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Faculté des Hydrocarbures et de la chimie économe et commercialisation des Hydrocarbures

Support de cours Les marchés des hydrocarbures


Chapitre 1 : historique du développement du marché pétrolier

1. Le développement du commerce international du pétrole


Jusqu’à la fin des années 60, l’industrie pétrolière se caractérisait par une forte intégration des activités
et un contrôle total de la chaîne d’approvisionnement (de la production à la distribution) par les
grandes compagnies pétrolières. Le commerce international se réduisait à quelques échanges entre
compagnies, principalement dans la zone Amérique.

1.1 Les années 1970 : des contrats long terme


Dans un contexte de tension entre l’offre et la demande, le début des années 1970 voit les pays
producteurs prendre progressivement le contrôle de l’amont pétrolier. L’industrie pétrolière est « dé-
intégrée » et de nouvelles pratiques commerciales entre un acheteur et un vendeur, désormais distincts,
apparaissent. Le système de concession précédemment en vigueur est remplacé par des relations
contractuelle de long terme (quelques années) liant les nouvelles compagnies nationales et les anciens
concessionnaires. Le prix du pétrole est désormais le Gouvernement Official Selling Price
(GOSP) fixé unilatéralement par l’OPEP lors de ses réunions semestrielles.

Les compagnies privés ne maîtrisent plus les cours du pétrole brut. Elles ont également perdu l’accès
direct à des réserves détenues en propre. Les contrats long terme leur assurant cependant une certaine
sécurité d’approvisionnement.

Ce système régira les prix du pétrole pendant 10 ans. Il sera progressivement altéré par le
développement des marchés spot dans les années 80. Les prix officiels disparaîtront définitivement en
1988 après avoir été malmenés par divers systèmes de rabais.

1.2 Les années 1980 :l’avénement des marchés spot


La première croissance significative des transactions spot de brut date du second choc pétrolier. En
1979, la révolution iranienne fait craindre une pénurie de pétrole brut. En dépit de la hausse de
production consentie par l’Aarabie saoudite, les acheteurs sont fébriles. Ils veulent du brut rapidement
à n’importe quel prix. Les prix spot montent alors à des niveaux supérieurs à ceux des officiels. Des
volumes jusqu’alors vendus dans le cadre des contrats long terme se portent donc sur ces marchés
spot, où les volumes de transactions enflent considérablement.

Paradoxalement, ce type de transaction apparu en prériode de crise va asseoir sa prééminence dans un


marché globalement excédentaire en brut. En effet, les économies d’énergies et les substitutions au
pétrole d’énergie concurrentes font chuter la demande au début des années 80. Dans le même temps,
arrive sur le marché une production pétrolière nouvelle dévelopée dans des zones non OPEP.

Face à l’importance des disponibilités, la sécurité des approvisionnements devient un objectif


secondaire pour les raffineurs privés. Dans un marché excédentaires donc structurellement baissier,
l’optimisation de leurs coûts passe par les achats spot. De plus, les contrats long terme manquent de
souplesse commerciale sur lers volumes.

Aussi, les premières cargaisons produites en mer du nord seront vendues dés 1980 exclusivement sur
une base spot. Jusqu’en 1985, les pays producteurs continuent cependant à proposer des contrats à
long terme à prix fixe . Ces contrats contiennent cependant de plus en plus de clauses négociables par
l’acheteur . Cette résistance cédera dés 1986 après l’épisode des contrats dit « netback ». Le prix de la
quasi-totalité des pétrole bruts est désormais fixé en fonction des prix sur les marchés spot…
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L’épisode du netback
Un type de contrat, dit netback, développé en 1985, a pourtant contrarié l’avénement des marchés spot.
L’arabie Saoudite est à cette époque le principal acteur du succès de la politique des quotas de l’OPEP.
En 5 ans, ce pays a réduit sa production de 10 à 3,6 Mb/j. Or, l’effort que s’est imposé le royaume
wahhabite n’est pas forcément partagé par les autres pays membres. Renonçant à soutenir les cours du
pétrole, le roi Fahd décide une reconquête des parts de marchés. Le système des prix officiels
est alors abandonné au profit d’une nouvelle pratique commerciale destinée à séduire les raffineurs.

En 1985, l’industrie du raffinage est morose et les marges sont faibles. Aussi, lorsque l’Aramco
propose aux acheteurs de brut (raffineurs) de leurs céder du pétrole en leur garantissant une marge
fixe par baril, ces raffineurs sont particulièrement réceptifs. Le prix du pétrole brut sera fixé, au terme
de ce contrat netback, en fonction du prix de vente des produits.

Le prix brut par baril est égal à la valorisation des produits issus d’un baril, diminué d’une marge de
raffinage et du coût de transport. La marge de raffinage et le coût de transport sont forfaitisés dans le
contrat.

Ainsi la rentabilité du raffineur est garantie. Devant le succés rencontré par ce contrat, les autres pays
de l’OPEP vont suivre et amplifier le mouvement, désireux de reprendre leurs clients. L’engouement
est tel que les producteures de mer du Nord pensent eux aussi à adopter le contrat netback. Ils y
renonceront rapidement car ce mécanisme recèle un effet parvers.

Les raffineurs souhaitent naturellement maximiserleur profit. Ce profit étant fixe par baril, il leur faut
traiter le maximum de barils pour augmenter leur bénéfice. Ces barils sont disponibles puisque les
pays de l’OPEP cherchent à developper leurs ventes. L’accroisement de l’offre conduit à
l’effondrement des prix des produits, et par conséquent du brut. C’est le contrechoc. Il sera bientôt
suivi de l’abandon de la pratique netback.

1.3 Les années 1990 : l’organisation des marchés spot et le développement


des marchés financiers
Les marchés spot ou marchés libres du pétrole (libres au sens économique) se sont imposés comme
baromètre des prix. Ce sont les quantités marginales échangées sur ces marchés qui font l’ajusement
entre l’offre et la demande. Mais, face la multiplicité des types de pétrole brut, le marché
ressent le besoin de plus d’organisation. Quelques types de bruts comme le Brent, le WTI ou le
Dubai s’imposent comme références. Ce sont les markers sur lequels s’indexent les prix des autres
qualités.

Cette organisation se poursuit par le développement de bourses pétrolières destinées à lutter contre la
volatilité des prix. En effet, la négociation de cargaisons au jour le jour conduit à des variations
permanantes des prix. Cette incertitude entraine pour les acteurs du marché d’importantes risques
financiers.

Les problèmes liés à la volatilité des prix, connus sur les marchés des devises, des taux d’intérêts ou
des matières premières, peuvent être contrés. Les outils utilisés sur ces marchés sont adaptés aux
besoins spécifique du monde pétrolier. Dés 1980 apparaissent les premiers contrats à terme ou
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« futures » suivis dans les années 90 par des instruments plus sophistiqués tels que les swaps et les
options. Ces instruments font partie intégrante du monde pétrolier actuel.

En l’espace de trans ans, la physionomie du commerce de pétroles bruts et de produits pétroliers s’est
radicalement modifié.

2. Les
prix d’équilibre sur les marchés pétroliers
Avant de s’intéresser plus avant aux pratiques commerciales actuelles sur ces marchés, il est important
de définir les termes d’une transaction commerciale sur matière première et la manière dont l’équilibre
de marché conditionne le mode de fixation des prix.

2.1 Les différentes types de transactions


La négociation du prix est bien sûr au cœur des transactions ; encore faut’il savoir de quel prix il
est question. Les transactions pétrolières obéissant principalement à deux types d’incoterm :

 Le prix
FOB (Free On Board ou Franco A Bord) est le prix du brut pour une cargaison disponible au port
de chargement (Ras Tanura en Arabie Saoudite ou Bonny au Nigeria par exemple). Le transfert de
propriété s’effectuant lorsque le produit passe la lisse du navire. L’acheteur doit assumer les coûts
de transport et d’assurances.
 Le prix
d’une cargaison de produits pétroliers rendue dans le port de destination (Fos, Le Havre où
Rotterdam) est un prix CAF (coût, Assurance et Fret) qui inclut les coûts de transport et
d’assurances (en anglais CIF : Cost Insurance Freight).

Même dans une transaction CIF, le transfert de propriété intervient lorsque le produit passe la lisse du
navire au chargement.
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Les opérations de changement ou de déchargement ne sont pas instantanées. Pour les échanges
maritimes, les dates de disponibilité d’une cargaison couvrent souvent une plage de deux jours. Un
retard du bateau ou de chargement ou déchargement peut entraîner pour le fautif le versement de
lourds indemnités (surestaries) aux autres parties. Pour les transports par oléoduc, le respect des dates
de pompage est également très important. De plus, le calcul du prix des transactions est souvent lié :

- à la date
effective du chargement du bateau (matérialisée par l’émission du Bill of Lading ou
Connaissement) pour le cas d’une vente FOB ;
- à la date
de déchargement (matérialisée par le NOR ou notice of Readdiness) pour une ventes CIF.

Pour un même produit, le prix CIF est évidemement plus élevé que le prix FOB. D’une manière très
schématique, le brut est en général vendu sous des conditions FOB et les produits sous conditions CIF.
Le niveau des taux de fret, les disponibilités en capacité de transport d’une compagnie, la pression des
habitudes commerciales peuvent influer sur les choix entre ces deux types de transactions.

2.2 La logique de fixation des prix du brut


Bien que les transactions puissent s’effectuer sur des bases FOB ou CIF, la fixation des prix résulte du
principe général de l’équivalence des prix CIF pour des bruts de même qualité rendus à la raffinerie.
C’est un marché d’acheteur.

Une raffinerie située à Rotterdam pouvant acheter du brut Brent à 18 $ par baril FOB Sullom Voe
(terminal de chargement du Brent dans les îles Shetland) doit supporter pour ce brut un coût de fret de
0,6 $ par baril. Elle est prête à prendre un brut de même qualité (c’est-à-dire dont elle attend la même
rentabilité) d’une autre provenance si son prix à Rotterdam ne dépasse pas 18 + 0,6 $ ar baril.

Supposons qu’un brut analogue soit produit en Afrique de l’Ouest et que le coût du transport entre les
deux ports soit de 1 $ par baril. Pour être compétitif, le brut d’Afrique de l’Ouest devra être vendu
FOB à 18,6 – soit 17,6 $ par baril.

2.3 La logique de fixation des prix des produits


La fixation du prix des produits offre plus de contraste. Elle dépend en effet de l’équilibre offre/
demande dans la région.

a. Offre
déficitaire
Le marché couvre une partie de ses besoins en recourant à l’importation. Le produit importé est payé
au prix CIF puisqu’il faut le transporter jusqu’à la zone de consommation. Les producteurs de la zone
sont en position forte face à des acheteurs dont l’alternative est l’importation. Dans cette situation de
rareté, l’équilibre du prix s’établit donc à la parité CIF.

b. Offre
excédentaire
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Dans cette situation, les producteurs doivent exporter une partie de leurs produits. Ces produits
exportés doivent être vendus au prix FOB, puisqu’ils doivent être compétitifs chez l’acheteur après
avoir supporté des coûts de transports. Si le marché est parfaitement concurentiel, les acheteurs
de la zone sont en position de force pour faire baisser les prix, le moindre gain au-delà du prix FOB
restant pour les producteurs préférable à l’exportation. L’équilibre naturel des prix est alors le prix
FOB.

La recherche de l’équilibre
Les producteurs ne se soumettent pas spontanément à cette spirale baissière. Un modus vivendi peut
éviter en partie la guerre des prix, tant qu’aucun acteur n’attaque pour prendre des parts de marché.
Un acteur peut en revanche achter sur le « marché international » des quantités exportées hors de la
zone pour les « reinjecter » sur la zone à un prix supérieur au prix FOB de la marge qu’il veut
réaliser, le produit, évidement ne sort ni ne rentre physiquement !

En tout état de cause, le prix ne pourra se maintenir prés de la parité CIF. Les producteurs pourront
cependant maintenir une « prime » par rappot au prix FOB s’il contrôlent l’outil logistique,
l’importateur étant alors contraint de couvrir des coûts logistiques importants par une marge
suffisante.

3. Les
pratiques commerciales sur les marchés pétroliers
Le panorama historique nous a montré que les pratiques commerciales sont évolutives. On
peut cependant présenter une typologie actuelle des différents modes de négoce physique du brut et
de produits pétroliers. Trois familles principales se dessinent : les accords de troc,les transactions
cargaison par cargaison et les accords long terme.

3.1 Les accords de troc


Il restant importants. Ils représentent actuellement en effet plus de 15% des volumes pétroliers
négociés. Ces transactions consistent typiquement en l’échange de pétrole ou de produits pétroliers
contre des marchandises, des services ou des biens d’équipement.

3.2 Les transactions cargaisons par cargaison


Dans ce cadre, on trouve deux types de transactions.

D’une part, les transactions forward (ou vente à prix à livraison différée) qui s’appliquent à des achats
et à des ventes d’une cargaison pour laquelle la livraison intervient sous un délai de 1 à 3 mois.

D’autres part, les transactions spot. Le terme spot se réfère à des achats et des ventes d’une cargaison
dont la livraison intervient à court terme c’est-à-dire sous un délai inférieur à un mois. Une
transaction spot n’est donc pas assimilable à une transaction instantanée, car rares sont les
transactions pour le jour-même. Un délai technique lié à la disponibilité de la cargaison, à la
disponibilité des bateaux et à leur vitesse de déplacement est en effet nécessaire.

Les volumes de pétrole échangés suivant des bases spot se montent à 30% du commerce international
pétrolier, si tant est qu’une comptabilité de ce type soit fiable. Leur influence est cependant bien plus
forte puisqu’ils déterminant le prix de 80% des transactions par le biais des contrats long terme.
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3.3 Les contrats long terme


Ces relations sont les plus répandues (de l’ordre de 55% du commerce international).
Les contrats long terme (term contrats) sont les plus souvent conclus pour un durée d’un an
reconductible dans lesquels les parties s’entendent sur des volumes échangés.

Ils permettent à de nombreux pays producteurs de garatir des débouchés à leurs bruts. L’acheteur
trouve également un intêret à ce type d’accord. Un raffineur peut ainsi s’assurer de la disponibilité
d’une qualité de brut donnée. Il économise également les frais induits par la multiplication des achats
spot de brut. Ainsi, la plupart des acheteurs garantissant grâce à ces contrats la couverture d’une part
majoritaire de leur besoin. Ils optimisent l’achat des volumes résiduels en recourant au spot et en
arbitrant entre les différents bruts en fonction des évolutions des prix.

Dans un contexte de prix spot fluctuants, la négociation du prix contractuel est devenue capitale. En
effet, si les pays producteurs recherchent des prix les plus fixes possibles, pour planifier leurs budgets,
les compagnies, dont la rentabilité avale dépend des marges de raffinage, recherchent quant à elles
des conditions s’adaptant le plus possible aux évolutions des prix de marché. C’est pourquoi, les prix
des contrats long terme suivent au jour le jour l’évolution du prix des marchés spot. Ces transactions
sont donc très différentes des contrats long terme à prix fixes (« officiels » ou « postés ») qui
existaient entre les deux chocs.

Les prix spot sont donc directeurs sur le marché pétrolier. Les compagnies pétrolières privés les
utilisent comme référence principale pour fixer le prix de leur cargaison comme le font désormais les
compagnies nationales des pays producteurs. Elles laissent aux forces du marché le soin de fixer
quotidiennement le niveau des prix.

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