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Virus».

La justice les suspecte d’être impliquées, à des degrés divers, dans un


vaste réseau franco-suisse qui recyclait les millions d’euros en espèces du trafic
de cannabis en les faisant transiter par les comptes bancaires de fraudeurs
fiscaux français et par des sociétés écrans. Un système complexe, parfaitement
rodé, qui illustre l’ingéniosité déployée par ces équipes pour blanchir les
liquidités générées par la vente de stupéfiants.

Depuis quelques années, les enquêteurs de la police judiciaire ont remarqué que
filières de blanchiment s’étaient professionnalisées. Certaines équipes proposent
ainsi leurs services à des réseaux de trafiquants « en manque d’expertise et de
ressources internes » pour les aider à dissimuler la provenance de l’argent
liquide, a expliqué vendredi la commissaire divisionnaire Cécile Augeraud à
l’occasion de la présentation du rapport annuel du Sirasco (Service
d’information, de renseignement et d’analyse stratégique sur la criminalité
organisée). Leur mission ? Éviter tout passage par le réseau bancaire traditionnel
afin d’éviter de susciter la curiosité de Tracfin, la cellule de renseignement
financier.

« Pacte verbal de blanchiment »


Ces organisations sont dirigées par un « superfacilitateur » ou
« saraf » en arabe, « qui réside généralement à l’étranger », a détaillé
la commissaire divisionnaire Corinne Bertoux, cheffe de l’OCRGDF
(Office central pour la répression de la grande délinquance financière).
« Il conclut avec les trafiquants un pacte verbal de blanchiment
prévoyant notamment la forme sous laquelle ils vont ensuite récupérer
les profits illicites : il peut s’agir de monnaie locale, d’ouvertures de
compte bancaire à l’étranger, notamment dans des places offshore, ou
de produits divers et variés », a-t-elle ajouté

Composées de personnes de « confiance », ces équipes commencent


par récupérer l’argent auprès des dealers. L’argent peut être transporté
de façon classique, « caché dans des voitures ou dans des containers,
ou par voie aérienne », a poursuivi Corinne Bertoux. Les fonds
peuvent être ensuite transformés en produits à forte valeur ajoutée ou
facilement transportables, tels que l’or, des bijoux ou des véhicules.
En Allemagne, pointe notamment la commissaire divisionnaire, il n’y
a pas de seuil maximum pour procéder à des achats en liquide…

Mécanismes de compensation
Ces professionnels du blanchiment ont aussi recours à des mécanismes
de compensation variés, difficilement détectables. La police
judiciaire a par exemple découvert que des membres de la diaspora
chinoise, installés en région parisienne et spécialisés dans le
commerce du textile, récupéraient « des liquidités importantes »
provenant du trafic de stupéfiant. « En compensation, ils exportaient
depuis la Chine, via un système de fausse facturation, des produits
vers le Maroc » qui étaient ensuite revendus sur place, a raconté la
patronne de l’OCRGDF. Permettant ainsi aux trafiquants de récupérer
leur argent sur un compte à l’étranger.
Malgré le haut degré de sophistication de ces systèmes de
blanchiment, les enquêteurs parviennent parfois à démanteler certains
réseaux. Fin 2017, les limiers de l’OCRGDF sont parvenus à mettre
hors d’état de nuire une équipe qui, en 18 mois, « avait blanchi plus de
70 millions d’euros ». 32 personnes avaient été interpellées, 17
écrouées. Les policiers ont également saisi 1,2 million d’euros
d’avoirs criminels. Dans ce dossier, baptisé « Emporio », ils avaient
également découvert l’existence de liens « entre des sarafs marocains
et algériens ». « C’était un peu une première, a confié Corinne
Bertoux. Chaque fois, on découvre de nouvelles méthodes
employées. »

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