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MAGAZINE

BIOGRAPHIE

LES SECRETS
D’UN GÉANT
L’HOMME SANS LIMITES

L 12644 - 12 - F: 20,00 € - RD
NAPOLÉON

Trimestriel n°12 - Mars - Avril - Mai 2024 - P929350


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Sommaire
N°12 - Mars - Avril - Mai 2024

NAPOLÉON
L’HOMME SANS LIMITES
4 Napoléon 1er, premiers secrets 58 Un consul à vie !
9 Le mystère de sa fin 67 Trop petite pour sa légende
21 La Bataille d’Austerlitz, est 73 Un stratège de la cavalerie de
l’une des plus grandes victoires la Garde
Napoléoniennes 87 Un grand Chef pour la grande
41 Le jour où l’armée prussienne armée
s’est écroulée
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Napoléon, l’homme sans limites
Napoléon 1er,
premiers secrets
Napoléon était petit
C’est une idée généralement répandue, tout le
monde le pense, mais dans les faits, il ne l’était
pas ! Bien que surnommé par ses soldats « Le
petit caporal », Napoléon mesurait 1,69 mètre.
Selon les normes d’aujourd’hui, oui, il serait petit,
mais ce n’était pas le cas à son époque. La taille
moyenne des français, à cette, époque était de
1,65 mètre. Les soldats d’infanterie mesuraient
par exemple entre 1,60 m et 1,69 mètre, Napoléon
était donc d’une grande taille pour son époque.
Ce qui trompe très souvent dans les tableaux,
où il semble très petit, est qu’il était très souvent
entouré de sa garde de grenadiers, qui eux,
mesuraient tous au minimum 1,76 mètre, et ils
étaient coiffés de hauts chapeaux à plumets.
Pourquoi Napoléon passait-il sa main dans
son gilet ?
La légende disait qu’il soulageait ainsi un mal
chronique de l’estomac. Mais en regardant la
majorité des tableaux de l’époque, alors tous
ses contemporains avaient cette maladie, car la
plupart des personnages étaient représentés avec
une main dans le gilet ! Napoléon n’avait rien
à son estomac, mais il s’agissait d’une posture
classique à l’époque, une attitude émanant d’une
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bonne éducation à son époque. Il suffit aussi
de lire un ouvrage du père Saint Jean-Baptiste
de la salle, « Les règles de la bienséance et de la
civilité chrétienne ». Dans cet ouvrage, l’auteur
recommande : « Il est assez ordinaire de poser
le bras droit sur la poitrine ou sur l’estomac en
plaçant sa main dans l’ouverture de la veste, à
cet endroit, et de laisser tomber la main gauche
en pliant le coude, pour faciliter la position
de la main, sous la basque de la veste ». C’est
exactement ce que faisait Napoléon !
Napoléon était myope
Oui, l’empereur était bien myope, mais il le
cachait ! Il était interdit de le représenter avec ses
lorgnons ! C’est pourquoi, on ne le voit jamais
représenté avec des lunettes sur les tableaux.
D’ailleurs en règle générale, les lunettes sont très
rarement représentées dans les tableaux. Dans les
faits, Napoléon ne sera presque jamais vu avec
ses lunettes, sauf ses proches au gouvernement,
qui connaissait ce que Napoléon pensait être un
petit défaut.
Napoléon et l’eau de Cologne
C’est un fait, Napoléon aimait l’eau de Cologne.
Peut-être un peu trop, il en consommait un
flacon par jour ! La légende disait même qu’il en
buvait quelques gouttes avant chaque bataille.
Dans la comptabilité de l’état, on dénombre entre
36 et 40 bouteilles d’eau de Cologne acheté par
mois ! Napoléon se frictionnait tout le corps avec

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Napoléon, l’homme sans limites
cette eau, et c’est durant la campagne d’Italie, puis
d’Égypte qu’il prit ces habitudes. Il continuera
d’utiliser l’eau de Cologne durant toute sa vie, et
même en exil à Sainte-Hélène, en en fabriquant
avec les moyens du bord sur place.
Napoléon, sa bibliothèque et son vin
Napoléon n’emportait seulement son eau de
Cologne en voyage, mais aussi sa bibliothèque !
Elle comportait plus de 1 000 livres
soigneusement choisis. Il emmenait à chaque
fois la totalité de cette bibliothèque ! C’est aussi
le cas avec son vin préféré ! Il avait un faible
pour le Gevrey-Chambertin, qu’il emportait
sur tous les champs de bataille. Il en buvait une
demi-bouteille à chaque repas, coupé d’eau, ce
qui ne plaira certainement pas aux puristes.
Napoléon n’aimait pas les chats
Encore une légende invérifiable et probablement
fausse. C’est d’ailleurs grâce à ces félins que ses
hommes furent sauvés en Palestine. Une énorme
épidémie de peste fut provoquée par les rats,
provoquant d’immenses pertes dans les rangs de
Napoléon. On fit appel à des chats, qui faisaient
partie du voyage, pour stopper cette épidémie.
Les chats éradiquèrent l’épidémie en tuant les
rats. Il faut d’ailleurs signaler qu’une race de
chat porte le nom de l’Empereur depuis 1995,
le napoléon, appelé également Minuet. Ce chat
possède de courtes pattes, comme le fameux
Munchkin, et un pelage long, comme le persan.
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Napoléon et les bains
On pourrait croire que l’utilisation abusive
d’eau de Cologne était pour cacher le manque
d’hygiène, ce qui était très souvent le cas à cette
époque ! Ce n’est pas vrai pour Napoléon, qui
attachait une attention forte à son hygiène. Il
adorait prendre des bains et ce, à n’importe quelle
heure du jour ou de la nuit ! C’est pour cette raison
que ses proches tenaient en permanence un bain
chaud, de nuit et jour ! Il prenait tout seul son
bain, se rasait lui-même et se lavait le visage, les
mains et les ongles tout seul. Ce n’est qu’ensuite
que son fidèle valet de chambre, Louis-Constant
Wairy le frictionnait avec de l’eau de Cogne
évidemment ! Chose rare à l’époque, il se lavait
les dents chaque jour avec un cure-dent de buis et
une brosse, trempée, au préalable, dans de l’opiat.
Ses « brosses à dents », étaient réalisées par le
grand orfèvre Martin-Guillaume Biennais et se
composaient d’un manche en or ou en vermeil.
Napoléon et ses enfants
Officiellement Napoléon n’aura qu’un unique
enfant, surnommé « L’Aiglon ». Napoléon
François Joseph Charles Bonaparte naît en
1811, conçu avec l’archiduchesse Marie-Louise
d’Autriche. Il sera aussi connu sous le nom
de Napoléon II. Il ne verra pas beaucoup son
père, un an et demi au total. La dernière fois
que Napoléon verra son fils sera en 1814, mais
ne l’oubliera jamais. Il conservera des portraits

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Napoléon, l’homme sans limites
de son fils à Sainte-Hélène. Il va également
adopter deux enfants, Stéphanie de Beauharnais
et Eugène de Beauharnais. Napoléon aura aussi
un certain nombre d’enfants « illégitimes », nés
de liaisons extraconjugales. Napoléon aura
de nombreuses conquêtes, il se croyait stérile
jusqu’au jour où sa soeur Caroline Bonaparte, la
plus jeune, lui présente une certaine Catherine
Éléonore Denuelle de la Plaigne. A 19 ans, elle
va donner un fils à Napoléon, Charles Léon,
mais Éléonore ne reverra jamais Napoléon qui
refuse de la revoir, mais va assurer son train de
vie avec une confortable pension et un nouveau
mari. Enfin, Napoléon donnera naissance à un
autre fils, Alexandre, comte de Walewski, fils de
la comtesse Walewska, la « femme polonaise » de
napoléon. Son unique fils légitime, n’aura aucune
descendance. Sachez aussi que c’est Napoléon
qui fera un décret, le 3 janvier 1813, interdisant
le travail aux enfants de moins de dix ans, décret
qui sera « enterré » et envoyé aux oubliettes par
les patrons, dès la chute de Napoléon.

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Le mystère de sa fin

D
ans l’imaginaire commun, le site de
l’Hôtel national des Invalides se ré-
sume bien souvent à la silhouette,
tout à la fois imposante et élancée, du
Dôme et par voie de conséquence à la figure de
Napoléon, dont il abrite l’illustre dépouille de-
puis la Monarchie de Juillet.
C’est comme si le brouillard qui s’était dissipé
au petit matin du 2 décembre 1805 sur le
plateau de Pratzen pour laisser place au soleil
éclatant d’Austerlitz, n’en était venu à éclipser
par ses nuées un autre soleil, pourtant tout aussi
souverain, celui de Versailles et de son roi. Face
à Louis XIV qui avoua au seuil de sa vie avoir
« trop aimé la guerre », Napoléon, « dieu de la
guerre » personnifié selon le grand penseur
Clausewitz, est partout chez soi aux Invalides. Il
l’est, parce qu’il a rendu à l’hôpital militaire, créé
par l’Ancien Régime, son rôle auprès des vétérans
et des soldats blessés, qu’il lui a attribué, pour
mieux fonctionner, de nouvelles ressources et
une nouvelle organisation, qu’il a accru le prestige
de l’Institution non seulement en conviant
dans l’ancienne chapelle royale les mânes des
maréchaux du Grand Siècle, Turenne et Vauban,
puis des généraux du Premier Empire (Baraguey
d’Hilliers, Éblé, Lariboisière, Bessières, Duroc),

9
Napoléon, l’homme sans limites
mais aussi en suspendant à la voûte du sanctuaire
des soldats les trophées de ses victoires. Il l’est, à
tel point qu’il peut être considéré, à bon droit,
comme un véritable refondateur des Invalides.
Il l’est, parce qu’il y repose, depuis son retour
de Sainte-Hélène à Paris.
Il l’est, parce qu’il y règne en tous lieux, statue
de bronze veillant sur la cour d’honneur de jour
comme de nuit, silhouette reconnaissable entre
toutes, en simple tenue militaire, redingote et
« petit chapeau ». Il l’est, parce qu’il attire, dans les
salles du musée de l’Armée, des flots de visiteurs
s’empressant auprès des reliques personnelles
de l’Empereur et des souvenirs de la Grande
Armée. Napoléon, ses réalisations civiles à ses
campagnes de la Révolution et de l’Empire. Sa
mort, le 5 mai 1821, si elle passe relativement
inaperçue aux yeux du monde, est extrêmement
bien documentée par ses compagnons d’exil.
Mais, malgré le foisonnement des mémoires,
des lettres, des croquis, des reliques et des récits,
cette histoire présente des zones mal éclairées,
des incertitudes, des contradictions… Autant
de faits que la raison a tenté de disséquer, et de
failles que l’imagination s’est hâtée de combler.
Napoléon, l’immortel
De l’Italie jusqu’aux Cent-Jours, la carrière de
Napoléon est jalonnée de hauts faits relayés par
la presse, par la peinture de Salon, par l’estampe,
voire par la caricature et la chanson populaire. Et
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c’est lui-même qui a, en grande partie, orchestré
ce que l’on appellerait aujourd’hui sa politique
de communication. Nouvel Alexandre, égal
d’Hannibal, successeur de Charlemagne… Il s’est
confronté aux plus grands héros de l’histoire. Du
héros au demi-dieu, il n’y avait qu’un pas que
de nombreux artistes ont facilement franchi.
Comment s’étonner que sa disparition ait suscité
l’apparition d’une nouvelle divinité au panthéon
de l’histoire ? Sa mort a été constatée, mais son
corps est resté sur une île trop lointaine pour
paraître réelle. Longtemps absent, désincarné
désormais, Napoléon est libre de devenir plus
que lui-même. Chez Alaux et Mauzaisse, le voici
reçu au firmament par des héros de guerre, voire
couronné par le temps lui-même – autant dire
qu’il entre dans l’éternité... Dans le monument
de Fixin (Côted’Or), François Rude le montre
sortant de sous son linceul, comme le papillon
s’extrait de la chrysalide pour s’envoler vers les
cieux. Cette section voit Napoléon, par sa mort,
acquérir le statut d’immortel. Le musée de l’Armée
y présente tout particulièrement trois oeuvres
exceptionnelles, dont deux presque entièrement
inédites, par François Trichot, Louis-Edmond
Dupain et Louis Béroud. Ces tableaux ont
été restaurés à l’occasion de l’exposition avec
le généreux soutien de tous les particuliers et
entreprises qui ont concouru à la souscription
lancée, en partenariat avec la Fondation

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Napoléon, l’homme sans limites
Napoléon, pour la restauration des monuments
napoléoniens des Invalides (2019-2021).
Mourir
En mai 1821, Napoléon est prisonnier des Anglais
à Sainte- Hélène depuis plus de cinq ans. Après
avoir renoncé à l’idée de quitter Sainte-Hélène
vivant, il travaille pour la postérité en rédigeant
ses mémoires. Il est peu à peu gagné par la maladie
et souffre d’une douleur persistante à l’estomac
causée par un grave ulcère. Année après année,
il s’affaiblit jusqu’à rester constamment alité dès
la fin de l’année 1820. Dans les derniers mois, ses
souffrances sont terribles et en avril 1821, son
entourage comprend qu’il est condamné. Dans
le premier temps chronologique du parcours,
l’exposition revient sur le moment fatidique de la
mort. Le crépuscule du prisonnier enchaîné à son
rocher inspire romanciers et poètes romantiques
dans de nombreux pays qui participent à l’image
de cette mort légendaire, celle du héros, du
grand homme. L’exposition se propose de laisser
la place à cette poésie et à ce recueillement en
exposant des chefs-d’oeuvre de la peinture. Mais
à Sainte-Hélène, la mort de Napoléon est aussi
celle d’un souverain qui a dominé l’Europe et
autour duquel est conservée l’étiquette du palais
impérial. Autour de lui, ses derniers compagnons,
fidèles serviteurs de sa personne comme ensuite
de sa mémoire, l’accompagnent dans ses derniers
instants.
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Les masques mortuaires
Une autopsie est pratiquée à la demande de
l’Empereur lui-même qui craint que le mal qui
le ronge ne soit héréditaire. Pour les Anglais,
cette autopsie a un autre enjeu : prouver que
ce ne sont pas les conditions de l’exil qui ont
tué le prisonnier dont ils avaient la garde. Elle
est pratiquée au lendemain de la mort par le
docteur Antommarchi, sous la surveillance
de six médecins anglais et en présence des
serviteurs les plus fidèles de l’Empereur. Le
rapport d’autopsie du docteur Antommarchi,
présenté dans l’exposition, décrit un ulcère qui
a lentement perforé la paroi de l’estomac. Le
masque mortuaire est pris après l’autopsie. Faute
de matériaux nécessaires à sa réalisation, sa prise
se fait deux jours après la mort, le 7 mai 1821. Sa
reproduction à échelle quasi industrielle dans la
seconde moitié du xixe siècle alimente le mystère
autour de l’existence d’un « vrai » masque.
Une veillée funèbre
Après sa mort, le corps de Napoléon est lavé et
installé dans l’ancien cabinet de travail devenu
chapelle ardente. Placé sur son lit de campagne,
il est revêtu de son uniforme bien connu de
colonel de la Garde et de ses décorations. Il
est veillé par les serviteurs de Longwood selon
l’étiquette du palais impérial. Après une messe
célébrée par l’abbé Vignali, on décide d’ouvrir les
portes de Longwood à tous ceux qui désiraient

13
Napoléon, l’homme sans limites
lui rendre un dernier hommage. Le 6 mai en fin
d’après-midi et le 7 mai dans la matinée, une
foule recueillie et nombreuse défile dans la petite
pièce sous l’autorité du capitaine anglais Crockat.
De nombreux soldats et marins anglais viennent
ainsi rendre une dernière visite au « grand
homme ». Dans la matinée du 6 mai, quelques
officiers britanniques sont autorisés à dessiner,
pour la postérité, le corps ainsi exposé. Les plus
connus sont les croquis de Denzil Ibbetson et
Frederick Maryatt, dont les compositions sont
largement reprises par la gravure.
Son testament
Composé de vingt pièces distinctes dont la
rédaction fut concentrée sur deux semaines, entre
le 11 et le 29 avril 1821, l’ensemble testamentaire
de Napoléon Ier possède plusieurs dimensions :
l’acte juridique, à la fois privé et public, se double
d’une perspective politique et comporte une
profondeur psychologique et intime. Sentant ses
dernières forces l’abandonner, Napoléon décide
de se consacrer à l’écriture de ses dernières
volontés. Au-delà des aspects matériels, son
dernier message est avant tout rédigé pour
l’histoire. Une dernière fois, il accable ses
adversaires, l’oligarchie anglaise comme ceux
qu’il accuse de l’avoir trahi. S’il lègue toutes les
reliques de sa gloire à son fils, oubliant assez
volontairement sa famille, il distribue l’essentiel
de son argent, plusieurs millions de francs, à ses
14
derniers compagnons. Après sa mort, l’exécution
de son testament est particulièrement compliquée
et se poursuit jusqu’au Second Empire.
Une exceptionnelle micro-mosaïque
Sous un tunnel de saules, auréolé de lumière
et couronné de lauriers, Napoléon, frontal,
repousse la dalle de pierre de son tombeau
de Sainte-Hélène. Son uniforme évoque celui
des fidèles « grognards » du 1er régiment des
grenadiers à pied de la garde. Sa poitrine est
barrée du grand cordon de la Légion d’honneur,
dont il arbore la plaque et la croix à côté de
l’insigne de la Couronne de fer. Les bottes de
cheval sont celles du conquérant qui passa
plus de temps sur les routes d’Europe que dans
ses palais. Sur son épaule, à la fois linceul et
manteau impérial, se déploie la redingote grise
du « petit caporal ». Devant une épée rappelant
celle d’Austerlitz, il tient un rameau d’olivier.
Ce n’est pas dans cette tenue qu’il a été enterré
dans la vallée du Géranium, en 1821. C’est une
image de légende, qui emprunte autant aux
portraits officiels qu’aux images religieuses. C’est
l’arrivée d’un héros, qui revient, transformé,
de son voyage aux enfers. Le dieu laïc d’un
nouveau monde qui, transfiguré par l’exil et la
mort, se présente en sauveur. Commandée en
vue du centenaire de la naissance de Napoléon
par la princesse Charlotte Bonaparte, comtesse
Primoli (1832-1901), petite-fille de Lucien

15
Napoléon, l’homme sans limites
Bonaparte, prince de Canino (1775- 1840) ainsi
que du roi Joseph (1768-1844), cette oeuvre orna
l’hôtel particulier du 44 rue de Varennes où les
Primoli tinrent salon avant d’être contraints à
l’exil par la chute du Second Empire. Le sujet de
cette extraordinaire oeuvre en micromosaïque
est emprunté à un tableau réalisé par Horace
Vernet à l’occasion du retour des Cendres. La
composition, aux forts accents christiques,
souligne l’importance symbolique du retour
de ce corps qui depuis 19 ans reposait en terre
étrangère, « au milieu de ce peuple français qu’il
a tant aimé » – ainsi que Napoléon l’avait écrit
dans son testament. L’inscription gravée sur la
dalle funéraire cite précisément ce passage, repris
au fronton de la crypte des Invalides. Personne
ne pouvait l’ignorer en 1869, date centenaire de
la naissance de Napoléon Ier, grandoncle de la
comtesse Primoli, qui commanda l’oeuvre, et
oncle de l’empereur régnant Napoléon III.
La tombe de Sainte-Hélène
De 1821 à 1840, le corps de Napoléon repose
à Sainte-Hélène au coeur de la riante vallée du
Géranium. Si la tombe est ancrée dans une réalité
géographique très caractéristique, elle devient
rapidement un symbole : cette tombe solitaire
en pleine nature entourée de saules pleureurs
devient en soit un sujet de représentation, un
sujet romantique. Elle se transforme en lieu de
pèlerinage et les visiteurs ont à coeur de ramener
16
avec eux un souvenir, une relique, de la tombe
et plus généralement de l’île. Aujourd’hui encore,
et même si le corps de Napoléon l’a quittée, la
tombe de Sainte-Hélène conserve sa dimension
mémorielle, une mémoire plus personnelle.
Si quelques fidèles pleurent sa disparition, ils sont
plutôt rares. Dans les journaux, l’information
est traitée plutôt sommairement même si un
certain respect est de mise. Et au sein des cours
européennes, on ne remarque aucune réaction
particulière. Le nom de Napoléon n’est pas oublié
mais semble appartenir à un temps désormais
révolu.
Le retour des cendres
Le retour des Cendres est un épisode hautement
politique. Depuis 1821, des pétitions sont
déposées à l’Assemblée pour rapatrier le corps de
Napoléon. Celles-ci trouvent finalement l’écho
suffisant dans les conditions politiques du règne
de Louis-Philippe, et avec le soutien d’Adolphe
Thiers, l’expédition est décidée en 1840. La Belle
Poule, affrétée pour l’occasion et placée sous le
commandement du prince de Joinville, compte
à son bord les anciens compagnons d’exil de
Napoléon. Le moment fort de l’expédition est le
moment de l’exhumation : la découverte du corps
presque intact alimente la légende immortelle
de l’Empereur. De retour en France, l’arrivée du
cortège à Paris provoque des scènes d’exaltation
populaire. Son entrée en grande pompe aux

17
Napoléon, l’homme sans limites
Invalides marque l’institutionnalisation de sa
légende.
Napoléon aux Invalides
Napoléon est une figure tutélaire de l’Hôtel
national des Invalides, au point d’éclipser celle
de son illustre fondateur, Louis XIV. Bien avant
le retour de ses Cendres et la construction
de ce tombeau monumental, Napoléon avait
imposé sa vision et ses perspectives à la nature,
à l’organisation et au fonctionnement de
l’institution des Invalides. Si d’autres lieux de
sépulture tels que la colonne. Vendôme, l’abbaye
de Saint-Denis ou encore la chapelle familiale en
Corse ont été envisagés, le choix des Invalides
s’impose naturellement et Napoléon repose
finalement « sur les bords de la Seine, au milieu
de ce peuple qu’il a tant aimé ». Le transfert de
ses Cendres achève ainsi la transformation des
Invalides en « panthéon des gloires militaires ».
Monumental
À l’achèvement du tombeau en 1861, Napoléon
devient, avec le Dôme, un monument national.
Au-delà de l’objet architectural qu’il constitue,
le tombeau devient un symbole, symbole
de l’Empereur, symbole de son passage à la
postérité et de sa mémoire éternelle. À ce titre,
les visites protocolaires et diplomatiques passent
fréquemment par le tombeau des Invalides. Le
moment fort du retour des Cendres fut l’ouverture
de la tombe, sur l’île de Sainte-Hélène, et
18
l’exhumation du corps de Napoléon. Commandée
par le comte de Rohan-Chabot, l’expédition avait
apporté de France deux cercueils. Le premier, de
plomb ciselé, portait une plaque où se lisaient les
mots « Napoléon, empereur et roi, mort à Sainte-
Hélène le V mai MDCCCXXI ». Le deuxième
était d’ébène. Victor Hugo l’avait vu en fabrication
dans l’atelier de l’ébéniste Lemarchand. Il décrivit
« une sorte de grande boite noire en ébène qui
ressemblait à tous les cercueils, à tous les autels,
à toutes les corbeilles de noces et qui portait
en lettres de cuivre – pas d’or ! – le nom de
Napoléon ». Toutes ces inscriptions devaient
sans doute réparer l’affront de la tombe de
Sainte-Hélène, dont les dalles étaient restées
anonymes, pour cause de mésentente entre le
gouverneur britannique et les derniers fidèles
de l’Empereur. La bière d’ébène était pourvue
d’une serrure. Les clefs en furent officiellement
remises le 15 octobre 1840 à Rohan-Chabot par
le capitaine Alexander, commandant le génie
militaire et civil sur l’île. Quelques heures plus
tôt, cependant, la serrure avait donné des sueurs
froides au représentant français : le mécanisme,
pourtant testé pendant la traversée, rechignant
à se laisser ouvrir, avait menacé la solennité de
l’opération ! Après la cérémonie du 15 décembre
1840 à Paris, les clefs scellées dans une boîte
passèrent officiellement d’un ancien de la Grande
Armée à un autre, du maréchal Soult, ministre de

19
Napoléon, l’homme sans limites
la Guerre, au maréchal Moncey, gouverneur des
Invalides. Après la création du musée de l’Armée
en 1905, les clefs sont confiées à son directeur,
officiellement nommé « gardien du tombeau de
l’Empereur ».

20
La Bataille D’austerlitz,
est l’une des plus
grandes victoires
Napoléoniennes.

L
e 2 décembre 1805 (11 frimaire an XIV),
dans le sud de la Moravie (partie orien-
tale de l’actuelle République Tchèque),
après neuf heures de combats, la Grande
Armée de Napoléon Ier bat les forces austro-russes
de l’empereur François II du Saint-empire et de
l’empereur russe Alexandre Ier.
Cette victoire est considérée comme le chef
d’oeuvre tactique de Napoléon Bonaparte. C’est
aussi la première fois que des Saint-Cyriens sortis
de l’École Spéciale Militaire créée en 1802 par
l’empereur, tombent au champ d’honneur. Au
cours de cette bataille, l’empereur Napoléon 1er
avait fait preuve de son génie militaire face
aux armées coalisées des empereurs de Russie
et d’Autriche. Le déroulement L’Europe était
en ébullition depuis le début des guerres de la
Révolution française en 1792. En 1797, après
cinq ans de guerre, la République française
soumit la Première Coalition, une alliance de
l’Autriche, de la Prusse, de la Grande- Bretagne,
de l’Espagne et de divers États italiens. Une

21
Napoléon, l’homme sans limites
deuxième coalition, dirigée par la Grande-
Bretagne, l’Autriche et la Russie, et comprenant
l’Empire ottoman, le Portugal et Naples, fut
formée en 1798, mais en 1801, elle aussi avait
été vaincue, laissant la Grande-Bretagne le seul
opposant au nouveau consulat français. Mais
de nombreux problèmes persistaient entre
les deux parties, rendant la mise en oeuvre du
traité de plus en plus difficile. Le gouvernement
britannique n’aimait pas devoir renvoyer la
colonie du Cap et la plupart des îles des Antilles
néerlandaises à la République batave. Napoléon
était en colère que les troupes britanniques
n’aient pas évacué l’île de Malte. La situation
tendue n’a fait qu’empirer lorsque Napoléon a
envoyé un corps expéditionnaire pour écraser la
Révolution haïtienne. En 1803, l’Angleterre saisie
1200 bateaux de commerces français et hollandais
dans les différents ports anglais, sans jamais
avoir une déclaration de guerre. Napoléon réagit
immédiatement et fait arrêter tous les Anglais
qui se trouvent sur le territoire français. En mai
1803, la Grande-Bretagne déclare la guerre à la
France.
Troisième Coalition
En décembre 1804, un accord anglo-suédois
conduisit à la création de la troisième coalition.
Le Premier ministre britannique William Pitt
a passé 1804 et 1805 dans une vague d’activités
diplomatiques visant à former une nouvelle
22
coalition contre la France, et en avril 1805, la
Grande-Bretagne et la Russie avaient signé une
alliance. Ayant été vaincu deux fois dans la
mémoire récente par la France, et désireuse de se
venger, l’Autriche a rejoint la coalition quelques
mois plus tard. William Pitt, le Premier ministre
britannique sait parfaitement que con armée
ne résistera pas à celle de Napoléon, il décide
alors de former une nouvelle coalition, avec la
Russie, l’Autriche et la Suède, afin de « contrer »
une éventuelle invasion française. Alexandre 1er
de Russie accepte, il pense que vaincre Napoléon
lui apportera gloire et prestige et confirmerait
la puissance de la Russie. L’empereur François
II sait que par deux fois, Napoléon l’a battu,
durant les premières et deuxièmes coalitions,
mais qu’une association avec la Grande Russie
pourrait aboutir à un résultat en sa faveur. Une
convention de guerre est alors signée entre la
Russie et l’Autriche, les Russes vont fournirent
140 000 hommes, et les Autrichiens, 100 000,
les Anglais, quant à eux, vont financer cette
coalition.
Les forces en présence
Armée Impériale française
Avant la formation de la Troisième Coalition,
Napoléon avait rassemblé une force d’invasion,
appelée Armée d’Angleterre autour de six
camps à Boulogne dans le nord de la France. Il
avait l’intention d’utiliser cette force, s’élevant à

23
Napoléon, l’homme sans limites
150 000 hommes, pour frapper en Angleterre,
et était si confiant de son succès qu’il fit frapper
des médailles commémoratives pour célébrer
la conquête de l’Angleterre. Bien qu’elles n’aient
jamais envahi, les troupes de Napoléon ont reçu
une formation minutieuse et inestimable pour
toute opération militaire possible. L’ennui parmi
les troupes s’installe parfois, mais Napoléon
effectue de nombreuses visites et organise de
somptueuses parades afin de remonter le moral.
Les hommes de Boulogne formaient le noyau de
ce que Napoléon appellerait plus tard La Grande
Armée. L’armée était organisée en sept corps,
qui étaient de grandes unités de campagne qui
contenaient chacune 36 à 40 canons et étaient
capables d’une action indépendante jusqu’à ce
que d’autres corps puissent venir à la rescousse.
Un seul corps (correctement situé dans une
position défensive forte) pourrait survivre au
moins une journée sans soutien. En plus de ces
forces, Napoléon créa une réserve de cavalerie de
22 000 personnes, organisée en deux divisions de
cuirassiers, quatre divisions de dragons à cheval,
une division de dragons débarqués et une de
cavalerie légère, le tout soutenu par 24 pièces
d’artillerie. En 1805, la Grande Armée comptait
350 000 hommes bien équipés, bien entraînés et
dirigés par des officiers compétents.
Armée impériale russe
L’armée russe en 1805 avait de nombreuses
24
caractéristiques d’organisation de l’Ancien
Régime. Il n’y avait pas de formation permanente
au-dessus du niveau régimentaire, et les officiers
supérieurs étaient pour la plupart recrutés dans
les cercles aristocratiques, les commissions
étaient généralement attribuées au plus offrant,
quelle que soit sa compétence. L’infanterie russe
était considérée comme l’une des plus résistantes
d’Europe, cependant, et il y avait une belle artillerie
russe, dirigée par des soldats professionnels
entraînés, qui se battaient régulièrement pour
empêcher leurs pièces de tomber entre les mains
de l’ennemi.
Armée impériale autrichienne
L’archiduc Charles, frère de l’empereur autrichien,
avait commencé à réformer l’armée autrichienne
en 1801 en enlevant le pouvoir au Hofkriegsrat, le
conseil politico-militaire responsable des forces
armées. Charles était le meilleur commandant de
campagne de l’Autriche, mais il était impopulaire
à la cour et perdit beaucoup d’influence lorsque,
contre son avis, l’Autriche décida d’entrer en guerre
avec la France. Karl Mack est devenu le nouveau
commandant principal de l’armée autrichienne,
instituant des réformes à la veille de la guerre
qui exigeaient qu’un régiment soit composé de
quatre bataillons de quatre compagnies, plutôt
que de trois bataillons de six compagnies.
Préliminaires d’une guerre annoncée. En août
1805, Napoléon, empereur des Français depuis

25
Napoléon, l’homme sans limites
décembre de l’année précédente, détourna son
regard de la Manche vers le Rhin pour faire face
aux nouvelles menaces autrichiennes et russes.
Campagne d’Ulm
Le 25 septembre, après une marche fébrile dans
le plus grand secret, 200 000 troupes françaises
ont commencé à traverser le Rhin sur un front
de 260 km. Mack avait rassemblé la plus grande
partie de l’armée autrichienne à la forteresse
d’Ulm en Souabe.
Napoléon a envoyé ses forces vers le sud dans un
mouvement de rotation qui a mis les Français à
l’arrière autrichien. La manoeuvre d’Ulm a été
bien exécutée et le 20 octobre, 23 000 soldats
autrichiens se sont rendus à Ulm, portant
le nombre de prisonniers autrichiens de la
campagne à 60 000.
Bien que cette victoire spectaculaire ait été aigrie
par la défaite de la flotte franco-espagnole à la
bataille de Trafalgar le jour suivant, le succès
français sur terre a continué pendant que Vienne
tombait en novembre. Les Français ont gagné
100 000 mousquets, 500 canons et des ponts
intacts sur le Danube. Le 9 septembre 1805,
Koutouzov arriva sur le champ de bataille,
contactant rapidement François Ier d’Autriche
et ses courtisans pour discuter de stratégie et
de logistique. Sous la pression de Koutouzov,
les Autrichiens ont accepté de fournir des
munitions et des armes en temps opportun.
26
Koutouzov a également repéré des lacunes dans
le plan de défense autrichien, qu’il a qualifié de
« très dogmatique ». Il s’est opposé à l’annexion
autrichienne de la terre récemment sous le
contrôle de Napoléon, parce que cela ferait
méfier la population locale de la force alliée.
Les Français ont suivi Koutouzov, mais se sont
rapidement retrouvés dans une position difficile.
Les intentions prussiennes étaient inconnues
et pouvaient être hostiles, les armées russe et
autrichienne avaient convergé, et les lignes de
communication françaises étaient extrêmement
longues, exigeant de fortes garnisons pour les
maintenir ouvertes. Du côté russe, Koutouzov
s’est également rendu compte que Napoléon avait
besoin de se battre, donc au lieu de s’accrocher
au plan de défense autrichien « suicidaire »,
Koutouzov décida de battre en retraite. Il ordonna
à Pyotr Bagration de contenir les Français à
Vienne avec 600 soldats et ordonna à Bagration
d’accepter la proposition de cessez-le-feu de
Murat afin que l’armée alliée puisse avoir plus
de temps pour se retirer. On a découvert plus
tard que la proposition était fausse et avait été
utilisée pour lancer une attaque surprise contre
Vienne. Néanmoins, Bagration a pu retarder
l’assaut français pendant un certain temps en
négociant un armistice avec Murat, donnant
ainsi à Koutouzov le temps de se positionner
avec l’arrière-garde russe près de Hollabrunn.

27
Napoléon, l’homme sans limites
Murat s’est d’abord abstenue de lancer une
attaque, estimant que toute l’armée russe se tenait
devant lui. Napoléon se rendit vite compte des
erreurs de Murat et lui ordonna de poursuivre
rapidement, mais l’armée alliée s’était déjà retirée
à Olmutz. Selon le plan de Koutouzov, les Alliés se
retireraient plus loin dans la région des Carpates
et prononça cette phrase « en Galice, j’enterrerai
les Français ».
Napoléon n’est pas resté immobile.
L’empereur français a décidé de tendre un
piège psychologique afin d’attirer les Alliés.
Quelques jours avant le combat, Napoléon avait
donné l’impression que son armée était faible
et qu’il souhaitait une paix négociée. Environ
53 000 soldats français - y compris les forces
de Soult, Lannes et Murat - furent chargés
de prendre Austerlitz et la route d’Olmutz,
occupant l’attention de l’ennemi. Les forces
alliées, au nombre d’environ 89 000, semblent
bien supérieures et seraient tentées d’attaquer
l’armée française en infériorité numérique.
Cependant, les Alliés ne savaient pas que
Bernadotte, Mortier et Davout étaient déjà à
portée de soutien et pouvaient être appelés
par des marches forcées depuis Iglau, Vienne
et Vienne respectivement, portant le nombre
français à 75 000 soldats. L’attrait de Napoléon ne
s’est pas arrêté à cela. Le 25 novembre, le général
Savary est envoyé au quartier général allié à
28
Olmutz pour délivrer le message de Napoléon
exprimant son désir d’éviter une bataille, tout en
examinant secrètement la situation des forces
alliées. Comme prévu, l’ouverture a été perçue
comme un signe de faiblesse. Lorsque François
Ier proposa l’armistice le 27, Napoléon accepta
avec enthousiasme. Le même jour, Napoléon
ordonna à Soult d’abandonner Austerlitz et les
hauteurs de Pratzen et, ce faisant, de créer une
impression de chaos pendant la retraite qui
inciterait l’ennemi à occuper les hauteurs. Le
lendemain (28 novembre), l’empereur français
demanda un entretien personnel avec Alexandre
Ier et reçut la visite de l’aide la plus impétueuse
du tsar, le prince Peter Dolgorukov. La réunion
était une autre partie du piège, car Napoléon
exprimait intentionnellement de l’anxiété et
de l’hésitation à ses adversaires. Dolgorukov a
rapporté au tsar une indication supplémentaire
de la faiblesse française.
Le plan a réussi
tsar et le chef d’état-major autrichien Franz von
Weyrother, ont fortement soutenu une attaque
immédiate et ont semblé influencer le tsar
Alexandre. Le plan de Koutouzov de se retirer
plus loin dans la région des Carpates a été rejeté
et les forces alliées sont rapidement tombées
dans le piège de Napoléon. Tout était réuni pour
la guerre.
La bataille
29
Napoléon, l’homme sans limites
La bataille a commencé avec l’armée française
en infériorité numérique. Napoléon avait
quelque 72 000 hommes et 157 canons pour la
bataille imminente, avec environ 7 000 soldats
sous Davout encore loin au sud en direction de
Vienne. Les Alliés avaient environ 85 000 soldats,
dont 70 % russes, et 318 canons. Au début,
Napoléon n’était pas totalement convaincu de
la victoire. Dans une lettre adressée au ministre
des Affaires étrangères Talleyrand, Napoléon a
demandé à Talleyrand de ne parler à personne
de la bataille à venir car il ne voulait pas déranger
l’impératrice Joséphine. Selon Frederick C.
Schneid, le principal souci de l’empereur français
était de savoir comment il pourrait expliquer à
Joséphine une défaite française.
Champ de bataille
La bataille se déroula à environ dix kilomètres
au sud-est de la ville de Brno, entre cette ville et
Austerlitz dans l’actuelle République tchèque. La
partie nord du champ de bataille était dominée
par la colline Santon de 210 mètres et la colline
Zuran de 270 mètres, toutes deux au-dessus de
la route vitale Olomouc / Brno, qui se trouvait
à l’est. / axe ouest. À l’ouest, se trouvait le village
de Bellowitz, et entre eux, le torrent Bosenitz se
dirigeait vers le sud pour rejoindre le ruisseau
Goldbach. Le point crucial de la région étaient
les hauteurs de Pratzen, une simple colline de 12
mètres de hauteur, mais oh combien importante.
30
Napoléon avait répété à plusieurs reprises les
environs et l’importance de cette colline, et il
dit à ses maréchaux : « Messieurs, examinez
attentivement ce terrain, ce sera un champ de
bataille, vous aurez un rôle à jouer dessus.
Plans et dispositions alliés
Le conseil allié s’est réuni le 1er décembre
pour discuter des propositions de bataille. La
plupart des stratèges alliés avaient deux idées
fondamentales en tête, prendre contact avec
l’ennemi et sécuriser le flanc sud qui maintenait la
ligne de communication avec Vienne. Bien que le
tsar et son entourage immédiat aient poussé dur
pour une bataille, l’empereur François d’Autriche
était plus prudent et, comme mentionné, il a été
secondé par Koutouzov, le commandant en chef
des Russes et des troupes alliées. La pression
pour combattre de la part des nobles russes et
des commandants autrichiens était cependant
trop forte et les Alliés ont adopté le plan du chef
d’état-major autrichien, Franz von Weyrother.
Cela a exigé un entraînement principal contre
le flanc droit français, les Alliés ont remarqué
qu’il diversion contre la gauche française. Les
Alliés ont déployé la plupart de leurs troupes
dans quatre colonnes qui allaient attaquer la
droite française. La garde impériale russe était
tenue en réserve tandis que les troupes russes
sous Bagration gardaient la droite alliée. Dans
la bataille, Koutouzov ne pouvait commander

31
Napoléon, l’homme sans limites
que le IVe corps de l’armée alliée, bien qu’il soit
toujours le commandant de facto car le tsar
avait peur de prendre le relais au cas où son
plan préféré échouerait. Plans et dispositions
de napoléon Napoléon espérait que les forces
alliées attaqueraient et pour les encourager, et
en fin stratège, il affaiblit volontairement son
flanc droit, pensant que l’ennemi tomberait dans
le piège et c’est exactement ce qui se passa ! Le
28 novembre, Napoléon rencontra ses maréchaux
au quartier général impérial, qui l’informèrent
de leurs scrupules au sujet de la bataille à venir.
Il a ignoré leur suggestion de retraite. Le plan de
Napoléon prévoyait que les Alliés lanceraient de
nombreuses troupes pour envelopper son flanc
droit afin de couper la ligne de communication
française de Vienne. En conséquence, le
centre et le flanc gauche des Alliés seraient
exposés et deviendraient vulnérables. Pour les
encourager à le faire, Napoléon abandonna
la position stratégique sur les hauteurs de
Pratzen, simulant la faiblesse de ses forces et
sa propre prudence. Pendant ce temps, la force
principale de Napoléon devait être cachée dans
un terrain mort en face des Hauteurs. Selon le
plan, les troupes françaises attaqueraient et
reprendraient les hauteurs de Pratzen, puis des
hauteurs elles lanceraient un assaut décisif vers
le centre de l’armée alliée, les paralyseraient et les
encerclaient par l’arrière. Le 2 décembre 1805,
32
au petit matin, quand le brouillard qui entourait
le plateau de Pratzen se dissipa et quand parut
dans le ciel dégagé un soleil éclatant, « Napoléon,
raconte Tolstoï dans La guerre et la paix, comme
s’il n’avait attendu que ce moment, déganta une
de ses belles mains blanches, fit de son gant un
geste aux maréchaux et donna l’ordre d’engager
la bataille. Les maréchaux et leurs aides de camp
galopèrent dans différentes directions et, au
bout de quelques minutes, les forces principales
de l’armée française se -portèrent rapidement
vers le plateau de Pratzen que les troupes russes
abandonnaient de plus en plus pour gagner vers
la gauche le ravin. » Si les forces russes quittent
les hauteurs de Pratzen pour aller du côté droit,
elles seront certainement vaincues – paroles de
Napoléon.
Dans la nuit qui précéda la bataille, la Grande
Armée célébra la veille de l’anniversaire du sacre
en allumant partout des feux et en multipliant
les vivats. « C’est la plus belle soirée de ma vie »,
déclara Napoléon. Au matin du 2 décembre,
Napoléon découvrit l’erreur ennemie. Davout
était prêt à subir le choc et s’acquitta parfaitement
de sa mission. Napoléon fit alors attaquer par
Soult le plateau de Pratzen où l’adversaire en
mouvement n’était pas préparé à cette attaque et
fut taillé en pièces. De leur côté Lannes et Murat,
sur l’aile gauche, enfonçaient Bagration.
Un allié de choc, la brume !

33
Napoléon, l’homme sans limites
La poussée massive à travers le centre allié a
été menée par 16 000 soldats du IVe corps de
Soult. La position du IVe Corps était masquée
par une brume dense au début de la bataille,
en fait, la durée de la brume était vitale pour le
plan de Napoléon, les troupes de Soult seraient
découvertes si la brume se dissipait trop tôt,
mais si elle persistait trop longtemps, Napoléon
serait incapable de déterminer quand les troupes
alliées auraient évacué Pratzen, l’empêchant
de chronométrer correctement son attaque.
Pendant ce temps, pour soutenir son faible flanc
droit, Napoléon ordonna au IIIe corps de Davout
de forcer la marche depuis Vienne et de rejoindre
les hommes du général Legrand, qui tenaient
l’extrême sud du flanc qui porterait la partie la
plus lourde de l’attaque alliée. Les soldats de
Davout avaient 48 heures pour marcher 110 km.
Leur arrivée a été déterminante pour le succès du
plan français. En effet, la disposition de Napoléon
sur le flanc droit était très risquée car les Français
n’y avaient que des troupes minimes en garnison.
Cependant, Napoléon a pu utiliser un plan aussi
risqué parce que Davout - le commandant du
IIIe corps - était l’un des meilleurs maréchaux
de Napoléon, parce que la position du flanc
droit était protégée par un système compliqué
de ruisseaux et de lacs, et parce que les Français
s’était déjà fixé une deuxième ligne de retraite à
travers Brunn. La Garde Impériale et le I Corps
34
de Bernadotte étaient tenus en réserve tandis que
le V Corps sous Lannes gardait le secteur nord
du champ de bataille, où se trouvait la nouvelle
ligne de communication. Le 1er décembre 1805,
les troupes françaises avaient été déplacées
conformément au mouvement allié vers le sud,
comme Napoléon s’y attendait.
La bataille s’engage
La bataille a débuté vers 8 heures du matin sur
le village de Telnitz, qui était défendu par le 3e
régiment de ligne. Ce secteur du champ de bataille
a été témoin de violents combats au cours de
cette première action alors que plusieurs charges
alliées féroces expulsaient les Français de la ville
et les forçaient de l’autre côté du Goldbach. Les
premiers hommes du corps de Davout arrivèrent
à ce moment et chassèrent les Alliés de Telnitz
avant qu’ils ne soient eux aussi attaqués par des
hussards et abandonnent à nouveau la ville. Des
attaques alliées supplémentaires hors de Telnitz
ont été contrôlées par l’artillerie française.
Des erreurs stratégiques importantes
Les colonnes alliées ont commencé à affluer contre
la droite française, mais pas à la vitesse souhaitée,
de sorte que les Français ont surtout réussi à
freiner les attaques. En fait, les déploiements
alliés étaient erronés et mal chronométrés, les
détachements de cavalerie sous le Liechtenstein
sur le flanc gauche allié devaient être placés sur
le flanc droit et dans le processus ils se heurtèrent

35
Napoléon, l’homme sans limites
et ralentirent une partie de la deuxième colonne
d’infanterie qui avançait vers la droite française.
À l’époque, les planificateurs pensaient que
ce ralentissement était désastreux, mais plus
tard, il a aidé les Alliés. Pendant ce temps, les
principaux éléments de la deuxième colonne
attaquaient le village de Sokolnitz, défendu par
le 26e régiment léger et les tirailleurs, tirailleurs
français. Les premiers assauts alliés se sont avérés
infructueux et le général Langeron a ordonné le
bombardement du village. Ce barrage meurtrier
a forcé les Français à sortir, et à peu près au
même moment, la troisième colonne a attaqué
le château de Sokolnitz. Les Français, cependant,
contre-attaquèrent et regagnèrent le village,
pour être de nouveau expulsés. Le conflit dans
cette région a pris fin temporairement lorsque la
division Friant (partie du IIIe corps) a repris le
village. Sokolnitz était peut-être la zone la plus
contestée du champ de bataille et changerait
de mains plusieurs fois au cours de la journée.
Tandis que les troupes alliées attaquaient le flanc
droit français, le IVe corps de Koutouzov s’arrêta
sur les hauteurs de Pratzen et resta immobile.
Tout comme Napoléon, Kutuzov a réalisé
l’importance de Pratzen et a décidé de protéger
la position. Mais le jeune tsar ne l’a pas fait, alors
il a expulsé le IVe Corps des Hauteurs. Cet acte a
rapidement poussé l’armée alliée dans sa tombe.
Un coup sec et la guerre est finie !
36
Carte avec des lignes bleues montrant l’avance
française contre le centre allié, symbolisée par
des lignes rouges. Les attaques décisives contre
le centre allié par Saint-Hilaire et Vandamme
ont divisé l’armée alliée en deux et ont laissé
les Français dans une position stratégique d’or
pour gagner la bataille. Vers 8 h 45, satisfait de la
faiblesse du centre ennemi, Napoléon demanda à
Soult combien de temps il faudrait à ses hommes
pour atteindre les hauteurs de Pratzen, ce à quoi
le maréchal répondit : « Moins de vingt minutes,
sire. Environ 15 minutes plus tard, Napoléon a
ordonné l’attaque, ajoutant : « Un coup sec et la
guerre est finie. » Un épais brouillard a aidé à
assombrir l’avancée de la division française de
Saint-Hilaire, mais alors qu’ils montaient la pente,
le légendaire « Soleil d’Austerlitz » déchirait la
brume et les encourageait à avancer. Les soldats
et commandants russes au sommet des hauteurs
ont été stupéfaits de voir autant de troupes
françaises venir vers eux. Les commandants
alliés ont déplacé certains des détachements
retardés de la quatrième colonne dans cette lutte
acharnée. Plus d’une heure de combat a détruit
une grande partie de cette unité. Les autres
hommes de la deuxième colonne, pour la plupart
des Autrichiens inexpérimentés, ont également
participé à la lutte contre l’une des meilleures
forces combattantes de l’armée française, les
forçant finalement à se retirer sur les pentes.

37
Napoléon, l’homme sans limites
Napoléon a ordonné au I Corps de Bernadotte
de soutenir la gauche de Vandamme et a déplacé
son propre centre de commandement de la
colline de Žuráň à la chapelle Saint-Antoine sur
les hauteurs de Pratzen. La position difficile des
Alliés a été confirmée par la décision d’envoyer la
garde impériale russe. Le grand-duc Constantin,
le frère du tsar Alexandre, commanda la garde
et contreattaqua dans la section de terrain de
Vandamme, forçant un effort sanglant et la seule
perte d’un étendard français dans la bataille (un
bataillon du 4e régiment de ligne fut vaincu).
Sentant des ennuis, Napoléon a ordonné à sa
propre cavalerie lourde de garde d’avancer. Ces
hommes ont pulvérisé leurs homologues russes,
mais avec les deux côtés déversant de grandes
masses de cavalerie, aucune victoire n’était claire.
L’artillerie à cheval de la Garde a également
infligé de lourdes pertes à la cavalerie et aux
fusiliers russes. Les Russes ont éclaté et beaucoup
sont morts alors qu’ils étaient poursuivis par la
cavalerie française revigorée pendant environ un
quart de mille. Les pertes des Russes à Pratzen
comprenaient Koutouzov, qui a été gravement
blessé, et son gendre Ferdinand von Tiesenhausen
qui a été tué.
Fin de partie
Pendant ce temps, la partie la plus au nord du
champ de bataille était également témoin de
violents combats. La cavalerie lourde du prince
38
Liechtenstein a commencé à attaquer les forces
de cavalerie légère de Kellerman après être
finalement parvenue à la bonne position sur
le terrain. Les combats se sont d’abord bien
déroulés pour les Français, mais les forces de
Kellerman se sont cachées derrière la division
d’infanterie du général Caffarelli une fois qu’il est
devenu clair que les chiffres russes étaient trop
importants. Les hommes de Caffarelli stoppèrent
les assauts russes et autorisèrent Murat à envoyer
deux divisions de cuirassiers (l’une commandée
par d’Hautpoul et l’autre par Nansouty) dans la
mêlée pour achever définitivement la cavalerie
russe. Lannes a ensuite dirigé son V Corps
contre les hommes de Bagration et, après de durs
combats, a réussi à chasser le commandant russe
compétent du terrain. Il voulait poursuivre, mais
Murat, qui contrôlait ce secteur sur le champ de
bataille, était contre l’idée.
Napoléon en veut encore plus
L’attention de Napoléon s’est maintenant déplacée
vers l’extrémité sud du champ de bataille où les
Français et les Alliés se battaient toujours pour
Sokolnitz et Telnitz. Dans un assaut efficace à
deux volets, la division Saint-Hilaire et une partie
du IIIe corps de Davout ont écrasé l’ennemi à
Sokolnitz, ce qui a persuadé les commandants
des deux premières colonnes, les généraux
Kienmayer et Langeron, de fuir aussi vite qu’ils
le pouvaient.

39
Napoléon, l’homme sans limites
Une panique générale des armées
Russes et Autrichiennes
La panique générale s’empara maintenant de
l’armée alliée et elle abandonna le champ dans
toutes les directions possibles.
Les pertes
La bataille coûta aux Austro-Russes 15 000 tués
ou blessés. La Grande Armée fit 30 000 prison
niers. Les Alliés perdirent une grande partie de
leur artillerie sur les étangs dont la glace rompit
pour diverses raisons. Côté français on déplora
1 305 tués et 6 940 blessés. L’empereur François
II demanda un armistice qui lui fut accordé.
Les conséquences européennes de la bataille
d’Austerlitz furent énormes. Elle porta un coup
fatal au Saint Empire Romain Germanique qui
s’effaça devant une Confédération du Rhin que
dominait Napoléon. Deux frères de l’Empereur
devenaient souverains en Europe : Louis à
Amsterdam et Joseph à Naples où il se substituait
aux Bourbons. Le 3 décembre, Napoléon dictait
son fameux discours à sa Grande Armée :
« Soldats, je suis content de vous … Vous avez
décoré vos aigles d’une immortelle gloire … Mon
peuple vous reverra avec joie, et il vous suffira de
dire : J’étais à la bataille d’Austerlitz pour que l’on
vous réponde : Voilà un brave ! »

40
Le jour où l’armée
prussienne s’est écroulée

L
a bataille d’Iéna (et d’Auerstedt, le même
jour), a eu lieu le 14 octobre 1806 et a
opposé l’armée française sous Napoléon
à la deuxième armée prussienne com-
mandée par Frédéric-Guillaume III de Prusse.
Cette bataille, ainsi que la bataille d’Auerstädt,
signifia la défaite de la Prusse et sa sortie des
guerres napoléoniennes jusqu’en 1813.
La campagne jusqu’aux batailles Napoléon et
ses troupes ont avancé du Main à travers la
Thuringe jusqu’à la capitale prussienne Berlin.
Il espérait ainsi forcer l’armée prussienne à se
battre et en même temps couper les Saxons de
leurs voies de communication. Les Prussiens et
les Saxons alliés s’étaient rassemblés à l’ouest de
la Saale afin de pouvoir réagir avec souplesse à
l’attaque de Napoléon, qu’elle se déroule à l’est
ou à l’ouest de la forêt de Thuringe. Lorsqu’ils
ont entendu parler de l’avancée de Napoléon de
Bavière, un différend de longue haleine a éclaté
parmi les commandants en chef quant à savoir
s’il valait mieux rassembler leurs forces à l’ouest
(concentration des armées près d’Eisenach,
Erfurt et Weimar) ou à l’est de la Saale pour
trouver les itinéraires vers Berlin et Dresde.
L’armée partielle du général Ernst von Rüchel
41
Napoléon, l’homme sans limites
s’est rassemblée près de Hanovre et de là s’est
rapprochée de l’armée principale via Göttingen
et Mühlhausen. Le prince Louis Ferdinand de
Prusse devait couvrir le passage de la Saale à
Saalfeld avec une avant-garde. Le 10 octobre,
ce corps a été anéanti dans la bataille près de
Saalfeld. Le prince est tombé dans un combat.
L’armée de Napoléon en difficulté
La veille, les troupes de Joachim Murat
rencontrèrent les troupes prussiennes et
saxonnes à Schleiz, mais furent repoussées.
Seule l’intervention de l’infanterie sous le
maréchal Bernadotte décida le combat en
faveur des Français. Ils ont perdu environ 200
soldats, tandis que les Prussiens ont perdu 500
hommes à mort, blessant et capturant. La bataille
de Schleiz a été la première grande rencontre
entre les troupes prussiennes et françaises dans
cette guerre. Les troupes de Napoléon avancent
maintenant surtout à l’est de la Saale vers le nord,
tandis que les alliés se rassemblent du côté ouest
de la rivière. Le 12 octobre, ils décident d’éviter
une bataille pour le moment et de déplacer
rapidement l’armée principale vers le nord pour
ne pas être coupés de Berlin. Le corps d’armée
des généraux prussiens Fürst zu Hohenlohe et
Ernst von Rüchel s’est arrêté à Iéna et à Weimar
pour couvrir la marche des forces principales
sous la direction du duc de Braunschweig vers
les points de passage de la Saale à Naumburg.
42
Les prussiens pensent que napoléon est perdu
L’illumination de Napoléon a également échoué
complètement pendant ces jours. Il ne savait pas
où se trouvaient les forces alliées, il soupçonnait
que c’était près de Gera ou plus au nord. Il envoya
donc les cavaliers de Murat en partie vers Leipzig
et les corps de Davout et Bernadotte à Naumburg.
Enfin, le 13, Lannes découvre les troupes
prussiennes près d’Iéna. En supposant qu’il
s’agissait de la principale armée alliée, Napoléon
concentra son corps devant Iéna et occupa la
ville et les hauteurs importantes, en particulier le
Landgrafenberg (280 m) et le Windknollen (363
m), à partir desquels il détermina la force et la
position de ses adversaires repérés.
Les prussiens y croient
S’il y avait eu des accrochages mineurs entre
les troupes de Lanne et les Prussiens dans
l’aprèsmidi, ces derniers ne se voyaient pas en
danger et les Prussiens campaient sur le plateau.
Ils considéraient qu’une attaque du côté de
Landgrafenberg était impossible, car on croyait
que cela ne pouvait pas être escaladé avec des
canons. Mais c’est justement tout le génie militaire
de Napoléon qui va justement ordonner cela,
cepen dant, et ses troupes ont travaillé toute la
nuit pour récupérer les armes du landgrave.
L’attaque surprise
Dans la nuit du 14, Davout, qui avait occupé le
col de Kösener, reçut l’ordre de se rendre à Iéna

43
Napoléon, l’homme sans limites
via Apolda. Cependant, la lettre se terminait :
« Quand le maréchal Bernadotte est avec vous,
vous pouvez marcher ensemble, mais le Kaiser
espère qu’il occupera le poste qui lui est assigné
à Dornburg. - Lorsque vous êtes suffisamment
proche d’Iéna pour y être entendu, tirez quelques
coups de canon. Ce sera le signal d’attaquer si nous
ne sommes pas obligés de commencer plus tôt ».
Cet ordre, que Napoléon rédigea vers 22 heures
et que Davout reçut à 3 heures le 14, montre que
Napoléon n’était pas encore sûr s’il attaquerait
immédiatement le matin ou si la bataille aurait
lieu plus tard. Probablement la combinaison du
succès de l’obtention des canons sur le Landgrave
et de l’avantage surprise a permis à Napoléon de
partir tôt et il a renoncé à Davouts (à environ 40 à
50 km d’Iéna) et à la participation de Bernadotte
au début de la bataille.
La bataille s’engage
Bernadotte, qui était à Naumburg mais dont les
troupes campaient sur le chemin de Dornburg,
décida de continuer via Dornburg. Lorsque la
bataille a commencé le lendemain matin, l’armée
principale de Napoléon ne faisait face qu’au corps
Hohenlohe, tandis que le corps français Davout
rencontrait de manière inattendue l’armée
principale prusso-saxonne assemblée à 22 km
au nord-est près de Hassenhausen. Bernadotte
a eu un problème à Dornburg pour franchir 80
à 100 mètres d’altitude dans des circonstances
44
difficiles avec ses troupes du pont de la Saale à
Dornburg et n’a pas par la suite atteint les deux
champs de bataille. Les batailles jumelles d’Iéna et
d’Auerstedt se sont déroulées le 14 octobre 1806
sur le plateau à l’ouest de la Saale dans l’Allemagne
d’aujourd’hui, entre les forces de Napoléon Ier
de France et Frédéric- Guillaume III de Prusse.
La défaite décisive subie par l’armée prussienne
soumit le royaume de Prusse à l’Empire français
jusqu’à ce que la sixième coalition soit formée
en 1812. Plusieurs personnages qui furent plus
tard partie intégrante de la réforme de l’armée
prussienne ont participé à Iéna-Auerstedt,
y compris Gebhard von Blücher, Carl von
Clausewitz, August Neidhardt von Gneisenau,
Gerhard von Scharnhorst et Hermann von
Boyen. La victoire est célébrée comme l’une des
plus grandes de Napoléon.
Les armées
Les deux armées ont été divisées en parties
distinctes. L’armée prussienne était dans un très
mauvais état. Brunswick avait 71 ans, tandis que
ses commandants sur le terrain étaient dans la
soixantaine. L’armée prussienne utilisait encore
la tactique et l’entraînement depuis l’époque
de Frédéric le Grand. Sa plus grande faiblesse
était l’organisation de son personnel. La plupart
des divisions étaient mal organisées et ne
communiquaient pas bien entre elles.
Le déroulement

45
Napoléon, l’homme sans limites
Les batailles ont commencé lorsque des éléments
de la force principale de Napoléon ont rencontré
les troupes de Hohenlohe près d’Iéna. Au départ,
seulement 48 000 hommes, l’empereur a profité
de ses dispositions soigneusement planifiées et
flexibles pour constituer rapidement une force
supérieure de 96 000 hommes. Avant que les
15 000 hommes de Ruchel puissent arriver de
Weimar, les 38 000 hommes de Hohenlohe ont
été mis en déroute, 10 000 tués ou blessés et
15 000 capturés. Néanmoins, ce fut une bataille
féroce, avec 5 000 pertes françaises, et Napoléon
crut à tort qu’il avait affronté le corps principal
de l’armée prussienne. Plus au nord, à Auerstedt,
Davout et Bernadotte reçurent l’ordre de venir en
aide à Napoléon. Davout a tenté de se conformer
via Eckartsberga, Bernadotte via Dornburg. La
route de Davout vers le sud, cependant, a été
bloquée par la force principale prussienne de
60 500 hommes, y compris le roi de Prusse, le duc
de Brunswick et les maréchaux von Möllendorf
et von Kalckreuth. Une bataille sauvage s’ensuivit.
Bien que plus nombreux que deux contre un, le
IIIe corps de Davout, superbement entraîné et
discipliné, a subi des attaques répétées avant de
finalement prendre l’offensive et de mettre les
Prussiens en fuite. Bien qu’à portée de voix des
deux batailles, le maréchal Bernadotte n’a pris
aucune mesure pour venir en aide à Davout,
refusant de prendre l’initiative et adhérant à
46
la place au dernier ensemble écrit d’ordres de
Napoléon.
Le 14 au matin, jour de bataille
Au matin du 14 octobre, jour de la bataille,
Napoléon
affronte uniquement le corps Hohenlohe.
Cependant, Hohenlohe n’avait pas concentré
ses troupes, 22 000 de ses soldats campèrent
à Kapellendorf et 8 000 hommes à Dornburg.
Entre Kapellendorf et Dornburg, juste en face des
troupes françaises, il y avait encore 8 000 soldats
prussiens du corps. Il était dirigé par le général
Tauentzien.
Hohenlohe était donc subordonné à
38 000 soldats près d’Iéna
Les 15 000 hommes sous la direction du général
Rüchel qui se trouvaient toujours à Weimar
n’étaient pas censés atteindre le champ de bataille à
temps. Cependant, il pensait toujours qu’il devrait
affronter l’armée principale prusso-saxonne, qu’il
estimait à au moins 100 000 hommes. À 11 heures,
il reçut des renforts de deux autres corps. L’effectif
de Napoléon était alors de 96 000 hommes, mais
seuls 54 000 soldats français étaient impliqués
dans les opérations de combat.
Le brouillard, l’allié de toujours de Napoléon
Le matin, il y avait encore un épais brouillard
sur le Landgrafenberg. La mauvaise visibilité,
noter dans ses mémoires, favorisa les troupes
françaises. Sur le Landgrafenberg, les soldats de

47
Napoléon, l’homme sans limites
Napoléon se tenaient « extrêmement entassés ».
Avec une bonne visibilité, ils auraient fait une
cible facile pour l’artillerie prussienne voisine.
Tout tir des Prussiens aurait pu « toucher » et
causer « de gros dégâts » aux rangs français.
Cependant, les Français n’ont pu former une
formation de combat efficace que dans la plaine
occidentale d’Iéna. Par conséquent, ils ont dû
marcher le plus rapidement possible sur la longue
et étroite crête, avant que les soldats prussiens ne
puissent effectivement boucler l’accès à la plaine.
Napoléon rencontre le maréchal Lannes
A 4 heures du matin, l’empereur Napoléon a
eu une rencontre personnelle avec le maréchal
Lannes. Il lui a donné les dernières instructions
pour une attaque. Peu de temps après, Napoléon
a renforcé le moral de ses troupes en quittant
leurs rangs et en leur rappelant dans un discours
la victoire rapide de la bataille d’Ulm contre les
Autrichiens l’année précédente. La première,
brève escarmouche a eu lieu peu de temps avant
l’attaque officielle ordonnée par Napoléon à 6
heures du matin. Des chasseurs prussiens ont
ouvert le feu sur les troupes d’avance françaises
de Soult. L’avant-garde de Soult avait été
mandaté par Napoléon pour explorer les routes
de la crête à la plaine. En raison de la mauvaise
visibilité dans le brouillard, le feu a été arrêté
relativement rapidement pour le moment. A
6 heures, Napoléon ouvre le feu des canons
48
sur Closewitz. Les bombardements devraient
préparer l’assaut ultérieur du village. Puis les
soldats du maréchal Lannes se mettent en
mouvement, où ils rencontrent le corps prussien
du général Tauentzien, qui bloque l’accès à la
plaine. La visibilité était d’environ 100 mètres
dans le brouillard persistant. En raison de ces
mauvaises conditions de visibilité, Lannes a
initialement estimé que la division prussienne
(8 000 hommes) était numériquement plus
grande qu’elle ne l’était réellement. Ce n’est que
lorsque le brouillard a lentement commencé à
se dissiper à 8h00 du matin que Lannes a réalisé
le véritable équilibre des forces. Il a repoussé
les troupes de Tauentzien vers le Dornberg, le
point culminant du champ de bataille, où les
soldats ont combattu une autre bataille à 8h30.
À ce moment-là, le prince de Hohenlohe n’était
toujours pas prêt pour une bataille. Il supposait
que la principale armée française marchait vers
Naumburg pour empêcher les soldats prussiens
de traverser l’Unstrut. Alors que les Français
avaient commencé leur attaque sur Closewitz,
les membres du quartier général se trouvaient
toujours dans les chambres du château de
Kapellendorf. L’Etat-Major prussien ne croient
pas à une attaque de Napoléon depuis Iéna,
cela causera leur perte. Nous avons pris le petit
déjeuner en paix jusqu’à 7 heures du matin. La
région de Hohenlohe ne pouvait pas imaginer

49
Napoléon, l’homme sans limites
que Napoléon prendrait le risque d’attaquer
depuis Iéna, car en cas de défaite française, le
terrain difficile d’accès et la rivière auraient rendu
difficile la retraite de Napoléon. Par exemple,
Hohenlohe n’a initialement pas pris au sérieux les
informations faisant état d’une attaque française.
A 8 heures, il fit obstruction à l’ordre du général
Grawert de démonter les tentes et de se préparer
au combat. Ce n’est qu’à 8h30 du matin que
Hohenlohe a donné l’ordre de réagir à l’offensive
française, bien trop tard.
Comme les jours précédents, le brouillard a
régné jusque vers neuf heures
Le camp prussien avait été balisé par Massenbach
en prévision des Français le long de la route
d’Iéna à Weimar dans une direction sud-ouest.
En fait, cependant, l’attaque est venue du sud-est
sur la pente raide de la vallée de la Saale. Les
troupes de la masse prusso-saxonne se rallièrent
donc tardivement et avec hésitation, alors que
leur avant-garde sous Tauentzien avait depuis
longtemps été massivement repoussée. L’attaque
française a eu lieu vers 6 heures du matin depuis
Landgrafenberg et le Windknollen près de Jena
hors du brouillard avec un soutien d’artillerie
étonnamment puissant. Il rencontra l’avant-garde
prussienne sous Tauentzien. Cela commandait
son propre détachement d’avant-garde, qui s’était
retiré des combats judiciaires les jours précédents
avec des pertes mineures. En outre, il avait reçu
50
le commandement des restes de l’avant-garde
vaincue dans la bataille près de Saalfeld du
prince déchu Louis Ferdinand de Prusse.
Le commandant saxon, le lieutenantgénéral
Zezschwitz, fit prendre à sa division du général
Niesemeuschel une position défensive sur la
crête du soi-disant « escargot » au sud-ouest de
Lützeroda.
Une attaque décisive
Napoléon a ordonné au V Corps sous Lannes
d’attaquer les positions prusso-saxonnes avancées
d’abord aux villages de Cospeda, Lützeroda et
Closewitz, puis à Rödigen et Lehesten. À cette
fin, la division de Gaza a été affectée à gauche et la
division Suchet à droite. Par rapport aux Saxons,
le VIIe Corps français sous Augereau formait
l’aile gauche, la division Desjardin put pénétrer
Isserstedt avec l’avant-garde, tandis que la
division Heudelet s’avançait derrière la Mühltal.
La garde impériale, formée en cinq réunions
à Karees, resta sur le Landgrafenberg sous les
ordres du maréchal Lefebvre et suivit plus tard
derrière Lannes jusqu’au Dornberg. Le général
Tauentzien commandait des troupes battues et
insuffisamment préparées. Le régiment Zweiffel
sous le colonel Brandenstein a été attaqué par
Vierzehnheiligen à la hauteur entre Krippendorf
et le moulin à vent. Les troupes françaises
réussirent à éloigner ces unités du Dornberg
à travers le champ de bataille brumeux. Le IVe

51
Napoléon, l’homme sans limites
corps du maréchal Soult, qui formait l’aile droite
des Français, avait franchi le Rautal et atteint le
plateau. La division Saint Hilaire et la brigade
de cavalerie Margaron poussent l’aile gauche
de Tauentzien à Kloswitz puis tombent sur les
lignes intactes de l’aile gauche prussienne sous
le général Holtzendorff à Rödigen. Pendant
ce temps, l’avant-garde vaincue de Tauentzien
s’était retirée de Krippendorf à Klein- Romstedt.
L’infanterie de la division prussienne Grawert
a attaqué le village de Vierzehnheiligen et y a
temporairement arrêté la bataille. Cette position
sans défense a été maintenue pendant une
heure et demie, pendant laquelle l’infanterie
et l’artillerie françaises ont tiré sur les troupes
de Hohenlohe, car Hohenlohe pensait qu’il ne
pourrait pas attaquer sans le soutien de Rüchel,
qui marchait de Weimar. L’aile gauche prussienne
sous Holtzendorff a été rejetée derrière
Altengönna par le corps Soult et a dû se replier
sur Hermstedt et Apolda. Le général Sanitz a été
blessé et sera capturé par l’armée française près
de Heiligenholz. Le front prussien restait trop
large et les Français, qui recevaient des renforts
constants du corps Ney, menaçaient de déborder
et d’encercler le village de Vierzehnheiligen. La
ligne de front prussienne s’est brisée à la suite
du feu continu de l’ennemi sans couverture lors
de l’attaque de l’infanterie française de plus en
plus forte, après quoi Hohenlohe a dû ordonner
52
la retraite, ce qui a cependant conduit à une
évasion de panique lorsque la cavalerie a attaqué
sous Murat.
Un combat inégal
Vers 13 heures, le corps de Rüchel atteignit
Kapellendorf, où le corps de Hohenlohe, déjà
démantelé, s’approcha de lui. Le corps de Rüchel
entreprit une contre-attaque infructueuse dans
laquelle il subit de lourdes pertes et Rüchel fut
également grièvement blessé. Puis il descendit
dans la foule de ceux qui fuyaient en direction de
Weimar et se dirigea vers la forteresse d’Erfurt.
Au total, environ 10 000 soldats prussiens et
saxons ont été tués ou blessés et 10 000 autres ont
été faits prisonniers. Les Français, en revanche,
n’avaient qu’environ 7 500 morts ou blessés.
Cause de la défaite
La cause principale est l’indécision de Friedrich
Wilhelm III, et de voir le duc de Braunschweig,
qui avec trop de prudence et d’hésitation s’est
transféré la responsabilité l’un à l’autre et s’est
confié dans les actions de l’autre (de leur propre
point de vue plus compétent). En revanche,
les rivalités et les airs des principaux généraux
Hohenlohe, Rüchel et Kalckreuth sont d’une
importance secondaire. La bataille ne devait pas
nécessairement être perdue. Napoléon avait pris
un risque élevé en faisant occuper ses troupes
sur un éperon autour du Landgrafenberg tard
dans la soirée. Le corps de Lannes et les gardes

53
Napoléon, l’homme sans limites
étaient entassés dans un espace confiné au centre
(le VI Corps sous Ney ne pouvait remonter que
dans la matinée avec la division Marchand).
Une attaque précoce et massive déterminée par
les troupes prussiennes-saxonnes aurait plongé
les Français, qui étaient clairement inférieurs
à l’époque, redescendre la pente raide dans le
labyrinthe de rues d’Iéna, où il n’y avait que des
occasions insuffisantes de battre en retraite sur
deux étroits ponts sur la Saale - le désastre aurait
probablement été inévitable. Hohenlohe avait
déjà préparé cette attaque, mais ne l’a pas fait
quand, au moment de l’attaque, Massenbach est
revenu du quartier général avec l’ordre d’éviter
les combats.
Napoléon, le plus fin stratège
Napoléon, cependant, a correctement évalué
l’indécision prussienne. Au contraire, il a
toujours attaqué résolument et énergiquement
et efficacement coordonné son corps d’armée,
qui était sous le commandement de maréchaux
relativement jeunes expérimentés, avec
indépendance, responsabilité et engagement -
exactement le contraire des généraux prussiens.
Les conséquences d’une victoire totale
Les défaites furent amères pour l’armée
prussosaxonne, mais elles ne conduisirent pas
à elles seules à une catastrophe. Au cours de la
retraite, des tentatives avaient été faites pour
contourner les troupes françaises dans le nord
54
et les réinstaller à Berlin. Cela a échoué parce
que le corps français pouvait avancer plus vite
vers le nord. Une grande partie de la force a
déserté. Au cours de cette retraite, les soldats
ont été impitoyablement poursuivis et détruits
par les troupes françaises. Seuls quelques
grands départements ont réussi à se retirer
de manière ordonnée, ce qui a fait ressortir en
particulier Blücher et Scharnhorst. Mais en
quelques semaines, ils ont été contraints de se
rendre à l’ouest de l’Oder près de Halle, Prenzlau
et Lübeck. Le roi Friedrich Wilhelm III s’est
échappé avec sa famille en Prusse orientale,
et Napoléon est entré à Berlin le 27 octobre en
tant que vainqueur. De même, en octobre et
novembre, les grandes forteresses prussiennes
d’Erfurt, Spandau, Stettin, Küstrin, Magdebourg
et Hameln se rendirent sans combat. Après que
le roi eut annoncé dans l’audience d’Ortelsburg le
1er décembre que tout commandant serait fusillé
s’il ne maintenait pas sa forteresse « avec les
efforts les plus acharnés au maximum », d’autres
forteresses combattirent jusqu’à l’épuisement,
Breslau, Brieg, Glogau, Danzig, Glatz et Neisse.
Lorsque la paix fut conclue, Kolberg, Glatz,
Graudenz, Silberberg, Kosel et Pillau étaient
toujours aux mains des Prussiens. Des poursuites
judiciaires militaires ont été engagées contre les
commandants des forteresses capitulantes, qui
ont abouti à deux condamnations à mort. Dans

55
Napoléon, l’homme sans limites
le cas de Spandau, le roi l’a converti en forteresse
d’arrestation sur la miséricorde royale, et dans le
cas de Küstrin, il n’a pas pu être exécuté en raison
de la désertion. Contrairement à Austerlitz, ou
Napoléon n’avait pas donné l’ordre de poursuivre
l’armée vaincue pour la détruire, il donna cette
fois, l’ordre de poursuivre l’armée vaincue.
Napoléon offre la paix
Lorsque Napoléon a conclu un armistice avec la
Russie le 21 juin 1807, il avait conquis tous les
États européens ou les avait liés par des traités -
à l’exception de la Grande-Bretagne, de la Suède
et de l’Empire ottoman. Quelques semaines plus
tard, le 7 juillet, le traité de paix de Tilsit entre la
France et la Russie stipulait que la Prusse devait
céder la moitié de son territoire national, mais
était conservé. Deux jours plus tard, la Prusse
n’avait pas le choix et elle a également signé
un accord de paix correspondant. Napoléon a
également poussé le renvoi d’Hardenberg et de
Rüchel. Dans l’accord de suivi de Königsberg
du 12 juillet 1807, la France s’engage à retirer
progressivement ses troupes de Prusse,
conformément à la compensation de la
contribution de guerre encore à déterminer.
Le montant de la contribution de guerre n’a
été fixé par Napoléon que le 8 septembre 1808
dans la Convention de Paris. Selon cet accord,
les garnisons françaises devaient rester dans
les forteresses prussiennes de Stettin, Küstrin
56
et Glogau jusqu’à ce que 120 millions de francs
soient payés, l’armée prussienne devait être
réduite à 42 000 hommes et tout sorte de milice ou
de réserve était interdite. La France s’est engagée
à évacuer la Prusse à l’exception des forteresses
dans un délai de 40 jours. Avec la victoire d’Iéna,
Napoléon tient, avec Austerlitz, les plus grandes
victoires et triomphes de sa carrière.

57
Napoléon, l’homme sans limites
Un consul à vie !

C
ette appellation fut donnée à Napo-
léon Bonaparte lorsque celui-ci fut à la
tête du Consulat, un régime politique
provisoire mis en place après le coup
d’État du 9 novembre 1799. Nommé alors Pre-
mier Consul, Napoléon deviendra ensuite consul
à vie à partir de 1802, avec les pleins pouvoirs.
Le consulat de France marque une période dans
l’histoire de la Première République française.
Du 10 novembre 1799 au 1er décembre 1804,
Napoléon Bonaparte a régné en tant que
premier consul. Le consulat a été remplacé par
le couronnement impérial de Napoléon Ier le 2
décembre 1804 par le Premier Empire. Le passage
du Directoire au Consulat a été opéré par le coup
d’État du 18 brumaire VIII (9 novembre 1799). La
Constitution de 1795 a été abolie par le Conseil
des Anciens sous la pression des militaires. La
Constitution du Consulat (Constitution de l’An
VIII) est entrée en vigueur le 24 décembre 1799.
Le consulat était l’institution du gouvernement
en France après la chute du Directoire, après le
coup d’État que Napoléon Bonaparte a donné
le 18 brumaire, une nouvelle constitution a été
promulguée qui a établi un pouvoir exécutif
composé de trois consuls pendant 10 ans en
charge de 1799, mais tout le pouvoir était

58
concentré dans le premier consul, jusqu’au début
de l’Empire napoléonien en 1804. Par extension,
le terme Consulat fait également référence à cette
période historique française.
Structure de la constitution
Le consulat reposait sur un projet de constitution
complexe, dont l’essentiel remontait à Sieyès,
coconspirateur de Bonaparte et membre du
premier consulat, mais avait été modifié par
Bonaparte. Le centre officiel de la constitution était
le Sénat (Sénat conservateur), qui se composait
de 80 membres de plus de quarante nommés à
vie qui se réunissaient à huis clos. Le Sénat s’est
complété et les anciens consuls sont devenus
membres constitutionnels. Ses tâches étaient
variées. Il avait le droit de choisir la législature,
le tribunal, les consuls et les juges en chef. En
outre, il pouvait déclarer inconstitutionnels et
donc invalider toutes les décisions législatives
et tous les autres actes du gouvernement, mais
aussi les élections populaires prévues. Les
amendements constitutionnels n’étaient pas
expressément prévus, mais ont ensuite été mis
en oeuvre au moyen de résolutions connues sous
le nom de senatus consulta. Le Sénat était dans
une certaine mesure un organe électoral, une
cour constitutionnelle et un organe de contrôle
général à la fois. Comme dans la constitution
de la direction, le gouvernement s’est structuré
en deux étapes, l’ancienne direction de l’exécutif

59
Napoléon, l’homme sans limites
a été remplacée par le corps des trois consuls,
en quelque sorte en remplacement du chef du
gouvernement et du chef de l’État. Les ministres y
étaient subordonnés en tant qu’organes exécutifs
proprement dits, mais ils devaient rester sans
influence politique.
Le Premier Consul
Les consuls étaient différenciés en tant que
premier, deuxième et troisième consul et étaient
élus par le Sénat pour une période de 10 ans, le
troisième consul étant nommé cinq ans en dehors
du premier et du deuxième. Dans les autres
affaires gouvernementales, il a dû consulter ses
deux collègues et ils ont dû signer les dossiers
du gouvernement, mais sa décision à elle seule
suffisait. Dans des cas individuels, il pouvait être
représenté dans ses prérogatives par l’un de ses col
lègues, qui était également autorisé à participer
à la gestion du Conseil d’État. Néanmoins, le
premier consul était le seul facteur déterminant,
tant sur le plan juridique que factuel.
Une chambre parlementaire
Le Sénat a également élu une sorte de chambre
parlementaire, le tribunat, qui pouvait discuter
des projets de loi proposés par le gouvernement
et exprimer ses voeux aux autres organes
constitutionnels, mais n’avait aucun pouvoir de
décision. En outre, le Corps législatif (Corps
législatif) a été élu par le Sénat, qui, après
avoir écouté passivement les porte-parole du
60
gouvernement et du tribunat, a été autorisé à
voter en secret sur les propositions législatives
du gouvernement. Les deux chambres ont été
partiellement renouvelées chaque année.
Le Conseil d’État
Un Conseil d’État, composé de trente à
quarante experts, a été mis en place en tant
qu’organe consultatif des consuls dans la gestion
gouvernementale et administrative, qui a en fait
office essentiellement de tribunal administratif
et qui existe encore de nos jours. Il a également
été chargé de rédiger les propositions législatives
de l’exécutif. Des élections populaires étaient
également prévues, bien qu’elles n’aient pas
été directes. Dans un système complexe à
trois niveaux, les listes locales ont d’abord été
déterminées aux différents niveaux administratifs
par un dixième de tous les électeurs éligibles,
parmi ceux-ci, lors d’un autre tour de scrutin, un
dixième des élus des listes locales sur les listes
régionales, et enfin un dixième des élus sur les
listes régionales des listes suprarégionales Listes
qui, ensemble, formaient une liste nationale.
Le Sénat et le premier consul n’étaient autorisés
à prendre en considération que les personnes
inscrites sur la liste pour leurs fonctions
respectives lors d’élections ou de nominations.
Le Sénat pourrait cependant annuler ces listes
à tout moment.
Cependant, les élections envisagées n’ont guère

61
Napoléon, l’homme sans limites
été utilisées pendant la période limitée pendant
laquelle la constitution était en vigueur ; En
raison de diverses dispositions, les résultats des
élections trop libres ont été exclus d’emblée : par
exemple, les premiers consuls ont été nommés
en vertu de la constitution (2e consulat) dans le
texte constitutionnel ; le sénat fut formé de telle
manière que les anciens deuxième et troisième
consuls et les nouveaux deuxième et troisième
consuls se réunirent et nommèrent ensemble la
majorité du sénat, les membres ainsi nommés
ont ensuite élu les autres. Sieyès et Ducos ont
été nommés sénateurs par la constitution. Le
29 floréal, an X, Napoléon, Premier Consul
fonde l’ordre de la Légion d’honneur. La
Révolution française avait supprimé ordres et
distinctions au nom du principe d’égalité. Mais
au lendemain de la Révolution, la création d’une
distinction nationale fait partie du programme
de réorganisation de la nation de Napoléon
Bonaparte, Premier Consul, au même titre que la
réforme de l’administration, la rédaction du Code
civil, ou la fondation de la Cour des comptes.
Une Légion d’honneur qui récompense
militaires et civils
« Je défie qu’on me montre une république
ancienne ou moderne dans laquelle il n’y a pas
eu de distinctions », déclare Napoléon Bonaparte
lors de débats préparatoires très vifs au Conseil
d’État, début mai 1802. « Il faut créer un ordre
62
qui soit le signe de la vertu, de l’honneur, de
l’héroïsme, une distinction qui serve à la fois
la bravoure militaire et le mérite civil. » Soumis
au vote, le projet de Napoléon est adopté par le
Tribunat par 56 voix contre 38, puis le 19 mai
1802 (29 floréal, an X) par le Corps législatif, par
166 voix contre 110. Le décret du 29 floréal porte
donc acte de la création d’une Légion d’honneur
qui récompense aussi bien les militaires que les
civils, et qui rassemble aussi bien le simple soldat
que l’éminent scientifique.
Napoléon distribue les insignes de la Légion
d’honneur après la proclamation de l’Empire
Napoléon s’abstient d’abord de prescrire aux
membres de la nouvelle institution le port
quotidien d’un insigne, considéré par certains
comme une offense au principe d’égalité. Il faut
attendre la proclamation de l’Empire, deux ans
plus tard, pour que le décret du 11 juillet 1804
(22 messidor, an XII) fixe la première forme
de la décoration (dessin ci-contre), à peine
deux mois après la proclamation de l’Empire
(le 18 mai 1804). Le 15 juillet 1804, l’Empereur
procède alors à la première distribution des
insignes de la Légion d’honneur en l’église des
Invalides au cours d’une fastueuse cérémonie
officielle, la première de l’Empire. Faisant partie
des collections du musée de l’Armée, le collier du
grand maître de l’ordre de la Légion d’honneur
a appartenu à Napoléon 1er. Sa chaîne en or est

63
Napoléon, l’homme sans limites
formée de seize médaillons représentant les
différentes disciplines des membres de l’Ordre
(comme l’architecture, les lettres, les sciences, ou
encore la marine) et de seize aigles, le tout encadré
de deux rangs de chaînons décorés d’abeilles.
L’ensemble est réuni par le monogramme N (pour
Napoléon). L’Hôtel de Salm à Paris abrite le siège
de la Légion d’honneur depuis 1804, date de son
acquisition par le comte de Lacépède, premier
grand chancelier de la Légion d’honneur.
Les ministres pendant Le Consulat et l’Empire
de 1799 à 1814
Pierre-Simon, marquis de Laplace (1749-1827)
12 novembre 1799 - Astronome et mathématicien,
membre de l’Académie des sciences en 1785, il a
ouvert la carrière militaire du jeune Bonaparte
comme examinateur d’entrée à l’École militaire. Il
fut choisi comme premier ministre de l’Intérieur
immédiatement après le 18 Brumaire.
Lucien Bonaparte (1775-1840)
25 décembre 1799 - Après des études au séminaire
d’Aix-en-Provence, d’où il est renvoyé, il participa
avec Paoli aux luttes politiques Corses. Député
de la Corse en Avril 1798, il devint président du
Conseil des Cinq Cents et participa activement au
coup d’État du 18 Brumaire. Il remplaça Laplace,
démis par Bonaparte, qui lui fit le reproche de
manquer de vue générale sur son administration.
Jean Antoine Chaptal, comte de Chanteloup
(1756-1832)
64
21 janvier 1801 - Fondateur des premières
fabriques de produits chimique en France, il
institua les chambres de commerces et créa la
première Écoles d’Arts et métiers. En charge du
portefeuille de l’Intérieur par intérim depuis le 6
novembre 1800, il fut confirmé dans ses fonction
quelques semaines plus tard, succédant à Lucien
Bonaparte, envoyé comme ambassadeur en
Espagne, suite à des conflits avec son frère.
Jean-Baptiste Nompère de Champagny, duc de
Cadore (1756-1834)
8 août 1804 - Officier de la marine royale, député
de la noblesse aux États généraux, il fut un des
premiers députés de la noblesse à se rallier à
Tiers État. Emprisonné sous la terreur, il revint
à la vie publique après le 18 Brumaire. Protégé
de Lebrun, il entra au Conseil d’État, fut envoyé
comme ambassadeur à Vienne de 1800 à 1804,
avant d’être appelé à l’Intérieur par Napoléon le
8 août 1804, fonctions qu’il n’occupa réellement
que le 4 novembre.
Emmanuel Cretet, comte de Champmol
(1747-1809)
9 août 1807 -Né dans l’Isère, appartenant à la
haute bourgeoisie commerçante, député de la
côte d’or en 1795, sénateur et conseiller d’État
en décembre 1799, il devint directeur général
des Ponts-et-Chaussées en 1804. Gouverneur
de la Banque de France en 1806, il fut nommé
ministre de l’Intérieur le 9 août 1807.

65
Napoléon, l’homme sans limites
Joseph Fouché, duc d’Otrante (1759-1820)
Intérim 1809 - Ancien oratorien, professeur
devenu avocat, il vota la mort du roi à la
Convention nationale. En 1797, Barras lui confia
la police secrète du régime, et en 1799 le poste
de ministre de la Police général qu’il occupa
jusqu’en 1802 puis de 1804 à 1810. Confirmé en
effet dans ses fonctions par Bonaparte, il entama
alors un important
travail de réorganisation de la police.
Jean-Pierre Bachasson, comte de Montalivet
(1766-1823)
1er octobre 1809 - D’abord gentilhomme des
hussards de Nassau, il prit un congé de longue
durée pour se consacrer à l’étude du droit à
Valence. Conseiller au parlement de Grenoble
de 1785 à 1790 il rencontre lors de ses séjours
à Valence, un jeune officier Bonaparte, auquel
il se lie. Pendant la terreur, il s’engage dans
l’armée d’Italie ; entre 1794 et 1796 maire de
Valence, commissaire du Directoire pour la
Drôme, il devient commissaire ordonnateur
adjoint de l’armée d’Italie. Après Brumaire, il fut
nommé préfet de la Manche (avril 1801) puis
de la Seine-et-Oise (mars 1804). Napoléon 1er
l’appelle le 5 mai 1806 à la direction générale
des ponts-et-chaussées puis au ministère de
l’Intérieur le 1er octobre 1809.

66
Trop petite pour
sa légende

«S
ainte-Hélène, petite île », avait
noté Napoléon dans un de ses
carnets de jeunesse. Petite, en
effet, cette île de 122 km2 décou-
verte par les Portugais en 1502 et occupée par les
Anglais depuis 1651 ne comptait que 5 218 habi-
tants en 1815, au moment où le gouvernement
britannique décida d’y envoyer Napoléon Bo-
naparte, vaincu à Waterloo le 18 juin 1815 et ré-
fugié depuis le 15 juillet à bord d’un navire de la
Royal Navy.
Bonaparte et son armée expéditionnaire étaient
accompagnés de la Commission des sciences
et des arts, un groupe d’experts de 167 savants,
ingénieurs, artistes, etc. La plupart d’entre
eux étaient membres fondateurs de l’Institut
d’Égypte du Caire en 1798, une institution
scientifique pour l’étude de l’Égypte. Les résultats
de l’expédition ont été documentés dans la
collection en plusieurs volumes de textes et
d’images Description de l’Égypte, qui a jeté les
bases de l’égyptologie ultérieure. Les objectifs
de l’expédition fixée par le Directoire étaient de
faire de l’Égypte une province française, mettre
fin à la suprématie britannique en Méditerranée
et assurer à la France un rôle dominant dans
67
Napoléon, l’homme sans limites
le commerce levantin. L’Égypte appartenait à
l’Empire ottoman, mais le pouvoir était exercé
par les beys mamelouks depuis le 17e siècle.
L’exil et la mort de Napoléon sous la surveillance
du terrible « geôlier » Hudson Lowe, racontés,
commentés, dessinés et réécrits par des centaines
d’admirateurs ou de contempteurs de l’épopée
impériale, ont fasciné le XIXe siècle.
L’exil
Avant d’être livré aux Britanniques le 15 juillet
1815 devant l’île d’Aix, Napoléon est conduit
à Torbay puis à Plymouth à bord du HMS
Bellerophon. Après avoir appris son transfert
forcé sur l’île de Sainte-Hélène le 31 juillet,
Napoléon est embarqué le 7 août 1815 à bord du
Northumberland, ce qui le conduit à destination
après deux mois et une semaine de traversée. Il
y a eu plusieurs témoins de la traversée, parmi
lesquels la figure d’Emmanuel de Las Cases, qui
composa plus tard le Mémorial de Sainte-Hélène
et Denzil Ibbetson, commissaire anglais chargé
des approvisionnements militaires, qui laissa un
journal, resté inédit jusqu’en 2010.
Ou se trouve l’île ?
Sainte-Hélène est située à 1900 km à l’ouest de
l’Afrique, au milieu de l’Atlantique sud, l’île est de
nature volcanique, avec trois amarres utiles qui
la rendaient facile à défendre. Northumberland
a accosté à Sainte-Hélène le 15 octobre 1815.
Napoléon débarqua le lendemain. Parmi ceux
68
qui l’accompagnaient figuraient le Grand
Maréchal du Palais, Henri Gratien Bertrand,
le général Gourgaud, Las Cases et le général
Montholon, Louis-Étienne Saint-Denis, dit le
Mamelouk Ali, et son valet Marchand. Le 17
octobre 1815, Napoléon s’installe au pavillon
des Briars chez les Balcombe, attendant que son
lieu de détention définitif soit adapté également
pour ses compagnons d’exil. Longwood House,
située sur un terrain plat, permettait une
surveillance optimale, mais était exposée à des
alizés constants, au brouillard et à l’humidité, à
de fortes pluies ou à un soleil brûlant. Napoléon
s’installe officiellement dans sa nouvelle maison
le 10 décembre 1815 en présence du gouverneur
provisoire, l’amiral Cockburn.
A tout seigneur, tout honneur.
Le plus célèbre témoignage, le Mémorial de
Sainte-Hélène, rédigé de juin 1815 à décembre
1816 par le chambellan Emmanuel de Las
Cases, un des fidèles de l’Empereur déchu, est
constamment réédité depuis sa parution en 1823.
D’autres témoignages ont également été conservés,
comme les Récits de la captivité de Napoléon à
Sainte-Hélène du général Montholon, publiés
en 1847, les Mémoires du docteur Francesco
Antommarchi, dernier médecin de Napoléon
de 1819 à 1821, les Rapports du baron Stürmer,
commissaire envoyé par l’Empereur d’Autriche
surveiller le captif, les Rapports du marquis

69
Napoléon, l’homme sans limites
de Montchenu, envoyé par le roi Louis XVIII,
la Correspondance du chirurgien William
Warden, qui accompagna l’Empereur sur l’île, les
Souvenirs de la comtesse de Montholon, connue
pour avoir été la dernière maîtresse de Napoléon,
les Souvenirs de Santini, un des domestiques
de l’Empereur à Sainte-Hélène, ou encore les
Souvenirs de Betsy Balcombe, la petite Anglaise
malicieuse rencontrée par l’Empereur captif au
tout début de son exil. Les sources ne manquent
donc pas et permettent de se faire une bonne idée
du quotidien de Napoléon et de son entourage
entre le 17 octobre 1815, date du débarquement
à Sainte-Hélène, et le 5 mai 1821, jour de la mort
du souverain déchu dans sa petite maison de
Longwood. Il faut aussi mentionner l’édition des
OEuvres de Napoléon à Sainte-Hélène, dernier
volume de la Correspondance de Napoléon Ier
publiée par ordre de Napoléon III.
Découvrir l’île
Pour ceux qui souhaitent découvrir plus en détail
l’île et ses secrets, la BnF conserve de nombreuses
ressources iconographiques et cartographiques,
notamment une carte et une vue de l’île de Sainte-
Hélène datant de la fin du XVIe siècle, une autre
du XVIIIe siècle, mais aussi l’original manuscrit
de la carte de l’île diffusée en Angleterre à partir
de 1815 par le lieutenant R. P. Read (ainsi qu’une
version imprimée de la même carte). Les plus
belles furent celles gravées par Robert Havell
70
d’après les dessins de George Hutchins Bellasis,
représentant les paysages les plus pittoresques de
l’île comme la Colonne de Sandy Bay ou encore
Plantation House, la luxueuse résidence de
campagne du gouverneur de l’île. Les plus belles
furent celles gravées par Robert Havell d’après les
dessins de George Hutchins Bellasis, représentant
les paysages les plus pittoresques de l’île comme
la Colonne de Sandy Bay ou encore Plantation
House, la luxueuse résidence de campagne
du gouverneur de l’île. Sur l’exil de Napoléon
lui-même, il existe certes de multiples caricatures.
Cependant, les images les plus intéressantes sont
celles qui furent dessinées sur l’île à l’époque de
la captivité de Napoléon et envoyées secrètement
en Angleterre pour y être gravées et diffusées.
Un officier anglais anonyme fit ainsi paraître un
portrait en pied – quelque peu caricatural – du
captif, pris sur le vif en mars 1817. Le lieutenant
Basil Jackson, qui faisait partie de l’état-major
de Hudson Lowe, arrondit sa solde en réalisant
plusieurs vues idéalisées de Longwood House,
qui parurent en Angleterre puis en France dans
un opuscule de propagande louant la vie pa
radisiaque sur l’île. Le commissaire militaire
Denzil Ibbetson fit parvenir en Angleterre
un portrait en pied de Napoléon dessiné en
mai 1816, à l’époque où le captif, encore en
bonne santé, était toujours conforme à l’image
de sa légende. Il laissa aussi un profil étrange

71
Napoléon, l’homme sans limites
de l’Empereur sur son lit de mort. Frederick
Marryat, commandant du Beaver, stationnant
au large de Sainte-Hélène, laissa pour sa part
un portrait du captif, déjà malade, au visage
bouffi, pris quelques mois avant sa disparition.
L’exaltation romantique autour de l’exil et de la
mort de l’Empereur inspirèrent de nombreux
dessinateurs. Certains éditeurs purent diffuser
les témoignages graphiques d’authentiques
acteurs de l’épopée, comme la vue de Longwood
House et la représentation quasi-photogra-
phique de la chambre mortuaire de l’Empereur
dessinés par Marchand, le valet de chambre de
Napoléon. D’autres gravures, plus fantaisistes,
représentèrent Napoléon en jardinier ou en père
éploré versant des larmes devant un portrait de
son fils. Pour la période du retour des Cendres,
de l’exhumation du corps de l’Empereur, de son
retour en France et de ses funérailles en grandes
pompes aux Invalides en 1840, il existe plusieurs
témoignages, comme celui de l’abbé Coquereau,
du fils du général Bertrand ou encore du fils Las
Cases. Le retour des Cendres intéressa aussi les
artistes. Des images d’Epinal mirent en scène
l’exhumation de l’Empereur, mais les cérémonies
furent aussi immortalisées par plusieurs vues
prises sur place. Une curieuse gravure représenta
même Napoléon en momie égyptienne !

72
Un stratège de la
cavalerie de la Garde

A
près le désastreux dénouement de
Leipzig, Napoléon s’arrête à Erfurt,
du 23 au 25 octobre 1813, afin de ré-
organiser les débris de la Grande Ar-
mée.
Un triste constat se fait rapidement jour : les
effectifs de l’armée impériale ont fondu comme
neige au soleil. Sur les 170 000 soldats qui
formaient les rangs des célèbres phalanges, au
début du mois d’octobre, il ne reste plus que
110 000 hommes. Et encore ce nombre doit-il être
réduit, considérant que près du tiers des « unités
combattantes » est composé de traînards, pour
la plupart sans armes et sans commandement.
Dans ces conditions, il ne faut plus songer qu’à
regagner la France au plus vite, afin de sauver
ce qui reste de la Grande Armée. Ce à quoi
l’Empereur va s’employer, mettant toute son
énergie dans ce repli salvateur. A Erfurt, il a
choisi la route du retour. Celle-ci passera par
Gelnhausen, Hanau, Francfort et Mayence. Dans
cette dernière ville, un fleuve mythique, chargé
d’espoir, puisqu’il ouvre la porte de la mère patrie,
restera à franchir : le Rhin.
Dans le même temps, la Confédération du
même nom achève de se désagréger.
73
Napoléon, l’homme sans limites
Après la trahison des Saxons, c’est au tour
des Bavarois de passer à l’ennemi. Le Général
Bavarois Charles-Philippe de Wrède, naguère
comblé des bienfaits de l’Empereur et chargé de
contenir le corps autrichien du Prince de Reuss,
joint ses troupes à celles des coalisés et se fait fort
de barrer toute voie de retraite à l’armée française.
Sachant la Grande Armée affaiblie et poursuivie
par quelque 200 000 soldats coalisés, il pense que
la seule vue de ses forces (50 000 austro-bavarois)
suffira à anéantir le moral de nos troupes et à leur
faire déposer les armes. De Wrede a déjà décidé
du lieu où il compte stopper les Français : ce sera
Hanau, petite place forte située au confluent de
la Kinzig et du Main. Le 26 octobre au matin,
ce qui reste de la Grande Armée s’est mis en
marche. A l’avant, ont pris place le 2e corps de
cavalerie de Sébastiani et la cavalerie légère de
la Garde commandée par Lefebvre- Desnouettes.
Ils sont suivis par les corps d’armée de Victor
et de Macdonald. Viennent ensuite les vestiges
des 6e, 5e et 3e corps, avec Marmont à leur tête,
les divisions Durutte et Sémélé (uniques restes
des 7e et 16e corps), l’Empereur accompagné
de sa vieille garde, la grosse cavalerie de la
Garde et le 1er corps de cavalerie placés sous
le commandement de Nansouty, et la réserve
d’artillerie. Beaucoup plus loin, soit à deux jours
de marche, et formant l’arrière-garde, nous
trouvons le 4e corps de Bertrand, accompagné
74
de la Division Guilleminot et du 4e corps de
Cavalerie, le 3e corps de Cavalerie d’Arrighi
et les divisions de jeune garde sous les ordres
d’Oudinot et de Mortier.
Une armée diminuée
A lire cet énoncé, à s’imaginer les « corps d’armée »
et les « divisions » en marche, on se représente,
sans grande difficulté, des masses considérables
de soldats que rien ne semble pouvoir arrêter. En
fait, il n’en est rien, car les corps d’armée n’ont
plus de corps que le nom. Ainsi, le 2e corps de
cavalerie de Sébastiani, censé regrouper trois
divisions (19 régiments !), ne peut ali gner que
3 000 sabres. Et ce qui est vrai pour les corps
d’armée, l’est également pour les divisions. Le
lendemain, 27 octobre, cette situation va encore
s’aggraver avec la défection de la Division
Wurtembergeoise qui quitte les rangs du 4e corps
de Bertrand. Pourtant, tout espoir n’est pas perdu,
car parmi les troupes qui s’avancent, se trouvent
des hommes de la plus grande valeur. Le 28
octobre au matin, une brigade de cavalerie légère,
avant-garde de l’armée du Général de Wrede,
s’empare de Hanau sans coup férir. Le 29, elle est
rejointe par le reste de l’armée austro-bavaroise
qui va aussitôt prendre les positions qui lui ont
été assignées par son généralissime. Quatre
divisions d’infanterie (deux bavaroises et deux
autrichiennes), totalisant quelque quarante
bataillons, se mettent en ordre de bataille avec

75
Napoléon, l’homme sans limites
une centaine de pièces d’artillerie. La plupart des
fantassins sont disposés le dos à la rivière Kinzig,
ainsi que les cinquante escadrons composant les
deux divisions de cavalerie austro-bavaroise. Ce
faisant, de Wrede a renouvelé l’erreur commise par
Bennigsen à la bataille de Friedland, ce qui risque
de lui coûter cher avec un adversaire déterminé
à passer coûte que coûte. A ce dispositif, sont
venus s’ajouter des partisans et des cosaques.
Placés à la gauche ennemie, ils représentent un
effectif d’environ vingt escadrons.
La stratégie de l’Empereur
Dans la nuit du 29 au 30, Napoléon, qui a fait
halte au Château d’Isembourg, s’attend à trouver
de Wrede devant Hanau. L’Empereur, dont les
vaillants soldats viennent d’effectuer une marche
de cinquante lieues en seulement quatre jours,
élabore avec ses maréchaux son plan de bataille. A
deux heures du matin, celui-ci est fin prêt et doit
aboutir au dégagement de la route de Francfort.
La partie risque, cependant, d’être serrée, car
Napoléon n’a avec lui que 17 000 hommes tout
au plus. Ne pouvant compter sur Marmont
et Bertrand, encore fort éloignés, il devra s’en
remettre aux 4 000 cavaliers de Sébastiani et
Lefebvre- Desnouettes, aux 5 000 fantassins de
Macdonald et Victor, aux 4 000 grenadiers et
chasseurs de la vieille garde (commandés par
Friant et Curial), aux 3 000 cavaliers de Nansouty
et à la réserve d’artillerie de Drouot.
76
A huit heures, le jour est levé.
Les hostilités débutent sous un ciel plombé qui
laisse tomber quelques flocons de neige mêlés à
la pluie. En avant de Hanau, se trouve la forêt de
Lamboi, où l’ennemi a disposé quelques milliers
de tirailleurs. La première action de la bataille
consistera donc à les en déloger. Macdonald est le
premier à pénétrer dans les bois, entraînant à sa
suite les 3 000 voltigeurs et fusiliers de la division
Charpentier. Les balles sifflent tout autour d’eux,
mais il en faut plus pour arrêter la progression
des Français qui commencent à déloger peu à
peu leurs adversaires. Bientôt rejoints par Victor
et les 2 000 hommes de Dubreton, les troupes
de Macdonald parviennent à faire reculer les
tirailleurs bavarois jusqu’à la lisière de la forêt.
Poussés par les soldats de Victor, les tirailleurs
Autrichiens connaissent bientôt le même sort
et se voient forcés de rallier le gros de leurs
troupes. Les fantassins en place Les fantassins
français s’apprêtent maintenant à déboucher
de la forêt, suivis par la cavalerie de Sébastiani.
Mais la mitraille vomie par quatrevingts canons
et le feu nourri de l’infanterie austro- bavaroise
interdisent toute sortie des bois. Informé, à
treize heures, de cette situation, Napoléon vient
constater par lui-même le déploiement ennemi.
Restant impassible aux boulets de canon qui
viennent fracasser les branches des arbres
situées juste au-dessus de sa tête, Napoléon

77
Napoléon, l’homme sans limites
se contente de répondre qu’il lui faut bien voir
le dispositif austrobavarois. Et c’est pendant
cette observation, au cours de laquelle il peut
constater que l’ennemi présente son dos à une
rivière, que l’Empereur a ces mots à l’égard du
Général de Wrede : « Pauvre de Wrede, j’ai pu le
faire comte, je n’ai pas pu le faire général ». Ayant
replié sa lorgnette, Napoléon ajoute aussitôt :
« Allons ! Il nous faut passer sur le ventre de
messieurs les Bavarois, puisqu’ils prétendent
nous barrer le passage ». Drouot ayant repéré un
chemin d’exploitation permettant d’amener de
l’artillerie jusqu’à l’orée du bois sans trop se faire
repérer, il élabore avec l’Empereur un plan qui
verra s’aligner jusqu’à cinquante bouches à feu,
destinées à donner le change à l’ennemi. Et afin
de protéger cette batterie, Napoléon lui adjoint
deux bataillons d’infanterie de la vielle garde, un
bataillon de chasseurs à pied et un bataillon de
grenadiers, également appelés à devenir le fer de
lance de l’attaque de l’infanterie française. A ses
fidèles grognards qui se préparent à prendre part
au combat, l’Empereur leur délivre ces quelques
paroles d’encouragement : « N’oubliez pas que
sous Louis XIV, ici même, à cette place, les
gardes françaises éprouvèrent un violent échec et
furent précipitées dans le fleuve. Faites en sorte
que l’ennemi éprouve aujourd’hui le même sort
et que la France soit vengée ! ».
Les canons entrent en action
78
Les canons français, mis en place en un temps
record, déversent bientôt un déluge de fer et de
feu sur l’artillerie austro-bavaroise, alors que
la cavalerie de Lefebvre-Desnouettes vient se
positionner sur leur droite, afin de contenir,
dans un premier temps, les partisans russes et
autrichiens. Plus à gauche, la grosse cavalerie
occupe, avec le reste de l’infanterie de la Garde,
la route de Gelnhausen, prête à fondre sur
l’ennemi au moindre signe de l’Empereur.
Quant aux hommes de Macdonald et de Victor,
formant le centre et l’aile gauche de l’armée
française, ils attendent également leur heure
pour passer à l’action. Le duel d’artillerie dure
jusqu’à quinze heures, moment fatidique pour
l’armée du Général de Wrède où l’impensable
se produit : son artillerie n’a plus de munitions !
Le généralissime des coalisés, aveuglé par
la certitude d’une victoire à bon compte, a
effectivement négligé l’approvisionnement de ses
troupes. Afin de dissimuler le repli de sa batterie,
de Wrede n’a d’autre choix que celui de lancer sa
cavalerie à l’assaut des canons de la Garde. Plus de
7 000 cavaliers Austro- Bavarois s’élancent donc
dans la plaine, sabre au clair. Devant cette masse
qui fond sur eux, nos canonniers, qui en ont vu
d’autres, conservent tout leur sang-froid. Et c’est à
la dernière minute, lorsque la cavalerie ennemie
se trouve à cinquante pas, qu’ils se décident
enfin à faire tonner leurs pièces. S’ensuit un

79
Napoléon, l’homme sans limites
épouvantable carnage dans les rangs des Bavarois
qui chargeaient en tête. Cependant, plusieurs
centaines de cavaliers ennemis parviennent
jusqu’à la batterie française, obligeant nos braves
canonniers à se défendre, la carabine à la main.
Drouot, lui-même, a sorti son épée et se bat
vaillamment contre un officier de chevau-légers
bavarois. Interviennent alors la cavalerie lourde
de Nansouty et la cavalerie légère de Sébastiani.
Leur élan est véritablement irrésistible et aucune
force sur cette terre ne semble pouvoir les
arrêter. La cavalerie ennemie est ramenée tout
entière, le sabre dans les reins. Et c’est au tour de
l’infanterie austro-bavaroise de faire les frais de
la charge française. Il faut les voir, les dragons
et grenadiers à cheval de la Garde, se couvrir de
gloire, de même que les 400 gardes d’honneur
du 3e régiment de la brigade Lafferière. Dans
la foulée, les deux bataillons de vieille garde ont
suivi. Malgré la faiblesse de leurs effectifs, ils
ne tardent pas à accomplir des prodiges. Dans
une telle débauche d’héroïsme, il est difficile
de repérer les plus courageux. Néanmoins, le
Général Cambronne et le Chef de Bataillon
Albert parviennent à se faire remarquer, à l’instar
de leur subordonné, le Capitaine Godard, qui
réussit l’exploit de culbuter plusieurs bataillons
bavarois avec seulement deux compagnies. A
inscrire également au panthéon des braves les
chasseurs Mère et Molert qui prirent, chacun, un
80
drapeau à l’ennemi, et le chasseur Paroume qui
alla, seul, s’emparer du fanon d’un guide au beau
milieu d’un bataillon bavarois !
Drouot avance ses pièces…
Pendant que les cavaliers austro-bavarois essayent
de se rallier derrière la ligne des cosaques, Drouot
en profite pour faire avancer ses pièces, ajoutant
encore au désarroi de l’infanterie ennemie. Afin
de dégager ses fantassins, de Wrède envoie, une
nouvelle fois, sa cavalerie à l’attaque, mais la
cavalerie de la Garde la sabre avant même qu’elle
ait pu atteindre la batterie de Drouot. Cette fois,
nos cavaliers infligent à leurs adversaires une
punition si terrible que la cavalerie alliée sera
dans l’incapacité totale de reprendre part à la
bataille.
Un officier des grenadiers à cheval fait état de ces
terribles combats dans une lettre, en date du 2
novembre, adressée à sa tendre amie : « Le 30 du
même mois, près de Hanau, les Autrichiens et
Bavarois réunis ont osé de se présenter sur notre
passage. La Cavalerie de la Garde, les grenadiers
en tête ont culbuté tout ce qui s’est présenté et je
me suis grandement vengé du mal qu’ils avaient
voulu me faire 15 jours avant. Mon bonnet a été
un peu entamé d’un coup de sabre, plusieurs me
sont tombés sur les bras sans couper seulement
mon habit. Ma pauvre Diana qui m’a rendu bien
des services a été moins heureuse, elle a eu le
nez fendu d’un coup de sabre. Ce ne sera rien et

81
Napoléon, l’homme sans limites
cela ne m’a pas empêché de la monter depuis ce
moment… ».
Partout sur le front, les coalisés sont bousculés.
A dix-sept heures, de Wrède n’a plus qu’une
seule décision à prendre : ordonner la retraite.
Cependant, il ne souhaite pas abandonner
complètement le champ de bataille, de manière à
pouvoir intercepter l’arrière-garde française lors
de son passage. Aussi, se contente-t-il de faire
traverser la Kinzig à ses troupes, avec pour mission
de tenir Hanau coûte que coûte. La manoeuvre de
repli à réaliser étant particulièrement délicate, il
envoie les divisions Bach et Beckers à l’assaut des
soldats de Macdonald et de Victor dans le seul
but de faire diversion. Cette démarche n’est pas
sans remporter quelque succès, mais, à Neuhof,
les coalisés sont stoppés par deux bataillons de la
vieille garde commandés par Friant. A dix-neuf
heures, la bataille est consommée, la victoire
est française. Les cosaques ont été dispersés par
les cavaliers de Lefebvre-Desnouettes, tandis
que le reste de l’armée coalisée est parvenu à
se rassembler du côté de Lehrof. Hanau est
toujours au pouvoir de l’ennemi, mais la route
de Francfort est dégagée, désormais tenue par
la cavalerie d’Exelmans. 11 000 coalisés gisent
sur le terrain, alors que les pertes françaises ne
s’élèvent qu’à 3 000 hommes. Mais au nombre des
morts français figure le célèbre Guindey, celui-là
même qui porta un coup de pointe mortel au
82
Prince Louis de Prusse.
Nouveau bombardement commandé par
Marmont
Le 31 octobre, à deux heures du matin,
Marmont, dont les troupes sont arrivées la veille
au soir, rouvre les hostilités en faisant bombarder
Hanau. L’Empereur l’a chargé d’occuper la ville
afin de protéger le passage de l’arrière-garde. A
la faveur de l’obscurité, et sous un déluge de feu,
les Autrichiens, qui occupaient la cité, évacuent
Hanau par la porte de Nuremberg. La place est
désormais libre. Au petit matin, la Grande Armée
reprend sa route, laissant le soin à Marmont et
à Bertrand, nouvellement arrivé, de contenir
l’ennemi qui ne manquera pas d’essayer de
prendre sa revanche. A neuf heures, Marmont,
contre toute attente, passe à l’offensive. Ce n’est
pas qu’il espère culbuter un adversaire bien
supérieur en nombre, mais, par cette manoeuvre,
il va donner à Bertrand le temps nécessaire pour
mettre en place son 4e corps. D’abord surpris par
une telle attaque, les coalisés reculent jusqu’aux
rives du Main. Ils ne tardent cependant pas à se
ressaisir et à prendre à leur compte l’initiative
de l’attaque. Devant les masses qui s’avancent
vers lui, Marmont est forcé de rétrograder. Son
repli s’effectue sans précipitation, toujours dans
le souci de gagner de précieuses minutes pour
Bertrand. Ce dernier ayant terminé, à midi, de
disposer ses hommes, Marmont peut, à son tour,

83
Napoléon, l’homme sans limites
quitter le champ de bataille et s’engager, avec ce
qui lui reste de troupes, sur la route de Francfort.
2 500 hommes face à 25 000 !
Bertrand, désormais seul et ne pouvant
compter que sur 2 500 soldats, s’apprête à
recevoir le choc d’un assaut mené par quelque
25 000 austro-bavarois. Il a placé la division
Fontanelli dans Hanau, tandis que la division
Guilleminot est chargée d’interdire le pont de
Lamboi à l’aide de douze pièces d’artillerie. La
division Morand, quant à elle, se tient en réserve,
protégeant l’accès à la route de Francfort. Il
est quatorze heures lorsque de Wrede se rend
compte qu’il n’a plus affaire qu’à un faible parti.
A dix contre un, il est certain d’écraser son
adversaire et lance aussitôt une attaque générale.
Ses deux objectifs sont la ville de Hanau et le
pont de Lamboi. Une heure plus tard, la ligne de
front s’embrase. Au pont de Lamboi, la Division
Guilleminot a fort à faire, ayant en face d’elle la
Division Beckers et deux régiments d’infanterie
soutenus par trente-deux bouches à feu et une
importante réserve de cavalerie. A Hanau, la
situation n’est pas moins critique, de Wrède
s’étant lui-même placé à la tête de six bataillons
autrichiens, suivis par le régiment de hussards
Autrichiens Szekler. L’infanterie bavaroise s’est
jetée sur le pont de Lamboi, mais chacun de
ses assauts reste infructueux. Les baïonnettes
françaises présentent un rempart infranchissable
84
aux Bavarois qui sont finalement repoussés ou
précipités dans la rivière. Le feu de part et d’autre
a été si violent que les longerons du pont se sont
enflammés et ont fini par céder sous le poids
des fantassins bavarois, ces derniers ayant laissé
deux cents des leurs aux mains des Français. A
Hanau, les Autrichiens sont parvenus à pénétrer
dans la ville. Dans les rues de la cité, les Italiens
de Fontanelli sont très vite submergés par le
nombre, mais ne cèdent du terrain que pas à pas.
Ils sont néanmoins repoussés jusqu’à l’extrémité
nord-ouest de la ville, et semblent bien incapables
d’empêcher les Autrichiens de franchir le pont
qui enjambe la Kinzig à cet endroit. Progressant
inexorablement, la colonne autrichienne a déjà
pris pied sur le pont et s’apprête à traverser au
moment même où l’artillerie de Morand, située
sur l’autre rive, entre en action et la prend pour
cible. Les pertes dans les rangs autrichiens sont
énormes, obligeant les coalisés à ralentir, pour
ne pas dire stopper, leur action. De Wrède essaye
d’encourager ses troupes, mais le voilà touché
au ventre par une balle française. Grièvement
blessé, il est emporté à l’arrière et bientôt suivi
par toute l’infanterie autrichienne. Le dernier
pont sur la Kinzig est en flammes, interdisant
désormais aux coalisés tout accès à la rive droite.
Ainsi s’achève la deuxième bataille de Hanau.
Elle aura coûté de 1 500 à 2 000 hommes aux
coalisés. Les deux journées de Hanau furent

85
Napoléon, l’homme sans limites
particulièrement meurtrières, tenant davantage
du carnage, et, ainsi que l’a noté Gérard, « nos
canons libres enfin de courir sur ce chemin de
Mayence, y trouvèrent tant de cadavres qu’ils
roulaient dans une boue de chair humaine ». Le 4
novembre 1813, la Grande Armée arrivait enfin à
Mayence, mais avec des effectifs encore diminués.
Ainsi qu’en a témoigné le Lieutenant Jolyet,
du 14e léger, division Charpentier : « certains
régiments de notre corps d’armée n’avaient pas
dix hommes ». Or, ce manque d’hommes allait
s’avérer particulièrement problématique pour
la prochaine campagne, la plus importante que
Napoléon eut à faire : la Campagne de France.

86
Un grand Chef pour
la grande armée

«J
e connaissais déjà comme certain
dans Drouot tout ce qui pouvait
en faire un grand général, j’avais
des raisons suffisantes pour le
supposer supérieur à un grand nombre de nos
maréchaux. Je n’hésite pas à le croire capable de
commander à cent mille hommes. » Napoléon (à
Sainte-Hélène)
Antoine Drouot naît à Nancy, dans la rue
Saint-Thiébaut, le 11 janvier 1774. Ses parents,
Charles Claude Drouot et Anne Royer, sont ce
qu’on peut appeler de braves gens. N’étant pas
fortunés – c’est le moins que l’on puisse dire – ils se
dépensent sans compter afin d’élever dignement
leurs douze enfants. Le père d’Antoine, boulanger
de son état, est connu pour son ardeur au travail.
Il est aussi célèbre pour sa générosité, car jamais
il ne refuse de donner du pain à ceux qui ont
faim. Antoine a une grande admiration pour son
père et c’est sans nul doute de lui qu’il va tirer ces
deux vertus qui resteront désormais attachées
à sa personne : la charité et la vaillance. Très
tôt, Antoine se révèle doué d’une remarquable
intelligence. A l’âge de trois ans, il voit des livres,
les ouvre et comprend instinctivement qu’ils
contiennent quelque chose qu’il ne sait pas
87
Napoléon, l’homme sans limites
encore déchiffrer. Il prend alors la résolution
d’apprendre à lire et c’est tout seul qu’il se rend
chez les frères afin d’obtenir d’eux d’être admis en
classe. Devant ce petit bout d’homme, les frères,
hilares, lui répondent qu’il est bien trop jeune pour
recevoir un enseignement, ce qui déclenche chez
Antoine un énorme chagrin. Toutefois, le Frère
Supérieur, devant la détermination et les pleurs
du jeune Drouot, veut bien tenter l’expérience.
Bien lui en prend, car il constate d’emblée chez
Antoine d’étonnantes aptitudes. Après avoir reçu
une éducation certes de qualité mais somme
toute basique, vient l’heure pour Drouot d’entrer
au Collège. Sa vive intelligence et son caractère
studieux lui ont déjà permis d’obtenir une
bourse, mais cela ne sera pas suffisant. Son père,
bien que conscient de ses difficultés pécuniaires,
ne souhaite pas priver son fils de cette chance qui
s’offre à lui de faire des études. Aussi, convient-il
avec sa femme de travailler encore plus.
Un fort sentiment religieux
Ayant développé, ces dernières années, un
fort sentiment religieux, et peut-être aussi
en reconnaissance pour ces frères qui lui ont
appris à lire, Drouot songe un moment à se
faire Chartreux. Cependant, nous sommes en
1792, une année où la France connaît de grands
dangers, et son patriotisme va l’emporter sur sa
foi. Déjà, un de ses frères, âgé de seize ans, vient
de s’engager dans l’armée de Sambre-et-Meuse.
88
Mais à peine ce dernier a-t-il revêtu l’uniforme
qu’il se fait tuer par un boulet. A cette nouvelle,
Antoine n’a plus qu’une seule idée en tête :
rejoindre nos combattants pour venger son frère.
Son père le dissuade, néanmoins, de partir au
front en tant que simple soldat. S’il veut se battre,
qu’il mette au moins son instruction au service de
la nation en devenant officier. Drouot va suivre
ce sage conseil et jette, dès lors, son dévolu sur
l’Ecole d’Artillerie de Châlons. Son frère est mort
par le canon, c’est par le canon qu’il le vengera.
Mais entrer dans cette prestigieuse institution
n’est pas si facile. L’examen d’entrée est redoutable
et plusieurs élèves, pourtant bien notés, se sont
cassé les dents sur des questions particulièrement
difficiles. Qu’à cela ne tienne, Drouot va préparer
cet examen avec sa fougue coutumière. N’est-il
pas habitué à se lever tous les jours à trois heures
du matin pour étudier, afin de profiter des lueurs
du four de son père ? Un autre obstacle pourtant
se présente : Châlons se trouve à bonne distance
de Nancy et ses parents ne peuvent lui offrir le
voyage en diligence.
Antoine n’a pas le choix, c’est à pied qu’il se
rendra à Châlons
Après plusieurs jours de marche, il arrive bon
dernier dans la salle d’examen, ce qui fait que tous
les regards se tournent vers lui. A son allure de
paysan pauvre, qui plus est couvert de poussière,
les deux cents autres concurrents, tous richement

89
Napoléon, l’homme sans limites
habillés, ont d’abord une réaction de stupeur puis
se moquent ouvertement de ce « phénomène ».
Monsieur de Laplace, l’examinateur en chef,
aussi surpris que les candidats, demande au
jeune Drouot s’il ne s’est pas trompé d’endroit.
Finalement, l’examen commence. En entendant
les questions posées à ceux qui le précèdent,
Drouot, auparavant intimidé, prend de l’assurance
en s’apercevant qu’il connaît toutes les réponses.
Vient enfin son tour.
Monsieur de Laplace envoie sa salve de questions
à Drouot, pensant, avec a priori, que le personnage
déguenillé qu’il a devant lui sera bien incapable de
répondre à la moindre interrogation. Quelle n’est
pas sa surprise en écoutant les réponses justes
sortir de la bouche d’Antoine. Elles sont, en plus,
accompagnées d’un raisonnement infaillible qui
ne tarde pas à impressionner l’examinateur. Se
prenant au jeu, de Laplace sort du programme
établi pour évoquer, avec Drouot, des questions
d’un niveau si élevé que l’assistance ne tarde pas à
perdre pied. Mais, là encore, le jeune cruellement
d’officiers. Aussi, les dix premiers de l’Ecole,
dont fait naturellement partie Antoine, sont-ils
affectés dans des régiments en opération ou qui
ne vont pas tarder à l’être. Au mois de juillet 1793,
Drouot rejoint le 1er régiment d’artillerie à pied
de Metz avec le grade de lieutenant en second.
Il n’a que dix-neuf ans. Après avoir connu la
vie de caserne pendant deux mois seulement,
90
son régiment est envoyé soutenir l’armée du
Nord commandée par le Général Houchard.
Ce dernier a reçu l’ordre d’aller au secours de
Dunkerque. En route pour cette destination,
son armée tombe sur un corps d’observation
autrichien à proximité d’Hondschootz, le 8
septembre 1793. A la tête de la 14ème compagnie
d’artillerie, Drouot déclenche un tir si précis
sur l’ennemi que celui-ci est déjà bien entamé
lorsque l’infanterie française arrive au contact.
Les Autrichiens sont très vite submergés et forcés
de battre en retraite. Dans cette affaire, l’action de
Drouot aura été déterminante et nous pouvons le
considérer comme l’un des principaux artisans
de la victoire. A un représentant du peuple venu
le féliciter, il exprime son souhait de poursuivre
l’ennemi l’épée dans les reins. Le représentant,
suffisamment heureux du résultat, ne souhaite
pas tenter la fortune davantage et s’emploie, au
contraire, à réfréner l’ardeur de ce jeune officier
à l’allure d’un enfant, ce qui lui vaut cette réponse
cinglante de la part de Drouot : « Des troupes
victorieuses n’ont pas besoin de repos ».
Drouot s’illustre au combat
Le 1er régiment d’artillerie est ensuite versé dans
l’armée de Sambre-et-Meuse, ce qui va permettre
à Drouot de s’illustrer dans de nombreux
combats, de 1794 à 1795, et de participer
notamment à la bataille de Fleurus. Pendant
cette période, sa valeur est reconnue et lui vaut

91
Napoléon, l’homme sans limites
une promotion rapide : le 22 février 1794, il est
nommé lieutenant en premier, puis capitaine le
24 février 1796. Cependant, ses compétences
vont l’éloigner un temps des champs de bataille.
En effet, remarqué pour ses connaissances
scientifiques, il est décidé de l’employer à la
direction d’artillerie. Le voici donc à Bayonne
où ses nouvelles fonctions l’amènent à diriger
et à surveiller des tâches aussi diverses que la
construction, la réparation et l’entretien des
affûts, voitures et autres attirails d’artillerie. Dans
ce nouveau poste, on pourrait le croire à l’abri
du danger, mais il n’en est rien, car l’accident
est proche. Alors qu’un jour, il inspecte l’âme
d’un canon à l’aide d’une bougie, un reliquat de
poudre, dissimulé dans une rainure, s’enflamme
soudainement et le brûle gravement au visage.
Drouot restera six semaines sans pouvoir ouvrir
les yeux. Certains ont vu dans cette mésaventure
l’origine de la cécité dont il sera frappé plus tard.
Cette affectation à Bayonne a également comme
conséquence funeste de l’empêcher de participer
tant à la première campagne d’Italie qu’à la
campagne d’Egypte, de sorte que le Général
Bonaparte, futur Empereur des Français, n’a
pas encore la possibilité de déceler ses talents
d’artilleur hors pair. En attendant, Drouot
reprend du service dans les forces combattantes.
En décembre 1798, il est affecté à l’armée de
Naples, ce qui lui donne l’occasion de participer,
92
le 19 juin 1799, à la bataille de la Trebbia. Bien
que, ce jour-là, le sort des armes soit favorable
à l’ennemi, les troupes de Macdonald peuvent
battre en retraite en bon ordre grâce au tir de
soutien des canons de Drouot. En 1800, il est
repéré par le Général Eblé (placé à la tête de
l’artillerie de l’armée du Rhin) qui le prend dans
son état-major. Ce nouveau poste lui permet
d’assister à la bataille de Hohenlinden, mais il
est toujours loin des yeux de Bonaparte. L’année
1803 voit Drouot prendre le commandement
de la 14ème batterie du 1er régiment d’artillerie
à pied. La France connaît, en ce temps-là, une
période de paix, de sorte que les occasions de
se signaler sont évidemment nulles. Drouot va
profiter de ce calme temporaire pour prendre un
congé et se rendre à Nancy. De retour dans sa
ville natale, il a, à la fois, le bonheur de retrouver
sa famille et le malheur d’assister au décès de son
père qui était gravement malade.
La Légion d’Honneur
L’année suivante, Drouot est au nombre des
premiers qui reçoivent la Légion d’Honneur
(il est fait légionnaire le 5 août 1804). Son âme
de guerrier commence aussi à se réveiller, car
il sait que l’armée française va bientôt partir en
campagne. Mais au lieu de rejoindre le camp de
Boulogne, il est appelé à Toulon par le Général
Lauriston qui souhaite l’avoir à ses côtés. Ce
dernier a reçu l’ordre de faire embarquer ses

93
Napoléon, l’homme sans limites
troupes sur les navires de l’Amiral Villeneuve
chargé d’attirer la flotte britannique vers les
Antilles. Une fois à bord de la frégate l’Hortense,
Drouot, qui n’a pas le pied marin, est constamment
malade. Il n’oublie son mal de mer que lorsqu’un
navire anglais est en vue, retrouvant alors
toutes ses qualités d’artilleur. Sur proposition de
Lauriston, et avec l’appui de Berthier, Drouot est
promu chef de bataillon et versé au 4ème régiment
d’artillerie à pied. Pour l’heure, il est à Cadix,
là où l’Amiral Villeneuve est venu s’enfermer
au mépris des ordres reçus. Et c’est justement
dans cette ville que Drouot reçoit une missive
l’enjoignant de gagner Strasbourg. Curieux clin
d’oeil du destin qui permit à notre artilleur de
quitter le navire juste avant la mémorable défaite
de Trafalgar. A Boulogne, la Grande Armée lève
le camp pour aller au-devant des Autrichiens et
des Russes. Drouot espère bien faire partie de
cette épopée qui amènera l’armée française à se
couvrir de gloire. Mais à peine a-t-il atteint Nancy
qu’un contrordre lui parvient. A la demande du
Général d’Artillerie Gassendi, lui-aussi conscient
des compétences scientifiques de son subalterne,
Drouot reçoit pour mission de se mettre à la
tête de la manufacture d’armes de Maubeuge.
Cette dernière, à la réputation peu élogieuse,
ne fournit plus que des armes de bien piètre
qualité. C’est pourquoi il a été décidé d’y envoyer
Drouot afin de remédier à cette situation. Bien
94
que notre Nancéien eût préféré rejoindre ses
camarades sur les champs de bataille de l’Europe,
il va accomplir sa nouvelle tâche avec toute la
conscience professionnelle qui le caractérise.
Très vite, il découvre le problème majeur de la
fabrique, lequel réside dans l’emploi de mauvais
fers. En faisant porter l’effort sur l’achat de
matières premières de qualité, il améliore, d’un
seul coup, la fabrication. Après avoir redressé la
manufacture de Maubeuge, Drouot est envoyé
relever celle de Charleville, victime d’un directeur
incompétent. Et bien qu’il accomplisse, là aussi,
des miracles, Drouot a l’impression de végéter,
ne pouvant donner toute la mesure de son talent.
Il sait pertinemment que c’est sur le champ de
bataille qu’il pourra véritablement se révéler.
Aussi, il ne cesse de réclamer son transfert dans
une unité combattante. L’année 1808 va, enfin,
lui donner satisfaction. Le 24 février, il est appelé
par Lariboisière qui commande l’artillerie de
l’armée d’Espagne. Dès son arrivée à Madrid,
Drouot se voit confier la direction des parcs
d’artillerie et des corps d’armée et divisions
d’observation en Espagne. Le 27 août 1808, il
est affecté à l’artillerie à pied de la Garde avec le
grade de major. Déjà remarqué par l’Empereur,
celui-ci le nomme à la tête du régiment à
compter du 15 décembre. Mais le brave Drouot
n’a pas encore eu la possibilité de frayer avec la
gloire. Celle-ci lui a donné rendez-vous pour

95
Napoléon, l’homme sans limites
l’année suivante, en Autriche. A la fin du mois
de mai 1809, Drouot est à Vienne où il s’emploie
à réorganiser son régiment, se signalant une
nouvelle fois auprès de Napoléon qui apprécie
ses qualités de grand coordonnateur. A Wagram,
lors de la fameuse bataille, l’Empereur permet à
Drouot de s’illustrer en lui confiant l’exécution
d’un des mouvements décisifs de la journée,
celui qui doit permettre l’entrée en scène de la
colonne Macdonald. Laissons Adolphe Thiers
nous conter, avec son talent coutumier, ce
célèbre épisode : « Enfin arrivent au galop, et en
faisant trembler la terre, les soixante bouches à
feu de la Garde, suivies de quarante bouches à
feu françaises et bavaroises. L’illustre Drouot, sur
une indication de l’Empereur se pose en jalon,
et les cent pièces de canon qu’il dirige viennent
s’aligner sur son épée. En un instant commence
la plus affreuse canonnade qui ait signalé nos
longues guerres ». Ecrasés par nos boulets, les
Autrichiens essayent désespérément de faire
taire la grande batterie, mais ni les efforts de leur
artillerie, ni ceux de leur cavalerie, ne peuvent y
parvenir. Drouot reste là, inébranlable, conscient
que de son action va peut-être dépendre le
sort de la bataille. Il se multiplie auprès de ses
canonniers, les encourageant par ses paroles et
son exemple, lui qui n’hésite pas à donner un
coup de main pour charger une pièce. A la fin
de la bataille, les pertes subies par ses troupes
96
attestent de la violence des combats : 19 officiers
et 457 artilleurs ont été soit tués soit blessés.
Lui-même a reçu un biscaïen au pied droit, ce
qui ne l’a pas empêché de rester auprès de ses
hommes, ayant exigé d’être pansé sur place. Le
9 juillet 1809, c’est tout son régiment qui est mis
à l’honneur avec la distribution de quelques 71
insignes de la Légion d’Honneur. L’Empereur ne
manque évidemment pas de récompenser notre
Nancéien en le faisant Colonel de l’Artillerie
à Pied de la Garde et en lui accordant le titre
d’Officier de la Légion d’honneur. Bien des
années plus tard, un ancien canonnier du nom
de Jean-Nicolas Maillot (de la 4ème compagnie à
pied de la Garde Impériale) rappelait à Drouot ce
magnifique fait d’armes dans une lettre en date
du 6 décembre 1831 : « A Wagram, en Autriche,
où ça chauffait si fort et où notre régiment a tout
fait, est-ce que vous croyez que, si vous n’aviez
pas été aimé comme vous l’étiez, les canonniers
de la Garde auraient aussi bien manoeuvré ?
Vous vous rappelez peut-être qu’après la bataille,
il manquait à l’appel 25 hommes par compagnie
dans l’artillerie de la Garde… ». Pour en finir
avec Wagram, notons que cette bataille aura
permis à Drouot, en plus de se couvrir de gloire,
d’instituer ce qu’il convient d’appeler la « charge
d’artillerie », manoeuvre initiée par le Général
Sénarmont à Friedland. Cette manoeuvre
consiste à lancer, à vive allure, des batteries vers

97
Napoléon, l’homme sans limites
l’ennemi, à la façon d’une charge de cavalerie,
puis à les stopper net une fois parvenues à courte
distance de l’adversaire. Les canons entrent alors
en action pour cracher un feu meurtrier sur les
lignes adverses.
Napoléon donne le titre de baron de l’Empire
à Drouot
L’année suivante, l’Empire Français connaît une
relative période d’accalmie. C’est ce moment que
choisit Napoléon pour anoblir Drouot, lequel
devient Baron de l’Empire le 15 mars 1810.
Cependant, la paix aura été de courte durée,
car voilà que se présente le spectre de la guerre
sous l’aspect d’un ours russe. En 1812, la Grande
Armée pénètre en Russie afin de faire entendre
raison à un Tsar traître à la parole donnée. Après
s’être dérobée sans cesse, l’armée russe accepte
enfin le combat aux portes de Moscou. C’est
la bataille de la Moskowa au cours de laquelle
nombre de Français vont s’illustrer.
Pascal Cazottes

Napoléon a ouvert la voie d’une grande légende


française. C’est vraiment l’homme sans limites.
Sachons rester fidèles à son ambition et à sa
grandeur.

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