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Aristocratie

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Pour les rois d'Arcadie, voir Aristocrate Ier et Aristocrate II.

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L'aristocratie est un régime politique dans lequel le pouvoir est officiellement détenu
par une élite minoritaire mais dominante : caste, noblesse ou classe sociale,
représentants élus ou cooptés, élite intellectuelle ou technocratique, voire
philosophique. On désigne également par aristocratie les membres de cette élite,
que ce soit des nobles ou des élus, des notables ou des riches, une nomenklatura ou
un pouvoir établi, ou tout autre forme d'élite visible ou cachée.
Le terme aristocratie vient des mots grecs ἄριστοι / áristoi, « les meilleurs »,
et κράτος / kratos « force, domination1 ». À partir de la Révolution française, le terme
« aristocratie » a été employé à tort pour désigner exclusivement la noblesse, ce qui
lui a fait perdre son sens plus général, surtout en français.
Usuellement, les notions d'aristocratie et d'oligarchie sont rapprochées. Cependant,
celles-ci diffèrent dans la mesure où l'oligarchie n'est pas liée à la notion d'élite
autoproclamée (il peut s'agir d'une sélection par l'argent, par exemple), tandis que
l'aristocratie ne présuppose pas une minorité bien définie. Néanmoins, les idées
restent proches et la confusion se justifie aussi du fait que, par l’idéologie du pouvoir,
les puissants sont préjugés former une élite, qui devient ainsi autoproclamée. Par
conséquent, ces deux termes sont couramment employés indifféremment.
Parcours historique de la notion
d'aristocratie[modifier | modifier le code]
Souvent issue de la féodalité, l'aristocratie a souvent évolué vers la monarchie ou
l'autocratie. Elle peut parfois se combiner avec une sorte de démocratie (par
exemple en République de Venise, où un doge est élu et aux pouvoirs limités, ou de
la Pologne, dont le roi était élu par la noblesse — 10 % de la population — et dont
les pouvoirs étaient dans la Diète).
Antiquité grecque[modifier | modifier le code]
Articles détaillés : Époque géométrique#Généralités et Époque orientalisante
(Grèce)#Clivages sociaux.
Dans la Grèce ancienne, les régimes oligarchiques et aristocratiques succèdent le
plus souvent à une royauté héréditaire. Ils commencèrent à se développer
au VIII siècle av. J.-C. en remplaçant peu à peu les monarchies en place, tombant les
e

unes après les autres à la suite d'une crise sociale. Au milieu du VII siècle av. J.-C.,
e

la monarchie a quasiment disparu du monde grec.


Aristocratie : du grec aristokratia (aristos, excellent, le meilleur, le plus brave
et kratos, pouvoir). Par ce seul mot, c'est la conception d'un régime politique et d'une
organisation sociale qui se dessine. L'exercice des responsabilités, la prise de
décisions et l'impulsion donnée reviennent aux êtres d'excellence dans le domaine
considéré. Pour la direction d'une nation, les qualités premières de ces aristocrates
ont été définies dans le manifeste Révolution droitiste rédigé par Michel-Georges
Micberth et François Richard : « […] une appréhension rapide et complète d’une
situation, une capacité immédiate à prendre une décision, une connaissance très
vaste des choses et des êtres, et une rigueur morale qui s’accommode parfaitement
des jeux de l’imagination ».
Ces honnêtes citoyens, comme le résumait Platon, s'imposent de fait comme les plus
aptes à diriger la cité pour la mener vers de bénéfiques horizons. L'auteur
des Dialogues rapporte dans l'un d'eux la réflexion de l'étranger, approuvé sans
réserve par Socrate le jeune : « […] suppose de nouveau qu’un homme, dans son
état de simple particulier, soit assez avisé pour donner des conseils au monarque de
quelque pays, ne dirons-nous pas que le conseiller possède en propre le savoir que
devrait avoir acquis celui qui exerce le pouvoir ? ». La sélection des meilleurs est le
propre du système aristocratique.
Comme une incarnation du conseiller avisé imaginé par l'étranger dans sa réflexion
socratique, Aristote énonce au puissant Alexandre, dont il a été le précepteur, les
qualités d'un régent d'empire : « Un tel homme doit être supérieur et parfait non
seulement dans la vaillance et la justice et dans des vertus diverses mais encore par
la puissance et par l’équipement militaire pour qu’il puisse contenir le peuple et le
pousser à écouter la loi ».
Aristote indique donc à l'ambitieux roi de Macédoine la manière d'être et d'aborder la
direction d'un empire pour que « dans les cités règnent toujours les bonnes mœurs
et que les vices en soient bannis ». Même si l’aristocratisme prône davantage la
collégialité dans l'exercice du pouvoir, les notions développées par le disciple de
Platon font une part essentielle à la valeur fondamentale de l'individu.
Certes la légitimité conférée aux hommes responsables de la destinée d'un peuple
est plus puissante par cette méthode de sélection, mais l'exercice du pouvoir est une
source de bien plus de devoirs que de droits. La fonction de chef doit hanter à
chaque instant celui qui l'a acceptée. Cette prise de responsabilités doit impliquer
toute sa vie et ne peut se limiter à la simple parade que permettrait le prestige de la
fonction. Être aristocrate, au sens premier, est aux antipodes de la facilité d'exister,
du carpe diem vanté depuis l’Antiquité.
Antiquité romaine[modifier | modifier le code]
Sous la royauté et la République[modifier | modifier le code]
L’évolution de l’aristocratie de la Rome antique peut être suivie sur une période de
plus de mille ans. Sous sa forme la plus ancienne, de la fondation de Rome jusqu’au
début de la République, les patriciens forment la classe aristocratique romaine. Se
présentant comme les descendants des compagnons de Romulus, ils disposent
seuls de pouvoirs sacrés, comme prendre les augures ou accéder aux sacerdoces.
Membres du Sénat romain, puis seuls éligibles aux magistratures aux premiers
siècles de la République romaine, ils monopolisent un pouvoir que leur disputent
les plébéiens pendant le V siècle av. J.-C.
e

Les plébéiens obtiennent peu à peu l’égalité civique et religieuse, et les plus riches
d’entre eux accèdent aux magistratures et au Sénat. Au III siècle et au II siècle av.
e e

J.-C., l’aristocratie romaine n’est donc plus fondée uniquement sur l’ascendance,
mais sur la richesse foncière (il faut une fortune d’au moins 400 000 sesterces pour
être éligible aux premières magistratures) et le succès électoral (cursus honorum) qui
ouvre l’admission au Sénat. Les grandes familles, patriciennes ou plébéiennes,
accèdent au consulat de génération en génération, constituant l’ordre sénatorial.
Des recensements périodiques (tous les cinq ans) voient le renouvellement de cette
aristocratie, par admission à la suite des succès électoraux ou exclusions pour
conduite dépravée ou crime.
Dans le même temps se constitue une autre classe, les chevaliers, enrichis par le
commerce méditerranéen, l’activité bancaire, la sous-traitance par l’État romain de la
collecte des impôts (publicains). Sans que cela leur soit interdit, les chevaliers
accèdent rarement aux magistratures, à quelques brillantes exceptions près
(Marius, Cicéron). Les ambitieux qui tentent d’imposer leur pouvoir à la fin de la
République romaine au I siècle av. J.-C. vont favoriser les chevaliers contre les
er

sénateurs conservateurs.
Sous l’Empire romain[modifier | modifier le code]
À la fin du I siècle, Octave s’impose, et organise l’aristocratie romaine en deux
er

niveaux : l’ordre sénatorial et l’ordre équestre de rang moindre, avec chacun leurs
obligations et leurs prérogatives. Les recensements périodiques, menés maintenant
par l’empereur, tiennent à jour et contrôlent l’effectif de ces deux ordres.
La conquête romaine chercha l’entente avec les élites locales des peuples ou des
états qui passaient sous la domination ou le protectorat de Rome. L’ancienne
aristocratie des provinces conquises demeura généralement donc en place : roitelets
d’Orient, grands prêtres juifs, bouleutes des cités helléniques, rois et aristocrates des
peuples celtes, etc. Une autre aristocratie se développa dans les provinces
romaines, sur le modèle de la République romaine : les magistrats élus dans
les municipes entraient à la fin de leur mandat annuel dans la Curie de leur cité,
équivalent local du Sénat romain, d’où leur nom de décurion.
À l’apogée de l’Empire romain, l’aristocratie romaine forme la pyramide suivante :

 au sommet l’ordre sénatorial, avec ses 600 sénateurs, de plus en plus d’origine
provinciale ;
 l’ordre équestre, estimé à environ 5 000 ou 6 000 membres ;
 l’ordre décurional, estimé à environ 400 000 membres, italiens et provinciaux
pour une population estimée entre 50 et 80 millions d’habitants, dont environ 4 à
5 millions de citoyens romains au I siècle.
er

Ces ordres ne sont pas fermés, il est possible de s’élever de l’un à l’autre, et pour un
simple citoyen de rentrer dans un de ces ordres, pour peu qu’il en ait la fortune et
l’ambition.
À la fin de l’empire, sous le Dominat, la différence entre sénateurs et chevaliers s'est
effacé, tous font partie de l'aristocratie des Honestiores.
Haut Moyen Âge[modifier | modifier le code]
Sous la Rome antique, le pouvoir avait une existence autonome, l’imperium qui se
passait d'un magistrat à l'autre, puis d'un empereur à l'autre. Les individus fidèles à
un pouvoir, soldats, administrateurs des provinces, prêtaient serment à ce pouvoir
permanent dont le détenteur n'était qu'un dépositaire provisoire.
Cette continuité est mise en cause au Moyen Âge, puisque les guerriers prêtent
serment à une personne, leur roi. Si celui-ci disparaît, le serment est caduc ; ce qui
est à l'origine d'une instabilité du pouvoir.
Contrairement à une idéologie qui laisserait croire une unité tribale, les peuples
germaniques sont au départ des Grandes invasions du V siècle une confédération
e

de nations mêlées qui se choisissent un roi. Lors de leur sédentarisation, ils sont
amenés à légiférer pour que la cohésion sociale entre peuples des territoires et
armée de combattants puisse se réaliser. Entre les guerriers et le roi se forme une
aristocratie dominante dont les titres sont variables selon les peuples
(exemple : dux et gastalds pour les Lombards). Cette caste intermédiaire en
formation, regroupée autour du chef de peuple et fédéré à l'Empire romain
d'Occident par son titre de dux, grade militaire dans l'administration romaine lui
donnant des fonctions de gouverneur provincial tant que l'Empire existe, constitue
l'embryon de la noblesse médiévale, les vassaux étant liés par l'hommage.
Les titres nobiliaires transitent ensuite par leur signification, de rex, dux et autres
(Graf, jarls, khans, seigneurs de la guerre) vers les acceptions médiévales
des rois, ducs, comtes et marquis et la mise en place de leur hérédité.
En France[modifier | modifier le code]
Ancien Régime[modifier | modifier le code]
La noblesse de la société d'Ancien Régime prolonge le régime féodal et lui ajoute
des rites nouveaux, notamment les arts de cour, qui sacralisent la différence avec
le tiers état.
Sous l'Ancien Régime, on ne parle pas d'« aristocrate » qui est un anglicisme
révolutionnaire. On ne parle que de noblesse et de gentilhomme (homme noble par
son sang comme par sa vie). Elle constitue, avec le souverain et le clergé, la classe
des propriétaires décrite par le physiocrate François Quesnay dans le Tableau
économique (1758-1759). Elle joue un rôle économique important en faisant les
avances (semences, charrues, granges) qui permettent aux laboureurs de faire
naître les richesses.
Depuis la Révolution française[modifier | modifier le code]
Jugement en dernier ressort de l'Aristocratie aux Enfers, où l'on y remarque les
principaux Monstres, (musée de la Révolution française).
La République, elle, met les droits au fronton de sa Déclaration, et ne peut intégrer
cette conception de la politique. Les doctrinaires se chargent alors de malmener le
terme d'aristocrate, jusqu'à la perversion du sens originel.
Une lecture restrictive (et récupératrice) de Montesquieu, dans son ouvrage De
l'esprit des lois publié en 1748, pouvait ouvrir la voie au rapprochement sémantique
aristocrate-noble. Au livre III chapitre IV intitulé « Du principe de l’aristocratie », il
juge ainsi ce type d'organisation politique : « Le gouvernement aristocratique a, par
lui-même, une certaine force que la démocratie n’a pas. Les nobles y forment un
corps qui, par sa prérogative et pour son intérêt particulier, réprime le peuple […] ».
En réalité, l'auteur des Lettres persanes décrit ici une déviance possible comme pour
tout système politique. Il revient bien vite dans ce même chapitre au principe
essentiel autour duquel les pouvoirs aristocratiques doivent se construire : « La
modération est donc l’âme de ces gouvernements. J’entends celle qui est fondée sur
la vertu, non pas celle qui vient d’une lâcheté et d’une paresse de l’âme ».
Un peu plus de quarante ans avant l'éclatement révolutionnaire, Montesquieu rejoint
encore, dans une ultime fidélité au sens antique, la définition donnée par Aristote de
l'aristocratie : « […] gouvernement d’un petit nombre d’hommes […] soit parce que
l’autorité est entre les mains des plus gens de bien, soit parce qu’ils en usent pour le
plus grand bien de l’État et de tous les membres de la société ».
Le galvaudage du vocable aristocrate se diffuse et se systématise à la fin
du XVIII siècle. Il consiste à désigner, comme le fait Beaumarchais dans une
e

perspective péjorative, les partisans de la noblesse, puis, lors des actions


révolutionnaires, les adeptes de l'ancien régime. Ainsi, un modeste savetier de
Valréas, nostalgique de la royauté, est-il traité d'aristo, alors que les frères Lameth,
nobles de souche, mais élus députés de gauche à l'Assemblée constituante, sont
choyés comme citoyens exemplaires.
La confusion des termes et l'approximation des concepts, portées par l'élan d'un
renouveau idéologique, déterminent les « patriotes » dans l'assimilation progressive
de l'aristocratie à la noblesse héréditaire. Dans la nuit du 4 août 1789 la noblesse est
abolie et le mot noble est tout naturellement remplacé par aristocrate. Dix jours plus
tard, le ton de la confusion est donné avec un libelle intitulé La découverte du
complot des aristocrates. Dans le même registre, les citoyens entonnent le refrain de
Ça ira, « Les aristocrates à la lanterne ! » comme pour exorciser La Grande peur de
l'été 1789.
En fait, l'abolition des privilèges la nuit du 4 août 1789 conduit à distinguer le
« patriote » qui respecte cette abolition, et l'« aristocrate » qui continue à revendiquer
des privilèges. Dans ce sens, l'aristocrate peut être non seulement un noble, mais
aussi une corporation, une ville revendiquant des droits particuliers, l'Église avec le
refus de la suppression du droit d'asile, etc. Les particuliers et les collectivités qui
refusent l'application des nouvelles lois sont donc des aristocrates, alors que les
nobles qui les respectent sont des patriotes.
Cette déviance linguistique se confirmera au XIX siècle. L'aristocrate est distingué
e

alors par : un titre, une particule nobiliaire, des terres et son éducation. Au bout du
compte, la méthode de qualification retenue est à l'exact opposé de celle en cours
dans l'antiquité : on ne jauge plus la valeur intrinsèque de l'homme, on soupèse
ses oripeaux.
La révolution de 1848 imposera une nouvelle définition de l'aristocrate, qui pourra
désormais être un simple bourgeois. Le Journal des débats politiques et littéraires du
1er août 1848 écrit : « Lorsque nous disons aristocratie, nous ne parlons pas
seulement de la noblesse. Toutes les classes privilégiées sont aristocrates »
Dans la suite, le terme d'aristocrate sera usuellement employé pour désigner une
minorité dominante quelconque. On parlera ainsi d'une aristocratie technocratique ou
d'une oligarchie financière. La notion originelle est perdue. Les générations suivantes
devront donc faire appel à un autre mot pour exprimer ce que cette notion signifiait
au sens premier : l’aristocratisme.

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