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DEUXIEME PARTIE – LES REGLES PARTICULIERES

APPLICABLES AUX REGIMES MATRIMONNIAUX

LA TYPOLOGIE DES REGIMES MATRIMONIAUX

Le code civil a organisé plusieurs régimes parmi lesquels les époux peuvent
choisir celui qui va régir leurs rapports pécuniaires.
En effet, les futurs époux peuvent avoir librement choisi un régime
matrimonial par un contrat de mariage avant la célébration du mariage. Dans ce cas
on dit que leurs biens sont régis par un régime conventionnel. Lorsqu’ils n’ont pas
fait de contrat, les époux sont soumis au régime de légal qui est un régime de
communauté. Donc pour écarter le régime légal, les époux doivent faire un contrat
de mariage devant un notaire. L’acte de mariage mentionne l’existence ou
l’absence du contrat.
En effet, étudier le fonctionnement permet de mettre en exergue la
répartition des biens et des pouvoirs au sein des couples. La législation existante au
Cameroun consacre la prééminence juridique du mari, laquelle est plus affirmée

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dans les régimes communautaires que dans le régime de séparation de
biens70.
Il convient d’étudier successivement les règles propres aux régimes de type
communautaire (chapitre 1) et les règles propres aux régimes de type séparatiste
(chapitre 2)

CHAPITRE I – LES REGLES PROPRES AUX REGIMES DE TYPE


COMMUNAUTAIRE

Les régimes communautaires se caractérisent par l’existence de trois


ensembles ou masses de biens : les masses des biens communs, et les masses des
biens propres à chaque époux.
Il s’agit :
du régime de la communauté universelle ;
du régime de communauté de meubles et acquêts;
du régime de communauté réduite aux acquêts.
Tous les régimes de communauté peuvent être conventionnels. Mais, en
l’absence d’un contrat de mariage, le régime légal est celui de la communauté de
meubles et d’acquêts.
Il convient d’étudier au préalable les règles générales aux régimes de
communauté (§1) avant d’aborder celles relatives à la composition de chacun
d’eux (§2), à la gestion des biens (§3) et la dissolution des régimes de communauté
(§4).
§1 - LES REGLES GENERALES AUX REGIMES DE
COMMUNAUTE
Qu’elle soit légale ou conventionnelle, la communauté commence ne
commence que le jour de la célébration du mariage par l’Officier d’Etat Civil, pas
avant.
La composition et l’administration des biens communs font de la communauté
le régime le plus complexe. Les problèmes qui se posent ici sont relatifs à la
répartition des biens et des pouvoirs des époux.
L’une des caractéristiques de la communauté réside dans la répartition des
biens conjugaux en trois masses :
-les biens communs qui forment la communauté ;
- les biens propres du mari ;
- les biens propres de la femme.

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En conférant au mari le pouvoir d’administration de la communauté, le législateur de 1804 avait lui-même
consacré l’inégalité entre les conjoints quant à la gestion des biens conjugaux.

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La répartition des biens des époux présente quelques particularités selon le
type de communauté, (communauté universelle, communauté de meubles et
acquêts, communauté réduite aux acquêts). Dans tous les cas, on distingue les
biens communs des époux des biens propres de chacun.
La répartition des biens en biens propres ou communs suppose que l’on puisse
faire la preuve du caractère de chaque bien et de son appartenance à telle ou telle
catégorie. Les problèmes de preuve sont multiples. La qualification des biens
dépend des facteurs assez variés tels que la date d’acquisition, la nature du bien
acquis, l’origine des deniers ayant servi à l’acquisition du bien, son affectation
à l’usage de l’un des époux ou au service du ménage, les pouvoirs de l’époux
acquéreur, le lien entre la cause d’acquisition et le caractère propre ou
commun du bien, l’exercice d’une profession séparée par la femme.
Pour simplifier les difficultés de preuve, l’on a adopté la présomption de
communauté dans tous les cas où l’on ne peut établir l’appartenance d’un bien,
(art. 1402 c. civ71.).
Cette présomption est d’abord une présomption d’acquêts et aussi une
présomption de copropriété, si l’on admet que la communauté est une copropriété.
Les créanciers de l’un des époux peuvent se prévaloir de la présomption pour
prétendre se faire payer sur un bien affecté à la communauté.
Présumé commun, un bien est soumis aux règles de gestion de la
communauté. Il y a alors présomption de pouvoirs des époux sur ce bien. Lors le la
liquidation et du partage, il y a lieu de distinguer les biens communs à partager et
les biens propres qui seront repris par leur propriétaire ; la présomption joue et les
biens dont l’origine est inconnue seront tenus pour communs sauf preuve contraire.
Il appartiendra à l’époux qui soutient que le bien lui est propre d’en apporter
la preuve. La présomption peut être invoquée par un époux ou par un tiers ; elle
joue ici un rôle de protection des intérêts des époux contre les tiers.
La présomption d’acquêt est une présomption simple, elle peut être
combattue par les preuves contraires. La preuve de la propriété des biens
immobiliers doit être faite par écrit, acte authentique : le titre foncier.

§2 - LES REGLES PROPRES A LA COMPOSITION DE CHAQUE REGIME


DE COMMUNAUTE

A – Le régime de communauté de meubles et acquêts


La communauté de meubles et acquêts s’établit soit par contrat de mariage,
soir, à défaut, par simple déclaration (art. 1400).

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Article 1402 : Tout immeuble est réputé acquêt de communauté s’il n’est prouvé que l’un des époux avait la
propriété ou la possession légale antérieurement au mariage ou qu’il lui est échu depuis au titre de succession.

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Selon l’article 1401 du code civil de 1804, la communauté de meubles et
acquêts a pour actif les meubles et les acquêts72. Les acquêts sont de l’essence
même de la communauté ; la répartition met en jeu deux critères :
- la nature des biens selon qu’ils sont meubles ou immeubles ;
- l’origine des biens selon qu’ils étaient des biens présents au moment du
mariage, dont certains restent propres (les immeubles) ou les biens futurs qui
constituent presque les acquis. Les meubles présents et futurs tombent dans la
communauté ainsi que les immeubles futurs, i.e., ceux acquis pendant le mariage.
Régime légal au Cameroun. L’art 1401 c. civ. énonce que « La communauté
se compose activement de tous les meubles présents et futurs, des acquêts faits
par les époux ensemble ou séparément durant le mariage provenant de leurs
activités personnelles et des immeubles futurs ».
La communauté de meubles et acquêts comprend un actif et un passif.
I - L’actif
S’agissant de l’actif, on distingue l’actif commun et les actifs propres.
L’actif commun comprend les acquêts et les meubles acquis avant et pendant
le mariage par les époux ensemble ou séparément.
Comme acquêts, on distingue :
- les acquêts par nature : biens acquis à titre onéreux pendant le mariage grâce
à l’activité des époux ;
- les acquêts par volonté du donateur ou du testateur : biens acquis à titre
gratuit mais qui ont été déclarés acquêts par le disposant ;
- les acquêts par présomption : biens qui se trouvent dans la communauté et
sur lesquels aucun époux ne peut établir son droit de propriété.
La communauté peut également recueillir d’autres biens que les acquêts,
notamment, les biens communs par la volonté de l’un avec la permission de la loi ;
c’est le cas de certains biens dont les disposants gratifient la communauté. Il faut
ici une stipulation expresse qui fait tomber les donations dans la communauté.
Par contre, les biens réservés de la femme73 qui sont soumis à une gestion
distincte, font partie des acquêts.
La communauté n’englobe pas les immeubles présents, ni les libéralités
mobilières ou immobilières que les époux reçoivent pendant le mariage car, la
notion d’acquêts exclut celle d’acquisition à titre gratuit. Ceux-ci constituent
les actifs propres des époux.
Ces actifs propres comprennent un capital mobilier propre et un capital
immobilier propre :
 Le capital mobilier propre comprend les meubles à caractère
personnel :
72
Les acquêts sont les biens immeubles acquis à titre onéreux par les époux pendant le mariage.
73
Les biens réservés de la femme sont les biens qu’elle a acquis grâce à son activité professionnelle.

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Les propres par nature, affectés à l’usage personnel du conjoint (vêtement,
linge à usage personnel, outils de travail ou droit attaché à la personne (rente
viagère ou capital, pension, indemnités droits d’auteur, action sociale, assurance ;
Les biens meubles acquis à titre gratuit pendant le mariage avec stipulation
du caractère propre ;
Les meubles incorporels : fonds de commerce, créances personnelles,
actions en justice, parts sociales…
Les droits de propriété littéraire et artistique
 Le capital immobilier propre comprend :
- les immeubles présents, i. e ; ceux que chacun des époux a acquis avant le
mariage ;
- les immeubles futurs, i. e. ceux qui sont échus aux époux pendant le mariage
par succession ou libéralité, sauf disposition contraire du disposant ;
- les immeubles acquis pendant le mariage par arrangement de famille, sauf
récompense ;
- les biens représentant l’extension d’un bien propre ainsi que les biens
propres pour lesquels joue la subrogation réelle i.e. acquis en emploi ou en remploi
avec des fonds propres.
II - Le passif
La fraction du passif que doit supporter la communauté est proportionnelle à
la fraction d’actif qu’elle reçoit, qu’il s’agisse des dettes des époux antérieures au
mariage ou de celles grevant les libéralités ou les successions par eux recueillies.
B – La communauté réduite aux acquêts
Dans cette catégorie, la communauté ne concerne que les biens acquis à titre
onéreux pendant le mariage grâce aux gains professionnels et aux revenus des
époux. Tous les biens meubles et immeubles présents sont propres, tandis que tous
les biens futurs sont communs, sauf ceux qui ont un caractère personnel ou qui
viennent d’une succession ou d’une libéralité.
La communauté d’acquêts commence à zéro au jour du mariage. Sa destinée
est de se former peu à peu pendant le mariage grâce aux revenus du ménage. Sa
source normale et nécessaire est l’activité professionnelle des époux.
Les biens créés par l’activité professionnelle des époux au cours du mariage
sont qualifiés biens d’origine,(gains, salaires, revenus professionnels), les autres
éléments de la communauté ne sont que complémentaires, contingents et
aléatoires.
Il convient d’étudier successivement la répartition des biens conjugaux,
l’administration de ces biens et les règles de sa dissolution.
La communauté réduite aux acquêts est caractérisée par sa composition en
trois masses :

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d’une part, les biens communs, qui forment la masse commune ou
« communauté » au sens strict ;
d’autre part, les biens propres du mari ;
enfin, les biens propres de la femme.
Ces biens, suivant la catégorie juridique à laquelle ils appartiennent, sont
soumis à des régimes juridiques différents. Ils convient donc de déterminer en
premier lieu la composition de chaque masse.
Mais, les éléments qui composent ces masses sont soumis à des fluctuations ;
certains éléments peuvent passer au cours du mariage, d’une masse à une autre. La
théorie de la subrogation réelle et celle des récompenses maintiennent ou
rétablissent l’équilibre fondamental instauré.
Ces trois masses sont composées chacune d’un actif et d’un passif suivant la
démarche du code civil.
I - la composition active des trois masses
Suivant le code civil, on distingue : l’actif commun, les actifs propres, les
revenus de l’un et de l’autre époux soumis à une condition juridique particulière et
qui, issus d’un patrimoine propre se dirigent vers la masse commune. Il convient
également de déterminer comment peut être administrée la preuve du caractère
commun ou propre d’un bien.
a) - l’actif commun
L’actif commun comprend : les acquêts par nature, les acquêts par la volonté
du donateur et du testateur, les acquêts par présomption auxquels il convient
d’ajouter les deniers autres que la monnaies.
Les acquêts par nature sont constitués des biens que les époux ont acquis à
titre onéreux ensemble ou séparément durant le mariage et qui proviennent tant de
leur industrie personnelle que des économies faites sur les fruits et revenus de leurs
biens propres.
Les acquêts par la volonté du donateur ou du testateur, qui sont des biens
acquis ou échus à titre gratuit, constituent une exception à la règle selon laquelle
seule l’acquisition à titre onéreux fait l’acquêt. Il en est ainsi, si la libéralité le
prévoit expressément, (art. 1405 c. civ.).
Les acquêts par présomption sont les biens meubles et immeubles dont la
preuve de leur caractère propre à un époux n’est pas faite. On parle de présomption
d’acquêts ou de présomption de communauté, puisque les acquêts font partie de la
communauté.
Il s’agit d’une présomption simple que l’on peut facilement faire tomber.
Quant aux deniers, ils tombent dans la communauté même si ce n’est pas à
titre définitif, i.e., même si la communauté en devra récompense.
En effet, il est admis que la masse commune assure le « service de caisse »
des époux.

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b) - Les actifs propres
Ils comprennent les biens présents, les biens à venir échus à titre gratuit, les
biens propres par extension, les biens acquis à la suite d’un arrangement de famille,
enfin, les biens à caractère personnel.
* - Les biens présents sont ceux dont les époux avaient la propriété ou la
possession au jour de la célébration du mariage. Ces biens leur restent propres. Il
peut s’agir des biens d’origine familiale ou des biens provenant des gains des
époux antérieurs au mariage.
Pour savoir si un époux avait la propriété d’un bien avant le mariage, il faut
déterminer da date d’acquisition.
Quant à la possession antérieure au mariage, il s’agit concrètement de
l’hypothèse où un époux, en possession d’un immeuble au jour du mariage, en
devient, pendant le mariage, propriétaire.
 - Les biens à venir échus à titre gratuit demeurent également propres.
Il s’agit des biens acquis par l’un ou l’autre époux pendant le mariage, par
succession, donation ou legs, excepté les libéralités expressément faite en
faveur de la communauté.
 Quant aux biens propres par extension, il s’agit des biens acquis à titre
onéreux pendant le mariage, qui, donc normalement, devaient être communs,
mais qui demeurent propres en raison d’un lien qui les unit à un propre dont on
a pensé qu’il convient de ne pas les séparer. Les textes prévoient deux
hypothèses : l’accession et l’acquisition des droits indivis. Pour l’accession, on
applique le principe suivant lequel, l’accessoire suit le principal (art. 546 c.
civ.). Il peut s’agir de l’accession mobilière ou de l’accession immobilière.
 - Quant à l’acquisition des droits indivis, il s’agit de l’hypothèse où, u
époux, ayant des droits indivis dans un immeuble, acquiert une ou plusieurs
parts nouvelles, ces parts sont propres à l’époux acquéreur.
 - Sont également propres à chacun des époux, les biens que l’un
d’eux a acquis à la suite d’un arrangement de famille. Il s’agit des biens
abandonnés ou cédés par le père ou la mère ou tout autre ascendant à l’un des
époux, soit pour le remplir de ce qu’il lui doit, soit à la charge de payer les
dettes du donateur à des étrangers. Le texte envisage deux hypothèses : c’est
d’abord le cas où un ascendant était débiteur de son enfant et au lieu de lui
payer sa dette, il lui cède l’un de ses biens. L’opération constitue une donation
en paiement. C’est une acquisition à titre onéreux, mais le bien est propre à
celui auquel il est transmis. C’est ensuite le cas où l’ascendant étant débiteur
d’un tiers, charge son descendant de payer sa dette et, en contrepartie, lui cède
la propriété de l’un de ses biens. L’opération peut s’analyser comme une
donation à charge (de payer les dettes du donateur) et est considérée comme un

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acte à titre gratuit, il est donc normal que ce bien reste propre en application des
règles du régime matrimonial.
 - Pour les biens à caractère personnel, en raison de leur caractère
personnel, ils forment des propres par leur nature quelque soit leur origine, i. e.,
qu’ils aient été acquis à titre onéreux au cours du mariage, à titre gratuit ou
sont nés de l’industrie de l’un des époux. Il s’agit des vêtements et linges à
usage personnel de l’un des époux, les actions en réparation d’un dommage
corporel ou moral, les créances et pensions incessibles et, plus généralement,
tous les biens qui ont un caractère personnel et tous les droits exclusivement
attachés à la personne. Sont également personnel par leur nature, les
instruments de travail nécessaires à la profession des époux, à moins qu’ils ne
soient l’accessoire d’un fonds de commerce ou d'une exploitation faisant partie
de la communauté.
c) - La condition juridique des revenus de l’un et de l’autre époux
Tous les revenus des époux tombent dans la communauté et la règle
s’applique de manière identique aux revenus des biens propres et aux gains et
salaires.
d) - la preuve du caractère commun ou propre des biens
La question de la preuve de l’appartenance des biens présente un intérêt
considérable au moment de la liquidation du régime et du partage des biens
conjugaux, lorsque les époux exercent les reprises de leurs biens propres. Mais
elle présente également un grand intérêt pendant le fonctionnement du régime,
dans la mesure où en dépendent :
 d’une part, les pouvoirs des époux, qui ne sont pas les mêmes selon qu’il ‘s’agit
d’un bien commun ou d’un bien propre ;
 d’autre part, le droit de gage des créanciers, dans la mesure où ceux-ci n’ont
pas le droit de saisir n’importe quel bien pour se faire payer de n’importe
quelle dette.
On sait que les biens dont l’appartenance des incertaine (il s’agit essentiellement des
meubles)74 sont réputés communs : telle est la présomption d’acquêts ou,
présomption de communauté, puisque les acquêts sont communs.
Pour prouver l’appartenance d’un bien, il convient de combattre cette
présomption.
La preuve se fait par l’inventaire ou autre preuve préconstituée, le cas échéant,
le juge prendra en considération tous écrits, notamment les documents de banques,
les factures, les registres et papiers domestiques…

II - La composition passive des trois masses de biens

74
Car l’acquisition d’un immeuble donne toujours lieu à la rédaction d’un acte écrit.

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De même qu’il existe des biens communs et propres, il existe des dettes
communes et des dettes propres.
La répartition du passif est réglementée par les articles 1409 et suivants du
code civil. Celui-ci y adopte une distinction symétrique de celle utilisée pour
l’actif. L’article 1409 définit le passif commun et l’article 1410, le passif propre ou
personnel.
Mais en ce qui concerne le passif, il convient de distinguer, comme toujours,
deux questions :
tout d’abord, celle dite de « l’obligation aux dettes » ou « du
droit de poursuite des créanciers », laquelle consiste à déterminer quel bien
ceux-ci peuvent saisir ;
d’autre part, la question de la « contribution aux dettes »,
laquelle consiste à déterminer qui des deux époux, à la dissolution de la
communauté, devra supporter définitivement la dette.
S’agissant de l’obligation à la dette, il convient de préciser qu’il n’existe pas
de dette exécutoire exclusivement sur les biens communs, en effet, la communauté
n’est pas une personne morale75. Toute dette est nécessairement née du chef de l’un
ou de l’autre des époux. Il en résulte qu’à l’égard des créanciers, certaines dettes,
les dettes communes, sont exécutoires sur les biens communs, en même temps que
sur les propres de l’époux du chef duquel elles sont nées, les autres dettes, i.e., les
dettes propres ou personnelles, n’étant exécutoires que sur les propres de l’époux
débiteur.
En revanche, dans les rapports entre époux (question de la contribution aux
dettes), les dettes communes sont les dettes qui doivent être supportées
définitivement par la communauté et les dettes personnelles celles qui doivent être
supportées définitivement par le mari ou par la femme.
a) - Obligations aux dettes
Il convient de distinguer le passif commun et le passif propre.
1 - Le passif commun
Il comprend, les dettes nées pendant la communauté. Mais le passif commun
est tantôt définitif, tantôt seulement provisoire.
Le passif commun définitif comprend des dettes qui présentent un caractère
familial. C’est-à-dire qu’elles tombent définitivement dans la communauté, qui
apparaît comme une masse de biens affectée aux besoins de famille.
Font partie de ce passif, les dettes alimentaires ainsi que les dettes contractées
par les époux pour l’entretien du ménage et l’éducation des enfants.

75 Les tribunaux ont toujours refusé d’admettre la personnalité morale de la communauté. Néanmoins, ils n’ont jamais admis que
les créanciers de la communauté aient, après la dissolution de celle-ci, sur les valeurs communes, un quelconque droit de
préférence par rapport aux créanciers qui ont traité avec l’un des époux, postérieurement à cette dissolution (civ. rej. 18 avril
1860, DP 1860.1.185 ; S.1860.1.305, note G. Massé).

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Le paiement de ces dettes peut être poursuivi sur tous les biens conjugaux
(biens communs, y compris les gains et salaires des époux, les propres du mari ou
de la femme, sous la réserve cependant que les propres du conjoint ne peuvent pas
être poursuivis lorsqu’il s’agit des dépenses manifestement excessives eu égard au
train de vie du ménage, à l’utilité ou à l’inutilité de l’opération, à la bonne ou
mauvaise foi du contractant ou lorsque l’achat a été fait à tempérament sans le
consentement du conjoint ou encore lorsqu’il s’agit d’un emprunt, à moins que
celui-ci ne porte sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie
courante.
Mais d’autres dettes font partie du passif commun, par exemple, la dette
d’impôts sur le revenu auxquels sont assujettis les époux communs en biens, pour
les revenus qu’ils perçoivent pendant la durée de la communauté.
Le passif commun provisoire comprend certaines dettes seulement, celles
qui ne tombent qu’à titre provisoire dans la communauté, elles ont droit à
récompenses de la part de l’époux dans l’intérêt duquel la dette aura été contractée.
Ces dettes sont distinctes selon qu’elles sont nées du chef de l’un des époux ou
d’un chef des deux époux.
2 - Le passif propre
Il s’agit des dettes pour lesquelles le créancier ne peut poursuivre que les
biens propres de l’époux débiteur.
Il existe deux sortes de passifs propres, à savoir, d’une part, le passif qui est la
contrepartie de l’actif propre et d’autre part, le passif sans corrélation entre dettes
propres et actif propre.
En ce qui concerne le passif propre corrélatif à un actif propre, l’article 1410
c. civ. prévoit comme propres, d’une part les dettes dont les époux étaient tenus au
jour de la célébration du mariage et d’autre part, les dettes dont se trouvent grevées
les successions et libéralités qui leur échoient durant le mariage.
Toutes ces dettes demeurent personnelles en capital et intérêts, et les
créanciers de l’un et de l’autre ne peuvent en poursuivre le paiement que sur les
biens propres et les revenus de leur débiteur.
Le passif propre sans corrélation avec un actif propre englobe les dettes nées
pendant le mariage auquel la loi refuse l’entrée en communauté.
b) - Contribution aux dettes
La question de la contribution aux dettes règle le problème de la charge
définitive des dettes. Ainsi, lorsqu’une dette propre a été payée par la communauté,
celle-ci a droit à récompense. De même, si une dette commune, le créancier peut se
faire payer sur les biens communs, mais la charge définitive de la dette n’incombe
pas toujours pour autant à la communauté. La communauté qui a payé une dette a
droit à récompense de la part de l’époux débiteur qui était seul intéressé ;

50
inversement si une dette commune quant à la contribution a été payée avec des
propres à l’un des époux, celui-ci a droit à récompense.
C) – La communauté universelle
C’est un régime exclusivement conventionnel76.
Sous ce régime, tous les biens entrent en principe dans la communauté ; les
meubles et immeubles acquis dont chacun des époux était propriétaire avant le
mariage et ceux acquis pendant le mariage. D’après l’article 1526 c. civ. « les
époux peuvent établir par contrat de mariage une communauté universelle de leurs
biens tant meubles qu’immeubles, présents ou à venir ou de tous leurs biens à
venir seulement ».
Autrement dit, tout l’actif présent ou futur est en principe commun. Quant au
passif, il comprend toutes les dettes présentes et futures.
Tous les biens communs seront alors partageables par moitié à la dissolution
du mariage, sauf clause contraire d’attribution intégrale de la communauté à un
époux ou de partage inégal.

§ 3 - L’ADMINISTRATION DES BIENS CONJUGAUX DANS LES


REGIMES COMMUNAUTAIRES

L’administration des biens communs est caractérisée par la consécration


des pouvoirs du mari. En effet, il a l’administration de ses biens propres mais aussi
l’administration de la communauté et celle des biens propres de la femme.
L’administration de biens propres de la femme par le mari découle des pouvoirs
que celui-ci tient de sa qualité d’administrateur de la communauté, alors usufruitier
des biens propres des époux, donc ceux de la femme, laquelle n’a que la nue-
propriété de ses propres77.
Par ailleurs, les pouvoirs du mari sur la communauté exigent souvent
l’accord de la femme78.
On relève que la répartition des biens entre les époux met en relief un
déséquilibre qui se manifeste sur le plan de l’administration et de la disposition des
biens communs.
A – L’inégalité des époux dans la gestion de la communauté
Contrairement au droit français qui a consacré la cogestion, le droit
camerounais demeure dans le système d’unité d’administration des biens communs

76
Dans le système français par exemple, la pratique révèle que les futurs époux ne recourent guère à ce régime pour tourner les
règles des libéralités, notamment pour consentir une donation à l’un d’eux, au mépris de la réserve des héritiers de l’autre.
La stipulation de la communauté universelle n’intéresse que la répartition active et passive des biens conjugaux. En effet, pour
tout ce qui intéresse l’administration, la liquidation et le partage, la communauté universelle demeure régie par le droit commun
77 Avec la réforme française de 1965, le mari n’a plus l’administration des propres de la femme, car la communauté n’a plus

l’usufruit des propres des époux.


78 La loi française de 1985 a substitué aux pouvoirs du mari sur les biens communs une gestion concurrente de ceux-ci par les

deux époux.

51
au nom de la cohésion familiale et de l’efficacité économique dans les rapports des
époux entre eux et avec les tiers.
Le mari, chef de famille et chef de la communauté est en principe l’unique
interlocuteur des créanciers. La femme n’a que des pouvoirs exceptionnels sur les
biens communs.
- Les pouvoirs du mari sur les biens conjugaux
L’administration des biens conjugaux est réglementée par les articles 1421 et
suivants du code civil.
La gestion de la masse communautaire est confiée au mari, ainsi selon l’al 1er
de l’article 1421 « le mari administre seul la communauté ; il peut vendre,
aliéner ou hypothéquer sans le secours de la femme, sauf à répondre des fautes
qu’il aurait commises dans sa gestion ».
La femme ne peut demander en justice à être substituée au mari dans
l’exercice de ses pouvoirs que si le mari se trouve d’une manière durable hors
d’état de manifester sa volonté (art. 1427 c. civ.).
Les pouvoirs du mari portent surtout sur les biens communs ordinaires79. Il est
seul administrateur de la communauté et peut en principe disposer des biens
communs ordinaires.
Cependant, les pouvoirs du mari ne sont pas discrétionnaires. Ils connaissent
des limites suivantes :
- Le mari est responsable des fautes de gestion ;
- le mari ne peut disposer des biens communs qu’à condition que ce soit sans
fraude et sous réserve de certaines exceptions qui intéressent les dispositions à
titre gratuit et les dispositions à titre onéreux.
Pour les actes de disposition à titre gratuit, on distingue selon qu’il s’agit
des libéralités entre vifs ou des legs.
Lorsqu’il s’agit des libéralités entre vifs, le mari ne doit les faire qu’après
avoir obtenu le consentement de la femme pour que l’acte soit valable80.La loi de
22 septembre 1942 avait étendu l’exigence du consentement de la femme à toutes
les donations des biens communs.
Lorsqu’il s’agit des legs, le mari peut disposer par testament des biens
communs, car cet acte ne produit des effets qu’à la dissolution du régime
matrimonial. D’après l’article 1423 c.civ. le legs fait par un époux ne peut excéder
sa part dans la communauté81. C’est donc seulement en qualité de copropriétaire du
bien légué que le mari peut disposer d’un bien de la communauté, et non en sa
qualité d’administrateur.
79 Par opposition aux biens communs réservés i. e. acquis par la femme au fruit de son salaire.
80
Ainsi, le mari ne peut seul disposer entre vifs à titre gratuit des biens communs, même si c’est dans l’intérêt de
leurs enfants (art. 1422 c. civ.).
De même, un époux qui détruit volontairement un bien commun se rend coupable du délit de dégradation volontaire
des biens communs.
81
On ne peut transférer plus de droits qu’on en a

52
En outre, si le legs consenti par le mari.
Pour les actes de disposition à titre onéreux, on opère plusieurs distinctions :
- les actes ménagers qui peuvent être faits par l’un ou l’autre époux ;
- les actes courants de gestion qui doivent être faits par le mari seul
- les actes importants pour lesquels le consentement de la femme est exigé. Ainsi,
le mari ne peut sans le consentement de la femme aliéner ou grever de droits
réels les immeubles dont dépend le logement familial, le fonds de commerce et
l’exploitation dépendant de la communauté, les droits sociaux non négociables,
les meubles corporels garnissant le logement familial (les meubles meublants),
les biens dont l’aliénation est notariée.
– Les pouvoirs exceptionnels de la femme dans l’administration de la
communauté
La femme a tantôt des pouvoirs directs sur les biens communs relatifs à
l’entretien du ménage et l’administration des biens réservés, tantôt des pouvoirs
indirects exercés à travers son contrôle ou sa substitution.
- Les pouvoirs de la femme sur les biens réservés
La femme a, pour l’administration des biens réservés les mêmes pouvoirs que
le mari pour l’administration des biens communs ordinaires. Elle possède le
pouvoir de gestion et le pouvoir de disposition sous réserve des mêmes limitations
que le mari, à savoir qu’elle répond des fautes de son administration conformément
à l’article 1424 c. civ. Par ailleurs, elle ne peut disposer des biens réservés que
dans la mesure où le mari peut disposer des biens communs ordinaires,
conformément aux articles 1421 et suivants du code civil.
- Les autres pouvoirs de la femme sur les biens communs
Il s’agit :
des pouvoirs ménagers de la femme mariée
La femme mariée a le pouvoir d’engager des dépenses ménagères. A ce titre,
elle est titulaire d’un mandat tacite appelé mandat domestique. Les actes passés
par la femme dans ce cadre lient le mari qui en reste débiteur solidaire.
du pouvoir de contrôle et de substitution
La femme a le pouvoir de contrôle sur tous les actes d’administration du mari.
Ce qui implique l’obligation pour le mari d’informer la femme de sa gestion
quotidienne.
La femme a également le droit de se substituer au mari en cas de
défaillance82.
du pouvoir de représentation du mari.

82
Par exemple lorsque le mari met en péril les biens communs.

53
Il en est ainsi lorsque le mari est dans l’impossibilité d’administrer la
communauté soit pour cause de maladie et d’éloignement. Cette représentation
peut être judiciaire ou non.
du pouvoir d’accomplir les actes conservatoires

B - Les sanctions des règles relatives aux pouvoirs des époux dans
l’administration des biens communs
Parmi les sanctions de ces règles, on relève :
 la possibilité pour la femme de demander la séparation judiciaire des biens (art.
1443 c. civ.)83 ;
 la possibilité pour chaque époux de demander en justice à être substitué à son
conjoint dans l’exercice de ses pouvoirs lorsque celui-ci se trouve de manière
durable hors d’état de manifester sa volonté ou si sa gestion soit de la communauté,
soit des biens réservés, atteste de son inaptitude ou de sa fraude (art. 1427 c. civ.)
 en cas de dépassement des pouvoirs de la part d’un époux, la sanction réside
dans la nullité de l’acte à la demande du conjoint ou des héritiers, à moins que la
nullité ne soit couverte par la ratification84.
L’action en nullité est ouverte aux conjoints pendant deux ans à partir du jour
où il a eu connaissance de l’acte. L’annulation ne peut être demandée plus de deux
ans après la dissolution de la communauté.
C - L’administration des biens propres des époux
Le principe est celui de la libre gestion personnelle des biens propres. Chaque
époux a l’administration et la jouissance de ses biens propres et peut en disposer
librement.
Mais, le principe de la gestion personnelle et libre des biens propres connaît
quelques tempéraments. Ainsi, l’article 1428 c. civ. dispose que « le mari a
l’administration de tous les biens personnels de la femme. Il peut exercer toutes les actions
mobilières et possessoires qui appartiennent à la femme. Il ne peut aliéner les immeubles
personnels de la femme sans son consentement. Il est responsable de tout dépérissement des
biens personnels causé par défaut d’actes conservatoires ».
Lorsque l’un des époux confie l’administration de ses biens propres à l’autre,
les règles du mandat sont applicables. Cependant, l’époux mandataire est dispensé
de rendre compte des fruits, à moins que la procuration ne l’y oblige expressément.
Lorsque l’un des époux prend en main la gestion des biens propres de l’autre
en vertu d’un mandat tacite, ce mandat couvre ses actes d’administration et de

83
L’art 1443 al 2 précise que toute séparation volontaire est nulle.
84
Si l’un des époux a outrepassé ses pouvoirs sur les biens communs ou les biens réservés, l’autre, à moins qu’il
n’ait ratifié l’acte, peut demander sa nullité (cf. : CS arrêt n° 84/C du 18 juin 1998, aff. Mme ELLA née
MONEYANG Honorine c/ NKOUNTCHE TCHE Jean Claude. Il s’agissait de la vente d’un immeuble commun par
le mari après le divorce malgré l’opposition de la femme devant le notaire. La femme avait été déboutée de son
action en nullité de la vente.

54
jouissance et tous les actes de disposition. L’époux mandataire n’est comptable que
des fruits existants et non des fruits consommés, sauf fraude.
En cas d’immixtion dans la gestion des biens propres du conjoint au mépris
d’une opposition constatée, on est responsable et comptable de tous les fruits
perçus.
§4 - LA DISSOLUTION ET LA LIQUIDATION DE LA COMMUNAUTE
Il convient d’étudier les causes de dissolution de la communauté, puis la
liquidation et le partage de celle-ci, enfin la liquidation des créances et des dettes
personnelles entre époux.
A – les causes de dissolution de la communauté
D’une manière générale, le régime matrimonial est liquidé en cas de
dissolution du mariage soit par le décès e l’un des époux soit par le divorce.
Autrement dit, la communauté se dissout par la mort de l’un des époux, par le
divorce, par la séparation de corps. Cette énumération est exhaustive. Toute
séparation volontaire est nulle.
La dissolution de la communauté a donc lieu soit par suite de la dissolution du
mariage, soit en l’absence de dissolution de celui-ci.
I - Dissolution de la communauté par suite de la dissolution ou de l’annulation
du mariage
a) - le décès d’un conjoint
S’agissant de la dissolution par le décès de l’un des époux, la communauté est
dissoute au jour du décès.
Pour éviter que certains biens communs puissent être détournés au préjudice
des héritiers du conjoint prédécédé, et aussi pour faciliter la liquidation distincte
de la communauté et de la succession, le conjoint survivant doit faire un inventaire
notarié des biens existant au décès.
En revanche, le conjoint survivant (la veuve) a droit au logement et à la
nourriture pendant les trois mois et quarante jours pour faire inventaire et délibérer
(art. 1465 c. civ.) ce droit est intuitu personae, i. e qu’il est exclusivement attaché à
la personne, donc il ne se transmet ni aux héritiers, ni aux créanciers de l’époux
survivant.
b) - le divorce
Dès avant le prononcé du divorce, des mesures provisoires peuvent être prises
afin de protéger un des époux contre les fraudes de son conjoint.
Lorsque le divorce est prononcé le régime matrimonial des époux prend fin.
c) - L’annulation du mariage
En cas d’annulation du mariage, les époux étant censés n’avoir jamais été
mariés, la communauté est réputée n’avoir jamais existé de sorte qu’il y a

55
liquidation de la société de fait qui s’est établie entre eux, sans application des
règles de la communauté.
Il n’en sera autrement que s’il y avait mariage putatif. En effet, il y aurait lieu
à liquidation comme en cas de mort ou de divorce des époux, du moins si l’un des
conjoint était de bonne foi. Si un seul des conjoints était de bonne foi, pour des
raisons pratiques, on donnerait à celui-ci le choix entre la dissolution du régime sur
les bases d’une communauté juridique ayant existé jusqu’à l’annulation du mariage
et la dissolution sur les bases de la société de fait.
II – La dissolution de la communauté en l’absence de la dissolution du
mariage
Cette dissolution résulte de la séparation judiciaire de biens accessoire à une
séparation de corps résultant d’un jugement prononcé au cours du mariage. En
effet, la séparation de corps, qui laisse subsister le mariage, emporte de plein droit
séparation de biens.
La communauté est alors dissoute entre époux et à l’égard des tiers.
B – Les suites de la dissolution de la communauté : la liquidation et le partage
de la communauté
A la dissolution de la communauté, chacun des époux reprend d’abord ceux
des biens qui ne sont pas entrés dans la communauté. C’est la reprise en nature des
biens propres. Cette reprise est conditionnée par la preuve du caractère propre du
bien qu’il entend reprendre que doit rapporter l’époux.
C’est après cette reprise que la liquidation proprement dite a lieu. Elle est faite
par un notaire. Ainsi, le notaire liquidateur procède à la mise au clair des droits de
chacun des époux, afin d’aboutir à la formation de la masse partageable.
Les époux sont tenus de procéder à une liquidation globale de leur régime
matrimonial lorsque le divorce a été prononcé par une décision devenue définitive.
Le juge, en prononçant le divorce, ordonne la liquidation et le partage de leurs
intérêts patrimoniaux ».
La liquidation des intérêts pécuniaires des époux ordonnée par une décision
de divorce passée en force de chose jugée englobe tous les rapports pécuniaires
existant entre eux, et qu’il appartient, par conséquent, à un époux de faire valoir sa
créance contre son conjoint lors de l’établissement des comptes se rapportant à la
liquidation de leur régime matrimonial, sous peine de se voir opposer la fin de non-
recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée.
I - La liquidation de la communauté
La liquidation comporte deux opérations : l’établissement d’un compte
personnel à chaque époux et le règlement du solde de chaque époux.
a) - L’établissement du compte personnel de chaque époux
Cette opération comprend elle-même deux opérations, à savoir :

56
1) - d’une part, l’évaluation des récompenses ;
2) - d’autre part, la balance du compte.
b) - Le règlement du solde personnel de chaque époux
Il s’opère différemment selon que la communauté est créditrice ou débitrice
d’un époux.
Lorsque la communauté est créditrice d’un époux, l’époux débiteur rapporte le
montant solde à la masse commune. Le rapport s’effectue souvent en valeur ou en
moins prenant, i.e. que l’époux débiteur paiera sa dette en prenant moins que son
conjoint dans les biens existant dans la communauté. Le rapport peut aussi être fait
en nature.
Si la communauté est débitrice à l’égard de l’un des époux, celui-ci dispose
d’une option qui peut le conduire soit à prélever des biens communs pour se payer
de sa créance, soit à exiger le paiement comme le ferait un créancier ordinaire à la
suite de la vente des biens du débiteur.
II - Le partage de la communauté
Il porte tant sur l’actif commun que sur le passif commun, mais en ce qui
concerne le passif commun, il faut tenir compte de ce qu’on appelle le bénéfice
d’émolument.
Dans le cadre du divorce, à l’issue du contentieux, le partage des biens a
lieu soit le divorce.
Puisqu’il peut arriver que les conjoints ne s’entendent pas sur les
conséquences du divorce, et notamment sur le partage des biens, le partage des
biens se fait par l’intermédiaire d’un notaire désigné au moment de la
procédure de divorce, ou au moment du jugement.
Le partage se réalise sur la base de la proposition de partage des biens faite au
cours de la procédure du divorce.
Le notaire répartit alors les biens des deux époux en fonction de leurs
droits respectifs et du régime matrimonial qui avait été choisi au moment du
mariage. Le partage des biens est parfois très conflictuel et peut, in fine, être fixé
par le juge, sur le fondement du procès-verbal établi par le notaire.
a) - le partage de l’actif commun
1- L’actif se partage par moitié.
Cependant, en cas de divertissement ou de recel d’effets de la communauté, le
conjoint, auteur de l’un de ces actes, est privé de sa part dans les objets divertis ou
recelés.
Le divertissement et le recel consistent à s’approprier frauduleusement des
biens de la communauté. Les deux actes ont pour effet de porter atteinte à l’égalité
du partage.

57
Le divertissement consiste à prendre à prendre dans la communauté les biens
que l’on ne possédait pas.
Le recel consiste à dissimuler les effets dont on était en possession.
2- En ce qui concerne sa forme et ses effets, le partage de la communauté est en
principe soumis aux mêmes règles que le partage successoral.
b) - le partage du passif commun
Le passif commun à partager ici est le passif commun définitif, i.e. celui qui
comprend les dettes demeurant définitivement à la charge de la communauté,
autrement dit, le passif commun quant à la contribution i.e. le passif constitué
exclusivement par les dettes contractées dans l’intérêt du ménage.
Dans la pratique, le règlement du passif commun est, le plus souvent, un
règlement avant partage.

58
CHAPITRE II – LES REGLES PROPRES AU REGIME DE
SEPARATION DES BIENS

Le régime de la séparation des biens est défini comme le régime dans lequel
chacun des époux conserve l’administration, la jouissance et la libre disposition de
ses biens. Il exclut en principe toute communauté. Toutefois, les époux ont
l’obligation de contribuer aux charges du ménage.
La séparation de biens se caractérise, en théorie du moins, par une extrême
simplicité. Aucune union d’intérêts pécuniaires n’est créée entre les époux ; le mari
n’a aucun droit ni aucun pouvoir sur les biens de sa femme85 en conséquence :
1) Chaque époux assure en toute indépendance l’administration et conserve
l’entière propriété, non seulement de ses biens présents, de ceux qui lui échoient
par succession, donation ou legs, mais aussi de toutes les acquisitions qu’il fait à
titre onéreux pendant le mariage.
2) Il y a séparation complète du passif des époux. Chaque créancier n’a de droit de
poursuite que sur les biens de l’époux qui est son débiteur. La femme reste tenue
de contribuer, dans la mesure de ses facultés aux charges du mariage.

Son organisation présente certaines caractéristiques.

SECTION I - LES CARACTERISTIQUES DU REGIME DE


SEPARATION DES BIENS
Il s’agit d’apprécier les caractères généraux ainsi que les avantages et
inconvénients de ce régime.
§ 1 – LES CARACTERES GENERAUX DU REGIME SEPARATISTE
Le régime séparatiste est celui qui ne contient pas en principe de masse
commune de biens entre époux. Il est surtout un régime conventionnel qui se
caractérise par la séparation rigoureuse des intérêts patrimoniaux des époux et par
la force des époux dans la jouissance et la disposition de leurs biens.
Les époux ont les mêmes pouvoirs sur leurs biens que n’importe quel
propriétaire, ce qui permet à la femme mariée d’exercer pleinement sa capacité.
Cependant, même dans ce régime, les époux peuvent convenir d’avoir une
unité d’administration et de jouissance.
Les époux régis par le régime de séparation de biens doivent contribuer aux
charges du ménage, le régime matrimonial primaire étant obligatoire. Chaque

85
Bien que celle-ci demeure soumise à l’hypothèque légale qui, est désormais soumise à inscription –art 2134 et
2135 C. civ.

59
époux peut engager non seulement ses biens mais solidairement ceux de son
conjoint lorsqu’il passe des contrats relatifs aux charges du ménage et à l’entretien
des enfants.
En dehors de ces domaines, chaque époux est tenu du passif né de son chef.
§ 2 - LES AVANTAGES ET LES INCONVENIENTS DU REGIME DE
SEPARATION DE BIENS
Le régime de séparation de biens présente des avantages et des
inconvénients.
Comme avantages :
le régime de la séparation des biens est le seul régime qui permette à la
femme mariée de conserver le plein exercice de sa capacité civile ;
Il ne comporte pas les mêmes difficultés de liquidation que le régime de
communauté86.

Comme inconvénients :
On reproche à ce régime son caractère indépendant et trop facilement égoïste87.
On lui reproche également de favoriser les fraudes des époux envers les tiers en
permettant de faire passer à la tête de l’un tous les biens de l’autre époux
lorsque ce dernier est en passe de devenir insolvable.

SECTION II – L’ORGANISATION DU REGIME DE SEPARATION DES


BIENS
La législation en vigueur au Cameroun prévoit la possibilité pour les époux
d’opter pour la communauté ou la séparation de biens pure et simple.
Le régime de séparation de biens est alors organisé par l’article 1529 c. civ.
En effet, la séparation des biens pur et simple s’oppose nettement à la
communauté, car en principe, elle ne comporte pas de masse commune. Il n’y a
que les biens personnels à l’un et à l’autre des époux, et chacun administre
librement les siens
D’abord exclusivement conventionnel en droit positif camerounais, le
régime de séparation de biens peut exceptionnellement intervenir dans un couple
en cas de séparation de corps prononcé par le juge entre les époux
communautaires.
Le législateur camerounais s’est contenté seulement de l’évoquer sans
l’organiser ; on peut conclure qu’il renvoie implicitement son organisation au code
civil français, législation d’emprunt.

86
Lorsqu’il existe des enfants d’un précédent mariage, ce régime est le meilleur pour éviter les discussions entre eux
et le second conjoint.
87
Volontiers admis par les anglo-saxons, il convient aux femmes qui sont capables de gérer elles-mêmes leur
fortune et n’est favorable qu’à celle dont les gains et les revenus sont supérieurs à ceux du mari.

60
Contractuelle ou judiciaire, la séparation de biens constitue, relativement aux
autres régimes, le type le plus séparatiste, le plus individualiste, celui sous lequel
l’indépendance des époux prend son plus ample déploiement. Il faut toutefois
relever que cette séparation s’atténue quand même dans la vie du couple dont elle
épouse souvent les contingences. Elle n’est donc pas absolue.
La séparation de biens a comme caractéristique et fin première la séparation
des intérêts à la base (§1) qui subit les contingences de la vie du couple (§2)
§ 1 – La séparation des intérêts des époux
Le principe de la séparation des patrimoines et le principe de la séparation
des pouvoirs, sont nettement affirmés par le législateur.
A‐ La séparation des patrimoines
Séparatiste, ce régime ne préside à la formation d’aucune masse de biens
commune, laissant en propre à chaque époux tous ses biens ; il établit ainsi une
séparation des patrimoines d’autant plus que chaque masse regroupant
l’universalité des droits et obligation de son propriétaire, le régime aboutit à
séparer corrélativement l’actif et le passif de chacun des époux.
La contribution est fixée librement entre les époux par le contrat de mariage
(art. 1537 et 1575 C. civ.). A défaut de stipulation conventionnelle, les époux
contribuent aux charges du ménage en proportion de leurs facultés respectives (art.
214 al.1 et 1575 c. civ.).
Quant au règlement de la contribution, il s’agit de déterminer les droits et les
obligations du mari, chef de famille (art. 213c.civ.). En cette qualité, il lui
appartient de subvenir aux dépenses du ménage et de les régler. C’est donc lui qui
supporte l’excédent de ces dépenses sur la part contributive de la femme.
Par ailleurs, l’ingérence d’un époux dans l’administration des biens de
l’autre, susceptible de degré, accentue les correctifs à la structure du régime de
séparation de biens (article 1430 c.civ.: ingérence du mari). L’ingérence s’entend
comme une participation active et non pas d’une simple présence soit à l’acte
d’aliénation, soit à la quittance
I - La séparation de l’actif
Avec l’absence de la communauté, il n’existe que les biens personnels à l’un
ou l’autre des époux, au mari ou la femme.
On entend par propre, d’une manière générale, les biens que les époux
possédaient au jour du mariage, des biens qu’ils acquièrent pendant le mariage, soit
à titre onéreux, soit à titre gratuit. En conséquence si les époux acquièrent en
commun un bien, il ne sera pas commun au sens juridique exact du terme (i.e. un
acquêt) mais indivis et donc soumis aux règles de l’indivision ordinaire. De même
à la dissolution du régime, il n’y a pas de masse partageable, chaque époux reprend
ses biens personnels.
61
II - La séparation des passifs
Dans un régime de séparation de biens, le principe de la séparation des
patrimoines des époux implique que sur le plan de l’obligation comme sur celui de
la contribution, chacun des époux n’est tenu que des dettes personnelles et jamais
des dettes de son conjoint
B – La séparation des pouvoirs
L’article 1356 al.1 C.civ. énonce que chacun des époux conserve dans ce
régime de séparation de biens l’administration, la jouissance et la libre disposition
de ses biens personnels. Il consacre, se faisant, la totale indépendance des époux
séparés de biens. Cela signifie concrètement que chacun peut agir sur tous ses
biens pour tous les actes qu’il veut, même les plus graves et que réciproquement,
aucun des époux n’a de pouvoir d’intervention dans les affaires de l’autre.
La mise en œuvre de ce principe est facilitée par le principe de l’autonomie
bancaire généralement consacrée. Elle est en revanche battue en brèche parce que
l’existence d’une vie commune entraîne des conséquences parfois inévitables.
La vie commune présente souvent des contingences. En effet, la séparation
des intérêts des époux dans le cadre de ce régime est rarement aussi nette dans la
réalité quotidienne. D’abord une confusion des patrimoines est inévitable au moins
au niveau des meubles, et le législateur a prévue ici une présomption d’indivision
Des modifications y sont également apportées dans le cadre du statut
fondamental de base i.e. le régime primaire, à travers la contribution aux charges
du ménage et des enfants et dans la contribution aux de chacun des époux aux
dettes du ménage.
En effet, il faut concilier la division des intérêts pécuniaires des époux avec
les exigences de la vie en commun. Les deux époux participent donc aux charges
du ménage. Il existe entre eux une obligation réciproque de secours (art.212 c.civ.).
Pour ce faire, la femme est, en principe, astreinte à prélever elle-même sur ses
revenus une certaine somme représentant sa part contributive et à la verser entre les
mains de son mari (art. 1448,1537 et 1575 C. civ.).
Toutefois, le principe de la répartition des charges entre les époux n’est pas
absolu88.

88
Ainsi, les dérogations suivantes au principe de la contribution :
1°) – D’abord, il n’existe pas en cas de séparation de corps, puisqu’il n’y a plus de vie commune ;
2°) – il n’y a pas lieu non plus à répartition des charges quand l’un des époux ne possède rien et n’exerce aucune industrie
lucrative. Dans ce cas, l’article 1448 al.2 précise que, si le mari, après la séparation judiciaire, est sans ressources aucunes, la
femme doit supporter toutes les charges du ménage ;
3°) – si, sans motif plausible, l’un des époux quitte le domicile commun, l’autre n’est plus obligé de contribuer aux dépenses
d’entretien de l’époux fugitif.

62
§ 2 – La dissolution du régime de séparation des biens
Le régime de séparation des biens est dissous avec la dissolution du
mariage pour lequel il a été conclu, soit parle décès de l’un des conjoints, soit par
le divorce.
Liquider un régime de séparation de biens consiste ainsi à identifier et
évaluer les créances détenues par chacun des époux à l’encontre de l’autre, à
quelque titre que ce soit, et à partager leur patrimoine indivis89. Ces deux éléments
vont, en conséquence, se retrouver combinés dans l’aperçu liquidatif d’un régime
séparatiste, qui comprend la liquidation des créances entre époux et le partage des
biens indivis
En théorie, il ne devrait pas y avoir lieu à liquidation d’un régime de
séparation de biens, chaque époux étant censé être demeuré seul titulaire de son
patrimoine, actif comme passif. Cette vision théorique est, cependant, très loin de
la réalité, la vie commune des époux ayant tôt fait de générer des mouvements
entre leurs deux patrimoines, lesquels se trouvent presque toujours partiellement
entremêlés :
- du fait de l’existence de biens indivis ;
- en raison des transferts ayant eu lieu d’un patrimoine personnel vers l’autre.
Le code civil envisage ces deux possibilités, mais de façon un peu
laconique
Chaque époux ayant conservé tout au long du mariage la propriété et la
gestion de ses biens personnels, lesquels n’ont, par définition, pas été affectés à
une communauté inexistante, il n’y a pas de « reprise » des propres dans le cadre
de la liquidation d’un régime séparatiste.
Toutefois, en dehors des patrimoines personnels des époux il peut avoir
entre les deux un patrimoine indivis qui lui devra faire l’objet d’un partage. C’est
souvent le cas par exemple des biens immobiliers. Par conséquent, à la liquidation
du régime matrimonial de séparation de biens, le partage des biens au moment du
divorce ne concerne que les biens acquis en indivision.

89
Les biens en indivision sont des biens achetés à plusieurs. Chacun des acheteurs est propriétaire d’une partie du
bien acheté, à proportion de son apport (de sa « quote-part »). Les acheteurs doivent se consulter avant de prendre
des décisions importantes : vente du bien, échange, mise en location etc. Les seuls biens communs que peuvent se
partager les couples vivant sous un régime de séparation de biens sont les biens acquis en indivision.

63
CONCLUSION
Les régimes matrimoniaux, à l’instar de tous les domaines relatifs à l’état des
personnes, se caractérisent par une dualité juridique entraînant également une dualité
judiciaire. Le droit coutumier et le droit écrit se côtoient. Cette coexistence est constatée
et consacrée dans la pratique par la jurisprudence à travers le principe suivant lequel
l’option de juridiction emporte option de législation.
L’arrêt fondateur du principe de l’option de juridiction qui emporte option de législation
est l’arrêt ANGOA Parfait (CS, Arrêt n028/CC du 10 décembre 1981).
Les arrêts ASSO’O Benoît (CS, Arrêt n0 120 CC du 16 septembre 1982) et BIHINA
Gabriel (CS, Arrêt n035 CC du 25 novembre 1982) confirment le principe en 1982 : Ce
principe violerait la règle e la non rétroactivité de la règle juridique.
Affaire EDING CS, Arrêt n0 138/L du 06 juin 1967 : Femme exerçant une activité
séparée de celle de son mari comme fondement de l’attribution des biens
conjugaux entre époux
Ainsi, en l’absence d’un contrat de mariage, les rapports patrimoniaux entre
époux sont régis par le régime matrimonial légal. Celui-ci varie suivant que le litige y
afférent est porté devant une juridiction de droit écrit (TGI) ou devant une juridiction de
droit traditionnel (TPD). En vertu de la règle « l’option de juridiction entraîne option de
législation ».
Dès lors, devant les juridictions de droit écrit, le régime matrimonial légal sera celui
de la communauté de meubles et acquêts90.
Les juridictions de droit traditionnel, quant à elles, ont suivi une évolution. Alors
qu’à l’indépendance, elles affirmaient que le seul régime matrimonial envisageable par
les coutumes était celui de la séparation des biens, elles ont admis par la suite que le fait
pour la femme mariée d’exercer une profession séparée de celle de son mari, permettait,
en l’absence de tout contrat de mariage, d’appliquer aux conjoints les règles de la
communauté des biens prévues par le code civil91. Elles ont changé de position en 1979
en instituant comme régime matrimonial légal en vigueur devant les juridictions de droit
traditionnel « la communauté sous condition de participation », le partage des biens à
la dissolution du mariage devant constituer un partage rémunération92.
Toutefois, avec les arrêts KOUM et KEMAJOU, la Cour suprême, en voulant
« faire prévaloir la réalité des faits sur les présomptions juridiques » a en quelque
remis en cause la règle de l’option de juridiction qui entraîne option de législation et en
appliquant la communauté sous condition de participation aux époux mariés sans contrat
de mariage et qui avaient porté leur litige devant les juridictions de droit écrit93.

90 CS, arrêt n°120/C/C du 16 septembre 1982, affaire ASSO’O Benoît.


91 CS, arrêt n°30 du 12 janvier 1971, affaire DAYAS.
92 CS, arrêt n°23/C/C du 13 décembre 1979, affaire LANTUM
93 CS, arrêt n°86/C/C du 18 juillet 1985, affaire KEMAJOU née MAKUGAM Jeanne c/ KEMAJOU François ;

CS, arrêt n°64/C/C du 16 juillet 1987, affaire KOUM née EBONGUE Solange c/ KOUM AMOND Frédéric.

64

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