TM

CRÉDITS
FANTASY FLIGHT GAMES RESPONSABLE DE PROJET SENIOR
John Franz-Wichlacz
CONCEPTION DU SUPPLÉMENT RESPONSABLE SENIOR DE
ET DÉVELOPPEMENT DÉVELOPPEMENT DE PROJET
Tim Cox, Tim Huckelbery et Katrina Ostrander Chris Gerber
DÉVELOPPEMENT SUPPLÉMENTAIRE CONCEPTEUR EXÉCUTIF
Dave Allen, Owen Barnes, Mark Brendan, Corey Konieczka
Mark Slabinski et Greg Spyridis
DIRECTEUR CRÉATIF
ÉDITRICE Andrew Navaro
Christine Crabb
RESPONSABLE DE LA PUBLICATION
RELECTEURS Christian T. Petersen
Molly Glover, David Johnson et Jeremiah J. Shaw
DIRECTEUR DU DÉPARTEMENT JEU DE RÔLE
Sam Stewart
TESTEURS
Jerad Bailey, James Binnie, William Jeremiah Bumgarner, Dana
FICTION Cartwright, James J. Cartwright, Dan Clark, Anthony DeMinico,
Craig Gallant Ali Eddy, Dawn Fannin, Mike Fannin, Tim Flanders, Casey
CRÉATION ORIGINALE Grover, Mary Hershey, Sterling Hershey, Dominic Hoeppner, TK
DES ROYAUMES DE TERRINOTH Jusola-Sanders, Keesjan Kleef, Christian Knapp, Skyler Latshaw,
Christian T. Petersen et Darrell Hardy Josh Lease, Brian Lewis, Jamie Lewis, Dean Lutz, Thomas Lutz,
RÉVISION DE L'HISTOIRE DE RUNEBOUND Pim Mauve, Nathaniel Kyle Ng, Tara Ng, Allison Parker, Brandon
Kara Centell-Dunk et Daniel Lovat Clark Perdue, James Quam, Rob Quillen, Eric Roos, Juan Rosales,
Michelle Stepp, Jake Tighe, Regine Mualla Tighe, Jeff Tyler Will
CONCEPTEURS GRAPHIQUES Vaughan, Rex Vogen, Joris Voogd, Jan-Kees Voogd et Alex West
Duane Nichols et Evan Simonet
RESPONSABLE DE LA
CONCEPTION GRAPHIQUE VERSION FRANÇAISE
Brian Schomburg PAR EDGE STUDIO
ILLUSTRATION DE COUVERTURE
TRADUCTION
Anna Christenson
Magali Plouzane Delobbe
ILLUSTRATIONS INTÉRIEURES
Alex Aparin, Alberto Bontempi, Andrew Bosley, Marius Bota, RELECTURE
Manon Le Gallo et Jimmy Prost
Dmitry Burmak, Anna Christenson, Emile Denis,
Dinodrawing, Simon Dominic, Carolina Eade, Simon Echert, MISE EN PAGE
Mariusz Gandzel, Nicholas Gregory, Johan Grenier, David Ricardo Martínez Vicente pour Edge Studio
Griffith, Margaret Hardy, Tyler Jacobson, Thomas Karlsson,
RESPONSABLE DE LOCALISATION
David Kegg, Jordan Kerbow, Mathias Kollros, Limetown
Shan Deraze
Studios, Antonio Maínez, Jaime Martinez, Enrique Rivera,
Michael Rookard, Charlène Le Scanff, Chris Seaman, DIRECTEUR DU DEVELOPPEMENT
Timur Shevtsov, Stephen Somers, Florian Stitz, Sandara Tang, Luis E. Sánchez
Allison Theus, Jokubas Uogintas, Wibben et Matt Zeilinger RESPONSABLE ÉDITORIAL
DIRECTEUR ARTISTIQUE Stéphane Bogard
Taylor Ingvarsson
RESPONSABLE DE LA DIRECTION ARTISTIQUE
Melissa Shetler

TÉLÉCHARGEMENT GRATUIT © 2022 Edge Studio. Fantasy Flight Games et le logo FFG sont ® de
DU PDF Fantasy Flight games. Apple et le logo Apple sont TM d’Apple, Inc,
aux USA et dans les autres pays. App Store est une marque de service
Rendez-vous sur le site de DriveThru et utilisez ce code d’Apple Inc. Google Play est TM de Google Inc. Publié par Edge
pour télécharger gratuitement la version PDF de ce livre. Studio - Groupe Asmodee et distribué par Novalis, 18 rue Jacqueline
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Tel : 01 34 52 19 70. Conservez ces informations pour vos archives.
ISBN : 8435407635890
Code Produit : ESGNS05FR
Première impression : Juin 2022
Imprimé et manufacturé par Standart Impressa, Dariaus ir Gireno
g. 39, LT-02189 Vilnius, Lituanie.
Pour plus d’informations sur la gamme Genesys, visitez notre site
Internet : edge-studio.net

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 TABLE DES MATIÈRES
Chapitre I : Contes des Ténèbres.....................................24
Les mythes de la création.................................................... 24
Les Elfes............................................................................. 26
La Guerre de la Larme de l’Ombre..................................... 27
Le difficile avènement des jeunes espèces............................ 29
L’histoire ancienne des Nains.............................................. 30
L’Humanité progresse......................................................... 31
L’ascension de Llovar et des Uthuk Y’llan........................... 33
L’ascension de Timmorran.................................................. 35
Les Premières Ténèbres....................................................... 36
L’ascension et la chute du roi Daqan................................... 38
Les Deuxièmes Ténèbres..................................................... 39
L’ascension des Anciens Rois.............................................. 43
Les Troisièmes Ténèbres...................................................... 45
L’Âge de Lorimor............................................................... 48
L’Âge du Courage............................................................... 50
Chapitre II : L’appel de l’aventure...................................58
Créer votre héros................................................................ 60
Espèces des personnages................................................... 60
Carrières........................................................................... 70
Aptitudes Héroïques......................................................... 74
Nouvelles compétences et nouvelles règles.......................... 81
Nouveaux talents................................................................ 84
Armes................................................................................. 92
Armures............................................................................. 96
Artisanat............................................................................. 97
Accessoires magiques.......................................................... 98
Matériel et services........................................................... 100
Améliorations et enchantements....................................... 106
Objets magiques............................................................... 108
Créer et fabriquer des objets............................................. 112
Alchimie......................................................................... 113
La magie de Mennara....................................................... 115
Compétences magiques.................................................. 115
Les éclats runiques............................................................ 118
La force de la dévotion..................................................... 122
Les vertus de la virtuosité.................................................. 125
Le shamanisme................................................................. 126
La magie elfique............................................................... 127
Chapitre III : Terres de magie.......................................134
Terrinoth.......................................................................... 136
Les Cités Libres.............................................................. 146
Les Terres des Brumes....................................................... 160
Secrets d’outre-tombe..................................................... 168
L’Aymhelin....................................................................... 174
Les Monts Dunwarr......................................................... 186
La Lande Vitrifiée............................................................. 193
Les Plaines Brisées............................................................ 197
Les Steppes du Ru et au-delà............................................ 208
Les murmures de l’Ynfernael.......................................... 218
Lorimor et les Torue Albes................................................ 220
Isheim.............................................................................. 232
Al-Kalim.......................................................................... 242
Zanaga............................................................................. 252
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction
BIENVENUE SUR
LA TERRE D'ACIER
O yez ! Oyez ! Soyez les bienvenus dans les Royaumes de Terrinoth !
Ce livre est un complément de la gamme de jeux Genesys ; il
vous permet d’utiliser notre Narrative Dice System (Système de Dés
Narratifs) dans le monde épique et fantastique où se déroulent les jeux
Descent : Voyage dans les Ténèbres, Runebound et Runewars. Dans
Royaumes de Terrinoth, vous deviendrez un héros de légende, prêt
à dégainer son épée et son livre de sorts pour affronter des morts-
vivants terrifiants et le feu des Dragons, et découvrir les sombres secrets
des royaumes démoniaques. Que vous choisissiez de devenir un noble
défenseur des justes causes, un roublard aux ruses retorses avide de
gloire et de richesse ou un être infâme prêt à tout pour conquérir une
infinie puissance, vous vivrez des aventures incroyables !
Si vous avez déjà tellement hâte de partir à l’aventure que vous
voulez commencer immédiatement, foncez et passez directement à
la page 24, où nous nous plongerons dans l’histoire de Terrinoth,
ou rendez-vous à la page 60 où nous entrerons dans le vif du sujet
en vous expliquant comment construire et jouer votre personnage.
Sinon, nous allons prendre un peu de temps pour vous expliquer ce
qu’est ce livre et comment l’utiliser ; nous vous donnerons également
un aperçu de son contenu. Donc, si vous êtes débutant en jeu de rôle,
ou si vous découvrez le système de jeu Genesys, nous vous conseillons
de lire attentivement les sections suivantes.
QU'EST-CE QUE CE LIVRE,
ET À QUOI SERT-IL ?
Royaumes de Terrinoth est un supplément pour le jeu de rôle
Genesys, ce qui signifie que pour l’utiliser, il vous faut aussi le livre
de base (en vignette ci-dessous). Vous aurez également besoin de dés
spéciaux. Vous pouvez vous en procurer dans votre magasin habi-
tuel, ou télécharger l’application de dés Genesys gratuitement, pour
l’appareil de votre choix, sur vos sites de télé-
chargement habituels.
Royaumes de Terrinoth présente un
univers que vous pouvez utiliser pour
créer vos histoires avec le système de jeu
Genesys. C’est une version plus détaillée
de l’un des univers de la Partie II du livre
de base Genesys. Vous utiliserez donc les
règles qui se trouvent dans la Partie I du
livre de base Genesys, combinées à celles
présentées ici. Les règles du livre Royaumes
de Terrinoth sont conçues pour avoir
la préséance sur celles du livre de base
Genesys ; ainsi, si certaines règles sem­blent
contradictoires, suivez celles indiquées dans
ce livre.
Par exemple, les règles de création de per-
sonnage sont indiquées dans le livre de base
Genesys : vous suivrez toujours les sept étapes
qui y sont décrites lorsque vous créerez un
personnage pour ce jeu. Cependant, le livre
Royaumes de Terrinoth propose différents choix
quand vous suivez ces étapes. Pour développer cet exemple, lors de
l’étape 2, vous sélectionnez un archétype ou une espèce pour votre per-
sonnage. Le livre de base Genesys offre un choix de quatre archétypes
4
humains. Dans le livre Royaumes de Terrinoth, vous pourrez choisir
de jouer un Humain, un Nain, un Elfe, un Orc, un Gnome, un Félis ou
l’une des nombreuses options proposées à partir de la page 60.
En résumé, Genesys est le moteur qui permet à votre jeu de « tour-
ner » ; le livre Royaumes de Terrinoth est la carrosserie qui vous
permettra de jouer de nombreuses aventures où des héros explorent
un monde foisonnant de détails dans un univers de fantasy.
PARLEZ-MOI DE TERRINOTH
Terrinoth, terre de grandeur oubliée et de secrets perdus, fut jadis dirigé
par les Anciens Rois qui utilisèrent de puissantes formes de magie pour
accomplir des actes héroïques et bâtir de merveilleux édifices. Toutefois,
cette terre souffrit atrocement une fois tombée aux mains de ses trois
grands ennemis : les armées de morts-vivants de Waiqar le Traître, les
hordes démoniaques d’Uthuk Y’llan assoiffées de sang et les terrifiants
Dragons de la Lande Vitrifiée. La plupart des grandes cités de Terrinoth
ne sont plus que ruines. Les merveilleux secrets et les puissants artefacts
de leur glorieux passé gisent désormais sous leurs décombres.
Depuis des siècles, l’obscurité et la décadence règnent à Terrinoth,
mais les royaumes se trouvent maintenant à un moment crucial de
leur histoire : de courageux héros apparaissent alors que la survie de
leurs terres est en jeu, d’audacieux aventuriers affrontent les ignobles
créatures qui vivent dans les ruines des âges passés, s’emparent de
ces lieux et y découvrent les trésors de leurs ancêtres. Les seigneurs
Daqan, héritiers des anciens royaumes, reconstruisent les forteresses
et lèvent des armées. Les magiciens de Havregris rassemblent des
runes de pouvoir pour réveiller les gardiens de pierre et d’acier, alors
qu’au même moment, les anciens ennemis des espèces ancestrales
de Terrinoth s’agitent à nouveau. Les royaumes ont plus que jamais
besoin de champions courageux et ingénieux
pour combattre l’obscurité qui grandit.
Mais Terrinoth n’est qu’un des territoires
du vaste monde de Mennara. Dans tous les
royaumes, les forces du bien se rassemblent,
comme celles du mal, en prévision d’un
nouvel affrontement. Au sud, les Elfes de
la vaste forêt de l’Aymhelin invoquent les
esprits des arbres, ainsi que les pouvoirs
de l’air et de la lumière, pour repousser les
hordes démoniaques qui ten­tent de piller
leurs territoires. Au nord, dans les Monts
Dunwarr, les Nains se rassemblent pour
affronter leurs Némésis, les grands Wyrms,
qui ont déjà failli les éradiquer par deux
fois. À l’est, les tribus orques des Plaines
Brisées se préparent à honorer leurs anciens
pactes et à combattre aux côtés des armées
de l’Humanité une fois encore.
Le monde de Mennara s’étend même
au-delà des mers, vers l’Empire de Lorimor
et sa gloire mourante, les landes de glace
d’Isheim, les jungles de Zanaga et les
royaumes désertiques d’Al-Kalim. Toutes ces terres regorgent d’his-
toires qui n’attendent que vous pour être racontées et de secrets que
seul découvrira un aventurier assez audacieux.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction

QUE VAIS-JE TROUVER PUIS-JE UTILISER TOUT CECI

DANS CE LIVRE ? POUR CRÉER MON PROPRE
Nous avons divisé Royaumes de Terrinoth en trois chapitres. Dans UNIVERS DE FANTASY ?
le Chapitre I : Contes des Ténèbres, nous décrivons l’histoire de Bien sûr, et surtout n’hésitez pas ! L’un de nos objectifs lors de la
l’ensemble du monde de Mennara. Pour l’écrire, nous avons princi- création de Genesys était de vous permettre de l’utiliser pour créer
palement utilisé des rumeurs et ouï-dire collectés par Alanya, célèbre vos propres mondes ; cela reste notre intention avec Royaumes de
érudite de Havregris (nous vous laissons ainsi de nombreuses possi- Terrinoth. Nous espérons que ce livre sera un outil aussi précieux
bilités pour modifier les faits passés afin de les adapter à votre propre lorsque vous créerez votre propre univers de fantasy qu’en jouant
histoire si celle-ci prenait une direction légèrement différente). dans le nôtre.
Dans ce chapitre, nous vous présentons la formation du monde Qu’il s’agisse de nos règles concernant les Orcs, Nains, Elfes ou
et nous vous expliquons comment les différentes espèces y ont vu le Gnomes, des armes et du matériel présentés, des règles pour la magie
jour. Nous suivons ensuite l’histoire de Mennara à travers la Guerre ou même des carrières, compétences et talents proposés, tous ces
de la Larme de l’Ombre, qui déchira les tribus elfiques originelles, éléments sont assez flexibles pour être importés dans n’importe quel
et les trois grandes Ténèbres qui tourmentèrent ce monde au cours univers de fantasy. N’hésitez donc pas à piocher dans ces différents
des millénaires. Lors de chacune des Ténèbres, Terrinoth fut qua- chapitres pour vous aider à construire votre monde. Il en va de même
siment terrassé par un nouvel ennemi, mais à chaque fois, celui-ci de la plupart des adversaires listés, comme les Dragons et les Gobelins,
fut finalement vaincu par des héros qui se dressèrent pour défendre ou même des règles sur les éclats runiques et autres objets magiques
leurs royaumes. spécifiques à votre univers ; il ne vous restera qu’à modifier leurs noms
Un lecteur attentif remarquera peut-être que les ennemis qui ont et les histoires qui les concernent.
provoqué les trois Ténèbres, les Uthuk, les morts-vivants et les Dragons, Voilà donc un aperçu du livre et de son utilisation potentielle.
recommencent tous à s’agiter. Les héros des Elfes, des Nains, des Bonne chance dans vos aventures, nous espérons que vous passerez un
Humains et des Orcs peuvent-ils à nouveau se dresser contre ces enne- excellent moment en explorant les royaumes de Terrinoth !
mis ancestraux qui menacent les royaumes tous à la fois ? Le sort de
Terrinoth repose entre vos mains et celles de vos compagnons de jeu !
Ce qui nous amène au Chapitre II : L’appel de l’aventure, où nous
vous fournissons toutes les options dont vous aurez besoin pour créer
et construire des personnages et vivre des aventures sur les terres de
Terrinoth et au-delà. Le premier tiers de ce chapitre constitue essen-
tiellement un supplément à la Partie I, Chapitres 2 à 4 du livre de base
Genesys, et propose des espèces et des compétences nouvelles, ainsi
que de nouveaux talents pour créer votre personnage. Ce début de
chapitre comporte également des règles spécifiques aux Royaumes de
Terrinoth, y compris un système de conception d’Aptitude Héroïque
unique et personnalisable pour votre personnage !
Le deuxième tiers complète la section de la Partie II du livre de base
Genesys consacrée au matériel et aux objets des univers de fantasy.
Nous y ajoutons ici tout ce que vous pourriez souhaiter donner à votre
personnage pour qu’il mène à bien ses aventures !
Le dernier tiers du chapitre explique comment la magie fonctionne
dans cet univers et précise ses règles d’utilisation. Pour cela, nous nous
basons sur les règles relatives à la magie de la Partie III du livre de base
Genesys : n’hésitez pas à vous les approprier et à les développer. Dans
cette section, vous trouverez également beaucoup d’informations inté-
ressantes sur ce qui rend la magie de Terrinoth unique.
Enfin, dans le Chapitre III : Terres de magie, nous vous présen-
terons un index géographique exhaustif de Terrinoth et du reste du
monde de Mennara. Cette section s’avérera extrêmement utile aux
MJ, car des profils de PNJ sont fournis pour chaque territoire, ainsi
que des exemples d’ennemis, monstres et créatures que nous espérons
amusants à rencontrer (et à combattre) – ce chapitre servira donc éga-
lement de bestiaire.
Vous remarquerez enfin dans ce livre que nous citons des extraits du
Journal de Tarik Al-Farabi, serviteur du Grand Calife d’Al-Kalim,
obligé de voyager à travers le monde pour percer les secrets d’une
gemme mystérieuse. Tarik vous sert donc de guide, car il se retrouve
« véritablement plongé » dans notre univers ; son point de vue de
voyageur étranger pourra être complémentaire au vôtre (sauf quand
il écrit sur Al-Kalim, qu’il considère évidemment comme la nation la
plus avancée et la plus sophistiquée de Mennara).
 LUMIÈRE
CONTRE
TÉNÈBRES
N ous vivons un âge de gloire fanée, empli d’odes et de chants de
bravoure, peuplé de noms légendaires et sacrés, une ère qui menace
de s’achever pour les vivants… Jadis, de puissants héros se sont opposés
aux forces du mal et aux calamités qu’elles apportaient ; après leur trépas,
d’autres ont pris leur place, mais sans égaler leur vaillance ni leurs exploits.
Plus que jamais, Mennara a besoin de formidables héros pour le sauver, car
il risque de disparaître définitivement.
Les mythes et légendes de Terrinoth et des autres royaumes de Mennara
ont toujours conté les aventures de héros, personnages qui surgissent
précisément au bon moment, dotés d’assez de courage, d’habileté et de
chance pour conjurer tous les malheurs qui se répandent sur cette terre.
Les héros qui répondent à l’appel viennent des quatre coins du monde,
quels que soient leur origine ou leur mode de vie. Les chevaliers, qui ne
jurent que par l’honneur, s’opposent à toute injustice, tandis que les fur-
tifs roublards s’aventurent dans l’oubli des tombes et des catacombes à
la recherche d’artefacts perdus. Les chasseurs agiles traquent sans relâche
leurs dangereuses proies sur de vastes distances, et les prêtres errants au
service des dieux extirpent le mal partout où il se cache. L’appel des héros
ne dépend ni du lieu, ni du sang. Des truands cyniques, qui n’ont que
le blasphème aux lèvres, se retrouvent parfois à marcher aux côtés de
fanatiques religieux en quête de justice et d’harmonie. Même s’ils étaient
autrefois de farouches ennemis, une fois appelés à servir comme héros, ils
s’unissent pour défendre une cause.
En ces temps de troubles, les héros sont extrêmement importants,
peu importe leur motivation. Le destin trouve toujours un moyen de les
conduire au bon endroit, au bon moment. Que brûle un village, qu’on
déterre un temple maléfique, qu’un monstre annihilateur de monde sur-
gisse des profondeurs, et inévitablement, des héros apparaissent. Une fois
entre leurs mains, l’histoire est toute tracée, la voie à suivre devient évi-
dente pour tous. Quand la foudre mystique s’abat sur les plaines, quand
les pirates pillent la côte, les héros sont souvent les seuls à avoir le courage
et les compétences nécessaires pour venir à bout de la catastrophe.
Que ce soit grâce à leur excellence au combat, leur ruse outrageuse ou
leurs utiles connaissances, les héros traversent l’adversité, chacun à leur
façon. Les héros naissent et succombent, certains plus vite que d’autres,
mais aucun, quelles qu’aient été sa nature et sa force de caractère, n’a
jamais vraiment réussi à résister à l’appel de l’aventure dans les terres sau-
vages. L’histoire oscille toujours, tel un pendule, du chaos et de la déso-
lation au courage et à la résistance. Personne ne saurait dire s’il existe un
équilibre cosmique qui doit être maintenu ou si le monde lui-même réagit
aux forces qui le détruisent. Seule certitude : les héros ont toujours fait
partie de l’histoire du monde, et il en ira toujours ainsi tant qu’il restera
des gens pour raconter leurs exploits.

7
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction

DES PAYSAGES MERVEILLEUX

D es pics glacés d’Isheim aux dunes brûlantes d’Al-Kalim, des
rives desséchées de Kaylor Morbis aux tropiques pluvieux de
Zanaga, les paysages et les climats des terres de Mennara sont aussi
variés que les gens qui y vivent. Vous trouverez toujours un endroit
fantastique à découvrir et à explorer. À Terrinoth, les plaines et les
rivières s’étendent d’une baronnie à l’autre, les voyageurs et les com-
merçants trouvent refuge dans les immenses cités. La cité fortifiée
d’Archaut, capitale des seigneurs Daqan, est l’un des nombreux bas-
tions qui surveillent l’espace séparant les fières chaînes de montagnes
de Terrinoth des forêts isolées.
Dans le lointain Al-Kalim, les déserts s’étendent sur des centaines
de lieues, cachant des villes belles comme des joyaux et des caravanes
solitaires parmi ses dunes presque infinies. À l’ouest, les îles baignées
de soleil des Torue Albes emplissent les esprits de rêves de trésors
enfouis dans les criques et les récifs colorés, tandis que la péninsule de
Lorimor, où jadis de nombreux exilés trouvèrent refuge, fascine avec
ses champs bien ordonnés et ses cultures délicates et ingénieuses sur les
rares pans de nature qui ont été préservés.
Au nord de Terrinoth, d’étranges brumes obscurcissent l’horizon ;
là-bas, la pierre et le bois des nobles palais d’autrefois ont été défigu-
rés par une magie corrompue, prenant d’étranges formes qu’il vaut
mieux ne pas voir à la lumière du jour. Les morts-vivants errent
librement dans ces tourbières, ces marais et les mausolées effrayants
qui s’y dressent.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction

Dans le Dunwarr voisin, les montagnes isolent et protègent les
communautés naines. Malgré les nombreuses tempêtes de neige, les
vents glacés et les paysages stériles, la vie parvient à se maintenir dans
cet endroit hostile. Le paysage accidenté des Monts Dunwarr est le
parfait reflet de ses habitants, résistants et vigoureux.
Plus au nord encore, les étendues glacées d’Isheim offrent une beauté
austère, avec leurs longues nuits et leurs rares cités, mais, sous leurs airs
tranquilles, elles regorgent de dangers. Ces terres sont leur propre sculp-
teur, elles taillent de grandes vagues de glace et de neige ou gèlent en un
éclair des forêts entières, transformant les arbres en statues étincelantes.
Pourtant, au cœur de ce rude territoire existent de petites enclaves de
chaleur, comme des îlots sacrés perdus dans une terre d’absolu.
Loin à l’est s’étendent des terres hostiles ; la mort seule attend
les insensés qui se rendent dans les Steppes du Ru et les Landes
de Charg’r. Là, loin de la civilisation, au-delà des derniers vestiges
des protections des seigneurs Daqan, les frontières entre les mondes
s’effondrent et laissent sortir l’Ynfernael. Des épines couvertes de
sang saillent du sol, des essaims d’insectes voraces dévorent constam-
ment la moindre végétation. D’horribles fosses s’ouvrent où se
déchaîne la violence de l’Ynfernael, dans les régions les plus corrom-
pues des Terres Sombres.
Au sud de Terrinoth, la forêt de l’Aymhelin envahit les flancs des
collines et grimpe jusqu’au sommet des montagnes, sa canopée aussi
sombre et inquiétante que l’océan le plus profond. Terre de murmures,
site où fut pratiquée une ancienne sorcellerie, sa beauté éthérée tente
d’effacer le monde sombre et brutal que les Elfes contemplent au-delà
de leurs frontières. Ainsi sont les paysages de ce monde : magnifiques,
sauvages et pleins de vie, ils offrent d’infinies possibilités pour faire
naître des légendes.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction

LA MAGIE EST PRÉCIEUSE

B ien que cela ne soit pas toujours visible, Mennara est un monde
imprégné de magie. Le Verto Magica, la rotation inhérente
au monde, constitue la source de toute l’énergie des arcanes. Jadis,
lorsque les Humains et les autres espèces commencèrent à apparaître,
cette énergie était plus facile à toucher pour certains que pour d’autres.
On vit même naître de véritables sorciers dotés d’une rare affinité avec
la magie qui leur permettait de sentir son flux et son rythme. Quand
la puissance de la magie atteignit son apogée, Timmorran Lokander,
le plus grand magicien qui ait jamais vécu sur ces terres, eut l’idée de
l’exploiter pour le bien de tous à Mennara.
Malheureusement, un tel pouvoir s’accompagnait d’un grand
orgueil. L’Orbe du Ciel de Timmorran créa une nouvelle relation
entre la magie et le monde physique. La magie fut à jamais divi-
sée entre l’ère d’avant Timmorran et celle qui suivit son existence.
L’entreprise titanesque de création de l’artefact exigea une puissance
dont le monde n’avait jamais été témoin auparavant, et Timmorran
fut obligé de faire un terrible choix. Il voulait créer l’Orbe pour aider
les habitants de Terrinoth, mais pour ce faire, il devait les priver d’une
partie de la connexion magique naturelle qui les liait tous au monde,
afin de la rediriger vers l’Orbe.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction

Lorsque Timmorran fut contraint de briser l’Orbe, il modifia éga-
lement le lien fondamental entre tous les êtres et la magie. Bien que
la nature magique du monde lui-même fût inchangée, de nombreux
êtres se retrouvèrent soudain perdus, incapables d’utiliser des pouvoirs
qui leur étaient autrefois familiers. Certains, comme Waiqar, étaient
encore capables de puiser dans la magie grâce à leur seule volonté,
mais pour beaucoup d’autres, les seules sources de pouvoir restantes
étaient les éclats de l’Orbe : les Étoiles de Timmorran.
Cependant, tout ne fut pas perdu. Plus tard, les Seigneurs Dragons
s’opposèrent au cours d’une guerre terrible pour tenter de rassembler
ces éclats, les abîmant alors davantage tandis qu’ils se les arrachaient et
décidaient d’y sculpter des runes pour les lier et maîtriser la magie puis-
sante qu’ils contenaient. Ainsi naquirent les éclats runiques, ces petits
morceaux de l’Orbe du Ciel qui peuvent être utilisés pour améliorer
les matériaux, les artefacts, et accomplir bien d’autres merveilles selon
le bon vouloir de l’utilisateur. L’Humanité, dans son infinie résilience,
a trouvé le moyen de s’adapter à cette nouvelle situation et d’utiliser
ces objets à son profit.
La magie des runes, comme on l’appelle, est désormais la forme
de magie la plus accessible à Terrinoth ; les éclats runiques sont les
trésors les plus précieux qu’un aventurier puisse espérer posséder. Ces
éclats alimentent les dispositifs magiques les plus puissants au monde
et ornent les meilleures armes que les Humains possèdent. Les éru-
dits de l’Université de Havregris étudient attentivement ces fragments
pour percer leurs secrets.
Des guerres ont éclaté pour s’emparer de certains éclats ; de nom-
breux êtres les convoitent à des fins égoïstes, alors que les héros les
recherchent car leur pouvoir leur permettra de résister à des enne-
mis aux forces inimaginables. Bien que la magie soit rare, elle n’a
pas disparu pour toujours. Les éclats runiques en sont la preuve ; ils
redonnent espoir aux Humains et aux autres espèces dans des situa-
tions autrement insurmontables.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction

DES AVENTURES PÉRILLEUSES

C omme le veut l’adage : « Le trésor appartient aux héros…
enfin, s’ils arrivent à le trouver. » Depuis des temps immé-
moriaux, d’innombrables histoires ont commencé de cette façon,
incitant les héros à se rendre dans des lieux oubliés de Mennara,
torche à la main, pour s’emparer des richesses et des reliques per-
dues qui peuplent les légendes.
Le destin est cruel : il laisse d’innombrables châteaux, donjons et
forteresses tomber en ruine au cours de l’histoire, abandonnés, rasés,
ou tout simplement oubliés alors que les habitants partent vivre
ailleurs. Bien que les ruines qui constellent Terrinoth rappellent à
ses peuples leur lointain passé, le fait qu’on ait laissé ces bâtiments
s’écrouler atteste de l’état de lent et long déclin de la région au fil des
siècles. L’héritage des Anciens Rois, tant dans les légendes que dans
les traces qu’ils ont laissées dans le monde réel, constitue une leçon
d’orgueil qu’apprennent vite ceux qui, au mépris des périls encourus,
abusent de la puissance de la magie.
Le baron Cédric Pierre d’Âme, premier des Anciens Rois, initia la
politique de construction d’imposants édifices que suivirent ses suc-
cesseurs, mais ne fut pas le seul bâtisseur dans l’histoire de Terrinoth.
Au fil des siècles, beaucoup d’autres travaillèrent également pour que
passent à la postérité leurs grandioses œuvres de roche sculptée. La
cité antique d’Archaut en est le parfait exemple, ainsi que les tours
sentinelles de la Grand-Route de Thelsvan qui mène à Tamalir. Les
châteaux, les forteresses et les remparts les plus décrépits datant des
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction
Ténèbres sont de véritables trésors. Certains édifices ont été trans-
formés en temples dédiés aux dieux draconiques, dont les disciples
croient qu’ils recréeront le monde dans les flammes et les cendres ;
d’autres sont consacrés à la Mère Araignée, dont les adeptes pré-
tendent qu’elle enveloppera le monde de sa soie pour le préserver tout
entier dans son étreinte froide.
Ces folies léguées par des bâtisseurs vaniteux renferment des richesses
que convoitent les aventuriers de Terrinoth. Tous les membres de la
lignée des Pierre d’Âme ont rempli chacune de leurs forteresses de tré-
sors, de puissants artefacts magiques et des armes les plus puissantes de
leur époque afin de défendre le peuple de Terrinoth. Bien que beaucoup
de ces édifices aient été dépouillés des objets de valeur les plus faciles à
trouver et à emporter, une immense magie règne toujours en ces lieux ;
les artefacts qui n’ont pas encore été dénichés sont probablement les
plus puissants. Les trésors restant à découvrir sont innombrables, mais
les éclats runiques constituent les plus formidables de ces trouvailles.
Personne ne sait dire avec certitude combien de ces éclats sont
cachés à travers le monde. L’infime espoir d’en trouver un suffit sou-
vent pour que beaucoup plongent tête baissée dans le danger et les
ténèbres. Un château abandonné et vide n’est peut-être rien de plus
que cela, mais il existe toujours une chance qu’un objet de l’ancien
monde y soit enterré, n’attendant qu’un courageux héros pour sortir
de son sommeil. Qu’il soit motivé par l’or, le pouvoir ou simple-
ment la gloire, un héros qui trouve un éclat runique et l’empêche de
tomber entre de mauvaises mains est une bénédiction pour tous les
êtres épris de justice.
Que les héros gardent courage et espoir, car l’aventure et les décou-
vertes formidables sont le lot de ces cryptes pourrissantes, ces châteaux
en ruine et ces donjons effondrés. Autrefois fiers, ces édifices recèlent
encore de grands secrets et des reliques puissantes, enfouis au cœur de
leurs salles abandonnées, attendant ceux ayant assez de courage et de
talent pour les mettre au jour.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction

LA NAISSANCE DES TÉNÈBRES

O n dit que de l’histoire s’écrit d’une encre de sang et de cendres :
cela est particulièrement vrai pour Terrinoth. Depuis sa
Fondation mythique, quand les Humains foulèrent pour la première
fois ses terres, la tragédie, portée par des ailes de feu implacables, n’a
cessé de déferler sur les royaumes.
Les pires drames se produisirent pendant les Âges des Ténèbres,
périodes où un mal indicible déchira le voile pour ravager, piller
et détruire les terres civilisées. Ces forces maléfiques semèrent un
immense chaos, mais elles souhaitaient avant tout anéantir Terrinoth.
Llovar, Waiqar, les Seigneurs Dragons : ces noms résonnent encore de
nos jours et provoquent toujours une peur ancestrale.
Le premier de ces fléaux, Llovar, était un Arpenteur de Rêves doté
d’une immense puissance et d’un don inné pour la magie. Son lien
avec les forces démoniaques du royaume maudit connu sous le nom
d’Ynfernael était sans pareil. Il leva un grand ost composé de son peuple,
les Uthuk Y’llan, ainsi que de Démons, d’Orcs et de Dragons, et enrôla
quiconque souhaitait se battre à ses côtés. L’époque où ses forces atta-
quèrent est connue sous le nom de Premières Ténèbres ; ce conflit
détruisit presque entièrement les civilisations humaine, naine et elfique.
Vint ensuite la trahison de Waiqar. Puissant général dans la guerre
contre Llovar et sa horde, Waiqar devint jaloux et méfiant vis-à-vis de
ses alliés ; il succomba à l’attrait de la nécromancie et de la magie noire.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction
Quelques décennies seulement après que Terrinoth avait évité la destruc-
tion suite à l’attaque de Llovar et de ses hordes démoniaques, les royaumes
menaient à nouveau une guerre pour leur survie. Pendant cette période,
connue sous le nom de Deuxièmes Ténèbres, les vivants guerroyèrent
contre l’armée des morts-vivants insensibles et décérébrés de Waiqar.
Waiqar fut finalement vaincu lui aussi. Pendant un certain temps, les
Ténèbres semblèrent bannies à jamais. La paix s’installa et les anciennes
batailles furent reléguées aux livres d’histoire. Puis vinrent les Dragons.
Près de cinq cents ans après la défaite de Waiqar, les Seigneurs Dragons
s’abattirent sur Terrinoth dans une grande tempête de serres et de
flammes, guidés par une faim insatiable de magie, avides de s’emparer
des Étoiles de Timmorran. Ainsi débutèrent les Troisièmes Ténèbres.
Les Dragons brûlèrent des cités entières et massacrèrent des dizaines
de héros qui les combattirent vaillamment, et surtout désespérément. Le
monde de Mennara tout entier fut menacé par la chaleur funeste et dévo-
rante de ces terribles envahisseurs. De nombreuses espèces de Terrinoth se
liguèrent pour résister aux Dragons ; la guerre prit fin aussi soudainement
qu’elle avait commencé lorsque les Dragons retournèrent dans leur loin-
taine contrée, chargés des trésors magiques qu’ils avaient volés. Des traces
de cette époque subsistent : les hybrides de Dragons abandonnés et les
Dragons sauvages, qui grandissent en dehors de la société draconique,
ravagent et terrorisent toujours les campagnes de Terrinoth.
Les Guerres draconiques laissèrent les royaumes dévastés : Terrinoth
n’était plus que l’ombre de ce qu’il avait été. Au lendemain de ces
terribles combats, le peuple était si exténué, la vie était si difficile et
l’espoir si ténu qu’on craignit que Terrinoth ne s’en remît point et fût
à jamais incapable de résister à un autre Âge des Ténèbres. La force des
héros de jadis avait disparu, les Dragons avaient anéanti les anciennes
lignées royales, détruit leurs forteresses et volé d’innombrables Étoiles
de Timmorran. De nos jours, les ombres s’allongent à nouveau sur la
terre, le froid dans l’air semble être le signe annonciateur d’un grand
malheur. Peut-être de nouvelles Ténèbres se profilent-elles à l’horizon,
encore plus dévastatrices que les précédentes…
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction

DÉFENDRE LA CIVILISATION
P arfois le déclin est lent et progressif, et parfois le désastre frappe
soudainement. Les terres de Mennara se situent quelque part à
mi-chemin. De dangereuses forces se profilent à l’horizon, mais sans
Dans les Torue Albes, malgré des combats acharnés, la flotte de
la reine a du mal à garder sous contrôle les équipages de pirates en
conflit, et des monstres sauvages se déchaînent dans tout l’archipel.
ennemi majeur contre lequel s’unir, ses dirigeants semblent devoir Ailleurs, d’Isheim à Al-Kalim, tout semble aussi aller de mal en pis
se chamailler jusqu’au dernier moment. À Terrinoth, différentes ces temps-ci. Les cours d’eau sont infestés d’étranges créatures aqua-
puissances s’affrontent pour diriger l’ensemble du continent. Dans tiques, et les ombres de bêtes ailées obscurcissent le flanc des collines
les baronnies des Daqan, tout est régi par la tradition et l’honneur solitaires. Alors que les nuits commencent à grouiller de monstres,
familial, à coup de querelles paroissiales et de serments de sang au certains ordinaires, d’autres beaucoup moins, les tours de guet et les
nom d’anciens griefs impliquant souvent des comtés entiers. Même forteresses restent affreusement désertes.
le front, autrefois unifié et puissant, qui protégeait les Cités Libres Les Elfes Latari, eux aussi, sentent le monde leur filer entre les
est lentement corrompu par l’égoïsme et la jalousie. Bien qu’elles ne doigts. Les défenses de l’Aymhelin sont toujours solides, mais la puis-
soient pas encore prêtes à se déclarer la guerre, certaines Cités Libres sance et la splendeur des anciennes armées Latari ont depuis long-
convoitent les territoires des autres, sabotent leur commerce et nuisent temps décliné, brisées pendant le cataclysme des Troisièmes Ténèbres.
à leurs guildes d’artisans, chacune motivée par ses propres intérêts.
La splendeur impériale qui faisait jadis de la péninsule de Lorimor
le joyau de Mennara s’estompe, beaucoup d’écoles militaires ferment
et la nature reprend ses droits sur nombre de célèbres avant-postes
de légionnaires.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Introduction
Ailleurs, les tribus orques s’insinuent de plus en plus loin dans les
plaines en quête de nourriture et d’abris. La tradition des razzias, aban-
donnée depuis longtemps par les Orcs nomades, revient en force, bien
que les chefs des tribus dénoncent ouvertement une telle barbarie.
Au nord, les Nains se terrent dans leurs forteresses et abandonnent
les routes commerciales aux mains des bandits et des malfrats. À chaque
saison qui passe, les convois des Nains sont de moins en moins nom-
breux ; ceux-ci s’éloignent d’un monde qui les oublie de jour en jour.
Cependant, tout n’est pas perdu.
Sur chacune de ces terres sont toujours apparus, chaque fois que
Mennara a été menacé, des héros prêts à relever le défi et à affronter
les ténèbres, des guerriers se dressant contre les escadrons de pillards
et leurs démoniaques alliés de l’Ynfernael. Des meneurs ont rallié des
braves pour prendre les armes contre Waiqar Sumarion et ses légions
d’horribles morts-vivants. Les diplomates ont formé une puissante
alliance pour affronter une horde de Dragons déchaînés apparemment
impossibles à arrêter. Sans eux, au cours de l’histoire de Mennara, la
civilisation aurait été anéantie à plusieurs reprises, celle-ci attend donc
de nouveaux héros alors que les ombres la menacent une fois encore.
Alors que l’Essaim de Locustes est revenu menacer Terrinoth, les
patrouilles des Daqan ont, jusqu’à présent, réussi à repousser leurs
attaques sanguinaires. Les mages de bataille de Havregris ont prêté
leurs puissants Golems de Runes pour arrêter les fourbes attaques
nécromantiques de l’Immortel et de ses armées des Terres des Brumes.
Sur d’autres territoires, les Orcs, les Elfes, les Nains et d’autres espèces
sont confrontés à des dangers similaires qui mettent en péril leurs
civilisations. Les menaces grandissent, mais les actions d’individus
courageux peuvent avoir d’importantes conséquences et permettre de
contrecarrer les ténèbres.
Les hordes déchaînées peuvent ravager des villages isolés dans la
campagne, mais il suffit qu’une voix s’élève, assez puissante pour ras-
sembler les habitants dispersés, pour qu’un front uni se forme. Des
créatures épouvantables sortent des ruines de donjons depuis long-
temps oubliés pour se retrouver face à un groupe de courageux aven-
turiers prêts à les arrêter avant qu’elles ne dévastent entièrement les
baronnies. Des entités surnaturelles et de sinistres magiciens sondent
leurs faiblesses pour les attaquer, mais sont repoussés lorsqu’ils ren-
contrent de vaillants éclaireurs ou même des équipages de pirates.
La bataille contre les dangers qui menacent Mennara est sans fin.
Partout, d’Isheim à Zanaga, d’Al-Kalim à Terrinoth, les peuples,
alliant héroïsme et courage, doivent prouver qu’ils seront à la hauteur
pour défendre la lumière de la civilisation et empêcher que la peur ne
l’éteigne à jamais.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi

Une vue, que j’ imagine seuls les oiseaux bénis peuvent

avoir, sur la merveilleuse Cour de la Sagesse des
Califes. Il m’est difficile aujourd’hui de me souvenir à
quoi elle ressemble réellement.

mes futurs enfants, pour qui j’écris ces mots. « Lève-toi. » Je n’oserai jamais comparer les tons mélodieux
Je m’appelle Tarik Al-Farabi et je suis votre père. de la voix du Calife à un aboiement, ô mes enfants, même s’ils y
J’occupais jadis la position estimée de Gardien ressemblaient vaguement.
de la Troisième Clef de la Petite Porte de la Salle
Basse dans la Cour de la Sagesse du plus Glorieux des Califes. « C’est lui ? » La lèvre du Calife sembla se tordre
J’ai passé mes premières années parmi les serviteurs les plus bizarrement, en une sorte d’expression décontenancée lorsque
modestes du Calife, me salissant les mains pour des travaux mon souverain se tourna vers la Grande Vizir, qui acquiesça.
sans importance à la grande Cour de la Sagesse alors même que « Oui, Votre Sainteté. »
j’aiguisais mon esprit pour comprendre les intrigues des puissants.
Je gardais déjà les yeux grands ouverts, guettant la moindre Le Calife me considéra avec un air dépourvu de la bienveillance et du
opportunité ; j’ai gravi les échelons, petit à petit, souvent au respect que j’aurais aimé susciter suite à mon acte de dévouement.
détriment de serviteurs du Calife moins doués que moi, puisse « Alors, tu essayes de jouer les intrigants, n’est-ce pas ? »
le Grand Soleil me regarder toujours avec bienveillance malgré cela.
Et alors que mon ascension se poursuivait, le nombre de gens Je pouvais dire, d’après le ton du grand homme, que pour
mesquins et à l’esprit étroit croissait derrière moi. lui cette description n’était pas flatteuse. Cependant, il existe
autant de sens pour un mot qu’il y a de gens dans une pièce.
Finalement, suite à une étrange série de coïncidences, je suis Je m’inclinai bien bas devant le descendant du grand Dieu du
tombé sur une information mineure concernant une grave Soleil, puis rencontrai son regard en gardant une expression
indiscrétion commise par Ali ibn Al-Nafis, Gardien de la aussi ferme que possible.
Première Clef de la Porte du Soleil de la Salle Haute. Mon
devoir auprès du Calife, puisse le lait de la bonne fortune « Votre Majesté, prononçai-je avec tout le calme dont mon
l’inonder chaque jour de sa longue vie bénie, ne me permettait cœur était capable, si par “intrigant”, vous entendez un homme
pas de laisser un si vil chancre conserver une aussi glorieuse qui complote et planifie ses actions dans l’ombre, qui cherche
position ; j’a i donc rapporté mes informations à une de mes à tirer profit de tous les désavantages de ses alliés, un homme
connaissances, un ami nommé Zakaria Zaybaq, gardien sans aucun sens du respect ni de ses responsabilités vis-à-vis de
plébéien des appartements de la Grande Vizir elle-même. la communauté, alors non, je ne peux pas prétendre être un
intrigant. » Les sourcils gris et touffus du grand homme
J’avais rendu quelques menus services à Zakaria par le passé, et il me
devait une audience. Vous pouvez imaginer ma surprise, mes chers
futurs enfants, quand je fus convoqué non pas dans le petit bureau
miteux de Zaybaq, mais dans les appartements de la Grande Vizir !
Celle-ci me jeta un regard pénétrant et, d’un simple hochement
de son visage émacié, me fit comprendre que je devais la suivre.
Contre toute attente, je fus conduit, dans un silence stupéfait, à
la salle d’audience privée du Calife en personne.
Une fois entré, en présence du Calife, mes jambes
se dérobèrent sous moi ; je me jetai à genoux
devant mon souverain, m’inclinant devant lui
comme il se doit, posant le front contre la
pierre froide du sol.

18
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
semblèrent remonter sur son front, et je sentis que je l’avais
peut-être mis en colère avec ma diatribe, je me pressai donc
de continuer. « Mais si vous voulez parler d’un homme qui
consacre chacune de ses pensées au bien-être du royaume de
Votre Majesté, qui cherche à utiliser toutes ses capacités pour
lutter contre les ennemis de son seigneur et maître, un homme
qui ne peut accepter la plus infime trahison ni la malhonnêteté
quand il se rend compte qu’elles dévorent le cœur de la Cour de
la Sagesse, au détriment du Grand Calife, qu’A ’tar et tous les
Djinns sourient éternellement à vos moindres volontés, alors oui,
Votre Majesté, je me fais un peu intrigant. »
Mes mots, après un long et tortueux chemin, semblèrent enfin
toucher juste et amuser le Calife ; je fus heureux de voir ses
vieux yeux sombres s’éclairer de gaieté.
« Il est futé. » Le Calife fit un signe de tête à la Grande
Vizir et se tourna pour remonter lentement les marches vers
son trône haut perché. « Montre-lui. »
Prononcés d’un ton sinistre, ces deux mots semblaient plus
lourds de sens que ne le laissait présager leur apparente banalité.
Alors que le Calife s’asseyait sur son trône doré, mes yeux se
tournèrent vers la Grande Vizir, qui tira quelque chose d’une
bourse suspendue à sa taille.
Dans la lumière vacillante d’une lampe, la Grande Vizir fit
apparaître une pierre scintillante d’un bleu profond et fascinant.
Le joyau semblait briller de l’intérieur et, au moment où mes
yeux se posèrent dessus, je sus que je contemplais un puissant
objet, marqué du sceau du destin.
« Reconnaissez-vous cette pierre ? » Il me fallut un moment
pour me soustraire au pouvoir hypnotisant du joyau, et un
autre pour réaliser que le Calife me parlait. Je le regardai, et il
m’observa à nouveau avec ce regard qui semblait exprimer moins
d’estime que je ne l’aurais souhaité.
« Avez-vous déjà vu une pierre comme celle-ci ? » Le
Calife répéta sa question plus lentement, comme s’il parlait
à un enfant, et je sentis mon âme se ratatiner très légèrement
dans mon cœur.
Je regardai à nouveau le joyau, que la Grande Vizir tenait
délicatement entre ses longs doigts agiles. Il semblait rayonner
et émettre des vagues de chaleur, comme n’importe quelle
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pierre à midi dans le grand désert. Et pourtant, le joyau
brûlait de cette couleur bleue froide, baignant le visage de la
Grande Vizir de sa lueur pâle.
« Je n’ai jamais vu pareille merveille, mon glorieux souverain. »
Je m’inclinai de nouveau.
« J’aurais été surpris du contraire. Cette pierre a été récemment
découverte par une maîtresse de caravane qui bravait la Désolation
de Faruun. Selon ses dires, les sables de la Désolation se sont
récemment reculés dans les profondeurs arides. La pierre a été
trouvée dans la zone nouvellement découverte. »
Pendant que le Calife me parlait, la Grande Vizir me
contourna et gravit les marches pour se placer au côté de
notre seigneur et maître ; la pierre les baignait maintenant
tous deux de son éclat de saphir.
« Un vizir sans importance a acquis la pierre, et une tripotée
de savants, d’historiens et de flagorneurs se sont révélés incapables
de révéler ses mystères. »
La voix du Calife s’assombrit. « Les imbéciles des Collèges des
Arcanes me disent qu’elle contient un vaste puits de puissance,
mais ils sont incapables de me préciser la nature de ce pouvoir
ou de m’expliquer comment m’en servir. »
La voix puissante du Calife se fit plus douce, puis, alors que
son regard plongeait dans les profondeurs de la pierre, des
étincelles bleues dansèrent dans ses yeux sombres.
« Au nord, Gardien, il existe des contes sur des pierres dotées
de vastes pouvoirs, grâce auxquelles un homme peut devenir un
roi, ou même un dieu. » Ce dernier mot me glaça jusqu’aux
os. « Dans d’antiques documents poussiéreux, conservés dans
les archives du Premier Collège, il est question d’une collection de
telles pierres qui aurait été dispersée à travers le monde. Mais
ces joyaux ont maintenant disparu. Ils sont tous perdus, selon
ces documents. Il était également mentionné que les Dragons les
avaient sculptés, ou quelque absurdité de la sorte. »
Le Calife fixait maintenant la pierre comme s’il était incapable
d’en détourner le regard. Le temps se figea pendant ce qui
me sembla être une éternité, et le silence se fit pesant dans
la petite pièce. Lorsque le Calife parvint enfin à détacher ses
yeux du joyau, il se tourna vers moi, tremblant comme s’il
venait de fournir un grand effort.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
« J’ai besoin d’envoyer quelqu’un vers le nord pour voyager au-
delà des mers à la cherche de la véritable nature de cette pierre,
quelqu’un qui percera ses mystères, reviendra et me donnera la clef
pour utiliser ses pouvoirs. » Il se détourna à nouveau, comme
s’il ne pouvait s’en empêcher, pour regarder une fois encore la
pierre précieuse. Les mots qu’il prononça ensuite furent murmurés
d’un ton révérencieux : « Pour ouvrir les portes des cieux. »
Et à cet instant-là, tout simplement, mon avenir me fut révélé.
Le plus humble et le plus fidèle serviteur du puissant Calife
d’Al-Kalim, puissent la sagesse et la lumière toujours veiller sur
lui, allait être envoyé au nord pour accomplir une mission insensée.
Je devais me rendre dans un royaume peuplé d’aventuriers écervelés
et de charlatans délirants, où, racontait-on, l’air était assez froid
pour aspirer la vie des poumons et la glace tombait du ciel comme
le sable retombe après une tempête sèche dans le désert.
« Ne vous méprenez pas, je ne suis pas ingrat »,
poursuivit-il finalement. Conjugué à la fixité et à l’expression
dure comme la pierre de ses yeux, le sourire qui rampait
sur ses lèvres exprimait moins de réconfort qu’il n’aurait dû.
« Qu’un homme revienne à Al-Kalim détenteur des secrets
de cette pierre, et ma gratitude sera éternelle et infinie. »
Une telle offre, venant d’un tel homme, pouvait signifier beaucoup.
Mais un aspect de cette entreprise, en dehors de la perspective
terrifiante de voyager vers le nord, me frappa soudain.
« Grand Calife, puissent toutes les puissances des cieux
briller sur vous et vous apporter la paix, votre humble
serviteur pourrait-il vous soumettre une demande qui
l’a iderait dans sa quête, avant que ses misérables sandales s’en
aillent soulever la poussière de la route par-delà l’oubli ? »
Le grand homme me regarda, soulevant ses royaux sourcils, et
me fit signe de poursuivre.
« Votre noble et puissante Majesté… » Mes pensées
s’éparpillaient, j’avais le cœur au bord des lèvres, terrifié à l’idée
de ce qui allait arriver et des conséquences que cela pourrait
avoir pour vous, mes chers futurs enfants. « Votre Sainteté,
pourrais-je emporter ce mystérieux joyau avec moi au nord,
afin que de pouvoir le montrer et que mes suppliques soient
plus éloquentes lorsque je quémanderai l’a ide des barbares ? »
Lorsque ces mots franchirent mes lèvres, j’en compris l’audace et
la folie. Le Calife, puissant parmi les puissants, sage parmi les
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sages, l’un des esprits les plus brillants d’A l-Kalim, ne laisserait
jamais un tel trésor disparaître entre les mains d’un Gardien de
rang mineur. De tels joyaux ne sont destinés qu’aux plus grands
et aux plus puissants. Et bien que j’eusse su au plus profond de
mon cœur qu’un jour, j’appartiendrais aux sphères dirigeantes, je
savais aussi que le Calife ne voyait en moi qu’un simple serviteur.
L’a ir ombrageux de mon seigneur s’accentua et j’attendis qu’il
reprenne la parole dans un état de terreur que je n’avais jamais
connu auparavant.
Il éclata de rire.
La Grande Vizir partageait son hilarité. Les deux augustes
personnages rirent tellement qu’ils peinaient à respirer quand
ils reprirent progressivement contenance, essuyant les larmes de
leurs yeux.
« Donnez-lui son dû, qu’il prenne la route immédiatement. »
Le Calife se détourna, et je fus étrangement convaincu que je ne
reverrais plus jamais cet homme. Je regardai ensuite la conseillère
du seigneur, et vis dans ses mains une lourde bourse de velours
couleur sable. Quand elle tinta de manière séduisante, je sus
qu’elle contenait une somme princière.
« Voici de quoi vous aider dans votre voyage vers le nord, Gardien,
votre esprit et votre bravoure feront le reste. Si vous surviviez au
voyage mais choisissiez de ne pas revenir ici, sachez ceci : dans
chaque ombre se tapit un serviteur du Calife. Si vous le trahissez,
vous serez traqué, enchaîné et ramené de force à la Cour de la
Sagesse. Votre fin deviendra un long, douloureux et édifiant récit qui
permettra de faire savoir pendant des siècles aux futurs serviteurs
du Calife ce qu’il en coûte de commettre une telle erreur. »
La bourse était lourde, mais pas aussi lourde que ces mots. Je
fus reconduit hors du palais par un petit fonctionnaire, laissant
aux grands le soin de réfléchir aux questions célestes du royaume.
De retour dans ma petite chambre, je m’assis sur le lit étroit,
la bourse dans les mains, et je considérai les différentes options
qui s’o ffraient à moi. Je ne vous mentirai pas : je fus traversé
par l’idée de laisser l’argent là, sur ce lit, et de disparaître
dans le désert, de partir seul à la recherche d’un nouveau
destin. Si j’abandonnais la bourse pleine de pièces, peut-être
ma disparition ne ferait-elle pas grand bruit ?
Mais le nord ?
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
Terrinoth et les différentes terres qui bordent la vaste mer au
nord ont mauvaise réputation dans les contes d’A l-Kalim. Ce
sont d’étranges royaumes barbares, dirigés par des créatures
grossières, dénuées de toute élégance, qui ne connaissent rien
des raffinements et des considérations de la civilisation. Cette
terre engloutit jadis le plus grand esprit militaire jamais
engendré par notre royaume et le réduisit à néant, ne laissant
pour sa postérité que de vils et cruels mensonges.
Car à Al-Kalim, nous nous souvenons encore du véritable
Waiqar. Waiqar l’Invaincu. Waiqar le Téméraire. Waiqar
ibn Neshar Al-Bagavad, dont les exploits, s’il n’avait traversé
les eaux du Nord, auraient été chantés par tous pendant les
siècles à venir. Son armée de champions, les Acolytes, est
toujours évoquée avec crainte et vénération, et nous accordons
peu de crédit aux histoires insensées qui nous sont parvenues
de ce monde de mufles et de menteurs du Nord.
Je ne sais combien de temps je restai assis sur mon lit dur,
hanté par le doute et torturé par les sinistres fruits de mon
imagination. La nuit était certainement très avancée quand un
léger coup à ma porte me fit sortir de ma rêverie désespérée.
Mon corps était raide et douloureux quand j’essayai de me lever.
Finalement, je décidai de rester sur ma couche et me tournai
simplement vers la porte pour inviter mon visiteur à entrer.
Je ne le connaissais pas, mais, en voyant sa robe, je supposai qu’il
était un petit fonctionnaire de la cour du Calife. L’homme semblait
nerveux, il jetait sans cesse des regards derrière lui, fouillant la pièce
sombre des yeux ; il tenait fermement un petit sac.
« Je viens de la part du Calife, puissent les champs être
toujours fertiles sous son règne. » L’homme inclina sèchement
la tête, ce qui n’a ida en rien à dissiper mes inquiétudes
grandissantes. « Il a finalement approuvé votre requête. »
Je restai planté là, confus et abasourdi, et un air d’exaspération
passa momentanément sur le visage de l’homme qui pourtant
tremblait constamment de peur. Il me tendit le sac. « La
pierre. Vous devez l’emporter avec vous. »
La déferlante de joie qui m’envahit fut immédiatement arrêtée
par un perfide soupçon.
Je hochai la tête et me forçai à me lever. « Je vais de ce pas
remercier le Calife du grand honneur qu’il daigne m’accorder. Je
ne doute aucunement… »
21
« Non ! » La peur s’accrut dans les yeux de l’homme.
« Le Calife vous envoie sa bénédiction avec ce présent, il
désire que vous partiez immédiatement vers le nord. »
Une peur profonde et brûlante commença à envahir ma gorge,
et je m’éloignai de l’homme alors qu’il me tendait à nouveau le
sac. « Vous devez partir avant l’aube. Le Calife souhaite que
vous traversiez les Champs de la Fertilité en toute quiétude ; il
empêchera quiconque de vous barrer la route, et vous recommande
de prendre un navire dans la Baie de Coupe-Bourse. »
Cette histoire devenait de plus en plus abracadabrante. Pourquoi
le Calife m’enverrait-il avec l’un de ses plus précieux trésors
au cœur de ce repaire de pirates sans foi ni loi ?
« Je devrais m’entretenir avec le Calife », dis-je en essayant
de dépasser l’homme, évitant de m’approcher du sac comme
s’il contenait un scorpion du désert ; mais le serviteur se mit
en travers de mon chemin et me déposa le joyau dans les
mains sans que je puisse réagir.
« Non. Vous allez partir tout de suite vers le nord, immédia-
tement, vous m’entendez ? » La peur habitait toujours ses yeux,
mais elle était maintenant accompagnée d’une résolution froide.
C’est alors que je remarquai qu’il n’était pas venu seul et que
d’autres l’attendaient dans le couloir. Ils portaient des armures
sombres, leurs casques enveloppés de tissu noir, les lames nues
et menaçantes de leurs cimeterres brillant dans leurs mains.
Je sus alors avec certitude que je partirais avec la pierre ce soir-là.
J’étais déjà en selle sur un cheval des écuries du Calife, bravant
le froid de la nuit du désert, les lumières scintillantes de la
Cour de la Sagesse s’effaçant derrière moi, quand je me rendis
compte que les soldats que j’avais vus cette nuit ne
portaient pas les couleurs du Calife, mais
celles d’A bdullah Qaswani, l’un de ses
cousins rivaux.
La pierre scintillante devint la
force qui me poussa à traverser
des terres dont je n’aurais
jamais osé rêver, que je sillonnai
pendant des années qui me
semblèrent durer des siècles.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
CONTES DES TÉNÈBRES :
UN BREF RECUEIL HISTORIQUE
par ALANYA de HAVREGRIS
LES MYTHES
DE LA CRÉATION
R
éfléchir aux toutes premières légendes des Elfes constitue un
véritable défi pour l’imagination, car cela nous conduit à sup-
poser que des personnalités existaient avant que des personnes ne
peuplent nos terres, et que les étapes de la création se sont produites
avant l’apparition de ce que nous pourrions appeler la réalité maté-
rielle. Certains aspects de ces mythes semblent incompréhensibles,
voire tout à fait contradictoires.
Au cours de mes voyages, je me suis entretenue avec des Elfes sur
ces questions, mais l’exercice a rarement été probant. Ils ont tou-
jours insisté sur le fait que leurs récits, qui mélangent la métaphore
au factuel, représentent en quelque sorte une seule et même vérité.
Je ne peux pas dire que j’aime beaucoup les Elfes. Bien qu’ils aient
été nos alliés par le passé, il ne faut pas oublier ce que dit l’un de
leurs dictons populaires : « Une vie humaine ne représente qu’un
jour. » Eh bien, si les éphémères faisaient notre taille, avaient notre
force et notre volonté, je pense que nous apprendrions rapidement
à les respecter !
Une autre chose importante à retenir sur les Elfes : ils aiment
nous montrer qu’ils nous dominent grâce à leur profonde sagesse.
Cependant, dans leurs propres récits, leur histoire est marquée par
des actes de folie si extrêmes que la pire des bévues humaines semble
triviale en comparaison.
Pour mémoire, le Legendum Magicara corrobore la plupart des
légendes elfiques, et qui croire si ce n’est son auteur, Timmorran
Lokander ? Si jamais vous avez la chance de tomber sur un recueil de
ses thèses, assurez-vous de comparer vos notes sur ce recueil avec la
sagesse qu’elles contiennent, car de nombreuses années se sont écou-
lées depuis que j’ai eu la chance de les étudier. Cependant, même
Timmorran, bien que doté d’une extrême perspicacité, a dû croire les
Elfes sur parole sur cette question, et, comme vous vous en rendrez
certainement compte, il n’a pas toujours été très bon juge quant au
caractère de certains êtres.
LE PREMIER ET LE VIDE FROID
Imaginez, si vous le pouvez, un temps avant les barons, avant les
guerres, avant la terre et les étoiles, avant même l’air… Bien avant
l’existence de toute forme physique, celle du temps ou des rêves, il
y avait le Premier. Le concevoir (j’utiliserai arbitrairement le mas-
culin pour le désigner par souci de simplicité, bien que le Premier
ne soit un concept ni singulier ni pluriel, ni masculin ni féminin)
équivaut à imaginer l’idée même d’une entité. En termes de poten-
tiel, le Premier est plus grand que les puissants dieux, car c’est au
Premier que les dieux doivent leur propre existence. Mais il est aussi
moindre, car le Premier n’a ni personnalité ni forme, et n’a donc rien
d’une créature pensante.
Les légendes ne sont pas claires quant à savoir si le Vide s’est créé
dans le Premier ou si le Premier a créé le Vide. Certaines interpré-
tations suggèrent qu’ils sont une seule et même entité. Peu importe
quelle version est juste : le Vide est l’espace dans lequel toute création
ultérieure a eu lieu.
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LES LAIS DU PREMIER
ET LEURS ÉCHOS
Sans souffle, privé de langue et de lèvres, le Premier aurait chanté des
chansons ou déclamé des poèmes qui ont façonné le Vide, définissant
ses possibilités et donnant naissance à toutes choses. Ces vers décrivent
des formes et des natures idéales. Les Elfes insistent sur le fait que, de
nos jours, on peut encore entendre les échos des Lais dans les rythmes
de la nature. Ils affirment que les sons de ces chansons constituent
la nourriture des esprits, et c’est en suivant cette tradition que les
Tisseurs de Sylves pratiquent leur art.
TROIS PLANS DE PUISSANCE
SONT CONJURÉS DU VIDE
Le Premier a conjuré à partir du Vide trois plans d’existence dis-
tincts, appelés les Plans de Puissance. Le plus élevé d’entre eux est
l’Empyréen, un plan de perfection. Les légendes elfiques évoquent
quatre sphères : la sphère de la Lumière, celle de l’Air, celle de la Vie
LES YRTHWRIGHTS
ÉCLOSENT
J e vais évoquer la question des Dragons et de leur créa-
tion dans une note séparée, en partie parce que je ne
sais pas exactement quand cette création s’est produite,
mais surtout parce que ces terribles bêtes, pleines de feu
et de fureur, ne méritent pas mieux à mon avis. Nous
savons que le Premier ne peut avoir créé les Dragons
avant l’Aenlong, car les Dragons en font partie. En outre,
ceux-ci devaient exister avant que le Premier ne crée le
royaume mortel, puisqu’ils ont joué un rôle majeur dans
son avènement.
Peu importe quand ces événements se sont produits, les
premiers Dragons ont été modelés à partir des débris de la
création ; ils ont été dotés de la capacité à donner vie à la
matière grâce à leur simple parole, comme pour rappeler
les Lais du Premier (notez ici que les Maîtres des Runes de
Havregris ne sont pas tous d’accord pour dire que les runes
des Dragons sont des vestiges de cette langue).
Grâce à ces incantations, les Dragons créèrent le Firma
Dracem, le royaume mortel, et le décorèrent avec des
corps célestes, des planètes et des soleils en rotation.
Leur grande œuvre n’est rien d’autre que l’existence
que nous percevons en tant que mortels. Grâce à leurs
talents, ils furent appelés les Dragons Fondateurs, éga-
lement connus sous le nom d’Yrthwrights.
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Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
et celle des Rêves. Ces sphères existent sous une forme tellement pure
dans l’Empyréen que les tourments de la faim, de l’âge et de l’incon-
fort y sont totalement inconnus.
Le plus bas des Plans de Puissance est l’Ynfernael. Le Premier
avait-il réellement l’intention de le conjurer ou le fit-il sous l’influence
d’une puissance malveillante ? La question reste ouverte. Seule évi-
dence : cet endroit lugubre est peuplé de monstrueuses entités qui
adorent torturer, blesser et humilier les mortels. Les Elfes évoquent
plusieurs sphères qu’ils associent à l’Ynfernael, dont voici quelques
exemples : les Ténèbres, la Douleur, la Mort et la Faim.
Entre ces deux plans a été formé l’Aenlong, le royaume auquel
le plan de l’existence physique est connecté. Cependant, l’Aenlong
est un plan spirituel, et l’on croit qu’il serait en fait la même chose
que les légendaires Terres Grises évoquées dans les enseignements
des Arpenteurs de Rêves. Au fil du temps, les déchets de la création
se sont entassés dans l’Aenlong – des choses inachevées à moitié
tangibles qui n’appartiennent ni à l’Empyréen, ni à l’Ynfernael, ni
au royaume mortel.
LE VERTO MAGICA :
L'UNIVERS MIS EN MOUVEMENT
Le Premier a ensuite mis en mouvement le Verto Magica ; vous
avez peut-être entendu parler de ce phénomène sous le terme de
« Rotation ». Selon les sources elfiques, pour le créer, le Premier
employa une sorte de mécanisme spirituel impliquant la montée de
l’Empyréen et la chute de l’Ynfernael. Sans le Verto Magica, tout serait
figé et le temps ne s’écoulerait jamais. Les êtres savants présupposent
que pour que quelque chose se produise, il faut qu’existe l’énergie
nécessaire à un tel phénomène, et j’émets donc l’hypothèse que toute
cette énergie provient de la Rotation.
Vous pouvez soulever ici l’objection suivante : les mythes antérieurs
parlent déjà de choses telles que le mouvement et le passage du temps.
Après tout, le Vide existait avant les Elfes, n’est-ce pas ? Mais peut-être
une existence purement spirituelle ne nécessite-t-elle pas de faire la
distinction entre le littéral et le figuré ?
CRÉATURES PRIMORDIALES :
LES FÉES ET LES DIMORA
Une fois l’Aenlong fondé, le Premier se consacra à la création de la
vie. Des sources elfiques suggèrent qu’au moment où les Elfes ont été
créés, d’autres êtres existaient déjà, en particulier deux espèces qui nous
ressemblent, car ses membres possèdent des formes corporelles et sont
capables de réfléchir. La question de savoir si ces êtres ont été délibéré-
ment créés par le Premier ou s’ils sont des manifestations involontaires
des sphères de l’Air et de la Vie de l’Empyréen est toujours en suspens.
Les contes prétendent que ces êtres étaient les Fées et les Dimora, que
l’on trouve encore parfois dans notre royaume mortel. Les Fées et les
Dimora sont sauvages, hostiles et difficiles à observer ; elles parlent une
langue simple, leur culture est rudimentaire. On connaît peu de choses
sur elles, je n’ai entendu que des rumeurs sur leur existence, et même dans
mes jours d’errance, je n’en ai jamais ne serait-ce qu’aperçu une seule.
LA RIVIÈRE TAARE
ET LES SOMBRES BOIS
J e dois maintenant faire une digression pour parler de
deux endroits qui existent à l’intérieur de l’Aenlong,
mais aussi parfois à l’extérieur ou traversant le royaume
mortel. Ceux-ci défient à nouveau l’imagination pour les
non-Elfes, car comment des lieux physiques pourraient-ils
exister en dehors du champ de la réalité ? Une fois encore,
les Elfes choisissent de contourner le problème en affir-
mant que ces endroits doivent simplement être interprétés
comme à la fois spirituels et physiques.
Les Sombres Bois errants constituent l’un de ces endroits
particuliers. On dit qu’il s’agit d’une grande et ancienne
forêt où la végétation est dense, les troncs moussus et le
sous-bois épais, pleine de fougères et de champignons. Les
Sombres Bois n’ont pas de position fixe dans l’Aenlong, ils
se déplacent et modifient leurs limites à un rythme inouï
et aléatoire.
La Rivière Taare apparaît dans les mythes de nombreuses
espèces (y compris ceux des Orcs, que je n’ai pourtant
jamais vus se soucier de cosmologie). Elle est censée for-
mer la frontière entre l’Empyréen et l’Aenlong ; les Elfes
comparent poétiquement ses flots à des larmes de chagrin,
affirmant que la tristesse, comme les eaux de la rivière,
n’est pas présente dans l’Empyréen. Timmorran, dans une
sorte de tentative d’humour savant, a émis l’hypothèse que
la rivière était formée par la « condensation du Vide ».
Si je devais vous donner mon opinion d’érudite, je vous dirais
qu’elles sont le fruit d’expériences pour créer une vie intelligente dont
le succès fut mitigé. Selon moi, elles ne sont pas tout à fait réelles au
sens que nous donnons au terme. Les Fées sont des êtres de l’air, les
Dimora de la terre. On suppose que ces deux espèces se détestent
et qu’elles s’attaquent l’une l’autre. Elles constituent également une
nuisance pour les autres espèces. La seule protection connue contre
ces êtres est le fer ; tous les livres qui abordent le sujet de leur existence
sont recouverts d’une épaisse couche de ce métal.
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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
LES ELFES
L
e Premier entreprit ensuite de créer des êtres plus familiers, dont
les célèbres Seigneur Émorial et Dame Latariana, appelés Père et
Mère des Elfes. Si les mythes elfiques sont vrais (et je réitère ici tous
les avertissements habituels vous invitant à ne pas les prendre trop
au sérieux), alors la lumière (sous forme d’un archétype de soleil) et
l’air (sous celle d’un ciel primitif ) furent créés séparément, puis « la
lumière fut attirée pour venir se prélasser dans le ciel » (comme indi-
qué dans le Legendum Magicara) ; finalement, les deux se marièrent.
Ce conte pourrait bien se rapporter à la création d’Émorial et de
Latariana ainsi qu’à la relation qui les unit, car on prétend qu’il est le
Seigneur Protecteur de la Lumière et elle la Dame Protectrice de l’Air.
Je me demande bien en quoi la lumière et l’air ont besoin de pro-
tection, mais porter de tels titres semble être un grand honneur. Les
Elfes vivaient dans l’Empyréen et avaient peu à voir avec la véritable
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existence physique du royaume mortel. Au contraire, leurs esprits se
nourrissaient uniquement de leur relation avec les sphères.
Il n’est pas clairement indiqué qu’Émorial et Latariana soient les
ancêtres des Elfes ; ils sont peut-être simplement les premiers êtres
de cette espèce à avoir été créés, y gagnant ainsi une reconnaissance
particulière. S’ils étaient littéralement le Père et la Mère des Elfes, leur
couple a été particulièrement fécond, car les Elfes se comptèrent bien-
tôt par légions. Il est certain en tout cas qu’ils étaient épris l’un de
l’autre et mariés selon la tradition de leur peuple.
DÉSIR ET TRAHISON
La Rotation continua, le temps passa, et Dame Latariana commença
lentement à désirer plus que son existence ordinaire. Elle aspirait à
un pouvoir dépassant celui que les Elfes possédaient dans le plan
Empyréen, et elle fit part à Émorial du désir fervent qui brûlait dans
son cœur : posséder une couronne de Rêves et de Vie.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
Les érudits se demandent toujours pourquoi Latariana devint
si avide, mais le consensus veut qu’un esprit ténébreux du plan de
l’Ynfernael l’ait poussée à la tentation en lui murmurant de sombres
secrets. D’autres suggèrent que le Premier, dénué de personnalité, était
une entité (ou des entités) trop distante et trop impersonnelle pour
que les Elfes parviennent à nouer une relation forte avec lui. Quels que
fussent ses motifs, Latariana enjôla son mari et lui demanda d’étendre
pour elle leur domination sur les sphères primaires, ou peut-être sur
toutes les sphères, de l’Empyréen. Émorial accéda finalement à sa
requête et partit pour exaucer le souhait de son amour éternel. Il voya-
gea jusqu’au bout de la création et demanda au Premier d’en laisser le
contrôle aux Elfes. Le Premier ne daigna même pas répondre, laissant
Émorial humilié et courroucé.
Émorial rejoignit les Elfes et les rassembla pour se mutiner contre le
Premier. Dame Latariana à ses côtés, il fit franchir la Porte des Années
à son ost. Les Elfes pensaient arriver dans la demeure du Premier, mais
ils se retrouvèrent sur un pont enjambant une grande rivière. Ils ne
comprirent pas immédiatement qu’ils étaient en train de traverser la
Rivière Taare pour rejoindre l’Aenlong.
LES ELFES FAITS PRISONNIERS
Pendant d’innombrables jours, les Elfes marchèrent, peut-être sans
même se rendre compte qu’ils étaient irrémédiablement perdus. Ils
tombèrent dans les griffes des Fées et des Dimora. Ils traversèrent
les landes infestées de dangers des Terres Grises. Puis, un jour, ils
se retrouvèrent sur un chemin étroit qui serpentait à travers une
immense forêt menaçante, et débouchèrent finalement dans une
grande clairière d’un vert luxuriant, baignée de l’or de la lumière du
soleil. Ils venaient de découvrir la forêt de l’Aymhelin, dont l’extrême
nord déborde aujourd’hui sur les terres de Terrinoth.
Pendant un bref instant, Émorial osa croire que la mutinerie avait
réussi et que les Elfes étaient maintenant maîtres des quatre sphères
de l’Empyréen. Puis il aperçut l’architecte de la clairière, un grand
serpent ailé, l’Yrthwright Mennara.
Le majestueux Dragon à l’air implacable aurait alors soutenu le
regard tout aussi froid d’Émorial, puis aurait énoncé la sentence
du Premier à l’encontre des Elfes rebelles : ils étaient bannis de
l’Empyréen. Ils ne commanderaient plus à l’Air et à la Lumière, les
Lais du Premier ne descendraient plus librement en leur cœur pour
les nourrir. Dorénavant, ils seraient prisonniers sur le plan mortel ;
les Elfes comprirent alors où ils avaient pénétré. Puis Émorial réalisa
que, pour satisfaire leurs désirs, les Elfes seraient désormais liés à
ce qui était à la fois leur destinée et leur damnation, un royaume
couronné de lumière, d’air, de vie et de rêves. Ce monde. Notre
monde, que certains osent nommer Mennara, comme l’Yrthwright
de ce conte.
LES LARMES DE LATARIANA
Les Elfes supplièrent Mennara de faire preuve de miséricorde, mais
celui-ci resta indifférent à leur supplique. Il se tourna alors vers
Latariana et lui offrit un terrible choix. Il suggéra qu’il existait un
moyen pour les Elfes d’obtenir une maigre faveur. Il était possible de
laisser un passage vers l’Empyréen ouvert pour qu’ils puissent un jour
y retourner, mais le prix à payer serait élevé. Latariana devait entrer
dans le Vide, emportant avec elle les tentations de l’Ynfernael qui
avaient engendré son avidité.
Le cœur lourd, Latariana accepta. Elle se tourna vers Émorial
pour lui chuchoter les derniers mots tendres qu’il entendrait jamais.
Ils s’étreignirent alors, et elle versa des larmes de courageux chagrin
et de grands regrets avant de monter sur le dos de l’Yrthwright. La
créature majestueuse déploya alors ses immenses ailes et s’envola
dans le ciel assombri.
Les Elfes regardèrent Latariana quitter ce monde pour rejoindre le
Vide. Lorsqu’elle se fut trop éloignée pour qu’ils puissent encore dis-
tinguer sa silhouette, une lumière éclatante se mit à briller à sa place :
la première étoile. De nouvelles étoiles commencèrent à apparaître,
en témoignage du sacrifice de Latariana pour son peuple. Les Elfes les
contemplèrent avec tristesse et admiration.
Mais l’un d’entre eux était incapable de les observer. Émorial
regardait ses mains, mouillées des larmes de Latariana. Sous ses yeux,
celles-ci se transformèrent en onze superbes joyaux nacrés, faibles
échos de la beauté de son amour perdu. Comme les étoiles, ils repré-
sentaient des gages d’espoir pour les Elfes, un signe qu’un jour ils
seraient peut-être pardonnés.
Émorial, submergé de honte, de colère et douleur, ne pouvait sup-
porter l’idée que le pardon lui fût accordé un jour. Il fit appeler onze
Elfes de noble lignée et partagea entre eux les Larmes de Latariana.
Il divisa ensuite son ost en onze tribus, dont il confia la responsabi-
lité à ces nobles qui garderaient les Larmes comme symbole de leur
charge. Il leur ordonna de diriger leur peuple pour créer un avenir
dans ce nouveau monde jusqu’à ce qu’ils trouvent un chemin pour
regagner l’Empyréen.
Ensuite, il prit son épée et quitta son peuple, le cœur empli d’une
fureur glacée. Les Elfes prétendent qu’il se rendit dans le plan de
l’Ynfernael pour tenter de se venger de l’ombre corruptrice à l’origine
de la déchéance de sa bien-aimée.
LA GUERRE DE LA
LARME DE L'OMBRE
O n constate avec tristesse que l’histoire se concentre davan-
tage sur les moments violents que sur les périodes de paix,
mais il faut reconnaître qu’il n’y a pas grand-chose à raconter sur
ces années de quiétude et d’harmonie pendant lesquelles les Elfes
vécurent dans le royaume mortel. Deux siècles après leur arrivée,
les tribus s’étaient dispersées, certaines avaient même peuplé des
territoires éloignés et avaient développé des cultures distinctes.
Seuls les Elfes Latari restèrent dans la région de la fameuse clairière.
Les onze tribus d’Elfes entretenaient cependant toujours des liens
commerciaux et amicaux.
LA TRISTE HISTOIRE
DE MALCORNE
Malcorne, fier porteur d’une des Larmes de Latariana, était le chef de
la onzième tribu elfique, les Malcari. Sa tribu voyagea bien au-delà de
l’abri des frondaisons de l’Aymhelin et s’installa finalement loin des
autres Elfes, à l’endroit qu’on appellerait ensuite les Monts Jornall, où
l’on racontait qu’Émorial avait poursuivi les démons jusque dans leur
foyer. Parmi les autres tribus, celle de Malcorne avait une réputation
mitigée. Bien que les Malcari fussent salués comme des héros car ils
transmettaient l’héritage d’Émorial, les autres Elfes les trouvaient par-
fois hautains et critiquaient souvent les actions qu’ils entreprenaient
sans avoir consulté les autres tribus. Pour combattre l’Ynfernael, les
Malcari étudiaient et utilisaient les pouvoirs des démons, pratiques
que désapprouvaient leurs alliés.
Au cours d’une patrouille, alors que Malcorne dirigeait un groupe de
chasseurs de démons au plus profond des cavernes, une bataille provo-
qua un effondrement qui le sépara des autres. Le croyant mort aux côtés
des perfides démons, sa tribu le pleura à chaudes larmes. Quand il revint
dans la cité des Malcari, ayant miraculeusement survécu à sa rencontre
avec un démon, Malcorne avait changé ; il avait des sautes d’humeur et
observait souvent les autres Elfes d’un regard suspicieux.
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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
Avec le temps, Malcorne rassembla ses alliés de confiance et
forma une petite clique. Il leur expliqua que, lors de ses errances,
il avait retrouvé Émorial, leur roi disparu depuis si longtemps.
Celui-ci lui avait révélé que les Larmes de Latariana étaient un
cadeau empoisonné. Elles étaient certes assez puissantes pour
ouvrir une porte vers d’autres plans d’existence - l'Aenlong - ce
qui permettrait aux Elfes de regagner un jour leur légitime foyer.
Mais à force de pourchasser les forces de l’Ynfernael, Émorial avait
réalisé que le Premier était un tyran qui craignait d’être destitué
par ses propres enfants. La promesse que le Dragon Fondateur
Mennara avait faite à Latariana n’était qu’un vil mensonge : le faux
espoir qu’il avait insufflé aux Elfes les gardait dociles alors qu’ils
vivaient dans une prison et constituait un moyen de les soumettre
au Premier pour l’éternité. Dans son dernier souffle, Émorial avait
ordonné à Malcorne de révéler la vérité sur le Premier aux autres
tribus elfiques et de conduire leur rébellion contre leur ancien
maître, sans quoi ils resteraient prisonniers à jamais. Les Elfes
Latari affirment encore aujourd’hui que Malcorne ne rencontra
pas le véritable Émorial dans ces grottes, mais un démon rusé qui
portait son visage.
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UNE LARME DANS L'OMBRE
Malcorne savait que les Elfes auraient besoin d’alliés puissants pour
combattre le Premier ; il utilisa donc sa Larme pour abaisser les bou-
cliers entre le Firma Dracem et l’Aenlong. Là, il trouva les alliés qu’il
cherchait : une horde de démons qui avait traversé à l’endroit où
l’Ynfernael se mêlait à l’Aenlong. Quand Malcorne s’allia aux démons,
la Larme de Latariana qu’il portait devint terne et sombre, perdant la
lumière qui brillait autrefois en son cœur.
Une fois qu’il eut corrompu le joyau de sa lignée, Malcorne utilisa
la Larme de l’Ombre pour ouvrir des brèches dans le tissu de la réa-
lité. Toutefois, le processus s’avéra ardu. Malcorne demanda l’aide
d’autres tribus, expliquant que le Dragon Fondateur avait menti et
que leurs Larmes étaient nécessaires pour briser les entraves de cette
réalité et rassembler des alliés de l’Aenlong. En l’écoutant exposer
ses plans, les autres tribus découvrirent Malcorne sous son véritable
jour : un être mauvais et corrompu, perverti par les tentations des
démons. Les deux parties ne pouvant trouver d’accord, Malcorne
lança une attaque contre les autres tribus elfiques pour s’emparer de
force des précieuses Larmes de Latariana.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres

Soutenus par des hordes de démons sauvages et de créatures de les êtres mortels. Cependant, les changements géographiques et les
l’Ynfernael, les disciples de Malcorne massacrèrent les premières altérations des espèces animales qui ont conduit à la vie telle que
armées d’Elfes, peu nombreuses, envoyées pour les arrêter. Bientôt, nous la connaissons aujourd’hui sont des conséquences indirectes du
les autres tribus se dispersèrent devant Malcorne et ce qu’elles appe- déversement d’énergies venues de l’Ynfernael.
laient les Daewyl, ou les Elfes « deux fois tombés ». Les survivants
Les Elfes se sont efforcés de localiser les brèches et de les refermer,
s’enfuirent dans des régions reculées, sur des îles lointaines et des
en utilisant de puissantes protections magiques de l’Empyréen pour
sommets solitaires, afin d’empêcher Malcorne de s’emparer de leurs
les sceller. Malheureusement, ils ne les ont jamais toutes trouvées,
précieuses Larmes.
et malgré leurs efforts pour garder les sites des portails protégés, les
espions Daewyl ont parfois réussi à saboter leur travail.
LA BATAILLE D'ENFREIL
C’est à cette époque que d’autres espèces, nées grâce aux muta-
Dans les profondeurs de l’obscurité, cependant, une lueur d’espoir
tions induites par les pouvoirs de l’Ynfernael, sont venues apposer
persistait. Glaciel Étoile-des-Neiges, fils du chef de la dixième tribu,
leur marque sur le monde. Les Dragons avaient toujours partagé un
les Nivali, fut témoin des conséquences dévastatrices des attaques,
semblant de culture et quelques connaissances avec les Elfes ; ils les
mais refusa de perdre espoir. Il sauva la Larme de son père et décida
avaient même aidés par le passé. Mais des espèces plus jeunes, comme
de partir à la recherche des Yrthwrights, pour leur demander aide
les Nains, les Orcs et nous, les Humains, se développaient. Les Elfes
et conseil afin de vaincre le chef elfe corrompu. En chemin, de fiers
s’inquiétèrent de l’émergence de ces peuples ; après moult débats, ils
compagnons se joignirent à sa cause : la Grande Prêtresse Céléneth
décidèrent de les laisser vivre et créer leurs propres civilisations. Les
des Salish, Keldarim le sorcier des Férédel, Érénil le Vif des Latari
Dragons ne furent pas du même avis. Réticents à interagir avec les
et bien d’autres. Les aventures et les exploits de Glaciel et de ses
nouveaux venus, ils coupèrent les liens avec les Elfes et partirent vers
compagnons se sont fait une place dans d’innombrables lais et sont
les landes volcaniques escarpées de l’extrême Nord.
encore chantés dans les contrées verdoyantes de l’Aymhelin.
Les Dragons, que le Premier avait chargés de préserver le monde, LES ANNÉES DE FAMINE
avaient semble-t-il prévu la venue de Glaciel ; ils restèrent indiffé-
Personne ne sait ce qui provoqua le Grand Cataclysme – une série de
rents alors que l’Elfe les suppliait d’aider son peuple. Ils refusèrent
tremblements de terre et de bouleversements d’une proportion sans
de porter secours au jeune chef : les Elfes devaient porter seuls le far-
précédent qui ravagea notre monde. Des tempêtes terribles empor-
deau des conséquences de leurs actes. Pourtant, le seigneur des Nivali
tèrent de grandes étendues de terre ou les fracassèrent, les transfor-
ne se laissa pas abattre, il refusa de partir. Les Dragons finirent par
mant en archipels. Les érudits ont avancé de nombreuses théories
accepter d’intercéder dans les affaires des Elfes, mais lui expliquèrent
sur les origines de cette catastrophe. Certains prétendent que les
qu’un jour les tribus devraient en payer le terrible prix. Glaciel ne
énergies de l’Ynfernael ont déchiré la terre ou qu’il s’agissait d’une
pouvait accepter que son peuple souffrît plus longtemps, il accepta
vengeance effroyable des Daewyl. D’autres suggèrent que ce fut un
donc la proposition. Ses compagnons et lui revinrent, suivis d’un vol
terrible accident, conséquence involontaire de rites elfiques conçus
de Dragons, pour rallier leurs tribus respectives. La bataille finale
pour fermer les derniers portails. La majorité, cependant, s’accorde à
contre Malcorne eut lieu dans les Plaines d’Enfreil. Ce fut l’heure
dire que ces bouleversements sont simplement inhérents à la nature
la plus noire de l’histoire du monde, mais les forces alliées des Elfes
du monde, et qu’un jour ou l’autre, nous serons victimes d’une des-
et des Dragons permirent de remporter la victoire et d’abattre le
truction encore plus grande, opinion que je partage également.
seigneur Elfe corrompu.
La plupart des érudits soutiennent que le Grand Cataclysme
Les Elfes Daewyl qui survécurent s’enfuirent devant les forces
s’est produit plusieurs milliers d’années après l’arrivée des Elfes
alliées dans l’espoir de rester cachés à jamais. Mais les vainqueurs
dans le royaume mortel (l’un de mes collègues de Havregris est
ne pouvaient prendre le risque de laisser la corruption se propager,
assez précis, et avance sans hésiter le nombre de trois mille trente
ils traquèrent donc leurs ennemis pour les brûler et les faire dispa-
ans). Suite à cette destruction, les jeunes espèces commencèrent à
raître pour toujours de ce monde. La maudite tribu de Malcorne
jouer un rôle plus important dans l’histoire. Vraisemblablement,
fut presque tout à fait exterminée lors de ce massacre. On craint
les ancêtres des Nains, des Orcs et des Humains ont été créés et
encore de nos jours qu’existent de petites enclaves de Daewyl dans
ont accompli de grands exploits pendant les temps que nous consi-
les endroits les plus sombres du monde ; en outre, un groupe
dérons comme préhistoriques, mais les récits des Elfes ne daignent
au moins affiche maintenant ouvertement son désir d’expier ses
pas mentionner ces événements.
péchés en détruisant les démons dans ce royaume et d'autres, plus
lointains. Ses membres se font appeler les Elfes des Profondeurs. Les Années de Famine portent bien leur nom, car à la suite du
Grand Cataclysme, le ciel s’obscurcit et le sol gorgé d’eau donna
de bien maigres récoltes. Les temps difficiles sont censés endurcir
LE DIFFICILE les peuples ; effectivement, une farouche volonté de survivre guida
alors les Humains et les autres jeunes espèces. Des nomades sau-
AVÈNEMENT DES vages se firent une réputation d’êtres impitoyables en maraudant

JEUNES ESPÈCES
dans les landes de l’extrême Nord ; peut-être ces barbares sont-ils les
ancêtres du grand et terrible peuple des Uthuk. Si cette hypothèse
était avérée, ces derniers constitueraient alors la plus ancienne des

L es Elfes avaient remporté la Guerre de la Larme de l’Ombre,

mais ils restaient confrontés à d’autres problèmes. Les sorciers
Daewyl avaient ouvert de nombreuses brèches entre le royaume mor-
tel et l’Ynfernael, et n’importe quel démon pouvait les emprunter
pour gagner Mennara, notre monde si vulnérable.
Pour les Elfes, ces brèches représentent une malédiction, mais
de notre point de vue, elles ont peut-être été une sorte de demi-­
bénédiction. L’influence directe de l’Ynfernael est sans aucun doute
nocive pour toute forme de vie, car les démons adorent faire souffrir
civilisations humaines, mais cela équivaudrait également à dire qu’ils
étaient alors encore plus sauvages qu’ils ne le sont aujourd’hui.
L’Humanité s’est propagée des Steppes du Ru vers d’autres terres.
Peut-être ces Humains ont-ils fui suite aux attaques des ancêtres des
Uthuk, peut-être sont-ils des réfugiés ? Sur les terres qui deviendront
Terrinoth, ils trouvèrent un climat tempéré, des lacs regorgeant de
poissons, des bois luxuriants et des vallées fertiles. Les premiers colons
comprirent bientôt qu’ils pouvaient abandonner la vie nomade pour
créer des foyers permanents, des villages et des fermes.

29
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
DU MYTHE ÉQUIVOQUE
À L'HISTOIRE AVÉRÉE
N otre monde est ancien et souvent mystérieux. Il
est impossible de tracer une limite précise entre les
faits historiques vérifiables, tels que ceux décrits par des
érudits remarquables et avérés par comparaison entre de
nombreux écrits, et les faits plus douteux, provenant des
mythes métaphoriques des Elfes.
Une fois de plus, j’utiliserai le Legendum Magicara comme
guide et je fixerai la limite à la fin de la Guerre de la Larme
de l’Ombre, avant laquelle tout autre récit devra être traité
comme relevant du mysticisme et des légendes elfiques, qui
ne sont rien de plus que des histoires allégoriques vague-
ment basées sur des événements réels.
S’écoule alors une longue période, dont la durée est assez
incertaine, où l’on a assisté aux conséquences des Larmes, à
l’apparition d'espèces douées de raison autres que les Elfes
et à l’émergence de l’Humanité.
Les premiers faits historiques pour lesquels j’oserai engager
ma réputation d’historienne sont le Grand Cataclysme et les
Années de Famine qui suivirent, car leurs effets sont encore
visibles, et nous pouvons les étudier avec certitude.
L'HISTOIRE ANCIENNE
DES NAINS
Q uoi que j’aie pu dire jusqu’ici sur les Elfes, je dois reconnaître
qu’au moins, certains d’entre eux ont accepté de s’entrete-
nir avec moi. Les Nains, en revanche, sont particulièrement taiseux
au sujet de leur passé. Malgré mes nombreux voyages à travers les
Monts Dunwarr et mes séjours à Thelgrim, la capitale, les notions
les plus précises que j’ai pu glaner proviennent d’une Naine, navi-
gatrice au long cours, que j’ai rencontrée à Orris. Cette histoire m’a
coûté deux grandes amphores de vin fort et la pire gueule de bois de
ma vie, car bien sûr, elle a insisté pour que je me joigne à elle pour
profiter de ce cadeau.
Ce soir-là, j’appris que l’histoire des Nains n’a été qu’une série de
tragédies les ayant poussés à fuir toujours plus profondément sous
terre. J’ai pu depuis vérifier ces dires en fréquentant subrepticement
les Bibliothèques de la Guilde des Scribes Runiques. Selon moi, ce
peuple représente ce qu’aurait pu devenir notre propre espèce si, dans
les premiers temps, nous n’avions vu apparaître des héros comme
Timmorran et Daqan qui nous permirent de nous développer.
Quand les brèches provoquées par la Larme de l’Ombre ont laissé
se répandre les énergies d’un autre monde à travers le nôtre, on raconte
30
que les Nains ont jailli des rochers escarpés et couronnés de flammes
de la Lande Vitrifiée, ce qui correspond parfaitement à leur attitude
maussade et dure ainsi qu’à leur tempérament ardent. Les premiers
Nains eurent une existence misérable, vivant parmi les affleurements
de basalte et les coulées de lave au cœur de la Lande Vitrifiée, chas-
sant les salamandres qui se prélassaient le long des rives des lacs en
ébullition et se nourrissant de racines de shar et de lichens des volcans
trouvés parmi les rochers.
L'ÉPOPÉE
D'HELKA L'AUDACIEUSE
Parmi les Nains vivait une ouvrière très douée nommée Helka, qui
travaillait à la mine et avait bien du mal à élever sa fille, Valnir,
depuis la mort de son compagnon. La légende raconte qu’un jour,
Valnir tomba malade à cause des cieux chargés de cendres ; tous
savaient que sa fin était proche. Mais Helka refusa d’accepter son
sort : elle partit avec sa fille au cœur de la Lande pour trouver les
grands et terribles êtres dont les tanières se trouvaient dans les plus
hautes montagnes de feu, afin de leur demander leur aide ; elle
partit chercher les Dragons.
Le voyage fut long et périlleux, mais finalement Helka découvrit
une vaste grotte au sommet de la plus haute des montagnes. À l’in-
térieur se trouvait un monstrueux serpent aux écailles d’argent et aux
yeux d’or, qui observa la Naine comme on étudie un insecte qui rampe
sur son bras. Helka fit courageusement face au Dragon et exigea qu’il
l’aide à sauver la vie de sa fille.
Le Dragon désigna les murs de la grotte ; Helka vit que des runes
gravées à coups de griffe recouvraient les parois rocheuses. La créa-
ture accepta de la laisser utiliser les runes pour sauver sa fille, mais en
retour, elle exigea de prendre la vue d’Helka pour qu’elle ne puisse
jamais révéler ce qu’elle avait découvert à d’autres.
La Naine accepta ce marché et le Dragon lui montra quelles runes
utiliser pour guérir son enfant. Ce fut la dernière chose qu’elle vit, alors
que le visage merveilleux du Dragon commençait à briller de plus en
plus fort, lui brûlant yeux. La puissante créature partit, et Helka pro-
nonça les mots de pouvoir pour guérir Valnir. Ensuite, en tâtonnant
contre les murs de la grotte, elle retrouva son chemin tout en mémori-
sant les formes d’autres runes gravées dans les parois rocheuses.
Quand Helka revint dans son village, elle prit une pierre et grava
chaque rune dont elle se souvenait dans une plaque de basalte.
Lorsque les Nains commencèrent à exploiter ces secrets, leur existence
primitive prit fin.
LE KAROK DOUM
Les runes renfermaient les secrets de la magie, du travail des métaux,
de l’agriculture et de la maçonnerie. Forts de ces connaissances, les
Nains purent quitter le cœur de la lande calcinée pour s’installer dans
les vertes prairies qui l’encerclaient. Ils construisirent de grandes villes
d’airain et de basalte dans les montagnes surplombant ces terres ver-
doyantes et appelèrent leur nouveau foyer le Karok Doum, ce qui
signifie « cadeau des Dragons » en langue naine. Pendant de nom-
breuses années, les Nains travaillèrent à construire un royaume pai-
sible et stable, Helka l’Audacieuse continua à étudier les secrets des
runes et Valnir devint une grande dirigeante de son peuple. Mais la
paix ne dura malheureusement pas.
LA GUERRE DU FEU
Le ressentiment des Dragons de la Lande Vitrifiée envers les Nains
grandit ; ils les qualifièrent de voleurs et les accusèrent d’avoir dérobé
les connaissances draconiques. Ils observèrent encore et encore le
Karok Doum, leur courroux grandissant, et finalement, ils partirent
en guerre.
 Les Nains combattirent vaillamment, mais une telle guerre ne pou-
vait avoir qu’une seule issue. L’une après l’autre, les cités brûlèrent.
Les survivants des armées naines massacrées firent front une dernière
fois à la Gorge des Braises Noires. Les courageux soldats protégeaient
des caravanes entières de réfugiés qui fuyaient la Lande et tentaient
de gagner les collines et les plaines voisines, tout en faisant face aux
armées des Dragons.
Bien que vieille et fragile, Helka l’Audacieuse mena une dernière
charge contre l’ennemi, ordonnant à Valnir de conduire le reste de leur
peuple en sécurité. Finalement, on raconte qu’Helka aurait déchaîné
les runes les plus dévastatrices pour détruire le col entre les mon-
tagnes, emportant de nombreux Dragons dans l’effondrement. Hélas,
la magie runique prit également la vie de l’Intrépide et celle des braves
Nains qui l’accompagnaient en ce jour fatidique.

L'EXIL DANS LE DUNWARR

Cependant, les Nains ne trouvèrent refuge ni dans les vallons sans
arbres, ni dans les ravins escarpés qui bordaient la Lande Vitrifiée au
sud-ouest. Finalement, leurs errances les conduisirent à une grande
chaîne de montagnes. Certains partirent vers l’est et formèrent les
colonies des Monts Jornall, tandis que d’autres continuèrent vers le
sud. Auprès d’un volcan, au cœur d’une vallée généreuse, ces réfugiés
construisirent la cité de la Forge d’Yrthwright… dont le nom rend
hommage à la gloire de leur ancien royaume.
Valnir et nombre des siens construisirent d’abord leurs maisons
parmi les sommets enveloppés de brume, au nord du territoire où
émergerait plus tard Terrinoth. Mais on voyait toujours de temps à
autre quelques Dragons venus du nord survoler ces terres ; les Nains
commencèrent donc à construire leurs forteresses sous la surface.
Ils s’enfoncèrent alors dans les grottes, toujours plus profondé-
ment, délaissant le ciel. Finalement, ils baptisèrent leurs montagnes
Dunwarr, nom qui signifie « sanctuaire ». Les enfants de Valnir
devinrent les premiers seigneurs des Profondeurs, qui protègent et
dirigent encore le peuple nain.

L'HUMANITÉ
PROGRESSE
L es Années de Famine marquent la fin de l’histoire telle que la
content les Elfes et le début de la nôtre telle que nous la connais-
sons. À cette époque, les Humains avaient probablement fait un pas
timide vers la civilisation, mais il n’en reste aucune trace, et les terres
qui allaient devenir Terrinoth étaient en grande partie inhabitées, à
l’exception de quelques fermes et villages récemment construits.

LE SEIGNEUR ARCUS PENACOR

ET L'ÈRE D'ACIER
Nous considérons que la période où se déroulèrent les campagnes du
seigneur Arcus Penacor, qui deviendra le premier des Rois Penacor,
marque le début du calendrier utilisé par les Humains. Arcus était un
noble, chef d’un petit village. Durant les derniers jours des Années de
Famine, il dut faire face à plusieurs attaques de pillards orcs et d’êtres qui
deviendraient finalement les terribles Chevaliers de la Garde de Sang.
Arcus créa une confédération avec les fiefs voisins et parvint à les
convaincre de mettre en commun leurs ressources et leurs combattants
afin d’assurer la sécurité des terres. Peu de temps après, ces armées unies
terrassèrent leurs ennemis. Le seigneur Arcus, qui avait non seulement
eu l’idée de créer cette confédération, mais avait également combattu
avec courage dans de nombreuses batailles, devint le héros des habitants
du pays. Il fut proclamé souverain du nouveau royaume de Talindon,

31
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
situé au centre du continent. Cet événement capital, qui eut lieu il y a
presque deux mille ans, constitue l’an zéro de notre calendrier.
Le roi Arcus s’avéra être un bon souverain. Il rédigea les chartes
qui codifièrent le gouvernement de Talindon, et des traces de ces
anciennes lois persistent dans les codes que les seigneurs Daqan
appliquent aujourd’hui. Il leva des fonds pour faire construire des
temples et de grands ouvrages d’art. Il préserva la sécurité du royaume
et de son peuple, construisit des fortifications, établit des patrouilles
frontalières et créa des ordres de chevalerie. La fortune sourit au nou-
veau royaume, et ses nombreux enfants, forts et courageux, dédièrent
leur vie à en assurer la gloire.
LES PREMIERS JOURS
DU ROI CHAGRIN
Les Années de Famine avaient pris fin ; pendant près de trois siècles, le
royaume prospéra sous le règne des Rois Penacor. Lorsqu’il arriva sur
le trône en 286, Jerlon Penacor semblait parfaitement digne de por-
ter la couronne. Riya, reine compétente, était célébrée à la cour pour
son intelligence et son charme, et leurs tout jeunes fils, Farrengol et
Farrendon, paraissaient eux aussi destinés à devenir de beaux et bons
princes de la lignée Penacor.
L’amour en avait cependant décidé autrement. Le royaume fut
déchiré lorsque le roi découvrit que la reine Riya et son plus grand
ami, son premier conseiller, Rusticar Lorimor, étaient profondément
épris l’un de l’autre, malgré leurs vœux respectifs de loyauté envers le
roi et le royaume. Lorsque Jerlon apprit qu’ils s’aimaient, ses prêtres et
ses conseillers le supplièrent de ne faire preuve d’aucune clémence ; ils
l’avertirent que tolérer une telle trahison serait une insulte à la volonté
des dieux et le rendrait faible aux yeux de son peuple. Mais le roi
aimait toujours sa reine, et il fut envahi par la mélancolie plutôt que
par la colère. Il annula son mariage et bannit définitivement Riya et
Rusticar du royaume.
Étrangement, beaucoup de sujets du roi suivirent Rusticar et Riya
dans leur exil, d’où mon interrogation : la trahison n’a-t-elle finale-
ment pas eu une place plus importante que l’amour dans cette his-
toire ? Le roi Jerlon semble avoir eu du mal à garder ses sujets auprès
de lui, ce qui témoigne d’un manque de charisme ou d’une autre
faiblesse de caractère. Quelle que soit la vérité, Rusticar se révéla être
un grand dirigeant, dont Riya fut au moins l’égale, et ce dans tous les
domaines. Peu après leur arrivée sur les rives de l’océan occidental,
ils fondèrent en effet leur royaume, qui rivalisait avec tout ce que
la lignée Penacor avait apporté (même si ces propos semblent héré-
tiques). Évidemment, j’évoque ici l’Empire de Lorimor, dont nous
reparlerons plus tard.
LA RÉBELLION
DE FARRENGOL PENACOR
À Talindon, le roi Jerlon pleurait son amour perdu. Il refusa de prendre
une autre épouse, sans se soucier de sauvegarder les apparences.
Perfidement, ses courtisans commencèrent à l’appeler le Roi Chagrin.
Comme d’autres jeunes nobles que je citerai peut-être, le prince
Farrengol fut toujours un enfant turbulent ; sa mère en exil et son
père perdu dans sa mélancolie, il se trouva libéré de toute autorité
parentale. Farrengol avait fait son éducation dans la cour des gardes,
entouré des membres les plus rustres et les plus violents de la maison
de son père, qui avait imprudemment laissé des liens de solidarité et
d’amitié se créer entre eux. Les gardes apprenaient au jeune prince à se
battre et à monter à cheval ; malheureusement, ils l’emmenaient aussi
secrètement piller des fermes éloignées pour s’amuser. De son côté, le
prince faisait en sorte que ses amis n’aient jamais à faire face aux graves
conséquences de leur comportement violent.
32
À l’occasion du seizième anniversaire du prince, le bouffon de
la cour déclama un poème écrit pour l’occasion. Quand Farrengol
réalisa que c’était un acrostiche et que les premières lettres de chaque
vers formaient le mot « bâtard », il fut envahi d’une rage féroce et
réunit ses acolytes pour quitter le château au triple galop, appelant
la vérole à s’abattre sur le roi morose et sa cour médisante. Ils ne
revinrent jamais.
Avec le temps, la nouvelle se répandit que des hors-la-loi retors atta-
quaient les voyageurs et les fermes isolées dans le nord du pays, non
loin de la frontière et des terres sauvages de Nerekhall. Les rapports
faisaient état de crimes graves dont la fréquence augmentait dangereu-
sement, mais le triste Roi Chagrin ne daigna pas lever le petit doigt
pour ordonner qu’on les arrête. Il laissa donc au seigneur de Nerekhall
le soin de promettre une récompense pour la capture des hors-la-loi,
morts ou vifs. Des chevaliers itinérants parvinrent finalement à tra-
quer et acculer les brigands dans une ferme. La scène qui se déroula
alors fut d’une horreur indicible.
Le lendemain matin, quelques chevaliers se présentèrent aux portes
du château du seigneur de Nerekhall. Ils portaient de longs bâtons
auxquels pendaient une vingtaine de têtes. Sous le sang séché et la
crasse de la route, on pouvait reconnaître les visages de certains des
membres de la garde partis avec Farrengol. Le prince était là, lui aussi.
Il avait été pris vivant, comme ses plus proches compagnons ; ils
étaient maintenant assis à califourchon sur les chevaux de réserve des
chevaliers, les fers aux mains et aux pieds.
LA TERRIFIANTE
TOUR DE NEREK
Nerekhall a été nommé d’après les ruines étranges et menaçantes qui
se dressaient sur les flancs d’une colline solitaire au centre de la région.
Personne n’avait osé construire quoi que ce soit à l’ombre de la Tour de
Nerek, car son aspect était si horrible qu’un profond sentiment d’ap-
préhension envahissait tous ceux qui passaient du temps à proximité,
au point de menacer leur santé mentale. On dit que les Elfes sont à
l’origine de la construction de la tour, bien qu’ils refusent de confirmer
cette rumeur et ne revendiquent en aucun cas la sinistre ruine. Tous
ceux qui vivaient dans les environs avaient un sommeil perturbé, plein
de cauchemars délirants qui continuaient à les hanter après leur réveil.
Le seigneur de Nerekhall décida d’utiliser la tour comme prison.
Le prince Farrengol et ses compagnons y furent enfermés en
attendant l’arrivée du roi, le seigneur de Nerekhall étant trop pru-
dent pour oser juger un Penacor. Pendant les nuits sombres qu’ils
y passèrent, ces vils individus auraient découvert le secret de l’ef-
frayante réputation de la tour : dans un coin du grenier s’ouvrait un
portail Daewyl à l’intérieur duquel vivait une ombre de l’Ynfernael.
Farrengol avait à peine rencontré le démon qu’il lui jurait déjà fidé-
lité éternelle si celui-ci lui rendait sa liberté.
Lorsque le roi Jerlon arriva au donjon du seigneur de Nerekhall,
on lui présenta des preuves des crimes de son fils et des comman-
dants de sa garde. Le roi ne perdit pas de temps et condamna à
mort le prince Farrengol. Il ordonna que les hors-la-loi soient pen-
dus à la Tour de Nerek et que leurs corps soient ensuite rapportés
de la frontière de Talindon et jetés dans les bourbiers des marécages
du nord-est.
LE RETOUR
DU REDOUTABLE PRINCE
Le Roi Chagrin retourna dans son château, où il erra comme un misé-
rable pendant quelques années. Le monarque mourut dans la solitude,
sans jamais avoir fait son deuil. Son fils survivant, Farrendon, n’avait
rien en commun avec son père, il n’avait pas ses faiblesses et était aussi
téméraire et résistant que ses ancêtres de la lignée Penacor.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres

L'ASCENSION DE
Toutefois, le prince Farrengol et ses compagnons n’avaient pas
encore quitté ce monde. Leurs dépouilles gisaient, putréfiées, dans
les marais, mais l’ombre de la tour n’avait pas oublié sa promesse.
Revenus à la vie grâce à la magie noire, les corps de Farrengol et de ses LLOVAR ET DES
comparses se relevèrent finalement et quittèrent le marais pour accom-
plir de nouveaux forfaits, comme au bon vieux temps. Les pillards UTHUK Y'LLAN
I
morts-vivants dévastèrent les fermes solitaires voisines. Grâce au butin
et aux armes dont ils s’étaient emparés, ils établirent rapidement leur l s’écoula plus d’un siècle avant qu’un groupe de braves ne par-
camp dans un donjon en ruine perdu dans les Collines Brumeuses sur- vînt à arrêter Farrenghast et ses comparses. On pense générale-
plombant leur ancienne tombe marécageuse. Le seigneur Farrenghast, ment qu’ainsi prit fin le règne du prince déchu, mais j’ai entendu
comme on appelait à présent le prince déchu, continua à dévaster les des récits affirmant qu’il hante encore Terrinoth. Malgré ses exac-
terres environnantes avec ses morts-vivants. Ils étaient le fléau de cette tions, une paix relative régna pendant cette période sur la plupart
région ; leur soif de malheur était apparemment inextinguible. des terres.

33
 REALMS OF TERRINOTH
Part I: Tales of Darkness

Cette paix s’acheva lorsque les Rois Penacor durent affronter des
adversaires bien pires encore : les terribles Uthuk Y’llan, dont on
trouve l’origine chez les nomades Loth K’har. Ces derniers consti-
tuent l’une des plus anciennes civilisations humaines, et certainement
la plus horrible.
Augures de la Nuit. On prétend qu’ils se seraient rapprochés des
membres d’une tribu elfique éloignée qui aurait été si impression-
née par leurs talents que ces Elfes les appelèrent les Loth Caara,
ce qui signifie « Arpenteurs de Rêve » dans leur langue. Le nom
« Loth K’har » dérive de ce terme.

L'ERRANCE DES LOTH K'HAR LE MAL QUI DORMAIT

ET LEURS MÉTHODES
DE DIVINATION
Pendant les temps cléments, les Loth K’har parcouraient les plaines
à la recherche de nouveaux pâturages pour leurs animaux, ils com-
merçaient avec les nombreuses fermes qui entouraient les landes.
Durant les périodes plus cruelles, ils avaient recours au pillage,
abattant leur fureur sur ces mêmes fermes pour les dépouiller.
Leurs shamans apprirent l’existence d’un royaume mystique appelé
T’mara T’rusheen d’où ils tirèrent des conseils prophétiques.
Les plus habiles de ces shamans formaient une caste appelée les
DANS LES SABLES
Après de nombreuses recherches, il semble que Llovar Rutonu
Lokander soit né en l’an 412. Les membres de la tribu de ses parents
faisaient partie des rares Loth K’har capables de survivre dans les
landes désertes de l’extrême Orient, où les profonds évents volca-
niques expulsent les fumées toxiques produites par les entrailles du
monde. La famille de Llovar était réputée dans la tribu car elle avait
déjà engendré de nombreux Augures de la Nuit et des chefs renom-
més ; Llander, le frère aîné de Llovar, montrait déjà de grandes prédis-
positions de voleur et de pillard malgré son jeune âge.

34
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
On attendait beaucoup du jeune Llovar, et il alla bien au-delà
de ces espérances. Les érudits qui ont étudié ses prodiges pensent
qu’une des brèches Daewyl se trouvait dans les landes de l’Est, et
que Llovar fut sensible à l’influence de l’Ynfernael dès son enfance.
Théorie intéressante, mais qui risque d’être impossible à prouver
étant donné la réaction mortellement hostile de la région envers
les visiteurs.
L'AVÈNEMENT DE LLOVAR
Llovar fut rapidement reconnu pour ses prodigieuses aptitudes
d’Arpenteur de Rêves ; on lui conféra le titre d’Augure de la Nuit
lors de son onzième anniversaire. De plus en plus téméraire au fil des
années, le jeune homme aurait rencontré, pendant un long séjour dans
le T’mara T’rusheen, une entité de l’Ynfernael, et aurait succombé à
une corruption définitive.
Dans la société cruelle mais toutefois paisible des Loth K’har, les
prouesses et le génie capricieux de Llovar furent célébrés, malgré les
signes évidents d’une influence maléfique. Le jeune augure était révéré
par ses chefs comme une sainte figure, il les accompagnait afin de
susciter l’exaltation de la tribu pour qu’elle surpasse toutes les autres.
Bientôt, les chefs firent de Llovar leur pair, puis leur chef suprême.
Ceux qui s’opposèrent à son influence et à ses pouvoirs grandissants
furent bannis ou exécutés ; Llander serait tout de même resté un de
ses proches confidents bien qu’il ait exprimé des doutes sur la façon
de diriger de son frère.
LA NUIT DES INVOCATIONS
Llovar déclencha son plan soigneusement élaboré pendant la Nuit des
Invocations. Après avoir promis de mirifiques récompenses et avoir
utilisé des formules interdites, il conduisit les plus valeureux guerriers
de sa tribu dans le T’mara T’rusheen, d’où ils émergèrent physique-
ment transformés, façonnés par l’influence de l’Ynfernael. Leurs mus-
cles épais devinrent surnaturellement puissants, et de leurs os mêmes
poussèrent des armes, déchirant leur peau pour former de grandes
pointes et de larges lames.
Ses guerriers à ses côtés, Llovar commença à former une confédéra-
tion des tribus, soumettant ceux qui refusaient de s’allier de leur plein
gré. Même les chefs des tribus Scal et L’jan, dont les effectifs étaient
pourtant plusieurs fois supérieurs à ceux des Loth K’har, s’agenouil-
lèrent devant lui. Bientôt, sa campagne se transforma en une guerre
civile à grande échelle entre les tribus des plaines. Alors qu’ils envahis-
saient les Steppes du Ru, les Loth K’har et leurs alliés choisirent un
nouveau nom : Uthuk Y’llan, qui signifie « Essaim de Locustes » dans
la langue du peuple des plaines.
L'ASCENSION
DE TIMMORRAN
A
u cours de la Nuit des Invocations, la femme de Llander, Rala,
donna naissance à un fils. Les Augures de la Nuit saluèrent
l’enfant et prophétisèrent qu’il deviendrait un homme d’une grande
importance. Effrayés par la dépravation croissante de son frère,
Llander et sa famille finirent par fuir dans les landes désertiques pour
commencer une nouvelle vie avant d’être eux aussi victimes des folies
sanguinaires de Llovar.
LA FUITE DE LLANDER
VERS LORIMOR
Les fugitifs se dirigèrent vers Lorimor, qui était devenu un empire
côtier florissant, réputé pour sa culture cosmopolite et ses pres-
tigieuses écoles. Llovar considéra l’abandon de son frère comme
une terrible trahison ; il convoqua les forces de l’Ynfernael pour
qu’elles jettent leurs plus effroyables malédictions sur les fuyards.
On ne peut affirmer que ces malédictions portèrent leurs fruits,
mais Rala mourut d’une longue et douloureuse maladie sur la
route et Llander disparut mystérieusement peu de temps avant que
Timmorran, âgé de cinq ans, ait atteint les portes de Lorimor, loin
à l’ouest.
TIMMORRAN ÉTUDIE LA MAGIE
Orphelin, sans parents et sans amis, Timmorran dut lutter pour sur-
vivre en ses jeunes années, mendiant pour quelques pièces de cuivre
dans les rues de Lorimor. Bien qu’inexpérimenté, il était déjà visi-
blement doté de grands talents pour la magie, et se tourna vers la
sorcellerie telle qu’on la pratiquait dans la rue pour obtenir de l’argent.
(Certains avancent qu’il utilisait ses talents pour escroquer et voler les
gens, je préfère croire l’histoire très répandue selon laquelle il accom-
plissait des miracles pour divertir la foule ébahie.)
Un groupe de magiciens locaux eut vent des talents de Timmorran.
Celui-ci fut rapidement accepté dans leur ordre ; ils lui enseignèrent
comment utiliser la magie de manière plus méthodique. (Les étudiants
qui lisent ces mots devraient les garder précieusement en mémoire : les
succès ultérieurs de Timmorran furent le fruit de l’acceptation de la
discipline imposée par ses professeurs.)
LES ASSASSINS DE Q'ARO FENN
Les pouvoirs de Timmorran grandissant, un Augure de la Nuit avertit
Llovar de la menace que représentait son neveu, prophétisant qu’un
jour celui-ci vaincrait le seigneur des Uthuk Y’llan. Llovar se moqua
ouvertement d’un tel pessimisme, méprisa cet avertissement et fit
extraire le cerveau de l’augure de sa boîte crânienne.
Bien qu’arrogant et dédaigneux en public, Llovar devait secrè-
tement s’inquiéter, car il envoya trois tueurs, des mages-assassins
redoutés, connus pour être des serviteurs de Q’aro Fenn, afin qu’ils
débusquent et tuent Timmorran. (On suppose que Q’aro Fenn
n’est pas véritablement un nom, mais plutôt un titre qui peut plus
ou moins être traduit par « Sorcière aux os de démon » dans notre
langue. C’est du moins ce qu’affirme l’un de mes collègues qui étu-
die la langue des terres de l’Est ; je ne prétends pas m’y connaître
dans ce domaine. Cela semble toutefois approprié, puisqu’elle était
l’un des lieutenants de Llovar et la cheffe de ses assassins selon
certains écrits de Timmorran.)
LE VERSATILE SAL MERINGYR
À Lorimor, Timmorran devint l’apprenti d’un célèbre magicien
nommé Sal Meringyr. L’impétueux Sal était doté d’une grande
puissance et d’un caractère héroïque, mais nourrissait la folle
ambition de cristalliser l’énergie des arcanes. Après tout, les Larmes
de Latariana n’étaient-elles pas censées être la cristallisation de
l’énergie de l’Empyréen ? Bien que cette dangereuse idée se fût
développée par sa faute dans l’esprit de son jeune apprenti, il faut
reconnaître que sans Sal Meringyr, l’histoire de Timmorran aurait
pris fin ici. Les assassins de Q’aro Fenn l’avaient enfin retrouvé.
Quand ils l’attaquèrent, Sal se battit comme un dément pour sau-
ver son apprenti ; il tua deux des assassins et envoya le troisième
dans les airs. Le magicien paya chèrement son acte de bravoure et
mourut des suites de ses blessures.
Timmorran décida alors de fuir à travers les mers vers le loin-
tain continent de Ghom. Il refit sa vie à Al-Kalim, également appelé
Scindeterres, et offrit ses services à la tribu d’Ashan l’Ancien pour
progressivement devenir un magicien très puissant, doublé d’un
aventurier ; il se lia d’amitié avec Waiqar Sumarion.
35
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
LES PREMIÈRES
TÉNÈBRES
S
elon de très anciennes archives, Llovar serait parvenu à unir
toutes les tribus des plaines du Nord en l’an 478. Les armées des
Uthuk Y’llan apportèrent avec elles les Premières Ténèbres dans leur
marche pour dépouiller les terres du Sud.
LLOVAR ENVAHIT L'OUEST
Les Uthuk Y’llan comptaient déjà nombre de redoutables guerriers,
nourris par les énergies de l’Ynfernael et emplis du désir de piller les
terres étrangères et d’annihiler toute résistance. Bien qu’il fût à la
tête de ces terribles guerriers, Llovar n’aurait pourtant pas pu porter
la guerre à Talindon sans l’aide d’alliés qui jurèrent fidélité à sa cause.
Les Orcs des Plaines Brisées furent les premiers à prêter allégeance au
seigneur des Locustes, le belliqueux Chef Lukosh cherchant depuis
longtemps un prétexte pour déclencher les hostilités. Ils furent
ensuite rejoints par le Chef de Guerre Sillage d’Enfer et son groupe
de Dragons de l’extrême Nord. Ces forces se rassemblèrent pour
créer une grande armée dont les Uthuk Y’llan formaient l’avant-
garde, Llovar ayant toujours le dernier mot sur les questions de stra-
tégie. Il conduisait les Uthuk sur son coursier bien-aimé Calamité,
une bête carnivore et vorace qu’il avait personnellement invoquée
de l’Ynfernael.
La guerre arriva sur les terres des Penacor, les armées de Llovar
dispersèrent sans rencontrer aucune difficulté les forces désorgani-
sées de la région. Tout au long de l’année 478, Llovar brûla la partie
orientale de l’Aymhelin et pilla Talindon. Le roi Falladir Penacor ras-
sembla ses soldats, mais son armée fut terrassée à la première bataille.
Nashaia, l’un des chefs des Uthuk, désarçonna le roi Falladir ; il
était sur le point de l’achever lorsqu’une contre-attaque désespérée
du prince Parren força l’ennemi à reculer assez longtemps pour per-
mettre de sauver le roi et de le transporter en lieu sûr. Alors que
Falladir attendait que ses blessures guérissent, les restes de son armée
furent dispersés, et les soldats devinrent de simples fugitifs, des vaga-
bonds à peine capables de harceler sporadiquement des unités en
difficulté de la horde de Llovar.
L’année suivante, Llovar ordonna à ses alliés orcs de continuer les
pillages à travers Talindon alors qu’il conduisait ses Uthuk vers le
nord, à travers les défilés étroits des Monts Dunwarr, jusqu’aux portes
de la grande forteresse de Thelgrim. Llovar accordait une importance
très particulière à la capitale des Nains, car elle constituait une posi-
tion stratégique à partir de laquelle une armée pouvait frapper dans
n’importe quelle direction à travers les terres environnantes ; Thelgrim
donnait accès à toute la frontière nord de Talindon, et était également
facilement accessible grâce à d’importantes voies d’approvisionne-
ment à travers les montagnes. Aussi puissantes que fussent les forces
de Llovar, il ne disposait cependant pas d’un équipement suffisant
pour envahir Thelgrim ; il décida donc de l’assiéger et d’affamer ses
défenseurs jusqu’à ce qu’ils se rendent.
NAISSANCE D'UNE ALLIANCE
Falladir Penacor travailla sans relâche pour rétablir l’ordre dans son
royaume après la destruction semée par les Uthuk, mais il savait que
son temps était compté. Si Llovar parvenait à briser la résistance de
Thelgrim, il reviendrait sans aucun doute ravager ses terres. Falladir
rassembla donc une nouvelle armée pour affronter l’Essaim de
Locustes, mais les volontaires qui répondirent à l’appel étaient peu
nombreux, mal entraînés et misérablement équipés.
La situation devenait de plus en plus difficile ; alors qu’il se battait
pour rassembler une armée, le roi Falladir fut contraint de démettre
36
de leurs fonctions un certain nombre de gardes noirs à cause de leurs
discours défaitistes – sanction qui peut paraître extrême, mais je rap-
pelle à mes lecteurs que ces temps étaient désespérés. Puis, venues de
l’Aymhelin, arrivèrent les forces des Elfes Latari, dirigées par le roi
Triamlavar. Les Elfes s’engagèrent à combattre aux côtés des forces des
Penacor. Ainsi naquit une grande tradition d’alliance entre Humains
et Elfes contre les menaces de l’Ynfernael. Une troupe d’élite fut
constituée à la hâte, combinant les forces d’assaut les plus rapides et
les plus efficaces des deux espèces. Elle avança à marche forcée à travers
les cols des montagnes et prit à revers les forces de Llovar dans une
attaque surprise et dévastatrice.
Les Humains et les Elfes déstabilisèrent complètement les Uthuk
et contraignirent Llovar à battre en retraite pour réorganiser ses
forces. Falladir et Triamlavar offrirent ainsi un répit à la forteresse des
Nains, qu’ils supplièrent de se joindre à eux dans cette guerre, mais
les seigneurs des Profondeurs du Dunwarr étaient réticents à l’idée de
s’engager dans une action militaire. Ils accordèrent certes à cette nou-
velle alliance l’usage de la forteresse de Thelgrim, mais refusèrent obsti-
nément de risquer leurs troupes au combat, affirmant qu’ils ne feraient
que se défendre dans ce conflit. Bien qu’un seigneur des Profondeurs
nain nommé Halgir, fils de Grom, fît valoir que les Nains devraient
prendre leur part de responsabilité sur le champ de bataille, les autres
seigneurs ignorèrent son avis.
Pendant ce temps, les pillards Uthuk attaquèrent les terres des
Penacor, et un vieil ennemi refit surface : des menaçantes Collines
Brumeuses au nord-est surgit une colonne de guerriers morts-­
vivants, Farrenghast à leur tête. Bien que certains aient oublié sa
présence malfaisante, surtout ceux qui vivaient loin de Nerekhall,
ce dernier représentait toujours une funeste malédiction pour cette
terre. La vile créature n’hésita pas un instant à prêter allégeance
aux forces de Llovar.
LES HÉROS DE
L'ANCIEN TEMPS ET
LEURS MERVEILLEUX EXPLOITS
En l’an 481, Timmorran persuada son ami Ashan l’Ancien d’envoyer
des forces défendre Talindon, arguant que si Llovar n'était arrêté
là-bas, il ne tarderait pas à s’attaquer à Ghom. Ils s’accordèrent pour
créer une armée d’Hommes de Scinde et passèrent un marché avec
la flotte de Lorimor pour qu’elle les emmène de Ghom à l’empire,
puis leur fasse remonter le Fleuve Flambepanache afin de rejoindre
les forces de Falladir. Il fallut une année entière pour que ce plan soit
mené à bien. En 482, Timmorran renforça cette alliance ; ses armées
commencèrent à traquer les bandes de pillards qui dévastaient les
terres et les fermes du Sud-Est de Talindon.
En 483, la campagne de Timmorran commença véritablement.
Avec l’accord de Falladir et Triamlavar, il ordonna à l’armée alliée de se
diviser en deux contingents ; il commanderait le premier, et le célèbre
général des Scindeterres Waiqar Sumarion, le second.
Timmorran envoya Waiqar aider Thelgrim, une fois encore assié-
gée. La tâche s’avéra assez simple pour le général, car il était un bril-
lant magicien en plus d’un chef militaire compétent. À l’automne, sa
mission l’ennuyait tellement qu’il lança sa propre campagne contre les
forces de Farrenghast. Ce fut une grande victoire : le contingent de
Waiqar bannit la horde de morts-vivants.
Entre-temps, l’armée de Timmorran, que Falladir et Triamlavar
avaient fini par rejoindre, débusqua les Uthuk et leurs alliés. Lors de la
Bataille des Collines Ardentes, ils appâtèrent une armée d’Orcs et les
poussèrent à attaquer une position en hauteur bien défendue. La vic-
toire fut éclatante, et Timmorran se servit de sa magie pour attaquer
le Chef Lukosh. Le magicien considérait les Orcs comme des brutes
violentes, mais il sentait que ceux-ci ne portaient pas l’Ynfernael dans
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
leur cœur. Il estima que la seule raison qui les poussait à s’allier à
Llovar était la marque sanglante que Lukosh portait en signe de fidé-
lité. Effectivement, une fois leur chef disparu, les Orcs commencèrent
à abandonner la cause de l’Ynfernael et, en 486, Llovar ne fut plus en
mesure de convoquer aucun régiment orc.
Waiqar voulait pousser son avantage ; Timmorran, plus cir-
conspect, conseilla aux alliés de consolider leurs victoires et de se
consacrer au combat contre les forces Uthuk au sud de Talindon.
Malheureusement, Waiqar ne tint pas compte de cet avis. Il rassembla
une armée et la conduisit dans les Landes de Charg’r, exactement à
l’endroit où Llovar avait érigé sa grande Citadelle Noire d’où il diri-
geait sa campagne.
Tout au long de l’an 485, Timmorran continua de superviser la
reconquête des terres Penacor, ses armées dispersant tous les Uthuk
qu’elles rencontraient. Toutefois, il ne se réjouissait guère, car il n’avait
aucune nouvelle de Waiqar et de son armée. Apparemment, ceux-ci
avaient simplement disparu dans les Landes de Charg’r.
L'OST DES ÉPINES
Dans les lointaines Terres Sombres de Ru, Llovar rassemblait ses
forces. Les morts-vivants de Farrenghast ayant été éliminés et les
Orcs de Lukosh chassés vers les Plaines Brisées, il ne pouvait plus
compter que sur les Dragons du Chef de Guerre Sillage d’Enfer
comme alliés majeurs. Pourtant, l’armée de Llovar était si grande
qu’on affirmait qu’elle noircissait la face du monde, et qu’on l’ap-
pelait avec désespoir l’Ost des Épines. Llovar avait divisé ses forces
en plusieurs contingents, dirigés par ses fidèles lieutenants, dont
les noms devinrent bientôt synonymes de cruauté et de perfidie :
la redoutable sorcière Q’aro Fenn, Melinesh le Cruel et Terrible,
Nashaia le Fléau du Roi et Khull le Serpent, aussi connu sous le
nom de Vipère, le plus grand archer des Uthuk. De nos jours encore,
même ici à Havregris, ces noms font frissonner mes collègues histo-
riens quand ils évoquent cette période.
En 487, l’Ost des Épines envahit Talindon, balayant tout ce qui
se dressait devant lui. Sur le Champ Cendré, l’Ost affronta une
armée dirigée par le roi Falladir et ses fils, qui combattirent vaillam-
ment. Le roi faillit fendre d’un coup d’épée la tête de Melinesh, tan-
dis que le prince Parren planta une lance dans le cœur de Nashaia.
Mais Llovar avait l’avantage du nombre, il maîtrisait la magie et
la cruauté de ses troupes était infinie. Quand vint le soir, les trois
Penacor gisaient morts sur le champ de bataille aux côtés des sol-
dats qui leur avaient juré fidélité. Un petit groupe de survivants en
piteux état, dirigé par le jeune baron Daqan, échappa au massacre.
Seule la fureur d’une grande tempête empêcha Llovar de pourchas-
ser les survivants, qui parvinrent à grand-peine à braver la pluie
battante pour avertir Timmorran et l’informer des nouvelles forces
dont disposait Llovar.
LES LOCUSTES SONT VAINCUS
Timmorran ordonna à ses troupes de se regrouper dans les contreforts
des Rochers Brisés. Il choisit un emplacement stratégique pour un
dernier affrontement désespéré, les flancs de son armée protégés d’un
côté par les profondeurs des eaux du Lac de l’Étoile Claire et de l’autre
par les pentes abruptes du Mont Goltok.
Pendant qu’il attendait l’Ost des Épines, Timmorran fut très
étonné, en écoutant les rapports, d’entendre qu’une armée appro-
chait par l’arrière. Ses troupes et lui furent soulagés de constater qu’il
s’agissait des Nains de Thelgrim. Halgir, fils de Grom, avait fini par
convaincre les seigneurs des Profondeurs d'engager les troupes naines
dans cette guerre. C'est un fait marquant de l'histoire des Nains ; mon
amie navigatrice m'en a même fait le récit à Orris après notre qua-
trième ou cinquième coupe.
Les troupes de Llovar arrivèrent à l’aube et lancèrent leur attaque
par vagues successives ; des Uthuk frénétiques étaient chargés de
briser les lignes et des bêtes démoniaques constituaient un fer de
lance sanglant. La Bataille des Locustes avait commencé. L’air était
saturé de flèches et d’éclairs de magie ; les Uthuk tombaient en
masse pour se relever de plus belle. Khull dirigea la troisième vague,
concentrant ses forces pour couvrir son avant-garde qui pénétrait la
position de Timmorran.
Des Uthuk tentèrent de tuer le magicien de leurs lames d’os
acérées, mais le roi Triamlavar bondit pour les en empêcher. Ce
dernier étant occupé par son combat, Khull en profita pour tirer
une flèche empoisonnée qui toucha le roi Elfe au ventre. Furieux,
Halgir, fils de Grom, défia Khull d’affronter sa hache. Le seigneur
des Profondeurs fut récompensé de sa bravoure par un trou dans le
crâne. Ashan l’Ancien se lança alors dans la mêlée. Khull fit tirer
un barrage de flèches dont une perfora le poumon de l’Homme de
Scinde. Ces trois sacrifices ne furent toutefois pas vains, car tous ces
efforts avaient épuisé Khull, ce qui permit à Timmorran de survivre
à l’attaque.
En apprenant que l’assaut de Khull avait été repoussé, Llovar fit
appeler Calamité, son cheval démoniaque dont le harnais était décoré
des têtes des seigneurs fraîchement massacrés. Le Maître des Locustes
demanda à Q’aro Fenn de le rejoindre avec les guerriers d’élite res-
tants. Il agit rapidement, essayant de profiter de la désorganisation
autour de la position de Timmorran suite à l’assaut de Khull.
Cependant, Llovar ne se doutait pas que son ennemi avait éco-
nomisé son énergie magique pour cet affrontement. Les deux
armées combattirent à nouveau, les montagnes tremblèrent quand
Timmorran et Llovar déchaînèrent leurs magies d’une puissance
inouïe. Llovar invoqua plusieurs monstruosités de l’Ynfernael, dont
Timmorran se débarrassa en les faisant simplement bouillir sous la
lumière brûlante des arcanes. La lame ensorcelée de Llovar fendit
l’air, couverte de flammes vertes et de venin noir dégoulinant, mais
Timmorran s’entoura d’un bouclier de force pure et résista à ses coups.
Il étendit alors sa main, et une lance d’énergie magique transperça le
cœur pourri de son oncle.
Ainsi mourut Llovar. Calamité s’effondra à ses côtés, le corps de
l’affreuse bête se dissolvant alors que les énergies qui le constituaient
retournaient vers l’Ynfernael. En me référant à mon expérience,
certes limitée, du royaume des ténèbres, je ne peux qu’imaginer à
quel point cette scène fut troublante. Ensuite, ligne par ligne, les
forces de l’Ost des Épines firent demi-tour pour s’enfuir dans les
Rochers Brisés. La Bataille des Locustes était terminée, les Premières
Ténèbres achevées.
Dans le chaos qui s’ensuivit, Timmorran et le baron Daqan cher-
chèrent à reprendre le contrôle de leurs armées, mais, obsédés par la
recherche de butin et le désir de vengeance, leurs soldats perdirent
la tête. Ils poursuivirent les Uthuk qui s’enfuyaient et pillèrent
les convois. Le temps de rétablir l’ordre, le corps du seigneur des
Locustes avait disparu, et il était impossible de déterminer le sort de
ses lieutenants.
Certains disent que Q’aro Fenn récupéra le cadavre de Llovar
dans les rochers et l’emmena dans un endroit secret bien au-delà
des Steppes du Ru. Si une telle chose s’est produite, le lieu de
repos éternel du Maître des Locustes doit être un monument
vénéré par tous ceux qui cherchent à s’attirer la faveur des forces
de l’Ynfernael. On prétend aussi que l’on peut trouver la tombe
de Llovar en suivant la piste des larmes d’amertume de Q’aro. Les
derniers instants de Khull, de Q’aro Fenn et du Chef de Guerre
Sillage d’Enfer ne sont pas passés à la postérité ; il est vraiment
regrettable que les soldats alliés se soient laissés aller à une telle
indiscipline, privant ainsi le peuple et l’histoire d’une justice pour
les actes de ces viles créatures.
37
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
L'ASCENSION ET LA
CHUTE DU ROI DAQAN
L
e royaume de Talindon était anéanti, la lignée des Penacor
éteinte. Timmorran profita de cette situation pour mettre en
place une nouvelle forme de gouvernement inspirée de celles qu’il
avait observées au cours de ses voyages.
FORGER UNE NOUVELLE PAIX
Les seigneurs de Talindon suggérèrent que le baron Daqan pourrait
reprendre la couronne des Penacor. Timmorran jugea cette proposi-
tion raisonnable, la voyant comme une étape de la transition entre
le règne des Penacor et le nouveau système de gouvernement qu’il
envisageait. Il persuada le baron de monter sur le trône, mais lui
conseilla également de jurer devant tous qu’il ne transmettrait pas son
titre à un héritier, mais créerait un Conseil des Barons pour prendre
sa succession.
Que le roi Daqan ait gouverné de son propre chef ou qu’il ait suivi
les ordres de Timmorran comme une simple marionnette suscite
encore de nombreux débats dans la communauté des historiens ; selon
moi, Daqan et Timmorran partageaient le même point de vue, il n’y
avait donc pas de tension quant à la question du pouvoir politique.
Le couronnement eut lieu en 488, et Daqan fut rapidement considéré
comme un souverain plein d’assurance.
LE SAUVETAGE DE WAIQAR
Peu après que Daqan fut monté sur le trône, Timmorran constitua
une armée pour voyager jusqu’aux confins des Landes de Charg’r
afin de découvrir ce qu’il était advenu de Waiqar Sumarion. Après
environ six mois, il tomba sur la Citadelle Noire de Llovar où il ter-
rassa les diverses horreurs qui y nichaient. Dans les profondeurs d’une
oubliette, parmi les nombreux prisonniers de Llovar, il découvrit le
visage ravagé du général autrefois si fier.
On connaît peu de détails sur le sauvetage de Waiqar, on sait
seulement que lorsque Timmorran revint à Talindon, il exhorta le
roi Daqan à interdire de voyager vers l’est dans ces terres maudites.
Il rassembla toutes les cartes des Landes de Charg’r et les réduisit
en cendres.
TERRINOTH
Alors que Daqan s’occupait de la reconstruction du royaume, de
nombreux contemporains observèrent combien la société avait évolué
depuis le règne des Penacor. Les Elfes se déplaçaient librement sur
ces terres, aidaient à la réhabilitation des communautés rurales, et les
ingénieurs nains du Dunwarr dirigeaient des exploitations de riches
gisements de fer découverts dans les collines du Nord. Ce parfum cos-
mopolite et l’autorité croissante accordée au Conseil des Barons (plus
récemment connu sous le nom de Conseil des Treize, en raison du
nombre de ses membres) permirent de créer une nouvelle ère d’opti-
misme et de prospérité.
Le roi Daqan, peut-être sur les instructions de Timmorran, pro-
nonça un discours dans lequel il se déclarait indigne du nom de
Penacor et annonçait que le royaume de Talindon appartenait main-
tenant au passé. Il proposa de renommer cette jeune nation aux
nouveaux dirigeants : ainsi naquit Terrinoth, ou « Terre d’Acier ».
LA CAMPAGNE DES STEPPES DU RU
La convalescence de Waiqar dura plusieurs mois ; il garda toujours
des stigmates de sa détention, entre autres une certaine maigreur et
un aspect négligé. Autrefois confiant et impétueux, le général était
38
maintenant toujours d’humeur maussade. Timmorran le supplia d’ac-
cepter à nouveau le commandement de l’armée. À la grande joie de ses
troupes, Waiqar y consentit.
Jadis d’une témérité frôlant l’insouciance, il était désormais
favorable à une approche du combat plus calculée, dont il parvint
tout de même à tirer une grande gloire. Quand un chef de guerre
Uthuk nommé Da’Roul Engluos surgit des Landes, Waiqar entama
la Campagne des Steppes du Ru. Ses troupes et lui défièrent
Da’Roul et détruisirent tous les camps Uthuk des Steppes du Ru
et des Terres Sombres. Daqan ordonna la construction de tours
de guet le long des frontières des terres interdites afin d’y installer
des patrouilles pour surveiller les signes de résurgence des Uthuk.
Au fil du temps, ces tours tombèrent en désuétude, car les Uthuk
avaient bel et bien été anéantis.
Pourtant, à l’heure de son triomphe, Waiqar refusait tous les éloges.
Au lieu de se délecter de ses victoires, il se plaignait auprès de ses
capitaines de la complaisance et de l’arrogance de Timmorran. Il esti-
mait que si le magicien avait jugé bon de faire bénéficier l’armée de
sa magie, de nombreuses vies auraient pu être épargnées. Je sais que
Timmorran était l’allié et l’ami de Waiqar, mais je ne peux m’empê-
cher de me demander si le grand mage fut informé du revirement
d’opinion du général à son sujet et des insultes qu’il proférait de plus
en plus haut et fort.
LES RÉFORMES DE DAQAN,
LE CONSEIL DES BARONS ET
LA FONDATION DES CITÉS LIBRES
Le roi Daqan n’occupa jamais le donjon des Penacor dans le
domaine ancestral de Tamalir. Il rédigea une charte pour charger les
anciens de la cité de sa protection et de son gouvernement. Leur était
accordée une grande indépendance, à condition qu’ils respectent les
décisions adoptées à la majorité par le Conseil des Barons, qu’ils
reversent une partie des taxes au Conseil et qu’ils entretiennent une
force permanente de soldats pour la protection de Tamalir et du
royaume. Ainsi, la plus grande cité de Terrinoth devint la première
des Cités Libres.
Dans une vallée calme du Sud, Daqan fit construite l’imposante
citadelle d’Archaut. En son centre se dressait une grande salle où,
au début de chaque printemps, les barons de Terrinoth se réunis-
saient, acceptant l’hospitalité du roi Daqan pour discuter des ques-
tions du royaume. Pendant l’une de ces discussions, il fut décidé
que Waiqar Sumarion aurait l’honneur de faire partie du Conseil et
qu’on lui accorderait des terres dans le Nord-Ouest de Terrinoth, près
des Collines Brumeuses et des Marais de Karahesh. De nombreux
Hommes de Scinde, vétérans des campagnes de Waiqar, s’installèrent
dans sa baronnie, la treizième du royaume. Le général gouverna équi-
tablement, bien qu’il encourageât une culture militariste et supervisât
la formation d’une légion de guerriers.
Tout le monde n’était pas satisfait des réformes du roi Daqan,
en particulier le baron Ulon de La Clairière du Héron, qui affichait
ouvertement ses opinions réactionnaires ; son opposition à Daqan
donna souvent lieu à des débats animés.
LES PRÉOCCUPATIONS
DE TIMMORRAN
Timmorran était souvent absent à cette période, il voyageait à tra-
vers le monde. De plus en plus absorbé par la nécessité de préserver
ses enseignements et ses capacités pour les générations futures, il
créa un village qui allait devenir le lieu d’apprentissage et d’étude
que nous connaissons aujourd’hui : Havregris. Il rencontrait occa-
sionnellement les barons d’Archaut, mais semblait toujours très pré-
occupé ; il se retira finalement dans la Tour de Meringyr, un grand
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
donjon qu’il avait fait construire dans le lointain Val du Magicien
pour effectuer des recherches sur la magie. Le nom du donjon était
évidemment un hommage à l’ancien tuteur de Timmorran, le grand
Sal Meringyr, qui lui avait transmis son ambition d’exploiter le
Verto Magica.
L'ASSASSINAT DU ROI DAQAN
En 513, le roi Daqan partit vers l’extrême Sud-Ouest de Terrinoth
pour arbitrer un conflit entre deux barons. Ce qui n’était initiale-
ment qu’un petit différend sur les frontières de deux royaumes voisins
s’était envenimé, quelques escarmouches s’étaient déjà produites, et le
roi Daqan espérait régler le problème avant qu’une guerre sanglante
n’éclate. Il n’arriva jamais à destination. Plus tard, on découvrit son
casque couronné sur un tronçon de route solitaire. Il semblerait que le
roi et sa suite aient été pris en embuscade et massacrés sur le chemin,
puis que leurs restes aient été dispersés par les loups.
Dans les cités de Terrinoth, on insinua que les Chevaliers de la
Garde de Sang avaient été engagés pour assassiner le roi par le baron
Ulon de La Clairière du Héron lui-même. Dirigé par Waiqar, le
Conseil prit des mesures extrêmes : il fit raser jusqu’au sol le château
de La Clairière du Héron et saisir le baron. Ulon ne cessa jamais de
clamer son innocence, même lorsqu’il se balançait dans une cage aux
portes d’Archaut, mourant lentement de faim.
LES DEUXIÈMES
TÉNÈBRES
L
a mort du roi Daqan déclencha les Deuxièmes Ténèbres.
Considérant que diverses personnes bénéficièrent de la dispari-
tion de Daqan, et alors même que les documents officiels indiquent
que seul le baron de La Clairière du Héron fut reconnu coupable aux
yeux de la justice, certains érudits émettent l’hypothèse que Waiqar
Sumarion pourrait être le véritable commanditaire de l’assassinat.
Après tout, il mit rapidement la situation à profit pour déchaîner le
mal sur Terrinoth.
Une explication alternative, que je vous recommande d’évoquer avec
la plus grande diplomatie si vous souhaitez en parler en public, consiste
à dire que Timmorran avait également beaucoup à gagner de la mort de
Daqan. Après le régicide, ceux qui avaient exprimé leur opposition au
Conseil des Barons, ne souhaitant pas voir leur nom associé à celui du
baron de La Clairière du Héron, devinrent nettement plus modérés en
matière de politique. Le Conseil y gagna une autorité suprême.
Certains suggèrent enfin que, son corps n’ayant jamais été retrouvé,
le roi Daqan n’est probablement pas mort. Je tire de cette idée espoir
et réconfort, car le retour du roi serait certainement un glorieux événe-
ment qui annoncerait un nouvel âge d’or.
LA CRÉATION
DE L'ORBE DU CIEL
Timmorran devint de plus en plus
obsédé par son ambition de préserver sa
puissance pour les générations futures.
Son rêve était de créer un réservoir de
pouvoir magique si important que les
magiciens qui viendraient après lui
seraient en mesure de l’utiliser pour
alimenter d’innombrables sorts. Il pen-
sait que cette magie serait relativement
facile à travailler et engendrerait moins
de risques de libérer la corruption venue
de l’Ynfernael.
Il imagina ainsi un puissant artefact,
une énorme sphère cristalline de magie
pure appelée Orbe du Ciel, qui devait
contenir une partie de l’énergie du Verto
Magica. Dans la Tour de Meringyr,
Timmorran s’efforça, avec l’aide de ses
acolytes, de créer l’Orbe, et y investit
tellement de sa propre énergie qu’il en
devint visiblement infirme.
Oh, que cet objet devait être merveil-
leux ! Je pourrais essayer de le décrire,
mais les lecteurs savent déjà probable-
ment que de simples mots ne suffiront
jamais. Tant de pouvoir condensé, mon
esprit vacille à cette idée…
En 513, Timmorran fit une brève
apparition publique lors d’un service
commémoratif pour le roi Daqan à
Archaut. L’extrême maigreur du magicien
fut un choc pour les personnes présentes.
Après son départ, Waiqar s’inquiéta haut
et fort de sa fragilité et des problèmes
qui pourraient advenir si l’Orbe tombait
entre de mauvaises mains.
39
 Comme Waiqar et ses guerriers approchaient de
l’atelier de Timmorran, le magicien comprit enfin
la folie que représentait l’Orbe. Il lança des sorts
d'annihilation du lien puis projeta la sphère de
cristal sur le sol d’acier de la forge
si violemment qu’elle s’y brisa.
Par magie toujours, il enferma
les innombrables éclats dans
une bourse en velours enchantée
qu’il confia à la garde de Lumii
Tamar, le plus ancien disciple
de Meringyr. Timmorran lui
fit jurer qu’il disséminerait les
fragments de l’Orbe à travers le
monde, les confiant un par un à
des êtres qu’il jugerait assez sages
pour les utiliser.
Grâce à un acte de haute magie
inouï, Lumii put se faufiler à travers
les terribles forces qui assiégeaient
le Val du Magicien, et parvint à
emporter tous les fragments à l’ex-
ception d’un seul. Quand Waiqar
pénétra dans l’atelier, accompagné
de ses fidèles gardes du corps, il fut
fou de rage de constater que l’Orbe
avait été détruit. Timmorran étant
épuisé par ses efforts, le général
n’eut aucun mal à tuer le magicien
sans défense, autrefois son ami.
Cet acte reste certainement le plus
odieux de notre histoire, du moins
à mon avis.
Waiqar s’empara du seul frag-
ment de l’Orbe qu’il trouva,
l’arrachant des mains du grand
magicien assassiné. Il se jura alors
de récupérer tous les autres frag-
ments et de ne s’arrêter qu’une
fois sa tâche accomplie. Il promit
que quiconque oserait refuser de
lui remettre le plus infime éclat
devrait affronter sa funeste colère.
Le poids de ce terrible serment était tel que,
combiné aux énergies magiques trop volatiles
libérées lors de la destruction de l’Orbe, lorsque
Waiqar le prononça, il conjura également une énorme tempête qui
balaya le Val d’une pluie glacée et empoisonnée. Les vies de tous
ceux qui étaient à portée de vue de Meringyr furent ainsi soufflées.
Pourtant, les morts ne reposèrent pas en paix. Waiqar Sumarion,
LA NUIT DE LA TRAHISON devenu Waiqar l’Immortel, quitta le Val du Magicien à la tête d’une
effrayante colonne de cadavres titubants, la Légion des Revenants.
Ce qui motiva de l’acte de trahison le plus célèbre de notre histoire est
connu du seul Waiqar Sumarion, bien qu’on suppose habituellement
que son incarcération et les tortures subies dans les cachots de Llovar
LUMII TAMAR
l’aient retourné contre Timmorran et la civilisation. Dans la Citadelle CONCOCTE UN PLAN
Noire, les ténèbres s’étaient enracinées au plus profond de son cœur Waiqar revint sur ses terres, qu’on appela dès lors la Baronnie Maudite.
et elles fleurissaient maintenant, déchaînant haine et violence. Waiqar Le Nord-Ouest de Terrinoth avait toujours été un lieu hostile dont les
rassembla alors des troupes dans sa baronnie de Terrinoth et affirma paysages n’étaient que landes brumeuses et bourbiers traîtres. Après la
être le seul à pouvoir veiller sur l’Orbe. Alors que le crépuscule tom- Nuit de la Trahison, il s’assombrit plus encore, et fut continuellement
bait par une agréable journée d’automne en 515, une légion dirigée enveloppé d’un brouillard dense et humide que la lumière du soleil
par Waiqar attaqua le Val du Magicien. Les soldats, bien préparés pour ne pénétrait plus.
prendre d’assaut le donjon, utilisèrent un bélier renforcé de métal
pour briser les portes. Ils tuèrent les gardes et passèrent les apprentis Il fallut du temps pour que la nouvelle parvienne aux autres barons.
de Timmorran au fil de l’épée. Pendant le Conseil de l’an 516, ils eurent du mal à reconstituer

40
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
l’histoire en assemblant les rumeurs entendues. Ils étaient troublés par
des informations à propos de pillards morts-vivants qui dévastaient
les terres autour de la baronnie de Waiqar. Leurs craintes grandirent
lorsque les messagers qu’ils avaient envoyés pour contacter le général
ne revinrent pas.
Alors qu’ils tergiversaient encore, un étranger emmitouflé dans
une cape arriva à Archaut et affirma être un survivant du massacre du
Val du Magicien. Comme il ne portait rien de plus dangereux qu’une
bourse de velours, il fut autorisé à s’adresser au Conseil. Lumii Tamar
put ainsi raconter la trahison de Waiqar.
Courroucé par cette nouvelle, le jeune et impétueux baron
Iréhythe empoigna la chaise vide réservée à Waiqar à la table du
Conseil dans l’intention de la jeter par la fenêtre. Alors qu’il la sou-
levait, il fut saisi par une sorte de crise et tomba en hurlant au sol,
foudroyé par une douleur atroce et des visions cauchemardesques,
avant de trépasser. Il ne laissait aucun héritier et, comme aucun de
ses sujets ne voulut risquer de subir un sort similaire, sa baronnie
mourut avec lui.
À la lumière de ces informations et suite à la mort tragique
d’Iréhythe, Tamar Lumii suggéra que les fragments de l’Orbe qu’il
portait, qu’il appelait les Étoiles de Timmorran, devaient être secrè-
tement conservés en lieu sûr. Le Conseil des Barons autorisa Lumii à
créer et diriger un ordre de magiciens chargés de protéger les Étoiles
et de donner leurs conseils avisés sur les questions les concernant.
C’est à ce moment que Lumii et les Étoiles entrèrent dans l’histoire.
Si seulement ils y étaient restés. Mais tant d’événements histo-
riques sur lesquels j’ai écrit, je le crains, sont soumis à ces terribles
mots. « Si seulement ».
LES CULTES DE LA MORT,
UNE GUERRE CACHÉE
Les barons de Terrinoth restants se préparèrent à la guerre avec
Waiqar, rassemblant leurs forces sur les terres entourant la baronnie
auréolée de brume. Cependant, l’ancien général était rusé. Je crois
que beaucoup de ses adversaires dans cette guerre avaient oublié les
compétences martiales qu’il possédait de son vivant, se concentrant
uniquement sur ses nouvelles aptitudes surnaturelles. Lui aussi avait
rassemblé ses forces, mais il avait également envoyé à la Cité Libre de
Tamalir un agent qui accomplirait des méfaits indicibles.
Certaines rumeurs suggèrent que Zarihell aurait été libérée des
cachots de la Citadelle Noire en même temps que Waiqar, après les
Premières Ténèbres, bien qu’aucun document officiel ne l’atteste.
La plupart des érudits conviennent que c’était une Elfe issue d’une
mystérieuse lignée, dotée d'une capacité de
persuasion hors normes qui explique
sans doute la facilité avec laquelle elle
diffusa la parole de Waiqar. Elle éta-
blit à Tamalir le premier Culte de la
Mort de Waiqar, qui promettait à ses
adeptes d’être libérés tant de la domi-
nation d’une baronnie corrompue
que de la mortalité elle-même. Alors
que les armées de Terrinoth se rappro-
chaient de Waiqar, le culte de Tamalir
déclencha une émeute destructrice
dans la cité.
Les barons de Terrinoth se retrou-
vèrent alors dans une position difficile.
Devaient-ils continuer d’engager leurs
forces armées pour contenir et affron-
ter Waiqar, ou les utiliser pour apaiser
les troubles à Tamalir ?
Jour après jour, les barons et leurs
armées guettaient des signes d’activité
aux frontières des terres de Waiqar. Et
jour après jour, ils ne recevaient que
des rapports sur le chaos qui régnait
dans la Cité, où le meurtre guettait les
habitants à chaque coin de rue. Aux
prémices de l’automne, les barons,
fatigués de ne rien voir d’autre que
des bancs de brouillard dérivant sur les
sinistres landes du royaume de Waiqar,
rentrèrent avec leurs armées à Tamalir.
41
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
LE FLÉAU
Waiqar profita de l’ouverture que venaient de lui offrir les barons.
Ses armées se mirent en marche et dévastèrent les régions environ-
nantes, mais, contrairement aux hordes des Uthuk Y’llan, elles avaient
un objectif précis. Waiqar voulait non seulement conquérir et piller
Terrinoth, mais aussi s’emparer des Étoiles de Timmorran. Alors que
ses légions ravageaient les villes et les campagnes, s’approvisionnant
en armes et en chair fraîche, matière première pour créer des soldats
morts-vivants, Waiqar leur ordonna de capturer des personnes pré-
cises pour les ramener sur ses terres et les interroger, afin de savoir où
étaient cachées les Étoiles.
Le temps que les barons arrivent à Tamalir, le Culte de la Mort
s’était évaporé. Les agents de Waiqar avaient abandonné la cité. Ils
s’étaient dispersés à travers Terrinoth, créant de nouvelles cellules du
culte partout où ils faisaient halte, même brièvement. Waiqar et ses
armées étaient en mouvement ; les dirigeants du culte communi-
quaient régulièrement avec les capitaines de la Légion des Revenants.
En particulier avec les deux lieutenants en chef de Waiqar : Zarihell,
qui organisait les activités du culte (bien que la rumeur prétende
qu’elle le faisait uniquement par intérêt personnel ou par amusement),
et Ardus Ix’Erebus, qui dirigeait les troupes sur le terrain et coordon-
nait leurs efforts de façon experte. À eux deux, ils veillaient à ce que
chaque action majeure de la Légion des Revenants soit coordonnée
avec des émeutes dans une ou plusieurs cités de Terrinoth.
Les barons poursuivirent Waiqar. Leurs forces combinées auraient
pu suffire à briser la Légion des Revenants, mais l’Immortel, toujours
aussi fin stratège, parvint systématiquement à éviter tout affrontement
majeur. La vie dans les cités devint si dangereuse que les habitants
partirent en masse, et un certain nombre de réfugiés dressèrent bientôt
un camp de fortune au bord du Fleuve Flambepanache. Cette posi-
tion était avantageuse, car elle permettait aux arrivages de vivres de
Lorimor de facilement atteindre le camp. Bientôt, ce camp fut appelé
Aubelande, peut-être parce que les réfugiés commencèrent à ressen-
tir une lueur d’espoir une fois installés là-bas. Aubelande devint un
endroit plein de vie, et ses habitants commencèrent à construire des
bâtiments en dur au milieu des tentes et des cabanes.
Lors de la Bataille de la Croisée des Béliers, une armée dirigée par
le baron Jerem Camford fut prise en embuscade par la cavalerie des
morts-vivants alors qu’elle tentait de franchir une rivière en crue. Le
baron ordonna la retraite vers ses propres terres, mais une armée de
revenants dirigée par Ardus Ix’Erebus harcela si brutalement ses forces
que, lorsqu’elles parvinrent enfin à se regrouper, elles n’étaient plus en
état de défendre les terres. La Légion des Revenants envahit bientôt la
baronnie de Camford, qui fut complètement ravagée ; le baron et ses
héritiers furent massacrés.
Waiqar apprit que les Étoiles de Timmorran étaient gardées par
l’Ordre de Lumii, nouvellement créé. Il concentra ses attaques sur
Archaut, la cité étant la capitale de Terrinoth, mais également le lieu
où l’Ordre s’était le plus probablement installé. La cité était toutefois
bien défendue et avait résisté à l’influence du Culte de la Mort. Waiqar
décida donc de se consacrer à affaiblir les baronnies, pillant et détrui-
sant les villes et les fermes ; pendant six longues années, la Légion des
Revenants fut le fléau des terres de Terrinoth.
42
UNE COALITION
VICTORIEUSE SE FORME
Par un matin de printemps, alors que le camp grandissant
d’Aubelande baignait dans un soleil éclatant, un bateau accosta au
port de fortune créé sur la rive, et un étranger descendit sur le quai. Il
se présenta sous le nom de Kellos et affirma être un saint homme. Il dit
avoir étudié une tradition magique permettant de maîtriser le feu et la
vitalité, et guérit miraculeusement certains des réfugiés d’Aubelande.
Bientôt, partout où se trouvaient des ennemis fut également présente
la main brûlante aux flammes justicières de Kellos.
En quelques semaines, Kellos devint la figure centrale d’un culte
grandissant. Il avait l’œil pour reconnaître le potentiel magique chez
certains êtres dont il fit ses acolytes, et bientôt il fut entouré d’une
multitude de prêtres qui pouvaient prodiguer des versions mineures
de ses propres soins merveilleux. Le miracle le plus formidable qu’on
lui prêtait était son retour d’entre les morts. Selon ses adeptes, il avait
été frappé par la lame d’un assassin, avait agonisé pendant des jours
et s’était finalement relevé de sa couche. Une fois ce conte répandu,
Kellos fut considéré non plus comme un saint homme, mais comme
un véritable être divin.
Kellos et ses prêtres se consacrèrent à la localisation et à l’exécu-
tion des meneurs du Culte de la Mort, libérant ainsi les forces des
baronnies qui n’eurent plus à se charger de la sécurité des cités de
Terrinoth. Kellos envoya également des émissaires pour implorer les
Elfes Latari et les Nains du Dunwarr d’apporter leur aide dans le
combat contre Waiqar.
Une fois de plus, les Elfes et les Nains unirent leurs forces pour
aider Terrinoth. La puissance combinée des armées alliées s’avéra
trop grande pour la Légion des Revenants. Waiqar ne pouvait plus
éviter une bataille rangée contre tant d’ennemis. Il pouvait toujours
invoquer plus de Réanimés à partir des corps des guerriers tombés,
mais pas assez rapidement sans une autre Étoile pour alimenter
son pouvoir de nécromancie. Bientôt, les effectifs de la Légion des
Revenants chutèrent, et, en 521, ils furent contraints de se retirer
dans la Baronnie Maudite.
Les alliés célébrèrent cette victoire sur Waiqar. Ils voulurent hono-
rer Kellos pour le remercier de son aide inestimable, mais le saint
homme avait disparu aussi mystérieusement qu’il était arrivé. Selon
ses fidèles, il était parti à la recherche de nouveaux ennemis à vaincre
et rassemblerait de nouveaux partisans ailleurs pour l’aider dans sa
noble tâche. La croyance veut que Kellos parcoure encore le monde
aujourd’hui, et ses adeptes de Valvigne attendent patiemment qu’il
revienne un jour à Terrinoth.
Je ne saurais dire en ma qualité d’historienne si ce récit retrace la
véritable origine du culte de Kellos, être révéré par tant de gens de
nos jours, mais nous connaissons tous la puissance et la sainteté de ses
prêtres. Lors d’un de mes voyages, j’ai été témoin de la résurrection
d’un camarade. Beaucoup d’autres ont évoqué dans nos salles, ici à
Havregris, des exploits similaires et tout aussi impressionnants. S’il
faut effectivement voir là le début de la divinité, je trouve que c’est un
bon commencement. Pour les lecteurs qui souhaitent en savoir plus
sur Kellos, une visite à Valvigne s’impose.
ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres

L'ASCENSION
DES ANCIENS ROIS
W aiqar Sumarion était vaincu, mais pas détruit. Au cœur
des brumes qui enveloppaient sa baronnie se dressait la
redoutable forteresse de Zorgas, bâtie sur le modèle de la Citadelle
Noire où il avait été si longtemps prisonnier. Les dirigeants de
Terrinoth érigèrent une série de tours de guet pour surveiller la
Baronnie Maudite. Cependant, conscients des coûts engendrés
par les anciennes tours qui surplombaient les landes de l’Est et
n’avaient toujours pas prouvé leur utilité, ils décidèrent que
celles-ci seraient beaucoup plus modestes et qu’on y affecterait des
effectifs plus réduits.

UNE NATION BLESSÉE GUÉRIT

Waiqar ne lançait aucune nouvelle invasion, mais il constituait tou-
jours une menace. Il avait infligé de terribles dégâts à Terrinoth, qui
ne comptait plus que quatorze baronnies sur les dix-sept ayant existé,
dont une était le royaume maudit de Waiqar. Les terres qui avaient
appartenu aux barons de La Clairière du Héron, Camford et Iréhythe
furent partagées entre les nobles voisins, ce qui étendit particulière-
ment les frontières des terres des Pierre d’Âme.
Avec le temps, un sentiment de sécurité se développa de nouveau à
Terrinoth, et les Étoiles de Timmorran commencèrent à ressurgir des
endroits où Lumii et ses partisans les avaient cachées. Elles apparurent
lentement dans les trésors des barons et les laboratoires des magiciens,
et furent utilisées dans des travaux pour créer des merveilles magiques.
Certaines Étoiles sont même apparues à la cour des Latari, dans les
halls de pierre des seigneurs des Profondeurs et dans la salle du trône
de l’Empire de Lorimor.

LA RENAISSANCE
DES CITÉS LIBRES
Suite aux destructions des Deuxièmes Ténèbres, de nouvelles cités de
Terrinoth obtinrent le statut de Cité Libre. Les barons, initialement
réticents à cette évolution, ne purent s’y opposer, car leurs actions
indécises au cours des Deuxièmes Ténèbres leur avaient fait perdre
toute crédibilité. Ils s’étaient avérés incapables de défendre les cités,
celles-ci étaient donc en droit d’assurer leur protection seules. Avec
le temps, Passegivre, située loin au nord, Havregris et sa célèbre uni-
versité, Rivegarde, sise au sud avec ses excellents cavaliers, Valvigne
et ses nombreux disciples de Kellos, ainsi que l’effrayante Nerekhall
signèrent toutes des chartes calquées sur celles qui accordèrent son
statut à Tamalir. Même Aubelande, bien qu’elle ressemblât encore
en grande partie à un campement de fortune, avait acquis assez d’in-
fluence pour être considérée comme une Cité Libre.
Bien qu’ils eussent perdu de leur influence, les seigneurs Daqan
de cette période supervisèrent cette prospérité et cette liberté grandis-
santes. Les Nains du Dunwarr profitèrent de cette bonne fortune et
construisirent de nombreuses grandes colonies minières et des forte-
resses dans les montagnes de tout le territoire.

43
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres

LE ROI USURPATEUR LE SALAIRE DE LA CUPIDITÉ

Dans les premières décennies du xe siècle, les luttes intestines com- ET DE LA COMPLAISANCE
mencèrent à ravager Terrinoth. Les barons, tout en présentant un
Sous le règne de Cédric Pierre d’Âme, le secret et les mesures de
front uni au monde extérieur, complotaient les uns contre les autres.
sécurité qui entouraient la possession et l’utilisation des Étoiles de
Nombre d’entre eux cherchèrent à augmenter leur pouvoir en s’em-
Timmorran furent abolis. Celles-ci furent vendues et l’or récolté servit
parant d’Étoiles de Timmorran à des fins personnelles, ou tentèrent
à construire de nombreux édifices publics, dont beaucoup existent
d’attirer de talentueux sorciers qui faisaient la gloire des cours de
encore aujourd’hui, malheureusement souvent dans un triste état – ce
leurs rivaux. La coopération entre les barons prit alors fin ; hormis
ne sont parfois que des ruines noircies.
pour les patrouilles destinées à surveiller la réapparition d’ennemis,
plus aucune ressource ne fut mise en commun, en dépit des pra- Le roi Cédric Pierre d’Âme s’éteignit en 954, terrassé par une fièvre
tiques que le roi Daqan avait fortement encouragées en espérant que maligne. Le nouveau monarque, le roi Rhys Pierre d’Âme, partageait
ce système perdure. les goûts de son père pour l’apparat et le faste. Il fit construire un cer-
tain nombre de châteaux et de forts extravagants dont on peut encore
En 936, les tensions atteignirent leur apogée et les conflits écla-
observer les ruines à travers tout le pays.
tèrent entre les barons. Ces affrontements restaient retenus, car les
barons estimaient encore nécessaire de conserver des effectifs mili- L’utilisation insensée des Étoiles permit toutes sortes de miracles, y
taires pour protéger Terrinoth de ses nombreux ennemis ; cepen- compris de nombreux exploits en ingénierie, en médecine, en aménage-
dant, une baronnie envoyait parfois une partie de ses forces armées ment du paysage et en politique. La lignée dirigeante des Pierre d’Âme
pour tenter d’en conquérir une autre. Puis, en 941, le baron Cédric devint particulièrement habile pour cette dernière utilisation. Éléanor II,
Pierre d’Âme revendiqua le Royaume de Terrinoth tout entier, et par exemple, était aussi réputée pour son Étoile d’améthyste qu’elle l’était
parvint à dominer ses rivaux en conjuguant habilement action pour ses prouesses exceptionnelles sur le champ de bataille lors du Grand
militaire, intrigue politique et soutien populaire. Pierre d’Âme Soulèvement des Gobelins de 997. Son visage serein mais sévère figure
promit en particulier d’adopter une attitude plus ouverte à l’égard encore sur de nombreuses pièces d’or frappées à cette époque.
des Étoiles de Timmorran, affirmant à
ses alliés et au peuple que, s’il deve-
nait roi, il encouragerait une utili-
sation plus libre et plus régulière de
ces artefacts.
Les membres du Conseil des
Barons étaient unanimement oppo-
sés au baron Pierre d’Âme, mais
celui-ci bénéficiait du soutien de
l’Église de Kellos, des Maîtres de
Guilde et des autres dirigeants des
Cités Libres, ainsi que d’une grande
partie de la population. À contre-
cœur, les barons cessèrent donc de
résister ; le couronnement de Pierre
d’Âme dans la Grande Cathédrale de
Kellos à Valvigne fut somptueux.
Le roi Pierre d’Âme fut surnommé
le Roi Usurpateur, car il abolit rapi-
dement le Conseil et s’empara paci-
fiquement du pouvoir sur les Cités
Libres. Il tenait toujours conseil
avec les autres barons à Archaut,
mais refusait de s’asseoir à son
ancienne place et préférait occuper
l’imposant trône laissé vide depuis
la mort de Daqan. Cette attitude fut
considérée comme une grave insulte
à la mémoire de Daqan. Même les
fidèles partisans de Pierre d’Âme
condamnèrent son arrogance, affir-
mant que cet acte attirerait le mal-
heur sur Terrinoth. Leurs paroles se
révélèrent tristement prophétiques.

44
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
Cette merveilleuse période de l’histoire est appelée de bien des
façons, mais certains l’évoquent comme le Temps des Anciens Rois,
époque où les terres des Elfes, des Nains et des Humains étaient
florissantes, où le commerce et la coopération entre le Dunwarr,
les Latari, l’Empire de Lorimor et Terrinoth étaient prospères, les
trésors de ces nations grossissant grâce aux bénéfices du négoce et
de l’innovation.
Pourtant, accomplir de tels prodiges revint à planter les graines
de la catastrophe, car une utilisation si manifeste d’objets aussi
puissants et convoités ne pouvait qu’attirer l’attention d’un ter-
rible ennemi. Les Elfes Latari ne parlent pas du Temps des Anciens
Rois quand ils évoquent cette période, mais des « Jours avant les
Dragons » – ce qui, selon moi, est une appellation malheureusement
plus appropriée.
LES TROISIÈMES
TÉNÈBRES
A vec le temps, le Royaume de Terrinoth, les Nains des Monts
Dunwarr, les Elfes Latari de l’Aymhelin et l’Empire de Lorimor
étaient tous devenus riches grâce aux Étoiles, dont ils étaient égale-
ment entièrement dépendants. On commença à appeler l’ensemble
de ces terres les Royaumes d’Équité ; tous ces peuples partageaient en
effet les mêmes coutumes et convenances, les mêmes lois, le même
goût pour les merveilles de ce monde, et avaient conclu ensemble une
alliance militaire. S’ils le désiraient, les habitants de Terrinoth pou-
vaient en théorie vivre parmi les Elfes, même s’ils n’appréciaient guère
ces derniers en raison de leur arrogance, de leur froideur et de leur
philosophie incompréhensible ; ou chez les Nains du Dunwarr, même
s’ils détestaient l’idée d’être enfermés dans des souterrains crasseux où
l’on servait de la nourriture fade.
Cependant, le Temps des Anciens Rois, plein d’harmonie et de
prospérité apparemment si facilement acquises, était sur le point de
connaître une fin violente.
L'AUBE DES
GUERRES DRACONIQUES
En 1024, plusieurs hordes de Dragons, venues de la Lande Vitrifiée
loin au nord-est, envahirent Terrinoth. Leur arrivée ardente annonça
le début des Troisièmes Ténèbres. Ces Dragons avaient entendu tant
d’histoires à propos de l’utilisation triviale des Étoiles qu’ils vou-
laient s’accaparer leurs pouvoirs et avaient décidé de s’emparer des
artefacts. Margath le Cruel, Levirax, Baalesh, Zir la Noire, Avox et
Géhennor conduisirent des groupes de Dragons plus petits qui atta-
quèrent différentes parties du monde. Bien que ces attaques fussent
presque simultanées, les Seigneurs Dragons ne s’étaient pas alliés
initialement ; parfois, certains envoyèrent même une partie de leur
horde pour attaquer les forces d’un Seigneur Dragon rival qui s’ap-
prochait trop. Tous étaient simplement venus pour s’emparer d’au-
tant d’Étoiles que possible.
L’apparition des Dragons hybrides concorde avec ces premières
attaques. On n’avait jamais observé ces créatures auparavant à
Terrinoth. Ils seraient la progéniture d’une créature appelée la Reine
Wyrm, bien que certains érudits de Havregris (y compris moi) sou-
tiennent qu’ils sont le résultat de cruelles expérimentations ou de
l’utilisation d’une magie interdite. Il est évident quand on regarde
leur morphologie qu’ils descendent des Dragons. Ils sont dotés d’un
long museau rempli de dents pointues, d’une queue serpentine et
d’une cuirasse d’écailles épaisses. Ils ont à peu près la même stature
qu’un Humain, bien qu’ils soient un peu plus grands et plus for-
tement musclés. Étant apparentés aux Dragons, certains hybrides
sont évidemment pourvus d’ailes ou capables de cracher du feu,
bien qu’ils ne le soient pas tous. Leur côté humain permet aussi à
certains hybrides d’utiliser des armes et de porter des armures.
Des essaims de ces hybrides accompagnaient leurs grands cousins
durant l’invasion ; leur présence conféra aux forces des Dragons une
flexibilité tactique qui leur avait manqué par le passé.
Les habitants de Terrinoth avaient déjà affronté des Dragons,
lorsque les forces de Sillage d’Enfer les avaient massacrés pendant les
Premières Ténèbres. Bien que ces Dragons aient été de terribles enne-
mis, ils étaient toutefois en nombre réduit. Avant que ne débutent
les Troisièmes Ténèbres, une défense organisée, principalement consti-
tuée d'un feu nourri de projectiles, de formations stratégiquement
disséminées et d’un très grand nombre de piquiers, avait été mise en
place. Ce système de défense, censé permettre de lutter efficacement
contre une attaque de Dragons, suivait les recommandations d’un cer-
tain nombre de traités militaires.
LA FIN DE LA LIGNÉE
DES USURPATEURS
Alors que les armées des Uthuk Y’llan, qui s’étaient pourtant
déchaînées sur Talindon, s’étaient contentées de détruire et de
piller ce qui leur tombait sous la main sans but précis, et que la
Légion de Revenants de Waiqar avait mis des années à localiser
un certain nombre d’Étoiles, le Seigneur Dragon Margath savait
très précisément ce qu’il voulait et où l’obtenir dès le début de sa
campagne. Lui aussi était dévoré par l’envie de posséder les Étoiles
de Timmorran, et bien qu’elles fussent disséminées dans le monde
entier, un grand nombre d’entre elles était conservé dans le trésor
du roi Trévnor Pierre d’Âme, dont la cour était installée à la Cité
Libre de Tamalir.
C’est donc vers Tamalir que l’ost du Dragon s’envola, ne s’arrêtant
que dans des villages isolés pour se réapprovisionner (doux euphé-
misme pour dire que les Dragons tuèrent et dévorèrent tout ce qui
leur tombait entre les griffes). Une fois devant les murs de la cité,
l’armée ne rencontra que peu de résistance. Les hybrides s’abattirent
sur les tours et les positions d’artillerie qui auraient pu constituer une
menace pour les Dragons plus grands, alors que ces derniers inci-
néraient les forces d’infanterie envoyées pour tuer les hybrides. On
dit que Margath lui-même fit irruption dans le palais royal et brûla
vif le roi jusqu’à ce qu’il n’en reste que de la viande carbonisée, et
qu’il fit subir le même sort à sa famille et à ses serviteurs. Terrinoth
se retrouvait encore une fois sans aucun dirigeant, et les Dragons
s’emparèrent des richesses du trésor royal, parmi lesquelles un bon
nombre d’Étoiles de Timmorran.
LE TEMPS DES
PREMIÈRES RUNES
Alors que la guerre continuait, le désir des Dragons de posséder
toujours plus d’Étoiles ne cessa de grandir, et, dans leur folie déses-
pérée, ils furent même prêts à transformer celles qu’ils possédaient
en armes de destruction afin d’étendre leurs pillages. Selon plu-
sieurs témoignages, Zir la Noire aurait été la première à briser cer-
taines Étoiles en fragments plus petits et à y inscrire des runes. Ce
processus impliquait l’utilisation du feu des Dragons pour ramollir
l’Étoile, et le fil incroyablement acéré de leurs griffes pour y graver
les marques.
Ce processus permettait de transformer une Étoile de Timmorran,
artefact magique instable qui ne pouvait être utilisé que par un magi-
cien accompli pour lancer toutes sortes de sorts, en un éclat runique,
plus petit et plus stable, utilisable par un porteur dépourvu de
connaissances magiques pour lancer un sort particulier.
45
 Comme vous vous en souvenez peut-être,
les mythes des Elfes affirment que la création
du royaume mortel s’est faite grâce aux mots
prononcés par les Yrthwrights. Mes collègues
Maîtres des Runes de Havregris soupçonnent
que les runes gravées sur les éclats soient les
représentations draconiques de ces mots.
Certaines d’entre elles sont connues sous le nom
de « runes des Dragons », et on suppose qu’elles
portent les noms des Seigneurs Dragons qui les
ont gravées. Faites-vous votre propre opinion ;
pour ma part, je fais confiance à mes éminents
confrères en la matière.
L’effet immédiat de ce travail fut de trans-
former l’ost de Margath, déjà formidablement
puissant, en une armée pratiquement invin-
cible. Les Dragons hybrides, qui formaient
l’avant-garde lors des assauts, étaient désormais
capables d’emporter avec eux des éclats runiques
qui rendaient leurs armures résistantes aux tirs ;
les puissants Dragons pouvaient se téléporter
sur de courtes distances et drainer l’énergie de
leurs ennemis afin de guérir leurs blessures.

LES ATTAQUES DES

DRAGONS TOURNENT
AU MASSACRE ABSURDE
Margath, trop confiant dans le pouvoir des
éclats runiques qui alimentaient ses forces, ne
prit plus la peine de commander sa horde et
de veiller à son unité. Ses armées se divisèrent
donc, chaque Seigneur Dragon conduisant son
propre petit groupe. Ces bataillons de pillards
s’abattirent sur les royaumes des Elfes, des Nains et des
Humains, brûlant et ravageant tout sur leur passage sans plus
suivre de véritable stratégie de combat. À cette époque-là, l’objectif
des Dragons devint flou. Les créatures cherchaient encore à s’empa-
rer d’Étoiles pour créer plus d’éclats runiques, mais elles semblaient
également prendre goût au massacre pur et simple. Même les Orcs
des Plaines Brisées souffrirent des déprédations des Dragons, bien
qu’ils n’aient jamais possédé aucune Étoile de Timmorran.
L’armée de Dragons dirigée par Géhennor se mit à persécuter les
Nains du Dunwarr en particulier. Ses hybrides lançaient leurs assauts
dans les salles souterraines des Profondeurs du Dunwarr, tandis que
les Dragons plus grands prenaient en embuscade toutes les forces
envoyées pour aider les défenseurs assiégés. Bien que ces pillages
fussent désastreux, ils n’étaient rien comparés à la dernière attaque de
Géhennor, véritablement dévastatrice, qui survint plus tard au cours
de la guerre.
Les Nains souffrirent aussi terriblement à la Forge d’Yrthwright.
Cette cité constituait une prise de choix pour les Dragons, car
des volcans fulminaient dans les profondeurs de la montagne. Ils
n’étaient pas uniquement attirés par la chaleur dégagée par la puis-
sante industrie et les exploitations minières, mais convoitaient éga-
lement les cheminées volcaniques qui leur fourniraient un habitat
agréable, comme un petit morceau de Lande Vitrifiée niché au cœur
du continent. Le Seigneur Dragon Avox dirigea l’assaut contre la
cité. Il asservit les Nains et les força à creuser plus profondément
dans la montagne, gardant pour lui les richesses qu’ils y trouvaient.
Les Dragons parcouraient la campagne autour de la forteresse, enle-
vant des Humains dans les villages voisins car ils avaient toujours
besoin d’esclaves dans les mines.
Les Latari eurent le malheur d’attirer l’attention de la Seigneur
Dragon Baalesh et de sa couvée d’hybrides. Les Dragons brûlèrent la
Porte de Lithelin et assiégèrent le palais d’argent de Caelcira. Les Elfes
étaient mieux préparés que les Nains pour résister à un assaut. Les
archers tirèrent sur les petits groupes d’assaillants depuis des positions
embusquées difficiles à localiser et à brûler pour les Dragons. Malgré
la protection des éclats runiques, les hybrides subirent de lourdes
pertes ; dès qu’ils tombaient, les Elfes s’emparaient des éclats et décou-
vraient rapidement le moyen de les utiliser.
Et ainsi Caelcira, le palais d’argent, resta invaincu. Les Dragons
infligèrent de terribles souffrances aux Elfes, mais subirent aussi de
lourdes pertes en retour ; ils ne parvinrent jamais à envahir l’Aymhelin
comme Tamalir et Thelgrim.
Plus loin, les armées de Dragons harcelèrent le ciel de Lorimor,
mais l’armée impériale ne tarda pas à construire un large éventail de
balistes autour des cités, avec lesquelles ils repoussèrent le plus gros des
attaques. De l’autre côté de la mer, même les cités d’Al-Kalim furent
attaquées par les forces draconiques.
À LA RECHERCHE DES FAVEURS
DES SEIGNEURS DRAGONS
Dans les années qui suivirent l’invasion de Margath, de nom-
breux ennemis de Terrinoth se rallièrent à sa cause. Le premier
d’entre eux, de façon assez prévisible, fut Waiqar le Traître, qui
envoya des détachements entiers de guerriers morts-vivants pour
aider les Dragons. Ce qu’il espérait gagner par cette manœuvre
reste un mystère, mais je suppose qu’il était moins intéressé par le

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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
fait d’aider les Dragons que par celui de récupérer des Étoiles de
Timmorran avant que Zir ne les morcelle toutes. Peut-être Waiqar
pensait-il que les Dragons pourraient lui montrer leur gratitude en
lui offrant une Étoile indemne, ou de nombreux éclats runiques ?
Ou alors cherchait-il simplement à se venger de ces barons qui
l’avaient humilié par le passé ? Certains sont même persuadés que
Waiqar a lui-même provoqué les Guerres draconiques, en faisant
courir le bruit à travers la Lande de l’existence des Étoiles pour
attirer l’attention de Margath.
Les mystérieux Chevaliers de la Garde de Sang firent également
leur apparition dans cette guerre, offrant leurs lances à la cause des
Dragons. On ne sait pas trop qui sont ces terribles guerriers et pour-
quoi ils apparaissent sporadiquement au cours de l’histoire. Pendant
les tout premiers temps de règne des Penacor, le roi Arcus a vaincu une
bande de pillards opérant sous ce nom ; le meurtre du roi Daqan leur
a également été attribué, entre autres atrocités.
Rien ne prouve que les Chevaliers de la Garde de Sang qui harce-
lèrent Terrinoth pendant les Troisièmes Ténèbres aient autre chose
en commun avec cette ancienne menace que leur nom. Ce que
l’on sait avec certitude, c’est qu’ils faisaient preuve d’une grande
cruauté, qu’ils étaient aussi bien équipés qu’un corps de cavalerie
d’élite, qu’ils adoraient se battre et acceptaient d’être payés en éclats
runiques. Certains seigneurs corrompus de Terrinoth furent eux-
mêmes tentés de se joindre aux Seigneurs Dragons à l’idée d’obtenir
une récompense similaire.
Les Dragons avaient cruellement besoin de tels alliés, car, malgré
leur grande force, ils risquaient de perdre cette bataille d’usure en rai-
son de leur faible nombre. Une fois encore, les Nains, les Elfes et les
Humains s’allièrent pour se défendre contre les Ténèbres.
UNE ALLIANCE À SUDANYA
En 1028, au cours d’une froide journée d’hiver, une réunion
eut lieu dans le village de Sudanya, niché près des frontières des
Steppes du Ru. L’hiver était considéré comme un moment pro-
pice pour organiser la lutte contre les Dragons. Le froid ralentissait
les grands reptiles et les rendait somnolents. Ceux-ci profitaient
des mois sans soleil pour consolider leurs victoires et économiser
leurs forces.
À Sudanya se rencontrèrent des représentants de Terrinoth, du
Dunwarr, de l’Aymhelin et de l’Empire de Lorimor afin de discuter
de stratégie ; pour la première fois dans l’histoire de Terrinoth, des
chefs des Orcs des Plaines Brisées se joignirent également à l’as-
semblée. Leur position était ambiguë : ils avaient désespérément
besoin d’aide pour affronter la menace des Dragons, mais personne
ne leur accordait la moindre confiance, en raison du rôle qu’ils
avaient joué aux côtés de Llovar pendant les Premières Ténèbres,
et de leurs nombreux pillages sur les terres voisines au cours des
siècles qui suivirent. Avant d’être invités à cette réunion, les chefs
d’un grand nombre de tribus orques jurèrent solennellement de ne
plus jamais combattre les Royaumes d’Équité. Je ne peux attester
d’aucune violation de ce serment depuis, malgré plusieurs récits
d’incidents non confirmés.
LE VENT TOURNE
Les alliés coordonnèrent leurs contre-attaques, profitant des effectifs
insuffisants des Dragons et de leur incapacité à répondre aux menaces
sur de multiples fronts. Grâce à ces assauts, les Dragons firent face à
une pression croissante et leur campagne souffrit des revers inatten-
dus. Heureusement pour les autres espèces, certains éclats runiques
avaient été récupérés dans le butin de guerre ou volés dans des tanières
de Dragons, donnant aux alliés les moyens de riposter également sur
le front magique.
Le Seigneur Dragon Géhennor, dans ce qui s’avéra être un excès
de confiance, rassembla une petite armée de Dragons hybrides et
lança une campagne souterraine contre les Nains du Clan de Jornall.
Toutefois, les guerriers hybrides furent brutalement repoussés ; les
pertes furent énormes. En outre, l’arrivée de renforts orcs prit com-
plètement au dépourvu le Seigneur Dragon, qui fut contraint de faire
battre en retraite ses quelques hybrides survivants.
Cette victoire fut qualifiée de majeure pour les Nains et leurs nou-
veaux alliés, les Orcs ; mais les Monts Dunwarr allaient bientôt en
subir le revers et être dévastés par Géhennor qui avait appris de ses
erreurs. Lors de l’attaque suivante, il chargea avec un contingent plus
important d’hybrides, ce qui lui assura la victoire.
La noble Dame Ysbet de Terrinoth conduisit une armée à la Forge
d’Yrthwright et orchestra une brillante série de combats dans les tun-
nels qui culmina lorsqu’elle terrassa le Seigneur Dragon Avox. Les
esclaves libérés la considérèrent comme leur sauveuse et lui deman-
dèrent de devenir gouverneure de la nouvelle Cité Libre de Forge
(après la destruction causée par les Dragons, les habitants ne voulaient
plus conserver le moindre lien avec les Yrthwrights).
Les Dragons subirent une défaite décisive dans le Nord-Est de
Terrinoth. Le bruit avait couru que Kell abritait plusieurs Étoiles de
Timmorran ; les Dragons attaquèrent donc la cité. Ils venaient de
tomber dans un piège ; il n’y avait aucune étoile à Kell. La cité avait
érigé des défenses redoutables avec, entre autres, des balistes conçues
à Lorimor. En outre, l’homme chargé de diriger les troupes n’était
autre que le seigneur Roland, l’audacieux aventurier, qui avait réussi
à se procurer les objets nécessaires pour tuer un Seigneur Dragon. Il
s’était muni d’un éclat runique de tempête de glace grâce auquel il
pouvait invoquer une pluie à vous geler les os, et un très rare éclat
runique de pierre d’âme, pris dans le trésor royal d’Archaut, qui drai-
nait la vie de ses ennemis pour l’emplir de la vigueur ainsi volée. Il
chevauchait une monture exceptionnelle, un Yeron, un des chevaux
ailés des Elfes.
Les troupes des Dragons vacillèrent sous une grêle de carreaux
et de flèches avant de se retirer dans le ciel froid des Montagnes du
Désespoir, hors de portée des funestes tirs d’artillerie. Le seigneur
Roland avait anticipé cette retraite, il prit donc son envol de son pro-
montoire rocheux et utilisa son éclat runique pour invoquer une pluie
de glace sur l’endroit où s’était réfugié Margath le Cruel.
Le seigneur Roland transperça de sa lance la gorge du Seigneur
Dragon hébété et affaibli par le froid. Le vaillant héros ne survécut
malheureusement pas pour célébrer sa victoire : Margath, dans les
affres de la douleur, brisa les ailes du Yeron. Cavalier et monture
succombèrent dans un vertigineux plongeon. Les habitants de Kell
saluèrent cet exploit le cœur lourd. Au cours des années suivantes,
ils fouillèrent vainement les flancs des montagnes à la recherche des
dépouilles de Roland et de Margath, qui restèrent prisonnières des
pics enneigés.
Avide de remporter une victoire à son tour, le roi Aanir des
Latari organisa une importante offensive depuis le palais d’argent
de Caelcira. Sous le couvert de l’obscurité, il dirigea une avant-
garde de Chevaucheurs de Leonx au cœur du camp ennemi.
Malheureusement pour le roi, sa charge ne fut pas l’action décisive
qu’il espérait ; avant que sa cavalerie ne puisse se regrouper, il se
trouva épinglé au sol, sous les griffes du Seigneur Dragon Baalesh,
qui le dévora tout cru.
Baalesh renforça ses armées suite à cette bataille et jugea que
les défenses des Elfes étaient maintenant si affaiblies qu’elle pou-
vait enfin prendre d’assaut le palais d’argent et mettre fin au siège.
Toutefois, avant de pouvoir agir, Baalesh reçut un message de Zir la
Noire lui intimant de partir en renfort à Terrinoth, où les Dragons
étaient menacés.
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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
DESTRUCTION DANS
LES PROFONDEURS
L
a navigatrice naine avait parlé avec amertume de la
Guerre du Feu, mais c’est une véritable haine qui
emplit sa voix quand elle évoqua les Troisièmes Ténèbres.
Comme Terrinoth brûlait, dit-elle, le Seigneur Dragon
Géhennor attaqua les Monts Dunwarr et envoya ses
armées d’hybrides ; ceux-ci s’enfoncèrent loin dans les
halls de pierre des Profondeurs du Dunwarr. Les seigneurs
des Profondeurs lancèrent une furieuse contre-­ attaque
contre la horde draconique. Sur les versants de la Pointe
du Gel Souillé, les frères Bran et Ordan, deux seigneurs
des Profondeurs, affrontèrent Géhennor, mais périrent en
vain sous ses griffes. Leurs cousins tentèrent de récupérer
leurs corps mais ne parvinrent qu’à finir brûlés vifs.
Ainsi s’éteignirent les derniers descendants de la lignée diri-
geante des Nains qui remontait à l’aube de leur histoire. J’ai
cru comprendre que cette tragédie a conduit à l’ascension
des guildes, et que cela explique que les Nains du Dunwarr
élisent maintenant leurs dirigeants parmi les doyens des
guildes. Aucun des Nains avec qui j’ai discuté ne croit que
le sang des seigneurs des Profondeurs coule encore dans les
veines de leur peuple, ce qui ne fait que renforcer la haine
viscérale et éternelle qu’ils vouent aux Dragons.
LE JUGEMENT DE SHAARINA
En 1029, les armées des Seigneurs Dragons étaient considérable-
ment réduites. Les cités de Terrinoth qui n’avaient pas été entiè-
rement brûlées étaient maintenant défendues par tant d’archers et
de pièces d’artillerie qu’aucun Dragon n’osait s’en approcher. Les
Chevaliers de la Garde de Sang avaient disparu aussi mystérieu-
sement qu’ils étaient apparus, et Waiqar le Traître n’avait envoyé
aucun autre régiment de Réanimés de sa Baronnie Maudite. Zir la
Noire et son armée de Dragons et d’hybrides vaincue sillonnaient
la campagne de Terrinoth, se cachant et essayant de conserver leurs
trésors volés.
Puis vint un spectacle qui glaça le cœur des alliés : une immense
nuée de puissants Dragons survola la terre. Ces créatures dépassaient
en taille tous les Seigneurs Dragons jamais vus ; escortées de troupeaux
grouillants d’autres reptiles, elles obscurcirent le ciel de Terrinoth.
J’imagine que beaucoup virent leur dernière heure arriver, et atten-
dirent, effrayés, cette mort ardente qui se profilait à l’horizon. L’ost
des Dragons venait de la Lande Vitrifiée, au nord, et se dirigeait vers le
dernier repaire connu de Zir.
Les alliés tinrent conseil en urgence, élaborant des stratégies pour
affronter cette nouvelle menace. Certains seigneurs, fous de peur,
suggérèrent de négocier une reddition, mais aucun être sain d’esprit
ne pouvait accepter une telle chose. Vivre sous le joug cruel d’un
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Seigneur Dragon qui se demande seulement quel profit il peut tirer de
ses esclaves et s’ils croustillent sous la dent est une vie qui, à mon avis,
ne mérite pas d’être vécue.
En quelques jours, des rapports arrivèrent suggérant que ces mêmes
Dragons qui semblaient être de nouveaux renforts pour les armées
en place repartaient maintenant vers la Lande, emportant dans leurs
griffes des tas de trésors volés dans les cités des Royaumes d’Équité.
Tous ces comptes-rendus établissaient que les nouveaux arrivants
n’avaient pas attaqué le peuple de Terrinoth et que tous les moutons
étaient encore sains et saufs après leur passage.
Pas la suite, on découvrit le site d’un terrible massacre. Des éclai-
reurs orcs retrouvèrent les corps de Zir la Noire et de centaines
de petits Dragons démembrés et brûlés. À Havregris, nous suppo-
sons que les exactions de Margath et des autres Seigneurs Dragons
n’avaient pas reçu l’aval de la Dragonne Rex Shaarina. Après un
long temps d’observation, sa cour et elle avaient probablement
décidé de mettre un terme aux Troisièmes Ténèbres en exécutant
ceux qui avaient participé à l’invasion et s’étaient emparés de trésors
à des fins personnelles lors des pillages.
D’après tous les témoignages recueillis, la Reine Shaarina vit tou-
jours dans la Lande Vitrifiée, où elle détient un nombre inestimable
d’éclats, runiques et libres, d’Étoiles intactes et d’autres richesses
magiques du Temps des Anciens Rois. Régulièrement, des aventu-
riers particulièrement téméraires se présentent devant les Dragons
à titre d’émissaires, tant pour obtenir des explications sur les évé-
nements des Troisièmes Ténèbres que pour tenter de faire du com-
merce. Ils finissent généralement dans la panse d’un Dragon, mais
certains reviennent parfois pour témoigner du grand déplaisir de la
Dragonne Rex à l’égard des excès des Anciens Rois et de leurs abus
d’un pouvoir qui n’était pas destiné aux mortels.
On raconte également que des Dragons de moindre envergure,
rares survivants des Troisièmes Ténèbres qui ont échappé à la colère
de Shaarina, vivent maintenant isolés dans des grottes de montagne
ou près de lacs marécageux. Certains prétendent même avoir discuté
avec ces créatures ; celles-ci confirment les récits de ceux qui eurent
l’honneur d’avoir une audience avec la Dragonne Rex. En de très rares
occasions, un Dragon hybride tente de se faire passer pour une créa-
ture civilisée et de s’engager dans une bande de mercenaires ou un
groupe d’aventuriers. Je ne comprends pas comment on peut tolé-
rer que vivent de telles aberrations, que même les véritables Dragons
semblent trouver abjectes.
On ignore complètement ce qu’il advint des Seigneurs Dragons
Baalesh, Levirax et Géhennor, aucun parchemin ni aucun docu-
ment retrouvé jusqu’à présent n’ayant fourni d’information à ce
sujet. Ce récit se termine donc sur une note pour le moins inquié-
tante, je le crains.
L'ÂGE DE LORIMOR
A près les Troisièmes Ténèbres, Terrinoth était une terre meur-
trie, la plupart de ses grandes cités n’étaient plus que ruines
fumantes, y compris Thelsvan, Tamalir et Archaut. Les rois Pierre
d’Âme, qui malgré leur orgueil avaient été des dirigeants bienveillants,
étaient bel et bien morts.
LA RECONSTRUCTION
DE TERRINOTH
Le Conseil fut rétabli. Dans les temps qui suivirent les Troisièmes
Ténèbres, les barons de Terrinoth qui siégeaient au Conseil (mainte-
nant Conseil des Treize), souvent appelés seigneurs Daqan, devaient
relever le grand défi qui les attendait.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
La nation était appauvrie. Les trésors avaient été volés par les
Dragons, et les fonds restants, engloutis par l’effort de guerre.
Terrinoth survivrait, mais son influence était déclinante. On dégagea
les décombres des rues, mais les cités n’étaient plus que l’ombre d’elles-
mêmes et avaient perdu leur grandeur passée. La campagne devint
la proie des bandits, des Gobelins et d’autres créatures pires encore.
Les cités furent revendiquées par de nouveaux seigneurs : marchands,
guildes et organisations avides d’argent et de pouvoir fleurirent sur les
ruines encore fumantes.
LORIMOR, ÉTOILE MONTANTE
Bien que les Dragons eussent ravagé les terres de Lorimor, les grandes
cités de l’empire, elles, avaient très bien résisté aux assauts grâce à l’uti-
lisation de balistes particulièrement puissantes et au fait que Terrinoth
ait servi de tampon entre Lorimor et la Lande Vitrifiée. Bien que de
vastes étendues de campagne et certains quartiers des cités eussent été
consumés par le feu des Dragons, Lorimor disposait encore de suffi-
samment de ressources pour renaître rapidement de ses cendres. La
reconstruction fut supervisée par l’empereur Viason Ier. Des Anciens
Roi et autres dirigeants de cette génération, il était le seul à avoir sur-
vécu aux Troisièmes Ténèbres.
Durant les siècles qui suivirent les Guerres draconiques, Lorimor
parvint même à prospérer. De nombreux réfugiés de Terrinoth, ayant
quitté leur foyer dévasté lors des Troisièmes Ténèbres, arrivèrent sur
la péninsule ; bientôt, de nouvelles colonies furent fondées pour les
loger. De nombreux édifices publics furent érigés grâce aux compé-
tences que les maçons et ingénieurs de Lorimor avaient su préserver.
En effet, l’empire, qui avait pourtant eu en sa possession des Étoiles
de Timmorran, n’avait jamais compté que sur ses habitants pour la
construction, contrairement à la lignée des Pierre d’Âme. Le peuple
avait maintenant à cœur de bâtir de grands ouvrages.
Poursuivant ses ambitions expansionnistes, Lorimor établit des
colonies sur les côtes des Torue Albes et dans d’autres lieux éloignés.
Les flottes de navires marchands gagnèrent le lointain continent de
Ghom ; Lorimor établit des liens étroits avec le califat d’Al-Kalim.
Viason Ier était un monarque aimé, et il profita de sa popularité
pour jouir d’une vie de plaisirs. Il ne devint jamais gros ou goutteux,
mais il devait entrer dans l’histoire comme l’un des monarques les
plus prolifiques du monde. En une génération, sa famille grandit au
point de former un réseau généalogique complexe d’entrelacs aristo-
cratiques. Les intrigues de palais et les disputes pour sa succession
firent bientôt partie intégrante de la politique de Lorimor.
LE SOLEIL SE LÈVE
SUR UN EMPIRE
En 1312, l’empereur Dérisian IV de la noble Maison Cerfépine pro-
nonça un discours depuis le balcon de son palais. Excellent orateur,
Dérisian choisit soigneusement ses mots pour créer une polémique,
condamnant les manipulations de son cousin sous couvert de pro-
noncer l’éloge funèbre de sa mère récemment décédée et d’encenser
le travail acharné accompli par les humbles citoyens de l’empire.
Alors que Dérisian levait les bras en réponse à l’ovation tonitruante
de la foule, un carreau d’arbalète se ficha droit dans son cœur. Le
tireur ne fut jamais appréhendé, mais la rumeur veut que la sœur de
Dérisian, Déliana, qui l’avait aidé à rédiger le discours, ait également
engagé son assassin.
Les soupçons se portent sur Déliana en raison de son comporte-
ment ultérieur. Dérisian laissait un héritier, mais l’empereur Viason
III était toujours au berceau, Déliana serait donc régente jusqu’à sa
majorité. Dès le début de son règne, on l’appela plus souvent « la
meurtrière » que « l’impératrice », et bien qu’aucune preuve tangible
ne l’eût jamais reliée à l’assassinat, elle endura un mépris généralisé.
En 1315, Viason III fut enlevé par des inconnus. Pendant plus d’un
an, le sort du jeune empereur demeura un mystère, jusqu’à ce qu’on
apprenne qu’il était sous la garde d’un oncle éloigné, retiré du monde,
qui possédait un domaine sur une île des Torue Albes. Bien qu’ap-
parenté aux Cerfépine, cet oncle s’était allié à un noble d’une lignée
rivale, la Maison Varnii.
Déliana dénonça aussitôt cet enlèvement par son parent, le qua-
lifiant de ravisseur et de corrupteur d’enfant. De son côté, le noble
oncle affirma être le sauveur de Viason III et l’avoir tiré des griffes
d’une « bande de pirates ». Le sous-entendu était évident pour
Déliana. Elle se prépara à répondre par les armes, mais Lorimor
échappa à une guerre civile, car la régente succomba à une maladie
soudaine. On soupçonne l’intervention d’un empoisonneur à la
solde de la maison Varnii, mais cette fois encore, on ne trouva
aucune preuve tangible.
Personnellement, je considère que ces événements donnent une
bonne idée de la déloyauté qui conduisit à la fondation de cet
empire. De telles traîtrises ont des répercussions sur plusieurs géné-
rations, je ne fus donc pas surprise outre mesure quand je lus des
documents au sujet des événements plutôt sordides impliquant la
« royauté » de l’Ouest.
Pendant un siècle et demi, les maisons nobles se disputèrent quant
à leur légitimité respective et la nécessité de redresser les torts his-
toriques. Au lieu de financer des travaux d’intérêt public et des
expéditions d’exploration comme par le passé, ils dilapidèrent leurs
trésors pour améliorer leur image publique et s’acheter des faveurs.
Finalement, en 1485, l’inévitable se produisit. Les factions ennemies
s’armèrent, et les conflits dynastiques de Lorimor dégénérèrent en une
guerre civile acharnée.
LA BATAILLE
DE LA BAIE DE RANTHOR
Pendant les cinq années qui suivirent, la misère s’abattit sur l’Empire
de Lorimor, qui endurait d’importants conflits alors que les familles
et les communautés se déchiraient selon leurs allégeances aux diffé-
rentes factions revendiquant le trône. Cette situation prit subitement
fin dans les Torue Albes.
La faction de l’empereur régnant, Gentias II de la Maison
Cerfépine, était la plus puissante, mais pouvait être renversée à tout
moment si ses ennemis acceptaient de former une alliance. Gentias II
a probablement gagné la guerre par la ruse plutôt que par son génie
militaire. Il aurait corrompu un certain nombre de messagers de ses
rivaux pour qu’ils transmettent de fausses informations sur les inten-
tions et les déplacements des diverses factions. Par trois fois au cours
de la guerre civile, des armées s’affrontèrent, persuadées de combattre
les forces de la Maison Cerfépine alors qu’en fait, elles faisaient face à
des forces alliées.
En 1490, Gentias II parvint à mettre fin à la guerre lors de la
bataille de la Baie de Ranthor. À cette époque, il combattait trois
cousins rebelles dont les prétentions au trône étaient toutes aussi
minces les unes que les autres, et qui représentaient les intérêts des
Maisons Varnii, Crosta et Ferastii. Il convainquit deux d’entre eux
que le troisième souhaitait réunir ses forces à la Baie de Ranthor,
un lieu quelconque sur l’île voisine d’Alben. En réalité, sa propre
armée était positionnée sur les falaises qui entouraient la baie ;
lorsque les ennemis débarquèrent et rassemblèrent leurs troupes, il
lança un assaut surprise, brûlant leurs bateaux avec du feu magique
alors qu’une multitude d’archers faisaient pleuvoir des flèches sur
les soldats.
À la fin de la bataille, le chef de la Maison Crosta était mort, celui
de la Maison Varnii était enchaîné, et celui de la Maison Ferastii,
quand il apprit la nouvelle, abandonna ses prétentions et s’exila. La
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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
bataille de la Baie de Ranthor marque la fin de la guerre, mais est
également considérée comme celle de l’Âge de Lorimor. L’empire per-
durerait, mais ne dominerait jamais plus le continent comme il l’avait
fait par le passé.
LA REINE DES TORUE ALBES
Une fois la guerre civile terminée, libéré des conflits et du besoin d’éta-
blir des colonies, en particulier dans les Torue Albes, le pouvoir impé-
rial put à nouveau porter son attention sur la péninsule de Lorimor.
Les biens de la Maison Varnii sur l’archipel voisin furent liquidés par
la Maison Cerfépine, et tout ce qui avait de la valeur fut perdu, mis
en gage ou pillé au profit de l’empire de l’intérieur des terres. Les
habitants des îles commencèrent à maudire leurs dirigeants, éloignés
de la réalité insulaire.
En 1497 eut lieu la première d’une série de révoltes. Bien que la
Maison Varnii eût été entièrement décimée, les restes des familles
nobles plus anciennes et les vieilles familles de militaires s’agitèrent,
profitant de la situation chaotique, tous tentant de prendre le
contrôle des Torue Albes. En 1505, Consino, qui s’était autopro-
clamé Grand Duc, dirigeait de fait après avoir remporté une victoire
contre la petite armée de la Maison Cerfépine, envoyée pour main-
tenir les intérêts de Lorimor dans la région. Il entreprit immédiate-
ment de redorer son blason auprès de l’empire, car il savait n’avoir
aucune chance si Lorimor décidait de reconquérir les Torue Albes.
Pour prouver sa loyauté à Lorimor, Consino tenta de faire assassiner
la capitaine Lutetia Dallia, la fameuse mercenaire. Elle avait mené une
brillante campagne au nom de Consino afin de lui assurer le trône,
mais il ne serait que trop heureux de se débarrasser d’elle, surtout si
cela lui permettait de regagner les faveurs de la Maison Cerfépine.
Lutetia survécut à plusieurs tentatives d’assassinat organisées par
Consino, et réussit même à capturer et interroger l’un des assassins.
Après l’avoir menacé, elle obtint le nom de son commanditaire. Elle
lança alors son armée de mercenaires d’élite pour prendre d’assaut
le château du Grand Duc, qu’elle jeta dans la plus profonde de ses
propres oubliettes.
Lutetia devint alors la souveraine des Torue Albes, rebaptisant
la cité d’après le nom de sa lignée. Au fil des années, elle donna
naissance à de nombreux fils et filles, et, souhaitant que sa famille
conserve le contrôle des îles, elle établit un système de règles strictes
pour le pouvoir royal qui perdure encore de nos jours. Actuellement,
les dirigeants, en particulier les reines, des Torue Albes défendent
férocement leur indépendance et ont la réputation de gouverner
d’une main de fer.
L'ÂGE DU COURAGE
C
omme Lorimor, Terrinoth avait du mal à se reconstruire et se
remettait lentement des conséquences des Troisièmes Ténèbres.
Les tâches monumentales qu’étaient la restauration des châteaux et la
replantation des champs brûlés s’avéraient d’autant plus compliquées
que les baronnies étaient dévastées et isolées. Chaque baron s’occupait
uniquement de ses terres et de son peuple ; par conséquent, des géné-
rations entières naquirent, vieillirent et moururent sans rien connaître
d’autre qu’un frêle écho de ce qu’avait été Terrinoth. La magie des
éclats, qui avait permis de réaliser bien des merveilles par le passé, avait
maintenant disparu, et tous les habitants durent réinventer les anciens
savoir-faire oubliés.
Il fallut des siècles pour restaurer ce qui fut perdu, et l’accomplis-
sement de cette tâche capitale fut entravé par l’exode des peuples vers
l’« équitable » Lorimor. Nombre des plus brillants dirigeants Daqan
et la plupart des artisans humains qualifiés abandonnèrent ces terres
ravagées, suivis par beaucoup de Nains et d’Elfes.
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Ces derniers connurent le même genre de déboires. Au milieu
des cendres calcinées de la Porte de Lithelin, Aeoneth des Latari
prit la succession de son frère décédé. Il se mit au travail et tenta
de rallier un peuple ancien et fatigué, qui se trouvait au bord de
l’anéantissement suite aux agissements des créatures que le Premier
avait désignées comme étant leurs gardiens. Au même moment,
les Nains du Dunwarr pleuraient la perte non seulement de leurs
bien-aimés souverains, mais aussi de toute la lignée dirigeante. Ce
peuple entier se retrouva soudain endeuillé, sans chef pour les gui-
der en ces temps difficiles.
Lorsque Lorimor déclina à son tour et que l’empire se brisa, une
grande partie de la civilisation humaine s’éteignit. Le commerce entre
Terrinoth, Isheim et les Scindeterres ralentit, car seuls quelques cou-
rageux capitaines bravaient les pirates et les monstres qui sillonnaient
les mers. Par voie de terre, voyager d’une cité isolée de Terrinoth à
l’autre devint si dangereux que l’on s’y risquait rarement. Pour chaque
caravane marchande arrivée saine et sauve à destination, deux autres
étaient la proie des bandits et des Gobelins.
Bientôt, chaque baronnie devint un simple petit rassemblement de
hameaux et de villages entourés d’une nature sauvage qu’aucune route
ne traversait. La poussière s’amassait sur les sièges de la salle du conseil
d’Archaut, les seigneurs Daqan répondaient de moins en moins aux
convocations du Conseil des Treize. Des décennies passaient entre
deux réunions ; quand le Conseil siégeait finalement, il ne rassemblait
que des hommes et des femmes brisés se blottissant les uns contre les
autres pour pleurer le souvenir des jours meilleurs.
L'ASCENSION DES GUILDES
Des années avant la reconstitution définitive du Conseil des Barons,
les Nains du Dunwarr s’engagèrent sur le long et difficile chemin de
la reconstruction, tentant de retrouver l’ombre de leur gloire passée.
Après cinq siècles, les clans des Profondeurs du Dunwarr s’étaient
séparés et avaient périclité, comme nos baronnies, et tous les forts
et forteresses s’étaient réduits à des communautés isolées régies par
n’importe quel noble doté de la plus infime légitimité. Cette situa-
tion aurait probablement duré indéfiniment si Ingunn Vergsbold,
la cheffe de la Guilde des Maçons de Thelgrim, n’avait entrepris de
reconstruire les quartiers de la cité détruits depuis si longtemps.
Le travail de la Guilde démarra lentement, mais il se poursuivit
sans interruption pendant les dernières décennies du xvie siècle et
ne cessa de prendre de l’ampleur pendant tout ce temps. Ingunn ne
se contenta pas de reconstruire les quartiers ravagés de Thelgrim ;
elle utilisa les dernières richesses des nobles de la cité, le peu qui
avait été amassé et préservé pendant les Guerres draconiques,
et travailla avec la Guilde des Mineurs pour construire un pont
enjambant un grand gouffre et reliant Thelgrim à la Route de
l’Âtre, pour lui permettre de communiquer avec le reste du monde.
Ensuite, la Guilde des Marchands s’allia à celles des Mineurs et des
Explorateurs pour rétablir les liens avec les autres forts du Dunwarr.
Alors que toutes les routes des Profondeurs rouvraient, le commerce
grandissait, les voyages devenaient plus fréquents et le pouvoir des
guildes augmentait.
Pourtant, de nombreux seigneurs, réticents à l’idée de perdre le
peu qu’il leur restait, refusèrent d’investir leur or péniblement gagné.
Lorsque le commerce le long de la Route de l’Âtre devint finalement
florissant, ces seigneurs n’en tirèrent aucun profit. Beaucoup d’entre
eux, trop appauvris, perdirent leurs domaines à Thelgrim suite à l’ex-
pansion des guildes, mais ils n’oublièrent jamais leur passé, et de nos
jours ils complotent encore, dans les profondeurs de forts lointains,
bien décidés à reconquérir leur pouvoir ou, au moins, à se venger des
Guildes des Mineurs, des Marchands et des Explorateurs.
En 1550, bien que non officiellement, les guildes gouvernaient
le Dunwarr. Il fallut encore deux décennies pour consolider ce
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
pouvoir et édicter les lois qui régiraient les élections des repré-
sentants du Dunwarr, choisis parmi les Maîtres de Guilde par
l’ensemble de leurs pairs. Mais à l’époque du Conseil d’Élyana,
la Première Représentante Ingunn était occupée à reconstruire la
gloire des Forts des Profondeurs.
LE CONSEIL RESTAURÉ
Saison après saison, le sort des baronnies s’aggrava jusqu’à la fin du
xvie siècle, quand une terrible famine s’abattit sur Terrinoth. Des
milliers d’habitants moururent de faim, les quelques privilégiés qui
avaient amassé de la nourriture la conservaient jalousement der-
rière des portes bien verrouillées pourvues de gardes armés. Après
trois années sans récolte, les baronnies menaçaient de sombrer dans
la sauvagerie. C’est alors que la baronne Élyana de Kell rassembla
ses fidèles serviteurs et envoya des cavaliers dans les autres baron-
nies et vers les Cités Libres. Le Conseil des Treize devait se tenir
cet hiver-là à Archaut.
Le désespoir poussa les barons à réagir, le Conseil se réunit donc
finalement pour la première fois depuis trente ans. Tous les barons,
mais aussi de nombreux princes marchands et Maîtres de Guilde des
Cités Libres, firent le long et difficile voyage jusqu’à Archaut. Le der-
nier d’entre eux arriva juste avant les premières chutes de neige, à la
fin de l’année 1596.
Les deux premiers jours du Conseil passèrent rapidement, cha-
cun vidant ses querelles et ressassant de vieux griefs. Enfin, au troi-
sième jour, la baronne Élyana tapa si fort du poing sur la table
du Conseil qu’elle en fendit le bois dur. N’étaient-ils pas tous les
héritiers d’un grand royaume ? leur demanda-t-elle. N’avaient-ils
pas la responsabilité de le sauver ? S’ils ne s’en chargeaient pas, qui
d’autre le ferait ?
Heurtés par la dureté de ses propos, les barons sortirent de la salle.
J’aimerais pouvoir dire qu’ils mirent alors de côté leurs mesquines
querelles, mais ce serait un mensonge. Pourtant, le lendemain, quand
Élyana présenta ses projets pour restaurer un semblant de commerce
entre leurs baronnies et distribuer de la nourriture pour lutter contre
la famine, ils acceptèrent à contrecœur de l’écouter et de suivre ses
plans. Et, bien que personne n’en parlât ouvertement, les barons
revinrent à Archaut l’année suivante ; le Conseil ne resta plus jamais
aussi longtemps sans se réunir.
C’est pourquoi nous commémorons la mort de la baronne par un
jour de jeûne suivi d’une nuit de fête ; c’est pourquoi nous disons que
le roi Daqan a forgé notre royaume, le roi Pierre d’Âme l’a détruit, et
la baronne Élyana l’a sauvé.
LE RETOUR DES ELFES
Les Elfes Latari menèrent mieux leur barque que leurs voisins au cours
du calme déclin de la civilisation. Bien que leur royaume et leur capi-
tale eussent été brûlés, ils n’avaient pas été entièrement rasés, et le
roi Aeoneth s’avéra aussi sage et capable que son frère. Lentement et
méthodiquement, il restaura l’Aymhelin, soignant les blessures que
Baalesh avait infligées à sa forêt et à son peuple. Il essaya de réduire les
tensions qui divisaient les Elfes Eolam et Verdelam en renforçant leur
appartenance à la tribu Latari. Les Chevaucheurs de Leonx, autrefois
considérés comme des sauvages par leurs pairs citadins, se firent un
nom comme coursiers transportant d’importants messages et comme
chasseurs des Dragons hybrides, dénichant ceux qui se cachaient sous
les rameaux de l’Aymhelin.
Au début des années 1600, Aeoneth jugea qu’il était enfin temps
pour son peuple de s’intéresser à nouveau au monde extérieur. À la
demande de la sorcière Maegan Cyndewin, il envoya des éclaireurs à
Terrinoth et au-delà pour voir ce qu’il était advenu des autres espèces.
Le prince Faolan, protecteur des frontières du Nord et fils de feu
le roi Aanir, s’opposa avec véhémence à cette décision. Les éclai-
reurs partirent tout de même et découvrirent nos terres en train de
se reconstruire lentement. Ils établirent également des liens avec les
Elfes qui avaient jadis émigré dans les Cités Libres, et certains choi-
sirent même de s’installer avec leurs cousins plutôt que de retourner
dans l’Aymhelin. La majeure partie de la participation des Elfes (ou,
comme certains aiment à le dire, de leur « ingérence ») dans nos
affaires commence à ce moment de l’histoire.
L'ALLIANCE
DES TROIS SEIGNEURS
Dans les décennies qui suivirent la restauration du Conseil, les baron-
nies eurent tendance à rester méfiantes et à s’isoler. Les Gardiens de
la Citadelle travaillèrent sans relâche pour essayer d’unir les héritiers
Daqan en établissant des liens diplomatiques et commerciaux tou-
jours plus étroits. Bien que ces échanges fussent fructueux, les barons
renâclaient encore à chaque nouvelle proposition.
Leur inertie s’avéra presque désastreuse à l’été 1627. Cette
année-là, le redoutable Waiqar l’Immortel chargea l’un de ses
fidèles disciples, connu seulement comme le Prêtre du Corbeau,
de détruire la citadelle une bonne fois pour toutes. Pour atteindre
cet objectif, Waiqar lui donna le Fétiche des Charognards, talisman
funeste créé avec de la poussière d’os de dizaines de Réanimés.
Armé de ce puissant artefact, le Prêtre du Corbeau releva en une
seule nuit une gigantesque armée de squelettes et d'apparitions
spectrales sur un ancien champ de bataille, au plus profond du
Roncebois. Il marcha alors avec sa Horde du Corbeau vers le nord,
traversa le Fleuve Flambepanache et se dirigea vers Archaut, brû-
lant et pillant tout sur son passage.
Les gardes de la Citadelle ne représentaient qu’une force symbo-
lique, et bien que le Gardien eût demandé l’aide des barons, aucun
n’arriverait à temps. Heureusement, au sud de la cité, le comte Aleks
Fairfax du Comté de Dragonholt en Allerfeldt parvint à rassembler
des troupes et s’allia rapidement avec les comtés voisins de Rostum
et Grivegué.
Les armées alliées affrontèrent la Horde du Corbeau au gué de la
Croisée de Carum, que Fairfax avait eu la brillante idée de faire forti-
fier dans l’urgence, sur la berge nord de la rivière. Une grêle de flèches
s’abattit sur la horde de morts-vivants qui remontèrent alors la rive
nord ; là, la comtesse Belmont de Rostum les attendait avec les che-
valiers des trois comtés, réunis pour une contre-attaque qui fit retour-
ner à l’eau toutes ces infâmes créatures. Lorsque le Prêtre du Corbeau
tenta de les ressusciter, la comtesse Cunningham de Grivegué conjura
un éclair qui les réduisit en cendres.
La victoire de la Croisée de Carum fut grandement célébrée. Le
Fétiche des Charognards ne fut jamais retrouvé malgré des recherches
intensives conjointes après la bataille, ce qui me paraît assez troublant.
Peut-être le puissant artefact fut-il incinéré dans l’explosion qui tua
le Prêtre du Corbeau ? L’autre explication, à laquelle je ne peux me
résoudre, est que l’un des nobles, trop ambitieux, s’en soit emparé ;
mais quel usage pourrait-on bien avoir d’une telle abomination ?
LA GUERRE DES DIX FRÈRES
À l’automne 1659, le baron Deiterhelm d’Otrin décéda subi-
tement, laissant derrière lui dix fils de diverses compagnes et
épouses, dont aucun n’était son héritier incontestable. Une guerre
civile ravagea rapidement la baronnie, opposant trois alliances
fraternelles. Les autres barons laissèrent les enfants de Deiterhelm
régler la question entre eux, jusqu’à ce qu’un nouveau belligérant
entre en jeu. L’un des frères, Geist, avait depuis longtemps quitté
la baronnie et renoncé à toutes ses prétentions à la succession pour
51
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
étudier à Nerekhall. Nul ne sait ce qu’il apprit dans cette ville mau-
dite, mais deux ans après le début du conflit, il revint soudaine-
ment à la tête d’une armée de ferrox sanguinaires levée dans les
terres sauvages des Rochers Brisés.
Geist écrasa rapidement l’une des alliances, on prétend même
qu’il massacra de ses mains deux de ses demi-frères. Les autres
membres de la fratrie le qualifièrent d’« Usurpateur » et deman-
dèrent de l’aide pour vaincre son évidente magie diabolique.
Comme les barons refusaient toujours de répondre à la demande
du Gardien de combattre avec les armées de la Citadelle, Dame
Anastel de l’Ordre de Kellos fut élevée au rang de Justicar et char-
gée de combattre la menace. Elle exhuma le Bouclier des Charbons
de son lieu de repos, sous les voûtes abritant la Flamme Éternelle,
et marcha aux côtés d’une armée de prêtres et de chevaliers.
Anastel supposa qu’armée d’un artefact aussi puissant et de la foi
ardente de ses disciples, elle terrasserait rapidement cet Usurpateur.
Cependant, les pouvoirs de Geist l’avertirent de son approche ; il ten-
dit donc une embuscade aux armées de Kellos dès qu’elles franchirent
la frontière. La plupart de ceux qui ne moururent pas sur le coup
furent corrompus et contaminés par l’immonde morsure des ferrox.
Seul un petit quart des combattants survécut et parvint à retourner à
Valvigne. Anastel ne fut pas du nombre, et Geist arracha le Bouclier
des Charbons des mains de son cadavre.
Geist semblait invincible ; durant l’hiver 1662, il assiégea la for-
teresse de Roc Noir. Une victoire à cet emplacement stratégique lui
aurait permis de contrôler le Morshan sur toute sa longueur entre
Tombeciel et la forêt de l’Aymhelin. Geist possédait le Bouclier des
Charbons ; il utilisa son pouvoir pour invoquer une grêle de feu sur
les défenseurs. La Cité Libre de Rivegarde dut se dresser seule contre
lui, car elle dépendait entièrement du commerce le long du fleuve, et
les habitants savaient que si l’Usurpateur prenait Roc Noir, il serait
ensuite à leurs portes. Aux jours les plus froids de l’hiver, toute la
compagnie des Cavaliers de Rivegarde sortit de la cité et se porta à la
rencontre de l’Usurpateur.
Les Cavaliers étaient dix fois plus nombreux que les ferrox de Geist,
mais l’Usurpateur avait déployé ses forces pour entourer Roc Noir. La
compagnie attaqua ses flancs avant que la horde ne puisse se retourner
pour affronter son nouvel ennemi. Lorsque la charge perça leurs rangs,
les ferrox flanchèrent sous le regard d’acier des cavaliers en bleu. Ils
s’enfuirent alors avec leur maître vers la rivière gelée. Alors qu’ils la
traversaient, le bouclier se mit à briller entre les mains de Geist. La
chaleur devint telle qu’il hurla sous la brûlure et laissa tomber l’artefact
sur la glace, qui se mit à fondre sous la colère de Kellos. En quelques
instants, la glace avait disparu ; Geist et ses ferrox se noyèrent dans
l’eau glaciale.
Sous la pression des seigneurs de la Garde de Rivegarde, les
enfants encore vivants de Deiterhelm choisirent pacifiquement un
successeur. Cette guerre prouva également aux barons qu’il était
indispensable de tenir compte des Cités Libres. Quand Rivegarde et
Tamalir proposèrent d’envoyer un détachement surveiller les alen-
tours et repérer les menaces naissantes, les barons furent obligés
de donner leur accord. Ainsi furent créés les Éclaireurs des Terres
Sauvages qui, deux siècles plus tard, patrouillent toujours sur les
territoires indomptés de Terrinoth.
LA DESTRUCTION DU CHÂTEAU
DE LA LANDE DE TAIRN
Bien que les Troisièmes Ténèbres se soient achevées des siècles plus tôt,
la menace des Dragons plane toujours. Aucune histoire ne le prouve
de façon aussi éclatante que le récit édifiant du comte Hector Ysphane.
Le comte, passionné d’objets rares, se procura en 1701 la pièce maî-
tresse de sa collection. Trois œufs de Dragon, chacun de la taille d’un
52
petit homme, recouverts d’écailles irisées aux teintes merveilleuses,
furent trouvés dans une grotte sur les terres d’Ysphane. Le comte les fit
transporter à grands frais au château de ses ancêtres dans la Lande de
Tairn, où il ignora superbement les conseils frénétiques du magicien
de la cour, et décida de placer les œufs à la place d’honneur… juste à
côté de l’âtre de la grande salle !
Honnêtement, en dehors de notre auguste université, tout le
monde a-t-il tout oublié au sujet des Dragons ? Je vous charge, mes
chers lecteurs, de partager vos connaissances avec celles et ceux qui
semblent avoir un pois chiche entre les oreilles, avant que Terrinoth
ne s’effondre sous sa propre bêtise.
Cette nuit-là, bien sûr, le magicien prit sagement la poudre d’es-
campette et se rendit à Havregris pour relater les faits. Il attendit des
nouvelles de la Lande de Tairn pendant un mois. Comme il n’en
recevait toujours aucune, il loua les services d’un groupe d’aventuriers
pour retourner chez lui et voir ce qui s’y était passé.
Ils trouvèrent le château réduit en cendres ; personne n’avait sur-
vécu. Les aventuriers explorèrent les ruines et tombèrent par hasard
sur le responsable de ce désastre. Dans la cave du château, un des
Dragons nouveau-nés (déjà deux fois plus gros qu’un cheval) avait
fait son nid.
Le combat qui s’ensuivit coûta une main au magicien, et les choses
auraient pu bien plus mal tourner si l’apothicaire de la troupe n’avait
pas été aussi doué dans les arts de la guérison. Finalement, le jeune
Dragon fut tué, et la troupe s’attribua très justement les trésors du
comte en récompense de cet exploit avant de retourner à Havregris.
Je me pose toujours cette question à laquelle aucun des documents
que j’ai étudiés jusqu’à présent n’a jamais répondu – et qui me semble
toujours cruciale, considérant l’espérance de vie des Dragons : que
sont devenus les deux autres œufs ?
UN VOYAGE DE DÉCOUVERTE
Alors que les baronnies renaissaient de leurs cendres et que les navires
sillonnaient à nouveau les mers, les histoires de terres oubliées recom-
mencèrent à titiller l’imagination d’explorateurs en herbe, comme
l’Elfe Lathina Veintralla et le Gnome roublard Keiren O’Brallen des
Cités Libres. L’improbable duo se rencontra à Archaut et partit pour
Dallak dans les Torue Albes, où les deux complices prirent le com-
mandement du solide navire baptisé Danse avec les vagues.
Lathina engagea un équipage et le navire fit voile vers le couchant.
Les semaines s’étirèrent en mois, puis les mois en années ; les habitants
de Dallak supposèrent le navire perdu. Ils furent très surpris quand
Danse avec les vagues revint au port cinq ans plus tard, avec l’un de
ses mâts et la moitié de son équipage en moins. Lathina rapportait de
merveilleuses histoires sur Zanaga et les Scindeterres. Pour preuve, ses
cales étaient pleines de spécimens d’animaux et de plantes, de gemmes
et d’épices exotiques ; elle rapportait même le crâne d’un « grand
Wyrm aquatique » qui venait d’être tué.
Keiren avait simplement rapporté une statuette en or représen-
tant un petit humanoïde, et une paranoïa toute fraîche à propos des
« malédictions » et des « singes chasseurs ». Lathina offrit à Havregris
un fabuleux présent : ses cartes de voyage, que nous utilisons
encore aujourd’hui ; Keiren disparut un jour dans les rues bondées
d’Aubelande, et personne ne le revit jamais.
L'ASCENSION DE LA RÉSOLUE
La politique baronniale a toujours été un fléau pour nos terres, car
il semble que peu de barons parviennent à résister au plaisir d’un
bon scandale, surtout s’il salit leurs rivaux ! Tel fut le cas lorsque
la baronne Georgiana Delacroux de Frest abdiqua en 1827 pour
épouser la cheffe orque Lazra la Chasseresse. La baronne n’ayant pas
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre I : Contes des TÉnÈbres
d’enfants et ayant omis de désigner son successeur avant son départ,
ses divers parents ne tardèrent pas à s’affronter pour s’emparer de
la baronnie. S’en aller en laissant tout derrière elle n’était peut-être
pas la chose la plus sage à faire, mais l’amour a ses raisons que la
raison ignore, paraît-il.
Les autres barons profitèrent de la situation comme on apprécie
une bonne compétition sportive, soutenant un noble puis l’autre dans
un conflit qui passait de la simple rivalité politique à des affronte-
ments occasionnels entre les groupes de partisans. Mais leur amuse-
ment fut grandement refroidi quand une charpentière locale nommée
Harriet Laurel, excédée par la situation, fomenta une rébellion avec les
paysans et les marchands de Frest.
La rébellion prit rapidement de l’ampleur et Harriet s’avéra être
une cheffe et une commandante compétente. Avant que les baron-
nies voisines n’aient eu le temps de réagir, elle avait éliminé la plu-
part des prétendants légitimes à la succession de Georgiana et pris
le contrôle des principales villes de la baronnie. Ses généraux et
elle régnèrent sur Frest pendant quatorze ans ; bien qu’assiégés, ils
repoussèrent toutes les tentatives des autres barons pour réprimer ce
« soulèvement paysan ».
Finalement, les barons cédèrent et acceptèrent de traiter avec
Harriet à Archaut. Sous le regard neutre du Gardien de la Citadelle,
ils convinrent qu’elle se verrait accorder le titre et le domaine de Frest.
Elle devint ainsi la baronne Harriet la Résolue, et, bien que les autres
barons lui reprochent encore ses origines populaires, personne ne
conteste la justesse de ses décisions depuis qu’elle gouverne Frest.
UNE AUBE NOUVELLE SE LÈVE
Et ainsi arrivons-nous à l’époque actuelle. Je suis fière de dire que nous
avons survécu aux flammes des Seigneurs Dragons et que nous avons
depuis rallumé la lumière vacillante de la civilisation. Il reste encore
beaucoup à faire et de nombreuses menaces à surmonter.
Terrinoth est toujours le siège de discordes politiques. D’affreuses
créatures rôdent toujours un peu partout, semble-t-il, et à n’en pas
douter de nombreuses régions sont toujours aussi dangereuses pour
les voyageurs. J’ai parlé avec des érudits venus d’autres régions de
Mennara : ils sont confrontés aux mêmes problématiques chez eux.
Ainsi, certains de mes collègues ont surnommé notre époque les
« années grises ». Je les qualifie de ridicules au mieux, de lâches au pire.
Notre époque est au contraire définie par un élément crucial pour
notre survie : le courage ! Notre ère est marquée par l’exploration,
l’aventure et l’héroïsme, mais aussi par des menaces imminentes. Des
morts-vivants s’agitent dans leurs tombes, des démons terrorisent les
Terres des Confins, et les Dragons brûlent les terres selon leur bon
vouloir. Nos actions marqueront soit la fin de Mennara, soit le début
d’une nouvelle ère capable de rivaliser avec les gloires du passé. Puisse
le courage nous apporter sa lumière, sans laquelle les ténèbres pour-
raient nous envahir pour toujours.
53
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi

e loin, la vue était grandiose. Des manoirs, des ailleurs, ici, les gens gardaient les yeux baissés ; ils ne jetaient
monuments et des temples s’élevaient au-dessus qu’un bref coup d’œil sur mon fidèle coursier et moi-même,
d’un horizon de toits ordonnés qui se découpait puis détournaient le regard pour ne pas croiser le mien.
sur fond de lever de soleil. Mais quelque chose
me semblait étrange tandis que nous descendions la route dans Il était aisé de comprendre que la cité était conçue pour contenir
une petite vallée avant de rejoindre la cité : probablement un bien plus d’habitants que les quelques hères qui parcouraient
effet de perspective, pensais-je en réfléchissant à la taille de ce actuellement ses larges rues bordées d’arbres. Je m’interrogeai à
qui devait sûrement être une communauté importante et pleine nouveau sur les propos du vieux Capitaine Crinière Blanche. Si
de vie. cette cité était bien la grande capitale des seigneurs Daqan, les
puissants seigneurs de si vastes terres, alors où étaient-ils ?
Je m’attendais à rencontrer une foule animée de voyageurs sur la
route menant à la cité ; en relisant ces mots, je me demande Ma maîtrise, bien qu’hésitante, de la langue commune
bien ce que j’imaginais… en effet, d’où seraient-ils venus ? Tout était maintenant suffisante pour au moins obtenir de vagues
autour, la terre n’était qu’une vaste étendue vide. Et la route qui indications afin de me diriger vers ce que je supposais être le
s’étirait devant moi était aussi solitaire que le reste du paysage. palais. Quand j’y arrivai enfin, je ne vis qu’une bâtisse déserte.
Son architecture imposante évoquait le pouvoir et la noblesse,
Poussant Ibn à avancer un peu plus vite sur la pente douce, mais ses fenêtres sombres et vides criaient haut et fort son état
je regardais la cité grise et blanche se dévoiler devant nous. d’abandon et de décrépitude.
Elle était presque insignifiante comparée aux remparts et aux
minarets gracieux de la glorieuse cité du Calife, bien sûr, mais Dans la foule disparate, je trouvai une multitude de
elle était impressionnante à sa manière, car elle possédait une fonctionnaires. Ils ne sont jamais bien difficiles à identifier,
sorte de force et une splendeur barbare à nulle autre pareilles, grâce aux uniformes raffinés et à l’allure générale d’inutilité qui
malgré la simplicité de son architecture et les froides et ternes les caractérisent. Entre ma faible maîtrise de la langue et mon
couleurs de ses pierres. mépris inné pour la bureaucratie, toujours difficile à dissimuler
devant une telle bande d’imbéciles souriants, je n’en tirai pas
Alors que nous approchions du grand mur d’enceinte, la grand-chose d’utile.
sensation d’étrangeté s’accentua. Malgré les grands monuments et
les prestigieux manoirs qui se dressaient derrière la muraille, Je continuai donc à errer dans les rues tout au long de
la cité semblait rétrécir et se ramasser sur elle-même à cette journée. Tous les dix pas environ, je découvrais une
mesure que j’approchais. Ce qui avait grandi dans mon esprit nouvelle place ou une autre statue commémorative, ou un
pendant ces longues semaines de voyage et y avait pris une telle énorme monument dédié à une gloire passée. Des batailles
importance, symbolisé un tel espoir, semblait maintenant se depuis longtemps oubliées et de grands actes de générosité et
résorber devant moi. d’héroïsme en étaient les thèmes majeurs. Tout était construit
avec cette pierre gris foncé que l’on trouvait en abondance dans
N’importe quelle grande cité d’A l-Kalim éclipserait sans difficulté la région. Que ce fût une fontaine dont les grands jets d’eau
celle d’A rchaut, si c’était bien elle. En fait, le seul palais du Calife claire jaillissaient vers le ciel, un drapeau ou une bannière
de la Cour de la Sagesse dominerait la plus grande partie de cette flottant au vent, tenu dans des mains de pierre rigide, ou une
petite cité qui semble étouffer sous son propre orgueil. coquette pelouse bien entretenue dont l’herbe avait été brûlée
par le froid de l’hiver, tous semblaient moribonds et plus
Un poste de garde vide veillait sur la grande porte ouvrant sur sinistres les uns que les autres.
cette étrange cité. Une fois l’enceinte franchie, je vis à l’intérieur
plus de monde que je n’en avais rencontré depuis mon arrivée Et pourtant, une force tranquille et désespérée se dégageait de
sur ces terres si particulières. Pourtant, les habitants étaient à la société qui avait érigé ces sanctuaires pour afficher une si
peine assez nombreux pour donner une impression de vie dans grande bravoure. Je pensai à toutes les tragédies qui jalonnent
l’immense vide qui les entourait ; ils me semblaient plus faire l’histoire de cette civilisation aussi ancienne que la mienne, si
écho au silence et souligner une absence qu’occuper un espace. Par tourmentée par les malheurs et les calamités qu’elle n’a donné

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 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
naissance qu’à des êtres à peine meilleurs que les barbares vêtus
de guenilles qui hantent la Côte des Voleurs. J’eus pitié des
misérables qui trébuchaient devant moi, dont la plupart s’étaient
enveloppés dans leurs propres misères contre l’insensibilité du
monde aussi étroitement qu’ils serraient leurs capes en lambeaux
pour se protéger de l’air glacial. J’avais pitié, certes, mais je
m’interrogeais aussi. Car je découvrais qu’ils m’étaient supérieurs
d’une façon que je n’avais jamais envisagée jusqu’à ce jour.
La richesse des odeurs que je rencontrais depuis que j’avais
débarqué du Regard du loup du Capitaine Nazrat ne cessait de
décontenancer mon délicat odorat. Habitué que j’étais à l’a ir sec
et pur de mon pays natal, après une vie d’errance dans ses
déserts et de déambulation dans ses rues propres, je ne cessais
d’être abasourdi par le large éventail d’expériences olfactives qui
m’attendaient à chaque tournant.
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Les monuments froids, par exemple, sentaient l’humidité et
la solitude, comme si aucun œil humain n’avait caressé leurs
grandioses lignes et leurs détails minutieux depuis mille ans.
C’était comme si la moiteur de l’a ir avait imprégné la pierre.
Plus d’une fois, j’a i tendu la main pour palper cette froide
solidité du bout des doigts, et j’a i toujours été surpris qu’ils
restent secs.
Les rues, en revanche, représentaient une véritable panoplie
d’a gressions et de sensations frappantes pour mes sensibles
narines. Même dans les quartiers les plus démunis de la Cour
de la Sagesse, les ordures laissées dehors se desséchaient en un
tas inerte et inodore en quelques jours. Ce n’était pas le cas
dans les rues presque désertes d’A rchaut. J’étais intrigué, je dois
bien vous l’avouer, à vous mes futurs descendants : comment
une cité si dépeuplée pouvait-elle produire un tel volume de
déchets, au point de rendre l’a ir nauséabond ?
Et pourtant, cette puanteur ne semblait nullement incommoder
les quelques âmes en peine qui erraient dans les rues vides.
Finalement, ma faim surpassa la nausée constante et
tenace causée par les odeurs de la cité, et je décidai de me
procurer de quoi me sustenter dans une petite taverne qui
commençait à se remplir sur les coups de midi. Ayant
laissé Ibn dans une petite écurie de louage de l’autre côté de
la rue, je poussai la porte et entrai. Je m’étais préparé à
être submergé par des vagues de mauvaises odeurs, mais je
fus très agréablement surpris par des fumets incomparables
de viandes rôties qui semblaient m’inviter et caresser mes
narines, chassant l’ordure des rues et m’attirant à elles
depuis la porte sombre. Le prix s’avéra raisonnable,
même selon mes humbles références, et le repas
fut agréable et copieux. On me servit de
la viande, probablement du bœuf ou du
porc – bien que, pour être honnête, je
n’aie pas fait beaucoup d’efforts pour
trancher la question – accompagnée
d’une belle portion de tubercules
écrasés, et l’ensemble du plat baignait
dans une sauce épaisse qui semblait
faire descendre le repas et fortifier le
corps contre le froid extérieur.
Les imposants murs de pierre de la ville.
Des statues et de belles bâtisses bordaient
chaque rue, toutes plus grandioses les unes
que les autres.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi

Je pus échanger avec l’histoire de l’étrange pierre que je portais, ou du moins qui
plusieurs habitants qui, pour pourrait me dire ce que je devais chercher et où le trouver.
des raisons qui leur étaient
propres, étaient plus disposés Hélas, cet espoir, apparemment comme tous ceux que je
que d’autres à parler avec un nourrissais sur ce malheureux voyage, devait s’éteindre bien
étranger venu d’une terre trop tôt. Quand, plus tard dans la journée, je m’approchai de
lointaine et exotique. Grâce à l’a ffreuse bâtisse ramassée sur elle-même, un très mauvais
mes conversations avec mes pressentiment m’envahit. C’était une forteresse, à n’en pas
loquaces compagnons, j’appris douter. Elle ne possédait ni les fins détails ni l’architecture
qui détenait véritablement ostentatoire des autres bâtiments de la ville. Cet édifice était
le pouvoir sur ces terres. dédié à la force et à la défense et, malheureusement, mon
Les seigneurs Daqan, cœur me souffla qu’il n’était destiné à rien d’autre. Devant la
semblait-il, résidaient dans lourde porte d’entrée, je ne rencontrai que le silence obtus
leurs lointains domaines, de gardes portant de riches armures, l’a ir aussi dur que la
Le bouclier et régnant chacun sur une pierre des murs qu’ils surveillaient. Là, au moins, il y avait
le marteau, région quasi autonome, et s’aventuraient rarement hors de des sentinelles.
symboles leurs forteresses de campagne. Devant ces portes, les gardes ignoraient ostensiblement une
distinctifs de la
garde de la cité. À mon grand regret, et surtout à mon immense petite foule de gens pathétiques qui suppliaient de leurs voix
Je fus chanceux de consternation, j’appris que cette cité était une coquille vide faibles pour qu’on leur accorde le droit d’entrer. C’était le plus
ne jamais tâter la majeure partie de l’année, et ne s’animait que lorsque grand groupe que j’a ie vu depuis que j’avais quitté le port
du mauvais côté les puissants seigneurs, accompagnés de leur suite, des de pirates de l'Anse de Karya, mais, malgré leur nombre,
de l’un ou de membres de leur maison et des innombrables parasites qui ils restaient tout aussi peureux que les paysans dans leurs
l’autre pendant s’y accrochaient, venaient à l’occasion d’une rencontre planifiée. champs. Les soldats ne daignaient même pas les regarder,
mon voyage ici. Ils se pavanaient alors en caracolant dans ce qui, j’en suis pas plus que les occupants de la forteresse ne souhaitaient
convaincu, était une danse perpétuelle pour établir leur leur répondre. Des voix éraillées criaient pour réclamer une
primauté les uns sur les autres. Les nobles peuvent venir de protection contre le grand mal venu du nord. J’entendis le
pays lointains, parler des langues incompréhensibles et suivre terme « Terres des Brumes » et un frisson me parcourut
des coutumes défiant l’imagination, rien n’y fera : ils agiront l’échine. J’eus une intuition et demandai à un homme à
toujours de la même manière, partout dans le monde. l’arrière de la foule si c’était le légendaire Waiqar qui les
menaçait ; je crus que l’homme allait mourir d’apoplexie juste
Cela semble être une façon terriblement chaotique de sous mes yeux. Les gens à ses côtés me regardèrent alors,
gouverner un royaume, mais je suis loin de chez moi, et ces leurs yeux écarquillés.
coutumes ne me paraissent pas plus étranges que ce que
j’a i pu observer dans d’autres contrées depuis que j’a i quitté les En fin de compte, je laissai les misérables à leur quête
sables immaculés du désert. désespérée, assez satisfait que cette question reste en suspens.
Dans mon pays, on se souvenait de Waiqar comme d’un grand
Un de mes compagnons de table m’informa qu’il y avait, héros, mais ici, dans ce lointain pays au-delà des mers, une
près du centre d’A rchaut, un grand édifice tout d’un bloc image différente du personnage était en train de se dessiner.
simplement appelé Citadelle, et, pendant un moment,
l’espoir dans mon cœur fut ravivé. À Al-Kalim, toute Je m’éloignai de la Citadelle sans avoir acquis la moindre
structure construite comme celle que m’avait décrite mon sagesse, et m’installai pour me reposer à côté d’un grand
compagnon, témoignage de pouvoir, était forcément un monument dont les fontaines semblaient taries depuis de
réceptacle de grande sagesse et de puissance. Là-bas, nombreuses années. Un peu plus loin, j’aperçus plusieurs
je trouverais sûrement quelqu’un capable de me raconter guerriers ; un passant m’expliqua qu’ils étaient des

56
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
Maréchaux – on entendait la majuscule dans sa voix. Qui
pouvaient bien être ces Maréchaux, ou qui ils servaient, je n’en
avais toutefois pas la moindre idée. Ils marchaient avec fierté
et détermination, ne montrant aucune crainte, contrairement
à leurs compatriotes, ce qui suffit à attiser ma curiosité.
Cependant, ils ne pouvaient aucunement m’a ider à ce moment-
là, je me détournai donc à contrecœur et repris mon chemin.
Je pensais trouver des écoles mystiques ici, un peu comme
celles de la Cour de la Sagesse dans mon pays natal. Les
académies magiques me semblaient les endroits les plus
propices pour obtenir des renseignements sur la mystérieuse
pierre qui régentait dorénavant ma vie. Et si je ne trouvais pas
ce genre d’institutions dans la capitale du plus grand royaume
de ce côté du monde, où pourrais-je donc bien les trouver ?
Ce soir-là, après avoir laissé Ibn dans une écurie de l’autre
côté de la rue pour une somme princière, j’entrai dans la salle
commune d’une auberge qui semblait accueillante. La baisse
de fréquentation ne semblait pas avoir influé sur les prix
pratiqués par les auberges, du moins à Archaut. Les odeurs
qui m’accueillirent n’étaient pas aussi raffinées que celles qui
avaient accompagné mon repas précédent, et je sus tout de
suite que j’étais dans un endroit très différent.
Je remarquai à nouveau les regards prudents et effrayés des
convives. Pendant un certain temps, je restai simplement assis
dans un coin sombre, me contentant de siroter la mauvaise
bière locale tout en picorant sans conviction le ragoût fade et
pâteux, seul plat que l’établissement proposait pour le dîner.
Je me souvins avec nostalgie de mon déjeuner tout en regardant
la soupe épaisse de mon repas actuel se figer en refroidissant
dans le bol en bois devant moi, et prêtai une oreille inattentive
aux conversations alentour.
Une fois de plus, j’entendis parler des Terres des Brumes,
ainsi que d’un autre endroit à l’est, quelque chose comme
les Plaines des Ruines, peut-être. Ces deux régions semblent
porter une grande partie du blâme pour la peur qui a envahi
ce royaume, et j’espère que ma propre quête ne me conduira
ni trop loin au nord ni beaucoup plus à l’est que je ne le suis
déjà. Aujourd’hui, mes propres problèmes rendent déjà ma vie
assez compliquée ; je préfère assurément me tenir à l’écart de
tout ce qui peut terroriser un royaume entier.
57
Je me remis en mémoire toutes les paroles de ceux que j’avais
rencontrés depuis que j’avais quitté la Cour de la Sagesse il
y avait si longtemps, essayant de remonter le chemin qui
m’avait conduit vers une destination aussi vaine. Je me souvins
de Marcus Phindar, qui habitait autrefois Lorimor et vivait
maintenant dans les Torue Albes, évoquant cet endroit comme
la cité des plus beaux monuments, et moi l’associant naïvement
à la capitale du Califat. Dans mon empressement à poursuivre
ma quête, j’étais convaincu que cette cité serait le meilleur
point de départ pour mes recherches dans cet étrange pays.
Mais je n’y avais trouvé qu’une coquille froide et sèche ; la cité
n’avait rien d’autre à m’o ffrir que la même peur et le même
silence qui avaient marqué les nombreux jours de mon voyage en
ces lieux.
Finalement, n’ayant rien appris de plus, fatigué d’approfondir
mes compétences dans la langue commune de Terrinoth, je
montai les escaliers pour rejoindre mon lit glacé. Là, je rédigeai
cette entrée de la longue missive que je vous écris, mes enfants,
et me demandai, dans la sagesse du silence, quelle ligne de
conduite adopter ensuite. Archaut ne semble rien avoir à offrir,
et vu les prix pratiqués dans la capitale désertée, et sans
aucun moyen de négocier, la bourse du Calife sera vide bien
plus vite que je ne l’avais escompté si je choisis de rester.
Demain, je ferai une autre tentative pour trouver ces
insaisissables écoles de magie dont j’imagine qu’elles doivent tout
de même bien exister et dont j’a i entendu parler à Trelton, et
dans l’A nse de Karya ; ensuite, je devrai continuer mon périple.
De telles écoles, un peu comme le Collège des Arcanes du
Califat, existent forcément, cachées quelque part dans ce
labyrinthe froid de pierre et de statues. Quand les barons
se rendent dans ces palais vides et sans âme ou dans ces
monuments ridicules, ne reçoivent-ils pas les conseils des
esprits les plus avisés que Terrinoth puisse rassembler ? Et
quand les grands seigneurs ont regagné leurs petits royaumes
ridicules, où résident-ils, ces érudits et ces sages ?
Il doit y avoir quelque part une école, ou une académie, ou une
salle des guildes, où les sages passent leur temps en attendant
les convocations de leurs maîtres.
Reste juste à savoir où chercher…
 Chapitre II :
L'appel de l'aventure

M ennara compte de nombreuses villes et colonies, mais

celles-ci ne sont que de petits îlots de civilisation dans
un océan de mythes et de légendes. En vérité, c’est un monde
de mystères et de magie où résonne le chant des épées. Les
seuls royaumes de Terrinoth regorgent déjà d’incommensu-
rables trésors perdus, de châteaux en ruine et de donjons aban-
donnés. Dans tout Mennara, des monstres voraces menacent
des êtres sans défense et des individus sans foi ni loi cherchent
à détruire ou à s’emparer de tout ce qui se dresse sur leur che-
min. Les étendues sauvages sont envahies par la magie noire
et les créatures surnaturelles, les morts se relèvent pour com-
battre les vivants et des êtres démoniaques d’os et de sang se
répandent en d’horribles nuées aux confins de l’horizon.
Heureusement, il existe des héros qui osent relever le défi,
prêts à explorer la nature sauvage et à affronter le mal partout
où il se trouve, que ce soit pour la gloire ou la richesse. Parfois, il
n’est pas nécessaire de voyager bien loin : dans la moindre petite
ville peuvent se tramer de funestes intrigues ou des plans démo-
niaques – une langue de vipère ou un esprit retors peuvent par-
fois s’avérer tout aussi mortels qu’une épée ou une griffe. Quelles
que soient leurs vocations et leurs attentes, tous les aventuriers
vivront des aventures palpitantes et seront dûment récompensés
pour leurs exploits dans les terres
de Mennara !
D’innombrables
opportunités
vous attendent,
aventuriers : il
vous suffit d’en sai-
sir une et d’œuvrer
à mener votre quête à
bien. L’horizon infini de
Mennara vous appelle. Armez­-
vous de courage et plongez dans l’aventure !
Ce chapitre développe la partie consacrée à l’univers de
Runebound dans le livre de base Genesys et vous présente
tout ce dont les joueurs peuvent avoir besoin pour vivre des
aventures dans le monde magique et sauvage de Mennara. Les
joueurs pourront créer de nouveaux types de héros apparte-
nant aux espèces et clans de ce monde, comme les Orcs des
Scindeterres, les Nains de Forge et les Gnomes Vagabonds,
puis les équiper avec une multitude de nouvelles armes et
armures ainsi que toutes sortes d’objets pour les aider dans
leurs quêtes. Ce chapitre propose également de nouveaux
types de magie et d’objets magiques, dont plusieurs éclats
runiques légendaires pour ceux qui se montreront dignes de
posséder les trésors suprêmes de Mennara.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
CRÉER VOTRE HÉROS
C ette section présente la création de personnages et les options
d’évolution spécifiques à l’univers de Runebound pour
Genesys. La création de personnages dans Royaumes de Terrinoth
ESPÈCES DES PERSONNAGES
L es pages suivantes présentent les espèces disponibles lors de la
création d’un personnage joueur pour l’univers de Runebound.
Les joueurs choisiront parmi ces options à la place de celles présentées
dans le livre de base Genesys.
HUMAINS
L’Humanité, bien qu’éphémère et défavorisée à bien des égards par la
nature, s’est néanmoins avérée être l’une des espèces les plus résistantes
et les plus diversifiées de Mennara. L’Humain, cet être étrange, n’a pas
reçu les dons innés de la nature dont jouissent d’autres espèces, mais
compense par son envie d’apprendre, sa détermination et sa grande
adaptabilité. Les Humains ont survécu à de formidables cataclysmes ;
de nos jours, c’est en grande partie grâce à leur force de volonté et à
leurs armes que le monde reste en sécurité.
Apparence : Les Humains ayant colonisé presque toutes les terres de
Mennara au fil des siècles, ils présentent des apparences très diverses.
Leur carnation varie du brun ou du rouge sombre à l’or ou au rose
pâle. La plupart des habitants des Torue Albes et de Lorimor, tout
comme les Sayr-Savim, ont la peau sombre ou tannée, tandis que
ceux du centre et du nord de Terrinoth sont souvent plus pâles. Les
Humains sont généralement grands ; ils font en moyenne une tête de
plus que les Nains, bien qu’ils ne soient pas aussi grands que les Elfes.
Comme toujours chez les Humains, la diversité est la seule constante.
Société : L’Humanité aimant la diversité, les sociétés qu’elle a bâties
sont également très variées, et ce depuis que les premiers Humains
sont jadis apparus. Ces sociétés diffèrent considérablement d’un
continent à l’autre, voire entre comtés voisins à Terrinoth. Alors que
les habitants des baronnies sont liés par un code strict et complexe de
serments, de devoirs et d’obligations, leurs territoires possèdent des
frontières communes avec les Cités Libres, où l’on a généralement la
conviction qu’il vaut mieux être autonome et indépendant, et donc
une vision beaucoup plus souple de la tradition.
La nature même des terres qui les entourent semble transmettre son
caractère à chacune des civilisations humaines là où elles surgissent.
Il est presque impossible d’imaginer le mode de vie des baronnies, à
l’organisation très rigide, fonctionner longtemps sur les îles morcelées
et isolées des Torue Albes, ou celui de Lorimor, plein de loisirs et de
poésie, dans les Terres des Confins. Ainsi, l’Humanité a souvent sur-
vécu grâce à son besoin de maîtriser le monde tout en restant à son
service. Les Humains se sont taillé de petits morceaux de paradis dans
les roches gelées comme dans les sables brûlants des déserts, tout en
s’adaptant à chacun de ces territoires, et ils ne s’arrêteront probable-
ment pas avant d’avoir exploré et cartographié tout Mennara.
Structurellement, les sociétés humaines ont tendance à adopter
une forme hiérarchisée, avec un pouvoir fort détenu par quelques
individus, c’est-à-dire un gouvernement par le haut. La plupart des
territoires humains sont dirigés par une haute autorité stable, comme
60
suit le processus standard décrit dans le livre de base Genesys, en ajou-
tant la création de l’Aptitude Héroïque, qui est effectuée à l’Étape 4 :
Dépenser les points d’expérience.
l’Impératrice de Lorimor, le Calife d’Al-Kalim et les nombreux
conseils des Maîtres de Guilde des Cités Libres. Même dans les landes
orientales, les Touchés par le sang, dont la culture est généralement
anarchique, respectent et obéissent toujours à l’autorité de ceux qu’ils
jugent dignes de devenir leurs chefs.
Malgré leurs innombrables différences, les cultures humaines par-
tagent plus de similitudes qu’on ne l’imaginerait à première vue. On
peut entendre des dizaines de langues sur les marchés de Tamalir,
mais presque tout le monde peut au moins comprendre la langue
commune, idiome simple créé au temps des Anciens Rois. S’ils se
retrouvent isolés de leur groupe d’origine, les Humains ont tendance
à rechercher naturellement la compagnie de leurs congénères pour
former une nouvelle communauté, du fait de leur instinct grégaire.
Culture : Les esprits les plus savants de Terrinoth débattent de la
nature exacte de l’Humanité depuis des générations. Parfois, les
Humains ne sont que des brutes avides de pouvoir, assoiffées de gloire
et de richesse. À d’autres moments, ils savent faire preuve d’un esprit
plus noble que tout autre, comme s’ils étaient poussés par un profond
besoin de voir la bonté triompher dans le monde.
En réalité, des merveilleuses tours de Lorimor aux froides villes
d’Isheim, toutes les sociétés humaines sont, d’une manière ou d’une
autre, fondées sur une poignée de désirs simples. L’humanité, plus
que toute autre espèce vivant à Mennara, se définit par les défis
qu’elle doit affronter. Quand il fait froid, l’Humain essaye de créer
de la chaleur ; quand il fait chaud, il cherche un endroit frais pour
se reposer. Quand l’Humain a faim, il cherche à se nourrir ; quand
il est dominé, il aspire de toutes ses forces à la liberté. Les Humains
qui vivent à Terrinoth et sur les terres voisines sont les descendants
d’explorateurs, de conquérants, de guerriers et d’érudits ; jamais
l’étincelle qui les pousse à explorer, conquérir, construire et défendre
leurs valeurs ne s’éteindra. Et tout ceci constitue la force motrice
de chaque culture humaine, quels que soient sa localisation ou son
mode de gouvernement.
Pour les Humains des baronnies des Daqan, l’ordre et le devoir sont
considérés comme des valeurs primordiales. Leurs plus grands héros
sont des parangons de loyauté et de respect de la loi. Leurs voisins des
Cités Libres de Terrinoth ont tendance à être cosmopolites, aventu-
reux et désireux de savourer les plus grands plaisirs de la vie.
Ailleurs, à Lorimor, l’art et les actions pour le bien de la com-
munauté sont valorisés avant toute chose. De nombreux empereurs
de Lorimor figurent parmi les plus grands artistes et poètes de leur
temps. Dans le Califat d’Al-Kalim, la politique et la magie sont
considérées comme d’égale importance, et les Sayr-Savim prennent
grand soin de préserver les origines mystiques de leurs ancêtres.
Pour les habitants des régions sauvages de Terrinoth et, au-delà,
des territoires presque déserts d’Isheim, des Terres des Confins, des
îles solitaires et sauvages des Torue Albes ou des abords des Terres
Sombres des Steppes du Ru, la vertu ne se mesure souvent qu’à
l’aune du pouvoir et de la brutalité.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
ELFES
Même pour ceux qui travaillent ou commercent avec elle régulière-
ment, l’ancienne espèce des Elfes est la définition même du mystère.
Êtres à la fois communs et remarquables, du moins pour les Humains,
presque tout à leur sujet est un assemblage enivrant et surréaliste de
contradictions. Ils sont impérieux tout en restant gracieux, gais autant
qu’anciens et sages, distants mais compatissants et bienveillants.
Lorsque les habitants de Terrinoth évoquent les Elfes, ils pensent
d’emblée à ceux de la tribu des Latari, qui vivent dans la forêt de
l’Aymhelin depuis des temps immémoriaux. Pourtant, les tribus dis-
persées à travers Mennara ont développé des cultures distinctes : les
Elfes des Profondeurs vivent dans les Monts Dunwarr, la tribu des
Salish à Isheim, et celles des Nivali et des Férédel sur des terres encore
plus lointaines et légendaires. Enfin, ceux, nomades, qui sillonnent les
terres de Mennara répondent à l’appel de la justice, de l’aventure, et
partent à la recherche de connaissances perdues.
Apparence : En dépit de leur souplesse élégante et de leur beauté
souvent surnaturelle, au premier coup d’œil, on pourrait confondre
la plupart des Elfes avec des Humains : leur chevelure, leur peau et
leurs proportions ressemblent à s’y méprendre à celles des Humains.
Toutefois, quand on plonge plus loin dans les terres sauvages, où
les Elfes vivent au cœur de la nature depuis des millénaires, ces
similitudes ont tendance à s’estomper. En ces lieux primordiaux et
interdits, les Elfes possèdent des caractéristiques non humaines plus
nettes et plus distinctes, leurs couleurs se fondent avec la nature qui
les entoure. Leurs cheveux et leurs yeux peuvent être aussi blancs
qu’une étoile filante, aussi verts qu’une émeraude, aussi sombres que
du raisin mûr ou rouges comme une feuille d’érable qui tourbillonne
au vent.
62
Société : La société elfique a passé des millénaires à évoluer lentement
pour finir par se dissocier en deux groupes : la grande noblesse et
tous les autres, considérés comme des êtres de « basse naissance » en
comparaison. Les Elfes de haute naissance ne sont séparés que par une
ou deux générations de ceux du temps d’Émorial et de Latariana. Ils
occupent presque toutes les positions importantes du gouvernement,
des temples ou des structures militaires des tribus. Dans la cour de la
tribu des Latari, ils rivalisent pour gagner les faveurs du roi Aeoneth
et font grand étalage d’alliances tissées pour travailler au « bien com-
mun » de l’espèce elfique. Ces Elfes de haute naissance, qui n’ont
jamais quitté le confort de Lithelin, sont appelés « Eolam », ou sang-
bleu. En théorie, ils travaillent ensemble pour ramener les peuples
elfiques dans l’Empyréen et bannir les vestiges de l’Ynfernael de ce
monde. En réalité, ils conspirent contre leurs rivaux en sabotant secrè-
tement leurs plans et renforcent leur propre influence en étalant leur
prestige. À d’autres endroits, les Elfes de haute naissance font office de
chefs de tribu et d’arbitres de la culture elfique.
Les Elfes de basse naissance sont ceux qui ont vu le jour plusieurs
générations après les anciens. Les artisans, les chasseurs et les guerriers
ont tendance à être issus de cette caste inférieure. En raison de la durée
de vie incroyablement longue des Elfes, ceux de basse naissance ont
peu de chances de progresser ; seuls les moments de grand tumulte
engendrant de graves pertes ouvrent l’accès aux positions hiérarchiques
supérieures de la société elfique, et ce toujours avec une grande hési-
tation. La plupart des Elfes de basse naissance se consacrent donc le
plus souvent à devenir des maîtres dans les divers domaines dont leurs
tribus ont besoin pour survivre. Ceux de la tribu des Latari vivent
souvent dans les régions les plus sauvages de l’Aymhelin et profitent
d’une vie plus en phase avec les cycles naturels du monde, se faisant
appeler les « Verdelam », ou sang-vert. Ils habitent parmi les arbres,
voire à l’intérieur de ceux-ci ; ils chassent dans les bois et font un peu
de commerce pour se procurer les rares choses indispensables que la
forêt ne leur fournit pas. Parfois, les Elfes de basse naissance voyagent
dans le vaste monde à la recherche d’aventures, de gloire et de fortune.
Beaucoup d’entre eux s’installent dans des cités, humaines ou non, où
ils créent leur propre forme de société aux côtés des autochtones, tout à
fait indépendamment des structures sociétales des Latari.
Culture : La culture elfique varie considérablement entre les diffé-
rentes tribus ; pourtant, toutes conservent quelques traits communs.
La majorité des Elfes préfèrent une existence recluse et isolée. Sans être
xénophobes, ils ne peuvent se défaire d’un certain air de supériorité
lorsqu’ils interagissent avec des espèces plus jeunes. Les Elfes avaient
déjà réalisé de merveilleux progrès technologiques et formé des sociétés
complexes alors que le reste du monde était encore peuplé
de chasseurs-­cueilleurs, ils ont donc pris
l’habitude de ne compter que sur
leur propre espèce.
Quand les Elfes intera-
gissent avec d’autres espèces,
généralement au cours d’un
échange commercial ou d’une
aventure, la plupart sont compatissants
et gentils, mais leur bienveillance s’accompagne
d’une condescendance très marquée. Les Elfes ont passé
des millénaires à attendre que le reste du monde mûrisse et
atteigne leur niveau de sagesse, fait qu’ils n’hésitent pas à rappeler
de la manière la plus paternaliste qui soit. Discuter politique avec
eux consiste à subir des plaisanteries sans fin sur la supériorité de la
cour des Elfes, demander leur aide les incite à faire un sermon sur
l’état de développement qu’un être devrait chercher à atteindre, et
laisser transparaître des émotions triviales provoque des « tss, tss »
accompagnés de regards profondément déçus.
 RUNEBOUND
Tales of Darkness
LA FINESSE DE L'ARTISANAT DES NAINS
L ’artisanat des Nains est un mariage exceptionnel
de métallurgie et de travail de la pierre qui s’ap-
puie sur des traditions ancestrales ; il est né d’un peuple
visiblement fait pour créer des objets d’une beauté et
d’une efficacité extraordinaires. Les Nains ont un corps
naturellement adapté à l’artisanat : ils sont dotés de
muscles suffisamment puissants pour manier le marteau
avec un contrôle parfait et possèdent une dextérité qui
leur permet de travailler les motifs les plus complexes.
Certaines civilisations expriment leurs émotions les plus
profondes dans la poésie ou la peinture ; les Nains, eux,
transmettent leurs sentiments aux objets qu’ils forgent
et sont capables de lire ceux de son créateur dans la
lame, le marteau ou le talisman d’un guerrier.
Les œuvres de centaines de générations de Nains ornent
la plupart de leurs villes ; qualifier ces lieux de trésors
serait encore trop réducteur. Le soin qu’ils apportent
à leur travail dépasse la simple envie d’être fiers d’un
travail bien fait. Un Nain considère que chaque pièce
qu’il crée appartient à la chaîne, ininterrompue depuis
des centaines des générations, de l’art et des souvenirs
de son peuple entier.
L’artisanat fait partie intégrante du mode de vie des
Nains, mais certaines histoires évoquent par ailleurs un
savoir-faire transcendant, la création d’un chef-d’œuvre
nain. Un tel chef-d’œuvre n’apparaît qu’une fois par
génération. Il commence comme une vision profondé-
ment enfouie dans l’esprit d’un artisan : l’image d’une
arme, d’un artefact ou d’une armure capable de surpas-
ser les limites de sa forme physique.
Ces histoires racontent également avec amertume et frustration
comment les Dragons ont chassé les Nains de leur foyer dans la
Lande Vitrifiée, puis les ont poursuivis dans les grottes sous les Monts
Dunwarr. Enfin, les récits dépeignent avec une précision effrayante la
façon dont les Dragons ont essayé d’éradiquer les Nains de Mennara.
Les Nains du Dunwarr considèrent que ces histoires prouvent leur
droit de naissance. Ils croient que la société naine fait partie des plus
nobles au monde, et qu’ils méritent le respect et la déférence qu’on
leur marquait jadis. Leur objectif ultime est de reconquérir la Lande
Vitrifiée et de forcer les Dragons qui occupent leurs terres à accepter
définitivement que les Nains s’y réinstallent.
• Compétences initiales : Les Nains du Dunwarr commencent
avec un rang en Résistance. Vous ne pouvez pas dépasser le
rang 2 lors de la création du personnage.
• Vision dans l’obscurité : Lorsqu’ils effectuent des tests de com-
pétences, les Nains du Dunwarr retirent jusqu’à 󲊸 󲊸 imposés
par l’obscurité.
• Dur à cuire : Une fois par session, un Nain peut dépenser un
Point Narratif, au prix d’une broutille hors tour, immédiatement
après avoir subi une blessure critique et déterminé son résultat.
S’il le fait, le résultat obtenu devient automatiquement 01.
Un Nain peut passer des décennies dans sa forge à fabriquer
de beaux bijoux, des canons, des armures, des ornements
ou tout autre objet dont ses clients peuvent avoir besoin,
jusqu’au jour où l’envie de créer une œuvre particulière
devient trop forte et le pousse à s’isoler pour la réaliser.
Plus d’un Nain est parti en quête d’un matériau singu-
lier, indispensable pour concrétiser sa vision. Certains n’en
reviennent jamais, mais ceux qui réussissent deviennent les
champions de leur espèce.
Telle est l’histoire d’Espardoré, le forgeron paria qui for-
gea le Marteau Miroir. Frappé par une vision de cette
arme à l’utilisation si particulière, il passa dix longues
années à voyager sur les cimes d’une chaîne de mon-
tagnes où un orage perpétuel, dont on prétend qu’il fut
créé par un éclat runique flottant, se déchaînait sur les
pics dentelés. Espardoré plaça des lingots de métal là où
la foudre était susceptible de les frapper et de les impré-
gner de son énergie. Il grava ensuite des runes sur chaque
lingot où un éclair avait apposé sa marque. Il plaça fina-
lement le métal, chargé de l’énergie d’un millier d’éclairs,
dans le feu de sa forge.
Ainsi naquit le Marteau Miroir. Comme son nom le
laisse supposer, quand il était utilisé, le Marteau Miroir
pouvait refléter n’importe quelle magie et repousser tous
les coups. Il était également doté d’un autre pouvoir,
témoin de la véritable nature de l’artefact. Quand le
Marteau Miroir frappait la surface d’un lac, l’eau gelait
pour former une surface argentée, et quiconque s’y
mirait contemplait des visions d’un lointain passé et le
reflet des âges.
NAIN DE FORGE
Tous les Nains n’ont pas le sentiment que leur destin appartient à la
montagne et à ses souterrains. Comme leurs ancêtres, certains sou-
haitent vivre sous l’immensité du ciel, aspiration à laquelle ils peuvent
facilement répondre à Terrinoth. Les Nains de Forge ont élu domicile
dans les Cités Libres et dans les colonies des baronnies à travers la
Terre d’Acier, mettant à profit leur savoir-faire distinctif pour s'y tailler
une place. Ils côtoient et traitent avec d’autres espèces, heureux de
vivre loin des ombres et des flammes de la Lande Vitrifiée.
• Compétences initiales : Les Nains de Forge commencent avec
un rang en Négociation. Vous ne pouvez pas dépasser le rang 2
lors de la création du personnage.
• Têtu : Les Nains de Forge ajoutent 󲊸 aux tests de compétence
sociale qui les visent.
• Dur à cuire : Une fois par session, un Nain peut dépenser un
Point Narratif, au prix d’une broutille hors tour, immédiatement
après avoir subi une blessure critique et déterminé son résultat.
S’il le fait, le résultat obtenu devient automatiquement 01.
65
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
ORCS
Il est facile pour les autres espèces de considérer les arcades sourcilières
proéminentes, les mâchoires carrées et les défenses saillantes des Orcs
comme les signes d’une espèce sauvage et primitive ; rien n’est plus
éloigné de la vérité. Les Orcs sont aussi intelligents et complexes que
les êtres des autres espèces, et assez futés pour profiter de tous ceux qui
osent les sous-estimer.
Apparence : Presque tous les Orcs ont les cheveux noirs, mais leur car-
nation s’est modifiée comme une sorte de camouflage évolutif, s’adap-
tant au fil des générations aux terrains où vivent les différentes tribus.
La peau de ceux qui vivent dans les bois tire sur le vert ou le brun,
tandis que celle des Orcs des plaines est plutôt dans les tons bruns ou
gris clair ; la carnation des habitants des régions montagneuses est
généralement gris pierre ou brun foncé.
Société : Comme celles des Humains, les sociétés orques adoptent
des structures très diverses à travers Mennara ; il arrive également
que dans une même région, elles diffèrent drastiquement malgré leur
proximité. Les Orcs des Plaines Brisées se vantent de leur mode de
vie nomade et proche de la nature, suivant le cycle des saisons alors
qu’ils battent la campagne. Les Orcs des Pierres, eux, ont abandonné
leur mode de vie ancestral, jugé « primitif », et vivent heureux aux
côtés d’autres espèces dans les cités du monde entier. Les Orcs des
Scindeterres constituent une exception : ils vivent dans des villages
cachés disséminés à travers les sables brûlants du désert. Ils sont si
peu nombreux, cependant, que même les autres Orcs les rejettent et
les considèrent comme des aberrations.
66
Culture : Les Orcs des Plaines Brisées considèrent souvent que la
plupart des civilisations ne sont qu’excès et déchéance, ils croient
fermement que les êtres doivent rester proches de la nature pour
être à la fois heureux et complets. Selon eux, il suffit de mettre un
pied dans une cité pour constater à quel point la vie dans les tours
de pierre et les rues sales a corrompu l’âme et affaibli l’esprit de tous
ceux qui vivent à l’intérieur de ces murs. Au lieu de succomber à la
tentation de l’immobilisme, les Orcs des Plaines Brisées migrent au
fil des saisons, commercent avec les petits villages qu’ils rencontrent
et mènent une vie qui, selon eux, convient mieux à leur force et à
leur résistance innées.
Les Orcs des Pierres ont abandonné la philosophie tribale, qu’ils
considèrent comme une « superstition primitive », et profitent de tout
le confort et des avantages qu’offre la vie urbaine. Autrefois, ces deux
factions s’observaient avec suspicion et dérision, mais les siècles pas-
sant, il est devenu de plus en plus courant pour les Orcs de migrer
d’une société à l’autre, toujours dans l’espoir qu’un autre lieu et un
autre style de vie leur apportent ce qui leur manque.
Les Orcs des Scindeterres restent beaucoup plus isolés que leurs
parents de l’autre côté de la mer. Ils s’aventurent parfois hors de leur
foyer ensoleillé, mais interagissent rarement avec les autres Orcs qu’ils
rencontrent. Leur culture est axée sur l’apprentissage et l’expérimen-
tation plutôt que sur le combat, bien qu’évidemment, même le plus
faible de leurs érudits puisse rivaliser avec n’importe quel Humain.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

CARRIÈRES
U n joueur qui crée un personnage pour l’univers de Runebound
doit sélectionner une carrière pour ce dernier. Les carrières
décrites ci-après remplacent celles du livre de base Genesys. Le joueur
ÉCLAIREUR
devra déterminer les compétences de carrière du personnage et attri- Les Éclaireurs sont des exclus et des vagabonds, souvent plus à l’aise
buer des rangs à quatre de ces compétences ; chaque carrière com- dans la nature inhospitalière que dans les rues sinueuses des cités. Ils
prend une liste de matériel initial. Si le maître de jeu le permet, le sont d’excellents chasseurs et pisteurs ; de nombreux gouvernements
joueur peut attribuer à son personnage ce matériel initial au lieu de les engagent comme fer de lance dans leurs armées. Les Chevaucheurs
suivre la démarche expliquée dans la section Matériel initial page 51 de Leonx des Latari et les Rôdeurs des seigneurs Daqan, par exemple,
du livre de base Genesys. Notez que tous les éléments répertoriés sont font partie de l’avant-garde des légions qui s’enfoncent profondément
façonnés en acier ou en bois de chêne s’il y a lieu. en territoire ennemi. En revanche, les inquisiteurs et les chasseurs de
primes aiment la vie solitaire d’Éclaireur et préfèrent voyager seuls ou
en petits groupes pour accomplir leurs missions, loin du regard des
DISCIPLE seigneurs. Peu importe leur fonction, les Éclaireurs sont aussi efficaces
pour traquer des proies humaines que pour chasser des animaux.
Les Disciples sont des mystiques qui consacrent leur vie à aider les Les Éclaireurs partent spontanément à l’aventure ; leur aisance
autres. Ils obtiennent leur pouvoir en faisant appel aux mystérieuses dans la nature et leurs compétences dans le maniement des lames et
faveurs des dieux ou par leur propre détermination. Certains cana- des arcs leur permettent de venir à bout de tout ce que Terrinoth ou
lisent les flammes bénies de Kellos, d’autres parcourent l’énigmatique les contrées au-delà peuvent mettre en travers de leur route. Toutes
Chemin des Étoiles des Elfes Latari, d’autres encore observent les tra- les espèces comptent des Éclaireurs dans leurs rangs ; les Rôdeurs
ditions druidiques de Kurnos ou croient en l’une des innombrables du Densebois des Latari se déplacent comme des ombres parmi les
autres divinités qui veillent sur le monde. Ils ont tous en commun arbres, les Éclaireurs des Gnomes Onoit sont capables de traverser
un talent pour aider les autres, que ce soit en les guérissant sur le plan les étendues gelées d’Isheim plus vite qu’un cavalier sur sa monture,
physique ou spirituel, en les guidant grâce à la parole divine ou en les et ceux de la Garde-Brumes protègent les habitats humains contre
protégeant grâce à des armes bénies par les dieux. Le plus souvent, les les morts-vivants qui rôdent. Les Éclaireurs sont des guerriers de la
Disciples sont formés dans des lieux isolés, comme des monastères ou nature, l’immensité du monde est leur champ de bataille.
de grands temples ; ils vivent selon des principes stricts et ont souvent
Les compétences de carrière de l’Éclaireur sont : Connaissance
prêté serment à leur divinité.
(Aventures), Connaissance (Géographie), Discrétion, Distance,
Les Disciples aventureux partent, forts des connaissances qu’ils ont Équitation, Perception, Survie et Vigilance. Avant de dépenser ses
acquises parmi les autres croyants dans leurs lieux de retraite, pour points d’expérience initiaux, le joueur peut choisir quatre de ces com-
répandre la parole de leur dieu sur les territoires qu’ils visitent. Parfois, pétences et gagner un rang dans chacune d’entre elles.
ils sont chargés de recueillir de l’or, d’autres fois de couvrir leur
temple de gloire ou de convertir les mécréants. Ils doivent parfois
accomplir des quêtes personnelles pour atteindre l’illumination ou
mener une guerre pour le salut qui ne prendra fin que lorsqu’un
grand mal aura été annihilé ou une ancienne prophétie accomplie.
Les compétences de carrière du Disciple sont : Athlétisme,
Charme, Commandement, Connaissance (Savoir), Corps à corps
(armes légères), Divin, Résistance et Sang-froid. Avant de dépenser
ses points d’expérience initiaux (XP), le joueur peut choisir quatre
de ces compétences et gagner un rang dans chacune d’entre elles.
Matériel initial : Les joueurs qui créent un personnage
de Disciple peuvent choisir de commencer avec le matériel
suivant au lieu de dépenser de l’argent lors de l’Étape 7 de la
création du personnage :
• Une masse
• Une icône sacrée ou un bouclier et une armure de cuir
• Une lanterne et 2 bouquets d’herbes médicinales ou du maté-
riel de voyage composé d’un sac à dos, une couche de voyage,
une corde, un silex et un briquet, 3 torches et une outre en
peau
• 1d100 pièces d’argent

70
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
Matériel initial : Les joueurs qui créent un personnage d’Éclaireur
peuvent choisir de commencer avec le matériel suivant au lieu de
dépenser de l’argent lors de l’Étape 7 de la création du personnage :
• Un arc ou une lance légère
• Une dague ou 2 élixirs de soin
• Une armure de cuir
• Des herbes médicinales et du matériel d’escalade ou des vête-
ments d’hiver
• Du matériel de voyage composé d’un sac à dos, une couche
de voyage, une corde, un silex et un briquet, 3 torches et une
outre en peau
• 1d100 pièces d’argent
ÉMISSAIRE
Les Émissaires sont des maîtres de la négociation, du charme et de l’in-
trigue. Ces héros charismatiques sont souvent les porte-parole de leur
groupe : ils négocient des accords, parviennent à convaincre les autres
d’offrir leur aide, de révéler leurs secrets, ou donnent de la crédibilité
aux mensonges d’un héros. Là où les lames et les sorts échouent, les
Émissaires réussissent, se battant aussi habilement avec des mots que
leurs compagnons avec des épées. Qu’ils appartiennent à la noblesse
de Terrinoth, qu’ils soient ambassadeurs, intendants ou chambellans
dans l’un des nombreux donjons ou domaines disséminés à travers le
pays, leurs relations et leur intuition sont d’une infinie utilité pour un
groupe d’aventuriers. Certains Émissaires sont également Maîtres de
Guilde à Tamalir, bardes au Cirque itinérant des Curiosités ou Enfants
de la Harpe, voire ambassadeurs des Elfes Latari ou des tribus orques.
Les Émissaires partent à l’aventure pour diverses raisons, que ce
soit pour échapper au climat oppressant de la vie de cour, disparaître
après un acte impardonnable, conclure de nouveaux accords et trouver
de nouvelles richesses pour leur guilde ou leur seigneur, ou tout sim-
plement offrir leurs chansons tout en découvrant davantage le vaste
monde. Dans la plupart des cas, ils cherchent de bons combattants
pour les accompagner dans leurs voyages, et troquent leur esprit et
leur charme contre du bon acier quand cela est nécessaire.
Les compétences de carrière de l’Émissaire sont : Calme, Charme,
Commandement, Connaissance (Géographie), Corps à corps
(armes légères), Négociation, Tromperie et Vigilance. Avant de
dépenser ses points d’expérience initiaux, le joueur peut choisir quatre
de ces compétences et gagner un rang dans chacune d’entre elles.
Matériel initial : Les joueurs qui créent un personnage d’Émissaire
peuvent choisir de commencer avec le matériel suivant au lieu de
dépenser de l’argent lors de l’Étape 7 de la création du personnage :
• Une dague
• Une épée ou un instrument de musique
• Une belle cape ou du matériel de voyage composé d’un sac à
dos, une couche de voyage, une corde, un silex et un briquet,
3 torches et une outre en peau
• Un gambison
• 200 + 1d100 pièces d’argent
ÉRUDIT
Alors que les Mages, les Disciples et les Primalistes font appel aux éner-
gies arcaniques, divines ou primales pour alimenter leurs pouvoirs,
les Érudits sont maîtres des secrets du monde naturel et des cultures
qui le composent. Ils croient fermement à l’axiome : « Le vrai pouvoir
est la connaissance. » Les civilisations du monde, passées et présentes,
ont amassé des millénaires de savoirs, dont une grande partie est
enfouie juste sous le nez des différentes espèces. Partout où ils vont, les
Érudits découvrent ces histoires cachées. Que ce soient les anciennes
marques laissées par l’Essaim de Locustes sur les bornes de pierre de
l’Île d’Hernfar, les statues des Djinns qui se dressent au milieu des
sables d’Al-Kalim ou les écailles abîmées des Wyrms des Profondeurs
qui étincellent sur les navires de commerce des Torue Albes, un Érudit
connaît leur signification. Il existe autant d’Érudits que de secrets dans
le monde ; la plupart ont leur propre spécialisation. Les alchimistes
gnomes viennent de loges isolées qui produisent des élixirs de soin et
des bombes acides, les artisans nains forgent des armes et des armures
d’une puissance incommensurable, et les Érudits des Runes dévoilent
les anciens secrets des inscriptions gravées sur les éclats runiques.
Les Érudits partent à l’aventure pour étendre leurs connais-
sances, déjà vastes et riches. Certains, comme les Parleurs de
Tempête Weik, parcourent le monde pour rassembler des histoires
comme on collecte de l’or pour le rapporter à son seigneur, tandis
que d’autres, comme les Maîtres du Savoir des Elfes Latari, âgés de
centaines d’années, deviennent les archives vivantes de la longue
histoire de leur peuple.
Les compétences de carrière de l’Érudit sont : Alchimie,
Connaissance (Géographie), Connaissance (Interdit), Connaissance
(Savoir), Mécanique, Médecine, Perception et Runes. Avant de
dépenser ses points d’expérience initiaux, le joueur peut choisir quatre
de ces compétences et gagner un rang dans chacune d’entre elles.
Matériel initial : Les joueurs qui créent un personnage d’Érudit
peuvent choisir de commencer avec le matériel suivant au lieu de
dépenser de l’argent lors de l’Étape 7 de la création du personnage :
• Une dague
• Une sacoche d’alchimiste ou une épée
• Une lanterne ou des herbes médicinales
• Une belle cape ou du matériel de voyage composé d’un sac à
dos, une couche de voyage, une corde, un silex et un briquet,
3 torches et une outre en peau
• 1d100 pièces d’argent
GUERRIER
Les Guerriers consacrent leur vie à maîtriser le maniement des épées,
des haches et autres armes de guerre. Qu’ils comptent sur la force
brute pour écraser leurs ennemis, sur une armure lourde pour encais-
ser les coups avant de les rendre ou sur leur vitesse et leur compé-
tence pour éviter les attaques – et riposter d’un coup mortel –, tous les
Guerriers excellent dans l’art du combat.
Les Guerriers peuvent être originaires de n’importe quelle culture et
de n’importe quel peuple. Les baronnies des Daqan forment certains
des meilleurs chevaliers au monde, la pointe de leur lance scintillant
au soleil lorsqu’ils poursuivent une quête au nom de leur seigneur. Les
Maréchaux de la Citadelle font régner la justice selon le Droit commun
et les Berserkers Weik combattent avec une sauvagerie débridée sur le
champ de bataille. Les Guerriers qui partent à l’aventure peuvent avoir
quitté leur foyer pour se conformer à un arrêté royal, pour faire leurs
preuves selon une tradition tribale, ou simplement parce qu’il n’y a pas
meilleur endroit où apprendre à maîtriser une lame que la nature sau-
vage de Terrinoth ou les vastes terres au-delà de ses frontières.
Si un Guerrier s’y entend en stratégie guerrière, il peut obtenir un
poste de commandement, diriger une garnison dans les Terres des
Confins, recevoir le titre de champion et conduire un contingent de
soldats de la marine de Lorimor, ou simplement trouver fortune et
gloire comme combattant solitaire qui erre dans les landes.
71
 Les compétences de carrière du Guerrier sont : Coercition,
Commandement, Corps à corps (armes légères), Corps à corps
(armes lourdes), Équitation, Pugilat, Résistance, et Vigilance. Avant
de dépenser ses points d’expérience initiaux, le joueur peut choisir
quatre de ces compétences et gagner un rang dans chacune d’entre elles.
Matériel initial : Les joueurs qui créent un personnage de Guerrier
peuvent choisir de commencer avec le matériel suivant au lieu de
dépenser de l’argent lors de l’Étape 7 de la création du personnage :
• Une épée et un bouclier ou une hache et un bouclier ou une
hallebarde
• Une armure de cuir
• 2 élixirs de soin
• Du matériel de voyage composé d’un sac à dos, une couche
de voyage, une corde, un silex et un briquet, 3 torches et une
outre en peau
• 1d100 pièces d’argent
MAGE
Mennara est un monde façonné par la magie. Les sorciers-nés peuvent
puiser dans les énergies arcaniques du Verto Magica, alors que d’autres
se retrouvent par hasard à pratiquer la magie après avoir découvert un
artefact puissant ou une relique perdue. Chaque contrée possède ses
propres traditions magiques, de la magie de cour pratiquée à Terrinoth
aux collèges de sorcellerie d’Al-Kalim. Malgré leurs différences de
culture et de formation, tous les lanceurs de sorts sont doués d’une
compréhension des mystères qui va au-delà des connaissances des
autres mortels et leur permet de défaire leurs ennemis ou de manipu-
ler le monde qui les entoure par des moyens magiques.
72
MAÎTRE DES RUNES
L
es joueurs peuvent sélectionner la carrière de Maître
des Runes comme variante de celle de Mage. Un
Maître des Runes y ressemble à bien des égards, mais il se
concentre uniquement sur la magie des runes. Il est doté
de la compétence Runes au lieu d’Arcanes comme com-
pétence de carrière, et plutôt qu’un bâton ou une baguette
magique, il reçoit une Rune mineure (voir page 121) dans
son matériel initial.
Les raisons qui poussent les Mages à partir à l’aventure sont aussi
variées que les disciplines qu’ils pratiquent. Les Maîtres des Runes de
Havregris partent à la recherche d’éclats de l’Orbe du Ciel, tandis que
les Sorcières des Tempêtes elfiques désirent retrouver d’anciens artefacts
pour défendre leurs forêts, et les Mages de Bataille, formés eux aussi à
Havregris, apportent leur soutien aux armées de la Citadelle. Ceux qui
se sont laissé séduire par les pouvoirs obscurs, y compris les immondes
envoûteurs, les nécromanciens et les sorciers soupçonnés d’échanger
leurs secrets à l’abri des murs de Nerekhall, parcourent discrètement
les terres pour servir leurs égoïstes desseins ou ceux de leur maître. Les
magiciens ont non seulement la capacité d’incinérer des monstres à
coups de boules de feu, mais sont aussi d’éternels étudiants avides de
connaissances ; la plupart des Mages sont des érudits qui ont, grâce à
leurs lectures, une connaissance profonde des secrets du monde.
Les compétences de carrière du Mage sont : Alchimie, Arcanes,
Calme, Connaissance (Aventures), Connaissance (Interdit),
Connaissance (Savoir), Perception et Sang-froid. Avant de
dépenser ses points d’expérience initiaux, le joueur peut choisir
quatre de ces compétences et gagner un rang dans chacune
d’entre elles.
Matériel initial : Les joueurs qui créent un person-
nage de Mage peuvent choisir de commencer avec le
matériel suivant au lieu de dépenser de l’argent lors
de l’Étape 7 de la création du personnage :
• Un bâton magique ou une
baguette magique
• Une dague ou une fronde
• Une robe épaisse ou
1 élixir d’énergie
• 1d100 pièces d’argent
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

PRIMALISTE
capable de se faufiler dans l’ombre en un clin d’œil. Les groupes
d’aventuriers sont toujours prêts à accueillir un Scélérat dans leurs
rangs, car de nombreuses situations requièrent leurs talents uniques.
Dieux féroces et forces de la nature relèvent du domaine des Primalistes. Si le groupe a besoin de quelqu’un pour se déplacer avec agilité dans
Ces lanceurs de sorts sont choisis par leur peuple pour être le vaisseau un donjon piégé, échapper à un ennemi vigilant ou trouver un allié
d’un dieu ou d’une puissante force naturelle ; ils canalisent la puissance dans les recoins les plus obscurs d’une cité, seul un Scélérat connaîtra
de la tempête à travers leur âme. Certains viennent de terres lointaines la bonne astuce.
et sont considérés comme de véritables dieux vivants, à l’instar des lan-
ceurs de sorts des Singhara de Zanaga qui adorent Hamzah, le Seigneur Les compétences de carrière du Scélérat sont : Calme, Charme,
de la Troupe. D’autres, comme les anciens Onoit d’Isheim, les Tisseurs Coordination, Discrétion, Distance, Magouilles, Système D et
de Sylves des Elfes et les shamans orcs des Plaines Brisées, ne font qu’un Tromperie. Avant de dépenser ses points d’expérience initiaux, le
avec le monde qui les entoure. Faisant appel aux grandes forces natu- joueur peut choisir quatre de ces compétences et gagner un rang dans
relles du monde, les Primalistes peuvent manipuler le temps, fortifier chacune d’entre elles.
leurs alliés ou invoquer des esprits bienveillants pour les protéger. Matériel initial : Les joueurs qui créent un personnage de Scélérat
Un Primaliste répond à l’appel de l’aventure pour accomplir la peuvent choisir de commencer avec le matériel suivant au lieu de
volonté de la grande puissance qui emplit sa chair et ses os. Il parcourt dépenser de l’argent lors de l’Étape 7 de la création du personnage :
le monde aussi inévitablement qu’un vent de tempête souffle et tour- • Une dague ou un ceste
billonne ; il recherche des lieux et des objets sacrés pour son ou ses
• Une épée et une dague ou un arc
dieux et suit le chemin que lui chuchotent les esprits de la terre. L’aide
d’un Primaliste peut se révéler inestimable, car peu d’êtres peuvent • Une belle cape ou des outils de voleur
commander aux forces de la nature comme ils le font. • Du matériel de voyage composé d’un sac à dos, une couche
Les compétences de carrière du Primaliste sont : Alchimie, de voyage, une corde, un silex et un briquet, 3 torches et une
Connaissance (Savoir), Corps à corps (armes lourdes), Médecine, outre en peau
Origines, Pugilat, Sang-froid et Survie. Avant de dépenser ses points • 1d100 pièces d’argent
d’expérience initiaux, le joueur peut choisir quatre de ces compétences
et gagner un rang dans chacune d’entre elles.
Matériel initial : Les joueurs qui créent un personnage de
Primaliste peuvent choisir de commencer avec le matériel suivant
au lieu de dépenser de l’argent lors de l’Étape 7 de la création
du personnage :
• Un bâton ou une hache à deux mains et une armure de
cuir
• Une trousse d’apothicaire ou du matériel de voyage com-
posé d’un sac à dos, une couche de voyage, une corde,
un silex et un briquet, 3 torches et une outre en peau
• 1d100 pièces d’argent

SCÉLÉRAT
Une fine lame et un esprit vif valent souvent mieux qu’une
fine lame toute seule. Des quartiers marchands de Tamalir
aux rues sinueuses de Havrefin, et dans les mille autres
lieux qui les séparent, les malfrats et les exclus vivent grâce
à leur ruse. Ces Scélérats se présentent sous de multiples
apparences : vils pirates de la Côte autonome, mystérieux
assassins venus des temples de combat d’Al-Kalim, rusés
bandits parcourant la nature sauvage des Terres des Confins,
joueurs invétérés, escrocs chevronnés ou simplement tire-
laine des Cités Libres qui essayent de joindre les deux bouts.
On peut aussi trouver des commerçants parmi les Scélérats,
qu’il s’agisse du fourbe Nain du Dunwarr qui tient une bou-
tique et sait comment obtenir le meilleur prix pour ses marchan-
dises ou de la maîtresse horlogère de Lorimor, aussi experte en
fabrication de pièges qu’en pièces d’horlogerie.
En tant qu’aventuriers, les Scélérats survivent grâce à leurs com-
pétences et leur esprit plutôt qu’à l’utilisation de leurs muscles ou de
leurs talents magiques. Adeptes de la finesse et de l’effet de surprise, ils
privilégient les armes légères à celles qui nécessitent la force brute. Un
Scélérat talentueux peut tirer à l’arc ou se battre au couteau, mais il est
tout aussi susceptible d’être doué pour éviter complètement le conflit,

73
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
APTITUDES HÉROÏQUES
L es personnages joueurs sont des héros, dotés de capacités uniques
qui les distinguent des habitants ordinaires de Mennara. Lorsque
vous créez votre personnage Genesys pour l’univers de Runebound,
vous choisissez également une Aptitude Héroïque pour votre person-
nage lors de l’Étape 4 de sa création (voir page 44 du livre de base
Genesys). Chaque personnage joueur ne dispose que d’une Aptitude
Héroïque, qui fait de lui un héros. Quand votre personnagegagne
de l’expérience, il reçoit des points d’Aptitude, que vous dépensez
pour des améliorations qui permettent de personnaliser davantage
l’Aptitude Héroïque de votre personnage.
UTILISER UNE
APTITUDE HÉROÏQUE
Les Aptitudes Héroïques sont très puissantes, leur usage est donc
limité par plusieurs restrictions. Cependant, comme vous le verrez à
la page 79, l’une des façons de personnaliser votre Aptitude Héroïque
consiste à dépenser des points d’Aptitude pour réduire ces restrictions.
Par défaut, l’activation d’une Aptitude Héroïque vous demande de
dépenser 2 Points Narratifs. Ses effets durent jusqu’à la fin du pro-
chain tour de votre personnage, et vous ne pouvez activer l’Aptitude
qu’une fois par session. Sauf indication contraire dans la descrip-
tion d’un effet spécifique, l’activation d’une Aptitude Héroïque est
une broutille.
CRÉER UNE APTITUDE
HÉROÏQUE
Pour créer votre Aptitude Héroïque, vous devez suivre une série
d’étapes simples qui vous permettront d’obtenir une Aptitude
Héroïque adaptée à votre personnage.
1. Choisissez l’effet d’Aptitude principal : L’effet principal
constitue le cœur de votre Aptitude Héroïque. Il définit ce que
l’Aptitude fait lorsque vous l’activez. Même au niveau de base,
ces effets sont puissants.
2. Déterminez l’origine de votre Aptitude : Comment votre per-
sonnage a-t-il acquis ces extraordinaires facultés ? Vous pouvez
créer une anecdote à ce sujet ou déterminer ces circonstances au
hasard en les tirant aux dés.
3. Nommez votre aptitude : Chaque Aptitude Héroïque a besoin
d’un nom unique et évocateur !
CHOISIR UN EFFET
D'APTITUDE PRINCIPAL
Un effet d’Aptitude principal constitue le cœur d’une Aptitude
Héroïque. L’effet vous indique l’avantage que tire votre personnage
de l’activation de son Aptitude. Une Aptitude Héroïque n’a qu’un
seul effet principal, alors choisissez-le avec soin ! Votre personnage
bénéficie des avantages de l’Aptitude de base, à moins que vous ne
dépensiez des points d’Aptitude pour disposer de la version améliorée
ou ultime. Sauf indication contraire, les avantages de chaque niveau
de l’effet sont cumulatifs, donc si vous dépensez des points d’Aptitude
pour obtenir l’effet amélioré, votre personnage bénéficie toujours de
tous les avantages de l’effet de base.
74
Lorsque vous décidez d’un effet d’Aptitude principal, réfléchissez
au concept de votre personnage et à ce que vous en savez déjà. Son
Aptitude Héroïque est au cœur de son identité, elle motive ses aven-
tures et aide à le définir.
ARME DE PRÉDILECTION
Certains héros (et leur réputation) sont indissociables de leur arme
de prédilection. Ces armes sont souvent aussi célèbres que les héros
qui les manient. Celle de votre personnage peut être enchantée, voire
intelligente, ou bien elle peut être simplement si bien conçue que
votre personnage la manie sans effort. L’étendue des capacités d’une
arme si singulière, en particulier si elle est de provenance magique ou
inconnue, ne devient parfois évidente que dans le feu de l’action, dans
les moments vraiment difficiles qui demandent un véritable héroïsme.
Base : Votre personnage possède une arme de prédilection, choisie
dans le Tableau 2-1 : Armes de prédilection, fruit de l’artisanat des
Nains ou des Elfes, ou encore de l’artisanat de l’acier (voir page 97).
Le MJ et vous devez déterminer ensemble quelle forme prend cette
arme et comment elle est arrivée en votre possession. Son apparence
n’affecte pas son profil mais peut dicter les améliorations dispo-
nibles. (Par exemple, si vous décrivez votre arme de prédilection
comme une hallebarde, vous ne pouvez pas ajouter l’amélioration
Tête lestée.) En outre, choisissez une amélioration que l’arme ne pos-
sède pas déjà. Quand vous activez cette Aptitude, votre arme de pré-
dilection gagne les effets de cette amélioration tant que l’Aptitude
est active (cela n’a pas de coût et ne nécessite aucun emplacement).
D’autres améliorations peuvent être ajoutées à l’arme de prédilection
de la manière habituelle.
CONSEILS POUR LE MJ :
RÉSISTER À DES
APTITUDES HÉROÏQUES
D e nombreuses Aptitudes Héroïques affectent direc-
tement les PNJ, et leur impact peut être significatif.
La plupart du temps, les PNJ ciblés par un personnage uti-
lisant une Aptitude Héroïque n’ont pas la possibilité d’es-
sayer d’y résister ou d’en éviter les effets. Habituellement,
c’est une bonne chose ; les PJ sont les héros de l’histoire, et
les Aptitudes Héroïques existent pour le montrer.
Cependant, vous voudrez peut-être autoriser certains PNJ,
en particulier les Némésis, à tenter d’éviter de subir l’in-
tégralité des effets d’une Aptitude Héroïque. Au lieu de
simplement faire effectuer au PNJ un test de compétence
pour résister, vous pouvez éventuellement demander au PJ
qui utilise l’Aptitude Héroïque d’effectuer un test opposé,
même si l’Aptitude n’en nécessite généralement pas.
L’adversaire résiste avec son Sang-froid contre la volonté
ou l'intelligence, ou sa Résistance contre la force physique
(le MJ est libre de choisir une autre compétence s’il pense
que cela convient mieux à la situation).

LES APTITUDES HÉROÏQUES
DANS LE RÉCIT
B ien que les Aptitudes Héroïques doivent être
activées et que leurs effets ne durent que peu de
temps, le MJ pourra toujours, à sa discrétion, insérer de
petits bonus narratifs, même succincts, découlant d’une
Aptitude, qu’elle soit activée ou non. Après tout, l’Aptitude
Héroïque d’un personnage en dit long sur l’identité de
celui-ci, et elle est susceptible d’avoir un impact sur une
grande partie de ses actions et de ses décisions. Toutefois,
il est important que ces considérations mineures ne fassent
pas double emploi ou ne rivalisent pas avec les bénéfices
retirés de l’activation de l’Aptitude Héroïque.
L’effet Sixième sens constitue un bon exemple. Si un per-
sonnage peut parler aux animaux, il peut le faire à tout
moment, bien qu’il n’ait aucune garantie de recevoir des
informations utiles sans activer son Aptitude ! En revanche,
si un personnage peut lire dans les pensées, le MJ peut
décider que cela demande une très grande concentration,
ou même que le PJ doit se trouver dans des circonstances
très particulières. De même, si l’effet d’Aptitude principal
d’un personnage est Connecté, le joueur et le MJ peuvent
décider que le personnage connaît déjà de nombreux PNJ
rencontrés dans le jeu, même s’ils ne lui doivent pas tous
une faveur importante.
DÉCHAÎNÉ
Quand il est poussé à bout et atteint son point de rupture, ou peut-
être juste pour impressionner la galerie, votre personnage déchaîne
ses pleines capacités, terrassant quiconque s’oppose à lui. Il peut se
déchaîner en portant des rafales de coups, ou en déclenchant une
soudaine vague d’énergie magique qui élimine tous les monstres et
ennemis trop proches de lui. Cet effet pourrait même signifier que
votre personnage peut en appeler à la colère d’une divinité ou d’un
autre être surnaturel.
Base : Tant que cette Aptitude est active, votre personnage, une fois
par round à son tour, peut effectuer une manœuvre pour vaincre
immédiatement un groupe de sbires à portée courte.
Amélioré : Tant que cette Aptitude est active, votre personnage, une fois
par round à son tour, peut effectuer une broutille à la place de l’effet de
base pour vaincre immédiatement un groupe de sbires à portée courte.
Ultime : Quand vous activez cette Aptitude, votre personnage vainc
immédiatement tous les sbires à portée courte.
GUÉRISON MIRACULEUSE
Les blessures de votre personnage se révèlent souvent moins graves
qu’il n’y paraît, ou peut-être guérit-il réellement si vite de ses blessures
physiques que cela défie toute explication. En tout cas, il a tendance à
se sortir de combats sanglants avec de simples égratignures.
Base : Quand votre personnage active cette Aptitude, et au début
de son tour à chaque round tant qu’elle est active, votre personnage
élimine 3 blessures.
76
Amélioré : Quand vous activez cette Aptitude, votre personnage
élimine toutes les blessures actuelles dont il souffre.
Ultime : Quand vous activez cette Aptitude, votre personnage éli-
mine une blessure critique dont il souffre.
INFLUENT
Votre personnage est un orateur exceptionnel, il est incroyable-
ment charmant ou possède une aptitude surnaturelle pour influen-
cer les autres. Qu’il raconte des mensonges, se lance dans des
discours passionnés, déclame de la poésie de façon extrêmement
émouvante ou utilise toute autre méthode, il obtient des gens qu’ils
fassent ce qu’il veut.
Base : Tant que cette Aptitude est active, lorsque votre personnage
utilise une compétence sociale pour infliger du stress lors d’une ren-
contre sociale (voir page 118 du livre de base Genesys), il inflige un
nombre de points de stress supplémentaires égal à sa caractéristique
liée à la compétence. Si la rencontre sociale est résolue avec un seul
test de compétence, votre personnage ajoute à la place un nombre
de 󲊳 égal à sa caractéristique liée à la compétence.
Amélioré : Tant que cette Aptitude est active, votre personnage doit
dépenser uniquement 󲊴 󲊴 pour déclencher une « remarque cri-
tique » (voir l’encadré à la page 123 du livre de base Genesys) et
infliger 5 points de stress à la cible. Votre personnage peut infliger
plusieurs remarques critiques avec un seul test.
CONSEILS POUR LE MJ :
GÉRER LES APTITUDES
HÉROÏQUES
T
outes les Aptitudes Héroïques ont un impact nar-
ratif important, mais certaines ont un effet parti-
culièrement fort ou bouleversant sur le récit. Alors qu’il
est assez simple de résoudre l’utilisation d’Aptitudes qui
interagissent directement avec les mécaniques de jeu, celles
comme Prédiction et Connecté peuvent être assez exi-
geantes pour le MJ. En tant que MJ, vous devez résoudre
ces Aptitudes de la même manière que n’importe quelle
autre action entreprise par les PJ qui ne demande pas de
test de compétence, ou que n’importe quelle autre ques-
tion des joueurs sur l’univers.
Bien que ces effets vous imposent certaines restrictions,
ils offrent également une grande liberté pour résoudre
l’utilisation d’une Aptitude de la manière qui fonc-
tionne le mieux pour votre session et votre campagne.
La faveur que gagne un PJ en utilisant Connecté ou les
connaissances qu’il acquiert grâce à Bien informé vous
offrent des opportunités de garder l’action sur la bonne
voie en fournissant aux PJ les informations ou l’oppor-
tunité dont ils ont besoin pour faire avancer l’aventure.
Quelle que soit la façon dont vous choisissez de résoudre
l’Aptitude, assurez-vous simplement que le joueur en
tire le bénéfice qu’il escomptait et qu’elle ait un impact
héroïque convenable sur le jeu !
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
Ultime : Tant que cette Aptitude est active lors d’une rencontre
sociale, votre personnage réduit également n’importe quel stress
dont il souffre d’un nombre de points égal à sa Présence ou à ses
rangs en Calme (selon lequel est le plus élevé). Cette réduction
s’applique aux tests de compétence, aux talents et aux aptitudes qui
infligent du stress, mais seulement pendant une rencontre sociale, et
ne s’applique pas aux points de stress que votre personnage s’inflige
volontairement.
INCASSABLE
Votre personnage peut se battre malgré les plus horribles blessures
– peut-être est-ce sa volonté de fer qui lui permet d’accomplir cet
exploit, ou peut-être est-ce quelque chose qui dépasse les simples mor-
tels. En tout cas, même les blessures les plus graves ne le ralentissent
pas dans le feu de l’action.
Base : Quand vous activez cette Aptitude Héroïque, choisissez une
blessure critique subie par votre personnage (sauf « Mort »). Tant
que cette Aptitude est active, ne subissez aucun effet de cette blessure
critique, y compris l’ajout de +10 à d’autres jets dans le tableau des
Blessures critiques (page 115 du livre de base). Vous pouvez égale-
ment activer cette Aptitude Héroïque au prix d’une broutille hors tour
quand votre personnage subit une blessure critique.
Amélioré : Tant que cette Aptitude est active, votre personnage ne
subit pas les effets des blessures critiques dont il souffre (sauf « Mort »).
Ultime : Tant que cette Aptitude est active, votre personnage ignore
également les effets du résultat « Mort ». Il meurt tout de même quand
le temps d’activation de l’Aptitude prend fin, à moins que la blessure
critique ne soit retirée avant d’une quelconque manière.
PARANGON
Votre personnage est tout simplement le meilleur dans une compé-
tence particulière. Que ses aptitudes soient vraiment surnaturelles ou
semblent juste l’être, votre personnage réussit toujours le test qu’il veut
quand cela compte vraiment. Plus important encore, même lorsque
les choses pourraient mal tourner, cela n’arrive jamais.
Base : Quand vous sélectionnez cet effet d’Aptitude principal, choi-
sissez une compétence. Tant que cette Aptitude est active, après avoir
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
lancé les dés pour un test utilisant cette compétence mais avant de
résoudre les résultats, vous pouvez retirer 󲊷 de votre choix de la
réserve. (Ignorez les symboles de ce dé lors de la résolution du test.)
Amélioré : Tant que cette Aptitude est active, vous pouvez retirer 󲊸
de votre choix des résultats des tests utilisant la compétence choisie.
Ultime : Tant que cette Aptitude est active, vous pouvez retirer 󲊻 au
lieu de 󲊷 des résultats des tests utilisant la compétence choisie.
PRÉDICTION
Votre personnage possède des moyens mystiques de prédire les événe-
ments à venir, ou vit sa vie en suivant une ancienne prophétie, dont
il peut même être l’objet. Que ce soit en interprétant les rêves des
autres, en lisant des présages dans les traces laissées par les animaux, en
scrutant une boule de cristal ou en discernant la signification cachée
des paroles d’anciens prophètes, votre personnage a accès à des infor-
mations utiles sur les événements en cours et ceux à venir.
Base : Chaque round, tant que cette Aptitude est active, vous pouvez
poser une question fermée (réponse par oui ou par non) au MJ sur
une connaissance que votre personnage n’a aucune raison normale ou
logique de posséder. Le MJ doit y répondre honnêtement. Votre person-
nage obtient ces informations grâce à n’importe quel moyen ésotérique
approprié. (Agir du fait de ces informations est un tout autre problème,
bien entendu. Vous ne pouvez pas accuser des nobles d’un crime sans
apporter de preuves juste parce qu’un esprit vous l’a dit !)
Amélioré : Tant que cette Aptitude est active, vous pouvez relancer
les dés d’un test de compétence lié à une question que vous avez
posée au MJ.
Ultime : Une fois, tant que cette Aptitude est active,
lorsqu’un PNJ effectue un test de compétence, vous
pouvez lancer une fois une réserve de dés iden-
tique et choisir de substituer vos résultats à ceux
du PNJ.
78
SIXIÈME SENS
Votre personnage possède une capacité rare, voire unique, de percevoir
des choses au-delà des cinq sens qui limitent la plupart des mortels.
Il est peut-être en mesure de comprendre le langage des animaux, de
percevoir les pensées des autres, ou même de communiquer avec les
esprits des êtres récemment trépassés.
Base : Quand vous choisissez cette Aptitude Héroïque, le MJ et vous
décidez à quel type d’entité s’applique la perception extrasensorielle
de votre personnage : aux animaux, aux morts, aux pensées des autres,
etc. Tant que cette Aptitude est active, votre personnage peut com-
muniquer de façon limitée avec ce type d’entité, percevoir des émo-
tions et des impressions vagues. En outre, quand vous activez cette
Aptitude, votre personnage utilise ce mode de communication pour
gagner automatiquement une information importante et pertinente
pour la rencontre en cours.
Amélioré : Tant que cette Aptitude est active, votre personnage peut
comprendre et échanger des idées simples par ce biais. En outre, il
gagne automatiquement une autre information importante, perti-
nente pour la session en cours.
Ultime : Tant que cette Aptitude est active, votre personnage peut
engager des conversations complexes par ce biais, ce qui s’avère tout
aussi rapide et efficace qu’une discussion ordinaire, sinon plus. En
outre, il gagne automatiquement une autre information importante,
pertinente pour l’aventure ou la campagne.
TROMPE-LA-MORT
Lorsque votre personnage rassemble toute sa détermination et resserre
sa prise sur son arme ou son bâton de mage, il se moque éperdument
de ce que l’ennemi lui réserve. Dans les moments cruciaux, il affronte
l’adversité écrasante la tête haute et s’en sort sans une égratignure,
grâce à son extrême ténacité et sa farouche volonté de franchir les
obstacles ou grâce à un effet magique.
Base : Tant que cette Aptitude est active, votre personnage gagne
encaissement +4.
Amélioré : Tant que cette Aptitude est active, votre personnage aug-
mente également d’un dé la difficulté des tests de combat qui le visent.
Ultime : Tant que son Aptitude Héroïque est active, votre person-
nage devient immunisé contre les dégâts ; réduisez tous les dégâts
qu’il subit à 0.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
AMÉLIORATION
DES APTITUDES
HÉROÏQUES
À mesure que votre personnage gagne de l’expérience, il gagne des
points d’Aptitude à dépenser pour améliorer ses Aptitudes Héroïques.
Évidemment, les améliorations rendent l’Aptitude plus puissante,
mais, plus important encore, elles aident à la différencier des autres.
Même si deux PJ ont le même effet d’Aptitude principal pour leurs
Aptitudes Héroïques, les différents choix d’amélioration peuvent
aboutir à des résultats très différents.
Votre personnage reçoit des points d’Aptitude selon les XP qu’il
gagne en jouant. Chaque fois que le total d’XP de votre personnage
augmente de 50, il gagne un point d’Aptitude. Il ne gagne pas de
points d’Aptitude en fonction de ses XP initiaux, déterminés par son
espèce, mais si vous créez un personnage avec des XP supplémen-
taires (voir l’encadré Personnages expérimentés page 44 du livre de
base Genesys), il gagne un point d’Aptitude pour chaque tranche de
50 XP supplémentaires.
Quand votre personnage gagne des points d’Aptitude, vous décidez
comment les dépenser. Chaque amélioration a un coût et dépenser les
points requis pour une amélioration ajoute de façon permanente le
bénéfice de cette amélioration à votre Aptitude Héroïque. Les effets de
certaines améliorations se cumulent si vous les achetez plusieurs fois.
DURÉE
Coût : 1 point d’Aptitude
L’effet de l’Aptitude Héroïque de votre personnage dure un tour sup-
plémentaire pour chaque achat de Durée.
FRÉQUENCE
Coût : 2 points d’Aptitude
Votre personnage peut activer son Aptitude Héroïque une fois supplé-
mentaire par session pour chaque achat de Fréquence.
PUISSANCE
Coût : Spécial
La première fois que vous achetez cette amélioration, elle vous coûte
1 point d’Aptitude et l’effet d’Aptitude de votre personnage passe
au niveau « Amélioré ». Vous pouvez acheter cette amélioration une
seconde fois pour un coût de deux points d’Aptitude supplémentaires
pour passer au niveau « Ultime ».
EFFET SECONDAIRE
Coût : 1 point d’Aptitude
Ajoutez un effet secondaire à l’Aptitude Héroïque de votre person-
nage. Lorsque vous achetez cette amélioration, sélectionnez l’un des
effets secondaires suivants. Vous pouvez acheter cette amélioration
une seconde fois pour choisir un effet différent, pour un total de deux
effets secondaires. Comme pour l’effet d’Aptitude principal, vous
devez discuter avec le MJ d’une explication narrative intéressante pour
chaque effet secondaire.
Même si l’effet principal est instantané, la durée de l’Aptitude
Héroïque est importante pour de nombreux effets secondaires.
N’oubliez pas qu’une Aptitude Héroïque dure jusqu’à la fin du pro-
chain tour de votre personnage, ou plus longtemps si vous prenez
l’amélioration Durée.
ALLIÉS REVIGORÉS
Quand votre personnage active l’Aptitude et au début de chaque tour
tant qu’elle est active, tous les alliés à portée courte guérissent 2 points
de stress.
ALLIÉS SURPUISSANTS
Tant que l’Aptitude est active, les alliés à portée courte ajoutent 󲊸 à
leurs tests de compétence.
DÉVASTATEUR
Tant que l’Aptitude est active, votre personnage ajoute +2 points de
dégâts à un coup de chacune de ses attaques.
DIMINUER
Tant que l’Aptitude est active, les ennemis à portée courte ajoutent 󲊸
à leurs tests de compétences.
DRAINER
Quand votre personnage active son Aptitude Héroïque et au début de
chaque tour où elle est active, les ennemis à portée courte subissent
2 points de stress.
NARRATION
Coût : 1 point d’Aptitude
Votre personnage n’a besoin de dépenser qu’un seul Point Narratif
pour activer l’Aptitude. Vous ne pouvez acheter cette amélioration
qu’une seule fois.
RENOUVEAU
Quand votre personnage active l’Aptitude, vous pouvez générer un
nouveau créneau d’initiative. Vous pouvez choisir d’utiliser Calme
ou Vigilance pour ce jet de dés. Le nouveau résultat persiste pour la
durée de la rencontre. Le nouveau créneau d’initiative peut être utilisé
immédiatement, mais il ne permet à aucun PJ de jouer un tour sup-
plémentaire pendant un round.
REVIGORER
Quand votre personnage active l’Aptitude et au début de chaque tour
tant qu’elle est active, votre personnage guérit 2 points de stress.
SURPUISSANCE
Tant que l’Aptitude est active, votre personnage ajoute 󲊸 à ses tests
de compétence.
ORIGINES DE
L'APTITUDE HÉROÏQUE
L’Aptitude Héroïque de votre personnage est une part importante de
sa personnalité, vous aurez donc probablement envie de décider com-
ment il l’a acquise. Il est probable qu’en la choisissant, vous ayez déjà
pensé à une explication et à l’histoire de la première fois que votre
personnage l’a utilisée. Il ne vous reste donc qu’à discuter de vos idées
avec le MJ et vous assurer que vous êtes tous les deux d’accord sur ce
que cette Aptitude impliquera lors de la campagne.
Si vous n’avez pas encore d’idée ou si vous voulez simplement laisser
faire le destin, vous pouvez lancer un dé 10 et consulter le résultat dans
le Tableau 2-2 : Origines de l’Aptitude Héroïque pour découvrir
comment votre personnage a obtenu son Aptitude.
79
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
NOUVELLES COMPÉTENCES
ET NOUVELLES RÈGLES
C ette section présente de nouvelles compétences spécifiques à
l’univers de Runebound. Le Tableau 2-3 : Compétences pour
l’univers de Runebound, page 82, comprend à la fois ces nouvelles
compétences et celles du livre de base Genesys utilisées dans l’univers
de Runebound. Cette section couvre également les règles du combat
monté, un type d’affrontement assez courant dans cet univers.
COMPÉTENCES
DE CONNAISSANCE
Les nouvelles compétences de cette section remplacent la compétence
Connaissance générique présentée dans le livre de base Genesys.
AVENTURES (INTELLIGENCE)
La vie d’aventurier expose à des dangers exceptionnels et offre des défis
uniques. Les aventuriers se précipitent souvent vers les périls que le com-
mun des mortels a tendance à fuir. Les plus expérimentés connaissent
des aspects du monde que la plupart des gens ne soupçonneront jamais,
et ils apprennent beaucoup au cours de leurs voyages et de leurs quêtes.
La compétence Connaissance (Aventures) représente toutes ces choses
apprises au fil des expériences vécues, ou bien lors de discussions dans
des tavernes avec des amis aventuriers sur les monstres, les ruines han-
tées et toutes sortes d’autres menaces… et comment les affronter au
mieux. Pour de nombreux aventuriers, cette compétence représente une
sorte d’instinct acquis au fil du temps ; même s’ils ne savent pas vous
expliquer exactement pourquoi, s’ils vous disent que c’est une mauvaise
idée de toucher à cette vieille statue, vous feriez mieux de les écouter.
COMPÉTENCE À UTILISER SI...
• Un personnage essaye d’identifier une masse étrange et vis-
queuse suspendue au plafond d’un donjon.
• Il tente de trouver le chemin le plus sûr à travers des ruines sur
un terrain dangereusement instable.
• Il cherche à résoudre une énigme complexe à base de statuettes
à déplacer et de leviers à actionner dans les profondeurs d’un
tombeau antique.
COMPÉTENCE À NE PAS UTILISER SI...
• Un personnage veut déterminer la provenance d’une étrange
amulette trouvée au beau milieu de ruines. Il doit utiliser pour
cela la compétence Connaissance (Savoir).
• Il essaye d’éviter de tomber dans une fosse cachée grâce à ses
réflexes et à sa dextérité. La compétence Coordination est plus
appropriée dans cette situation (bien que Vigilance puisse aussi
l’aider à éviter le piège).
• Il compte sur ses sens aiguisés pour éviter les dangers dans un
souterrain : il doit plutôt compter sur sa Vigilance.
SAVOIR (INTELLIGENCE)
Le Savoir représente la connaissance d’un personnage sur la magie, les
légendes, la religion… Cela inclut les contes populaires et l’histoire
récente, ainsi que les questions obscures et nébuleuses auxquelles seuls
les sages réfléchissent. Le Savoir englobe des connaissances spéciali-
sées, savantes et ésotériques qu’on juge généralement assez inutiles.
Un personnage avec des rangs dans la compétence Connaissance
(Savoir) peut se rappeler les détails de légendes anciennes, reconnaître
des icônes religieuses rares et même déterminer si un événement est
d’origine magique ou triviale.
•
COMPÉTENCE À UTILISER SI...
Un personnage essaye d’identifier les origines d’une ancienne
épée récupérée dans des ruines.
• Il veut déterminer la source de la magie d’un magicien après
l’avoir vu en action.
• Il tente de se rappeler une terrible légende sur les Premières
Ténèbres.
COMPÉTENCE À NE PAS UTILISER SI...
• Un personnage essaye de lancer un sort. Cela requiert l’utilisa-
tion d’une compétence magique.
• Il tente de lire une carte. Il doit utiliser pour cela la compétence
Connaissance (Géographie).
• Il veut déterminer un parcours sûr à travers des ruines antiques.
Il doit utiliser pour cela la compétence Connaissance (Aventures).
GÉOGRAPHIE (INTELLIGENCE)
La géographie représente la compréhension qu’a un personnage des
territoires et des différentes cultures qu’on y trouve, y compris les us et
coutumes et les lois. Grâce à la géographie, votre personnage maîtrise
la lecture de cartes et la cartographie, connaît les différentes règles
d’étiquette selon les régions et s’y entend en navigation. Un person-
nage avec des rangs en Connaissance (Géographie) peut élaborer un
itinéraire sur terre ou sur mer, décrire de mémoire les emplacements
des villes et monuments principaux, éviter de violer accidentellement
les lois locales, et avertir ses alliés de ne pas aborder certains sujets
sensibles dans telle ou telle ville.
COMPÉTENCE À UTILISER SI...
• Un personnage veut déterminer un parcours pour traverser une
dangereuse étendue sauvage afin de se rendre dans un village
non loin.
• Il veut indiquer de mémoire l’emplacement approximatif d’un
monument ou d’une colonie.
• Il doit choisir la tenue appropriée pour passer inaperçu dans la
foule dans une ville étrangère.
COMPÉTENCE À NE PAS UTILISER SI...
• Un personnage veut se souvenir d’informations sur les Terres
Sombres. Cela requiert la compétence Connaissance (Interdit).
• Il doit établir un camp ou gérer d’autres questions pratiques
pour traverser un désert. Cela requiert la compétence Survie.
• Il essaye de se rappeler l’histoire d’un monument en ruine. Cela
requiert la compétence Connaissance (Savoir).
81
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
COMPÉTENCES
DE MAGIE
Les personnages peuvent utiliser les nouvelles compétences magiques
de cette section en plus de celles décrites page 70 du livre de base
Genesys. Pour en savoir plus sur l’utilisation des compétences
magiques dans l’univers de Runebound, voir page 115.
RUNES (INTELLIGENCE)
La compétence Runes représente la compréhension qu’a un person-
nage des éclats runiques et son aptitude à exploiter et contrôler leur
magie. Si n’importe qui peut activer un éclat runique pour libérer
l’effet magique spécifique de la rune qui y est gravée, un personnage
possédant la compétence Runes peut extraire et manipuler ce pouvoir
pour obtenir de meilleurs résultats, aux effets plus polyvalents. Bien
que seuls quelques rares êtres puissent contrôler la magie brute, la plu-
part des individus en ont le potentiel, qu’il leur faut développer à force
d’étude et de pratique, pour exploiter les éclats runiques.
COMPÉTENCE À UTILISER SI...
• Un personnage veut utiliser une rune d’immolation, que ce soit
pour créer une grande gerbe de flammes ou simplement allu-
mer un feu de camp.
• Il veut créer une barrière de glace protectrice en utilisant une
rune de tempête de glace.
• Il veut identifier le sens et l’effet d’une rune gravée sur un éclat
runique.
COMPÉTENCE À NE PAS UTILISER SI...
• Un personnage veut lancer un sort sans l’aide d’un éclat runique.
Cela nécessite une compétence magique différente, selon le sort
concerné.
• Il tente de traduire les glyphes découverts dans une antique
cité naine en ruine. Il doit utiliser la compétence Connaissance
(Savoir).
• Il souhaite utiliser l’effet d’activation d’un éclat runique : cela
ne requiert pas de test de compétence magique.
VIRTUOSITÉ (PRÉSENCE)
La compétence Virtuosité est l’aptitude d’un personnage à obtenir des
effets magiques grâce à la poésie, au chant ou à une performance artis-
tique. La plupart de ceux qui utilisent cette compétence apprennent
leur répertoire et leurs techniques par cœur, puis composent et impro-
visent d’instinct. Contrairement à d’autres, la compétence magique
Virtuosité est définie par des méthodes et pratiques distinctives. Elle
peut puiser dans les mêmes sources de pouvoir que les compétences
magiques Arcanes, Divin ou Origines, en fonction de la culture du
personnage et des traditions dont il s’inspire. Un personnage avec des
rangs dans la compétence Virtuosité peut déclencher des effets surna-
turels en chantant, en jouant de la musique ou en offrant tout autre
type de représentation en apparence ordinaire.
COMPÉTENCE À UTILISER SI...
• Un personnage veut galvaniser ses alliés lors d’un combat grâce
à un chant qui les inspire.
• Il veut démoraliser son ennemi avec des quolibets cinglants,
au point que le malaise de ce dernier entame ses capacités
physiques.
• Il veut contrer les sorts néfastes d’un nécromancien grâce à un
discours vibrant.
COMPÉTENCE À NE PAS UTILISER SI...
• Un personnage veut chanter une chanson ordinaire. Cela néces-
site la compétence Charme.
• Il veut lancer une boule de feu ou tout autre projectile physique
pour blesser l’ennemi. Cela nécessite une autre compétence
magique, comme Arcanes.
COMBAT MONTÉ
Des destriers des baronnies des Daqan aux Leonx des Elfes Latari,
les guerriers montés de tout Mennara chevauchent des créatures très
diverses, du banal cheval au reptile volant, pour gagner en vitesse et en
maniabilité au combat. Un cavalier habile a également de nombreux
avantages sur ses adversaires à pied.
Monter ou descendre d’une monture nécessite une manœuvre. Un
cavalier en selle et sa monture seront traités comme un seul person-
nage dans la plupart des situations (les attaques visent le cavalier, la
monture n’agit pas indépendamment dans les rencontres structurées,
et les deux agissent de concert lorsqu’un joueur prend un créneau
d’initiative pour son personnage monté).
Un personnage monté peut effectuer une manœuvre pour diriger sa
monture et la faire se déplacer. Le cavalier et la monture se déplacent
immédiatement comme s’ils avaient effectué deux manœuvres pour le
faire. Dans certaines situations, telles que le contrôle d’une monture
non entraînée au combat au milieu d’une grande bataille, le MJ peut à
la place exiger que le personnage effectue un test d’Équitation au prix
d’une action pour diriger et maîtriser sa monture.
Généralement, un personnage monté a un avantage au Corps
à corps contre les adversaires à pied et doit ajouter 󲊸 aux tests de
combat au Corps à corps le visant, tandis que les adversaires à pied
ajoutent 󲊸 aux attaques de Corps à corps contre des personnages
montés. Inversement, tirer avec une arme à Distance ou lancer un
sort sur le dos d’un cheval qui galope est plus difficile, un personnage
monté doit donc ajouter 󲊸 aux tests d’attaque à Distance et aux tests
de compétence magique. Le MJ prendra la décision finale quant à
l’ajout de 󲊸 et de 󲊸 aux tests effectués tant que le personnage est sur
sa monture, comme pour n’importe quel test.
Puisque nous traitons une monture et son cavalier comme un
seul personnage, le seul moyen de viser une monture est d’utili-
ser la manœuvre Viser pour cibler des « parties » spécifiques d’un
adversaire, conformément à la page 100 du livre de base Genesys.
(Dans certaines circonstances, le MJ peut autoriser les person-
nages à attaquer sans malus une monture particulièrement grande,
comme un Dragon.)
Un personnage dont la monture est tuée ou neutralisée est jeté à
terre et subit 3 points de stress. Selon la situation et les résultats de
n’importe quel test lié à celle-ci, le personnage peut subir des dégâts
supplémentaires ou se retrouver coincé sous la monture.
83
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

NOUVEAUX TALENTS
C ette section présente de nouveaux talents spécifiques à l’univers
de Runebound. Ces talents, ainsi que ceux présentés dans le
Tableau 2-4 : Talents Genesys pour l’univers de Runebound à la Catégorie : 1
COUP DE BOUCLIER

page 85, peuvent également être utilisés dans d’autres univers si le MJ Activation : Actif (broutille)
et les joueurs le souhaitent. Rangs : Non
Quand votre personnage utilise un bouclier pour attaquer un sbire ou
un rival, vous pouvez dépenser 󲊴 󲊴 󲊴 󲊴 ou 󲊵 pour sonner la cible
CATÉGORIE 1 jusqu’à la fin du prochain tour de celle-ci.

COUP DOULOUREUX
APOTHICAIRE Catégorie : 1
Catégorie : 1 Activation : Actif (broutille)
Activation : Passif Rangs : Non
Rangs : Oui Quand votre personnage effectue un test de combat, vous pouvez
Quand un patient soigné par votre personnage élimine des blessures volontairement améliorer 1 dé de difficulté pour utiliser ce talent. Si
grâce au repos, il élimine un nombre de blessures supplémentaires égal la cible subit une ou plusieurs blessures à cause de ce test de combat,
à deux fois le nombre de rangs que possède votre personnage dans le elle subit 2 points de stress chaque fois qu’elle effectue une manœuvre
talent Apothicaire. jusqu’à la fin de la rencontre.

CASTAGNEUR DE TAVERNE DÉFI !

Catégorie : 1
Activation : Passif
Rangs : Non
Votre personnage ajoute 󲊴 aux tests de Pugilat et aux tests de combat
utilisant des armes improvisées.
CHANGEFORME
Catégorie : 1
Activation : Passif
Rangs : Non
Quand votre personnage est neutralisé car il a dépassé son seuil
de stress tant qu’il est sous sa forme normale, il subit les change-
ments suivants au prix d’une broutille hors tour : il élimine tout
son stress, augmente ses compétences Pugilat et Agilité de 1 jusqu’à
un maximum de 5, et réduit ses compétences d’Intelligence et de
Volonté de 1 jusqu’à un minimum de 1. Il inflige des dégâts +1
quand il effectue des attaques à mains nues, celles-ci ont un cri-
tique de 3 ; mais il ne peut pas utiliser de compétence magique ou
effectuer d’attaque à Distance.
Le MJ doit s’assurer que les PNJ réagissent de manière appropriée
à la situation (au minimum, en améliorant 2 dés de difficulté des tests
de compétences sociales). Votre personnage reprend sa forme normale
après huit heures ou s’il est neutralisé (par exemple, en dépassant son
seuil de blessure ou de stress).
Catégorie : 1
Activation : Actif (manœuvre)
Rangs : Oui
Une fois par rencontre, votre personnage peut utiliser ce talent pour
choisir un nombre d’adversaires à portée courte inférieur ou égal au
nombre de rangs qu’il a en Défi ! (dans ce cas-là, un groupe de sbires
est considéré comme un seul adversaire). Jusqu’à ce que la rencontre
se termine ou que votre personnage soit neutralisé, ces adversaires
ajoutent 󲊸 aux tests de combat visant votre personnage et ajoutent 󲊸
󲊸 aux tests de combat visant d’autres personnages.
FINESSE
Catégorie : 1
Activation : Actif (broutille)
Rangs : Non
Quand il effectue un test de Pugilat ou de Corps à corps (armes
légères), votre personnage peut utiliser Agilité à la place de Vigueur.
PRÉCISION
Catégorie : 1
Activation : Actif (broutille)
Rangs : Non
Quand il effectue un test de Pugilat ou de Distance, votre personnage
peut utiliser Ruse à la place de Vigueur ou d’Agilité.

CHARGE DE TAUREAU PRO DES DONJONS

Catégorie : 1
Activation : Actif (broutille)
Rangs : Non
Quand votre personnage effectue un test de Pugilat, de Corps à corps
(armes légères) ou de Corps à corps (armes lourdes) après avoir uti-
lisé une manœuvre pour entrer au contact d’une cible, vous pouvez
dépenser 󲊴 󲊴 󲊴 ou 󲊵 pour utiliser ce talent afin de jeter la cible à
terre, et l’éloigner de votre personnage d’un niveau de portée.
Catégorie : 1
Activation : Passif
Rangs : Oui
Après que votre personnage a effectué un test de Perception, de
Vigilance ou de Connaissance (Aventures) pour remarquer, identifier
ou éviter une menace dans une grotte, des ruines souterraines ou autre
lieu de ce type, il annule un nombre de 󲊱 nets inférieur ou égal à son
nombre de rangs dans Pro des donjons.

84
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

CHARGE AVEUGLE ÉTAU

Catégorie : 2 Catégorie : 2
Activation : Actif (broutille) Activation : Actif (broutille)
Rangs : Non Rangs : Non
Après avoir utilisé une manœuvre pour venir au contact d’un adver- Votre personnage peut subir 2 points de stress pour utiliser ce talent.
saire, votre personnage peut subir 2 points de stress pour utiliser ce Jusqu’au début de son prochain tour, les ennemis doivent dépenser
talent. Il ajoute ensuite 󲊳 󲊳 󲊱 󲊱 au résultat du prochain test de deux manœuvres pour ne plus être au contact avec votre personnage.
Pugilat, de Corps à corps (armes légères) ou de Corps à corps (armes
lourdes) qu’il effectue ce tour-ci. FAVEUR DES FÉES
Catégorie : 2
CHASSEUR Activation : Actif (broutille)
Catégorie : 2 Rangs : Non
Activation : Passif Votre personnage ne peut pas prendre ce talent s’il a pris le talent Empire
Rangs : Non des Dimora. Quand il lance un sort d’Attaque, votre personnage peut
Connaissance (Géographie), Distance et Survie sont maintenant des ajouter l’effet Manipulation sans augmenter la difficulté. Il ne peut
compétences de carrière de votre personnage. jamais ajouter l’effet Impact.

COMMUNION AVEC LA NATURE FLAMMES DE KELLOS

Catégorie : 2 Catégorie : 2
Activation : Passif Activation : Actif (broutille)
Rangs : Non Rangs : Non
Quand votre personnage utilise l’action magique Invocation, le sort Votre personnage ne peut pas prendre ce talent s’il a pris le talent Frisson
gagne l’effet Invocation d’Allié sans augmenter la difficulté. Toutes les de Nordros. Quand il lance un sort d’Attaque, votre personnage peut
créatures invoquées par votre personnage doivent être naturellement ajouter l’effet Incendie sans augmenter la difficulté. Il ne peut jamais
présentes dans l’environnement où il se trouve. ajouter l’effet Glacial.

COUP SOURNOIS FLÉAU DES SPECTRES

Catégorie : 2 Catégorie : 2
Activation : Actif (broutille) Activation : Passif
Rangs : Oui Rangs : Non
Quand votre personnage effectue un test de combat avec une arme à Votre personnage diminue de 1 le niveau de critique de son arme,
Distance ou de Corps à corps (armes légères), il peut subir 2 points jusqu’à un minimum de 1, quand il effectue une attaque visant un
de stress pour utiliser ce talent et ajouter l’attribut Enchevêtrement à adversaire mort-vivant.
l’attaque. La valeur d’Enchevêtrement est égale au nombre de rangs de
votre personnage dans le talent Coup sournois. FRISSON DE NORDROS
Catégorie : 2
ÉCLAIR DE GÉNIE Activation : Actif (broutille)
Catégorie : 2 Rangs : Non
Activation : Passif Votre personnage ne peut pas prendre ce talent s’il a pris le talent Flammes
Rangs : Non de Kellos. Quand il lance un sort d’Attaque, votre personnage peut
Quand votre personnage génère 󲊵 lors d’un test de Connaissance, ajouter l’effet Glacial sans augmenter la difficulté. Il ne peut jamais
lancez 󲊸 󲊸 et ajoutez les résultats au test, en plus de dépenser le 󲊵 ajouter l’effet Incendie.
comme d’habitude.
MENACER
ÉPINGLER Catégorie : 2
Catégorie : 2 Activation : Actif (broutille)
Activation : Actif (broutille) Rangs : Oui
Rangs : Non Après qu’un adversaire à portée courte de votre personnage a résolu un
Quand votre personnage inflige une blessure critique avec une arme test de combat qui inflige des dégâts à l’un des alliés de votre person-
de Corps à corps, il peut utiliser ce talent pour immobiliser la cible nage, ce dernier peut subir 3 points de stress pour utiliser ce talent, et
jusqu’à la fin du prochain tour de celle-ci (en plus des autres effets de infliger à l’adversaire un nombre de points de stress égal au nombre
la blessure critique). de rangs qu’il a en Coercition. La portée de ce talent augmente d’un
niveau de portée par rang de Menacer au-delà du premier.
EMPIRE DES DIMORA
Catégorie : 2
RÉCUPÉRATION HÉROÏQUE
Activation : Actif (broutille) Catégorie : 2
Rangs : Non Activation : Actif (broutille)
Votre personnage ne peut pas prendre ce talent s’il a pris le talent Faveur Rangs : Non
des Fées. Quand il lance un sort d’Attaque, votre personnage peut Quand votre personnage acquiert ce talent, choisissez une caractéris-
ajouter l’effet Impact sans augmenter la difficulté. Il ne peut jamais tique. Une fois par rencontre, vous pouvez dépenser un Point Narratif
ajouter l’effet Manipulation. pour utiliser ce talent afin que votre personnage élimine un nombre de
points de stress égal à la valeur de la caractéristique choisie.

88
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

REMPART VOYAGEUR CHEVRONNÉ

Catégorie : 2 Catégorie : 2
Activation : Actif (broutille, hors tour) Activation : Passif
Rangs : Non Rangs : Non
Votre personnage doit avoir acheté le talent Parer au préalable pour béné- Connaissance (Géographie), Négociation et Vigilance sont mainte-
ficier de ce talent. Tant qu’il manie une arme dotée de l’attribut Parade, nant des compétences de carrière de votre personnage.
votre personnage peut utiliser Parer pour réduire les dégâts d’une
attaque visant un allié au contact.
CATÉGORIE 3
SACRIFICE SANGLANT
Catégorie : 2 CAVALIER
Activation : Actif (broutille)
Rangs : Oui Catégorie : 3
Votre personnage doit avoir acheté le talent Sombre clairvoyance au pré- Activation : Actif (manœuvre)
alable pour bénéficier de ce talent. Avant d’effectuer un test de com- Rangs : Non
pétence magique, votre personnage peut subir un certain nombre de Tant qu’il chevauche une monture entraînée pour le combat, par
blessures pour utiliser ce talent et ajouter le même nombre de 󲊳 au exemple une monture de guerre ou une monture volante (voir
test. Ce nombre ne peut dépasser le nombre de rangs de votre person- page 104), une fois par round, votre personnage peut utiliser ce talent
nage dans le talent Sacrifice sanglant. pour faire effectuer une action à sa monture.

SALES TOURS
Catégorie : 2
Activation : Actif (broutille)
Rangs : Non
Après que votre personnage a infligé une blessure critique à un adver-
saire, il peut utiliser ce talent pour améliorer les dés de difficulté du
prochain test de cet adversaire.

SAVOIR RUNIQUE
Catégorie : 2
Activation : Passif
Rangs : Non
Connaissance (Savoir) et Runes sont maintenant
des compétences de carrière de votre personnage.

SORT DE PRÉDILECTION
Catégorie : 2
Activation : Passif
Rangs : Non
Quand votre personnage acquiert ce talent, choisissez-lui un sort
de prédilection, composé d’une action magique particulière et d’un
ensemble d’effets spécifiques (au moins un effet). Quand votre
personnage lance son Sort de prédilection (composé de
l’exacte association de l’action et du ou des effet(s) en
question), dégradez 1 dé de difficulté du test.

TEMPLIER (AMÉLIORÉ)
Catégorie : 2
Activation : Passif
Rangs : Non
Votre personnage doit avoir acheté le talent Templier au préalable pour
bénéficier de ce talent. Quand votre personnage lance le seul sort Divin
autorisé par rencontre par le talent Templier, il n’ajoute pas le 󲊸 dû
au port d’une armure lourde (armure avec encaissement +2 ou supé-
rieur), à l’utilisation d’un bouclier ou au fait de ne pas avoir au moins
une main libre (voir Tableau III.2-3 : Malus pour lancer des sorts,
page 210 du livre de base Genesys)

89
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

CONTRE-ATTAQUE POIGNARDER DANS LE DOS

Catégorie : 3
Activation : Actif (broutille, hors tour)
Rangs : Non
Votre personnage doit avoir acheté le talent Parer (amélioré) au préalable
pour bénéficier de ce talent. Quand votre personnage utilise le talent
Parer (amélioré) pour frapper un attaquant, il peut également activer
un attribut de l’arme qu’il utilise comme s’il avait généré 󲊴 󲊴 lors
d’un test de combat utilisant cette arme.
DISSONANCE
Catégorie : 3
Activation : Actif (action)
Rangs : Non
Tant qu’il joue d’un instrument de musique, votre personnage peut
utiliser ce talent pour effectuer un test de Charme ou de Virtuosité
Moyen (󲊷 󲊷 󲊷) Pour chaque 󲊳 généré par le test, un ennemi à portée
moyenne au choix du joueur subit 1 blessure. Pour chaque 󲊴, un
ennemi affecté par Dissonance subit 1 blessure supplémentaire.
FRAPPE DOUBLE
Catégorie : 3
Activation : Actif (broutille)
Rangs : Non
Quand il résout un test combiné pour attaquer avec deux armes dans
un combat au Corps à corps, votre personnage peut subir 2 points de
stress pour utiliser ce talent et frapper avec l’arme secondaire au lieu
de dépenser 󲊴 󲊴.
GARDE DU CORPS
Catégorie : 3
Activation : Actif (manœuvre)
Rangs : Non
Une fois par round, pour utiliser ce talent, votre personnage peut
subir un nombre de points de stress inférieur ou égal au nombre de
rangs qu’il possède en Garde du corps. Choisissez un allié au contact
avec votre personnage ; jusqu’à la fin du prochain tour de votre per-
sonnage, pour tous les tests de combat visant cet allié, améliorez un
nombre de dés de difficulté égal au nombre de points de stress subis.
JUSTICE DE LA CITADELLE
Catégorie : 3
Activation : Actif (broutille)
Rangs : Non
Une fois par round, au tour de votre personnage, ce dernier peut subir
3 points de stress pour utiliser ce talent et ajouter un nombre de dégâts
égal à son nombre de rangs en Sang-froid à un coup d’une attaque de
Corps à corps réussie.
ONDE DE CHOC
Catégorie : 3
Activation : Passif
Rangs : Non
Votre personnage traite les armes de Corps à corps (armes lourdes)
comme si elles étaient dotées de l’attribut Souffle avec une valeur égale
aux rangs de votre personnage en Corps à corps (armes lourdes). Votre
personnage ne subit pas de dégâts dus à l’attribut Souffle de l’arme
(mais les alliés si !).
Catégorie : 3
Activation : Actif (action)
Rangs : Non
Votre personnage peut utiliser ce talent pour attaquer un adversaire
inattentif en utilisant une arme de Corps à corps (armes légères).
Poignarder dans le dos constitue une attaque de Corps à corps et suit
les règles normales d’un test de combat (voir page 101 du livre de base
Genesys), mais en utilisant la compétence Magouilles du personnage
à la place de la compétence Corps à corps (armes légères). Si le test
est réussi, chaque 󲊳 net ajoute +2 dégâts (à la place du +1 normal).
POINTS DE PRESSION
Catégorie : 3
Activation : Actif (broutille)
Rangs : Non
Quand votre personnage effectue un test de Pugilat à mains nues
visant un opposant vivant, il peut utiliser ce talent pour infliger des
points de stress à la place de blessures, et infliger un nombre de points
de stress supplémentaires égal à son nombre de rangs en Médecine.
POTIONS PUISSANTES
Catégorie : 3
Activation : Passif
Rangs : Non
Quand votre personnage effectue un test d’Alchimie qui génère 󲊵,
lancez un 󲊻 supplémentaire et ajoutez ses résultats à la réserve, en
plus de dépenser le 󲊵 comme d’habitude. Quand votre personnage
effectue un test d’Alchimie qui génère 󲊲, lancez un 󲊻 supplémen-
taire et ajoutez ses résultats à la réserve, en plus de dépenser le 󲊲
comme d’habitude. Chacun de ces effets ne peut se produire qu’une
seule fois par test.
PROIE FACILE
Catégorie : 3
Activation : Actif (manœuvre)
Rangs : Non
Votre personnage peut subir 3 points de stress pour utiliser ce talent.
Jusqu’au début de son prochain tour, votre personnage et ses alliés à
portée courte ajoutent 󲊸 󲊸 aux tests de combat contre des cibles
immobilisées.
SE JETER DANS LA BATAILLE
Catégorie : 3
Activation : Passif
Rangs : Non
Votre personnage n’ajoute pas aux tests de compétence magique le
󲊸 dû au port d’une armure lourde (armure avec encaissement +2 ou
supérieur), à l’utilisation d’un bouclier ou au fait de ne pas avoir au
moins une main de libre (voir Tableau III.2-3 : Malus pour lancer
des sorts, page 210 du livre de base Genesys).
TIR DE PRÉCISION
Catégorie : 3
Activation : Passif
Rangs : Non
Quand vous effectuez un test de combat à Distance visant un person-
nage au contact avec l’un des alliés de votre personnage, dégradez 1 dé
de difficulté du test (vous réduisez ainsi le malus dû au fait de tirer sur
des cibles au contact).

90
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

CATÉGORIE 4 CATÉGORIE 5
DOS À DOS COUP ÉCRASANT
Catégorie : 4 Catégorie : 5
Activation : Passif Activation : Actif (broutille)
Rangs : Non Rangs : Non
Tant qu’il est au contact avec un ou plusieurs alliés, votre personnage Une fois par session, après avoir effectué un test d’attaque de Corps
et ces alliés ajoutent 󲊸 à leurs tests de combat. Si un ou plusieurs de à corps, mais avant de l’avoir résolu, votre personnage peut subir
ces alliés possèdent également le talent Dos à dos, cet effet se cumule 4 points de stress pour utiliser ce talent. Tant qu’il résout le test, l’arme
jusqu’à un maximum de 󲊸 󲊸. gagne les attributs Brèche 1 et Renversement, et détruit un objet
manié par la cible qui n’est pas doté de l’attribut Résistance Accrue.
IMPLACABLE
CHÂTIMENT !
Catégorie : 4
Activation : Actif (broutille) Catégorie : 5
Rangs : Non Activation : Actif (broutille, hors tour)
Une fois par round, après avoir résolu un test de combat de Pugilat, Rangs : Non
de Corps à corps (armes légères) ou de Corps à corps (armes lourdes) Une fois par round, quand un adversaire attaque un allié à portée
réussi, votre personnage peut subir 4 points de stress pour utiliser ce moyenne, votre personnage peut dépenser un Point Narratif pour uti-
talent afin d’effectuer une attaque de Corps à corps supplémentaire liser ce talent et toucher automatiquement cet ennemi une fois, avec
sur la même cible au prix d’une broutille. Améliorez 1 dé de difficulté une arme que votre personnage manie, si l’ennemi est à sa portée. Le
du test de combat si cette attaque utilise une seconde arme, ou 2 dés coup inflige les dégâts de base de l’arme, plus tout autre dégât dû aux
de difficulté si elle utilise la même arme. talents ou aux aptitudes applicables.

LAME ENDUITE DE VENIN ET SI ON EN DISCUTAIT ?

Catégorie : 4 Catégorie : 5
Activation : Passif Activation : Actif (broutille, hors tour)
Rangs : Non Rangs : Non
Quand il effectue un test de combat au Corps à corps (armes légères) Une fois par session de jeu, quand une rencontre de combat contre un
en utilisant une arme empoisonnée, votre personnage traite cette arme ou plusieurs êtres doués d’intelligence est sur le point de débuter, votre
comme si elle était dotée de l’attribut Incendiaire 2. personnage effectue un test de Charme Intimidant (󲊷 󲊷 󲊷 󲊷 󲊷). Si
le test est réussi, la rencontre de combat se transforme en rencontre
RAGE MEURTRIÈRE sociale, où les PJ tentent de convaincre leurs adversaires de reculer,
d’adhérer à leur point de vue ou d’accepter un compromis. Le MJ a
Catégorie : 4 le mot de la fin quant à la façon dont la situation est résolue sans faire
Activation : Passif usage de la violence (ou la façon dont la rencontre de combat évolue
Rangs : Non si le test du personnage échoue).
Votre personnage ajoute +2 dégâts aux attaques de Corps à corps pour
chaque blessure critique dont il souffre actuellement. (Le MJ peut éga- FEU SACRÉ
lement imposer des malus supplémentaires aux tests de compétence
sociale effectués par votre personnage si celui-ci souffre de blessures Catégorie : 5
critiques dues à son comportement irréfléchi.) Activation : Passif
Rangs : Non
À chaque fois que le MJ dépense un Point Narratif, votre personnage
SORT DE PRÉDILECTION (AMÉLIORÉ)
élimine 2 points de stress.
Catégorie : 4
Activation : Passif TOURBILLON
Rangs : Non
Votre personnage doit avoir acheté le talent Sort de prédilection au préa- Catégorie : 5
lable pour bénéficier de ce talent. Quand votre personnage lance son sort Activation : Actif (action)
de prédilection, dégradez 2 dés de difficulté du test au lieu d’un seul. Rangs : Non
Votre personnage peut subir 4 points de stress pour utiliser ce talent
afin d’effectuer une attaque de Pugilat, de Corps à corps (armes
VAISSEAU légères) ou de Corps à corps (armes lourdes) contre l’adversaire au
Catégorie : 4 contact le plus difficile à toucher (selon ce que décidera le MJ), en
Activation : Actif (broutille) améliorant 1 dé de difficulté. Si le test de combat est réussi, chaque
Rangs : Non adversaire au contact avec votre personnage subit un coup à cause de
Une fois par rencontre, votre personnage peut dépenser un Point cette attaque, qui inflige les dégâts de base plus un nombre de dégâts
Narratif pour effectuer une action magique au prix d’une manœuvre. égal au nombre total de 󲊳 générés par le test.

91
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
ARMES
B ien que dans tout Mennara, il existe des guerriers qui préfèrent
manier des armes étranges ou exotiques, la plupart comptent
sur les épées et les lances, qui ont fait leurs preuves et que leurs
ancêtres portaient au combat avant eux. Cette section présente la plu-
part des armes que l’on trouve le plus couramment à Terrinoth et dans
les régions voisines. Notez que les tableaux répertoriant les armes dans
Royaumes de Terrinoth stipulent également un nombre d’emplace-
ments. Il s’agit du nombre d’améliorations et d’enchantements (voir
page 106) dont l’objet peut être équipé ; cela remplace les règles sur
le nombre d’emplacements d’un objet de la page 206 du livre de base
Genesys.
Sauf indication contraire, les dégâts de base d’une arme de jet sont
égaux à la Vigueur du personnage plus le modificateur de dégâts indi-
qué. En outre, les armes décrites dans ce livre suivent les conseils de
l’encadré Garder le compte des munitions de la page 89 du livre de
base Genesys.
ARMES DE
CORPS À CORPS
Les armes conçues pour être utilisées en combat rapproché sont
décrites ci-dessous.
BÂTON
On trouve des bâtons partout dans Terrinoth, en raison de leur prix
défiant toute concurrence (et du fait qu’on les fabrique facilement à
partir de simples branches). On s’en sert pour marcher ou aiguillonner
les troupeaux. Ceux qui manient bien le bâton peuvent également
l’utiliser pour se défendre contrela plupart des redoutables créatures
qui rôdent dans la nature sauvage.
BOUCLIER
La forme et la conception des boucliers varient
énormément d’une culture à une autre. Les guer-
riers d’Al-Kalim préfèrent les boucliers légers et
ronds en bronze, tandis que les barbares d’Isheim
utilisent des boucliers en bois recouverts de peau
durcie. Les chevaliers de Terrinoth se servent évi-
demment de boucliers en fer ou en acier, souvent
décorés du blason de leur baronnie. Quels que
soient la forme ou le matériau utilisé, les bou-
cliers permettent de dévier les flèches et les lames,
et peuvent éventuellement servir à frapper un
ennemi de plein fouet.
Les grands boucliers, plus solides et plus lourds
que les boucliers classiques, offrent une meilleure
protection. Les Nains des Monts Dunwarr n’uti-
lisent que ce type de boucliers (au point de se moquer
de tous ceux qui sont plus petits), et les baronnies qui
peuvent se le permettre en équipent souvent leurs compa-
gnies de lanciers.
Les boucliers remparts sont énormes : ils doivent être assez grands
pour protéger un chevalier de l’épaule au tibia et sont presque aussi
larges que hauts. Particulièrement efficaces pour protéger contre les
tirs de gros projectiles, ils permettent aux combattants de se rappro-
cher des archers sans se faire cribler de flèches.
92
CESTE
On prétend que les cestes proviennent des fosses de combat des Torue
Albes, où les combattants s’affrontent encore sans raison pour le plus
grand plaisir de spectateurs ivres. Bien que ces armes ne vaillent pas
une belle et bonne épée, certains aventuriers préfèrent ces gants en
cuir épais aux jointures bardées de fer. Un bon coup de poing peut
alors casser des os et mettre à mal un adversaire, et porter une paire
de cestes attire beaucoup moins l’attention que tenir une lame nue.
DAGUE
Presque tout le monde à Terrinoth porte un couteau à sa ceinture,
car c’est un outil utile pour bon nombre de tâches quotidiennes. Les
dagues, en revanche, sont conçues uniquement pour tuer. Leurs lames
effilées et tranchantes comme un rasoir sont généralement parfaite-
ment équilibrées pour que l’arme, jetée d’un simple coup de poignet,
puisse facilement se planter dans une gorge imprudente.
Votre personnage peut utiliser une dague pour poignarder ou lacé-
rer un adversaire en utilisant le profil du Tableau 2-5 : Armes de
Corps à corps, page 94 ; il peut également la lancer en utilisant le
profil suivant : (Distance ; Dégâts +2 ; Critique 3 ; Portée [courte] ;
Précis 1, Munitions limitées 1).
ÉPÉE
Dans de nombreuses cultures, l’épée symbolise à la fois la noblesse
et les prouesses martiales. Elle ne peut être utilisée ni comme outil,
contrairement à la hache et au fléau, ni comme arme de chasse,
contrairement à l’arc ou à la lance. Une épée est une arme, purement
et simplement ; ceux qui la portent à leur côté annoncent fièrement
au monde qu’ils sont des guerriers.
La forme des épées varie énormément selon les cultures. Les for-
gerons d’Al-Kalim fabriquent des cimeterres aux lames
minces et incurvées, qui présentent des simili-
tudes avec les sabres des Elfes Latari. Les guer-
riers de certains royaumes et des tribus de Zanaga
brandissent des épées dont la lame évoque une
faucille, tandis que les nobles de Lorimor pré-
fèrent les épées courtes à lame large. Les épées des
Daqan, à lame droite à double tranchant, toujours
bien équilibrées, sont souvent forgées en acier.
Les épées ont joué un rôle emblématique dans
l’histoire de Terrinoth et des baronnies des Daqan.
La légende veut que le premier royaume humain
ait été fondé grâce à de belles et bonnes épées
en acier qui aurait donné son nom à ses terres –
« Terrinoth » signifiant « Terre d’Acier ».
ÉPÉE À DEUX MAINS
Les épées à deux mains font partie des armes les plus
difficiles à manier efficacement, on les voit donc géné-
ralement entre les mains de chevaliers ou d’autres guerriers
grandement expérimentés. À la fois solides et flexibles, leurs lon-
gues lames sont équilibrées avec précision. Seul un contrôle précis du
pommeau pour envoyer la pointe dans un défaut de l’armure d’un
adversaire permet de combattre avec efficacité quand on manie une
épée à deux mains. Sans cela, le combattant ne fera que balancer mala-
droitement son épée et l’adversaire bloquera ou esquivera facilement
ses coups.
 Les nobles et les guerriers des baronnies préfèrent les épées à deux
mains aux lames droites munies de quillons. La plupart des épées à
deux mains de Terrinoth sont conçues sur ce modèle, mais les Elfes
Latari en fabriquent également dotées de longues poignées et de lames
courbes encore plus longues – parfaites pour entailler et pourfendre
à grands coups.
FLÉAU
Autre outil agricole qui peut faire office d’arme,
le fléau est constitué d’un long manche qui
permet de le tenir à deux mains et d’une
chaîne, ou d’une lanière en cuir,
lestée d’une boule. Bien que
les coups portés soient dou-
loureux, le fléau reste tout
de même un outil pour
battre le grain plutôt qu’une
arme. Pourtant, les paysans
de Terrinoth ne le dédaignent
pas quand ils doivent se battre et
n’ont rien d’autre à portée de main.
HACHE
Bien qu’à l’origine elle ne soit qu’un simple outil de bûche-
ron, maniée par des mains habiles (ou par quelqu’un de
désespéré), une hache peut devenir une arme meurtrière.
La lourde lame au tranchant recourbé mord cruellement le
bois aussi bien que les chairs ; de nombreuses cultures en ont
conçu à des fins uniquement guerrières. Les Orcs des Plaines
Brisées préfèrent les haches avec une tête en pierre dont les
coups pulvérisent les membres des victimes, tandis que les
Nains des Monts Dunwarr forgent des haches à double tran-
chant aux longues barbes qui entaillent profondément les chairs.
HACHE À DEUX MAINS
Cette hache est simplement la version à deux mains de la hache clas-
sique, avec un manche plus long et une tête plus grosse. Seul un solide
guerrier peut la manier au combat ; un simple coup permet de briser un
bouclier ou de déchirer le cuir d’une armure. Certains Nains préfèrent
ces armes à toutes autres et prétendent qu’elles sont l’héritage de leurs
ancêtres, qui les auraient conçues pour entailler la peau des Dragons.
HALLEBARDE
On obtient une hallebarde en fixant la tête d’une hache (ou un long fer
de lance) sur la hampe d’une lance. La polyvalence de cette arme la rend
très populaire dans les garnisons de certaines Cités Libres. Les soldats
peuvent mettre à profit la longueur des hallebardes pour résister à un
assaut de cavalerie, tout en gardant la possibilité de taillader les armures
avec leur lame de hache. La plupart des baronnies préfèrent cependant
équiper leurs armées de simples lances, bien moins onéreuses.
KATAR
La plupart des érudits s’accordent à dire que les katars ne sont pas
originaires de Terrinoth. L’hypothèse la plus plausible est que ces poi-
gnards proviennent des jungles de Zanaga ou du lointain Al-Kalim,
puis qu’ils soient devenus populaires parmi les voyous des ruelles
d’Orris, de Rivegarde et de Nerekhall. La lame large et acérée et la
prise horizontale sur la poignée permettent aux coupe-jarrets d’expé-
dier leurs victimes en quelques coups discrets.
LANCE
Les lances sont parfaites pour se battre en formation serrée, quand les
soldats ne peuvent pas jouer de leurs épées ou de leurs haches sans ris-
quer de blesser l’un de leurs compagnons. Les fantassins des baronnies
s’entraînent donc souvent à se battre avec lance et bouclier et à former
un mur défensif hérissé de pointes de lance.
ÉPÉE ET BOUCLIER
C
ombattre avec un bouclier et une arme de Corps
à corps à une main est une technique de combat
classique et très efficace. Bien que Genesys classe les bou-
cliers comme des armes, leur utilisation est principale-
ment défensive, ce qui se traduit par les attributs Parade
et Déflexion, qui représentent l’aptitude d’un bouclier à la
fois à bloquer les coups au corps à corps et les flèches ou
autres projectiles. Parade et Déflexion sont des attributs
passifs qui s’appliquent à chaque fois qu’un combattant se
protège avec un bouclier (ou tout autre objet doté de ces
attributs), et pas seulement lorsqu’il utilise le bouclier pour
attaquer. La plupart du temps, un personnage brandit pro-
bablement un bouclier pour bénéficier de ces attributs
passifs. Cette utilisation n’affecte pas les tests de combat
du personnage, à moins que le bouclier ne soit doté de
l’attribut Encombrant (il est indiqué dans la description
que cet attribut s’applique chaque fois que le personnage
utilise l’objet).
Un bouclier, donc, peut également être utilisé de manière
offensive, soit seul, soit associé à une autre arme. Dans
le premier cas, le personnage suit les règles normales des
attaques de Corps à corps ; dans le second cas, il suit les
règles de combat à deux armes, page 108 du livre de base
Genesys. S’il le souhaite, le joueur peut désigner le bou-
clier comme arme principale pour une attaque à deux
armes. Dans tous les cas, le personnage applique tous les
attributs passifs du bouclier, y compris Parade et Déflexion,
et Imprécis. En outre, le personnage peut activer les attri-
buts déclenchés d’un bouclier, tels que Renversement, s’il
sert à frapper.
Les lances standard sont trop lourdes pour être maniées d’une seule
main ou pour être jetées. On a donc créé des lances « légères » (parfois
appelées javelots) qui peuvent être maniées d’une seule main, dont
l’épais fût en bois d’un mètre vingt de long est surmonté d’un lourd
fer de lance. Elles sont suffisamment légères pour être lancées sur de
courtes distances ; les Orcs des Plaines Brisées jettent souvent ce type
de lances pour tuer leurs proies quand ils chassent.
Votre personnage peut utiliser une lance légère pour piquer ou
tuer un adversaire en utilisant le profil du Tableau 2-5: Armes de
Corps à corps ; il peut également la lancer en utilisant le profil sui-
vant : (Distance ; Dégâts +2 ; Critique 4 ; Portée [courte] ; Précis 1,
Munitions limitées 1).
MARTEAU DE GUERRE
On raconte que les Nains de Forge sont les premiers à avoir utilisé
les marteaux comme armes de guerre quand ils s’emparèrent de leurs
outils pour chasser le Seigneur Dragon Avox. Bien que cela ne soit très
probablement qu’une légende, de nombreux Nains (de Forge comme
des Monts Dunwarr) manient ces armes énormes lors des batailles. Les
bons marteaux de guerre sont équilibrés spécifiquement pour le com-
bat ; même alors, seuls les guerriers les plus forts peuvent les manier.
Le coup d’un marteau de guerre résonne comme le tonnerre et laisse
n’importe quel ennemi, s’il a la chance de survivre, complètement
sonné et chancelant.
93
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
tunique volumineuse, mais absorbe ou dévie mieux les coups que du
cuir bouilli. Il est possible de broder ou de décorer le tissu, ce qui flatte
la vanité de bon nombre de nobles (et de pas mal de scélérats aussi).
COTTE DE MAILLES
Aussi lourde que fiable, composée de milliers de petits anneaux reliés
entre eux, la cotte de mailles offre protection et souplesse et constitue
un moyen fiable de se prémunir contre les armes tranchantes et perfo-
rantes. Certains aventuriers portent les cottes de mailles transmises par
leurs aïeux ; d’autres se servent toujours de celle qu’ils ont volée dans la
première tombe qu’ils ont explorée. Le seul inconvénient est qu’il faut
énormément de temps pour forger et relier les nombreux anneaux, ce
qui entraîne un coût important.
La cotte de mailles est bruyante et entrave les mouvements, votre
personnage doit donc ajouter 󲊸 aux tests de Discrétion qu’il effectue
tant qu’il en porte une.
ARTISANAT
L a qualité des matériaux et la compétence de l’artisan qui les
travaille contribuent grandement à l’efficacité et à la durabilité
d’un objet. La plupart des armes et armures n’ont rien de particu-
lièrement remarquable. Dans ce livre, nous avons présenté des pro-
fils d’objets standard, fabriqués par des artisans compétents avec le
matériau le plus courant à Terrinoth, l’acier. Cette section indique
également les règles pour représenter des objets d’une facture vraiment
exceptionnelle, fabriqués avec des matériaux rares ou aux propriétés
remarquables.
Un objet ne peut relever que d’un seul type d’artisanat, déterminé
par le MJ quand l’article est acheté ou obtenu. Le type d’artisanat ne
peut jamais être modifié ultérieurement.
ARTISANAT ANCIEN
Les armes et armures anciennes remontent au temps des Rois
Penacor, époque où la magie était plus puissante et plus répandue
dans ce monde. Elles sont donc remarquablement solides et résis-
tantes à la corrosion ; le tranchant des armes reste intact malgré un
usage intensif.
Armure : Augmente l’encaissement et la défense de l’armure de 1.
L’armure gagne l’attribut Résistance Accrue. Réduit le nombre
d’emplacements de l’armure de 1 (jusqu’à un minimum de 0).
Arme : Augmente les dégâts de l’arme de 1 et réduit son niveau de
critique de 1. L’arme gagne l’attribut Résistance Accrue. Réduit le
nombre d’emplacements de l’arme de 1 (jusqu’à un minimum de 0).
Prix : Coût × 20.
Rareté : 10.
ARTISANAT ELFIQUE
L’artisanat elfique utilise du bois récolté dans les profondeurs de la
forêt de l’Aymhelin, incrusté de pierre de lune irisée et entremêlé
d’argent scintillant. Les objets qui en résultent sont aussi magnifiques
que légers et résistants ; on dit des lames fabriquées à partir de pierre
de lune qu’elles ont un tranchant aussi vif que la lumière des étoiles
des nuits d’hiver les plus froides.
GAMBISON
Un gambison se compose de plusieurs couches épaisses et matelassées
de tissu : il ressemble plus à un manteau d’hiver qu’à une pièce d’ar-
mure. Cependant, le rembourrage épais permet d’amortir les coups et
offre une certaine protection. Les gambisons sont plus courants dans
les royaumes nordiques d’Isheim et dans les baronnies des Daqan les
plus pauvres, où les guerriers ne peuvent se payer mieux.
ROBE ÉPAISSE
Une épaisse robe en lainage ou en fourrure sert surtout à garder
quelqu’un au chaud plutôt qu’à le protéger d’une épée ou d’une lance.
Cependant, d’amples vêtements peuvent masquer la silhouette d’une
personne et la rendre difficile à toucher ; l’arme d’un attaquant peut
même se prendre dans les plis volumineux.
Armure : Réduit la valeur d’encombrement de l’armure de 2, jusqu’à
un minimum de 0. En outre, votre personnage supprime 󲊸 des tests
de Discrétion qu’il effectue.
Arme : Réduit les dégâts de l’arme de 1 et son niveau de critique de 1,
jusqu’à un minimum de 1.
Prix : Coût × 2.
Rareté : +3.
ARTISANAT NAIN
Les forgerons nains sont des maîtres de la métallurgie. Les alliages
qu’ils créent et utilisent pour forger des armures et des armes sont bien
meilleurs que le simple acier. La qualité incomparable des ouvrages
issus des forges naines est plus due à la compétence de ces artisans qu’à
une quelconque magie, bien que les résultats semblent miraculeux aux
forgerons de moindre talent.
Armure : Augmente la valeur d’encombrement de l’armure de 1 et
ajoute 1 emplacement.
Arme : Augmente les dégâts de l’arme de 1 et sa valeur d’encombre-
ment de 1.
Prix : Coût × 2.
Rareté : +2.
ARTISANAT DE L'ACIER
L’acier est le matériau préféré des forgerons de Terrinoth ; les guerriers
et les nobles qui peuvent se le permettre s’en équipent toujours, et
fournissent des pièces d’armure, voire des armures complètes, en acier
à leurs soldats. Les profils d’armes et d’armures standard de ce chapitre
sont ceux d’objets en acier ;l’artisanat de l’acier ne leur confère aucun
effet supplémentaire.
Prix : Inchangé.
Rareté : Inchangée.
97
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
ARTISANAT DU FER
Le fer n’est pas aussi solide que l’acier, il est plus difficile à travailler,
mais faire fondre ce métal est à la portée de n’importe quel forgeron.
En outre, un objet en fer sera toujours moins cher que son équivalent
en acier. De nombreux aventuriers, miliciens et soldats au service de
la petite noblesse doivent se contenter d’armes et d’armures de fer. On
prétend que les armes en fer ont des effets surprenants sur certains
ennemis surnaturels tels que les Dimora et les Fées.
ACCESSOIRES MAGIQUES
U n personnage doté d’une compétence magique peut utiliser cer-
tains accessoires pour améliorer ses tests dans cette compétence,
comme décrit dans la Partie III, Chapitre 2 du livre de base Genesys
(page 218).
BAGUETTE MAGIQUE
Les baguettes peuvent être fabriquées à partir de tout ce qui possède une
quelconque trace de magie, mais on utilise le plus souvent des petits bâtons
qui se glissent facilement dans une poche ou un sac. Les sorciers puissants
et expérimentés se fabriquent généralement plusieurs baguettes, chacune
étant dédiée à un type de sortilège différent. Ainsi, les baguettes sont sou-
vent connues pour leurs effets spécifiques et désignées par des noms tels
que « baguette de feu », « baguette d’affaiblissement » ou « baguette de
restauration ». Même si les sorciers en fabriquent plusieurs pendant leur
carrière, les baguettes ne sont en aucun cas des objets communs.
Quand votre personnage fabrique ou obtient une baguette, le MJ
détermine un effet qu’elle lui permet d’ajouter à n’importe quel sort
approprié sans en augmenter la difficulté. L’effet choisi par le MJ ne
devrait normalement (sans baguette) augmenter la difficulté d’un sort
que de 1. Les sorts d’attaque lancés par votre personnage augmentent
leurs dégâts de base de 3.
BÂTON MAGIQUE
Les bâtons sont l’objet magique préféré de la plupart des mages de
Terrinoth. Qu’il soit sculpté dans du bois ou de l’os, ou même forgé,
un bâton est synonyme de longs voyages. Ce lien aide les magiciens à
augmenter la portée de leurs sorts. Un bâton magique sert également de
bâton de marche pour les nombreux mages âgés qui sillonnent les routes.
Quand votre personnage jette un sort tant qu’il utilise un bâton
magique, le premier effet Portée ajouté au sort n’en augmente pas la
difficulté. En outre, les sorts d’Attaque lancés par votre personnage
augmentent leurs dégâts de base de 4.
GRIMOIRE MAGIQUE
À moins de parvenir à s’introduire dans l’une des bibliothèques
de Havregris, les aventuriers trouveront la plupart des grimoires
magiques dans les profondeurs des tombes de lanceurs de sorts
oubliés depuis longtemps. Un grimoire n’est pas simplement un
manuel d’instructions sur la façon de lancer des sorts : l’acte même
de coucher les sorts sur une page peut créer une petite résonance
avec les énergies du monde, et si le lecteur arrive à lire et suivre
les instructions avec exactitude, il peut faire appel à cette résonance
pour améliorer ses propres sorts.
98
Armure : Augmente la valeur d’encombrement de l’armure de 2.
En outre, votre personnage ajoute 󲊸 aux tests d’Athlétisme, de
Coordination, d’Équitation et de Discrétion qu’il effectue tant qu’il
porte cette armure.
Arme : Augmente le niveau de critique de l’arme de 1.
Prix : Coût × ½.
Rareté : –1.
Quand votre personnage crée ou obtient un grimoire, le MJ
détermine jusqu’à deux effets que le grimoire lui permet d’ajouter à
n’importe quel sort adéquat sans en augmenter la difficulté. Les effets
choisis par le MJ ne devraient normalement (sans le grimoire) aug-
menter la difficulté d’un sort que de 3 au total.
ICÔNE SAINTE
Les prêtres et les templiers portent ces objets pour proclamer leur
foi, les icônes saintes sont donc généralement ornées de l’icono-
graphie d’une divinité particulière. Dans la Terre d’Acier, on croise
souvent des prêtres portant des pendentifs représentant une main
qui tient une flamme, le symbole du dieu Kellos. De nombreux
prêtres des Elfes Latari arborent des icônes représentant une étoile
d’argent brillant et froid qui rappelle leurs origines perdues. Certains
Nains des Monts Dunwarr décorent leurs boucliers d’un emblème
ou d’une icône, ou bien gravent sur leur armure des runes ou le
visage d’une Naine. Ils traitent ces icônes avec une révérence quasi
religieuse, mais toute tentative de poser des questions sur leur signi-
fication se solde par un regard froid assorti de la suggestion d’aller
déranger quelqu’un d’autre.
Quand votre personnage jette un sort tant qu’il utilise une icône
sacrée, l’ajout de n’importe quel effet Divin Uniquement ajoute 1 dé
de difficulté de moins au sort qu’il ne le ferait normalement. En outre,
quand votre personnage lance un sort de Guérison, le nombre de bles-
sures soignées augmente de 2.
INSTRUMENT DE MUSIQUE
Les bardes font-ils véritablement usage de magie ou ne sont-ils qu’un
ramassis de charlatans ? La question déchire les érudits de l’Université
de Havregris et la vérité se trouve certainement quelque part entre
les deux. Il semble que les bardes utilisent la magie de manière
entièrement instinctive et que leur charisme entre fortement en
ligne de compte. Cela signifie qu’ils ne fabriquent pas d’accessoires
magiques comme les autres lanceurs de sorts, mais qu’avec le temps,
ils imprègnent de puissance leurs instruments.
Certains instruments, transmis de génération en génération, sont
devenus des reliques magiques à part entière ; et beaucoup d’autres
sont vendus comme des reliques magiques quand leurs propriétaires
ont besoin d’argent suite à une folle nuit d’ivresse.
Quand votre personnage lance un sort en utilisant la compétence
Virtuosité tant qu’il joue d’un instrument de musique, ajouter l’effet
Cible Supplémentaire n’augmente pas sa difficulté.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
MATÉRIEL ET SERVICES
C ette section présente les objets qui peuvent être utiles aux per-
sonnages au cours de leurs voyages à Mennara.
MATÉRIEL
Bien que les aventuriers aient des origines et des motivations très
diverses, ils ont tous plus ou moins besoin du même matériel pour
accomplir leurs quêtes et passer de ruine en ruine à la recherche de
trésors perdus.
BELLE CAPE
Qu’elle soit coupée dans de la soie doublée aux couleurs chatoyantes
ou dans un riche velours garni de fourrure, rien de tel qu’une belle
cape pour étaler outrageusement sa richesse et sa puissance (ou jeter
suffisamment de poudre aux yeux).
Quand il porte une belle cape, votre personnage retire 󲊸 de n’im-
porte quel test de Charme, Tromperie ou Commandement qu’il effec-
tue. Tant qu’elle est revêtue, une cape a un encombrement de 0.
CARQUOIS SUPPLÉMENTAIRE
Qu’il s’agisse de flèches ou carreaux supplémentaires enveloppés
dans un morceau de cuir ou bien de projectiles pour d’autres armes
comme une sarbacane, tout cela est regroupé sous le terme « carquois
supplémentaire ».
Si votre personnage dispose d’un carquois supplémentaire, il peut
dépenser une manœuvre pour reconstituer sa réserve de munitions
pour son arme à Distance quand elle subit un résultat 󲊲 « À court
de munitions ». Notez que cela ne recharge pas les armes dotées de
l’attribut Munitions limitées, car elles ne tombent pas réellement à
court de munitions.
CHARIOT
Les chariots coûtent souvent si cher que plusieurs fermiers en
achètent un en commun. Un chariot de fermier est généralement
assez simple, construit en bois brut, contrairement à ceux des mar-
chands qui sont en bois verni, ou ceux des Gnomes Vagabonds,
peints de couleurs vives.
Un chariot peut transporter des personnages et du matériel pour
un encombrement total de 50. Il est pourvu d’au moins deux roues
et peut se déplacer à une vitesse modérée lorsqu’il est tracté par une
bête de somme.
CORDE
Aucun soldat, marin, mineur, marchand ou voyageur qui se respecte
n’oserait partir sans une bonne grosse corde, et cela va sans dire pour
les aventuriers également. Les plus riches d’entre eux possèdent parfois
une corde en fils de soie, mais celles en chanvre font très bien l’affaire.
Une corde a une longueur allant environ jusqu’à une portée
moyenne, mais il est possible de s’en procurer de différentes lon-
gueurs, selon ce qu’accepte le MJ.
COUCHE
Que ce soit pour camper sous les frondaisons de l’Aymhelin, dormir
sur une dune des Scindeterres ou au milieu des décombres d’un châ-
teau, une bonne couche sera peut-être la seule chose dont rêveront
100
les personnages pour passer une bonne nuit de sommeil réparateur.
Une couche se compose généralement d’une épaisse couverture rem-
bourrée qui fait office de matelas et d’une autre couverture pour tenir
chaud au dormeur. Les voyageurs les plus riches utilisent parfois des
couvertures traitées avec une résine alchimique qui résiste à la pluie
et à l’humidité.
FLASQUE
Une flasque, en métal ou en terre cuite, est l’objet idéal pour trans-
porter de l’eau pendant un long voyage. Évidemment, pour un Nain,
l’eau n’est pas un liquide digne d’une bonne flasque.
La plupart des flasques ont une contenance d’environ 250 ml. Le
bouchon, généralement en liège, permet de la fermer de façon étanche.
GOURDE EN PEAU
Généralement faites de vessies de mouton ou de bœuf, les gourdes
en peau sont un moyen simple et efficace de transporter toutes
sortes de liquides, que ce soit l’eau fraîche d’un puits ou du vin
pour égayer le voyage. Certains Gnomes ont tenté de fabriquer des
gourdes en enduisant de la toile avec des résines alchimiques, mais
la plupart des gens se plaignent du goût amer qu’elles donnent aux
boissons et insistent sur le fait qu’elles ne remplaceront jamais la
version en peau.
Une gourde en peau peut transporter suffisamment de liquide pour
étancher la soif de deux personnes par jour. Lorsqu’elle est pleine, son
encombrement augmente à 2.
HERBES MÉDICINALES
La plupart des habitants des Cités Libres présument que les forêts de
Terrinoth regorgent de Kobolds et d’araignées géantes, mais ceux qui
vivent au-delà des murs de la civilisation savent bien que des mer-
veilles se cachent parmi les arbres, entre autres des herbes qui, une
fois mélangées selon une recette découverte par les Elfes, écrasées et
badigeonnées sur une plaie ou jetées dans de l’eau bouillante pour for-
mer une vapeur aromatique, auraient la capacité presque surnaturelle
d’aider à se remettre de graves blessures.
Quand il effectue un test de Médecine, votre personnage peut uti-
liser les herbes médicinales pour ajouter 󲊳 󲊴 au résultat. Les herbes
sont épuisées une fois utilisées.
LANTERNE
Une lanterne en fer est plus facile à manipuler qu’une torche et peut
s’accrocher à une ceinture ou à un bouclier. Protégée dans sa cage de
métal et de verre épais, la flamme se trouve en relative sûreté, même
si la lanterne est ballottée. Une lanterne peut s’avérer vitale dans les
sombres cavernes qui creusent la roche de Mennara.
Une lanterne allumée fournit de la lumière et retire le 󲊸 ajouté
aux tests à cause de l’obscurité. (S’il est important de déterminer la
distance éclairée : une lanterne éclaire à portée courte.)
MATÉRIEL D'ESCALADE
Cordes, pitons et piolets rendent l’escalade d’un mur ou d’une falaise
simplement difficile, plutôt que presque impossible (et éventuelle-
ment mortelle).
Quand votre personnage utilise du matériel d’escalade, il retire 󲊸 de
tous les tests d’Athlétisme qu’il effectue pour escalader quelque chose.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
de brouillard épais et étouffant. Le brouillard n’est pas nocif (à moins
d’être associé à du poison, qui s’achète séparément), mais il est impos-
sible de voir au travers et il est très désagréable d’être pris à l’intérieur.
Au prix d’une manœuvre, un personnage peut lancer un flacon de
fumigène sur quelque chose ou quelqu’un situé à portée courte. Lors
de l’impact, le flacon se brise pour créer un écran de fumée épaisse,
assez grand pour englober un personnage et les personnages au contact
de la cible. L’écran de fumée fournit un camouflage d’une valeur de +2
dés (voir la section Camouflage, page 110 du livre de base Genesys).
POISON
Sur Mennara, chaque culture dispose de ses propres poisons, que ce
soit des extraits de plantes communes ou des potions alchimiques
artistement élaborées. La plupart des poisons sont faciles à obtenir, et
encore plus à utiliser.
Votre personnage peut introduire du poison dans la nourriture ou
la boisson d’une cible, qui en subira les effets à l’ingestion. Le poi-
son peut également être placé dans des bombes fumigènes ou d’autres
objets, au choix du MJ. Au prix d’une manœuvre, il peut aussi être
étalé sur la pointe ou le tranchant d’une arme, comme un poignard ou
une flèche ; il est alors introduit dans le sang de la cible. Si le poison
est utilisé sur une arme, le premier coup réussi qui inflige au moins
1 blessure à la cible inflige les effets du poison. Une fois que le poison
a affecté une cible, il est épuisé et une autre dose doit être utilisée.
Les personnages affectés par du poison ou se trouvant dans un nuage
de poison doivent effectuer un test de Résistance Difficile (󲊷 󲊷 󲊷 󲊷)
au prix d’une broutille hors tour ou subir 4 blessures (non réduites par
l’encaissement) plus 1 point de stress par 󲊱. Le joueur ou le MJ peut
dépenser 󲊲 lors du test pour infliger une blessure critique ou forcer
APOTHICAIRES
Q u’ils aient appris leur art en étudiant les écrits
dans une école ou en pratiquant les méthodes plus
empiriques nées de différentes traditions, les apothicaires
connaissent les plantes, savent les récolter et les combiner
pour créer des potions aux effets magiques. Leur vie est
régie par les rythmes de la nature, les Lais du Premier, que
les Humains ne peuvent percevoir mais que les Elfes dis-
cernent et utilisent. Les plantes absorbent et conservent
elles aussi ces énergies.
L’art de l’apothicaire est similaire à celui de ceux qui
fabriquent des poisons ou des toniques ordinaires.
Cependant, contrairement aux empoisonneurs, les apo-
thicaires n’utilisent pas que les propriétés physiques des
plantes récoltées, ils équilibrent aussi leurs composantes
magiques. Ils sélectionnent et mesurent avec une infinie
précision les ingrédients de leurs potions, qu’ils passent des
heures à faire infuser ou à extraire grâce à des procédés
alchimiques. Ils obtiennent finalement des potions qui,
une fois ingérées, ont des effets semblables à ceux des sorts,
mais qui ne peuvent affecter que celui qui les boit.
Les apothicaires les plus talentueux ont une connaissance
plus poussée des pratiques alchimiques, et savent par
la cible à effectuer à nouveau le test au début de son prochain tour, le
poison continuant à ravager son corps pendant ce temps.
POTION D'INVISIBILITÉ
Les potions comme la légendaire potion d’invisibilité sont à la
frontière entre la démarche scientifique des alchimistes et la véritable
magie. Les ingrédients qui les composent (des fils de soie tranchants
comme des rasoirs sécrétés par des araignées des ténèbres, cette herbe
cristalline appelée avathian et un soupçon d’élémentaire d’air) ont
d’indéniables propriétés magiques, même si la façon de les combiner
ne l’est pas. Dans tous les cas, consommer l’une de ces potions rend
celui qui la boit complètement invisible à l’œil nu.
Quand votre personnage absorbe une potion d’invisibilité, il
devient invisible pendant 3 rounds. Pendant ce laps de temps, il ne
peut pas être vu, il n’a aucun reflet et ne projette aucune ombre. En
revanche, il fait du bruit, dégage des odeurs… Comme d’habitude, il
a une présence physique. Un personnage invisible peut également être
détecté par des moyens magiques. Il bénéficie d’un camouflage
d’une valeur de +4 dés (voir la section Camouflage, page 110
du livre de base Genesys).
POTION DE PUISSANCE
Les potions de puissance sont similaires aux potions
de vitesse (voir page 104), mais elles augmentent spé-
cifiquement la force du haut du corps et des abdo-
minaux. Ceux qui consomment une potion de
puissance sont plus à même de frapper et de blo-
quer les coups. Des exploits nécessitant une force
extraordinaire, comme soulever et déplacer des
objets très lourds, sont également facilités par
l’utilisation d’une potion de puissance.
exemple préparer des flacons contenant des liquides qui
émettent une fumée épaisse ou un gaz toxique lorsqu’ils sont
mélangés et exposés à l’air. Ce type d’utilisation de l’alchi-
mie est souvent l’apanage des apothicaires ayant appris leur
art dans une université ; les élixirs, eux, sont plus typiques de
ceux qui ont été apprentis chez un apothicaire de campagne,
bien que les deux techniques d’enseignement se recoupent.
Les élixirs préparés à partir d’ingrédients frais sont plus
efficaces. À Terrinoth, cela signifie qu’il vaut mieux les
consommer entre les équinoxes de printemps et d’au-
tomne, quand la végétation est abondante et diversifiée.
Pendant les mois d’hiver, il est toujours possible de fabri-
quer des élixirs à partir d’ingrédients séchés ou marinés,
mais ils perdent en efficacité.
La plupart des magiciens méprisent les apothicaires, car
leur art implique de passer de longues heures penché
sur des chaudrons et des alambics pour produire des
sorts moins puissants que ceux créés grâce à la sorcelle-
rie. Cependant, quelques magiciens plus éclairés ont
développé un certain respect pour l’art de fabriquer des
potions, après avoir constaté qu’il s’agit d’une forme de
magie efficace et qui présente peu de risque.
103
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
Utilisation : Cette amélioration peut être apportée à n’importe quelle
arme à Distance.
Modificateurs : L’arme gagne l’attribut Souffle 5.
Emplacements requis : 1.
RUNE DES LAMES
Une rune des lames est presque toujours associée à une épée ou un
couteau. C’est un éclat runique simple et efficace qui augmente la
puissance d’une arme blanche en aiguisant magiquement son tran-
chant. Comme les runes de rayon de soleil, les runes de lames sont très
demandées parmi les membres de l’armée et peuvent être réquisition-
nées auprès des particuliers pour soutenir l’effort de guerre. Certains
Dragons et autres créatures intelligentes utilisent ces runes pour aigui-
ser leurs griffes ; elles ne peuvent être utilisées pour affûter du bois.
Utilisation : Cette amélioration peut être apportée à n’importe quelle
arme pourvue d’une lame.
Modificateurs : Quand cette arme inflige une blessure critique, elle
inflige la blessure critique Hémorragie au lieu d’une blessure tirée au dé.
Emplacements requis : 1.
RUNE FATALE
Une épée ou un couteau portant cette inscription runique trouve tou-
jours le point vital où frapper, ses coups sont toujours fatals. Quand
l’ennemi s’écroule, la rune émet une lueur cramoisie.
Utilisation : Cette amélioration peut être apportée à n’importe quelle
arme de Corps à corps pourvue d’une lame.
Modificateurs : L’arme gagne l’attribut Sanguinaire 5.
Emplacements requis : 2.
TONNERRE RUNIQUE
Lorsque l’arme dotée de cette rune frappe un ennemi, l’inscription
gravée émet une lumière blanche et aveuglante semblable à un éclair.
Le fracas du tonnerre arrive une demi-seconde plus tard, sonnant
l’ennemi comme s’il souffrait d’une commotion.
Utilisation : Cette amélioration peut être apportée à n’importe
quelle arme.
Modificateurs : L’arme gagne l’attribut Choc 1.
Emplacements requis : 2.
AMÉLIORATIONS
D'ARMURES
Les nouvelles améliorations d’armures présentées ci-après sont dis-
ponibles pour les personnages de Mennara. Ceux-ci peuvent éga-
lement utiliser les améliorations du livre de base Genesys qui sont
appropriées. Toutes les améliorations adaptées sont résumées dans
le Tableau 2-14 : Améliorations d’armures ci-après. Pour plus
de détails sur les améliorations dans le livre de base Genesys, voir
Améliorations d’armures page 209.
DORÉ
Bien que cela soit d’une inutilité totale, de nombreux nobles aiment
posséder une armure dorée à la feuille. Cela leur confère une certaine
prestance mais attire tous les bandits à la ronde comme un pot de
confiture attire les mouches.
Utilisation : Cette amélioration peut être apportée à n’importe
quelle armure.
Modificateurs : Tant qu’il porte cette armure, votre personnage
ajoute 󲊸 aux tests de Charme, Négociation et Commandement.
Emplacements requis : 0.
ARTISANS
L es artisans sont des serviteurs discrets de la juste cause
qu’est la lutte contre les ténèbres grandissantes ; leur
travail quotidien est une contribution essentielle dans ce
combat. Les artisans s’occupent de bien des tâches triviales,
indispensables à la vie à Terrinoth. La plupart des forgerons
passent leur temps à forger et réparer les fers à cheval et
autres charrues et non à fabriquer des armes, bien qu’ils
en aient toujours une à vendre à un aventurier de passage.
De même, les drapiers, cordonniers, chapeliers, tailleurs
de pierre, armuriers et alchimistes qui exercent leur métier
dans les cités comme dans les villages du continent ne font
généralement que répondre aux demandes du quotidien
des habitants et créent rarement des produits de luxe.
L’artisanat est souvent un héritage familial : les parents
transmettent leurs connaissances à leurs enfants dans
l’espoir qu’ils perpétueront leur activité. Il est assez
courant de voir deux ou trois générations d’une famille
entière travailler ensemble, dans un même corps de
métier, pour produire des articles vendus sur les grands
marchés des cités de Terrinoth. L’accès à la scolarité est
limité à la noblesse et à ceux qui ont la chance d’être
bénis et d’avoir reçu une affinité pour la magie à la nais-
sance. De fait, les familles d’artisans sont les gardiennes
de connaissances et de compétences vitales ; à certains
endroits, un artisan est parfois le seul à pratiquer son
art à des kilomètres à la ronde. À Tamalir et à Thelgrim,
de puissantes guildes contrôlent la quantité et la qua-
lité des biens produits, ainsi que la transmission des
compétences spécialisées d’une génération à l’autre. Les
guildes sont souvent des acteurs politiques majeurs dans
les grandes cités, leurs voix ont autant de poids que celle
d’un noble sur la question de l’artisanat.
Hors des guildes des grandes cités, cependant, les artisans
sont libres d’aller à leur guise pour rechercher du travail et
des clients. Dans les Torue Albes, les charpentiers viennent
du monde entier pour apporter leurs compétences aux
célèbres constructeurs navals de Tarianor ; les architectes
et les maçons affluent vers Lorimor pour percer les secrets
de ses étonnants édifices. Les artisans de Terrinoth forment
un groupe hétéroclite où se mélangent des individus de
toutes origines et venus de tous horizons. Ce sont parfois
d’anciens aventuriers qui ont déposé les armes pour deve-
nir fabricants d’épées, mettant à profit de nouvelles tech-
niques acquises au cours de leurs périples. Certains artisans
voyagent à travers les baronnies et acceptent de former des
apprentis au fil de leurs pérégrinations.
107
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
BÂTON DE LUMIÈRE
Les prêtres de Pollux ont créé les bâtons de lumière pour ne pas avoir
à s’embarrasser de torches et de lampes. Ce sont de courts et épais
bâtons de fer forgé recourbés, surmontés d’un joyau opalescent qui
émet une intense lumière blanche ; il suffit de prononcer le bon ordre
pour qu’il s’allume. Ces bâtons sont généralement utilisés à la place
des torches, mais les aventuriers ont pris l’habitude de les brandir pour
éblouir leurs ennemis. Ceux qui sont dotés de véritables compétences
magiques peuvent les utiliser à des fins bien plus grandioses.
Un bâton de lumière éclaire à portée courte. C’est également un
accessoire magique, comme décrit page 218 du livre de base Genesys.
Tant qu’il utilise un bâton de lumière comme accessoire magique, votre
personnage peut utiliser la compétence Arcanes pour lancer des sorts de
Guérison. Lorsqu’il jette un sort, ajouter l’effet Souffle n’en augmente
pas la difficulté. Enfin, les sorts d’Attaque lancés par votre personnage
augmentent leurs dégâts de base de 5.
BÂTON PRISMATIQUE
Les bâtons prismatiques furent fabriqués sous la direction de
Timmorran par certains de ses étudiants. L’objectif était de donner aux
magiciens un objet qui symbolisait leur fonction tout en leur fournis-
sant une certaine protection individuelle. Ce sont des artefacts impres-
sionnants ; leurs longues hampes d’argent sont surmontées d’orbes de
cristal qui diffractent la lumière. Se crée alors un spectacle de lumières
déconcertant, dont l’intensité éblouit les adversaires imprudents.
Un bâton prismatique est un accessoire magique, comme décrit
page 218 du livre de base Genesys. Quand votre personnage lance
un sort, tant qu’il utilise un bâton prismatique, le premier effet
Portée ajouté au sort n’en augmente pas la difficulté. En outre, les
sorts d’Attaque lancés par votre personnage augmentent leurs dégâts
de base de 3 et gagnent les attributs Désorientation et Choc 2.
BOTTES AILÉES
L’ordre des prêtres de Pollux parraine toutes sortes de recherches dans
le but de créer des artefacts permettant de voler. Les bottes ailées sont
l’un des fruits de ces efforts, mais elles ne permettent pas de voler bien
haut. Un aventurier équipé de bottes ailées peut planer à quelques
dizaines de mètres du sol ou ralentir sa descente pour lui permettre
d’atterrir en toute sécurité.
Tant qu’il porte des bottes ailées, votre personnage peut voler (voir
Voler, page 100 du livre de base Genesys). Il n’a pas besoin d’utiliser
une manœuvre pour rester en l’air (les bottes font tout le travail et
permettent à celui qui les porte de faire du vol stationnaire), mais il ne
peut pas dépasser la portée moyenne au-dessus du sol.
Les bottes ailées ont un encombrement de 0 lorsqu’elles sont por-
tées. Quand elles ne le sont pas, elles ont tendance à bondir et à s’en-
voler d’elles-mêmes.
BOTTES ELFIQUES
Que ce soit grâce à des enchantements dont leur créateur les aurait
dotées ou simplement dû à la compétence exceptionnelle d’un cor-
donnier elfe, ces bottes sont réputées pour leur excellent maintien de
la cheville et leur confort extrême qui assurent à celui qui les porte
d’avoir le pied sûr. Un aventurier portant des bottes elfiques sera
capable de marcher sans se fatiguer à travers des terrains difficiles et
dépassera ses compagnons pourvus de chaussures ordinaires.
Lorsqu’il porte des bottes elfiques, votre personnage réduit le
nombre de manœuvres nécessaires pour changer le niveau de portée
de 1, jusqu’à un minimum de 1. Les bottes elfiques ont un encombre-
ment de 0 lorsqu’elles sont portées.
BOUCLIER DE LUMIÈRE
Le bouclier de lumière est un objet béni, il est sacré pour les prêtres
de Kellos. C’est un grand bouclier qui émet de la chaleur, décoré d’un
grand soleil doré sur fond rouge. Quand il est utilisé au combat, des
rayons de lumière dorée jaillissent du soleil, dont la vision devient
insoutenable lorsqu’un adversaire frappe le bouclier.
Tant qu’il brandit le bouclier de lumière, si votre personnage subit
un coup découlant d’un test de combat au Corps à corps, une fois
l’attaque résolue, vous pouvez dépenser 󲊱 󲊱 ou 󲊲 du test de l’atta-
quant pour infliger à ce dernier la blessure critique Aveuglé.
BRASSARDS DES OMBRES
La surface de ces brassards noirs est gravée d’arabesques et enduite
d’une laque irisée. Les brassards émettent en continu une légère
brume noire, inodore et non toxique, mais qui permet d’obscurcir
la vision. Au combat, cette brume artificielle enveloppe celui qui les
porte, l’entourant d’obscurité et le rendant donc plus difficile à tou-
cher. L’effet des brassards est dérangeant et provoque un sentiment de
désespoir chez les adversaires.
Tant qu’il porte les brassards d’ombre, votre personnage bénéficie
d’un camouflage d’une valeur de +2 dés (voir la section Camouflage,
page 110 du livre de base Genesys). En outre, les attaques au Corps à
corps de votre personnage gagnent l’attribut Désorientation 3.
CAPE DE BRUME
Grande cape noire aux revers décorés de plumes blanches, ce mys-
térieux artefact est source de nombreuses controverses parmi les
magiciens de Terrinoth. Ils prétendent qu’elle utilise les énergies de
l’Ynfernael, qu’elle peut être utilisée pour accomplir toutes sortes de
méfaits et qu’elle doit donc être détruite. L’enchantement de la cape
permet à celui qui la porte de disparaître temporairement dans un
nuage de brouillard. Cependant, sa magie est quelque peu vampi-
rique, et plus le porteur utilise le pouvoir de la cape, plus il s’affaiblit.
Tant qu’il porte la cape de brume, après avoir subi n’importe
quel nombre de points de dégâts, votre personnage peut dépenser
un Point Narratif au prix d’une broutille hors tour et choisir de
remplacer tout ou partie de ces points de dégâts par des points de
stress qu’il subit à la place. L’encombrement de la cape de brume est
de 0 quand elle est revêtue.
BOUSSOLE DE L'HOMME MORT
Bien que ses véritables origines restent inconnues, cet artefact serait,
selon les rumeurs, l’œuvre de nécromanciens, et l’on sait de source
sûre que les arcanistes l’utilisent. Posés au centre
d’un socle doré, sous un dôme en verre, les os
d’une main humaine flottent sur un liquide
sombre et visqueux qui tourbillonne.
Les os sont intégralement blancs, à l’ex-
ception de la dernière articulation de
l’index, qui est écarlate. Quelqu’un qui
parvient à activer le compas peut lui
demander d’indiquer la destination de
ses désirs les plus secrets ou de pointer
vers quelque chose ou quelqu’un à retrou-
ver. Les os bougent alors lentement pour for-
mer une main qui indique la bonne direction.
109
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
Quand votre personnage effectue un test de Connaissance
(Géographie), de Perception ou de Vigilance pour tracer un par-
cours, trouver un lieu spécifique, éviter de se perdre ou s’orienter
d’une manière ou d’une autre, il peut choisir d’utiliser le compas de
l’homme mort au prix d’une broutille, après avoir lancé les dés du
test mais avant de déterminer les résultats. Votre personnage subit un
nombre de blessures de son choix et ajoute un nombre égal de 󲊳 au
test. Si ces blessures lui font dépasser son seuil de blessure, ajoutez +50
au jet de blessure critique résultant.
COR DU COURAGE
Les cors jouent un rôle important dans la mythologie des Weik, car ils
affirment que les dieux eux-mêmes soufflent dans des cors de guerre
quand ils se préparent au combat. Selon la rumeur, ce cor, façonné
dans une vieille corne de bœuf craquelée et orné d’anneaux en bel
argent, aurait été fabriqué par des prêtres de Nordros, et attesterait de
la véracité de leurs mythes. Quand un aventurier souffle dans ce cor,
ses alliés sont emplis de courage et de ferveur.
Au prix d’une broutille hors tour, votre personnage peut souffler
dans le cor du courage ; jusqu’à la fin du round suivant, votre
personnage et ses alliés à portée moyenne réduisent la difficulté
des tests de peur d’un niveau, jusqu’à un niveau minimum de
Simple (–). Évidemment, le son du cor
est très puissant ; dans la plupart des
cas, il est facilement entendu par
tous les personnages et créatures qui
se trouvent jusqu’à portée extrême,
voire au-delà.
DAGUE-SERPENT
La lame acérée et la poignée de la dague rappellent la silhouette d’un
serpent prêt à mordre. De valeureux aventuriers l’ont récupérée dans
le Labyrinthe de la Ruine, mais les érudits pensent qu’elle a été for-
gée à Al-Kalim ou dans les Steppes du Ru. Grâce à une sorcellerie
maléfique, un poison mortel suinte constamment de la lame, de sorte
qu’une simple égratignure peut provoquer une mort douloureuse.
Si votre personnage touche avec succès une cible avec la dague-
serpent, vous pouvez dépenser 󲊴 pour empoisonner la cible, qui
doit immédiatement effectuer un test de Résistance Intimidant
(󲊷
󲊷 󲊷 󲊷 󲊷) au prix d’une broutille hors tour, ou subir 8 blessures et
8 points de stress. Vous pouvez dépenser 󲊱 󲊱 󲊱 ou 󲊲 sur le test
de la cible pour forcer celle-ci à effectuer à nouveau le test au début de
son prochain tour, le poison continuant de se répandre dans son sang
pendant ce temps.
ÉPÉE HANTÉE
Les nécromanciens peuvent lier les esprits de redoutables guerriers à
des lames maudites. Ces épées habitées par une âme ont un aspect
sinistre, elles arborent des détails morbides : le pommeau est souvent
en forme de crâne et la garde est sculptée dans de l’os. La lame noire
est légèrement iridescente, et, en regardant de près, il est possible de
distinguer le fantôme piégé à l’intérieur. On prétend que ceux qui
combattent avec ces épées bénéficient d’une partie des compétences
guerrières de l’esprit. Le moindre contact d’une de ces lames s’avère
souvent fatal. La triste réputation et la sinistre apparence des épées
hantées inspirent une terreur absolue.
110
Tant qu’il manie ou porte sur lui une épée hantée,
votre personnage réduit son seuil de stress de 2. Tant
qu’il manie une épée hantée, au prix d’une
broutille, votre personnage peut lui per-
mettre de l’aider ; il effectue immédiate-
ment un test de peur Difficile (󲊷 󲊷 󲊷 󲊷),
et tous les personnages au contact effectuent
un test de peur identique au prix d’une brou-
tille hors tour. En supposant que votre per-
sonnage ne laisse pas tomber l’épée tant il
est terrifié, il est considéré comme ayant
4 rangs en Corps à corps (armes lourdes)
pour les attaques utilisant l’épée han-
tée pendant la durée de la rencontre. Si
votre personnage a déjà quatre rangs
ou plus en Corps à corps (armes
lourdes), il ajoute 󲊸 󲊸 aux attaques
utilisant l’épée.
Si vous échouez au test de peur
avec 󲊲, l’esprit enfermé dans la
lame possède entièrement votre
personnage pour le reste de la
rencontre, ou plus longtemps si le
MJ le décide. Le MJ et le joueur
doivent déterminer ensemble
quelles actions effectue le person-
nage tant qu’il est possédé.
GANTELETS DE POUVOIR
Ces gantelets magiques ressemblent à des gantelets renforcés classiques,
mais ils sont forgés à partir d’épaisses plaques d’acier noir et non de
fines feuilles d’acier brillant. Leur origine est inconnue, bien que leur
esthétique plutôt grossière rappelle le travail des Orcs. L’enchantement
dont ils sont dotés est d’une magnifique simplicité : ils emmagasinent
l’énergie des coups qui les frappent, puis la relâchent quand celui qui les
porte riposte. Un aventurier qui combat au Corps à corps est capable
d’infliger des coups étourdissants avec ces gantelets.
Lorsqu’ils sont portés, les gantelets de puissance ajoutent 󲊳 󲊴 à tous
les tests de compétences basés sur la Vigueur de votre personnage. Les
gantelets de puissance ont un encombrement de 0 lorsqu’ils sont portés.
LANTERNE DE JUSTÉCLAT
Les lanternes de Justéclat ont été créées par la magie des Elfes Latari.
Elles ressemblent plus à de gros joyaux aux multiples facettes qu’aux
modestes lanternes de verre et d’acier fabriquées par les artisans des
Cités Libres. Lorsqu’elle est activée, la lanterne émet une douce lueur
verte qui, étonnamment, éclaire la zone environnante aussi efficace-
ment qu’une torche enflammée. Cette lumière perce également les
illusions, et permet à celui qui la tient de voir des choses dissimulées,
comme les portes et les pièges cachés par magie.
Une lanterne de Justéclat éclaire à portée courte. Dans la zone
illuminée, tous les personnages améliorent 2 dés de leurs tests de
Perception pour voir les portes et objets cachés, détecter les illusions
et autres détails similaires.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

CRÉER ET FABRIQUER
DES OBJETS
L es personnages peuvent fabriquer pratiquement n’importe quoi,
que ce soit des épées ou des arbalètes, des navires ou des méca-
nismes d’horlogerie, pourvu qu’ils aient suffisamment de temps ainsi
que les ressources et les compétences nécessaires. Bien que facteur
d’arc, forgeron et tanneur soient des métiers complètement différents,
par souci de simplicité, il faudra utiliser la compétence Mécanique
pour fabriquer la plupart des objets. L’utilisation de l’Alchimie pour
créer des potions rentre dans cette catégorie, mais elle est assez diffé-
rente pour dépendre de sa propre compétence et donc être régie par
des règles supplémentaires, indiquées en page 113. Quelle que soit la
compétence utilisée, nous appelons « test de fabrication » le test de
compétence utilisé pour fabriquer un objet.
Toute fabrication suit les mêmes règles de base, même si la tech-
nique choisie par votre personnage dans le récit peut considérable-
ment varier. Le MJ peut évidemment modifier ces règles en fonction
de la situation et de l’objet créé, et peut également imposer des exi-
gences supplémentaires.
LE PROCESSUS
DE FABRICATION
Pour fabriquer un objet, votre personnage doit disposer des outils
appropriés et des pièces nécessaires. Par exemple, pour fabriquer une
épée, il doit avoir accès à une forge et des outils de forgeron, et dispo-
ser d’une réserve de fer ou d’acier suffisante. En règle générale, le coût
des matières premières pour fabriquer un objet est égal à la moitié du
coût de ce dernier. Ces matériaux sont consommés lors de la fabrica-
tion, que le test soit réussi ou non. Les outils peuvent généralement
servir plusieurs fois avant d’être usés, mais sont souvent assez chers.
CONSEILS AU MJ :
FABRIQUER DES
OBJETS MAGIQUES
S euls les mages et sorciers les plus puissants peuvent
créer des objets magiques. Chacun de ces objets est
aussi unique que son processus de création. De ce fait, les
règles détaillées pour la création d’objets magiques ne sont
pas indiquées dans ce livre. Cependant, dans de rares cas,
un PJ peut enchanter un objet magique.
En tant que MJ, il vous revient de décider si un personnage
peut créer un objet magique spécifique. Avant de pouvoir
procéder à l’enchantement, le personnage doit fabriquer ou
acheter un objet approprié doté de l’attribut Bonne Qualité ;
en effet, seuls les objets fabriqués avec le plus grand soin ont le
potentiel de contenir la magie requise. Le processus d’enchan-
tement suit les règles normales de fabrication d’un objet. Le
MJ détermine quels outils et quelles pièces supplémentaires
sont nécessaires, ainsi que le temps requis et la compétence
magique à utiliser pour le test de fabrication – n’importe
quelle compétence magique ne convient pas à n’importe quel
objet, tout comme une action magique demande une com-
pétence de magie spécifique. Nous suggérons un test dont
la difficulté sera au minimum Difficile (󲊷 󲊷 󲊷 󲊷) pour les
objets magiques les plus insignifiants ; un test Exceptionnel
(󲊷
󲊷 󲊷 󲊷 󲊷 󲊷) est généralement approprié.
Si le test est réussi, l’objet gagne les aptitudes magiques
désirées. Le MJ et le joueur peuvent évidemment dépenser
󲊴, 󲊵, 󲊱 et 󲊲 pour ajouter des effets supplémentaires.

Le processus de fabrication d’un objet prend un jour, plus un certain

nombre de jours égal à la rareté de l’objet. Cette durée ne comprend
pas le temps passé à rassembler les outils ou les fournitures nécessaires.
Le MJ peut décider que la fabrication de certains objets
demande plus ou moins de temps, en fonction de leur nature
et de la technique de fabrication.
Pour entreprendre la fabrication de l’objet, votre person-
nage effectue un test de Mécanique dont la difficulté est basée sur
la rareté de l’objet ; pour déterminer le nombre de 󲊷 dans la réserve,
divisez la rareté de l’objet par deux et arrondissez au supérieur. Par
exemple, le test de Mécanique pour fabriquer une épée en acier
(rareté 2) est Facile (󲊷󲊷). Le MJ peut ensuite modifier cette difficulté
ou ajouter 󲊸 ou 󲊸 pour représenter des circonstances particulières.

112
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

TABLEAU 2-16 : UTILISATION DES 󲊴, 󲊵, 󲊱 ET 󲊲

POUR LES TESTS DE FABRICATION
COÛT OPTIONS

Réduit le temps de fabrication de l’objet d’un jour, jusqu’à un minimum de un. (Vous pouvez sélectionner cette option plusieurs fois.)
󲊴 ou 󲊵
Votre personnage ajoute 󲊸 à son prochain test qui utilise la même compétence.
Votre personnage économise suffisamment de matériaux pour réduire de moitié le coût du prochain objet similaire qu’il fabrique.
Diminue l’encombrement de l’objet de 1, jusqu’à un minimum de 0.
󲊴 󲊴 ou 󲊵
Permet de fabriquer un objet identique supplémentaire si l’objet initial est doté de l’attribut Munitions limitées 1, ou est limité d’une autre
façon à une seule utilisation. (Vous pouvez sélectionner cette option plusieurs fois.)
Augmente de 1 le nombre d’emplacements de l’objet.
󲊴 󲊴 󲊴 ou 󲊵
Réduit de 1 la difficulté des futurs tests pour fabriquer l’objet, jusqu’à un minimum de Simple (–).
L’objet gagne l’attribut Bonne Qualité.
Augmente la valeur d’un avantage numérique ou d’un attribut de l’objet de 1, à l’exception des dégâts, du niveau de critique, de
󲊵
l’encaissement et de la défense (s’applique par exemple à la capacité d’encombrement supplémentaire qu’un sac à dos ajoute).
Augmente les avantages narratifs de l’objet ou ajoute un nouvel effet narratif approuvé par le MJ.
󲊵󲊵 L’objet gagne un autre attribut, sous réserve de l’approbation du MJ. (Vous ne pouvez sélectionner cette option qu’une seule fois.)
Augmente d’un jour le temps de fabrication de l’objet. (Vous pouvez sélectionner cette option plusieurs fois.)
󲊱 ou 󲊲
Ajoute 󲊸 au prochain test de fabrication effectué par le personnage.
Augmente l’encombrement de l’objet de 1.
󲊱 󲊱 ou 󲊲
Votre personnage doit acheter des matériaux supplémentaires valant la moitié du coût des composants d’origine.
Si l’objet est une arme, il gagne l’attribut Imprécis 1.
󲊱 󲊱 󲊱 ou 󲊲 Diminue le nombre d’emplacements de l’objet de 1, jusqu’à un minimum de 0.
Les outils de votre personnage sont détruits lors de la fabrication et doivent être remplacés.
L’objet gagne l’attribut Mauvaise Qualité.
󲊲
Chaque fois que l’objet est endommagé, il est endommagé d’un niveau supplémentaire.
Un terrible accident s’est produit et votre personnage subit une blessure critique ou, au choix du MJ, survient un événement narratif d’une
󲊲󲊲
gravité équivalente (l’enclume de votre personnage vole en éclats, la forge prend feu, des gaz toxiques se répandent dans le village, etc.).

Si le test de fabrication est réussi, votre personnage crée l’objet. En
outre, le joueur et le MJ peuvent dépenser des symboles de dés pour
des effets supplémentaires, comme indiqué dans le Tableau 2-16 :
Utilisation des 󲊴, 󲊵, 󲊱 et 󲊲 pour les tests de fabrication.
Évidemment, ces effets ne sont que des exemples, et le joueur et le MJ
sont libres de choisir d’autres options.
OBJETS RUDIMENTAIRES
ALCHIMIE
Les personnages peuvent utiliser la compétence Alchimie pour pré-
parer des élixirs, des poisons, des pommades, des onguents et autres
décoctions, y compris ceux présentés pages 102 à 104. Pour plus de
simplicité, ces diverses préparations sont toutes appelées potions. La
préparation d’une potion suit les règles normales de fabrication, sauf
exceptions indiquées dans cette section.
Le processus de préparation d’une potion prend une heure, plus
un nombre d’heures égal à la rareté de la potion. Si le test est réussi,
le personnage en crée une quantité suffisante pour une dose ou une
application unique. Le joueur et le MJ peuvent dépenser des sym-
boles de dés pour des effets supplémentaires, comme indiqué dans
le Tableau 2-17 : Utilisation des 󲊴, 󲊵, 󲊱 et 󲊲 pour les tests

L
e maître de jeu peut autoriser les personnages à uti-
liser la compétence Survie pour créer certains objets
simples, comme une lance ou un piège rudimentaires. On
utilise alors les règles normales de fabrication, mais ces objets
ne sont pas conçus pour durer et s’usent généralement rapi-
dement. Le MJ peut dépenser 󲊲 sur n’importe quel test
impliquant un objet fabriqué à l’aide de la compétence
Survie pour que l’objet se casse et devienne inutilisable.
d’alchimie (voir page 114).
Normalement, un laboratoire ou une sacoche d’alchimiste (voir
page 101) est nécessaire pour préparer une potion. Dans certains cas,
le MJ peut permettre à un personnage d’effectuer un test, dont il aug-
mente la difficulté, pour préparer certaines potions alors qu’il n’a accès
à aucun outil approprié. De même, le personnage doit avoir accès aux
ingrédients nécessaires (voir page 114).

113
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

TABLEAU 2-17 : UTILISATION DES 󲊴, 󲊵, 󲊱 ET 󲊲

POUR LES TESTS D'ALCHIMIE
COÛT OPTIONS

Un personnage qui utilise la potion élimine 1 point de stress ou 1 blessure (au choix du personnage) en plus de ses effets normaux.
󲊴 ou 󲊵
Votre personnage ajoute 󲊸 à son prochain test d’Alchimie.
Votre personnage prépare une dose de potion supplémentaire. (Vous pouvez sélectionner cette option plusieurs fois.)
󲊴 󲊴 ou 󲊵
Réduit le temps de préparation de la potion de moitié.
Votre personnage dispose d’assez d’ingrédients pour fabriquer à nouveau la potion.
󲊴 󲊴 󲊴 ou 󲊵
Augmente la durée des effets de la potion d’un round (si applicable).
Améliore 1 dé de difficulté des tests pour résister aux effets du poison (poison uniquement).
󲊵
La potion est plus efficace que prévu, de la façon décidée par le MJ, lorsqu’un personnage l’utilise.
󲊵󲊵 Choisissez une autre potion de moindre rareté et ajoutez ses effets à cette potion.
Si la potion est bénéfique, un personnage subit 2 points de stress après l’avoir utilisée et avoir bénéficié de ses effets.
󲊱 ou 󲊲 La potion (ou le poison) dégage une forte odeur qui ajoute 󲊸 à tous les tests effectués pour détecter sa présence, y compris dans les aliments
ou les boissons.
Quand elle est utilisée, la potion ne fait effet qu’au bout d’une minute ou un round de temps structuré.
󲊱 󲊱 ou 󲊲
Votre personnage doit acheter des ingrédients supplémentaires valant la moitié du coût des composants d’origine.
Si la potion est bénéfique, un personnage subit 1 blessure après l’avoir utilisée et avoir bénéficié de ses effets.
󲊱 󲊱 󲊱 ou 󲊲 Réduit la durée des effets de la potion d’un round, jusqu’à un minimum d’un round (si applicable). Si les effets devaient durer jusqu’à la
fin de la rencontre, ils durent deux rounds à la place.
Un personnage qui utilise la potion est désorienté pendant deux rounds.
󲊲 󲊷 󲊷) ; s’il échoue, son corps rejette la potion et celle-ci
Un personnage qui utilise la potion doit réussir un test de Résistance Moyen (󲊷
n’a aucun effet.
󲊲󲊲 Si la potion est bénéfique, celui qui l’utilise subit également des effets de poison (voir page 103) après avoir résolu ses effets normaux.

AUTRES POTIONS INGRÉDIENTS

ET ÉLIXIRS
Votre personnage n’est pas limité
aux potions répertoriées aux
pages 102 à 104. Si vous sou-
haitez en créer une nou-
velle, parlez de votre idée
avec le MJ et détermi-
nez-en les effets avec
lui. Les potions pro-
posées dans ce livre
donnent une bonne
idée des différents
effets qu’une potion
peut avoir, ainsi que
de sa rareté (et donc
de sa difficulté de
fabrication). Le MJ a le
dernier mot sur les effets
de la potion et la difficulté
du test pour la préparer.
La plupart des poisons sont
supposés fonctionner comme le
poison de base présenté page 103 ;
ils nécessitent donc que la cible
effectue un test de Résistance dont
le résultat détermine la sévérité des
effets. Par exemple, un poison des-
tiné à rendre inconscient peut fonc-
tionner comme le poison de base, sauf
qu’il inflige du stress au lieu de blessures
si la cible rate son test.
ALCHIMIQUES
Avant que votre personnage ne puisse concocter une potion ou une
autre préparation alchimique, il doit évidemment disposer des ingré-
dients nécessaires. La plupart du temps, il peut simplement les acheter
ou les collecter par lui-même.
À titre indicatif, les ingrédients d’une potion coûtent la moitié du
prix du produit final, leur rareté est égale à la moitié de celle de la
potion ou de l’élixir désiré (arrondie au supérieur). Évidemment, les
choses ne sont pas toujours aussi simples, et le MJ peut décider que
certains ingrédients essentiels ne sont pas disponibles à la vente et
nécessitent que votre personnage se les procure par d’autres moyens.
Ceci sera particulièrement vrai pour les potions rares et extraordi-
naires, telles que les potions d’invisibilité.
La plupart des ingrédients, qu’ils puissent être achetés ou non,
se trouvent dans la nature. Pour les collecter, le personnage (ou
un allié) doit voyager dans un endroit déterminé et passer du
temps – probablement au moins une grande partie de la journée
– pour trouver et récolter les ingrédients voulus. Il effectue un
test de Survie, dont la difficulté est égale à la moitié de la rareté
de la potion, arrondie au supérieur. Si le test est réussi, le person-
nage rassemble suffisamment d’ingrédients pour préparer une dose
de potion.
Les ingrédients rares ou spécifiques, et ceux dont l’acquisition pré-
sente un danger, peuvent nécessiter plus d’un seul test de Survie. La
façon de se procurer de tels ingrédients peut constituer la base d’une
rencontre, ou même d’une aventure entière.

114
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
UTILISATION DE LA
COMPÉTENCE RUNES
La magie runique est une composante majeure de l’univers de
Runebound, et les règles qui la régissent comportent quelques chan-
gements mineurs mais importants par rapport aux règles de magie
habituelles. Comme détaillé ci-après, l’utilisation des éclats runiques
diffère fondamentalement des autres pratiques magiques.
Pour lancer un sort en utilisant la compétence Runes, un per-
sonnage doit utiliser un éclat runique comme accessoire magique
– l’usage d’un tel accessoire étant normalement facultatif pour les
autres compétences magiques. Évidemment, cela signifie également
que les personnages ne peuvent utiliser aucun autre type d’accessoire
avec la compétence Runes, car on ne peut utiliser qu’un seul acces-
soire magique pour lancer un sort.
Bien que chaque éclat runique puisse être utilisé pour de nombreux
sorts, le MJ et le joueur doivent garder en tête la nature de l’éclat quand
ils décrivent un sort. Une rune d’immolation et une rune de stase
peuvent toutes deux créer une barrière magique, mais l’effet narratif sera
forcément très différent ! La première matérialisera, par exemple, une
sphère de flammes protectrices autour de la cible, alors que la seconde
ralentira les flèches au point que la cible pourra facilement les éviter.
LES ARTS
DES ARCANES
La magie est à la fois une bénédiction salvatrice pour Mennara et sa
plus grande malédiction. Le Premier et les Yrthwrights utilisèrent la
magie pour énoncer la création et faire naître le monde ; depuis lors,
les magiciens des royaumes civilisés ont toujours tenté de puiser dans
cette magie, pour accomplir des actes héroïques comme pour répandre
les pires calamités. Les magiciens peuvent imprégner armes et armures
116
avec des enchantements incroyables ou bâtir d’épais murs autour d’un
château pour défendre les bastions de la civilisation, ou bien appeler
la colère des cieux et anéantir une culture entière, tuant un nombre
incroyable d’innocents au passage. Heureusement, un pouvoir tel qu’il
permet d’accomplir des merveilles ou de faire d’immenses ravages est
rare à Mennara. Il est important d’enseigner à ceux qui ont le don
de sorcellerie comment l’exploiter et l’utiliser pour le bien commun.
À l’époque des Rois Penacor, l’Humanité s’installa définitivement
et orienta ses efforts vers des activités plus théoriques. Pour la première
fois, les préceptes magiques furent codifiés et consignés sur des parche-
mins. Les plus puissants magiciens, des sables d’Al-Kalim au tout jeune
Empire de Lorimor, commencèrent à percer les secrets de la Rotation,
ou Verto Magica. De nos jours, des institutions telles que l’Université
de Havregris préservent ces anciennes pratiques, bien que l’admission
dans ces prestigieux collèges soit principalement l’apanage des classes
supérieures. L’apprentissage de la magie est long et minutieux, il est
dispensé dans de rares endroits disséminés à travers les royaumes ;
les écoles de magie réclament donc souvent des frais exorbitants. Les
nobles maisons des Royaumes d’Équité s’acquittent de bonne grâce de
ces sommes extravagantes, car leurs magiciens ainsi formés viennent
ensuite considérablement augmenter leur pouvoir et leur prestige.
Bien que les sorciers talentueux puissent facilement subvenir à leurs
besoins dans les Cités Libres ou dans les baronnies, beaucoup d’entre
eux choisissent une vie d’aventure. On traite souvent les sorciers itiné-
rants, ou « enchanteurs » comme on les appelle parfois, avec beaucoup
de suspicion, et ce n’est pas tout à fait injustifié. La plupart de ces
vagabonds mènent cette vie parce qu’elle leur convient mieux que celle
aux normes strictes des écoles de magie ; d’autres ont été renvoyés
à cause de leurs recherches secrètes, en particulier sur les pratiques
occultes. Leur magie est donc plus incontrôlée et comporte plus de
risques d’effets secondaires dangereux que celle de leurs camarades de
classe plus disciplinés. Il arrive que des magiciens plus orthodoxes se
lancent également dans une vie d’aventure, généralement à des fins
très personnelles, pour découvrir d’étranges pratiques magiques ou
des artefacts perdus dans les lointaines contrées sauvages de Mennara.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

LA SOURCE
DE LA SORCELLERIE
À l’Ère d’Acier, il était déjà rare qu’un être naisse avec le don d’exploiter
le Verto Magica, également appelé « Rotation » ; c’est encore plus rare à
l’âge d’incertitudes que nous vivons. Les connaissances de cette époque
qui nous sont parvenues au sujet de ces « vrais sorciers » suggèrent que
le Verto Magica est la source de leurs incroyables pouvoirs et de l’énergie
qui sous-tend la vie elle-même. Selon des textes qui auraient été écrits par
Timmorran lui-même, après la création de l’Empyréen et de l’Ynfernael,
leur lutte constante pour la suprématie a conduit l’influence de chacun
des deux royaumes à croître et diminuer de manière cyclique. Au cours
de certains âges, les forces obscures de l’Ynfernael ont grandi, la douleur
et la folie ont régné en maîtres. À d’autres âges, l’influence de l’Empyréen
a dominé, la paix et la tranquillité ont alors prévalu. L’éternel passage
de la réalité entre ces forces opposées créa une sorte de roue qui se mit
à tourner : ce mouvement, on l’a vu, est appelé Rotation. En théorie, la
Rotation est la force qui induit le mouvement du Soleil, de la Lune, des
étoiles et de tous les corps célestes, ainsi que le passage des saisons et les
changements de climat. En résumé, le Verto Magica est la marche inces-
sante du temps, la force qui préside à tous les changements du monde.
Quelqu’un qui a le don peut toucher cette force et ce mouvement
comme il plongerait les doigts dans un courant capricieux. C’est ainsi
qu’un magicien tire de l’énergie de cette source ou même, dans les cas
les plus étonnants, redirige le flux de l’énergie elle-même. Si l’on en Dans des cas extrêmement rares,
croit les enseignements des maîtres de Havregris, ces véritables sor- les Maîtres des Runes peuvent appor-
ciers ont l’incroyable aptitude d’emprunter, simplement en tendant la ter des modifications à l’éclat runique
main, une fraction de l’énergie issue de l’interaction entre la lumière lui-même, en effaçant ou en ajoutant
et l’obscurité, entre le bien et le mal. des traits pour changer l’effet de base
Malgré tout l’émerveillement et l’étonnement qu’un tel exploit de la rune. Toutefois, quelle que soit
inspire, les Elfes considèrent qu’il s’agit de « magie inférieure » par l’habileté du Maître, les éléments les
rapport à leurs arts apportés de l’Empyréen. Non seulement le Verto plus fondamentaux de la rune sont
Magica est entaché par l’influence de l’Ynfernael, mais ses effets irrévocablement ancrés dans l’éclat, ce
peuvent en outre être destructeurs et chaotiques. Néanmoins, il existe qui signifie que la rune ne peut être effacée pour
plus de véritables sorciers chez les Elfes que parmi les mortels, car eux rendre l’éclat vierge à nouveau, et qu’on ne peut pas non plus modifier
seuls ont une vie assez longue pour apprendre à manipuler cette force, l’élément ou l’affinité de l’éclat pour une sphère complètement diffé-
et deviennent alors de puissantes Sorcières des Tempêtes ou des Mages rente. Un Maître peut ainsi manipuler une rune d’immolation pour en
de Givre qui n’utilisent aucun éclat. faire une rune d’explosion ou de feu, mais il ne pourra jamais la trans-
former en rune de tempête de glace ou de téléportation.

LES ÉNIGMES
L’Université de Havregris est la demeure officielle des Maîtres des
Runes. Là, les tuteurs forment leurs apprentis à cet art ancien qui

DES RUNES
Depuis la fin des Troisièmes Ténèbres, une nouvelle forme de magie
règne sur les prestigieuses salles de Havregris. Les Maîtres des Runes
s’exposent à des risques bien moindres que les véritables sorciers, car
ils ne puisent pas directement dans le Verto Magica. En fait, la plupart
d’entre eux ne sont pas nés avec un don pour la sorcellerie, ils sont
donc incapables d’utiliser la magie seuls. Au lieu de travailler leurs
propres capacités magiques, les Maîtres des Runes activent les énergies
latentes des éclats runiques ou manipulent les runes qui y sont gravées,
pour modifier ou concentrer leur effet et obtenir un résultat qui cor-
respond mieux à leurs désirs.
Bien que n’importe qui puisse activer un éclat runique, pour deve-
nir Maître des Runes, il faut apprendre la signification des runes et
connaître la manière dont les Dragons les ont gravées à l’origine ; ces
études prennent des années, voire des décennies. En traçant le motif
d’une rune de façon subtilement différente du motif initial, ou en
se concentrant sur des traits spécifiques de la gravure, un Maître des
Runes est capable de diriger les énergies de l’éclat, d’omettre certains
effets, et parfois de changer la nature même de l’expression de la rune.
Les améliorations d’un effet tendent généralement à augmenter sa
durée ou sa puissance, mais parfois aussi sa portée ou sa cible.
demande un soin extrême et conduisent des recherches sur de nou-
velles méthodes de manipulation des runes. Ils considèrent qu’il est tout
aussi important d’inculquer ces méthodes aux futurs Maîtres des Runes
qu’une loyauté sans faille envers tous leurs pairs. Les doyens soignent
leurs relations avec les seigneurs Daqan et les autres puissants établisse-
ments de Terrinoth. Certaines mauvaises langues les accusent de parti-
ciper à un cynique jeu sans fin pour évincer les pratiquants de la vraie
sorcellerie et favoriser leurs propres pratiques, limitées mais plus sûres.
Ces érudits de la magie runique font partie des rares individus
capables d’éveiller les Golems de Runes pour protéger les Royaumes
de Terrinoth en période de grande détresse ; on en soupçonne même
certains de créer de nouvelles créatures tirant leur énergie des éclats
runiques. Les montures runiques, comme celle du baron Zachareth,
« Brisenuque », pourraient un jour rejoindre les rangs des Golems de
Runes et des Cuiraciers de Nerekhall, ces soldats imprégnés de magie
qui combattent aux côtés des troupes des baronnies des Daqan.
D’autres communautés de Maîtres des Runes existent hors de
l’Université de Havregris. Celle de l’Empire de Lorimor leur ressemble
cependant beaucoup. Comme les Guerres draconiques furent prin-
cipalement limitées à Terrinoth, on ne connaît qu’une poignée des
éclats runiques qui ont traversé la vaste mer et ont atterri parmi les
flèches d’Al-Kalim.

117
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
LES ÉCLATS RUNIQUES
U n éclat runique peut être utilisé de deux manières. N’importe
quel personnage peut l’activer et provoquer l’effet décrit dans la
section « Activation » de l’entrée de cet éclat. Si un personnage possède
la compétence de carrière Runes et dispose d’au moins un rang dans la
compétence Runes, il peut également utiliser un éclat runique comme
accessoire magique et bénéficier des avantages répertoriés dans la sec-
tion « Accessoire magique » de sa description.
Un éclat runique fonctionne comme un accessoire magique unique-
ment pour un personnage utilisant la compétence Runes. Un person-
nage qui effectue un test en utilisant une autre compétence magique ne
peut pas utiliser un éclat runique comme accessoire magique.
Les éclats runiques sont généralement petits et ont donc tous un
encombrement de 0. Ils sont également trop rares et trop précieux
pour être proposés à la vente comme des articles normaux. Quand
nobles et magiciens parviennent à acquérir l’un de ces inestimables
artefacts, le prix qu’ils payent ne se résume jamais à de simples pièces
d’or. Par conséquent, aucun prix ne figure dans le Tableau 2-19 :
Éclats runiques (voir page 119).
Sauf indication contraire, activer un éclat runique est une
manœuvre. Certains éclats fonctionnent comme une arme lorsqu’ils
sont activés, auquel cas le profil d’arme fourni dans leur entrée spé-
cifie la compétence qu’un personnage utilise pour effectuer le test de
combat. Même si la compétence indiquée n’est normalement pas une
compétence de combat (par exemple Sang-froid), elle doit être traitée
comme telle lorsqu’elle est utilisée pour un test de combat.
PIERRE DU VAGABOND
Les pierres du vagabond se portent sur la poitrine et envoient une éner-
gie régénératrice vers le cœur et les poumons. Bien que cette énergie
soit trop faible pour permettre de guérir blessures ou maladies, elle per-
met d’éliminer efficacement les effets de la fatigue. Les personnages qui
portent l’un de ces éclats sont capables de marcher, courir, nager, ramer,
voler et se battre avec une endurance considérablement améliorée. Les
possesseurs de ces runes les attachent souvent au harnais de leur mon-
ture ou de leur animal de trait au lieu de les utiliser pour eux-mêmes.
Activation : Une fois par rencontre, au prix d’une action, votre person-
nage peut utiliser une pierre du vagabond pour guérir 5 points de stress.
Accessoire magique : Quand votre personnage lance un sort
d’Augmentation, il peut ajouter les effets Rapidité et Vivacité sans
augmenter la difficulté.
RUNE D'ACCUMULATION
Si la plupart des éclats runiques fonctionnent de
manière si simple qu’ils peuvent être utilisés par un
quidam qui n’a jamais reçu aucun enseignement
magique, certains ne peuvent être correctement
utilisés que par des magiciens expérimentés.
Les runes d’accumulation agissent comme des
réservoirs de puissance magique en absorbant
lentement la magie ambiante du Verto Magica.
Ces éclats fournissent chacun un puits de magie
sûr et fiable, bien que leur capacité soit limitée ; les
magiciens qui dépendent d’un tel éclat pour lancer leurs
sorts peuvent se retrouver grandement affaiblis s’ils le perdent.
Activation : L’éclat runique brille légèrement à cause de la puissance
qu’il recèle, mais rien ne semble se produire.
Accessoire magique : Quand vous lancez n’importe quel sort, votre
personnage réduit la difficulté du test de 1. En outre, il subit 1 point
de stress de moins lorsqu’il lance un sort.
118
RUNE D'ÉCLAIR DES ARCANES
Toutes sortes d’éclats runiques produisent
une puissante explosion d’énergie magique
lorsqu’ils sont activés. Bien que leurs effets
puissent prendre des formes diverses, les résul-
tats de leur activation sont assez similaires…
et hautement nuisibles à des cibles vivantes.
Certains éclairs des arcanes se manifestent
sous forme d’averses de lumière diffuse qui
font peu de dégâts mais frappent sur une zone étendue. D’autres for-
ment de puissantes lances, sortes de faisceaux d’énergie concentrée, qui
transpercent les armures avec une facilité déconcertante.
Activation : Jusqu’à la fin du tour de votre personnage, la rune d’éclair des
arcanes est considérée comme une arme à Distance avec le profil suivant :
(Distance ; Dégâts 8 ; Critique 3 ; Portée [moyenne] ; Automatique).
Accessoire magique : Quand votre personnage lance un sort d’Attaque,
le premier effet Portée ajouté n’augmente pas la diffculté du test. En outre,
il doit ajouter l’effet Impact sans augmenter la difficulté. Les dégâts de
base des sorts d’Attaque qu’il lance augmentent de 4.
RUNE D'EXPLOSION
Quand on l’active, une rune d’explosion imprègne une pierre dans la ligne
de vue du lanceur d’une telle énergie qu’elle éclate en une petite mais puis-
sante explosion. Ces runes sont très prisées par les Nains, qui les utilisent
non seulement pour se défendre, mais aussi pour briser des roches inac-
cessibles pendant les opérations d’extraction. Les Orcs des Plaines Brisées
font également bon usage d’un éclat de ce type lorsqu’ils parviennent à
en obtenir un, car le terrain escarpé de leur pays natal garantit au porteur
d’une telle rune de toujours avoir une bonne arme sous la main.
Activation : Jusqu’à la fin du tour de votre personnage, la rune
d’explosion est considérée comme une arme à Distance avec le pro-
fil suivant : (Sang-froid ; Dégâts 9 ; Critique 3 ; Portée [moyenne] ;
Souffle 7, Renversement).
Accessoire magique : Quand votre personnage lance un sort
d’Attaque, il doit ajouter l’effet Souffle et peut ajouter l’effet Impact
sans augmenter la difficulté. Les dégâts de base des sorts d’Attaque
qu’il lance augmentent de 5.
RUNE D'IMMOLATION
Les runes d’immolation sont des armes à part
entière. Quand l’un de ces éclats est activé,
une éruption de flammes en jaillit.
Ces runes ont leur propre source de
pouvoir, bien sûr, mais celui qui les
utilise peut concentrer une partie de
sa propre énergie pour augmenter la
taille et l’intensité des flammes ; il en
souffre, mais pas autant que sa cible.
La gerbe de flammes ne perdure que
quelques secondes, ces éclats ne sont donc
d’aucune utilité pour s’éclairer ; en revanche, ils
sont très efficaces pour se protéger et allumer des feux.
Activation : Jusqu’à la fin du tour de votre personnage, la rune
d’immolation est considérée comme une arme à Distance avec le
profil suivant : (Sang-froid ; Dégâts 8 ; Critique 3 ; Portée [courte] ;
Incendiaire 2).
Accessoire magique : Quand votre personnage lance un sort d’Attaque,
il doit ajouter les effets Feu et Mortel sans augmenter la difficulté. En
outre, après avoir lancé les dés pour effectuer son test de combat magique,
mais avant d’appliquer des dégâts, il peut choisir de subir n’importe quel
nombre de blessures ne dépassant pas la moitié de son seuil de blessure
pour ajouter un nombre égal de dégâts à tous les coups de l’attaque.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
L'HÉRITAGE DE L'ORBE
Q
uand Timmorran Lokander décida de créer l’Orbe
du Ciel, il ne savait pas que ses actions change-
raient non seulement le visage de la magie, mais la face de
Mennara lui-même. Son intention était louable, mais fut à
l’origine non pas d’une, mais de deux des guerres les plus
terribles que Mennara ait jamais connues.
Il fallut des années pour façonner l’Orbe, l’artefact magique
le plus puissant qui ait jamais existé selon les érudits de
Havregris. Celui-ci constituait une effrayante réserve de
magie qui devait permettre aux futurs magiciens de lancer
des milliards et des milliards de sorts extrêmement puis-
sants sans avoir besoin de puiser dans le Verto Magica.
Terrinoth ne craindrait alors plus jamais d’être envahi.
Il n’en fut pas ainsi. L’Orbe fut détruit, éparpillé en plu-
sieurs milliers de fragments. Ces Étoiles de Timmorran
sont si puissantes que l’une d’entre elles a été associée à la
naissance de l’Immortel, la première des horribles réper-
cussions des actions de Timmorran.
Pendant des générations, les Étoiles furent gardées en
sécurité dans des lieux tenus secrets. Toutefois, elles réap-
parurent et se répandirent à l’époque des Anciens Rois,
attirant alors l’attention des Dragons. Pour des raisons
encore inconnues, ces êtres anciens quittèrent la Lande
Vitrifiée et ravagèrent tout Mennara à la recherche des
Étoiles. Ainsi l’Orbe de Timmoran provoqua-t-il une deu-
xième guerre, encore plus dévastatrice.
Les Dragons morcelèrent les Étoiles dont ils s’étaient
emparés et y gravèrent des runes à coups de griffe, créant
ainsi les éclats runiques. Les Étoiles pouvaient alimenter
toutes sortes de sorts, mais ne pouvaient être utilisées que
par ceux possédant des dons magiques. Les éclats runiques,
eux, ne pouvaient produire qu’un seul effet, mais étaient
beaucoup plus faciles à utiliser (et donc plus utiles pour les
Dragons et leurs sbires hybrides).
L’utilisation d’éclats runiques s’est répandue à Mennara
après la fin de la guerre, même si la plupart d’entre eux
n’ont jamais été retrouvés. On raconte que les Dragons
en posséderaient encore beaucoup dans leurs énormes tré-
sors, mais personne n’en a la preuve. Néanmoins, ils en
ont créé tant qu’il en reste encore un nombre incalculable
à travers le monde. Certains sont tombés entre les mains
des défenseurs pendant les Troisièmes Ténèbres ; d’autres,
bien cachés, ont été retrouvés en pleine nature au cours des
siècles suivants. Les puissants Barons, les corps militaires
et les riches collectionneurs en détiennent maintenant la
plupart. L’Université de Havregris et le culte de Kellos dis-
posent de leurs propres réserves privées.
On pense toutefois que quelques Étoiles ont échappé aux
Dragons. Le moindre espoir qu’elles existent encore suffit
à faire naître des légendes, comme celle de la Pierre des
Scindeterres, du Caveau du Crépuscule de Jade ou du
Gouffre des Étoiles.
120
RUNE DE SOUFFRANCE
Ces éclats runiques infligent à la cible d’immenses souffrances, qui
suffisent rarement à la blesser gravement, mais bien assez à l’affaiblir.
Les chasseurs de primes d’élite des Cités Libres se battent avec four-
berie et s’en servent donc souvent, car ces éclats leur permettent de
capturer leurs proies sans provoquer trop d’effusions de sang gênantes.
Activation : Au prix d’une action, le porteur subit 3 points de
stress et sélectionne une cible à portée courte. La cible devient
désorientée pendant trois tours. Tant que l’effet dure, le porteur
peut dépenser 󲊱 󲊱 générés lors de n’importe quel test qu’effectue
la cible pour infliger 1 blessure à celle-ci.
Accessoire magique : Quand vous lancez un sort de Malédiction,
votre personnage réduit la difficulté du test de compétence de 2. En
outre, le MJ peut dépenser 󲊱 󲊱 sur le test pour infliger 1 blessure
à votre personnage.
RUNE DE STASE
Un personnage qui active une rune de stase se concentre sur une seule
cible. Pendant une brève période, la cible a l’impression d’être figée
dans le temps et l’espace. Même si elle n’est pas attaquée, à court
terme, elle trouve très perturbante l’expérience de rattrapage de temps
qu’elle vit.
Activation : Au prix d’une action, votre personnage subit 2 points
de stress et choisit un personnage à portée courte. Ce personnage est
sonné et immobilisé jusqu’à la fin de son prochain tour.
Accessoire magique : Quand votre personnage lance un sort de
Malédiction, il doit ajouter l’effet Paralysé sans augmenter la difficulté.
RUNE DE TÉLÉPORTATION
L’utilisateur d’un tel éclat peut, sur une
courte distance, se téléporter lui-même
ou téléporter un petit objet sur lequel
il se concentre. Il est plus sûr de se
téléporter vers un endroit à portée
de vue ; bien que celui qui utilise
la rune puisse se téléporter à travers
les murs, s’il se matérialise dans le
même espace qu’un objet solide, cela
peut entraîner de graves blessures. Les runes
de téléportation sont particulièrement rares et difficiles à trouver ;
elles sont très appréciées par toutes sortes d’assassins, criminels et
aventuriers.
Activation : Au prix d’une action, l’utilisateur peut se téléporter ou
téléporter un seul objet de gabarit 0 en sa possession, à n’importe quel
endroit qu’il peut actuellement voir situé jusqu’à une portée extrême.
De même, il peut tenter de se téléporter vers un lieu qu’il connaît et
qu’il a déjà visité, mais cela nécessite un test de Vigilance Moyen
(󲊷
󲊷 󲊷). Le MJ peut modifier le test en fonction des circonstances, y
compris en fonction du temps écoulé depuis que le personnage s’est
rendu en ce lieu pour la dernière fois, la durée de son séjour là-bas et
ainsi de suite. Le MJ peut dépenser 󲊲 ou plusieurs 󲊱 pour que le
personnage finisse loin de son lieu de destination prévu, dans l’antre
d’un monstre ou dans une situation encore plus périlleuse.
Accessoire magique : Quand votre personnage lance n’importe
quel sort, les trois premiers effets Portée ajoutés n’augmentent pas
la difficulté.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
RUNE DE TEMPÊTE DE GLACE
Les runes de tempête de glace peuvent être
utilisées pour créer un blizzard localisé mais
très intense. Elles ne nécessitent pas d’hu-
midité et fonctionnent même dans des
environnements arides. Un porteur qui
active une telle rune se retrouve rapi-
dement au centre d’un vortex de neige
tourbillonnante, soufflée par un vent ter-
rible. Ce vortex peut être dirigé et déplacé
indépendamment du porteur ; quiconque
est pris à l’intérieur subit bientôt les effets
d’un froid mordant. En tant qu’arme, ces runes
sont particulièrement efficaces contre les Dragons, qui
craignent leurs porteurs autant qu’ils les haïssent.
Activation : Jusqu’à la fin du tour de votre personnage, la rune de
tempête de glace est considérée comme une arme à Distance avec le
profil suivant : (Sang-froid ; Dégâts 7 ; Critique 2 ; Portée [moyenne] ;
Souffle 4, Enchevêtrement 3).
Accessoire magique : Quand votre personnage lance un sort d’Attaque,
il doit ajouter les effets Glace et Explosion sans augmenter la difficulté.
Les dégâts de base des sorts d’Attaque qu’il lance augmentent de 4.
RUNE DE TERREUR
Personne ne comprend pourquoi les Dragons ont créé les runes de
terreur, puisqu’ils sont déjà eux-mêmes profondément sinistres.
Certains érudits de Havregris se demandent si les Dragons n’en
savent pas plus sur l’Ynfernael et la menace croissante qu’il repré-
sente pour Mennara, ou s’il n’existe pas des créatures au-delà de la
Lande Vitrifiée qui sont aux Dragons ce que ces derniers sont aux
êtres mortels, et donc s’il leur fallait un moyen de les combattre. Les
aventuriers assez chanceux pour posséder de telles runes les trouvent
inestimables quand ils explorent de sombres catacombes dans les
Terres des Brumes ou face aux créatures des Steppes du Ru.
Activation : Tant qu’il possède une rune de terreur, votre person-
nage peut ignorer les effets de la peur (voir page 243 du livre de
base Genesys).
Accessoire magique : Quand votre personnage lance un sort, n’importe
quelle cible alliée affectée est immunisée contre les effets de la peur pour
la durée du sort. N’importe quelle cible ennemie affectée doit immédia-
tement effectuer un test de peur Intimidant (󲊷 󲊷 󲊷 󲊷 󲊷) au prix d’une
broutille hors tour.
RUNE DE VISION
Une rune de vision permet à un personnage d’avoir une portée visuelle
extraordinaire. Il peut voir jusqu’à l’horizon, à l’intérieur de conte-
nants scellés ou à travers les murs, aptitudes que n’importe quel voleur
ou espion tuerait pour obtenir. Les magiciens peuvent également uti-
liser ces runes pour lancer des sorts sur des ennemis cachés ou tapis
dans l’obscurité ; l’une de ces runes permit à l’aveugle Jenti le Juste de
recouvrer la vue après des blessures incurables, après quoi il devint un
célèbre sorcier de la cour impériale de Lorimor.
Activation : Au prix d’une action, un personnage peut effectuer un
test de Perception Moyen (󲊷 󲊷 󲊷) pour observer un lieu situé n’im-
porte où à une portée de trois jours de voyage maximum comme
s’il s’y trouvait en personne, ou pour voir à travers un objet solide
à portée moyenne comme si le matériau qui le constitue était aussi
transparent que du verre.
Accessoire magique : Quand il lance un sort, votre personnage peut
choisir n’importe quelle cible à portée, même s’il ne peut pas la voir
(par exemple si elle se trouve dans le noir ou derrière un mur).
RUNE DU DESTIN
La rune du destin fait partie des plus difficiles à manier, car elle
dirige la puissante magie contenue dans l’éclat runique pour influen-
cer la trame du destin. Même l’individu le plus incompétent qui
soit, en serrant l’éclat dans sa main, voit sa chance et celle de ses
alliés augmenter de manière subtile mais indéniable. Un Maître des
Runes peut tirer une myriade d’effets d’un tel éclat, comme rendre
un ennemi armé anormalement maladroit ou faire en sorte qu’un
allié arrive à glisser sa lame dans une fente incroyablement étroite de
l’armure d’un adversaire.
Activation : Au prix d’une action, votre personnage peut activer cet
éclat runique pour déplacer un Point Narratif de la réserve des joueurs
à celle du MJ ; ajoutez 󲊲 au prochain test qui cible votre personnage.
Accessoire magique : Quand votre personnage lance un sort d’Aug-
mentation ou de Malédiction, vous pouvez ajouter l’effet Cible
Supplémentaire sans augmenter la difficulté. En outre, quand il lance
un sort de Malédiction, vous devez ajouter l’effet Malheur sans aug-
menter la difficulté.
RUNE MINEURE
Certaines runes sont capables de prouesses magiques légendaires.
D’autres… eh bien, d’autres pas vraiment. Ces runes ne présentent
pas grand intérêt, sauf pour un Maître des Runes, qui lui est capable
de les plier à sa volonté et de les pousser au-delà des capacités qu’elles
avaient à leur conception. Bien que n’ayant pas le prestige des autres
éclats runiques, elles sont toujours inestimables et font l’objet de
nombreuses quêtes.
Activation : Ce type de rune peut être utilisé pour obtenir un effet
bénéfique mineur qui varie selon la rune, comme projeter une
lumière équivalente à celle d’une torche, conjurer une petite créa-
ture illusoire, augmenter la portée de votre voix ou allumer de petits
feux. Le MJ choisit l’effet mineur associé à la rune lorsque l’éclat est
découvert ou obtenu.
Accessoire magique : Quand votre personnage obtient une rune
mineure, le MJ décide d’un effet qu’elle lui permet d’ajouter à n’im-
porte quel sort approprié sans en augmenter la difficulté. Idéalement,
cet effet aura un lien avec l’effet mineur déterminé précédemment. Il
ne doit augmenter la difficulté d’un sort que de 1. Les dégâts de base
des sorts d’Attaque lancés par votre personnage augmentent de 3.
121
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
LA FORCE DE LA DÉVOTION
D ans tout Mennara, la magie runique est devenue l’une des
sources de pouvoir les plus facilement accessibles. Cependant,
il existe de nombreuses autres traditions qui permettent d’accomplir
des actes miraculeux au-delà de ceux enseignés à Havregris. Au lieu de
puiser dans la Rotation, certaines personnes comptent sur leur dévo-
tion et leur foi envers les figures de légende et leurs disciples.
Tout au long de l’histoire, de merveilleux héros sont apparus
lorsque Mennara en avait le plus besoin, alors que le monde était
menacé par d’horribles adversaires aux étranges pouvoirs. Personne
ne peut identifier avec certitude la source de leurs aptitudes miracu-
leuses. Cependant, une minorité non négligeable d’entre eux sem-
blaient capables de transmettre leurs dons à leurs fidèles acolytes.
Même si certains célèbres (ou tristement célèbres) personnages ne
sont plus que des légendes, leurs fidèles disciples ont continué à faire
des miracles en leur nom.
LA PUISSANCE
DES ESPRITS
Les terres de Mennara vénèrent des centaines de dieux et de divinités,
d’esprits aux grands pouvoirs et de champions immortels ; et l’en-
semble de ce que l’on pourrait qualifier de « religions » est aussi divers
que les cultures qui peuplent ce monde. En effet, de nombreuses enti-
tés vénérées et célébrées pour leurs aptitudes divines sont propres à
une région, voire à un village. L’apparition de ces créatures aux pou-
voirs extraordinaires, de ces esprits puissants et de ces héros excep-
tionnels défie toute explication rationnelle, mais les aptitudes et les
bénédictions qu’ils accordent à leurs disciples sont bien réelles.
Bien que certains croient que leurs dieux ont joué un rôle dans la
création de leur civilisation, comme A’tar pour le Califat d’Al-Kalim,
les religions de Terrinoth lient rarement leurs divinités à la création
du monde. Les histoires sur le Premier et les Yrthwrights sont assez
peu connues au-delà des limites de la société elfique. La plupart des
autres civilisations ont une vague idée du fait que les Dragons ont créé
Mennara, et qu’ils sont probablement à blâmer pour l’imperfection et
la cruauté de ce monde. La majorité des peuples considèrent leur divi-
nité personnelle comme une entité protectrice d’un aspect particulier
de leur monde, mais pas comme son créateur. Quand un serviteur
d’une divinité particulière poursuit les missions de cette divinité à tra-
vers ses actes, il peut exploiter une certaine part de son essence divine
et faire des miracles en son nom.
Certains érudits de Havregris soutiennent que la magie des prêtres
de Kellos et celle d’autres représentants de divers clergés ne sont pas
d’origine divine, mais sont simplement des conséquences mal identi-
fiées de la Rotation ou d’invocations accidentelles de l’Empyréen. Si
cette dernière théorie se vérifiait, les êtres que les gens ordinaires consi-
dèrent comme des « dieux » ne seraient rien d’autre que des mortels
exceptionnels ayant capté le pouvoir de l’Empyréen grâce à la pureté
de leur cœur, l’intensité de leur volonté ou la bienveillance de leurs
intentions. Peut-être chacun a-t-il en lui une étincelle de divinité, mais
seuls quelques-uns auraient la force de la sublimer ?
Quelle que soit la source de leur pouvoir, de nombreux prêtres,
clercs, moines et templiers parcourent Mennara pour accomplir leur
mission divine. Les exemples qui suivent ne sont qu’un petit échantil-
lon des entités divines de Mennara, et il en existe sans doute beaucoup
d’autres qui ne figurent dans aucune chronique ou dont l’existence a
été jalousement gardée secrète.
122
KELLOS, L'ÉTINCELANTE LUMIÈRE
DE LA VIE ET DE LA JUSTICE
Selon la légende, Kellos serait apparu à Mennara pendant les jours
les plus désespérés des Deuxièmes Ténèbres, quand la Légion des
Revenants de Waiqar ravageait Terrinoth et alors que les Cultes de la
Mort qu’il avait créés faisaient régner peur et confusion dans les cités
du pays, étendant leur emprise comme une peste maléfique. Kellos
saisit sa masse et jura qu’il serait témoin de l’anéantissement de ces
vils morts-vivants. Il brûla de ses flammes bénies la chair et les os des
abominations créées par Waiqar. Il appela à ses côtés de nombreux
autres courageux aventuriers. Quand ils tombaient pour défendre le
royaume, Kellos les sauvait de la mort grâce à ses pouvoirs de guérison,
les faisant renaître par le feu sacré. Kellos le Héros fut rapidement
salué comme Kellos l’Étincelant et Kellos le Sauveur, car il était l’une
des lumières les plus brillantes de l’Humanité au milieu des ténèbres
qui avaient envahi le monde.
Lors de la bataille finale, lorsque les armées de Waiqar furent
repoussées dans les Terres des Brumes, Kellos disparut. Peut-être fut-il
tué au combat, s’étant finalement sacrifié pour les peuples et les terres
qu’il aimait. Peut-être est-il sorti indemne de la bataille et a-t-il décidé
de s’installer dans un hameau reculé pour enfin trouver la paix qui lui
avait été refusée pendant de si longues années. Ses disciples croient
qu’il a accédé à la divinité ce jour-là, pour veiller à jamais sur ceux
qui luttent contre la mort par la lumière et la force vitale du feu. Ses
disciples retournèrent à Valvigne, maintenant une Cité Libre, et allu-
mèrent la Flamme Éternelle en son nom.
À Valvigne, tout en construisant une cathédrale en l’honneur du
fondateur de leur culte, les disciples de Kellos enseignèrent que la
chaleur et la vie étaient intrinsèquement liées, et que leur magie,
qui utilisait la chaleur et le feu, pouvait aussi servir à guérir. Leurs
soins étaient très efficaces, bien que souvent douloureux. Bientôt,
de nombreux citoyens de Valvigne et des terres voisines reçurent les
dons de guérison de Kellos, et les récits des miracles qui en décou-
lèrent se répandirent à travers Terrinoth. On prétendit même que
les prêtres les plus pieux et les plus puissants pouvaient accomplir
le miracle de la résurrection. Les pèlerins vinrent alors à Valvigne
pour assister à ces merveilles ou recevoir le don de guérison à leur
tour, et bon nombre d’entre eux se consacrèrent ensuite à répandre
les enseignements de Kellos le plus largement possible. L’Église de
Kellos était née.
Ceux qui rejoignent cette Église sont appelés Acolytes. Les membres
du bas clergé entretiennent les flammes et s’occupent des troupeaux
de l’Église dans tous les sanctuaires de Terrinoth. Les Acolytes qui
ont l’aptitude d’accomplir de hauts faits divins au nom de Kellos
sont initiés par le rite de l’Étreinte du Feu et deviennent prêtres ou
chevaliers de Kellos. Ils apportent la guérison dans les villes et les
villages, ou parcourent les routes pour annihiler le mal partout où
il naît. Les plus puissants Acolytes de Kellos sont les Grands Prêtres,
qui dirigent la cathédrale de Valvigne. Ceux que l’on appelle Justicars
dirigent les contingents du sacerdoce au cours des batailles dans les
temps les plus sombres.
De nos jours, les flamboyantes robes rouges des prêtres de Kellos
sont un signe de bonne fortune à Terrinoth, car elles promettent châ-
timent pour les brutes et miséricorde pour les humbles. On trouve
la plupart des prêtres aux côtés des malades et des blessés dont ils
prennent soin dans les cités, mais il n’est pas rare d’en voir un se
joindre à un groupe d’aventuriers pour poursuivre sa croisade contre
les éternels ennemis de Kellos : les morts-vivants.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
LES ESPRITS DES LIEUX
O
utre les puissances connues pour ne pas appartenir
à l’ordre naturel du monde, de nombreuses com-
munautés révèrent les esprits locaux qu’elles considèrent
comme protecteurs ou bienveillants. D’autres régions
tentent d’apaiser ou de détourner l’attention des esprits
malveillants qui hantent d’anciens champs de bataille san-
glants ou les forêts primitives.
L’Arbre des Légendes, un grand chêne qui se dresse dans une
clairière près de la lisière est de la Forêt vespérale, en consti-
tue un excellent exemple. Selon la légende locale, l’arbre est
l’hôte d’un esprit puissant que les habitants de Dragonholt
comme les Hyrrinx qui vivent dans la forêt considèrent
comme sacré ou extraordinaire. De nombreux villageois
rendent visite à l’arbre pour lui raconter leurs histoires et
laissent derrière eux des colifichets, des offrandes, et même
des messages écrits. Les nombreux présents pendent des
branches de l’Arbre des Légendes, sont cloués et placardés
sur son tronc ou nichés aux creux de ses branches.
NORDROS, MAÎTRE DU FROID
ET DE LA MORT
Certains temples de Kellos enseignent que les morts-vivants sont les
agents de Nordros le Froid, souverain de l’hiver, qui s’oppose à Kellos.
Selon leurs récits, ce dernier avait un frère jumeau nommé Nordros, si
jaloux qu’il succomba aux sombres promesses de Waiqar. Quand Nordros
rejoignit le Traître, un terrible pouvoir fut libéré en lui : il maîtrisait désor-
mais le froid de la mort. Quand les flammes jumelles de la justice et de
l’espoir vacillent et faiblissent, le pouvoir de Nordros grandit. Les fidèles
du temple affirment que lorsque ce dernier sera définitivement vaincu,
Kellos reviendra et l’hiver sera à tout jamais banni des royaumes.
Selon les Weik d’Isheim, l’existence de Nordros est antérieure à
celle de Waiqar. Nordros serait descendu du nord à l’aube du monde,
chevauchant des blizzards rugissants. Ils prétendent que les valeureux
guerriers d’Isheim le tiennent à distance, mais chaque année, lorsque
le soleil faiblit, il revient. Les Weik et le culte de Kellos ont en com-
mun cette croyance que Nordros doit être tenu en échec, sans quoi il
finira par étendre sa domination sur les royaumes et le monde entier
sera pris dans les glaces.
Le culte de Nordros est pratiquement inconnu à Terrinoth, il n’en
existe que quelques petites congrégations dans les Collines du Géant
Hurleur et la Forêt de Muir Sans Issue. Là-bas, certains lui apportent
encore des sacrifices pour qu’il reste paisible et pour le supplier de
les épargner de sa colère. Quelques individus ambitieux à Havrefou
prêtent allégeance à Nordros et acquièrent le contrôle du froid et de la
mort. Certains espèrent même que leur détermination leur permettra
d’utiliser cette magie sans succomber à la volonté du dieu. Les habi-
tants des cités comme Valvigne et Aubelande persécutent activement
tous ceux qui croient ouvertement en Nordros, et l’Église de Kellos
continue de demander à la Citadelle d’interdire son culte.
ARIS, PATRONNE DE LA PAIX
ET DE LA PROSPÉRITÉ
Dans les années grises et froides qui suivirent les Troisièmes Ténèbres,
quand Terrinoth gisait en ruine sans presque aucune lueur d’espoir,
un soir d’hiver, une voyageuse arriva dans un petit hameau à moitié
brûlé. Ceux qui n’avaient pas succombé à la guerre, à la peste ou à la
famine l’accueillirent du mieux qu’ils purent, mais la prévinrent qu’il
leur restait peu de nourriture, tant pour eux que pour leurs invités.
La femme, qui s’appelait Aris, leur dit de ne pas s’inquiéter.
Puisqu’ils lui offraient un abri, elle fournirait le repas. Elle alla au foyer
et attisa le feu, puis sortit de son paquetage des céréales, de la viande
et des racines en copieuse quantité. On ne sait comment, le ragoût
qu’elle prépara permit de nourrir tout le village ; il en restait même
pour le lendemain.
Dans les semaines qui suivirent, Aris emmena les villageois dans
les bois et leur montra où trouver quantité de noix et de baies. Elle
les aida à reconstruire de douillettes maisons où le froid n’avait pas
sa place. Lorsque des bandits attaquèrent le village, elle parvint à les
convaincre de s’y installer et d’abandonner leur vie de maraude. Puis
elle partit, marchant dans la neige, son sac sur le dos.
On raconte des histoires semblables dans de nombreuses régions
de Terrinoth, mais si même seulement une partie d’entre elles sont
vraies, alors Aris a dû errer pendant cent ans. Ceux qu’elle a aidés lui
ont construit d’humbles sanctuaires dans leurs villages et ont com-
mencé à y déposer des cadeaux dans l’espoir d’obtenir sa bénédiction
et sa protection. Et les malfrats ont vite appris à ne pas y toucher, car
ceux qui en ont volé ont connu de nombreux malheurs tout le reste
de leur vie. Seuls ceux dont le cœur est généreux peuvent prendre
les offrandes pour les redistribuer à ceux qui sont dans le plus grand
besoin. Avec le temps, ces rares êtres ont commencé à s’appeler les
prêtres d’Aris.
Ils travaillent sans relâche pour aider les pauvres, poursuivent
l’œuvre d’Aris et transmettent ses convictions. Les adeptes d’Aris
aident également à arbitrer des différends, les disputes entre voisins
comme les guerres entre barons. Bien que ces prêtres prennent par-
fois les armes pour défendre les faibles, ils considèrent toujours que
la violence doit être utilisée en dernier recours (et qu’elle constitue un
échec personnel).
Le plus grand sanctuaire d’Aris se trouve près du Bassin des Larmes,
à Terrinoth, où le corps de Margath est tombé après que le Seigneur
Dragon a été tué par le seigneur Roland. On prétend qu’il existe un
ordre secret au sein des prêtres d’Aris, appelé l’ordre des Veilleurs, qui
garde le lac pour s’assurer que Margath ne se relève jamais. Certains
prétendent que ceux qui viennent voir le lac au fond du cratère et
boivent son eau reçoivent la force et la vigueur d’Aris elle-même, mais
seulement s’ils en ont vraiment besoin.
FORTUNE, DAME DE LA CHANCE
ET DE LA SUPERCHERIE
Fortune est, sans surprise, une des divinités préférées des aventuriers.
Après tout, si elle leur sourit, ils ont des chances de sortir vivants et
riches d’un donjon ; sinon… c’est le garde-manger d’un ogre qui
les attend.
Les adeptes de Fortune prétendent qu’à une époque, elle errait à
travers les royaumes de Lorimor et faisait partie des plus infâmes intri-
gants et malfrats de son temps. Les histoires disent qu’elle réussit à
duper un duché tout entier en lui faisant croire qu’elle était sa sou-
veraine depuis longtemps disparue. Elle régna pendant un an et un
jour, avant de disparaître en dérobant tous ses trésors à la noblesse à
l’orgueil terni qui avait loué ses manières et reconnu son ascendance.
123
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
Cet exploit et des centaines d’autres ont valu à Fortune qu’on lui
porte un grand nombre de toasts dans d’innombrables tavernes ; avec
le temps, les gens ont commencé à lui adresser une prière avant de
lancer les dés, de truquer leurs cartes ou de monter sur scène. Peut-
être son accession à la divinité a-t-elle été sa plus belle prestation et sa
meilleure supercherie ?
Il n’existe ni clergé ni prêtres de Fortune, alors qu’elle compte
énormément d’adeptes qui recherchent sa bénédiction. Elle n’a pas
de sanctuaires connus ou d’églises érigées en son nom, on ne trouve
que des bols à offrandes dans les tripots pour attirer sa faveur. Dès
que celui qui a versé son obole détourne les yeux, les pièces offertes
semblent disparaître immédiatement, car Fortune est toujours preste à
accepter son dû. L’arrivée des bénédictions souhaitées est, de manière
assez appropriée, surtout une question de chance.
KURNOS, SEIGNEUR DE LA CHASSE
Pendant les Années de Famine, les peuples primitifs des terres
qui deviendraient Terrinoth se tournèrent vers Kurnos pour qu’il
leur accorde bonne chasse et cueillette abondante dans la forêt. Le
Seigneur de la Chasse leur apprit à ne prendre à la terre que ce dont
ils avaient besoin et à honorer les animaux dont la mort leur appor-
tait la vie. Certains prétendent que Kurnos était un Elfe qui, lors de
son exil à Mennara, fut rapidement séduit par ses forêts immaculées
et abandonna les autres Latari. Son amour de la nature était si fort
que lorsqu’il rencontra l’une des espèces mortelles, il lui enseigna
comment vivre en parfaite harmonie avec elle. Compte tenu de
l’espérance de vie infinie des Elfes, il erre peut-être encore dans ce
monde, mais ses fidèles se préoccupent peu de telles suppositions.
Pour eux, Kurnos est simplement leur patron, et chaque chasse un
acte de dévotion envers lui.
De nos jours, les fermes et les cités de Terrinoth dépendent de
l’agriculture pour leur subsistance ; souvent, seuls les rôdeurs, les
nomades et les habitants des villages isolés se souviennent de Kurnos.
Bien que les sanctuaires qui lui sont dédiés soient disséminés dans
toute la campagne, ses fidèles affirment que tout ce qui se trouve
sous la canopée fait partie de son domaine sacré. Quand un chasseur
veut honorer Kurnos, il prélève une belle pièce sur sa proie et la
cache aussi astucieusement que possible. Le Seigneur de la Chasse
aime traquer ces offrandes ; plus la chasse est difficile, plus belle est
la récompense accordée.
Les druides de Kurnos sont également réputés pour leurs guérisons
miraculeuses. Ils sont capables de contrôler le comportement de bêtes
sauvages et peuvent trouver refuge même dans les environnements les
plus hostiles. Ils errent dans la nature et pourvoient aux besoins de
la terre, s’assurant que l’harmonie entre les peuples, les plantes et les
bêtes est préservée. Les adeptes de Kurnos les plus pieux se réunissent
parfois pour célébrer les pleines lunes au Cercle du Chasseur, près du
Lac de Kurnan, où leurs hurlements se perdent dans l’immensité du
ciel avec ceux de leurs compagnons animaux.
POLLUX L'INVENTEUR
Les Inventeurs de Pollux ne semblent pas accomplir de miracles à la
façon des disciples de Kellos. Ils ne sont célèbres ni pour leurs prières
ni pour leurs actes miraculeux. Ils exercent leur magie en réalisant des
exploits d’ingénierie, en étudiant aussi bien les enchantements que
des compétences plus triviales telles que la menuiserie ou la forge. Les
124
lieux saints consacrés à Pollux sont des ateliers et des forges où les dis-
ciples inventent et construisent des artefacts aux puissantes propriétés
magiques. Ses textes sacrés sont des traités sur les éléments naturels
et des formules de réactifs rares. Une prière à Pollux est un appel à
l’inspiration et à l’ingéniosité pour fabriquer ce qui semble impossible.
Personne ne sait qui était Pollux ni à quoi sa vie fut occupée ;
homme ou femme, son nom ne figure dans aucun récit historique
d’exploits ou de grandes aventures. En revanche, son nom apparaît
dans une série de traités et de schémas découverts par des inventeurs
à l’époque des Anciens Rois. Gravés sur de fines feuilles d’acier, cha-
cun décrivait une merveille de construction, un artefact, donnait la
formule d’une création alchimique ou d’un réactif magique. Tous
étaient signés « Pollux ». Les inventeurs à l’origine de cette heureuse
découverte suivirent les instructions de Pollux et affirmèrent que ses
dessins étaient d’inspiration divine. Chaque traité devint rapidement
une sainte relique.
Les habitants de Terrinoth apprécient les Inventeurs, bien qu’ils
s’en méfient. D’un côté, les adeptes de Pollux ont créé et construit un
certain nombre d’artefacts grandement admirés utilisés pour bâtir des
édifices publics et dans les opérations militaires. Ils ont créé les solides
Forgés dans l’Acier pour combattre les magiciens maléfiques et les tra-
quer dans leurs antres de Nerekhall. Par ces exploits, et bien d’autres,
les Inventeurs de Pollux prouvent leur dévouement et démontrent le
pouvoir que la foi en leur dieu peut offrir.
Pourtant, ils protègent jalousement leurs formules et ne partagent
leurs connaissances qu’avec ceux qui jurent de garder le secret. Ceux
qui envient leurs réalisations, en particulier certains Maîtres des Runes
de Havregris, ont répandu d’ignobles rumeurs sur la source de leurs
merveilles. Les Inventeurs de Pollux sont prompts à répliquer que de
telles allégations sont des calomnies sans fondement ; ils insistent sur
le fait qu’ils ont la responsabilité de garantir que l’héritage de Pollux
ne se retrouve pas entre de mauvaises mains.
SYRASKIL, MARNN
ET LES SEIGNEURS DES TEMPÊTES
Lorsque le ciel s’embrase d’éclairs noirs, le monde tremble. À l’hori-
zon, à l’ouest de la Grande Mer, une sombre tempête fait rage. Ceux
qui osent s’aventurer au-delà de ces nuages pour explorer le grand
inconnu ne reviennent jamais. Les Seigneurs des Tempêtes ont une
fois de plus réclamé leur dû.
Les marins qui sillonnent les mers entre Al-Kalim et les Torue
Albes, ou celles qui bordent Lorimor, la Côte autonome et le loin-
tain Zanaga s’assurent d’apaiser Syraskil, le serpent du chaos qui garde
les confins du monde, avec des offrandes suffisantes, de peur d’en-
courir sa colère. Ils font des signes protecteurs pour éloigner Marnn,
le géant de nuées, qui réduirait leurs navires en mille morceaux de
son immense marteau. Ces deux divinités et les autres Seigneurs des
Tempêtes regardent avec envie les merveilles de Mennara et les détrui-
raient volontiers s’ils en avaient la possibilité. La légende raconte que
les mythiques sept descendants les ont affaiblis, mais qu’avec le temps,
la tempête reprendra toute sa vigueur.
Certains croient qu’ils peuvent exploiter ce pouvoir et utiliser la puis-
sance des mers en colère et des vents violents pour causer des ravages
dans les rangs ennemis. Ces sinistres adeptes renforcent les Seigneurs
des Tempêtes, rapprochant toujours un peu plus le jour de leur retour.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

LES VERTUS DE LA VIRTUOSITÉ

L a musique fait partie de l’histoire de Mennara depuis ses ori-
gines ; la plupart des récits les plus anciens n’existent que sous
forme de chansons transmises de génération en génération. Même
dans les temps les plus sombres, la musique et le chant ont été utilisés
pour diriger les troupes, renforcer leur volonté et leur sentiment de
fraternité. La musique, cependant, peut être beaucoup plus que cela
à Mennara. Quand les êtres les plus talentueux ou les plus dévoués
mettent tout leur cœur dans leur performance, c’est littéralement
comme s’ils jetaient un sort à leurs auditeurs.
Les Elfes, qui savent tant de choses sur la nature profonde de
ce monde, ont depuis longtemps perçu le lien entre la magie et la
musique. Très tôt, ils ont appris qu’une musique, même ordinaire,
résonne avec les Lais du Premier, qui se propagent à travers toute la
création et la nourrissent. C’est peut-être pour cette raison que les
chansons, la danse et la musique sont des éléments fondamentaux de
toutes les cultures, des premières tribus des Steppes du Ru aux plus
hauts cercles de la société elfique. Chaque être a en lui une part primi-
tive qui se souvient des chants de la création, et tous retrouvent incon-
sciemment ce pouvoir quand ils ressentent ou cherchent à inspirer des
émotions puissantes.
Chaque culture a ses propres traditions de chant et de musique,
où les mélodies et les musiciens tiennent différents rôles en fonction
des besoins. Les Maîtres du Savoir des Elfes chantent les histoires de
leur peuple, utilisant le rythme et les harmoniques là où les mots seuls
ne suffisent plus. Les Nains font résonner sous terre leurs chants de
labeur ancestraux aux rythmes entraînants pour travailler en cadence.
Les Gnomes se servent de la musique pour alléger le poids de leurs
bagages et se remonter le moral lorsqu’ils voyagent de ville en ville.
Les Félis utilisent des chansons pour appeler les tribus à se rassem-
bler en cas de besoin et communiquer quand ils chassent. Les peuples
orcs chantent pour célébrer leurs ancêtres et les esprits de la terre qui
les nourrissent. Les Humains, évidemment, ont recours à la musique
pour impressionner et courtiser leurs semblables, ou simplement pour
passer le temps.
Les chanteurs, musiciens, danseurs et poètes suffisamment doués
et dotés d’une grande sincérité sont capables de produire des effets
magiques grâce à leurs mélodies, leurs mots et leurs mouvements. La
structure de leurs vers, l’harmonie de leurs chants ou leurs techniques
instrumentales évoquent la magie de ces lais originels ou inspirent
une réaction quasi magique à l’auditeur. En conséquence, les bardes
n’ont pas besoin d’être formés comme magiciens pour déclencher ces
effets ; la plupart d’entre eux, qu’ils soient ignorants en matière de
magie ou par simple vantardise, attribuent l’effet de leur musique à
leur virtuosité.
Les sorciers et les Maîtres des Runes diraient que la magie des
bardes est beaucoup plus limitée et subtile dans ses effets que la leur,
mais les troubadours connaissent la puissance de leur art. Grâce à
lui, ils peuvent améliorer leur moral et celui de leurs compagnons,
insuffler une énergie revitalisante, renforcer la détermination, aider
à la concentration ou pousser à marcher plus vite et plus longtemps.
Certains artistes sont même capables de produire des dissonances
troublantes qui provoquent la peur ou un certain malaise chez leurs
cibles. Pour ces raisons, malgré le mystère qui entoure leur art, les
bardes sont des membres tout aussi appréciés dans les compagnies
d’aventuriers que dans les communautés sédentaires.

LES INSTRUMENTS
DE MENNARA

L es instruments de musique des bardes sont aussi

divers que les terres de Mennara. On trouve cepen-
dant des instruments à cordes, comme des luths, des
cithares et des lyres, dans toutes les régions, et certains
bardes connus de Tamalir utilisent souvent de petites
écailles de Dragon pour faire vibrer les cordes. Les instru-
ments à archet comme les violes et les lyres d’Al-­Kalim
offrent des sons plus riches mais nécessitent une plus
grande technique. Quelques bardes utilisent des tambours,
des carillons et même des lyres à cloche, en particulier
pour jouer des rythmes guerriers avant une bataille.
Les bardes qui ne chantent pas préfèrent les instruments à
vent, comme les cornemuses et les flûtes. Les cors sont éga-
lement populaires ; ceux des Elfes sont fabriqués dans des
matériaux offerts par des créatures sensibles de l’Aymhelin.
Les plus connues, cependant, sont les cornemuses du
Dunwarr en peau de Dragon tannée qui, selon les fables,
peuvent mettre en déroute des armées entières.

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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure

LE SHAMANISME
P ersonne ne sait avec certitude d’où viennent les esprits ni quel
est leur lien avec les Dragons qui ont créé Mennara. Lorsqu’on
leur demande leur âge ou la façon dont ils sont venus à l’existence,
Le shamanisme reste l’une des plus anciennes formes de magie, née
de la nécessité pour les premiers peuples de coexister avec un paysage
tumultueux peuple d’esprits. Au fil des âges, les arts arcaniques ont
la plupart des esprits ne répondent pas, car ils ne connaissent pas ces supplanté le shamanisme dans de nombreuses cultures en raison de
notions de temps, d’existence et de non-existence. Certains cher- leurs effets plus visibles et d’un aspect plus pratique : les magiciens
cheurs émettent l’hypothèse que les esprits sont le fruit d’une accu- n’avaient pas à amadouer ou apaiser une autre entité pour obtenir les
mulation d’énergies magiques de la Rotation en des lieux particuliers, effets désirés. Cependant, dans les cultures qui vivent encore en lien
qui finissent par fusionner en êtres intelligents. D’autres postulent étroit avec la nature et la terre, comme les tribus orques des Plaines
que les esprits étaient des êtres qui se sont enfuis de l’Aenlong et se Brisées, les fiers Singhara de Zanaga, les Gnomes Onoit d’Isheim,
sont installés dans le Firma Dracem. D’autres encore pensent qu’ils ainsi que de nombreuses colonies humaines reculées, à Terrinoth et
sont des effets secondaires accidentels de la création du monde par au-delà, le shamanisme est toujours une partie extrêmement impor-
l’Yrthwright Mennara. tante du quotidien et demeure essentiel à la survie.
Tout ce qui est certain, c’est que les esprits résident dans des Nombre de shamans ont l’air excentriques et étranges, et sont
endroits merveilleux partout à Mennara, bien qu’ils semblent surtout imprégnés d’une touche de nature sauvage, probablement parce que la
se rassembler dans les zones sauvages, loin des cités et des villes. Peut- plupart d’entre eux vivent isolés dans des lieux hostiles pour être plus
être en est-il ainsi car ils préfèrent habiter dans des arbres séculaires ou proches des esprits. Les excentricités et les surprenantes préoccupa-
des grottes brumeuses, le genre d’endroit qu’un peuple qui s’installe tions des esprits peuvent influencer les manières de penser et de parler
quelque part évite ou aménage à sa guise. Ou bien est-ce simplement des shamans, ce qui peut aussi expliquer leur air étrange. Ou peut-être
parce que les esprits n’aiment pas beaucoup les espèces mortelles, et est-ce simplement qu’en apprenant à connaître la nature du monde
donc qu’ils gardent leurs distances ? qui les entoure, les shamans acquièrent une sagesse qui échappe à ceux
qui les méprisent.
Il existe également une confusion entre les esprits de la terre et
les spectres qui hantent des lieux entachés de colère, de désespoir ou
de violence. Les esprits que l’on rencontre dans la nature sont
plutôt considérés comme des avatars ou des émissaires
du monde naturel, qu’ils soient les esprits de lieux,
d’objets ou d’organismes particuliers, comme des
arbres. Les shamans seraient également capables de
communier avec des fantômes n’ayant pas trouvé le
repos, mais personne n’a osé tenter de parler avec les
spectres qui infestent les Terres des Brumes.
Les shamans sont des êtres qui ont le don, ou peut-
être simplement la patience de communiquer avec
les esprits. Ils apprennent à éveiller ou chercher
leur attention en utilisant le chant, les percussions,
la danse et les offrandes, sous forme de cadeaux ou
de services. Une fois qu’ils ont obtenu l’attention
des esprits, ils peuvent leur demander des faveurs,
comme guérir une blessure ou avoir de la chance
dans une situation particulière. Il n’est pas rare que
les shamans demandent à un esprit de faire du mal
à un ennemi, en particulier lorsque celui-ci a éga-
lement offensé l’esprit. Les esprits peuvent également
transmettre une partie de leur magie aux shamans, leur
permettant ainsi de se battre avec la puissance de la flamme, du
vent, de la pierre ou de l’eau.
À certains égards, l’art des shamans ressemble à celui des
Arpenteurs de Rêves, car les esprits peuvent partager leurs
connaissances avec ceux qui communiquent avec eux. Les infor-
mations transmises par les esprits sont un peu plus fiables que celles
des rêves, mais aussi plus limitées. Si le shaman impressionne l’esprit
interrogé, ce dernier sera plus enclin à révéler la vérité, mais il se limi-
tera aux informations dont il dispose ou qu’il a apprises par d’autres
esprits. Les réponses ainsi obtenues par les shamans sont souvent plus
claires que celles glanées dans les rêves, mais elles se limitent aussi
souvent à un simple « je ne sais pas ».

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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre II : L’appel de l’aventure
LA MAGIE ELFIQUE
A lors que les sorciers humains tirent leurs énergies magiques du
Verto Magica, les Elfes puisent dans d’autres sources de pou-
voir. Selon leur mythologie, les Elfes habitaient autrefois dans l’Em-
pyréen, un royaume parfait qui se trouvait dans un plan supérieur au
royaume mortel. Les Elfes furent profondément affligés de perdre leur
foyer dans l’Empyréen, mais en récompense de sa repentance et de son
sacrifice, Latariana pu créer les étoiles dans le ciel nocturne, dont la
première, selon la tradition elfique, offre une fenêtre minuscule, mais
bien ouverte, sur l’Empyréen.
Un flux constant d’énergie de l’Empyréen filtre à travers cette fenêtre
et aide à nourrir le royaume mortel. Les Elfes sont capables de perce-
voir de manière exceptionnelle cette énergie, qui permet aux prêtres de
réaliser des miracles s’ils suivent les traditions du Chemin des Étoiles.
LES LARMES DE LATARIANA
D ’après les chansons des Elfes, quand Latariana
fut bannie à cause du rôle qu’elle avait joué dans
la Chute, elle pleura sur son destin et son peuple. Ces
larmes se cristallisèrent dans les mains de son époux
Émorial, qui les transmit ensuite aux chefs de chacune
des onze tribus elfiques.
Les Larmes, du moins dans leur forme originelle, étaient
constituées d’énergie de l’Empyréen cristallisée. On pense
que, tant par leur forme que par leur fonction, ce sont des
artefacts précurseurs des Étoiles de Timmorran à bien des
égards. Une Larme de Latariana s’utilise à peu près de la
même manière qu’une Étoile de Timmorran. Ces Larmes
constituent de grandes réserves d’énergie de l’Empyréen et
peuvent alimenter des sorts extrêmement puissants.
Toutefois, il n’existe que onze Larmes de Latariana, ce qui
les rend encore plus rares que les quelques Étoiles libres
de Timmorran (donc vierges de toute rune gravée par un
Dragon). Chacune est l’apanage d’un chef de tribu, et
comme tant d’objets magiques puissants et symboles de
pouvoir vénérés, elles sont soigneusement gardées. En
de rares occasions, un seigneur Elfe peut accepter qu’une
Larme de Latariana soit utilisée pour accomplir une grande
œuvre magique au profit de l’ensemble de Mennara, mais
il ne la confiera jamais à quelqu’un d’extérieur aux tribus.
Depuis la création des Larmes, l’une d’elles a été perdue.
La Larme de l’Ombre appartenait à Malcorne, le seigneur
de la tribu Daewyl. On prétend qu’il imprégna la Larme
des énergies de l’Ynfernael, puis qu’il l’utilisa pour ouvrir
des brèches entre le royaume mortel et le plan démo-
niaque. Cette Larme disparut lors des événements de la
Guerre de l’Ombre ; si elle est toujours intacte, alors un
puissant artefact, combinant à la fois les magies de l’Em-
pyréen et de l’Ynfernael, attend que quelqu’un le trouve.
LES ARTS
DE L'EMPYRÉEN
On connaît quatre sphères de l’Empyréen : celles de la Lumière, de
l’Air, des Rêves et de la Vie ; on pense qu’elles furent utilisées par les
Yrthwrights pour créer Mennara. Quand il canalise les énergies de
l’Empyréen, un prêtre Elfe puise généralement dans une seule de ces
sphères pour en travailler la magie ; il peut également concevoir un
rituel plus complexe afin de puiser dans deux sphères ou plus. Selon
les mythes elfiques, Émorial et Latariana obtinrent autrefois de régner
sur l’air et la lumière. Que ces mythes soient véridiques ou non, les
prêtres elfiques ont beaucoup plus de facilité à accéder aux énergies de
ces deux sphères qu’à celles de la vie et des rêves.
D'AIR ET DE LUMIÈRE
Avant leur Chute, les deux Elfes originels incarnaient l’air et la
lumière. Leurs descendants ont encore accès à ces sphères grâce à la
Porte de Latariana. Pour eux, apprendre des sorts en lien avec l’air et la
lumière est très aisé, et même ceux qui ne se consacrent pas à la prêtrise
elfique sont capables de créer ou de dissiper de petits globes lumineux,
ou d’invoquer une légère brise.
De subtiles différences existent entre les sorts qui manipulent l’air
ou la lumière du Firma Dracem et ceux qui les invoquent de l’Em-
pyréen même. Pour illuminer un recoin sombre, un Elfe redirige la
lumière d’une partie de la pièce à une autre, ce qui ne présente pas
grand danger. En revanche, jeter un sort pour invoquer la lumière du
jour dans une caverne noire comme une tombe signifie invoquer cette
lumière directement depuis l’Empyréen, ce qui exige beaucoup plus
de volonté et de concentration.
DE VIE ET DE RÊVES
Avant leur Chute, les Elfes convoitaient les pouvoirs de la vie et des
rêves. Latariana désirait tant régner sur ces sphères qu’elle poussa son
mari à commettre une grande folie ; comble de l’ironie, son peuple se
retrouva alors prisonnier d’un monde où l’air, la lumière, la vie et les
rêves existaient en abondance.
Bien qu’ils n’aient pas le même lien avec la vie et les rêves qu’avec les
éléments précédents, les Elfes qui rejoignent les rangs des prêtres du
Conseil Stellaire apprennent les mystères de ces deux autres sphères.
Grâce à l’étude et à la pratique, les guérisseurs peuvent puiser dans
la puissante magie de la vie pour accomplir des guérisons exception-
nelles comme on en voit rarement en dehors de l’Aymhelin. Les chairs
ouvertes se referment sans effort et sans douleur, les os cassés se res-
soudent et sont encore plus solides qu’auparavant. Les prêtres soignent
les maladies du corps et de l’esprit, apaisent les troubles émotionnels,
dissipent la colère et la peur.
Les rêveurs passent la plupart de leur temps plongés dans le sommeil,
et utilisent leurs rêves comme un portail vers l’Aenlong. Là, ils peuvent
marcher entre les mondes et entrevoir ce qui fut, ce qui est et ce qui sera.
En utilisant l’Aenlong comme pont, ils peuvent aussi se rendre jusqu’aux
confins de Mennara pour toucher l’esprit d’autres rêveurs et découvrir
leurs espoirs, leurs peurs et leurs désirs. Forts de ces connaissances, les
Elfes essayent d’empêcher les conflits avant qu’ils n’éclatent et connaissent
généralement le meilleur moment pour intervenir. Toutefois, dès qu’ils
ont goûté aux rêves, peu de rêveurs parviennent à rester longtemps dans
le monde éveillé. La plupart passent leur vie éternelle à dormir sous les
plafonds blancs scintillants du Temple aux Étoiles.
127
 Depuis la Guerre de la Larme de l’Ombre, des parties de la
sphère des rêves sont entachées par des énergies de l’Ynfernael, et LE CHEMIN DES ÉTOILES
il arrive que des cauchemars envahissent l’esprit du rêveur, qui est

alors ensuite hanté par les visions d’horreur dont il a été témoin. Les
grandes prêtresses Elfes pensent que ce phénomène est lié aux brèches
entre l’Aenlong, l’Ynfernael et Mennara ouvertes par Malcorne et les
membres de sa tribu.
Cependant, les Elfes ne sont pas les seuls à savoir arpenter les
rêves. Jadis, les shamans de la tribu des Loth Caara étaient connus
pour voyager dans le royaume de T’mara T’rusheen, « qui s’étend
au milieu », ce qu’ils ont peut-être appris à faire grâce aux Elfes qui
vivaient parmi eux. Les shamans entraient en transe pendant la pleine
lune pour prédire les déplacements des proies afin d’aider les chas-
seurs, ou prévoir les catastrophes afin que la tribu puisse les éviter. On
suppose que ce plan intermédiaire est le même que celui sillonné par
les Elfes dans leurs rêves. Les Augures de la Nuit des tribus Uthuk ont
maintenant envahi ce plan avec leur version corrompue du T’mara
T’rusheen, et utilisent l’Aenlong pour rencontrer des démons avant
de les invoquer de l’Ynfernael dans ce monde.
L
atariana ouvrit un chemin par lequel ses descendants
pourraient expier ses fautes, ainsi que celles d’Émo-
rial. Les tout premiers prêtres et prêtresses consacrèrent
leur vie à découvrir l’Escalier de Latariana et à en entre-
prendre l’ascension, par la méditation, l’introspection et
la prière. Toutefois, au cours des millénaires suivants, les
rangs de la prêtrise se trouvèrent divisés quant au rôle que
devaient jouer les Elfes dans le reste de Mennara, certains
prêchant l’isolement, d’autres l’implication.
La plupart des prêtres et prêtresses appartiennent aux Eolam,
ils sont extrêmement âgés et ne se sont jamais aventurés hors
de la cité de Lithelin. Les flèches du Temple aux Étoiles sont
presque aussi hautes que celles de Caelcira, le palais d’argent,
et les grandes prêtresses rendent régulièrement visite au roi
dans l’espoir que son épouse et lui se rallient à leur cause.

L'UNION DES SPHÈRES

Un sorcier humain qui souhaite créer une rafale de vent invoque et
manipule l’énergie du Verto Magica pour lancer son sort. Pour obtenir
le même résultat, un magicien elfique a besoin d’invoquer une cer-
taine quantité d’air, puis une petite quantité de vie afin de propulser
la rafale. Un sort plus complexe, comme créer l’équivalent d’une
boule de feu lancée par un sorcier humain, exige la contribution
de trois sphères : l’air pour alimenter le sort, la lumière pour
l’imprégner de feu et la vie pour propulser le projectile. Plus le
sort est complexe, plus le nombre de sphères impliquées dans
sa création est important, plus l’équilibre entre les différentes
énergies tirées des sphères est difficile à trouver.
Certains processus magiques mis en œuvre par les vrais
sorciers sont pratiquement impossibles à reproduire avec la
magie de l’Empyréen, en particulier les sorts qui influencent
directement l’eau et la pierre. Pour un sorcier, créer un glis-
sement de terrain ou une inondation est un acte magique
simple et direct. Les prêtres elfiques ne peuvent accomplir de
tels exploits que par des moyens détournés, tels que l’invoca-
tion de rafales de vent pour faire tomber des rochers.
En revanche, la magie d’illusion est facile à manier pour les
magiciens elfiques. N’importe quelle vision peut être invoquée à
partir de la sphère des rêves. En combinant de telles visions avec
les énergies des sphères de lumière et de vie, il est possible d’animer
ces illusions, et, dans des cas
extrêmes, de les faire interagir
avec le monde réel.

128
 L'ORDRE DES DARNATI
C omme le triste Émorial avant eux, les Guerriers
Darnati croient qu’ils ne pourront gravir l’Escalier
de Latariana que s’ils parviennent à vaincre les ténèbres
qui ont précipité leur peuple dans ce monde. À cette fin,
ces guerriers prennent des apprentis dans leurs mystérieux
temples, loin des enseignements traditionnels des Filles de
l’Empyréen. Là, les futurs combattants apprennent la dis-
cipline, découvrent les mystères et les rituels qui forment la
base de leur danse sacrée. Tout cela se passe sans qu’un mot
ne soit prononcé, grâce à un langage de signes et de gestes
complexe, car les guerriers Darnati accomplis font vœu de
silence. Leurs voix ne résonnent que pour leurs prières et
la lecture des textes sacrés, dont les mots servent de cri
de ralliement au combat. Parfois, ils murmurent aussi ces
paroles à leurs épées dans le cadre de leur danse sacrée.
LA SORCELLERIE
ELFIQUE
Bien que les Elfes aient tendance à préférer leur approche de la magie,
qui fait appel à l’énergie pure de l’Empyréen, certains d’entre eux étu-
dient les arts arcaniques et canalisent l’énergie de la Rotation de la
même manière que les magiciens ordinaires.
Comme elles maîtrisent le pouvoir brut de la nature, les Sorcières
des Tempêtes Latari sont aussi admirées par les soldats Elfes que
craintes par leurs ennemis. Quand les enfants des Latari acceptèrent la
charge de gardiens de la majestueuse forêt de l’Aymhelin, ils apprirent
à utiliser leurs dons pour puiser dans le pouvoir de la pluie et du vent,
afin de protéger la fragile vie végétale ou de faire tomber des averses
pour alimenter les cours d’eau desséchés. En tant que protecteurs de
la forêt, ils apprirent à créer des rafales terribles pour punir quiconque
oserait pénétrer sur leurs terres sacrées. Outre la force d’une tempête
déchaînée, ces sorcières invoquent la foudre pour attaquer leurs enne-
mis à des distances impossibles et électrocuter les guerriers à l’intérieur
de leurs armures en métal, tout en protégeant leurs alliés des flèches
enflammées des ennemis avec des torrents de vent et de pluie.
COMPLICES
DE LA FORÊT
Les anciens chants des Latari les réconfortèrent quand leur peuple
arriva à Mennara après la Chute, mais ces Elfes ne s’attendaient pas
à ce que leurs mélodies éveillent la forêt elle-même. Leurs voix firent
vibrer une joie inconnue dans les cœurs mystérieux de la jeune forêt,
insufflant du mouvement aux racines, aux branches et aux troncs de
ces bois. Ainsi furent éveillés les tout premiers Finwalyn, les enfants
de la forêt, et les Elfes comprirent que finalement, on leur avait peut-
être accordé une certaine influence sur la sphère de la vie. Les
jeunes arbres poussèrent, toujours plus grands et plus forts,
et devinrent les puissants gardiens de la forêt que l’on voit
parfois marcher aux côtés des armées des Latari.
Depuis lors, les Complices de la Forêt ont appris
à chanter, à parler aux plantes et aux arbres pour
leur demander de pousser dans certaines direc-
tions, permettant ainsi aux Elfes de construire
leurs cités en relative harmonie avec la nature.
En de rares occasions, les Elfes demandent son
aide à la forêt dans leur combat contre l’en-
nemi : celle-ci déchaîne alors ses bruyères,
ses épines, ses lianes et tous ses branchages
contre ceux qui osent s’introduire dans son
havre de paix émeraude. Au lendemain de
telles batailles, les pouvoirs des Complices
de la Forêt permettent aussi aux Elfes de
guérir des parties de l’Aymhelin abîmées par le
feu ou la corruption démoniaque, ramenant la vie
végétale à son état verdoyant d’origine.
Pour les étrangers, la magie des Complices de
la Forêt ressemble à la fois à celle des shamans et à
celle des bardes. Quand on les interroge sur ces simili-
tudes ou qu’on leur demande quelle est la véritable source
de leur pouvoir, les Elfes répondent simplement par une
mélodie mystérieuse et plaintive.
129
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi

n apercevait des signes de civilisation sur les pour examiner la pièce. Je fus surpris de voir que, même en
lointaines collines, mais, au bord de la route, ce début d’après-midi, plusieurs groupes de ce que je pris
tout n’était qu’enchevêtrements de forêt épaisse pour des magiciens et des conjurateurs étaient agglutinés autour
et étendues de prairie déserte. Comme toujours des tables, parlant à voix basse et feutrée…
dans cette terre perdue, des ruines d’une architecture ancienne
étouffées par des lianes saillaient ici et là dans la verdure, et les Note du traducteur : plusieurs pages manquent ici.
statues abîmées par les intempéries, à l’ombre sous les arbres de Je quittai la Fiole Cassée sans un regard en arrière. Après
part et d’autre du chemin, me fixaient d’un regard vide. avoir récupéré Ibn, je descendis la rue et dépassai l’angle, sans
Nous avons traversé un paysage qui, malgré sa tranquillité et même un instant de réflexion ni de regret pour l’or que j’avais
son calme apparents, dégageait néanmoins une aura de tragédie abandonné en partant.
et de défaite. J’étais complètement innocent. Je le savais. Mais un lit qui
Nous approchions de notre prochaine destination, et je ne voyais explose alors qu’un habitant du coin fait un petit tour dans la
rien qui aurait pu distinguer Havregris de toutes les autres chambre d’un étranger, et qui laisse un mort sur le carreau… Il
grandes cités que j’avais visitées jusqu’alors. L’architecture y était n’existe aucun endroit, dans aucun royaume, où cette situation
peut-être un peu plus grandiose que ce à quoi on aurait pu finit bien pour l’étranger.
s’attendre si loin dans la campagne : de nombreux grands édifices Je poussai Ibn pour qu’il adopte un trot cahoteux et traversai
ornementés s’élevaient jusqu’au ciel, défiant la gravité comme la cité aussi vite que je le pus, sans regarder en arrière. Le
tout esprit de commodité. pauvre petit poney était tout dépité que je l’a ie sorti de
Dépourvue de murs d’enceinte, la cité semblait à la merci sa confortable stalle pleine de foin. Mais je lui promis une
de n’importe quel groupe mal intentionné. Cependant, en pomme quand nous ferions de nouveau halte, et je me plus à
parcourant les rues, j’observai immédiatement de nombreuses imaginer qu’il me pardonna.
différences entre Archaut, la lointaine capitale, et Havregris. Je Finalement, je m’installai dans une petite auberge minable située
commençai alors à penser qu’il n’était peut-être pas nécessaire dans un des quartiers les plus sales et les plus sombres de
de bâtir un rempart pour chasser une bande de mécréants, l’ouest de la cité. L’enseigne délavée au-dessus de l’épaisse porte
même fortement armés. La cité était un lieu d’apprentissage d’entrée bardée de fer annonçait « La Main du Mage »,
et de commerce très animé, évidemment. Les rues étaient même si je pense que peu de mages ont jamais fréquenté ce
remplies de toutes sortes de gens – des paysans discrets aux quartier. L’écurie était sale, sa paille souillée dégageait une
nobles hautains, on y trouvait l’éventail complet de l’humanité. odeur nauséabonde, mais plus je nous éloignerais du corps qui
refroidissait dans ma petite chambre à la Fiole Cassée, plus
Partout où je regardais, je voyais des érudits qui se déplaçaient nous serions en sécurité tous les deux.
seuls ou en groupes, serrant à s’en faire blanchir les jointures des
livres, des parchemins ou des cartables de leurs doigts jaloux. La salle commune de La Main du Mage était beaucoup plus
Sous le grand soleil d’A ’tar, chaque rue semblait regorger de petite que celle de mon auberge précédente, mais les gens ici
cantines, tavernes et cafés, de salons, académies et instituts semblaient plus insouciants, d’une certaine manière, que les
se proclamant maîtres de toutes les disciplines. Je découvris clients austères de la Fiole Cassée. Quand je commandai un
des magasins qui semblaient répondre à tous les désirs, des verre à emporter dans ma chambre, l’aubergiste ne me demanda
besoins du corps les plus triviaux à ceux, plus ésotériques, qui pas ce que je voulais, il posa simplement un verre sur le
n’intéressent que les esprits malades. comptoir, qu’il remplit et poussa vers moi avec un petit sourire
narquois. J’avais à nouveau payé d’avance, ne voulant pas attirer
Je décidai de commencer mes recherches en entrant dans la salle l’attention en marchandant, et il était donc, du moins pour
commune de la Fiole Cassée, une auberge qui semblait capable l’instant, bien disposé envers moi.
d’épuiser la bourse du Calife. L’aubergiste insista pour que je
paye d’avance pour deux nuitées et la pension d’Ibn. Après Je ne goûtai la boisson qu’une fois dans ma petite mansarde. À
avoir posé l’argent sur le comptoir à contrecœur, je me retournai la première gorgée, je fus très agréablement surpris. Le liquide

130
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
avait un goût sucré, sans amertume, et même s’il ne pourrait
jamais soutenir la comparaison avec les millésimes de la cave
du Calife ou des Champs de la Fertilité, il était néanmoins
agréable en bouche. J’étais tellement étonné que je redescendis
pour demander de quoi il s’a gissait et en avoir un autre verre.
Je ne sais ce qu’est l’« hydromel », mes futurs enfants,
mais j’a i l’intention d’en apprendre le plus possible à ce sujet.
Et si l’on peut facilement s’en procurer ailleurs dans Terrinoth,
mon séjour ici en sera d’autant moins désagréable.
Je bus mon hydromel assis sur mon lit étroit, en fixant le
mur tordu et décoloré. Il était maintenant évident que je ne
devais plus montrer la pierre à personne à Havregris.
Je comprends enfin la gravité de ma situation. Ma vie est en
danger. J’a i besoin de réponses sur la pierre, mais le simple
fait de l’avoir en ma possession m’expose à un péril mortel.
La boisson m’a embrumé l’esprit. Je crains d’avoir abusé de
ce breuvage sucré en réaction aux événements de la journée.
Je vais donc terminer là le récit de ce jour, mes chers futurs
descendants. Que ceci soit un double avertissement pour vous :
évitez toujours de vous retrouver mêlés aux affaires des Califes
et des magiciens. Les récompenses valent rarement la peine et
les angoisses que tout cela suscite.
‰‰‰‰‰
Dans d’autres pays, on porte des
épées ou des arcs ; ici, tout le
monde semble avoir un bâton ou
une baguette à portée de main.
131
Je suis dans cette cité froide et sèche depuis des jours. Cinq,
je pense, même si j’a i bien pu perdre le compte à cause de
la frustration et l’ennui. Peut-être cela ne fait-il que deux
ou trois jours, finalement… Chaque journée me semble une
éternité, et je n’en sais pas plus que lorsque je suis arrivé dans
cet endroit de malheur.
J’a i longuement fait le tour des écoles, des conservatoires et des
bibliothèques, et je n’a i rien appris de plus, à part le plan des
rues sinueuses de cette cité tordue. Je crains de plus en plus
d’être suivi.
Je me fais sûrement des idées, car j’éprouve un sentiment de
culpabilité vague et troublant, bien qu’entièrement injustifié,
pour la mort du magicien, Cindar. J’aperçois sans cesse des
mouvements furtifs du coin de l’œil, mais dès que je me
retourne, il n’y a plus rien.
J’ai passé ma première journée complète dans la cité à errer
sur les larges boulevards des quartiers est, où se trouvent les
édifices les plus grands et les plus ostentatoires. Une rue en
particulier, appelée la Voie de la Lumière sans autre raison
apparente que celle qui semblait évidente, était bordée de hautes
tours et de murs de pierre multicolores. Les membres des
académies logés dans ces édifices dégoulinants d’autosatisfaction
étaient manifestement convaincus de leur sagesse et de leur
puissance, mais ils ne me furent que de peu d’utilité.
J’ai maintenant presque peur de mentionner l’existence de
la pierre, ce qui entrave considérablement mes recherches sur
l’histoire de ces gemmes et la façon dont leur pouvoir peut être
libéré. Toutefois, même si je paradais sur la Voie de la Lumière
et hurlais pour demander de l’aide, je doute que quiconque dans
cette rue soit en mesure de me répondre. La Maison Noire,
qui se trouve, évidemment, être un édifice brillant de marbre
blanc, est un bon exemple des types d’écoles situées le long de la
Voie de la Lumière. Il est clair que l’argent coule à flots dans
cette Maison Noire, et je frémis à l’idée du genre de cours pour
lesquels des parents riches et crédules payent les maîtres cupides
de cette institution. Mais, pour être honnête, je n’ai pas été
impressionné par les occupants du magnifique bâtiment.
Les étudiants de la Maison Noire avaient le regard vide et
terne, et les sages et les professeurs aux lèvres minces et aux
yeux plissés n’avaient certainement aucun conseil à offrir à un
pauvre voyageur au manteau poussiéreux.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
À l’autre bout de la Voie de la Lumière, dans un groupe de
bâtiments non moins grandioses, je rencontrai les membres de
l’A cadémie Royale, qui ne me furent pas plus utiles, mais
pour d’autres raisons.
Premièrement, dans un pays qui n’a pas vu le moindre roi
depuis plus d’années que je ne saurais le dire, j’a i trouvé
le nom de l’institution à la fois déroutant et rebutant. En
outre, les savants qui résident au sein de l’académie étaient
clairement convaincus de leur importance. Les nominations
et les distinctions ne sont peut-être pas aussi importantes
que celles qui ornent les murs de la Maison Noire, mais
même ainsi, il est clair que la plupart des fonds de l’académie
sont dédiés aux bâtiments, aux jardins et à la vêture de ses
nombreux savants plutôt qu’aux études ou à l’achat de livres et
de réactifs alchimiques.
Et que dire des regards qu’ils m’ont lancés quand je suis
entré, avant que j’a ie le temps de prononcer ne serait-ce qu’un
mot ? J’a i aussitôt tourné les talons, mes enfants, et je savais,
jusqu’au bout de mes orteils, que j’avais raison de le faire.
Il n’y a aucune sagesse à trouver sur la Voie de la Lumière,
même si les gens qui l’arpentent sont convaincus d’être sages.
Les bâtiments sont grandioses, les arbres qui bordent la rue
luxuriants et hauts, l’a ir lourd de la puanteur des parfums
et de l’encens hors de prix, mais les yeux des misérables qui
hantent ce morceau de route pavée sont aussi dépourvus de
sagesse que le désert de miséricorde.
Après avoir passé toute la journée à errer d’un antre d’é goïsme
et de vide au suivant, je désespérai que Havregris eût quelque
chose à m’o ffrir. Mais, dans mon découragement, je baissai
un peu ma garde pendant que je déjeunais, mâchonnant une
grosse miche de pain chaud tout en m’appuyant lourdement
contre une gracieuse fontaine de marbre, ressassant dans ma
barbe les aventures que j’avais vécues sur la Voie. Une gentille
jeune femme, qui m’observait à travers d’épaisses lunettes qui
auraient été un accessoire trop grossier pour un mime singeant
un magicien, me fit remarquer que si je cherchais vraiment
sagesse et illumination, je devrais plutôt me diriger vers le
sud, traverser le marché fermier et me rendre dans le quartier
voisin, simplement appelé le « quartier bleu ».
Je n’avais rien à perdre, et rien de ce que j’avais vu jusqu’alors
ne m’incitait à aller dans une autre direction. Donc, après
avoir ôté les miettes de ma tunique, je me dirigeai vers le
sud, traversai le marché fermier (où les odeurs, certes loin
d’être agréables, étaient bien plus tolérables que la puanteur
écœurante de la Voie de la Lumière), et arrivai dans le quartier
bleu. Bien que les marchands ne fussent par exempts de la
tension et de la peur que j’avais perçues partout jusqu’ici, ni
les badauds qui déambulaient entre les étals, glanant les maigres
légumes, viandes et fromages qui constitueraient leur dîner, il
régnait au moins une légère sensation de détente, et un ton
de plaisanterie, qu’aurait reconnus n’importe quel fermier des
Champs de la Fertilité à Al-Kalim.
Une fois sorti des hautes structures en bois du quartier
du marché, je sus presque aussitôt que j’étais arrivé
là où je le désirais. Bien que l’architecture ne
fût pas aussi grandiose que celle des quartiers
est de la cité, un air de dignité et de gravité se
dégageait de ces ruelles douillettes et sinueuses,
cet air que n’aurait jamais la Voie de la
Lumière, enveloppée de sa froide fierté.
Les rues étaient remplies de tavernes, de
boutiques et d’étals de vendeurs proposant leurs
marchandises.
Il en résultait tout un éventail d’images, de sons,
et surtout d’odeurs.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
Et c’est là, au milieu de ces rues étroites et labyrinthiques,
entourées de hauts murs et de tours s’élevant à perte de vue,
que je sentis l’espoir renaître. Là, je trouvai des écoles aux
noms moins pompeux, mais dont l’enseignement était plus
sérieux. Le Librarium de l’Étoile du Nord et le Conservatoire
de Lorimor en étaient deux parfaits exemples. Ces bâtiments
en simple pierre grise fonctionnelle étaient emplis de lumière
et de vie grâce à ceux qui y discutaient, débattaient et
élaboraient des démonstrations sur des sujets très divers, tant
philosophiques et théoriques que magiques. J’y fus témoin
d’exploits qui auraient émerveillé la cour du Calife et y
entendis des discours rhétoriques qui auraient impressionné le
plus sage parmi les sages de mon seigneur et maître.
Les yeux de ceux qui arpentaient ces rues étaient vivants et
pleins de curiosité. Bien que leurs robes ne fussent pas aussi
belles que celles de leurs compatriotes des quartiers est, ils
n’étaient pas non plus habillés comme des nécessiteux, et je
compris rapidement que la magie, au moins à Havregris, n’était
certainement pas l’apanage des pauvres. Ces sages détenaient
un pouvoir, d’une sorte ou d’une autre, qui leur conférait
clairement un certain degré de respect et de confort que ne
connaîtra jamais un lanceur de sorts des déserts sauvages.
Malheureusement, une fois de plus, je ne trouvai guère d’a ide
ici. Ces érudits étaient bien moins ouverts que l’inconnue à
lunettes de la fontaine. Ces magiciens et ces sorciers n’avaient
aucune raison de m’accorder plus d’attention qu’à un vagabond
errant dans les rues. Et comme j’étais toujours choqué, et
extrêmement méfiant, après ma malheureuse rencontre avec
Cindar le Rayonnant, je ne parvins pas à leur proposer
quelque chose qui sût piquer leur curiosité.
Havregris n’est pas une cité hospitalière pour un visiteur banal
qui n’a rien à offrir aux sages et aux érudits. J’imagine que
cette cité n’est guère chaleureuse même si l’on n’a pas la mort
d’un de ses habitants qui pèse injustement sur la conscience.
La Main du Mage est un refuge, A’tar soit remercié pour ce
petit réconfort, mais après des jours à être reçu avec froideur
dans des endroits glacés et des salles remplies d’échos, même le
goût sucré de l’hydromel n’est plus d’une grande consolation.
133
Je pense qu’aujourd’hui, j’ai même vu de loin l’un des célèbres
Maréchaux de la Citadelle. La situation politique de ce royaume
est tellement chaotique que je n’ai pas la plus petite idée de ce
que cela peut signifier, mais j’ai trouvé cette vision encore plus
troublante que ma situation actuelle. Les Maréchaux règnent-ils
sur chacune des cités ? Ont-ils un pouvoir ici, ou ailleurs ?
Enquêtent-ils sur les morts mystérieuses ?
J’a i été très prudent et circonspect quant aux questions que
j’a i posées aux augustes personnages de Havregris. Il n’y a
presque aucun moyen pour que les gens que j’a i rencontrés
sachent ce qui motive ma curiosité. Bien sûr, à cause de cela,
les rares réponses que j’a i reçues étaient pratiquement inutiles.
Je tire quelque réconfort de l’idée que personne ne sache ce
qui m’a conduit ici, ou ce que je transporte avec moi à chaque
pas de chaque jour, ce fardeau qui semble plus lourd à chaque
heure que je passe dans cette cité froide et grise.
Et donc, alors que j’écris ces mots, m’arrêtant de temps en
temps pour contempler les fissures du plafond de bois, j’avoue
me sentir encore plus désespéré qu’avant.
Mon parcours s’achève-t-il ici ? Si c’est le cas, ma peur et
ma lâcheté y ont-elles mis fin, ou dois-je admettre que tous
mes espoirs étaient vains depuis le début ?
Je veux écrire les mots « demain sera mon dernier jour dans
ce lieu maudit par les Djinns », mais je ne sais pas s’ils
seraient le reflet d’un cœur faible, ou s’il serait encore plus
lâche de simplement admettre ma défaite et me jeter aux
pieds du Calife pour implorer sa pitié.
Sachant ce que je sais maintenant de la pierre et de sa place
dans l’histoire de cette contrée, je désespère même de pouvoir la
vendre si cette opportunité se présentait à nouveau. Qui paierait
pour un objet pour lequel d’autres sont prêts à tuer ?
Que vaut ma vie dans cet endroit étrange, si loin de chez moi ?
 Chapitre III :
Terres de magie

M ennara est un monde né de la magie, et bien que celle-

ci se soit faite rare et ait décliné à travers les âges, on
en trouve des traces un peu partout. Certaines terres de ce
monde sont l’apanage de la bravoure et du courage, alors que
d’autres ont sombré dans les ténèbres, la haine et la violence.
Toutes possèdent pourtant encore une étincelle de magie en
elles, qu’elles abritent des trésors perdus depuis longtemps ou
de puissants éclats runiques, de ceux qui ont permis de diffu-
ser la magie partout.
Ce chapitre explore les terres magiques de Mennara, offrant
aux joueurs une grande variété de contrées où mener leurs
aventures et leurs campagnes. Le territoire central, Terrinoth, se
compose de nombreux domaines civilisés tels que les baronnies
et les Cités Libres, mais aussi de vastes étendues de nature sau-
vage et inexplorée, ainsi que de ruines antiques regorgeant de
passages vers des catacombes oubliées. Les aventuriers coura-
geux peuvent également se risquer dans la forêt de l’Aymhelin et
dans les redoutables Terres des Brumes, car, malgré les menaces
qu’elles recèlent, elles promettent également des récompenses
incroyables, telles que la sagesse des anciens Elfes ou les secrets
de la magie nécromantique. Les plus intrépides pourront aus-
si s’aventurer dans les profondeurs des Monts Dunwarr et des
royaumes des Nains, pour acquérir des talents de forgerons ou
apprendre les secrets des runes des Dragons.
Lorimor, empire maritime, et les îles des Torue Albes
peuvent servir de point de départ à des aventures au-delà des
mers, vers les déserts lointains d’Al-Kalim ou les terres gelées
d’Isheim au nord. Les zones plus sauvages, comme les terres
accidentées des Plaines Brisées, les jungles de Zanaga et le ter-
ritoire volcanique de la Lande Vitrifiée, abritent également des
trésors pour ceux qui sont prêts à affronter leur terrain hos-
tile… et les autochtones encore plus dangereux !
Les régions sombres des Steppes du Ru et des landes sauvages
se trouvent à l’est, là où les brèches entre les plans permettent
aux influences démoniaques de s’infiltrer dans Mennara. Là, les
horribles Uthuk Y’llan prospèrent et font appel aux énergies de
l’Ynfernael pour alimenter leurs sorts – une pratique que les
aventuriers pourront également apprendre s’ils l’osent.
Les sections consacrées à chacune de ces régions com-
prennent des informations géographiques et une carte destinée
au maître de jeu, qu’il peut utiliser pour créer et faire jouer
ses campagnes dans ces contrées. Vous y trouverez également
toutes sortes de nouveaux Personnages Non Joueurs – alliés,
adversaires et créatures monstrueuses. Les aventuriers pourront
être confrontés à des tribus de Kobolds ou de Gobelins, à des
monstres aquatiques comme les Merriods ou encore, bien sûr,
à des Dragons !
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
TERRINOTH
L e Royaume de Terrinoth existe depuis plus de treize siècles
et a survécu aux trois Ténèbres. Terre de contradictions, on y
rencontre beauté et horreur, joie et tragédie, splendeur et décadence
entremêlées. Depuis l’époque du roi Daqan, Terrinoth a été princi-
palement dirigé par le Conseil des Barons. De nos jours, le Conseil
ne compte plus que douze barons ; la treizième baronnie n’existe plus
depuis plus d’un millénaire, suite à la trahison de Waiqar. Malgré cela,
l’assemblée des douze seigneurs Daqan s’appelle toujours le « Conseil
des Treize », par respect pour le roi Daqan ou pour ne jamais oublier
la trahison et ce qu’elle a coûté aux peuples de Terrinoth.
Bien que les barons gouvernent leurs baronnies, ils n’ont aucun
contrôle sur les célèbres Cités Libres de Terrinoth. Qu’une Cité Libre
se trouve enclavée dans une baronnie ou se dresse sur un territoire
indépendant, elle n’a juré fidélité à aucun baron. Pourtant, ces cités
font partie de Terrinoth et sont soumises aux lois du Conseil des
Treize. Cela a généré de nombreuses frictions au fil des siècles, et plu-
sieurs barons ont tenté de soumettre les Cités, en particulier celles
situées sur leurs terres.
À bien des égards, les Cités Libres sont l’âme de Terrinoth.
Beaucoup de baronnies stagnent, prises dans le carcan de vieilles tra-
ditions, de traités anciens et de lois rigides, soumises aux seuls caprices
du baron régnant. Les Cités Libres, elles, possèdent une plus grande
souplesse, la capacité de s’adapter aux évolutions du commerce et de
tirer le meilleur parti de ce que les voyageurs peuvent leur enseigner.
En général, les Cités Libres sont gouvernées par des conseils, des
commissions ou d’autres instances dirigeantes. Indépendamment de
la façon dont ces dirigeants sont désignés, le besoin permanent de
trouver des compromis conduit à des changements durables qui per-
mettent d’améliorer les conditions de vie dans les Cités. Inversement,
un baron peut à lui seul maintenir ses terres dans le passé en conser-
vant d’anciennes coutumes, ou les plonger dans la pauvreté par un
simple édit mal pensé ou mal rédigé.
Cela ne veut pas dire que les seigneurs Daqan sont des tyrans ;
au contraire, la plupart sont des dirigeants justes et bons, dont les
éventuelles impulsions trop destructrices sont souvent tempérées par
leurs conseillers. Bien qu’il y ait eu des exceptions à travers l’his-
toire, dont certaines assez notables, la plupart des barons ont été
et continuent d’être des dirigeants compétents. Certains excellent
en matière de stratégie militaire, d’autres sont de parfaits orateurs ;
souvent, ils ont assuré la prospérité de leurs terres grâce à des machi-
nations et des intrigues. Quelques-uns, même s’ils sont assez rares,
ont même étudié les arts de la magie, que ce soit pour améliorer
l’utilisation des éclats runiques qu’ils ont acquis ou pour parfaire
leurs talents personnels. Quelle que soit leur approche, les barons
agissent dans l’intérêt de leurs baronnies et de Terrinoth dans son
ensemble. Sans cela, comment un royaume pourrait-il survivre plus
de mille ans sans roi pour le gouverner ?
Paradoxalement, ces mêmes barons qui s’occupent en priorité
de leurs terres doivent prendre toutes les décisions concernant le
gouvernement du royaume lors de leur rassemblement annuel à la
Citadelle. Ces conseils sont donc truffés de manigances politiques et
de compromis difficiles, mais servent finalement à protéger Terrinoth.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Chaque baron veille ensuite à la bonne application des décisions sur
ses terres, grâce à des rôdeurs, des soldats, des chevaliers et toutes
sortes d’autres gardiens et guerriers. La Citadelle s’efforce de coordon-
ner ces efforts pour maintenir l’ordre, protéger le royaume contre les
monstres qui errent dans les campagnes en temps de paix, et rallier les
armées disséminées dans les baronnies en temps de guerre.
Malgré ces imbroglios politiques et des siècles de paix relative,
Terrinoth reste un endroit en grande partie sauvage. Il suffit de
s’éloigner un peu, d’aller à peine plus loin que la portée d’une flèche
tirée depuis les tourelles du château ou les palissades de la ville, pour
découvrir des ruines antiques, des catacombes perdues, des grottes
mystérieuses et toutes sortes d’autres monuments issus d’un passé
glorieux et de lieux mystiques sur lesquels les yeux des Humains ne
se sont jamais posés.
LE SUD
DE TERRINOTH
Le Sud de Terrinoth est délimité par une grande chaîne montagneuse,
qui porte bien son nom : les Montagnes du Désespoir. Sur ces som-
mets imposants, les tempêtes bouillonnent et s’abattent en vagues
tumultueuses, souvent accompagnées de créatures éveillées par la
tourmente. Depuis des générations, ces dangers naturels et surnaturels
harcèlent les habitants du Sud de Terrinoth, qui sont donc devenus
vigilants et résistants. Ils sont toujours attentifs aux dangers qui les
guettent dans les endroits sauvages, mais savent également admirer la
beauté naturelle des Plaines de Velours et des Jardins de Tarn.
Plusieurs Cités Libres se situent dans le Sud de Terrinoth, entre
autres Rivegarde, Tamalir, Valvigne et Aubelande. Bien sûr, leur loca-
lisation précise revêt peu d’importance pour le gouvernement de ces
cités ; les alliances et la coopération entre les cités et les baronnies ne
sont pas rares, mais les habitants des Cités Libres sont aussi fiers de
leur indépendance que de leur appartenance historique à Terrinoth.
Malgré la proximité de la présence militaire de Rivegarde et de
ses célèbres cavaliers, les Collines de Fuméebleue et les Montagnes
du Désespoir ont longtemps servi de lieu de rassemblement à des
cultes de sorciers, des adorateurs des Dragons et autres serviteurs des
ténèbres. Ces dernières années, les récits d’événements étranges sur-
venus dans les montagnes sont devenus plus fréquents. Les éclaireurs
ont aperçu beaucoup plus de Dragons hybrides cachés dans les ruines
éparses qu’on n’en a observé depuis la fin des Guerres draconiques.
Les villages situés au pied des collines et à l’ombre des montagnes
souffrent de maladies et de disparitions étranges.
La paix règne principalement dans les autres régions du Sud de
Terrinoth, en grande partie grâce à son solide système interne de
maintien de l’ordre. Toutefois, le Bosquet de Noirépine est une zone
de non-droit particulièrement dangereuse pour les Humains. Situé à
la frontière, il fait partie intégrante de l’Aymhelin ; on dit qu’il abrite
toutes sortes de parias et de fugitifs. Sorcières et bandits y élisent sou-
vent domicile, appréciant ses nombreuses clairières naturellement
bien protégées par les arbres hérissés d’épines ; d’étranges monstruo-
sités y traînent leurs pieds, ou leurs pattes, et patrouillent dans les
sous-bois à la recherche de proies faciles. Certains prétendent avoir
aperçu deux imposantes tours elfiques dépasser du feuillage, mais les
tentatives pour les observer se sont toujours heurtées à une salve de
flèches en guise de coup de semonce.
Malgré les menaces qui rôdent dans la nature, la région est un
important centre de commerce depuis des siècles, même en ces temps
de plus en plus troublés, principalement en raison de la présence des
Cités Libres. Celles-ci attirent commerçants, nobles, artistes et voya-
geurs, tous venus d’horizons différents, de Terrinoth et d’ailleurs, qui
apportent dans leurs bagages une infinité de produits rares et exo-
tiques. L’argent coule à flots dans le Sud de Terrinoth, ses habitants
acceptent depuis longtemps les monnaies de toutes les provenances,
tant qu’elles sont sonnantes et trébuchantes. Loin au sud-est, dans
la Cité Libre de Valvigne, se trouve la plus grande cathédrale à la
gloire de Kellos de tout Mennara. Jalousé par les barons voisins, ce
grand centre religieux attire tous les pèlerins du Sud de Terrinoth
et d’ailleurs.
Au-delà de la forêt, de Tombeciel à Gardescinde, et même plus
loin vers Coupebranche, de nombreuses forteresses maintiennent un
réseau de routes relativement bien entretenues et sécurisées pour les
voyageurs qui souhaitent rejoindre les cités commerçantes du Sud.
Évidemment, les cavaliers et les gardes des seigneurs Daqan et des
Cités Libres sont trop peu nombreux pour protéger les dizaines de
lieues de routes et d’étendues sauvages entre les bastions de civilisa-
tion ; les nobles et les marchands qui en ont les moyens se payent donc
souvent leurs propres gardes.
Au sud-ouest, Terrinoth a une frontière commune avec l’empire
de Lorimor. Immigrés et commerçants de Lorimor ou des Torue
Albes arrivent à Aubelande par bateau, puis continuent par voie de
terre jusqu’à leur destination. Les Montagnes de la Porte de Lorim
et les terres hostiles des Landes du Traître gênent considérablement
le commerce par voie de terre ; la mauvaise réputation des fon-
dateurs de Lorimor n’arrange pas la situation. Les communautés
dispersées le long de la côte sont souvent la proie des pirates et des
pillards à la recherche d’esclaves et de vivres ; l’intérieur des terres
est en grande partie inhabité en raison des conditions inhospita-
lières qui y règnent.
TRAST, PASSAGE VERS TERRINOTH
La baronnie de Trast, située à l’est des Montagnes de la Porte de
Lorim, s’étend jusqu’à la lisière du Roncebois. Sa proximité avec
l’Aymhelin, et plus précisément avec Chant d’Été, a entraîné plus
d’interactions entre ses habitants et les Elfes Latari que la plupart des
Humains de Terrinoth n’en ont jamais eu ; toutes ne sont pas amicales.
Trast tire sa richesse des mines d’argent et de fer dans les contreforts
des montagnes. Ses habitants chassent et coupent du bois dans la forêt
de temps en temps, bien qu’ils soient nombreux à affirmer qu’elle est
hantée par des loups-garous.
Récemment, les Elfes Latari ont été plus actifs, ou du moins leur
activité a été plus visible pour les Humains. Leurs patrouilles de
reconnaissance ont été plus fréquemment repérées émergeant de la
lisière nord de la forêt. Alors que les paysans craintifs accusent les
Elfes d’un certain nombre d’attaques contre des fermes isolées, les
nobles belliqueux protestent contre ces ingérences sur le territoire de
Trast. Le baron Rault peut facilement faire fi des craintes des pay-
sans, mais ne peut ignorer les protestations véhémentes, et souvent
armées, des aristocrates.
Le baron dirige ses terres depuis le Château d’Artrast. Rault est
un homme juste, mais prompt à s’offusquer de tout ce qu’il perçoit
comme un affront à son honneur. Les visiteurs ont intérêt à ne pas
faire de remarque sur son hospitalité, même quand elle écorche l’éti-
quette. La population de la baronnie, tant la plèbe que la noblesse,
est nettement divisée en deux quant à son opinion sur le baron. Un
premier camp considère que Rault est un dirigeant faible, trop enclin à
accepter les demandes des émissaires des Latari et de Lorimor. L’autre
critique au contraire sa façon trop sévère de traiter les Elfes, estimant
que ces provocations inutiles risquent de déclencher une guerre avec
les habitants de la forêt.
Des agitateurs des deux côtés cherchent à influencer le baron. On
parle même d’une conspiration pour le renverser, bien que personne
ne sache avec certitude lequel des deux camps complote, si la rumeur
est vraie.
137
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Dans les contreforts de la Porte de Lorim, un cercle d’anciens
menhirs se dressent sur des tumulus. On prétend que deux fois
par an, des adeptes de cultes interdits se rassemblent à cet endroit
pour communier avec des entités innommables, lors de cérémonies
conduites par des prêtres à l’âme noire et corrompue. Le baron Rault
a exprimé quelque intérêt pour cette histoire ; il a demandé que la
lumière soit faite sur ces rumeurs, et que les auteurs soient arrêtés le
cas échéant, mais la nature isolée du site empêche toute intervention
ou surveillance.
OTRIN, TERRE DE VIGILANCE
La baronnie d’Otrin commence juste au nord-ouest de Rivegarde
et s’étend jusqu’au Marais de l’Aile Noire au nord. Les habitants
d’Otrin cultivent de riches terres agricoles sur les Plaines de Velours
et ramassent respectueusement les herbes rares des Jardins de Tarn ;
selon la loi de la baronnie, abattre un arbre de cette forêt sacrée est
passible de mort.
Les terres d’Otrin jouxtent les Montagnes du Désespoir, qui jettent
leur longue ombre sur la baronnie. Officiellement, le baron Trevalyan
pourrait revendiquer une partie de cette étendue ombreuse pour s’oc-
troyer les minerais qui s’y trouvent sans doute, mais ses ancêtres ont
appris il y a bien longtemps que rien de bon ne sort de ces pics rocheux
accidentés. Tombeciel, la demeure ancestrale des barons d’Otrin, est
bâtie au pied des montagnes. On pourrait croire qu’un tel château
fortifié utilise cette position stratégique pour se défendre contre les
autres baronnies ; on aurait tort. Il sert en fait de rempart contre les
créatures des contreforts et des cimes : comme le veut la tradition, le
baron protège le peuple d’Otrin et les terres environnantes des dangers
des hauteurs. Ainsi, Trevalyan surveille sans relâche les menaces venues
des sommets et accueille les aspirants Chevaliers de la Citadelle, qui
chassent les Manticores et autres monstres dans les montagnes pour
prouver leur valeur.
Ces derniers temps, des créatures infâmes et des bêtes féroces
descendent des hauteurs plus effrontément et plus régulièrement
qu’auparavant. Au grand dam de certains Chevaliers de la Citadelle,
le baron Trevalyan a commencé à solliciter l’aide d’aventuriers itiné-
rants, afin de lancer des expéditions pour traquer certaines bêtes ou
pour effectuer des frappes préventives contre les créatures des mon-
tagnes en général. Certains pensent que les monstres fuient les tem-
pêtes, toujours plus nombreuses et violentes depuis quelques années.
Malgré cela, les érudits balayent de la main les rumeurs sur un ancien
et puissant sorcier qui vivrait dans les sommets et commanderait aux
éléments… de simples histoires, rien de plus.
Au cœur des plaines se dresse la surprenante chaîne des Dents de
Mennara. Bien que peu étendues, ces montagnes s’élèvent haut dans
le ciel, leurs pics acérés évoquant les crocs d’une énorme bête. On dit
que les Dragons viennent dans ces montagnes quand ils sentent que
leur fin est proche ; la plupart des gens les évitent de peur de rencon-
trer un monstre. Pourtant, des histoires persistent sur la Grotte des
Merveilles, censée se trouver quelque part au milieu de ces sommets
effrayants. Parmi ceux partis à sa recherche, beaucoup ont disparu à
jamais ; les rares qui sont revenus avaient changé. Ils étaient étrange-
ment sereins, détachés de leur ancienne vie. Ils ont toujours refusé de
parler de leur expérience.
FREST, LA BARONNIE
AU TRÔNE USURPÉ
Située dans l’extrême Sud-Est de Terrinoth, Frest est unique parmi
les baronnies ; en effet, elle n’est pas gouvernée par un noble à la
charge héréditaire, mais par une baronne qui ouvre une nouvelle
ère. Il y a des décennies, la baronne Harriet la Résolue était une
simple charpentière. Quand la baronne de l’époque abdiqua brus-
quement, Frest fut plongé dans un chaos qui affecta principalement
138
la paysannerie. Harriet mit fin aux conflits entre les nobles qui se
chamaillaient pour la succession lorsqu’elle s’empara du pouvoir en
ralliant l’ensemble des paysans.
Harriet gouverne désormais magnanimement depuis le Bastion
d’Aerendor. Les paysans gardent ce dont ils ont besoin et vendent
le reste à leur guise ; les taxes de Frest sont les plus basses de tout
Terrinoth. Les habitants labourent les champs, chassent et cueillent
dans la paisible Forêt de Pommebois. Tout le monde sait qu’il faut
éviter Boisanglant, à la frontière est de la baronnie, les Elfes vengeurs
qui y vivent on donc fait très peu de victimes ces dernières années.
Les autres barons n’apprécièrent guère l’accession au pouvoir
d’Harriet ; ils déclarèrent donc la guerre à Frest. Le conflit fit rage
pendant des années, jusqu’à ce que la baronne en titre soit finale-
ment acceptée comme membre à part entière du Conseil des Treize,
principalement car la guerre prenait un mauvais tournant pour les
autres barons. Aujourd’hui encore, ceux-ci craignent que leur peuple
ne décide de suivre l’exemple de Frest. Harriet vieillit, sa succession
est incertaine et les autres barons soulèvent à nouveau des ques-
tions de légitimité. Certains craignent que sa fille ne lui succède,
établissant ainsi une lignée, légitimant son règne et conférant un
titre de noblesse à sa famille. Cela créerait un précédent susceptible
d’inspirer d’autres roturiers en quête d’anoblissement – et de leur
donner l’idée de s’emparer du pouvoir. Pourtant, les barons ont
bien conscience qu’ils ne peuvent rien tenter ouvertement contre
Harriet : ils risqueraient une nouvelle guerre, ou pire, la révolte
parmi les paysans de leurs baronnies. Ils cherchent donc d’autres
moyens de déloger l’« intruse » et sa famille du pouvoir. La baronne
Magrit de Dhernas et le baron Gillian de Cailn ont commencé à
récolter discrètement des informations susceptibles de retourner les
habitants de Frest contre leur dirigeante.
L'EST DE TERRINOTH
À bien des égards, c’est par nécessité que l’Est de Terrinoth est une
terre aux habitants austères. Protégée par une frontière naturelle de
chaînes de montagnes, l’Est de Terrinoth est divisé entre les terres et
celles qui jouxtent les Landes de Charg’r. Bien que les sommets den-
telés du sud des Monts Dunwarr assurent la sécurité de Terrinoth,
ils forment également un rempart supplémentaire qui enferme les
royaumes, comme un rappel qu’il n’existe aucune échappatoire dans
la lutte pour la survie de la civilisation.
Les terres intérieures de l’Est de Terrinoth ne sont que collines mou-
tonnantes dominées par les impressionnantes hauteurs des Rochers
Brisés. La zone la plus peuplée de la région est la vallée qui traverse
le centre de la chaîne montagneuse, où de nombreux villages de
pêcheurs parsèment les rives du Fleuve du Sommeil. Les bois occupent
la plus grande partie du territoire restant, vierges de toute occupation,
en particulier les Bois Suspendus à l’ouest et la vaste Forêt Bruissante
à l’est. De nombreuses rumeurs effrayantes courent sur cette dernière,
mais les communautés voisines n’ont guère de choix et doivent s’en
remettre à la forêt pour se procurer gibier et bois.
À l’extrême est se trouvent les Terres des Confins, une étendue
désolée qui commence à la pointe sud des Monts Dunwarr. Cette zone
inhospitalière sert de frontière, terriblement mince, entre Terrinoth et
les Steppes du Ru. Bien que la menace des Uthuk Y’llan appartienne
au passé depuis longtemps, les Steppes du Ru restent un endroit
sinistre et redouté, uniquement peuplé de monstrueuses créatures. Sur
ordre de la Citadelle, plusieurs petits donjons et avant-postes main-
tiennent une surveillance constante sur les Terres des Confins. Ce
triste paysage occupe une grande partie de l’horizon, et les habitants
de l’Est de Terrinoth préfèrent tourner leur regard vers les placides
eaux du lac de l’Écho ou vers les collines du Ruisseau de Jade.
 Labyrinthe de Deurg
Fort Hadran

La Frontière
Fosses
Faille de Monts Dunwarr
Feldrath
de Duldor

Ancrefin
Thelgrim

Lacs
des
Égarés
Bois du Forêt de Muir
Les Karahesh Sans Issue
Malheur

Les Terres Passegivre

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Le Densebois
Contreforts
des Darnati Primechute

Terrinot h
Côte
Sélénique
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Il faut à peine plus d’une heure de marche depuis le Château Kellar
pour atteindre un monument étrange, anciennement connu sous le
nom d’Orrush Khatak, mais généralement appelé Porte de la Fournaise
de nos jours. C’est une grande arche de pierre rouge sang, assez large
pour laisser passer plus de quatre cents soldats de front. Aujourd’hui,
personne ne sait dire si c’est une formation naturelle autrefois consi-
dérée comme un porte-bonheur pour le départ des armées, ou si elle a
été créée pour les besoins d’un rituel magique. Cette arche n’est qu’un
mystère de plus dans une contrée qui en compte déjà tant. Quand
le vent souffle, il n’est pas besoin de beaucoup d’imagination pour
entendre des cris angoissés, mais peu de gens admettront que ce n’est
pas une simple illusion créée par le vent qui fouette la pierre.
Au-delà de l’Orrush Khatak coule une longue et large rivière, la
Lothan. Située à l’endroit le plus large de la rivière, l’Île d’Hernfar
est l’avant-poste le plus oriental. Les recrues de la milice de Kell plai-
santent souvent en disant que les commandants y sont les plus durs de
tout Terrinoth, car l’insubordination est punie par une affectation à la
garnison du Bastion d’Hernfar.
L’Île d'Hernfar semble être une île tout à fait ordinaire, en dehors
de sa proximité avec les Steppes du Ru ; mais les apparences sont
trompeuses. Se promener sur cette île n’offre pas grand intérêt, on y
croise quelques insectes, on y entend le chant des oiseaux et on pro-
fite de l’agréable brise, mais ce calme apparent met constamment les
nerfs des membres de la garnison à rude épreuve. Après quelque temps
passés sur l’île, les soldats trouvent que les ombres semblent plus lon-
gues que d’ordinaire ou qu’elles scintillent étrangement, quelques-uns
racontent même avoir aperçu des yeux luminescents dans l’eau. On les
voit rarement longtemps et personne ne saurait dire à qui ou à quoi
appartiennent ces yeux. Savoir que la rivière et les premiers contreforts
de ces terres hostiles sont tout ce qui les sépare des Terres Sombres
n’aide pas à apaiser les soldats.
Certains prétendent que les nuits de pleine lune rouge, des hurle-
ments s’élèvent de l’eau ; seuls quelques naïfs affirment qu’il ne s’agit
que de cris d’animaux.
DHERNAS, LA LANCE DES DAQAN
Les terres de Dhernas s’étendent des Bois Suspendus à l’ouest jusqu’à
la Forêt Bruissante à l’est. Jadis, la baronnie tirait sa grande richesse
d’une mine d’or située au pied des Pics de l’Ombre, loin dans les
profondeurs des Bois Suspendus, mais elle est depuis longtemps aban-
donnée. La plupart des gens pensent que les gisements se sont épuisés,
d’autres soutiennent que la mine est hantée et que les fantômes des
mineurs décédés dans un lointain passé veillent pour l’éternité sur
leurs filons étincelants. De nos jours, les habitants de Dhernas entre-
tiennent des terres agricoles verdoyantes le long des berges du Fleuve
du Sommeil et récoltent le bois des terres forestières de la région.
Havreshyr, la plus grande ville de la baronnie, accueille fréquemment
des marchands et des commerçants, car elle n’est située qu’à quelques
lieues en amont de Passegivre.
La baronne Magrit Kalrif vit au Bastion de Dhernar, qui surplombe
la rivière, à l’ombre des Rochers Brisés. Kalrif est une dirigeante enga-
gée et éclairée ; les lanciers et les chevaliers de Dhernas sont respectés
dans tout Terrinoth pour leur discipline et leurs armes et armures de
belle facture. La bannière des forces de la baronne représente une épée
et un gantelet ouvert, qui symbolisent les vertus jumelées de justice
et de miséricorde. Les soldats de Dhernas ont déjà commencé à se
déployer pour répondre aux rumeurs de menaces venues des Steppes
du Ru, et Kalrif attend avec impatience l’opportunité de les rejoindre
sur le champ de bataille.
Dhernas est connue pour ses gardiens qui protègent ses routes et
ses voies navigables, ce qui en fait l’une des baronnies les plus sûres de
Terrinoth, bien que cela reste très relatif. Les Bois Suspendus doivent
leur nom à un maréchal particulièrement zélé, Tyrek Gorm, qui y
140
aurait pendu un millier de brigands. De nos jours, les maréchaux sont
peu nombreux, ils doivent affronter les incursions de plus en plus fré-
quentes de Gobelins et de fanatiques de cultes obscurs, en plus des
éternels bandits et voleurs. Les maréchaux et les échevins de la baron-
nie recourent de plus en plus souvent aux chasseurs de primes et aux
aventuriers qui louent leurs services afin d’endiguer les menaces.
KELL, LE BOUCLIER DES DAQAN
La baronnie de Kell s’étend le long de la chaîne des Monts Dunwarr,
qui protège Terrinoth des terribles Landes de Charg’r et des créatures
étranges qui la peuplent. Le Sud de la baronnie jouxte les Terres
de Confins, qui séparent Terrinoth des Steppes du Ru. En raison
de sa position frontalière, Kell maintient l’une des armées les plus
grandes et les plus entraînées de toutes les baronnies, nourrie par la
fertile vallée de la rivière et qui a établi de nombreux avant-postes
dans d’anciens donjons. Dans les profondeurs de plusieurs de ces
donjons, de magnifiques Golems de Runes attendent d’être à nou-
veau éveillés et appelés à la guerre. Bien sûr, la plupart des habitants
des autres baronnies tiennent la protection de Kell pour acquise et
considèrent que les Steppes du Ru ne représentent pas une réelle
menace. Certains, malheureusement peu nombreux, ont tout de
même conscience du danger.
Les soldats de Kell surveillent la désolation des Steppes du Ru, ainsi
que les passages qui permettent de traverser la Lothan pour atteindre
l’Île d'Hernfar ; ils sont postés dans les tours de guet d’anciennes for-
teresses dont les bâtisseurs ont depuis longtemps été oubliés. Comme
tant d’édifices des anciens royaumes, ces structures conçues pour défier
le temps ont tout de même commencé à s’éroder au cours des siècles
écoulés depuis les dernières Ténèbres, et les secrets de leur construc-
tion dépassent le savoir des maçons et des artisans d’aujourd’hui.
Toutefois, pour l’instant, elles tiennent bon. Seul le temps dira si elles
sont encore assez solides pour résister à un assaut.
Derrière ces forteresses usées par le temps, les citoyens de Kell pros-
pèrent. Les fermes de la vallée produisent suffisamment pour nourrir
la baronnie et vendre le surplus aux Nains du Dunwarr et de Joulnar,
ainsi qu’à la baronnie voisine de Dhernas. Le commerce florissant
de bois et de fer fait couler l’argent à flots dans les coffres du baron
Fredric, argent qui n’y reste jamais longtemps, car le baron l’utilise
pour le bien de son peuple et de ses terres. On raconte que Roland de
Kell a tué le Seigneur Margath à l’apogée des Guerres draconiques, et
beaucoup discernent cette noblesse dans son descendant.
PELGATE,
LA BARONNIE EN DÉCLIN
La baronnie de Pelgate s’étend le long de la chaîne des Rochers Brisés,
au sud des régions orientales de Terrinoth. La majeure partie de ses
richesses provient des mines de fer au pied de ces montagnes et des
abondantes ressources des Plaines de Velours. Pelgate fut le site d’im-
portantes batailles pendant les Guerres draconiques – ses terres en
portent encore les cicatrices. Toutefois, pendant les siècles de paix, le
douloureux rôle que joua jadis Pelgate a été largement oublié, éclipsé
par les exploits d’autres baronnies.
Aux confins de ces terres, les Collines Cendrées s’étendent à la
base des Rochers Brisés. Ces collines rocheuses au terrain accidenté
tiennent leur nom de leur état suite aux Guerres Draconiques. Leurs
flancs stériles ont la particularité d’abriter d’étranges obélisques mar-
qués de runes qui jaillissent de monticules herbeux. Hormis ces pierres
mystérieuses, les Collines Cendrées abritent le Fort Rodric, construit
après les Guerres draconiques en mémoire du héros éponyme. Ce fort
n’a jamais été conquis ni même attaqué. Après de longues années de
paix, les effectifs de la garnison sont sévèrement diminués. Pourtant,
cette forteresse est d’une importance vitale pour protéger la route qui
longe les Rochers Brisés contre une invasion venue de l’est.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
La baronne Pryor est la plus âgée des seigneurs Daqan. Nombre de
ses pairs et de ses sujets, qui redoutent la menace grandissant à l’est,
craignent qu’elle n’ait plus la force d’y faire face. Après Kell, Pelgate
est la baronnie la plus proche des Steppes du Ru. Bâtie entre deux
montagnes, au creux d’un goulot d’étranglement naturel, c'est une
position facile à défendre. Bien que la plupart des sujets et des pairs de
la baronne n’aient pas conscience du danger imminent, Pelgate prend
des mesures pour préparer ses défenses. Dame Corinne Varr, l’une des
capitaines de l’armée de la baronnie, craint une attaque imminente,
et fait de son mieux pour préparer ses soldats. De frustration, Varr a
commencé à demander l’aide de mercenaires, guerriers ou mages, qui
sillonnent les terres de la baronnie.
L'OUEST
DE TERRINOTH
L’Ouest est le berceau du Terrinoth moderne, le lieu où la civilisa-
tion telle que son peuple la connaît a prospéré. Cette région regorge
de ruines et de châteaux antiques, héritage des Anciens Rois et de
ceux qui les ont précédés. C’est là que se dresse la monumentale cité
d’Archaut, capitale des seigneurs Daqan et siège incontesté du pou-
voir à Terrinoth. Le Conseil des Treize s’y réunit chaque année pour
discuter et décider des questions du royaume. S’y dresse également la
chaise noire de Waiqar le Traître, rappel constant aux autres barons
de l’attrait insidieux des ténèbres et du malheur qui attend ceux qui
s’aventureraient sur cette voie.
Dans toute la campagne alentour, ruines, anciens temples et
décombres rappellent constamment les temps passés et ceux qui
auraient pu advenir. Toutefois, bien peu les considèrent avec tristesse,
car ils se trouvent là depuis si longtemps qu’ils font pratiquement par-
tie du paysage naturel.
Les enfants jouent parmi les piliers de marbre d’antiques édi-
fices ; les villageois font bon usage de leurs excellentes pierres tail-
lées, et construisent parfois leurs fermes ou leurs maisons adossées à
un bout de mur encore solide. Si elles ne suscitaient pas une forte
aversion superstitieuse, toutes les ruines de Terrinoth auraient été
démolies pour élever les murs des nouvelles fermes et des nouveaux
forts dans les collines. Les Humains de Terrinoth sont finalement très
résistants, preuve en est que les fondations, bien qu’en ruine, sont
toujours visibles. On peut encore se tenir au centre de ces anciennes
constructions et imaginer où le seigneur et sa dame s’asseyaient jadis
pour écouter leurs sujets.
L’Ouest est une contrée fertile et verdoyante, pleine de vertes
vallées et de placides collines. De vastes plaines, comme celle du
Souffle de Kellos, donnent à cette partie de Terrinoth un terrain
plat et dégagé ; par ailleurs, cette région est relativement à l’abri
des attaques des morts-vivants du Nord et des ennemis étranges et
surnaturels de l’Est, et isolée également des tensions avec les Elfes de
l’Aymhelin. De toutes les régions de Terrinoth, l’Ouest est celle qui
se complaît le plus dans la situation actuelle, qui se soucie le moins
des dangers grandissants, qui relâche le plus sa vigilance et n’entre-
tient plus ses défenses.
Le climat de l’Ouest de Terrinoth est souvent clément, le ciel est
dégagé presque toute l’année et son l’atmosphère est saine et agréable.
En de rares occasions, de redoutables tempêtes venues de la mer,
grands tourbillons de vents cinglants, s’abattent sur ces terres. Les
effets sont alors dévastateurs, des villages entiers sont emportés et des
troupeaux s’écrasent à des centaines de lieues de leurs pâturages. Les
cavaliers apprécient beaucoup l’Ouest de Terrinoth et trouvent le ter-
rain excellent pour leurs coursiers. Ils s’offrent souvent le frisson d’un
galop échevelé. Plusieurs rivières remarquables permettent de par-
courir le continent d’un bout à l’autre, pour voyager ou commercer.
LA FORÊT VESPÉRALE
L
a Forêt vespérale, non loin de la Côte autonome, est
un grand bois dont on dit qu’il est la demeure des
esprits. Que ceux-ci soient bienfaisants ou malveillants
dépend de l’histoire et de son conteur. Pourtant, beaucoup
d’habitants des villages voisins se rendent dans la forêt
pour se recueillir auprès de l’Arbre des Légendes, un vieux
chêne que de nombreuses personnes à travers la région
considèrent comme sacré, malgré certaines réticences de
l’Église de Kellos.
Que ces histoires d’esprits soient vraies ou non, la Forêt
vespérale abrite également des êtres en chair et en os. Un
petit village d’Hyrrinx s’y niche, en grande partie coupé
de la baronnie voisine. Bien qu’aux yeux de la loi de la
Citadelle, un baron ait autorité sur l’ensemble des peuples
qui vivent sur son territoire, la lignée Sephone a depuis
toujours permis à la communauté de Félis de garder son
indépendance et d’avoir son propre gouvernement, sans
lui réclamer d’impôts. Jusqu’à présent, la baronne Katrin
maintient ce statu quo.
La richesse coule toujours de l’Ouest vers l’opulente Tamalir, portée
par des courants doux ou traversant des lacs placides.
Pourtant, cette terre possède aussi un côté sauvage. Les petites villes
et les fermes accueillent volontiers chasseurs et commerçants fatigués,
mais une grande partie du territoire reste inhospitalier et difficilement
accessible. Au-delà des terres cultivées, des bêtes féroces, des créatures
étranges, des Gobelins retors, ou pire encore, rôdent et guettent les
voyageurs imprudents. Malheureusement, au fil des ans, ces monstres
gagnent en audace, s’aventurant sur les champs labourés et dans les
avant-postes de la civilisation.
ARCHAUT
Archaut : Cité des Monuments, siège du Conseil, protectrice de la
Citadelle. Depuis que la cité s’est développée autour de la tombe du
roi Falladir, Archaut est devenue la capitale de Terrinoth. Le Conseil
des Treize se tient dans la Citadelle, l’ancien château des Daqan, où
siègent également les institutions administratives et judiciaires du
royaume. En quelques années, d’un petit mausolée, Archaut est deve-
nue une vraie cité, en grande partie grâce à la présence annuelle du
Conseil des Barons.
Bien qu’Archaut soit la capitale de Terrinoth, un visiteur ne s’en
douterait pas forcément. La majeure partie de l’année, Archaut est
un endroit calme et austère. Certes, la Citadelle fourmille d’activité
toute l’année, mais, outre quelques marchands et de rares tavernes
qui accueillent les Maréchaux et les soldats, le reste de la cité som-
meille en attendant que se tienne la rencontre annuelle du Conseil
des Barons. Lorsque la date fatidique approche enfin, commer-
çants, artistes, chevaliers en herbe, ainsi que d’innombrables autres
visiteurs, gagnent la cité. Un peu avant l’arrivée des barons com-
mence alors une période d’effervescence qui dure plusieurs semaines
141
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
et s’achève peu après le départ des derniers serviteurs. Certains
viennent préparer la cité pour le Conseil, d’autres pour profiter de la
présence des barons et des personnages importants, d’autres encore
viennent solliciter leur aide.
Pourtant, même après le départ des marchands et des nobles,
Archaut offre encore un spectacle impressionnant. Parmi les nom-
breuses merveilles de la cité, on peut admirer de colossales statues qui
bordent les avenues et portent d’anciens châteaux sur leurs épaules. La
plus grande de toutes est la statue de Daqan, monument éternel à la
gloire du roi perdu. Après plus de mille ans, sa prestance royale reste
intacte, telle qu’au premier jour où la statue fut érigée, comme si les
éléments mêmes s’inclinaient devant le monarque disparu.
LA CITADELLE
La Citadelle est le centre des pouvoirs exécutif et législatif de Terrinoth.
Après le retour des seigneurs Daqan dans leurs baronnies, le Gardien
de la Citadelle exécute leurs ordres et supervise les affaires quotidiennes
de l’État jusqu’au rassemblement de l’année suivante. Depuis plus de
vingt ans maintenant, cette responsabilité incombe à la Gardienne
Gravia Kein, qui sert les barons et le peuple de Terrinoth avec honneur
et passion. Les serviteurs de la Citadelle portent fièrement le blason à
couronne d’or sur champ d’azur, les armoiries du roi Daqan.
142
La Citadelle elle-même est une structure imposante, et le donjon
le mieux fortifié de tout Terrinoth. Ses majestueux murs d’albâtre
dominent la cité, constant rappel de la puissance et de la gloire du
royaume. Bien qu’il soit de la responsabilité de chaque baron d’assurer
la défense de Terrinoth, la Citadelle dispose également de sa propre
petite armée permanente, commandée par la Gardienne. Cette force
représente la dernière ligne de défense si l’impensable se produisait, si
Archaut était attaquée.
La Citadelle accueille également les quelques ordres de chevalerie
qui jurent fidélité à Terrinoth dans son ensemble, et non à un seul
baron. Les plus importants d’entre eux sont les Maréchaux de la
Citadelle. Chaque Maréchal est à la fois un excellent guerrier et un
grand érudit, particulièrement versé dans l’étude des lois de Terrinoth.
Les Maréchaux rendent la justice à travers Terrinoth et affrontent
toutes sortes de menaces : des nobles coupables de trahison, des ban-
dits de grand chemin, des bandes armées de Gobelins ou encore des
sorciers pratiquant des magies interdites. Ils sont autorisés à faire office
de juges, de jurés et de bourreaux. Leur loyauté est incontestable ; ils
rendent la justice prestement, car il y a toujours de nouveaux pro-
blèmes à résoudre.
De nos jours, même les Maréchaux suffisent à peine pour com-
battre les nombreuses menaces qui émergent à travers Terrinoth.
Ces dernières années, la Gardienne Kein et ses officiers se sont vus
contraints d’avoir recours aux services d’aventuriers itinérants et autres
mercenaires pour résoudre des problèmes liés à de possibles cultes aux
Dragons, traquer des essaims de Ferrox, des pillards gobelins et des
nécromanciens en fuite.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
ALLERFELDT,
LE GRENIER DE TERRINOTH
Grande, puissante et essentielle aux efforts des autres baronnies,
Allerfeldt tire un grand profit de son sol fertile et de ses vastes plaines
qui permettent des déplacements faciles et une communication
rapide. Le Palais d’Or est le siège traditionnel de la famille Sephone,
le château depuis lequel la baronne Katrin gouverne ses terres. Il est
le fruit de plusieurs siècles de construction et représente l’héritage de
la famille Sephone. Hautes flèches, grandes salles, vastes entrepôts et
immenses casernes : tout concourt à faire du Palais d’Or l’un des plus
impressionnants châteaux de toutes les baronnies ; cette véritable for-
teresse défend Allerfeldt contre ses ennemis.
Ces derniers temps, le Palais d’Or a joué un rôle plus administra-
tif que militaire. En raison de ses vastes bâtiments, de ses immenses
bibliothèques et de ses installations permettant d’accueillir les digni-
taires et d’œuvrer aux affaires de l’État, le palais sert souvent de pre-
mier lieu de rencontre pour de nombreuses actions diplomatiques
d’importance entre les baronnies. Plus d’un traité et de nombreuses
déclarations de guerre ont été signés au Haut Siège du Palais d’Or,
tandis que la Chaussée des Larmes, construite par un ancêtre des
Sephone en hommage à son père cruellement tué, a longtemps servi
de terrain de rassemblement pour les armées alliées d’Allerfeldt.
Dirigé par le comte Oszric Cunningham, le Comté de Grivegué a
mauvaise réputation en Allerfeldt. Bien que les Cunningham entre-
tiennent de solides relations avec les autres comtés et leurs dirigeants
(grâce à de nombreuses alliances matrimoniales qui aident à maintenir
la stabilité d’Allerfeldt), au fil des générations, ils sont devenus notoi-
rement connus pour leurs obsessions, chaque nouveau comte poursui-
vant une nouvelle lubie quand il accède au pouvoir. Des bâtiments à
moitié finis parsèment le paysage, chacun construit afin qu’un comte
ou une comtesse y mène à bien son grand projet et jamais achevé, ledit
projet disparaissant avec son commanditaire. D’autres ne sont que
ruines, restes de tentatives pour reproduire le Feu de Lorimor ou créer
de nouvelles potions alchimiques qui ont spectaculairement échoué.
Alors que quelques projets ont été bénéfiques, comme l’amélioration
par la comtesse Ygraine Cunningham des salles d’entraînement pour
les mages de bataille, la plupart ne furent que des pertes de temps et
d’argent. Les finances du comté sont si basses qu’Oszric a été obligé
d’épouser la fille d’une riche famille marchande, Éléna, pour renflouer
le trésor.
Heureusement, ces dernières années, le couple est parvenu à récu-
pérer de nombreuses ruines, mines et autres territoires abandonnés,
et a financé des dizaines de fouilles et de travaux de reconstruction.
Malheureusement, les Cunningham ont dans le même temps décou-
vert des hordes de Gobelins et d’autres créatures qui avaient élu domi-
cile en ces lieux isolés au fil des générations. Depuis qu’ils ont été
dérangés, ces êtres infâmes menacent les villages voisins.
CAILN, LA CROISÉE MEURTRIE
La baronnie de Cailn, qui fait partie des terres les plus pauvres de
Terrinoth, est en proie à des troubles incessants depuis les Troisièmes
Ténèbres. Le baron Gilliam Xarles réside au Château de Tagis, qui sur-
plombe les Plaines de Thelsvan, fertiles et pourtant abandonnées. Les
ruines calcinées de fermes parsèment ces plaines verdoyantes, inhabi-
tées depuis les Guerres draconiques. Le sol est riche, on dit qu’il a été
fertilisé par le sang et les cendres de ceux qui y vivaient autrefois. Mais
les plaines sont hantées par les victimes des Dragons et les soldats qui
y ont rendu leur dernier souffle. Tous ceux qui ont tenté de s’y installer
au cours des derniers siècles n’ont connu que malheur.
À l’ouest des plaines s’étend la belle et dangereuse Forêt de l’Étoile
Déchue. Ainsi appelée à cause des envoûtantes pierres bleu et noir qui
en jonchent le sol et dont on raconte qu’elles sont tombées des cieux,
la forêt fait l’objet de nombreux contes étranges. La plupart de ceux
qui pénètrent dans les bois à la recherche de ces pierres précieuses et,
selon certains, mystiques, ne reviennent jamais. L’ancien Château de
Caer Loc se dresse à la lisière, construit avec les pierres mystérieuses
de la forêt. Son nom date d’avant l’âge des Anciens Rois. On prétend
que les murs de Caer Loc résistent à la magie noire et aux attaques
des morts-vivants, bien que cette théorie n’ait jamais été éprouvée de
mémoire d’homme.
La cité de Nornholt est peut-être le seul endroit animé de Cailn
de nos jours. Elle se trouve à la croisée de plusieurs routes commer-
ciales, au centre du triangle formé par les Cités Libres de Nerekhall,
Havregris et Tamalir. Cette situation géographique permet à la cité
de générer la plupart des richesses de la baronnie. Le commerce et
les voyages ont également conduit une forte population de Gnomes
à s’y installer. Dernièrement, il est devenu évident que quelque chose
terrifie les Gnomes de Nornholt, qui ont pratiquement cessé de célé-
brer leurs nombreuses fêtes traditionnelles et préfèrent s’enfermer
chez eux le soir venu. Encore plus étrange, eux qui sont normale-
ment loquaces se montrent peu désireux d’évoquer le problème avec
des êtres d’autres espèces.
TELOR, LE PORT DE TERRINOTH
Les terres de Telor commencent juste au-delà des murs d’Archaut et
s’étendent jusqu’à la Côte autonome, englobant à la fois la lisière nord
de la Forêt vespérale et la partie sud de Bois-le-Grand. La côte de la
baronnie est son élément le plus remarquable, car elle constitue la
plus grande étendue de côte civilisée de Terrinoth. Unique parmi les
baronnies, Telor maintient une petite flotte pour affronter les pirates
et autres menaces venues des mers.
La cité la plus prospère de Telor est le Port de Jendra, situé vers le
sud de la Côte autonome, à l’embouchure du fleuve des Larmes de
Korina. Ce port est l’un des rares où les navires venus de l’autre côté
de la mer peuvent accoster sans danger. La cité accueille des voyageurs
venus de Lorimor et même d’Al-Kalim. Le port est le point de départ
des navires faisant route vers les Torue Albes, et parfois même d’expé-
ditions vers Zanaga.
Le baron Echard dirige Telor, mais la comtesse Sela est l’intendante
du Port de Jenda, ce qui lui confère une bien plus grande influence, à
Terrinoth comme ailleurs. Cette situation emplit d’amertume Echard,
qui erre dans les couloirs décrépits du Fort de Grandor, frustré et
désœuvré. Sela, quant à elle, continue de cultiver ses bonnes relations
avec les comtes et les barons de tout Terrinoth, les marchands, les
princes venus des mers lointaines, et même l’impératrice de Lorimor.
Bien que Telor tire un grand profit du Port de Jendra, sa posi-
tion privilégiée sur la Côte autonome ne manque pas de lui attirer
également des ennuis. Grâce au commerce, des richesses transitent
constamment par le port, mais y circulent aussi artefacts maudits,
prêtres mystérieux et créatures maléfiques qui cachent leur véritable
nature sous de longs manteaux et de larges capuchons. Alors que la
vie du Port de Jendra est plus florissante que jamais, de nombreux
petits ports et villages le long de la côte sont abandonnés, à moi-
tié en ruine. Certains d’entre eux ont subi de violentes tempêtes,
d’autres ont été victimes de Merriods ravageurs et d’horribles créa-
tures surgies des profondeurs. On dit même que le phare du Pic de
Calem est hanté par les esprits de son gardien devenu fou et de ses
nombreuses victimes.
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 LE NORD
DE TERRINOTH
Dans le Nord de Terrinoth, les sols fertiles cèdent la place aux terres
froides et aux longs automnes, aux cités aux murs épais et glacés,
aux forêts où règne un soupçon d’obscurité. Le Nord évoque ces
visions autant qu’il évoque les envahisseurs des Terres des Brumes et
les valeureux clans du Dunwarr. Les premiers restent l’un des plus
grands ennemis de l’Humanité, les autres l’un de ses plus grands
alliés. Les forts des Nains se dressent au-delà des terres où se sont
établis les Humains, bien que la Cité Libre de Forge constitue une
exception. Cette cité, jadis conquise par les Dragons, est maintenant
peuplée des Nains qui ont résisté à l’invasion et des descendants
des esclaves humains qui y furent amenés pour forger les armes des
hordes draconiques.
Le Nord est aussi une terre de contes et de légendes où la tradition
orale est bien plus vivante que dans toute autre partie de Terrinoth.
On n’y chante pas simplement des histoires et des poèmes, on y
transmet aussi, entre autres, des connaissances pratiques, comme
des conseils de survie dans le froid ou sur les meilleurs moments
pour partir en expédition. Les Nains racontent l’héroïsme de leurs
ancêtres dans des poèmes et des sagas, tandis que les Humains
chantent des refrains sur les bandits héroïques des Bois Suspendus
et tous les seigneurs avides qu’ils ont criblés de flèches après avoir
refusé de payer la Taxe du Voleur. Que ce soit dû au paysage ou au
temps maussade, l’humour noir a toujours occupé une grande place
dans la culture nordique.
Avec la forteresse de Caer Loc, le Pic de l’Exil marque la frontière
communément admise entre le Nord et le Sud de Terrinoth. Ce pic
a joué un rôle important dans les histoires de nombreux héros ; des
sages se sont depuis installés à son sommet et y dispensent leur savoir
aux courageux prêts à relever le défi d’une périlleuse ascension. Plus au
nord se trouvent la Cité Libre de Havregris et sa célèbre université, qui
recèle, au cœur de ses profondeurs, dans des chambres fortes scellées
par magie, les secrets des éclats runiques.
144
Non loin de Havregris passe le Sentier du Pèlerin, qui serpente
à travers la chaîne de montagnes des Pics de l’Ombre. La magie
naturelle y est suffisamment puissante pour que chaque pèlerin y
affronte un défi différent ; ceux qui réussissent sont autorisés à cueil-
lir un fruit, et un seul, sur les branches de l’Arbre de Shika, censé
apporter fortune ou gloire à qui mange sa chair. Ceux qui survivent
au Sentier se rendent souvent à Passegivre pour y retrouver la cha-
leur accueillante d’un feu de cheminée, l’odeur d’un rôti de sanglier
chassé dans la toundra sauvage et le son enivrant de la bière naine
qui coule à flots.
CARTHRIDGE,
LA BARONNIE D'ARGENT
Voisine de Rhynn, la baronnie de Carthridge enjambe le fleuve des
Larmes de Korina pour s’étendre bien au-delà de ses berges et englober
la majeure partie des Monts Carth. Tirant avantage de ses abondantes
terres agricoles et de ses montagnes truffées de ses célèbres mines
d’argent, Carthridge jouit d’une immense richesse et d’une grande
influence. L’abondance de nourriture et d’argent attire respectivement
les créatures sauvages et les bandits. Toutefois, les habitants s’en s’in-
quiètent peu, car les chevaliers et les fantassins du baron Zachareth
sont parmi les mieux équipés et les plus entraînés de tout Terrinoth.
Bien que les troupes n’aient été confrontées à aucune menace sérieuse
depuis des siècles, Zachareth exige qu’elles se perfectionnent sans cesse
et soient toujours sur le qui-vive.
Malgré les menaces surnaturelles qui rôdent dans les Terres des
Brumes, les habitants de Carthridge continuent, comme ils le font
depuis des siècles, à cultiver le sol fertile qui s’étend jusqu’aux abords-
des marais embrumés. Pourtant, vivre aux portes du territoire du
Traître a causé bien des malheurs à ces gens, qui barrent leurs portes
la nuit et se méfient systématiquement des étrangers. Les quelques
visiteurs de ces fermes et hameaux isolés se demandent souvent si
les habitants ont connaissance d’un danger enfoui ou s’ils ont leurs
propres secrets à cacher.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Comme dans tout Terrinoth, on trouve de nombreuses mer-
veilles anciennes dans les régions isolées de Carthridge. Le Lac de
Tombétoile, par ailleurs petit et banal, abrite en son centre une unique
île sur laquelle est érigé le Temple des Quatre Tempêtes. Cet ancien
temple, très peu fréquenté, est dédié à une religion depuis longtemps
oubliée. Certaines nuits, au milieu de vents hurlants et d’une pluie
aveuglante, les éclairs révèlent les silhouettes de personnages mysté-
rieux rassemblés sur la petite île.
Probablement parce que Carthridge a une frontière commune
avec la Treizième Baronnie, Zachareth est le seul de tous les barons
à parler régulièrement et avec insistance de la menace qui grandit
dans les Terres des Brumes. Alors que d’autres ne voient pas le dan-
ger ou choisissent de le minimiser, Zachareth demande ardemment
une invasion préventive des Terres des Brumes, et se porte bravement
volontaire pour la mener. Jusqu’à présent, les autres barons ont refusé
de soutenir une telle entreprise. En comité restreint, les barons Xarles
et Echard ont fait part de leur crainte qu’une telle action, réussie ou
non, porte son général aux nues, ce qui bouleverserait l’équilibre des
pouvoirs au Conseil.
RHYNN, FLEURON DE TERRINOTH
Rhynn, terre très cosmopolite selon les normes des baronnies, est
dotée d’une grande cité, d’un château moderne et d’un service
de messagers rapides qui relient les villages et les donjons. Elle
contrôle d’une main de maître la Rivière Rhynn, moyen rapide
de transporter les marchandises et les habitants de la baronnie.
Ces derniers sont souvent considérés comme hautains par leurs
concitoyens des autres baronnies. Rhynn a grandement bénéficié
du commerce de l’argent des Monts Carth, et est devenue une
baronnie riche et prospère.
Le baron Greigory vit au Château Arhynn d’où il dirige ses terres.
Homme assez âgé arborant une épaisse moustache blanche, Greigory
dégage un air de sophistication tranquille qui contraste avec l’at-
titude militante de son allié le plus proche, le baron Zachareth de
Carthridge. Le blason de Rhynn représente un arbre en l’honneur de
l’Arbre Mère-Grand de Bois-le-Grand, symbole sacré de la prospé-
rité de la baronnie. Le pouvoir politique de Rhynn est partagé entre
les membres du cercle restreint qui gravite autour du baron Greigory
et les nombreux petits nobles qui se sont enrichis grâce aux mines
d’argent. À bien des égards, le baron de Rhynn règne comme le plus
grand parmi ses égaux ; son autorité est plus précaire que celle de la
plupart de ses pairs.
Il y a des siècles, les immigrants des Cités Libres et de Lorimor,
ainsi que certains venus des Forts du Dunwarr et des clans des Orcs,
sont arrivés à Rhynn en grand nombre. Ces nouveaux habitants,
attirés par la promesse d’un salaire en argent brut, ont aidé ceux de
Rhynn à combattre les Gobelins et les petits Dragons qui infestaient
les Monts Carth. Outre le fait qu’ils ont sauvé d’innombrables vies,
ils ont également enrichi la culture locale ; Rhynn est depuis lors
très bien disposée envers les étrangers, ce qui constitue une sorte
d’anomalie par rapport aux autres baronnies. Toutefois, ces der-
nières années, les histoires d’attaques de mineurs par des Gobelins
et des créatures plus terribles encore n’ont cessé de se répandre, et
le nombre de personnes disparues atteint des sommets effrayants.
Ces malheurs commencent à avoir des répercussions sur le rende-
ment des mines ; les seigneurs et les dames de Rhynn réclament une
solution, même si cela signifie embaucher des aventuriers itinérants
spécialistes de ce genre de menaces.
HAVREFOU
R epaire de parias et d’excentriques qui n’appartient à
aucune baronnie, la cité de Havrefou se situe à l’ex-
trême nord de Terrinoth. Trop reculée pour être soumise à
une quelconque loi, Havrefou est une communauté dans
la plus large acception du terme. C’est un endroit où l’on
trouve à peu près tout, pourvu qu’on ait assez d’or pour
payer et qu’on ne pose pas trop de questions. Comme ils
ne bénéficient ni de la protection des seigneurs Daqan,
ni même de celle d’une milice ou d’une garde officielle,
on pourrait croire que les habitants de Havrefou sont des
proies faciles pour les horreurs qui rôdent dans les Terres
des Brumes. Pourtant, en dehors de rares morts-vivants
que des Coursiers du Brouillard traquent parfois jusqu’à la
ville, Havrefou a, jusqu’à présent, été épargnée.
FORTHYN, LA DERNIÈRE
TERRE CIVILISÉE
Forthyn, qui marque la limite nord de Terrinoth, s’étend des Rochers
Brisés à la Forêt de Muir Sans Issue. Le peuple de cette baronnie est
constitué de gens robustes, endurcis par les rigoureux hivers nordiques.
La Cité Libre de Passegivre est enclavée dans Forthyn, ce qui crée
une certaine tension. La baronnie ne peut pas officiellement régenter
Passegivre et son conseil férocement indépendant, mais la Cité Libre
dépend de la bonne volonté de Forthyn pour ses importations, que les
échanges aient lieu avec des producteurs de la baronnie ou avec des
commerçants qui voyagent sur ses terres.
La baronne Adelynn vit à Hautmont, où elle supervise personnelle-
ment l’élevage et le dressage des célèbres Rokhs de Forthyn, comme tous
ses prédécesseurs depuis des siècles. Les Rokhs sont des aigles massifs,
domestiqués il y a longtemps et élevés pour être utilisés comme mon-
tures de guerre. Adelynn fournit ces Rokhs dressés à certaines autres
baronnies en accord avec d’anciennes traditions et alliances. Éleveurs et
dresseurs travaillent et vivent dans de grandes aires artificielles dans les
montagnes. Ces experts se sont adaptés au froid des hauteurs et perfec-
tionnent leur art depuis de nombreuses générations.
Cependant, ils ont récemment été confrontés à un nouveau défi.
Des voleurs non identifiés ont tenté à plusieurs reprises de voler des
Rokhs, y compris des nouveau-nés et des œufs. Jusqu’à présent, les
maîtres-Rokhs et les hommes d’armes de la baronne sont parvenus
à déjouer ces tentatives. La persévérance des voleurs et la difficulté
extrême pour s’enfuir avec des créatures aussi redoutables sur un ter-
rain aussi périlleux démontrent la détermination et l’ingéniosité des
coupables. Certains habitants de Forthyn craignent qu’ils ne soient
envoyés par une puissance maléfique. Il serait de très mauvais augure
pour la Terre d’Acier que de puissants Rokhs tombent entre les mains
des ennemis de Terrinoth.
145
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LES CITÉS LIBRES
L’existence des Cités Libres de Terrinoth remonte à la lointaine
époque du roi Daqan, qui créa la première et celle qui reste la plus
grande de toutes : Tamalir. Après les Guerres draconiques, alors
qu’une grande partie de Terrinoth n’était plus que ruines fumantes
et que les barons ne pouvaient reconstruire le pays seuls, Tamalir
et sept autres cités parvinrent à prospérer indépendamment et
acquirent ainsi une certaine autonomie. Hormis le fait qu’elles sont
tenues de payer une contribution pour aider à la défense du royaume
et de suivre les lois édictées par le Conseil des Barons, dans tous les
autres domaines, ces huit cités-États agissent de façon complètement
indépendante. Bien que chacune soit unique et ait sa propre iden-
tité, elles forment à elles huit un pan indissociable et indispensable
de la culture de Terrinoth.
AUBELANDE
Fondée par des réfugiés pendant les Deuxièmes Ténèbres, Aubelande est
une cité cosmopolite où se rencontrent des compagnies de mercenaires,
des tribus nomades, des caravanes itinérantes et, fait remarquable, une
importante population d’Elfes. Malgré la taille relativement réduite de
la cité, l’emplacement d’Aubelande sur le Fleuve Flambepanache lui
confère une position privilégiée pour le commerce et un accès facile vers
Tamalir, au nord-est. Pour cette raison, le fleuve est devenu une sorte
d’extension de la ville ; à la nuit tombée, de nombreux travailleurs de la
cité rejoignent leurs maisons sur les rives. Les bateliers et les pêcheurs
de cette région comptent parmi les meilleurs de Terrinoth, et de nom-
breux capitaines de navires maritimes ont commencé leur carrière par
des petits boulots sur le fleuve d’Aubelande.
Bien qu’il y ait beaucoup de passage dans la cité, la présence des
Elfes, elle, reste constante. La culture elfique fait maintenant partie
intégrante d’Aubelande, qui a développé des relations amicales avec
les Latari et accueille en conséquence certains des meilleurs archers
de Terrinoth. Toutefois, les relations entre les Elfes et les Humains de
la cité ne sont pas toujours faciles ; les différends commerciaux et les
conflits de juridiction sont fréquents. Il existe également des domaines
où les deux cultures ne se mélangent tout simplement pas bien. Plus
d’un voyageur s’est mis dans un sacré guêpier sans le savoir en entrant
simplement dans une taverne curieusement vide, en achetant une épée
à un nouveau forgeron ou même en déclarant grandement apprécier
une tourte à la viande particulière lors d’un repas.
Dépourvue de murs d’enceinte, Aubelande est également devenue
une escale de prédilection pour des personnages peu recommandables
qui ont besoin d’un peu de repos – ou d’un peu d’or. Ceci, associé à
la nature largement itinérante de sa population, a contribué à la répu-
tation sulfureuse de la cité. On dit qu’on peut tout y trouver et tout y
acheter, y compris des services assez douteux. Certains habitants ont
préféré déménager dans les petits villages qui entourent la cité, sur la
rivière, ou dans les landes des Plaines Brumeuses au sud. Des camps
comme Valbrasil apparaissent et deviennent progressivement des
hameaux. Mais même dans ces lieux, il existe un marché parallèle qui
permet de trouver tout ce que l’on cherche, en particulier lorsqu’on ne
veut pas attirer l’attention des institutions officielles.
FORGE
Bâtie au pied du grand sanctuaire de la Forge d’Yrthwright, la Cité Libre
de Forge, dans les montagnes à l’est de Tamalir, est l’une des nombreuses
villes dédiées à l’art de la forge. Bien que cette cité soit une ancienne
forteresse des Nains, les Humains sont devenus partie intégrante de sa
population lors des Troisièmes Ténèbres, lorsque le Seigneur Dragon
qui la conquit, Avox, exigea qu’elle produise de plus grandes quantités
d’armes et d’armures à partir du métal issu de ses mines.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Une grande partie de Forge est relativement récente ; des bâtiments
furent construits pour abriter les Humains asservis et d’autres, érigés
après l’occupation dévastatrice des Dragons. De nombreux anciens
esclaves habitent à Bourg Garenne, un village accroché à la paroi de la
montagne dont certaines maisons sont même taillées dans la roche ;
d’autres Humains sont dispersés à travers la cité et se sont intégrés aux
quartiers des Nains, non sans heurts.
Malheureusement, bien que les Humains et les Nains aient com-
battu ensemble contre les Dragons et qu’ils organisent maintenant
des commémorations annuelles, les tensions restent vives. Les Nains
qui furent déportés pendant la guerre revinrent pour trouver des
Humains qui semblaient être partout, et étaient des étrangers presque
aussi indésirables que n’importe quel autre envahisseur. De leur côté,
les Humains considèrent que les Nains sont insensibles à leur escla-
vage passé, et qu’ils sont peu reconnaissants des efforts fournis pour
les aider à mettre fin à l’occupation des Dragons. Les conflits restent
larvés pour la plupart, mais beaucoup ont peur que ce ne soit qu’une
question de temps avant qu’un mot mal choisi ou mal interprété ne
déclenche des émeutes, ou pire encore.
Malgré les tensions, la cité abrite peut-être les plus belles forges
de tout Terrinoth. Au cœur de la montagne, les flammes primitives
brûlent, assez chaudes et assez pures pour permettre la fabrication
d’incroyables armes et œuvres d’art. Seuls quelques apprentis désireux
d’apprendre les secrets du métal sont acceptés chaque année, et cer-
tains doivent attendre très longtemps avant qu’une opportunité ne
leur soit offerte. La majeure partie du travail de forge est exécuté pour
des voyageurs qui cherchent à restaurer leurs lames brisées ou leurs
reliques sacrées grâce au feu purificateur de la montagne. En raison
de l’exceptionnelle habileté de ses forgerons, Forge est la seule cité dis-
pensée de payer des impôts en main-d’œuvre, en or ou en récoltes aux
seigneurs Daqan ; à la place, elle leur fournit des armes et du matériel.
HAVREGRIS
On ne peut pas parler de Havregris sans mentionner son université
réputée dans tout Terrinoth ; rares sont ceux qui réalisent que la ville
fut créée en premier et non l’inverse. Bien que les documents concer-
nant son édification soient peu nombreux, la plupart soutiennent
que Timmorran lui-même fonda la cité du Nord, probablement pour
les réfugiés errants et ceux qui cherchaient à oublier les horreurs des
Premières Ténèbres. Cependant, il avait peut-être d’autres raisons de
choisir cet endroit.
La confluence de deux rivières à proximité ainsi que son accessibilité
conféraient à la ville un atout commercial évident ; la cité a ensuite évo-
lué pour devenir un centre d’apprentissage cosmopolite. Des légendes
se développèrent autour de Havregris, on prétendit que les eaux voisines
repoussaient les Fées et que les morts-vivants ne pouvaient être relevés
au sein de la cité. Bien que jamais avérés, ces contes attirèrent l’attention
de ceux versés dans l’étude des arcanes ; ils s’établirent à Havregris et
créèrent la plus grande université de Terrinoth, dédiée uniquement à
l’étude de la magie. On érigea de grandes salles de pierre et on creusa de
profonds souterrains où mener de dangereuses expériences, tandis que
les plus sages et les plus éminents magiciens de chaque cour et de chaque
cité étaient recrutés pour devenir instructeurs et maîtres.
Havregris abrite maintenant les meilleurs collèges magiques de
tout Terrinoth, et peut-être du monde entier ; ses magiciens sont
réputés pour leur sagesse et leur dévouement aux arts magiques.
Les seigneurs Daqan recrutent leurs mages de bataille à Havregris,
d’où proviennent également la plupart des connaissances actuelles
sur la magie runique. L’université possède le plus grand nombre
d’éclats runiques connus, que les mages utilisent fréquemment
pour leurs expériences, toutes plus puissantes et saugrenues les
unes que les autres.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Havregris abrite également d’autres collèges consacrés à tous les
arts, de l’histoire à l’agriculture en passant par la rhétorique, mais
la plupart de ses établissements se spécialisent dans l’étude de diffé-
rents aspects des savoirs et des pratiques magiques. Y étudier signifie
passer de longues journées en cours et de longues nuits à lire, mais
aussi participer fréquemment à des sessions d’expérimentations qui
se soldent parfois par des explosions catastrophiques. Obtenir son
diplôme assure une grande reconnaissance et ouvre les portes d’une
longue (mais dangereuse) carrière. Des voyageurs viennent souvent à
Havregris pour assister à des conférences et pratiquer leur art avec des
adeptes, afin d’améliorer leurs compétences magiques ou de mieux
manipuler certains objets.
NEREKHALL
La paranoïa règne à Nerekhall ; certains diraient que c’est à juste titre.
Jadis, dans un moment d’incommensurable disgrâce, un membre
du Conseil des Magiciens de la cité céda à l’influence corruptrice de
l’Ynfernael et ouvrit un portail vers ce plan corrompu. Des montres
s’en déversèrent, menaçant les régions de l’Ouest de Terrinoth. Les
seigneurs Daqan se dressèrent contre ces forces des ténèbres et recou-
rurent à des mesures drastiques pour endiguer l’invasion. Des familles
entières de sorciers furent éradiquées lors d’une purge brutale dans
la lutte pour forcer le portail à se refermer. Ceux qui furent épargnés
restèrent sous surveillance constante.
Hantés par la peur de retomber sous l’emprise de l’Ynfernael, les
Prêtres de Pollux, qui dirigent un grand culte à Nerekhall, créèrent les
Cuiraciers : des armures vivantes, insensibles à la corruption qui guette
les êtres mortels, immunisées à la fois contre les magies maléfiques et
bénéfiques. Fabriqués en fer noir, ces automates dépassèrent les attentes
de leurs inventeurs et remplacèrent bientôt la plus grande partie de la
milice de Nerekhall. Aujourd’hui, on les voit partout dans les rues de la
cité, protégeant les habitants contre les actes flagrants de magie malé-
fique. Ceux qui osent prétendre avoir été témoins d’un dysfonctionne-
ment ou d’une panne d’un Cuiracier sont sévèrement punis pour avoir
répandu des rumeurs malveillantes.
Malgré son sinistre passé, Nerekhall a prospéré, sous
le regard méfiant des inquisiteurs, des templiers des
baronnies et de l’Église de Kellos. Les magis-
trats qui y rendent la justice sont impla-
cables et clament que seuls la peur et le
148
contrôle assurent une protection contre la corruption. Il est impos-
sible de retourner la moindre pierre, de mener la plus petite expé-
rience ou de consulter un seul grimoire sans qu’ils en soient informés,
car ils surveillent presque tous les aspects de la vie à Nerekhall afin
d’en améliorer l’image. La cité est particulièrement fière de son école,
connue sous le simple nom d’Académie, qui a acquis une grande
renommée. Véritable puits de culture et d’apprentissage, l’Académie
est un lieu où les membres de l’élite de la société peuvent mener des
expériences et des recherches originales en consultant des volumes
rares sans être soumis à un examen minutieux en raison de leur rang
élevé. Les membres du corps professoral semblent encore plus désireux
que leurs étudiants d’explorer tous les aspects de la magie et des autres
arts dans leur quête pour créer un grand héritage pour Nerekhall.
PASSEGIVRE
Passegivre, la plus septentrionale des Cités Libres, est le dernier lieu
civilisé avant les terres sauvages et indomptées de l’hiver éternel. À
peine assez grande pour qu’on la considère comme une cité la majeure
partie de l’année, Passegivre s’apparente davantage à une commu-
nauté dont la richesse croît et décroît en fonction des saisons. L’été,
la cité se vide presque entièrement, ses habitants partent chasser et
cultiver les terres avant le retour du froid. Lorsque la saison s’achève,
Passegivre reprend vie, envahie par tous ceux qui cherchent à échap-
per à la neige et à la glace pour trouver un semblant de confort. Les
chasseurs et les trappeurs, les éleveurs et les fermiers, les commerçants
et leurs escortes, tous retournent en ville pour se rencontrer, échanger
et commercer. Les richesses naturelles de la Forêt de Muir Sans Issue,
la voie navigable de la Rivière des Larmes et les gisements abondants
de minerais des Pics de l’Ombre non loin font de Passegivre l’un des
seuls endroits de la région où l’on peut facilement acheter des matières
premières et faire fabriquer armes et équipement.
Pendant les mois d’hiver, Passegivre est bondée, des champs de
yourtes se pressent contre ses murs tandis que l’industrie tourne à plein
régime jusque tard dans la nuit. C’est la saison où la cité peut rivali-
ser avec Tamalir, avec ses salles de théâtre temporaires, ses tribunaux,
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

ses temples et ses magasins érigés en quelques jours. Alors, les réjouis-
sances constantes sont si intenses, et le bruit une telle cacophonie, que
l’on entend la cité bien avant de la voir.
Pour s’assurer de bonnes récoltes et des chasses réussies, les tribus du
Nord effectuent un certain nombre de rituels à cette époque de l’an-
née, dont les plus importants sont les Épreuves de Passegivre. Lors de
ces épreuves, on utilise divers élixirs et herbes sacrées pour accéder au
monde des esprits ancestraux, où il faut relever une série de défis. Pour
prouver leur valeur, les concurrents pénètrent les plans spirituels, où ils
démontrent leur force, leur ruse et leur courage, souvent en affrontant
les esprits de puissants animaux. Ceux qui remportent les épreuves
gagnent les bénédictions des esprits et on leur tatoue le symbole des
Champions de Passegivre, une importante récompense et un signe de
puissance dans cette Cité Libre. C’est généralement à Passegivre que
se forment les groupes de voyageurs qui partiront s’aventurer dans le
Nord, car c’est la seule communauté dans toute cette région boisée,
en dehors d’une petite colonie de Latari. Les tatouages indiquent à ces
groupes que le guerrier qui les porte a accompli des exploits et qu’il est
prêt à affronter tous les dangers.
RIVEGARDE
Fièrement dressée au-dessus de la cité portuaire de Rivegarde, une
immense statue, que tout le monde surnomme le Vieil Homme, veille
sans relâche. Scrutant l’horizon du haut de la falaise, lanterne à la
main, ce colosse est le symbole parfait de Rivegarde et de la place
qu’elle occupe dans la grande histoire de Terrinoth. Initialement fon-
dée pour être un avant-poste militaire des Rois Penacor, Rivegarde
est depuis devenue l’une des Cités Libres les plus autonomes et se
consacre à la défense de la partie sud du continent.
On peut considérer que le siège du pouvoir de Rivegarde est la
Garde, qui surplombe stratégiquement le Sud de Terrinoth. Plus qu’un
château, plus qu’une garnison de soldats, c’est une institution cultu-
relle, symbole de la force et de l’histoire martiale de la ville. Premier
bâtiment construit sur le site de ce qui allait devenir Rivegarde,
les soldats qui y vinrent en garnison adoptèrent son nom
comme ils acceptaient leur mission. Ici, les soldats
sont formés aux arts de l’équitation et du combat
à l’épée. Une unité spéciale de cavaliers joue
un rôle vital même en période de paix, car la
cité est dotée d’un service de messagers qui
dessert même les régions les plus lointaines
de Terrinoth. Ces Cavaliers de Rivegarde ont
prouvé l’importance de la rapidité et de la fia-
bilité des communications en permettant de
mettre fin à beaucoup de menaces avant qu’elles
ne prennent des proportions catastrophiques.
Au sud de Rivegarde se dresse la forteresse de
Gardescinde, l’une des nombreuses constructions
de ce genre parsemées dans le paysage. En raison du
grand nombre de soldats et de cavaliers de la milice de
Rivegarde et de la présence permanente de rôdeurs, elle
sert souvent de base d’opérations avancée. Ses occupants
sont la première ligne de défense contre les dangers venus
des Montagnes du Désespoir au sud.
Rivegarde bénéficie d’une activité commerciale florissante grâce à
sa chaîne d’approvisionnement très dense. Les négociants et commer-
çants pullulent pour répondre aux besoins des milliers de cavaliers et de
leurs montures. Un grand nombre d’Orcs se sont établis dans la cité, et
beaucoup d’autres y font une étape au cours de leurs voyages. Les Orcs,
originaires des Plaines Brisées, ont des connaissances sur les techniques
pour apprivoiser et élever des bêtes sauvages qui se sont révélées inesti-
mables ; leur connaissance des dangers qui rôdent dans tout Terrinoth
et au-delà de ses frontières l’est probablement encore plus.
TAMALIR
Plus d’une aventure légendaire a débuté dans l’une des nombreuses
tavernes de Tamalir, la plus grande et la plus prospère des Cités
Libres. On dit que chaque habitant a une histoire à raconter sur la
jeunesse d’un guerrier ou d’un mage, avant que son nom ne devienne
légendaire. Ce n’est pas un hasard : Tamalir a toujours eu une place
particulière dans l’histoire de Terrinoth. Première cité à obtenir l’in-
dépendance grâce à une charte ratifiée par le roi Daqan en personne
et siège des Anciens Rois pendant leur règne, son emplacement pri-
vilégié le long du Fleuve Flambepanache en fait depuis longtemps un
lieu d’échange pour tout Terrinoth ainsi qu’une destination pour les
immigrants. Toutes les routes mènent à Tamalir, ses habitants sont
fiers de l’héritage et de l’importance de leur cité.
Sa domination s’étend si loin qu’elle englobe presque l’ensemble
du Marais de l’Aile Noire et de Pontgrenat, un lieu de passage sur le
fleuve célèbre pour ses jeux d’argent et ses soirées arrosées. On trouve
à Tamalir les plus belles auberges et les plus grands théâtres ; les arti-
sans les plus qualifiés de la plupart des corps de métiers et les plus
grands artistes y résident. Il est rare de ne pas trouver son bonheur
dans l’une de ses mirifiques boutiques ou l’un de ses immenses bazars.
Si l’importante milice officielle ne suffisait pas à défendre la cité, ses
dirigeants peuvent aussi faire appel à toutes sortes d’aventuriers et
de mercenaires qui louent leurs services au fond des ruelles et dans
les salles des guildes pour constituer une armée prête à se battre en
quelques heures.
Tamalir étant la plus grande cité de Terrinoth, le commerce y
régit presque tous les aspects de la vie, dans la cité comme dans la
campagne environnante ; le choix des dirigeants est donc intime-
ment lié aux intérêts commerciaux. Plutôt que d’être gouvernée
par un gouverneur ou tout autre dirigeant facile à influencer,
Tamalir est dirigée par un conseil de Maîtres de Guilde, au sein
duquel tous sont considérés comme parfaitement égaux.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Impitoyables, rusés, ils se consacrent entièrement à la prospérité de
leurs guildes et de la cité dans son ensemble, et rivalisent d’ingéniosité
pour promouvoir de grands travaux publics et des foires extravagantes
afin de gagner la faveur de l’opinion publique.
De nos jours, Tamalir est toujours en convalescence. Dévastée lors
des Secondes et Troisièmes Ténèbres, bâtie sur les pierres tombales
des générations passées, la cité se reconstruit sur des tas de cendres
et d’os. Nombre de bâtiments sont relativement récents, n’ayant été
érigés qu’au cours des derniers siècles ; la cité n’a pas encore rega-
gné sa majesté d’antan. Toutefois, malgré les destructions subies,
elle reste un lieu de prédilection pour établir des contacts, monter
des expéditions et s’informer sur les événements survenant dans des
terres lointaines. Tamalir est probablement la seconde maison de
tous ceux qui se prétendent aventuriers, le lieu où ils se reposent
et se rétablissent avant de repartir explorer les ruines perdues et les
catacombes oubliées de Terrinoth.
VALVIGNE
De toutes les Cités Libres, aucune n’a un caractère aussi sacré que
la cité monastique de Valvigne. Située au sud-est de Rivegarde, à la
jonction des Collines du Gardien et des Grandes Plaines, Valvigne
est le centre administratif et universitaire consacré à Kellos, dieu de
la Vie, de la Flamme et de la Justice. Site de pèlerinage populaire,
elle abrite la plus grande bibliothèque de Terrinoth après celle de
l’Université de Havregris.
Selon les actuels Grands Prêtres de Kellos, peu de temps après les
Deuxièmes Ténèbres, un vil nécromancien vivait près de Valvigne et
désirait créer son empire et son armée de morts-vivants. Des héros se
réunirent pour le vaincre, mais ils échouèrent et se firent massacrer.
Le dernier survivant, quelques instants avant de trépasser de ses bles-
sures infligées par le sorcier, appela à l’aide et jura fidélité éternelle à
quiconque viendrait lui porter secours. Son regard se voila, son corps
fut enveloppé de flammes. Levant sa main, qui brillait d’une lumière
à faire pâlir le soleil, le survivant, à présent guéri, frappa le nécroman-
cien d’une vague de flammes et bannit son armée de morts-vivants
pour l’éternité. Une fois sa vue rétablie, il constata ce qu’il avait fait et
sut qu’un pouvoir divin avait intercédé en sa faveur.
Il tint promesse et commença à prêcher en témoignant de la géné-
rosité et de la puissance du dieu. Des individus qui se souvenaient
de récits d’un feu purificateur lors des Deuxièmes Ténèbres, et qui
avaient allumé un Feu Éternel en souvenir de ces tragé-
dies, le rejoignirent bientôt. Ensemble, ils créèrent
une église en l’honneur de l’être qui, selon le
survivant, l’avait aidé : Kellos.
150
Ses disciples le nommèrent Premier Acolyte de Kellos. À la même
période, débuta la construction de ce qui deviendrait la Grande
Cathédrale de Kellos. À la mort du Premier Acolyte, celui-ci fut
canonisé et devint le premier saint de l’Église. Les Acolytes qui lui
succédèrent ajoutèrent des ailes, des salles, des bastions et autres
constructions, transformant la cathédrale en une structure qui pour-
rait rivaliser avec les plus grands châteaux des seigneurs Daqan.
Derrière ses murs imposants, des centaines d’initiés entretiennent
en silence les jardins, tandis que les innombrables scribes passent des
années à copier des textes sacrés et d’autres documents rares.
C’est ici que les Prêtres et les Chevaliers de Kellos sont formés
dans le plus grand secret, sous le regard de leur dieu. Capables de
bannir la souillure des ténèbres grâce à un simple contact, ils sont
aimés par toute la population. Leur formation achevée, ils quittent
la cathédrale et parcourent le monde pour frapper les morts-vivants
de leurs flammes purificatrices. Les nombreux pèlerins qui se rendent
à Valvigne dans l’espoir d’une guérison miraculeuse les acclament
quand ils les croisent sur les routes. Les Prêtres et les Chevaliers de
Kellos sont faciles à reconnaître, car ils portent tous sur leur armure la
représentation rouge et or de la main brûlante de Kellos.
LES HABITANTS
DE LA TERRE D'ACIER
Peut-être en raison de son emplacement central dans Mennara,
Terrinoth est peuplé d’habitants très divers. On y trouve très commu-
nément des Humains tant dans les Cités Libres au riche passé que dans
de petites colonies qui n’existent parfois que le temps de quelques sai-
sons, car ils vivent à Terrinoth depuis des siècles. Elfes, Nains, Gnomes
et autres espèces peuplent également les villages et les régions sauvages
du royaume, et vivent (le plus souvent) en paix avec les Humains.
Cependant, les terres sauvages qui s’étendent entre les régions civili-
sées de Terrinoth abritent aussi d’innombrables colonies de Gobelins
et autres créatures dangereuses, y compris des Dragons qui y sont restés
ou y ont éclos après la fin des Troisièmes Ténèbres. Notez qu’on observe
souvent des Ailes-rasoir (voir page 147 du livre de base Genesys) dans
les cieux de Terrinoth, prêtes à attaquer les aventuriers imprudents.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
lors que nous progressions vers l’ouest,
je remarquai que les rares autres voyageurs
que je croisais me jetaient de plus en plus
souvent d’étranges regards en coin. Mon style
vestimentaire et mon accent me désignaient clairement comme
étant étranger, je le sais parfaitement. Mais cette surprenante
hostilité, si différente de la façon dont m’avaient reçu les Nains,
était un revirement de situation malvenu.
Dès mon départ sous le soleil matinal, j’avais commencé à
avoir des doutes sur ma nouvelle destination. Tant de mes amis
et compagnons m’avaient fait part de leurs craintes quant à
ce mystérieux royaume. Et pourtant, l’histoire d’une seule
personne avait suffi à me convaincre de ne tenir compte d’aucun
de ces conseils et de foncer tête baissée dans le brouillard…
Mais l’idée était là, et il était certain que je ne trouverais ce
que je cherchais nulle part ailleurs.
Ces histoires ne pouvaient être vraies, n’est-ce pas ?
L’une des nombreuses tours de
guet que j’a i rencontrées dans
cette région. La plupart étaient
cependant dans un état bien
plus délabré que celle-ci.
156
Il y a des revenants à Al-Kalim, bien sûr. Mais un ancien
seigneur Liche menaçant un continent entier des centaines et des
centaines d’années après sa mort supposée ? Et suivi par une
véritable armée de morts-vivants ?
Ce sont des contes pour effrayer les enfants, évidemment. Je
doute fortement qu’une seule de ces créatures existe sous la
lumière du soleil d’A ’tar.
Cependant, plus j’avançais vers l’ouest et plus les habitants
épars sur ma route me semblaient être les plus réticents, les
plus méfiants, et carrément les plus terrifiés de tous ceux que
j’avais rencontrés jusqu’à présent à Terrinoth. Lors des nuits où
j’a i eu la chance de tomber sur une auberge où me reposer,
les rares discussions dans les salles communes n’étaient que
murmures et évoquaient, le plus souvent, ce qui se passait
dans les Terres des Brumes. J’entendis bien des récits de pillages
par des créatures damnées qui surgissaient du brouillard
nocturne pour brûler des villages, terroriser et tuer leurs
innocents habitants.
Pour autant que je pusse en juger, ces histoires n’étaient que de
deuxième ou troisième main. Aucune des personnes avec qui je
parlai n’avait vraiment été témoin de ces horreurs. Ces affreux
événements semblaient toujours avoir frappé la grand-tante de
quelqu’un qui vivait dans une région voisine, ou « un vieux de mon
village d’origine ». Quoi qu’il en soit, il était évident pour ces gens
que les événements qu’ils décrivaient étaient tout à fait réels.
Leurs yeux étaient emplis d’une telle terreur quand ils
parlaient que je n’avais aucun doute sur le fait que quelque chose
se tramait et que je me dirigeais droit dessus. Je n’accordais
aucun crédit à ces fables sur les morts agités qui causeraient de
telles horreurs, mais je craignais tout de même que franchir la
frontière et trouver ce Karkadahn ne s’avère plus difficile que
prévu. Si les Terres des Brumes étaient vraiment hantées par
les morts, et si je me dirigeais effectivement vers un endroit
maudit, eh bien mon voyage ne me plaisait pas du tout.
La route était assez bien entretenue comparée à la plupart de
celles qui étaient déjà passées sous les sabots abîmés du pauvre
Ibn, mais elle faisait pâle figure face à l’excellence des Nains
en ingénierie civile. Des collines bordaient les terres au nord de
la route ; au loin, je distinguais de hautes montagnes. Au sud,
le paysage était plus ou moins le même, sans les immenses
pics rocheux, et la route se déroula ainsi jusqu’au quatrième ou
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
cinquième jour après mon départ de Thelgrim. Je vis alors une
première tour de guet qui se dressait fièrement sur une colline
lointaine.
J’eus la curieuse impression, peut-être à cause de quelque
chose dans l’architecture – mais je ne pouvais en avoir la
certitude – que la tour avait été orientée pour me regarder
directement, ou du moins observer le nord, derrière moi, de
l’autre côté de la route.
Je me retournai pour regarder au loin, mais ne discernai aucune
menace ni aucune différence flagrante de terrain dans cette
direction par rapport aux terres au sud. Peu de temps après
avoir dépassé cette première tour, j’en atteignis une autre, avec la
même architecture massive, la même orientation vers le nord,
et je sentis un frisson me parcourir l’échine. La superstition
avait bon dos, mais je ne connais aucun seigneur qui dépenserait
les sommes qu’avaient coûté ces tours de guet par caprice.
Après plusieurs jours de chevauchée, nous vîmes ce qui
semblait être au premier abord une autre tour, mais n’en était
pas une en réalité. Des décombres de pierre au sommet d’une
colline semblaient avoir été brûlés. Je regardai nerveusement ces
ruines au loin et constatai qu’il y avait des lambeaux de tissu
bleu et blanc éparpillés sur la colline. Des drapeaux ? Ou
peut-être des uniformes ?
Je fis repartir mon cheval, peu désireux de savoir ce qu’il en était
réellement, et ne rencontrai plus aucune tour côté sud, sauf une
ruine isolée qui avait l’air bien plus ancienne que la précédente.
La route de l’Ouest qui part de Thelgrim conduit à la cité de
Havrefou, ma prochaine destination. Située tout près de la
frontière des Terres des Brumes, je savais qu’elle constituerait un
point de départ parfait pour mon incursion dans ces territoires
mystérieux, si je rassemblais assez de courage pour suivre
mon idée.
Les deux ou trois derniers jours avant notre arrivée, je ne pus
m’empêcher de remarquer à quel point les terres agricoles
autour de nous étaient riches et luxuriantes. Les champs
regorgeaient de cultures de toutes sortes de plantes aux couleurs
diverses, qui me firent penser avec nostalgie aux Champs de la
Fertilité, et peut-être même au lointain Aymhelin.
Et pourtant, pour chaque champ entretenu, j’en croisais deux
en jachère, comme s’il n’y avait pas assez d’ouvriers pour les
157
labourer tous. Ceci, bien plus que les avertissements les plus
terribles et les plus dramatiques que j’a ie jamais entendus,
m’emplit d’un sentiment de grande inquiétude. Si la sombre
menace était si imminente dans cette région qu’elle avait poussé
les paysans à abandonner de si belles terres, alors le danger
était probablement des plus réels.
Havrefou offre un contraste frappant avec les vastes champs
verdoyants qui s’étendent autour de la cité. Ses bâtiments,
construits en grosses pierres gris sombre et en bois goudronné,
sont fonctionnels mais affreux à regarder. Je restai quelques
instants fasciné par le fait qu’un même matériau puisse avoir
un aspect si différent en fonction de la culture qui l’utilise. Les
Nains ont construit des merveilles d’art en granit et en marbre.
Le grès poli et les mosaïques scintillantes jettent mille feux sur
Al-Kalim. D’un autre côté, il y a la complexité naïve et laide
d’A rchaut et l’aspect froidement fonctionnel de Havregris.
Parmi tous ces styles, cependant, celui de Havrefou était de loin
le moins accueillant.
C’était comme si un nuage invisible et oppressant, suspendu
au-dessus de la ville, projetait son ombre dérangeante et
plongeait Havrefou dans une obscurité troublante. Les rues
étaient imprégnées d’une odeur écœurante d’encens et de
poussière accumulée depuis des décennies ; ce mélange m’était
pénible. Les rares auberges et tavernes ne faisaient pas grand-
chose pour atténuer la puanteur. Les relents de nourriture
et de boisson rancies qui en émanaient n’ajoutaient à l’arôme
général qu’un arrière-goût persistant qui vous prenait au fond
de la gorge et remontait désagréablement dans le nez.
Les habitants de la ville restaient distants. Ils passaient
abruptement d’une affaire à une autre. Quoi qu’ils aient été en
train de faire, ils prenaient cela très au sérieux. Ils me jetaient
des regards pleins de suspicion et de colère à peine voilée
quand ils ne m’ignoraient pas complètement. Le sentiment
d’angoisse et de peur qui régnait ne m’étonnait guère étant
donné la terrible réputation des terres situées de l’autre côté de
la frontière, si proches ; il me sembla pourtant qu’il y avait
quelque chose de personnel dans leur hostilité.
Le grand A’tar sait que j’essaye d’accorder le bénéfice du doute
à toutes les créatures qui errent en ce monde, mais il fut
presque immédiatement évident pour moi que Havrefou était
un repaire de parias, d’exilés et de malfrats.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
Je passai du temps dans une ou deux tavernes, essayant
subtilement d’apprendre quelle était la meilleure façon
d’entrer dans les Terres des Brumes, mais à chaque fois, je
ne rencontrai que regards hostiles et silence malveillant. Ma
conviction s’a ffermit : la plupart de ces personnes en savaient
plus sur la pierre cachée dans ma bourse et son secret que
celles que j’avais rencontrées jusqu’ici au cours de mes voyages.
Cependant, je compris également qu’aucun d’eux ne me dirait
jamais rien, à moi, un étranger, et que je ne tirerais d’eux
aucun des sombres secrets qu’ils avaient eux-mêmes découverts
au prix de je ne sais quels sacrifices.
Pour couronner le tout, l’hydromel était aigre, si différent de la
boisson claire et sucrée à laquelle je m’attendais.
Une pensée horrible avait lentement pénétré mon esprit au
cours des derniers jours, alors que je voyageais vers l’ouest et
que je voyais des ruines bien plus récentes remplacer lentement
les vieux ossements du passé tout autour de moi. Il était clair
que cette terre était tourmentée par le mal, et qu’elle l’était
depuis de nombreux siècles.
Et si les pouvoirs qui avaient terrassé Terrinoth, quelle qu’a it
été leur origine, et prenaient maintenant une telle ampleur
dans les royaumes du nord, risquaient d’atteindre un jour
Al-Kalim ?
Cette pensée, qui envahissait petit à petit mon esprit,
donna un nouvel élan à ma quête. Si ces forces obscures
devaient jamais tourner leur regard vers le sud, les guerriers,
les assassins et les mages du Calife auraient bien du mal à
défendre le royaume. Un artefact aussi puissant que la pierre
en ma possession pourrait bien faire la différence entre la
victoire et la défaite pour mon pays.
Malheureusement, cette nouvelle résolution se heurta à ma
tout aussi nouvelle peur face aux menaces des Terres des
Brumes qui rôdaient au nord de Havrefou. Il était clair que
les habitants de la cité étaient eux aussi terrifiés par ce qui
pouvait se cacher dans le brouillard qui recouvrait les terres
stériles de ce qu’ils appelaient la Treizième Baronnie. La
pénurie de bons fermiers, la plupart ayant fui des jours, des
semaines, voire des mois avant mon arrivée, était la preuve
silencieuse du fait que les bonnes gens étaient persuadés que la
menace venue du nord était bien réelle.
158
L’idée d’anciens revenants et de goules se relevant pour attaquer
les vivants à coups de griffes est risible, mais que se passerait-
il si cette peur enfantine cachait un danger réel, plus terre
à terre ?
Et si les barons, les Cités Libres, les Elfes, les Nains et les
autres habitants des terres du Nord, se souvenant dans leur
inconscient collectif de la terrible puissance de Waiqar le
Grand, avaient donné son nom à un autre être doté d’un grand
pouvoir et de terribles ambitions, qui étirait sa main griffue
pour menacer tout de Terrinoth ?
Il m’était plus facile de croire qu’un roi bandit avait envahi
les baronnies, s’était installé dans les Terres des Brumes et
utilisait maintenant les superstitions de ces gens contre eux,
que d’accepter qu’un mal ancien prévoie encore maintenant la
destruction de tout ce qui est juste et bon.
Je laissai Havrefou derrière moi avec un sentiment de
soulagement presque aussi grand que la peur croissante
que je ressentais à l’idée de bientôt atteindre les Terres des
Brumes. J’avais besoin de croire que je trouverais de l’a ide
là-bas, car toutes les autres pistes n’avaient finalement été que
des impasses. Les paroles de mon ami humain de Thelgrim
m’avaient au moins donné un faible espoir : selon lui, les choses
qui rôdaient dans les brumes n’étaient pas des monstres, mais
étaient aussi humaines que moi. Si nous avions un héritage
commun, n’était-il pas possible que je pusse échapper à leur
hostilité, même si les autochtones du Nord avaient beaucoup à
craindre d’elles ?
J’atteignis une petite colonie, au nord de Havrefou, où l’on
m’avait suggéré de me rendre : Durling, juste à la frontière
de la dernière baronnie. C’était une petite ville tranquille, qui
m’en rappelait beaucoup d’autres que j’avais traversées dans les
terres du Nord. Les maisons, guère plus que des huttes à vrai
dire, avaient connu des jours meilleurs, la couche de peinture
appliquée dans un passé lointain avait été récurée par le vent
et le soleil, ne laissant pour toute couleur qu’un gris blanchi
uniforme sur tous les bâtiments. Il n’y avait pas âme qui vive
dans la rue centrale jonchée d’ordures, et quand j’entrai dans la
seule taverne que la ville pouvait se vanter d’avoir, après avoir
confié Ibn à jeune étrange et silencieux, au crâne lisse comme
un œuf et qui portait un cache-œil, je ne fus pas surpris de
découvrir la salle commune presque vide.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
Être le seul client de l’auberge de la Tête du Baron et
essayer de ne pas accorder trop d’importance au nom de
l’établissement donna à ma tentative d’approche un air encore
plus étrange et cauchemardesque que les fois précédentes.
Le propriétaire, un homme à la peau grasse et aux yeux
rougis, un pli amer au coin de la bouche, ne fit que grogner
en réponse à mes questions jusqu’à ce qu’il voie la couleur de
l’or du Calife. Il fut alors enchanté de me décrire les horreurs
que je risquais de rencontrer de l’autre côté de la frontière. Il
me parla de buveurs de sang et d’esprits errants, d’animaux
massacrés dans la nuit et d’enfants disparus dans leur lit, que
personne ne revit jamais.
L’aubergiste me raconta de bien tristes histoires qui ne calmèrent
ni mes pensées, ni mon estomac. Finalement, je me lassai
d’entendre cette litanie de propos larmoyants et coupai court à
la conversation d’un hochement de tête aussi poli que possible.
Je passai ensuite quelques instants à regarder par la fenêtre
le ciel qui s’assombrissait au nord. Rester assis, seul, dans la
salle commune était par trop étrange et inintéressant, d’autant
qu’on n’y servait que la boisson amère que j’avais goûtée pour la
première fois à Trelton. Je montai donc tôt dans ma chambre,
bien que mes pensées tournassent en boucles effrayantes et que
mon esprit me mît au défi d’oser m’assoupir.
Je m’assis sur la couche mince et dure pour regarder par la
fenêtre les brumes qui tourbillonnaient dans l’obscurité. Je pris
159
la pierre du Calife, chose que je ne fais plus que rarement, et
plongeai mon regard dans ses profondeurs d’azur, la suppliant
de s’ouvrir à moi, de me dévoiler ses secrets, et d’a insi me
dispenser de ce voyage sur une terre effrayante qui ne cessait
d’attirer mon regard vers le nord.
Al-Kalim a peut-être besoin de cette pierre, mais elle sera
bien inutile si je ne parviens pas à libérer sa puissance. Si
je ne me montre pas digne de cette tâche, quel sera mon
destin ? Errer dans ce royaume froid et lointain en attendant
que les myriades d’horreurs qui y rôdent s’emparent de moi, et
n’être qu’une autre victime sans nom ?
Je n’a ime pas avoir ce genre de pensées. Je suppose que la
tristesse des habitants de cette terre m’a tellement touché
que j’en deviens morose, et que je n’arrive plus à réfléchir
rationnellement à ma situation.
Quoi qu’il en soit, je pressens la fin imminente de mon voyage.
Je ne sais si je dois être soulagé ou fuir pour me cacher,
terrifié, dans le tunnel le plus profond que je puisse trouver.
‰‰‰‰‰
Mon sommeil à Durling fut agité, et pas seulement à cause
du sentiment de malheur imminent qui planait sur ma tête
comme un gros nuage d’orage. J’entendais un bruit curieux dans
la nuit, des coups lointains et sourds, des claquements et des
grincements comme si quelqu’un avait mis en route une étrange et
énorme machine parmi les brumes. Le son semblait traverser les
murs et les portes sans discontinuer pour m’aller droit au cœur.
Je me réveillai, si je puis dire, considérant que je m’étais à
peine assoupi, et le son s’estompa aussitôt. Qu’il ait été réel
ou juste le fruit de mon imagination surmenée, je ne sais, et
je répugnais à l’idée d’en parler au propriétaire au cas où il
confirmerait mes craintes.
Je n’a i plus d’excuse, maintenant, pour retarder davantage
mon voyage dans les Terres des Brumes. Je dois trouver
du réconfort dans le monde rationnel de mon propre
pays, et ne pas céder aux contes terribles et
angoissants que ces misérables fous répandent.
Quelques habitants de cette région. Leurs visages étaient emplis de
méfiance et de peur. Je les ai dessinés de mémoire, car personne
n’aurait accepté de poser pour moi, de peur que des esprits nuisibles
ne s’emparent de leurs âmes sur le parchemin comme on vole des
fruits d’un arbre.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LES TERRES DES BRUMES
C eux qui osent voyager au-delà de Havregris se retrouvent
au cœur d’un paysage voilé et constamment changeant, où
la chaleur du soleil atteint rarement la terre. Délimitées par des
marais fétides à l’ouest et les Monts Dunwarr au nord, ces étendues
maudites appartenaient au treizième baron de Terrinoth, celui dont
le siège à Archaut reste vide depuis des centaines d’années. Cette
région au sol de roches volcaniques est sillonnée par des marais ten-
taculaires qui bouillonnent, expulsent des gaz mortels et piègent
pour l’éternité dans leurs boues noires les aventuriers trop témé-
raires. Voici les Terres des Brumes, le domaine de Waiqar l’Immortel,
presque infranchissables depuis sa trahison, il y a des centaines d’an-
nées de cela. Il lança sa funeste campagne depuis ces terres pour raser
Terrinoth et s’emparer des éclats runiques. À mesure que son pou-
voir s’est développé au fil des siècles, les Terres des Brumes se sont
étendues au-delà des limites originelles de la Treizième Baronnie.
Inexorablement, elles continuent de s’étendre, s’enfonçant toujours
plus loin dans les terres des vivants.
ZORGAS
La légende raconte que la grande forteresse de Waiqar a été construite
à l’image de la Citadelle Noire de Llovar, mais rares sont ceux qui
osent en parler, car la plupart savent que le regard assassin de
l’Immortel pénètre profondément jusqu’au cœur de Terrinoth. Zorgas
se dresse au centre d’un marais quasi infranchissable dont le terrain
constamment changeant ne laisse apparaître un chemin dégagé qu’au
moment où Waiqar souhaite sortir de ce bourbier avec son ost. C’est
là, prétend-on, que les plus terribles des forces du Traître se préparent
à repartir à la conquête de Terrinoth.
On chuchote même que des armées de Réanimés patrouillent sans
répit au sommet des murailles et que les Revenants favoris de Waiqar
siégeraient à sa Table Noire, sombre parodie du Conseil des Barons
d’Archaut. Les tunnels qui s’enfoncent dans les falaises autour de l’ef-
frayante forteresse abritent des Wyrms des Tumulus, tandis que les
vastes souterrains cachent des spectres, des Banshees et des squelettes
réanimés, trop destructeurs pour qu’on les laisse en liberté, sauf si l’on
souhaite anéantir un champ de bataille.
Les histoires parlent également des trésors que l’on peut y trou-
ver : des objets et des armes magiques extrêmement rares et puissants
qui datent des Premières Ténèbres. De nombreux érudits de Havregris
soupçonnent que la forteresse recèle également un nombre incalculable
d’éclats runiques, puisque Waiqar avait partiellement tenu sa promesse
de s’emparer de tous les éclats. Certains se sont aventurés sur ces terres
pour d’autres raisons, en particulier pour tenter d’évaluer les forces des
morts-vivants, envoyés par des seigneurs Daqan soucieux. Presque aucun
des éclaireurs n’étant jamais revenu, leur inquiétude ne fait que croître.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
AMERCASTEL
Toutes les conquêtes de Waiqar ne se sont pas faites par la force ; au fil
des années, beaucoup lui ont volontairement juré fidélité en échange
de richesse et de pouvoir, peu importe le prix à payer pour leur âme.
L’un des plus tristement célèbres de ses fidèles était Naythen Torvic
d’Amercastel, qui trahit d’autres seigneurs, ses propres amis, lors d’une
terrible nuit. Torvic et ses vassaux se changèrent en d’horribles créa-
tures quand les brumes s’emparèrent de leurs terres : des créatures
vampiriques, aussi immortelles que leur nouveau maître.
Peut-être, comme ils le firent durant leur vie, les morts-vivants
d’Amercastel complotent-ils et œuvrent-ils pour gagner plus de puis-
sance et de plus grandes faveurs auprès de leur maître, ou pour attirer
les vivants et s’en servir comme des pions ? La plupart rivalisent pour
agrandir leurs armées et se préparer aux guerres à venir contre les autres
baronnies, ou s’efforcent de maîtriser des objets arcaniques cachés au fond
des nombreux châteaux et donjons qui constellent Amercastel. Beaucoup
s’accrochent aux réminiscences d’attitudes nobles et chevaleresques, répri-
mandant sévèrement les mauvaises manières alors qu’ils étranglent leurs
ennemis sans aucun scrupule. Certains survivants de rencontres avec la
royauté d’Amercastel affirment même que quelques-uns cherchent
à échapper à leur existence éternelle et attendent que des aven-
turiers conjurent cette malédiction et leur permettent de
reposer en paix. Ces histoires ne sont peut-être que
des pièges pour attirer les insensés, mais les récits
de villageois du Nord (et les pièces d’or à l’image
de ce qui semble être des Rois Penacor) leur
donnent un certain crédit.
Les brumes d’Amercastel cachent également d’autres êtres qui
servent leurs propres desseins. On trouve parmi eux Zarihell, une
Elfe des temps anciens qui fut relâchée, par erreur ou par ignorance,
lorsque Timmorran sauva Waiqar de sa prison dans la Citadelle Noire
de Llovar, à la fin des Premières Ténèbres. Elle parcourt les Terres des
Brumes à sa guise et semble capable de commander tant aux esprits
des vivants qu’à ceux des morts, avec une telle puissance qu’elle paraît
plus perplexe qu’effrayée face aux actes de Waiqar. Un autre de ces
êtres est ce personnage furtif et mystérieux, toujours vêtu d’une cape,
dont les origines restent inconnues, qui explore sans cesse les pro-
fondeurs des forteresses effondrées au pied des montagnes du Nord
à la recherche d’un objet dont on ignore la nature. On ne sait s’il le
cherche pour le donner à Waiqar ou pour le détruire, mais cet énig-
matique personnage parle avec un accent que l’on n’avait plus entendu
depuis les Guerres draconiques.
CHÂTEAU DALIBOR
Malgré l’effroi mêlé de respect que tout tyran inspire, il semble qu’il
y ait toujours un général, un conseiller, qui reste indifférent à l’at-
trait du pouvoir. Celui-ci ne sert pas son maître parce qu’il le sou-
haite, mais parce qu’il y a été contraint. C’est le cas de Kyndrithul, un
Vampire puissant qui dirige actuellement la Maison Dalibor. Bien que
le Château Dalibor soit un peu moins puissant que celui d’Amercastel,
sa soumission apparente ne reflète pas sa force. Kyndrithul est un
expérimentateur dans l’âme, un génie qui a passé des siècles à maîtri-
ser les différentes disciplines magiques nécessaires pour créer le parfait
serviteur Réanimé.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Son domaine est donc rempli de toutes sortes de créatures surnatu-
relles. Les forêts autour du château pullulent de meutes de Barghests
qui s’y promènent librement, tandis que les horreurs osseuses et les
créatures de chair réanimée errent sans réel but, mais constamment à
la recherche de proies. L’adage préféré de Kyndrithul, toujours prag-
matique, est que toute chose a son utilité. Un héros qui a la mal-
chance d’être fait prisonnier au Château Dalibor se retrouve bientôt
dans le laboratoire du Vampire, où il exulte généralement à l’idée de
trouver de nouvelles façons de modeler cette chair vivante grâce à la
nécromancie. Ses expériences les plus récentes sont peut-être les plus
audacieuses : il imprègne de la chair vivante avec de la poudre d’os de
la Légion des Revenants de Waiqar. Un tel crime est puni par un châ-
timent pire que la mort, si terrible que Kyndrithul lui-même tremble
à l’idée de se faire prendre.
Malgré l’immense risque encouru, Kyndrithul laisse gracieusement
Waiqar traverser ses terres et lui offre un endroit où établir ses campe-
ments pour lancer ses attaques sur Terrinoth. Les généraux Revenants
de Waiqar regardent le Vampire avec dégoût et suspicion, mais ce der-
nier sait que tant qu’il joue son rôle d’humble serviteur, il peut récolter
les fruits de son travail secret.
L'ENGRENAGE ÉTERNEL
L a plus odieuse des inventions destructrices de
Waiqar, l’Engrenage Éternel, est une machine au
fonctionnement immonde. Loin dans les profondeurs
des grottes volcaniques, sous les ruines de Kelipa, ses
engrenages d’os tournent sans cesse, et leur son résonne
à travers toutes les Terres des Brumes. Ce bruit méca-
nique est si fort que, les nuits tranquilles, on peut l’en-
tendre à des dizaines de lieues à la ronde, jusqu’à la
frontière de la Baronnie de Carthridge. Seuls Waiqar et
l’Archiliche Revik, qui supervise son fonctionnement,
connaissent la véritable utilité de cette machine : à
chaque tour d’engrenage, la barrière entre les mondes
des vivants et des morts s’affaiblit. Tous les morts-vi-
vants sentent leur pouvoir grandir, ne serait-ce qu’un
peu, et de nouvelles horreurs inimaginables se mani-
festent pour tourmenter le monde des vivants.
Waiqar se sert de ceux qui lui déplaisent pour alimenter sa
terrible machine ; les cris des sacrifiés se mêlent à chacun
de ses gincements jusqu’à ce que les victimes soient entiè-
rement absorbées. Aucun mortel ne sait ce qu’implique
exactement être consommé par l’Engrenage Éternel, mais
ce destin semble assez affreux pour semer la peur dans le
cœur de ceux qui servent l’Immortel.
162
LES COLLINES
BRUMEUSES
Les Collines Brumeuses ont été imprégnées par le mal depuis le temps
où le sadique Prince Penacor et ses partisans furent exécutés pour des
crimes d’une horreur indescriptible. Mais ce châtiment n’était pas une
fin pour eux, car l’immonde serment qu’ils avaient prêté la nuit avant
leur pendaison leur permit de se relever d’entre les morts.
Prenant le nom de Farrenghast, le prince s’installa dans un impo-
sant donjon abandonné dans les Collines Brumeuses avec ses compa-
gnons revenants. Bien que des esprits morts-vivants aient toujours erré
dans Mennara, c’était peut-être la première fois que de telles créatures
déchues se regroupaient en si grand nombre et créaient une telle puis-
sance maléfique. Au fil du temps, leur essence fétide s’est infiltrée dans
la terre elle-même et l’a rendue aussi infâme qu’eux. Ce maléfice a
peut-être attiré les Terres des Brumes, qui ont absorbé la région.
Malgré la nature horrible des Collines Brumeuses, certains les
parcourent à la recherche de reliques anciennes, et de connaissances
plus anciennes encore. Comme leurs habitants morts-vivants, les col-
lines ont peu changé depuis le temps où Farrenghast s’est emparé du
donjon et des terres voisines. Elles offrent de nombreuses opportunités
aux aventuriers courageux et intelligents.
Au cœur du donjon, des livres de nécromancie dotés d’un immense
pouvoir reposent sur des étagères de bois pourrissant ; leurs reliures en
cuir et leurs pages tachées de sang semblent comme neuves malgré les
siècles. Les armes et les butins rapportés des nombreuses campagnes
de Farrenghast se trouveraient à l’intérieur de plus petites forteresses
parmi les Collines. On y trouve des objets de tout Mennara, car les
ennemis de Farrenghast venaient parfois de très loin – avant que
leurs possessions ne soient volées sur leurs cadavres après leur ultime
défaite. Des rumeurs prétendent qu’on trouve même dans certains
caveaux discrets des Étoiles libres de Timmorran ; ces bruits enflam-
ment l’imagination de mages avides de pouvoir ou désireux d’étudier
ces raretés inestimables.
LE VAL DE ROTH
Sans véritables limites physiques, le Val de Roth constitue la frontière
nébuleuse entre le reste des baronnies et les Terres des Brumes. Bien
qu’il soit à bien des égards une terre maudite, il n’en a pas toujours été
ainsi. Avant la trahison de Waiqar, le Val de Roth était un territoire
florissant, protégé par de puissantes magies et de glorieux trésors de
l’âge d’or des Anciens Rois. Quand le dernier baron du Val de Roth
mourut sans héritier, cette terre fut entièrement désertée ; les querelles
pour décider qui en deviendrait le protecteur n’ont fait que s’intensi-
fier ces dernières années.
Le jeune Gaspard de la Baie, un héros avec un brillant avenir devant
lui, déjà anobli pour ses hauts faits au combat avec la garnison orien-
tale d’Hernfar, souhaite désespérément se voir confier la responsabilité
de ce territoire, non seulement par fierté, mais aussi pour honorer une
promesse faite à ses ancêtres. Le baron Zachareth de Carthridge, sei-
gneur compétent mais impétueux qui, dit-on, aurait succombé à l’at-
trait de pouvoirs maléfiques, convoite les centaines d’artefacts perdus
dans les temples et les châteaux abandonnés de ces terres. Ces objets
pourraient être utilisés pour vaincre les morts-vivants… ou pour les
relever et leur commander.
ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

Compétences : Athlétisme 2, Perception 3, Pugilat 2, Résistance 3,

Vigilance 2.
Talents : Vivacité (un Barghest n’effectue pas de manœuvres supplé-
mentaires pour se déplacer sur un terrain difficile).
Aptitudes : Mise en pièces (un Barghest ajoute 󲊸 󲊸 aux tests de
Pugilat contre des cibles à terre ou immobilisées), Terrifiant (au début
de la rencontre, tous ses adversaires doivent effectuer un test de peur
Difficile [󲊷
󲊷 󲊷 󲊷] au prix d’une broutille hors tour, selon les règles
de la page 243 du livre de base Genesys ; s’il y a plusieurs sources de
peur dans la rencontre, les adversaires effectuent un test de peur contre
l’ennemi le plus terrifiant), Mort-vivant (n’a pas besoin de respirer, de
manger ou de boire et peut survivre sous l’eau ; immunisé contre les
poisons et les toxines).
Équipement : Griffes et crocs (Pugilat ; Dégâts 6 ; Critique 3 ; Portée
[au contact] ; Renversement, Sanguinaire 1).

CHEVALIER DE LA MORT (NÉMÉSIS)

Supérieurs aux simples Réanimés, les Chevaliers de la Mort consti-
tuent la force de frappe de prédilection de Waiqar, l’expression la plus
pure de sa haine et de sa volonté de dominer toute vie. Créés à partir
de la poussière des soldats les plus infâmes et les plus fidèles de son
armée originelle, ces chevaliers possèdent une certaine autonomie qui
fait défaut aux morts-vivants inférieurs, et parviennent même dans
une certaine mesure à développer une personnalité.
Comme les troupes d’élite de Waiqar qui ont combattu à ses côtés
lors des Deuxièmes Ténèbres, les Chevaliers de la Mort portent une
armure lourde consacrée lors de rituels de sang impies. Leurs lames
sont de puissantes reliques datant de la trahison de Waiqar, des arte-
facts dont le pouvoir n’a fait que croître après des siècles de guerre.
Chevauchant des montures vampiriques qui se régalent de la chair
des vivants, les Chevaliers de la Mort peuvent jaillir des brumes avant
même que leurs ennemis ne soupçonnent leur présence.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

SECRETS
D'OUTRE-TOMBE
De toutes les myriades de façons dont les énergies magiques sont
utilisées depuis des millénaires, aucune n’est aussi terrifiante et
contre nature que la nécromancie. Alors que toute magie est intrin- LES PJ ET LA NÉCROMANCIE
sèquement fascinante, le pouvoir de contrôler la mort terrifie la
plupart des êtres. Voir des hordes de morts se relever et avancer
d’un pas chaotique mais implacable suffit généralement à perturber
même le plus chevronné des aventuriers.
M algré son horrible nature, certains PJ souhaiteront
apprendre et même utiliser la magie de la mort.
Cependant, vous remarquerez qu’il n’existe pas formelle-
ment de talent ou de type de sort « nécromancie » ; cette
De telles horreurs font partie de l’histoire depuis des siècles. Même
magie est utilisée grâce au talent Sombre clairvoyance
avant les Deuxièmes Ténèbres, lors desquelles une baronnie entière fut
et à une utilisation créative des sorts d’Arcanes et de la
corrompue et chercha à répandre le fléau des morts-vivants à travers
compétence Connaissance (Interdit). Le MJ et les joueurs
Mennara, des cadavres sortaient déjà de leurs tombes et des revenants
doivent déterminer quels usages des talents, compétences
erraient dans les régions sauvages. Chaque année, on constate que de
et sorts existants constituent une pratique des arts nécro-
nouveaux cultes d’adorateurs de la mort se développent secrètement à
mantiques dans leur campagne.
Terrinoth, où ils sèment leurs graines insidieuses loin dans la société.
La nécromancie, pratiquée tant par les vivants que les morts, se répand De nombreux mages et érudits pourraient être tentés
comme un linceul sur le monde et, si elle n’est pas contrôlée, elle d’étudier cette pratique interdite pour mieux comprendre
aboutira sûrement à la fin de toute vie. le fonctionnement de leurs ennemis et mieux contrer leurs
actions nécromantiques, par exemple. Il existe beaucoup
LA NÉCROMANCIE À MENNARA de reliques et de grimoires corrompus dans les Terres
des Brumes grâce auxquels ces personnages pourront en
Il semblerait que les morts-vivants aient toujours existé à Mennara.
apprendre plus sur la magie de la mort. Les PJ peuvent
Les contes sur les êtres irréels, comme les apparitions spectrales
également découvrir des parchemins perdus dans les bou-
et les fantômes, sont parmi les plus anciens dans de nombreuses
tiques de Tamalir ou des reliques effrayantes enfouies dans
cultures. Les Vampires et les Barghests existent depuis des siècles,
les sables d’Al-Kalim, qui les entraîneront peut-être sur le
bien qu’en petit nombre, mais peu osent parler, même dans un
chemin tracé par Waiqar.
état d’ébriété avancé, d’êtres comme le seigneur Farrenghast ou les
seigneurs d’Amercastel. Toutefois, il fallut attendre la venue d’un Cependant, les PJ qui plongent trop profondément dans
puissant général et d’un grand meneur pour véritablement faire des les arts nécromantiques en subiront les conséquences.
arts nécromantiques une force puissante, susceptible de menacer Pour commencer, ce genre d’étude est tout à fait interdit
tout Mennara. dans la majeure partie de Mennara. Même à Havregris, les
ouvrages traitant de la magie de la mort sont soigneuse-
Quand Waiqar Sumarion rugit de fureur et de haine contre tout
ment surveillés ; seuls les plus fiables et les plus respectés
ce qui existe en ce monde et jura de ne jamais se reposer tant que
des mages sont autorisés à les consulter. Que le bruit vienne
sa quête ne serait pas achevée, quelque chose répondit à son appel,
à courir qu’un personnage s’intéresse d’un peu trop près à
et la véritable nécromancie se déchaîna sur le monde. Ses armées
ces sujets ou qu’il soit pris en flagrant délit de pratique de la
et lui ne moururent que pour mieux renaître. Waiqar découvrit
nécromancie, et les gardes de la ville, ou des paysans armés
ensuite le moyen de générer de nouveaux morts-vivants, comme les
de torches, ne devraient pas tarder à apparaître !
Réanimés créés à partir des Revenants déchus. Depuis des siècles, ses
disciples répandent son évangile de mort et de réanimation à travers Étudier (et pire, pratiquer) la magie de la mort affecte
Mennara. Ils créent de nouveaux sorts et pratiquent de nouveaux également l’âme. À chaque page d’antique parchemin
rituels, mais aucun ne peut espérer égaler l’Immortel en puissance mémorisée, à chaque sort funeste utilisé, à chaque créa-
et en compétence. Certains découvrent d’anciennes reliques, mais ture morte-vivante soumise, l’esprit se flétrit un peu plus
aucun, aussi puissant soit-il, ne peut espérer les recréer ni même et le mage devient plus cruel. Ces altérations sont prin-
les comprendre. cipalement internes, et n’ont que peu ou pas d’effet sur
l’apparence, elles offrent donc de belles opportunités
LES MYSTÈRES d’interprétation pour un personnage. Le joueur et le MJ
devront discuter de ces changements pour les intégrer au
DES ARTS OCCULTES développement du personnage, et éventuellement en faire
La nécromancie est un art relativement méconnu, malgré les innom- une intrigue secondaire dans la campagne en cours, lors de
brables siècles que ses praticiens ont passé à l’étudier. Quelques éru- laquelle les autres personnages réaliseront que leur compa-
dits qui étudient cet art croient qu’il est de nature aracanique et qu’il gnon cède lentement à l’attrait des ténèbres.
tire son énergie de la Rotation, ou Verto Magica. Bien que la plupart
des mages considèrent la nécromancie comme une forme de magie
inférieure, elle reste assez puissante. De nombreux spécialistes des arts
magiques croient fermement qu’il est trop dangereux de l’étudier et
travaillent activement à proscrire ce genre d’activités. Malgré cela, il
existe toujours quelques assoiffés de connaissance et de pouvoir qui
font progresser la pratique de cet art funeste.

168
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

De manière générale, les arts occultes se présentent sous trois formes
principales : relever les morts en utilisant les restes de morts-vivants
ayant déjà été relevés auparavant, drainer la vie d’êtres vivants pour
alimenter d’autres êtres (le plus souvent, le nécromancien lui-même),
et travailler la chair pour lui donner une nouvelle forme.
LA NÉCROMANCIE
DANS LE JEU
Alors que la plupart de ceux qui prétendent s’y connaître croient
que les nécromanciens se contentent de relever les morts, la vérité est
encore plus perturbante. Waiqar a découvert que les restes d’un sque-
lette de l’une de ses créations déchues, une fois correctement désacra-
lisés par des rituels profanes de sa conception, pouvaient être utilisés
pour animer d’autres cadavres. Seule une petite quantité de poudre
d’os est nécessaire ; un seul Légionnaire Revenant peut être utilisé
pour relever des milliers de simples Réanimés. Ses armées ne firent
alors que grandir, même lorsque l’un de ses combattants était vaincu,
même alors qu’aucun de ses nouveaux soldats n’était aussi puissant
que ses lieutenants d’origine. Ses disciples sont donc chargés de la
tâche essentielle de recueillir les restes des revenants afin que Waiqar
puisse façonner d’autres morts-vivants.
Même sans leurs sbires morts-vivants, les nécromanciens restent puis-
sants. Ils peuvent utiliser leur magie occulte pour accélérer la nécrose

L
et la pourriture, faire s’infecter les plaies et éclater les pustules de leurs
orsque la magie nécromantique intervient dans
ennemis. Plus leurs adversaires déclinent doucement, plus ces mages
une aventure qui se déroule à Mennara, elle doit en
immondes se gorgent de vie et d’énergie. Ceux qui travaillent la chair
constituer un élément capital ; elle sera souvent la pierre
jouent également avec les tissus morts, mais de bien plus horrible façon.
angulaire d’un scénario où les PJ lutteront contre un
Aussi connus sous le nom de Sculpteurs de Chair, ils peuvent modifier
nécromancien qui relève des armées de morts, ou encore
les tissus bruts pour leur donner de nouvelles formes torturées grâce à
où ils contrecarreront une invasion venue des Terres des
leurs arts impies. Les membres supplémentaires, les yeux insectoïdes et
Brumes. Le MJ s’efforcera donc de rendre toute apparition
les doigts trop longs aux ongles venimeux ne sont que quelques-unes
de la magie de la mort particulièrement mémorable.
des transformations qu’ils peuvent façonner – certaines sont encore plus
Les rites nécromantiques peuvent par exemple déclencher effrayantes. Il arrive que des nécromanciens utilisent leurs pouvoirs sur
des tests de peur pour en représenter l’horrible nature. eux-mêmes, s’affublant d’altérations bizarres, mais toujours mortelle-
Les PJ peuvent voir des alliés trépassés transformés en ment dangereuses, pour mieux servir l’Immortel.
nouveaux Réanimés, ou un Dragon mort émerger d’un
donjon effondré. Pire encore, l’un des leurs, autrefois un
vaillant héros qui a donné sa vie pour une noble cause,
peut devenir la marionnette de leur plus grande Némésis.
De tels éléments de scénario sont l’occasion idéale d’instal-
ler une ambiance d’horreur (voir page 242 du livre de base
Genesys), afin que les PJ mesurent pleinement la nature
de cette magie.
Cependant, pour les personnages, l’aspect le plus trou-
blant de la nécromancie sera probablement le fait que ceux
qui l’utilisent parviennent facilement à cacher leur vraie
nature. N’importe qui, du noble respecté à l’érudit tombé
en disgrâce en passant par le guérisseur à deux sous des
bas quartiers, peut secrètement être un nécromancien. La
révélation du véritable méchant de l’histoire dans une telle
aventure peut donc être un moment clef, et doit idéale-
ment prendre les PJ par surprise (sauf s’ils ont déjà décou-
vert ces secrets grâce à un brillant travail d’enquête, ce qui
est encore mieux !).
Cela signifie également que la magie de la mort peut
apparaître partout à Mennara, pas seulement dans les
Terres des Brumes. Chaque région peut même présenter
des spécificités dans la façon dont elle est utilisée, selon la
culture locale, ce qui déstabilisera peut-être les PJ lors de
leur enquête. Les morts peuvent toujours se relever pour
menacer la civilisation peu importe où les PJ se trouvent,
et pourront donc constituer un grand défi qui les occupera
pendant une bonne partie de n’importe quelle aventure.

169
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi

e pensais connaître le malheur. Dans mon Si seulement je pouvais les faire parler.
plus jeune âge, avant de gagner ma place à la
Cour de la Sagesse, je fus souvent contraint Comme je l’ai déjà dit, le premier jour n’a pas été de bon
de dormir dans les rues de la cité du Grand augure. Après avoir quitté ma chambre dans une auberge voisine
Calife. Je dormais sous les palmiers, je me réfugiais dans des où j’avais laissé la plupart de mes effets, je m’approchai des
caves pendant les féroces tempêtes de sable. Une fois, je me ombres vertes de la forêt avec une grande appréhension. Même
suis même blotti contre le mur d’un vieux puits pendant un après avoir contemplé la vue panoramique de ma chambre à la
terrible orage dont les éclairs tombaient juste à côté de moi. Porte verte, il était impossible de comprendre la véritable majesté
et la présence imposante de ce colossal mur d’arbres. Alors que
Aucune de ces expériences ne m’avait préparé au cauchemar vert chaque pas me plongeait plus profondément dans cette obscurité
et glaçant qu’est l’Aymhelin. émeraude, les troncs titanesques se dressant toujours plus haut
autour de moi, j’en vins à apprécier pleinement l’insignifiance de
Ma première incursion dans la forêt ne fut guère de bon mon existence face à la majesté de ces géants millénaires.
augure, et suffit presque à me convaincre de renoncer à ma
quête. En vérité, mes futurs descendants, je me suis retrouvé Au départ, le chemin était large et dégagé. Sur plus d’une
à réfléchir une fois encore à la possibilité de revenir bredouille centaine de pas, deux chariots chargés auraient pu se croiser,
devant le Calife, comme déjà à plusieurs reprises au cours de et il serait encore resté beaucoup de place pour passer. Mais
ces derniers jours interminables. ce chemin débouchait ensuite sur une grande clairière vide,
abîmée par des années d’activité. J’avais la nette impression
Si je revenais avec la pierre, si je la rendais au Calife moi- que les chariots du monde extérieur étaient conduits ici, puis
même, comment alors un homme si grand et si sage déchargés, et que leur contenu était ensuite envoyé au plus
pourrait-il jamais croire que je l’avais volée en premier lieu ? profond de la forêt par d’autres moyens.
Quel homme sensé reviendrait à la Cour de la Sagesse après
avoir dérobé un tel objet ? Plusieurs sentiers partaient de cette clairière, beaucoup plus étroits
et étouffants. Alors que je regardais en arrière pour observer le
Mais de telles réflexions ne me traversent désormais plus chemin d’où j’étais venu, je trouvai qu’il ressemblait à un tunnel,
l’esprit. Pourquoi un homme sensé reviendrait-il dans des autour duquel s’amassaient de profondes ombres inquiétantes.
circonstances telles que celles où je me trouve ? Quelle punition Au loin, on pouvait voir les chauds rayons de soleil du Sud
le Calife pourrait-il lui infliger afin de dissuader quiconque de tomber sur l’herbe. Mais aucune chaleur, aucune lumière ne
voler dans ses coffres à l’avenir ? m’atteignait ici, enfermé au creux de cette forêt de mastodontes.
Même ici, blotti à la lisière de cette obscure et inquiétante Aucun des chemins qui partaient de la clairière ne portait
forêt, si loin de ma contrée sèche et poussiéreuse, je frémis en d’indication qui m’aurait permis d’en choisir un. Essayant
envisageant ces éventualités. de garder mes repères, je pris celui qui me semblait
J’en reviens donc à cette pensée familière : retourner sur plonger le plus profondément dans les
ma terre natale me sera impossible tant que je n’aurai ténèbres. Je serrai étroitement ma
pas compris les mystères entourant ce joyau. cape neuve autour de mes épaules, et
continuai à marcher, la tête inclinée et
Et les Elfes Latari de les yeux fouillant les ombres alentour sous
l’Aymhelin savent quelque mes sourcils froncés.
chose. Je crois qu’ils connaissent
au moins la prochaine étape Partout, des fougères épaisses débordaient
de mon chemin. sur le sentier. Leurs feuilles étaient
chargées de rosée, et je fus bientôt
Je suis tombé sur plusieurs petits sanctuaires
trempé à force de repousser leurs feuilles
comme celui-ci à cœur de la grande forêt, délicates pour me dégager un passage.
toujours dans des zones de grande tranquillité et
de paix. Je ne sais pas s’ils sont placés là pour
célébrer l’atmosphère de l’endroit, ou s’ils la créent.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
Le sentier devant moi disparaissait régulièrement sous la végétation
opulente ; mes pieds traînaient, noyés dans la verdure, invisibles à
mes yeux.
Je ne pourrais vous dire combien de temps dura ce misérable
voyage. J’eus l’estomac retourné tout du long, mais jamais
à cause de la faim. Je ne vis personne, ni Elfes ni autres
créatures, pendant ce qui me sembla des heures. La peur
qui grandissait dans ma poitrine n’avait rien à voir avec la
terreur qui avait accompagné mes pas depuis Havregris. Cette
sensation d’oppression, de danger imminent, était beaucoup
plus palpable, renforcée par le poids de la forêt ancienne que
je sentais sur mes épaules, les frondaisons cachant le soleil. Je
sentis que, pour la première fois de ma vie peut-être, j’allais
comprendre la véritable signification du mot « peur ».
Et quand je vis enfin mon premier Elfe de l’Aymhelin,
l’expérience ne fut pas plaisante, loin de là.
Je m’étais arrêté pour boire à mon outre sans baisser ma
garde, observant attentivement la forêt autour de moi, et
j’aurais juré, mes futurs enfants, que j’étais parfaitement seul.
Quand l’ Elfe sortit des ombres vertes au niveau de mon coude, je
fus tellement surpris que j’en laissai tomber mon outre, perdant
plusieurs précieuses gorgées d’eau qui coulèrent sur la terre déjà
humide avant que je ne puisse la récupérer et la refermer.
L’ Elfe était un individu typique de son espèce, ai-je appris
depuis – grand, mince, élégant et bien proportionné. Ses
vêtements aux nuances de vert et de brun vertigineuses se
confondaient, de façon presque magique et terriblement efficace,
avec la forêt derrière lui.
Alors que je l’observais, espérant qu’il parlerait le premier,
plusieurs autres semblèrent apparaître miraculeusement derrière
lui, me fixant de leurs regards vides et énigmatiques.
Le silence entre nous s’étira, ponctué plutôt que brisé par la
kyrielle de sons de la forêt pleine de vie tout autour.
« Bonjour ? » Comme première tentative de conversation
avec un être d’une nouvelle et étrange culture, j’aurais pu faire
mieux avec un peu plus de préparation.
Toutefois, la réponse de l’ Elfe ne fut pas plus élaborée.
171
« Partez. »
Il parlait la langue commune de Terrinoth avec un accent qui
aurait rendu une réponse plus complexe difficile à comprendre.
Cet unique mot, cependant, était assez clair.
« Très bien. » J’a ime à penser que j’aurais été plus
loquace si j’avais pu m’exprimer dans ma langue maternelle,
mais vu les circonstances, avec ces silhouettes effrayantes qui
me regardaient comme si je n’étais rien de plus qu’une petite
nuisance dont on se débarrasse facilement d’une seule flèche, je
n’en suis absolument pas convaincu.
Mais peu importe ce que j’avais dit, je ne bougeai point. Fut-
ce par courage, par peur ou en raison d’un vulgaire accès de
stupidité combiné à mon inconscience du danger ? Je pense ne
jamais avoir de réponse à cette question.
Néanmoins, cela sembla surprendre les Elfes autant que moi,
ce qui, jugeai-je, me permettait d’essayer de formuler une
réponse plus éloquente.
« J’a imerais vraiment parler à quelqu’un avant de partir. »
Et une fois que j’eus commencé, comme cela m’est souvent
arrivé dans des situations tendues, il me devint très difficile
de m’arrêter de parler. « J’a i parcouru un long chemin, un
très long chemin, pour arriver jusqu’ici. Vous ne me croiriez
pas si je vous disais tout le chemin que j’a i fait. Et je voulais
seulement poser quelques questions à quelqu’un. Je fais des
recherches sur des pierres. Des pierres magiques. En fait,
peut-être pas magiques ; je ne sais pas trop. C’est pourquoi
j’a imerais parler à quelqu’un. Je suis juste curieux, voyez-vous.
Je n’a i aucun intérêt direct pour ce genre de pierres, en soi. Je
ne suis qu’un érudit qui voyage, à la recherche d’informations.
À propos des pierres magiques. Ou des pierres non magiques,
vous savez, selon ce qu’elles sont en réalité. »
Finalement, plus par manque de souffle qu’autre chose, ma
voix s’éteignit.
Le premier Elfe à être apparu pencha la tête de côté,
un pli très fin se forma entre ses yeux d’un vert vif. Outre
cela, cependant, je ne discernai aucun signe m’indiquant qu’ils
m’avaient ne serait-ce qu’entendu.
Il me vint soudainement à l’esprit que j’avais terriblement
manqué de bonnes manières.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
« Je suis désolé, laissez-moi me présenter. Je suis Tarik
Al-Farabi, de la cour du Calife d’A l-Kalim. Je vous en prie,
tout ce que je souhaite…
– Partez immédiatement. » Les mots me semblèrent plus
durs cette fois-ci, mais peut-être cela était-ce dû à ma
nervosité croissante.
Sentant qu’une fois de plus des murs s’élevaient devant moi, me
séparant de l’objet de ma quête, le désespoir m’envahit à nouveau.
« S’il vous plaît, si je pouvais simplement parler à
quelqu’un… n’importe qui… »
Il n’y eut aucun mouvement, mais soudain, je fixai les pointes
scintillantes de trois flèches visant le milieu de mon front.
Seul le premier Elfe n’était toujours pas armé, ses mains
vides négligemment ballantes.
« Partez ou mourez. » Les mots avaient été prononcés
lentement, d’un ton neutre et d’une voix claire. Le poids du
choix qu’ils m’o ffraient démentait leur ton.
Je constatai que mes mains s’étaient levées au-dessus de ma tête,
et je les forçai à redescendre. Je regardai cet étranger droit dans ses
yeux froids, et fus soudain submergé par une étrange certitude.
Les Elfes savaient pourquoi j’étais là, et c’était cela, plus que
n’importe quelle paranoïa xénophobe ou un quelconque instinct
sylvestre surprotecteur, qui avait suscité cet accueil glacial.
« Je ne partirai pas tant que je n’aurai pas obtenu de
réponses ! »
Du moins, c’est ce que je voulus dire. Malheureusement, alors
que je commençais à parler, une flèche passa tout près de
mon oreille dans un sifflement diabolique et se ficha dans un
arbre derrière moi, m’arrachant quelques cheveux au passage.
Mes mots se changèrent en une sorte de gargouillis étranglé
alors que je vacillais, ébranlé par ce contact éphémère.
« C’était votre dernier avertissement. Il n’y a rien pour vous
ici, Tarik Al-Farabi. » Le premier Elfe bougea alors, levant
sa main pour me montrer le chemin par lequel j’étais venu.
« Vous allez partir maintenant, sans émettre un autre son,
ou vous ne partirez jamais. »
‰‰‰‰‰
172
Le voyage de retour à Chant-d’ Été me sembla prendre encore plus
de temps que ma randonnée matinale, mais quand je retrouvai
la chaleur du soleil, il restait encore plusieurs heures avant le
crépuscule ; je suppose donc que mon trajet aller vers l’Aymhelin
n’avait pas pris pas autant de temps que je ne le croyais.
J’entrai à la Porte verte, ignorant les regards curieux des autres
clients, et me dirigeai rapidement vers ma chambre avec sa
vue magnifique sur la terrible forêt. Mon humeur, mélange
perturbant de peur et de colère, était si sombre que je m’assis
sur mon lit, dos à la large fenêtre, et boudai pendant plusieurs
minutes avec la ferme intention de rester là jusqu’au lendemain
matin. J’étais bien décidé à laisser l’obsédante obscurité verte et
les yeux froids de ses habitants loin derrière moi.
Mais en fin de compte, ma détermination fut surpassée par ma
faim. Je n’avais rien mangé depuis que je m’étais restauré sur la
route, et, avec la soudaineté d’un éclair dans le désert, le souvenir
des odeurs savoureuses qui flottaient dans la salle commune quand
je l’avais traversée un peu plus tôt me revint de plein fouet.
J’avais également vu plusieurs gobelets et de nombreuses chopes,
aussi étais-je certain que je pourrais agrémenter mon repas
d’hydromel, si j’osais seulement descendre et demander.
Les gens de la salle commune levèrent les yeux quand je
revins, et, à en juger par leurs réactions, le sourire que
j’avais plaqué sur ma figure pour cacher mon air renfrogné
n’était qu’imparfait. Toutefois, plusieurs personnes me firent
un signe de tête avant de s’intéresser de nouveau à leurs
affaires. Bientôt, je pus attirer l’attention de l’aubergiste pour
commander un délicieux ragoût et m’installer à une grande
table dans un angle pour observer la pièce autour de moi.
Le repas me fut servi presque immédiatement, avec un gobelet
d’hydromel frais, particulièrement sucré ; je hochai la tête
en guise de remerciement. Il y avait de la viande dans le
ragoût, j’en étais à peu près certain, mais elle disparaissait
sous une profusion de légumes que j’avais beaucoup de mal
à reconnaître. Tous les produits étaient frais et les saveurs
de l’assaisonnement léger explosaient en bouche avec un léger
arôme rappelant la forêt qui me fit frissonner.
Je n’avais pas tout à fait terminé mon repas quand un grand
homme blond, assis à une table voisine, se pencha vers moi
avec un sourire pas tout à fait amical.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
« Ce n’est pas si facile de leur parler, hein ? »
La voix de l’homme était basse et râpeuse ; il hocha la
tête comme s’il partageait un truisme malheureux avec un
compagnon de route.
Je haussai les épaules, m’essuyant poliment la bouche avec
ma serviette, une autre petite marque de courtoisie souvent
négligée ici, dans le Nord. « Je vous demande pardon ? »
L’homme inclina la tête vers l’ouest, là où la forêt se dressait
dans la lointaine obscurité. « Les Elfes. Ils ne facilitent pas la
tâche aux gens comme nous. »
Mes yeux se plissèrent. J’avais développé une sensibilité
particulière à des expressions telles que « des gens comme
nous », car j’étais rarement inclus dans le groupe ainsi défini.
Mais ici, cet étranger semblait nous assimiler tous les deux à
une sorte de groupe, par opposition aux Elfes, et malgré les
événements de la journée et ma frustration du moment, il me
sembla que quelque chose clochait là-dedans.
Pour des raisons que je serais bien incapable de vous expliquer, mes
chers futurs enfants, je ressentis le besoin de défendre les Elfes.
« Les gens comme qui ? Les Elfes ne sont ni plus faciles ni
plus difficiles à aborder que d’autres individus que j’a i rencontrés
par le passé. »
Pour une raison quelconque, l’homme trouva ma remarque
amusante et retourna à sa table. « Ouais, vous avez raison
sur ce point, je suppose. » Il avala une grande gorgée de
bière. « Des gens comme nous, je veux dire des Humains.
À moins de posséder quelque chose qui intéresse la Cour, ou
d’être convoqué par leurs plus hauts dignitaires, personne ne
va bien loin dans l’Aymhelin. Et on revient toujours avec le
regard que vous avez ce soir, l’ami. »
Cela attira mon attention : « La Cour ? Quelle cour ? »
J’avais honte d’admettre que j’en avais peu appris sur le
fonctionnement de la société des Latari et sur l’Aymhelin, malgré
ma folle bravoure du jour. Peut-être aurait-il été un peu plus
judicieux de me renseigner auprès des gens les plus ouverts de
Chant-d’ Été avant de me lancer sur les chemins de leur forêt.
« Voyons ! » Il se tourna à nouveau vers moi, souriant
toujours de façon insupportable. « La Cour. En vérité, on raconte
173
que les Elfes ont plusieurs Cours, en fonction de la région, peut-
être, ou de leur lignée, ou peut-être du type d’arbre dans lequel
ils vivent. Qui sait ? Chaque tribu est plus ou moins autonome,
je crois, mais tous les dirigeants se rencontrent, au centre de la
forêt, pour discuter des questions vraiment importantes. Le C
majuscule vous écorche les oreilles quand ils prononcent ce mot. La
Cour. Celle qui fait la pluie et le beau temps, qui régit toutesles
interactions entre le monde extérieur et les Elfes Latari. »
Alors, était-ce la Cour qui m’avait fait renvoyer aujourd’hui ?
Ou était-ce un groupe local sans importance qui m’avait trouvé
en train d’errer ? Me restait-il un espoir, si je tentais une
approche différente ou si j’empruntais un autre chemin depuis la
clairière principale ?
« Non. » Son sourire avait disparu maintenant, et le grand
homme me fixait maintenant de ses yeux froids.
« Non quoi ? » Ma maîtrise de la langue du Nord était
presque parfaite, mais les dialectes et les expressions de
certaines localités pouvaient me poser des difficultés quand
mon esprit était ailleurs.
« Non, ne vous imaginez pas que ce qui vous est arrivé là-
bas aujourd’hui pourrait avoir une issue différente demain. »
Ses yeux s’assombrirent. « Vous avez eu de la chance de vous
en sortir, étranger. La nuit du solstice d’été, quand ils sont
plus conciliants que d’ordinaire avec les Humains, seuls les
marchands et les négociants vont et viennent à leur guise. Tous
les autres ressortent comme vous, avec des yeux de merlan frit.
Ou ils n’en ressortent pas du tout. »
Il se détourna à nouveau, et je décidai de ne pas le relancer
cette fois. Je ne savais pas trop si les propos
de cet homme et sa compréhension de la
situation de l’Aymhelin étaient fondés ou s’ils
relevaient d’une forme d’intolérance, mais
de toute façon, cela ne m’aidait en rien.
D’une manière ou d’une autre, je devais
trouver quelqu’un parmi les Latari qui
acceptât de me parler, ou mon
périple à travers cette terre
de malheur n ’aurait été
d’aucune utilité.
Une créature mystérieuse et
majestueuse que j’a i pu observer à la
lisière de la grande forêt. Personne n’a
été capable de l’identifier.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

L'AYMHELIN
D epuis le sommet des montagnes occidentales des Darnati, il
serait aisé de prendre l’Aymhelin pour une région boisée peu LITHELIN
développée et assez sous-peuplée. Bien que de petits groupes de tours
blanches s’élèvent vers le ciel au milieu des bois millénaires, si la même ET L'AILATAR
végétation sauvage envahissait un territoire humain, on supposerait à
Le cœur de l’empire elfique est Lithelin, une cité étincelante dont les
juste titre que ses habitants ne sont ni assez nombreux, ni assez pros-
tours blanches s’élèvent fièrement au cœur d’une vaste et ancienne
pères pour défricher la terre afin de gagner du terrain.
forêt. La Plaine des Étoiles, l’Ailatar, marque le lieu où les Elfes sont
Dans le cas des Elfes, cependant, c’est tout l’opposé. arrivés à Mennara, une clairière d’où ceux qui le désirent peuvent voir
Latariana et les autres étoiles scintiller dans le ciel nocturne. Le palais
Chaque flèche étincelante, chaque chemin aux pierres scintillantes,
et les quartiers les plus anciens de la cité sont isolés des étendues de
chaque épais bosquet d’arbres majestueux, chaque acre de prairie
forêt verdoyante et opulente qui entourent Lithelin, mais les quartiers
magnifiquement entretenue, chaque étang et lac cristallins ont été
extérieurs se sont développés dans la forêt en une fusion gracieuse
soigneusement créés pour que nature et civilisation soient en parfaite
d’architecture elfique et de beauté naturelle.
harmonie. Cela permet aux Elfes qui habitent dans les cités de com-
munier avec la nature, à ceux qui vivent dans les territoires forestiers Au centre de Lithelin se dresse Caelcira, ou « Première Porte », le
de profiter facilement de la myriade d’avantages de la civilisation cœur politique et spirituel de l’Aymhelin, qui veille sur la cité depuis
moderne, et à la nation entière de se rallier quand surgit la menace plus de quatre millénaires, et qui se dressa fièrement contre les assauts
d’envahisseurs étrangers ou surnaturels. du Seigneur Dragon Baalesh et de son ardente progéniture.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
On dit que Caelcira est construit sur la pierre fondatrice du
monde et qu’il ne succombera jamais au mal, à moins que tout
Mennara n’ait chuté avant lui. C’est là qu’est soigneusement gardée
la Larme de la tribu Latari, ainsi que celles des nations perdues, de
peur qu’elles ne tombent entre de mauvaises mains. Bien que les
Larmes portent officiellement le nom de Latariana, un adage parmi
les Eolam affirme que ses larmes tombent de nouveau aujourd’hui
à cause de la corruption et des innombrables intrigues, complots et
jalousies qui gangrènent la Cour.
Cela ne veut pas dire que toute la politique des hautes sphères de
la Cour n’est que ruses et trahisons. À la tête de la Cour siège le roi
Aenoeth, un Elfe qui a la réputation d’être un dirigeant juste et bien-
veillant depuis des siècles. Il est secondé par son épouse et conseillère,
Maegan Cyndewin. Bien que celle-ci se soit battue vaillamment et
ait été blessée à plusieurs reprises en défendant sa terre et son peuple,
beaucoup d’Elfes à la Cour s’en méfient toujours et conspirent contre
elle chaque fois qu’ils le peuvent. Cette triste haine est en partie due
aux agissements passés de son père, membre de la tribu Daewyl qui
s’allia aux démons dans sa quête éperdue pour s’emparer des Larmes
de Latariana, ainsi qu’au passé de sa mère, de la tribu Loth Caara,
qui servait Llovar lorsqu’il corrompit son peuple. Les ascendances de
Cyndewin entacheront éternellement son honneur, malgré son rôle
déterminant dans la défense de Caelcira. Elle est constamment suspec-
tée de trahison, car beaucoup craignent qu’elle ne cède à la tentation
du pouvoir qui séduisit les tribus de ses parents et qu’elle n’œuvre à
une nouvelle chute des Latari.
Entre le palais et les murs d’enceinte de la cité s’étendent des terres
verdoyantes constellées d’étangs purs et cristallins, de blé sauvage et
d’arbres fruitiers qui furent transplantés avec une grande délicatesse
de la forêt voisine. Bien qu’à l’origine ils aient été créés pour héber-
ger les Protecteurs de la Forêt, qui apportent leur aide pour défendre
Caelcira, ces vallons sont devenus des centres spirituels pour Lithelin.
Ils abritent maintenant un nombre vertigineux de sanctuaires, de jar-
dins de prière, de temples dédiés au Chemin des Étoiles entretenus par
la Grande Prêtresse Ancela, ainsi que des sanctuaires pour les Tisseurs
de Sylves et les Tisseurs de Rêves. Au-delà de ces jardins, dans d’im-
posantes tours surmontées de flèches, résident les puissantes Sorcières
des Tempêtes.
Cachées loin derrière ces étendues verdoyantes, invisibles de tous
les voyageurs qui pourraient s’aventurer autour du palais, se dressent
les maisons dépareillées et délabrées des Verdelam, un spectacle inha-
bituel dans cette contrée. Nés de sang inférieur et souvent éloignés
des premiers Latari par des dizaines d’ignobles générations, ces Elfes
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
tentent désespérément de se montrer dignes d’une ascension sociale.
Chaque matin, ces âmes entreprenantes font route vers le donjon et
les temples voisins pour effectuer les tâches triviales et subalternes
qui permettent à un royaume de fonctionner sans heurts. Ceci leur
permet de gagner lentement, à un rythme qui mortifierait n’importe
quel être d’une autre espèce de Mennara, le respect et le prestige
nécessaires pour accéder à des postes plus importants au sein de la
société elfique.
Ceux qui échouent à s’élever mais ne veulent pas, ou ne peuvent
pas, revenir à leur ancienne vie choisissent généralement l’une des
deux voies suivantes : embrasser la vie d’aventurier pour chercher
gloire et fortune dans les terres au-delà de Lithelin, ou rejoindre les
rangs de l’armée Latari. Bien que le sang noble soit évidemment
requis pour devenir officier et occuper un poste de commandement,
le Capitaine Ilendar accepte dans ses rangs tous ceux qui répondent
aux exigences physiques pour devenir soldat.
BOISANGLANT
Autrefois une plaine stérile et désolée, la terre où Boisanglant se dresse
aujourd’hui fut le théâtre d’une horrible bataille où les armées elfiques
rencontrèrent et repoussèrent, bien que terriblement dépassées en
nombre, plus de dix mille envahisseurs barbares. Quand les Elfes
revinrent pour en retirer les légions de corps des guerriers en décom-
position, ils découvrirent que de mystérieux jeunes arbres, rouges
comme le sang, avaient poussé parmi les morts.
L’abominable histoire de Boisanglant est devenue une source de
fierté pour tous les chasseurs, bûcherons, fabricants d’arcs, éclai-
reurs et ermites qui y ont élu domicile. Dense et fourmillante de
vie, s’étendant en tous sens, Boisanglant est un endroit idéal pour
apprendre à pister et combattre en forêt, à fabriquer des flèches à
partir du bois d’un jeune arbre, et pour découvrir les techniques de
chasse au cerf et au sanglier qui contribuent à nourrir tous les Elfes
de l’Aymhelin.
Ces bois mystiques abritent également une communauté d’Elfes qui
vivent dans la bourgade cachée de Methras. Le cœur de Methras est
un ensemble éclectique d’habitations construites haut dans les arbres
et reliées par des ponts suspendus et des plates-formes partagées. Au
centre de cette étendue interconnectée se trouve Ledish Schall, le siège
ancestral de Dareine, le champion d’Etharyon, le magistrat qui gou-
verne tous les Elfes qui choisissent de poser un pied dans Boisanglant.
Depuis son trône, Dareine donne des conseils, résout les conflits,
organise la chasse de manière à mieux gérer les populations animales
et s’assure que le Maître de Chasse Cillian, le chef des éclaireurs d’élite
des Latari, dispose de tous les outils et toutes les ressources dont ses
Rôdeurs peuvent avoir besoin.
Reculé et secret, Methras est également un foyer pour les Elfes
qui cherchent refuge loin des castes et des structures politiques tra-
ditionnelles de la société Latari ; c’est également une destination
pour ces Elfes agités qui cherchent plus d’émotions fortes que la vie
dans l’Aymhelin n’en offre généralement. Ils vivent à la sauvage dans
Boisanglant et sont libres de se livrer aux activités les plus ignobles.
Dans des huttes isolées, on peut ainsi trouver des Elfes engagés dans
une foule d’entreprises scandaleuses…
176
LE BOSQUET
DE NOIRÉPINE
Sur la frontière la plus septentrionale des terres elfiques, aussi loin de
Lithelin que l’on puisse se rendre sans quitter l’Aymhelin, deux stoïques
donjons, appelés Sern Genslyn, les « Jumeaux Vigilants », se tiennent à
la lisière de la forêt. Ces deux tours gardent la frontière elfique la plus
fréquentée et la protègent des bandits, des pillards et autres maux qui
tentent de corrompre les terres humaines de Terrinoth. Les donjons
jumeaux se dressent de part et d’autre d’une route pavée qui traverse
une partie luxuriante des Plaines Brumeuses connue sous le nom de
Bosquet de Noirépine. Les archers, les soldats préposés aux trébuchets
ainsi que la cavalerie en poste à Sern Genslyn protègent l’Aymhelin de
la corruption et des invasions depuis des siècles.
Néanmoins, la plupart des Elfes des provinces du Sud considèrent
ceux qui protègent le Bosquet de Noirépine avec peur et suspicion.
Habiter si loin du cœur spirituel de l’empire elfique et si près des
barbares humains a influencé les guerriers de Sern Genslyn à un point
alarmant. Les habitants du Bois sont plus enclins à faire du commerce,
tisser des liens, voire se marier avec les habitants de l’autre côté de la
frontière nord, en particulier de la Cité Libre d’Aubelande, qu’avec
ceux de leur propre espèce. Les Elfes de Lithelin sont à la fois scan-
dalisés et inquiets, même si ce genre de chose est toléré, voire même
encouragé par le Maréchal Cennan Valareth, commandant de Sern
Genslyn depuis une éternité.
Sage et perspicace, le Maréchal a compris très tôt que les appro-
visionnements, la camaraderie et l’aide militaire étaient tous beau-
coup plus accessibles au nord qu’au sud, Valareth travaille donc avec
plaisir avec les Humains afin d’améliorer les conditions de vie de ses
soldats. Cependant, ce mélange interculturel sert un objectif secret
bien plus important : il permet à un groupe d’espions d’élite de
recueillir des rumeurs et des informations qui transitent vers le sud
des terres humaines. Les maîtres-espions qui travaillent à Rivegarde
affirment que le réseau est dirigé par Aenara, une marchande qui
gère un empire commercial impressionnant dans le village de
Valbrasil. Ces espions Elfes glanent toutes sortes d’informations, des
rumeurs infondées aux renseignements vérifiés, et les rapportent vers
la capitale via des intermédiaires, des messagers et des notes cryptées
portées par des corbeaux.
LA CÔTE SÉLÉNIQUE
Bien que la majeure partie de la Mer Sélénique, dont les vagues
grondent contre la rive sud de l’Aymhelin, soit dangereuse pour
les équipages novices, la ville abritée de Primechute, au sud-est de
Lithelin, est un port accueillant où il est facile de charger et décharger
toutes sortes de marchandises. Construite autour d’une lagune natu-
relle et ceinturée de remparts construits par des maçons Elfes et des
sorciers élémentaires il y a des millénaires, Primechute est assez bien
protégée des vents, de la forte houle et des contre-courants violents de
la mer impitoyable.
Ainsi, presque tous les échanges maritimes avec le royaume elfique
de l’Aymhelin passent par Primechute avant que les marchandises ne
soient transportées en charrette vers le nord et l’ouest, sur des routes
pavées bien entretenues. Au nord des quais, à l’extérieur de la ville pro-
prement dite, se trouve le village communautaire de Selonish, grand
hameau de cabanes construites sur pilotis dans la baie. Les shamans et
les élémentalistes de Selonish partagent leurs ressources et s’entraident
dans leurs recherches pour maîtriser le vent, l’eau et les esprits de la
baie. Le village est dirigé par Mannen, une vieille shaman ratatinée
dotée d’une puissance telle qu’on en voit rarement en l’espace d’un
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

siècle. Ayant abandonné depuis longtemps sa quête de puissance,

Mannen passe désormais ses journées à donner des conseils, guider les
jeunes esprits, et s’assurer que les perturbations mystiques de Boisgris
ne s’étendent pas au-delà des frontières.

BOISGRIS
Situé au nord-est de la Mer Sélénique, non loin de la frontière entre
l’Aymhelin et les Plaines Brisées, se trouve Boisgris. Cette forêt est
un territoire honni peuplé de légendes déroutantes, où les réalités se
mélangent de manière imprévisible et où le voile entre Mennara et
l’Aenlong devient si mince que des créatures passent facilement de l’un
à l’autre. Sur les sentiers ombragés errent des êtres qui n’auraient jamais
dû entrer sur ce plan. Ici, ceux qui cherchent à gagner la faveur des Fées
sont en mesure de négocier ce qu’ils désirent.
Sans relâche, les Elfes surveillent attentivement les alentours de
Boisgris, ils font tout leur possible pour empêcher les mortels d’entrer
dans cette forêt sombre et humide, mais aussi pour éviter que quelque
chose n’en sorte. À leur grand désarroi, les Elfes ne disposent ni d’un
pouvoir suffisant ni des aptitudes nécessaires pour purger la forêt de la
menace mystique qui y règne. Ils n’ont donc pour seule solution que
d’offrir un accueil musclé aux créatures surnaturelles qui tentent de
sortir des bois.

LES CONTREFORTS
DES DARNATI
À l’extrême ouest, à proximité des plaines méridionales de Lorimor,
l’Aymhelin devient moins dense, des collines et des affleurements
rocheux déchirent les étendues d’immenses arbres. Ce terrain acci-
denté rend les Elfes qui vivent dans les Contreforts des Darnati par-
ticulièrement robustes. Saillant des rochers et des falaises comme des
cicatrices iridescentes, la précieuse pierre de lune est relativement
abondante dans cette région ; elle constitue le matériau principal de
certaines des plus grandes merveilles de l’armement elfique. Parmi les
artisans qui ont élu domicile ici, on trouve des mineurs et des for-
gerons qui produisent une grande partie des armes aiguisées comme
des rasoirs et des armures minutieusement ajustées qu’utilisent les
Elfes de l’Aymhelin. Ces ouvrages sont si extraordinaires, efficaces
et appréciés que nul n’oserait insulter ou nuire aux forgerons qui les
créent. Les Darnati sont donc les seuls Elfes véritablement protégés
du système de castes rigide et des intrigues complexes qui règnent à
la Cour de Lithelin.
Nichés dans les hautes terres se trouvent les antiques temples de
pierre des guerriers Darnati, un ordre mystérieux d’adeptes mystiques
qui canalisent leurs énergies spirituelles dans des démonstrations
incroyables de grâce, de vitesse, d’équilibre et de puissance. Souvent
appelés « Maîtres des Lames », ces moines sont parmi les guerriers les
plus redoutés de tout Mennara. De leur humble monastère, ils veillent
en permanence sur les hautes terres.

LE DENSEBOIS
Il existe peu d’endroits dans tout l’Aymhelin aussi mystérieux,
magiques ou vitaux pour les Elfes que le Densebois. Miracle d’enchan-
tement et de nature, le cœur de l’épaisse forêt se compose d’immenses
arbres aux troncs imposants dont les fibres, aussi solides que l’acier,
plient mais ne se rompent jamais. Ces arbres millénaires grandissent,
s’étirent, toujours plus grands, pour étendre leurs branchages toujours
plus loin, tant et si bien que la canopée ne laisse pratiquement plus
aucune lumière atteindre le sol.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Si les arbres sont le cœur de cette forêt, alors son âme est le lit de
fougères et de champignons phosphorescents qui éclairent faiblement
l’obscurité comme des centaines de petites bougies. Après des milliers
d’années d’étude, les apothicaires et les sorciers de l’Aymhelin tentent
encore de véritablement comprendre cette flore unique, aussi belle que
mystérieuse, qui n’existe nulle part ailleurs.
La nature magique du Densebois attire également l’attention
d’autres êtres que les Elfes. Les puissances étrangères envoient
constamment des émissaires, des espions, des pillards, ou offrent
d’importantes récompenses pour tout échantillon de ces formes de
vie uniques. Toutefois, peu survivent assez longtemps pour avoir un
aperçu de cette sombre beauté.
Le corps des Archers du Densebois a été créé afin de sauver la vie
des visiteurs assez téméraires pour tenter leur chance, mais aussi pour
repousser de plus grandes menaces. Ces guerriers d’élite dissuadent
rapidement ceux qui tentent de s’introduire dans la forêt. Vêtus de vio-
let et de bleu sombres pour se fondre dans les ombres perpétuelles du
Densebois, ils se camouflent pour surprendre les intrus. Maîtres en fur-
tivité et en tactique, capables de chasser dans le noir le plus complet, les
Archers du Densebois incarnent le silence de la mort. Pourtant, chaque
année, des récompenses incroyablement élevées incitent un nombre
croissant d’aventuriers à accepter de se lancer dans des quêtes toujours
plus dangereuses dans les profondeurs du Densebois.
LES CLAIRIÈRES
DE THALIAN
À l’ouest du Densebois, là où les arbres serrés commencent à céder
la place à des tapis d’herbe luxuriante, se trouvent les Clairières de
Thalian. Miracle de la nature, ces clairières reçoivent une quantité
parfaite de pluie et de soleil, l’ombre y est présente sans être exces-
sive, le sol merveilleusement riche. Livrée à elle-même, la végétation
des clairières pousse sans retenue, les arbres étendant follement leurs
feuillages ; mais entretenue par des êtres comme les Elfes, dotés d’un
profond respect et d’un immense amour de la terre, elle permet de
subvenir aux besoins d’un royaume.
Les Elfes travaillent ces terres depuis des siècles ; ils ont développé
des liens à la fois physiques et mystiques avec elles, qui leur permettent
aujourd’hui de produire une quantité incroyable de vivres pour des
espaces aussi limités. De longues rangées de vignes entrecoupent l’or
des champs de céréales, de petits vergers abritent des ruchers soi-
gneusement placés ; tout cela suffit largement à nourrir l’ensemble de
l’Aymhelin, et le surplus est vendu.
Pour se protéger contre les pillages et les incursions ennemies, les
Elfes de l’Aymhelin ont établi dans les clairières la base d’opérations
des Chevaucheurs de Yeron, une unité de cavalerie volante légendaire
qui fait partie des troupes d’élite de Mennara. Montés sur des che-
vaux volants incroyablement rares, les Yeron, et dirigés par Aishalan
Finnan, ils surveillent les menaces qui rôdent, qu’elles soient proches
ou lointaines. Lorsqu’ils ne patrouillent pas, les Yeron et leurs cavaliers
vivent en paix dans la beauté et la tranquillité des clairières.
LES HABITANTS
DE LA FORÊT
Les immenses forêts de l’Aymhelin semblent même s’étendre au-delà
de ce que montrent certaines cartes. Elles sont peuplées d’êtres bien
plus anciens que l’Humanité, qui les protègent farouchement contre
d’éventuels intrus afin qu’ils ne perturbent pas l’éternelle quête des
Elfes pour rejoindre l’Empyréen.
178
LA FONTAINE DE PURETÉ
S
ource naturelle dans une forêt riche et pleine de
vie non loin des Clairières de Thalian, la Fontaine
de Pureté est, selon la légende, la source qu’utilisèrent
les Latari pour purifier l’Aymhelin après les Troisièmes
Ténèbres. On dit que son eau nourrit la pureté du cœur,
dévore les corruptions intérieures, redonne beauté et jeu-
nesse et retire la souillure de l’ombre qui s’immisce parfois
dans la forêt. Les membres des cultes des Tisseurs de Sylves
entretiennent ces eaux et les jeunes arbres de l’Aymhelin
qui s’en nourrissent.
Seuls les Elfes sont autorisés à se rendre à la Fontaine de
Pureté, bien que tous les nobles de Mennara aient envoyé
des messagers à Caelcira pour supplier le roi Aenoeth de
leur accorder l’honneur de boire à l’un de ses nombreux
ruisseaux dans les clairières. Au fil des siècles, bien des
êtres désespérés ou avides ont tenté de s’emparer des
eaux mystiques par la force, mais ne sont parvenus qu’à
essuyer la fureur conjuguée des Tisseurs de Sylves et des
Protecteurs de la Forêt, qui ont tous juré de protéger la
nature de l’Aymhelin.
ARCHER DU DENSEBOIS (SBIRE)
Presque toutes les espèces de Mennara ont développé leurs propres
corps d’archers, mais peu d’entre eux, voire aucun, peuvent égaler
l’adresse et la puissance des Archers du Densebois. Ceux-ci tirent leur
nom et leurs armes des arbres du Densebois, qu’on ne trouve que dans
les forêts de l’Aymhelin. La force et la flexibilité de leurs arcs longs
sont sans égales et confinent au magique ; ils sont faits de multiples
couches du bois vénéré, prélevé au cœur de branches très anciennes.
Ces arcs tirent plus souplement mais avec plus de puissance, et se
brisent bien plus rarement que tout autre.
Cependant, les adversaires des Archers du Densebois ne les
redoutent pas qu’à cause de leurs armes. Formés dès l’enfance à maî-
triser leurs arcs incomparables et à encocher leurs flèches en un clin
d’œil, quand ils atteignent l’âge de se battre, les Archers sont capables
de tirer avec une vitesse et une précision que peu d’êtres parviennent à
égaler, même en utilisant un arc trois fois moins puissant.
Les Archers du Densebois sont extrêmement fiers de leurs apti-
tudes, leur confiance frise régulièrement l’arrogance et ils adoptent
souvent un ton supérieur, surtout quand ils rencontrent des archers
venus d’autres pays. Lorsqu’ils ne sont pas de service dans les rangs des
Archers de la Plaine de l’Étoile, des Blythwth Arethyl ou des Rôdeurs
du Densebois, ils aiment participer à des concours de fabrication
d’arcs, former d’autres archers Elfes et traquer des proies plus impres-
sionnantes que celles des Clairières de Thalian.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi

h bien, mes chers enfants, il était temps lourde, je crus avoir mal compris les directions que l’on m’avait
que quelque chose dans cette terre obscure indiquées. Les larges tunnels, qui m’évoquaient plutôt de grandes
m’impressionne pour d’autres raisons que la peur rues, étaient bondés d’autres voyageurs et de toutes sortes de
et le dégoût qu’elle suscite en moi ! Thelgrim est boutiques, tavernes et auberges. Des couloirs latéraux aux parois
une véritable merveille ! C’était la première cité que je rencontrais finement sculptées bifurquaient occasionnellement, tout aussi
dans ces royaumes du Nord qui fût digne de ce nom. sombres que l’artère principale qu’Ibn et moi parcourions.
Il nous semblait que nous descendions indéfiniment ; il nous
Curieusement, la première indication que ma fortune avait fallut plusieurs longues journées avant que la cité des Nains ne
tourné fut le changement de l’état de la route. La démarcation se déploie devant nous. Et là, mes futurs descendants, pour la
était aussi nette que si elle avait été tracée au cordeau ; le première fois, je ressentis véritablement de l’é merveillement dans
chemin poussiéreux, sinueux et truffé de nids-de-poule auquel cette terre étrange et lointaine.
je m’étais habitué au cours de mes longs trajets dans le Nord
céda soudain la place à une surface lisse et droite de pavés bien Thelgrim était une gigantesque caverne, qui semblait plus vaste
ajustés, avec des fossés bien réguliers de chaque côté. que les montagnes au-dessus d’elle. Les façades des magasins et
des maisons étaient creusées dans les parois, chacune sculptée
J’a i appris depuis, bien sûr, que j’étais alors entré dans la vaste dans un style différent, avec des pierres aux tons et aux textures
vallée qui abrite Thelgrim, quittant ainsi l’é gide douteuse des diverses conférant à chacune un aspect unique au milieu de
baronnies des Daqan pour le royaume des Monts Dunwarr. cet ensemble grandiose. L’éclairage provenait de grandes coupes
Alors que nous descendions cette voie bien nivelée, je vis au loin suspendues dans les hauteurs, remplies d’une substance qui
plusieurs édifices en pierre dont j’appréciai l’architecture. Bien brillait comme de l’or dans l’obscurité ; leur lumière se reflétait
que constitués de grands blocs gris sombre plutôt que du grès sur les cristaux incrustés dans le plafond voûté pour baigner les
chaleureux de mon pays, les bâtiments réchauffèrent néanmoins rues en contrebas d’une douce lumière jaune.
mon cœur. Se dressant fièrement à l’entrée de la vallée, des
tours massives et de hauts remparts flanquaient une porte De larges tunnels s’étiraient vers l’extérieur, dans toutes les
d’acier brillant qui s’élevait jusqu’au ciel. Je crus alors être arrivé directions, comme de vastes avenues, bordées de parcs d’une
à Thelgrim, jusqu’à ce qu’un marchand rencontré par hasard sur beauté si étrange que je ne trouve point les mots pour les
la route ne me détrompe. décrire. Là où l’on aurait trouvé des arbres et de la végétation
dans un parc sous le soleil, ici se dressaient des formations
Car ce n’était que l’entrée de Thelgrim. Là vivaient beaucoup de pierre gracieuses et délicates d’une vertigineuse diversité
d’ Humains, ainsi que des Nains d’une nature plus aventureuse de couleurs, chacune brillant doucement de son propre éclat
que leurs congénères. Près de la porte et des remparts étaient surnaturel ; toutes contenaient d’innombrables images gravées,
également installés de nombreux commerces, des marchés et des posées sur des étagères ciselées dans les pierres étincelantes.
entrepôts approvisionnant les Humains des territoires voisins,
et facilitant les échanges de Thelgrim avec les baronnies et autres Au milieu de ce paysage fantastique s’agitait une foule de Nains et
territoires du Nord. J’appris plus tard que la plupart des Nains d’ Humains, tous plus grands que ceux que j’avais rencontrés plus au
considéraient cette entrée avec grand dégoût, pour ne pas dire sud. Ici, enfin, je découvrais des êtres qui ne vivaient pas dans la
peur omniprésente qui avait empoisonné la surface. Je ne voudrais
avec une véritable colère, ne voyant dans ces fières constructions pas que vous vous mépreniez, mes chers enfants, ce royaume n’était
que des signes manifestes indiquant à leurs nombreux ennemis, pas insensible à l’obscurité et à la menace qui semblaient planer
réels ou imaginaires, où attaquer leur véritable foyer. Mais tout sur tout le Nord. Je dirais plutôt que, alors que les Humains de
ce que j’observai de ces constructions en surface semblait dater la surface semblaient souvent écrasés sous ce poids, les habitants de
de nombreuses, très nombreuses années ; depuis combien de Thelgrim l’affrontaient avec une résolution endurcie.
temps les Nains nourrissaient-ils ces craintes sans avoir jamais
été attaqués ? Cela restait un mystère pour moi. Je commençai à me demander si les Humains d’autres pays
partageaient l’enthousiasme et l’énergie des gens de Thelgrim.
Au centre des fortifications s’élève la grande porte qui donne
accès aux passages vers Thelgrim même. Au début, comme Et je me demandai ensuite ce que cela révélait sur mon espèce
j’étais entré sous les yeux attentifs de guerriers nains en armure en général.

182
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
Quand je vis pour la première fois les pierres brillantes
des parcs publics, un élan d’espoir jaillit en moi, mais il fut
rapidement anéanti lorsqu’une très jeune Naine m’expliqua que
cette pierre était très souvent utilisée dans leurs cités, et qu’elle
n’avait aucun rapport avec de quelconques « cailloux magiques »,
comme me dit la fillette, un sourire sur son joli visage poupin.
Tout de même, plusieurs personnes rencontrées dans des
tavernes aux abords de l’Aymhelin m’avaient affirmé que
les Nains étaient adeptes de l’utilisation des runes et qu’ils
étudiaient des savoirs anciens. Je ne renonçai donc pas.
J’appris rapidement que tous les Nains s’y connaissent
grandement en techniques de brassage et de culture de la vigne,
ainsi que dans l’art de consommer, ou de lamper, pour utiliser
le terme approprié, les produits de ces passe-temps. Je ne
pouvais faire dix pas dans l’avenue principale de Thelgrim sans
croiser deux tavernes et un magasin de spiritueux.
Je fus grandement réconforté de découvrir, en entrant dans
un établissement très fréquenté, que l’hydromel est une des
boissons préférées des Nains, et qu’on le trouve sans difficulté
et en grande quantité chez eux.
J’installai Ibn dans une petite écurie de louage bien entretenue
avant d’entrer dans un établissement dont l’enseigne en pierre
aux dessins compliqués annonçait qu’il s’appelait la Coupe en
terre. Alors que je poussais la porte et regardais autour de
moi l’intérieur sombre et enfumé, je fus surpris de découvrir
plusieurs Humains parmi la clientèle petite et barbue.
Je me dirigeai vers le long comptoir en pierre au fond de
la salle et commandai une grande chope d’hydromel. Je
me retournai ensuite pour chercher de potentielles sources
d’informations en attendant que le patron m’apporte ma
boisson. Je vis trois vieux soldats grisonnants qui semblaient
prometteurs, assis non loin, à une table ronde et usée d’où
ils pouvaient garder un œil sur la porte tout en accédant
facilement au comptoir.
Leur table gémissait presque sous le poids des mets de leur
festin, qui ressemblait à s’y méprendre au dîner du Calife le
jour d’A ’tar, et ma bouche commença à saliver malgré le repas
copieux que j’avais déjà pris. Il y avait là des plateaux de
viandes juteuses, des tas de petits légumes et de tubercules, et
de grosses miches de pain noir encore chaud. Pour couronner
le tout, les convives levaient régulièrement leurs gobelets
finement ouvragés, et surtout débordants de l’amer
breuvage mousseux du Nord.
Plein d’assurance avec ma chope d’hydromel bien
pleine, je m’approchai. L’un des Nains, l’a ir âgé et
jovial avec sa foisonnante barbe blanche séparée
en deux longues tresses, se leva avant même que
je puisse me présenter, tendit le bras pour me
donner une grande claque, sympathique mais
douloureuse, dans le dos, et me poussa sur un
siège avec une telle force que je renversai un peu
de ma précieuse boisson sur le sol en pierre.
« Salut à toi, Homme de Scinde ! Joins-toi
donc à nous ! » Le Nain souriait franchement, ses
dents brillant dans sa barbe couleur neige, quand
il se rassit sur son propre siège. « On voit pas
souvent des gens de votre espèce, si loin au nord !
Laissez-moi vous présenter ces vieux brigands. »
Les portes de Thelgrim ! J’aurais pu rester là, à les
regarder avec émerveillement, pendant des heures et
des heures. Leur taille était vraiment impressionnante,
surtout compte tenu de celle de leurs bâtisseurs.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
Exemple de petite
collation que la plupart
des Nains engloutissent
entre deux vrais repas.
Les mots étaient bon enfant ; les deux autres Nains firent mine
de se renfrogner un instant avant de tourner vers moi un œil
amusé, sans rancune pour l’humour de leur vieil ami.
« Lui – et le Nain frappa dans le dos d’un autre, plus
jeune, dont la barbe brune était coupée court, d’une façon qui
ressemblait beaucoup à celle de mon pays –, c’est Corbin, de
la Guilde des Mineurs. »
L’intéressé, vêtu d’une armure de plates, hocha la tête sous
son casque de métal aux pointes en forme de cornes.
« Et lui – mon hôte tendit le bras pour donner une claque
sur l’épaule du Nain assis en face de moi –, c’est Glyr, un
guérisseur et l’un de mes frères de la Guilde des Guerriers. »
Glyr avait le nez rond et bulbeux et le teint rougeaud de ceux
qui boivent trop. Ses cheveux roux étaient rassemblés en arrière
en un petit chignon, tandis que sa barbe couleur de feu s’étalait
sur sa large poitrine en une cascade indisciplinée. Il hocha lui
aussi la tête, tout en repoussant la main du vieux Nain.
« Et moi, dit mon nouvel ami avec un grand geste de la
main, ignorant la rebuffade de Glyr, je suis Grisban. Mais je
réponds aussi à mon nom de guilde : l’A ssoiffé ! » Il tendit
la main vers la chope de Glyr et l’attrapa avant que l’autre
Nain ne puisse l’arrêter. Lorsqu’il la porta à ses lèvres, son
geste fut si vif qu’il renversa la moitié du liquide dans sa barbe.
Ceci, je devais l’apprendre plus tard, était une bonne grosse lampée.
Les trois Nains me pressèrent alors de questions pour avoir
des nouvelles de mon pays, apprendre mon histoire et toute
autre nouvelle que je pourrais leur donner sur le monde hors
de Thelgrim. Corbin, le Nain brun, semblait le mieux connaître
mon lointain pays, mais tous étaient vraiment curieux. Je laissai
mon sourire s’épanouir, la chaleur de l’hydromel amplifiant
184
l’impression de bien-être que je ressentais en compagnie de
ces braves Nains, et commençai à les régaler d’histoires sur
Al-Kalim et mes voyages à travers les royaumes du Nord.
Je fis tout de même bien attention, en dépit de leur attitude
amicale et de la conversation chaleureuse, de ne rien révéler de
mes véritables intentions.
À la place, j’expliquai longuement le traditionnel Rite de
Passage que les érudits doivent accomplir pour gagner leur
place dans l’un des Collèges des Arcanes, et décrivis de façon
passionnément détaillée les rues et les édifices de l’ancienne
Haruun, une cité que je n’avais jamais visitée de ma vie.
Cette nuit-là, j’en appris beaucoup sur les Nains, leur histoire,
leurs mythes et leurs légendes. Pour trois anciens vétérans,
mes compagnons semblaient bien préoccupés par les contes
pour enfants. Les Dragons tenaient un rôle exceptionnel dans
leurs récits du passé, malgré le fait bien connu, me semble-
t-il, que ces immenses créatures sont extrêmement rares et de
nature très solitaire.
Au passage, j’évoquai mon mépris croissant pour les seigneurs
Daqan, et mes nouveaux amis se joignirent rapidement à moi
pour dénigrer leurs voisins humains et le chaos qui régnait
dans leur système de gouvernement sous couvert de traditions.
La société des Nains des Monts Dunwarr, me semblait-il,
était beaucoup plus traditionnelle ; les habitants suivaient les
décisions d’un monarque qui était seul à dicter ses directives et
à ordonner le travail de ses sujets. Toutefois, la façon de choisir
ce parangon de vertu naine demeure assez obscure pour moi.
La seule certitude que j’a i acquise est qu’avant d’être choisi, le
futur dirigeant doit avoir servi dans l’une des nombreuses guildes
qui forment le cœur de la société naine dans les montagnes.
Le concept de choisir un monarque, cependant, me parut si
étrange que j’en interrompis l’interminable et houleuse conversation
avec mes nouveaux amis pour leur demander comment il était
possible qu’un dirigeant nain ne soit pas né pour régner, choisi par
les dieux eux-mêmes pour endosser une si grande responsabilité.
Grisban, le vieux guerrier grisonnant, me répondit en me regardant
d’un air incrédule par-dessus le bord de sa chope :
« Tu voudrais que nous nous mettions à la merci de
n’importe quel idiot, qui ne serait peut-être pas plus doué
que le premier gardien de troupeau de moutons venu ? »
Il semblait vraiment dégoûté par le concept de pouvoir
héréditaire, et je levai une main en signe d’apaisement.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
« Depuis l’époque d’ Helka l’Audacieuse, nous faisons plus confiance
aux compétences et au courage qu’à une lignée de sang. » Corbin
haussa les épaules. « Nous savons que vous, les grandes gens,
vous accordez beaucoup d’importance à de telles choses, mais nous,
les Nains, avons toujours été un peuple plus pragmatique. »
Glyr acquiesça. « Vous, les grandes gens, vous croyez trop au sang,
et n’accordez pas assez de crédit aux capacités de quelqu’un. »
Leurs propos étaient sensés, mais l’idée qu’un Calife puisse
être choisi, par des gens ordinaires qui plus est, était trop
dérangeante pour mon esprit confus.
« Pour être choisi comme souverain par les Nains, il faut
faire ses preuves pendant des années, au service des guildes. »
Grisban se renversa dans sa chaise sculptée. « On ne se
contente pas d’errer dans la salle du trône et d’assumer une
autorité incontestée sur l’ensemble du peuple nain. Il faut
des années de dévouement et d’apprentissage pour accumuler
la sagesse nécessaire pour diriger les gens du Dunwarr et les
protéger des traîtrises du monde. Devrions-nous laisser le jeune
Corbin, ici présent, nous guider à l’avenir, alors que les gouttes
de son dernier bain sont encore humides sur sa tête ? »
Grisban et Glyr s’esclaffèrent, leur rire long et gras accompagné
des éclaboussures d’une grande quantité de boisson tragiquement
renversée sur la pierre. Je constatai que Corbin commençait à
être agacé, mais il parvint à se détendre un peu en prenant
une autre gorgée de sa bière amère.
Mes compagnons m’expliquèrent ensuite plus en détail le
système des guildes et les différences qui séparaient la Guilde
des Mineurs, à laquelle appartenait Corbin, de celle des
Guerriers, plus traditionnelle, des deux Nains plus âgés.
Dans la société naine, les mineurs sont ceux qui creusent la
roche inexplorée à la recherche de minerais précieux. Ils créent
donc des tunnels et aident au développement de nouveaux
filons. Les membres de la Guilde des Guerriers, eux, sont des
combattants, comme la Garde Blanche du Calife, ou peut-
être même les Maréchaux de la Citadelle.
Je suis sûr qu’il existe plusieurs autres guildes, mais le cours
tortueux de nos discussions et le flot abondant de boisson ont
conspiré contre ma mémoire, habituellement excellente pour
retenir les détails. Je me souviens de quelque chose au sujet
d’une Guilde des Marchands, et comme ce sont des Nains,
je suis certain qu’il doit y avoir des Guildes de Maçons et de
185
Forgerons, bien sûr. Et nous avons évidemment discuté de la
Guilde des Brasseurs en long, en large et en travers.
Finalement, après que les Nains eurent fait servir d’innombrables
tournées de boissons, après ce qui me parut être des heures de
discussions et de plaisanteries conviviales sur nos nombreuses
différences, je parvins à amener le sujet des artefacts magiques, ce
qui sembla éveiller l’intérêt de mes compagnons.
Ces braves Nains, tous aventuriers, en savaient beaucoup sur
les éclats runiques dont j’avais déjà entendu parler ailleurs. Ils
connaissaient de nombreux objets fantastiques alimentés par ces
pierres. Toutefois, étant des guerriers, ils en savaient peu sur
leur fonctionnement.
Mais quand, enfin, j’amenai la conversation sur la provenance
de ces reliques et sur la source de leur pouvoir, les trois Nains
éludèrent les questions en marmonnant, tantôt gentiment,
tantôt avec un air plus bourru, chacun se moquant de
l’ignorance des autres.
En quelques instants, je compris qu’ils ne pourraient rien
m’apprendre sur ma propre pierre, le joyau du Calife, car il
n’était pas lié par les chaînes de la magie runique issue des
ennemis les plus acharnés des Nains, les Dragons.
Voulant rester discret, il me fallut emprunter des chemins
détournés, et offrir plusieurs autres tournées sur le compte du
Calife, pour savoir si cette ignorance n’était imputable qu’à mes
nouveaux amis, ou propre à tous les Nains.
C’est alors que je découvris l’irritabilité de ces derniers. Ils
n’apprécièrent guère mes insinuations et déclarèrent que les
connaissances de leur Guilde des Scribes Runiques étaient bien
supérieures à celles de n’importe quel érudit à deux sous de
Havregris, de Nerekhall ou de chez ces mollassons des forêts
du Sud.
Mes compagnons virent à quel point j’étais affecté par la
tournure que prenait notre conversation, et m’o ffrirent donc
rapidement un peu de réconfort, ce qui était tout à leur
honneur. Tout ce que je devais faire, m’assurèrent-ils, était
trouver la bonne personne pour répondre à mes questions.
Mais si ni les mages humains de Havregris, ni les sages
Elfes de l’Aymhelin, ni les scribes runiques nains des Monts
Dunwarr ne pouvaient m’a ider, où aller ensuite pour trouver
des informations ?
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LES MONTS DUNWARR
S ombres et inquiétants, les Monts Dunwarr sont hérissés de pics
frappés par le blizzard, de crêtes acérées gris ardoise, et ponc-
tués d’épais bosquets de conifères noueux. Entre les cimes enneigées
s’étendent de hautes prairies de bruyères et d’ajoncs, où serpentent des
ruisseaux aux eaux vives et glaciales. Territoire en apparence inhospita-
lier, hormis pour quelques chèvres et de rares lièvres, les Monts Dunwarr
sont le dernier endroit où l’on s’attendrait à trouver un royaume.
Cependant, alors que les voyageurs s’aventurent à travers les éboulis
des contreforts et suivent les sentiers sinueux vers les hautes vallées,
les signes d’une civilisation perdue depuis longtemps commencent à
apparaître. Après une observation plus attentive, les falaises paraissent
trop droites et leurs bords trop nets pour avoir été ciselés par la pluie
et le vent. Ce que l’on pensait n’être qu’une piste de moutons s’avère
être un sentier aux pavés bien ajustés. Et certains des affleurements
escarpés commencent à ressembler étrangement à des visages sinistres
et usés par les intempéries.
Si les voyageurs suivent une piste en particulièrement mauvais état
à l’est des Collines du Géant Hurleur, ils finiront par entrer dans une
vallée étroite menant dans le Dunwarr. À l’entrée de cette vallée, enca-
drées par le rugissement écumeux de deux imposantes chutes d’eau,
se dressent les Portes de Thelgrim, cœur du royaume des Nains caché
dans les profondeurs du Dunwarr.
LES PORTES
DE LA MONTAGNE
Enchâssées dans des roches où sont sculptées les silhouettes de deux
puissants guerriers nains se tenant dos à dos pour repousser les enne-
mis qui les entourent, les portes d’acier renforcé s’élèvent sur plus
d’une centaine d’empans. Fabriquées à partir de bandes d’acier trempé
jointes par des centaines de rivets et estampillées de runes de résis-
tance, les Portes de Thelgrim portent clairement les bosses et les cica-
trices de dizaines d’assauts qui témoignent de leur indestructibilité.
Ce qui reste invisible, ce sont les autres défenses secrètes, intégrées
dans les portes et les falaises voisines. Meurtrières et autres ouvertures
de tir camouflées permettent aux gardes nains, à l’abri de l’ennemi,
de prélever un tribut sanglant sur toute armée qui ose attaquer, et se
retrouve alors soumise aux tirs d’arbalètes, de balistes et de bombes
incendiaires. Des sorties cachées permettent à la garnison de lancer des
contre-attaques dévastatrices. Dernier avantage, et non des moindres,
l’eau des chutes peut être redirigée pour inonder toute la vallée.
Les Nains du Dunwarr ne maintiennent qu’une faible garnison aux
portes, car un petit nombre de soldats suffit à tenir la position pen-
dant des semaines ; en outre, Thelgrim se situe à un jour de marche.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Bradha au Bouclier commande la garnison, elle est également chargée
d’inspecter les caravanes de Passegivre qui viennent commercer avec
les marchands de Thelgrim. Guerrière d’expérience à l’air sombre, elle
a survécu à plusieurs batailles et considère que son premier devoir est
d’assurer la sécurité de son royaume. Ainsi, elle est plus que disposée à
interdire l’entrée à n’importe qui ayant l’air suspect, et paie grassement
pour toute information sur de potentielles menaces.
THELGRIM
Une fois les portes franchies, les voyageurs se retrouvent dans une
vaste salle en pierre, éclairée par des puits astucieusement taillés qui
apportent la lumière de la surface, protégés par des défenses toujours
aussi invisibles. Quelques issues conduisent aux quartiers des soldats
et aux réserves, mais la seule sortie est la seconde paire de portes mas-
sives, de l’autre côté de la grande salle, qui conduit à la Route de
l’Âtre, le passage souterrain qui s’étend sur sept lieues jusqu’au cœur
de Thelgrim.
La Route de l’Âtre est suffisamment large pour que cinq chariots y
circulent de front. Des inscriptions runiques complexes courent sur
toute la longueur de ses murs : une histoire du peuple nain destinée
aux privilégiés qui peuvent la lire. Chaque pouce est lisse et poli, et
rappelle plus le métal savamment travaillé que la pierre brute. Tel est
le don des Nains du Dunwarr, l’aptitude non seulement à travailler
un matériau, mais aussi à l’écouter. Ils savent d’un simple regard si
le fer est à la bonne température pour être travaillé, ils devinent la
taille et la forme d’une veine d’obsidienne en posant la main dessus,
et peuvent sentir exactement où poser le ciseau pour obtenir une face
parfaitement lisse sur la pierre qu’ils sont en train de tailler. Ils sont les
maîtres de la forge et de la mine, et Thelgrim dévoile toute la splen-
deur de leur art.
Thelgrim est l’endroit où l’on commence à vraiment comprendre
la taille des Profondeurs du Dunwarr, le réseau de cavernes qui tra-
verse les entrailles des Monts Dunwarr et le domaine des Nains. La
Route de l’Âtre s’ouvre sur une immense grotte remplie de stalag-
mites et d’affleurements de roche vivante. Par le passé, la route tra-
versait la caverne sans interruption, mais tel n’est plus le cas depuis les
Troisièmes Ténèbres, quand Géhennor envoya ses Dragons hybrides
franchir la Route de l’Âtre pour plonger au cœur de Thelgrim. Depuis,
les Nains ont creusé un gouffre profond de ce côté-ci de la caverne ;
seul un unique pont relie désormais la Route de l’Âtre à la cité. De
l’autre côté se dressent encore d’autres portes, ainsi que des remparts
surmontés d’un parapet aux créneaux stratégiquement positionnés.
Une fois seulement cette dernière muraille franchie, on entre vérita-
blement dans la cité de Thelgrim.
Les portes sont dotées de défenses similaires à celles de l’extrémité
nord de la cité, qui conduisent dans les Profondeurs ; chacune est
flanquée d’une garnison de la Guilde des Guerriers. Celle du sud
est commandée par la Capitaine des Briscards Lyssa Svensdottir, qui
supervise toutes les actions militaires en dehors des Monts Dunwarr.
Celle du nord est commandée par son frère, le Capitaine des Gardes
Einalf Svensson, qui est chargé de la défense dans les Profondeurs et de
la Garde du Palais, qui assure la sécurité du roi Geirmund Ragnarson.
LE COEUR DE LA CITÉ
Thelgrim n’était à l’origine qu’une simple intersection de tunnels
formant l’une des plus grandes cavernes des Profondeurs, où étaient
rassemblés des camps de réfugiés épuisés. Ainsi naquit la capitale pen-
dant les Années d’Exil. Finalement, les tentes en tissu cédèrent la place
aux murs de pierre, et les camps se transformèrent en une nouvelle et
fragile civilisation. Quelques millénaires plus tard, Thelgrim constitue
toujours un témoignage taillé dans la pierre, en éternelle croissance,
de la résistance des Nains.
L’immense caverne qui abrite Thelgrim est continuellement
éclairée par des centaines de globes-étoiles en cristal soigneusement
fabriqués par la Guilde des Scribes Runiques. De loin, leur éclat
fait ressembler la cité à une gigantesque géode. Entre ses murs, les
globes-étoiles éclairent les rues d’une douce lueur. Les visiteurs
humains trouvent la faible luminosité gênante, ce qui amuse infi-
niment les habitants.
À Thelgrim, les bâtiments, construits en cercles concentriques,
sont souvent creusés à même la roche des murs de la caverne ou dans
l’épaisseur des stalagmites. Au cœur de Thelgrim, un imposant aque-
duc détourne l’eau d’une rivière souterraine vers un lac construit par
les Nains pour approvisionner la cité en eau douce.
À la pointe la plus éloignée du lac se dresse Dunwol Kenn Karnin,
la « Forteresse à l’intérieur de la Montagne ». Derrière les remparts
épais de cette forteresse, eux-mêmes creusés entre les remparts de la
montagne, le roi Ragnarson règne depuis le Trône de Tanngnoster, au
plus profond de Dunwol Kenn Karnin, dernier refuge du peuple nain
aux heures les plus sombres.
De l’autre côté du lac, en face de Dunwol Kenn Karnin, se trouve
la Salle des Guildes ; devant son imposante façade se dressent dix
piliers richement décorés, chacun représentant l’une des dix guildes
qui constituent le cœur et l’âme de la société naine. Contrairement
à la forteresse du roi où règne un calme sobre, la Salle des Guildes
est un lieu bruyant et animé. Les chefs, sous-chefs et représen-
tants de chaque guilde passent des heures en débats animés, cha-
cun défendant bec et ongles les intérêts de son groupe et tentant
d’étendre son autorité. Ces débats se sont envenimés plus d’une
fois, tournant au pugilat et obligeant les envoyés du roi à faire sortir
de force les membres des guildes, voire à les jeter dans le lac pour
rafraîchir leurs ardeurs.
LA FORGE DES RUNES
Foyer de la vénérable Guilde des Scribes Runiques, la Forge des Runes
abrite la collection de runes draconiques que les Nains ont rassem-
blée. Les membres de la guilde ont partiellement construit l’imposant
bâtiment en forme de croix dans les parois de la caverne, à la lisière
de Thelgrim. De leur perchoir, les scribes runiques peuvent observer
toute la cité, rappelant ainsi, de manière assez peu subtile, qu’eux plus
que quiconque sont responsables de la préservation de l’âme de la
culture du Dunwarr.
Chacune des quatre immenses ailes du bâtiment est dédiée à une
activité spécifique. L’aile sud, où se trouvent les entrées, abrite les
bureaux et les salles de réunion. L’aile ouest contient les forges, les
moules et les fonderies où de nouveaux objets runiques sont créés.
L’aile nord abrite deux exemplaires de chaque rune draconique
connue, moulés dans un métal particulier et enchâssés dans des
dalles de roche. Pour finir, l’aile est, entièrement prise dans la pierre
du mur de la caverne et orientée vers la Lande Vitrifiée, protège les
archives complètes de l’histoire des Nains, gravées sur des feuilles de
cuivre martelées.
Les scribes runiques ont non seulement la responsabilité de pré-
server l’histoire du Dunwarr et de graver les runes draconiques sur
les armes et les armures, mais ils sont aussi chargés de découvrir de
nouvelles runes, ou de redécouvrir celles perdues avec la destruc-
tion du Karok Doum. Aucun ne prend cette charge plus au sérieux
que le Maître Scribe Dorgan Poingmarteau. On prétend même
qu’il envisage sérieusement d’embaucher un groupe d’aventuriers
pour se rendre dans la Lande Vitrifiée afin d’explorer les ruines
des antiques cités des Nains, dans l’espoir d’y trouver d’anciennes
inscriptions runiques.
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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LA SALLE DES ANCÊTRES
Située sous le cœur de Thelgrim, la Salle des Ancêtres est le lieu de
repos éternel des Nains. Là sont entreposés sept cent trente-quatre
sarcophages non scellés, sépultures provisoires des nouveaux trépas-
sés. Les corps se décomposent dans ces tombes temporaires pendant
sept cent trente-quatre jours. Ensuite, les os sont transférés dans une
série d’antichambres, longue de plusieurs kilomètres, qui permettent
de réunir – au moins physiquement – les morts avec leur famille ou
leur guilde.
Seuls les monarques bénéficient d’une sépulture individuelle. Ils
sont enterrés dans de grandes et élégantes tombes de métal et de pierre
scellées. Ces mausolées miniatures racontent les légendes des diri-
geants à travers des bas-reliefs et des vers finement sculptés.
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FORT HADRAN
Fort Hadran, situé cœur du Dunwarr, était à l’origine un poste de
garde isolé construit sur l’imposant Mont Valborne. Au fil des siècles,
ce poste s’est développé pour devenir une forteresse, puis une cité.
De la surface, on voit seulement la tour de pierre et les remparts
d’origine, construits au sommet de la montagne. La Guilde des
Rôdeurs entretient la tour, qui lui sert de quartier général non offi-
ciel. Le reste de Fort Hadran, profondément enfoui sous la surface,
est relié à la tour de guet par un unique escalier de pierre aux milliers
de marches.
La cité proprement dite a été creusée dans les cavernes des
Profondeurs de la même manière que Thelgrim. Toutefois, Fort
Hadran se trouve près du cœur en fusion de Mennara. Les membres
de la Guilde des Forgerons et de celle des Inventeurs sont nombreux
à s’y être installés pour profiter de la chaleur intense, dont ils tirent
profit pour la fusion et la forge. La partie souterraine de Fort Hadran,
contrairement à la froide et solitaire forteresse qui la surmonte, est
devenue une cité animée peuplée d’artisans talentueux.
LA FOURNAISE DE PIERREFEU
Loin sous Fort Hadran se trouve un immense et antique haut-four-
neau construit dans un alliage inconnu. Il se dresse au centre d’un
lac de magma bouillonnant, et seule la nature merveilleuse du métal
qui le constitue l’empêche de fondre : c’est la Fournaise de Pierrefeu.
Les Nains de la Guilde des Forgerons atteignent cette merveille sur-
naturelle par des ponts d’obsidienne renforcés de runes qui repoussent
la chaleur féroce. La Fournaise leur permet de transformer des minerais
en lingots de métal extrêmement purs, et même de fabriquer de l’acier
trempé capable de résister au feu des Dragons, dans lequel furent for-
gées les Portes de Thelgrim.
Sous le regard vigilant du Grandmarteau Hafnir Terrassefer, la
Fournaise fonctionne nuit et jour, toute l’année. Couturé d’horribles
cicatrices, le robuste corps d’Hafnir, où aucun poil ne repousse plus,
a été brûlé presque partout au cours de divers travaux. Cependant,
le dévouement absolu d’Hafnir n’est pas motivé uniquement par la
fierté. Si la Fournaise restait sans surveillance trop longtemps, elle
pourrait surchauffer et dépasser son propre point de fusion ; elle s’ef-
fondrerait alors dans le magma. Une telle tragédie aurait des répercus-
sions terribles pour la Guilde des Forgerons, et pour tout le royaume
du Dunwarr.
LES FOSSES
DE DULDOR
Loin à l’ouest de Thelgrim, au creux du granit des montagnes, les
Fosses de Duldor sont le foyer de nombreux membres de la Guilde
des Inventeurs et de la non officielle Ligue des Alchimistes. Dans ses
salles de pierre, la Guilde des Inventeurs teste ses nouvelles machines,
conserve sa collection toujours plus fournie de pièges et de serrures et
entrepose ses armes de siège. La Guilde tolère la présence et la colla-
boration (parfois malvenue) des prétentieux membres de la Ligue des
Alchimistes, qui ne cessent d’expérimenter de nouvelles mixtures, de
créer de nouveaux acides et gaz toxiques, et de fabriquer leurs coupes
inflammables et leurs bombes incendiaires de malheur. Bien que les
résultats de ces expériences profitent à l’ensemble du royaume du
Dunwarr, ils ont également entraîné un certain isolement des Fosses
de Duldor par rapport aux autres cités naines.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Tales of Darkness
LES GUILDES DU DUNWARR
L a société naine des Profondeurs du Dunwarr est
principalement organisée autour de dix guildes.
Chacune supervise un aspect différent de la vie des Nains.
Elles sont les principales institutions dirigeantes des Nains
du Dunwarr depuis d’innombrables générations.
La Guilde des Maçons est chargée de construire de nouveaux
bâtiments et d’entretenir des édifices dans les montagnes,
alors que la Guilde des Mineurs creuse pour découvrir des
minerais et des pierres précieuses, ainsi que pour créer de
nouveaux tunnels et de nouvelles salles pour les Maçons.
La Guilde des Forgerons fabrique des outils, des armes et
divers autres objets, tandis que la Guilde des Inventeurs
confectionne des jouets, des mécanismes et de beaux
bijoux. La Guilde des Brasseurs produit toutes sortes de
bières, et supervise également les cultures de céréales en
surface (et les moud parfois à contrecœur pour en faire
du pain plutôt que de la bière). La Guilde des Marchands
s’occupe de la vente de tous ces produits aux communau-
tés du Dunwarr et au monde extérieur.
La Guilde des Guerriers se tient prête à protéger les
Profondeurs contre toute menace, tandis que la Guilde des
Rôdeurs patrouille dans les montagnes pour chasser les bêtes
L’Alchimiste en Chef Freja Bjornhart et son mari, le Maître
Inventeur Stron, supervisent les Fosses de Duldor. Ils sont tombés
amoureux après des décennies d’étroite collaboration, mais leur rela-
tion fut désapprouvée dès le début. La Guilde des Inventeurs craignait
que la loyauté de Stron envers sa femme n’affaiblisse la position domi-
nante de l’organisation, et la Ligue des Alchimistes percevait cette
liaison comme de la fraternisation avec l’ennemi. Tous deux reçurent
des mises en garde puis des injonctions à mettre un terme à leur rela-
tion, qu’ils écoutèrent avec attention pour mieux les ignorer ensuite.
Dans les années qui suivirent, aucune des deux organisations n’accepta
de reconnaître que seul le mariage de Freja et Stron avait permis aux
Fosses de Duldor de fonctionner relativement bien. Au lieu de cela, la
Guilde et la Ligue se disputèrent ardemment pour déterminer à quelle
organisation les futurs enfants du couple appartiendraient.
LE LABYRINTHE
DE DEURG
Il y a plusieurs siècles, lors des premières explorations des Nains
dans les Monts Dunwarr, une équipe de la Guilde des Mineurs prit
la décision fatidique de suivre un étrange filon de minerai jusqu’à la
surface de la montagne. Le filon traversait une masse de pierre noire
ressemblant à de l’obsidienne et la Guilde des Forgerons estima que
le minerai, une fois fondu, donnerait un métal brillant à la dureté et
à la résistance inégalées. Après avoir obtenu l’accord des doyens de la
Guilde, le Maître Mineur Deurg redoubla d’efforts.
dangereuses et les bandes de maraudeurs. Pendant ce temps,
la Guilde des Explorateurs envoie des éclaireurs et des émis-
saires (et parfois des espions) dans d’autres territoires pour
s’informer sur ce qui se passe dans le reste de Mennara.
Enfin, la Guilde des Scribes Runiques conserve les connais-
sances nécessaires pour inscrire des runes de pouvoir.
Cependant, tous les Nains n’appartiennent pas à l’une
des guildes, bien qu’ils aspirent presque tous à rejoindre
leurs rangs. Même le roi ou la reine leur est lié, car il faut
avoir été Maître de Guilde avant de pouvoir être élu par ses
pairs. Bien qu’il jure de renoncer à ses anciennes loyautés
une fois sur le trône, aucun dirigeant n’arrive à être parfai-
tement impartial.
Il existe de nombreux autres groupes dans la société du
Dunwarr qui aspirent à accéder au pouvoir et au prestige
des Guildes. Selon l’ancienne loi, il ne peut exister que dix
Guildes en même temps, mais rien n’empêche que l’une
d’elles soit dissoute et qu’une nouvelle prenne sa place.
Des groupes comme la Ligue des Alchimistes, les Forgeurs
de Feu et les Vengeurs complotent constamment pour ren-
verser l’une des Guildes existantes – qui, elles, travaillent
sans relâche pour maintenir leur autorité.
Peu de temps après les premières excavations, les mineurs commen-
cèrent à remettre en question le forage. Ils avaient du mal à suivre
leur progression dans la montagne, phénomène entièrement nouveau
pour les Nains, dotés d’une grande aptitude à déterminer leur empla-
cement sous la surface. Ils creusaient pendant des jours mais avaient
l’impression de ne pas avancer. Ils faisaient demi-tour pour remonter
le filon, mais auraient juré toujours avancer dans la même direction.
Ils s’attendaient à voir le filon se tarir, mais découvraient de plus gros
gisements. Finalement, ils pénétrèrent dans des cavernes et des salles
dont ils ne soupçonnaient même pas l’existence, aux parois couvertes
d’éclats tranchants comme des lames de rasoir de cette fameuse pierre
noire, et veinées de l’étrange métal.
Alors commencèrent les chuchotements.
Les mineurs les entendaient depuis des semaines, mais ils com-
prirent alors qu’ils n’étaient pas le fruit de leur imagination et qu’ils
existaient en dehors de leur esprit. « Creusez, les exhortaient les voix. Le
filon le plus riche se trouve juste un peu plus loin. Creusez vers moi… »
Les rapports sur les chuchotements furent la dernière chose à sortir
des mines. Les équipes de recherche envoyées de Thelgrim trouvèrent
les entrées des tunnels écroulées. Les Nains déblayèrent l’éboulement,
mais ne trouvèrent aucune trace des mineurs. Quand cette information
parvint à la Naine qui occupait le siège de seigneur des Profondeurs,
elle décréta que tous les lingots de l’étrange métal seraient replacés dans
la mine, qui serait scellée à jamais par des runes de lien et de défense.
Depuis, toute exploration qui touche de près ou de loin au Labyrinthe
de Deurg est formellement interdite et punie de mort.
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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LA LANDE VITRIFIÉE
L oin au nord-est des baronnies des Daqan, les énormes rochers
qui protègent le cœur déchaîné de Mennara s’amincissent. De
grands traits de feu rugissant et de pierre en fusion jaillissent du sol.
Des falaises d’obsidienne aux arêtes acérées, des crêtes de roche noire
et des rivières de lave en fusion occupent le centre de la lande ; ces
paysages sont parmi les plus pittoresques de Mennara. Des cours
d’eau cristalline, des plaines parsemées de fleurs sauvages et de grands
conifères entourent ce paysage primitif, où un riche sol volcanique
et la fonte des neiges des montagnes s’allient pour créer un paradis
luxuriant de verdure. Les mortels appellent cette terre impossible, où
vie et mort s’unissent, la Lande Vitrifiée.
LE DOMAINE
DES DRAGONS
Le Cœur, au centre de la Lande Vitrifiée, est un groupe de volcans
d’où coulent des fleuves de lave, qui inondent les terres environnantes
pour former un véritable bourbier de roche fondue recouvrant perpé-
tuellement celle en train de refroidir. Créant un labyrinthe incandes-
cent, des ruisseaux de magma traversent un paysage cauchemardesque
d’affleurements d’obsidienne et de dunes de cendre à la dérive. Plus
haut, les Dragons font leurs nids dans les calderas des volcans. Les
jeunes vivent dans les tunnels de lave refroidie et les grottes à flanc
de montagne, tandis que les plus vieux hantent les cratères brûlants
des sommets.
Le Cœur et ses abords immédiats sont un paysage infernal de
feu et de fumée que seul un Dragon peut supporter. Les constantes
éruptions libèrent de vastes coulées de lave qui ne refroidissent jamais
vraiment ; elles remplissent les failles et les gorges de vastes lacs d’ar-
dente roche en fusion. Les Dragons survolent la surface pour chasser
les Salamandres et se perchent sur les îles calcinées pour se reposer et
converser entre eux.
On sait peu de chose sur la société des Dragons ; peu d’étrangers
ont réussi à se rendre dans la Lande Vitrifiée, à observer ces créatures
et à survivre à l’expérience. Les érudits savent que les Dragons de
la Lande, contrairement aux bêtes sauvages que l’on trouve dans la
majeure partie de Terrinoth, sont affreusement intelligents, et qu’ils
dominent les tribus de Dragons hybrides qui errent, dispersées dans
les dunes de cendre et sur les pentes de basalte. Les histoires racontent
même qu’une Dragonne Rex, l’être le plus puissant de son espèce,
règne sur l’ensemble de la Lande Vitrifiée.
 Le Cœur a émergé de l’Anneau Verdoyant suite à des millénaires
d’éruptions. Ponctués de crevasses crachant de la fumée et de sources
chaudes bouillonnantes, des pentes de basalte fracassé et des amas de
scories délimitent le Cœur. Mais à mesure que l’on s’éloigne dans la
vallée, ce paysage infernal cède la place à une plaine foisonnante de
bruyères et d’ajoncs, peuplée d’arbustes et même de conifères, qui
rayonne depuis le Cœur. Les baies sauvages et les plantes céréalières
s’emparent du paysage, des fruits et des noix fantastiques pendent
lourdement aux branches des arbres. Les Nains tentent depuis long-
temps de s’emparer des terres fertiles de l’Anneau Verdoyant. D’autres
peuples de Terrinoth tournent maintenant eux aussi leur regard vers
le nord, espérant y créer un sanctuaire protégé du fléau de la guerre…
à condition de parvenir à éloigner les Dragons.
LE KAROK DOUM
Aux confins de la Lande Vitrifiée, des montagnes depuis longtemps
endormies veillent sur les ruines éparses de la civilisation naine.
Détruits par le feu des Dragons, les murs effondrés et les tours abat-
tues de Karok Zon, Dorgol Visoth et Morath az Moran, la grande
capitale du royaume perdu, se dressent toujours en ces lieux déso-
lés. Leurs fenêtres aveugles surveillent leur pays abandonné, autrefois
appelé le Karok Doum.
Bien que la plupart des cités aient été calcinées, les Dragons ne
parvinrent jamais à faire entièrement disparaître les édifices des Nains.
Chaque ville était entourée d’un mur d’obsidienne, protégé par des
runes de feu pour qu’il ne fonde jamais. Ces murs se dressent donc
toujours là, comme au premier jour, même privés de leurs portes en
fer, si hauts qu’ils sont visibles à des kilomètres à la ronde dans cette
vaste étendue de la lande.
Une fois à l’intérieur, les aventuriers découvrent les larges rues
qui rayonnaient du centre des cités, bordées des restes des maisons
basses et larges en basalte, des forges et des greniers jadis construits
par les Nains. Les forges et les ateliers fonctionnaient grâce à l’acti-
vité volcanique moins intense des abords de la lande. Au centre de
chaque cité, les tours d’or et de cuivre furent entièrement brûlées
par le feu des Dragons. On trouve même encore des flaques d’or
solidifié dans les rues, une fortune de rois oubliée sous une couche
de cendre.
Mais peut-être un plus grand trésor se cache-t-il sous les tours en
ruine ? Pendant les Années de Feu, les Nains ont été forcés d’aban-
donner de nombreuses merveilles derrière eux alors qu’ils fuyaient
leur royaume. Il circule beaucoup de rumeurs au sujet de caveaux
secrets, pleins de bijoux et d’or, d’armes et d’armures dotées d’une
puissance inouïe grâce à l’ancien artisanat runique. Certains Nains
croient même que l’une des cités abrite encore l’atelier secret d’Helka
l’Audacieuse, mère des Nains et première Scribe Runique. S’il existe
encore des runes draconiques oubliées en ces lieux, elles pourraient
détenir une puissance bien supérieure à tout ce que les royaumes nains
connaissent aujourd’hui.
Toutefois, mettre les pieds dans les vestiges du Karok Doum n’est
pas pour les âmes sensibles. Les ruines de ces cités sont infestées de
toutes sortes de créatures immondes. Des Salamandres géantes nichent
à l’intérieur les murs. Des vers de charbon et des araignées étripeuses
se tapissent dans l’ombre et n’attendent qu’un instant d’inattention de
leur naïve proie pour leur tomber dessus. Certains petits Dragons pré-
fèrent également vivre dans les ruines plutôt qu’au centre de la Lande
Vitrifiée, évitant ainsi de subir la domination de leurs aînés.
LA GORGE
DES BRAISES NOIRES
Autrefois l’un des itinéraires les plus directs entre la Lande Vitrifiée et
les montagnes voisines, la Gorge des Braises Noires n’est maintenant
plus qu’une profonde faille entre les parois de falaises accidentées.
Selon la légende, Helka et les armées naines livrèrent leur dernière
bataille contre les Dragons dans cette gorge, et l’Intrépide y aurait
déchaîné ses pouvoirs runiques les plus redoutables.
Quoi qu’ait fait Helka, sa démonstration de puissance a ouvert la
terre si profondément que les feux de Mennara émanent encore de
ses profondeurs. Des vapeurs toxiques se dégagent toujours de la fis-
sure, submergeant les aventuriers trop téméraires qui s’égarent près de
la faille. En fait, ceux qui voyagent vers la Lande Vitrifiée préfèrent
éviter la Gorge, et prendre les sentiers des chèvres de montagne qui
permettent de la contourner.
Il reste peu d’autres traces de la grande bataille qui fut livrée ici.
Toutefois, au fond de la Gorge, on peut toujours voir le squelette d’un
grand Dragon. Il semble avoir été embroché par un imposant pic de
basalte qui aurait jailli de terre ; ses os y sont toujours accrochés.
LES HABITANTS
DE LA LANDE
Les Dragons dominent la lande, et règnent sur les autres créatures
qui vivent dans les contreforts de leur territoire. La civilisation dra-
conique est aussi riche que toutes les autres, mais les motivations de
ces créatures restent entièrement énigmatiques pour les autres espèces
de Mennara. Les Dragons ne tolèrent aucun intrus, mais beaucoup
tentent tout de même de pénétrer sur leurs terres ancestrales pour
dérober les trésors et les objets magiques dont ils se sont emparés au
cours des Troisièmes Ténèbres.

194
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

LES PLAINES BRISÉES

I l y a bien longtemps, des tremblements de terre et des éruptions
volcaniques brisèrent ce qui était autrefois une vaste prairie val- LES ORCS
lonnée dans l’Est de Mennara ; avec le temps, le paysage est devenu
un ensemble chaotique de rochers aux arêtes acérées qui éperonnent DES PLAINES
le ciel, de ravins sans fond qui éventrent le sol et de glissements de
Dans les Plaines Brisées, les Orcs ramassent les minéraux pour les tro-
terrain qui dévalent les flancs des montagnes instables lors de pluies
quer, chassent sur les terrains dégagés, tendent des pièges à leurs proies
torrentielles. Bien qu’une grande partie des prairies fertiles et des trou-
dans les collines rocheuses et utilisent les profonds ravins comme pro-
peaux d’animaux qui y paissaient à l’origine ait été plus ou moins
tection naturelle contre d’éventuelles attaques. Les Elfes soutiennent
épargnée par la destruction, les vallées dévastées et les éboulements ont
même que les Orcs sont nés sur ces terres, qu’ils sont eux aussi une
révélé certains des gisements de pierres précieuses les plus riches, et les
conséquence des cataclysmes primordiaux qui leur ont donné leur
plus facilement accessibles, de tout Mennara.
nom. La générosité des Plaines Brisées a permis aux clans orcs de pros-
Ces terres, maintenant appelées les Plaines Brisées, ne sont plus que pérer, et le terrain les aide à se défendre contre le harcèlement quasi
rarement déchirées par les tremblements de terre. Reflétant leur nature incessant des Dragons à la recherche de trésors, les envahisseurs venus
hostile, cette association de vastes plaines et de paysages torturés crée des Steppes du Ru au nord, les armées de mercenaires humains, les
un parfait foyer pour les Orcs. créatures émergeant de la jungle de Zanaga et toutes les autres menaces.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Les Orcs sont divisés en grandes tribus, chacune revendiquant un
territoire avec ses points de repères et ses terrains de chasse. Pourtant,
les frontières changent fréquemment en fonction des conflits entre
tribus, ajoutant incertitude et péril pour les aventuriers qui voyagent à
travers les Plaines Brisées, déjà hautement dangereuses. Évitant toute
forme de sédentarité, les tribus transportent leurs villages avec elles
quand elles parcourent leurs terres. Une fois que les Orcs ont trouvé
un emplacement approprié, ils plantent leurs tentes et s’installent
jusqu’à ce que l’ensemble de la communauté ait envie de repartir.
Cette tradition de nomadisme garantit qu’aucune tribu ne s’accapare
ni ne détruise trop de gibier ou de végétation, et permet également de
mieux protéger les territoires de tous les prédateurs.
LES TERRES
DES PLAINES
Les Plaines Brisées le sont au sens littéral du terme, car elles sont
morcelées en portions de terrain souvent séparées par de profondes
fissures, séquelles d’anciens tremblements de terre. La région res-
semble plus à un assemblage mal ajusté de pièces de puzzle qu’à un
paysage uniforme. Sous l’action de crues éclair et de glissements de
terrain, les failles se sont élargies avec le temps et abritent à présent
un paysage métamorphosé, creusé de vallées assez grandes pour que
la faune sauvage les colonise. Quelques fissures, aux arêtes rocheuses
toujours aussi vives malgré les années, recèlent des trésors profondé-
ment enfouis, et d’immenses chaînes montagneuses offrent des vues à
couper le souffle sur les fleuves occidentaux qui se jettent dans la Mer
Sélénique. Toutefois, peu importe l’environnement, une ou plusieurs
tribus orques y vivent inévitablement, et malheur à tout envahisseur
qui oserait pénétrer sur leurs terres.
LA CHAÎNE DU BARUK
La région sud des Plaines Brisées est constituée de longues chaînes
de montagnes et de volcans en sommeil, ainsi que de petites plaines
qui s’étendent jusqu’aux abords rocheux de Zanaga. De nombreuses
rivières tumultueuses dévalent les montagnes jusqu’aux jungles de
Zanaga, dont elles nourrissent la végétation luxuriante. Dans cette
région, on pratique l’orpaillage, et un simple tamis suffit parfois
à trouver des pépites d’une pureté et d’une taille exceptionnelles.
Remonter le cours de ces rivières est toutefois inutile, car elles émer-
gent mystérieusement des montagnes comme si des trous avaient été
creusés dans la roche nue à cette seule fin. Certains Orcs croient que
ces eaux sont le Sang du Baruk qu’ils vénèrent. Ils leur prêtent des
vertus miraculeuses, et même le pouvoir d’influencer la vie et la mort.
Les rivières semblent prendre part à une bataille animée le long des
terres du Sud, combat qui n’aura probablement jamais de vainqueur.
En effet, les jungles et les montagnes semblent indéfiniment
s’affronter pour étendre leur emprise, les premières lançant leurs
épaisses branches et leurs longues lianes à l’assaut des dernières, qui
les repoussent à grands coups de glissements de terrain. Les rivières,
comme pour aider tout à tour les deux adversaires, charrient des blocs
de pierre et des débris rocheux des montagnes dans les jungles, et per-
mettent aux plantes de pousser toujours plus vers le nord et de se
répandre le long des berges. Alors que cette guerre se poursuit, les
Orcs et les habitants de Zanaga déplacent leurs villages et s’emparent
de nouveaux terrains de chasse à mesure que le paysage évolue ; les
affrontements qui en résultent remontent aussi loin que les contes et
légendes s’en souviennent. Les restes de ces batailles sont disséminés
le long des frontières liquides, où l’on trouve également des reliques
magiques et autres objets de valeur. Cependant, même sans parler de
ces conflits, le Baruk est dangereux pour d’autres raisons.
198
Bien que le Baruk soit aussi hostile que n’importe quelle autre région
des plaines, quelque chose instille la brutalité et la sauvagerie chez tous
ceux qui y vivent. Après une saison, même les colons d’autres espèces
deviennent assoiffés de sang ; ce phénomène s’atténue quelque peu une
fois qu’ils ont quitté la zone. Les rares fois où les autres Orcs parlent
des membres de la tribu qui vit dans le Baruk, ils disent seulement qu’il
vaut mieux les éviter et ne jamais leur faire confiance.
BARUK GRO URAK
Bien que la plupart des Orcs de Mennara respectent les Piliers, c’est-
à-dire les lois orques, et les traités de paix avec les Humains, la « Tribu
de la Main Rouge » défie souvent ces lois et se livre à des pillages
sanglants. La culture de cette tribu repose sur un mélange horrible
de rituels et de mythes sanglants, ainsi que sur une violence extrême ;
le chef de la tribu gagne son statut uniquement par sa brutalité et
le conserve à force de combats d’une grande sauvagerie. Ces Orcs
ne connaissent ni agriculture ni système économique, ils dépendent
entièrement de la chasse et des pillages, ainsi que des grottes désertes
qu’ils utilisent comme abri. Ils sont plus liés par le partage d’une iden-
tité culturelle que par de quelconques relations interpersonnelles, et,
à l’exception de leurs compagnons, la plupart des Mains Rouges ne
feront aucun effort pour aider un congénère affaibli ou blessé.
Leur culture est si impitoyable que les Orcs de la Baruk Gro Urak
ne sont considérés comme adultes que lorsque leurs mains sont défi-
nitivement teintées du sang de leurs ennemis. Le rituel exige qu’ils se
poncent les mains avec un cactus curak, puis qu’ils les plongent dans
la Rivière Rakbo ; si elles sont encore rouges quand ils les en ressortent
et si le Chef Barka en juge l’Orc digne, alors ce dernier reçoit le statut
respecté de Main Rouge et obtient le droit de participer aux conseils
de la tribu. S’il échoue, l’Orc est atrocement battu par tous ceux qui
ont assisté à la cérémonie, puis socialement exclu jusqu’à ce qu’il tente
à nouveau d’accomplir le rituel lors du cycle lunaire suivant.
LES TERRES FLUVIALES D'ERD
Alors qu’elles se situent sur un territoire rocheux et montagneux, les
Terres Fluviales d’Erd ne sont, elles, couvertes que de marais et de
cours d’eau. Les terres de la majeure partie des Plaines Brisées étant
plus élevées, les centaines de fleuves qui y coulent se déversent ici
avant de se jeter dans la mer occidentale. Certains Orcs racontent que
les Terres Fluviales recueillent les pleurs des Plaines Brisées qui voient
les peuples orcs s’affaiblir à force de traiter pacifiquement avec d’autres
espèces. D’autres Orcs prétendent que c’est là que la terre saigne, car,
comme les êtres qui la peuplent, elle se meurt lentement à mesure
qu’on oublie les anciens us et coutumes ; cette dernière affirmation
n’est pas sans fondement.
Tantôt vives, tantôt calmes, les eaux sont toujours constellées de
petites paillettes rouges scintillantes provenant de sources indétec-
tables. Il n’existe aucune source minérale en amont qui expliquerait
ce phénomène. On suppose donc le plus souvent que quelque chose
s’érode lentement et que les eaux emportent ces particules qui, si
on les prend dans des filets finement tissés et qu’on les expose à l’air
libre, deviennent pâles et grises, puis tombent en poussière. Beaucoup
d’érudits de Havregris croient que quelque chose de magique existe,
ou vit, sous l’Erd, et que l’érosion fait perdre quelque chose d’essentiel
aux Plaines Brisées. Ils ne parviennent toutefois pas à s’entendre et à
déterminer si cette chose a un effet bénéfique ou non pour ces terres.
ERD'LANTIR URAK
Les Orcs de l’Erd’Lantir Urak, la « Tribu du Passage de l’Eau », font
souvent du commerce avec les Humains et les autres espèces. Malgré
son emplacement sur les rives de la Mer Sélénique, leur territoire est
la zone d’interaction la plus hospitalière des Plaines Brisées, étant
donné que les autres régions du territoire partagent des frontières
avec l’Aymhelin, les Steppes du Ru et Zanaga. Ces Orcs voyagent
le long des multiples cours d’eau sur des bateaux de construction
grossière mais ingénieuse, car ils peuvent facilement être démontés en
deux morceaux transportables lorsque les Orcs doivent passer d’une
voie navigable à une autre. Ce sont tous d’excellents marins, dotés
d’un grand instinct pour éviter les obstacles immergés et pêcher à
mains nues. Certains voyagent dans les mers lointaines, parfois même
jusqu’aux Torue Albes, pour participer à des expéditions d’explora-
tion en terres inconnues.
Les Orcs des Terres Fluviales commercent avec presque toutes les
autres tribus, et ont donc beaucoup à offrir aux étrangers venus de
la mer ou de l’intérieur des terres. En retour, ces échanges poussent
nombre d’entre eux à visiter d’autres territoires, et beaucoup décident
finalement de commencer une nouvelle vie dans les Cités Libres de
Terrinoth. L’histoire raconte que les Orcs des Scindeterres sont issus
d’une branche éloignée de cette tribu (ainsi que de membres de la
tribu Jer’Khull) partie il y a bien longtemps sur un navire marchand
d’Al-Kalim. Ces Orcs ont depuis mené des études alchimiques sur
le vif-argent et sur d’autres matériaux rares qui ont produit des mer-
veilles à nulle autre pareilles.
LES HAUTES TERRES DE GHUR
Dans le Nord des Plaines Brisées se dresse une série de vertigineux
sommets, les Hautes Terres de Ghur. En contrebas, on trouve des
mesas, sur lesquelles serpentent quelques pistes qui facilitent quelque
peu les déplacements dans les Hautes Terres. Le Ghur s’étend égale-
ment au nord jusque dans les Steppes du Ru, mais il est préférable
de ne pas connaître le nom qu’utilisent les Uthuk pour désigner ces
montagnes dans leur immonde langue.
Certains des endroits les plus froids des plaines se situent sur ces
territoires, où d’énormes avalanches se produisent souvent. Certaines
sont si puissantes qu’elles déposent de la neige sur les abords des Vallées
du Khull, et entraînent avec elles de gros morceaux de métaux rares
arrachés aux falaises. Ceux qui cherchent à s’emparer de ces richesses
doivent affronter plusieurs tribus orques, mais de nombreux trésors
dorment sous les tas d’arbres cassés ou enfouis dans le sol meuble,
attendant simplement d’être découverts. Bien des rumeurs courent sur
d’autres objets précieux cachés dans les épaisses coulées, des artefacts
perdus datant de la création elfique ou des armes anciennes aussi tran-
chantes qu’au premier jour, mais aucun d’eux n’a jamais été déterré et
ces suppositions restent non vérifiées.
Presque chaque saison, on découvre de nouveaux sommets ; les
cartes du Ghur sont donc encore moins précises que celles du reste
des Plaines Brisées. Il est fortement recommandé aux aventuriers qui
souhaitent explorer cette région de s’appuyer davantage sur l’obser-
vation du terrain, celle des pistes fraîches par exemple, plutôt que de
planifier leur voyage à l’aide de cartes incomplètes ou erronées. Être
accompagnés d’un guide orc local est non seulement encouragé mais
obligatoire, car si les « invités » ne sont pas accueillis dans les mon-
tagnes par les Orcs, la visite peut s’avérer assez courte et désagréable.
GHUR'ZHUN URAK
La Ghur’Zhun Urak, la « Tribu des Piedslégers », est composée
d’équipes de reconnaissance, de rôdeurs et d’habitants des montagnes.
Le clan a revendiqué les Hautes Terres il y a plusieurs siècles, il les
protège donc farouchement et attaque quiconque s’approche trop de
la lisière des Plaines. Les Orcs de la Ghur’Zhun Urak tendent des
embuscades aux éclaireurs elfiques et uthuk sans distinction, posent
des pièges le long des sentiers fréquentés et se faufilent dans les villages
voisins pour voler des chevaux, des vivres, des armes et surtout des
fûts de vin elfique.
De leur côté, les Elfes répondent en envoyant des rôdeurs chasser
les Orcs, qui sont généralement partis depuis longtemps lorsqu’ils
arrivent. Les représailles des habitants des Steppes du Ru peuvent
toutefois être catastrophiques. Les Orcs considèrent toujours ces
affrontements comme un mal nécessaire pour juger de la menace
croissante des Terres Sombres ; les Orcs de la Ghur’Zhun Urak se
définissent comme les gardiens des Plaines Brisées, précieux défen-
seurs de leur territoire.
Les hauteurs des montagnes permettent aux Orcs de la Ghur’Zhun
Urak de voir arriver de loin une attaque et lancer l’alerte. De leur per-
choir d’Urakuhl, la Tribu des Piedslégers a une vue imprenable sur les
vastes terres entourant les Plaines. Quand les Orcs de la Ghur’Zhun
Urak descendent de leur montagne pour appeler aux armes les tri-
bus rivales, les petites querelles sont rapidement mises de côté pour
défendre les Plaines contre n’importe quel agresseur.
LES VALLÉES DU KHULL
Déchirée par d’anciens bouleversements géologiques, la terre des
Plaines Brisées s’ouvre par endroits comme si d’immenses griffes
l’avaient entaillée. Beaucoup croient que les plaines doivent leur nom
au Khull, car il est évident que cette terre a été éventrée et qu’elle
ne s’en remettra probablement jamais. La plupart de ces failles sont
199
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

profondes de plusieurs coudées, parfois même d’une lieue, voire plus
en de rares endroits. Certaines vallées font également plusieurs lieues
de large, et sont donc assez grandes pour donner aux Orcs qui y vivent
la sensation d’être en plaine.
La terre dans le Khull est en grande partie stérile, le gibier y est
donc peu abondant, les cultures doivent être soigneusement choisies
et ne sont destinées qu’à nourrir les Orcs, ce qui leur permet tout
juste de survivre. Il est rare que des Orcs parviennent à quitter ces
terres ; la plupart vivent toute leur vie au fond des failles. Ils font tout
de même des échanges avec leurs congénères de la surface et d’autres
voyageurs, principalement en utilisant des planches et des cordes pour
faire monter et descendre les marchandises ; il existe également des
endroits dans les vallées où de vrais chemins donnent facilement accès
aux terrains des hauteurs. Les fissures dans les parois surplombant les
vallées conduisent parfois à d’épaisses veines d’argent, voire à des bas-
sins de vif-argent, qui permettent aux Orcs du Khull d’acheter tout
ce qui leur manque.
JER'KHULL URAK
Les Orcs de la Jer’Khull Urak, la « Tribu des Habitants des Vallées »,
passent la majeure partie de leur vie dans les larges vallées formées par
les tremblements de terre qui ont déchiré les Plaines sur des centaines
de lieues. Contrairement à la plupart des autres tribus orques, celle-ci
pratique l’agriculture et l’élevage. Ces Orcs cultivent de petites par-
celles de terre disséminées dans les vallées, ils font paître des troupeaux
de petits élans, de cerfs et d’autres animaux sauvages qui sont jadis
tombés dans les vallées et qui s’y sont adaptés.
La plupart des autres tribus orques regardent les Jer’Khull de haut
(au sens propre du terme), mais les habitants des vallées créent de
complexes alliages à base d’argent que beaucoup apprécient, et dont
ils pensent qu’ils sont bénis par les esprits du monde souterrain. Il
est possible que cette croyance dans les esprits soit fondée, mais pas
comme les Orcs l’imaginent : dans certaines vallées, l’air siffle dans
les évents. On croit alors entendre l’obscurité chuchoter et voir de
terribles visages flotter dans la fumée étouffante qui sort du sol.
Des pierres gravées découvertes à Zanaga semblent indiquer que seuls
le danger et la mort règnent au-delà de la chaîne rocheuse, avertis-
sement souvent valable dans tout Mennara pour les voyageurs trop
téméraires ou mal préparés. Un jour, des aventuriers exploreront les
terres de l’Est, peut-être avec l’aide des Orcs du Lok, et la vérité sera
enfin dévoilée.
LOK URAK
La légende raconte que les Orcs de la Lok Urak, la « Tribu de l’Arc »,
qui vivent sur les terres de la bordure est des Plaines Brisées, furent
les premiers à fabriquer des arcs en os, en corne et en tendon. Que
cela soit véridique ou non, les Orcs de la Lok Urak n’en sont pas
moins des chasseurs étonnants de précision ; armés de leurs puissants
arcs U’Rek, ils chassent le cerf, qu’ils trouvent à profusion sur les
flancs des montagnes, mais sont également des guerriers formidable-
ment dangereux. Nomades comme la plupart des Orcs des plaines, ils
restent toutefois plus longtemps dans un même endroit que d’autres
de leurs congénères, car les territoires du Lok sont souvent plus géné-
reux et accueillants.
Sous l’œil attentif du Chef Mogro le Prompt, les Orcs commencent
à s’entraîner au tir à l’arc dès l’instant où ils sont capables de tenir un
U’Rek, puis pas un jour de leur vie ne passe sans entraînement aux
armes. La dirigeante du conseil, Scurr la Chasseresse, assiste Mogro.
Seule responsable de l’approvisionnement en nourriture de la tribu,
elle doit non seulement surveiller l’évolution des populations des
proies, mais également superviser le repérage du terrain et le pistage.
Elle doit aussi s’assurer que chaque chasseur est capable de pister des
bêtes, de construire des pièges et de maîtriser les techniques de survie
et les tactiques d’embuscade.

LES FALAISES DU LOK

Hormis les Orcs, peu d’êtres connaissent le Lok, car ce territoire
se situe loin des terres dites « civilisées » qu’étudient les éru-
dits de Terrinoth et d’Al-Kalim. La chaîne rocheuse émerge
des Terres Ingrates d’Ugluk comme une vague déchiquetée
de pierres cyclopéennes, et ressemble aux ruines d’un gigan-
tesque château éparpillées sur des centaines de lieues. Rares
sont ceux qui osent vivre dans le Lok ; la plupart des Orcs
habitent sur ses abords occidentaux, où le terrain s’aplanit et le
gibier devient plus abondant. Ceux qui vivent sur les sommets
sont des êtres solitaires, dépositaires de grands secrets
qu’ils n’osent révéler au reste de Mennara.
Ce qui se trouve à l’est du Lok suscite de nom-
breuses spéculations et de grandes discussions, plus ou
moins agitées. Les historiens de Havregris mettent
en avant des parchemins en décomposition qui
évoquent des royaumes glorieux et des mages
puissants, mais ces écrits furent rapportés par des
visiteurs étrangement vêtus il y a des siècles de
cela, ces affirmations sont donc difficiles à croire.

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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LE PLATEAU DU MOK
Situé entre les Terres Fluviales et les Vallées du Khull, le Plateau
du Mok est peut-être la zone la plus connue des plaines. Les Orcs
de presque toutes les autres tribus viennent y chercher des conseils
spirituels ; la tribu du Mok est donc rarement attaquée et bénéfi-
cie même de la protection des autres contre les menaces externes.
Des voyageurs de Terrinoth et d’autres pays viennent également voir
ces Orcs pour leur demander conseil. Ils racontent des histoires sur
cette région comme si le Plateau du Mok représentait l’intégralité
des Plaines Brisées, ignorant tout de la vraie nature de cette terre aux
multiples facettes.
MOK'THUL URAK
Constituant plus un mouvement religieux qu’un clan, les Orcs de la
Mok’Thul Urak (qui peut se traduire par « Tribu de la Lune Grise »)
sont des Orcs errants, qui parlent aux esprits et lisent les présages
dans les os. Selon la loi du Pilier de Gharmuth, la Tribu de la Lune
Grise est considérée comme composée entièrement de Marcheurs
Fantômes neutres ; elle est une source de conseils et de soutien
universellement bienveillante pour tout être sensible qui recherche
son aide. Dans les rares occasions où des êtres, Orcs ou autres, ont
osé s’approcher de la Mok’Thul Urak avec de mauvaises intentions,
ils ont vite découvert que les esprits croient aussi que cette tribu
doit être protégée.
En règle générale, les seules difficultés auxquelles sont confrontés
les Orcs de la Mok’Thul Urak relèvent de la simple logistique : avoir
suffisamment de nourriture pour eux et les pèlerins qui recherchent
leurs sages conseils, s’assurer que chaque âme soit entendue et aidée,
et résoudre les différends internes de la tribu. Un conseil dirigé par
la Shamane Anka et l’Aînée Jutta gère ces préoccupations mortelles.
Ces deux sœurs à la longévité surnaturelle ont vu de nombreuses vies
orques naître et s’éteindre. Presque certainement soutenues par les
entités surnaturelles avec lesquelles elles communient, les sœurs sont
dotées d’une force bienveillante et dispensent bonté et clairvoyance à
tous ceux qu’elles touchent.
LES TERRES INGRATES D'UGLUK
Dans une région déjà inhospitalière, les Terres Ingrates d’Ugluk sont
peut-être le pire des territoires. Avec ses pics rocheux et ses crues
éclair qui creusent de nouveaux ravins, la région est accidentée et
impitoyable. Le gibier y est rare, les chasses fructueuses se gagnent
de haute lutte. L’air poussiéreux a une odeur épaisse et terreuse que
peu de gens apprécient (ou même supportent). La végétation est aussi
sèche que la terre, mais il est souvent possible, avec des méthodes adé-
quates, d’en tirer des remèdes efficaces, au goût extrêmement amer ou
douloureux à l’application ; selon certains, avec la bonne préparation,
ces médicaments et ces cataplasmes permettraient de vaincre la mort
elle-même. De nombreux Orcs qui se rendent à Terrinoth prétendent
venir de cette région, ne serait-ce que pour impressionner ceux qu’ils
rencontrent en décrivant la nature terrible des Plaines Brisées.
Comme elles sont situées au cœur des Plaines Brisées, les Terres
Ingrates reçoivent peu de visiteurs. Certains voyageurs les traversent
pour ensuite emprunter le passage étroit vers le nord et les Steppes
du Ru, quand ils se lancent dans des quêtes dont personne ne se sou-
viendra plus (généralement car les voyageurs n’en sont jamais reve-
nus). Certains viennent dans les Terres Ingrates pour s’approvisionner
en plantes médicinales introuvables ailleurs, qui se revendent à un prix
parfois plus élevé que celui d’un éclat runique mineur. Les passionnés
d’équitation y découvriront les cavaliers de la Mag Ugluk Urak et leurs
célèbres montures reptiliennes.
MAG UGLUK URAK
La Mag Ugluk Urak, qui se traduit vaguement par la « Tribu de la
Grande Bête », reste la plus nomade des tribus orques contemporaines,
ce qui engendre avec les autres tribus des conflits à la fois inévitables
et imprévisibles. Ces Orcs mènent une vie presque complètement
dépourvue de confort et de sécurité.
Pour la plupart des êtres, et même pour la plupart des Orcs, les défis
d’une existence en perpétuel mouvement sont tout simplement trop
grands à surmonter ; ce n’est pas le cas pour les Orcs de la Mag Ugluk
Urak, car ils disposent des Gurak Tols. Ces énormes lézards à six pattes
sont notoirement vicieux ; on envoie les jeunes Orcs voler des œufs à
même les nids surveillés par les mères vigilantes, pour élever ensuite
les bébés. Comme ils s’en occupent depuis l’éclosion, les Cavaliers de
la Bête créent un lien émotionnel si fort avec leur monture que l’un et
l’autre développent des compétences et une adaptabilité inégalées par
rapport à la cavalerie ordinaire ; ils font incontestablement partie des
guerriers montés les plus redoutés dans le monde.
Le légendaire cavalier Skorn, Orc de peu de mots à qui il ne reste
plus qu’un bras, aux cheveux gris et dont le comportement rappelle de
façon déconcertante celui d’un prédateur embusqué, dirige la Tribu de
la Grande Bête et gère les alliances et les conflits avec les tribus orques
voisines. Attentionné, patient mais impitoyable, il est connu pour sa
conviction que la parole donnée par un Orc est aussi indéfectible que
le lien qui l’unit à son Gurak Tol ; Skorn est donc considéré comme
l’un des mortels les plus honnêtes et honorables que l’on puisse ren-
contrer dans les Plaines Brisées.
Bras droit de Skorn, Gorhta Tamer Uglar est le chef du conseil
tribal et le Maître de l’Obéissance qui supervise toutes les formes d’en-
traînement des bêtes. Le comportement insultant d’Uglar, Orc cassant
et dénué d’humour, lui vaut le mépris du reste de la tribu. Sans ses
incroyables aptitudes pour dresser les bêtes, il aurait été assassiné par
ses propres frères depuis belle lurette.
LES HABITANTS
DES PLAINES
Les Plaines Brisées confèrent force et ténacité à leurs habitants, qui
doivent constamment affronter leur nature impitoyable. Les Orcs y
prospèrent aux côtés d’autres êtres et créatures encore plus féroces.
CAVALIER ORC (RIVAL)
Les cavaliers à dos de lézards de la Tribu de la Grande Bête, ou Mag
Ugluk Urak, sont des guerriers aussi dangereux que n’importe quelle
cavalerie de Mennara. Orcs nomades qui chassent le cerf et autre gibier
sauvage dans les Plaines Brisées, ils mènent souvent une vie assez simple
de chasseurs-cueilleurs. Suivant l’exemple de leur noble chef, les Orcs
du Mag Ugluk Urak sont d’une honnêteté brutale et tiennent toujours
parole. Ils ne tricheront jamais lors d’un échange, ne poignarderont pas
un allié dans le dos ni ne se désisteront après avoir fait une promesse. Si
cette promesse consiste à tuer un adversaire ou à massacrer un ennemi,
il ne fait aucun doute que celui-ci n’en réchappera pas.
Généralement armés de haches et de lances, entraînés à porter
des attaques à grande vitesse, les cavaliers atteignent leur efficacité
maximale lorsqu’ils chevauchent leurs Gurak Tols. Les Orcs nouent
des liens indéfectibles avec leurs montures lorsqu’ils les dressent.
Cependant, les Gurak Tols ne sont jamais complètement apprivoisés,
et les cavaliers prennent bien soin d’éviter de s’approcher trop près de
la gueule de ces bêtes toujours affamées.
201
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
mes chers futurs enfants, j’a i longtemps hésité
à vous raconter cette histoire.
Maintenant que je suis loin des Terres des
Confins, tout cela semble trop irréel pour être vrai, plus
une fable qu’un fait, dont il est sûrement plus facile de rire
en plein jour. Mais quand le soleil se cache et que l’obscurité
envahit le ciel, je me souviens du village si bien nommé de
Coucher de Soleil.
Quand la nuit se tait, si silencieuse que je ne perçois plus
que les battements de mon cœur et que je sens le sang courir
dans mes veines, j’entends alors clairement ses paroles – quand
je parviens à entendre le sang comme elle l’a décrit, alors je
plonge au pays du sang et de la terreur.
‰‰‰‰‰
J’avais voyagé en suivant les limites de la baronnie de Kell,
encore une des étranges frontières séparant ces terres. On
m’avait dit qu’une ancienne route me conduirait dans un village
peuplé de sages, supposés connaître la magie des pierres.
L’ambiance dans cette région semblait très tendue, comme si
ses habitants s’attendaient à ce qu’une calamité les frappe ou
qu’un monstre les dévore au moindre instant d’inattention.
Je traversai une large rivière, laissant derrière moi les champs
pour entrer dans des terres sauvages à la végétation exubérante.
Le passage devint de plus en plus incertain, déteignant sur
mon esprit qui se mit à vagabonder.
J’étais véritablement anéanti et regrettais amèrement que ma
quête ait pris une telle direction. J’avais soif d’espoir comme
un voyageur perdu depuis une éternité dans les sables infinis
qui entourent nos villes rêve d’une eau salvatrice.
La mélancolie m’envahit, et je fus de nouveau tenté de
simplement partir avec mes deniers restants et la pierre
céruléenne, et d’abandonner mon Calife, son intelligence puisse-
t-elle toujours déjouer les machinations des Djinns, puissent-
ils être à jamais vaincus.
Ainsi ne remarquai-je pas que la route jusqu’alors pavée
était maintenant faite de terre battue, simple chemin piétiné
à travers la végétation. J’avançai tout de même ; après
seulement quelques instants, je ne savais déjà plus si je suivais
bien le sentier. La région était sauvage et déserte ; je passais
devant de grands forts, des ruines croulantes dont l’ancienne
majesté avait disparu à tout jamais.
204
Enfin, alors que le ciel devenait sombre, je vis au loin un petit
village, guère plus qu’un hameau. Il m’offrirait un abri pour la
nuit, et je remerciai le ciel d’apporter son aide au fou que j’étais.
J’entrai dans le premier établissement qui me sembla ouvert, les
lumières vacillantes guidant mes sandales sur le sol accidenté. Des
rires moqueurs accueillirent mes questions alors que je m’enquérais
de gens sages susceptibles de connaître les pierres, ou du moins la
magie. Bien que l’endroit fût plein de clients, personne n’accepta
de me parler, même quand je proposai d’offrir la prochaine
tournée. Et pourtant, l’apparence de certains était si misérable
que je pensais mon offre irrésistible. Enfin, la femme derrière le
comptoir attira mon attention et me fit signe de la rejoindre.
Son apparence s’accordait aux lieux ; comme la taverne,
le village, et même les terres alentour, elle était dure et
intransigeante. J’avais le sentiment qu’elle avait entendu parler
beaucoup de voyageurs, et j’espérais apprendre des choses qui
faciliteraient mon périple.
« Oh, homme des Scindeterres, vous avez l’a ir perdu »,
commença-t-elle avec un air légèrement amusé. Elle continua
à sécher une rangée de tasses avec son épais chiffon, ses mains
protégées par de gros gants. « Nous n’avons pas beaucoup de
visiteurs dans le coin. Mais vous me rappelez quelqu’un qui
s’est perdu par ici, il y a des années. »
Je répondis qu’il était tout à fait possible que je ne fusse pas
arrivé à l’endroit où je souhaitais me rendre, et lui parlai de
ma quête pour apprendre la magie de cette terre. « Cet
autre voyageur connaissait-il la magie ? Et les pierres de
pouvoir ? ajoutai-je dans un murmure.
– Elle a appris la magie, oui, me répondit Garda (car ainsi
se prénommait-elle, chose qu’elle ne me révéla que plus
tard, quand la nuit eut largement dépassé son apogée et qu’elle
laissait place au jour). Peut-être qu’elle en a trop appris, c’est
à vous de voir. Je peux vous raconter une histoire. Elle a des
chances de vous intéresser, homme des Scindeterres. »
Je poussai une première pièce vers elle en échange d’un
gobelet d’un breuvage chaud, puis d’un second. Garda s’assit
sur un tabouret et commença son récit, que finalement j’aurais
préféré ne jamais entendre.
‰‰‰‰‰
« Elle n’a jamais dit d’où elle venait ni pourquoi elle était
partie si loin dans les Terres des Confins. Elle était presque
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
dans les Steppes du Ru. Peut-être qu’elle cherchait des cadavres
à dépouiller, car il y en a toujours un paquet là-bas. Peut-être
qu’elle était sur la piste du Royaume Creux, ou d’un temple
elfique oublié, ou même de trésors perdus qu’une horde de
Dragons avait volés quand ces monstres ont failli brûler le
monde dans le temps. Des trésors comme cette jolie pierre
bleue que vous avez. Oui, je l’a i vue. Ne vous inquiétez pas, je
n’a i aucune intention de vous la prendre.
Selon moi, elle voulait échapper à quelque chose. Elle avait
peut-être déserté l’armée des Daqan, ou fui ce fou d’ Edlund ;
c’était peut-être une voleuse à la tire qui ne voulait pas passer
quelques années en prison, qui s’était sauvée d’une des cités de
la baronnie et qui avait une longueur d’avance sur la garde. Elle
a peut-être eu de la chance, mais la chance s’épuise vite dans
les Terres des Confins. Comme ses pièces étaient en bon argent
(ou en mauvais or), je n’a i jamais posé de questions. Je trouve
plus drôle d’imaginer l’histoire des gens, parce que la vérité
est toujours plus sordide que ce qu’on pense, n’est-ce pas,
homme des Scindeterres ?
C’est une patrouille venue d’un donjon sans nom qui l’a
finalement attrapée. Ils lui ont passé un sac sur la tête,
l’ont attachée avec une corde, et offert un aller simple pour
la potence. Elle a dû penser que c’était le pire jour de sa
misérable vie. Mais elle a été bien vite détrompée.
Soudain, des cris ont retenti, les soldats hurlaient des ordres en
tous sens. Puis ça a été le chaos autour d’elle, les beuglements
de ses ravisseurs se mêlant au fracas du métal contre les
armures, et au sinistre bruit de l’acier qui transperce la chair.
Le calme est finalement revenu. Quand le sac a été retiré et
qu’elle a vu les horreurs qui l’entouraient, elle a hurlé.
Elle a découvert des créatures qui avaient probablement été
autrefois des Humains, dont les chairs, transpercées d’éclats
jaillis de leurs propres os, avaient pris la teinte grise de la
pierre. Des pointes saillaient de leurs crânes lisses, de leurs
bras, et même de leur dos. Ils ne portaient en guise de
vêtements que des bandes de tissu déchiré, peut-être déjà
rouge à l’origine, maintenant cramoisi à cause des éclaboussures
de sang. La puanteur était insupportable, leurs bruits rauques
qu’ils émettaient meurtrissaient ses oreilles.
Elle s’est souvenue de légendes qu’on n’osait que murmurer. Les
Locustes. Les Premières Ténèbres. Les Uthuk.
L’une des horreurs des Terres Sombres, libre
interprétation de ma part suite au récit de Garda.
Elle hante mes rêves depuis cette nuit-là.
Il y avait des corps partout, quelques créatures étaient mortes,
mais elle voyait surtout les cadavres des gardes, du moins ce
qu’il en restait.
Les autres survivants ont été ligotés comme elle, et emportés
comme on conduit des bœufs à l’abattoir.
Elle était terrifiée, mais parvenait encore à réfléchir et à se
demander pourquoi ils n’étaient pas tous déjà morts. Elle
distinguait quelque chose dans les yeux des gardes, eux savaient
pourquoi. Et ils étaient complètement terrifiés. Certains
essayaient de s’é gorger sur les lianes pleines d’épines avec
lesquelles ils étaient ligotés, dans l’espoir d’avoir une mort plus
clémente que ce qui les attendait. Aucun n’a eu cette chance,
ils n’ont réussi qu’à s’entailler douloureusement la gorge sous les
yeux amusés des Uthuk, qui hurlaient et chantaient pour les
encourager dans leurs efforts désespérés.
Les Uthuk les ont transportés à travers les Terres des Confins,
puis ils se sont dirigés vers le nord, dans les Landes de Charg’r
– mais ça, elle l’a découvert plus tard. À l’époque, elle n’avait
aucune notion de la distance parcourue ou du nombre de jours
écoulés. Ils ne s’arrêtaient jamais. Ses compagnons d’infortune et
elle dormaient brièvement, comme ils pouvaient, de jour comme
de nuit, malgré les cris, leurs esprits épuisés s’effondrant comme
des arbres coupés. On ne leur donnait ni eau ni nourriture, et
seule existait cette marche inexorable pour s’enfoncer toujours
plus profondément dans une terre maudite.
Après que le soleil s’est couché derrière un rocher d’un rouge
sombre, de terribles ombres ont obscurci le ciel nocturne qui
dominait ce paysage torturé. Les cieux ont été striés d’éclairs,
offrant une brève image, toujours
différente, des formes
surnaturelles alentour.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
Des cris assourdissants ont éclaté au loin, et les rugissements
de centaines, peut-être de milliers d’ Uthuk ont retenti en
réponse. Et ce dialogue s’est répété sans fin, lui semblait-il,
comme si ces cris les rendaient toujours plus assoiffés de sang.
La survivante n’a jamais rencontré les créatures à l’origine de ces
cris ; elle avait déjà été témoin de tant d’horreurs qu’elle était
heureuse d’avoir échappé à celle-ci, comme elle me l’a dit.
Le long du chemin, des troncs d’arbres et des piquets de métal
rouillé étaient plantés dans le sol, tous ornés de crânes et
d’icônes sculptées, recouverts d’éclats d’os et de dessins faits
avec du sang frais. Elle ne savait pas si ces constructions
servaient à faire peur aux intrus pour les faire rebrousser
chemin, à marquer la limite d’un territoire, ou si elles
avaient été érigées en souvenir de conquêtes passées. Les autres
survivants et elle feraient-ils partie d’une nouvelle structure
comme celles-ci ? Finalement, ils ont contourné l’un des
nombreux pics rocheux et sont entrés dans le village.
Tout en angles et en pointes, le village était aussi torturé et
effrayant que ses ravisseurs. Il était composé principalement de
simples huttes, des peaux d’animaux tendues sur des piquets
de bois ; de grandes cornes et de gigantesques cages thoraciques
d’animaux supportaient de plus grandes structures. Des fosses
profondes contenaient des feux dont les flammes jaillissaient vers
le ciel comme des oiseaux prédateurs.
Les structures qui se trouvaient dans
le village étaient ornées de crânes
plus récents.
Elle voyait maintenant d’autres
Uthuk, tous plus atroces
les uns que les autres.
Certains avaient des
os qui émergeaient
de leur dos et les
rendaient deux fois plus
grands. Tous s’étaient
parés de tissus sanglants et
d’ossements pour célébrer
l’arrivée de ses ravisseurs.
J’espère ne jamais voir une de
ces horreurs, car cela signifierait
sûrement que je me serais égaré
en territoire Uthuk.
206
D’énormes monstruosités aux membres déformés erraient çà et
là, molestant négligemment des Uthuk moins forts qu’eux. Les
prisonniers ont défilé jusqu’au centre du village, poussés par les
hurlements de leurs tortionnaires et de leurs congénères ; dans
ce vacarme sans fin, à chaque fois qu’elle osait regarder, elle
découvrait une nouvelle atrocité, mais le pire restait à venir.
Oui, homme des Scindeterres, elle a affirmé qu’il y existait
quelque chose d’encore plus terrible. Quelque chose de
profondément malsain imprégnait ce lieu, au-delà des horreurs
qui l’entouraient. Elle m’a raconté que c’était comme si la
puanteur de l’air s’épaississait, comme si le sol rocheux devenait
plus tranchant, les sons plus perçants. Parfois l’air enfumé au-
dessus des fosses à feu se tordait comme si des choses volaient à
l’intérieur, même si on ne voyait rien. Il est possible que tout
ceci ait été le fruit de son imagination épuisée, de sa fatigue
devenue insoutenable, mais elle a énormément insisté là-dessus,
comme si c’était encore plus important que l’attaque des Uthuk.
Croyez ce que vous voulez, homme des Scindeterres.
Leur voyage s’est finalement achevé près d’une pierre plate
dont la surface était teintée de brun sombre. Là, ils ont été
jetés dans une cage grossière, faite d’os courbés attachés par des
lianes épineuses ; de grosses chaînes entravaient leurs poignets.
Les armes de la patrouille et les maigres possessions de la
survivante ont été jetées sur un grand tas de bijoux étincelants
et de lames aux reflets d’argent qui scintillaient à la lueur du
feu. La femme a reconnu quelques runes naines sur certains
objets, et, d’après ses descriptions, j’a i compris qu’ils étaient
très vieux et très puissants. Il y avait également une pierre
qui brillait et portait une rune qu’elle ne m’a jamais décrite,
mais j’imagine que ça vous rappelle quelque chose, hein ?
Elle n’a jamais beaucoup parlé de ce qui s’est passé ensuite.
Un par un, les prisonniers ont été choisis et emmenés vers
la pierre plate. Le sang coulait, les chants résonnaient, et la
présence malsaine et maléfique dans l’a ir devenait plus forte.
Jusqu’à ce qu’elle disparaisse, jusqu’à ce que les feux s’éteignent
et que la fumée se dissipe dans les cieux.
Quelque chose a dû mal tourner, cependant, des paroles ont
été mal prononcées ou le dessin d’une icône était imparfait.
La chose n’était pas apaisée, malgré les sacrifices offerts. Tout
ce que la prisonnière savait, c’est que personne ne pouvait
la voir à travers les épais nuages noirs qui avaient envahi tout
le village. Elle est parvenue à s’emparer d’un poignard en os,
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
tombé par hasard à côté de la cage. Une douleur aiguë a alors
envahi sa main, encore plus intense que celle qui consumait sa
jambe, puis elle a été libre. Elle avait parcouru de nombreuses
lieues quand les cris ont enfin cessé ; mais certains cris ne vous
quittent jamais vraiment, n’est-ce pas ?
‰‰‰‰‰
Et puis un jour, elle est arrivée ici, homme des Scindeterres,
il n’y a pas si longtemps de ça. Elle boitillait en s’appuyant sur
un bâton de bois noirci, couvert d’icônes, une jambe coupée au
niveau du genou et pansée avec des chiffons brunâtres pleins de
croûtes. Elle était maigre et misérable, mais avait encore assez
de force pour porter une lourde bourse.
Un seul des petits objets qu’elle contenait, même le plus
insignifiant, suffisait à payer le gîte et le couvert pour plus
d’une nuit. La femme a prétendu qu’elle possédait de plus
grands trésors, bien cachés au-delà des Terres des Confins.
Certains ont essayé de la suivre quand elle est partie les
récupérer, mais personne n’est jamais revenu. Tous ses trésors
sont peut-être encore cachés là-bas ? Peut-être qu’elle retire
parfois quelques objets pour payer de quoi écarter toute
menace qui pourrait venir ici ?
Tout ce que je sais, c’est qu’elle m’a donné assez d’argent pour
s’assurer de vivre à l’abri du besoin sous mon toit. Elle reste
seule et s’est entourée de suffisamment de mercenaires pour
qu’on la laisse tranquille. Une fois par mois, un visiteur vient
la voir. C’est parfois quelqu’un qui l’a déjà rencontrée, parfois un
nouveau visage, mais ils ont tous le même air avide. Et cette
convoitise est toujours remplacée par de l’émerveillement et une
certaine plénitude quand les visiteurs repartent. Qui sait quels
trésors ils emportent, quels objets de pouvoir ils acquièrent,
quelles anciennes reliques leur appartiennent désormais ? Ce qui
m’importe vraiment, c’est ce qu’ils laissent derrière eux, car leur
argent finit invariablement dans ma poche avec le temps.
Quant à la femme, l’unique survivante de l’attaque… Une
parmi Kellos sait combien… Elle reste seule, regarde ses jours
passer, et essaye d’oublier. Elle n’a jamais voulu consulter
d’apothicaire ou de magicien pour qu’il s’occupe de sa jambe,
elle dit que la partie manquante appartient à une autre vie
maintenant, et qu’elle ne fait pas confiance à la magie qui
pourrait « réveiller la chose ». Ce sont ses propres mots,
homme des Terres de Scindes, ses propres mots.
Une fois, je lui ai demandé pourquoi elle ne quittait pas ce
taudis pour partir vivre loin d’ici. Elle a fixé le contenu de sa
207
tasse en murmurant qu’il n’y a nul endroit où se cacher quand
ils viennent. Quand les Locustes reviendront, le monde entier
brûlera, notre sang et nos os seront offerts en sacrifice. »
‰‰‰‰‰
« Voilà, homme des Scindeterres, finit Garda, j’a i terminé.
Un conte des Terres Sombres, plein d’horreurs et de trésors.
C’est une histoire qui vaut le coup d’être racontée à d’autres au
cours de vos voyages à travers Terrinoth, n’est-ce pas ? »
Je répondis que c’était en effet un conte impressionnant, digne
d’être répété. Je lui donnai une autre pièce de monnaie, plus
épaisse cette fois-ci, et demandai une chambre pour la nuit.
Devant vous, mes enfants, je peux le reconnaître, et je le dois
par honnêteté, celle d’un digne serviteur du Calife, que son
règne perdure plus d’années que le désert ne compte de grains
de sable, je préférerais oublier cette histoire. Imaginer que de
telles choses existent, malgré toutes les autres terreurs que j’a i
connues sur ces terres au-delà des sables où vous naîtrez, est
une chose terrible sur laquelle je n’a i pas envie de m’attarder.
Et ce n’était le récit que d’une seule attaque, raconté par
l’unique survivante. Combien d’autres n’avaient laissé aucun
témoin ? Combien sont perdus à jamais, noyés dans le sang ?
Pourtant, cette histoire, je l’ai transmise à d’autres, car elle
demande à être contée, à se répandre sur ces terres, à la fois
comme avertissement et comme appât. Peut-être était-ce le but
de Garda ? Peut-être quelques autres voyageurs la racontent-ils
également, ou sont-ils assez courageux pour braver les landes et
tenter de s’emparer de ces trésors ? Une telle histoire, avec tout
ce qu’elle implique, effraiera beaucoup de gens, mais il y aura
toujours des êtres qui sont prêts à tout pour de l’or, qui aiment
l’aventure ou qui désirent rendre justice. Et plus de personnes
seront au courant, plus il y en aura qui seront susceptibles de
combattre, pour une raison futile ou non, de telles horreurs.
Je n’a i jamais demandé à Garda comment la malheureuse de
son histoire était parvenue à retrouver son chemin à travers les
landes. Mais je me souviens que les doigts de l’un de ses gants
épais ne semblaient jamais se plier, et je revois la raideur de
ses déplacements derrière le comptoir. Je me souviens aussi du
globe en verre épais contenant des os ébréchés et des dents qui
trônait dans un coin.
Je suis donc content de ne pas avoir demandé. Elle avait une histoire
à raconter, mais la personne qui la racontait n’était pas celle qui
l’avait vécue, et je ne comprends que trop bien la différence.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LES STEPPES DU RU ET AU-DELÀ
L es vastes Steppes du Ru et la contrée effrayante qui s’étend
au-delà marquent la limite orientale de Terrinoth. Pour les
non-initiés, ces territoires ressemblent plus ou moins à un terrain
vague, simple endroit où les confins du monde civilisé se fondent peu
à peu dans le néant. Et pourtant, les plaines hurlantes et les terres
inhospitalières couvertes de nuages de poussière cachent des horreurs
aussi anciennes que Terrinoth, certaines enfouies et n’attendant que
d’être découvertes, comme les vestiges du royaume perdu de Llovar,
d’autres tapies dans l’ombre, impatientes que leur heure sonne,
comme les tribus grouillantes d’Uthuk. Certains prétendent que les
prochaines Ténèbres qui engloutiront le monde sont déjà à l’œuvre
dans cette région abandonnée ; chaque jour le ciel des Steppes du Ru
s’assombrit à mesure que la tempête approche.
De toutes les régions sauvages de Terrinoth, peu sont aussi hos-
tiles ou dangereuses que les Terres Sombres ; les héros audacieux
ont néanmoins de nombreuses raisons de s’y aventurer. Ceux qui
cherchent à s’emparer des butins et des richesses de temps oubliés
fouilleront les ruines du Fort du Val-Creux, la Sépulture des
Lamentations ou le Royaume Creux, ces lieux d’où l’on tenta en
vain de faire régner la loi sur les Steppes. Les vertueux et les braves
se rendront dans les Terres Sombres pour défendre les frontières de
Terrinoth ; les aventuriers se joindront peut-être à des patrouilles
venues des baronnies des Daqan pour pourchasser les pillards Uthuk
loin sur leur propre territoire, ou chercheront la source du Lacis, le
bois de ronces qui ne cesse de s’étendre. Pour les plus courageux, les
Terres Sombres des Steppes du Ru offrent une chance de découvrir
et peut-être même d’endiguer les Ténèbres à venir, et de porter le
combat chez les tribus Uthuk, qui ont commencé à se rassembler.
Ils chercheront la Citadelle Noire et le pouvoir perdu de Llovar, ou
affronteront les seigneurs de l’Ynfernael et tenteront de refermer les
passages qu’ils utilisent pour traverser le voile.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LES TERRES
DES CONFINS
Délimitées par les baronnies des Daqan, l’Aymhelin (la forêt sacrée
des Elfes Latari) et les territoires des tribus orques des Plaines Brisées,
les Terres des Confins marquent la fin du Terrinoth civilisé. Ici, les
fertiles terres agricoles, les forêts épaisses et les collines verdoyantes
cèdent la place à des prairies nues qui semblent s’étendre sans fin dans
toutes les directions jusqu’au sombre horizon. Les villages suffisam-
ment têtus pour survivre ici ne sont que de pâles reflets des villes et
des remparts de l’Ouest ; les habitants passent leur vie à craindre ce
qui pourrait surgir des régions orientales. D’anciens forts se dressent
toujours, dignes sentinelles, le long des Terres des Confins, sans qu’on
se souvienne vraiment de leur utilité.
Le Bastion de Méditerre, le plus grand de ceux qui gardent les fron-
tières des baronnies des Daqan, se dresse à la croisée des chemins entre
l’est et l’ouest ; de nombreux héros y ont leur premier aperçu de ce
qui les attend dans les Steppes du Ru. Méditerre est une forteresse
solide et bien entretenue autour de laquelle les villages se regroupent
pour bénéficier de la protection de ses murs, en dépit de sa mau-
vaise réputation. Une affectation ici constitue une punition classique
dans les armées des baronnies. Les barons qui souhaitent se débar-
rasser d’aventuriers gênants ou de rivaux leur écrivent généralement
une lettre de recommandation adressée au commandant du donjon,
Edlund, ou leur accordent une charge de défenseur de la partie orien-
tale du royaume. Edlund, que ses soldats appellent le « Général Fou »,
est l’exemple type de l’affaiblissement des forces armées à l’est des
baronnies. Il y a des années, après son heure de gloire dans les guerres
contre les clans orcs du Sud, Edlund fut affecté à Méditerre ; il était
alors convaincu que lui seul pourrait soumettre les Terres des Confins.
Cependant, pendant l’une de ses premières batailles, la lame empoi-
sonnée d’un Uthuk lui transperça le flanc, et le venin de l’Ynfernael le
rendit fou. Dorénavant, il est obsédé par la recherche de la légendaire
Cité de Sang des Uthuk, dont l’existence lui aurait été révélée dans
ses rêves fiévreux ; chaque fois guidé par sa dernière vision en date, il
envoie régulièrement des soldats dans les landes.
Les Terres des Confins sont également un nid de chasseurs de
primes. Malgré la présence des forts et des tours de guet, des monstres
surgissent constamment pour envahir les contrées ouest ; les villes et
les seigneurs offrent toujours des récompenses pour leur extermina-
tion. Les aventuriers qui acceptent de telles propositions sont amenés
à traquer des meutes voraces d’écorcheurs, des charognards nocturnes,
chétifs mais agressifs, ou d’énormes Wyrms de l’Ynfernael, habituel-
lement en suivant la piste des massacres que de telles horreurs laissent
dans leur sillage. Certains individus plus audacieux paient pour leur
capture plutôt que leur extermination ; le Carnaval Ambulant des
Horreurs de Calivar tire un bon profit des créatures exotiques captu-
rées dans les landes.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

Certains dangers ne sont pas aussi faciles à définir ou à éradi- Toutefois, la véritable richesse de l’empire perdu demeure cachée,
quer. C’est le cas du fléau connu uniquement sous le nom de Lacis. attendant ceux qui parviendront à résoudre l’énigme de ses ruines et
Bois d’épines vivant, il s’étend depuis les ruines d’Athealwel, une à découvrir sa capitale mécanique, que les Nains auraient enfouie au
forteresse elfique abandonnée au fond de la steppe, où des Elfes cœur de la terre lors des derniers jours de l’empire.
voueraient un culte à l’Ynfernael. Le Lacis a répandu ses ronces sur
Les Nains ne sont pas les seuls à avoir laissé leur empreinte sur les
de nombreuses lieues pour finalement engloutir les villages et les
Steppes du Ru. Elles furent le refuge de clans de sorciers et le repaire de
campements environnants comme une créature maléfique ; elles
criminels endurcis. Le Bois des Tourmenteurs, forêt pétrifiée envelop-
commencent même à empiéter sur l’Aymhelin et les comtés de l’est
pée d’une ombre éternelle, marque le lieu de repos des Sept Pécheurs,
de Kell. Quand la lune est sombre, le Lacis grandit plus rapidement
des magiciens au pouvoir singulier bannis par de vertueux habitants
encore ; toute la nuit se livre alors une longue et sanglante bataille
des baronnies des Daqan pour leur cruauté. Tués et enterrés par leurs
pour défendre des villes contre ses vrilles envahissantes, et combattre
serviteurs, les magiciens défièrent la mort et se relevèrent sous forme de
les bêtes d’ombre qui se tapissent dans les ronces. Edlund, parmi
grands chênes maléfiques. Ces arbres conscients exsudent les ténèbres,
d’autres seigneurs, est continuellement à la recherche de braves pour
faisant du bois un terrain de chasse idéal pour les prédateurs. Des
s’aventurer loin dans les Steppes du Ru, et même dans les ruines
mirages de refuges créés par les Sept attirent les proies, y compris les
d’Athealwel, pour identifier et détruire l’origine du Lacis, qui serait
voyageurs ; leur sang nourrit les arbres lorsque les bêtes les dévorent. La
un dieu-arbre démoniaque, si l’on en croit les rumeurs. Jusqu’à pré-
richesse des Sept reste enchevêtrée dans leurs racines, n’attendant que
sent, aucun n’est revenu d’une telle quête, et chaque année le Lacis
des héros assez audacieux pour traverser l’obscure forêt, affronter les
étend ses épines plus à l’ouest.
nombreux monstres qui s’y cachent, puis les arbres eux-mêmes.
Le mal se cache partout dans les Steppes du Ru. D’innombrables
LES STEPPES DU RU grottes et terriers abritent des bêtes monstrueuses et autres horreurs

ET LES TÉNÈBRES
chassées des terres voisines. Les Grottes de Tremblecroc, peut-être les
plus connues, ont une si sombre réputation que même les Uthuk ont
appris à s’en méfier. Ces grottes sont la demeure d’un Dragon mutilé,
Au-delà de l’horizon des forts et des tours de guet, là où la végéta- laissé pour mort pendant les Troisièmes Ténèbres. Le monstre a perdu
tion est torturée par les vents incessants, commencent les véritables ses ailes et rampe maintenant dans l’obscurité de sa vaste tanière, sor-
Steppes du Ru. Ici, des crêtes et des ravins accidentés, des plateaux tant exceptionnellement pour dévorer une proie, ou la rapporter dans
désertiques et les fonds de lacs asséchés cuisent sous un ciel rouge son repaire et la manger plus tard. D’innombrables trésors sont épar-
sang. Là est le territoire de chasse des Uthuk, où ils viennent verser pillés dans ces grottes remplies de cadavres, enfouis parmi les restes de
le sang et attendre le grand chef qui les unira pour obtenir la ven- grands héros, mêlés aux corps pourrissants de Sorcières de Sang et de
geance tant attendue. Bien que les sauvages pillards Uthuk et leurs créatures de l’Ynfernael.
impitoyables sorciers représentent un péril
constant, les Steppes du Ru, témoins de
plus de guerres et de mort que toute
autre terre, cachent de nombreux
LES LANDES
secrets dans leurs entrailles. DE CHARG'R
Bien avant l’avènement de
l’Essaim de Locustes, une tribu de Dans le Nord des Steppes du Ru, la maigre
Nains y construisit un empire. Les végétation cède la place à un sol pierreux, à
ruines de ce royaume, qui s’effondra des dunes de schiste et des collines en dents
avant les Premières Ténèbres, sont de scie. Des orages secouent constamment
connues seulement sous le la terre, et la foudre embrase le ciel alors que
nom de « Royaume Creux », le cri triste du vent déchire l’air. Les Terres des
l’histoire ayant oublié son Confins sont une contrée d’abondance verdoyante
véritable nom. Ici et là, comparée à ce sinistre désert de pierre et de tempêtes.
des bornes sur les che- Les habitants de Terrinoth l’appellent les Landes de
mins portent des ins- Charg’r ; peu de villages sont parvenus à s’y établir.
criptions en runes naines Aux abords des landes se dressent des cités de Nains
pour indiquer la direction du Dunwarr dédiées à la fonderie. Les Nains pillent
de cités qui n’existent plus, de les réserves naturelles de quartz de foudre, une
ponts qui enjambent des rivières pierre chargée utile pour les armes comme les
asséchées ou de forêts de piliers outils, qui n’existe qu’ici. Passées ces quelques
qui soutenaient autrefois de grands étincelles de civilisation, on ne trouve plus que
temples. Marchands et érudits les monstres les plus résistants et les ermites les
paient un bon prix les artefacts du plus excentriques, qui vivent dans des abris
Royaume Creux, car leur concep- souterrains pour se protéger de l’infinie
tion est souvent exceptionnelle. cruauté du climat.

210
 L’une des rares choses qui persistent dans la désolation est
le sentier sinueux appelé Voie des Crânes. La légion perdue de
Waiqar parcourut ce chemin lors de sa malheureuse incursion
dans les Terres Sombres des Steppes du Ru. Waiqar perdit un
soldat à chaque pas ; on prétend que ces âmes damnées errent
encore sur la Voie, leurs crânes aux sinistres sourires et leurs os
blanchis traçant le chemin de la Citadelle Noire, la forteresse
disparue de Llovar et de son ost de l’Ynfernael. Le sentier
recèle également de nombreux trésors. En suivant les chu-
chotements des guerriers morts, un aventurier peut retrou-
ver d’anciens artefacts venus d’Al-Kalim et d’autres terres
lointaines ; si les voix sont celles d’esprits malveillants, il
découvrira plutôt les mâchoires de bêtes affamées.

LES TRIBUS
DES UTHUK Y'LLAN
Traverser les Terres Sombres, c’est entrer dans le monde
des Uthuk Y’llan et de leurs alliés de l’Ynfernael. Sous la
lumière funeste dispensée par la Flèche de la Ruine, l’obscur
cœur des Terres Sombres, les tribus règnent sur cette terre
maudite. Il existe de nombreuses tribus Uthuk, chacune née
des diverses branches de l’ost morcelé de Llovar, mais cer-
taines se démarquent par leur taille et leur férocité.
Les membres de la tribu des Griffes de Sang sont les plus
grands et les plus agressifs des Uthuk, leurs ongles aiguisés et leurs
mains cramoisies les distinguent de leurs congénères. Descendants
du prophète Golreth, ils gardent vivantes les légendes de Llovar et
des maîtres de l’Ynfernael. Des siècles de secrets ont été conservés
par les sorcières de cette tribu sur des pages de peau écorchée. S’étant
autoproclamés héritiers de l’Essaim de Locustes, les sorcières et les
démonistes de la tribu des Griffes de Sang s’efforcent d’unir toutes
les tribus Uthuk et utilisent leur magie démoniaque pour rassembler Hormis ces trois tribus majeures, des dizaines d’autres errent dans
des armées, forger des alliances et faire progresser la vengeance de les Terres Sombres des Steppes du Ru. Grottes immondes aux murs
leur peuple. couverts d’écritures griffonnées, temples branlants fabriqués avec les os
Les membres de la tribu de la Lignée Écorchée, eux, ne convoitent des innombrables victimes de sacrifices de sang, ou encore ruines mau-
pas la domination des Steppes du Ru. Ils cherchent plutôt à se rappro- dites vestiges de massacres abritent toutes sortes d’Uthuk. La Tour des
cher de la puissance du plan de l’Ynfernael. Les guerriers se mutilent Mains, la Cathédrale de l’Ynargal et les Grottes de l’Échine sont parmi
volontairement, puis versent dans leurs blessures du sang de démon les endroits honnis à propos desquels on chuchote dans les tavernes de
qui leur donne des pouvoirs surnaturels lorsqu’elles cicatrisent. Méditerre et de Havrefin. Tous ces endroits, sans exception, sont des
Descendants du cercle intime de Llovar, les sorciers de la tribu de la lieux funestes où l’air est imprégné de l’odeur du sang et où la corrup-
Lignée Écorchée détiennent de nombreuses clefs abandonnées après la tion semble sourdre de la terre. On ne sait presque rien des principales
disparition de leur maître, y compris celles censées ouvrir les portes de tribus Uthuk, car peu d’étrangers ressortent vivants des Steppes du Ru.
la Citadelle Noire. La quête de la Citadelle reste une obsession pour Les prisonniers emmenés aux Fosses d’Élevage d’Yyrg sont jetés dans des
la tribu ; bon nombre de ses sorciers sont convaincus que la trouver cages d’os pour être possédés par les esprits de l’Ynfernael et transformés
provoquera le retour de Llovar. en bêtes de guerre. L’opération est sanglante et douloureuse, comme
peuvent en attester les monticules de cadavres en décomposition qui
Les Hurleurs Nocturnes règnent sur les territoires proches des
entourent les fosses, chaque corps éventré de l’intérieur.
Terres des Confins et font partie des pillards les plus dangereux parmi
les Uthuk. Dans les profondeurs de Nyak Sutchra’aa, le Gouffre de la Le sort encouru dans le Puits des Péchés, enchevêtrement de ponts
Nuit Éternelle, ils ont perfectionné l’art des combats nocturnes afin de tombés au fond des Abysses du Gyrar, semble à peine moins cruel.
mener la guerre dans les ténèbres, leur peau et leurs armes recouvertes Dans cette grande fissure des Terres Sombres, cachés dans l’ombre
de poussière noire. Les Hurleurs Nocturnes se jettent sur leurs vic- fraîche de leurs cités des gouffres, les Uthuk viennent échanger des
times avec des cris de guerre qui les terrorisent, les laissant croire que esclaves et des âmes. La plus grande colonie Uthuk est le cercle de
la nuit elle-même a pris vie pour les attaquer. Les prisonniers ramenés camps de guerre autour de Kaylor Morbis. Jadis, au bord de ce lac,
au Gouffre de la Nuit Éternelle peuvent s’attendre à participer active- les anciens des plaines se réunissaient pour régler leurs différends et
ment à l’« entraînement » des membres de la tribu : lâchés dans des échanger des biens et des promesses. De nos jours, les Sœurs de Sang
souterrains sans lumière, ils doivent tenter de s’échapper tandis que règnent sur ce tribunal, réglant les conflits dans des combats rituels,
les Uthuk les traquent. rassemblant leurs forces et préparant l’invasion d’autres terres.

211
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
HAVREFIN
L es Terres des Confins ont toujours constitué un
refuge pour les êtres chassés par leurs pairs. Des cri-
minels ayant échappé à la justice de la Citadelle, des che-
valiers disgraciés, des magiciens désireux de conduire leurs
expériences loin des regards indiscrets, et d’innombrables
autres mécréants se réfugient sur cette terre pleine de dan-
gers. Beaucoup finissent par s’installer à Havrefin, une cité
de bandits construite sur les anciennes fondations d’une
forteresse naine qui protégeait une mine. Nul ne sait pour-
quoi la forteresse a été abandonnée, mais beaucoup sup-
posent, à cause des marques laissées par d’énormes griffes
et des profondes entailles dans la roche épaisse des niveaux
inférieurs, que les mineurs ont réveillé quelque chose de
terrible dans les profondeurs – quelque chose d’ancien et
d’affamé.
Cloaque de bâtiments en pierres grossières et de rues
tortueuses, Havrefin accueille les êtres méprisés et les
condamnés. Les voyageurs qui désirent se rendre plus loin
dans les Steppes du Ru passent souvent par cette cité pour
faire le plein de provisions et d’informations ; les plus avi-
sés gardent en permanence une main sur leur sacoche et
l’autre sur la garde de leur arme. Il n’existe pas de loi à
Havrefin, chaque quartier, chaque bâtiment constitue un
territoire avec ses propres règles. Au cœur de la ville, une
ancienne guilde au nom bien choisi de Creusor maintient
un semblant de commerce officiel et s’occupe des achats
et des ventes des richesses collectées dans les Terres des
Confins, tandis que les fosses de combat de l’Orc Xor
offrent une chance de gagner ou de perdre de l’argent… et
peut-être aussi quelques dents.
La Chapelle Silencieuse est peut-être le lieu le plus inté-
ressant de Havrefin. Les Silencieux, ordre de sorciers exi-
lés, y rassemblent les connaissances perdues et interdites
ainsi que des artefacts anciens, et meurtriers, qu’ils payent
un bon prix. Des rumeurs prétendent que les Silencieux
servent un maître de l’Ynfernael, et qu’ils ont l’intention
d’ouvrir une brèche dans le voile sous la ville avec les arte-
facts qu’ils acquièrent pour faire venir leur seigneur noir
dans ce monde.
212
UNE DÉCHIRURE
DANS LE VOILE
Non loin de l’endroit où Llovar commença son fatidique voyage dans
le T’mara T’rusheen, les premiers sorciers Uthuk Y’llan élevèrent la
Flèche de la Ruine pour célébrer la naissance de leurs pouvoirs démo-
niaques. On prétend que la Flèche favorise les projets de conquête
de ceux qui s’écorchent contre ses pierres aux arêtes acérées. Elle
ne fut jamais détruite, car personne ne la découvrit quand les ste-
ppes furent ravagées ; son emplacement est maintenant gardé secret.
Quand les Uthuk reconquirent leurs terres, ils cherchèrent la Flèche,
car les Sœurs de Q’aro Fenn affirmaient que sa redécouverte serait un
bon présage pour leur vengeance. De nos jours, ce passage entre les
mondes est encore ardemment recherché, par des individus puissants
comme par des groupes d’aventuriers, des magiciens ténébreux venus
des baronnies des Daqan, des nécromanciens à la recherche des secrets
de la vraie mort, et même des Djinns et des Dragons qui y voient un
moyen de restaurer la gloire de leur espèce.
Bien que beaucoup convoitent la puissance qu’offre cette faille,
atteindre la Flèche est une tâche presque impossible. Même les
Uthuk n’essayent qu’avec prudence, en suivant scrupuleusement
les conseils de leurs sorciers les plus puissants lorsqu’ils partent à
la recherche du lieu maudit. Les vents démoniaques passent par la
brèche dans la réalité, ses rafales dévastent les Terres Sombres ; à
mesure que les voyageurs se rapprochent, la terre elle-même se tord,
tourmentée par sa puissance. Tout devient alors possible. Dans les
vallées, des crocs monstrueux déchirent la terre, des nuages hurlent
leur haine et des rivières sortent de leur lit pour noyer ceux qui se
croyaient naïvement en sécurité sur leurs rives. Les monstres qui
errent près de la Flèche sont presque toujours possédés par des
démons qui submergent et consument leurs esprits bestiaux, ne lais-
sant que l’instinct de chasse et de tuerie. Les créatures naturelles se
mêlent aux surnaturelles et leurs gémissements affamés résonnent
alors qu’elles se lacèrent le corps et écharpent les autres dans un cycle
éternel de violence prédatrice.
La Flèche de la Ruine jaillit du sol comme une lance éperonnant
le ciel. À son extrémité, la faille dans le T’mara T’rusheen, le plan
des esprits et l’Ynfernael au-delà, scintille comme une étoile rouge et
aspire avidement l’air environnant et la terre en dessous dans sa gueule
béante. Par ce passage, il est possible de voyager entre les mondes, du
moins si l’on parvient à ne pas succomber face aux centaines d’hor-
reurs qui nichent dans le labyrinthe de tunnels de la Flèche, puis à
atteindre le grand autel situé juste sous la déchirure. La légende raconte
que si l’on parvient à franchir le seuil et à rencontrer un seigneur de
l’Ynfernael, on peut soit lui prêter allégeance, soit le tuer et gagner son
inimaginable puissance en retour. Bien sûr, ces mêmes légendes pré-
cisent bien que la déchirure n’est pas seulement une porte, mais la pre-
mière marche d’un chemin qui conduit à un nombre infini de lieux,
que ce soit les mondes miroirs torturés des seigneurs de l’Ynfernael
où se dressent leurs donjons brûlants, les obscures profondeurs où les
secrets oubliés des vivants viennent se cacher, ou les plans occultes où
la réalité et toutes les sources magiques peuvent être façonnées grâce
à un seul mot.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LES MURMURES
DE L'YNFERNAEL
Mennara est confronté à de nombreuses menaces, mais peu de ses
habitants connaissent celle qui guette à la fois hors du monde et
parallèle à lui, comme le reflet d’un miroir déformé. L’Ynfernael,
plan séparé de la réalité et constitué d’une énergie ignoble et infinie,
inondé d’une obscurité insondable, abrite des créatures surnaturelles
C
qui émergent de sa rage et de son désespoir absolus comme les requins
affamés surgissent d’océans agités.
Plan d’existence impalpable, alimenté par les actes les plus horribles
perpétrés dans le plan mortel, il tire force et rage des offrandes de
sang et des sacrifices. Personne ne comprend les desseins des créatures
impies de l’Ynfernael, on constate seulement que leurs actions font
écho au plan tourmenté dont elles sont issues. Depuis des siècles, les
terribles effets de leurs actes sur Mennara sont nombreux et toujours
visibles. Même les Larmes de Latariana ne furent pas préservées de
la corruption de l’Ynfernael ; les simples mortels et leurs œuvres le
sont encore moins. Sa puissance grandissant, l’Ynfernael souille tout
ce qu’il touche, et menace d’un jour transformer Mennara en un
immense et sanglant chaudron de mal à l’état pur.
LA MAGIE DE L'YNFERNAEL
À MENNARA
Les érudits de Havregris et d’ailleurs soutiennent que malgré sa nature
infâme, l’Ynfernael fait partie intégrante de toute forme d’existence.
D’autres croient simplement qu’il est la source de tout le mal qui existe à
Mennara ; ils imputent constamment chaque acte horrible et chaque tra-
hison à son influence sur les esprits désespérés et faibles. Ils soutiennent
même que les énergies de l’Ynfernael peuvent s’écouler en Mennara dans
les lieux où le voile entre les plans est plus ténu, et souillent la terre et
l’esprit de ceux qui vivent près d’elles, quelles que soient leurs intentions
ou leur force de caractère. Selon eux, accéder au plan des démons est
extrêmement dangereux et le risque encouru ne vaut pas le vaste pouvoir
qu’il peut conférer. Pour d’autres, cependant, seul compte ce pouvoir.
Les Uthuk embrassent pleinement l’Ynfernael, son ignoble éner-
gie habite chacun de leurs battements de cœur et chaque goutte de
sang versé. Il est la source de leur furieuse puissance depuis que Llovar
est devenu la proie des démons et a transformé les habitants des ste-
ppes en une horde affamée de Locustes. De même que le pouvoir
a corrompu et transformé leur chair, l’Ynfernael a déformé la magie
des Loth K’har. Les Augures de la Nuit, gardiens de la tradition des
Arpenteurs de Rêves, utilisent maintenant leurs aptitudes pour voya-
ger dans le plan obscur et communier avec les démons. Leur ancienne
capacité à lier les esprits entre eux dans une discussion harmonieuse
a été corrompue au point de devenir une méthode pour commander
et dominer les armées de Locustes. Ceux qui se sont élevés contre la
corruption de leurs anciennes traditions ont été détruits.
Depuis, les Uthuk ont perfectionné leur aptitude à voyager dans
l’Aenlong pour entrevoir le plan de l’Ynfernael et ses habitants. Les
créatures surnaturelles qui y vivent peuvent directement puiser dans
la puissance obscure de ce plan. Les plus puissants de ces démons
invoquent sans effort la magie de l’Ynfernael, car elle coule en eux
comme le sang dans les veines.
Les Uthuk ne sont pas les seuls à Mennara à utiliser la magie de
l’Ynfernael ; il semble que les Elfes Daewyl en fassent également usage. Ils
osent voyager dans les plans corrompus de l’Aenlong pour tuer les nom-
breuses créatures infâmes qui y résident, mais sont eux-mêmes souillés par
la noirceur de l’Ynfernael. Beaucoup de Daewyl font maintenant appel à
cette source de magie alors qu’ils combattent résolument le mal, sans tenir
compte des conséquences sur eux-mêmes ou sur leur entourage.
218
LES PJ ET LA MAGIE
DE L'YNFERNAEL
ertains PJ peuvent souhaiter en savoir plus sur la
puissance de l’Ynfernael, et même l’utiliser pour
gagner du pouvoir, bien que les conséquences soient clai-
rement visibles sur les habitants des Steppes du Ru aux
silhouettes contre nature. Notez cependant qu’il n’existe
pas formellement de talent ou de type de sort « magie de
l’Ynfernael » ; celle-ci est pratiquée grâce au talent Sombre
clairvoyance et à une utilisation créative des sorts de Divin
et de la compétence Connaissance (Interdit), exactement
comme pour la nécromancie. Le MJ et les joueurs doivent
déterminer quels usages des talents, des compétences et
des sorts existants reviennent à traiter avec les démons dans
leur campagne.
Les PJ qui souhaitent utiliser la magie de l’Ynfernael
peuvent le faire avec de nobles intentions. Pourtant, cela
ne peut en aucun cas bien se terminer, car l’Ynfernael
est tout simplement trop puissant pour qu’on lui résiste.
Antithèse de la force créatrice de vie, il n’est que destruc-
tion et corruption.
Les rites associés à la magie des démons sont aussi horribles
que les créatures elles-mêmes. Ils impliquent généralement
des sacrifices de chair et de sang, d’os et de peau. Aucun
rite n’est identique, car chacun s’appuie sur la haine, la pas-
sion et la rage propres au lanceur de sorts qui invoque les
êtres de l’Ynfernael ou communie avec eux. À la discrétion
du MJ, ces rites peuvent exiger des tests de peur pour résis-
ter aux images, sons et odeurs atroces qui en découlent.
Les PJ s’adonnant à la magie de l’Ynfernael peuvent rare-
ment cacher les conséquences de leurs pratiques pendant
longtemps. Sa nature corruptrice modifie leur chair, reflé-
tant la pourriture de leur âme. Ceux qui puisent trop dans
ce pouvoir ou qui plongent trop profondément dans ses
secrets se retrouvent souvent pourvus de cornes, de crocs,
de griffes, et même d’ailes au cuir épais. Plus les traits
de leur visage seront torturés, plus il deviendra difficile
de cacher leur corruption. Ces transformations peuvent
même survenir, dans une moindre mesure, en étant trop
longtemps exposé à des régions fortement affectées par
l’Ynfernael. Le MJ et le joueur devront discuter de ces
questions avant que les choses ne deviennent trop évi-
dentes pour les autres PJ, mais une des conséquences pour-
rait être que le personnage quitte l’aventure et devienne
une nouvelle Némésis pour le groupe.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

Les sorciers Arpenteurs de Rêves Uthuk opèrent de manière encore

plus obscure. Dans leur sommeil, ils arpentent l’Aenlong, traquant
leurs ennemis comme ils chasseraient le cerf et conversant avecles ter-
ribles êtres de l’Ynfernael. Ces interactions révèlent combien ils sont
dangereux – ils sont en effet les maîtres de sinistres rituels et de céré-
monies impies mêlant sang et hurlements.
LES TERRES CORROMPUES Lors de ces sacrifices, les sorciers implorent l’Ynfernael et invoquent
des démons dans Mennara. De telles conjurations requièrent parfois

L ’Ynfernael corrompt non seulement ceux qui puisent
dans sa magie, mais également la terre même de
certains lieux, là où le voile de la réalité est si mince que
l’Ynfernael peut s’écouler dans Mennara. Ces brèches
permettent non seulement aux démons de murmurer à
l’oreille des mortels pour les narguer, mais aussi de pervertir
l’environnement de la région. Les arbres se rabougrissent
et se tordent, adoptant des formes troublantes, les plantes
ont faim de chair et même les créatures les plus craintives
deviennent sauvages et assoiffées de sang.
Les Terres Sombres sont tristement célèbres car elles
abritent de tels lieux, des régions où la barrière est trop
fine, la plus infâme étant celle où Llovar arpenta un rêve
dans l’Ynfernael pour la première fois. Il existe également
d’autres régions à Mennara où la frontière est poreuse, des
endroits où eurent lieu d’horribles rituels, où se produi-
sirent des catastrophes, certaines à l’époque de la Guerre
de la Larme de l’Ombre. La magie de l’Ynfernael y est plus
forte, ce qui augmente le risque que des démons inter-
viennent dans les aventures en dehors des Steppes du Ru.
de longues semaines de consécrations et de mélopées incessantes plus
horribles les unes que les autres, afin de permettre aux créatures invo-
quées de s’incarner assez solidement dans le plan mortel pour qu’elles
soient difficiles à bannir. Être témoin d’un rite de ce genre est une
expérience terrifiante, d’autant plus s’il est fructueux. Les meurtrières
cérémonies que les Uthuk pratiquent généralement avant les batailles
sont plus rapides, mais ne permettent pas aux démons d’acquérir une
présence stable ; toutefois, ceux-ci suffisent généralement à paralyser
de terreur leurs adversaires, dont ils se repaissent ensuite.
Les sorciers évitent d’avoir un rôle trop visible pour garder leurs
pouvoirs secrets ; les cultes maléfiques se multiplient dans les terres
occidentales comme Terrinoth, Lorimor, et même Al-Kalim. Ils enva-
hissent sournoisement ces nations civilisées, s’infiltrent profondément
dans le ventre vulnérable de leurs ennemis pour l’empoisonner avec
la magie de l’Ynfernael. Grâce à leurs rituels sanglants, impliquant
souvent des habitants enlevés pour obtenir un effet plus puissant, ils
développent non seulement le pouvoir des Uthuk, mais ils renforcent
aussi la présence de l’Ynfernael.

LES SIGNES DE L'YNFERNAEL

Certains indices révèlent que la magie de l’Ynfernael s’était écoulée dans
Mennara en des temps plus anciens, mais il fallut attendre l’époque
de Llovar Lokander pour que son abjecte pratique se développe.
Bien que l’étude d’une telle magie soit totalement interdite, cer-
tains mages la considèrent comme l’obscure contrepartie de la
magie divine ; ainsi, comme l’Empyréen bénit toute magie bonne
et pure, l’Ynfernael renforce celle qui est horrible et funeste.
Par une faille oubliée, son influence s’est répandue dans les
Steppes du Ru, infectant à la fois leurs peuples et leur terre elle-
même. Les corps des Uthuk sont déformés et dotés de serres et
d’épines osseuses qui déchirent leur peau épaisse. Pour certaines
créatures, cette énergie corrompue est devenue le carburant
d’une magie redoutable, surtout pour celles qui devinrent
les premières Sorcières de Sang et Sorcières d’Os, dont les
veines sont emplies du riche sang démoniaque.
Une telle magie est puissante mais difficile à contrôler,
et parmi ceux qui sont nés avec un talent pour la manier,
beaucoup se détruisent en cherchant à la maîtriser. Les
sorcières de l’Assemblée du Sang surveillent attentivement
leurs progrès, et éliminent les faibles lors de rites doulou-
reux et de compétitions féroces. Les survivantes rejoignent
l’Assemblée comme apprenties ; une fois qu’elles ont pleinement
prouvé leur fidélité et qu’elles se sont montrées dignes de toutes
les bénédictions de l’Ynfernael, elles utilisent leur sorcellerie pour
terrifier et unifier les tribus en une horde implacable.

219
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LORIMOR ET LES TORUE ALBES
À l’ouest de Terrinoth s’étend une immense péninsule qui
s’avance dans les eaux d’un immense océan. Jadis marquées
par la trahison et la tragédie, ces terres sont depuis devenues des
bastions de civilisation et d’exploration. L’Empire de Lorimor, qui
occupe la péninsule, accueille ce que beaucoup affirment être la plus
grande nation humaine de l’histoire de Mennara. Personne n’oserait
comparer les Torue Albes, archipel situé tout près de la côte nord, au
parangon de civilisation qu’est Lorimor, mais elles se révèlent être fré-
quemment le point de départ de nombreuses aventures vers l’inconnu,
tant sur les flots que vers les terres, menées par les nombreux pirates,
voyous et excentriques qui ont choisi ces îles comme port d’attache.
LORIMOR
Lorimor est une saillie étincelante où l’Humanité s’est épanouie, une
terre au climat tempéré qui s’avance dans la mer. Pour de nombreux
historiens, sa fondation constitue un des moments cruciaux des
débuts de l’histoire des Rois Penacor, un événement singulier qui a
défini l’évolution de Terrinoth pendant des millénaires. Mais à n’en
retenir que ce fait, on en oublierait la grande histoire de Lorimor. Fière
et noble nation à part entière, cette terre accueille des romantiques,
des poètes, des bâtisseurs, des philosophes, des marins et des soldats.
Lorimor fut fondé au début de l’Ère d’Acier, à la fin du troisième
siècle du calendrier humain, quand Rusticar Lorimor et Riya Penacor
furent bannis de Terrinoth pour avoir trahi leur roi et ami, époux de
Riya de surcroît.
Leur exil les conduisit sur cette immense péninsule inexplorée
s’étendant vers le nord, entre la Mer Teallin et la Côte autonome à l’est,
et le bleu infini des eaux de l’ouest. Quand ils découvrirent l’endroit,
il semblait impossible de s’y établir. Le paysage était assez agréable,
mais le gibier était rare et les semences qu’ils tentèrent de planter mou-
rurent dans le sol trop rocailleux. Pire encore, ces terres semblaient
impossibles à défendre si le roi décidait finalement que sa sentence
avait été trop magnanime, ou si les Elfes de l’Aymhelin, au comporte-
ment toujours mystérieux, jugeaient tout à coup souhaitable d’étendre
leur domaine.
Après plusieurs mois, les exilés et leurs partisans atteignirent enfin
un endroit plus accueillant, boisé et riche en nourriture, qui devint
leur nouveau foyer. Avec le temps, la cité de Lorim devint la capi-
tale du nouvel Empire de Lorimor, d’où partirent des éclaireurs pour
explorer les terres environnantes. Ils fondèrent de nouvelles cités,
comme Orris le long de la côte, et établirent de nouvelles colonies
dans les îles au nord.
LES TERRES INTÉRIEURES
L’intérieur de Lorimor fut la première région à être occupée. Les
peuples qui y vivent dominent toujours la nation car la capi-
tale, et les cités environnantes avec lesquelles elle entretient des
liens étroits, détiennent les rênes du pouvoir politique. Ceux qui
cherchent un refuge peuvent s’établir dans de petites colonies, iso-
lées dans de vastes étendues sauvages de la péninsule. Là-bas, à
l’abri des regards indiscrets, ils peuvent conduire des rituels et des
expériences qui leur vaudraient le bannissement, ou pire encore,
dans les régions civilisées.
LORIM
Accueillant des marchés bien achalandés et des édifices spectacu-
laires, Lorim est l’une des cités les plus pittoresques au monde. Les
architectes et les tailleurs de pierre ont construit des amphithéâtres
époustouflants, d’énormes statues et de célèbres monuments, sou-
vent à la gloire de ses deux fondateurs. Lorimor a grandi autour
de cette cité, se dotant d’armées puissantes et de la plus grande
marine du monde.
L’Empire de Lorimor est toujours considéré comme une des
grandes puissances de Mennara, mais l’époque où il était la
nation dominante est depuis longtemps révolue. Lorim
est maintenant une cité où règnent les intrigues et les
conspirations. L’empire s’étant affaibli, ses chanceliers, ses
princes, ses seigneurs marchands, ses maîtres espions et
autres personnages puissants s’accrochent désespérément
au pouvoir qu’il leur reste. Les étrangers constituent d’ex-
cellents pions dans leurs intrigues. À Lorim, les voyageurs
pourront parfois obtenir une audience royale, où on leur
proposera probablement de participer à des quêtes contre
les monstres ou les bandits qui ravagent le pays. Même les
autorités locales demandent de l’aide à des étrangers pour
s’occuper de problèmes qu’elles préfèrent ne pas rendre
publics, comme des villages maudits ou des sorciers sus-
pects qui passent trop de temps dans les cimetières.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

Pourtant, la cité a beaucoup à offrir aux voyageurs et aux com- Certains pensent que l’empereur est à blâmer pour ce qui survint
merçants. La longue histoire de l’empire signifie qu’il regorge d’érudi- ensuite : fut-il trop orgueilleux et aveuglé par sa conviction que ses
tion : on peut tout y étudier, de l’architecture à la construction navale donjons étaient imprenables ? Ou bien des messages de la garde furent-
en passant par les dernières découvertes exotiques venues d’autres ils mal retranscrits ? Quoi qu’il en soit, lorsqu’un nouveau contingent
royaumes. Il est aussi un centre d’échanges commerciaux depuis des de recrues se présenta un jour dans l’un des avant-postes pour assurer
siècles : on est sûr d’y trouver n’importe quelle marchandise, quelles la relève, le donjon était vide ; les soldats ne trouvèrent ni corps ni
que soient sa provenance et sa nature ; on y trouve toujours également signes de lutte, l’armurerie semblait intacte. On découvrit que tous les
des individus passionnés par l’aventure et l’exploration. autres donjons étaient également vides. L’empire envoya vers le sud des
armées entières, craignant une attaque, mais aucun ennemi ne vint.
LES MONTS ARRIK ET ORRIK
À compter de ce jour, les avant-postes furent laissés à l’abandon ;
Ces deux sommets, situés de part et d’autre du Fleuve des Soupirs, les meilleurs augures et devins de l’empire proclamèrent que ces sites
non loin d’Orris, sont flanqués de petites tours de guet où des yeux étaient maudits. La plupart des donjons sont maintenant en ruine
perçants fouillent sans relâche les alentours pour détecter le moindre et servent d’abri aux voyageurs. Toutefois, les vents qui soufflent au
signe d’invasion. Les sentinelles cherchent également les indices milieu des décombres semblent plus froids, et les vins y tournent
annonciateurs d’une crue du fleuve tumultueux, qui inonde parfois à l’aigre du jour au lendemain. Le sommeil qu’on y trouve est
la région de Queldan. rarement réparateur, souvent peuplé de terribles rêves
Rares sont ceux qui se souviennent des récits des premières explo- sur les âges passés et d’atroces trahisons. Peu
rations d’Arrik et Orrik, et plus rares encore ceux qui ont enquêté de visiteurs restent plus d’une nuit,
sur ce qu’ils révélaient, en particulier ceux mentionnant des entrées sentant clairement que ce qui
de tunnels sinueux qui semblaient artificiels. Néanmoins, les his- réside maintenant dans ces
toires se sont répandues dans Orris et les Torue Albes : elles évoquent donjons ne désire pas de
des cavernes profondément creusées au cœur des montages, qui compagnie.
menacent de s’effondrer sur des coffres jamais ouverts. On dit aussi
qu’on peut y trouver, loin sous la surface, de mystérieux souterrains
et catacombes gémissant sous la masse des pics au-dessus d’eux.
Quelques contes prétendent même qu’il existe des passages entre les
deux montagnes, serpentant sous le fleuve fougueux, dont certains
ressortent au-delà du Détroit de Gracor. On raconte que certaines
de ces grottes contiennent des statues de pierre d’une hauteur inhu-
maine, aux visages emplis de terreur et de rage, qui semblent tenter
désespérément de sortir ; ces rumeurs laissent perplexes les clients
des tavernes, qui se demandent pourquoi ces statues ont été sculp-
tées puis abandonnées si loin sous la surface.
Les divers érudits de la cité de Lorim s’abstiennent de tout com-
mentaire et s’en tiennent à la version officielle : ces terres étaient entiè-
rement inoccupées lors de la naissance de l’empire. Secrètement, au
gré d’investigations magiques, les érudits ont rassemblé des preuves
attestant qu’il y a des milliers d’années, Arrik et Orrik ne formaient
qu’une seule et gigantesque montagne, mais qu’ils furent séparés par
des forces inimaginables. La cause d’un tel cataclysme, et les péchés
que les anciens habitants des montagnes ont bien pu commettre pour
mériter un tel sort, sont des questions que les sages de l’empire pré-
fèrent ne pas aborder.

LES DONJONS PERDUS

Jadis, un empereur de Lorimor décréta la construction d’une série de
forteresses et de tours de guet dans les régions sud de la péninsule, où
Riya et Rusticar, les amants exilés, avaient cherché refuge. La tâche
était ardue, mais Lorimor était à son apogée, et rien ne semblait alors
impossible. De longs convois transportèrent des tonnes de granit sur
les chantiers, ainsi que nombre de soldats, de maçons et de forge-
rons. Des années de dur labeur furent nécessaires, mais finalement,
des dizaines d’avant-postes furent érigés le long de la partie la plus
étroite de la péninsule. Ils remplirent leur office pendant des siècles ;
la réputation des forces de Lorimor était telle qu’aucun ennemi n’osa
jamais l’attaquer.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LES TERRES CÔTIÈRES
Bien que les terres intérieures détiennent le pouvoir politique, les
cités du littoral, reines du commerce, possèdent le pouvoir financier.
Depuis leurs nombreux ports, des navires marchands sont toujours en
partance vers les terres connues et inconnues. Le commerce s’étend
jusqu’à Terrinoth et aux légendaires marchés de Tamalir, car l’empire
s’est réconcilié avec sa terre d’origine lorsque les deux pays ont com-
battu les Ténèbres ensemble. Lorim lutte pour garder le contrôle des
côtes, mais il existe toujours des factions plus intéressées par l’or que
par le soutien de la capitale.
ORRIS
Orris se trouve sur la côte nord de Lorimor, là où le turbulent Fleuve
des Soupirs se jette dans la Mer Cerridor. C’est une cité prospère où
l’on se presse pour accoster ; ses quais sont occupés nuit et jour par
de grands navires lourdement chargés, et les équipages trouvent diffi-
cilement la place de débarquer leurs trésors venus de terres lointaines.
Le succès d’Orris donne l’impression que cette cité à la réputation
sulfureuse est indépendante du reste de Lorimor. Ses bars et tavernes
sont devenus des paradis pour les capitaines enclins à la piraterie, et
bien des regards se détournent tant que l’or et autres richesses conti-
nuent de couler à flots dans l’Empire de Lorimor. La conquête des
Torue Albes fut lancée depuis Orris, qui contrôlait une grande partie
du commerce avec les îles à mesure que les colonies y prospéraient.
Beaucoup considèrent Orris comme une cité de pirates, ce qui n’est
pas complètement faux. Mais elle est surtout pleine d’opportunités.
Ses équipages sont toujours prêts pour l’action si la récompense est
belle. Ceux qui cherchent un moyen de transport sans avoir à répondre
à des questions embarrassantes, qui ont besoin des services de marins
et de mercenaires habiles au coutelas, ou qui souhaitent écouter les
dernières histoires sur les monstres marins et les mers inconnues…
tous se rendent à Orris, et ils sont rarement déçus.
ROUGERIVE
Principal port de la côte ouest de Lorimor, Rougerive se situe dans une
large baie bordée de longs et solides quais en pierre de taille apportée
des terres intérieures. Les navires quittent le port pour naviguer vers
le sud, traverser la Mer Sélénique et atteindre Zanaga et les Plaines
Brisées. La plupart des bateaux dont les défenses sont insuffisantes
accostent à Rougerive pour échapper aux pirates, dont les attaques
deviennent malheureusement de plus en plus fréquentes ces dernières
années. Les navires marchands naviguent également vers le sud-ouest
sur la Grande Mer, la plus vaste étendue d’eau connue ayant jamais
été traversée, pour rejoindre le lointain Al-Kalim et rapporter trésors
et spécialités culinaires du pays du désert. Ceux qui se lancent dans
ces aventures doivent cependant apaiser ou éloigner les terribles dieux
qui règnent sur ces eaux, au risque que leurs navires ne rejoignent les
innombrables épaves qui pourrissent par le fond.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
À l’ouest de Rougerive s’étend l’Océan Infini. On raconte que
les navires qui en reviennent n’ont jamais pu accoster pendant leur
périple. Bien des histoires circulent également à propos de créatures
monstrueuses émergeant des profondeurs, de chants entêtants venus
du cœur de la nuit, de spectres de vaisseaux scintillant d’un feu bleuté
dont les marins crient aux autres navires de rebrousser chemin avant
qu’il ne soit trop tard… et de tant d’autres choses encore. Peut-être
existe-t-il ici des dieux encore plus terribles qui attendent ceux assez
fous pour oser entrer dans leur domaine ? Tourner son regard vers
l’ouest, c’est observer l’immensité de l’inconnu, là où les eaux bleues
s’assombrissent et se teintent de rouge flamboyant sous le soleil cou-
chant ; c’est se demander quel équipage aura suffisamment d’audace
pour découvrir ce qui se cache au-delà de l’horizon.
LES TORUE ALBES
Les Torue Albes, archipel constitué de quatre îles principales et d’in-
nombrables petites îles dispersées sur les flots, ressemblent aux Cités
Libres de Terrinoth. Bon nombre de ces petites îles sont désertes ou
utilisées comme ports de contrebande. Anciennes colonies de Lorimor
libérées de la domination de l’empire, elles forment une sorte d’éco-
système où chacun apporte son aide dans la mesure de ses capacités,
et qui fonctionne sur des liens créés par la nécessité plus que par la
famille ou l’honneur. Bien que relativement indépendantes les unes
des autres, les îles reconnaissent l’autorité d’une seule reine, dont la
cour se trouve dans la cité de Dallak, sur l’île principale d’Alben.
ALBEN
Alben est la plus grande île des Torue Albes (nom qui, dans une langue
presque oubliée, signifie « les Îles d’Alben »). Située à l’est de l’archi-
pel, elle fut la première à être colonisée par les explorateurs de Lorimor
qui osèrent jadis s’aventurer au-delà du Détroit de Gracor. Les cités
d’Alben contrôlent la majeure partie du commerce dans l’archipel, les
visiteurs des Torue Albes sont donc presque certains d’y passer à un
moment ou un autre de leur voyage.
DALLAK
Capitale des Torue Albes (si une telle notion existe en ces lieux), cette
cité est bâtie entre la Chaîne de Feunimbus et les Montagnes Cendrées,
le long de la principale route commerciale terrestre qui traverse Alben.
Qualifier Dallak de capitale s’avère toutefois un peu exagéré. La reine
de Dallak est à n’en pas douter l’autorité suprême des Torue Albes,
le titre est transmis de génération en génération depuis le jour où
les îles ont gagné leur indépendance pendant la grande guerre civile
de l’empire. En pratique, cela signifie essentiellement avoir l’auto-
rité nécessaire pour prélever les taxes et percevoir les droits de pas-
sage aux principaux carrefours commerciaux, y compris à Dallak.
La Tourbière aux Vipères borde également la cité, le voyage est donc
périlleux pour tous ceux qui refuseraient de payer le Droit de passage
royal pour se rendre à Trelton, au nord, ou à Garnott, au sud.
Bien que constituant un revenu assez aléatoire, ces privilèges ont
néanmoins permis à Dallak de devenir la plus riche cité de la région.
La Garde de la Reine en particulier est habilitée à prélever des taxes
spéciales pour soumettre les opposants au régime par des sanctions
économiques. Dans le monde cruel des Torue Albes, l’argent vaut la
peine de tuer et d’être tué, et les membres de la Garde de la Reine font
partie de l’élite de l’infanterie dans la région.
L’influence de la reine s’étend à tous les aspects de la vie de Dallak,
de sorte que la ville est autant un organe dirigeant que la reine elle-
même. Quand on commence à battre les tambours de guerre, la reine
peut émettre un décret qui accorde sa clémence à tous les équipages
de pirates (ou toute autre personne intéressée) disposés à se battre et à
piller sous le drapeau de la Marine royale albésienne.
GARNOTT
Cette cité côtière est située sur la Baie Brûlante, loin au sud de Dallak.
Le mode de vie quasi martial de Garnott fait de cette cité le lieu idéal
pour la principale école de formation militaire des îles : l’Académie
Martiale des Torue Albes. Les diplômés qui en sortent deviennent
invariablement l’élite de la Marine royale albésienne ou de la Marine
Impériale de Lorimor, car ils ont été formés pendant des années à
tous les aspects de la navigation et des combats maritimes. Délaissant
l’armure pour le simple uniforme du corps des officiers, ils offrent
un spectacle époustouflant lors de n’importe quelle bataille navale, et
représentent un danger même pour un pirate aguerri.
Garnott est beaucoup plus facile à défendre que la plupart des
autres cités des Torue Albes. Au nord se dressent les Pics d’Azur, et
les envahisseurs potentiels qui passeraient par voie de mer doivent
d’abord franchir le Détroit de Gracor, où de nombreux navires
finissent fracassés contre les rochers. Toutes sortes de charmes pro-
tègent la cité ; la légende raconte qu’ils seraient le dernier cadeau d’un
empereur de Lorimor dont le fils aurait péri quand son navire fut
précipité sur les rives.
TRELTON
Trelton, petite cité côtière au nord de Dallak, face à la côte sud de
l’île d’Ulthik, est réputée jusqu’à Terrinoth pour l’excellence de ses
forgerons et de ses inventeurs. La proximité de matériaux de grande
qualité que l’on trouve dans les Hauts de Corbelune, dans Bois-
le-Cerf et sur le Mont Ulthik, en plus de la protection de la reine,
permet à Trelton de produire un grand nombre d’armes, dont beau-
coup sont devenues légendaires. Cette activité garantit à la cité, qui
est pourtant à peine assez grande pour mériter ce nom, une place
d’honneur dans l’archipel.
Trelton abrite également une sorte de monastère, la Fraternité du
Mont. Quand les forgerons se rendent pour la première fois dans la
cité et demandent à bénéficier de l’enseignement spécial qui y est dis-
pensé, la Fraternité examine leur requête et vérifie la véracité de leurs
déclarations. Si leurs mains sont calleuses, s’ils ne sont pas effrayés face
à un fourneau rugissant, s’ils acceptent d’être couverts de suie et de
cendre, alors ils sont acceptés et peuvent accéder aux forges de Trelton.
Le gîte et le couvert, ainsi que l’enseignement des compagnons, sont
à la disposition de tous ceux qui savent attiser le feu et qui vivent leur
vie au rythme du marteau frappant l’enclume, quelle que soit leur
origine. Beaucoup ont parcouru d’innombrables lieues pour gagner
leur droit d’entrer et venir pratiquer leur métier, réparer des reliques
inestimables et créer leur propre chef-d’œuvre.
L'ÎLE DE GARNET
À l’ouest d’Alben, cette vaste île est bordée par la Mer Cerridor au
sud et la Mer Chatoyante au nord ; elle constitue une pause naturelle
lors d’un voyage à travers les Torue Albes. Quelques petites colonies,
qui vivent principalement de contrebande, se cachent parmi ses forêts
verdoyantes ; on n’y trouve qu’une seule cité. La plupart des visiteurs,
cependant, considèrent Perchegué plus comme un terrain d’essai pour
explosifs que comme une ville à proprement parler.
PERCHEGUÉ
De loin, vu les nuages de fumée et les flammes qui s’élèvent de la
cité, les voyageurs pourraient penser que Perchegué est en pleine
guerre. Pourtant, une fois entrés, ils comprennent rapidement que ces
signes alarmants ne sont que le produit des activités quotidiennes des
habitants. Perchegué est une ville d’alchimistes, de magiciens et de
chimistes plus traditionnels ; on y trouve en abondance toutes sortes
de potions et décoctions (dont beaucoup ont d’abord été élaborées et
expérimentées dans l’un des abris aux murs bien renforcés qui font
office de laboratoires). Les Bois Creux, qui bordent le nord de la cité,
223
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
sont l’un des rares endroits où l’on peut se procurer certains ingré-
dients extrêmement difficiles à trouver, ce qui en fait la principale
destination des étudiants en botanique (et, évidemment, de ceux qui
étudient les poisons). Les habitants envoient des navires pour se pro-
curer ce qu’ils ne trouvent pas sur place, Perchegué est donc l’un des
principaux importateurs de minéraux rares et d’autres composants en
provenance des landes gelées d’Isheim et d’ailleurs.
Naturellement, la production de Perchegué ne se limite pas uni-
quement aux potions de force et de vigueur, mais comprend égale-
ment des bombes incendiaires et fumigènes, des grenades, des obus
et toutes sortes de réactifs. La tristement célèbre préparation connue
à Terrinoth sous l’appellation « Feu de Lorimor » est un des princi-
paux articles d’exportation, bien que les habitants conservent une
version beaucoup plus raffinée et puissante pour certains acheteurs
spéciaux. Les explosions sont les incidents les plus fréquents sur l’île,
et nécessitent une brigade de pompiers spécialement dédiée qui s’oc-
cupe des innombrables départs de feu. Si le reste du monde n’ache-
tait pas assidûment les munitions et les autres composés qu’elle offre,
il est presque certain que Perchegué ne serait plus qu’un cratère
fumant à l’heure actuelle.
Pour ceux qui sont plus enclins à apprécier les plaisirs simples
de la vie, Perchegué est aussi réputée pour ses tavernes, les Maîtres
Alchimistes étant souvent également des experts en matière de ton-
neaux et de fûts. Un grand nombre des spiritueux les plus connus
de Perchegué sont le fruit de mélanges accidentels de breuvages
alchimiques et de boissons alcoolisées, certains n’ayant jamais été
reproduits avec succès malgré des années d’efforts. Un magnum du
légendaire Espar pourpre, en particulier, peut valoir le poids d’un
ogre en or, et de fréquentes expéditions sont lancées pour localiser
la caisse de Baiser de la Reine qui a disparu quelque part sur le
chemin de Tamalir.
TARIANOR
La légendaire Cité Flottante de Tarianor est le plus grand chantier
naval de toutes les Torue Albes, voire du monde entier ; elle est plus
proche d’une île que d’une cité, cependant. Cette merveille d’in-
génierie est née du rêve fou de la Capitaine Eddy Tranchevarech,
une Gnome qui fit une bien piètre carrière dans la piraterie car
elle s’intéressait plus à l’ingénierie nautique qu’au combat et au
pillage. Après que sa dernière victime se fut échappée alors que
son navire s’échouait lamentablement sur l’immense étendue d’un
récif corallien, Eddy eut la vision saugrenue d’un port maritime
construit au-dessus du récif, une sorte d’île flottante qui pourrait
lever l’ancre et dériver à sa guise, ou là où se trouverait le plus
grand nombre de navires.
Elle parvint à rassembler ce qui restait de son équipage désespéré,
et à lui insuffler son énergie pour bâtir son port visionnaire. Joignant
leurs compétences en construction navale et en ingénierie, et avec
peut-être un peu d’aide magique, ils se mirent au travail. Il leur fal-
lut cinq longues années, et les coffres de dizaines d’investisseurs tout
aussi téméraires qu’eux, mais finalement, la Cité Flottante vit le jour
et commença ses activités marchandes.
Le succès fut fulgurant. La Reine de Dallak fit une offre pour trans-
former la Cité Flottante en une véritable cité des Torue Albes et lui
accorder officiellement le titre de chantier naval royal. Eddy devint
plus riche que n’importe quel autre pirate et, après avoir délégué une
grande partie des opérations quotidiennes à son second, passe depuis
ses journées à faire des expériences et à élaborer de nouveaux projets.
Tarianor est désormais le chantier naval le plus prestigieux au
monde. Les bâtiments de guerre de Lorimor et de la Marine royale
albésienne y sont produits, ainsi que des navires de commerce (l’équi-
page gnome, qui conserve toujours un penchant pour la piraterie,
224
est généralement ouvert aux contrats spéciaux, ceux qu’on accepte
sans poser de questions). Tarianor peut même servir de moyen de
transport, pour déplacer des groupes de petits bateaux fluviaux à tra-
vers les eaux dangereuses et leur permettre d’atteindre des destinations
le long des côtes de l’ouest du continent.
TIGH HIGARD
Au nord de Garnet se trouve l’île rocheuse de Tigh Higard, bordée
par les Rochers Cristallins au nord et les Montagnes Nodan au sud.
Un large fleuve divise le paysage, coulant vers l’est en traversant
Port-la-Conque, la plus grande cité de Tigh Higard, avant de se jeter
dans l’océan. La vie sur l’île est difficile à cause de son rude climat.
La glace et la neige recouvrent les grands sommets au nord et au sud,
où vivent de terribles créatures qui s’aventurent trop souvent hors de
leur repaire pour chercher de la nourriture. Les plaines sont également
dangereuses, leurs hautes herbes cachent souvent de silencieux reptiles
et autres prédateurs. Les côtes ne sont pas en reste, avec leurs bandes
de malfrats prêtes à capturer quiconque passe à leur portée.
Certains murmurent même que les nuits de lune rouge, les bar-
rières entre les mondes commencent à s’altérer, et que d’étranges
choses émergent des sous-bois. On prétend que des marins morts
depuis belle lurette sortent de leur tombe pour chercher leurs trésors
perdus, et que des meutes de loups-garous rôdent sur les plages en
quête de victimes à sacrifier à leurs dieux macabres. Au-delà de Tigh
Higard, à l’ouest, s’étendent la Mer de Fumée et le grand bleu ; les
histoires de tavernes à Port-la-Conque prétendent que des créatures
aquatiques gigantesques vivent là-bas, certaines si grandes qu’on
risque de les confondre avec des îles.
PORT-LA-CONQUE
Contrairement au reste de Tigh Higard, Port-la-Conque est dédiée
aux plaisirs ; la cité portuaire procure aux marins et aux aventuriers
épuisés des lieux où se reposer et s’amuser pendant leur escale. Les
tavernes sont nombreuses, tout comme les distractions visant à déles-
ter les visiteurs de leur argent. Port-la-Conque est un endroit où faire
la fête, mais offre également un grand nombre d’opportunités.
Le flux constant de marins qui passe par le port implique qu’on
parle toujours de nouveaux trésors à découvrir et qu’on peut facile-
ment acheter des cartes indiquant leur emplacement. Quelques-unes
sont exactes, et certaines peuvent même conduire à des récompenses
encore plus faramineuses (bien que les quêtes pour les trouver soient
plus périlleuses). De nouvelles expéditions se montent toutes les nuits
dans les tavernes, dont les membres partent ensuite naviguer vers des
terres inconnues, ou s’aventurent vers le nord dans l’espoir de trou-
ver de nouveaux passages commerciaux. Des groupes armés se ras-
semblent régulièrement à Port-la-Conque pour tenter d’exterminer
les horreurs des montagnes, une quête sans fin qui offre parfois des
récompenses inattendues, quand les combattants découvrent des tré-
sors et des objets magiques perdus, ou bien le corps gelé d’un Dragon
ou d’une autre créature à forte valeur marchande.
L'ÎLE D'ULTHIK
L’Île d’Ulthik, la plus septentrionale des Torue Albes, est un marais
inhospitalier qui se trouve à peine au-dessus du niveau de la mer. Une
petite chaîne de montagnes volcaniques s’élève de la boue, mais le
reste du terrain est entièrement détrempé et inhospitalier, comme si
les eaux voisines gagnaient peu à peu la bataille pour reconquérir la
terre ferme. Sans les nombreux minerais d’une pureté exceptionnelle
qu’on y trouve, il est probable que l’île serait restée inhabitée. Les gros
gisements de fer et les épaisses veines de minéraux magiques l’ont
transformée en centre industriel. Les fourneaux et les ateliers pleins de
suie constituent l’horizon d’Hardell, la principale cité, qui rejette assez
de fumée et de gaz nocifs pour rivaliser avec les volcans.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
HARDELL
L’histoire de la future cité d’Hardell commença quand un magicien
bricoleur fut banni de Terrinoth car ses inventions étaient bien trop
destructrices. Le mage exilé suivit alors un chemin solitaire pour fina-
lement arriver en ce lieu, où il pensait vivre une vie simple et sans
incident. Ce qui fut bien le cas jusqu’à ce qu’il découvre accidentelle-
ment, juste sous ses pieds, d’abondants gisements de minerais. En un
rien de temps, il se mit à les fondre pour forger des objets combinant
métal et magie comme personne n’avait jamais osé en imaginer. Des
rumeurs se répandirent au sujet de ses créations, en particulier dans
la proche Trelton, et des inventeurs incompris aux idées tout aussi
excentriques traversèrent avec empressement le Détroit des Zéphyrs
pour se joindre à lui.
Bientôt, une série de forges et de fonderies vit le jour, et la cité
d’Hardell (nommée en l’honneur du mage) fut fondée. Dans cet
endroit peuplé de merveilles destructrices, le génie du magicien est
désormais reconnu à sa juste valeur. Son plus grand chef-d’œuvre est
peut-être le canon runique, une arme arcanique qui amplifie la force
des éclairs d’énergie runiques au centuple, capable de faire sauter
facilement la roche et les épaisses fortifications. On trouve par ail-
leurs une infinité d’autres appareils et engins mécaniques, de nom-
breuses créations uniques attendant que quelqu’un découvre toute
l’ampleur de leur potentiel (ou comprennent comment les utiliser).
Les aventuriers qui cherchent des objets spécifiques, ou qui veulent
apporter des modifications à ceux qu’ils possèdent afin de les rendre
plus performants pour leur prochaine quête, sont toujours les bien-
venus à Hardell, car ses habitants apprécient toujours un bon défi
technique.
LES HABITANTS
DE L'OUEST
L’Empire de Lorimor prospère depuis des siècles grâce au courage et
aux compétences de ses habitants, et en particulier grâce à ses forces
maritimes. Sa puissance a permis de débarrasser la péninsule de tout
ce qui la menaçait (c’est du moins ce que veut la croyance popu-
laire) ; des siècles de stabilité ont abouti à une richesse culturelle quasi
exceptionnelle.
Au-delà de Lorimor, l’archipel est riche d’une vie plus sauvage. Bien
que toute la vie des Torue Albes ne tourne pas autour de la piraterie,
les apparences suffisent à entretenir cette réputation auprès des étran-
gers. Pourtant, les îles abritent des êtres plus bizarres et dangereux que
de simples pirates. Une grande partie des terres intérieures est encore
inexplorée, et pleine de créatures et de merveilles que l’on ne trouve
nulle part ailleurs.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
ISHEIM
A u-delà des mers agitées du Nord, le monde devient blanc. Ici,
le ciel froid chargé de neige et de grésil domine la terre, alors
qu’un vent intense, venu des sommets glacés, hurle constamment.
Voici Isheim, désert gelé accroché au bout du monde.
Isheim est la terre perdue des Salishwyrd, les anciens Elfes qui
régnaient sur ce continent avant que des années de famine et d’obs-
curité ne transforment leur paradis en cauchemar glacé. Sous la
neige et la glace se cachent encore les gloires de leur empire nor-
dique, si recherchées par certains héros et pour lesquelles s’affrontent
les fourbes Wyrms des Glaces et les féroces seigneurs des Foyers. Les
héros qui voyagent dans cette terre reculée pourront se retrouver
entraînés dans les guerres commerciales des seigneurs Weik, plon-
ger dans les profondeurs secrètes de la cité volcanique de Vrede
ou encore rejoindre une expédition de chasseurs de sang de glace
qui cherchent des bêtes gelées. Les plus audacieux pourront même
s’aventurer loin au-delà des cités et des colonies côtières, au-delà des
terres des Onoit et des tanières des Wyrms des Glaces, pour décou-
vrir les ruines de l’empire elfique, et même le Val Vert, la dernière
cité des Salishwyrd.
LE NORD GELÉ
Des mers glaciales, des monstres marins et des pillards impitoyables
séparent Isheim de Terrinoth et des continents du Sud. Pour ne
serait-ce qu’apercevoir les falaises interdites de cette terre nor-
dique, les voyageurs doivent d’abord braver l’impitoyable océan.
S’ils survivent, ils ne trouveront sans doute pas les rives d’Isheim
plus hospitalières.
La côte accidentée est le premier grand obstacle qui se dresse entre
les voyageurs et les terres d’Isheim. Appelée Côte des Pillards, elle
abrite les peuples Weik et leurs hardis pirates et guerriers. Elle consti-
tue également le seul accès vers l’intérieur du continent et les nom-
breux secrets et trésors qu’il recèle.
LA CÔTE DES PILLARDS
Les côtes d’Isheim sont gouvernées par les seigneurs des Foyers, jarls
des Weik. Chaque seigneur contrôle une cité ou une ville et possède
une flotte qui sillonne les eaux au-delà des falaises et des baies abritées.
Les aventuriers et les marchands qui souhaitent débarquer à Isheim
doivent conclure un accord avec un seigneur des Foyers, car seuls les
Weik et leurs drakkars peuvent naviguer le long de la côte d’Isheim
sans encombre. Même avec l’aide d’un guide Weik aguerri, les voya-
geurs doivent affronter de nombreux dangers susceptibles d’envoyer
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
un navire par le fond, comme des labyrinthes de gigantesques ice-
bergs, des volcans sous-marins qui projettent de l’eau brûlante et
d’énormes orques des failles qui déchirent la coque des bateaux pour
en dévorer les passagers.
Malgré les dangers de la mer gelée, on trouve des villes Weik
un peu partout sur les falaises et dans les criques de la Côte des
Pillards ; la plus grande, Lagart, héberge le Haut Palais. Dans cette
cité aux grands murs surplombant des rues sinueuses et gelées, les
bâtisses sont construites dans les coques d’anciens navires. Le Haut
Palais domine la falaise ; son toit est la coque retournée de la Hache
d’Isheim, vaisseau légendaire qui aurait transporté les premiers Weik
vers leur nouvelle demeure de glace. Se trouvent également à Lagart
des palans pour les grands bateaux, dressés au-dessus du Fleuve
Fumant. Durant les mois d’été, lorsque le fleuve dégèle, les palans
permettent de sortir les navires de la mer pour qu’ils rejoignent l’in-
térieur d’Isheim.
Fait peut-être plus important encore, Lagart est le lieu où se tient
le Conseil des Pillards, alliance des douze seigneurs des Foyers Weik.
Chaque année, au jour le plus long, les seigneurs se rendent à Lagart
pour cracher sur la statue brisée de Nordros, le dieu des Glaces, et
réaffirmer leur domination sur cette terre. Le vénérable Ulfred Varl,
seigneur des Foyers de Lagart, est à n’en pas douter le premier parmi
ses pairs, car il dirige la plus grande cité Weik. Toutefois, il faut recon-
naître que son pouvoir faiblit depuis déjà longtemps, et comme dans
une meute, le vieux loup alpha se fait attaquer au jarret par ses rivaux
qui cherchent constamment la faiblesse qui lui sera fatale.
Seragart, deuxième cité des Weik, est le plus important centre de
construction navale. Les habitants travaillent nuit et jour dans les
chantiers, qui s’étendent jusqu’à une baie voisine. Vivent également
à Seragart les Mages de Givre, magiciens du peuple Weik qui com-
mandent au climat, s’assurent que la cité reste à l’abri des tempêtes et
des neiges du Nord, et imprègnent les vaisseaux de magie.
De nombreux voyageurs venus de pays lointains s’y installent, cer-
tains liés à de puissantes lignées par le sang ou par le mariage. Olief
Aubépyne, par exemple, est né à Seragart et n’a découvert ses origines
qu’après le décès de son oncle, le seigneur Aubépyne de Terrinoth,
quand celui-ci lui a légué son titre et son château.
Le seigneur des Foyers de Seragart est Baergul Rus le Traître, ainsi
nommé à cause des actes infâmes qu’il commit lorsqu’il était pirate
et n’avait qu’une vague notion du mot « alliance ». Baergul espère
que Seragart deviendra la première cité Weik, et complote pour qu’un
seigneur des Foyers faible remplace Ulfred. Les aventuriers peuvent se
retrouver impliqués dans ces machinations alors qu’ils participent à
une guerre commerciale ou qu’ils cherchent des artefacts Salishwyrd
pour des Mages de Givre.
Outre Lagart et Seragart, il existe des dizaines de petites cités,
comme Weikgart et sa colonie de trappeurs sur le Lac Craquelé, ou
Holmgart et ses marchés pirates qui occupent les Fjords des Berserkers.
Certains de ces endroits ne sont habités que par un clan de pillards,
composé tout au plus d’une dizaine de familles possédant un seul
drakkar, alors que les grandes cités sont gouvernées par un seigneur
des Foyers. Toutes sont cependant farouchement fières et indépen-
dantes, et se battent régulièrement entre elles. Les étrangers peuvent
facilement être entraînés dans ces conflits lorsqu’ils souhaitent gagner
le soutien d’un seigneur des Foyers.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

LES SEIGNEURS
Le sang de ces monstres reste perpétuellement froid, il a donc de
nombreux usages dans le Sud, dans des élixirs pour apaiser les fièvres

DES FOYERS ou sur des armes qui peuvent tuer en une seule touche. Les seigneurs
des Foyers se déchirent maintenant pour s’emparer de ces ressources,
qu’ils aient recours à la manipulation et à la politique ou se lancent, le
L’histoire des seigneurs des Foyers remonte à l’époque où les premiers plus souvent, dans des guerres ou des pillages pour s’assurer la domi-
Weik traînèrent leurs drakkars sur les côtes d’Isheim. Les membres nation des voies commerciales et s’approprier les marchandises. Ces
des douze flottes de pirates Weik étaient alors des nomades qui conflits sont de plus en plus fréquents, et des aventuriers peuvent faci-
chassaient en haute mer, dont le nombre avait trop crû pour leurs lement s’y retrouver mêlés, surtout s’ils sont l’instrument de l’ascen-
cachettes insulaires et leur flottille au large des villes. Quand Lagrul le sion ou de la chute d’un seigneur des Foyers.
Rouge aperçut Isheim avec ses côtes aux sommets enneigés, il amarra
ses navires au pied des falaises et déclara que cet endroit serait son
dernier port. Plusieurs centaines d’années plus tard, des cités et des
villages se sont développés sur les lieux où les premiers Weik accos- UNE RÉGION SAUVAGE
tèrent, et les seigneurs des Foyers ont pris le titre de jarl, transmis par
les premiers capitaines. Ces seigneurs font office de dirigeants, mais
INEXPLORÉE
incarnent surtout la lutte sans fin des Weik contre l’environnement Lorsque les voyageurs quittent avec empressement la Côte des Pillards
hostile d’Isheim et leur guerre contre Nordros, le dieu des Glaces, du pour pénétrer dans les terres, ils se retrouvent dans une région sauvage
Froid et de la Mort. Les Weik croient que Nordros essaye continuelle- où se dressent de hautes chaînes de montagnes, s’étend la toundra
ment de les renvoyer sur la mer avec son souffle glacé. Ils prétendent et poussent des forêts agitées par les vents au beau milieu des glaces.
que le dieu incarne la dureté des éléments qui cherchent à les tuer à Seuls les chasseurs de sang de glace Weik voyagent aussi loin de la
chaque instant ; il est leur ennemi éternel, dont le culte est interdit. côte, car l’intérieur des terres est un endroit impitoyable qui n’offre
On raconte même une légende sur un puissant guerrier qui vaincra un qu’une mort glacée. Ici, la terre n’appartient plus aux pillards des
jour Nordros. Les Weik qui s’entraînent pour devenir des héros rêvent mers mais aux Onoit, petits nomades qui vivent à Isheim depuis des
d’avoir un jour cet immense honneur. temps immémoriaux. Il existe tout de même des endroits où les deux
Tandis que les guerriers s’entraînent à combattre les sbires de peuples coexistent, comme l’antique cité de Vrede, l’une des grandes
Nordros, il est du devoir de chaque seigneur des Foyers d’ancrer merveilles du Nord.
toujours plus profondément sa cité dans les terres d’Isheim, en
défrichant ses forêts, en chassant son gibier et en établissant de
nouvelles colonies. La croissance des cités et la montée en puis-
sance des seigneurs des Foyers ont créé un nouveau problème
pour les Weik : les guerres commerciales. Les premiers Weik
vivaient de la terre, abattant des arbres et amassant des four-
rures, mais ils apprirent bien vite qu’Isheim recelait de nom-
breuses ressources exotiques très appréciées dans les terres du
Sud. Parmi celles-ci, l’huile de baleine, la graisse de Wyrm des
Mers et le bois dur des chênes de givre valaient un bon prix
et étaient très demandés. Cependant, ce fut la découverte
du sang de glace, le fluide vital de rares créatures du Nord
comme les Wendigos et les Wyrms des Glaces, qui fit la
fortune des chasseurs Weik.

234
 VREDE, CITÉ DE FLAMME
ET DE GIVRE
De loin, la fumée tourbillonnante qui émerge constamment du
sommet de Vrede semble couper le ciel en deux. En approchant,
les voyageurs découvrent un volcan actif qui se détache sur fond de
montagnes, ses flancs de roche noire dépourvus de neige miroitant
sous l’effet de la chaleur emprisonnée. La cité de Vrede se dresse à
proximité d’une rivière qui, bien que gelée une partie de l’année,
offre un accès saisonnier à la mer ainsi qu’un chemin pour s’en-
foncer dans les terres des Onoit. Vrede est devenue un lieu de ren-
contre pour les différents peuples d’Isheim, ainsi qu’un centre de
commerce important.
Les habitants de Vrede ont jadis construit leurs colonies, reliées par
des ponts et des plates-formes, autour de la caldera sifflante du vol-
can. Il ne fait jamais froid à Vrede, car une série de sources chaudes
réchauffe le sol. Les aventuriers qui s’y arrêtent pourront y acheter
aussi bien les merveilles du Nord que les marchandises du Sud, et
côtoyer des pirates Weik, des pisteurs Onoit et des marchands de
Terrinoth et d’Al-Kalim. L’aventure est toujours à portée de main dans
cette cité de vapeur, car personne ne sait avec certitude la profondeur
qu’atteignent les sources chaudes ou ce qui peut se cacher dans ces
abîmes emplis de brouillard. Certains croient qu’un ancien Dragon
sommeille sous la ville, enroulé sur ses trésors, tandis que d’autres
évoquent en chuchotant un culte du feu dont les chants entonnés
dans le noir déclencheraient lentement la fin du monde.
LES PISTES DES ONOIT
Les pistes des Gnomes Onoit et des Ulfen, leurs fidèles montures
canines, dessinent des sentiers secrets à travers les plaines de glace et les
forêts d’Isheim. Des ombres maudites du Bois de la Sorcière, dans le Sud
d’Isheim, en passant par les Plaines de Cristal et jusqu’aux Montagnes
Hurlantes, les Onoit vivent sur les terres centrales du continent gelé,
sans jamais trop s’approcher du royaume côtier des Weik ni des ter-
ritoires de l’extrême nord. Les Onoit sont des alliés inestimables pour
les voyageurs qui plongent plus profondément dans la nature sauvage,
car ils peuvent offrir de la nourriture, un abri et des conseils dans ces
régions hostiles. Souvent, le premier contact entre les aventuriers et les
nomades Onoit se produit lorsqu’un Ulfen surgit de la neige. On dit
que ces canidés intelligents sont capables de juger une personne rien
qu’à son odeur ; si les Ulfen les en estiment dignes, ils ramènent les nou-
veaux arrivants aux camps des Gnomes, où les shamans bienveillants
peuvent soigner leurs blessures.
Les Onoit vivent en harmonie avec leur environnement ; les sha-
mans écoutent la voix de la terre et transmettent sa sagesse à leur
peuple. Les colonies des Onoit sont construites pour se fondre dans
le paysage : les abris sont taillés à même la glace et les huttes des
plaines ou des forêts sont pratiquement invisibles jusqu’à ce que l’on
se retrouve au beau milieu du village. La plus grande forteresse Onoit,
Ukirlu, nichée au cœur du Boisvert, est l’un des rares véritables refuges
de tout Isheim.
LIEUX SACRÉS
Les shamans Onoit entretiennent un lien profond avec l’esprit de
leur terre ; les voyageurs croisent parfois leurs traces remarquables
en chemin. Des menhirs sculptés de runes se tiennent bien droits
dans toute la lande, si hauts qu’il est impossible que les Onoit, si
petits, les aient érigés. Sur les sommets, dans les lits des rivières, ils
s’élèvent comme si les Gnomes les avaient fait pousser des profon-
deurs du sol plutôt que redressés à l’aide de cordes et de beaucoup de
muscle. Chacune de ces pierres indique le chemin vers une merveille
du peuple Onoit, comme le Lac Miroir, où l’on peut, paraît-il, voir
son avenir dans le reflet du ciel, ou le Gouffre d’Ulur, une caverne
de glace qui semble pleurer, célèbre car des générations de shamans
y sont enterrées.
235
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Les pierres servent également d’avertissement, car les Onoit n’ap-
précient guère que des étrangers profanent leurs lieux sacrés. Des
shamans et des Ulfen de guerre, prêts à repousser le moindre intrus,
sont rarement loin des lieux de sépulture et des cairns magiques. Sur
d’autres sites, les pierres elles-mêmes constituent la seule barrière
entre les fous qui bravent l’interdit et leur trépas. Même les Weik
préviennent les voyageurs de ne pas prendre à la légère les limites
fixées par les pierres des Onoit, car si certaines existent pour pro-
téger les peuples gnomes, la plupart sont les seuls avertissements
d’un péril imminent que recevra un aventurier sur cette terre hos-
tile. Néanmoins, les héros recherchent parfois ces monolithes, car ils
indiquent souvent les tanières d’énormes Wyrms des Glaces, ou les
ruines des Elfes Salishwyrd, toujours protégées par des pièges retors
mais pleines de secrets.
LE ROYAUME
DE LA MORT BLANCHE
Au-delà des Plaines de Cristal, où seuls osent s’aventurer les Onoit,
commence le vrai Nord. Le rude climat devient mortel, le froid s’abat
et enveloppe la terre dans son étreinte impitoyable. Ici, la toundra
s’étend à perte de vue, aveuglante de blancheur, sa monotonie brisée
seulement par des arbres tordus par les glaces et les sommets mons-
trueux des Montagnes du Bout du Monde. Là commence le Royaume
de la Mort Blanche.
LES CAUCHEMARS DES GLACES
Les monstres et les choses mortes qui infestent l’extrême nord se
combattent entre eux, mais s’attaquent aussi à ceux qui sont assez
insensés pour pénétrer sur leur territoire. La neige tombe constam-
ment, déployant son grand rideau blanc, et les brumes dévalent
des Montagnes du Bout du Monde comme la vapeur d’un cadavre
en train de refroidir. Dans cette sinistre étendue blanche gisent les
restes de l’empire Salishwyrd, qui fut jadis anéanti par la Tempête
de Givre. Née de cette tempête, ou peut-être du froid maudit lui-
même, la Mort Blanche règne ici. Elle consume tout ce qui n’est
pas originaire de l’extrême nord, transforme les Humains en statues
étincelantes ou les rend fous en les faisant succomber à la démence
du givre. Il existe de nombreux endroits où le pouvoir de la Mort
Blanche s’amplifie. Au Lac du Silence, un lieu hanté où l’air est si
froid qu’on ne peut le respirer, les malheureux voyageurs ne peuvent
même pas crier lorsque des spectres de glace les taillent en pièces.
Dans les Vals d’Épine, vallées situées au cœur de la forêt dite des
Aiguilles, des êtres au sang de glace vénèrent les Wendigos comme
des dieux et piègent des proies sur les arbres couverts d’épines pour
nourrir leurs maîtres monstrueux.
Hormis le Val Vert et les ruines dispersées des anciennes cités
emprisonnées par les glaces, il ne reste que peu de chose de l’empire
Salishwyrd. Une des rares structures à encore émerger de la neige
est la Prison de la Porte de Glace, tombe gelée située haut dans les
Montagnes du Bout du Monde. Autrefois, les Elfes y incarcéraient
les pires êtres de leur espèce et les plus dangereux de leurs ennemis.
Cette ancienne prison est maintenant le repaire d’âmes tourmentées
et d’horreurs rampantes. C’est là que Scarsha, la reine des Wyrms des
Glaces, règne sur sa nombreuse progéniture, obsédée par sa guerre
contre les derniers Salishwyrd.
236
LA TEMPÊTE DE GIVRE
L
e climat d’Isheim, imprévisible et dangereux, peut
changer en un battement de cœur. Le ciel clair se
remplit soudain de nuages de neige, les vents surgissent de
nulle part, et la température chute si vite que les rivières
gèlent sous vos yeux. Le temps du Nord ne fut jamais
clément, mais la situation s’est aggravée avec la Tempête
de Givre. Fléau des Salishwyrd, ce maelström magique
s’abattit jadis sur leur empire.
Pendant des années, les Elfes cherchèrent à identifier et
vaincre les forces mystérieuses qui se cachaient derrière la
tempête ; finalement, ils décidèrent de créer un sanctuaire
capable de les protéger des vents hurlants. Alors que le Val
Vert ressemble encore à l’Isheim d’autrefois, la Tempête de
Givre sévit toujours par intermittence au-delà de la terre
des Elfes. Rares sont les habitants d’Isheim qui peuvent
prédire le temps qu’il fera le lendemain. Seuls les shamans
Onoit et les Mages de Givre Weik y parviennent avec un
certain succès ; leurs sens magiques leur permettent en
quelque sorte de lire dans la Tempête de Givre, et de pré-
dire aux voyageurs quand le ciel sera dégagé ou quand il est
préférable de trouver rapidement un abri.
LE VAL VERT
Au milieu de la glace et de la neige de l’extrême nord est niché un
royaume caché. Offrant un contraste saisissant avec le paysage envi-
ronnant, le Val Vert abrite la dernière cité des Salishwyrd. Il constitue
peut-être le plus grand secret d’Isheim ; les Elfes l’ont construit il y a
des millénaires pour échapper à la Tempête de Givre qui détruisit leur
empire et pour se protéger de tous les dangers extérieurs. Rares sont
ceux qui ont réussi à atteindre le Val Vert, car il faut d’abord braver
les horreurs des Landes de Glace, puis traverser les blizzards magiques
qui l’entourent. Parmi les histoires contradictoires qui sont parvenues
jusqu’aux terres du Sud, l’une prétend que le Val Vert est un lieu doté
d’une magie puissante, gouverné par un roi immortel, un exilé égaré
né en un âge oublié, qui attend le moment où la Tempête de Givre sera
vaincue et où l’empire des Salishwyrd renaîtra de ses cendres gelées.
Dans l’attente de ce jour, les Elfes Salishwyrd sont passés maîtres
dans l’art des magies de la guérison et de la vie ; ils ont amassé des
artefacts de sorcellerie depuis l’aube de Mennara, et il est rare qu’ils ne
puissent réparer les chairs abîmées ou un esprit meurtri. Les histoires
racontent aussi qu’une âpre guerre opposa les Salishwyrd aux Wyrms
des Glaces, créatures qui seraient, selon certains, la progéniture sau-
vage des Dragons, déformée par la Tempête de Givre. Les Wyrms des
Glaces rêvent de dévorer le Val Vert, et recherchent donc constamment
son emplacement. Des héros assez audacieux pour voyager dans ces
étendues hostiles peuvent se trouver pris entre les froides ambitions de
Scarsha, la reine des Wyrms des Glaces, et les immortels Salishwyrd,
qui attendent désespérément le retour de l’été pour leur peuple.
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi

a route traversant le désert était plate et bien sous leurs armures légères, et leur regard était aussi dur qu’une
entretenue, j’appréciais le voyage. Alors que le pierre dans le désert. Je n’avais aucun intérêt à m’aventurer dans
puissant A’tar se levait, baignant la Grande Mer une ville pleine de femmes de ce genre. Leur fidélité douteuse au
de Sable de sa chaleur, je me dirigeais vers les Calife leur conférait un aspect encore plus sinistre, compte tenu
luxuriantes vallées des Champs de la Fertilité. Mes voyages ne de ce que je portais dans la bourse à ma ceinture.
m’avaient encore jamais conduit si loin au nord, et la vue d’une
telle quantité d’eau s’écoulant entre les rives verdoyantes emplit Alors que je me dirigeais vers le nord, j’évitai la tentation que
mon cœur d’une émotion presque trop grande. Alors seulement, représentaient les petites villes et les villages. Je campai la nuit
en pénétrant dans ces splendides terres de champs féconds où sous les longues branches protectrices de grands arbres, profitant
chantait l’eau fraîche, je compris tout ce que j’allais abandonner. de la douceur herbeuse de ma couche. Le rythme tranquille de
mon voyage me laissait beaucoup de temps pour réfléchir à ma
Pendant un instant, j’envisageai de rester dans ces champs pour situation. La pierre, toujours cachée dans sa bourse, pendait
toujours. Peut-être pourrais-je me terrer dans l’un des petits lourdement à ma ceinture. Était-ce la chance qui m’avait
villages de la région, me trouver une gentille femme et me apporté ce trésor, ou était-ce une malédiction et la mauvaise
plonger dans la vie d’honnête labeur d’un paysan ? fortune ? Le sentiment né au cours des premières nuits n’avait
fait que grandir, et je soupçonnais que j’avais pris part à mon
Je m’arrêtai dans l’un de ces villages pour me restaurer et insu à l’une des tristement célèbres intrigues de la Cour de la
réfléchir aux choses de la vie que ces gens appréciaient. On était Sagesse. Et si le Calife n’avait en réalité pas consenti à ce que
Al-Arabiea, le cinquième jour de la récolte, les villageois avaient j’emporte la pierre ? Si son cousin rival l’avait volée dans ses
organisé une fête, et il ne leur fallut pas longtemps pour inviter coffres et me l’avait ensuite remise ?
le mystérieux inconnu que j’étais. Il y avait des brochettes de
viande juteuses, des purées savoureuses accompagnées de morceaux Ma peur et ma paranoïa grandissaient de jour en jour.
de pain azyme et des petites pâtisseries moelleuses à souhait. Finalement, j’arrivai dans la petite cité de Thaj, à l’extrême
Des coupes pleines de fruits aux couleurs vives étaient posées aunord des Champs de la Fertilité. Bien que son appartenance à
bout de chaque table, ainsi que de petits pots de sorbet en grès.Al-Kalim soit évidente, Thaj est aussi éloignée de la Cour de
la Sagesse que vous pouvez l’imaginer, et son architecture et
Ce n’était peut-être pas aussi extravagant que la nourriture que son mode de vie reflètent clairement cet isolement. Les pierres
mon bien-aimé Calife apprécierait en une telle occasion, car le des principaux bâtiments sont plus sombres que le grès tendre
repas manquait cruellement des délicieux mets venus des quatre du profond désert, les gens semblent également plus froids,
coins du monde par les grandes routes commerciales, mais ce moins disposés à offrir leur aide à un étranger de passage
festin fut tout de même succulent. pourtant fatigué.
Hélas, même dans ce moment de faiblesse, je savais que là La nourriture à Thaj, affirme-t-on, est également plus proche
n’était pas mon destin. Le Calife ne laisserait jamais disparaître de celle des cultures du Nord, et j’attendais avec impatience de
dans la nature son sac de pièces, sans parler de son précieux découvrir ces saveurs. Toutefois, si la préparation pâteuse et
joyau venu du nord. Et ainsi, le cœur déchiré de regrets, je grumeleuse qu’on m’y offrit est représentative, mon voyage ne
quittai ces charmants fermiers pour continuer mon chemin. sera pas d’un grand intérêt culinaire.
Je restai évidemment à bonne distance de la cité de Siryasa. Les À Thaj, je prélevai une petite contribution dans le sac d’argent
guerrières de sa société matriarcale peuvent sembler séduisantes du Calife pour payer mon passage vers le nord, sur l’un des
de loin, mais elles s’avèrent beaucoup plus intimidantes lorsque longs bateaux fluviaux peints de couleurs vives qui sillonnent les
vous les croisez sur votre route. Je n’avais vu aucun soldat depuis eaux au-delà des Champs de la Fertilité. On m’avait averti de
mon départ de la Cour de la Sagesse, ce qui m’avait procuré me méfier des équipages de ces bateaux, un peuple itinérant du
un curieux sentiment de soulagement. Mais alors que, sur ma fleuve, mais j’a i constaté que tant que vous gardez un œil sur
gauche, les flèches et les minarets de Siryasa jaillissaient de la vos possessions, ces gens s’avèrent assez agréables. Leur musique
cime des arbres, je distinguai des guerrières qui patrouillaient est plus enlevée et frivole que les tonalités mélodieuses que
deux par deux. Elles portaient des vêtements de tissu écarlate vous entendrez à la Cour de la Sagesse, et je dois reconnaître

240
 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi
que j’appréciai l’enthousiasme des musiciens, leur amour de
la vie, plus que les attitudes de tout autre peuple rencontré
jusqu’alors. Le bateau fluvial, le Mawja, me conduisit au nord
d’A l-Qursanuq, l’une des infâmes cités pirates de la Baie de
Coupe-Bourse.
Comme vous pouvez probablement l’imaginer, à part les
membres du peuple du fleuve qui forment les équipages – les
ghajir, dans leur dialecte - les personnes qui entreprennent un
voyage vers cet endroit si tristement célèbre ne sont pas les sujets
les plus honnêtes du Calife. Je fus réellement sidéré de constater
l’ampleur grandissante du mépris envers le Fils du Soleil au fur
et à mesure que nous nous éloignions de la Cour de la Sagesse.
Al-Qursanuq était un repaire de pirates, de voleurs et de
coquins de toutes sortes. J’hésiterais presque à qualifier la
cité de civilisée, compte tenu du danger constant qui semblait
me menacer alors que je parcourais ses rues, tentant de
déterminer comment poursuivre mon chemin. De nombreux
navires étaient amarrés au port, bien entretenus, la plupart
peints en noir, avec des voiles de la même couleur ; aucun
n’arborait de drapeau ni d’étendard en haut de son mât. Je
ne vis aucun signe de la puissante marine du Calife, et nulle
part je ne distinguai la bannière de mon bien-aimé maître
ou celle d’A l-Kalim ondulant dans la brise joueuse du rivage.
241
sté dans l’une des splendides salles de
Un des somptueux repas auxquels j’a i assi
terre nata le. Ma lgré tous mes voyages,
réception du Calife avant de quitter ma
bien que certains repas, qui avaient
je n’a i jamais vu festin aussi fabuleux,
plus agréables tant était grande ma
coûté bien moins cher, me fussent bien
faim certains soirs.
Les gens avaient un regard triste, et, même
dans les moments de gaieté, leur joie semblait
forcée et teintée de désespoir.
Vous pouvez trouver presque tout ce dont
vous rêvez dans les rues d’A l-Qursanuq,
dans les magasins tape-à-l’œil et les
bazars bruyants, ou à la sauvette dans
les ruelles sombres. La qualité des
marchandises varie énormément. Les
prix sont exorbitants, même pour les articles
les plus courants, et bien que j’y eusse vu des
bijoux et des ornements dignes de la Cour de
la Sagesse, ils étaient peu nombreux. La plupart
des gens de la Baie de Coupe-Bourse sont habillés comme des
vagabonds, toutes notions d’esthétique ou de mode sacrifiées aux
nécessités de leur vie difficile.
Trouver un navire plus ou moins en règle s’avéra très difficile.
Finalement, je parvins à obtenir une place à bord du Regard
du loup ; son capitaine affirmait que c’était un navire marchand
de Lorimor, un empire déchu et décadent du Nord.
Le Capitaine Nazrat comprit rapidement à mon attitude
que je n’étais pas un voyageur ordinaire, ce qui me mit en
position de faiblesse pour négocier le prix de ma place à bord.
Cependant, son avarice atténua mon sentiment de culpabilité
lorsque je parvins à récupérer d’un geste rapide plusieurs des
pièces sorties de la bourse du Calife que je lui tendais.
Après tout, on ne devrait jamais se sentir coupable de voler
un voleur.
Je me retrouvai donc à bord de ce bateau pirate de malheur,
quittant la chaleur réconfortante de ma terre natale. Chaque
jour, la température baissait, l’a ir se chargeait de l’humidité
de la mer. Après quelques discussions avec d’autres voyageurs,
je décidai de débarquer à Trelton, une cité située sur une île
dans ce qu’on appelle les Torue Albes ; de là, je voyagerai vers
Terrinoth pour commencer ma quête.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

AL-KALIM
A u sud de Terrinoth, au-delà de l’étendue scintillante de la mer,
s’étend un vaste continent aride. Ici, alors que les grandes
baronnies et les royaumes du Nord n’étaient encore que tribus bal-
butiantes, les graines de la civilisation prenaient racine et fleurissaient
déjà. Jadis, Al-Kalim était, prétend-on, le domaine des Djinns, des
demi-dieux mesquins et cruels qui régnaient sur les tribus humaines
depuis leurs châteaux flottants et leurs citadelles de verre.
Quand A’tar, le dieu du Feu et de la Lumière, descendit sur le
monde, il balaya les immondes Djinns, libérant les Humains de leur
joug magique. À la place de ces créatures capricieuses, il engendra le
premier Calife et donna naissance à ce qui est peut-être la plus grande
civilisation humaine que le monde ait jamais connue. Depuis des
siècles, ce grand empire brille comme le phare de la lumière d’A’tar ;
mais peut-être sa dernière heure est-elle venue, car ses ennemis ances-
traux se rassemblent à présent dans la nuit du désert.
Les héros qui arrivent sur ce vaste continent désertique peuvent y
trouver merveilles et périls en égale mesure. Ils peuvent découvrir les
repaires de pirates de la Côte des Voleurs et leurs cités anarchiques
ou se rendre dans les grandes cités-États des Vizirs, où complotent
de puissants seigneurs. Ceux qui veulent gagner de l’avancement et
saisir de nouvelles opportunités peuvent voyager jusqu’à Al-Madena,
cœur du Califat, où siège le Calife. Au-delà de la politique et des
conflits sociaux qui agitent la capitale, les mystères des déserts sont
une invitation permanente à l’aventure, leurs dunes abritant les ruines
des cités des Djinns, des tanières d’animaux mythiques, et les Djinns
eux-mêmes, qui se mêlent toujours des affaires des mortels et tentent
de reprendre le pouvoir.
LE CALIFAT
DU ROI DU DÉSERT
Al-Kalim est gouverné par le puissant Calife, descendant divin du Dieu
Soleil A’tar. L’empire s’étend sur des centaines de lieues le long de côtes
irrégulières, sur des sommets enneigés et de vastes déserts. Le Calife
commande aux diverses tribus et espèces du désert, aux fiers Clans
Bedorri comme à ses vassaux Jiafar et aux citoyens des cités-États des
Vizirs. Cette terre, véritablement ancienne, survit depuis des siècles,
protégée des guerres et du chaos de Terrinoth par la force de ses grandes
armées et de ses flottes ainsi que par le Dieu Soleil. Mais, comme on l’a
dit, il n’en fut pas toujours ainsi. Avant l’arrivée d’A’tar, les Sayr-Savim,
comme on appelle les tribus du désert, étaient esclaves de la volonté
des Djinns. Dans de grandes cités créées par magie, les mortels ser-
vaient ces créatures dotées de pouvoirs magiques, répondant à leurs
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
caprices alors que celles-ci ne vivaient que pour s’amuser. Kajir, la Cité
des Rêves Obscurs, faisait commerce de cauchemars, ses mines d’ob-
sidienne emplies des cris des captifs endormis qui alimentaient la soif
dépravée de leur maître, le Djinn Darmarr. Pendant ce temps, Asolerr,
la Cité de Feu, consumait une centaine d’Humains par jour dans ses
brasiers pour que le Djinn de Feu Erfrart puisse baigner dans sa gloire
incandescente. Pour survivre à cette époque si corrompue, un Humain
devait porter la marque de son maître Djinn, contenter ses désirs, servir
sa cité et participer aux guerres contre les serviteurs des autres Djinns.
Seuls les efforts du culte d’A’tar sauvèrent le peuple d’Al-Kalim.
Se réunissant en secret, ses membres adoraient l’unique chose plus
puissante que les Djinns : le soleil. Quand leurs prières furent enfin
exaucées, une saison de flammes s’abattit sur la terre, accompagnée
d’un grand soulèvement pour renverser les Djinns. Quand les derniers
feux s’éteignirent enfin, les Djinns avaient été bannis du désert, des
montagnes et du ciel ; le Califat fut alors fondé pour les remplacer.
Aujourd’hui, des siècles plus tard, la cité d’Al-Madena se dresse au
cœur de cet empire. C’est là, dans la Vallée Bénie, qu’A’tar descendit
à la surface du monde et que naquit le premier Calife. Sur ce sol sacré
s’étend l’une des plus grandes cités au monde ; ses tours touchent le
soleil, ses flèches d’or luisent comme le feu. Sur des centaines de lieues
à la ronde, le Calife règne, son pouvoir s’étendant sur les montagnes
et leurs observatoires arcaniques, sur les plaines désertiques jusqu’à
Haruun, Siryasa et Irram, les puissantes Cités des Vizirs, ainsi que sur
tous les chemins qui conduisent à la mer baignée de soleil et à la Côte
des Voleurs, avec ses innombrables villes commerçantes.
LA COUR DU CALIFE
Al-Madena, la capitale du Califat, se situe au pied des falaises de
la Vallée Bénie, où les eaux d’une rivière scintillante cascadent sur
la roche rouge cuite par le soleil. La richesse de tout Al-Kalim est
concentrée le long des rues et dans les bazars de la plus grande des cités
du Califat. On y trouve presque tout ce que l’on désire, à vendre ou
à troquer, et chaque coin de rue recèle des merveilles qui éblouiront
ou étonneront les voyageurs venus d’autres pays. Sous cette richesse,
cependant, se cache une obscurité persistante que la lumière d’A’tar
n’est jamais véritablement parvenue à faire disparaître. Comme on dit
souvent chez les Sayr-Savim, l’ombre du géant est plus sombre à ses
pieds, ce qui est sûrement vrai pour Al-Madena.
Bien que l’éclat d’A’tar soit évident dans des endroits aussi glo-
rieux que la Bibliothèque d’Adrashi, dont les sous-sols renferment
d’infinies connaissances, et la Tour des Miséricordieux, le plus
ancien des hôpitaux du Califat, de nombreux quartiers de la cité
sont dangereux pour les imprudents qui s’y aventurent. Décadence
et vice règnent en maîtres dans les repaires de drogués de Kaliffar, au
fond du Labyrinthe des Nomades, ou dans les Arènes de Sable et les
Fosses à Cicatrices, où les gens, les bêtes et les monstres se battent
pour amuser les foules.
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Chapitre III : Terres de magie
Évidemment, pour les aventuriers audacieux, cela peut signifier
qu’ils pourront tirer le meilleur parti de ces deux mondes : avoir la
chance de fréquenter les savants et les guérisseurs les plus brillants,
les aider dans leur quête pour atteindre l’illumination, mais aussi ren-
contrer des marchands aux activités douteuses et s’acoquiner avec des
criminels qui attaquent les étrangers sans aucun scrupule.
Cité dans la cité, le palais se dresse dans toute sa splendeur, pro-
tégé des vicissitudes du commun des mortels. Là demeure le Calife,
qui ne s’aventure que rarement hors de ses superbes murs et de ses
salles parfumées. Comme il est le descendant divin d’A’tar, il ne
s’occupe pas de la plupart des affaires des mortels : une armée de
conseillers et de bureaucrates s’en charge et contrôle le fonctionne-
ment du Califat.
Hiresh, le Prince des Monnaies, est probablement le plus influent
d’entre eux, bien que Jorgul, la Lance du Désert, général de la grande
armée, conteste souvent cette affirmation. Hiresh s’exprime souvent
au nom du Calife, et c’est devant ce grippe-sou ratatiné que les vizirs
et les doyens des collèges doivent plier le genou s’ils souhaitent obte-
nir l’aide de la capitale. Complètement paranoïaque, Hiresh ne se
déplace jamais sans une forte escorte. Il emploie également de nom-
breuses doublures par mesure de précaution, ce qui lui confère la
réputation d’être partout au même moment. Les héros impliqués
dans les activités du palais rencontreront très probablement Hiresh,
en tant qu’allié ou ennemi. Le Prince des Monnaies est toujours inté-
ressé par les individus qui peuvent l’aider à étendre son influence ou
imposer sa volonté au-delà des murs de la cité. Cependant, ceux-là
doivent se méfier, car Hiresh peut changer d’avis à leur sujet et
s’emporter aussi vite que le vent du désert se lève, surtout si cela
sert ses desseins et permet de faire porter aux autres le blâme pour
ses méfaits.
LES COLLÈGES DES ARCANES
Des flèches scintillantes et des lieux de culte obscurs foisonnent dans
toutes les cités d’Al-Kalim. Ce sont les sanctuaires des magiciens qui
composent les collèges de sorcellerie, et conduisent des recherches sur
les nombreuses disciplines magiques pratiquées à Al-Kalim. Les pre-
miers collèges furent créés par des lanceurs de sorts qui revendaient
les secrets volés aux Djinns. Ces magiciens de l’ombre fabriquèrent
des bijoux, des tapisseries et des lampes pour piéger des fragments
de pouvoir de ces êtres magiques, et les utiliser contre leurs anciens
maîtres. Après qu’A’tar fut descendu du soleil et eut nettoyé la terre,
les magiciens construisirent des caveaux dans lesquels furent conservés
ces objets arcaniques et formèrent différents ordres pour les étudier.
Aujourd’hui encore, chaque collège porte le nom de l’une de ces puis-
santes reliques, comme la Citadelle des Lampes à Al-Madena et la
Flèche du Miroir, qui garde les portes de Siryasa.
En apparence, les Collèges des Arcanes appartiennent tous à une
seule et même organisation dédiée à l’étude et à la progression de la
pratique de la magie ainsi qu’à la protection du Califat. En réalité,
les doyens des différents ordres ont chacun leurs propres allégeances.
Beaucoup ont passé des pactes secrets avec le vizir de leur cité ou
avec le seigneur de guerre de la terre sur laquelle ils vivent. Certains,
comme les descendants d’Ashan l’Ancien, suivent des traditions très
strictes. Parfois, ces estimés personnages se rendent dans la capitale
pour partager leur sagesse et tenir conseil avec leurs pairs, car, comme
le veulent les lois d’Al-Kalim, seul un magicien peut demander des
comptes à un autre magicien. Toutefois, ils restent habituellement
isolés, protégeant jalousement les secrets de la magie élémentaire des
Djinns derrière les murs de leurs tours.
Les héros qui demandent l’aide des Collèges des Arcanes peuvent se
retrouver à parcourir le désert, cherchant les cités perdues des Djinns et
leurs secrets cachés, ou œuvrant pour un ordre contre un autre. Certains
doyens n’hésitent pas à enlever de grands magiciens afin d’augmenter la
puissance de leurs propres rangs. Certains héros ont également entendu
parler des anciens artefacts des Djinns conservés par les différents ordres,
mais seuls les fous ou les désespérés envisagereaient de s’attirer à la fois la
colère des Collèges des Arcanes et celle des Djinns.
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Chapitre III : Terres de magie

LES CITÉS DES VIZIRS La dernière des Cités des Vizirs est Haruun, la Cité des Piliers,
dont la majeure partie est bâtie sous les Montagnes Célestes. Un vaste
Les cités-États d’Haruun, Fort Marchand, Siryasa et Irram rivalisent pont de pierre conduit les visiteurs vers un trou béant dans les falaises
toutes avec la capitale en taille et en richesse ; en outre, chacune d’elles d’où part une route qui s’enfonce dans le sol frais. Creusée dans le
égale en puissance n’importe quelle baronnie de Terrinoth. Ensemble, sable par des esclaves, Haruun est un dédale de quartiers entassés sous
elles sont connues sous le nom de « Cités des Vizirs », chacune est des cavernes en pierre voûtées, ponctuées de puits de lumière et de
dirigée par un puissant seigneur à qui le Calife a octroyé le droit champs de mousse luisante. Haruun est souvent appelée la Cité des
de gouverner. Bien sûr, le véritable pouvoir de ces cités provient de Parias, car de nombreux indésirables d’Al-Kalim viennent y refaire
leur richesse qui, combinée à la distance qui les sépare d’Al-Madena, leur vie. Le vizir Eyrat aux Cinq Doigts ne fait pas grand effort pour
leur confère une grande liberté. Cette richesse génère également des démentir cette réputation, et la rumeur veut que le seigneur à la main
conflits ; il est courant que des affrontements, politiques ou armés, unique dirige bien d’autres choses que la seule cité. La position pros-
aient lieu aux endroits où les routes commerciales se croisent. père dont jouit ici la Guilde des Voleurs n’a rien fait pour arranger
Située au bord du Désert de l’Éternité, Irram est la plus ancienne la situation.
des cités d’Al-Kalim en dehors de la capitale. À sa tête, la Prêtresse du
Soleil Sharish est à la fois la dirigeante de son peuple et la gardienne
du Grand Temple d’A’tar. Irram est un centre religieux et culturel, les
pèlerins des quatre coins du Califat viennent prier dans ses nombreux
sanctuaires. Au centre de son vaste enchevêtrement de bâtiments en
grès ancien se dresse le tombeau du premier Calife. Lorsque le règne
d’un Calife s’achève, sa dépouille est recouverte d’argile puis trans-
portée ici, pour y être ensevelie en gardant éternellement l’ap-
parence de ses derniers instants. Irram est souvent en conflit
avec les Collèges des Arcanes, bien que son propre ordre
de magiciens ait peu de pouvoir hors des murs de la cité.
Sharish croit que les fruits de la magie des Djinns sont
intrinsèquement corrompus, et elle préférerait que le
Califat n’en dépende plus. À cause de cette opinion,
elle se trouve également en conflit avec d’autres vizirs
qui ne s’intéressent qu’à la richesse que les anciens
artefacts des Djinns peuvent apporter.
Fort Marchand, en revanche, est une cité
jeune et dynamique qui s’étire le long du Val des
Bergers. Dirigée par le Vizir Temoth, Gardien du
Bazar, elle permet d’accéder à la Côte des Voleurs
et est le premier port d’escale pour les voyageurs
entrant dans le Califat proprement dit. Son
surnom, la Cité des Étrangers, est amplement
mérité ; elle abrite des quartiers où vivent des
représentants de tous les principaux peuples et
espèces du monde. Fort Marchand est un endroit
où l’on trouve facilement du travail ou des raisons
de partir à l’aventure, car nombre de marchands,
de chefs de guerre et de magiciens de premier plan
disposent d’agents dans la cité qui sont toujours à la
recherche de recrues. Certains d’entre eux sont plus
que disposés à répandre le sang de leurs rivaux pour
s’assurer les services d’un héros talentueux.
Ensuite vient Siryasa, la Cité des Guerrières. La
plupart des grands guerriers d’Al-Kalim sont issus de
son école militaire et de ses centres de formation. Kayree
Lancedesable, Vierge de la Désolation, commande l’armée
de la cité au nom du Calife. Une fois par an, lors du sommet de
Siryasa, Lancedesable elle-même entre dans l’Arène des Lames
et affronte quiconque ose la défier pour obtenir le droit de
gouverner. Beaucoup ont essayé, mais tous sont morts sous
les coups de ses deux lames vipères. Beaucoup de héros se
rendent à Siryasa pour éprouver leurs compétences, tant
dans les fosses de combat que lors de la terrible compé-
tition du Chemin des Dagues, qui a lieu dans un donjon
rempli de pièges creusé dans le flanc de la Honte de Siryasa.
La compétition récompense tous ceux qui terminent les épreuves, et
distingue ceux qui y parviennent en un temps record ou sans verser
de sang.

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 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LA CÔTE DES VOLEURS
Autrefois, la Côte des Voleurs était l’un des joyaux les plus brillants de
la couronne du Califat. Ses ports représentaient la loi et la puissance
du Calife, ses soldats et ses vizirs assuraient un commerce régulier
entre Al-Kalim, Terrinoth, Lorimor et une douzaine d’autres ter-
ritoires. Bien que le commerce soit toujours aussi prospère, et que
l’argent qui en découle emplisse toujours les coffres du Califat, une
sorte de pourriture lente s’installe sur le littoral et lui confère une
réputation beaucoup plus sulfureuse. De nos jours, les criques et les
ports abritent autant de pirates et de voleurs que de marchands ; le
Calife a perdu le contrôle de la plupart des grandes cités maritimes.
Depuis Fort Marchand, le vizir Temoth affiche avec ostentation son
emprise sur les seigneurs des ports de la Côte des Voleurs, et autorise
d’énormes caravanes remplies de leurs marchandises à partir loin dans
le Califat. En réalité, Eyrat aux Cinq Doigts et la Guilde des Voleurs
contrôlent autant que Temoth ce qui circule depuis la côte ; on dit
que pour deux pièces destinées à la bourse de Temoth, l’une d’elles va
dans la poche d’Eyrat.
A'TAR, LE DIEU DU SOLEIL
C hacun des nombreux dieux de Terrinoth et des
territoires au-delà a trouvé une place à Al-Kalim.
Parmi ces myriades d’êtres divins, le plus grand a tou-
jours été A’tar, dieu du Soleil. Car A’tar sauva les habi-
tants d’Al-Kalim des affreux Djinns, et fonda le Califat.
On prétend que le Calife est un descendant direct
d’A’tar, et que le sang brûlant qui coule dans ses veines
lui confère le droit de régner. Beaucoup croient que si le
Calife saignait, des flammes sortiraient de la blessure et
A’tar en personne viendrait sauver son fils, bien que de
mémoire d’homme, on n’ait jamais vu quiconque oser
lever la main contre le souverain.
En tant que grand prêtre d’A’tar, le Calife décide des
rites officiels liés au culte du dieu du Soleil et s’assure
que le cas de ceux qui blasphèment ou pervertissent le
message divin soit rapidement réglé. Le dieu du Soleil a
cependant une influence très large, et, malgré les édits
du Calife, de nombreux cultes l’adorent de manières
différentes. Les Filles des Cendres s’infligent des brû-
lures car elles voient le divin dans le feu, tandis que la
Cabale du Vent du Désert enseigne que les tempêtes de
sable sont une manifestation d’A’tar, et qu’il faut donc
les vénérer, et que le Soleil Béni intime aux dévots de
s’aveugler en contemplant l’éclat d’A’tar afin d’y décou-
vrir la vérité suprême.
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Alors que des dizaines de bourgs et de villages parsèment la côte, les
voyageurs accosteront plus probablement dans la Baie de Coupe-Bourse
ou au Fort Maritime du Ponton Vermoulu. La Baie de Coupe-Bourse
accueille les Cités des Monnaies, trois ports délabrés qui se regardent
de part et d’autre de la baie comme des joueurs méfiants. Dans cette
zone de non-droit où ne règne que la cupidité, les armées privées des
guildes de marchands imposent leurs règles. Quant au Fort Maritime
du Ponton Vermoulu, fabriqué à partir des coques d’une centaine de
vaisseaux capturés, il se dresse au milieu des flots au large de la Côte des
Voleurs. Les navires des pirates comme ceux de la marine du Califat font
voile depuis ses quais grinçants, pour ensuite rapporter leurs butins qui
viennent s’ajouter aux richesses toujours plus grandes du fort.
Les héros qui voyagent sur la Côte des Voleurs ne manqueront pas
d’occasions de partir à l’aventure. À Ponton Vermoulu, pour payer le
prix de son passage, il faut souvent gagner un pari, un gros pari… :
les pirates parient leurs vaisseaux qu’ils peuvent tuer le Kraken de
Dunnweir ou retrouver la flotte naufragée du Jarl Voskol. Les Cités
des Monnaies sont des labyrinthes tentaculaires de péché et de vice où
seuls les criminels les plus adroits peuvent faire fortune, en dépouil-
lant les fourbes seigneurs des ports, ou bien en acceptant des contrats
pour retrouver des personnes enlevées par des marchands d’esclaves
avant qu’elles ne disparaissent dans le désert ou au-delà des mers. Les
vieux forts, qui se dressent comme des dents cassées et qui gardent
souvent l’entrée de l’un des nombreux ports de la côte, peuvent égale-
ment receler leur part de péril et de gloire. Bien que beaucoup abritent
encore une garnison, d’autres tombent en ruine et servent de repaires
à des monstres ou à des choses encore plus horribles. Si les aventuriers
acquièrent une réputation suffisante, ils peuvent attirer l’attention
de Temoth ou d’Eyrat en personne, et se retrouver entraînés dans la
guerre commerciale que se livrent les deux vizirs.
LA GRANDE MER
DE SABLE
Au-delà des murs des cités-États, de l’abri de la Vallée Bénie et de la
Côte des Voleurs balayée par les vents, le désert s’étend vers les mon-
tagnes arides et les canyons ombreux. Le désert constitue la majeure
partie du paysage du Califat, l’eau y est plus précieuse que l’or et les
prédateurs y attaquent les imprudents. Villages et villes se cachent dans
cette étendue ; les habitants s’aventurent rarement loin de la sécurité
des murs et des puits, et gardent toujours un œil fixé sur l’horizon.
LES PÉRILS DU DÉSERT
Hors des cités, Al-Kalim est une terre qui meurt sans cesse de soif. L’air
sec et le sable chaud s’emparent avec avidité de la plus petite goutte
d’eau, et les voyageurs doivent se battre contre les bandits pour conser-
ver leurs provisions s’ils veulent avoir le moindre espoir de franchir les
distances arides qui séparent les colonies. Le soleil qui écrase sans cesse
le paysage est également un ennemi redoutable. De nombreux voya-
geurs ont perdu la vue et la raison pour la simple raison qu’ils n’ont
pu trouver d’ombre ; ce mal s’appelle la cécité de lumière et affecte
l’esprit autant que le corps. Les vents du désert et les maelströms qu’ils
apportent ne sont pas en reste. Les tempêtes de sable fouettent le
désert, les villes et les montagnes d’Al-Kalim, si grandes et si terribles
qu’elles peuvent masquer le soleil pendant des jours, voire des mois.
Se retrouver pris dans une telle tempête vous prive de tous vos sens ;
vous vous retrouvez perdu dans un royaume cauchemardesque où tout
n’est que poussière tourbillonnante et sons assourdis.
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Chapitre III : Terres de magie
Tales of Darkness
LES DJINNS
D e toutes les créatures d’Al-Kalim, les plus énigma-
tiques et les plus dangereuses sont les Djinns. Dans
les cités cachées et les recoins sombres du pays, ils fomentent
leurs machinations contre le Califat. Il existe de nombreux
types de Djinns : les fougueux A’tari, les calmes Maani, les
volages Falkhi, pour n’en citer que quelques-uns. Les Djinns,
comme les mortels, ne sont pas tous égaux. Ils ne sont pas
tous dotés de la même puissance, certains sont anciens et
ont survécu à la destruction de leur empire par A’tar, d’autres
ne sont âgés que de quelques siècles et ne connaissent que
les histoires de l’époque où leur espèce régnait sur le désert.
Les mortels savent peu de choses sur les Djinns, bien
qu’ils soient fermement convaincus qu’une fois invoqué,
Tous ces périls sont des aléas incontournables que les voyageurs
doivent accepter ; mais même s’ils y survivent, une multitude d’autres
dangers rôdent encore dans les recoins maudits et hantés du Califat.
La Faille de la Porte de l’Ombre est réputée pour être le repaire d’âmes
perdues, d’esprits exclus du regard béni du dieu du Soleil. Bannis de
la gloire d’A’tar, ils rôdent dans les profondeurs de la Faille, se languis-
sant de la lumière. Ils fondent avec haine sur tout intrus et dévorent
la chaleur du soleil que peut encore contenir sa chair. Dans la Vallée
des Tempêtes de Sable, les vents peuvent écorcher un voyageur jusqu’à
l’os ; dans le Désert de l’Éternité, un labyrinthe de mirages fait tourner
les aventuriers en rond jusqu’à ce qu’ils en meurent.
LES CITÉS PERDUES
Après l’avènement d’A’tar, de nombreuses cités naguère gouvernées par
les Djinns furent abandonnées et envahies par les sables du désert. Ces
lieux perdus sont maintenant des repaires de monstres, de brigands
et de bien pire encore. Pourtant, une partie de la magie des Djinns
y perdure, et certains cherchent ces vestiges pour s’emparer de leurs
secrets. Loin dans les Dunes Blanches, le Labyrinthe du Mendiant
est tout ce qu’il reste de la cité marchande d’Ajiran, située à la croisée
de routes commerciales, qui abritait autrefois les immenses salles des
coffres du Djinn Rashat. Cette grande étendue de bâtiments envahis
par le sable est devenue un repaire pour les Nomades Kalishar, un
rassemblement de dizaines de clans qui brandissent leurs bannières
en signe de défiance envers le Calife. Toutefois, même les nomades ne
s’aventurent pas trop loin dans le cœur en ruine de la cité.
La Flèche du Phénix est un endroit où peu de mortels osent se
rendre. Cette tour dorée s’élève dans les Désolations Grises ; son som-
met brillant est signe d’avertissement, visible des voyageurs à des lieues
à la ronde. Lorsque les feux magiques d’A’tar ravagèrent les cités des
Djinns, l’un d’entre eux préféra faire fondre son palais d’or et choisit
d’être enseveli dans cette tombe scintillante plutôt que d’être banni.
Le Djinn y réside toujours, attendant que l’avidité des mortels les
pousse à ouvrir sa crypte dorée.
Certaines des cités des Djinns d’Al-Kalim sont encore plus
étranges, transformées par magie en mirages ou suspendues dans le
ciel pour échapper aux incendies purificateurs qui consumèrent leurs
sœurs. Parmi les plus grandes, on trouve la Cité de la Foi, la Cité des
Rêves et la Cité des Nuages. Sortis de nulle part, ces bastions étin-
celants peuvent apparaître comme un mirage en plein désert, sans
un Djinn devient immortel ; les histoires abondent sur les
pouvoirs qu’on leur prête. La sagesse populaire enseigne
également qu’il est risqué de conclure un pacte avec un
Djinn, comme le prouve la triste histoire d’Urnas le
Sans-Marque, qui tua un millier de mortels pour le Djinn
A’tari Jyrrii contre la promesse qu’aucune lame ne pour-
rait plus jamais entailler sa chair. Sa silhouette en pierre
se dresse toujours, immobile, dans les ruines de la cité de
Jyrrii, à l’endroit où le Djinn exauça son vœu. Malgré cela,
nombreux sont ceux qui ne comprennent pas les avertis-
sements que renferment ces histoires et n’y voient qu’une
promesse de pouvoir. Même à une époque où le culte
d’A’tar tient les Djinns à distance, beaucoup cherchent à
les invoquer pour qu’ils réalisent leurs souhaits.
être d’abord plus qu’une brume de lumière, puis devenant aussi réels
que le sol sous vos pieds. Les Djinns règnent toujours en ces lieux ; y
entrer équivaut à pénétrer dans un royaume périlleux où l’on ne peut
se fier à la réalité, car les Djinns adorent se créer de nouvelles distrac-
tions. Cependant, les récompenses que l’on peut y gagner sont gran-
dioses, car ces cités mythiques recèlent des connaissances et des secrets
magiques que le monde des mortels a oubliés depuis longtemps, pour
lesquels bon nombre à Al-Kalim et au-delà paieront des fortunes.
LES HABITANTS
DES SABLES
Les ennemis mortels comme les monstres abondent à Al-Kalim, bien
que bon nombre cachent leur vraie nature, aussi fourbes qu’un mirage
en plein désert. Les aventuriers les plus prudents resteront toujours sur
leurs gardes, car les ennemis les plus meurtriers se tapissent au cœur
de cette grande civilisation qu’est le Califat. Cette section détaille cer-
taines des créatures que les héros sont susceptibles de rencontrer au
cours de leurs voyages au pays des Djinns.
ASSASSIN (NÉMÉSIS)
Les assassins des Confréries Hysshari sont des ombres mortelles qui
rôdent dans les cours d’Al-Kalim. Ces cultes de meurtriers, au ser-
vice du Calife et de ses vizirs, forment et entraînent leurs assassins
dans des temples perdus dans les montagnes et dans des forteresses
cachées dans des oasis. À la Tour des Couteaux, qui pend comme une
dague du plafond souterrain d’Haruun, les tueurs acrobates maîtrisent
l’art de marcher sur les murs. Dans la Vallée de Cendre, les membres
de la Confrérie s’entraînent avec de mystérieuses combattantes pour
apprendre les secrets du meurtre silencieux et des combats nocturnes.
Une fois qu’un assassin a accepté un contrat, il poursuit implaca-
blement sa proie ; il prête serment devant les maîtres de son ordre : les
sables boiront le sang de sa victime, ou le sien s’il échoue. Cependant,
le vrai talent des assassins réside dans leur aptitude à se fondre dans
leur environnement. Ils sont également maîtres dans l’art du déguise-
ment : peu importe leur genre ou leur corpulence, ils peuvent adop-
ter une nouvelle apparence et s’intégrer parmi toutes les strates de la
société d’Al-Kalim.
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 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi

on voyage m’avait ramené dans les Torue à ceux qui avaient signé, en leur désignant un navire amarré
Albes, où je consacrai de nouveau la plupart à proximité. Il mentionna également qu’il donnerait la même
de mon temps à chercher à Trelton ceux qui somme le matin du départ, ce qui devait inciter les futurs
accepteraient de partager leurs connaissances aventuriers à se présenter sur le quai si leur venait l’idée dans
sur la magie ou sur des pierres semblables à celle qui n’aurait la nuit de se dérober à leurs nouvelles obligations.
jamais dû quitter le Calife. Debout sur l’un des principaux
quais, je regardais vers l’ouest. Bien que j’eusse déjà pris la mer Il se dirigea ensuite vers une taverne, et je proposai de lui offrir
par deux fois maintenant, j’étais toujours étonné qu’il y ait tant un verre, car sa gorge devait être sèche après un tel discours.
de liquide dans notre monde. Après avoir passé tant d’années à Nous trouvâmes une table ; je commandai un verre pour mon
ne voir que du sable, regarder l’horizon et ne voir que de l’eau nouvel ami Axdeen et lui posai des questions sur Zanaga et
partout me coupait le souffle. tout ce qui pouvait être en lien avec des pierres magiques.
Contempler autant d’eau finit pourtant par être lassant – « Je n’ai jamais vu de telles pierres… Mais de la magie… ça oui,
même si je suis certain que je changerai d’opinion la prochaine j’en ai vu, et pas qu’un peu, mais rien d’aussi impressionnant
fois que je serai perdu dans les dunes dorées entourant le palais que ça », me répondit-il. Il s’avéra qu’il était parti là-bas
du Calife, puisse-t-il régner autant d’années qu’il y a de grains pour la première fois il y a des années, recruté par un autre
de sable dans le désert. J’étais sur le point de m’en aller quand tout comme il venait d’enrôler les badauds. « Vous voyez ces
une voix forte derrière moi attira mon attention. pousse-charrue au bout de l’autre table, qui sont déjà en train de
boire l’argent que je viens de leur donner ? J’étais comme eux. Je
Debout sur une caisse, un individu à la peau basanée, vêtu de suis même parti de ce quai. » Il but une autre longue gorgée.
cuir épais, agitait un chapeau à plumes et attirait les passants
en leur parlant des aventures qu’ils allaient bientôt vivre et des « C’est le voyage qui a été le pire, poursuivit-il. On contourne
richesses qu’ils gagneraient. Une foule s’assembla lentement devant Lorimor, puis on passe par le sud entre deux territoires hostiles.
lui alors qu’il parlait de Zanaga, où les attendaient des créatures Si vous vous approchez trop du premier, des géants de fumée
merveilleuses et des montagnes de trésors ; il suffisait de aux dents tranchantes émergent pour jouer avec votre bateau. Si
s’inscrire pour partir avec lui vers le sud. Je m’approchai pour vous vous approchez trop de l’autre, vous découvrez si les Elfes
en apprendre plus, car c’était la première fois que j’entendais aiment votre tête ce jour-là. » Je m’abstins de répondre à ses
parler de cet endroit, et la mention des trésors m’évoquait mon commentaires sur ma terre natale et payai une autre tournée.
mystérieux fardeau. « Et si vous restez au milieu, c’est pas mieux, reprit-il. Pas de
Cet individu était un excellent orateur, la foule (moi y compris) terre ni de navires en vue, vous pensez que vous êtes tout seul. Et
buvait ses paroles et chacun rêvait déjà aux opportunités puis, vous découvrez que non. » Sa voix devint basse, peut-être
mirifiques qu’il trouverait dans la jungle luxuriante. Il partirait pour éviter d’effrayer les nouvelles recrues à l’autre table.
avec la marée du matin, et il y avait beaucoup d’argent à gagner « Des tentacules plus hauts que notre mât tentaient d’attraper
pour les courageux qui s’inscriraient pour voyager avec lui. des poissons gigantesques avec des dents plus grosses que des
L’attention augmenta quand il mentionna un paiement d’avance, lames de glaives, qui se débattaient comme des démons. » Il
et crût encore lorsqu’il expliqua que cela permettrait à tout regarda son verre. « La nuit, on voyait des choses… de grandes
le monde de prendre un nouveau départ. Il ne précisa pas choses… passer en dessous de nous, illuminées de flammes
explicitement que cela impliquait aussi de se laver les mains violettes et jaunes. » Je me souvins de mon propre périple
d’engagements financiers et autres obligations familiales, mais en bateau, et réalisai en frissonnant que je n’avais même pas
tout le monde comprit parfaitement ses sous-entendus. réfléchi alors à ce qui pouvait se cacher dans les eaux.
Des gens sortis de la foule s’approchèrent, seuls ou, bien que « Cette traversée était la pire que j’ai jamais connue, et
plus rarement, en petits groupes, pour écrire leur nom avec pourtant j’ai fait ce voyage des dizaines de fois depuis, ajouta-t-il.
enthousiasme (ou simplement faire une croix, car beaucoup On a finalement traversé la Mer Sélénique, puis on a accosté à
trop de gens dans ces pays ne savent encore rien des lettres) Zanaga, au Ravin d’ Herman, à l’époque de sa construction. »
sur un long parchemin. Ils s’engageaient ainsi à monter à bord
du navire et, une fois arrivés à destination, à travailler un Alors qu’il attrapait une autre bouteille, je remarquai le lien
certain nombre d’années dans cette contrée lointaine. Une fois le en cuir qu’il portait autour du cou. Il avait quelque chose
parchemin rempli, il arrêta son discours et distribua de l’argent d’inhabituel : il n’y avait aucun pendentif dessus. Presque tous

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 Royaumes de Terrinoth
Extrait du Journal de Tarik Al-Farabi

les habitants de ces îles avaient une pièce qui pendait sur
leur poitrine, en souvenir d’un pari gagné, d’une transaction
réussie ou de quelque chose de plus litigieux. Je lui posai des
questions à ce sujet ; Axdeen, d’abord réticent, me raconta
finalement son histoire.
Il s’avéra (après avoir vidé la bouteille) que le jeune Axdeen
s’était aventuré seul dans la jungle un matin, peu de temps
après son arrivée. Après plusieurs jours pendant lesquels son
groupe avait exploré les environs, découvrant d’anciennes reliques
et combattant les créatures bizarres de la jungle, il s’était senti
suffisamment confiant pour partir seul. Il se disait que c’était
sa chance, le moment de se tailler sa part de gloire.
« Bien sûr, j’étais un imbécile, marmonna-t-il. Je me suis
perdu assez vite, mais j’étais trop fier pour appeler à l’a ide.
J’allais trouver un trésor, fonder ma propre colonie ! » Il rit
doucement à ce souvenir.
Son histoire n’était pas aussi héroïque que celles qu’il avait
racontées. Le feuillage épais lui masquait le chemin. Les
insectes le piquaient sans cesse, les oiseaux lançaient des cris
effrayants et il percevait des mouvements autour de lui.
« Je suis arrivé en terrain dégagé, dans une clairière où
j’a i trouvé un peu de répit. Mais tout y était mort. »
Axdeen me regarda comme si je devais avoir une explication.
« L’herbe était noircie, les troncs pourris. Des animaux de
toutes sortes gisaient sur le sol, leur chair gonflée avait même
éclaté par endroits. Tout était calme, malgré le bourdonnement
des flopées de mouches. J’étais fatigué et je ressentais le besoin
impérieux de m’allonger et de me reposer là. Et je n’avais pas
envie de me relever tout de suite. Voire jamais. »
Ses yeux s’emplirent d’excitation. « Soudain, un bras m’a
attrapé, épais et vert, et quelque chose m’a tiré dans la jungle !
C’était chauve, ça marchait comme un homme, mais ça avait
deux bras en trop ! J’étais sur le point de le frapper quand
j’a i vu qu’une des créatures sur le sol n’était finalement pas si
morte. » Il grimaça. « Ça avait une grande gueule ouverte,
prête à prendre une grosse bouchée, et ses mâchoires ont
claqué d’un coup ! Et heureusement, ça m’a raté. »
À peine les deux gaillards étaient-ils revenus dans la jungle que
quelque chose tomba sur le sauveur d’Axdeen, quelque chose
avec encore plus de membres que la… créature ? Son ami ?
J’emploierai le terme « ami », car c’est bien ce qu’ils
devinrent. Axdeen tira sa lame, son énergie lui revint, et il
réussit à se débarrasser de leur ennemi. « Il s’avère que cette
chose aurait pu nous tuer lui et moi sans trop de problèmes,
dessiné d’après sa description. Je suis
déchiré quant au fait de savoir si je
souhaite vraiment le rencontrer, lui et ceux
de son espèce à Zanaga, ou pas.
251
m’expliqua-t-il. Nous ne nous comprenions pas, mais je lui ai
donné ma médaille. Il l’a ajoutée à son collier de dents, et m’a
donné ceci. »
Axdeen sortit un autre collier de sous sa chemise. Y pendait
une grosse tête de grenouille faite d’un métal qui aurait bien
pu être de l’or. « Je pense que ça porte chance, déclara-t-il.
Je n’a i plus fait de mauvais voyage depuis que je l’a i. »
Le nouvel ami d’Axdeen lui indiqua la direction à prendre, et
ils se séparèrent. Bientôt, Axdeen entendit du fracas dans les
branches. Un certain Annen le retrouva et l’a ida à rejoindre le
camp, coupant de grands pans de feuillage avec sa machette.
Axdeen me raconta avoir revu son ami plusieurs fois depuis,
mais seulement quand il sortait seul. Il essaya de retrouver la
clairière où tout était mort, mais apparemment, elle n’existait
plus. « Peut-être qu’il est parvenu à guérir cette terre ?
Ou que la clairière a bougé ? murmura-t-il, presque pour
lui-même. Pourtant, j’en ai vu d’autres, et elles me semblaient
être plus grandes à chaque fois. » Il n’en parla jamais à
personne, même pas à son ami. « Les Trois Crânes paient
bien, mais j’a i vu ce qu’ils font avec certaines des choses qu’il y
a là-bas, et je pense que ça va mal se passer s’ils s’en mêlent.
Vous et moi, on va garder ça pour nous, hein ? »
Je lui assurai qu’il en serait ainsi, et déclinai une nouvelle fois
sa proposition de m’enrôler sur le navire. Il me restait encore
beaucoup à découvrir dans les Torue Albes avant de m’aventurer
à Zanaga, mais s’il y avait quelque chose de magique là-bas,
je devrais m’y rendre pour mener mon enquête
à un moment ou à un autre. Et il
y aurait également des trésors et
des dangers en abondance pour les
autres pendant ce temps.
Le mystérieux « ami » d’Axdeen
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
ZANAGA
L oin au sud-ouest de Terrinoth se trouve le continent de Zanaga.
Des jungles remplies d’ombres cachent d’anciens secrets que la
lumière du soleil n’atteindra jamais, alors que des sommets monta-
gneux menaçants dominent un paysage inchangé depuis la nuit des
temps. Des créatures sauvages vivent dans ces vastes jungles et de fières
tribus les vénèrent ou les combattent. Ces dernières années, des expé-
ditions venues d’autres royaumes ont percé le cœur de la jungle, et
des colonies se sont développées sur des terres fraîchement défrichées,
le long des sentiers accidentés et des voies navigables. Bien que les
lumières envahissantes de la civilisation aient en grande partie chassé
les ténèbres apparemment primitives de Zanaga, de nombreuses
ombres persistent, et il reste encore bien des secrets et des merveilles à
découvrir pour ceux qui viennent de par-delà les mers.
Les héros qui effectuent le périlleux voyage à travers l’océan pour
rejoindre Zanaga découvriront une terre riche d’aventures et de richesses,
qu’ils souhaitent travailler pour la Compagnie Marchande des Trois
Crânes et aider à créer de nouvelles routes commerciales vers l’intérieur
des terres, gagner le respect des Singhara et peut-être lutter avec eux contre
les sbires du dieu de la Peste, partir seuls pour trouver l’empire perdu des
Hommes-Lézards ou combattre les Nagas qui vivent dans ses ruines.
Ceux qui ont assez de courage pour affronter ces défis pourraient
même choisir de rester vivre à Zanaga. Plus d’un aventurier s’est taillé
son territoire à coups de machette dans la jungle et a créé une colonie
qui porte son nom.
UN NOUVEAU MONDE
Zanaga est pour beaucoup une nouvelle terre étrange, loin des rivages de
Terrinoth. Par endroits, sur les côtes, des voyageurs venus d’autres conti-
nents ont pris le risque d’acheter de petits territoires, y établissant petites
villes et ports de fortune d’où pourront partir les expéditions d’explora-
tion. Les aventuriers et les explorateurs de Terrinoth, d’Al-Kalim et des
Torue Albes ont tous fait le long et périlleux voyage en mer vers Zanaga
pour y faire fortune. Fruit de leur dur labeur, la colonie du Ravin
d’Herman s’est développée sur les berges de la Cicatrice des Larmes.
Cette ville constitue le point le plus éloigné à l’intérieur des terres que
peuvent atteindre les navires de haute mer. Le trajet de l’océan au Ravin
d’Herman est long et sinueux, mais c’est le seul qui existe à travers les
immenses marécages qui protègent les côtes de Zanaga.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Le Ravin d’Herman, petite ville comparée à celles de Terrinoth,
reste la plus grande colonie de Zanaga ; les Humains et autres visiteurs
audacieux y entament leur voyage dans l’inconnu.
LES TERRES DU PEUPLE LION
Alors que les jungles, les marécages et les montagnes restent des lieux
inaccessibles peuplés de monstres et de reptiles, les plaines de Zanaga
appartiennent à l’ancien et puissant peuple lion des Singhara. Ce
peuple de lions humanoïdes arpente les prairies en grandes et fières
troupes, issues des anciennes tribus, qui dominent chacune une
région. Le territoire de ces troupes s’étend de la Route des Héros aux
Terres Stériles du Soleil Cuisant, et même au-delà.
Suite à l’arrivée de ceux qui marchent sur l’eau (comme les
Singhara appellent les colons venus de l’autre côté des grandes
étendues d’eau au nord), certaines troupes ont appris les langues
des nouveaux arrivants et ont commencé à faire du commerce avec
les habitants du Ravin d’Herman et d’autres colonies. Ceux-ci ont
toutefois la sagesse de se méfier des coutumes des Singhara : le
peuple lion n’accorde de l’importance qu’aux compétences mar-
tiales et aux démonstrations de force, et nombre de leurs accords
sont scellés par un combat rituel et en répandant du sang. Il arrive
qu’un chef de troupe défie un voyageur dès leur première ren-
contre, non par envie de le tuer ou par colère, mais simplement
pour juger de sa valeur.
Quelques troupes acceptent de traiter avec ceux qui marchent sur
l’eau, mais de nombreuses autres s’y refusent. Certaines gardent leurs
distances et observent les voyageurs, n’agissant que s’ils s’approchent
trop de leurs villages, alors que d’autres sont ouvertement hostiles et
considèrent simplement ces nouveaux venus comme un danger de
plus pour leur terre.
Peu d’explorateurs savent que les Singhara comptent parmi les
plus puissants ennemis de Tarakhe, combattant encore et toujours
l’influence du dieu mort. Bien que le dieu de la Peste ait été ren-
voyé dans sa tombe de pourriture, une grande partie de son poison
infeste toujours Zanaga, corrompant et tuant la terre. Le peuple
lion mène une guerre incessante contre ces séquelles et les créatures
qu’elles engendrent. Dans des lieux comme la Forêt des Crocs, que
le pouvoir de Tarakhe a rendue torturée et inextricable, les Singhara
traquent les ténèbres lors de leurs chasses, à la recherche des disciples
du dieu. Lorsqu’ils s’affrontent, les rugissements des guerriers léonins
et les sifflements de leurs ennemis serpentins résonnent sous les arbres
couverts de cloques.
Une bataille contre les serviteurs de Tarakhe constitue l’un des rares
événements qui peuvent inciter une troupe de Singhara à s’allier avec
d’autres espèces, car le peuple lion tolère les explorateurs s’ils choisissent
de prendre les armes contre le dieu immonde, et s’ils prouvent leur
valeur au combat. Ils peuvent même accorder à un étranger l’insigne
honneur d’être accepté dans une troupe, bien que cela ne se produise que
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
très rarement. Après qu’un aventurier a prouvé sa valeur au chef d’une
troupe, généralement lors d’un combat, il peut parcourir le Chemin des
Os jusqu’à Singhavrem, le foyer du peuple lion. L’aventurier devient
l’ennemi des Singhara dès qu’il pose le pied sur le chemin et le reste
pendant tout ce long et dangereux voyage, jusqu’à ce qu’il triomphe
des gardiens de Singhavrem et pose une paume sanglante sur le temple
du lion. Seul cet exploit lui permet d’obtenir les cicatrices rituelles le
désignant comme un véritable Singhara aux yeux de tous.
LES DIEUX DES PLAINES
Les dieux des Singhara sont, comme la plupart des divinités ances-
trales de Zanaga, des bêtes dotées d’une immense puissance. Hamzah
le Seigneur de la Troupe, le dieu lion de la Guerre, est un gigantesque
fauve qui rôde dans les vastes plaines et les tanières du monde souter-
rain sous Singhavrem. Les Singhara rugissent fièrement pour monter
leur dévotion à Hamzah quand ils chassent ou chargent au combat ;
les légendes racontent même que, s’ils en ont besoin, Hamzah bondit
pour se joindre à eux.
Les héros qui gagnent le respect d’un ancien Singhara peuvent avoir
l’honneur d’entrer dans la tanière du grand lion et d’être autorisés à
prendre une mèche de sa crinière. Lorsque ces poils sont tissés sur des
armes ou une armure, on prétend qu’ils décuplent la force du guerrier.
Des individus plus retors essaieront peut-être de déjouer la vigilance des
gardiens du temple de Singhavrem pour entrer dans la tanière du fauve
endormi, car on prétend qu’il se repose sur une mon-
tagne d’os pleine de trésors.
Jararr, cruel frère d’Hamzah, est le grand dieu panthère de la Chasse
Sanguinaire. Les chasseurs prient avec ferveur cette féroce divinité de
sang et de mort avant de tuer leurs proies, et élèvent des statues d’obsi-
dienne striées de sang en son honneur. Tandis qu’Hamzah le Seigneur
de la Troupe symbolise la civilisation et l’importance des tribus, Jararr
est un solitaire. Chez les Singhara, seuls les parias lui vouent un véri-
table culte ; ils choisissent alors de teindre leur crinière en noir par
respect pour leur cruel maître.
Les aventuriers cherchent à trouver Jararr, car s’ils chassent au
côté de la panthère géante et s’ils parviennent à suivre le rythme de
la gigantesque bête et à terrasser leur proie, une partie du gibier leur
reviendra. Certains Maîtres des Potions Singhara, tout aussi malé-
fiques, sont connus pour apposer la marque des proies de Jararr sur
leurs ennemis ; ces âmes désespérées chercheront probablement de
l’aide si elles veulent avoir une chance de s’enfuir de Zanaga vivantes.
Le furieux battement des tambours est le langage du Dieu Gorille,
Gor-Bor-Gor, le plus grand de tous les primates de Zanaga. Créature
pleine de rage et de force brute, les guerriers téméraires lui dédient
leurs prières avant la bataille ou imitent ses cris de guerre pour effrayer
leurs ennemis. La légende raconte que Gor-Bor-Gor vit dans la
Flèche, une montagne qui ressemble à un grand singe endormi quand
le soleil couchant caresse ses flancs. On prétend qu’il attend le grand
champion qui brisera les chaînes de pierre qui le retiennent, et qu’ainsi
il pourra libérer sa fureur contre Zanaga.
Évidemment, la plupart des Orcs de Zanaga vénèrent Gor-Bor-Gor
et tentent constamment de réveiller la créature afin qu’elle puisse
détruire la civilisation. Certains apportent des sacrifices vivants à la
Flèche, brisant les os et les colonnes vertébrales à mains nues pour
réveiller le singe, tandis que d’autres cherchent des aliments spéciaux
pour le nourrir. Selon les Orcs, il existe des bosquets de fruits rouge
sang qui ne poussent que dans les profondeurs de la jungle,
dont la chair peut susciter la rage même dans l’âme la
plus placide. Ils espèrent qu’en récoltant assez de
ces fruits de sang, ils donneront envie au grand
Gor-Bor-Gor de descendre de sa Flèche.
Le cousin de Gor-Bor-Gor est le Dieu
Singe. On sait peu de choses sur ce mys-
térieux maître des singes sanguinaires.
Jadis, les explorateurs crurent que
les idoles grossières érigées par les
singes représentaient leurs alphas,
de grandes créatures qui régnaient
sur leurs violentes tribus. Avec le
temps, il devint évident que ces
animaux adorent le Dieu Singe, le
considèrent comme un être divin
et lui apportent des sacrifices et la
viande de leurs victimes. Les moti-
vations et les désirs du Dieu Singe
restent obscurs.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
LES DIEUX D'OMBRE ET DE MAGIE
Des fils de magie noire parcourent les contrées sauvages de Zanaga, et
en leur centre repose Arachnée la Déesse Araignée. Dans une grotte
sous le Ravin d’Herman, l’énorme araignée intelligente contrôle son
empire secret. Alors que les mortels essayent d’étendre leur emprise
sur Zanaga, Arachnée s’immisce dans toutes leurs transactions. Des
légions de sbires répondent à son appel, leurs esprits reliés depuis qu’ils
ont bu son venin ; un bon nombre des capitaines de la Compagnie
des Trois Crânes sont ses fidèles serviteurs, et portent un petit tatouage
d’araignée caché quelque part sur leur corps.
Les héros venus de par-delà les mers qui gênent l’expansion du
réseau d’Arachnée seront soudain la cible d’anciens alliés et de par-
faits inconnus se liguant contre eux, ou d’événements malencontreux
entravant leurs efforts. Les véritables gêneurs recevront peut-être
une « invitation » à boire le venin de la Déesse Araignée ; après tout,
Arachnée porte aussi un vif intérêt aux êtres venus d’ailleurs et espère
un jour voir ses toiles s’étendre au-delà des mers.
Harridan la Harceleuse, sainte patronne des espions et des assassins,
est une alliée d’Arachnée. Déesse Oiseau, elle vit à Zanaga depuis d’in-
nombrables générations ; elle est capable de prendre la forme d’une
femme ou d’un majestueux condor des montagnes. Elle compte des
adeptes parmi toutes les espèces, qui, contrairement aux serviteurs
d’Arachnée, la servent volontairement, dans l’espoir d’aider à pro-
téger Zanaga des dieux maléfiques et de l’avidité des mortels. Ainsi,
Harridan tempère la soif de pouvoir d’Arachnée ; elle utilise souvent à
ses fins le réseau de la Déesse Araignée.
Les aventuriers devront peut-être demander de l’aide aux agents de
la Déesse Oiseau ou même rejoindre leurs rangs, et voyager à travers
les terres pour lutter contre ceux qui tentent de détruire ou d’exploiter
Zanaga. Ces services sont souvent récompensés par des informations,
car Harridan connaît de nombreux secrets, y compris les chemins vers
des lieux oubliés depuis longtemps par les mortels.
L'EXPÉDITION
PERDUE
La jungle épaisse et de hautes chaînes de montagnes protègent
jalousement l’intérieur du continent de Zanaga des explorateurs. Il
n’existe que quelques routes et pistes dans cette nature sauvage. Les
voyageurs doivent trouver le bon chemin, ou se le tailler à coups de
machette, s’ils souhaitent atteindre les anciens temples et les tré-
sors de l’empire saurien disparu qui dominait autrefois ces terres.
Pourtant, cachés dans la jungle, certains vestiges proviennent indé-
niablement de Terrinoth : des balises sur certains chemins et des
ruines de colonies abandonnées évoquent une tentative beaucoup
plus ancienne de s’installer sur ce continent. Ce sont les restes d’une
expédition entreprise avant les Deuxièmes Ténèbres, quand une
flotte d’Humains et d’Orcs, partie à la recherche de nouvelles terres
à piller, navigua vers le sud et disparut à jamais. Jusqu’à récemment,
le sort de l’expédition n’était que conjectures de la part des éru-
dits, mais il semblerait que, pendant un certain temps au moins,
ces Humains et ces Orcs aient élu domicile au milieu de la jungle.
On ne sait toujours pas ce qui mit fin à leur brève présence, mais
les féroces descendants de ces premiers colons vivent encore dans la
jungle et tourmentent ces terres.
Les ruines d’un monument orc, simplement appelées le Pic de nos
jours, regardent fixement les Terres Stériles du Soleil Cuisant et ses
environs. Le seigneur des brigands, Urgash l’Impitoyable, y règne
sur son armée d’adeptes assoiffés de sang. Urgash et son peuple ne
quittent que très rarement le Pic et se contentent d’attaquer ceux qui
sont assez fous pour pénétrer dans leur antre. Parfois, ils s’aventurent
à l’extérieur à la recherche de viande fraîche. La légende raconte
qu’Urgash est le descendant dégénéré du shaman orc Hrgrun, et
porte toujours le cristal magique luisant de son ancêtre autour de
son cou taché de sang.
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

Urgash et ses disciples ne sont pas les seuls descendants de l’expé-

dition perdue à avoir survécu. Au nord, là où les Pics de Trancheciel
s’enfoncent dans la Forêt des Crocs, se trouve le Gouffre du
Désespoir. La cité qui s’accroche à ses parois abruptes est le point
le plus éloigné atteint par l’expédition ; le gouffre est peut-être la
cause de son échec. Abritant un labyrinthe de ponts et de tunnels en
ruine, il est peuplé d’habitants vêtus de guenilles qui évitent à tout
LA COMPAGNIE MARCHANDE
prix la lumière. Les Chuchoteurs, comme on les appelle, se crèvent
volontairement les yeux pour demeurer à jamais dans les ténèbres, DES TROIS CRÂNES
en offrande à leur dieu nocturne. Les histoires racontent comment
les Chuchoteurs ont jadis construit des tunnels sous tout Zanaga,
attendant le jour où leur maître fera disparaître le soleil honni ; alors,
ils se soulèveront et massacreront tous ceux qui n’appartiennent pas
L a Compagnie Marchande des Trois Crânes est la plus
puissante de toutes les sociétés de négoce qui pillent
les richesses de Zanaga. Constituant une véritable armée à
à la nuit. elle seule, elle est contrôlée par les seigneurs pirates d’Orris
dans les Torue Albes ; elle emploie des êtres de toutes les
Plus près du Ravin d’Herman, des tribus issues de l’expédition
espèces imaginables. À bien des égards, la Compagnie des
perdue continuent d’attaquer les voyageurs. Certaines sont deve-
Trois Crânes fait office de gouvernement non autochtone
nues riches en pillant les marchandises échangées avec le continent.
à Zanaga. Son emblème distinctif, les trois crânes, est peint
Parmi elles, la plus redoutée est la tribu des Corsaires des Eaux
sur la plupart des marchandises exportées et flotte sur des
Sombres. Son capitaine, un descendant de l’un des rares Nains à
bannières au-dessus des colonies à l’intérieur des terres,
avoir voyagé avec l’expédition, commande un redoutable vaisseau
jusqu’au Gué de Terr.
mécanique construit par ses ancêtres, qui peut naviguer sous les
vagues. Les barges et les navires marchands ne disposent souvent Motivés uniquement par le profit, les capitaines de la
que d’un instant avant que les pirates nains ne surgissent du fond Compagnie des Trois Crânes stationnés dans la région
de la rivière pour attaquer. Des rapports mentionnent même des sont plus qu’heureux d’aider les voyageurs et les aventu-
attaques de Nains contre les navires marchands qui naviguent le riers, finançant souvent leurs expéditions et leur offrant
long de la côte de Zanaga. même des guides, des mercenaires et des rabais sur les
marchandises. Toutefois, ces offres généreuses ont tou-
LE DIEU QUI CHUCHOTE jours une contrepartie ; les capitaines sont prudents et
ne concluent jamais de marché si cela ne sert pas au
Var Ni est le dieu momifié de la Folie et de la Terreur. Objet d’effroi mieux leurs intérêts. Les aventuriers insouciants qui ne
parmi les habitants de Zanaga, Var Ni a jadis étiré ses ailes et fait dis- lisent pas les petites lignes du contrat reviennent souvent
paraître le soleil, ainsi que le veut la légende, avant de se repaître des de leur expédition en devant au capitaine plus de trésors
tribus sous un voile de nuit éternelle. Seule l’intervention de grands qu’ils n’en ont récupéré. Ils contractent alors une dette
héros permit d’abattre la puissante bête, mais ils furent incapables de envers les Trois Crânes, situation que le capitaine fera
véritablement la détruire avant que ses serviteurs n’emportent son tout pour entretenir.
cadavre et ne l’embaument pour l’enterrer.
Les Chuchoteurs déterrèrent les immenses restes de Var Ni dans
le Gouffre du Désespoir, et versent depuis le sang de leurs sacrifices
dans sa gueule pleine de crocs. Même inerte, le Dieu Chauve-souris
envoie d’immondes rêves et des vagues de ténèbres à travers le pays,
faisant courir des rumeurs parmi les shamans à propos de la venue
de la nuit éternelle et plongeant soudainement des régions entières
dans l’obscurité. Les Chuchoteurs accomplissent leurs missions dans
cette noirceur surnaturelle, œuvrant lentement pour ouvrir la voie au LES MAHKIM
retour de Var Ni.
Être reptiliens à quatre bras, les Mahkim sont les héritiers de l’empire
des Hommes-Lézards. Ils étaient autrefois soldats impériaux ; l’héritage

LES TRIBUS
DES DIEUX REPTILES
Zanaga est le domaine de trois espèces majeures liées aux Dieux
Serpents. Bien que les Mahkim, les Hommes-Lézards et les Nagas
aient tous en commun d’avoir une apparence reptilienne, ils
sont constamment en conflit. Beaucoup s’aventurent à l’intérieur
des terres depuis les côtes ou le Ravin d’Herman pour chercher
les merveilleux trésors gardés par ces espèces, bien trop souvent
pour ne devenir qu’une légende de plus parmi toutes celles qui
entourent Zanaga.
de ces jours glorieux perdure dans les tactiques complexes et les armes
uniques qu’ils utilisent ainsi que dans leurs compétences de combat dans
la jungle. Alors que les Hommes-Lézards qui vivent encore de nos jours
ne sont que de pâles descendants qui ne se souviennent que vaguement
de la gloire de leurs ancêtres, les Mahkim ont pris soin de conserver
leur culture. De nombreuses tribus de Mahkim vivent près d’anciennes
routes ou à l’ombre d’un ancien temple des Hommes-Lézards, proté-
geant ces édifices des Nagas désireux de voler leurs secrets.
Les aventuriers peuvent s’allier ou s’opposer aux Mahkim,
selon qu’ils viennent leur demander conseil ou s’emparer de leurs
pontes. Ces œufs d’un vert laiteux se vendent cher dans les ports de
Terrinoth et d’Al-Kalim, où leurs propriétés curatives sont célèbres.

256
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
Guides hors pair, les Mahkim sont par ailleurs les maîtres des voies
navigables à l’intérieur des terres, ce qui peut s’avérer utile pour éviter
les chasseurs nagas tapis dans les profondeurs de l’ancien empire des
Hommes-Lézards. Les explorateurs recrutent parfois des guerriers ou
des chasseurs Mahkim, les jeunes de cette espèce ayant la réputation
de partir à l’aventure en solitaire pour faire fortune.
Le plus grand village, qui est également le centre spirituel du peuple
Mahkim, est bâti sur le dos de l’énorme crocodile Ravin. Cette énorme
bête, vénérée comme un dieu par les Mahkim, les transporte sur toutes
les rivières et tous les lacs de Zanaga ; en retour, les Mahkim doivent
constamment le nourrir, et l’appétit du monstre est insatiable. Quand
ils relèvent un défi ou répondent à une offense, les guerriers Mahkim se
peignent le corps pour ressembler à leur dieu et hurlent son nom quand
ils se jettent dans la mêlée. Ils dévorent ensuite leurs ennemis vaincus,
chaque bouchée de viande constituant une prière pour leur dieu.
LES HOMMES-LÉZARDS
Les Hommes-Lézards constituent une espèce déchue, brisée par
la roue de l’histoire, qui ne s’est jamais remise de la disparition
de son grand empire il y a des siècles de cela. Plus grands et plus
minces que les Mahkim, ils ressemblent à des Humains recou-
verts d’écailles, et vivent dans les ruines de leurs cités autrefois
magnifiques. Dans la cité lunaire sacrée de Xitotl, les niveaux
supérieurs abritent les Humains et les Mahkim, tandis que les
Hommes-Lézards vivent dans l’ombre des niveaux inférieurs. La
ziggourat de Teno’tek, dont l’emplacement change de saison en
saison, reste un lieu central pour les Hommes-Lézards, bien qu’ils
aient depuis longtemps oublié comment ouvrir ses grandes portes
solaires. On trouve souvent les Hommes-Lézards aux côtés de
Mahkim ; ils portent des ornements faits de vestiges d’anciennes
technologies et manient des outils étranges dont l’utilité échappe
même à leurs propriétaires.
Le Dieu Lézard, Moakileki, est une ancienne figure de légende
soupçonnée d’avoir causé la chute du grand empire des Hommes-
Lézards. Roi du chaos, Moakileki n’est vénéré que par des êtres haineux
et pervers qui veulent la mort du monde. Certains prétendent que le
dernier acte des puissants lanceurs de sorts des Hommes-Lézards, les
Voyants de Cristal, fut de mettre en cage Moakileki, sacrifiant leur vie
aux derniers jours de l’empire pour ensevelir le dieu quelque part sous
les jungles de Zanaga. Les héros à la recherche des légendaires crânes
ornés de joyaux des membres du Conseil de Cristal retrouveront peut-
être la piste de Moakileki – et, s’ils sont vraiment très malchanceux,
découvriront peut-être même le lieu de repos éternel du lézard géant.
LES NAGAS
Anciens ennemis des Hommes-Lézards, les Nagas ont passé des
siècles dans l’ombre, à se cacher de leurs cousins détestés. Quand
l’ancien empire chut, ils sortirent au grand jour, rendirent grâce à
leur Dieu Serpent et revendiquèrent ce qui leur appartenait. Depuis
ce jour, les forces des Nagas, à moitié serpents, à moitié humanoïdes,
n’ont fait que croître à Zanaga. Sous la houlette des Prêtresses de
Set, ils combattent ce qui reste des Hommes-Lézards avec l’espoir
d’enfin les exterminer. Bien que les Mahkim combattent les Nagas,
ceux-ci ont établi leurs nids dans de nombreux anciens temples des
Hommes-Lézards.
Parmi ces temples se trouvent Omaga, le temple du Soleil
d’Obsidienne, dont les couloirs étincelants résonnent des cris
des êtres offerts en sacrifice à Set, et Jatok, le temple de l’Eau, une
tombe engloutie dans laquelle toutes les rivières de Zanaga finissent
par couler. Traîtres et rusés, les Nagas manipulent souvent les explo-
rateurs pour qu’ils trouvent à leur place des artefacts des anciens
Hommes-Lézards, ou qu’ils anéantissent des villages Mahkim qui
UN MAL INISIDIEUX
T arakhe, le dieu de la Peste, a récemment été vaincu
et renvoyé dans son sommeil en décomposition
sous Zanaga. Créature millénaire semant le chaos et la
corruption, il était un ennemi acharné des Mahkim, des
Hommes-Lézards et des Singhara. Jadis, Tarakhe naquit
du déclin de l’empire des Hommes-Lézards, se régalant de
sa destruction. Les sbires du dieu se déchaînèrent sur tout
Zanaga, y compris sur ses innombrables cités, éradiquant
la plupart des ses peuples. La victoire absolue de Tarakhe
fut évitée uniquement grâce aux efforts des Mahkim et des
quelques Hommes-Lézards survivants ; privé de son pou-
voir, le dieu de la Peste retomba dans le sommeil.
Bien qu’il ait été vaincu, l’influence de Tarakhe perdure
sur la terre. Dans la Clairière Putride, le pouvoir du dieu
crée des tempêtes fongiques qui provoquent crises de
démence et illusions permanentes chez les mortels. La
colonie d’Onasan a été envahie par des êtres touchés par
l’horreur de Tarakhe, des mutants retors bien trop désireux
de recruter de nouveaux membres dans leurs rangs. Des
créatures ont également été corrompues par l’influence du
dieu de la Peste, tant les serpents vicieux des Eaux Sombres
que les charognards de la Forêt Ombrale, qui suspendent
les carcasses pourrissantes de leurs proies jusqu’à pouvoir
aspirer la chair putride sur leurs os.
Grâce aux serviteurs du dieu et à leur culte obscur, l’hé-
ritage de Tarakhe perdure et infecte toujours la vie et la
terre de Zanaga. Seuls les Singhara et les Mahkim conti-
nuent de lutter contre cette menace. Leur plus grande
crainte est que les miasmes de Tarakhe se propagent via
la Compagnie Marchande des Trois Crânes ou la ville
fréquentée du Ravin d’Herman, ce qui pourrait signer la
résurgence du pouvoir du dieu.
se dressent sur leur chemin. Certains de ces pions auront peut-être
la chance de s’en sortir vivants, mais la plupart d’entre eux resteront
prisonniers des profondeurs de la jungle et rempliront finalement le
ventre de Set, le Dieu Serpent.
Mensonges et mystères entourent Set, le dieu des Nagas. Selon la
légende, il serait le premier des Nagas, un énorme homme-serpent
aussi grand que les plus hauts arbres de la jungle. Ayant survécu à la
catastrophe qui fit chuter l’empire des Hommes-Lézards, Set travaille
dans l’ombre pour aider ses enfants à recouvrer leur droit de nais-
sance ; son pouvoir s’accroît grâce à leurs offrandes. Les Nagas croient
que Set sera un jour assez puissant pour sortir de sa cachette et envahir
le monde ; il dévorera alors un par un les autres dieux de Zanaga.
257
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie
INDEX
A Coup douloureux (talent)..........................................84
Accessoires magiques.................................................98
Al-Kalim.................................................................242
Alchimie..................................................................113
Autres potions et élixirs........................................114
Ingrédients...........................................................114
Améliorations d'armes.............................................106
Améliorations d’armures..........................................107
Améliorations et enchantements .............................106
Anciens rois...............................................................43
Animaux et matériel afférent...................................104
Années grises.............................................................53
Apothicaire (talent)...................................................84
Aptitude héroïque.....................................................74
Améliorations........................................................79
Origines.................................................................79
Arme de prédilection (aptitude héroïque)..................74
Armes à Distance.......................................................95
Armes de Corps à corps.............................................92
Armes........................................................................92
Armures....................................................................96
Artisanat....................................................................97
Aventures (compétence de Connaissance)..................81
Aventurier (talent).....................................................87
Aymhelin................................................................174
B
Barde (talent)............................................................87
Barde.......................................................................104
Barrage (talent)..........................................................87
Bien informé (aptitude héroïque)..............................75
C
Carrières....................................................................70
Castagneur de taverne (talent)...................................84
Cavalier (talent).........................................................89
Changeforme (amélioré) (talent)...............................87
Changeforme (talent)................................................84
Chant d'encouragement (talent)................................87
Charge aveugle (talent)..............................................88
Charge de taureau (talent).........................................84
Chasseur (talent).......................................................88
Châtiment ! (talent)...................................................91
Combat monté..........................................................83
Communion avec la nature (talent)...........................88
Compétences ............................................................81
Connecté (aptitude héroïque)....................................75
Contre-attaque (talent)..............................................90
Corruption de l’Ynfernael.......................................106
Coup de bouclier (talent)..........................................84
260
Coup écrasant (talent)...............................................91
Coup sournois (talent)..............................................88
Créer et fabriquer des objets....................................112
Fabriquer des objets magiques (encadré)..............112
Processus de fabrication.......................................112
D
Daqan, origines de la dynastie...................................38
Déchaîné (aptitude héroïque)....................................76
Défi ! (talent).............................................................84
Demi-Félis (espèce)...................................................68
Deuxièmes Ténèbres..................................................39
Disciple (carrière)......................................................70
Dissonance (talent)....................................................90
Dos à dos (talent)......................................................91
E
Éclair de génie (talent)...............................................88
Éclaireur (carrière).....................................................70
Éclats runiques........................................................118
Elfes (espèce).............................................................62
Elfes des Cités Libres..............................................63
Elfes, Origines des.....................................................26
Émissaire (carrière)....................................................71
Empire des Dimora (talent).......................................88
Épingler (talent)........................................................88
Érudit (carrière).........................................................71
Espèces (personnages)................................................60
Et si on en discutait ? (talent)....................................91
Étau (talent)..............................................................88
F
Faveur des Fées (talent)..............................................88
Félis (espèce).............................................................68
Feu sacré (talent).......................................................91
Finesse (talent)..........................................................84
Flammes de Kellos (talent)........................................88
Fléau des spectres (talent)..........................................88
Frappe double (talent)...............................................90
Frisson de Nordros (talent)........................................88
G
Garde du corps (talent).............................................90
Géographie (compétence de Connaissance)...............81
Gnomes (espèce).......................................................69
Gnome de Garenne................................................69
Gnome Vagabond..................................................69
Guérison miraculeuse (aptitude héroïque).................76
Guerre de la Larme de l'Ombre.................................27
Guerrier (carrière).....................................................71
 ROYAUMES DE TERRINOTH
Chapitre III : Terres de magie

H Potions et élixirs......................................................102
Humains (espèce)......................................................60 Potions puissantes (talent).........................................90
Humanité..................................................................31 Précision (talent).......................................................84
Prédiction (aptitude héroïque)...................................78
I
Premières Ténèbres....................................................36
Implacable (talent)....................................................91
Primaliste (carrière)...................................................73
Incassable (aptitude héroïque)...................................77
Pro des donjons (talent).............................................84
Influent (aptitude héroïque)......................................76
Proie facile (talent)....................................................90
Interdit (compétence de Connaissance).....................82
R
J
Rage meurtrière (talent)............................................91
Jeunes espèces............................................................29
Récupération héroïque (talent)..................................88
Justice de la Citadelle (talent)....................................90
Rempart (talent)........................................................89
L Rune de l'Ynfernael.................................................119
Lame enduite de venin (talent)..................................91 Runes (compétence de Magie)...................................83
Lande Vitrifiée........................................................193
S
Llovar et les Uthuk Y'llan..........................................33
Sacrifice sanglant (talent)...........................................89
Lorimor, Géographie...............................................220
Sales tours (talent).....................................................89
Lorimor, Histoire .....................................................48
Savoir (compétence de Connaissance).......................81
M Savoir runique (talent)...............................................89
Mage (carrière)..........................................................72 Scélérat (carrière).......................................................73
Magie......................................................................115 Se jeter dans la bataille (talent)..................................90
Arcanes................................................................116 Services...................................................................105
Effets des sorts.....................................................115 Sixième sens (aptitude héroïque)...............................78
Magie et compétences..........................................115 Sombre clairvoyance (talent).....................................87
Magie et compétence Runes.................................116 Sort de prédilection (amélioré) (talent)......................91
Magie de l'Ynfernael............................................218 Sort de prédilection (talent).......................................89
Runes...................................................................117 Steppes du Ru.........................................................208
Sorcellerie............................................................117
T
Matériaux des objets magiques .................................99
Talents......................................................................84
Matériel...................................................................100
Templier (amélioré) (talent).......................................89
Menacer (talent)........................................................88
Templier (talent).......................................................87
Mennara ...................................................................24
Terres des Brumes....................................................160
Monts Dunwarr......................................................186
Terres Sombres........................................................208
N Terrinoth.................................................................136
Nains (espèce)...........................................................64 Les Cités Libres....................................................146
Nain de Forge........................................................65 Timmorran Llander...................................................35
Nain du Dunwarr..................................................64 Tir de précision (talent).............................................90
Nains, origines..........................................................30 Torue Albes.............................................................223
Tourbillon (talent).....................................................91
O
Troisièmes Ténèbres...................................................45
Objets magiques......................................................108
Trompe-la-mort (aptitude héroïque)..........................78
Onde de choc (talent)...............................................90
Orcs (espèce).............................................................66 V
Orc des Plaines Brisées...........................................67 Vaisseau (talent)........................................................91
Orc des Pierres.......................................................67 Virtuosité (compétence de Magie).............................83
Orc des Scindeterres...............................................67 Voyageur chevronné (talent)......................................89
P Z
Parangon (aptitude héroïque)....................................77 Zanaga....................................................................252
Plaines Brisées.........................................................197
Poignarder dans le dos (talent)...................................90
Points de Pression (talent).........................................90

261
Nom du personnage : TM

Espèce :
Carrière :
Joueur :

ENCAISSEMENT BLESSURES STRESS DÉFENSE

Seuil Niveau actuel Seuil Niveau actuel À distance Corps à corps

Caractéristiques

VIGUEUR AGILITÉ INTELLIGENCE RUSE VOLONTÉ PRÉSENCE

Compétences
COMPÉTENCES GÉNÉRALES CARRIÈRE ? RANG COMPÉTENCES DE COMBAT CARRIÈRE ? RANG

Alchimie (INT) Distance (AGI)

Athlétisme (VIG) Corps à corps (armes légères) (VIG)

Calme (PRÉ) Corps à corps (armes lourdes) (VIG)

Coordination (AGI) Pugilat (VIG)

Discrétion (AGI) COMPÉTENCES SOCIALES

Équitation (AGI) Charme (PRÉ)

Magouilles (RUS) Coercition (VOL)

Mécanique (INT) Commandement (PRÉ)

Médecine (INT) Négociation (PRÉ)

Perception (RUS) Tromperie (RUS)

Résistance (VIG) COMPÉTENCES DE CONNAISSANCE

Sang-froid (VOL) Aventures (INT)

Survie (RUS) Géographie (INT)

Système D (RUS) Interdit (INT)

Vigilance (VOL) Savoir (INT)

COMPÉTENCES MAGIQUES RANG COMPÉTENCES SUR MESURE RANG

Arcanes (INT)

Divin (VOL)

Origines (RUS)

Runes (INT)

Virtuosité (PR)

Armes
ARME COMPÉTENCE .DÉGÂTS CRITIQUE PORTÉE PARTICULARITÉ

XP totaux XP disponibles
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Talent Actif ? PYRAMIDE DES TALENTS TM

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talents achetés pour votre personnage. Inscrivez
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achetez dans la boîte en haut à gauche.

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un plus grand nombre de talents dans la
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5 XP 10 XP 15 XP 20 XP 25 XP

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 TM

Entrez dans un monde d’ancienne magie

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Dégainez votre épée, ouvrez votre grimoire et partez à l’aventure dans
le monde fantastique de Terrinoth ! Ce supplément pour le Jeu de Rôle
Genesys vous permet d’explorer l’univers de Runebound, où règnent la
magie, la tragédie et le mystère. Effroyables squelettes Réanimés, dragons
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espèces telles que les Elfes Latari, les Orcs des Plaines Brisées, les Félis,
les Nains de Forge et les Gnomes.
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lointains déserts de sable d’Al-Kalim, les landes glacées d’Isheim ou les
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