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Les symptômes du bas appareil urinaire (SBAU) sont une cause fréquente de consultation en urologie. Le
syndrome clinique d’hyperactivité vésicale (SCHV) et certaines formes de rétention urinaire en font partie.
Lorsque aucune étiologie n’est retrouvée, et que les traitements de première ligne sont un échec, une
neuromodulation sacrée peut être proposée ; elle consiste à appliquer un champ électrique sur la branche
ventrale du nerf spinal S3 par une électrode située dans le troisième foramen sacré. Le système implantable
®
InterStim (Medtronic) est actuellement le seul dispositif disponible en France pour le traitement prolongé
des SBAU par neuromodulation sacrée. Cette thérapie de deuxième ligne est indiquée pour des troubles de
la phase de stockage : SCHV idiopathique ou neurogène avec ou sans incontinence et pour des troubles de
la phase de vidange : rétention réflexe sans obstacle anatomique (compatible ou non avec un syndrome
de Fowler). La neuromodulation sacrée a aussi une indication en colo-proctologie dans l’incontinence
fécale à sphincter conservé ou lésé en deuxième ligne après échec de rééducation. C’est ainsi que la
neuromodulation sacrée est un traitement de choix de la double incontinence (urinaire et fécale).
© 2018 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Nerf spinal
Racine ventrale
Efférence-motricité
Neurostimulation Neuromodulation
Racine dorsale
Section-désafférentation
Nerf spinal
Racine ventrale
Stimulation d’un organe effecteur (supraliminale)
Bien que ses mécanismes d’action ne soient pas complètement et comportementales, rééducation périnéosphinctérienne,
élucidés, le principe de neuromodulation doit être distingué de antimuscarinique, bêta3-agonistes et leurs associations, sti-
celui de neurostimulation (Fig. 1). mulation tibiale percutanée,
Dans la neuromodulation destinée à traiter les SBAU, ◦ SCHV neurogène ;
l’application d’un champ électrique à la branche ventrale du nerf • les troubles de la phase vidange :
spinal S3 par une électrode située dans le troisième foramen sacré ◦ rétention et dysurie sans obstacle anatomique (acontracti-
agirait par voie afférente. Son effet sur le SCHV pourrait être lié lité par inhibition vésicale réflexe) incluant le syndrome de
au recrutement d’une activité inhibitrice dans les nerfs hypogas- Fowler ;
triques, à la modification de l’activité afférente du nerf pudendal, à • l’incontinence fécale (recommandée en deuxième ligne après la
l’activation d’interneurones spinaux ou de structures cortico-sous- rééducation et les mesures hygiénodiététiques) dans les formes
corticales qui permettraient de limiter la survenue de l’urgenturie à sphincter intact ou à sphincter lésé ;
et de prolonger l’inhibition du passage à la phase mictionnelle. • la double incontinence (association d’incontinence urinaire par
Dans les rétentions « réflexes » liées, selon le modèle proposé par urgenturie et d’incontinence fécale).
Clara Fowler, à une activité anormale et permanente du sphinc- La neuromodulation est inefficace dans les contextes suivants
ter strié urétral, le même effet d’inhibition du message afférent (situation de non-indication) :
permettrait de supprimer l’inhibition du déclenchement de la • incontinence urinaire d’effort ;
contraction détrusorienne par le message afférent urétral aber- • hyperactivité du détrusor avec lésions complètes de la moelle ;
rant [3] . • lésions périphériques complètes (syndrome de queue-de-
®
Le système implantable InterStim , agréé par la Food and Drug cheval).
Administration (FDA) en 1997 et pris en charge au titre de la liste La neuromodulation est contre-indiquée dans les cas suivants :
des prestations et produits remboursables (LPPR) depuis 2002 en • en cas de désir de grossesse ; le fabricant recommande de
France, est actuellement le seul dispositif de neuromodulation dis- retarder le test et la mise en œuvre éventuelle de la thé-
ponible pour le traitement des SBAU. Le dispositif Axioncs basé rapie au post-partum. Pour une patiente déjà implantée, il
sur le même principe a obtenu le marquage CE en 2016 mais n’est est recommandé d’arrêter le stimulateur dès le désir de gros-
pas encore disponible en France. sesse exprimé et ce jusqu’à l’accouchement car les effets
®
Depuis la commercialisation du système InterStim , quatre tératogènes n’ont pas été évalués. La voie basse favorise-
changements techniques notables (par ordre chronologique rait le déplacement de l’électrode pendant la descente du
d’apparition) ont permis d’améliorer le dispositif : l’électrode per- fœtus dans le bassin [4] avec risque de perte d’efficacité en
cutanée à ailette utilisée pour le test et le traitement définitif ; le post-partum, faisant discuter l’intérêt d’une extraction par
®
boîtier de taille réduite et de connexion simplifiée InterStim II, césarienne ;
TM
le stimulateur temporaire de la phase test Verify et le mandrin • en cas de présence d’un autre boîtier de stimulation à moins de
courbe pour une pose optimisée de l’électrode elle-même modifiée 20 cm du fait du risque d’interférence (pacemaker, stimulation
pour le recevoir. cérébrale, etc.) ;
• il est préférable de ne pas réaliser d’autre stimulation électrique
externe chez les patients porteurs de boîtiers de neuromo-
Indications dulation (courants électriques utilisés en kinésithérapie par
exemple).
La thérapie InterStim® est un traitement de deuxième intention
indiqué chez l’homme et la femme dans :
• les troubles de la phase de stockage :
Stratégie de mise en œuvre
◦ SCHV idiopathique avec ou sans incontinence réfractaire au ®
traitement de première ligne associant : mesures diététiques L’implantation du dispositif InterStim comprend deux étapes.
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Neurostimulation sacrée : technique d’implantation 41-260
A B C
Figure 2. Installation du patient.
A. Décubitus ventral, les coudes fléchis à 90◦ et les pieds en dehors de la table d’opération.
B. L’anus doit être bien visible pour apprécier la réponse motrice lors de la stimulation.
C. Fiche noire sur le mollet du patient.
D. Positionnement des champs stériles.
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Neurostimulation sacrée : technique d’implantation 41-260
Trouvé Jumelé
0.0
OK OK
7 8
Continuer
10
Aiguille de
Câble test ponction des
foramens sacrés
S2
S3
1
S4
La tunnellisation de l’extension temporaire en sous-cutané et pour la plus faible intensité, et comme plot positif, le plot le
extériorisée au plus loin de la logette, en controlatéral, est réali- plus proximal. Le champ électrique créé entre ces deux plots
sée selon le même principe (diminution du risque d’infection de aura une intensité réglée au seuil de sensibilité consciente du
l’électrode définitive). patient en début de test. Il est possible, en l’absence de preuve
Les incisions cutanées sont suturées en deux plans. claire chez l’homme, de stimuler à 14 Hz le réglage par défaut
Une fois les pansements réalisés, l’extension temporaire est pour les deux indications. La fréquence peut être baissée entre
connectée à boîtier VerifyTM . La télécommande « patient » utilisée 5 et 10 Hz pour le traitement de l’hyperactivité vésicale (travaux
en mode médecin (code 1155) permet de paramétrer la stimula- de Fall et Lindstöm) ; pour les rétentions, 14 Hz peuvent être
tion. conservés. On ne dispose d’aucune étude sur laquelle baser une
stratégie de changement de fréquence. Certains auteurs ont décrit
Réglage de la stimulation de façon empirique des augmentations de fréquence à 20–50 Hz
Nous proposons de définir comme plot négatif le plot le plus pour « récupérer » un test initialement négatif dans les deux
distal (plot 0 si possible) donnant une réponse motrice typique indications.
Figure 5. Repérages radiologiques en incidence de profil : l’aiguille doit idéalement trouver le chemin du foramen S3. Lors de la mise en place de l’électrode
test, celle-ci doit dépasser légèrement la table interne du sacrum, puis la meilleure réponse est obtenue en retirant lentement l’électrode (A à D).
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Neurostimulation sacrée : technique d’implantation 41-260
A B
C D
Figure 6. Mandrin coudé et son électrode pour optimiser le placement le long du nerf (A à D).
C D
C D
Suivi et réglages
Le patient se voit confier une carte de porteur de dispositif médi-
®
cal implantable Medtronic à présenter lors de chaque passage de
champs magnétiques (portiques d’aéroport, de magasin, etc.). Ces
derniers peuvent altérer les paramétrages du dispositif et modifier
son efficacité.
Un suivi régulier est nécessaire en début de thérapie afin de
s’assurer du bon fonctionnement de celle-ci. Le patient sera revu
en consultation à un mois, puis six mois, puis annuellement. En
éteint au préalable) jusqu’à la loge du boîtier. Une incision de fonction des résultats du patient, une adaptation des paramètres
®
la coque fibreuse qui s’est constituée autour du boîtier est prati- grâce à la télécommande N’Vision pourra être nécessaire. Il fau-
quée. On extériorise alors le boîtier et la section des fils d’arrimage dra aussi vérifier l’aspect de la cicatrice à chaque consultation.
est réalisée. Le tournevis dynamométrique fourni avec le nou- La neuromodulation est donc une thérapie efficace mais qui
veau neurostimulateur permet de retirer l’ancien et de placer le nécessite une prise en charge par un praticien ou un centre
nouveau dans la même logette. Le boîtier est fixé comme précé- d’urologie ayant une bonne connaissance du dispositif implanté.
demment. En effet, il nécessite un suivi régulier avec le recours parfois à de
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Neurostimulation sacrée : technique d’implantation 41-260
S. Gaillet.
F. Lannes.
Service d’urologie et transplantation rénale, Hôpital de la Conception, AP–HM, 147, boulevard Baille, 13005 Marseille, France.
S. De Wachter.
Service d’urologie, Hôpital universitaire d’Anvers, Wilrijkstraat 10, 2650 Edegem, Belgique.
Faculté des sciences de la santé, Université d’Anvers, Anvers, Belgique.
G. Karsenty (gilles.karsenty@ap-hm.fr).
Service d’urologie et transplantation rénale, Hôpital de la Conception, AP–HM, 147, boulevard Baille, 13005 Marseille, France.
Aix-Marseille université, Jardin du Pharo, 58, boulevard Charles-Livon, 13007 Marseille, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Gaillet S, Lannes F, De Wachter S, Karsenty G. Neurostimulation sacrée : technique d’implantation.
EMC - Techniques chirurgicales - Urologie 2018;11(2):1-9 [Article 41-260].
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