse, c’est-à-dire ceux dont les créances sont antérieures au
jugement d’ouverture. Le vote du concordat est obtenu à la majorité au si bien du
nombre des créanciers présents que du montant total des créances. Il s’agit donc
d’une double majorité. Si aucune des majorités requises n’est obtenue, le concordat
est rejeté et la juridiction compétente en prend acte et ouvre la liquidation des
biens. Mais si seule l’une des majorités est obtenue, une nouvelle assemblée des
créanciers est convoquée dans la huitaine.

Ce n’est qu’après le vote des créanciers que la juridiction saisie homologue le


concordat, après avoir vérifié sa régularité.

D’après l’art. 127 de l’AUPC, « La juridiction compétente n'accorde l'homologation du


concordat de redressement judiciaire que si :
1°) les conditions de validité du concordat sont réunies ;
2°) aucun motif, tiré de l'intérêt collectif ou de l'ordre public, ne paraît de nature à
empêcher le concordat ;
3°) en cas de redressement judiciaire d'une personne morale, la direction de celle-ci
n'est plus assurée par les dirigeants dont le remplacement a été proposé dans les

72
offres concordataires ou par le syndic ou contre lesquels a été prononcée la faillite
personnelle ;
4°) le concordat offre des possibilités sérieuses de redressement de l'entreprise
débitrice, de règlement de son passif et des garanties suffisantes d'exécution ;
5°) les conditions prévues par l'article 33-1 sont remplies, si des personnes bénéficient
du privilège prévu par ce texte, et que les montants garantis sont expressément
mentionnés ».

L'homologation du concordat de redressement judiciaire rend celui-ci obligatoire à


l'égard de tous les créanciers antérieurs à la décision d'ouverture, quelle que soit la
nature de leurs créances, sauf disposition législative particulière interdisant à
l'administration de consentir des remises ou des délais.

Toutefois, les créanciers bénéficiant de sûretés réelles spéciales ne sont obligés que
par les délais et remises particuliers consentis par eux ; si le concordat comporte
des délais n'excédant pas deux (02) ans, ceux-ci peuvent leur être opposés si les
délais par eux consentis sont inférieurs.

Les travailleurs ne peuvent se voir imposer aucune remise ni délais excédant deux
(02) ans sans préjudice des dispositions de l'article 96.Les créanciers munis de
sûretés réelles ne perdent pas leurs garanties mais ne peuvent les réaliser qu'en cas
d'annulation ou de résolution du concordat de redressement auquel ils ont consenti
ou qui leur a été imposé, sans préjudice de leur droit d'agir contre un tiers afin de
préserver leurs droits.

Le concordat de redressement judiciaire accordé au débiteur principal ou à un


coobligé ne profite pas aux autres coobligés ou aux personnes ayant consenti un
cautionnement ou affecté ou cédé un bien en garantie.

Avec l’homologation du concordat, il est mis fin à la procédure de redressement


judiciaire (art. 136 de l’AUPC). Le débiteur retrouve la direction de son entreprise ou
de ses activités et les créanciers, l’initiative des poursuites individuelles. Ils devront
cependant se conformer au respect des délais consentis et des remises accordées.
Le syndic termine sa mission avec le rapport qu’il dépose au juge-commissaire et
celui-ci met également fin à sa mission.

Le concordat disparait soit avec sa complète exécution, soit avec son annulation ou
sa résolution. L’annulation intervient pour cause de dol alors que la résolution a
lieu, soit en cas d’inexécution par le débiteur de ses engagements, soit en raison de
ce que ce débiteur est frappé de l’interdiction d’exercer une activité commerciale,
ou, s’agissant d’une personne morale, lorsque les dirigeants sont frappés d’une
interdiction de gérer, de diriger ou d’administrer une entreprise. En cas de clause
de retour à meilleure fortune, le débiteur doit régler, même les créances frappées de
forclusion.

Outre le concordat, la procédure de redressement pourrait être interrompue ou


clôturée en raison de l’extinction du passif. Il peut arriver, en effet, qu’au cours de

73
la procédure, le débiteur trouve des ressources et honore ses engagements. Le
syndic établit alors l’existence de ses ressources et assiste le débiteur dans le
règlement de ses créanciers. Dans tous les cas, lorsque, avant le terme de la
procédure, il n’existe plus de créance exigible, ou que des consignations aient été
effectuées à la caisse des dépôts et consignations pour régler, à terme, ses créances,
la juridiction compétente rend la décision de clôture pour extinction du passif.

B- La procédure simplifiée de redressement judiciaire

Aux termes des dispositions de l’art. 141-1, « Tout débiteur répondant à la définition
de la petite entreprise visée à l'article 1-3, peut demander l'application de la
procédure de redressement judiciaire simplifié… ».

Le débiteur souhaitant bénéficier du redressement judiciaire simplifié doit


soumettre la déclaration prévue aux articles 25 et 26, en tenant compte notamment
des dérogations accordées aux petites entreprises.Il produit en même temps une
déclaration sur l'honneur attestant qu'il remplit les conditions du redressement
judiciaire simplifié.

En même temps que la déclaration visée par les articles 25 à 26 ou, au plus tard,
dans les quarante-cinq (45) jours qui suivent celle-ci, le débiteur, avec le concours
du syndic, doit déposer un projet de concordat de redressement judiciaire.

Le projet de concordat de redressement judiciaire peut se limiter à des délais de


paiement, des remises de dettes ainsi qu'aux garanties éventuelles que le chef
d'entreprise doit souscrire pour en assurer l'exécution.Il n'est pas dressé de bilan
économique et social dans le redressement judiciaire simplifié.

La juridiction compétente fait application du redressement judiciaire simplifié dès la


décision d'ouverture. Toutefois, elle peut être saisie ultérieurement par le débiteur
dans un délai de trente (30) jours à compter de la décision d'ouverture s'il établit
que les conditions d'application de cette procédure sont remplies. Elle statue alors
après avoir entendu le syndic.

La décision de la juridiction compétente de faire application du redressement


judiciaire simplifié n'est susceptible d'aucun recours.A tout moment et jusqu'à la
décision homologuant le concordat de redressement judiciaire, la juridiction
compétente peut décider de ne plus faire application de la procédure simplifiée par
une décision spécialement motivée, à la demande du débiteur, du syndic, du
ministère public ou d'office. Elle statue après avoir entendu le débiteur, le syndic et
les contrôleurs.

Au moins quinze (15) jours avant que la juridiction compétente statue sur
l'homologation du projet de concordat, le syndic communique ledit projet aux
créanciers, par lettre au porteur contre récépissé ou par lettre recommandée avec
demande d'avis de réception ou par tout moyen laissant trace écrite.

74
Si le projet de concordat prévoit des remises de dettes, l'accord de chaque créancier
concerné est nécessaire. Il en va de même s'il prévoit des délais de paiement d'une
durée supérieure à deux (02) ans.Le défaut de réponse dans le délai de quinze (15)
jours à compter de la réception de la lettre du syndic vaut refus.

Au vu des réponses des créanciers, le syndic finalise avec le concours du débiteur,


le projet de concordat définitif qui comporte notamment :

- les remises de dettes acceptées par les créanciers ;


- les délais de paiement acceptés par les créanciers ;
- des délais de paiement qui ne peuvent excéder deux (02) ans pour les
créanciers qui ont refusé d'accorder tout délai de paiement.

La juridiction compétente peut ensuite se prononcer sur l'homologation du


concordat définitif, conformément aux dispositions des articles 126 et 127 sans que
les créanciers soient appelés à voter.

§ 2 : Les spécificités de mise en œuvre de la procédure de liquidation des


biens

Nous verrons ici la mise en œuvre de la procédure de liquidation des biens


proprement dite (I) et la mise en œuvre de la procédure de liquidation des biens
simplifiée (II).

I- La mise en œuvre de la procédure de liquidation des biens proprement


dite

La liquidation des biens prépare la disparition de l’entreprise. Elle peut être ouverte,
ab initio, par le jugement d’ouverture, ou par conversion du redressement judiciaire.
Dans tous les cas, elle met les créanciers en état d’union (A), la clôture pouvant
intervenir pour insuffisance d’actif (B).

A- L’union

L’union est le regroupement des créanciers consécutif à la décision de la liquidation


des biens. Le but poursuivi est non la sauvegarde de l’entreprise mais la réalisation
de l’actif en vue de l’apurement du passif. Sous la conduite du syndic, la
surveillance des contrôleurs et le contrôle du juge-commissaire, chacune des
phases est exécutée dans l’intérêt des créanciers.

En ce qui concerne la réalisation de l’actif, elle porte essentiellement sur les


meubles mais intéresse aussi des immeubles. La réalisation peut être perçue
comme une voie d’exécution concertée. Le syndic poursuit, à sa seule initiative, la
réalisation des actifs. Il a ainsi le pouvoir d’engager ou d’accepter des compromis et
de transiger si des contestations naissent au sujet des actions engagées. Le syndic
a également le pouvoir, sur autorisation du juge-commissaire, de lever les charges
qui pèseraient sur certains biens exposés aux garanties. C’est ainsi qu’il peut
choisir de payer le créancier gagiste pour libérer au profit de la masse des

75
créanciers, le bien servant à la garantie. Mais il n’effectuera ce choix que si le bien
servant a une valeur substantiellement supérieure à la dette à l’égard de ce
créancier. Le créancier gagiste ou nanti reprendra cependant son initiative à la
poursuite individuelle, à charge d’en rendre compte au syndic, si, dans le délai de
trois mois à compter de la décision de la liquidation des biens, celui-ci n’a pas retiré
le gage ou le nantissement ou entrepris une procédure de réalisation appropriée.

En ce qui concerne l’apurement du passif, elle consiste à satisfaire les créanciers.


Mais il serait illusoire, particulièrement en ce qui concerne la liquidation des biens,
d’espérer que chaque créancier soit complètement satisfait. En réalité, les
créanciers sont réglés, dans la mesure du possible, jusqu’à l’épuisement total des
actifs réalisés. Le montant des actifs réalisés est réparti entre tous les créanciers.
Mais compte tenu des modalités de distribution relatives à l’ordre des créanciers,
certains pourraient ne rien recevoir. Il faut souligner cependant que les actifs ne
sont répartis qu’après distraction du montant des frais et dépens de la liquidation,
notamment, des honoraires du syndic ainsi que du secours accordé au débiteur et
à sa famille pour des raisons alimentaires. C’est le juge commissaire qui ordonne la
répartition des deniers entre les créanciers en fixant la quotité. Il veille surtout que
tous les créanciers soient avertis.

Lorsque la répartition est ordonnée, il revient au syndic d’adresser à chaque


créancier un chèque en règlement de son dividende. Périodiquement (une fois par
semestre) le syndic dresse un rapport sur l’état de la liquidation. Ce rapport est
adressé au juge-commissaire.

L’ordre de paiement des créanciers est défini par l’article 166 s’il s’agit des
immeubles et par l’article 167 de l’AUPC en matière des meubles. En effet, d’après
l’article 166, « Les deniers provenant de la réalisation des immeubles sont distribués
dans l'ordre suivant :
1°) aux créanciers bénéficiant du privilège prévu par les articles 5-11,11-1 et 33-1 ci-
dessus ;
2°) aux créanciers des frais de justice engagés pour parvenir à la réalisation du bien
vendu et à la distribution du prix ;
3°) aux créanciers de salaires super privilégiés en proportion de la valeur de
l'immeuble par rapport à l'ensemble de l'actif ;
4°) aux créanciers titulaires d'une hypothèque conventionnelle ou forcée et aux
créanciers séparatistes inscrits dans le délai légal, chacun selon le rang de son
inscription au livre foncier ;
5°) aux créanciers de la masse tels que définis par l'article 117 ci-dessus ;
6°) aux créanciers munis d'un privilège général selon l'ordre établi par l'Acte uniforme
portant organisation des sûretés, à savoir, aux créanciers munis d'un privilège
général soumis à publicité, chacun selon le rang de son inscription au Registre du
commerce et du crédit mobilier, et aux créanciers munis d'un privilège général non
soumis à publicité selon l'ordre établi par l'article 180 de cet Acte uniforme ;
7°) aux créanciers chirographaires munis d'un titre exécutoire ;
8°) aux créanciers chirographaires non munis d'un titre exécutoire.

76
En cas d'insuffisance des deniers pour désintéresser totalement les créanciers de
l'une des catégories désignées aux 1°, 2°, 3°, 5°, 6°, 7° et 8° du présent article venant
à rang égal, ceux- ci concourent aux répartitions dans la proportion de leurs créances
totales, au marc le franc ».

L’article 167 dispose que « Sans préjudice de l'exercice d'un éventuel droit de
rétention ou d'un droit exclusif au paiement, les deniers provenant de la réalisation
des meubles sont distribués dans l'ordre suivant :
1°) aux créanciers bénéficiant du privilège prévu par les articles 5-11, 11-1 et 33-1 ci-
dessus ;
2°) aux créanciers des frais de justice engagés pour parvenir à la réalisation du bien
vendu et à la distribution elle-même du prix ;
3°) aux créanciers de frais engagés pour la conservation du bien du débiteur dans
l'intérêt du créancier dont les titres sont antérieurs en date ;
4°) aux créanciers de salaires super privilégiés en proportion de la valeur du meuble
par rapport à l'ensemble de l'actif ;
5°) aux créanciers garantis par un privilège général soumis à publicité, un gage, ou un
nantissement, chacun à la date de son opposabilité aux tiers ;
6°) aux créanciers munis d'un privilège mobilier spécial, chacun sur le meuble
supportant le privilège ;
7°) aux créanciers de la masse tels que définis par l'article 117 ci-dessus ;
8°) aux créanciers munis d'un privilège général selon l'ordre établi par l'Acte uniforme
portant organisation des sûretés ;
9°) aux créanciers chirographaires munis d'un titre exécutoire ;
10°) aux créanciers chirographaires non munis d'un titre exécutoire.
En cas d'insuffisance des deniers pour désintéresser totalement les créanciers de
l'une des catégories désignées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 7°, 8°et 9° du présent article venant
à rang égal, ceux- ci concourent aux répartitions dans la proportion de leurs créances
totales, au marc le franc ».

Si le prix de vente d'un bien spécialement affecté à une sûreté est insuffisant à
payer la créance en principal et intérêts, le créancier titulaire de cette sûreté est
traité, pour le reliquat non payé de sa créance, comme un créancier chirographaire
(voir l’art. 168 de l’AUPC).

A la fin des opérations de liquidation, le syndic procède à la reddition des comptes


au juge-commissaire, en présence du débiteur. Le procès-verbal de compte rendu
est communiqué à la juridiction compétente qui prononce la clôture de la
liquidation.

La décision qui clôture les opérations tranche les contestations éventuelles. L’union
est alors dissoute de plein droit ainsi que les organes de la procédure. Les
créanciers recouvrent leur droit de poursuite individuelle. La décision de clôture est
publiée au journal officiel, dans les journaux d’annonces légales et par toutes voies
appropriées. Mais la clôture de la procédure peut intervenir de manière prématurée,
pour insuffisance d’actif.

77
B- La clôture pour insuffisance d’actif

Aux termes des dispositions de l’art. 173 de l’AUPC « Si les fonds manquent pour
entreprendre ou terminer les opérations de la liquidation des biens, la juridiction
compétente, sur le rapport du Juge-commissaire peut, à quelque époque que ce soit,
prononcer, à la demande de tout intéressé ou même d’office, la clôture des opérations
pour insuffisance d’actif ». La clôture pour insuffisance d’actif intervient en effet si
les fonds manquent pour entreprendre et terminer les opérations de la liquidation.
Il semble bien que le législateur vise ici la situation d’extrême difficulté de
l’entreprise qui ne permet point à celle-ci de faire face même aux frais et dépens que
génère la liquidation. Sur les observations dans ce sens du syndic ou à la demande
de toute personne intéressée, la juridiction compétente prononce, à tout moment, la
clôture pour insuffisance d’actif.

Comme dans le cas précédent, la décision de clôture met fin aux opérations et aux
fonctions des organes désignés par le jugement de clôture.

Les créanciers recouvrent leur droit de poursuite individuelle. Leurs créances ayant
été admises, ils tiennent un titre exécutoire qu’ils peuvent mettre à exécution
lorsque, conformément à leur espérance, le débiteur recouvre une meilleure santé
financière. D’autant que lorsqu’il est postérieurement justifié que des fonds
nécessaire à la procédure ont été rassemblés ou consignés, la décision de clôture
pourra être rapportée à la demande du débiteur ou de toute personne intéressée.
On peut donc retenir que, dans le cas de la clôture pour insuffisance d’actif, la
décision n’est que provisoire.

II- La mise en œuvre de la procédure de liquidation des biens simplifiée

Tout débiteur répondant à la définition de la petite entreprise, à la condition de ne


pas être propriétaire d'un actif immobilier, peut demander l'application de la
procédure de liquidation des biens simplifiée (art. 179-1 de l’AUPC).

Le débiteur souhaitant bénéficier de la liquidation des biens simplifiée doit


soumettre la déclaration prévue à l'article 25 dans les conditions fixées par l'article
26, en tenant compte notamment des dérogations accordées aux petites
entreprises. Conjointement à la déclaration prévue aux articles 25 à 26, le débiteur
qui remplit les conditions d'application de la liquidation des biens simplifiée produit
une déclaration sur l'honneur l'attestant.

Après l'ouverture d'une liquidation des biens, le syndic peut, dans les trente (30)
jours de sa désignation, rédiger et déposer un rapport auprès de la juridiction
compétente. La juridiction compétente peut, d'office, sur la base du rapport, faire
application de la procédure de liquidation des biens simplifiée après avoir entendu
ou dûment appelé le débiteur.

La juridiction compétente qui envisage de prononcer une liquidation des biens


simplifiée doit constater dans sa décision :

78
- la qualité de « petite entreprise » du débiteur conformément à la définition
de l'article 1-3;
- et l'absence d'actif immobilier.

La juridiction compétente conserve toutefois la faculté de ne pas appliquer la


procédure de liquidation des biens simplifiée, même si les conditions d'application
sont réunies.La décision de la juridiction compétente de faire application de la
liquidation des biens simplifiée n'est pas susceptible de recours.

Par dérogation aux dispositions de l'article 147 dans la décision faisant application
de la liquidation des biens simplifiée, la juridiction compétente détermine les biens
du débiteur pouvant faire l'objet d'une vente de gré à gré. Le syndic y procède dans
les quatre- vingt (90) jours suivant la publication de cette décision. A l'issue de cette
période, il est procédé à la vente aux enchères des biens subsistants.

Les biens non déterminés comme pouvant faire l'objet d'une vente de gré à gré dans
la décision d'application de la liquidation des biens simplifiée sont vendus aux
enchères sans délai.

Par dérogation aux dispositions de l'article 146, il est procédé à la vérification des
seules créances susceptibles de venir en rang utile dans les répartitions et des
créances salariales.

A l’issue de la procédure de vérification et d’admission des créances et de la


réalisation de l’actif, le syndic établit un projet de répartition qu’il dépose au greffe
de la juridiction compétente. Le dépôt de ce projet fait l’objet d’une mesure de
publicité dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas de l’article 37,
réalisée par le greffe.

Tout intéressé peut prendre connaissance du projet de répartition et, à l’exclusion


du syndic, le contester devant le juge-commissaire, dans un délai de dix (10) jours à
compter de la publicité.

Le juge-commissaire statue sur les contestations par une décision qui fait l'objet
d'une notification par tout moyen permettant d'établir la réception effective par le
destinataire aux créanciers intéressés. Sa décision est insusceptible de recours. Le
syndic procède à la répartition conformément au projet ou, si ce dernier a été
contesté, à la décision rendue

Au plus tard cent vingt (120) jours après l'ouverture ou la décision prononçant la
liquidation des biens simplifiée, la juridiction compétente prononce la clôture de la
liquidation des biens, le débiteur entendu ou dûment appelé. La juridiction
compétente peut, par décision spécialement motivée, proroger la durée de la
procédure de liquidation des biens simplifiée pour une période qui ne peut excéder
soixante (60) jours.

79
A toute époque du déroulement de la liquidation de biens simplifiée, la juridiction
compétente peut décider, par décision spécialement motivée, de ne plus faire
application des dérogations prévues à la présente section.

80
PARTIE II : LES SANCTIONS
L’ouverture d’une procédure collective contre une entreprise en difficulté est, en
principe, sans incidence sur le sort de ses dirigeants, à moins que ces derniers
n’aient commis une faute. Le législateur communautaire a prévu trois catégories de
sanctions contre le dirigeant d’une personne morale soumise aux procédures
collectives : les sanctions patrimoniales, les sanctions extrapatrimoniales et les
sanctions pénales.

Ces sanctions revêtent trois caractères principaux. Elles ont, d’abord, un caractère
dissuasif car elles permettent d’empêcher la commission des faits incriminés.
Ensuite, elles ont un caractère punitif parce qu’elles permettent d’éliminer pour
l’avenir les coupables dans le but d’assainir l’environnement socio-économique
dans lequel les entreprises évoluent. Enfin, elles revêtent un « caractère
patrimonial »73 puisqu’elles contribuent, en cas du prononcé de comblement du
passif ou de l’extension de la procédure, au paiement des créanciers.

Il est à noter que le législateur OHADA a juste incriminé les faits punissables sans
déterminer les peines encourues. Les peines sont déterminées par les législations
nationalesde chaque Etat partie au Traité.

73 Voir Filiga Michel SAWADOGO, OHADA - Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 5, pp. 3 et 4.

81
Chapitre 1 : Les sanctions patrimoniales

Les sanctions patrimoniales ont essentiellement pour but de contribuer au


paiement des créanciers et au redressement de l’entreprise. Elles visent à faire
supporter aux dirigeants tout ou partie des dettes de l’entreprise en procédure
collective lorsque ces dettes trouvent leur cause dans une faute de gestion. Elles
concernent principalement le comblement de l’insuffisance d’actif (section 1) et
l’extension des procédures aux dirigeants (section 2).

Section 1 : Le comblement du passif

L’action en comblement du passif est une importante action qui sanctionne, en


pratique, la faute de gestion (entre autres l’erreur de gestion, l’imprudence, la
négligence, la violation des règles légales et statutaires) commise par le dirigeant, si
ladite faute de gestion est à l’origine du préjudice subi par les créanciers, c’est-à-
dire à l’origine de l’insuffisance d’actif. Elle a pour objet d’obliger les dirigeants,
auteurs des fautes de gestion ayant partiellement ou totalement entraîné une
insuffisance d’actif, à combler partiellement ou totalement cette insuffisance sur
leur propre patrimoine.

L’action en comblement du passif avait été créée par la loi française du 16


novembre 1940 sur les sociétés anonymes et par le décret français du 9 août 1953
sur les sociétés à responsabilité limitée. Elle a été reprise et étendue par la loi du 13
juillet 1967, puis avec la loi du 25 janvier 1985, elle a été réformée et codifiée à
l’article L. 624-3 du Code du commerce. La réforme de 1985 avait abouti à
l’abandon de la double présomption de faute et de responsabilité qui frappait
jusque-là les dirigeants ; les conditions de mise en œuvre de l’action en comblement
du passif étant devenues celles de la responsabilité civile du droit commun.

Avant la Réforme, la situation dans les Etats francophones d’Afrique parties au


Traité de l’OHADA relativement à l’action en comblement du passif n’était pas tout à
fait claire. En effet, le décret du 9 août 1953 était, contrairement à la loi du 16
novembre 1940, étendu dans les colonies74. De même, après leur accession à la
souveraineté nationale et internationale, les modifications législatives et
réglementaires intervenues en France n’y sont plus automatiquement étendues. A
l’exception de quelques Etats comme la Guinée, le Mali et le Sénégal, les législations
de la plupart de ces Etats francophones d’Afrique s’inspiraient paradoxalement de
la loi du 16 novembre 194075. Cependant, l’action en comblement du passif, telle
qu’elle est aujourd’hui appliquée en droit communautaire, s’est largement inspirée
de l’article 180 de la loi française du 25 janvier 1985 qui avait apporté une profonde
modification en la matière.

74 Voir Filiga Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., note de bas de page n° 1,
n° 335, p. 317.
75 Jean René GOMEZ, OHADA – Entreprise en difficulté, lecture de l’Acte uniforme de l’OHADA portant

organisation des procédures collectives d’apurement du passif à la lumière du droit français,op. cit., n°
209, p. 254.

82
Aux termes des dispositions de l’article 183 de l’AUPC, lorsque le redressement
judiciaire ou la liquidation des biens d’une personne morale fait apparaître une
insuffisance d’actif, la juridiction compétente peut, en cas de faute de gestion ayant
contribué à cette insuffisance d’actif, décider, à la requête du syndic ou même
d’office, que les dettes de la personne morale seront supportées en tout ou en
partie, avec ou sans solidarité, par tous les dirigeants ou certains d’entre eux. Tout
comme une action en responsabilité de droit commun, l’action en comblement du
passif suppose une faute de gestion, un préjudice et un lien de causalité entre cette
faute de gestion et le préjudice subi.

§ 1 : La faute de gestion

Depuis la loi française du 25 janvier 1985, la condamnation du dirigeant au


comblement de l’insuffisance d’actif ne découle plus ni d’une présomption de faute
de gestion, ni d’une présomption de responsabilité. Mais, le dirigeant de droit ou de
fait, poursuivi pour insuffisance d’actif, ne peut être condamné à en répondre sur
son patrimoine personnel qu’à la condition que cette insuffisance d’actif soit due à
une faute de gestion. Ni le législateur OHADA, ni son homologue français ne
définissent la notion de faute de gestion expressément exigée par l’article 183 de
l’AUPC et l’article L. 651-2 du C. com. L’article 180 de la loi française du 25 janvier
1985 qui a inspiré le législateur OHADA ne définit pas non plus cette notion de
faute de gestion. Un tour d’horizon historique a montré que lors de la discussion de
la loi de 1985, le Sénat avait proposé de ne retenir qu’une « faute grave de
gestion »76 mais son amendement avait été repoussé. La faute à prendre en
considération peut être lourde ou légère, une pluralité de fautes ou une seule faute.
Elle sera le plus souvent une faute par action, mais elle peut aussi être une faute
d’abstention77.

M. BADINTER, le garde des Sceaux français à l’époque du vote de la loi de 1985,


avait estimé qu’il s’agissait d’une faute par rapport « à des normes de gestion »78. La
notion de faute de gestion est souverainement appréciée par les juges du fond par
référence à l’attitude d’un dirigeant notamment avisé, « en tenant compte du fait que
la gestion n’est pas plus que le droit une science exacte »79 ; la Cour de cassation se
limite seulement à un contrôle de la qualification80. La jurisprudence française
retient une diversité de fautes de gestion81.

76 Journal officiel Sénat, 8 juin 1984, p. 1443.


77 La faute d’abstention sera par exemple commise lorsque la comptabilité de l’entreprise sera
incomplète (Paris, 25 octobre 2002, RJDA 2/2003, n° 172).
78 Journal officiel Sénat, 8 juin 1984, p. 1443.
79 Françoise PEROCHON et Régine BONHOMME, Entreprise en difficulté, Instrument de crédit et de

paiement,op. cit., n° 568.


80 Voir par exemple Cass. com., 19 décembre 1995, Juris-Data n° 003952. La Cour de cassation a

cassé l’arrêt se fondant, pour condamner le dirigeant, sur la seule importance du passif, sans
s’expliquer sur les causes du déficit.
81 Ce sont par exemple la mauvaise tenue de comptabilité, les sureffectifs, la perte d’un marché et

l’absence de diversification de la clientèle, la poursuite d’une activité déficitaire dans l’intérêt des
dirigeants, les investissements excessifs et inadaptés, le procédé de la « chenille », c’est-à-dire le
procédé consistant en une émission de chèques tirés entre les sociétés d’un groupe pour se procurer
du crédit, la non déclaration de la cessation des paiements, la poursuite d’une activité déficitaire sans
avoir pris des mesures concrètes de restructuration en temps utile, etc. Voir pour plus de détails,
Corinne SAINT-ALARY-HOUIN, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 1265, p. 808 et suiv.

83
§ 2 : Le préjudice subi : une insuffisance d’actif

Aux termes des dispositions de l’article 183 de l’AUPC, l’action en responsabilité


pour insuffisance d’actif ne peut être exercée que lorsque l’ouverture de la
procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens contre une
personne morale « fait apparaître une insuffisance d’actif ». Le préjudice subi par les
créanciers résulte de l’impossibilité pour l’entreprise de les désintéresser, c’est-à-
dire d’une « insuffisance d’actif pour couvrir les dettes antérieures »82 ou d’un
« déséquilibre entre le passif externe de l’entreprise et l’actif dont elle dispose au jour
où le juge est saisi »83.

Les faits auxquels les juridictions tiennent compte pour admettre les poursuites
contre les dirigeants pour le comblement de l’insuffisance d’actif sont logiquement
les seuls faits antérieurs au jugement d’ouverture. Les dettes « nées postérieurement
au jugement n’entrent donc pas dans le passif pouvant entraîner la sanction du
comblement de l’insuffisance d’actif ; les frais proprement dits de procédure ne
rentrent pas dans la détermination de l’actif »84. Même si la preuve d’une faute de
gestion et l’insuffisance d’actif est rapportée, l’action en comblement du passif ne
peut être exercée contre un dirigeant qu’à la condition que soit établi un lien de
causalité entre cette faute de gestion et cette insuffisance d’actif.

§ 3 : La preuve d’un lien de causalité

En vertu de l’article 183 de l’AUPC, l’action en responsabilité pour insuffisance


d’actif ne peut conduire à la condamnation du dirigeant qu’à la condition qu’un lien
de causalité soit établi entre la preuve de la faute et une insuffisance d’actif. En
effet, la juridiction compétente ne peut décider que les dettes de la personne morale
seront supportées en tout ou en partie, avec ou sans solidarité, par les dirigeants,
qu’en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif.

L’exigence du lien de causalité entre la faute de gestion et l’insuffisance d’actif n’est


que la conséquence de la suppression de la double présomption de faute et de
responsabilité en matière de l’action en comblement du passif. Seulement, le
législateur ne précise pas clairement laquelle des théories de la causalité adéquate
(qui consiste à ne prendre en considération que les causes les plus proches du
dommage causé, ce qui limite la chaîne de causalité) ou de l’équivalence des
conditions (qui consiste à retenir toutes les conditions positives ou négatives qui
produit le résultat incriminé, c’est-à-dire l’insuffisance d’actif) sera retenue. Mais, il
semble que la théorie de l’équivalence des conditions soit la plus indiquée en raison
du fait que, même si, elle ne peut être la seule cause de l’insuffisance d’actif, une
faute légère des dirigeants est largement suffisante pour justifier les poursuites
contre eux.

82 Marie-Laure COQUELET, Entreprises en difficulté, Instrument de paiement et de crédit, op. cit., n°


512, p. 352.
83 Françoise PEROCHON et Régine BONHOMME, Entreprise en difficulté, Instrument de crédit et de

paiement,op. cit., n° 569.


84Cass. com., 28 février 1995, RJDA 5/95, n° 651, Juris-Data, n° 001249 ; Cass. com., 2 juin 1987,

LPA, 23 novembre 1987, note A. HONORAT.

84
L’action en comblement du passif relève exclusivement de la compétence de la
juridiction compétente qui a prononcé le redressement judiciaire ou la liquidation
des biens85. Cette action peut être introduite par le syndic, et l’assignation de celui-
ci doit être signifiée à chaque dirigeant mis en cause huit (8) jours au moins avant
l’audience ; elle peut également l’être d’office par la juridiction compétente pour
« pallier l’impéritie éventuelle des organes de la procédure et les collusions entre le
dirigeant et certains créanciers »86. Dans ce dernier cas, le Président de la juridiction
compétente fait convoquer les dirigeants, par acte extrajudiciaire, à la diligence du
greffier, toujours dans un délai de huit (8) jours. La juridiction compétente statue
dans les moindres délais, après avoir entendu le juge-commissaire en son rapport
et les dirigeants en audience non publique.

Cette action en comblement se prescrit par trois ans à compter de l’arrêté définitif
de l’état des créances. La prescription est suspendue pendant le temps que dure le
concordat de la personne morale et recommence à courir en cas de sa résolution ou
de son annulation. Toutefois, le syndic dispose à nouveau, d’un délai qui ne peut,
en aucun cas, être inférieur à un an87. Par ailleurs, la décision de comblement du
passif est soumise aux articles 36 et 37 de l’AUPC qui sont relatifs aux modalités de
la publication88. En effet, la publicité est faite en ce qui concerne les associés
responsables du passif ou les dirigeants d’une personne morale commerçante, sous
le numéro d’immatriculation de cette personne morale au RCCM. Si les dirigeants
sont eux-mêmes commerçants, la publication est faite au Journal officiel sous le
numéro personnel des dirigeants.

L’action en comblement a pour but de condamner les dirigeants de droit ou de fait


qui ont contribué, par leurs fautes de gestion, à l’insuffisance d’actif d’une personne
morale, à supporter en tout ou en partie les dettes de cette personne morale en cas
d’ouverture d’une procédure collective. Cependant, en pratique, le succès de cette
action est très faible soit parce que « les dirigeants se trouvent insolvables, soit parce
qu’ils répondent déjà des dettes sociales en qualité d’associés tenus solidairement et
indéfiniment aux dettes sociales ou en qualité de cautions »89.

Les dirigeants ne peuvent être condamnés à combler le passif de la personne morale


qu’ils dirigent qu’à la suite de l’ouverture d’une procédure collective contre cette
personne morale.

Section 2 : L’extension des procédures aux dirigeants90

L’extension des procédures collectives à certaines personnes du fait de leurs


agissements n’est pas une innovation dans l’espace OHADA. Le droit français qui

85
Voir l’article 184 de l’AUPC.
86
Yves GUYON, Droit des entreprises en difficulté, Redressement judiciaire, Faillite, op. cit., n° 1378.
87
Voir l’article 186 de l’AUPC.
88
Voir l’article 188 de l’AUPC.
89
Voir l’article 181 de l’AUPC. Voir également Corinne SAINT-ALARY-HOUIN, Droit des entreprises en difficulté,op.
cit., n° 1262, p. 807.
90 Pour le Professeur SAWADOGO, « l’expression « extension de la procédure collective au(x) dirigeant(s) »

peut induire en erreur car elle fait penser que la procédure ouverte à l’égard de la personne morale va
étendre ses effets aux dirigeants. Or, il ne s’agit pas d’une procédure unique : d’autres procédures
devront être prononcées. De plus, l’ouverture de ces dernières n’est pas automatique… ». Voir Filiga
Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 346, p. 326 et suiv.

85
était rendu applicable dans la plupart des Etats francophones d’Afrique avant la
Réforme de l’OHADA faisait déjà mention, à l’ancien article 437 du Code du
commerce français, de l’extension de la faillite d’une société commune à « toute
personne qui, sous le couvert de cette société masquant ses agissements, avait fait
des biens sociaux comme des siens propres ». Les articles 189 à 193 de l’AUPC sont
relatifs à l’extension des procédures collectives aux dirigeants des personnes
morales. C’est une mesure dissuasive qui vise les dirigeants qui, par leurs
agissements fautifs, auraient diminué l’actif ou aggravé le passif de l’entreprise.

De toutes les façons, s’agissant du domaine d’application rationae personae de cette


sanction, il ressort de l’Acte uniforme qu’une procédure de redressement judiciaire
ou de liquidation des biens ouverte contre une entreprise peut être étendue aux
personnes physiques ou morales dirigeantes91, de droit ou de fait, apparentes ou
occultes, rémunérées ou non et les personnes physiques représentantes
permanentes des personnes morales dirigeantes. Que ces personnes physiques
dirigeantes des personnes morales ou représentantes permanentes des personnes
morales dirigeantes soient elles-mêmes ou non en difficulté, et notamment en
cessation des paiements, l’extension des procédures peut les concerner si elles se
rendent coupables de certains agissements fautifs92. Toutefois, il n’y aurait plus
intérêt à étendre les procédures collectives à une personne si, dès le jugement
d’ouverture, son patrimoine devrait normalement être appréhendé par les
procédures collectives. Tel est, par exemple, le cas des débiteurs personnes
physiques et des associés indéfiniment et solidairement responsables du passif
social93. Il en irait de même pour les associés commanditaires qui auraient fait les
actes de gestion externe, en violation de l’article 299 de l’AUSCGIE 94, et pour les
associés commandités. La procédure leur sera étendue non à titre de dirigeants,
mais en tant qu’associés tenus indéfiniment et solidairement du passif social95.

§ 1 : Les cas d’extension des procédures collectives

L’article 189 de l’AUPC énumère quatre cas d’extension des procédures collectives
aux dirigeants. Cette extension peut être décidée même si le dirigeant n’est pas lui-
même en cessation des paiements. L’art.189 de l’AUPC dispose qu’en cas de
redressement judiciaire ou de liquidation des biens d’une personne morale, peut
être déclaré personnellement en redressement judiciaire ou en liquidation des
biens, tout dirigeant qui a, sans être en cessation des paiements lui-même :

- exercé une activité commerciale personnelle, soit par personne interposée,


soit sous le couvert de la personne morale masquant ses agissements. Il
s’agit de l’hypothèse dans laquelle le dirigeant, « maître de l’affaire use du
masque de la personnalité juridique de la société pour exercer une activité

91 Voir l’article 194 de l’AUSCGIE.


92Cass. com., 16 juin 1987, Bull. Joly, 1987, 727.
93 Voir l’article 181 de l’AUPC.
94 L’article 229 de l’AUSCGIE dispose que « l’associé ou les associés commanditaires ne peuvent faire

aucun acte de gestion externe, même en vertu d’une procuration ».


95 Voir dans ce sens et pour plus de détails Filiga Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en

difficulté,op. cit., n° 347 et suiv. p. 327 et suiv.

86
qui lui est interdite ou pour porter atteinte aux droits de ses créanciers »96.
L’entreprise n’a, dans ce cas, pas d’existence propre. Elle est, par contre,
au service du dirigeant : elle est donc fictive;

- disposé du crédit ou des biens de la personne morale comme des siens


propres. C’est le cas par exemple lorsqu’un débiteur se fait consentir des
avances par la société, fait cautionner par elle ses dettes personnelles,
encaisse personnellement des effets de commerce dont la société était
bénéficiaire ou perçoit une rémunération excessive ;

- poursuivi abusivement, dans son intérêt personnel, une exploitation


déficitaire qui ne pouvait conduire qu’à la cessation des paiements de la
personne morale. Ce cas vise, par exemple, « le dirigeant qui utilise des
moyens de financement « ruineux » pour maintenir artificiellement à flot une
entreprise économiquement et financièrement non viable »97.

- Le quatrième cas d’extension concerne les dirigeants à la charge desquels


a été mis tout ou partie du passif d’une personne morale et qui
n’acquittent pas cette dette. Si les trois premiers cas d’extension des
procédures collectives aux dirigeants comportent une idée « d’abus de la
personne morale » ou « semblent reposer sur le fait que le dirigeant a plus
ou moins confondu le patrimoine de la société avec le sien propre »98, le
dernier cas a un fondement carrément différent. Il peut, en effet,
s’analyser comme « une sanction de l’obligation de comblement de
l’insuffisance d’actif »99. Par ailleurs, ces trois premiers cas constituent
également des cas de faillite personnelle (196 – 2°, 196 – 3° et 197 – 5° de
l’AUPC). Ces deux types de sanctions peuvent être prononcés contre un
dirigeant qui se rendrait coupable de ces mauvaises attitudes
managériales.

Le législateur OHADA, relativement à l’extension des procédures s’est tu sur les


personnes habilitées à agir en extension de la procédure. Néanmoins, pour l’action
en comblement du passif qui se trouve sous le même chapitre VI relatif aux
dispositions particulières aux dirigeants des personnes morales, et qui poursuit la
même finalité d’amener les dirigeants à contribuer à l’insuffisance d’actif en cas de
leur faute de gestion, le législateur a prévu que la saisine de la juridiction
compétente peut se faire soit par le syndic, soit d’office. Dans le cas où la saisine est
faite par le syndic, l’assignation du syndic doit être signifiée à chaque dirigeant mis
en cause huit (8) jours au moins avant l’audience, et lorsqu’elle est faite d’office, le
Président les fait convoquer, par acte extrajudiciaire, à la diligence du greffier, dans
les mêmes délais de huit (8) jours. N’est-il donc pas convenable malgré ce silence du

96 Com., 8 déc. 1998, RTD Com. 1999, 189, obs. A. LAUDE.


97 Jean René GOMEZ, OHADA – Entreprise en difficulté, lecture de l’Acte uniforme de l’OHADA portant
organisation des procédures collectives d’apurement du passif à la lumière du droit français,op. cit., n°
221, p. 264.
98Filiga Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 350, p. 330 et suiv.
99 Jean René GOMEZ, OHADA – Entreprise en difficulté, lecture de l’Acte uniforme de l’OHADA portant

organisation des procédures collectives d’apurement du passif à la lumière du droit français,op. cit., n°
221, p. 264.

87
législateur communautaire relativement à la saisine en cas d’extension des
procédures aux dirigeants, et surtout en raison de la finalité identique poursuivie
par ces deux sanctions patrimoniales de retenir les mêmes solutions en matière de
saisine ? Le Professeur SAWADOGO pense que « il eût été indiqué de prévoir des
dispositions procédurales communes au comblement du passif et à l’extension de la
procédure »100.

§ 2 : L’autonomie de la procédure d’extension

Il ressort des dispositions de l’Acte uniforme que l’ouverture des procédures


collectives contre les dirigeants est accessoire à celle ouverte contre la personne
morale elle-même. Toutefois, il y a dualité des procédures, et la procédure
applicable aux dirigeants est autonome par rapport à celle ouverte contre la
personne morale. En effet, la personne morale peut bénéficier du redressement
judiciaire si sa situation économique et financière le permet, alors que les dirigeants
peuvent être déclarés en état de liquidation des biens, et vice-versa. De même, les
procédures peuvent être étendues aux dirigeants même s’ils ne sont pas eux-mêmes
en cessation des paiements. C’est justement en cela que l’expression « extension des
procédures collectives aux dirigeants » prête confusion101, car en réalité, ce n’est pas
la procédure dont bénéficie la personne morale qui est forcément et
automatiquement étendue aux dirigeants.

La juridiction compétente pour prononcer l’extension des procédures collectives aux


dirigeants est celle qui a ouvert la procédure de redressement judiciaire ou de
liquidation des biens contre la personne morale. La juridiction compétente peut, en
effet, prononcer le redressement judiciaire ou la liquidation des biens de tout
dirigeant si celui-ci se rend coupable de l’un des agissements énumérés à l’article
189 de l’AUPC.

De toutes les façons, la date de la cessation des paiements du dirigeant est


normalement celle fixée par la décision prononçant le redressement judiciaire ou la
liquidation des biens de la personne morale. La date de la cessation des paiements
du dirigeant ne peut en aucun cas être postérieure à celle fixée par le jugement
déclarant le redressement judiciaire ou la liquidation des biens de la personne
morale. Elle peut néanmoins être antérieure à celle de la personne morale si le
dirigeant bénéficie lui-même d’une procédure indépendante (art. 192 de l’AUPC).

La décision qui prononce l’extension des procédures collectives aux dirigeants des
personnes morales, fait l’objet de publicité. Elle est, en effet, faite d’office, par le
greffier ou à défaut par le syndic au RCCM, dans un journal habilité à recevoir des
annonces légales et au journal officiel(art. 193 de l’AUPC).

100FiligaMichel SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté, op. cit, n° 351, p. 332.
101 Pour plus de détails sur ce point, voir Jean René GOMEZ, OHADA – Entreprise en difficulté, lecture
de l’Acte uniforme de l’OHADA portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif à
la lumière du droit français,op. cit., n° 222, p. 265.

88
Chapitre 2 : Les sanctions extrapatrimoniales et pénales

La loi française du 13 juillet 1967 portait une idée directrice : « éliminer les
entreprises économiquement condamnées sans cependant frapper d’infamie les
dirigeants qui ne l’ont pas mérité ». Le débiteur ou le chef d’entreprise ne subit pas
de sanction particulière du seul fait de l’ouverture d’une procédure collective contre
l’entreprise. Néanmoins, s’il a commis des fautes de gestion, il peut être frappé de
sanctions. Les dirigeants peuvent ainsi encourir des sanctions civiles dont la plus
grave est la faillite personnelle, c’est-à-dire une sanction se traduisant d’une part,
par l’interdiction de gérer toute entreprise commerciale et, d’autre part, par la
privation du droit de vote et l’interdiction d’exercer une fonction élective. Il peut
également s’exposer aux sanctions pénales, notamment à la banqueroute.
Seulement, toutes les sanctions que le débiteur peut encourir sont détachées du
sort de l’entreprise : c’est le corollaire de la distinction de l’homme de l’entreprise.

En droit OHADA, lorsque la faute du chef d’entreprise est prouvée, celui-ci peut
encourir, outre les sanctions patrimoniales, des déchéances, des interdictions voire
des sanctions pénales. Les déchéances et les interdictions désignent la faillite
personnelle qui écarte les débiteurs et les dirigeants immoraux de la vie civique,
politique et des affaires.

Jusqu’à l’ordonnance de Colbert102 de 1673, aucune distinction n’est officiellement


faite entre la faillite et la banqueroute. A la suite d’une ordonnance promulguée en
janvier 1629 par Louis XIII, et dont l’article 135 disposait que « les banqueroutiers
qui feront faillite en fraude seront punis extraordinairement », le banqueroutier
frauduleux est distingué du débiteur malheureux. La banqueroute (qui est une
lourde et délictueuse faute de gestion) est la sanction pénale. Pour les peines
applicables, l’Acte uniforme renvoie aux législations nationales traitant de ces
infractions (art. 226 de l’AUPC), en raison, sans doute, des considérations politico-
économiques propres à chaque Etat partie.

Section 1 : La faillite personnelle

Le Tribunal qui ouvre la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des


biens doit ou peut, à toute époque de la procédure, prononcer contre les dirigeants
de l’entreprise en difficulté la faillite personnelle qui est une sanction
professionnelle ou personnelle103. Cette compétence est exclusive quel que soit le
statut de la personne poursuivie : une personne non commerçante pourra ainsi être
poursuivie devant la juridiction compétente ayant diligenté la procédure collective.
Si le droit français fait le départ entre la faillite personnelle et l’interdiction de gérer,

102 Jean Baptiste COLBERT fut le contrôleur général des finances de 1665 à 1683 et secrétaire d’Etat
de la maison du Roi et secrétaire d’Etat de la Marine de 1669 à 1683.
103 Il est à noter que le prononcé de la faillite personnelle n’est pas automatique à l’ouverture de la

procédure.

89
« l’Acte uniforme de l’OHADA n’a pas retenu le démembrement de la faillite
personnelle sous la forme d’une interdiction professionnelle ponctuelle »104.

La faillite personnelle est une sanction professionnelle sévère. Les effets de la faillite
personnelle sont prévus par les articles 199 et 203 de l’AUPC. Elle emporte, en effet,
de plein droit interdiction générale de faire le commerce et notamment de diriger, de
gérer, d’administrer, de contrôler (directement ou indirectement) une entreprise
commerciale à forme individuelle ou toute personne morale (de droit privé ou de
droit public) ayant une activité économique. Elle emporte aussi interdiction
d’exercer une fonction publique élective et d’être électeur pour ladite fonction
publique. Aux termes des dispositions de l’article 1037 du Code des obligations
civiles et commerciales du Sénégal, cette déchéance vise les élections des députés,
des conseillers généraux, des conseillers municipaux, aux Tribunaux de commerce,
aux chambres de commerce et d’industrie et aux conseils de prud’hommes. Le failli
ne peut, en outre, exercer aucune fonction, administrative, judiciaire ou de
représentation professionnelle. Il ne peut, par exemple, donner des consultations ou
rédiger pour autrui des actes sous seing privé ou être officier ministériel 105. Il sera,
en outre, privé de porter les décorations les plus honorifiques. La faillite personnelle
des dirigeants des personnes morales les prive du droit de vote dans les assemblées
de ces personnes morales contre lesquelles est ouverte une procédure collective. Ce
droit est exercé par un mandataire désigné par le juge-commissaire à cet effet à la
requête du syndic (art. 199 de l’AUPC).

La faillite personnelle a donc pour « objectif d’éliminer le chef d’entreprise


malhonnête de la vie des affaires afin de protéger les cocontractants potentiels, et de
réprimer son comportement »106. Ce sont des mesures d’assainissement107,
d’élimination, à la fois protectrices et sanctionnatrices108 qui « se rapprochent de
mesures de sûreté »109. En effet, comme le dit M. André JACQUEMONT, « il ne s’agit
plus cette fois-ci de faire payer les dirigeants, mais plutôt de les éliminer au moins
temporairement de la vie des affaires, en raison de leur inaptitude ou indélicatesse
révélée lors d’une procédure collective »110.

D’une manière générale, la faillite personnelle s’applique aux commerçants


personnes physiques, aux personnes physiques dirigeantes de droit ou de fait des
personnes morales assujetties aux procédures collectives, et aux personnes
physiques représentantes permanentes des personnes morales dirigeantes de droit

104Filiga Michel SAWADOGO, Note sous l’art. 203 de l’AUPC, OHADA, Traité et Actes uniformes
commentés et annotés, op. cit. p. 938.
105 Jean René GOMEZ, OHADA – Entreprise en difficulté, lecture de l’Acte uniforme de l’OHADA portant

organisation des procédures collectives d’apurement du passif à la lumière du droit français,op. cit., n°
238, p. 275.
106 Jean René GOMEZ, OHADA – Entreprise en difficulté, lecture de l’Acte uniforme de l’OHADA portant

organisation des procédures collectives d’apurement du passif à la lumière du droit français,op. cit., n°
224, p. 267.
107 Yves CHAPUT, Droit des entreprises en difficulté et faillite personnelle, P.U.F., Droit fondamental,

1996, n° 628. L’auteur évoque la « police de la direction des entreprises ».


108 Françoise PEROCHON et Régine BONHOMME-JUAN, Entreprises en difficulté, Instruments de crédit

et de paiement, op. cit., n° 439.


109 Pierre-Michelle LE CORRE et Emmanuelle LE CORRE-BROLY, Droit des entreprises en difficulté,op.

cit., n° 472, p. 487.


110 André JACQUEMONT, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 1045, p. 535.

90
ou de fait soumises aux procédures collectives. L’Acte uniforme fait la distinction
entre les cas de la faillite personnelle obligatoire (§ 1) et ceux de la faillite
facultative111 (§ 2).

§ 1 : La faillite personnelle obligatoire

Les articles 196 et 197 de l’AUPC énumèrent les cas de la faillite personnelle
obligatoire. Selon les dispositions de l’article 196, la faillite personnelle obligatoire
est prononcée à toute époque de la procédure contre les personnes qui ont :

- soustrait la comptabilité de leur entreprise, détourné ou dissimulé une


partie de son actif ou retenu frauduleusement des dettes qui n’existaient
pas ;

- exercé une activité commerciale dans leur intérêt personnel, soit par
personne interposée, soit sous couvert d’une personne morale masquant
leurs agissements ;

- usé du crédit ou des biens d’une personne morale comme des leurs
propres ;

- par leur dol, obtenu pour eux-mêmes ou pour leur entreprise, un


concordat annulé par la suite ;

- commis des actes de mauvaise foi ou des imprudences inexcusables ou


qui ont enfreint gravement les règles et usages du commerce.

La faillite personnelle peut être prononcée comme une sanction complémentaire à


celle de la banqueroute. L’article 196, in fine de l’AUPC dispose que les dirigeants
d’une personne morale condamnés pour banqueroute simple ou frauduleuse sont
également frappés de faillite personnelle.

L’article 197 de l’AUPC apporte des précisions en énumérant les actes présumés de
mauvaise foi, imprudences inexcusables ou infractions graves aux règles et usages
du commerce. Sont présumés actes de mauvaise foi, imprudences inexcusables ou
infractions graves aux règles et usages du commerce :

- l’exercice d’une activité commerciale ou d’une fonction de gérant,


administrateur, président, directeur général ou liquidateur, contrairement
à une interdiction prévue par les Actes uniformes ou par la loi de chaque
Etat partie ;

- l’absence d’une comptabilité conforme aux règles comptables et aux


usages reconnus de la profession, eu égard à l’importance de l’entreprise ;

111 Voir dans ce sens Filiga Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 359, p.
338. Voir aussi Jean René GOMEZ, OHADA – Entreprise en difficulté, lecture de l’Acte uniforme de
l’OHADA portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif à la lumière du droit
français,op. cit., n° 227, p. 269.

91
- les achats pour revendre au-dessous du cours dans l’intention de retarder
la constatation de la cessation des paiements ou l’emploi, dans la même
intention, de moyens ruineux pour se procurer des fonds ;

- la souscription, pour le compte d’autrui, sans contrepartie,


d’engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion, eu
égard à la situation du débiteur ou son entreprise ;

- la poursuite abusive d’une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire


l’entreprise qu’à la cessation des paiements.

§ 2 : La faillite personnelle facultative

Aux termes des dispositions de l’article 198 de l’AUPC, la juridiction compétente qui
ouvre la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens peut, en
toute liberté, à toute époque de la procédure, prononcer la faillite personnelle des
dirigeants qui :

- ont commis des fautes graves autres que celles visées à l’article 197 de
l’AUPC qui entraînent le prononcé de la faillite personnelle obligatoire, ou
ont fait preuve d’une incompétence manifeste ;

- n’ont pas déclaré, dans les trente (30) jours, la cessation des paiements
de la personne morale ;

- n’ont pas acquitté la partie du passif social mise à leur charge.

Le domaine d’application rationae personae de cet article 197 relatif à la faillite


personnelle facultative est bien défini : il s’agit uniquement des dirigeants de
personnes morales. En outre, les fautes conduisant au prononcé de la faillite
personnelle facultative sont moins graves que celles qui appellent la sanction de
faillite personnelle obligatoire.

Aux termes des articles 200 et 201 de l’AUPC, lorsqu’il a connaissance des faits
susceptibles de justifier la faillite personnelle, le syndic en informe immédiatement
le représentant du Ministère public et le juge-commissaire à qui il fait rapport dans
les trois (3) jours. Le juge-commissaire adresse ce rapport au Président de la
juridiction compétente. A défaut d’un tel rapport du syndic, le juge-commissaire
peut faire lui-même rapport au Président de la juridiction compétente. Dès qu’il est
saisi du rapport du syndic ou du juge-commissaire, la juridiction compétente siège
en audience non publique en présence du syndic dûment appelé par le greffier par
lettre recommandée ou tout moyen laissant trace écrite. Le débiteur ou les
dirigeants de la personne morale cités à comparaître à jour fixe, huit (8) jours au
moins à l’avance, par acte extrajudiciaire, à la diligence du greffier, doivent
comparaître en personne ou, en cas d’empêchement justifié, se faire représenter par
une personne habilitée à cet effet. Si le débiteur ou les dirigeants sociaux ne se
présentent pas ou ne sont pas représentés, la juridiction compétente les cite à
nouveau à comparaître, dans les mêmes formes et délais ; en cas d’itératif défaut, la
juridiction compétente statue contradictoirement à leur égard.

92
Deux types de recours peuvent être exercés contre les décisions prononçant la
faillite personnelle : l’opposition et l’appel. L’opposition, lorsqu’elle est recevable, est
formée contre les décisions rendues en matière de faillite personnelle, par
déclaration au greffe dans un délai de quinze (15) jours à compter de la signification
de la décision. Le débiteur ou les dirigeants des personnes morales ou leurs
représentants sont cités à comparaître (art. 220 de l’AUPC). Il est statué sur
l’opposition dans le mois. L’appel, lorsqu’il est recevable pour une décision rendue
en matière de faillite personnelle, est formé dans le délai de quinze (15) jours à
compter du prononcé de la décision. L’appel est jugé, sur pièces, par la juridiction
d’appel, dans le mois. La décision d’appel est exécutoire sur minute (art. 221 de
l’AUPC). En matière de faillite personnelle, l’appel peut être interjeté à la requête du
débiteur ou des dirigeants adressée au Président de la juridiction d’appel, ou à la
requête du représentant du Ministère public, dans le délai de quinze (15) jours à
compter de l’avis qui lui a été adressé dans les trois (3) jours par le greffier de la
juridiction ayant rendu la décision. En vertu de l’article 225 de l’AUPC, le greffier de
la juridiction d’appel adresse, dans tous les cas, expédition de la décision d’appel au
greffe de la juridiction compétente pour mention en marge de la décision et pour
accomplissement, le cas échéant, des mesures de publicité.

Selon l’article 202 de l’AUPC, les décisions prononçant la faillite personnelle sont
mentionnées :

- au casier judiciaire conformément aux dispositions du Code de procédure


pénale de chaque Etat partie ;

- au registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM). S’il s’agit des


dirigeants des personnes morales non commerçantes, ces décisions sont
mentionnées sur le RCCM ainsi qu’en marge de l’inscription relatant le
redressement judiciaire ou la liquidation des biens (art. 202, al. 2, de
l’AUPC) ;

- par extraits dans un journal habilité à recevoir des annonces légales dans
le ressort de la juridiction ayant statué et dans un journal officiel, à la
diligence du greffier.

Par ailleurs, la faillite personnelle peut être prononcée par la juridiction compétente
pour une durée qui ne peut être inférieure à trois (3) ans et supérieure à dix (10)
ans. Au terme fixé par le Tribunal, les déchéances, les incapacités et les
interdictions résultant de la faillite personnelle cessent de plein droit, sans qu’un
jugement soit nécessaire. La faillite personnelle prend fin à l’expiration de sa durée.
Elle peut, en outre, prendre fin par la réhabilitation du failli.

S’agissant de la réhabilitation des débiteurs personnes physiques, l’Acte uniforme


en prévoit trois cas différents. D’abord, la décision de clôture pour extinction du
passif entraîne la réhabilitation du débiteur si le passif est éteint dans les
conditions prévues à l’article 178 de l’AUPC, c’est-à-dire s’il n’existe plus de passif
exigible ou si le syndic dispose de deniers suffisants ou lorsque sont consignées les
sommes dues en capital, intérêts et frais. Ensuite, la réhabilitation de l’associé tenu
indéfiniment et solidairement responsable des dettes d’une personne morale peut

93
être de plein droit s’il justifie qu’il a acquitté toutes les dettes de la personne
morale, alors même qu’un concordat particulier lui aurait été consenti (art. 204, al.
2, de l’AUPC). Enfin, toute personne qui a obtenu des créanciers un concordat
particulier et qui a payé intégralement les dividendes promis, ou toute personne qui
justifie de la remise entière de sa dette par ses créanciers ou par leur consentement
unanime à sa réhabilitation, peut être facultativement réhabilitée si sa probité est
reconnue. Ces cas de réhabilitation ne sont pas automatiques, mais ils sont laissés
à l’appréciation de la juridiction compétente qui apprécie la probité du débiteur. En
vertu de l’article 205, al. 2, de l’AUPC, peuvent être aussi réhabilités les dirigeants
des personnes morales :

- contre qui a été prononcé le redressement judiciaire ou la liquidation des


biens et dont la procédure s’est achevée par une clôture pour extinction
du passif ;

- contre qui a été prononcée seulement une faillite personnelle si la


procédure de la personne morale à l’égard de qui a été prononcé le
redressement judiciaire ou la liquidation des biens s’est achevée par une
clôture pour extinction du passif.

Les articles 206 et 207 de l’AUPC apportent quelques précisions sur la


réhabilitation. La personne décédée en état de faillite personnelle peut être
réhabilitée après sa mort si, de son vivant, elle remplissait les conditions de la
réhabilitation de plein droit ou facultative112.

La procédure de réhabilitation est adressée au représentant du Ministère public


dans le ressort duquel la cessation des paiements a été constatée, avec quittance et
pièces à l’appui. Celui-ci communique toutes les pièces au Président de la
juridiction compétente qui a statué et au représentant du Ministère public du
domicile du requérant en les chargeant de recueillir tous les renseignements
possibles et utiles sur la véracité des faits exposés. Les mêmes pièces sont reçues
par le syndic qui est chargé de rédiger un rapport qu’il doit déposer dans le mois de
sa saisine113.

La demande de réhabilitation fait l’objet d’un avis donné par lettre recommandée
avec accusé de réception ou par tout moyen laissant trace écrite, adressé par les
soins du greffier aux créanciers admis ou reconnus, afin de leur permettre, s’ils
n’ont pas intégralement été payés, de faire oppositions114, le cas échéant, à la
demande de réhabilitation présentée par le débiteur. Après l’expiration du délai
d’un mois accordé au syndic pour déposer son rapport, et aux créanciers pour faire

112 Pour le Professeur SAWADOGO, « tout comme le décès n’est pas un obstacle à l’ouverture de la
procédure collective, il n’empêche pas la réhabilitation ; mais en raison du caractère personnel et quasi
pénal de la faillite personnelle, le décès est un obstacle à son prononcé ». Voir Filiga Michel
SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 366, p. 344.
113 Voir l’article 208 de l’AUPC.
114 L’opposition doit être faite dans un délai d’un mois à partir la date de réception de l’avis.

L’opposition à la réhabilitation peut être faite par simple déclaration au greffe appuyée des pièces
justificatives. Le créancier opposant peut également intervenir dans la procédure de réhabilitation par
requête présentée au Président de la juridiction compétente et signifiée au débiteur (voir l’art. 210 de
l’AUPC).

94
opposition à la réhabilitation du débiteur, le résultat des enquêtes et rapports
prescrits ainsi que les oppositions formées par les créanciers est communiqué au
représentant du Ministère public saisi de la demande qui les transmet à la
juridiction compétente avec ses réquisitions écrites. La juridiction compétente
appelle, s’il y a lieu, le débiteur et les opposants et les entend contradictoirement en
audience non publique. Cette procédure de réhabilitation est dispensée de timbre et
d’enregistrement. L’objectif poursuivi par le législateur est de ne plus mettre de
lourds frais supplémentaires à la charge du débiteur demandeur en réhabilitation
qui vient de sortir d’une situation difficile.

Plusieurs conséquences sont attachées à la décision du Tribunal (art. 213 de


l’AUPC) :

- si la demande en réhabilitation est rejetée, le failli personnel peut encore


la renouveler, mais pas avant l’expiration d’un délai d’une année ;

- si la demande est admise, la décision est transcrite sur le registre de la


juridiction de la juridiction compétente qui a statué et de celle du domicile
du demandeur ; elle est, en outre, adressée au représentant du Ministère
public qui a reçu la demande et, par les soins de ce dernier, au
représentant du Ministère public du lieu de naissance du débiteur qui en
fait mention au casier judiciaire, en regard de la déclaration du
redressement judiciaire ou de la liquidation des biens.

Section 2 : La banqueroute

L’évolution historique de la faillite115 a montré que tout au long de la procédure, le


débiteur était considéré comme un pestiféré : le failli était traité au Moyen-âge
comme un criminel. Pour l’empêcher de nuire ou de créer des risques pour les
autres entreprises par une sorte d’effet « domino », son comptoir ou son banc était
publiquement rompu (banco rotto, origine italienne du mot banqueroute). Il était
symboliquement exclu des foires et des marchés. En effet, jusqu’en 1807, le
débiteur défaillant pouvait encore risquer la prison. Pour Napoléon, « la faillite est
un naufrage, on arrête le capitaine s’il n’a pas coulé avec le navire »116.

De nos jours, le débiteur n’est plus, certes, considéré comme un pestiféré ou un


criminel en raison de l’intérêt accordé à la protection et au sauvetage de
l’entreprise, et aussi à cause de l’importance des activités et de leur influence sur
l’emploi, mais il peut toujours être condamné à des sanctions pénales très sévères
s’il se rend coupable de graves agissements ou comportements managériaux
préjudiciables.

La banqueroute est un délit consistant en des faits de gestion frauduleuse par un


commerçant, personne physique (c’est-à-dire un entrepreneur individuel ayant la

115 Le droit de la faillite est d’origine italienne. En effet, le droit de la faillite puise ses origines dans le
droit romain le plus ancien. Ce droit s’est progressivement construit jusqu’à l’émergence d’un véritable
droit des entreprises qui se caractérise aujourd’hui par la nécessité de sauver les entreprises qui
connaissent des difficultés sérieuses pour assurer le paiement de leurs dettes.
116 Yves CHAPUT, Le surendettement : traitement juridique et sauvegarde de l’entreprise, in

l’endettement – richesse de l’entreprise ?de Christian De BOISSIEU et Yves CHAPUT, op. cit., p. 90.

95
qualité de commerçant) et les associés des sociétés commerciales ayant la qualité de
commerçant ou qui sont tenus indéfiniment et solidairement des dettes sociales117,
et dont la poursuite nécessite, en principe, l’ouverture préalable d’une procédure
collective. Toutefois, dans la plupart des Etats parties, c’est le Tribunal
correctionnel qui est la juridiction répressive compétente en matière de
banqueroute et des infractions assimilées. Le prononcé du délit de banqueroute
contre toute personne physique commerçante nécessite préalablement la cessation
des paiements de celle-ci. Cependant, le Juge pénal peut condamner le dirigeant
d’une entreprise pour banqueroute simple ou frauduleuse malgré l’absence de
procédure collective ouverte par la juridiction compétente, et même si la cessation
des paiements n’a pas été constatée dans les conditions prévues pour l’ouverture de
ladite procédure (Voir l’article 236 de l’AUPC). Cet article 236 de l’AUPC consacre
ainsi « la faillite de fait »118.

En fonction du degré de la gravité des actes répréhensibles passibles de


banqueroute, le législateur OHADA distingue la banqueroute simple et la
banqueroute frauduleuse. Il a, en outre, abandonné la distinction entre la
banqueroute simple facultative et la banqueroute simple obligatoire. Dans un souci
de simplification, le législateur français du 25 janvier 1985 (la loi relative au
redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises) avait, par contre,
supprimé toute distinction entre banqueroute simple et banqueroute frauduleuse. A
ces deux catégories de banqueroute, sont annexées d’autres infractions.

§ 1 : La banqueroute simple

L’article 228 de l’AUPC énumère cinq cas de banqueroute simple. Le délit de


banqueroute est retenu même si le commerçant, personne physique en état de
cessation des paiements se retrouve dans l’un de ces cinq cas énumérés. Il y a donc
la banqueroute simple lorsque le commerçant, personne physique en état de
cessation des paiements :

- a contracté sans recevoir des valeurs en échange, des engagements jugés


trop importants eu égard à sa situation lorsqu’il les a contractés ;

- a dans l’intention de retarder la constatation de la cessation de ses


paiements, fait des achats en vue d’une revente au-dessous du cours ou
employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;

- ne fait pas au greffe de la juridiction compétente la déclaration de son


état de cessation des paiements dans un délai de trente jours, alors qu’il
ne peut faire valoir aucune excuse légitime ;

117 Le droit français a élargi le cercle des personnes passibles de banqueroute :


- le débiteur personne physique, quelle que soit l’activité de l’entreprise (commerciale,
artisanale, agricole ou indépendante (art. L. 653-1 1° du C. com.)) ;
- le ou les dirigeant(s) de droit ou de fait d’une personne morale (art. L. 654-1 2° du C. com.) ;
- les personnes physiques, représentants permanents d’une personne morale exerçant les
fonctions de dirigeant de droit ou de fait d’une personne morale (art. L. 654-1 3° du C. com.).
118Filiga Michel SAWADOGO, Note sous l’art. 236 de l’AUPC, OHADA, Traité et Actes uniformes

commentés et annotés, op. cit. p. 946. Pour l’auteur, cela paraît difficile à justifier, même en
considérant l’autonomie du droit pénal.

96
- a une comptabilité incomplète ou irrégulièrement tenue ou s’il n’a tenu
aucune comptabilité conforme aux règles comptables et aux usages
reconnus de la profession eu égard à l’importance de l’entreprise ;

- a été déclaré deux fois en état de cessation des paiements dans un délai
de cinq ans, si ces procédures ont été clôturées pour insuffisance
d’actif.

La crainte de se rendre coupable de banqueroute simple par l’un de ces cas


amènerait les commerçants, personnes physiques à assainir leur gestion. Cela
éviterait à l’entreprise plusieurs difficultés qui pourraient la conduire à cesser ses
paiements ou l’entraîner dans un état de défaillance totale. A un degré de gravité
des agissements managériaux frauduleux beaucoup plus évolué, le commerçant
personne, physique sera plutôt coupable de banqueroute frauduleuse.

§ 2 : La banqueroute frauduleuse

Aux termes des dispositions de l’article 229-1, est coupable de banqueroute


frauduleuse toute personne physique commerçante ou tout associé des sociétés
commerciales ayant la qualité de commerçant, en état de cessation des paiements,
qui :

- a soustrait sa comptabilité ;

- a détourné ou dissipé tout ou partie de son actif ;

- soit dans ses écritures, soit par des actes publics ou des engagements
sous seing privé, soit dans son bilan, s’est frauduleusement reconnue
débitrice de sommes qu’elle ne devait pas ;

- a exercé la profession commerciale contrairement à une interdiction


prévue par les Actes uniformes ou par la loi de chaque Etat partie ;

- après la cessation des paiements, a payé un créancier au préjudice de la


masse ;

- a stipulé avec un créancier des avantages particuliers à raison de son vote


dans les délibérations de la masse ou qui a fait avec un créancier un
traité particulier duquel il résulterait pour ce dernier un avantage à la
charge de l’actif du débiteur à partir du jour de la décision d’ouverture.

Ces différents cas de banqueroute frauduleuse sus-énumérés ne s’appliquent qu’à


l’occasion d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens.
L’article 229-2 énumère deux cas de banqueroute frauduleuse susceptibles d’être
retenus contre toute personne physique commerçante à l’occasion d’une procédure
de règlement préventif. Le texte de l’article 229-2, alinéa 1er, de l’AUPC fait mention
du « règlement judiciaire » au lieu du règlement préventif119. La preuve en est que

119Voir dans ce sens Filiga Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 373, p.
351. L’auteur parle à ce propos de « l’inattention ». Nous espérons que cette erreur ou inattention sera

97
l’article 229-2 2° renvoie à l’article 11 de l’AUPC qui interdit, sans autorisation
motivée du Président de la juridiction compétente, l’accomplissement de certains
actes au cours de la procédure de règlement préventif. De même, l’article 233 de
l’AUPC, qui est relatif aux infractions assimilées à la banqueroute frauduleuse et
qui reprend cet article 229-2, fait clairement mention de « règlement préventif ». Cet
article retient, en effet, qu’est également coupable de banqueroute frauduleuse,
toute personne physique commerçante qui, à l’occasion d’une procédure de
règlement préventif :

- a, de mauvaise foi, présenté ou fait présenter un compte de résultats ou


un bilan ou un état des créances et des dettes ou un état actif et passif
des privilèges et sûretés, inexact ou incomplet ;

- a, sans autorisation motivée du Président de la juridiction compétente,


payé, en tout ou en partie, les créances nées antérieurement à la décision
de suspension des poursuites individuelles et visées par celle-ci ou fait un
acte de disposition étranger à l’exploitation normale de l’entreprise ou
consenti une sûreté ou désintéressé les cautions qui ont acquitté des
créances nées antérieurement à la décision de suspension des poursuites
individuelles.

Le législateur assimile aux banqueroutes proprement dites certaines infractions


dont l’une des particularités est qu’elles concernent un cercle beaucoup plus large
des personnes qui peuvent en être rendues coupables.

§ 3 : Les infractions assimilées aux banqueroutes

Le domaine d’application rationae personae de ces infractions annexes aux


banqueroutes est plus étendu que celui des banqueroutes proprement dites. Selon
les dispositions de l’article 230 de l’AUPC, les infractions assimilées aux
banqueroutes proprement dites concernent, d’une part, les personnes physiques
dirigeantes de droit ou de fait des personnes morales assujetties aux procédures
collectives, ou toute personne ayant directement ou par personne interposée,
administré, géré ou liquidé la personne morale sous le couvert ou aux lieu et place
de ses représentants légaux et, d’autre part, les personnes physiques
représentantes permanentes des personnes morales dirigeantes, des personnes
morales assujetties aux procédures collectives. Certaines personnes visées par cet
article 230 de l’AUPC relatif au domaine d’application rationae personae des
infractions assimilées aux banqueroutes désignent aussi bien les commerçants que
les non-commerçants.

A- Les infractions assimilées à la banqueroute simple

Aux termes de l’article 231 de l’AUPC, les infractions assimilées à la banqueroute


simple frappent les dirigeants de fait ou de droit, personnes physiques dirigeantes
des personnes morales assujetties aux procédures collectives, et aux personnes

corrigée lors de la prochaine révision de l’Acte uniforme portant organisation des procédures
collectives d’apurement du passif dont le projet est déjà en cours.

98
physiques représentantes permanentes des personnes morales dirigeantes, des
personnes morales soumises aux procédures collectives qui ont, en cette qualité, et
de mauvaise foi :

- consommé des sommes appartenant à la personne morale en faisant des


opérations de pur hasard ou des opérations fictives ;
- fait des achats en vue d’une revente au-dessous du cours ou employé des
moyens ruineux pour se procurer des fonds, et tout ceci, dans l’intention
de retarder la constatation de la cessation des paiements de la personne
morale ;
- payé ou fait payer un créancier au préjudice de la masse après la
cessation des paiements de la personne morale ;
- fait contracter par la personne morale, pour le compte d’autrui, sans
qu’elle reçoive de valeurs en échange, des engagements jugés trop
importants eu égard à sa situation lorsque ceux-ci ont été contractés ;
- tenu ou fait tenir ou laissé tenir irrégulièrement ou incomplètement la
comptabilité de la personne morale, et ceci sans conformité aux règles
comptables et aux usages reconnus de la profession eu égard à
l’importance de l’entreprise ;
- omis de faire au greffe de la juridiction compétente, dans le délai de trente
jours, la déclaration de l’état de cessation des paiements de la personne
morale ;
- en vue de soustraire tout ou partie de leur patrimoine aux poursuites de
la personne morale en état de cessation des paiements ou à celles des
associés ou des créanciers de la personne morale, détourné ou dissimulé,
tenté de détourner ou de dissimuler une partie de leurs biens ou qui se
sont frauduleusement reconnus débiteurs de sommes qu’ils ne devaient
pas.

Sont également punis de peines de banqueroute simple, les représentants légaux ou


de fait des personnes morales comportant des associés indéfiniment et
solidairement responsables des dettes de celles-ci si, sans excuse légitime, ils ne
font pas au greffe de la juridiction compétente, dans le délai de trente (30) jours, la
déclaration de leur état de cessation des paiements ou si cette déclaration ne
comporte pas la liste des associés solidaires avec l’indication de leurs noms et
domiciles.

Le législateur OHADA vise, à travers ces incriminations, des fautes graves de


gestion qui ne pourraient que conduire l’entreprise en état de défaillance ou
l’entraîner dans un état de cessation des paiements. C’est en cela justement que
toutes ces incriminations peuvent être utiles pour l’assainissement de la gestion de
l’entreprise.

99
B- Les infractions assimilées à la banqueroute frauduleuse

Les infractions assimilées à la banqueroute frauduleuse concernent les dirigeants


de droit ou de fait, tel que définis par l’article 230120 de l’AUPC, qui ont
frauduleusement :

- soustrait les livres de la personne morale ;


- détourné ou dissimulé une partie de son actif ;
- reconnu la personne morale débitrice de sommes qu’elle ne devait pas,
soit dans les écritures, soit par des actes publics ou des engagements
sous signature privée, soit dans le bilan ;
- exercé la profession de dirigeant contrairement à une interdiction prévue
par les Actes uniformes ou par la loi de chaque Etat partie ;
- stipulé avec un créancier, au nom de la personne morale, des avantages
particuliers à raison de son vote dans les délibérations de la masse ou qui
ont fait avec un créancier un traité particulier duquel il résulterait pour
ce dernier un avantage à la charge de l’actif de la personne morale, à
partir du jour de la décision déclarant la cessation des paiements.

Les infractions assimilées à la banqueroute frauduleuse concernent également les


dirigeants visés à l’article 230 de l’AUPC qui, à l’occasion d’une procédure de
règlement préventif, ont :

- de mauvaise foi, présenté ou fait présenter un compte de résultats ou un


bilan ou un état des créances et des dettes ou un état et passif des
privilèges et sûretés, inexact ou incomplet ;
- sans autorisation du Président de la juridiction compétente, payé, en tout
ou en partie, les créances nées antérieurement à la décision de
suspension des poursuites individuelles et visées par celle-ci ou fait un
acte de disposition étranger à l’exploitation normale de l’entreprise ou
consenti une sûreté ou désintéressé les cautions qui ont acquitté des
créances nées antérieurement à la décision de suspension des poursuites
individuelles.

Pour la poursuite des infractions de la banqueroute et des infractions assimilées,


l’article 234 de l’AUPC dispose que la juridiction répressive est saisie, soit sur la
poursuite du représentant du Ministère public, soit sur la constitution de partie
civile, soit par voie de citation directe du syndic ou de tout créancier agissant en
son nom propre ou au nom de la masse. Toutefois, le syndic ne peut agir au nom de
la masse qu’après y avoir été autorisé par le juge-commissaire et après avoir
entendu les contrôleurs, s’il en a été nommé. Tout créancier peut intervenir à titre
individuel dans une poursuite en banqueroute si celle-ci est intentée au nom de la
masse.

120 L’article 230 vise, d’une part, les personnes physiques dirigeantes de droit ou de fait de personnes
morales assujetties aux procédures collectives et, d’autre part, les personnes physiques représentantes
permanentes de personnes morales dirigeantes, des personnes morales assujetties aux procédures
collectives.

100
Si le syndic exerce l’action en banqueroute c’est au nom de la masse des créanciers
(constituée dès la décision d’ouverture) qu’il représente. Est-il encore nécessaire
qu’un créancier intervienne à titre individuel dans une poursuite en banqueroute
intentée par le syndic au nom de ces créanciers ? Pour le Professeur SAWADOGO,
« il n’y a pas de difficulté, comme le prévoit l’Acte uniforme, à ce qu’un créancier
puisse intervenir à titre individuel dans une poursuite en banqueroute intentée par le
syndic au nom de la masse »121. Seulement, il nous semble que l’intervention du
créancier dans la poursuite en banqueroute est sans intérêt réel. L’article 239 in
limine de l’AUPC semble d’ailleurs décourager la poursuite intentée par un créancier
en mettant à sa charge les frais s’il y a relaxe. En réalité, qui autre que le syndic, le
« chef d’orchestre »122 de la procédure, pourra mieux apprécier les faits constitutifs
du délit de banqueroute ?

Pour permettre au représentant du Ministère public d’exercer son action, le


législateur OHADA, à travers l’article 235 de l’AUPC, impose au syndic de lui
remettre les pièces, titres, papiers et renseignements qui lui sont demandés.
Pendant le cours de l’instance, ces documents peuvent être communiqués par le
greffier au syndic sur simple réquisition de sa part, pour y prendre des extraits
privés ou en requérir d’authentiques. Après la décision de la juridiction répressive
compétente, ces documents sont restitués au syndic qui en donne décharge sauf si
leur dépôt judiciaire a été ordonné (art. 235, les alinéas 2, 3 et 4, de l’AUPC).

Même si la cessation des paiements n’a pas été constatée dans les conditions
prévues pour l’ouverture des procédures collectives, une condamnation pour
banqueroute simple ou frauduleuse ou pour délit assimilé à la banqueroute simple
ou frauduleuse peut être prononcée (article 236 de l’AUPC). Il s’agit là d’une
consécration de la « faillite de fait » qui a disparu dans le droit français des
entreprises en difficulté qui tend à la dépénalisation des procédures.

Le souhait du législateur communautaire est d’alléger, tant que faire se peut, les
charges ou les créances contre la masse. Il est implicitement guidé par la volonté de
dégager suffisamment de fonds pour le sauvetage de l’entreprise123. L’article 237,
alinéa 1er, de l’AUPC dispose que les frais de poursuite intentée par le représentant
du Ministère public ne peuvent être mis à la charge de la masse. S’il y a
condamnation, le Trésor public ne peut exercer son recours en recouvrement des
frais contre le débiteur qu’après l’exécution du concordat en cas de redressement
judiciaire ou après la clôture de l’union en cas de liquidation des biens.

Si la poursuite est intentée par le syndic au nom de la masse, les frais sont
supportés par la masse, s’il y a relaxe. S’il y a condamnation, les frais sont
supportés par le Trésor public, mais celui-ci peut exercer le recours contre le
débiteur après l’exécution du concordat en cas de redressement judiciaire ou après
la clôture de l’union en cas de liquidation des biens (l’article 238 de l’AUPC).

121Filiga Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 377, p. 354.
122 DERRIDA, GODE et SORTAIS, Droit de redressement et de la liquidation judiciaire des entreprises,
Rec. Dalloz-Sirey, 2e éd., 1986, p. 28, cité par Filiga Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en
difficulté,op. cit., n° 147, p. 142.
123 Voir dans ce sens Filiga Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté,idem, n° 378, p. 354.

101
Les frais de poursuite intentée par un créancier sont supportés par lui s’il y a relaxe
et, s’il y a condamnation, ils sont supportés par le Trésor public sauf recours de
celui-ci contre le débiteur après l’exécution du concordat en cas de redressement
judiciaire ou après la clôture de l’union en cas de liquidation des biens (l’article 239
de l’AUPC).

§ 4 : Les autres infractions

Le législateur a encore prévu d’autres infractions dont peuvent se rendre coupables


des personnes autres que le débiteur ou les dirigeants qui, par leurs agissements
entravent la bonne réussite des procédures collectives. L’Acte uniforme vise quatre
(4) catégories de personnes.

A- Les infractions commises par des personnes indéterminées par l’Acte


uniforme

Aux termes de l’article 240-1° de l’AUPC, les personnes convaincues d’avoir, dans
l’intérêt du débiteur, soustrait, recelé ou dissimulé tout ou partie de ses biens
meubles ou immeubles, le tout sans préjudice des dispositions pénales relatives à
la complicité, sont punies des peines de la banqueroute frauduleuse.

Sont aussi punies des peines de la banqueroute frauduleuse, les personnes


convaincues d’avoir frauduleusement produit dans la procédure collective, soit en
leur nom, soit par interposition ou supposition de la personne, des créances
supposées (l’article 240 – 2° de l’AUPC).

L’article 240-3° punit également des peines de la banqueroute frauduleuse les


personnes qui, faisant le commerce sous le nom d’autrui ou sous un nom supposé,
ont, de mauvaise foi, détourné ou dissimulé, tenté de détourner ou de dissimuler
une partie de leurs biens.

Le but visé par le législateur est la protection de l’actif du débiteur soumis à une
procédure collective par la punition des personnes qui ont détourné ou tenté de
détourner directement ou indirectement ou frauduleusement les biens cet actif qui
est le gage commun de tous les créanciers. Le texte vise, en général, les personnes
qui organisent l’insolvabilité de l’entreprise en difficulté en l’appauvrissant ou en
tentant de l’appauvrir.

B- Les infractions intéressant le conjoint et certains proches parents du


débiteur

Le conjoint, les descendants, les ascendants ou les collatéraux du débiteur ou ses


alliés qui, à l’insu du débiteur, auraient détourné, diverti ou recelé des effets
dépendant de l’actif du débiteur en état de cessation des paiements encourent les
peines prévues par le droit pénal en vigueur dans chaque Etat partie pour les
infractions commises au préjudice d’un incapable124.

124L’article 205 de la loi française de 1985 punit des peines de l’abus de confiance (art. 314-1 du C.
pén.) les personnes se rendant coupables de tels agissements frauduleux.

102
Pour ces différentes infractions prévues aux articles 240 et 241 de l’AUPC, même
s’il y a relaxe à cause, par exemple, de la non réunion des éléments constitutifs de
l’infraction, le juge doit statuer non seulement sur les dommages-intérêts qui
seraient demandés, mais aussi sur la réintégration, dans le patrimoine du débiteur,
des biens, droits ou actions soustraits (art. 243 de l’AUPC). Il transparaît à travers
cet article que l’objectif du législateur n’est pas simplement de punir, mais
également de reconstituer le patrimoine de l’entreprise en difficulté afin d’assurer
efficacement son redressement.

C- Les infractions concernant le syndic

L’article 243 punit des peines prévues par le droit pénal en vigueur dans chaque
Etat partie pour les infractions commises par une personne faisant appel au public
au préjudice d’un loueur, dépositaire, mandataire, constituant de nantissement,
prêteur à usage ou maître d’ouvrage, tout syndic d’une procédure collective qui :

- exerce une activité personnelle sous le couvert de l’entreprise du débiteur


masquant ses agissements ;

- dispose du crédit ou des biens du débiteur comme des siens propres ;

- dissipe les biens du débiteur ;

- poursuit abusivement et de mauvaise foi, dans son intérêt personnel, soit


directement, soit indirectement, une exploitation déficitaire de l’entreprise
du débiteur ;

- se rend acquéreur pour son compte, directement ou indirectement, des


biens du débiteur, en violation de l’interdiction que lui fait l’article 51 de
l’AUPC125.

La doctrine a favorablement accueilli les incriminations du syndic 126. En tant que


« chef d’orchestre » de la procédure, le syndic qui se rend coupable de telles
malversations127 et acquisitions frauduleuses, compromettrait par ses agissements
le redressement de l’entreprise et le paiement des créanciers, qui sont les
principaux objectifs poursuivis par le législateur.

De même, quelques juridictions arrivent audacieusement à sanctionner les


malversations ou agissements frauduleux commis par certains syndics. C’est le cas,
par exemple, de la Cour d’appel de Ouagadougou qui avait dénoncé l’attitude
insouciante d’un syndic (ou administrateur) le 1er avril 1994. Il s’agissait, en
l’espèce, de la contestation de la décision prononçant, sur demande du débiteur, la

125 L’article 51 de l’AUPC interdit au syndic et à tous ceux qui ont participé à l’administration de toute
procédure collective, d’acquérir personnellement, soit directement, soit indirectement, à l’amiable ou
par vente de justice, tout ou partie de l’actif mobilier ou immobilier du débiteur en état de règlement
préventif, redressement judiciaire ou liquidation des biens.
126 Voir Filiga Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en difficulté, op. cit, n° 380, p. 356. En outre,

le Professeur Yves GUYON estime utile de rappeler que « la procédure est organisée dans l’intérêt de
l’entreprise et des créanciers et non dans celui des auxiliaires de justice ». Voir Yves GUYON, Droit des
affaires, t. 2 : Droit des entreprises en difficultés,op. cit., n° 1419.
127 Le Code des obligations civiles et commerciales du Sénégal, à la suite du Code de commerce

français, qualifiait ces incriminations de malversation.

103
révocation d’un syndic ou administrateur nommé à la suite de l’ouverture d’une
procédure pour ses attitudes contraires au sauvetage de l’entreprise. La Cour
d’appel avait rejeté cette action en contestation de l’administrateur tout en
admettant au contraire la révocation de celui-ci. Elle avait relevé que « il est
constant que certains actes de l’administrateur au concordat causent un préjudice
au débiteur concordataire et aux créanciers qu’il est censé représenter ; qu’en effet,
alors que les honoraires de l’administrateur au concordat devraient être payés sur
six (6) ans, celui-ci a préféré se payer en une seule fois ; qu’après avoir vendu le
stock de produits de la pharmacie, il a préféré se payer lui-même au lieu de payer
les salariés et les fournisseurs ; que ces faits compromettent l’exécution du
concordat ; que d’ailleurs la gestion de l’administrateur n’a eu d’autre effet que la
fermeture de la pharmacie »128.

D- Les infractions imputables aux créanciers

L’Acte uniforme punit des peines prévues par le droit pénal en vigueur dans chaque
Etat partie pour les infractions commises au préjudice d’un incapable, le créancier
qui a stipulé avec le débiteur ou avec toutes les personnes, des avantages
particuliers à raison de son vote dans les délibérations de la masse, ou qui fait un
traité particulier duquel il résulterait en sa faveur un avantage à la charge de l’actif
du débiteur à partir du jour de la décision d’ouverture de la procédure collective.
Cette incrimination est destinée à punir le créancier qui porterait atteinte au
principe de l’égalité des créanciers.

Mme Corinne SAINT-ALARY-HOUIN, a bien relevé la nécessité des sanctions dans


les procédures collectives en écrivant qu’elles garantissent « une certaine morale des
affaires (et) il ne faut pas que le débiteur malhonnête puisse échapper aux rigueurs
du droit sous prétexte que l’objectif premier est de redresser l’unité économique »129.

128 Ouagadougou, Civ. Com., n° 33, 1er avril 1994, décision inédite, inFiliga Michel SAWADOGO,
L’accès à la justice en Afrique francophone, op. cit., p. 200.
129 Corinne SAINT-ALARY-HOUIN, Droit des entreprises en difficulté,op. cit., n° 1250, p. 793.

104
Annexe
Les travaux dirigés présentés ci-après ont été rédigés à l’aide du cours, mais
également des références bibliographiques citées.

Les fiches de travaux dirigés se composent de sujets que nous allons ensemble
corriger dans la semaine prévue pour les travaux dirigés. Il s’agit de dissertations,
de cas pratiques et de commentaires de décisions de justice et d’articles qui sont les
exercices les plus communément réalisés en travaux dirigés et donnés aux examens
à partir de la première année en droit civil. Y sont reproduites des décisions, parfois
anciennes et donc plus difficilement accessibles, qui ont marqué la matière et qu’il
faut connaître.

L’assistance aux séances de travaux dirigés est obligatoire. Il est vrai qu’en
assistant aux cours, l’étudiant verra la matière s’animer et qu’il pourra comprendre
certaines notions élémentaires grâce aux exemples qui y seront développés, mais ce
n’est qu’en participant aux TD que l’étudiant maîtrisera la technique du
commentaire d’arrêt, de cas pratique et de dissertation, et approfondira les thèmes
abordés dans l’amphithéâtre.

1
Travaux dirigés : Entreprises en difficulté
Cours : …
TD : ….

SEANCE n° 1

Thème : Les personnes assujetties aux procédures collectives.

METHODOLOGIE ET EXERCICE D’APPLICATION

- COMMENTAIRE DE DECISION DE JUSTICE ;


- COMMENTAIRE D’ARTICLE ;
- DISSERTATION ;
- METHODOLOGIE DE CAS PRATIQUE.
A lire (et à relire) très attentivement et très souvent

A. Comment préparer la séance de TD ?

Le TD constitue une application et un approfondissement de la matière présentée


en cours.

Le TD n’est pas une redite du cours ou un tout nouveau cours. Le TD n’est pas une
séance au cours de laquelle le ou la chargé(e) de TD doit faire le résumé ou l’exposé
du cours. Le cours doit donc être étudié, su et approfondi par l’Etudiant avant
chaque séance. Vous devez assister au TD en apportant les textes de l’Acte
uniforme portant procédures collectives d’apurement du passif qui sont utiles
pour la séance.

Les outils de la préparation du TD

Il est indispensable d’avoir consulté ou de consulter l’un des manuels cités en


bibliographie. Des documents fondamentaux sont, en outre, accessibles
gratuitement en ligne : les différents Actes uniformes de l’OHADA, les décisions et
des ouvrages traitant des thèmes spécifiques sont accessibles en version intégrale
et gratuitement sur les sites www.ohada.comet le site www.legifrance.gouv.fr, qui
fournissent beaucoup d’informations. Hormis les manuels en droit des entreprises
en difficulté ou des procédures collectives que vous avez dans la bibliothèque, vous
disposez également de la documentation nécessaire en ligne et gratuitement pour
travailler correctement.

Les règles d’or de l’apprentissage

Apprendre n’est pas survoler une fois ses notes de cours. Il faut reprendre ses notes
en établissant un plan très détaillé de la partie du cours étudié, à l’aide du plan de
cours et d’un manuel. Il faut être capable de retenir ce plan détaillé en comprenant
comment les parties s’enchaînent : la compréhension de la logique des
développements permet de retenir le détail des règles et non l’inverse. Apprendre

2
par cœur au kilomètre sans comprendre l’ordonnancement général de ce que l’on
récite ne sert à rien. Toutefois, il faut vous résoudre à apprendre certaines règles
par cœur (par exemple certains textes courts du Code de commerce fondamentaux
comme celui relatif à la capacité ou celui portant sur la compétence d’attribution
des tribunaux de commerce), et à bien connaître avec précision les définitions qui
sont données en cours et donc à consulter les références de textes (notamment le
Code de commerce), de jurisprudence et doctrine indiquées en cours.

Comment apprendre le cours ?

Dans un premier temps, on doit reprendre les notes prises en cours avec un
dictionnaire de vocabulaire juridique grâce auquel on peut établir un glossaire de la
matière étudiée : aucun mot technique expliqué en cours et utilisé en TD ne doit
rester flou dans votre tête. Apprendre le cours, c’est, d’une part, comprendre les
enchaînements du raisonnement qui ont été exposés en cours et, d’autre part,
connaître le détail des règles analysées.

Dans un second temps, il faut se reporter au moins à l’un des manuels cités dans
la bibliographie ou au Répertoire commercial Dalloz. Il est indispensable de
maîtriser la recherche par ces bases de données et la plupart des références
données en cours et dans les séances de TD sont référencées sur le site dalloz. Pour
réussir en TD et à l’examen, ce travail de préparation est obligatoire : le cours
donne les grandes lignes et indique les pistes à suivre pour l’approfondissement.

Comment traiter les thèmes de la séance de TD ?

Une fois le travail préparatoire décrit ci-dessus accompli, on peut passer à la


préparation de la séance de TD. Chaque séance ne reprend pour approfondir que
certains aspects d’une question plus vaste étudiée en cours. Par exemple sur la
séance portant sur la notion de cessation des paiements, seuls certains points
spécifiques relatifs à ladite notion seront étudiés. Il sera donc nécessaire pour
l’Etudiant sur un point particulier de creuser la question, à l’aide du cours, d’un
manuel et des répertoires et périodiques.

Chaque fiche de TD vous soumet des exercices qui sont tous obligatoires. Pour
chaque exercice à préparer, certains documents complémentaires seront reproduits
ainsi que des « conseils de lecture ».

B. Le commentaire de décision de justice

Le commentaire d’une décision de justice est un exercice qui invite à une


explication, à une analyse et à une critique d’une décision de justice au regard du
droit positif, de la jurisprudence et des débats de la doctrine. Il se présente suivant
le schéma suivant :

1- une introduction qui doit comprendre les points suivants :


- une amorce ou une phrase d’accroche ou une phrase d’attaque. Ici, il n’y a
pas une formule miracle à donner. La phrase d’accroche peut être le point de
vu d’un auteur sur la question. Tout dépend simplement de l’inspiration de

3
l’Etudiant. Si vous n’êtes pas trop inspiré le jour de l’épreuve, définissez
simplement le thème sur lequel porte la décision à commenter. Mais
attention aux formules vaseuses et surtout fantaisistes car les juristes n’ont
souvent pas la réputation de les apprécier ;
- une phrase de présentation de la décision : il s’agit ici de situer la décision à
commenter en donnant le thème sur lequel porte la décision, l’auteur de la
décision, la date à laquelle la décision a été rendue ;
- un exposé des faits : un résumé logique et chronologique des faits qui se
dégagent de la décision. L’exposé des faits doit faire voir le litige ;
- une présentation de la procédure, c’est-à-dire un exposé chronologique des
juridictions qui ont eu à trancher le litige ;
- une présentation des prétentions et argumentations des parties. Il faut
toujours commencer par les prétentions de la partie qui a saisi pour la
première fois le juge ;
- une présentation de la solution des juridictions antérieures ;
- un énoncé du problème juridique. Il faut souligner ici que transformer la
solution de la décision en question de droit ou dégager la solution et
imaginer la question à laquelle le juge a répondu est une mauvaise méthode
car les juges ne répondent pas toujours à toutes les prétentions. En le
faisant, ce serait comme si vous avez fermé la vanne et vous posez la
question en considérant uniquement les prétentions d’une seule partie. La
réponse à ces genres de problèmes juridiques est soit « oui catégorique » ou
« non catégorique », ce qui n’est pas bien. On doit pouvoir répondre à un bon
problème juridique par « oui mais » ou par « non mais ». Pour trouver une
bonne question de droit, il faut soit résumer et transformer les faits sous
forme interrogative, soit il faut confronter les prétentions et argumentations
des parties ou les thèses en présence.
2- Un développement : Commenter c’est expliquer, analyser et critiquer la
solution de la décision à commenter.

C. Le commentaire d’article (voir la fiche de méthodologie).

D. La dissertation juridique (voir la fiche de méthodologie).

E. L’exercice du cas pratique

Dans le cas pratique, on vous soumet des faits qui soulèvent des questions
juridiques. Vous devez dégager de ces faits les questions de droit posées et
répondre par une analyse juridique motivée qui fait appel aux connaissances
que vous aurez révisées dans le cours et approfondies en suivant la méthode
rappelée ci-dessus. Le cas pratique est donc un exercice fondamental
d’argumentation juridique.

Quel est le but du cas pratique ?

Le but du cas pratique est double. D’abord, et avant tout, il permet de mettre en
application des connaissances. Donc, sans connaissances, pas de possibilité de
répondre aux questions posées car il ne s’agit pas de formuler des réponses qui
s’apparentent à des discussions de comptoir de café, du pseudo bon sens ou,
encore, qui vous paraissent « justes ». Il s’agit de raisonner en droit, selon les règles
applicables.

4
Ensuite, le cas pratique doit permettre d’exercer vos qualités de rédaction qui sont
essentielles pour tout juriste, quels que soient les modalités et le domaine d’exercice
de son activité. La forme est donc primordiale également.

Comment s’y prendre pour le résoudre ?

Le travail préparatoire : Il consiste à lire l’énoncé plusieurs fois en entier. Il faut


ensuite sélectionner les faits significatifs (l’énoncé du cas raconte une histoire dont
tous les éléments ne sont pas juridiquement pertinents et utiles) et qualifier
juridiquement les personnes, les situations et les prétentions. Attention toutefois de
ne pas empiéter sur le raisonnement à proprement parler (par exemple désigner
l’une des personnes par « le commerçant » si, précisément, la question posée porte
sur cette qualification).
Sur le fond : Bien souvent, les questions sont posées de manière précise et
orientée. Par exemple est-ce que Mme Sagal peut saisir le tribunal de commerce ?

Pour répondre à chaque question, il faut que l’on retrouve la structure suivante qui
met en évidence un va et vient entre la règle applicable et l’application aux faits de
l’espèce :
- quelle est la question de droit posée. Par exemple (en reprenant la question
de Mme Sagal) comment est déterminée la compétence d’attribution du
Tribunal de commerce ?
- quelles sont les règles applicables ? Vous devez exposer dans l’ordre, en
suivant la hiérarchie des normes : la loi (Code commerce notamment, en
citant correctement et précisément les dispositions concernées), les usages,
la jurisprudence (en citant précisément des arrêts en donnant au moins
l’année de la décision) et éventuellement la doctrine qui permet d’éclairer les
sources.
- comment ces règles s’appliquent-elles à l’espèce ? Il ne s’agit pas de recopier
alors l’énoncé mais de vérifier si les conditions d’application des règles citées
sont réunies. Chaque affirmation doit être motivée au regard de la règle
dégagée.

Il arrive que la réponse ne puisse pas être ferme et tranchée en raison des
hésitations sur l’interprétation jurisprudentielle de telle ou telle règle. Dans ce cas,
c’est évidemment la partie « application à l’espèce » et la discussion qui seront
importantes. Dans l’exercice universitaire du cas pratique, le sens de la réponse est
parfois indifférent ; il est évident que dans la « vie réelle », les questions sont
souvent orientées dans un sens ou dans un autre dans l’intérêt de la personne
représentée : il sera alors nécessaire de trouver tous les arguments dans un sens
déterminé. Dans le cadre du TD, ce qui est primordial est d’avoir compris et exposé
tous les sens possibles de la réponse si des hésitations sont soulevées.

Sur la forme : Il n’y a pas de forme imposée en plan avec partie et sous-parties
comme dans une dissertation ou un commentaire. Il vaut mieux traiter les
questions dans l’ordre (qui obéit à une logique) en reprenant leur numérotation. La
structure évoquée ci-dessus ne doit pas apparaître formellement (« règles
applicables », « application ») mais se dégager de la fluidité de la rédaction. Il est
donc nécessaire de faire des paragraphes clairs pour montrer les étapes du

5
raisonnement, en se pensant votre lecteur est un non juriste. Tout doit être écrit
mais seulement ce qui est nécessaire. En d’autres termes, il ne s’agit pas de faire
une dissertation en plaquant toutes vos connaissances sur la question (il faut
sélectionner les connaissances utiles pour le cas). L’exposé des règles est tout aussi
important que son application à l’espèce qui ne doit pas être un recopiage de
l’énoncé mais une démonstration.

L’introduction consiste en un rappel synthétique et concis des faits, qualifiés


juridiquement (là non plus, il ne s’agit pas de recopier l’énoncé). La conclusion
consiste à résumer la réponse à la question (avec éventuellement indication
d’alternatives si l’application des règles à l’espèce pose des difficultés).

Tout texte de loi (notamment les articles de l’Acte uniforme portant organisation des
procédures collectives d’apurement du passif) doit être cité avec précision (et
éventuellement tout arrêt également). Quand on cite un arrêt au soutien de son
raisonnement, il faut connaître le sens et la portée de l’arrêt (il faut donner les faits,
le point de droit et la solution) car cela ne sert à rien de retenir des dates par cœur
(jour, mois, année) pour citer des arrêts au kilomètre. Mieux vaut n’en citer qu’un
mais l’exploiter sur le fond, que d’en citer 20 dont on ne connaît que les dates.

Nota Bene : Le style est pris en compte (ainsi que la syntaxe et l’orthographe de
base). C’est en relisant le cours, en lisant des manuels, des commentaires, etc. que
l’on s’imprègne du style et de la terminologie juridiques. Il ne sera pas admis que des
mots techniques soient mal orthographiés (par exemple commerçant, fonds de
commerce, achalandage, clause compromissoire, artisan ou au féminin, artisane). Il
faut travailler avec un dictionnaire ordinaire, un art de conjuguer et un lexique ou
vocabulaire juridique. Aucun travail écrit rendu (et cela vaut pour l’examen) ne doit
comporter d’abréviations. Tout doit être rédigé, ce qui interdit des présentations sous
forme de tirets ou autres signes car les exercices traités en droit ne doivent pas être
présentés sous forme de plan de cours ou des notes à votre usage.

6
APPLICATION

Thème : Les personnes assujetties aux procédures collectives

Objet de l’exercice : Commentaire de l’arrêt de la chambre commerciale de la Cour


de cassation rendu en audience publique le mercredi 26 mai 2010, N° de pourvoi :
09-10178.

Note introductive

Le droit des procédures collectives s’est construit par opposition à la déconfiture


civile. Lorsqu’un commerçant ne paie pas ses dettes, il est mis en place une
procédure judiciaire de règlement collectif et égalitaire des créanciers. Au contraire,
en droit civil, si un particulier ne paie pas son créancier, celui-ci peut exercer des
poursuites en paiement, voire des procédures civiles d’exécution, mais « le paiement
demeure le prix de la course ».

Les procédures collectives sont ouvertes à deux grandes familles de débiteurs. C’est
l’article 2-1, l’alinéa 2, de l’AUPC qui énumère les personnes relevant du règlement
préventif. Cet article dispose que : « Le règlement préventif est applicable à toute
personne physique ou morale commerçante ou à toute personne morale de droit privé
non commerçante, à toute entreprise publique ayant la forme d’une personne morale
de droit privé qui, quelle que soit la nature de ses dettes, connaît une situation
économique et financière difficile mais non irrémédiablement compromise ». En
outre,les personnes assujetties à la procédure de règlement préventif ne doivent pas
être en cessation de paiement. L’article 261, al. 2, de l’AUPC dispose bien qu’il s’agit
de toute personne qui « connaît une situation économique et financière difficile mais
non irrémédiablement compromise ».

Travail à faire : Commentez l’arrêt suivant.

Chambre commerciale
Audience publique du mercredi 26 mai 2010
N° de pourvoi: 09-10178

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


(…) ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, que Mme X... a présenté une demande d'élaboration
d'un plan conventionnel de redressement, laquelle a été déclarée irrecevable par
une commission d'examen des situations de surendettement des particuliers, le 25
octobre 2007 ; que Mme X... a exercé un recours contre cette décision et sollicité
son admission à la procédure de rétablissement personnel ;

Attendu que pour confirmer la décision, le jugement retient que Mme X..., gérante
de la société Eglantine conseil, a été placée en liquidation judiciaire, par un
jugement du 24 septembre 2007, et est donc inéligible à la procédure de
surendettement civil ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le jugement du 24 septembre 2007


prononce la liquidation judiciaire de la société Eglantine conseils et non celle de

7
Mme X..., sa gérante, le juge de l'exécution a dénaturé les termes clairs et précis de
cette décision et violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 6 novembre


2008, entre les parties, par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de
Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se
trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le juge de
l'exécution du tribunal de grande instance de Nanterre ;

Condamne les défendeurs aux dépens ;

8
Travaux dirigés : Entreprises en difficulté
Cours : …
TD : …

SEANCE n° 2

Thème : Le traitement conventionnel

Objet des exercices : Résoudre les cas pratiques.

- Apprécier la portée de la jurisprudence antérieure à l’entrée


en vigueur de la procédure de conciliation.

Cas pratique 1 :

Depuis 2 ans, M. X achète, auprès de particuliers, des vieux meubles, livres ou


bibelots qu’il entrepose dans une ancienne usine et revend au moyen d’un site
internet dans toute l’Europe. Cependant, il n’a effectué aucune démarche lors de la
création de son activité. Depuis quelques mois, les acheteurs se font rares et il ne
pourra plus payer la location de l’entrepôt ainsi que les frais liés à son site. Peut-il
bénéficier de la procédure de conciliation ?

Cas pratique 2 :

En raison de la perte d’un client important, la SARL Faladèma rencontre des


difficultés financières. Son gérant souhaite demander le bénéfice d’une procédure
de conciliation et vous demande conseil.

1) Après avoir identifié la ou les questions que vous devez lui poser, vous lui
indiquerez la procédure à suivre.
2) Un conciliateur été désigné et les négociations avec les principaux
créanciers sont bien engagées. Cependant, le Trésor se refuse à tout effort
et poursuit la SARL en paiement des cotisations échues. Que faire ?
3) Le gérant de la SARL s’est porté caution solidaire pour le remboursement
d’un emprunt accordé en 2016 à la SARL par la banque le Crédit du Sud.
Il vous demande de lui indiquer quel sera son sort après la conclusion de
l’accord ?
4) Enfin, il veut connaître les conséquences d’une inexécution par la SARL
de l’accord conclu, notamment dans l’hypothèse où elle ne pourrait plus
honorer les échéances convenues.

9
SEANCE n° 3

Thème : La prévention des difficultés des entreprises

Objet de l’exercice : Dissertation

Note introductive

« Des entreprises en difficulté, on en trouve un peu partout en Afrique ; des


entreprises qui se redressent ; on en cherche ». Cette assertion du Pr SAWADOGO à
laquelle on peut adjoindre l’adage « mieux vaut prévenir que guérir » a certainement
poussé le législateur OHADA, dans l’institution de l’Acte uniforme portant des
procédures collectives d’apurement du passif et dans d’autres règles matérielles, à
privilégier la prévention des difficultés ; ce qui est tout à fait compréhensible si on
se donne pour objectif d’attirer les investisseurs. La présente séance de TD est
l’occasion de réfléchir sur l’efficacité des mesures instituées.

Bibliographie : A consulter

- Filiga Michel SAWADOGO, OHADA – Droit des entreprises en difficulté ;


coll. Droit uniforme africain, éd. Bruylant ;
- Eric Aristide MOHO FOPA, « Réflexions critiques sur le système de
prévention des difficultés des entreprises OHADA »,
www.memoireonline.com;
- Nguie Pascal KANTE, « Réflexions sur la notion d’entreprises en
difficulté dans l’Acte uniforme portant procédures collectives
d’apurement du passif, [En ligne].

Dissertez sur le thème suivant :

« L’efficacité des modes de prévention des difficultés des


entreprises dans le droit OHADA ».

10
Travaux dirigés : Entreprises en difficulté
Cours : …
TD : …

SEANCE n° 4

Thème : La cessation des paiements

Objet de l’exercice : Commentaire de la décision de C.C.J.A.,


3ème Chambre, arrêt n° 22 du 06 décembre 2011. Affaire : La Compagnie
Cotonnière Ivoirienne C/. T et G.

Note introductive

Il peut arriver que les tentatives de prévention des difficultés des entreprises ne
donnent pas les résultats escomptés et que l’entreprise se retrouve corrélativement
en état de cessation des paiements. Cette notion de cessation des paiements est
celle qui permet de distinguer la procédure de règlement préventif des procédures
de redressement judiciaire et de la liquidation des biens. Elle constitue la condition
économique d’ouverture de ces deux dernières procédures de traitement.

Bibliographie : A consulter

- Filiga Michel SAWADOGO (sous la direction de Paul-Gérard POUGOUE), « cessation


des paiements », in Encyclopédie du droit OHADA, 2011 ;
- Komlan ASSOGBAVI, « les procédures collectives d’apurement du passif dans l’espace
OHADA », Penant 2000, pp. 5 et suiv. ;
- Commentaire de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif, in J. Y. SAYEGH, P-G POUGOUE et F. M. SAWADOGO,
OHADA (sous la direction scientifique), Traités et Actes uniformes commentés et
annotés, 3e édition, Juriscope, pp. 867 à 1035.

Sujet n° 1 :
Commentez cette décision de la C.C.J.A., 3ème Chambre, arrêt n° 22du
06 décembre 2011. Affaire : La Compagnie Cotonnière Ivoirienne
C/. T et G.
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation
du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et
d’Arbitrage ;
Vu l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif ;

11
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que la Compagnie
Cotonnière Ivoirienne (en abrégé CCI), société anonyme spécialisée dans
l’importation, l’exportation et le négoce de coton, a connu une exploitation
normale jusqu’en 2004 puis a commencé à éprouver des difficultés dues
essentiellement à la conjoncture économique internationale et
nationale impactant négativement le secteur du coton ;
Que face à cette situation, elle a présenté une requête aux fins de règlement
préventif au Président du Tribunal de première instance d’Abidjan, qui, au
vu des documents produits, a rendu l’ordonnance n° 1088/2006 du 24 mars
2006 décidant de la suspension des poursuites individuelles et de la
désignation de l’expert ANON SEKA pour faire un rapport sur la situation
économique et financière de la société et ses perspectives de redressement ;
Que dans son rapport, l’expert désigné relève que les comptes de la société
LCCI font apparaître des besoins financiers importants qui ne peuvent pas
être couverts par un financement adapté aux possibilités de la société et que
l’actif réalisable et disponible, soustraction faite des stocks, s’élève à la
somme de 31 456 896 095 F CFA contre un passif exigible de
57 580 255 578 F CFA, soit un écart négatif de 26 123 259 483 F CFA ; qu’il
en déduit que la société CCI se trouvant dans l’impossibilité de faire face à
son passif exigible avec son actif disponible est en état de cessation des
paiements et que le plan de restructuration présenté et les perspectives de
redressement reposant essentiellement sur des promesses de soutien
financier de l’Etat ivoirien ne peuvent être le fondement d’un concordat
sérieux justifiant la continuation de l’exploitation ;
Que par jugement n° 2213 du 22 septembre 2006, le Tribunal de Première
Instance d’Abidjan-Plateau a prononcé la liquidation des biens de la CCI ;
Que suite à l’appel interjeté contre ce jugement par la CCI, la Cour d’appel
d’Abidjan a confirmé le jugement du Tribunal de Première Instance
d’Abidjan-Plateau par son Arrêt n° 1216 du 30 novembre 2006 contre lequel
a été formé le présent pourvoi et le dispositif est ci-dessus énoncé ;
Attendu qu’au soutien de son pourvoi, la CCI invoque deux moyens tirés
respectivement de la violation des articles 25 et 33 de l’Acte uniforme portant
organisation des procédures collectives d’apurement du passif ;
Sur les deux moyens réunis
Attendu que la CCI fait valoir, au soutien des moyens tirés de la violation
des articles 25 et 33 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures
collectives d’apurement du passif, que l’argumentation de l’arrêt confirmatif
de la Cour d’appel d’Abidjan suivant laquelle «… la CCI était en état de
cessation de paiement au moment de solliciter le règlement préventif et que
ses allégations selon lesquelles l’Etat de Côte d’Ivoire entend procéder à la
restructuration du secteur du coton et prendre en charge une partie de la dette
des opérateurs du secteur ne sont étayées par aucun commencement de
preuve de sorte que la proposition par elle faite n’est pas sérieuse et fragilise
son plan de sauvetage», n’est point pertinente et que son offre concordataire,
en plus d’être parfaitement ambitieuse et réalisable est protectrice des
intérêts des créanciers tout en présentant un intérêt économique
indéniable ;
Qu’en se fondant essentiellement, voire uniquement, sur le rapport de
l’expert ANON SEKA qui n’a pas tenu compte des perspectives de

12
redressement avec notamment le soutien financier de l’Etat et la mise en
place d’un plan de restructuration de la filière, la Cour d’appel d’Abidjan, ne
s’est pas conformée à l’objectif de sauvegarde de l’entreprise que vise la
législation OHADA sur les procédures collectif d’apurement du passif ;
Mais, attendu qu’aux termes des dispositions combinées des articles 25 et
33 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif que le débiteur qui est dans l'impossibilité de faire
face à son passif exigible avec son actif disponible doit faire une déclaration
de cessation des paiements aux fins d'obtenir l'ouverture d'une procédure de
redressement judiciaire ou de liquidation des biens, quelle que soit la nature
de ses dettes, et que la juridiction compétente qui constate la cessation des
paiements prononce le redressement judiciaire s'il lui apparaît que le
débiteur a proposé un concordat sérieux ou, dans le cas contraire, prononce
la liquidation des biens ;
Que la Cour d’appel par son arrêt confirmatif du jugement d’instance qui
s’est fondé sur les conclusions de l’expert désigné qui a constaté que la CCI,
en état de cessation des paiements, avait un passif exigible supérieur à son
actif réalisable et disponible de plus de 26 milliards de francs CFA, de sorte
qu’elle est dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible et qu’en
plus, le plan de restructuration présenté ne peut être réalisé faute de
ressources financières, a fait une saine application des dispositions des
articles 25 et 33 dudit Acte uniforme ;
D’où il suit que les moyens ne sont pas fondés et doivent être rejetés ;
PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi formé par la Compagnie Cotonnière Ivoirienne.

Sujet n° 2 :
Objet de l’exercice : Commentaire

Commentez les alinéas 2, 3 et 4 de l’article 25 de l’AUPC qui


dispose :

« La cessation des paiements est l’état où le débiteur se


trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible
avec son actif disponible, à l'exclusion des situations où les
réserves de crédit ou les délais de paiement dont le débiteur
bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire
face à son passif exigible.

Le débiteur qui est en cessation des paiements doit faire une


déclaration aux fins d'obtenir l'ouverture d'une procédure de
redressement judiciaire ou de liquidation des biens quelle que
soit la nature de ses dettes.
13
La déclaration de cessation des paiements doit être faite par
le débiteur au plus tard dans les trente (30) jours qui suivent
la cessation des paiements et déposée au greffe de la
juridiction compétente contre récépissé ».

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SEANCE n° 5

Thème : Les effets de l’ouverture d’une procédure collective à


l’égard des créanciers et du débiteur

Objet de l’exercice : Dissertation

Note introductive

L’ouverture des procédures collectives produit des effets aussi bien à l’égard du
débiteur qu’à l’égard des créanciers. Cette séance de TD est l’occasion de relever
tous les effets de l’ouverture d’une procédure collective.

Bibliographie : A consulter

- Filiga Michel SAWADOGO, OHADA – Droit des entreprises en difficulté ;


coll. Droit uniforme africain, éd. Bruylant ;
- H. LABITEY, « La sécurisation des systèmes de paiement UEMOA à
l’épreuve du droit des procédures collectives d’apurement du passif »,
in Revue sénégalaise du droit des affaires, 2011, pp. 4 et suiv. ;
- M. NGOM, « La situation du propriétaire dans le droit OHADA des
procédures collectives d’apurement du passif », in Revue sénégalaise du
droit des affaires, 2011, pp. 34 et suiv. ;
- J. GHESTIN, Réflexions d’un civiliste sur la clause de réserve de
propriété, D. 1981, Chron. 1 ;
- J. MESTRE, De la transmissibilité de la réserve de propriété, Petites
affiches, 25 avril 1986, p. 85.

Sujet n° 1 :

Dissertez sur le thème suivant :

« Droit de propriété et procédures collectives ».

14
Sujet n° 2 :

Dissertez sur le thème suivant :

« L’impact d’une procédure collective sur les droits des créanciers


munis de sûretés ».

Sujet n° 3 :

Dissertez sur le thème suivant :

« Les procédures collectives et le dessaisissement du débiteur ».

15
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SEANCE n° 6

Thème : Les inopposabilités de la période suspecte

Objet de l’exercice : Commentez l’arrêt rendu en audiencepublique


du 1er avril 2014 ;n° de pourvoi: 13-14086 (…).

Bibliographie : A consulter

- Filiga Michel SAWADOGO, OHADA – Droit des entreprises en difficulté ;


coll. Droit uniforme africain, éd. Bruylant.
Note introductive

Le débiteur qui a cessé ses paiements est dans une situation fragile et peut être
tenté de faire n’importe quoi, de faire échapper certains biens. Il y a donc une
période pendant laquelle les actes conclus par le débiteur vont être étudié au cas
par cas, c’est la période suspecte.

La loi établie la période suspecte du jour de la cessation des paiements au jour du


jugement d’ouverture de la procédure de redressement. On retrouve ici l’importance
de la fixation de la date de cessation des paiements par le Tribunal. Néanmoins tout
ne pourra être annulé, il existe deux types de règles prévues par le Code de
Commerce : les règles générales et les règles spéciales à tel ou tel acte.

Commentez l’arrêt ci-dessous reproduit, rendu en audience


publique du 1er avril 2014 ;n° de pourvoi: 13-14086

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt


suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Colmar, 19 décembre 2012), que le 26 mars
2009, M. et Mme X... ont constitué la SCI Enès (la SCI) à laquelle ils ont fait
apport de leur maison d’habitation ; que le 30 novembre 2009, M. X... a été
mis en liquidation judiciaire, la date de cessation des paiements étant fixée
au 30 mai 2008 ; que le 29 janvier 2010, le liquidateur a assigné la SCI et
Mme X... en annulation de l’apport effectué ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable comme
étant de pur droit :
Attendu que Mme X... et la SCI font grief à l’arrêt d’avoir confirmé le
jugement ayant dit que l’apport du bien immobilier cadastré au livre foncier
de Haguenau sous S CD n° 0025/ 0006 a été réalisé en période suspecte, en
conséquence annulé cet acte, dit que le jugement sera transcrit au livre
foncier de Haguenau, dit le jugement opposable à Mme X..., alors, selon le
moyen, que depuis l’ordonnance n 2008-1345 du 18 décembre 2008, entrée
en vigueur le 15 février 2009, le liquidateur ne peut plus exercer l’action en

16
nullité d’actes accomplis pendant la période suspecte ; qu’en accueillant
pourtant, en l’espèce, une telle action intentée le 29 janvier 2010 par le
liquidateur de M. X..., la cour d’appel a violé l’article L. 632-4 du code de
commerce, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n 2008-1345 du 18
décembre 2008 ;
Mais attendu qu’aux termes des articles L. 632-4, L. 641-4 et L. 641-14 du
code de commerce, dans leur rédaction issue de l’ordonnance du 18
décembre 2008, le liquidateur exerce les fonctions dévolues au mandataire
judiciaire, lequel a qualité pour agir en nullité d’un acte accompli en période
suspecte ; que le moyen n’est pas fondé ;
Et sur le moyen, pris en ses deuxièmes, troisième et quatrième branches :
Attendu que Mme X... et la SCI font le même grief à l’arrêt, alors, selon le
moyen :
1°/ que la nullité facultative d’un apport réalisé en période suspecte ne peut
être prononcée que si le bénéficiaire de cet apport a eu connaissance de la
cessation des paiements ; qu’en se fondant sur le seul fait que la SCI, dont
elle a relevé qu’elle était bénéficiaire de l’apport, était « l’émanation des deux
conjoints et associés », motifs impropres à établir que cette SCI avait
personnellement connaissance de la cessation des paiements de Monsieur
X..., la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.
632-2 du code de commerce ;
2°/ que la nullité facultative d’un acte réalisé en période suspecte suppose
une connaissance des parties à cet acte de la cessation des paiements ;
qu’en se bornant, en l’espèce, à relever que l’accumulation des dettes
impayées notamment vis à vis de l’URSSAF et des impôts ne pouvait être
ignorée de Mme X..., signataire d’un acte mentionnant les sûretés inscrites
en garantie des dettes impayées de l’exploitation de son conjoint, laquelle
n’invoquait l’existence d’aucun bien ni revenu qui aurait constitué un actif
disponible, de sorte qu’elle ne pouvait ignorer que l’immeuble était le seul
bien susceptible de répondre aux engagements professionnels de M. X..., la
cour d’appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser qu’au jour
de la signature de l’acte argué de nullité, Mme X... savait que son époux ne
pouvait pas faire face à son passif exigible avec son actif disponible, a privé
sa décision de base légale au regard de l’article L. 632-2 du code de
commerce ;
3°/ que le prononcé d’une nullité qui n’est que facultative pour le juge
suppose que celui-ci motive sa décision d’annuler l’acte ; qu’en se bornant à
déduire la nullité de l’apport consenti à la SCI du seul fait que les conditions
de la nullité facultative soient réunies, sans motiver sa décision de
prononcer une telle nullité, dont les conséquences particulièrement graves
étaient mises en exergue par les conclusions des exposants, la cour d’appel a
privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 632-2 du code de
commerce ;
Mais attendu que l’arrêt relève que l’accumulation des dettes impayées en
particulier vis-à-vis de l’URSSAF et des impôts à partir de 2007 ne pouvait
être ignorée de Mme X..., signataire des statuts concrétisant son accord et
mentionnant ces diverses sûretés inscrites en garantie des dettes impayées
de l’exploitation de son conjoint ; qu’il retient encore que Mme X..., qui
n’invoque l’existence d’aucun bien ni revenu qui aurait constitué un actif

17
disponible, ne pouvait ignorer que l’immeuble était le seul bien susceptible
de répondre des engagements professionnels de M. X... et que l’apport a eu
pour but de soustraire l’immeuble à la procédure collective et aux poursuites
de ses créanciers ; qu’ayant ainsi caractérisé la connaissance qu’avaient
Mme X... et la SCI, dont M. et Mme X... étaient les seuls associés, de
l’impossibilité pour M. X... de faire face à son passif exigible avec son actif
disponible, la cour d’appel a retenu à bon droit que l’article L. 632-2 du code
de commerce était applicable à l’apport litigieux ; que le moyen n’est pas
fondé ;
Et attendu que les autres griefs ne seraient pas de nature à permettre
l’admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... et la SCI Enes aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière
et économique, et prononcé par le président en son audience publique du
premier avril deux mille quatorze.

18
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SEANCE n° 7

Thème : La continuation des contrats en cours

Objet de l’exercice :

- Arrêt de la chambre commerciale de la Cour de Cassation du 20juin


2000, Bulletin n°130 : arrêt fondamental ;
- Consultez les arrêts ci-après : Cass. Com., 5 mai 2004 ; Cass. Ass.
plén., 7 mai 2004 ; Cass. Com., 18 mars 2003 ;
- Commentez l’arrêt Cass. Com., 19 mai 2004.
Bibliographie : A consulter

- Filiga Michel SAWADOGO, OHADA – Droit des entreprises en difficulté ;


coll. Droit uniforme africain, éd. Bruylant ;
- BOLZE (A.), Procédures collectives et sûretés, coll. Dyna’sup Droit, éd.
Vuibert, 2006.
Note introductive

On ne veut pas étouffer l’entreprise, elle doit continuer à vivre. Certains contrats
peuvent devenir trop lourds. L’entreprise peut avoir intérêt à les rompre. En
principe, un contrat conclu valablement va continuer à exister mais c’est une
simple faculté. La règle fondamentale est posée par l’article 108 de l’AUPC : le
monopole de cette décision est accordé au syndic (à l’administrateur en droit
français). Il décide si le contrat va continuer ou non. En droit français, quand il n’y
a pas d’administrateur, c’est le dirigeant de l’entreprise qui a la possibilité de
décider. En droit OHADA, si le syndic ne décide pas, il peut être contraint à exercer
l’option.
S’agissant du domaine de l’option, il est à noter qu’il faut être en présence d’un
contrat en cours d’exécution au jour du jugement d’ouverture (hypothèse des
contrats à exécution successive, à exécution instantanée mais l’exécution n’a pas
encore eut lieu). D’après la jurisprudence, un contrat dont les obligations
essentielles n’ont pas encore été exécutées est un contrat dont l’exécution n’a pas
encore eut lieu (transfert de propriété et paiement du prix). Cette règle est valable
pour tous les contrats (entre deux personnes, administratifs…), elle est d’ordre
public (pas de stipulation prévoyant que l’option pour les contrats en cours ne
s’applique pas). Le cocontractant peut clarifier la situation en adressant une mise
en demeure pour savoir si mes relations contractuelles vont continuer (pour savoir
ce qui va se passer). Cette mise ne demeure n’est jamais obligatoire. S’il le fait, il
s’adresse au syndic (à l’administrateur ou au dirigeant en droit français).

Cass. Com., 5 mai 2004 (à consulter)

Vu l'article L. 621-115 du Code de commerce ;


Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Brown et Sharpe a vendu à la société Mécasat,
le 18 décembre 1998, une machine dont elle s’est réservé la propriété jusqu'au paiement

19
complet du prix ;
Qu’à la suite de la mise en redressement judiciaire, le 1er avril 1999, de la société Aérosat,
qui avait absorbé la société Mécasat, et de l’adoption, le 29 septembre 1999, d’un plan de
cession au profit de la société Sai investissement, la société vendeuse a revendiqué la
machine par lettre du 19 octobre 1999 adressée à la SCP Laureau et Jeannerot,
commissaire à l’exécution du plan ; qu’elle a saisi le juge-commissaire d'une requête en
revendication, le 20 octobre 1999 ;
Attendu que pour condamner la SCP Laureau et Jeannerot, ès qualités, à restituer à la
société Brown et Sharpe la machine vendue, ainsi que les logiciels équipant cette machine,
et dire que cette décision était opposable à la société Sai investissement, l’arrêt retient que le
transfert de propriété de la machine n’ayant pas eu lieu à défaut de paiement du prix, le
contrat de vente était en cours au jour de l’ouverture du redressement judiciaire, et que, mis
en demeure le 10 septembre 1999, l’administrateur n’a pas opté pour la poursuite du
contrat de sorte que le contrat s’est trouvé résilié ; que l’arrêt retient encore que la requête
en revendication est recevable pour avoir été présentée dans le délai de trois mois ayant
commencé à courir à compter de la résiliation du contrat;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’un contrat de vente de biens mobiliers dont la
propriété est réservée et dont le prix n’est pas payé lors de l’ouverture de la procédure
collective n'est pas un contrat en cours au sens de l’article L. 621-28 du Code de commerce,
et que le délai de revendication a pour point de départ la publication du jugement
d’ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

Cass. Ass. plén., 7 mai 2004 (à consulter)

Sur le premier moyen :


Vu les articles 5 et 7 du décret du 30 septembre 1953 devenus les articles L. 145-9 et L.
145-12 du Code de commerce, et l'article 37 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction
applicable en la cause ;
Attendu que le bail commercial renouvelé après délivrance d'un congé est un nouveau bail,
le précédent cessant par l'effet du congé ; qu'il en résulte qu'il ne constitue pas un contrat
en cours dont l'administrateur du redressement judiciaire du preneur peut exiger
l'exécution ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (comm. 17 février 1998 bull
IV n° 72) que, le 30 juin 1993, la société civile immobilière Dumas (la SCI) a délivré à sa
locataire la société anonyme Dumas (la société) un congé pour le 31 décembre 1993, date
d'expiration du bail commercial conclu entre elles le 8 octobre 1984, en proposant le
renouvellement de ce bail pour un loyer supérieur au précédent ; qu'après avoir accepté le
principe du renouvellement en contestant le loyer proposé, la société a été mise en
redressement judiciaire le 22 décembre 1993 ; que, le 31 décembre 1993, la SCI a mis
l'administrateur en demeure de se prononcer sur la poursuite du bail ; que celui-ci a
répondu, le 11 février 1994, qu'il entendait "poursuivre" le bail aux conditions initiales ; que
la SCI a assigné la société et son administrateur en résiliation du bail, expulsion et
paiement de diverses sommes ;
Attendu que pour accueillir ces demandes, l'arrêt retient que le congé n'a pas mis fin aux
relations contractuelles qui se poursuivaient après l'expiration du bail initial et que le défaut
de réponse de l'administrateur dans le délai d'un mois entraîne une présomption
irréfragable de renonciation à la poursuite du contrat ;
Attendu qu'en statuant ainsi alors que, le bail en vigueur à la date d'ouverture de la
procédure collective étant arrivé à son terme, les relations entre les parties ne pouvaient se
poursuivre qu'en vertu d'un nouveau bail, de sorte qu'il ne s'agissait pas d'un contrat en
cours au sens du dernier des textes susvisés, la cour d'appel a violé lesdits textes ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

20
A commenter : Cass. Com., 19 mai 2004
Sur le moyen unique :
Vu les articles 37, alinéa 1er, et 173 de la loi du 25 janvier 1985 devenus les
articles L. 621-28, alinéa 1er, et L. 623-4 du Code de commerce et l'article
61-1 du décret du 27 décembre 1985 ;
Attendu, selon l’arrêt déféré, que la SCI Messidor (la SCI), qui avait consenti
à la société La Brûlerie d’Adamville et à M. X... des baux commerciaux
portant sur des locaux situés dans un centre commercial, a été mise en
redressement judiciaire le 8 février 1995 ; que, par lettre du 29 juin 1995, M.
Y..., administrateur, a « procédé à la résiliation des baux commerciaux à effet
au 31 juillet 1995, du fait de la situation actuelle du centre commercial qui
ne permet pas à la SCI d’exécuter les contrats de bail » ; que saisi par
l’administrateur devenu commissaire à l’exécution du plan de cession de la
SCI, le juge-commissaire a « prononcé » la résiliation des baux et fixé leur
date de résiliation au 31 juillet 1995 ; que le tribunal ayant confirmé cette
décision, la société La Brûlerie d’Adamville et M. X... ont relevé appel ;
Attendu que pour déclarer irrecevable l’appel formé par la société La Brûlerie
d’Adamville et M. X..., l’arrêt retient qu’il entre dans la compétence exclusive
du juge-commissaire de statuer sur les difficultés de la décision de
poursuivre ou non un contrat en cours et qu’il n’y a pas eu excès de pouvoir
du juge-commissaire approuvé par le tribunal en ce qu’il a mis fin aux baux
commerciaux liant la SCI à la société La Brûlerie d'Adamville et à M. X... ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’en l’absence de mise en demeure par
le cocontractant, la renonciation de l’administrateur à la poursuite du
contrat n’entraîne pas la résiliation de plein droit de la convention à son
initiative mais confère au seul cocontractant le droit de la faire prononcer en
justice et qu’une telle demande n’entre pas dans les attributions du juge-
commissaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 juin
2001, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence,
la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et,
pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Cass. Com., 18 mars 2003 (à consulter)


Sur le moyen unique pris en ses six branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 3 février 2000), que le 5 mars 1997, la société Sipac
a passé un marché avec la société Bel portant sur des travaux d'agencement et de
décoration d'un palais des congrès ; que par jugement du 13 janvier 1998, le tribunal a
ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Bel ; que le 28
mai 1998, la société Sipac a mis en demeure l'administrateur judiciaire de lui faire connaître
s'il entendait ou non poursuivre le marché du 5 mars 1997 ; que par courrier du 2 juin
1998 reçu le 9 juin 1998 par la société Sipac, l'administrateur judiciaire a indiqué à celle-ci
qu'il n'entendait pas poursuivre le marché ; que le 23 juin 1998, la société Sipac a saisi le
juge-commissaire aux fins de voir constater la résiliation du marché et fixer au 9 juin 1998
la date de la résiliation ; qu'un plan de cession a été adopté par jugement du 1er juillet 1998
; que le 7 janvier 1999, la société Sipac a déclaré une créance ; que devant le juge-

21
commissaire, elle a soutenu que ce dernier devait prononcer la résiliation du marché, en
fixer la date et ouvrir le délai de déclaration supplémentaire prévu à l'article 66 du décret du
27 décembre 1985 ; que par ordonnance du 16 février 1999, le juge-commissaire a rejeté les
prétentions de la société Sipac ; que cette dernière a fait appel de cette décision ;
Attendu que la société Sipac fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de résiliation
judiciaire du marché du 5 mars 1997, constaté que la résiliation de ce marché était
intervenue le 9 juin 1998, et dit que le délai supplémentaire de déclaration de créance prévu
à l'article 66 du décret du 27 décembre 1985 était expiré depuis le 9 juillet 1998 alors, selon
le moyen,
1) que l'administrateur à un redressement judiciaire n'a pas le pouvoir de résilier de sa
propre initiative les contrats en cours que, dès lors, en retenant, pour débouter la SIPAC de
sa demande de résiliation judiciaire du contrat du 5 mars 1997 et constater que ce contrat
avait été résilié le 9 juin 1998, que celle-ci avait expressément reconnu avoir reçu à cette
date un courrier de résiliation de l'administrateur judiciaire de la société Bel daté du 2 juin
1998, la cour d'appel a violé l'article 37 de la loi du 25 janvier 1985 modifiée ;
2) qu'en rejetant la demande de la SIPAC tendant à ce que soit prononcée judiciairement la
résiliation du contrat du 5 mars 1997 et en constatant que la résiliation de ce contrat était
intervenue le 9 juin 1998, date de réception par la SIPAC de la lettre de l'administrateur
judiciaire indiquant qu'il n'entendait pas le poursuivre, tout en constatant que cette lettre
"n'est pas une décision prononçant une résiliation mais un simple acte d'information" du
cocontractant, ce dont il résultait qu'elle n'avait pas pu avoir pour effet d'entraîner la
résiliation du marché, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres
constatations au regard de l'article 37 de la loi du 25 janvier 1985 modifiée qu'elle a ainsi de
nouveau violé ;
3) que le délai supplémentaire octroyé par le deuxième alinéa de l'article 66 du décret du 27
décembre 1985 modifié aux cocontractants mentionnés à l'article 37 de la loi du 25 janvier
1985 modifiée pour déclarer leur créance n'est ouvert qu'en cas de résiliation de plein droit
de la convention ou de notification d'une décision judiciaire la prononçant, de telle sorte que
la résiliation par l'administrateur judiciaire n'est pas de nature à produire un tel effet ; que,
dès lors, en relevant, pour refuser de prononcer à la demande de la SIPAC la résiliation de la
convention du 5 mars 1997 et la priver en conséquence de son droit à déclarer sa créance,
que cette société avait reconnu avoir reçu un courrier de résiliation émanant de
l'administrateur au redressement judiciaire de la société Bel, la cour d'appel a violé les
textes susvisés ;
4) qu'en considérant que « l'acte d'information » de la résiliation de la convention par
l'administrateur judiciaire « emporte la même conséquence qu'un défaut de réponse, à
savoir la résiliation de plein droit, sauf à lui donner effet à une date plus rapprochée », la
cour d'appel a créé un cas de résiliation de plein droit des conventions que l'article 37 de la
loi du 25 janvier 1985 modifiée ne prévoit pas, a ajouté à l'article 66 du décret du 27
décembre 1985 modifié un cas d'ouverture du délai supplémentaire de déclarations des
créances qu'il organise et a modifié en outre le point de départ qu'il fixe à ce délai qu'en
statuant de la sorte, elle a derechef violé les textes susvisés ;
5) que le jugement qui arrête un plan de cession n'opère que le transfert des contrats en
cours poursuivis par le repreneur et est sans influence sur les autres ; que, dès lors, en
considérant pour statuer comme elle l'a fait, que le jugement du 1er juillet 1998 arrêtant le
plan de cession de la société Bel n'avait pu que « confirmer » à la SIPAC "que son contrat
avait été régulièrement résilié", la cour d'appel a également violé l'article 86 de la loi du 25
janvier 1985 modifiée ;
6) que la résiliation d'une convention par accord implicite de l'administrateur judiciaire et
du cocontractant n'implique pas renonciation par ce dernier à sa créance en résultant et ne
peut en conséquence le priver de son droit d'obtenir une décision lui permettant de la
déclarer ;
que, dès lors, en retenant, pour refuser de prononcer à la demande de la SIPAC la résiliation
de la convention du 5 mars 1997, que celle-ci, en contractant avec un tiers, avait reconnu
plein et entier effet au courrier de l'administrateur au redressement judiciaire de la société

22
Bel résiliant la convention litigieuse, la cour d'appel a encore violé les articles 37 de la loi du
25 janvier 1985 modifiée et 66 du décret du 27 décembre 1985 modifié ;
Mais attendu que l'administrateur ayant été mis en demeure de se prononcer sur la
poursuite d'un contrat en cours, son refus exprès de poursuivre le contrat entraîne la
résiliation de plein droit de celui-ci, à la date de la réception par le cocontractant de ce
refus, si celle-ci intervient dans le délai d'un mois prévu à l'article 37 de la loi du 25 janvier
1985 devenu l'article L. 621-28 du Code de commerce ; qu'il n'y a pas lieu de faire
nécessairement constater cette résiliation par le juge-commissaire ; que le délai
supplémentaire, prévu à l'article 66 du décret du 27 décembre 1985, pour déclarer la
créance résultant de la résiliation court à compter de la réception de la réponse de
l'administrateur ;
Et attendu qu'ayant constaté qu'à la suite de la mise en demeure adressée le 28 mai 1998,
l'administrateur judiciaire avait indiqué à la société SIPAC, par courrier reçu le 9 juin 1998,
qu'il n'entendait pas poursuivre le contrat, la cour d'appel en a justement déduit,
abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les cinquième et sixième branches
du moyen, que le contrat avait été résilié de plein droit le 9 juin 1998 sans qu'il y ait lieu de
prononcer sa résiliation et que la société SIPAC ayant déclaré sa créance le 7 janvier 1999,
elle se trouvait forclose ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

23
Travaux dirigés : Entreprises en difficulté

Cours : …
TD : …

SEANCE n° 8

Thème : La restriction des droits de certains créanciers

Objet de l’exercice : Analyse de jurisprudence (donnez les éléments de


commentaire) et établir un tableau comparatif du régime applicable aux
créanciers antérieurs et postérieurs au cours des procédures collectives.

Bibliographie : A consulter

- Filiga Michel SAWADOGO, OHADA – Droit des entreprises en difficulté ; coll.


Droit uniforme africain, éd. Bruylant ;
- BOLZE (A.), Procédures collectives et sûretés, coll. Dyna’sup Droit, éd. Vuibert,
2006.
Note introductive

Le redressement de l’entreprise en difficulté nécessite une gestion rigoureuse de celle-ci : le


débiteur ou les dirigeants doivent redéfinir les grandes orientations managériales ou les
grands axes prioritaires stratégiques et prendre des mesures adéquates pour les atteindre.
Cela restreint également les droits de certains créanciers. Cette séance de TD est l’occasion
de mener une étude comparative sur les créanciers antérieurs et les créanciers postérieurs
au cours des procédures collectives.

Cass. Com., 28 janvier 2004


Attendu selon l’arrêt déféré que M. X..., préposé de la société Interbrew France (la société
Interbrew) a déclaré la créance de la BNP-Paribas (la BNP) au passif de la liquidation
judiciaire de la société Le Clown ; que par ordonnance du 23 février 2001, le juge-
commissaire a rejeté la réclamation formée par M. Y..., caution, à l’encontre de la décision
d’admission de la créance ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles 853, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile et L. 621-43 du Code de
commerce ;
Attendu que pour infirmer l'ordonnance du juge-commissaire et décider que la créance de la
BNP était éteinte comme ayant été déclarée irrégulièrement, l’arrêt, après avoir constaté que
la déclaration de créance était accompagnée d'un mandat de recouvrer donné par M. Z...,
agissant en qualité de fondé de pouvoir principal du groupe de Lille, au nom et pour le
compte de la BNP, à la société Interbrew, retient que M. Z... n'était ni président du conseil
d’administration , ni directeur général de la BNP ; qu’ainsi il n'était pas légalement habilité à
la représenter et n'avait par conséquent pas le pouvoir de donner à la société Interbrew un
mandat d'agir en justice, ce pouvoir n'appartenant qu'au représentant légal ;
Attendu, qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, s’il
résultait de la délégation de pouvoir consentie le 30 octobre 1992 à M. Z... produite aux
débats, que celui-ci avait reçu, d’un organe habilité à représenter la BNP, le pouvoir de
donner mandat spécial à un tiers de déclarer les créances de la BNP, la cour d'appel n'a pas
donné de base légale à sa décision ;
Et sur le second moyen :
Vu l’article L. 621-43 du Code du commerce ;

24
Attendu que pour infirmer l'ordonnance du juge-commissaire et décider que la créance de la
BNP était éteinte comme ayant été déclarée irrégulièrement, l’arrêt après avoir constaté que
la déclaration de créance avait été signée par M. X..., préposé de la société Interbrew, retient
que M. X... ne représente pas légalement la société Interbrew seule titulaire du mandat et ne
justifie pas avoir reçu du président de cette société ou de son délégué le pouvoir de déclarer
la créance d’un tiers ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, alors qu'elle avait constaté qu'était annexé
à la déclaration de créance un pouvoir donné le 30 avril 1999 à M. X... par M. A... agissant
lui-même en vertu d’une délégation consentie par M. B..., président et directeur général de
la société Interbrew, et qu’était produite aux débats la délégation de pouvoir dont bénéficiait
M. A..., la cour d’appel, qui n’a pas recherché si ces délégations de pouvoirs ne justifiaient
pas du pouvoir de déclarer les créances dont bénéficiait M. X..., n’a pas donné de base légale
à sa décision ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20
février 2002, entre les parties, par la cour d’appel de Riom ;

Cass. Com., 21 novembre 2006

Sur le moyen unique :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 10 août 2005, arrêt n° 642), qu'après la mise en
liquidation judiciaire de la société Lucciana ambulances (la société), le juge-commissaire a
rejeté la créance de la Caisse autonome de retraites complémentaires et de prévoyance du
transport (la caisse) par ordonnance du 17 février 2004 ; qu'infirmant cette décision, la cour
d'appel a admis la créance de la caisse à concurrence de la somme de 7 915,49 euros à titre
privilégié ;
Attendu que la société et M. de X...Y..., son liquidateur judiciaire, font grief à l'arrêt d'avoir
ainsi statué, alors, selon le moyen, que la mention d'une signature pré-imprimée et scannée
sur une déclaration de créance équivaut à un défaut de signature, laquelle déclaration ne
saurait être régularisée que dans le délai de deux mois imparti ou dans le cadre d’une
procédure de relevé de forclusion, et, en tout état de cause, avant le prononcé de
l’ordonnance du juge-commissaire ; que la cour d’appel, qui a dûment constaté que la seule
mention « identifiante » apposée dans la déclaration de la caisse était une signature pré-
imprimée et scannée, comme telle inopérante, mais qui a néanmoins cru pouvoir exciper
d’une tentative de régularisation opérée le 19 août 2004, alors que l'ordonnance du juge-
commissaire rendue datait du 17 février 2004, pour admettre la créance, n’a pas tiré les
conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l’article L. 621-43 du
code de commerce, ensemble l'article 853, alinéa 1er, du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que la preuve de l’identité du déclarant peut être faite, même en l’absence de
signature de la déclaration, par tous moyens, jusqu’au jour où le juge statue ;
Attendu qu'après avoir relevé que le directeur de la caisse avait donné pouvoir à Mme Z...
pour « produire à toutes procédures de redressement et de liquidation judiciaire », l’arrêt
constate que la déclaration de créance litigieuse est revêtue de la signature pré-imprimée et
scannée de Mme Z... et que, par attestation établie le 19 août 2004, celle-ci a formellement
reconnu et identifié cette signature de sorte que cet élément extrinsèque permet d’identifier
avec certitude le déclarant ; qu'en l’état de ces constatations et appréciations, la cour
d’appel, qui pouvait prendre en considération l'attestation établie par l’auteur de la
déclaration litigieuse, a légalement justifié sa décision ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi
Cass. Com., 19 décembre 2006
Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 14 janvier 2005), que la société Natexis, venant aux
droits de la Banque française pour le commerce extérieure (la banque) a souscrit quatre
garanties autonomes les 30 juillet 1999, 23 et 24 février 2000, au profit de deux créanciers
de la société Air Liberté AOM (AOM), titulaire dans ses livres d'un compte courant

25
comportant une convention de fusion de comptes ; que le 19 juin 2001, AOM a été mise en
redressement judiciaire, puis a bénéficié le 27 juillet suivant d'un plan de cession ; que les
19 et 26 juin 2001, les quatre engagements ont été appelés par leurs bénéficiaires ; que la
banque, après s'être exécutée, a débité le compte courant d’AOM de la somme de 1 784 097
euros, puis, le 3 août 2001, a déclaré une créance incluant ce montant; que les
commissaires à l'exécution du plan d'AOM ont assigné la banque en remboursement de
ladite somme ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la banque fait grief à l’arrêt de l’avoir condamnée à payer aux commissaires à
l’exécution du plan d’AOM une certaine somme alors, selon le moyen, qu’en vertu de l’article
2028 du code civil, la créance de recours personnel du garant naît de son paiement ; que
dès lors en l’espèce, en décidant que la créance du garant prenait naissance au jour de la
conclusion du contrat, et en privant la banque dont elle constatait qu’elle avait effectué des
paiements à titre de garant pendant la période d’observation, du bénéfice de l’article L. 621-
32 du code de commerce, la cour d'appel a violé les articles 2028 du code civil et L. 621-32
du code de commerce ;
Mais attendu que la cour d'appel, a exactement décidé que la créance de recours du garant
contre le donneur d'ordre prenait naissance à la date à laquelle l'engagement à première
demande autonome avait été souscrit ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la banque fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :
1 / qu'en vertu de l'article L. 621-28 du code de commerce, lorsqu’il opte pour la
continuation d'un contrat en cours, l'administrateur doit exécuter le contrat en son entier,
avec toutes les clauses ; qu'en l'espèce, en décidant que les administrateurs avaient pu
bloquer les débits du compte courant et transformer le compte courant en un compte
destiné à recevoir les paiements dont la société AOM était destinataire, la cour d’appel a
violé le texte susvisé ;
2 / qu'en tout état de cause, dans ses conclusions d'appel, la banque avait invoqué la lettre
recommandée avec accusé de réception du 12 janvier 2002 par laquelle les administrateurs
avaient procédé à la clôture du compte courant litigieux, ce dont elle déduisait que le
compte courant n'ayant été clôturé que le 12 janvier 2002, la compensation avait pu
s'opérer par inscription en compte avant cette date ; qu'en décidant que la renonciation des
administrateurs à la poursuite d'une partie du contrat était intervenue dès le 20 juin 2001,
sans s'expliquer sur la lettre du 12 janvier 2002 de clôture du compte courant, la cour
d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 621-28 du code de
commerce ;
3 / qu'en tout état de cause, la compensation de dettes connexes peut être invoquée après
l'ouverture de la procédure, dès lors que la créance a été déclarée, peu important que le
compte courant soit ou non poursuivi après l'ouverture de la procédure collective ; qu'en
l'espèce, à supposer que la créance de recours de la banque soit une créance antérieure, la
cour d'appel qui a constaté qu'il résultait de la convention de fusion de comptes que les
parties étaient convenues d'un compte courant, ne pouvait écarter la compensation, sans
rechercher, comme elle y était invitée, s'il n'y avait pas connexité entre les dettes litigieuses ;
qu’en n’effectuant pas cette recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au
regard des articles 1290 et 1134 du code civil ;
Mais attendu que le caractère autonome d’une garantie exclut la connexité entre la créance
du garant à l’encontre du débiteur et toute créance de celui-ci à l'encontre du garant; que le
moyen est inopérant ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Cass. Ch. mixte, 18 mai 2007 :


Sur le premier moyen :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Agen, 13 octobre 2004), que M.Y... a assigné la société civile

26
immobilière Lalande (la SCI) en paiement d'un solde d’honoraires ; qu'à la suite de la mise
en redressement judiciaire de la SCI, le tribunal a arrêté le plan de continuation ; qu'un
arrêt irrévocable du 28 juin 2000 ayant fixé la créance de M.Y... au passif du redressement
judiciaire de la SCI, ce dernier a assigné M.X..., en sa qualité d’associé de la SCI, en
paiement de la dette sociale à proportion des parts détenues par lui ; que le tribunal a
prononcé la résolution du plan de la SCI et sa mise en liquidation judiciaire ; qu'un
jugement a déclaré irrecevable la demande de M.Y..., qui l'a réitérée en soutenant que la
mise en liquidation judiciaire de la SCI suffisait à démontrer qu'il avait engagé des
poursuites l’encontre de celle-ci ;
Attendu que M.X… fait grief à l’arrêt d’avoir déclaré recevable la demande de M.Y…, alors
selon le moyen :
1° / qu'aux termes de l’article 1858 du code civil, les créanciers ne peuvent poursuivre le
paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement poursuivi en
vain la personne morale ; que la cour d'appel qui, pour déclarer recevable l'action en
paiement de la dette de la SCI dirigée contre M.X..., s’est bornée à relever que l'arrêt du 28
juin 2000 condamnant la SCI au paiement était définitif et que celle-ci faisait l'objet d'une
procédure collective mais qui s'est abstenue de rechercher, comme elle y était invitée, si,
avant d'assigner en paiement M.X..., par acte du « 16 août 1996 », M.Y... avait fait, au
préalable, diligenter à l’égard de la SCI des mesures d'exécution qui s'étaient révélées vaines
a, en statuant ainsi, privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

2° / que, conformément à l'article 1858 du code civil, le créancier d'une société civile
déclarée en liquidation judiciaire ne peut poursuivre le paiement des dettes sociales contre
un associé qu'à la condition d'établir que le patrimoine de la société est insuffisant pour le
désintéresser ; que la cour d'appel qui, pour déclarer recevable l'action en paiement de la
dette de la SCI dirigée contre M.X..., s'est bornée à relever que la SCI faisait l'objet d'une
procédure de liquidation judiciaire et que M.Y... était créancier chirographaire mais qui s'est
abstenue de rechercher, comme elle y était invitée, si M.Y... avait, en vain, poursuivi la SCI
et si le patrimoine de celle-ci était insuffisant pour le désintéresser a, en statuant ainsi,
privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Mais attendu qu’il résulte des dispositions de l’article 1858 du code civil que les créanciers
d’une société civile de droit commun ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales
contre les associés, débiteurs subsidiaires du passif social envers les tiers, qu'après avoir
préalablement et vainement poursuivi la personne morale et que dans le cas où la société
est soumise à une procédure de liquidation judiciaire, la déclaration de la créance à la
procédure dispense le créancier d’établir que le patrimoine social est insuffisant pour le
désintéresser ; que l'action peut être régularisée si la créance a été régulièrement déclarée à
la procédure ;
qu'ayant relevé que la SCI avait été mise en liquidation judiciaire et dès lors qu'il n'était pas
contesté que la créance avait été déclarée à cette procédure, la cour d'appel en a exactement
déduit que les vaines poursuites à l’égard de la SCI étaient établies ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Et attendu que le second moyen ne serait pas de nature à permettre l’admission du
pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

Cass. Com., 9 juillet 2006


Attendu, selon l’arrêt attaqué, que les époux X... ont confié à la société Decock Delmotte (la
société), ultérieurement mise en redressement judiciaire le 9 juillet 1991, la construction
d’une maison individuelle ; qu’à cette même date un jugement a prononcé la résolution du
contrat et dit que les parties seront remises en l’état où elles se trouvaient avant sa
signature ; que l’administrateur et le représentant des créanciers ont été assignés aux fins
de se voir déclarer ce jugement opposable ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société, l’administrateur et le représentant des créanciers font grief à l’arrêt
d’avoir dit le jugement du 9 juillet 1991 définitif et opposable aux organes du redressement

27
judiciaire de la société, alors, selon le pourvoi, que le jugement d’ouverture prend effet à
compter de sa date, c'est-à-dire dès la première heure du jour de son prononcé et que le
débiteur se trouve par conséquence dessaisi par la mission confiée aux mandataires de
justice ; qu’en l’espèce les juges ont dit que le jugement du 9 juillet 1991, rendu le même
jour que celui prononçant l’ouverture du redressement judiciaire de la société, était
opposable aux organes de la procédure car il aurait été rendu à l’encontre de la société alors
représentée par ses représentants légaux ; qu’ainsi, en méconnaissant la date de prise
d’effet du jugement d’ouverture de la procédure qui faisait que le 9 juillet 1991 la société
n’était pas valablement représentée par ses représentants légaux, les juges ont violé l’article
31 de la loi du 25 janvier 1985 et l’article 14, alinéa 2, du décret du 27 décembre 1985 ;
Mais attendu qu’après avoir relevé que les débats précédant le jugement rendu le 9 juillet
1991 avaient eu lieu le 4 juin 1991 et qu’à cette dernière date l’ouverture de la procédure de
redressement judiciaire de la société n'était pas encore intervenue, c’est à bon droit que la
cour d'appel a décidé que ce jugement, régulièrement rendu contre la société, était
opposable aux organes de son redressement judiciaire ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l’article 33 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que, pour accueillir la demande des époux X... et condamner la société aujourd’hui
représentée par son administrateur judiciaire à démolir et à enlever à ses frais la
construction édifiée par elle, l’arrêt retient, par motifs adoptés, que l’obligation de remise en
état inhérente à la résolution du contrat s’analyse en une prestation en nature de démolition
et retrait des ouvrages ouvrages édifiés, cette restitution de terrain en son état initial ne
tombant pas sous le coup de l’article 47 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que toute obligation de faire se résout en dommages-
intérêts en cas d’inexécution par le débiteur et que, sous couvert de condamnation de la
société à procéder à la démolition et à l’enlèvement d’une construction, la demande des
époux X... ne tendait qu'au paiement d’une somme d'argent pour une cause antérieure à
l’ouverture de la procédure collective, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a confirmé le jugement du 8 décembre 1992
ayant condamné la société Decock Delmotte, aujourd’hui représentée par son
administrateur judiciaire, à démolir et à enlever à ses frais la construction en cause édifiée
par elle, l’arrêt rendu le 3 juin 1994, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient
avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la d’appel d’Amiens.
Cass. Com., 6 juin 1995 (extrait)
Vu l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que pour confirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle avait enjoint à la société
FVMC d’exécuter son obligation de souscrire un cautionnement, l'arrêt retient que l'action
des consorts X... tendait « à obtenir l'exécution d'une obligation de faire et non pas le
paiement d'une créance » et que, dès lors, « sa poursuite ou sa recevabilité ne sauraient être
affectées par l'ouverture d'une procédure collective » ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'action exercée par les consorts X... tendait, sous
couvert de l'exécution d'une obligation de faire, à obtenir de la société FVMC la souscription
d'un engagement de payer une somme d'argent au profit de la banque, la cour d'appel a
violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen en
tant qu'il est présenté par la société FVMC :
CASSE ET ANNULE
Cass. Com., 26 octobre 1999 (extrait)
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que la résiliation étant demandée pour inexécution d'une

28
obligation de faire et non d’une obligation de payer une somme d’argent, l’instance ne
pouvait être arrêtée, ni par l’ouverture de la procédure collective de la société CSC, ni par
l’exercice de la faculté ouverte à l’administrateur d'exiger l’exécution des contrats en cours,
la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 26 septembre 1996, entre
les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties
dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant
la cour d’appel d’Amiens.

29
Travaux dirigés : Entreprises en difficulté
Cours : …
TD : …

SEANCE n° 9

Thème : l’extension des procédures

Objet de l’exercice : Commentaire

Commentez l’article 118 de l’AUPC :

« Les tiers, créancier ou non, qui, par leurs agissements


fautifs, ont contribué à retarder la cessation des paiements
ou à diminuer l’actif ou à aggraver le passif du débiteur
peuvent être condamnés à réparer le préjudice subi par la
masse sur action du syndic agissant dans l’intérêt collectif
des créanciers »

30
Travaux dirigés : Entreprises en difficulté
Cours : …
TD : …

SEANCE n° 10

Thème : Liquidation des biens : distribution des deniers

Objet de l’exercice : Résoudre de manière détaillée et


argumentée le cas pratique suivant

Bibliographie : A consulter

- Filiga Michel SAWADOGO, OHADA – Droit des entreprises en difficulté ;


coll. Droit uniforme africain, éd. Bruylant ;
- Martin DIDIER, « Le droit des entreprises en difficulté, les lois des 1 er
mars 1984 et 25 janvier 1985 », in La revue Banque Editeur, 1985, n°
29 : le diagnostic d’entreprise, critère de responsabilité judiciaire, RTD
Com. 1979, p. 18, n° 2.
Note introductive

« Quels que soient les soins mis à prévenir, contenir et résoudre amiablement les difficultés, il
faudra encore se résoudre à organiser plus brutalement le destin de l’entreprise quand,
imperméable aux thérapeutiques douces et malgré elles, elle aura franchi le seul clinique de
la cessation des paiements. Alors s’imposera le choix entre la médecine (continuation de son
activité sous contrôle), la chirurgie (par imputation partielle ou cession globale) et
euthanasie (par liquidation judiciaire de ses biens) » a écrit M. Martin DIDIER. L’objectif de
la procédure de liquidation des biens est de réaliser les biens de l’entreprise dont la situation
est irrémédiablement compromise et désespérée et de distribuer les deniers entre les
créanciers constitués en une discipline collective. La présente séance de TD permettra d’avoir
une idée de ce qui se fait en pratique des affaires quand une entreprise est liquidée.

Cas pratique :

Le 13 septembre 2014, le tribunal de Tsévié statuant en matière commerciale a


prononcé l’ouverture d’une procédure de règlement préventif en faveur de la société
« Faladéma » SA, et il a été nommé un expert qui a pour mission de lui faire le
rapport sur la situation économique et financière de ladite société, les perspectives
de son redressement compte tenu des délais et remises consentis ou susceptibles
de l’être par les créanciers et toutes autres mesures contenues dans les
propositions du concordat préventif. Deux mois après, suite aux rapports de
l’expert, le tribunal refuse d’homologuer le concordat car il a constaté que la société
« Faladéma » SA a cessé ses paiements depuis le 30 juin 2013 et que sa situation
économique et financière est complètement obérée. Il prononce pour cela la
liquidation des biens de la société « Faladéma » SA, et Monsieur Nemoauditur est
nommé comme syndic.

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La réalisation des biens de cette société donne les résultats suivants :

- actif immobilier : 900. 000.000fcfa ;


- acte mobilier : 600.000.000fcfa.
Le montant des créances réclamé se présente comme suit :

- les créanciers hypothécaires inscrits dans le délai légal : 630.000.000fcfa ;


- les créanciers de salaires supersprivilégiés : 350.000.000fcfa ;
- Les créanciers de la masse : 40.000.000fcfa ;
- Les créanciers garantis par un gage : 30.000.000fcfa ;
- Les créanciers munis d’un privilège de « l’argent frais » : 60.000.000fcfa ;
- Les créanciers chirographaires : 330.000.000fcfa.
Monsieur Nemoauditur vient vous consulter pour que vous l’aidiez pour la
distribution des deniers provenant de la réalisation des biens de la société
« Faladéma » SA. Il vous informe, en outre, que le montant des frais de justice
engagés pour parvenir à la réalisation des biens et à la distribution elle-même du
prix s’élève à 100.000.000fcfa.

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Evaluation des connaissances
Le questionnaire à choix multiple

Le principe du QCM proposé ici : toutes les réponses peuvent être justes, toutes les
réponses peuvent être fausses, plusieurs réponses peuvent être justes ou fausses.

1- En droit positif, les expressions « procédures collectives » et « entreprises en


difficulté » sont équivalentes :
a- vrai
b- faux
2- Le concordat désigne :
a- un contrat entre le débiteur et chaque créancier
b- un contrat entre le débiteur et les créanciers
c- un contrat entre le débiteur et ses créanciers chirographaires
3- Le syndic désigne :
a- l’organe chargé de gérer l’entreprise pendant la procédure
b- l’organe chargé de défendre les créanciers au cours de la procédure
c- l’organe chargé de chercher un éventuel repreneur à la fin de la procédure
4- La période suspecte est une période :
a- antérieure au jugement d’ouverture d’une procédure collective
b- postérieure au jugement d’ouverture d’une procédure collective
c- peut justifier une contravention.
5- Le rôle du juge en matière de procédure collective est :
a- gracieux
b- contentieux
c- les deux à la fois
6- Le règlement préventif désigne :
a- une procédure collective pour liquider les biens de l’entreprise
b- une procédure collective pour obtenir l’accord des créanciers
c- une procédure collective destinée à éviter la cessation des paiements
7- La procédure de rétablissement personnel est-elle une procédure collective :
a- oui
b- non
c- en partie
8- La date de la cessation des paiements ne peut être fixée expressément par le
tribunal lorsqu’il ouvre une procédure collective :
a- vrai
b- faux
9- La preuve de la cessation des paiements incombe :
a- au tribunal qui ouvre la procédure
b- à celui qui l’invoque
c- au débiteur
10- Le tribunal saisi d’une procédure de conciliation peut :
a- prononcer l’ouverture de cette procédure
b- vérifier l’absence de cessation des paiements
c- ouvrir une procédure de liquidation des biens si la situation de l’entreprise est
irrémédiablement compromise
11- Le jugement d’ouverture d’une procédure collective est :

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a- exécutoire de plein droit
b- exécutoire par provision
c- ni l’un ni l’autre
12- L’homologation de l’accord dans la procédure de conciliation est :
a- confidentielle
b- publiée
c- publiée seulement à la demande des signataires

Cas pratiques
Résolvez de manière détaillée et argumentée les cas suivants.

Marié depuis le 13 septembre 1993 sous le régime de la communauté des biens, M.


Nemoauditur exploite, à Gamégblé dans la préfecture du Zio, un fonds de commerce ayant
pour objet la vente de matériel de bureau. Son activité, qu’il a développée par un travail
acharné en refusant tout conseil, était prospère et florissante. Mais il rencontre aujourd’hui
des difficultés liées, d’une part, à l’installation, en périphérie de la ville de Gamégblé, d’une
grande enseigne dont il craint la concurrence et, d’autre part, à des conditions
d’approvisionnement défavorables. Il a obtenu du tribunal de première instance de Tsévié
l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, par un jugement du 28 septembre
2014. Ce jugement désigne un Syndic, M. Pactasunt.

De nombreuses difficultés apparaissent tout au long de cette période. Il vous appartient de


les résoudre.

1) Dans la gestion quotidienne de l’entreprise, M. Nemoauditur se montre peu prudent


lors de la conclusion de petits contrats de fourniture de biens ou de services pour les
besoins de l’entreprise. Que peut faire le syndic ?

2) Afin de trouver de nouveaux clients professionnels, M. Nemoauditur souhaite


conclure avec M. Negotium un contrat d’agent commercial stipulant des
commissions d’un montant très élevé. Il prétend passer seul ce contrat. Qu’en
pensez-vous ?

3) Récemment, M. Nemoauditur a été condamné par le tribunal de travail de Lomé à la


suite d’un licenciement d’une personne qu’il employait pour assurer la garde et la
préparation des devoirs de ses enfants. Peut-il relever appel de ce jugement ?

4) La veille de l’ouverture de la procédure, un des camions de livraison de M.


Nemoauditur a été déposé pour une réparation chez un garagiste. Le syndic réclame
la restitution du véhicule, parce qu’il est utile à la poursuite de l’activité, mais le
garagiste subordonne cette remise au paiement de toutes les factures laissées
impayées par M. Nemoauditur. Appréciez la légitimité de chacune de ces deux
prétentions.

5) Afin de trouver de la trésorerie, M. Nemoauditur, en accord avec le syndic, se


propose de vendre, d’une part, la résidence secondaire qu’il a acquise avec son
épouse quelques années après leur mariage et, d’autre part, un fonds de commerce
qu’il avait créé, avant de se marier, à Mikpayè Plage, mais dont l’exploitation est
depuis, assurée par son épouse. Pourront-ils mener à bien ce double projet ?

6) L’épouse de M. Nemoauditur est inquiète : elle souhaite rester à l’écart de cette


procédure de redressement judiciaire. Pouvez-vous la rassurer ?

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Cas pratiques
Résolvez de manière détaillée et argumentée les cas suivants.

Cas n° 1

MM. PACTA, SUNT et SERVANDA ont créé une entité de transformation des produits
agricoles en jus de fruits : « LES TROIBE » S.A.R.L. Cette société n’a pas été immatriculée et
a fonctionné ainsi de février 2009 à juin 2013. Dès le début de l’année 2013, elle était déjà
confrontée à des difficultés financières : refus d’honorer ses dettes, prorogation des délais de
paiement, émission des traitres de complaisance, etc.

Le tribunal saisi pour ouvrir la procédure collective contre la société « LES TROIBE » avait
décidé en août 2013 qu’il n’y avait pas de cessation des paiements. A l’issue de ce procès,
les trois associés avaient décidé de procéder à l’immatriculation de la société en septembre
2013 et de continuer la production en augmentant le capital. Ainsi deux nouveaux associés
firent leur entrée dans la société.

Celle-ci va passer un contrat de fourniture avec une maison de fruits qui lui livrera quatre
(4) tonnes de mangues en juin 2014. Compte tenu de la persistance de ses difficultés, le
tribunal saisi en septembre 2014 déclarera la société en cessation des paiements.

1- Que se serait-il passé si le premier tribunal saisi avait constaté en 2013 la


cessation des paiements ?
2- Jusqu’à quand peut remonter la période suspecte après cette seconde action ?

Avant le jugement déclaratif, une action en responsabilité civile avait été intentée contre la
société à la suite d’un accident causé par un de ses préposés et malgré l’ouverture de la
procédure collective, M. PACTA, gérant a continué à passer des contrats au nom de la
société à l’insu du syndic et à verser une prime spéciale à sa secrétaire. L’assemblée
générale des associés tenue en juillet 2013 a décidé de faire une remise de dette à M.
SERVANDA, associé-débiteur et de contribuer à hauteur de 20% à l’organisation du
baptême de la fille de M. PACTA. La BICIS avait accordé à la société un prêt de 10 millions
et le syndic a passé un certain nombre de contrats (contrats de vente, d’achat, de travail)
pour les besoins de la liquidation de l’entreprise.

3- Quel est le sort de l’action en responsabilité intentée contre « TROIBE » ?


4- Quels sont les actes inopposables à la masse ? Pourquoi ?
5- Procédez à la classification des différents créanciers de la société (dans, hors et
de la masse).

Cas n° 2

Le fils de Nemoauditur, Inparicausa, mineur de 16 ans exerce un commerce de colas à


Kétao. Tombé sous le charme de la jeune Ishall, il s’est lancé dans des dépenses folles au
point d’être dans l’impossibilité de respecter ses engagements financiers. Ainsi certains
créanciers l’ont assigné en liquidation des biens devant le tribunal de Kara qui leur a donné
gain de cause. L’infortuné Inparicausa pour sa défense invoque la loi qui, selon lui, permet
au débiteur seul, de demander la déclaration de cessation des paiements.

1- Qu’en pensez-vous et que lui dites-vous ?

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Le frère aîné de Inparicausa, Meliorest, associé commandité dans une société en
commandite simple, spécialisée dans la vente de pneus de seconde main fait lui aussi l’objet
d’une action en cessation des paiements qui remonte au 2 février 2014 et cette action
aboutira à un jugement déclaratif le 13 mars 2015. Avant le prononcé du jugement,
Meliorest avait, 9 mois auparavant, manifesté sa bonne volonté de régler sa dette en
donnant en nantissement à son créancier certains de ses biens et en vendant en solde des
pneus de petite taille.

2- Quel est le sort des conventions signées par Peter ?

Cas pratiques
Résolvez de manière détaillée et argumentée les cas suivants.

Cas n° 1

La société VOLFI SA, spécialisée dans l’écoulement des produits chimiques dérivés,
rencontre des difficultés depuis la liquidation de la grande société TG CHIMIE qui était son
partenaire principal. La situation financière, telle que décrite par son dernier bilan s’illustre
comme suit : baisse des commandes et du chiffre d’affaires qui est passé de 725 millions de
F CFA à 395 millions de F CFA ; des pertes nettes de 75 millions par an pour les deux
dernières années pour un endettement de plus de 100 millions de F CFA (23 millions à
l’égard de la société Africaship ; 10 millions sur la BTCI ; 17 millions sur l’administration
des douanes ; 15 millions à l’égard de CIB informatique, etc.) ; baisse des capitaux propres
de l’ordre de 40% pour les deux dernières années. Grâce à un emprunt à la CORIS BANK de
l’ordre de 80 millions de F CFA, la société VOLFI SA maintient ses paiements alors que la
banque avait conscience que les capacités de remboursement de la société étaient loin
d’assurer le remboursement du prêt.

Parmi l’actif de la société, figurent : un fonds de commerce, 23 véhicules automobiles, deux


lettres de change endossables d’un montant respectif de 5 et 7 millions dont les échéances
sont dans les six mois, des actions au porteur d’ECOBANK, divers titres de créances.

1- La société VOLFI SA est-elle en cessation des paiements ? Argumentez.


2- Si elle devrait être recherchée, sur qui pèserait la charge de la preuve de la cessation des
paiements de la société VOLFI SA ?
3- Dans le cadre d’un concordat préventif, la société VOLFI SA serait-elle tenue de négocier
avec tous ses créanciers ? Argumentez votre réponse.
4- Dans quelle mesure le juge pourrait-il contribuer à rendre le concordat préventif sérieux
en vue de son homologation ?
5- Parmi les éléments d’actifs cités, quels sont ceux qui seront pris en compte pour
l’appréciation de l’état de cessation des paiements ?

Cas n° 2

Monsieur Tafatafoi est président d’une association de spéléologie qui rencontre des difficultés
passagères suite à une mauvaise maîtrise des dépenses au cours d’un stage organisé au
gouffre de Défalé.

La procédure de règlement préventif trouve-t-elle à s’appliquer ici ? Si oui, devant quelle


juridiction ? Si non, pourquoi ? Indiquez brièvement à Monsieur Tafatafoi les étapes de la
procédure.

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Les sujets proposés à l’épreuve orale
1- La politique de prévention des difficultés des entreprises.
2- Les droits des salariés dans les procédures collectives.
3- Le rôle du juge-commissaire dans les procédures collectives.
4- La situation du conjoint du débiteur marié sous le régime de la communauté.
des biens faisant l’objet d’une procédure collective.
5- La notion de cessation des paiements en droit OHADA.
6- Les droits du propriétaire d’un bien inclus dans une procédure collective.
7- Le sort des créances nées avant l’ouverture d’une procédure collective.
8- Le sort des créances nées après l’ouverture d’une procédure collective.
9- La cession de l’entreprise en difficulté.
10- La liquidation des biens simplifiée.
11- Le rôle du syndic.
12- La responsabilité pénale du chef d’entreprise.

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