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Toxoplasmose congénitale
F. Kieffer, P. Thulliez, E. Yi-Gallimard, A. Tasseau, S. Romand, F. Jacquemard

La toxoplasmose congénitale résulte d’une transmission verticale de la mère au fœtus du parasite


Toxoplasma gondii après une primo-infection maternelle. Le nombre de nouveaux cas de toxoplasmose
congénitale est estimé à 700 par an en France, soit un taux de 1 pour 1 000 naissances vivantes. Le
risque de contamination fœtale est d’autant plus élevé que le terme est avancé au moment de l’infection
maternelle. À l’inverse, le risque que l’infection fœtale soit sévère décroît avec le terme ; les infections du
troisième trimestre sont le plus souvent asymptomatiques à la naissance. Devant une séroconversion
maternelle, un traitement par spiramycine est débuté pour réduire le risque de transmission
maternofœtale. Le diagnostic biologique d’une infection fœtale repose sur la polymerase chain reaction
sur le liquide amniotique. Devant un diagnostic anténatal positif, un traitement associant de la
sulfadiazine ou de la sulfadoxine et de la pyriméthamine est donné en continu jusqu’à l’accouchement ;
dans les formes sévères, une interruption de la grossesse peut être effectuée. Le traitement postnatal des
infections congénitales prouvées associe en continu un sulfamide et de la pyriméthamine. Il n’élimine pas
le risque de survenue d’une choriorétinite après un délai de plusieurs mois ou années, rendant la
surveillance ophtalmologique systématique indispensable jusqu’à l’âge adulte.
© 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Primo-infection maternelle ; Prévention ; Calcifications cérébrales ; Choriorétinite ;


Pyriméthamine ; Sulfamides

Plan ophtalmologiques de sévérité variable. En raison de son inci-


dence élevée en France, elle fait l’objet d’un programme
national de dépistage chez la femme enceinte.
¶ Introduction 1
¶ Agent pathogène 1
Tachyzoïtes 1 ■ Agent pathogène [1]

Kystes 1
Toxoplasma (T.) gondii est un parasite protozoaire, c’est-à-dire
Oocystes 2
un organisme unicellulaire devant pénétrer dans un autre
¶ Épidémiologie 2 .
organisme vivant pour se reproduire. Il a trois formes évoluti-
¶ Prévention de l’infection 2 ves : tachyzoïtes, bradyzoïtes (contenus dans des kystes tissulai-
Prévention primaire et secondaire 2 res) et oocystes.
Risques et conséquences d’une infection fœtale 2
¶ Diagnostic anténatal 2 Tachyzoïtes
Diagnostic de l’infection maternelle 2
Diagnostic de l’infection fœtale 2 Ils ont une forme d’arc et mesurent 2 à 4 µm de large pour 4
à 8 µm de long. Il s’agit de la forme activement réplicative
¶ Traitement anténatal 3
intracellulaire aboutissant à la mort de la cellule hôte avec une
¶ Diagnostic postnatal 3 invasion rapide des cellules voisines. Ce sont les tachyzoïtes qui
Diagnostic clinique et imagerie 3 sont à l’origine des manifestations cliniques de la toxoplasmose.
Diagnostic biologique 3
Infection congénitale non prouvée à la naissance 3
Infection congénitale prouvée 4 Kystes
¶ Conclusion 6 Ils sont l’aboutissement d’une série de multiplications
asexuées de tachyzoïtes. Chacun mesure 50 à 200 µm, est
entouré d’une membrane épaisse et peut contenir jusqu’à
plusieurs milliers de bradyzoïtes morphologiquement identiques
■ Introduction mais fonctionnellement différents des tachyzoïtes. Les bra-
dyzoïtes restent vivants pendant des années et peuvent se
La toxoplasmose congénitale résulte d’une transmission retransformer en tachyzoïtes, expliquant les manifestations
verticale de la mère au fœtus après une primo-infection mater- tardives des toxoplasmoses congénitales ou les recrudescences
nelle. Elle peut être à l’origine de lésions neurologiques et des infections des patients immunodéprimés. Les kystes sont

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présents dans le cerveau et les muscles et sont résistants à Tableau 1.


l’acide chlorhydrique gastrique, rendant possible la contamina- Risque de transmission maternofœtale et d’infection symptomatique en
tion à partir de viande peu cuite. fonction du terme lors de l’infection maternelle [17].
Terme lors Taux de transmission Risque d’infection
Oocystes de l’infection maternofœtale* symptomatique avant l’âge
Ils sont issus d’une multiplication sexuée qui n’intervient que maternelle de 3 ans*
dans l’intestin des chats. Les oocystes peuvent rester infectants 13 SA 6 % (3-9) 61 % (34-85)
pendant plusieurs années dans le sol et sont à l’origine de 26 SA 40 % (33-47) 25 % (18-33)
contamination humaine par ingestion de légumes souillés. 36 SA 72 % (60-81) 9 % (4-17)
Trois génotypes principaux de T. gondii ont été isolés (types
I, II et III). Le type II représente plus de 80 % des souches * % (intervalle de confiance à 95 %) ; SA : semaines d’aménorrhée.
isolées dans les toxoplasmoses congénitales en France et a pu
être identifié aussi bien dans des formes létales, sévères,
bénignes, qu’asymptomatiques. Le type I est habituellement ■ Diagnostic anténatal
associé à des formes sévères [2].
Diagnostic de l’infection maternelle
■ Épidémiologie Le diagnostic de primo-infection maternelle est facile devant
une séroconversion (apparition d’immunoglobulines [Ig] G et
Les toxoplasmoses congénitales surviennent de façon quasi d’IgM). Une survenue isolée d’IgM nécessite un contrôle 2 à
exclusive après une primo-infection maternelle pendant la 3 semaines plus tard, puisqu’elle peut correspondre aussi à une
grossesse avec une transmission hématogène transplacentaire au réaction non spécifique (faux positif). Le diagnostic est plus
décours de la phase de parasitémie maternelle. Des cas d’infec- difficile lorsque la première sérologie montre à la fois des IgG
tion congénitale chez des femmes immunisées antérieurement et des IgM, ce qui peut correspondre à une infection récente,
à la grossesse et sans déficit immunitaire ont été décrits mais comme à la persistance tardive d’IgM pendant plusieurs années.
restent anecdotiques. L’enquête périnatale effectuée en France Ce sont la cinétique des IgG sur deux prélèvements successifs et
en 1995 a montré que la prévalence d’une immunisation vis-à- les techniques d’avidité qui permettent d’estimer la date de
vis de la toxoplasmose chez les femmes venant d’accoucher l’infection maternelle.
était de 54,3 %. La séroprévalence augmente avec l’âge maternel
et varie selon les régions de 37,9 % dans le Limousin à 68,3 %
en Aquitaine. Les facteurs de risque identifiés d’infection chez
Diagnostic de l’infection fœtale
la femme enceinte sont la consommation de viande de mouton Diagnostic biologique
ou de bœuf mal cuite, l’hygiène incorrecte pour le lavage des
mains et des instruments de cuisine ainsi que la consommation Il est réalisé par une amniocentèse, effectuée à partir de
de crudités hors du domicile. Avec un taux de transmission 18 semaines d’aménorrhée (SA) et au moins 4 semaines après la
maternofœtale moyen de 30 %, le nombre de nouveaux cas de date présumée de l’infection maternelle. La recherche du
toxoplasmose congénitale peut être estimé à 700 par an en parasite est effectuée par polymerase chain reaction (PCR) et
France, soit un taux de 1 pour 1 000 naissances vivantes. Ce inoculation à la souris. Ces deux techniques ont actuellement
taux varie fortement selon les pays ; il est par exemple de une spécificité de 100 % permettant d’affirmer l’infection de
1/10 000 au Massachusetts et de 3/10 000 au Brésil. l’enfant. En revanche, la sensibilité n’est que de 50 % à 60 %
pour l’inoculation du liquide amniotique à la souris avec un
délai de réponse de 6 semaines. Pour la PCR, le résultat est
■ Prévention de l’infection obtenu en moins de 48 heures avec une sensibilité moyenne de
65 %. Ce taux varie en fonction du terme de l’infection
Prévention primaire et secondaire maternelle (proche de 100 % vers 20 SA, inférieur à 50 %
pendant le premier trimestre et le dernier mois de grossesse [6]).
.
Elle consiste, chez les femmes enceintes non immunisées, à Les faux négatifs peuvent s’expliquer par un passage transpla-
ne manger de la viande que bien cuite, à éviter les contacts avec centaire retardé ou par une charge parasitaire très faible, tous
la terre et les chats et à laver soigneusement les légumes. ces enfants étant asymptomatiques à la naissance [6, 7]. L’intro-
La symptomatologie clinique d’une infection maternelle étant duction de la PCR en temps réel augmente probablement sa
peu fréquente et peu spécifique, un dépistage des femmes sensibilité et permet, pour les infections de la première moitié
séronégatives en début de grossesse et leur suivi sérologique de la grossesse, de donner un élément pronostique défavorable
mensuel ont été mis en place en France depuis 1978. Une si la quantification parasitaire est supérieure à 100/ml.
dernière sérologie maternelle doit être effectuée au minimum à
l’accouchement et idéalement 2 à 3 semaines après celui-ci pour
détecter une infection de toute fin de grossesse.

Risques et conséquences d’une infection “ Point fort


fœtale
Un diagnostic biologique anténatal négatif ne permet pas
Après une primo-infection maternelle, le risque de contami-
d’écarter une toxoplasmose congénitale.
nation fœtale est d’autant plus élevé que le terme est avancé.
Les données précises sur le délai entre l’infection maternelle et
l’infection fœtale éventuelle manquent. Néanmoins, des cas en
faveur d’un passage transplacentaire du parasite retardé de
plusieurs semaines ont été décrits [3]. À l’inverse, le risque que Diagnostic échographique
l’infection fœtale soit symptomatique décroît avec le terme Dans deux tiers des cas, la surveillance échographique
(Tableau 1) [4] . Les infections acquises pendant le premier mensuelle est normale (formes asymptomatiques). Les formes
trimestre peuvent être à l’origine d’une fœtopathie sévère symptomatiques s’observent surtout dans les infections de la
disséminée avec hydrocéphalie, calcifications cérébrales, abcès première moitié de la grossesse. Les anomalies cérébrales sont
cérébraux, ascite... pouvant évoluer vers une mort fœtale in les plus fréquentes et les plus spécifiques : dilatation ventricu-
utero. Les infections du troisième trimestre sont le plus souvent laire symétrique, généralement de mauvais pronostic, ou
asymptomatiques à la naissance. Le risque majeur pour ces calcifications cérébrales (Fig. 1). Des lésions moins spécifiques
enfants est de développer des lésions oculaires (choriorétinite) peuvent être observées : hépatomégalie, ascite, épanchement
après un délai de plusieurs mois ou années avec une fré- péricardique, hyperéchogénicité intestinale, épaississement
quence > 80-90 % en l’absence de traitement [5]. placentaire.

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purpura thrombopénique, anémie...) ou séquellaire (micro-


céphalie, hydrocéphalie, convulsions...). Il n’y a pas de fré-
quence accrue de retards de croissance intra-utérins. En prati-
que, l’examen clinique est le plus souvent normal. L’examen
ophtalmologique recherche des lésions de choriorétinite,
idéalement par ophtalmoscopie indirecte (Fig. 3). L’imagerie
cérébrale néonatale repose actuellement sur l’échographie
transfontanellaire (ETF) qui a l’intérêt d’avoir une excellente
sensibilité, d’être facilement disponible et de ne pas nécessiter
d’irradiation. Elle recherche des calcifications cérébrales nodu-
laires de quelques millimètres de diamètre ou curvilignes (Fig. 4)
et une hydrocéphalie. Le scanner permet de visualiser des
calcifications corticales proches de la voûte crânienne, qui
échapperaient à l’examen par ETF. L’imagerie par résonance
magnétique (IRM) cérébrale ne semble pas apporter de rensei-
gnement supplémentaire par rapport à l’échographie.

Figure 1. Échographie cérébrale fœtale à 32 semaines d’aménorrhée Diagnostic biologique


(SA), coupe sagittale. Hydrocéphalie après une infection maternelle entre L’examen du placenta par inoculation à la souris a une
.
12 et 16 SA. sensibilité de 50 % et une spécificité de 100 % avec le même
délai de réponse de 6 semaines que sur le liquide amniotique [7].
■ Traitement anténatal (Fig. 2) La PCR sur le placenta a un taux de faux positifs de près de
10 % qui ne permet pas actuellement de l’utiliser en routine.
Devant une séroconversion maternelle, un traitement par Le diagnostic sérologique positif repose sur la mise en
spiramycine (Rovamycine®) 9 millions d’unités/j en trois prises évidence d’IgM et/ou d’IgA spécifiques, seules les IgG maternel-
est débuté systématiquement en France pour réduire le risque de les traversant le placenta. La mise en évidence d’IgM et/ou d’IgA
transmission maternofœtale. Il est justifié par le délai variable chez le nouveau-né signe une synthèse propre, preuve d’une
entre la parasitémie maternelle et l’infection fœtale mais ne infection congénitale. La sensibilité de la sérologie à la nais-
peut donc prévenir toutes les infections fœtales. De plus, la sance dépend de la technique utilisée et augmente avec le terme
spiramycine n’est que parasitostatique sur les tachyzoïtes et si de l’infection (40 % au premier trimestre, 70 % au troisième).
les concentrations minimales inhibitrices (CMI) sont atteintes Sa spécificité est de 100 % si le prélèvement a été effectué sur
dans le placenta, elles ne le sont qu’après un délai de plusieurs sang périphérique et non au cordon (la présence d’IgM et/ou
jours. La diminution du risque de transmission du parasite par d’IgA dans ce dernier peut être due à un passage de sang
la spiramycine n’a pas été étayée par des études à la méthodo- maternel). Des techniques analytiques comparatives des diffé-
logie rigoureuse et son intérêt est débattu [8]. rents isotypes (IgG, IgM, IgA) ont été mises au point pour
Lorsque le diagnostic anténatal est négatif, le maintien du différencier les anticorps maternels transmis de ceux synthétisés
traitement par spiramycine jusqu’à l’accouchement est justifié par le nouveau-né. Il s’agit de techniques dont l’apport, une fois
par la possibilité d’une infection fœtale retardée. le diagnostic anténatal et la sérologie postnatale effectués, est
Devant un diagnostic anténatal positif avec une surveillance modeste (aucun cas par exemple de toxoplasmose congénitale
échographique normale, un traitement associant un sulfamide avec une PCR sur liquide amniotique négative, ayant une
(sulfadiazine ou sulfadoxine) et de la pyriméthamine est donné recherche d’IgM et/ou d’IgA à la naissance négative et un
en continu jusqu’à l’accouchement. Ces molécules agissent sur werstern blot positif, dans la série de Robert-Gangneux [7]).
le métabolisme de l’acide folique de façon synergique et sont La ponction lombaire est un examen classique en cas de
parasiticides sur les tachyzoïtes, réduisant le risque d’infection suspicion de toxoplasmose congénitale, mais dans une étude
symptomatique. Ce traitement nécessite une surveillance effectuée sur 233 enfants à risque de toxoplasmose congénitale,
hématologique régulière et un apport en acide folinique. Dans seuls 112 (52 %) liquides céphalorachidiens (LCR) étaient
les infections asymptomatiques du premier trimestre, l’indica- analysables, les autres étant contaminés par une ponction
tion à une mise sous traitement parasiticide ou à une interrup- vasculaire ou en quantité insuffisante. Même en exceptant ce
tion médicale de grossesse est discutée. Ainsi, sur sept fœtus problème, l’analyse cytochimique et la sérologie dans le LCR
infectés avant 16 SA, dont l’échographie était normale (en ont une sensibilité diagnostique médiocre (< 50 %) et n’ont pas
1989) et dont la grossesse avait été interrompue, tous avaient montré de valeur pronostique de survenue d’une lésion de
des foyers extensifs de nécrose cérébrale. Néanmoins, un seul de choriorétinite postnatale avec un recul moyen de 80 mois [11].
ces fœtus avait reçu un traitement anténatal avec sulfamide et L’intérêt de la PCR dans le LCR pour les toxoplasmoses congé-
pyriméthamine [9]. À l’inverse, la poursuite de la grossesse chez nitales n’a pas été évalué. La réalisation systématique d’une
sept fœtus infectés avant 18 SA et traités en anténatal avec du ponction lombaire n’est donc actuellement pas justifiée.
Fansidar® a permis de faire naître autant d’enfants dont le
développement est normal à 3 ans [10].
Si le diagnostic anténatal est positif et qu’il existe des lésions
échographiques, en particulier cérébrales, une interruption
médicale de la grossesse peut être justifiée.
Dans les séroconversions des deux derniers mois de la
“ Point fort
grossesse, un traitement associant d’emblée un sulfamide à la La ponction lombaire systématique n’a pas d’intérêt
pyriméthamine peut être débuté, quel que soit le résultat de diagnostique ou pronostique démontré.
l’éventuelle amniocentèse. À ce terme, le risque de transmission
est en effet maximal et la sensibilité de la PCR sur liquide
amniotique de 50 % environ seulement. Un résultat positif de
la PCR permet d’affirmer que l’enfant est infecté et de poursui- Au terme des examens anté- et néonataux, deux situations
vre le traitement sans interruption après la naissance. sont possibles (Fig. 2).

■ Diagnostic postnatal Infection congénitale non prouvée


à la naissance
Diagnostic clinique et imagerie Le diagnostic anténatal est négatif, l’examen clinique,
L’examen clinique recherche des signes non spécifiques de l’imagerie cérébrale, l’examen ophtalmologique sont normaux
fœtopathie évolutive (hépatomégalie, splénomégalie, ictère, et la sérologie postnatale ne montre ni IgM, ni IgA. L’abstention

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Figure 2. Arbre décisionnel. Démarche dia-


Séroconversion maternelle gnostique et thérapeutique en cas de sérocon-
version maternelle de toxoplasmose en cours
de grossesse. SA : semaines d’aménorrhée ;
IMG : interruption médicale de grossesse ; Ig :
Avant 30 SA > 30 SA
immunoglobulines.

Spiramycine

Amniocentèse

Échographie fœtale mensuelle

Amniocentèse négative Amniocentèse positive Amniocentèse positive


Échographies normales Anomalies échographiques Échographies normales

Poursuite de IMG ? Pyriméthamine + sulfamide


la spiramycine + acide folinique

Naissance
examen clinique, échographie transfontanellaire, fond d'œil
sérologie, examen parasitologique du placenta

Résultats Résultats
négatifs positifs

Pyriméthamine + sulmamide
Pas de traitement,
+ acide folinique
surveillance sérologique
12 mois

IgG Surveillance
Annulation des et/ou IgM+ ophtalmologique
IgG avant 12 mois et/ou IgA+ => adolescence

Infection exclue
Arrêt de la surveillance

thérapeutique est la règle avec une nouvelle sérologie à 1 mois nécessiter la vérification de l’activité glucose-6-phosphate
puis tous les 2 mois jusqu’à l’annulation des IgG spécifiques qui déshydrogénase érythrocytaire.
doit survenir avant l’âge de 1 an. Le diagnostic de toxoplasmose Trois schémas thérapeutiques sont employés en France. Le
congénitale peut alors être récusé et la poursuite de la sur- premier est une association continue de 12 mois de sulfadiazine
veillance clinique, biologique et ophtalmologique est inutile. Si (Adiazine®) et de pyriméthamine (Malocide®) qui a été proposée
l’évolution sérologique est en faveur d’une toxoplasmose par le Chicago Collaborative Treatment Trial [14]. La sulfadiazine
congénitale (augmentation du titre des IgG, apparition d’IgM est commercialisée sous forme de comprimés à 500 mg quadri-
et/ou IgA spécifiques), il faut instaurer un traitement et une sécables, la pyriméthamine n’existe que sous forme de compri-
surveillance selon l’un des protocoles proposés au paragraphe més à 50 mg, inadaptés à un usage pédiatrique. Pour cette
suivant. dernière, il est nécessaire d’utiliser des gélules à 5 mg préparées
dans une pharmacie hospitalière. La posologie hebdomadaire
Infection congénitale prouvée peut être répartie en 3 à 6 prises, la demi-vie étant de plusieurs
jours.
Traitement postnatal La deuxième possibilité thérapeutique est d’utiliser l’associa-
Il a pour but de réduire la fréquence et la sévérité des tion sulfadoxine-pyriméthamine (Fansidar®) avec de l’acide
séquelles à long terme. Étant donné l’absence de diffusion de la folinique. Chaque comprimé quadrisécable contient 500 mg de
spiramycine dans le parenchyme cérébral dans un modèle sulfadoxine et 25 mg de pyriméthamine. La posologie est de un
animal (singe Rhésus) de toxoplasmose congénitale [12], elle quart de comprimé par 5 kg de poids tous les 10 jours pendant
n’est plus utilisée après la naissance au profit d’une association 12 à 24 mois [13]. Elle correspond à une dose de 0,125 mg/kg/j
continue de sulfamides et de pyriméthamine. Le type de de pyriméthamine et de 2,5 mg/kg/j de sulfadoxine. L’intérêt de
sulfamide (sulfadiazine ou sulfadoxine), la posologie de pyrimé- ce traitement est sa simplicité qui peut favoriser son observance.
thamine et la durée du traitement sont variables [13, 14]. En En revanche, l’utilisation d’une forme retard de sulfamide
fonction de l’origine ethnique, le recours à un sulfamide peut impose une nette prudence en cas de manifestation allergique,

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30 %
25 %
20 %
15 %
10 %
5%
0%
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Années
Figure 5. Incidence cumulée de la première lésion de choriorétinite en
fonction de l’âge chez des enfants traités [16].

nuls au bout de 9 à 12 mois [14]. La possibilité d’une annulation


complète de la sérologie pendant le traitement doit être connue
et non interprétée comme un argument contre le diagnostic de
toxoplasmose congénitale. En cas d’incertitude diagnostique,
une fenêtre thérapeutique doit être effectuée afin de pouvoir
Figure 3. Fond d’œil : foyers choriorétiniens maculaires et paramacu- statuer. L’association sulfadoxine - pyriméthamine ne provoque
laires gauches cicatriciels. pas une diminution aussi spectaculaire des titres d’anticorps
spécifiques.
Les rebonds sérologiques font toujours l’objet de controverses,
leur (s) mécanisme (s) restant incompris. Ils sont quasi cons-
tants (90 % à 97,8 %) après l’arrêt du traitement et il n’y a pas
de corrélation démontrée avec une évolutivité oculaire à court
terme [15]. Trois études ont récemment tenté de les corréler à la
survenue d’une évolutivité clinique. Dans les deux premières,
seuls quatre rebonds sur 76 (10,9 %) et un sur 82 (1,2 %) ont
été suivis de manifestations cliniques. Dans la dernière, le risque
relatif de choriorétinite après un rebond sérologique a été
estimé à 1,1 (intervalle de confiance [IC] 95 % [0,47-2,58]). Un
rebond sérologique isolé ne justifie pas la reprise du traitement.

“ Point fort
Le traitement des rebonds sérologiques isolés et donc le
suivi sérologique postnatal ne sont pas justifiés.

Figure 4. Échographie transfontanellaire, coupe frontale passant par le


IIIe ventricule : calcification pariétale bilatérale.
Évolution clinique
ce d’autant plus que le Fansidar® n’a pas l’autorisation de mise En l’absence de traitement, parmi les enfants asymptomati-
sur le marché (AMM) pour la toxoplasmose. ques, les risques de séquelles neurologiques et intellectuelles
Le dernier schéma est une combinaison des deux précédents : sont importants. Sur une série de 24 enfants, avec un recul
association sulfadiazine et pyriméthamine pendant 2 mois, puis moyen de 8 ½ ans, deux enfants ont une microcéphalie, quatre
Fansidar® les 10 mois restants. ont eu des convulsions, trois ont un retard psychomoteur sévère
Effets secondaires des traitements et le quotient intellectuel (QI) moyen est de 87,3.
Les neutropénies sont le principal effet secondaire du traite- Le pronostic neurodéveloppemental des formes pauci- ou
ment par sulfadiazine - pyriméthamine, puisque 50 % à 58 % asymptomatiques des enfants traités avec les schémas thérapeu-
des enfants traités ont au moins un épisode de neutropénie tiques exposés plus haut semble excellent mais repose sur de
< 1 000/mm3 pendant l’année de traitement [14]. Elles sont petites séries. Une étude multicentrique européenne actuelle-
réversibles après diminution ou arrêt temporaire du traitement. ment en cours devrait permettre de le préciser.
La tolérance hématologique de l’association sulfadoxine - Le risque évolutif essentiel des enfants infectés est la survenue
pyriméthamine est bien meilleure, puisque sur une série de d’une choriorétinite. Elle peut apparaître à n’importe quel
78 enfants, aucune neutropénie n’a été rapportée. Les thrombo- moment de l’enfance, y compris pendant l’année de traitement
pénies sont un effet secondaire classique des sulfamides et de la ou à l’adolescence, et peut être responsable d’une cécité si elle
pyriméthamine mais aucune série n’en rapporte au cours des englobe la macula. Sa fréquence atteint 80 % à l’adolescence en
traitements pour toxoplasmose congénitale. Les manifestations l’absence de traitement anté- et postnatal avec près de 50 % de
allergiques cutanées liées à l’utilisation de sulfamides survien- cécité uni- ou bilatérale. Une étude plus récente portant sur des
nent avec une fréquence de 1 à 2 % des enfants traités sous enfants traités en anté- comme en postnatal trouve une inci-
forme de rash cutané ou d’urticaire. Le risque de survenue d’un dence de choriorétinite de 11,6 % à 1 an, 14,1 % à 2 ans, 18 %
syndrome de Lyell, bien qu’exceptionnel, fait partie des raisons à 5 ans, 22,9 % à 10 ans (Fig. 5) avec une cécité unilatérale
pour lesquelles certaines équipes n’utilisent pas de sulfamide (acuité visuelle < 1/10) pour 12,7 % de ceux qui ont une
retard (sulfadoxine). Les troubles digestifs (nausées, vomisse- choriorétinite [16]. Le principal facteur de risque identifié associé
ments) sont peu fréquents. au développement d’une choriorétinite est la présence de
calcifications cérébrales à la naissance. La découverte d’une
Évolution biologique nouvelle lésion de choriorétinite justifie la reprise du traitement
Pendant le traitement avec sulfadiazine - pyriméthamine, les parasiticide si elle est proche de la papille ou d’aspect
titres des IgG spécifiques diminuent pour devenir nuls ou quasi inflammatoire.

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■ Conclusion [14] McAuley J, Boyer KM, Patel D, Mets M, Swisher C, Roizen N, et al.
Early and longitudinal evaluations of treated infants and children and
La prise en charge des séroconversions maternelles de toxo- untreated historical patients with congenital toxoplasmosis: The
plasmose en cours de grossesse puis de leurs enfants est actuel- Chicago collaborative treatment trial. Clin Infect Dis 1994;18:38-72.
lement assez bien codifiée en France. Il subsiste néanmoins de [15] Djurkovic-Djakovic O, Romand S, Nobre R, Couvreur J, Thulliez P.
nombreuses questions, en particulier sur les différentes modali- Serological rebounds after one-year-long treatment for congenital
tés thérapeutiques. L’introduction de molécules actives sur les toxoplasmosis. Pediatr Infect Dis J 2000;19:81-3.
bradyzoïtes des kystes, telles que l’atovaquone [17], pourrait [16] Wallon M, Kodjikian L, Binquet C, Garweg J, Fleury J, Quantin C, et al.
améliorer le pronostic à long terme des enfants atteints. Long-term ocular prognosis in 327 children with congenital
toxoplasmosis. Pediatrics 2004;113:1567-72.
[17] Araujo FG, Huskinson J, Remington JS. Remarkable in vitro and in
.

■ Références vivo activities of the hydroxynaphthoquinone 566C80 against


tachyzoites and tissue cysts of Toxoplasma gondii. Antimicrob Agents
[1] Montoya JG, Liesenfeld O. Toxoplasmosis. Lancet 2004;363:1965-76. Chemother 1991;35:293-9.
[2] Dardé ML. Genetic analysis of the diversity in Toxoplasma gondii. Ann
Ist Super Sanita 2004;40:57-63. Pour en savoir plus
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F. Kieffer (ipp.kieffer@free.fr).
Service de néonatologie, Institut de puériculture et de périnatologie, 26, boulevard Brune, 75014 Paris, France.
P. Thulliez.
Laboratoire de la toxoplasmose, Institut de puériculture et de périnatologie, 26, boulevard Brune, 75014 Paris, France.
E. Yi-Gallimard.
Consultation d’ophtalmologie, Institut de puériculture et de périnatologie, 26, boulevard Brune, 75014 Paris, France.
A. Tasseau.
Service de néonatologie, Institut de puériculture et de périnatologie, 26, boulevard Brune, 75014 Paris, France.
S. Romand.
Laboratoire de la toxoplasmose, Institut de puériculture et de périnatologie, 26, boulevard Brune, 75014 Paris, France.
F. Jacquemard.
Service de médecine fœtale, Institut de puériculture et de périnatologie, 26, boulevard Brune, 75014 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Kieffer F., Thulliez P., Yi-Gallimard E., Tasseau A., Romand S., Jacquemard F. Toxoplasmose congénitale.
EMC (Elsevier SAS, Paris), Traité de Médecine Akos, 8-0370, 2006.

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