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et maladie endocrinienne

Empreinte génomique parentale

L
e syndrome de Prader-Willi la nature et la fonction des différents du syndrome de Prader-Willi. Ainsi,
(SPW) est une maladie rare gènes. Cette région est la première cette affection survient :
(1 cas sur 20 000 à 30 000 nais- pour laquelle le phénomène d’em- – soit en raison de délétions intersti-
sances) [1] décrite la première fois preinte parentale, appelé aussi geno- tielles touchant la région 15q11-q13
en 1956. Il représente une fraction mic imprinting, a été démontré chez du chromosome 15 paternel, situation
importante des retards mentaux liés l’homme (3). Ce phénomène cor- observée dans 70 à 80 % des cas ;
à une cause génétique et est l’une des respond à un processus biochimique – soit du fait d’une disomie (hétéro- ou
principales causes d’obésité syndro- de contrôle épigénétique de l’ex- isodisomie) 15 uniparentale (DUP15)
mique. Il est aujourd’hui essentielle- pression de certains gènes qui sont maternelle, situation résultant d’une
ment pris en charge en pédiatrie dit “soumis à l’empreinte géno- non-disjonction méiotique mater-
et est responsable de handicaps phy- mique”. Ces gènes ont comme nelle suivie par la perte mitotique
siques, psychologiques et sociaux caractéristique essentielle de subir, (post-zygotique) de l’unique chromo-
d’une particulière gravité (2). au cours de la gamétogenèse et via some 15 paternel et observée dans
Le diagnostic est évoqué sur des la méthylation de l’ADN, un “mar- 20 à 30 % des cas ;
éléments cliniques et confirmé par quage”, qui est différent selon qu’il – soit par une mutation du centre
l’analyse génétique, réalisée aujour- s’effectue dans la lignée germinale d’empreinte (1 à 2 %).
d’hui en routine dans la plupart des mâle ou femelle. Cela conduit, dans Ces anomalies sont souvent acciden-
centres de génétique. les cellules somatiques, à des diffé- telles et sporadiques. Les cas fami-
rences d’expression des deux allèles liaux sont très rares, en dehors du
paternel et maternel de ces gènes. cadre lié à une mutation d’empreinte,
Le fait que certains gènes de la où le risque de récurrence est élevé.
Génétique région 15q11-q13 soient, à travers La plupart des délétions responsables
ce phénomène d’empreinte, naturel- du syndrome de Prader-Willi sont
Le syndrome de Prader-Willi est un lement inactivés sur le chromo- détectables en cytogénétique et affec-
syndrome de gènes contigus, lié à la some 15 d’origine maternelle (tous tent l’ensemble des gènes soumis à
région chromosomique 15q11-q13. ces gènes ne sont pas connus à ce l’empreinte. Ces gènes sont regrou-
La figure 1 représente la région jour) explique que deux principaux pés sur une distance de deux millions
15q11-q13 avec des précisions sur mécanismes puissent être à l’origine de paires de bases (2Mb), ce qui

Gènes non soumis à l’empreinte


BP1-BP2 GABR 3 récepteurs GABA impliqués
NIPA1 5 dans l’apprentissage et les fonctions cognitives
3
NIPA2
CYFIPI P(OCA2) gène de l’albuminisme occulo-cutané
GCP5 HERC2 protéine impliquée dans le trafic et la dégradation intracellulaires

SPW SA
-AS
38A

38B

GA BA5
3
BG
F2
ND EL2

HB I-436

GA B3

2)
SNURF-
MA N3

10C
N

2
NIP A1

E3A

ATP 3A

C2
GC IPI

OR

CA
II-1

II-4

II-8

II-5

II-4
CYFA2

BR
BR
BR
RP
P5

G
R

IPW

HER

cen tel
NIP

I
C15

P(O
MK

SN

HB

HB

HB

HB

HB

UB

UB

GA

BP1 BP2 BP3

IC Gènes sno ARN


2 Mpb

Gènes soumis à l’empreinte maternelle Gènes soumis à l’empreinte


MKRN3 : coderait pour une ribonucléoprotéine paternelle
MAGEL2 : protéine nucléaire exprimée dans le cerveau et l’hypothalamus UBE3A
NDN : protéine nucléaire et cytoplasmique impliquée dans le contrôle ATP10C
de la croissance neuronale, anti-apoptotique dans les motoneurones
Complexe IC/SNURF-SNRPN-SnoARN

Figure 1. La région 15q11-q13.

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représente environ la moitié de la dont l’implication dans le syndrome séquence de 18 nucléotides corres-
région 15q11-q13. Dans environ 5 % d’Angelman est bien connue. pondant à la protéine 5HT2-C. Or,
des cas de syndrome de Prader-Willi, D’autres sites de cassure, notamment cette protéine représente un des
il s’agit de microdélétions indétec- BP4 et BP5, ont été décrits, mais ces récepteurs sérotoninergiques jouant
tables en cytogénétique qui affectent sites semblent beaucoup plus rare- un rôle dans le contrôle de la satiété
un domaine appelé centre de l’em- ment impliqués. Enfin, il faut égale- et de la dépression, deux aspects
preinte. Ce domaine joue un rôle cru- ment signaler que ces sites peuvent importants du SPW. Très récem-
cial dans le contrôle au niveau des être à l’origine d’autres remanie- ment, on a pu montrer, grâce aux
gènes cibles de la région 15q11-q13 ments plus rares à type de dupli- animaux transgéniques, que la région
du mécanisme de l’empreinte. cations, voire de triplications, dont SPW stimulait l’expression d’une
L’analyse moléculaire fine de ces certains seraient à l’origine de région chromosomique spécifique
délétions en 15q11-q13 a permis de formes d’autisme. Ainsi, les patients contenant en particulier 8 gènes (4).
cartographier trois principaux sites qui présentent une délétion peuvent
de cassure, baptisés BP1 (pour Break être classés en trois groupes en fonc-
Point 1) pour le plus centromérique, tion de l’étendue de la délétion (de la
BP2, et BP3 pour le plus télomé- plus grande aux plus petites) : délé- Clinique
rique. Ces sites sont constitués de tion de type 1, délétion de type 2 et
séquences dupliquées, les duplicons autres délétions. Le tableau clinique évolue en plu-
ERC2-DUP, qui sont à l’origine du Parmi les gènes soumis à l’em- sieurs phases.
remaniement chromosomique. Ces preinte, le gène necdyne (NDN) À la naissance, ces enfants présen-
trois sites de cassure provoquent code une protéine impliquée dans le tent une hypotonie particulièrement
deux classes de délétions communé- contrôle de l’apoptose des motoneu- sévère nécessitant le plus souvent
ment appelées type 1 lorsqu’elles rones. Son inactivation conduit à des une hospitalisation prolongée en
s’étendent de BP1 à BP3 et type 2 animaux non viables par déficit res- néonatologie variant de quelques
lorsqu’elles sont comprises entre piratoire sévère. Chez les survivants, semaines à plusieurs mois. Cette
BP2 et BP3 (la délétion de type 1, des anomalies hypothalamiques ont hypotonie s’améliore partiellement,
plus étendue, englobe donc la délé- été décrites, avec en particulier une mais persiste toute la vie et explique
tion de type 2). À ce jour, 12 gènes diminution des neurones à GnRH. en partie :
soumis à l’empreinte, dont 6 codant Les souris se grattent intensément et – le retard d’acquisition de la
des polypeptides, ont été caractérisés ont des troubles de l’apprentissage. marche (acquise en moyenne à
entre BP2 et BP3, tandis que, entre Les animaux dont les gènes 24 mois), les complications ortho-
BP1 et BP2, il a été identifié 4 gènes SNURF-SNRP ont été inactivés sont pédiques (à savoir luxations de
qui sont, eux, exprimés indifférem- viables mais n’ont pas été soumis à hanche) ;
ment par les allèles maternels et des études comportementales. Les – les scolioses sévères, qui sont
paternels. Deux de ces gènes NIPA1 grandes délétions allant de SNURF à environ cinq fois plus fréquentes
et NIPA2 codent des protéines de la UBE3A entraînent chez la souris une que dans la population générale ;
famille TM9SF à neuf domaines létalité périnatale importante et un – les signes respiratoires et digestifs,
transmembranaires localisées dans retard statural. Les modèles animaux incluant des troubles précoces de la
les endosomes et qui ont une fonc- obtenus par création d’une disomie succion et de la déglutition, une
tion de ligand pour des agonistes monoparentale ont un phénotype qui dysarthrie, ainsi qu’une faiblesse
bêta-adrénergiques (impliqués dans reproduit la première phase du des muscles respiratoires à l’origine
la relaxation colique, le chimiotac- modèle humain, associant une hypo- d’infections respiratoires récidi-
tisme des éosinophiles, la phagocy- tonie majeure, des difficultés respi- vantes chez le jeune enfant.
tose et l’adhésion cellulaires). Le ratoires et des difficultés postnatales Il existe également un syndrome
gène CYF1P1 code une protéine qui de prise de poids. Mis à part les dysmorphique discret mais
s’associe à la protéine FMRP (impli- gènes NDN et MAGEL2, il y a peu constant, au niveau de la face
quée dans le syndrome de l’X fragile) de données sur l’expression et la (figure 2), associé à de petites extré-
et intervient dans le développement fonction des autres gènes de la mités (mains et pieds, acromicrie).
neuronal. Le quatrième gène, GCP5, région. Les ARNsno, petits ARN C’est à cet âge que le diagnostic
code une protéine entrant dans la for- nucléolaires, semblent fortement doit être fait, devant l’hypotonie
mation du complexe tubuline. Pour impliqués dans la physiopathologie. sévère et constante qui explique que
10 de ces 12 gènes, l’empreinte est Ils sont exprimés au niveau cérébral 90 % des nouveau-nés soient hospi-
maternelle, jouant un rôle pathogé- et agissent en reconnaissant et en talisés en néonatologie et qu’ils
nique capital dans le SPW, tandis modifiant spécifiquement des ARN soient “gavés”, car la succion est
qu’elle est paternelle pour les deux cellulaires. À titre d’exemple, les longue et difficile. En effet, si le dia-
autres gènes, dont le gène UBE3A, ARNsno HBII-52 reconnaissent une gnostic est fait très précocement et

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L’articulation est ainsi souvent
imprécise, avec des habiletés oro-
motrices qui sont parfois sévère-
ment altérées (mouvements de la
langue, des lèvres, etc.). Par
Front étroit ailleurs, la hauteur de la voix est
plus élevée que la normale, avec
Yeux en amande une très fréquente hypernasalité et
Lèvre de faibles capacités aérodyna-
supérieure fine miques (temps de phonation très
courts). Ainsi, les individus PW ont
Bouche à la fois des difficultés de langage
en chapeau expressif et réceptif (les premières
de gendarme
sont plus importantes), mais il
existe, comme pour les autres traits,
une grande variabilité interindi-
Figure 2. Dysmorphie faciale.
viduelle dans la gravité et le type
des déficits de langage. Certains
si l’on met en place une prise en par emploi d’un traitement par ana- individus peuvent ne jamais
charge adéquate, on peut prévenir logues de la somatostatine n’a pas apprendre à s’exprimer et les autres
en particulier l’obésité et ses com- entraîné de modifications significa- peuvent développer des compé-
plications. Toute hypotonie néona- tives du comportement alimentaire. tences normales.
tale inexpliquée doit faire évoquer D’autres anomalies endocriniennes, Il existe, dès l’enfance, des troubles
un SPW. en relation avec des anomalies du comportement variés. Non spéci-
Après cette phase initiale, des hypothalamo-hypophysaires, font fiques par leur type, ils sont évoca-
signes plus évocateurs apparaissent, partie du tableau. Elles associent un teurs par leur intensité et leur mode
avec la constitution d’une obésité retard statural, par déficit en hor- de déclenchement. Il s’agit de crises
sévère d’installation précoce, dès mone de croissance dans 50 à brutales de colère incontrôlable
l’âge de 2 ans, due à une hyper- 100 % des cas (6) et un développe- survenant souvent à l’occasion de
phagie et à une absence de satiété ment pubertaire incomplet en rela- frustrations mineures et pouvant
qui s’aggrave rapidement et tion avec un hypogonadisme par- aboutir à des violences physiques
explique une grande partie de la tiel. On a rapporté de longue date un contre l’entourage ou à la destruc-
morbidité et de la mortalité de ces déficit en neurones sécrétant l’ocy- tion d’objets environnants, des
patients (diabète, complications tocine. Il existe aussi d’autres comportements obsessionnels avec
respiratoires et cardiovasculaires) atteintes hormonales plus subtiles, répétitions verbales, et une tendance
(5). La recherche constante de nour- telle une pubarche prématurée, qui dépressive. Comme pour les autres
riture est probablement liée à un est beaucoup plus fréquente que atteintes, il existe une extrême
défaut du système complexe de dans la population générale, ou une variabilité du tableau psychiatrique
régulation de la satiété, mais le hypothyroïdie fruste, qui est retrou- clinique.
mécanisme précis n’en est à ce jour vée dans environ 30 % des cas et Les tableaux psychiatriques de
pas connu. Des taux élevés (trois qui justifie l’instauration d’un trai- type névrose ou psychose sont rares
fois la normale) de ghréline – hor- tement substitutif. chez l’enfant. Les tableaux psycho-
mone sécrétée par l’estomac, et Le retard mental, rarement majeur, tiques sont cependant extrêmement
contrôlant à la fois la prise alimen- est extrêmement variable d’un fréquents chez les patients adultes
taire et la sécrétion d’hormone enfant à l’autre. Il est associé à des ayant une disomie maternelle et ne
de croissance – ont été mis en évi- difficultés d’apprentissage (7) sont pas décrits chez les autres
dence chez ces patients quels que ainsi qu’à des troubles du langage, patients.
soient leur âge et leur corpulence. À et de la parole, majorés par des Il s’agit donc d’une affection très
l’inverse, des taux bas de ghréline troubles psychologiques et compor- hétérogène, à la fois sur le plan cli-
sont retrouvés dans les obésités tementaux lorsqu’ils sont présents. nique et génétique. Il existe aujour-
communes ou d’autres obésités De façon globale, on rapporte des d’hui un consensus parmi les
génétiques (déficit en leptine, muta- retards d’acquisition du langage et experts sur le fait que le diagnostic
tions du gène MC4R). Le méca- de la parole. Les compétences des de la maladie est clinique (critères
nisme physiopathologique n’en est patients atteints sont inférieures à ce de Holm de 1993, revus en 2001)
pas élucidé aujourd’hui. La diminu- que l’on pourrait attendre compte (8) (tableau I), et que sa confirma-
tion des taux de ghréline circulante tenu de leur niveau intellectuel. tion est génétique.

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Le diagnostic est évoqué sur des Prise en charge nution de la masse grasse, ainsi
signes cliniques très différents en que sur l’augmentation de la masse
fonction de l’âge : hypotonie en musculaire. Ce dernier effet est
période néonatale, obésité avec En raison de la diversité des important chez ces enfants, car il
retard statural pendant l’enfance et atteintes et des complications du réduit leur hypotonie et favorise la
à l’adolescence, troubles du com- SPW, les experts soulignent la pratique de l’activité physique. Ce
portement évocateurs. nécessité d’une prise en charge traitement doit être commencé
précoce, globale et multidiscipli- avant l’âge de 12 ans et être pres-
naire associée au traitement par crit dans le cadre d’une prise en
Tableau I. Critères de Holm modifiés* (2). hormone de croissance. charge multidisciplinaire globale
La précocité du diagnostic et de la associant :
✔ Critères majeurs (1 point) prise en charge est reconnue comme – suivi diététique ;
– Hypotonie néonatale un élément important ; elle est a – kinésithérapie ;
– Hypotrophie/troubles de la succion priori associée à une meilleure évo- – pratique régulière d’une activité
– Gain de poids rapide lution des enfants, en particulier sur physique et sportive ;
après l’âge d’un an le plan pondéral. Or, la rareté de la – prise en charge psychologique
– Dysmorphie faciale caractéristique maladie et la non-spécificité du et/ou psychiatrique.
– Hypogonadisme tableau clinique de 0 à 3 ans sont La kinésithérapie et la prise en
– Micropénis, cryptorchidie responsables du défaut de diagnos- charge orthophonique et psychomo-
– Retard pubertaire tic précoce et, par conséquent, d’un trice, avec une implication familiale
– Hyperphagie, recherche agressive défaut de prévention de certaines importante, sont nécessaires dès les
de nourriture complications (obésité, troubles premiers mois de vie. Une scolari-
– Retard du développement d’apprentissage et du langage). sation à l’âge normal en maternelle
psychomoteur Le diagnostic précoce permet éga- et en primaire est souvent possible,
lement : et une évaluation des fonctions
✔ Critères mineurs (1/2 point) – de diminuer la phase d’errance cognitives doit être réalisée si
– Diminution des mouvements fœtaux diagnostique, angoissante et très nécessaire pour l’orientation et l’in-
in utero mal vécue par les familles ; sertion scolaires. Ce sont, le plus
– Troubles du comportement – de mettre en place une guidance souvent, les troubles du comporte-
– Perturbation du sommeil – apnées parentale qui améliore l’implication ment qui empêchent la scolarisation
– Retard de croissance de la famille et de proposer, si normale. C’est sur cet aspect précis
– Hypopigmentation nécessaire, un soutien psycholo- que les progrès de dépistage et de
– Acromicrie : mains étroites gique. prise en charge sont à réaliser.
avec ongles caractéristiques La possibilité de traiter ces enfants Aujourd’hui, la plupart des enfants
– Strabisme/myopie par hormone de croissance a mobi- peuvent être scolarisé en maternelle
– Salive visqueuse lisé les pédiatres et optimisé de puis en primaire. Certains enfants
– Dysarthrie façon considérable la prise en accèdent au collège, mais la pour-
– Grattage cutané charge. Le remboursement du trai- suite de la scolarité au-delà de la
tement par hormone de croissance classe de 5e est plus rare. Excep-
✔ Accessoirement (0 point)
pour les enfants atteints d’un SPW tionnellement, des patients attei-
– Seuil élevé à la douleur
a été obtenu en France en 2002 sur gnent le baccalauréat et poursuivent
– Irritabilité thermique
la base de l’AMM européenne de des études universitaires.
– Scoliose – cyphose 2000. À l’inverse de l’AMM amé- La prise en charge doit associer
– Adrénarche prématurée ricaine, qui vise simplement à trai- des compétences différentes en
– Ostéoporose ter les enfants SPW pour améliorer fonction des enfants, de leur âge et
leur croissance, l’indication euro- des caractéristiques familiales.
Points requis pour le diagnostic péenne a aussi pour objectif Nous ne disposons pas de données
de syndrome de Prader-Willi : d’améliorer leur composition cor- sur de grandes cohortes suivies
• 4 points issus des critères majeurs chez porelle et, en particulier, de réduire prospectivement qui permettraient
les enfants âgés de 3 ans et moins ; l’excès de masse grasse. Il s’agit de décrire de façon précise l’his-
• 8 points chez les enfants âgés de plus de la première indication à visée toire de la maladie. C’est un des
de 3 ans avec au moins 5 points dans les
métabolique de l’hormone de objectifs de la mise en place du
critères majeurs
croissance en pédiatrie. Toutes les centre de référence pour maladies
* après classement des signes cliniques et suppression
études confirment les effets posi- rares dans le cadre de la loi de
des données génétiques. tifs du traitement sur la croissance, santé publique. Ce centre de réfé-
la prévention de l’obésité, la dimi- rence pour le SPW a été labellisé

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en novembre 2004, et nous en par hormone de croissance chez ces relation forte entre le génotype et
assurons la coordination. Il associe patients adultes a été rapporté certaines caractéristiques phénoty-
des compétences très diverses comme très positif dans des études piques. En ce qui concerne le retard
(tableau II). Les données concer- pilotes, et les résultats sont large- statural et l’obésité, il n’y a pas de
nant les adultes atteints de cette ment superposables à ceux établis corrélation qui ait été mise en évi-
affection sont rares, car ceux qui chez l’enfant, l’effet sur la crois- dence dans la littérature. Les don-
ont été suivis pendant l’enfance sance excepté. Une prise en charge nées les plus abondantes concernent
sont souvent perdus de vue et le par un spécialiste d’endocrinologie- le développement cognitif et les
diagnostic n’a jamais été établi diabétologie est absolument néces- troubles psychiatriques.
chez la plupart de ceux qui sont saire. Les troubles du comporte- Une étude récente (10) concernant
adultes aujourd’hui. Il y a donc, là ment semblent s’améliorer avec des adolescents et de jeunes adultes
aussi, une urgence et un besoin l’âge, après une acmé à l’adoles- atteints d’un SPW a mis en évidence
majeur d’optimisation de la transi- cence. Ces patients ne sont auto- des différences phénotypiques en
tion pédiatrie-médecine adulte et nomes que de manière exception- fonction des anomalies génétiques
de la prise en charge (9). nelle. Ils peuvent travailler en CAT, en étudiant l’influence du type de la
À l’âge adulte, la morbidité est mais, le plus souvent, ils sont dans délétion (forme longue 1 ou courte
essentiellement liée à l’obésité, ces centres ou dans leur famille. Un 2). Les distinctions trouvées entre
avec des complications respira- état dépressif apparaît fréquemment ces trois types génétiques – les deux
toires, cardiaques, métaboliques pendant l’adolescence, les patients délétions et les disomies – concer-
(diabète de type 2), rénales, infec- prenant conscience de leur diffé- nent les problèmes comportemen-
tieuses sur les lésions de grattage, rence et de leur isolement. De ce taux (essentiellement la présence de
et psychiatriques (dans le cadre des point de vue, l’existence de lieux de comportements adaptatifs), psycho-
disomies, mais pas uniquement). rencontre semble avoir un effet logiques (l’intensité des obsessions
Ces patients mal substitués sur le bénéfique. et compulsions) et cognitifs (les pro-
plan hormonal ont une ostéoporose cessus d’intégration visuomotrice,
majeure. Quelques cas exception- les performances en lecture et en
nels de grossesse chez des femmes mathématiques).
SPW ont été publiés. Le traitement Relations Cette première étude de corrélation,
génotype-phénotype avec deux grands types de délétions
(sous-groupes 1 et 2), a permis de
Tableau II. Compétences nécessaires dans mettre en évidence, pour les sujets
la prise en charge. Toutes les atteintes présentes dans le ayant les délétions les plus étendues
cadre du SPW sont caractérisées par (sous-groupe 1), un comportement
Équipe pluridisciplinaire une extrême variabilité chez un compulsif significativement plus
du centre de référence SPW
même individu en fonction de son marqué et une altération plus pro-
Pédiatre endocrinologue : âge et de son environnement, mais fonde de la perception visuelle. Les
coordonnateur médical aussi d’un individu à l’autre. Il patients chez lesquels des délétions
Psychologue : semble que cette hétérogénéité inter- plus courtes ont été identifiées (sous-
coordonnateur paramédical individuelle puisse être en grande groupe 2) avaient des phénotypes
Endocrinologue gynécologue partie expliquée par la forme géné- plus proches de ceux décrits dans le
(spécialiste adulte) tique de l’affection (disomie ou groupe des disomies uniparentales
ORL (enfant), phoniatre délétion). Il a été initialement mon- maternelles. Les auteurs ont suggéré
Pneumologue tré que les phénotypes les plus que ces différences pouvaient être
typiques étaient ceux qui étaient liés liées à une haplo-insuffisance des
Spécialiste du sommeil
aux délétions 15q13-q11 paternelles. quatre gènes localisés entre les sites
Neuropédiatre Comparativement, les phénotypes BP1 et BP2 et qui sont donc délétés
Psychiatre associés aux disomies uniparentales uniquement dans le sous-groupe 1. Il
Orthopédiste maternelles comportent des caracté- s’agit là d’une première étude réali-
Généticien ristiques physiques atténuées avec, sée sur de petites cohortes (moins de
Dentiste notamment, une absence d’hypopig- 15 patients pour chaque sous-
mentation et des performances groupe), et la méthodologie utilisée
Chirurgien viscéral, urologue
cognitives globalement meilleures. pour le diagnostic moléculaire repose
Centre du langage : médecin, Il n’y a pas aujourd’hui de consen- sur l’analyse d’un nombre très limité
orthophoniste, psychomotricien sus strict sur l’existence d’une cor- de marqueurs microsatellites.
Diététicien rélation génotype-phénotype, mais À la lumière des données récentes
il existe des données étayant une publiées dans la littérature, il semble

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que les anomalies du comportement tion de la satiété. C’est un modèle à 2. Goldstone AP. Prader-Willi syndrome:
advances in genetics, pathophysiology and treat-
et les troubles cognitifs des enfants et la fois de syndrome hypothalamique ment. Trends Endocrinol Metab 2004;15:12-20.
adolescents atteints d’un SPW soient et de pathologie liée à l’empreinte 3. Nicolls RD, Knoll JH, Butler MG et al. Gene-
corrélés à l’altération génétique génomique. C’est aussi un modèle tic imprinting suggested by maternal hetero-
(délétion, disomie, type de délétion). pour l’étude de l’effet métabolique disomy in nondeletion Prader-Willi syndrome.
Si ces données étaient confirmées, de l’hormone de croissance chez Nature 1989;342:281-5.
4. Stefan M, Portis T, Longnecker R et al. A nonim-
elles apporteraient un éclairage nou- l’enfant. C’est à la fois un modèle printed Prader-Willi Syndrome (PWS)-region gene
veau sur la carte fonctionnelle de la physiopathologique des troubles du regulates a different chromosomal domain in trans
région 15q13-q11 et sur certains langage, de la mémoire et du com- but the imprinted PWS loci do not alter genome-
mécanismes étiopathogéniques. Cela portement et un modèle d’étude des wide mRNA levels. Genomics 2005;85:630-40.
permettrait de cibler les interventions troubles du développement cérébral 5. Schrander-Stumpel CT, Curfs LM, Sastrowijoto
P et al. Prader-Willi syndrome: causes of death in
et les prises en charge en fonction d’origine génétique. Ces patients et an international series of 27 cases. Am J Med
des besoins spécifiques de chaque leur famille, regroupés solidaire- Genet 2004;124A:333-8.
type géno-phénotypique. ment en associations nationales et 6. Pia Burman E, Ritzén M, Lindgren AC. Endo-
Une telle démarche devrait notam- mondiale, attendent beaucoup de crine dysfunction in Prader-Willi syndrome: a
review with special reference to GH. Endocr Rev
ment permettre d’améliorer l’inser- l’organisation de la prise en charge 2001;22:787-99.
tion scolaire et professionnelle de et de la recherche médicale, espé- 7. Whittington J, Holland T. Prader-Willi syn-
ces patients, leur qualité de vie et rant que celles-ci sauront leur drome: development and manifestations. Cam-
celle de leur famille. apporter une amélioration de leur bridge: Cambridge University Press, 2004.
qualité de vie. ■ 8. Holm VA, Cassidy SB, Butler MG et al. Prader-
Willi Syndrome : consensus diagnostic criteria.
Pediatrics 1993;91:398-401.
9. Tauber M. Syndrome de Prader-Willi : mise au
Conclusion point sur le traitement par hormone de croissance.
Références Actualités en endocrinologie. Paris: Elsevier,
Le SPW est un modèle patholo- 2001;167-82.
gique à différents niveaux. C’est un 1. Vogels A, Van Den Ende J, Keymolen K et al. 10. Butler MG, Bittel DC, Kibiryeva N et al.
Minimum prevalence, birth incidence and cause Behavioral differences among subjects with Prader-
modèle d’obésité génétique asso- of death for Prader-Willi syndrome in Flanders. Willi syndrome and type I or type II deletion and
ciée à des anomalies de la régula- Eur J Hum Genet 2004;12:238-40. maternal disomy. Pediatrics 2004;113:565-73.

Auto-test
A. Le diagnostic de SPW peut être fait devant :
1. une hypotonie néonatale
2. une obésité à début précoce
3. des troubles du comportement
4. une surdité
5. une atteinte rénale
B. Le traitement par hormone de croissance est indiqué aujourd’hui :
1. chez l’enfant
2. chez l’adulte
3. uniquement pour corriger les troubles de la croissance
4. pour prévenir l’obésité
5. associé à une prise en charge globale
C. Vous évoquez le diagnostic sur des éléments cliniques. Comment le confirmer dans un premier temps :
1. caryotype standard sur leucocytes (sang)
2. recherche d’une anomalie du profil de méthylation chez l’enfant
3. caryotype avec FISH (fluorescence)
4. recherche d’une anomalie du profil de méthylation chez les parents A. 1-2-3. B. 1-4-5. C. 2.
5. caryotype sur les fibroblastes cutanés

Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 1, janvier/février 2006 15

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