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DROIT ADMINISTRATIF 2

Chapitre 2 : Les contrats administratifs

□ Section 1 : l’environnement du contrat administratif

I. La place du contrat dans l’action publique

● 1re Remarque
Le contrat en droit administratif tient une place secondaire par rapport à l’AAU. Le
contrat a une place secondaire pour deux raisons :
- Le modèle français de l’administration repose sur une structure hiérarchisée
dont le fonctionnement est ‘‘autoritaire’’ via des procé dé s unilaté raux.
L’administration agit à travers des actes unilaté raux
- L’encadrement juridique de l’action publique est passée en France par le
recours pour excès de pouvoir (REP). Les progrè s du contrô le de
l’administration se sont fait au gré des progrè s du REP. Il a fallut donc que
toute action de l’administration soit dé cortiqué en AAU, mê me implicite, qui
permettent par la suite des REP. C’est par le prisme du REP que passe le
contrô le de l’administration et des actes qu’elle prend.

● 2e Remarque
L’administration a toujours eu recours aux contrats pour construire des bâ timents,
acqué rir des biens, confier la gestion d’une activité à autrui. Il a joué un rô le
important au cours du XIXè me siè cle pour assurer la modernisation du pays.
L’é lectrification du pays, la distribution de l’eau, les transports… se sont opé ré s par
voie du contrat. L’Etat ou les CT déléguant le soin à des opérateurs privés de
construire ou de faire fonctionner des services. On parle de concession, qui consiste
en la dé lé gation d’une activité à un opé rateur privé . Le contrat a donc toujours eu
une place de choix dans le fonctionnement de l’administration.

● 3e Remarque
On assiste par ailleurs à un phénomène de contractualisation de l’action publique.
Ce phé nomè ne ne concerne pas que le droit public. Cela ne concerne pas que le droit
public puisqu’on le retrouve aussi en droit civil. Le procé dé contractuel progresse à
partir de la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Il est du à :

- Un découpage historique de ce phénomène à partir de 1950. Des auteurs se


sont inté ressé s à ce phé nomè ne et à structurer une histoire de ce
phé nomè ne. On identifie 3 pé riodes selon L. Richier :
o Années 50-60 : phénomène de l’économie contractuelle avec un
interventionnisme de l’Etat qui passe par des contrats avec des
opé rateurs privé s et les acteurs é conomiques. Cela porte sur les
niveaux des prix, des niveaux de production
o Années 80 : Le développement de l’administration territoriale lié à
l’approfondissement des lois de décentralisation. C’est le rô le joué par
les CT. Il apparait un lien contractuel entre l’Etat et les CT ou entre les
CT. L’Etat ayant transféré des compétences au CT, il a lui aussi
transféré les moyens humains et financiers né cessaires à l’exercice de
ces compé tences ce qui a é té assuré par voie de contrat.
o Années 90 et suivantes : Le ‘tout contractuel’ qui illustre l’idé e que
comme technique d’administration, le contrat prend le pas sur l’AAU.
On pourrait dire que le phé nomè ne contractuel est assez
emblé matique du phé nomè ne de socié té de la fin du XXè me siè cle. Il
apparait plus adapté à l’action de l’administration

- Pourquoi le procédé contractuel a acquis cette place ?


o Les modes de conduite ‘‘autoritaire’’, ces comportements sont en
partie périmés. Pour que l’action publique soit efficace, il faut associer
les administrés, les usagers dans l’édiction des normes. Cela peut
prendre plusieurs formes (la consultation, le referendum consultatif…)
ou tout simplement par le recours au contrat qui lie directement à
l’administration. Le procé dé contractuel est donc à l’image de la
modernité de l’administration. On valorise les techniques non
autoritaires
o La prégnance du discours néo-libéral depuis la fin des anné es 70 qui
disqualifie le modèle classique de l’administration et qui impose une
vision qui valorise le contrat dans tous les champs de l’activité sociale.
Dans le cas de l’action publique, on valorise l’externalisation.

- Le contrat ne concerne pas que les phénomènes d’externalisation. La place


du contrat existe aussi entre les personnes publiques. D’autres contrats se
développent au sein même de l’administration, d’une personne publique
(ex : les contrats avec les agents contractuels, qui ne sont pas des
fonctionnaires)

II. Contrat, faux contrat et acte unilatéral

Est-on vraiment en présence de contrat ou de faux actes unilatéraux ?


● 1re Remarque : certains contrats n’ont pas de valeur juridique
Un certain nombre de contrat n’ont pas de valeur juridique. Ils n’ont pas de
porté e juridique.
Au sein de l’administration : Pour les contrats au sein de l’administration, comme par
exemple au sein de l’U.F.R de droit de la Sorbonne, un contrat d’objectif et de
moyen est signé entre l’EDS et l’Université . Cela n’a aucune valeur juridique mais
seulement une technique de management pour orienter l’activité de l’EDS.

En matière d’action sociale : On intè gre la délivrance de prestation sociale dans les
contrats qui font peser sur les bénéficiaires des engagements. L’exemple type est le
RSA (Revenu de Solidarité Active). Il y a un contrat d’engagement dé sormais avec
France Travail. On impose aux bé né ficiaires de prestations sociales de s’engager
dans un contrat avec des engagements à leur charge. Ce ne sont pas non plus des
vrais contrat
CE, 4 déc. 2019 : le CE précise que le RSA n’est pas un contrat ayant valeur
juridique. Les bénéficiaires sont et restent dans une situation légale et réglementaire
et non contractuel. Le contrat reste une manière de l’informer de ces engagements
et de ses obligations (légales et réglementaires)

● 2e Remarque : les actes unilatéraux négociés


Les contrats peuvent être en réalité des faux contrats et être des AAU négociés.
Cela renvoi beaucoup à une économie contractuelle des années 50-60. Un certain
nombre de ces contrats et ces conventions se symbolisaient par des négociations entre
l’Etat et les opé rateurs privé s, qui s’achève par l’adoption d’un acte unilatéral et
portera le nom de d’acte d’approbation. Concernant ces actes, la jurisprudence n’est
pas univoque. Il y a diffé rente maniè re de les traiter dans les jurisprudence
administrative :

- Dans certains cas, toute valeur juridique est dénié à la convention en


question. C’é tait longtemps le cas des accords collectifs signés entre
l’administration et ses agents. Les protocoles d’accord entre Etat et syndicats
n’avaient pas non plus de valeur juridique. L’Etat adoptait un dé cret ou
une loi pour mettre l’accord en œuvre donc l’accord n’avait pas de valeur
juridique

- La seconde hypothè se est le recours par le juge administratif à une série de


technique pour valoriser l’acte unilatéral dans ce contexte : il n’y a pas un
contrat mais un AAU : il dispose alors de deux techniques :
o L’incorporation : on incorpore les clauses de l’accord dans l’AAU pris
par l’Etat posté rieurement à cet accord. Par exemple, les accords
visant à libé raliser les prix, le CE a dit que les engagements en question
é taient incorporé s par l’Etat dans un acte unilaté ral pour les mettre en
œuvre
o La requalification : cela ressemblait à un contrat mais en vérité, c’est
un AAU. CE, 3 mai 2004, Soc. Laboratoires Servier : quelle est la nature
des conventions de fixations des prix des médicaments ? Le CE a jugé que ces
conventions étaient en réalité des AAU.
□ L’enjeu est souvent lié à la possibilité d’engager un REP

● 3e remarque : les contrats à effet réglementaire


Il existe en droit administratif des contrats à effet réglementaire. Ce sont des
vé ritables conventions. Elles ont un effet ré glementaire : il dépasse les simples
parties au contrat.
Pour les GIP, les conventions qui les constituent sont des contrats à effet
réglementaire : ils engagent et obligent au-delà des personnes publiques ou privé es
ayant signé es la conventions.
Au sein des contrats administratifs, il existe souvent des clauses réglementaires, en
particulier au sein des concessions.
Exemple : une ville dé lè gue la gestion d’un transport public à une socié té privé e. Ce
contrat comporte des clauses dont des clauses à effet réglementaire : ce sont celles
qui dé terminent l’organisation du service public (fré quence des bus, prix du ticket)
qui touchent aussi les usagers de ce service et pas seulement la ville et la compagnie
privé e.

III. Contrat administratif, contrat public, contrat de la commande publique

On peut voir des notions qui sont proches, notamment celle de contrat administratif,
de contrat public ou encore de contrat de la commande publique. Est-ce que ce sont des
synonymes ?

Le terme de contrat administratif est assez généraliste voire paresseux. Il n’a pas une
dé finition é quivoque. Le plus souvent, on utilise le terme de contrat public qui est le
contrat passé avec une personne publique. Mais tous les contrats publics ne sont pas
des contrats administratifs. Il arrive que l’administration passe des contrats de
droit privée. Tous les contrats publics ne sont pas des contrats administratifs.
Inversement, tous les contrat administratifs ne sont pas des contrats publics : il y a
des contrats administratifs entre personnes privé es.

L’intérêt de la notion de contrat public est que le simple fait qu’il y ait une personne
publique partie au contrat, quelque soit la nature du contrat entraîne un certain
nombre de consé quences juridiques :
- Les modalités d’expression du consentement sont celle de la personne
publique
- Il y a le principe d’insaisissabilité des biens publics (ce qui est possible dans
les contrats privé es)
- Il existe pour les dettes des personnes publiques des rè gles d’obligation
spé cifique via la prescription quadriennale (4 ans)
Les contrats de la commande publique existent depuis trè s longtemps. Ils ont é té
ré unis dans le Code de la commande publique entré en vigueur le 1er avril 2019. Il
n’y a pas de synonymes avec le contrat administratif. Tous les contrats de la
commande public ne sont pas des contrats administratifs.

Il faut regarder l’émergence du droit de l’UE dans le droit de la commande


publique. Les contrats de l’administration ont une valeur é conomique importante
qui repré sentent environ 15% du PIB en France. Il y a un marché des contrats de
l’administration qui ont une valeur é conomique. L’ambition de l’UE est que tous les
acteurs économiques soient en mesure de candidater dans tous les Etats qui ne
sont pas les leurs. L’UE s’est trè s tô t pré occupé à l’accè s au contrat administratif en
fixant des obligations à la charge des opé rateurs publics avec des obligations de
transparence et de mise en concurrence. Cette obligation de mise en concurrence,
l’UE a imposé ces obligations aux personnes publiques mais aussi à certains
opé rateurs privé s qui avaient besoin de passer des contrats.
Exemple : une ville a une activité de service public qu’elle ne veut pas gé rer
directement mais via une société d’économie mixte. C’est une personne privé e qui
va gé rer cette activité . Lorsqu’elle passe des contrats, elle va se voir imposer des
obligations de transparence et de concurrence. Le droit de l’UE en ce sens a é té
ré aliste. Le critè re organique n’est pas né cessaire pour dé finir le champ
d’application des contrats de la commande public pré sent dans le Code de la
commande publique du fait qu’ils touchent personne publiques et personnes
privé es.

Tous les contrats administratifs ne sont pas des contrats de la commande publique.
Ce sont des contrats qui ont une dimension é conomique importante. Des contrats
administratifs ne sont pas tous soumis aux rè gles de la commande publique
Exemple : certains agents sont des agents contractuels, lié s par un contrat
d’engagement personnel. Ce sont des contrats administratifs mais pas des contrats
de la commande publique.

IV. Les sources du droit des contrats administratifs

D‘où viennent les règles qui s’appliquent au droit administratif ?

Le droit du contrat administratif est un droit jurisprudentiel. C’est le juge


administratif qui va jouer un rô le essentiel dans sa dé finition et dans l’é laboration
de leurs ré gimes. A partir de 2007, le CE a redéfini entièrement le contentieux du
contrat. Il existe aussi une jurisprudence constitutionnelle au sujet des contrats
publics. Le CC a dé gagé des principes fondamentaux de la commande publique
CC, DC, 22 août 2002 : égalité d’accès à la commande publique et égalité de
traitement devant la commande publique.
On constate là encore le dé veloppement d’une législation importante dans le
champ qui l’inté resse. Les lé gislateurs ont multiplié les interventions de champ là :

- Le législateur de l’UE produit des actes juridiques en tant que lé gislateur


particulier via des règlements et des directives. Il s’est inté ressé trè s
fortement au droit de la commande publique en inté grant le respect de la
concurrence dans les contrats de l’administration. Les textes (directives) de
l’UE dans ce domaine se sont inté ressé s à la question de la passation (la
conclusion) des contrats. l’UE s’est aussi inté ressé aux recours juridictionnels
en cas ce non respect des obligations de concurrence Les référé contractuel
et référé précontractuel sont issues de la transposition d’une directive
europé enne. On a né anmoins peu de rè gles dans l’exé cution du contrat.

- Le législateur français a dé veloppé 3 points

o Sur la question de la compétence : Qui est compétent pour fixer les


règles des contrats ? Dans l’article 34 de la C°, il est fixé la compétence
du législateur pour fixer les principes des obligations civiles et
commerciales. Il devrait donc en ê tre de mê me pour les contrats
administratifs. Mais le CE n’a pas eu cette interprétation. Pour les
contrats des CT, c’est le législateur qui est compétent au titre de l’article
72 de la C° qui pose le principe de libre administration fondant la
compétence du législateur pour imposer les règles qui s’imposent à
leurs contrats. Pour les contrats d’Etat, c’est en principe au pouvoir
réglementaire de dé terminer les rè gles applicables.

o On est dans un domaine où les lois et règlements se sont multipliés,


notamment du fait de la né cessité de transposer les directives de l’UE.
On voit par exemple le Code de la commande publique qui est un
code assez substantiel qui a codifié une sé rie de rè gles et de principes
qui trouvaient leurs bases et fondements dans la jurisprudence du CE.

o Quid du Code civil ? Le Code civil a é té ré formé par l’ordonnance de


2016. A-t-il une application dans les contrats administratifs ? La réponse est
oui mais de maniè re ré siduelle. Certaines dispositions, notamment
relatives aux vices du consentement sont appliqué es par le juge
administratif. Un autre champ de norme de droit privé est appliqué qui
sont celles des clauses abusives venant du droit de la consommation.
Le juge administratif peut faire application sur mesure de ces
principes.

□ Section 2 : Identification du contrat administratif


I. L’administrativité du contrat

Qu’est ce qui fait qu’un contrat est un contrat administratif ?


Cette question de la qualification a longtemps reposé sur la mise en œuvre de critères
jurisprudentiels définis pas le juge. Ces critères sont :
- Organique : personne publique
- Matériel : service publique
- Formel : pré rogative de puissance publique
Le lé gislateur est intervenu dans le champ du contrat de maniè re croissante de
sorte que la qualification des contrats reposent sur des qualifications législatives et
de moins en moins sur les principes jurisprudentiels.

Remarque préalable : Cass, 3e Civ, 26 oct. 2022 : A quel moment se situe-on pour qualifier
un contrat d’administratif ou pas ? Souvent, on recourt au juge au moment de
l’exé cution du contrat. Mais la difficulté qui se pose est que des éléments font que la
qualification du contrat évolue (par exemple une personne publique se privatise).
La Cour de cassation a dit que pour dé terminer la nature d’un contrat et tout ce qui
va avec, il faut se situer au jour de la conclusion de ce contrat.
Cela est trè s important au regard de la sociétalisation des établissements publics,
dynamique engagé e par l’Etat (ex : France Té lé com devenu Orange…)

A. Les contrats administratifs par détermination de la loi

La qualification peut ê tre directe ou indirecte.


Elle est directe quand la loi dit expressément est un contrat administratif.
Elle est indirecte lorsque le législateur confie au juge administratif le soin de
connaître du contentieux d’un type de contrat.
Le lé gislateur interviendrait pour dé fendre la qualification du contrat administratif.
Cela est faux car il intervient dans les deux sens : il n’y a pas de pratique
homogène et juge opportun de la qualification publique ou privé e d’un contrat.
1. La qualification directe

Les plus importants contrats administratifs le sont par qualification directe.

La plus importante sont les marchés publics : procuration de biens, construction de


bâ timents, emploi de personnes. Ces critères étaient majoritairement jurisprudentiels.
Des marchés publics pouvaient être des contrats privées.
Dans une loi de 2001, le lé gislateur a soumis l’ensemble des contrats de marché
public à la qualification de contrat administratif. Il intervient une nouvelle fois via
la code de la commande publique en disant que seul ont la qualification de contrat
de marché public sont des contrats passés par des personnes publiques.
Les concessions de service public sont les contrats de délégation d’un service
public à un autre opé rateur. Les contrats de concession font l’objet d’une
qualification de contrat administratif dans le code de la commande publique

Les contrats de partenariat sont des contrats désormais publics. Ils ont fait l’objet
d’une qualification par une ordonnance. Ils font partie dé sormais des contrats de
marché public.

Dans une loi du 12 juillet 2010, les contrats d’achat d’électricité passé s entre EDF et
des producteurs d’é lectricité renouvelables sont des contrats administratifs. On est
pourtant dans le cadre de personnes privées mais sont administratifs.

2. La qualification indirecte

Les contrats de vente d' immeubles de l’Etat sont des contrats par qualification de la
loi. Les contrats portant sur l’occupation du domaine public sont des contrats
administratifs. Les baux emphytéotiques passés par des personnes publiques sont
aussi des contrats administratifs.

B. Les critères jurisprudentiels d’administrativité

Ce sont des contrats qualifié s par les jurisprudence administrative et par le


Tribunal des Conflits selon les critères organique, matériel et formel. Le jeu de ces
critè res a parfois provoqué des consé quences regrettables. Le juge a parfois choisi
d’autres options en passant par la qualification de bloc de compé tence.

1. Contrat entre personnes publiques

On a un peu l’illusion de la simplicité : le TC a posé une présomption


d’administrativité des contrats entre personnes publiques.
TC, 21 mars 1983, UAP : Les contrats entre personnes publiques sont présumés
administratifs « sauf si eu égard à leur objet ils ne font naître entre les parties des
relations que de droit privé ». On présume que le contrat entre personnes publiques sont
des contrats administratifs mais on limite cette présomption par le caractère des
relations entre les deux personnes. Exemple : cas des SPIC.
Cette jurisprudence s’est ré vé lé e difficilement applicable et la pré somption
d’administrativité des contrats entre personnes publiques a finalement dé cliné dans
les jurisprudences du Tribunal des Conflits.
TC, 15 novembre 1999, Commune de Bourisp : le TC rappelle le cadre gé né ral de
l’arrê t UAP mais il va qualifier le contrat en vérifiant que le contrat en cause
contenait des clauses exorbitantes. Ce critè re est assez classique mais n’est pas en
lien avec l’objet du contrat.
□ Finalement, on en revient à la pé riode anté rieure à cette pré somption :
confronté à un contrat entre deux personnes publiques, il se réfère aux
critères de qualification entre personne publique et personne privée (infra
2.).

2. Contrat entre une personne publique et une personne privée

Quand est ce qu’un contrat liant une personne privée et une personne publique est un
contrat de droit privé ?

a. Les critè res de qualification

3 critères justifient de l’administrativité d’un contrat

- L’objet du contrat : il a à voir avec le service public ou la réalisation de


travaux publics.

On met de cô té les travaux publics qui relè vent du droit administratif des biens : dè s
lors que le contrat avait pour objet la ré alisation de travaux public, le juge
administratif est compé tent.
Si le contrat a pour objet le service public, alors le juge administratif est compé tent.
La qualification de contrat administratif suppose un degré de proximité entre
l’activité de service public et le contrat. Il y a 4 hypothè ses dans lesquelles un
contrat est un contrat administratif en raison de son lien avec une activité de service
public :

o Le contrat a pour objet l’exécution même du service public : cela


renvoi à l’arrê t CE, 20 avril 1956, Epoux Bertin : la personne publique
confie à la personne privée le soin d’assurer l’exécution du service
public.

o Le contrat conduit à ce que le cocontractant de l’administration


participe à l’exécution du service public. Cette participation à
l’exé cution du service public doit ê tre directe.
Exemple : les contrats passés avec les agents contractuels ne sont pas
automatiquement administratif : ils l’é taient s’ils faisaient participer à
l’activité de service public. La mise en œuvre de ce critè re n’est pas
é vidente. C’est une question dé licate et complexe : le contentieux
concernant des contrats de socié té privé e fournissait des té lé s dans
des hô pitaux publics : doute sur la participation à la mission de service
public. Le juge administratif a dit que les contrats ont pur effet de
mettre en œuvre le service public dans un arrê t de 94. Mais le TC
a
expliqué que ce type de contrat n’avait pas pour objet de faire
participer à la mission de service public.

o Lorsque le contrat constitue une modalité d’exécution du service


public. En passant le contrat, la personne publique assure sa mission
de service public. CE, 20 avril 1956, Consorts Grimouard : les contrats
sont considé ré s comme une modalité d’exécution du service public.
Exemple : Convention passé e entre une université et une socié té
privé e en vue d’assurer la formation d’un des salarié s de cette socié té
privé e : ici le Tribunal des conflits a considé ré que c’é tait bien un
contrat administratif car cette convention a pour objet une modalité de
l’exécution du service public de formation continue assurée par
l’université.

o Le contrat ayant pour objet d’assurer la coordination des missions de


service publics dont les cocontractants sont chargés. CE, 2013, Société
Kéolis : il é tait en cause une convention entre l’agglomé ration de Caen
(EPCI) et deux autres socié té s avec lesquelles elle avait passé un
contrat de concession. C’est un contrat administratif.

- Le second critè re est le critère formel : c’est la clause exorbitante de droit


commun : le contrat est administratif parce qu’il contient ces clauses. Il est
assez ancien car il a pour origine CE, 1912, Société des granits porphyroïdes
des Vosges : la clause exorbitante de droit commun est confrontée au droit
commun, c’est-à -dire le droit civil. Sur la base de cette idé e là , on considé rait
qu’il y avait 3 types de clauses :
o La clause impossible dans les contrats entre personnes privé es.
Exemple : la clause qui permet le recouvrement des créances par voie
d’état exécutoire (administration a un privilège : quand elles ont une
cré ance elles ne sont pas obligées d'aller devant le juge, elles peuvent
se délivrer à elles-mêmes un état exécutoire : ordonner à quelqu'un
l’exé cution de sa cré ance. Donc une clause qui donne possibilité à l’une
des parties de ré cupé rer sa cré ance sans passer devant le juge, est une
clause impossible pour les personnes privé es)

o La clause inhabituelle : dans les rapports entre particuliers , des contrat


qui pré voient des clauses de contrô les. Dans les contrats
administratifs, les clauses de contrôles sont les clauses par lesquelles la
personne publique s’autorise à contrôler la manière dont l’opérateur
privée exécute la mission de service public.
o Les clauses illicites car abusive : dans les rapports entre
particuliers, dans un contrat entre personnes privé es, elle serait illicite
car abusive.

Le juge a ensuite donné une autre définition dans TC, 2014, Société Axa France
IARD : la clause exorbitante est la « clause qui notamment par des prérogatives
reconnues à la personne publique contractante dans l’exécution du contrat, implique dans
l’intérêt général qui relève du régime exorbitant des contrats administratifs ». Il en résulte
deux choses :
- On a plus besoin de comparer avec le droit commun.
- La clause exorbitante est la clause qui attribue une prérogative de puissance
publique à l’administration ou qui fait peser une sujétion de puissance
publique en vue de permettre la ré alisation de la finalité d’inté rê t gé né ral.

Le TC est venu pré ciser que la prérogative de puissance publique doit bénéficier à
la personne publique pour que le contrat soit administratif.
TC, 2 novembre 2020, Société Eveha : il ré sulte de cet arrê t que seules les
prérogatives reconnues à la personne publique sont susceptibles de qualifier le
contrat d’administratif. Il é tait question d’une socié té publique locale qui avait en
charge une acticité de service public. Le contrat contenait une clause qui permettait
de résilier le contrat de manière unilatérale. Le contrat est-il pour autant administratif ?
le TC a dit que non parce que la clause ne bé né ficiait pas à la personne publique. Il
faut que la clause bé né ficie à une personne publique pour que le contrat soit
administratif.

Exemples de clauses exorbitantes :


- La clause relevant d’une créance ou confé rant un pouvoir de contrôle sur le
cocontractant sont des clauses exorbitantes de droit commun.
- Il en est de mê me pour la clause qui permet à la personne publique de
modifier unilatéralement le contrat.

Il existe cependant des interrogations et des incertitudes autour de la qualification


de ces clauses exorbitantes. Une caté gorie de clause a une situation ambiguë qui
sont celle de rupture unilatérale de contrat par la personne publique. Une clause qui
permettrait de mettre fin au contrat sans mise en demeure est une clause
exorbitante de droit commun.

CE, 20 juillet 2022, ONF : le simple fait que des clauses attribuent des prérogatives
de puissance publique ne signifie pas que ce sont des clauses exorbitantes. Dans
cet arrê t, il est question d’un contrat qui comporte des clauses accordant des
pré rogatives de puissance publique mais ce ne sont pas des clauses exorbitantes, et
ce n’est pas un contrat administratif. C’est une convention qui lie l’ONF à une
personne autorisée à occuper et exploiter une parcelle sur un territoire d’une
commune pendant 10 ans. Cette convention est-elle un contrat administratif ? La CAA
avait considé ré que oui car pré sence de clauses exorbitantes (elles le paraissaient
en tout cas, car les pré rogatives confié es é taient considé rables : possibilité de
rompre contrat sans pré avis, pouvoir de contrô le de l’ONF sur le cocontractant,
besoin autorisation ONF pour abattre des arbres…). Mais Conseil d'É tat annule
l’arrê t d’appel, se fonde sur le fait qu’aucune de ces clauses qui semblent certes
exorbitantes ne justifient que dans l’intérêt général cette convention relè ve du
ré gime exorbitant des contrats administratifs. Nonobstant l’existence de clauses
exorbitantes, cela ne justifie pas que ce contrat soit administratif.

On est dans un contrat largement réglementé par la loi. Il se trouve que le ré gime de
ce contrat est exorbitant. Les contrats passé s en exorbitance sont des contrats
administratifs.
CE, Section 1973, Société d’exploitation électrique de la rivière du Sant : contrat
d’achat d’électricité entre EDF et des producteurs indépendants d’électricité. Ces
contrats faisaient l’objet d’un cadre légal assez important avec une loi qui dé finissait
les obligations imposé es aux parties comme pour EDF qui avait l’obligation d’achat
de l’é lectricité issue des barrages. Le régime était exorbitant donc on était dans le
cadre d’un contrat administratif.
TC, 11 mars 2011, Groupement forestier de Beaume Haie c. ONF : contrat passé
par l’ONF avec des proprié taires de bois et de forê ts et le proprié taire avait choisi de
se placer dans un régime particulier qui prévoyait des dispositions exorbitantes,
donc le TC a considé ré que le contrat était administratif.

b. Les blocs de compé tence

Parfois, le jeu de ces critè res produisait des effets indésirables : le juge a pu avoir
recours aux blocs de compé tence : le but est de savoir quel juge est compé tent en
fonction du type de contrat.

Le premier exemple concerne les contrats d’engagement personnels. Pendant


longtemps, ce sont les critè res jurisprudentiels qui ont joué .
TC, 25 nov. 1963, Mazerand : une dame travaille pour la crèche municipale. Elle est
embauché par la mairie pour faire l’entretien. Elle évolue dans ses fonctions
puisqu’elle va par la suite prendre en charge la garde des enfants. Elle a engagé une
action pour obtenir des rappels de salaires car considère qu’elle n’a pas été payé à sa
juste valeur. Il a fallut déterminer le juge compétent : Est-ce un contrat administratif
relevant du juge administratif ou un contrat de droit privé donc compétence des
prud’hommes ? Le TC a fait application des critères jurisprudentiels : comme elle
participe désormais à l’exécution du service public, son contrat est administratif. Le
TC a dit que pour le début, il fallait aller au privé car elle n’était pas dans une
mission de service public. Mais pour la seconde partie, elle devait aller devant
le juge public car en mission de service public.
Cet arrêt illustre le caractère indésirables des critères jurisprudentiels.

C’est bien aprè s que le TC a cré er un bloc de compétence pour simplifier les choses.
TC, 25 mars 1996, Berkani : le TC dispose que les agents contractuels qui travaillent
pour les services publics administratifs gérés par des personnes de droit public
sont des agents de droit public donc leur contrat est de droit administratif.

Mais les contrats entre les SPIC gérés par les personnes publiques et leurs usagers
sont des contrats de droit privé, y compris s’ils contiennent des clauses exorbitantes
de droit commun.

3. Les contrats entre personnes privées

C’est vrai en particulier lorsque le contrat contient une clause exorbitante. On


pourrait dire qu’il y a une sorte de présomption pour des contrats passés entre des
personnes privées.
Il y a au moins 3 hypothè ses dans lesquelles des contrats entre personnes privé es
est un contrat administratif :

- Dans l’hypothè se de la personne privée transparente : CE, 2007, Commune


de Boulogne Billancourt : lorsqu’une personne privée est créée à l’initiative
d’une personne publique qui en contrôle l’organisation et le
fonctionnement et qui lui procure l’essentiel de ses ressources, cette
personne privé e est transparente et les contrats qu’elle conclut sont des
contrats administratifs.

- Dans le cas où le contrat est accessoire, se greffe à un contrat administratif,


l’exemple le plus évident sont les conventions à objet financier qui
accompagnent la conclusion d’un contrat administratif (contrat de
cautionnement) lorsqu’un contrat entre deux personnes privées vient se lier à
un contrat passé avec une personne publique.

- L’hypothè se du mandat : c’est un systè me de la représentation. La personne


privé e agit pour le compte d’une personne publique. Le contrat est un contrat
administratif si on retrouve les autres critères. Parfois, il y a un vrai mandat
donc l’hypothè se joue pleinement. Mais le mandat ne renvoi pas seulement
au mandat du droit civil, mais aussi au mandat administratif en considérant
que la personne privée agit pour le compte d’une personne publique. la
jurisprudences s’est surtout dé veloppé dans les convention d’amé nagement
dans lesquelles la personne privé e d’amé nagement va acheter les
terrains,
construire des bâ timents… ce sont des sociétés d’aménagement qui vont
mettre en œuvre les actions d’une personne publique. C’est là que l’on voit ce
mandat administratif : dans le cas où la personne mandaté passe des contrats
avec une personne privée, les contrats sont administratifs

CE, 1975, Société d’équipement de la région montpelliéraine : 2 socié té s privé es ont


passé s un contrat avec un concessionnaire d’amé nagement et avec une entreprise
de travaux. La société d’aménagement est lié à une personne publique. Le CE est
venu dire que la socié té d’amé nagement doit ê tre considé ré comme agissant au nom
et pour le compte de la collectivité publique, donc é tait un contrat administratif.
L’existence du mandat est identifié au regard d’un faisceaux d’indices : objet du
contrat, origine des financements…

CE, juin 2009, ADP : Aé roport de paris est une socié té privé e dans lequel la sé curité
est assuré e par des personnes privé es. Le CE a considé ré que les contrats par
lesquelles les socié té s d’aé roport confient la mission de filtrage des passagers sont
réalisés pour le compte de l’Etat et sous son autorité donc sont des contrats
administratifs. On est dans le cas d’une mission de police administrative.

TC, 2015, Entreprise Peyrot : la socié té d’autoroute agit au nom et pour le compte
de l’Etat : les contrats conclus pour la réalisation des routes nationales y compris entre
personnes privé es sont des contrats administratifs car la construction des routes est
une compétence de l’Etat.
Mais revirement de jurisprudence : TC, 9 mars 2015, Rispal contre autoroute du
Sud de la France : Se fonde uniquement sur l’objet du contrat. Une socié té
concessionnaire d’autoroutes qui conclu un contrat avec une socié té ayant pour
objet la construction et l’entretien d’une autoroute ne peut pas être regardé comme
agissant au nom et pour le compte de l’Etat.

II. Typologie des contrats administratifs

Il faut faire la part des choses dans les contrats. Seulement deux caté gories de
contrat ont une dimension é conomique importante qui relè vent du Code de la
commande publique où la mise en concurrence est né cessaire : ce sont les marchés
publics et les concessions. La division entre ces deux contrats repose sur l’objet du
contrat et sur l’é conomie financiè re.
Ces contrats ne sont pas nécessairement administratifs : ils le sont que si une
personne publique est partie au contrat ou le contrat est fait pour le compte d’une
personne publique.
A. Les marchés publics

Des marchés publics peuvent ne pas ê tre administratifs. Les marchés publics
sont les plus classiques. Ils ressemblent le plus aux contrats classiques du droit civil.
Un marché public est un contrat par lequel un acheteur passe un contrat avec un
opérateur privé pour répondre à ses besoins de travaux, de fournitures ou de service
en contrepartie d’un prix (Art. L1111-1 CPP)
On est dans la logique de l’achat. On parle de 3 types de marché s : les marché s de
travaux, de fourniture ou de service.

Il faut spé cifier une caté gorie de marché complexe que sont les marchés de
partenariats, anciennement concessions de partenariats. Ce sont des contrats récents.
L’objectif est la construction de grands équipements publics tout en lissant leur coû t
sur la duré e. L’opé rateur privé va s’engager à concevoir l’équipement, assurer son
financement, sa construction, son entretien, son exploitation en échange d’un loyer
acquitté par la personne publique qui utilise l’équipement.
Exemple : des universités ont fait construire des bâ timents et ils ont été financés par
la société de construction en contrepartie du paiement d’un loyer. C’est un marché
public.

B. Les concessions

Les concessions sont des concessions de service ou de travaux publics. Un contrat de


concession est un contrat par lequel l’autorité concédante (la personne publique)
confie l’exécution de travaux ou la gestion d’un service à un opérateur économique à
qui est transféré un risque lié à l’exploitation de l’ouvrage et du service en
contrepartie soit du droit d’exploiter l’ouvrage ou le service soit de ce droit assorti
d’un prix (Art. L. 1121-1 CCP).
La rémunération sera en générale assurée par les usagers de l’ouvrage ou du
service. Ce n’est pas la collectivité qui paie mais les usagers. Le risque financier pèse
sur le concessionnaire et pas sur la collectivité .

Comment distinguer un marché d’une concession ?


Les contraintes en matiè re de passation de ces contrats sont beaucoup plus lourdes
pour les marché s publics que pour les concessions. Le vé ritable critè re de
distinction est le critère du risque : sur qui pè se le risque d’exploitation du service.
S’il pè se sur la collectivité , c’est un marché . S’il pè se sur le contractant c’est une
concession.

Exemples

- CE, 2021, Ville de Paris : contrat passé avec des socié té s dont la mission
en vertu du contrat é tait d’assurer l’enlèvement des véhicules abandonnés
dans
les fourrières de la ville de Paris. La ré muné ration de cette socié té ne
ré sultait pas d’un prix payé par la ville de Paris : l’opérateur se payait sur la
dette : il ré cupé rait les vé hicules et en faisait ce qu’il voulait. La question se
posait de savoir si c’était un marché ou une concession. Le juge a dit que
aucune des stipulations du contrat ne pré voyait une compensation pas la ville
de Paris, que par ailleurs, il y avait un alé a lié aux vé hicules ré cupé ré s (on ne
valorise pas de la mê me maniè re un vieux vé hicule qu’un nouveau). Le risque
porte sur la société donc on est dans une concession

- Cass, Com, 2022, société Bernard dépannage : concession d’autoroute qui a


passé une contrat avec une entreprise chargée d’effectuer des dépannages
sur une portion d’autoroute. La question é tait de savoir si c’é tait une
convention ou un marché public ? Il n’y avait pas de compensations des pertes
car se finançait directement sur les dépannages et l’entreprise ne maitrisait pas
le nombres de vé hicules à dé panner. Certes, elle avait le monopole mais la
socié té de dé pannage supportait les risques liés à l’exploitation du service
rendu donc on é tait en pré sence d’une concession. Le critère du risque est
donc central dans le cas d’un marché ou d’une concession.

Il existe plusieurs types de concession :


- Concession de service public qui ont pour objet la gestion d’un service
public par un concessionnaire qui a aussi la mission souvent de ré aliser des
travaux permettant la mise en œuvre de ce service.
- Concession de travaux qui ont pour objet la réalisation de travaux
- Concession d’aménagement qui sont des contrats complexes qui touchent
l’aménagement du territoire, des opé rations urbaines… Ils impliquent que
l’opé rateur acquiert des terrains, y ré alise des travaux d’aménagements et
commercialise les lots issus des travaux.
Ce ne sont pas forcé ment des contrats administratifs. Le Code de la commande
publique n’é voque que les concessions et marché s publics.
C. Les conventions d’occupation

Les conventions d’occupation sont les contrats par lesquels l’administration


autorise des personnes privées à occuper de manière privative son domaine public
moyennant une redevance d’occupation domaniale. Cette occupation peut ê tre le
fruit d’un AAU mais aussi d’une concession.
Ces contrats posent des difficulté s avec des problè mes de frontières entre ces
contrats et ceux de concession. On se situe en amont du contrat. Il a fallu trouver un
critè re pour les distinguer. Ils diffèrent du fait des règles de concurrence et de
transparence qui sont appliqué s aux concessions de service public mais qui sont
absents pour les conventions d’occupation.
D. Les contrats de recrutement d’agents publics

Les contrats de recrutement d’agent public sont les contrats par lesquels les
contrats engagent des employé s. On parle des contrats d’engagement personnel. La
majorité des personnes dans une administration sont des fonctionnaires : elles ont
un statut. Mais il y a une part non né gligeable qui sont des contractuels et qui sont
liés par des contrats de travail administratif.

□ Section 3 : le régime juridique du contrat administratif

Introduction : l’exorbitance du contrat administratif

Il y a des éléments d’exorbitance. Cette idé e d’exorbitance s’exprime à la fois par des
prérogatives du droit de la puissance publique, mais cette exorbitance s’exprime
aussi par des charges exorbitantes de la puissance publique. Il pè se sur
l’administration des obligations qui ne pè sent pas sur des contractants dans des
contrats de base.
Cette idée d’exorbitance apparait assez facilement lorsque l’on confronte le régime
du contrat administratif avec celui du contrat de droit privé (1102 et 1103 du code
civil) qui posent la liberté contractuelle et le principe de la force obligatoire du
contrat. Quand on confronte le droit administratif avec ces articles, les exorbitances
se ré vè lent.

Sur le 1102, la liberté contractuelle est la liberté de contracter ou de ne pas


contracter, liberté de choisir son cocontractant, liberté de dé terminer le contenu et
la forme du contrat. Dans le contrat administratif, la liberté subit des remises en
causes : l’administration n’a pas toujours la liberté du fait de la limitation de
possibilité de contracter (Cf. La police administrative), liberté de choisir son
cocontractant est aussi limité par rapport à la transparence et la mise en
concurrence. La liberté de dé terminer le contenu du contrat est enfin limité du fait
de règles qui encadrent par exemple la durée des contrats à respecter pour les
personnes publiques.

Sur le 1103, la force obligatoire du contrat tient force de lois à ceux qui les ont cré es.
Quand on fait un contrat on l’exé cute. Mais on verra en droit administratif que dans
certains hypothè ses, l’administration est en droit de modifier unilatéralement le
contrat ou d’y mettre fin unilatéralement.

□ Il ne faut cependant pas avoir l’image d’une administration surpuissante et


un opé rateur faible. La représentation d’une administration surpuissante est
fausse. Les contractants ont des droits (notamment à la ré paration) et il
est
parfois plus sur de passer des contrats avec une personne publique.
D’ailleurs, les collectivité s ne mettent pas tout le temps en œuvre leurs
pré rogatives

I. La formation du contrat administratif

Quand on aborde la formation du contrat, on aborde les conditions de validité du


contrat. On se tourne vers l’article 1128 du code civil qui pré voir diffé rents
é lé ments dans le contrat :
Sont nécessaires à la validité d'un contrat :
1° Le consentement des parties
; 2° Leur capacité de contracter ;
3° Un contenu licite et certain.
Il faut ajouter d’autres règles spécifiques au contrat de l’administration qui visent à
pré server les deniers publics et s’assurer des rè gles de concurrence.

Les personnes publiques sont soumises à des contreparties importantes qui


s’expliquent par plusieurs raisons : on veut éviter les pratiques de corruption.
Les rè gles de concurrence vise à assurer l’é gal accè s aux contrats administratifs. Ces
rè gles de passation transpose 3 rè gles qui sont à l’article L. 3 du Code de la
commande publique :
- Egalité d’accès à la commande publique
- Egalité de traitement des candidats
- Transparence des procédures

Elles sont plus ou moins contraignantes en fonction du contrat :Les contrats qui
n’ont pas de dimension é conomique (engagement personnel) é chappent à ces rè gles
Pour les contrats de la commande publique, soumis aux exigences de ce code.
Pour les autres contrats, ces règles varient selon le choix du cocontractant avec le
prix qui est un critè re dé terminant. De plus en plus dans les critè res de sé lection on
tente d’inté grer d’autres critères plus qualitatifs (protection de l’environnement…)
L’article L2152-76 du code de la commande publique é nonce que le « marché
public est attribué au soumissionnaire (candidat) qui présente l’offre économiquement
la plus
avantageuse la sur base du critère du prix ou du coût. L’offre peut également être
déterminé sur une pluralité de critères liés à l’objet ou aux conditions d’exécution du
contrat (prix, qualité, environnement, social…) »

A. La passation des contrats administratifs

1. Pour les marchés publics

Dans les marchés publics, les règles sont les plus contraignantes. Elles reposent sur
l’idé e d’une publicité et d’une mise en concurrence des opé rateurs qui candidatent.
Ces rè gles sont minimums et limité s pour les marché s dont les enjeux financiers
sont faibles. Les marchés en dessous de 40.000€ ne font pas l’objet de contraintes
particulières.
La procédure classique est celle de l’appel d’offre : elle passe par la publication
d’un avis concernant la passation d’un contrat (dans un journal). Les candidats
présentent leur projet de marché et une commission des appels d’offre choisit le
projet le plus souvent sur le critè re du prix.

2. Pour les concessions de service public

Pour ce qui est des concessions, les contraintes sont beaucoup plus limitées car
l’intuitu personae joue un rôle essentiel. Il s’agit de confier aux cocontractants une
mission de service public. La collectivité publique a plus de marges de manœuvres
qu’en matière de marché public. On retrouve l’exigence de publicité mais aussi des
règles qui encadrent la négociation avec les différents opérateurs candidats. Parce
que les enjeux sont lourds en terme de service public qu’il y a une négociation et
une liberté de choix du cocontractant.

3. Pour l’occupation du domaine public

Les contrats d’occupation du domaine public ont longtemps é chappé aux rè gles de
publicité et de mise en concurrence. Le CE avait rappelé en 2010 cet é chappement
aux rè gles.
Cela est fini depuis l’ordonnance du 19 avril 2017 qui a pré vu de maniè re limité e
des règles de passation. Elles sont ré gies dans le CG3P (Code général de propriété
des personnes publiques). la collectivité fait une procédure de sélection publique et
transparente des candidats mais c’est bien l’autorité en charge qui dé termine
librement la mise en œuvre des exigences.

B. La conclusion du contrat

1. Les rè gles relatives aux parties

On retrouve la problématique de la capacité et de la compétence de la personne


publique pour conclure le contrat. Il existe un principe de spécialité : chaque
personne publique doit rester dans le cercle de sa compétence : une collectivité
publique ne peut pas contracter en dehors du champ de ses compé tences.

On retrouve aussi les vices du consentement. Ils sont moins importants en droit
administratif mais le juge mobilise des dispositions du code civil : on retrouve le
dol, l’erreur et éventuellement la violence. En droit civil, modè le est celui d’une
personne physique qui passe un contrat. Mais en droit administratif, les
personnes
sont morales et de droit public. Elles sont moins susceptibles de subir de la
violence, de faire des erreurs ou ê tre soumis à des contraintes.
Exemple : dol au dé pens d’une personne publique : CE, 2020, société Lacroix
signalisation : affaire du cartel de la signalisation routière. Il y avait une entente
entre 8 sociétés pour se répartir les marchés publics pour ne pas se faire concurrence.
Cette entente s’est faite au dé pens des personnes publiques victimes de ces
ententes. Ces manœuvres sont du dol qui vicie le consentement des personnes
morales publiques.

2. Les rè gles relatives au contrat

a. La duré e

La durée du contrat correspond à une règle spécifique : en droit administratif, les


textes pré cisent que les contrats doivent ê tre stipulé s pour une duré e . C’est le cas
pour les contrats du code de la commande publique (Art. L5 de ce code). C’est aussi
le cas pour les concessions et l’occupation du domaine public.
Dérogation : on voit émerger des contrats de travail (=engagement personnel) à
durée indéterminées
On impose cette durée déterminé pour assurer la concurrence et donc par la
suite un changement d’opé rateur peut ê tre plus avantageux. Pour les concessions de
service public dans l’eau ou les déchets, leur durée ne peut pas excéder 20 ans. La
question de la duré e est lié e à cette exigence de concurrence dans l’accè s au contrat
de l’administration.

b. La forme

La aussi, les choses sont un peu diffé rentes. La forme écrite est imposée par les
textes.
c. Le contenu

On retrouve une série de règles qui pèsent sur les acteurs publics :

- La nécessité d’un objet licite.


Exemple : en principe, l’administration ne peut déléguer ses missions de
police. Dè s lors qu’un contrat aurait pou objet de confier à une personne
privé e des missions de police, il a un objet illicite (Cf. Suite du CM)

- Des clauses prohibées au sein des contrats administratifs. Des clauses sont
illicites par la loi ou par le juge.
Arrê t CE, 2012, CCI de Montpellier : interdiction faite aux personne
publiques de consentir des libéralités. Il en ré sulte qu’un contrat ne peut
pré voir une indemnité de ré siliation ou de non renouvellement du contrat
qui serait au dé triment de la personne publique manifestement
disproportionné au montant du pré judice subi par le cocontractant de
l’administration du fait de cette ré siliation.

- Des clauses obligatoires dans un contrat administratif. Ce sont des


dispositions pré cises. Le code de la commande publique mais aussi d’autres
codes (urbanisme…) pré voient au cas par cas des conditions obligatoires.
Il faut mentionner qu’il existe de maniè re traditionnelle en matiè re de
marché public des clauses types qui figurent dans des cahiers de clauses
administratives générales (CCAG). Ce sont des contrats types qui
contiennent un certain type de clause. Ces CCAG sont utiles parce que les
collectivité s publiques n’ont pas forcé ment de grands services juridiques. Les
plus petites CT vont y avoir recours. le recours à ces CCAG est assez courant.
Ces contrats ne sont pas obligatoires né anmoins et les CT ne sont pas tenus
d’y avoir recours.

II. L’exécution du contrat administratif

L’idé e d’exorbitance se retrouve surtout dans l’exécution du contrat administratif.


On retrouve en droit administratif la force obligatoire du contrat mais il n’est pas
central : il faut insister sur les prérogatives de l’administration qui peuvent remettre
en cause le contrat lorsque cela est né cessaire par la bonne gestion d’un service
public.

A. Les prérogatives de l’administration

L’administration a des prérogatives exorbitantes. Elles visent à lui permettre


d’adapter le contrat et son exécution à son besoin : celui du service public.
L’administration ne peut pas s’engager par voie de contrat à mettre en ouvre ces
pré rogatives.
CE, 1985, Association Eurolat : impossibilité de renoncer par voie de contrat aux
prérogatives de l’administration. Ce sont des « règles générales applicables au contrat
administratif » Elles existent quand bien mê me le contrat ne les pré voit pas. Elles
ont é té en partie codifié es à l’article L6 du CCP.

Dans une dé cision ré cente CE, 2023, question autour des marchés publics
d’assurance : les personnes publiques font assurer leurs biens par des marché s
d’assurance. La difficulté qui existait é tait que dans le code des assurances, il est
pré vu que l’assureur a la possibilité de résilier le contrat unilatéralement à
l’expiration d’un délai d’un an. La question s’est posé de l’application de ces
dispositions pour les marché s publics d’assurance. Quelle application en droit
administratif ? Le CE a essayé d’adapter ces textes au contrat administratif : il a jugé
que la personne publique peut pour un motif d’intérêt général tiré des exigences
du service public s’opposer à la mise en œuvre de cette clause et imposer la
poursuite du contrat à l’assureur pendant la duré e strictement né cessaire au
dé roulement d’une nouvelle procé dure de passation d’un marché public d’assurance
sans que cette duré e ne puisse excé der 12 mois.

1. Le pouvoir de contrô le et de direction

L’administration peut vérifier que son cocontractant exécute correctement son


contrat. elle peut opé rer des indications et des modifications. Ces possibilité s sont
dé finies par les textes.
Exemple : en matière de concession de service public, il est prévu dans le CGCT que
le concessionnaire établisse un rapport d’activité chaque année pour que la CT
puisse contrôler la bonne exécution du contrat.

Ce qui est inté ressant de ce pouvoir de contrô le est qu’il peut conduire
l’administration à prendre des sanctions à l’é gard de ses cocontractants. Il y a 3
types de sanctions possibles :
- Pécuniaire : on inflige des pénalités en cas de retard ou manquement dans
l’exécution du contrat. Cette possibilité doit ê tre prévue dans le contrat. Cela
renvoie aux clauses pé nales des contrats publics. Le juge administratif a un
pouvoir de modulation à l’é gard de ces clauses et peut ré duire le montant des
pé nalité s (existe aussi en droit civil)

- Coercitive : ce sont les situations dans les cas de mauvaise exécution que
l’administration va pouvoir décider de se substituer à ce cocontractant pour
assurer l’exé cution du contrat au fait et risque de se cocontractant dé faillant.
Elle peut aussi avoir recours à un autre opé rateur. On peut parler de mise
sous séquestre d’une concession et de la mise en régie d’un marché de
travaux. Cette possibilité pour l’administration existe sans clauses contractuelles
(Arrêt CE, 2017 : société de manutention portuaire d’Aquitaine)
Le contrat initial n’est pas rompu.

- Résolutoire : possibilité pour l’administration de prononcer la résiliation


pour faute du contrat en cas de manquement de son cocontractant à ses
obligations. C’est une possibilité sans clauses (Arrêt CE, 1983, SARL
Comexp) Article 1226 du code civil autorise le cré ancier à ré soudre le
contrat en cas « d’inexécution suffisamment grave et après mise en demeure »
Précisions :
o Une caté gorie de contrat ne peut pas être résolu unilatéralement et
suppose de saisir le juge : pour les concessions (sauf si une clause du
contrat le permet). On peut obtenir la dé ché ance du concessionnaire.
Ces contrats imposent de lourds investissement pour le
concessionnaire. On a considé ré qu’il serait risqué pour le
cocontractant.
o La dé cision de ré silier un contrat est une dé cision unilaté rale. Cela est
dé fini par le CRPA et suppose une motivation et le respect d’une
procédure contradictoire. Lorsque l’administration prend une dé cision
dé favorable, elle est soumise à une motivation et au contradictoire.

2. Le pouvoir de modification unilaté rale

L’administration a la possibilité de modifier unilatéralement certaines clauses du


contrat. Ce pouvoir a longtemps é té discuté .
□ Dans un arrêt CE, 21 mars 1910, Cie générale française des tramways : porte
d’entrée de ce pouvoir exorbitant mais n’est pas trè s clair. Il a participé à
l’incertitude autour du ré gime du pouvoir de modification unilaté rale.

Les choses ont é té clarifié es par CE, 1983, société des transports régionaux :
administration peut modifier le contrat même si cela n’est pas prévu par le contrat.
L’article L6 du CPP a fini par reprendre à son compte cette possibilité .
Cet encadrement s’opère à 3 égards :

- Seul un motif d’intérêt général peut justifier le recours à cette prérogative. Il


ne faut pas sous-estimer l’action de l’administration car contrôle du juge
administratif est assez limité. Arrêt CE, 2023, SIPPEREC : caractè re illicite
d’un contrat, l’administration peut y apporter de maniè re unilaté rale les
modifications permettant de remé dier à cette irré gularité .

- L’administration ne peut pas tout faire : l’administration ne peut pas toucher


aux clauses essentielles du contrat. Elle ne peut pas toucher à l’objet du
contrat : si l’administration modifie l’objet du contrat, ce n’est plus le mê me
contrat, or cela pose un problè me de concurrence. Elle ne peut pas non plus
toucher aux clauses financières du contrat qui sont relatives à la
rémunération du cocontractant. Permet de sanctuariser les clauses financières
du contrat.

- Le droit à indemnité du cocontractant. Lorsque cela est né cessaire, la


modification du contrat ouvre droit à compensation du préjudice subi par le
cocontractant. Ce droit à indemnité peut ê tre limité mais en principe,
ré paration inté grale.

3. Le pouvoir de ré siliation pour motif d’inté rê t gé né ral


On est confronté à un pouvoir exorbitant. Cette pré rogative a é té reconnue trè s tô t à
l’administration par le juge. Arrêt de référence : CE, 1958 distillerie de Magnac-
Laval.
Cette décision peut faire l’objet d’une contestation par son cocontractant. Il peut
demander l’annulation de cette dé cision. Cette possibilité est ré cente.
CE, 2011, Commune de Béziers (2) : admet la possibilité pour le contractant de
demander l’annulation de la résiliation du contrat.

Le motif d’intérêt général a fait l’objet d’interrogation : Peut-il être financier ? Souvent,
on considè re que non. Il arrive que la prise en compte de la dimension financiè re du
contrat justifie qu’il y soit mis fin.
Ce peut cependant l’être pour une meilleure gestion du domaine public
Dans une affaire, le motif d’inté rê t peut ê tre lié à la situation financiè re d’une
commune. Ce sont des considé rations financiè res.

Le contrôle du juge reste limité en la matière : CAA Versailles, 2 décembre 2022,


Ministre de l’Ecologie c. Société Axxès : Cas des bonnets rouges et de l’é cotaxe.
L’Etat a fini par mettre fin aux contrats avec les socié té s permettant la mise en place
de l’é cotaxe. La CAA a dit que les troubles à l’ordre public lié s à cette taxe é tait un
motif d’inté rê t lé gitime pour mettre fin au contrat. Il précise qu’il n’appartient pas
au juge administratif d’apprécier l’opportunité de l’administration de mettre fin à
ce contrat.

Autre affaire : Commune de Palavas les Flots. É tait en cause une convention
d’occupation du domaine public qui avait é té stoppé par la commune afin de mettre
en place un parking. La cour s’é tait permise de regarder les besoins en matiè re de
stationnement. Mais le CE a annulé l’arrêt d’appel car on refuse que le juge puisse
s’ingérer dans les choix de l’administration.
L’administration devra indemniser son cocontractant ce qui couvrira ses pertes
mais aussi le gain manqué. L’é tendue de cette indemnisation est susceptible d’ê tre
dé terminé par des clauses du contrat. Mais principe d’interdiction de libéralité des
personnes publiques ce qui fait obstacle à des stipulations contractuelles qui
prévoiraient des indemnités de compensations qui seraient disproportionnées.

Cas pour irrégularité du contrat. Cas particulier avec l’action en contestation de la


validité du contrat. (Cf Suite du CM, Béziers 1) C’est une action à l’initiative des
parties du contrat. Mettre fin à un contrat parce qu’il est irré gulier met en cause la
loyauté au sein du contrat entre les parties.
Cadre juridique fixé par un arrê t CE, 2020, Société Comptoir Négoce Equipements :
lorsqu’un contrat est entaché d’un irrégularité telle que si le juge est saisit, il
pourrait en prononcer l’annulation ou la résiliation, la personne publique sous
ré serve d’exigence de la loyauté des relations contractuelles peut mettre fin
unilatéralement à son contrat sans avoir besoin de saisir le juge.
L’administration ne pourra ré silier que si l’irré gularité peut justifier l’annulation
par le juge s’il é tait saisi de l’affaire. Si cela n’entraine pas la possible annulation du
contrat, alors l’administration ne peut pas ré silier le contrat : « l’administration ne
peut pas faire plus que ce que le juge peut faire »
Il faut aussi prendre en compte la loyauté : l’administration ne peut ré silier le
contrat si cela dé montre sa volonté de se dé lier de ses obligations contractuelles
lorsque l’irré gularité vient de l’administration.
Exemple de cas d’irré gularité : la duré e excessive du contrat

B. Les droits du cocontractant à l’administration

1. L’impré vision

La théorie de l’imprévision est ancienne. L’arrê t de ré fé rence en la matiè re est CE,


1916, Compagnie générale d’éclairage au gaz de Bordeaux . Aléa économique
anormal peut permettre à administration d’aider cocontractant à faire face aux
difficultés de telle sorte qu’il pourra continuer à assurer le contrat. Le but est
d’assurer la continuité du service public. L’administration donne un coup de main
financier.
On la rencontre moins parce que les contrats prévoient dans leur clause cet aléa.
Cette thé orie jurisprudentielle a moins d’importance aujourd’hui. On s’est aussi
interrogé sur la compatibilité avec les exigences europé ennes de concurrence sur
les effets modification des contrats.
Cette théorie est revenue à la mode avec la guerre en Ukraine et ses conséquences sur
le coû t de l’Energie.

a. Les conditions

Les conditions de l’impré vision sont au nombre de 4 :


- L’é vè nement à l’origine doit ê tre imprévisible au moment de la conclusion
du contrat. Exemple : une flambé e soudaine des coû ts est impré visible
- L’é vè nement doit ê tre extérieur aux parties du contrat. Le comportement, les
agissements de l’administration ne justifient pas l’impré vision
- L’é vè nement en question doit entraîner un véritable bouleversement de
l’économie du contrat. Cela doit ê tre vé ritablement anormal : aggravation
importante des conditions d’exé cution du contrat à un point tel q ’elle rend
difficile son exé cution
- Cette situation d’imprévision doit rester temporaire. Si elle devient
permanente, cela justifie la ré solution du contrat.
□ On revient à la force majeure
b. Les conséquences

Lorsque l’on est dans ces situations, le cocontractant va pouvoir revendiquer une
indemnité d’imprévision qui va compenser la part de son dé ficit imputable à ses
circonstances impré visibles lors de l’exé cution du contrat. Toute la question est
celle du montant de l’indemnité : cela ne joue que sur la part de l’aléa qui est
imprévisible. L’administration prend en charge l’alé a é conomique autour de 90% de
la charge nouvelle subi par le cocontractant : on laisse 10% d’incertitude d’aléa
normal. L’administration en prend en compte que ce qui est anormal. Cette
indemnité a vocation à ê tre dé terminé d’un commun accord. Le juge devra
dé terminer le montant de cette indemnité s’il est saisi de cette affaire.

Hypothè se dans lesquelles on a admis l’imprévision est souvent celle des coûts de
l’énergie: Arrêt CE, 1982 Sect. Scté Propétrol. Il est question du second choc
pé trolier.

Pour activer cette thé orie, celui qui est en charge de l’exécution du contrat doit
continuer à exécuter sa part du contrat. Certes il a une aide mais il continue à
exé cuter le contrat puisque la raison d’ê tre de l’impré vision est de permettre la
continuité du service public.
CE, AG, Avis de 2022 : le CE a pré cisé que les parties au contrat ont le choix :
- Modifier consensuellement le contrat dans le respect du code de la
commande publique
- Avoir recours à un système d’indemnisation des charges dans le respect de
l’impré vision

2. Les sujé tions impré vues

Ce sont les compensations dans le cas des travaux publics lors d’aléas techniques
qui vont interrompre ou rendre difficile un chantier : tempê te, la dé couverte de la
structure d’un sol…
Il y a un caractère exceptionnel et imprévisible lors de la conclusion du contrat,
extérieur aux parties du contrat. Il aura droit à une indemnisation intégrale des
charges impré vues qu’il a supporté , mê me sans clauses en ce sens.

3. Le fait du prince

Cette théorie est une invention de la doctrine. Il y a une incertitude sur son champ
d’application. L’administration est ici en cause : son action va donner lieu à une
difficulté dans l’exécution du contrat.
- 1 : Hypothè se où cet alé a est imputable à une autre personne publique que
celle qui a contracté.
- 2 : Hypothèse où cet aléa est imputable à la personne publique contractante,
mais en tant qu’elle agit au titre d’une autre mission que partie au contrat
(ex: contrat entre commune et société de transports pour assurer les transports
publics sur le territoire commune. Mais commune décide de fermer la
circulations ou mettre des sens interdits au titre de son pouvoir de police car il
y a un risque de trouble à l’ordre public. Lorsqu’elle fait cela, elle n’agit pas en
tant que cocontractante de la société de transports mais en tant qu’autorité de
police. Mais cette décision aura une conséquence sur l’exécution du contrat
(détours imposés, qui entraînent un surcoû t pour la société.
- 3 : Hypothè se où la personne publique interfère dans l’exécution du contrat
en tant que cocontractante.
La situation de fait du prince renvoie principalement à la 2 ème hypothèse. Dans ce
cas, le cocontractant privé aura droit à une indemnité pour réparer l’intégralité du
préjudice subi. Ici on n’est plus dans une responsabilité contractuelle sans faute,
mais dans une responsabilité dé lictuelle sans faute.

□ Section 4 : Le contentieux contractuel

Le contentieux contractuel est d’actualité. Il a é té repensé à partir de 2007 par une


sé rie d’arrê t du CE. Le juge a considé ré qu’il fallait repenser cette chose. Ce
bouleversement du contentieux du contrat a eu deux objectifs :
- Simplifier les recours. Le contentieux é tait trop compliqué à comprendre car
é tait lié à des AAU (ré siliation…) on peut à la fois envisager un contentieux du
contrat (pleine juridiction) mais qu’une partie relè ve des actes administratifs
unilaté raux (via des REP). Le CE a tenté de ré soudre ce problè me

Exemple : la dé cision de conclure un contrat est AAU. Il pouvait faire l’objet d’un
REP. Le juge de l’excè s de pouvoir ne pouvait dé cider que de cela. Il ne pouvait pas
dé cider de mettre fin au contrat. Il fallait saisir d’un RPC aprè s pour demander au
juge de statuer sur le contrat.
Le solution a été de renforcer le champ des compétences du juge du contrat dans la
cadre d’un RPC au dépens du juge du REP.

- Adapter l’office du juge au contentieux contractuel. Elle é tait assez rustique


car reposait que la nullité ou l’absence de nullité . On va donner des nouveaux
outils au juge pour s’adapter aux nouvelles situations dont il pouvait ê tre
saisi.

I. Les procédures de référé


Tout est lié au droit de l’UE et aux règles de concurrence. Le droit de l’UE s’est
inté ressé au contrat de l’administration en s’inté ressant à la phase de cré ation du
contrat. (publicité et concurrence) Pour s’assurer que ces rè gles soient respecté es,
l’UE a mis en avant des ré fé ré s pour contrô ler cela et donc dè s la formation du
contrat des rè gles de mise en concurrence et des rè gles de publicité du contrat. Cela
a aboutit à deux référés.

A. Le référé précontractuel

Article L551.10 du CJA. Il peut jouer en particulier à l’égard des contrats de la


commande publique. Il a une fonction préventive : il s’agit de paralyser et
d’interrompre la passation d’un contrat qui n’a pas é té conclu lors de la formation
du contrat. Dè s lors que le contrat est conclu, le recours est irrecevable.

Qui peut agir ?


Il faut un intérêt à agir nécessaire : inté rê t à contracter dans le futur contrat et
intérêt à être lésé par le manquement invoqué.
Le CE dit dans son arrêt CE, 2008 SMIRGEOMES que les requérants ne peuvent
invoquer que les manquements qui « eu égard à leur portée et au stade de la procédure
auquel ils se rapportent sont susceptibles de les avoir lésé ou risquent de les léser »

Que peut faire le juge ?


Le juge a une palette de pouvoir : il peut prendre des mesures provisoires comme
des injonctions ou dé cider de mesures définitives comme l’annulation de dé cisions
intervenues dans le cadre de la passation du contrat, de supprimer des clauses
illé gale sou l’annulation totale de la procé dure de passation.

B. Le référé contractuel

Art. L551.13 du CJA dé finit le régime de ce référé. Il peut ê tre engagé après la
conclusion du contrat. Il s’agit de permettre une remise en cause rapide de ce
contrat dans l’hypothè se que les rè gles de mises en concurrence te de publicité ont
é té violé es.

Le référé contractuel sur référé précontractuel ne vaut : on ne peut pas cumuler les
deux. Le ré fé ré ne peut ê tre engage s’il y a dé jà eu un ré fé ré pré contractuel. Ce ne
peut pas ê tre les mê mes personnes. Le dé lai est celui de 31 jours après la réalisation
des mesures de publicité du contrat. Le dé lai est de 6 mois si pas de publicité à
compter de la conclusion du contrat.

Quels sont les pouvoirs du juge ?


Palette de possibilité : il peut suspendre pour la durée de l’instance ou il peut
prononcer la nullité du contrat dans le cas où aucune mesure de publicité n’a é té
mise en œuvre. Le juge peut aussi simplement dé cider la résiliation, la réduction du
temps ou des pénalités à charges de la personne publique au cas où il se heurte
d’inté rê t gé né ral

II. Le recours pour excès de pouvoir

REP a un rôle plus limité depuis 2007 mais il joue toujours un rô le. Il faudra voir les
actes détachables du contrat qui sont des AAU pris sur le fondement ou à la suite du
contrat puis le cas particulier rare des REP directement contre le contenu du contrat.

A. Les actes détachables du contrat

Des AAU de l’administration interviennent dans le cadre de certains contrats.

1. Histoire des actes dé tachable du contrat

Arrê t CE, 1905, Martin : le juge de l’excès de pouvoir s’est saisi du contentieux
contre les décisions prises par l’administration dans le cadre de l’exécution et
l’annulation du contrat. Ces AAU doivent être détachables du contrat donc peuvent
faire l’objet d’un REP. Permet à des tiers au contrat (usagers, concurrents) de
contester des actes valables au contrat (conclusion, refus de conclure…) ou des actes
relatifs à l’exé cution du contrat (ré siliation…). Il a é té considé ré que cette
construction a produit des effets indésirables. En 2007, pour contrecarrer les effets
des actes dé tachables, le CE a dé cidé de ré duire la porté e cette jurisprudence.

CE, Ass, 2007, Scté Tropique Travaux Signalisation et CE, Ass, 2014, Département
du Tarn-et-Garonne : nouveau recours devant le juge : recours en contestation de la
validité du contrat. Il se rapporte devant le juge de la pleine juridiction. En
contrepartie, le CE décide que des REP ne seront plus possibles contre des actes
préalables mettant en cause la validité du contrat. Il s’agit selon ces arrê ts des
dé cision relatives à la conclusion du contrat qui ne peut plus faire l’objet d’un REP,
de signer le contrat et enfin du choix du cocontractant. Les tiers pourront faire un
recours en contestation de validité du contrat devant le juge du RPC et pas du juge
du REP.

2. Survie du REP dans le cadre des contrats

Le REP persiste dans le champ qui est à l’é gard des actes dé tachables du contrat.

Quels sont les AAU pouvant faire l’objet d’un REP ?


- Contre les décisions prises par l’assemblée délibérante d’une CT d’avoir
recours à un contrat, par exemple dans le cas d’une délégation d’une activité
de service public.
- Contre certains AAU d’approbation du contrat pour autant qu’il n’émane
pas d’une partie au contrat. Autorité d’approbation ne doit pas ê tre partie au
contrat. On se focalise sur l’acte d’approbation
- Des actes d’exécution du contrat : le REP est toujours possible contre la
dé cision de l’administration de mettre fin à un contrat. la dé cision de
l’administration de mettre fin au contrat : CE Ass., 2 février 1987, Soc. TV6.
Solution qui reste valable. Aujourd’hui : les tiers sont recevables pour
engager un REP contre décisions par lesquelles administration met fin à
l’exécution du contrat.
Mais à l’inverse, solution n’est pas la mê me quand la décision qui est en
cause refuse de mettre fin au contrat : CE sect., 30 juin 2017, Syndicat mixte
de promotion de l’activité transmanche : quand on demande à
l’administration de ré silier un acte parce qu’il est irré gulier, on est face à une
demande qui implique d’apprécier la validité du contrat, et ce n’est pas
possible en REP.
- Le préfet peut toujours faire un REP par la voie du référé préfectoral sur les
actes dé tachables du contrat

B. Le contrat

CE, 1998, Ville de Lisieux : Les contrats d’engagements personnels peuvent faire
l’objet d’un REP.
Les clauses réglementaire des contrats administratifs : cela renvoie aux contrat
concernant la gestion de service public. Mais la clause concerne aussi les usagers du
service public qui sont des tiers au contrat.
Exemple : commune qui a passé un contrat de transport : fré quence des bus, tarif
payé par les usagers… l’effet va au-delà des parties au contrat. Il a autorisé la
possibilité d’invoquer ces clauses à l’appui de recours pour excès de pouvoir formé
par les usagers du service public considéré.
CE, 1906, Syndicat des propriétaires et contribuables du quartier Croix de Seguey
Tivoli : il fallait contraindre la mairie à respecter le contrat de concession.
CE, 1996, Cayzeele : possibilité d’engager un REP contre les clauses d’un contrat

III. Recours de pleine juridiction

Le REP reflue au bénéfice de RPC devant le juge du contrat.

A. Le contentieux de la validité
1. La validité du contrat

a. A l’initiative des parties

Le juge du contrat ne peut être saisi que par les parties au contrat. Elles ont toujours
disposé es d’un recours en nullité contre le contrat, peu utilisé pendant de
nombreuses anné es parce que les parties n’avaient pas intérêt à demander la nullité
du contrat. Le CE a refondu ce recours à l’occasion d’un arrêt CE, 2009, Commune
de Béziers (1): Soit le recours est engagé par voie d’action devant le juge du plein
contentieux et cette possibilité est possible tout au long de la duré e de vie du
contrat. Soit elle peut avoir lieu par voie d’exception : à l’occasion d’un litige relatif
à l’exécution du contrat, un des partie va mettre en avant l’irré gularité du contrat
pour se libérer de ses obligations. Lorsque dans les deux cas, le juge du plein
contentieux dispose de pouvoirs plus diversifié qu’avant. Il a un panel de pouvoir
qui vont é ventuellement jusqu’à l’annulation du contrat mais passe aussi par des
hypothè ses intermé diaire. Ce pouvoir qu’a le juge s’opè re en tenant compte de deux
exigences :
- Loyauté des relations contractuelles : ce principe interdit à une partie de se
prévaloir d’une erreur dont elle est responsable. La commune de Bé ziers
avait demandé à tenté de se dé tacher du contrat car le contrat avait é té signé
avant la transmission au pré fet. Mais c’est de sa faute. Elle ne pouvait pas se
pré valoir de sa propre turpitude.
- L’objectif de stabilité des relations contractuelles qui dans la mesure du
possible impose la poursuite de l’exé cution du contrat. Dans les hypothè ses
où le juge peut annuler ou ré silier le contrat, ces hypothè ses sont ré duites.
Distinguons deux hypothèses :

- Le recours par voie d’action : partie conteste validité du contrat. Le juge


dispose d’une palette de possibilité : il peut dé cider de la poursuite de
l’exécution du contrat en dépit de la présence d’une irrégularité si cette
irré gularité est mineur ou peut faire l’objet d’une ré gularisation. Il peut si
l’intérêt général ne s’y oppose pas mettre fin au contrat soit pour l’avenir
(résiliation) soit en cas d’irré gularité s graves (annulation rétroactive). Une
irré gularité grave renvoie à des hypothè ses ciblé s par la jurisprudence : le
contrat a un contenu illicite : un contrat confé rant des missions de police est
illicite, ou alors le contrat par lequel une personne publique s’engage à faire
exercice de son pouvoir réglementaire dans un certain cas, une clause
portant sur le transfert du lien de propriété du domaine public alors que le
domaine public est inalié nable, clause ayant pour objet amé nagement sur le
territoire est proté gé . L’existence d’un vice d’une particulière gravité dans
lesquelles les parties ont donné leur consentement.
- Contestation par voie d’exception : litige entre parties, on va devant juge du
contrat, et celui qui n’a pas respecté ses obligations peut se prévaloir d’un
manquement de son cocontractant.

b. A l’initiative des tiers

Avant Tropic Signalisations 2007, la contestation du contrat par les tiers n’était pas
possible, seuls les actes dé tachables é taient contestables par voie du REP.
2 arrêts initient le changement :
- CE, société Tropic Signalisations 2007
- CE Ass., 4 avril 2014, Département de Tarn-et-Garonne.

● Qui peut engager cette action en contestation de validité ?


Tous les tiers. Mais les modalités de recevabilité de cette action dépendent de la
qualité des tiers :

- Les tiers privilégiés : préfet, et membres de l’organe délibérant de la


collectivité publique en cause, ont un accè s privilé gié au juge, notamment
concernant les conditions de recevabilité . Leur simple qualité leur suffit pour
engager cette action.
Dans son arrêt CE, Danthony 2022, le Conseil d'É tat a refusé d’étendre cette
qualité privilégiée à un membre d’un conseil d’administration partie au
contrat.

- Les autres tiers ont des conditions de recevabilité drastiques, ils doivent
dé montrer que ce contrat est susceptible de léser leurs intérêts de façon
suffisamment directe et certaine. Ici, inté rê t à agir est donc appré cié
strictement.
□ La simple qualité de concurrent potentiel ou é vincé ne suffit pas pour ê tre
recevable à engager une action en contestation de validité du contrat. Il faut
dé montrer que la conclusion du contrat lèse directement un intérêt
économique du concurrent é vincé ).

● Dans quel délai ?


Délai de 2 mois à compter des mesures de publicité du contrat. pour les tiers
privilé gié s, c’est 2 mois à compter de la dé libé ration mais pour les pré fet c’est 2
mois à compter de la dé libé ration.

● Quels sont les moyens invocables par les tiers ?


- les tiers privilé gié s peuvent se prévaloir de tout moyen contre le contrat, tout
motif d’irré gularité du contrat
- Les autres tiers notamment les concurrents é vincé s, ne peuvent invoquer
que les vices qui sont en rapport direct avec l’intérêt dont ils se prévalent
ou les vices d’une gravité telle que le juge devait les relever d’office (ordre
public) Exemple : manquements aux rè gles relatives à la passation du
contrat, et notamment les rè gles qui sont en rapport direct avec son
é viction.

● Quels sont les pouvoirs du juge confronté à cette action des tiers ?

Le juge peut adapter sa réponse à la nature de l’irrégularité. Une seule chose


disparait : la loyauté contractuelle. Mais il peut dé cider poursuite du contrat quand
irré gularité est minime, il peut dé cider la poursuite de l’exécution du contrat sous
réserve de la prise de mesures de régularisation par les parties, il peut quand
l’irré gularité est grave, soit prononcer l’annulation du contrat pour l’avenir
(résiliation simple), soit prononcer l’annulation rétroactive du contrat, mais
toujours en tenant compte de l’intérêt général.

Exemples :
CE, 13 mars 2019, SAGEM : Annulation du contrat pour irrégularité grave : le juge
a constaté des manquements graves aux règles de publicité et de mise en
concurrence, et que ces manquements ré vé laient une volonté de la personne
publique de favoriser un candidat au dé triment des autres.

● Action qui tend à la ré siliation du contrat : cas du référé suspension


Administration refuse de résilier un contrat irrégulier CE Sect., 30 juin 2017,
Synd. mixte de promotion de l’activité transmanche : Conseil d'É tat a pré cisé les
moyens qui peuvent être invoqués par le requérant au soutien de cette action
devant le juge du contrat. 3 moyens peuvent ê tre soulevé s par les tiers.
- un moyen tiré de ce que la personne publique contractante était tenue de
mettre fin à l’exécution du contrat du fait de dispositions lé gislatives
applicables au contrat en cours,
- un moyen tiré de ce que le contrat est entaché d’irrégularités de nature à
faire obstacle à la poursuite de son exécution et que le juge devait relever
d’office,
- un moyen tiré de ce que l’exécution du contrat est manifestement contraire à
l’intérêt général.

Mais le requérant ne peut pas se prévaloir de l’irrégularité relative aux conditions


ou à la forme de la décision de refus de résiliation. Et le requé rant privilé gié doit
dé montrer un vice en rapport direct avec ses intérêts. Le juge saisi appré cie la valeur
des moyens. s’il considè re que la dé cision de refus de ré siliation du contrat ne porte
pas atteinte à l’inté rê t

2. La validité des mesures d’exé cution du contrat


Ici, contestation des mesures d’exé cution des contrats par l’une des parties.
Jusqu’en 2011, pas de possibilité pour les parties d’obtenir exécution du contrat. Le
litige se ré glait sur le terrain indemnitaire en engageant la responsabilité de
l’administration.
Puis : CE, 21 mars 2011, Commune de Béziers (« Béziers 2 ») : Conseil d'É tat précise
que le cocontractant de l’administration peut contester la validité de la décision de
résilier un contrat administratif, et il peut demander, si la ré siliation est illé gale, que
soit ordonnée à l’administration la reprise des relations contractuelles.
□ Cet arrê t marque une rupture, car avant, le juge administratif devait toujours
respecter l’administration et de ne pas lui imposer l’exé cution d’un contrat
qu’elle ne veut plus exé cuter. Et avec cet arrê t, le juge peut théoriquement
ordonner la reprise des relations contractuelles. Et il est possible d’assortir la
contestation de la validité d’un référé-suspension (juge va prescrire la
suspension de la dé cision de ré siliation le temps de statuer).

Comment le juge statue sur la validité de la résiliation unilatérale d’un contrat administratif
?
Le juge administratif doit avoir 2 considérations pour le guider sans sa réflexion sur
une telle demande :
- Gravité des vices qui entachent la décision de résiliation : seuls les vices
graves concernant la ré gularité de la dé cision sont susceptibles de justifier la
reprise des relations contractuelles. Si vice n’est pas grave, le litige se rè gle
sur le terrain indemnitaire.
- Prise en compte des intérêts en présence : la reprise des relations
contractuelles ne doit pas porter une atteinte excessive à l’intérêt général, ni
mettre en cause les intérêts des tiers

Que peut-il décider ?


- Annulation de la décision de résiliation. Cela entraîne la reprise des relations
contractuelles à la date que le juge dé termine.
- Indemnisation du cocontractant de l’administration (= alternative)

Mais pour les autres mesures d’exécution du contrat (autre que la ré siliation
unilaté rale) le contentieux ne peut se régler que sur le terrain indemnitaire :
dommages et inté rê ts.
Arrêt CE, 13 juillet 2022 (renouvellement du contrat) : illustre cette idée, Conseil
d'État rappelle la solution de Béziers 2, et on se demande si le refus de l’administration
de renouveler un contrat peut être contesté ? Est-ce que cette décision de refus peut être
annulée ? Le régime Béziers 2 est-il transposable à l’hypothèse de ne pas renouveler le contrat
? Conseil d'É tat dit non. Le régime applicable ici est celui des autres mesures
d’exécution du contrat = terrain indemnitaire.
B. Le contentieux de la réparation

Plusieurs types de responsabilités peuvent être engagées dans le contexte du


contrat et des relations contractuelles :
- Responsabilité contractuelle pour faute
- Responsabilité contractuelle sans faute : hypothè ses dans lesquelles
administration a utilisé ses prérogatives au sein du contrat (modifier le
contrat ou y mettre fin pour motif d’inté rê t gé né ral), et ici le cocontractant a
droit à réparation intégrale de son préjudice. Termes de l’indemnité sont
parfois pré vus par le contrat.
- Responsabilité quasi-contractuelle ou quasi-délictuelle : hypothè se où le
juge constate des irrégularités dans le contrat et un vice d’une telle gravité
que le contrat s’en trouve nul, le juge met fin au contrat. Demandes de
ré paration ne peuvent plus ê tre fondé es sur le contrat car contrat est nul,
donc on est sur le terrain de la responsabilité quasi-contractuelle : ex:
enrichissement sans cause de l’administration.
- Responsabilité délictuelle : hypothè se d’un tiers qui souhaite obtenir
réparation (ex: concurrent illé galement é vincé ).

PARTIE 4 : Les finalités de l’action administrative

- L’activité de service public est celle qui correspond à fournir des


prestations à la population.
- L’activité de police administrative est celle consistant à assurer le maintien
de l’ordre public mais aussi de l’ordre social.

● Remarques

- Les interrogations sur les hostilités de cette dualité entre service et police.
Des auteurs considè rent qu’il n’y a pas que deux fonctions de
l’administrations. Un auteur (Truchet) dé fendu une troisième fonction qui est
celle de la régulation qui consisterait pour l’Etat à assurer une activité
d’organisation du marché et de l’activité économique. Il la particularise parce
qu’elle s’opè re selon des modalité s spé cifiques via l’action des AAI et elle
mobilise des formes juridiques atypiques de soft law.
Il existe à cô té du service public le cas du pouvoir réglementaire. Celui-ci
repose essentielle sur le Premier Ministre et sur les décret pris pour l’exécution
des lois…
La gestion du domaine public n’est pas une expression courant. C’est cette
gestion par les personnes publiques qui sont affectées au service public ou
mis à la disposition du public. Cette question du domaine public relè ve du
droit administratif des biens.

- Cette distinction renvoie à une histoire de ce qu’aurait pu être l’action de


l’administration depuis 2 à 3 siècles. C’est l’idée que l’Etat du XIXème siècle a
pour seul objet d’assurer le maintien de l’ordre public. L’outil de cette
fonction est la police administrative. Cela renvoie à la période de l’Etat
gendarme. Avec la progression des idées socialistes, l’intervention de l’Etat
devient de plus en plus interventionniste et providence : l’idée de service
public est l’expression juridique même de cet forme d’Etat. Tradition
interventionniste de l’Etat en France qui remonte bien avant le XIXème siècle
(Colbertisme…) La distinction entre Etat gendarme et Etat providence existe
de loin mais doit être nuancée.

- Il ne faut pas surestimer la correspondance entre un type de fonction et un


type de modalité d’exécution de ces fonctions. Souvent, quand on parle de
police, on pense à l’activité de réglementation. Pour les services publics, on
parlerait plus de prestations. Cette correspondance est souvent juste mais
relativisé e : l’activité de police peut aussi passer par des prestations d’un
service (cas des activité s de secours comme la sé curité civile, les SDIS…) La
police est une activité de service publique en elle-mê me. L’activité de service
public ne chasse pas la police. quand une autorité à en charge une activité de
service publique, elle devra assurer une activité de police administrative
pour réguler et réglementer l’usage ou les conditions du service public.
Exemple : le pré sident du l’Université a une activité de police administrative
via des mesures de ré glementation pour assurer la police au sein de ce
service public.

Chapitre 1 : l’activité de service public

Remarques introductives
On est dans un domaine entre juriste et non-juriste. La ré ponse n’est pas la mê me
entre ces deux types de personnes. Ces diffé rences sont lié s à la polysémie. Jacques
Chevalier a mis en valeur les 3 dimensions de ce service public :
- Institutionnel : pluralité d’institutions avec leurs biens et leurs personnels
- Idéologique : on légitime l’action de l’administration. Cette action est
lé gitime car on pourvoir au service public et au besoin de l’administration.
- Juridique : c’est une mission d’intérêt général assuré de manière directe ou
indirecte par une personne publique. Il y a un ré gime spé cifique et il en
ré sulte une ré partition ces compé tences juridictionnelles. La pré sence du
service public est le critè re pour dé terminer l’office du juge.

Exemple entre ces 3 dimensions :


L’é mergence à la fin des années 70 de la remise en cause néolibérale de l’action de
l’Etat partant du service public. Cette critique né olibé rale et ces politiques ont eu
un impact sur ces 3 dimensions du service public :
- Idéologique : la ré fé rence au service public lé gitime l’action de l’Etat. Mais
cette repré sentation est critiquée et remise en cause par le néolibéralisme. On
met en avant l’idé e de concurrence à la liberté d’entreprendre des individus.
Cette action serait aussi inefficace.
- Institutionnel : phé nomè ne de contraction de la sphère publique. Des
activité s de service public ne le sont plus (Air France é tait un service public,
EDF é tait un EP, Orange anciennement France té lé com)
- Juridique : on a perçu les influences des politiques néolibérales dans le
ré gime des services publics.

□ Section 1 : Définition de l’activité de service public

Le service public est une l’activité d’intérêt général assuré e directement ou


indirectement par une personne publique.
Elle ne pose pas de problème quand elle est mise en œuvre directement par une
personne publique. Là où apparait la difficulté est lorsque l’activité est prise en
charge par une personne privée. La question qui va se poser est que l’on a une
personne privée qui agit sous le contrô le d’une personne publique : Cette personne
prend-elle en charge l’activité de service public ?
Il arrive que cette qualification soit directement déterminée par la loi. Elle est
parfois lé gislative. Un exemple qui est le plus é vident est l’art. 2 loi du 2 juin 1891 :
qualifie de service public l’activité des socié té s de course de chevaux.

Ces hypothèses ne sont pas majoritaires. C’est sur la base d’un critè re
jurisprudentiel que se dé finit le service public et donc sur celle du CE. Cette
qualification s’opère en l’application de critères cumulatifs, un troisiè me pouvant
le conforté . Arrêt CE, Sect., 2007, APREI :
- 1. « Une personne privée qui assure une mission d’intérêt général sous le
contrôle de l’administration doté de prérogatives de puissance publique assure
l’activité de service public ».
- 2. Mais il envisage aussi le cas où la personne privée n’a pas de prérogatives
de puissance publique : elle peut aussi faire partie de l’action du service
public sans ces pré rogatives. Une personne peut ê tre regardé comme gé rant
du service public par un faisceaux d’indices : activité d’intérêt général,
condition de sa création, conditions de son fonctionnement et organisation,
au regard des mesures prises pour voir si l’objectif est atteint, alors mission
de service public.

Exemple :
Arrêt de CAA : mise en cause d’une é cole privé e d’osté opathie. Est-elle partie du
service publique ? Oui car pas de pré rogative de puissance publique mais existence
de faisceaux d’indices : contrô le de l’administration, contenu de la formation
dé terminé par la ré glementation…

I. Une activité d’intérêt général

On est face à une notion incertaine. Deux types d’approches possibles sur le terme
d’inté rê t gé né ral :
- Utilitariste : l’inté rê t gé né ral est l’addition des intérêts particuliers
- Volontariste : ce sont les instituions de l’Etat

Approches :
- Objective : des activités sont par nature des activités d’intérêt général.
D’autres ne le sont pas
- Subjective : dé pend d’abord d’un choix politique fait par le lé gislateur ou
par l’administration selon les cas.
□ C’est l’approche subjective qui domine

TC, 1988, Villes de Cannes / Ponce : le TC a considé ré que le palais des festivals de
Cannes est une activité d’intérêt général car elle participe du développement de la
culture et du tourisme.
CE, 2000, Plage ‘‘Chez Joseph’’ : l’exploitation d’une plage sous le contrô le de la
commune d’Antibes a la caractère d’un intérêt général car participe au le
développement de la station balnéaire.

La limite de cette qualification est lorsque l’intérêt de cette activité est essentiellement
patrimonial : CE, Sect., 1999, Rolin : La FDJ est elle une activité d’intérêt général ? Non
selon le CE car le simple fait qu’il en résulte pour l’Etat d’importantes recettes
fiscales ne permet pas d’en faire une activité d’intérêt général.

□ Section 2 : une activité rattachée à une personne publique

Le rattachement à une personne publique est assez floue: cela se fait directement
ou indirectement. On é carte le fait que c’est la personne publique qui fait elle mê me
l’activité de service public. La question est de savoir s’il existe un lien de rattachement ?

Remarques
● La question du rattachement ou non de l’activité d’une entreprise privée au
service public est éminemment politique pour la raison que la maniè re dont
on perçoit ce rattachement, on porte un regard plus ou moins libé rale sur la
maniè re de fonctionner de la socié té . Il y a un enjeu sur la liberté
d’association avec l’Etat qui s’incorpore des activités de service privé. Enjeux
sur le plan politique et juridique : place de la liberté d’association et in fine, le
ré gime est diffé rent : on passe dans le droit public (continuité , laïcité ,
application du CRPA...)

● Les critères pour considérer le rattachement à une personne public :

- Quand la loi procè de elle-mê me à cette qualification. Des dispositions


lé gislatives expriment que tel type d’acticité gè re un service public :
Exemple : les fé dé rations sportives. L’article L131-9 du code du sport pré cise
que les fédérations qui sont des personnes privées participent à la mise en
œuvre de mission de service public.
- Il faut sinon se tourner vers le faisceaux d’indices pour déterminer si l’activité
d’une entité privé est rattaché à une personne publique :
o l’origine de la création de l’entité ou de l’activité,
o le contrôle assuré par la personne publique sur ses organes,
o l’origine des financement de son organisation ou de ses activité s,
o l’é ventuelle mise à dispositions de moyens humains et matériels par
la personne publique,
o la dé tention de prérogatives de puissances publiques.

2 points importants :

L’initiative de la création de l’activité : si elle a é té créée par une personne


publique, alors on peut penser qu’elle joue un rôle de service public.
Juridiquement, c’est un contrat par lequel une personne publique confie à la
personne privé e la concession d’un service public. Ce critè re n’est pas
indispensables.

CE, 2007, Commune d’Aix en Provence : permet de constater qu’il peut y avoir
service public et rattachement à une personne publique sans que la personne
public soit en cause. Le festival d’Art lyrique d’Aix en Provence poursuit une
mission de service public sans avoir é té cré é par la commune d’Aix en
Provence. C’est une initiative privée. Le festival est-il considéré comme un service public ?
le CE fait é voluer sa jurisprudence dans cet arrê t : il rappelle l’hypothèse classique
mais ouvre une brèche pour la qualification de service public : une activité peut
né anmoins se voir reconnaitre le caractère de service public si « une personne
publique en raison de
l’intérêt général qui s’y attache et de l’importance qu’elle revêt à ses yeux, exerce un
droit de regard sur son organisation, et le cas échéant lui accorde des financement »
Le festival gé ré par une association dont les organes sont composée de représentants
des collectivités publiques (dé partement, ré gion, commune) et le financement de
cette manifestation est assurée par des personnes publiques. Le CE constate aussi
qu’il y a des aides en nature fourni par la commune comme des locaux mis à
dispositions.
Une activité publique se retrouve ainsi lié e au service public. Ces critères ne sont pas
cumulatifs.

Le CE a mis en œuvre cette jurisprudence dans un arrê t CE, 2016, SARL


Cathédrales d’Images : il est en cause la cré ation d’un spectacle audiovisuel sur le
terrain appartenant à la commune. Le spectacle doit il être érigé en service public ?
Situation similaire mais réponse différente. On retrouve les mê mes critè res. La
commune n’avait aucun rôle dans la programmation et la tarification de l’activité.
Elle n’avait pas le droit de regard sur l’organisation et le fonctionnement de la
socié té qui assurait l’activité . La commune ne pouvait être regardée comme ayant
organisé un service public à l’activité de cette société.

Sur le critè re de la prérogatives de puissance publique : il a longtemps été


important pour considérer la mission de service public : CE, Sect., 1963, Narcy :
personne privé e qui assure la gestion d’une activité de service public doit ê tre dotée
de prérogatives de puissance publique
Ce caractère a disparu à partir de l’arrê t CE, 1990, Ville de Melun : une activité peut
prendre en charge une activité de service publique alors mê me qu’il n’y a pas de
pré rogatives de puissances publiques.

□ Section 2 : l’organisation du service public

I. La création de l’activité de service public

A. La compétence

Qui peut organiser les services publics ? Quelles sont les autorités compétences pour créer des
délégations de service public ?

1. Echelon national

Le cadre général a été rappelé dans un arrêt CE, 1997, Ordre des avocats à la cour
d’appel de Paris : Le CE s’est fondé sur les articles 34 et 37 de la C° qu’il appartient
au pouvoir réglementaire de fixer l’organisation d’un service public de l’Etat sous
réserve qu’il ne soit pas porté atteinte aux matières réservées en principe au
législateur.

Quels sont les titres de compétence du législateur pour créer des activités de service public
? C’est l’art. 34 de la C° : il renvoie à la loi d’organiser les différentes activités de
service public en rapport avec les matières énumérées.
Exemple de l’arrê t pré cé dent : création de Légifrance avec la cré ation d’un service
public de base de donné es juridiques. Cette cré ation dé cidé e par dé cret a fait l’objet
d’un REP. L’Ordre des avocats a pointé l’incompé tence du pouvoir ré glementaire.
Mais le CE é carte ce moyen car aucun alinéa ne prévoit ce service public dans
l’article 34 de la C°.

Lorsque l’activité de service public entraîne la création d’une nouvelle catégorie


d’EP, c’est le législateur qui est compétent. L’article 34 le précise explicitement.

2. Echelon local

Assez simple : l’organe délibératif de la collectivité en cause est compé tent : conseil
ré gional, dé partemental ou municipal

B. La création obligatoire ou facultative ?

1. La cré ation obligatoire

a. Au niveau national

Le plus inté ressant est lorsque la création semble être imposé par les textes
constitutionnels. Cette idé e a é té é voqué e par le CC dans une DC, 25 -26 juin 1986,
Loi de Privatisation : la nécessité de certains services publics nationaux découlent
de principes ou de règles de valeur constitutionnels. On en a dé duit l’existence des
services publics constitutionnels, dont la cré ation s’impose en application de la
Constitution.
Difficulté est que CE n’a pas pré cisé les activité s de service public dont la cré ation a
é té imposé par le service public constitutionnel. On est venu mettre dedans le
service public régalien (justice, police, dé fense…) L’autre caté gorie est celle des
services qui répondent aux besoins du Préambule de la Constitution de 1946
(protection de la santé , droit à l’é ducation…)

b. Au niveau local
Il y a aussi des activités qui sont obligatoirement pris en charge par les CT. Il faut
se référer au CGCT qui dé finit les activité s dont les CT sont tenus de prendre en
charge.
Exemple : la commune doit prendre en charge l’assainissement de l’eau, les pompes
funè bres…

2. La cré ation facultative

Sa dé marche de cré ation peut se heurter avec la liberté de cré ation, de liberté de
l’industrie. On est sur un terrain délicat qui a suscité dé bats entre les tenants du
libé ralisme face à ceux de l’interventionnisme de l’Etat. Ce point permet de concilier
les motifs d’intérêt général et de l’autre les libertés économiques. La ré ponse de
savoir si la personne publique peut cré er une activité se retrouve dans la
jurisprudence du CE.
Il y a en droit constitutionnel une jurisprudence CC, 2001, Archéologie préventive :
cas de construction de bâ timent et né cessité de fouilles pré alables si la construction
en met pas en cause la construction des travaux. Le problè me est que l’Etat crée un
EP alors qu’il existait des sociétés privées qui assuraient ces mission d’archéologie
préventives. Les socié té s par l’intermé diaire de parlementaire se sont pré valus une
violation de la liberté d’entreprendre. Le CC a reconnu un problè me au regard de la
liberté d’entreprendre mais que des atteintes sont justifiées par l’intérêt général. En
l’occurrence, le CC a é carté le grief formulé par les parlementaires car la
conservation du patrimoine arché ologiques répond à un besoin d’intérêt général et
la cré ation d’un monopole public se justifiait par la pé ré quation de redevance des
travaux et parce que cet EP avait la possibilité de recourir à des socié té privé s.

Dans quelle mesure une administration peut créer une activité de service public ?
Avec une premiè re approche d’abord sensible à la liberté d’entreprendre, elle s’est
par la suite socialisé e.

Arrêt CE 1901, Casanova : il repose sur l’interventionnisme public. Un mé decin


avait reçu des prestations en nature (cabinet) de la part de la mairie en l’échange de
soins rendus à la population. Cette cré ation a é té contesté e au nom de la liberté
d’entreprendre. Le CE a dit que les communes peuvent dans les circonstances
exceptionnelles intervenir pour procurer des soins mé dicaux aux habitants qui en
sont privé s, or ce n’é tait pas une condition exceptionnelle : le CE a une approche
restrictive.

Mais on observe au dé but du XXè me siè cle la montée en puissance du socialisme


municipal qui voit les communes multiplier la prise en charge d’activité s nouvelles
pour ré pondre aux besoins sociaux de la populations.
CE, Sect. 1930, Chambre syndicale du commerce en détail de Nevers : service
municipal de ravitaillement. Cela n’enchantait pas les commerçants. Le CE pose
cette fois ci un cadre plus souple en précisant que le principe reste le même. Il
pré cise que les communes ne peuvent é riger des entreprise de caractè re
commercial en service public que si, en raison de circonstances particulières de
temps et de lieu, un intérêt public justifie leur intervention en cette matière. Il
n’est plus questions de circonstances exceptionnelles. Il faut dé montrer l’existence
d’un inté rê t public et des circonstances particuliè res de temps et de lieu. Il y a deux
considé rations qui justifient la prise en charge d’activité s nouvelles : un intérêt
public local et la carence quantitative ou qualitative de l’initiative privée.

Exemple : CE, Sect. 1964, Ville de Nanterre : mise en cause de la commune de la


cré ation d’un cabinet dentaire. Le CE a considé ré qu’il y avait un intérêt public local
(plus grand accè s de la population au soin dentaire) et carence de l’initiative privée
(problème que les tarifs proposés par les dentistes à Nanterre étaient trop chers et pas
tous remboursé s par la sé curité sociale) Il y avait des circonstances particulières de
temps ou de lieu justifiant la cré ation du cabinet dentaire.

Le 3e temps de la jurisprudence n’est pas une rupture mais une reformulation


générale. Arrê t CE, Ass., 2006, Ordre des avocats du barreau de Paris : le CE va
d’abord opé rer une distinction entre deux types d’activité s :
- Celles nécessaires à la « réalisation de mission de service public dont les
personnes publique sont investies et pour lesquelles elle bénéficient de
puissance publique »
- Les activités économiques.
□ Deux sé ries activité s qui ré pondent à deux ré gimes.

1. Les activité s né cessaires à la mission de service

public

Pour celles né cessaires à la mission de service public dont les personnes publique
sont investies et pour lesquelles elle bé né ficient de puissance publique, on ne peut
pas contester la prise en charge de ces activités en se fondant sur la liberté de
commerce et de l’industrie. Ce sont des activité s non é conomiques des personnes
publiques.

Arrêt CE, Ass., 2006 Ordre des avocats du barreau de Paris : mission d’appui à la
réalisation des contrats de partenariats. Cette cré ation a posé des problè mes car
cette activité est plus ou moins ré alisé e par des acteurs privé s comme les cabinets
d’avocat. Mais le CE dit que cette activité se rattache à la mission de l’Etat de veiller
à la bonne application de la règle de droit qui est une mission administrative donc
ce n’est pas une activité é conomique. On est sur un terrain assez instable.
Arrêt CE, 2017, Perez et Ordre des Avocats de Paris : configuration proche. Il é tait
en question la cré ation par le ministè re de l’é conomie d’un mé diateur des
entreprises dont le but é tait de favoriser la résolution amiable des litiges en matière
de marché public. Là encore, ce n’a pas enthousiasmé l’ordre des avocats de Paris
qui exercent dé jà cette activité . Le CE é carte le recours car l’Etat s’é tait borné à
mettre en œuvre la mission gé né rale des MARL, corolaire de la bonne
administration de la justice. Cela n’empê châ t pas non plus de continuer à recourir à
un avocat. Il n’y a pas d’intervention sur un marché selon le CE.

D’autres jurisprudences permettent d’affiner le régime de ces activités non


économiques : certaines activités peuvent ê tre librement cré é es par les collectivité s
publiques sans que puisse leur ê tre opposé le principe de liberté du commerce et de
l’industrie (activité s à forte dimension sociale notamment)
- CE, Ass., 1933, Blanc : cré ation de bains douches a é té considé ré par le CE
que cela é tait une liberté de l’administration car justifié par l’hygiène public.
On ne peut pas lui opposer la liberté de l’industrie.
- CE, Sect. 1970, Commune de Montmagny (commune a mis en place un
service municipal de consultation juridique, qui s’adressait à des personnes
qui n’ont pas forcé ment les moyens d’avoir un avocat). Donc la création
d’activités à vocation sociale ne peut se voir opposer le principe de liberté du
commerce et de l’industrie.

Possibilité pour les personnes publique de de pourvoir elle-même à ses propres


besoins, quand bien mê me ils pourraient ê tre assuré s par une entité privé e.
- CE, 1970, Unipain : boulangerie militaire dans une caserne. Il a avait décidé
que son activité s’étendrait aux établissement pénitentiaires voisons. Il est
loisible pour la personne publique de pourvoir à ses propres besoins même
s’il existe des opérateurs privés
- CE, 2011, API : repose sur les mêmes principes : des mairies proposent de faire
les photos d’identité pour les personnes qui font leur passeport/CNI ce qui
é tait une concurrence pour les photographes. Le Conseil d'É tat considè re que
cette prestation fournie par la mairie ne pouvait ê tre contesté e au regard de
la liberté du commerce et de l’industrie, et du droit de la concurrence car les
personnes publiques peuvent décider d’exercer elles-mêmes les activités
qui découlent de la satisfaction de leurs besoins. Cette jurisprudence
contribue à é largir la possibilité pour les personnes publiques de prendre en
charge ces activité s.

2. Les activité s intervenant sur un marché é conomique


Le 2e temps est celui du cas où elles interviennent sur un marché . C’est lorsque les
personnes publiques souhaitent prendre en charge des activités qui s’exercent sur
un marché.
Le CE dans l’arrêt de 2006 Avocats de paris pré cise que si des personnes publiques
souhaitent prendre en charge de telles activités, elles doivent agir dans les limites
de leur compétences mais é galement que cela soit justifié d’un intérêt public, lequel
peut ré sulter de la carence de l’initiative privé e.
Il faut que la collectivité soit compétente, mais il faut aussi que la situation justifie
d’un intérêt public qui peut notamment ré sulter de la carence de l’initiative privé e
(carence ne semble plus particuliè rement né cessaire, donc forme de rupture dans la
jurisprudence, mais on peut plutô t y voir une continuité )
Bertrand Seiller : le Conseil d'É tat présente la carence de l’initiative privée comme «
un motif parmi d’autres qui permettent de fonder l’intervention de la personne publique : tout
intérêt public est désormais susceptible de fonder cette intervention »

Exemple : CE, 2010, Département de la Corrèze : dé partement vieillissant, qui a fait


le
choix de mettre en place un service de téléassistance aux personnes â gées et
handicapées, pour leur permettre d’alerter lorsqu’elles sont en difficulté. Type de
prestation qui existent déjà chez des opérateurs privés. Des collectivité peuvent-elle
mettre en place cette activité ? Le Conseil d'É tat dit que oui, « même si des sociétés privées
offrent des prestations de téléassistance, la création de ce service, ouvert à toutes les personnes
âgées ou dépendantes, indépendamment de leurs ressources, satisfait aux besoins de
la
population et répond à un intérêt public local » L’élément clé est que : «
indépendamment de leurs ressources » : ceux qui en bénéficient sont d’abord ceux
qui n’ont pas accès à l’initiative privée en raison de leurs moyens, donc ici carence
qualitative de la prestation privé e.

Autre jurisprudence qui é tend la possibilité pour une administration d’intervenir


sur un marché : la liberté du commerce et de l’industrie n’est pas opposable à une
activité d’une personne publique lorsqu’elle constitue le complément d’une
activité de service public existante, et y compris lorsque cette activité annexe a pour
objectif de permettre l’équilibre financier de l’activité initiale en question.

Exemple :
- CE, Sect., 1959, Delansorme : parking municipal gé ré par la commune. Elle
dé cide de rajouter une station essence. Le CE a dit qu’elle pouvait car
permettait d’assurer l’attractivité du parking municipal et de permettre à ne
pas gêner la circulation en laissant les automobiles sur la voie publique
- CE, 1954, Dame Berthod : service public des pompes funèbres (activité
principale), à laquelle est associée une activité de vente de fournitures
funéraires, que la commune met en place en complément, et concurrence ainsi
le marché . Mais possible car l’activité est annexe à une activité de service
public déjà existante.

II. Les modalités de gestion des activités de service public

Soit la prise en charge directe par la personne publique, soit elle est confiée à un
opérateur privé.
La personne publique n’a toujours pas la liberté de choix dans la matière : elle doit
parfois faire des activités directes sans déléguer des activités. C’est le cas pour les
activités relevant de la police où le recours à des organisations privé s n’est pas
possible (CE, Ass., 1932, Ville de Castelnaudary)

A. La gestion directe

Cela recouvre 3 formes juridiques plus ou moins é loigné es de la personne publique :


- La régie simple : l’activité est régi directement par la personne publique avec
ses propres moyens humains, financiers

- La régie directe : ré gime de gestion qui ne concerne que les CT et le EPCI. Ce


sont les hypothè ses où il y a une automatisation de la gestion du service. Elle
peut prendre deux formes : la forme de la régie autonome (le service est doté
d’une autonomie financière avec son propre budget annexé à celui de la CT)
ou celle de la régie personnalisée (le service a la personnalité juridique)

- La gestion par un organisme spécifiquement crée pour assurer cette gestion.


La personne publique va créer une société dont l’objet exclusif va être la
prise en charge de l’activité. Pour qu’il y ait gestion directe par la personne,
son objet doit ê tre la gestion de ce service et qu’à l’é gard de cet organisme, la
personne publique opère un contrôle comparable à celui qu’elle exerce sur
ses propres services.

En droit de l’UE et en droit de la concurrence, lorsqu’une personne publique


souhaite confier l’activité à un tiers, il faut passer par la case de publicité et de mise
en concurrence. Juridiquement, ce n’est pas la personne publique mais bien une
autre entité . Mais cela reste de la gestion directe car elle garde la maitrise de son
organisation et de son fonctionnement.
Ces 3 hypothèses sont issues de l’arrêt Aix en Provence.

B. La gestion indirecte par un tiers


Comment confier à un tiers la gestion d’un service ? Qui peut bénéficier de la dévolution de
l’activité.

1. Les modalité s

CE Sect., 6 avril 2007, Commune d’Aix en Provence : lorsqu’il est question de confier
à un tiers le soin de prendre en charge l’activité de service public, le mode normal
sera un contrat (concession ou marché public), et règles de concurrence devront être
respectées.

Mais dérogations existantes :


- il arrive que le législateur prévoit une dévolution par des AAU et non par
des contrats.
Exemple : pour le sport, un arrêté ministériel prévu par le code du sport
permet de confier le soin à des fédération sportives de prendre en charge des
missions de service public.
- Les CT peuvent se passer d’un contrat lorsque « eu égard à la nature de
l’activité en cause et aux conditions particulières dans lesquelles il l’exerce, le tiers
bénéficiaire ne saurait être regardé comme un opérateur sur un marché concurrentiel »
(Commune d’Aix en Provence) L’activité en cause n’est pas économique
donc pas de concurrence nécessaire, donc pas de contrat, et cela a vocation à
jouer pour les services publics sociaux, et culturels.

2. Les bé né ficiaires de la dé volution

Ce sont les personnes privées (socié té s commerciales dont celles publiques, des
associations…)
La question s’est posé pour savoir si une personne publique peut se voir confier par une
autre personne publique la gestion d’un service public ?.
Le problème est celui de la concurrence. Le CE a du répondre à cette question par un
avis puis des arrêts. CE, Ass. 2014, Soc. Armor SNC qui fixe le cadre juridique assez
fiable sur ces questions là . Pour comprendre l’arrêt, il faut comprendre deux points
: une personne publique peut-elle candidater à un marché public ? Si oui, selon quelles
modalités ?
Aucun principe ou texte ne fait obstacle à ce qu’une CT ou un EPCI se porte
candidat à l’attribution d’un contrat de la commande publique. Ils ne peuvent
présenter que leur candidature que si elle répond à un intérêt public. Il ajoute que
cette candidature doit constituer le « prolongement d’une mission de service public
dont la personne publique a la charge dans le but notamment d’amortir des
équipements, de valoriser les moyens dont dispose le service ou d’assurer son équilibre
financier et sous réserves qu’elle n’en compromettent pas l’exercice de cette mission ».
Dans cette affaire : le dé partement qui avait proposé un marché pour des opé rations
de draguage de riviè res et de fleuves. Un département voisin avait ce matériel. Un
département pouvait-il candidater à ce marché ? Le CE répond que oui mais il faut un
intérêt public. Cela ne doit pas non plus fausser la concurrence et le prix proposé
par la personne publique doit ê tre dé terminé en intégrant tout les coups direct ou
indirect concourant à sa formation sans que la personne publique bé né ficier d’un
avantage dont elle jouit pour assurer par ailleurs sa mission de service public.

□ Section 3 : le régime des activités de service public

Il n’y a pas un régime mais des régimes d’activité de service public. Pour rendre
compte de la diversité de ce ré gime juridique, il faudra distinguer les facteurs de
variation et ceux d’unité des ré gimes de service public.

I. Les facteurs de variation de régime de service public

A. La distinction entre personne publique et personne privée

En fonction de la nature de l’activité de service public, le critère organique est très


présent. La question de savoir sur une personne publique ou une personne privé e va
jouer en matiè re fiscale.
Cela a aussi des conséquences sur le régime affecté au service pour la mise en
œuvre du service puisque les personnes publiques bé né ficient d’un privilège : les
biens des personnes publiques sont insaisissables.
Le statut de agents qui participent de l’activité de service public varie en fonction
de si c’est une personne publique ou privé e. Ce sont pratiquement tous des agents
publics ou des agents privé s. La considé ration de la qualité du statut de la personne
qui prend en charge le statut est important.

B. La distinction entre les SPIC et le SPA

Cette distinction est lié à l’extension des activités des personnes publiques au
début du XXème siècle qui é taient jusqu’alors prises en charges par des personnes
privé es. Il est apparu assez normal qu’elles soient soumises au même droit des
entreprises privés.
L’arrêt qui consacre cette distinction est TC, 1921, Société Commerciale de l’Ouest
Africain (dit Bac d’Eloka) Il s’agit d’un bac qui lors d’une traversée va couler. Action
en responsabilité mais quel juge va connaitre de l’action en responsabilité de ce drame ?
Le TC va dire la chose suivante : il se base sur l’idée que lorsque l’Etat gère ce bac, il
agit come une entreprise privée donc doit être soumis au droit privé : « en effectuant,
moyennant rémunération, les opérations de passage de piétons et de voitures d’une rive à
l’autre du lac, la colonie de Côte d’Ivoire exploite un service de transports dans les
mêmes conditions qu’un industriel ordinaire donc il n’apparient qu’à l’autorité
judiciaire de connaitre des conséquences dommageables de l’accident invoqué » C’est
l’acte de naissance de la notion de SPIC qui va venir se différencier des SPA.

Comment distingue-t-on ces deux types de service public ?

1. La qualification

a. Par la loi

En la matiè re, comme en matiè re de contrat, il existe des qualifications législatives.


Le lé gislateur va qualifier une activité de SPIC ou de SPA. Il va faire un choix :
ce sont des considérations pragmatiques. Lorsqu’il donne la qualification de SPIC, il
lui donne un régime de droit privé plus souple en matière de gestion. Les
personnes qui y travaillent sont des salariés soumis au droit du travail.

Exemples :
- Art L 342-13 Code du tourisme : « l’exploitation des remontées mécaniques et des
pistes de stations de ski est un SPIC » Cette question é tait peu é vidente à
l’origine: beaucoup de stations de ski é taient financé es par l’argent public
donc devraient plutô t ré pondre au modè le du SPA, mais ici législateur pose le
fait que ce sont tous des SPIC.
- Art L2224-11 CGCT : « Les services publics d’eau et d’assainissement sont
financièrement gérés comme des SPIC » Ils sont financés par les usagers via une
redevance et non par l’impôt.

Il arrive que le juge s’émancipe de ces qualifications législatives : le juge peut


considé rer que certaines activité s de SPIC relè vent d’activité de service public.
Exemple : TC, 29 décembre 2004, Blanckeman : VNF (voies navigables de France) est
un EPIC (prend en charge un SPIC). La loi dit que VNF est un SPIC. L’activité de cet
EPIC relève en principe de la compétence du juge judiciaire. Mais TC ajoute qu’en
revanche, « celles de ses activités qui, telle la réglementation, la police, et le contrôle,
relèvent des prérogatives de puissance publique, sont soumises à la compétence du juge
administratif ». Donc une qualification opérée par la loi n’a pas forcément pour
consé quence que l’ensemble des activité s de cette entité sont de la compé tence du
juge judiciaire. Une partie des activité s sont commerciales mais une partie de
l’activité relè ve de pré rogatives de puissances publiques donc relè ve du juge
administratif. La qualification législative d’EPIC ne chasse pas de celle de SPA.

b. Par la jurisprudence
CE Ass., 1956, Union syndicale des industries aéronautiques (USIA) : arrê t qui fixe
des critères jurisprudentiels pour la distinction SPA / SPIC : pour qu’une activité
soit considé ré e et é rigé comme une activité de SPIC, il faut 3 critères réunis et
cumulatifs :

- L’objet : L’activité en cause doit ê tre une activité de service ou de production


susceptible d’être prise en charge par une personne privée.
Arrêt TC 2005 Alberti Scott : mise en cause d’une activité d’eau qui est
l’activité de service de production qui peut ê tre faite par une personne privé e
donc c’est un SPIC.
Arrêt TC, 1981, Crouzet : l’activité de contrôle aérien n’est pas assuré par
des personnes privées. C’est un SPA.

- L’origine des ressources : il faut une redevance pour service rendu en


contrepartie d’un prix.
Arrêt TC, 1994 Synd. Mixte de l’équipement de Marseille : é tait en cause un
centre portuaire d’accueil routier. Quelle est la nature de cette activité ? C’est un
SPA car son financement est assuré par des subventions de la ville de
Marseille et de la CCI

- Les modalités d’organisation et de fonctionnement du service : existence


d’un faisceaux d’indices qui doivent aller dans le sens du SPIC : le régime
comptable, la détention ou l’utilisation de prérogatives de puissances
publiques, le statut des personnels… ces éléments sont pris en compte par le
juge pour savoir si l’on est dans le cadre d’un SPIC se rapprochant du
fonctionnement d’une entreprise privée.
Exemple : Arrêt TC, 2017, Scté Centre Léman : ville exploite, prè s d’un lac,
un centre aquatique : SPA ou SPIC ? Doutes importants existaient, TC a
considé ré que ce n’était pas un SPIC au regard des indices : le fait que les
agents du service é taient sous l’autorité du chef du service des sports de la
commune, le fait que le gymnase et le centre aquatique é taient rattachés au
pôle culture de la commune.

Il existe des EP qui assurent deux types de missions : on parle d’ EP à double visage
car assurent des missions de SPIC et de SPA.
Arrêt TC, 1986, Commune de Kintzheim : l’ONF assure des missions de SPA en
protégeant et surveillant les forêts mais aussi de SPIC en vendant du bois. En
fonction du type d’activité , on ira soit devant le juge judiciaire soit devant le juge
administratif.

2. Le ré gime applicable
Dè s lors que l’on est en pré sence d’un SPA : le régime est celui du droit public donc
c’est le juge administratif qui sera compé tent pour connaître des litiges.
Si c’est un SPIC : régime de droit privé avec juge judiciaire compé tent.

Mais les choses ne sont pas aussi simple que ca : il faut intégrer dans l’équation la
nature de la personne qui prend en charge l’activité. Le ré gime ne sera pas le mê me
si le SPA est pris en compte par une personne publique ou privé e :

- Les relations entre le service et ses usagers

SPA : si le service est gé ré par une personne publique, les usagers sont dans une
situation lé gale et ré glementaire. Régime de droit public qui s’appliquera
Mais si le SPA est gé ré par une personne privée, le ré gime applicable à la relation
est un ré gime de droit privé sauf lorsque le litige met en cause la mise en œuvre
de prérogatives de puissances publiques par le gestionnaire

SPIC : quelque soit la nature, la relation est de droit privé. C’est une relations
contractuelles de droit privé, quand bien même il y aurait une clause exorbitante (CE
Sect., 1961, Etablissement Campanon Rey : on applique les règles du code de la
consommation)

- La relations entre le service public et ses agents

SPA : les agents sont de droit public si le service est géré par une personne publique.
Ex : TC, 25 mars 1996, Berkani : Simplifie les choses en indiquant que dès lors
qu’est en cause un SPA, les personnes qui y travaillent sont des agents publics et les
contrats de travail sont des contrats administratifs. (Revirement de Mazerand)
Mais si le SPA est pris en charge par une personne privée, les agents sont des
salariés de droit privé. Le code du travail s’applique

SPIC : les agents qui y travaillent en principe sont des salarié s privé s soumis au
droit privé . Mais exceptions dé gagé s par le CE : Arrêt CE, 1957, Jalenques de
Labeau : le DGS et le comptable ont une qualité d’agent public.

- Les AAU é manant à l’occasion de la gestion de ses services

SPA : si gé ré par une personne publique, les actes unilatéraux sont des AAU.
Mais si SPA est gé ré par une personne privée, il s’agit en principe de droit privé
sauf si pris dans l’exercice de prérogatives de puissances publiques (CE, Sect. 1961,
Magnier : il s’agissait d’une association dont la mission est l’é radication d’un
nuisible. Mise en place d’une association qui regroupe les agriculteurs concerné s. Il
font appel à des cotisations grâ ce à un texte qui l’impose. L’acte par lequel
l’association appelle les cotisations est un AAU pris dans le cadre de la puissance
publique car l’adhé sion à l’association est obligatoire.

SPIC : les actes unilatéraux sont des actes de droit privé sauf si ces actes sont
relatifs à l’organisation du service public. Arrêt TC, 1968, Barbier : hô tesse de l’air
chez AirFrance socié té commerciale mais qui gé rait un SPIC. Rè glement inté rieur de
l’entreprise spé cifiait que dè s lors qu’une hô tesse de l’air se mariait elle ne pouvait
plus voler. Mme Barbier engage un contentieux devant le juge judiciaire, conteste
les clauses qui l’empê chent de voler. Puis Cour de cassation soulève problème de
compétence. Le TC annonce que règlement est un AAU et met en cause
l’organisation du service public, donc juge compétent est celui administratif.
(Actuellement, systè me de la question pré judicielle au juge administratif)
Arrêts de 2008 : il ré sulte que les question des conditions de travail ne relèvent plus
des l’organisation du service public. La jurisprudence Magnier s’est contracté avec
moins d’hypothè ses dans lesquelles des litiges entre SPIC et leur agents sont connus
du juge administratif

- Le contentieux de la responsabilité délictuelle : dommage subi par les tiers au


service

SPA : si c’est une personne publique, ce sera la responsabilité administrative qui


sera en jeu. Si c’est une personne privée, l’action devra être portée devant le juge
judiciaire et on appliquera les rè gles de droit privé sauf si le dommage procède de
la mise en œuvre de prérogatives de puissances publique ou du fonctionnement d’un
ouvrage public (CE Sect., 24 novembre 1967,Labat)

SPIC : en principe, on applique le droit de la responsabilité civile sauf si sont en


cause des pré rogatives de puissance publique ou un ouvrage public (CE Sect., 24
novembre 1967, Labat)

C. La distinction des activités de service public économiques et non


économiques

Remarques :
- Cette distinction vient jouer selon les règles de concurrence imposées par le
droit de l’UE
- Elle joue essentiellement lorsque l’activité est pris en charge par une
personne publique

1. La distinction

Le service est-il géré comme une entreprise ?


Ce n’est pas la même distinction entre SPA/SPIC. Cela peut coïncider mais ce
n’est pas systé matique : les qualifications législatives altèrent ces différences.
Il arrive qu’un EP gé rant un SPA constitue une entreprise prenant en charge une
activité é conomique au sens du droit de la concurrence.
Exemple : CE, 30 avril 2003, UNICEM : établissement public administratif (EPA)
par qualification de la loi qui a en charge la mise en place de l’arché ologie
pré ventive. Ici Conseil d'É tat relè ve que les diagnostics et opé rations de fouille
d’arché ologique pré ventive sont des activité s é conomiques, donc malgré sont statut
d’EPA, l’institut national des recherches archéologiques constitue du fait de
l’exercice de telles activités une entreprise au sens des dispositions du TFUE
relatives à la concurrence. On s’appui sur des rè gles de marché . Si l’activité est
é conomique, il faut né cessairement un respect des rè gles de concurrence.

Au regard de cette dé finition, la jurisprudence a dé cidé que ne constituent pas des


activités économiques les activités régaliennes (police, justice, dé fense), certaines
activités sociales (Sé curité sociale), et certaines activités culturelles et artistiques.
Donc les rè gles de la concurrence ne sont pas opposables à ces activité s.

2. Porté e de la distinction

a. Pour les activités non économiques (celle des puissance publiques)

Les activités de puissances publiques échappent à l’application des règles de


concurrence (toutes : celles de la commande publique, du droit des ententes et des
abus de position dominante, du droit des aides d’Etat)
La porté e de cette exclusion doit ê tre bien comprise : le gestionnaire de cette activité
doit néanmoins s’abstenir d’agir de telle sorte qu’elle altèrerait la concurrence sur
un marché en mettant un opé rateur é conomiques qui abuserait de sa position
dominante.
Exemples :
- Avis, CE, 2000, Société L&P publicité : est en cause l’activité non-
économique de police spéciale de l’affichage. Le maire a en charge la
police de l’affichage publicitaire dans sa commune. On est dans une
activité de puissance publique. Le maire ne doit pas conduire à placer une
entreprise dans une positon de nature à abuser de sa position dominante.
- Arrêt CE, 2002, Sect. EDA : aé roport de paris a en charge des activités
économiques et non-économiques. Non é conomique : gè re des parties du
domaine public (parking…). A l’occasion de cette activité non-é conomique, il
doit veiller cependant à la mise en œuvre de règles de concurrence dans
l’attribution des parkings à diffé rentes entreprises.

b. Pour les activités économiques


Les activé s é conomiques sont en principe pleinement soumises aux règles de
concurrence : les règles du Code de la commande publique et les règles concernant
les aides d’État
Mais mê me si ce sont des activité s é conomiques, elles restent des activités de service
public. Donc se pose la question de la conciliation entre activité de service public et
exigence de respect du droit de la concurrence.
Le droit de la concurrence n’interdit pas par principe l’attribution, à des entité s
exerçant une activité é conomique mais en charge de service public, de privilè ges
exorbitants pour garantir la bonne exé cution de la mission de service public. Ces
privilèges sont l’octroi des droits exclusifs (monopole), et l’attribution de
subventions.
Mais cela ne se justifie que quand c’est nécessaire à l’accomplissement de la mission
de service public.
Prise en compte du droit de la concurrence par les services publics qui influence
leur fonctionnement, leur architecture :
- A conduit au démantèlement des monopoles publics (Gaz, transports…).
Question posée par le droit de la concurrence : les activités de service public
peuvent perdurer, mais est-il nécessaire pour en arriver là de réserver le monopole de
l’activité à une seule personne ?
- Consé quence aussi sur d’autres services publics : organisation mê me de la
SNCF : dé mantè lement de l’entreprise en plusieurs activités (réseau et
transports) Gestion des infrastructures vs. gestion des services, ce qui
permet qu’un autre opé rateur que la SNCF puisse prendre en charge la
mission de service public. L’autre entité est souvent une AAI.

Donc comment concilier les deux dimensions (activité de service public et activité
économique) sur le terrain des subventions ?
Exemple : SNCM entreprise publique en Corse : subventions de la part de la
collectivité pour ses activités de service public, même si elle reste une entreprise à
activité économique. Est-ce que l’aide est nécessaire ? Car sinon, problème au regard du
droit de la concurrence.
Le droit de la concurrence n’a pas mis fin à la possibilité de subventionner mais
à encadrer les possibilité des subventions. On le fait que dans la mesure où cela
est né cessaire dans la prise en charge du service public.

CJCE, 24 juillet 2003, Altmark : arrê t qui concerne les subventions versées par
l’Etat en contrepartie de l’exécution d’une mission de service public, à des
opé rateurs é conomiques telle qu’une entreprise qui gè re des services publics mais
qui intervient aussi sur un marché (ex : ancienne SNCF). La CJ dé finit les critè res
permettant d’appré cier si des subventions constituant ou non la contrepartie de
prestations effectué es par des entreprises pour exé cuter des missions de service
public ne constitue pas des aides d’Etat au sens du droit de la concurrence. Il définit
des critères et s’ils sont respectés, les subventions ne sont pas des aides d’Etat
soumises au règles de la concurrence. La CJCE a dit que la compensation
(subventions) ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts
occasionnés par l’exécution de la mission de service public (si on ne veut pas
affecter le bon fonctionnement du marché ). La CJ pour s’assurer de cela, dé finit une
série d’exigences :
- les paramètres sur la base desquels est calculée cette compensation doivent
être établis de façon objective et transparente.
- La compensation ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour permettre à
l’entreprise d’atteindre un niveau de rentabilité « raisonnable » pour les
entreprises du secteur concerné .
- Les obligations de service public à compenser doivent ê tre clairement
dé finies.

Ces exigences posé es par la CJ sont retrouvé es aujourd'hui en droit français : les
juridictions vérifient que les subventions pour mission de service public rentrent bien
dans ces exigences :
- CE, 25 octobre 2017, Société Corsica Ferries France : compensation de service
public versé e à la SNCM par la collectivité de Corse, et ici le Conseil d'É tat
applique les exigences Altmark pour appré cier la licé ité de la compensation
de service public versé e. É tait en cause la licé ité de la compensation entre la
SNCM et la CT de Corse. Le CE a dit que les critères posés par l’arrêt Altmark
n’étaient pas remplis : la SNCM recevait une subvention qui dépassait la
compensation des services publics qui pesaient sur elle.
- CAA Marseille, 19 janvier 2022, SNCF Mobilités : contrat entre ré gion PACA
et SNCF Mobilité s par lequel la ré gion a confié à la SNCF la prise en
charge des services ferroviaires ré gionaux. Il é tait pré vu dans le contrat que
la ré gion verserait des subventions à SNCF pour assurer la compensation des
charges de service public. Difficulté : ni le contrat ni aucun élément du dossier
ne permettait d’évaluer le coût exact des obligations de service public
assurées par la SNCF. Donc faute d’identifier de maniè re objective et
transparente les charges lié es à cette mission de service public, la cour a
constaté que la contribution de la région devait être considérée comme une
aide d’État illégale dans ses modalités.

II. Les facteurs d’unité des régimes de service public

Lois de Rolland en ré fé rence à Louis Rolland, universitaire en droit, qui a


systématisé ces règles autour d’une trilogie des règles du service public. Ils sont
ré sumé s à travers des principes : continuité, mutabilité et égalité.
A. Le principe de continuité du service public

Il a valeur constitutionnelle depuis CC, DC, 1979, Continuité du service public


(aussi appelé grève dans le service public).
On a pu le voir dans l’impré vision du contrat : si la personne publique est censé aidé
son cocontractant confronté à un alé a, l’idée de service publique se doit d’être
continue.
L’usager doit pouvoir bé né ficier des prestations du service de manière continue.
Cette idé e de permanence est vitale pour certains services (hô pitaux, police…). Elle
implique pour d’autres une accessibilité aux jours ouvré s.
Quand on parle continuité du service public, on parle de l’articulation de ce principe
avec le droit de grève. Droit de grè ve donné par un Arrêt CE Ass., 7 juillet 1950,
Dehaene : le problè me est d’assurer la concordance entre ce principe et celui de
continuité.
Les exigences de continuité du service public ont des conséquences sur l’exercice du
droit de grève, qui n’existent pas dans les rapports entreprise / salarié s :
- droit de grève interdit à certains des agents du service public : police, armé e,
administration pé nitentiaire…
- pour d’autres services publics, exigence se traduit par la mise en place d’un
service minimum : agents en charge de la navigation aé rienne ou
l’audiovisuel, l’hô pital.

Quand bien mê me il n’y aurait pas de texte, la jurisprudence du CE autorise de


maniè re gé né rale les chefs de service au sein des services publics à prendre les
mesures nécessaire pour assurer la continuité du service public. Il pourra à ce titre
interdire l’exercice du droit de grè ve et/ou ré quisitionner certains personnels en
charge de ce service (Cf. Arrêt CE, 1936, Jamart et CE, 4 févr. 1976, Section syndicale
CFDT du Centre psychothérapique de Thuir : Conseil d'É tat reconnait la possibilité
pour le directeur de l’hô pital d’opé rer des ré quisitions du personnel de l’hô pital
pendant une grè ve, pour garantir un service minimum).

Depuis la pré sidence Sarkozy (2007-2012), des lois sont venus encadrer l’exercice
du droit de grève dans les services publiques. Ces rè gles sont intervenus concernant
les écoles, le transport terrestre régulier de voyageur et celui aérien de passagers. On
n’interdit pas la grè ve mais on l’encadre. Elle passe par des négociations préalables
obligatoire et l’obligation d’informer de leur volonté de participer au mouvement
de grève : l’idé e est d’anticiper. Loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction
publique (sous Macron) a mis en place ces mê mes rè gles pour les services publics
locaux, de transport public, d’accueil des enfants… ou encore une Loi du 28
décembre 2023 qui est venu pré ciser les modalité s de la grè ve dans les services de la
navigation aé rienne avec toujours cette obligation déclarative.
B. Le principe de mutabilité

C’est le principe d’adaptabilité (ou de mutabilité). Il y a une ré sonance de ce


principe dans le ré gime des contrats de l’administration : modification unilatérale
du contrat pour adapter le contrat aux exigences du service public.

Il en résulte deux conséquences :


- CE Ass., 2 février 1987, Soc. TV6 : il est toujours loisible pour
l’administration de réorganiser un service public
- CE Sect., 27 janvier 1961, Vannier : les usagers n’ont pas le droit acquis au
maintien d’un règlement relatif à l’organisation d’un service public.
L’administration peut changer, et usager ne peut pas s’y opposer.

Jugement du TA de Montreuil qui a suscité des espoirs de la part des personnes qui
dé fendent le service public. Est en cause la cré ation d’un nouvel hô pital dans le Nord
de Paris qui conduit la fermeture de deux autres. Le TA de Montreuil a considé ré
que la déclaration d’intérêt public était illégale car la mise en œuvre de projet
risquait de réduire l’offre de soin contraire au droit fondamental constitutionnel à
la santé.

C. Le principe d’égalité

On ne parle que d’égalité entre les usagers du service public. Ce principe a en droit
administratif a la valeur de PGD depuis CE Sect. 1951, Soc. des concerts du
Conservatoire. Ce principe se dé cline de diffé rentes maniè res :

1. L’égalité de traitement entre les usagers

Le principe d’é galité suppose un traitement égal entre les usagers. Cela ne signifie
pas que les usagers doivent tous ê tre traité s de la mê me maniè re.
CE sect., 18 janvier 2013, Association SOS Racisme : question des tarifs d’accès au
musée « Le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que l’autorité investie du pouvoir
réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’elle déroge
à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que dans l’un comme l’autre cas, la
différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la norme
qui l’établit, et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs
susceptibles de la justifier.» Donne un cadre pour traiter de manière différemment
des
usagers :

● Quand la loi le pré voit (motif rajouté )


La loi est soumise au contrôle de constitutionnalité et de conventionnalité. Elle
n’est pas sanctuarisé e. Lorsque le lé gislateur met en œuvre des diffé rences de
traitement, cela peut ê tre justifié . Doute dans la jurisprudence administrative qui
pourrait donner lieu à des diffé rences de traitement.
Exemples de loi qui autorisent des diffé rences de traitement :

- Loi 29 juillet 1998 relative à l’exclusion : lè ve une incertitude de la


jurisprudence du Conseil d'É tat concernant la possibilité de moduler les
tarifs pour l’accès au SPA facultatif (ex : é cole de musique…) : lé gislateur a
dit qu’on pouvait moduler la tarification d’un SPA en fonction de
considérations sociales (en particulier du revenus des usagers et en fonction
du nombre de personnes vivant dans le foyer (quotient familial)…)

- Article L173-3 du code de la voirie routière qui a ouvert la possibilité d’une


modulation du tarif entre usagers d'un bac selon qu’ils habitent ou non dans
le dé partement où se situe le bac. Cette disposition est intervenue é galement
pour contrecarrer une jurisprudence du Conseil d'É tat fondé e sur le principe
d’é galité : CE Sect., 10 mai 1974, Denoyez et Chorques : concerne la
tarification du bac de l’Île de Ré : le dé partement qui gé rait le bac avait fait
une tarification à 3 tarifs (le plus bas pour les ré sidents, intermé diaire pour
les habitants du dé partement de la Charentes-Maritimes, et troisiè me tarif
pour les autres). Ici le Conseil d’É tat admet le tarif résidant mais pas pour
celui des habitants du département de Charentes-Maritimes.

● Quand il y a une diffé rence de situations entre les usagers

L’arrê t pré cé dant (Denoyez et Chorques) est un arrêt important. La situation entre
les personnes qui vivent sur le continent et les personnes qui vivent sur l’Ile de Ré
n’est pas la même ce qui justifie que le tarif du bac soit diffé rent.

Arrêt CE, 2018 sur la tarification des communications té lé phonique pour les
dé tenus. Les tarifs sont plus importants que ceux des usagers classiques. Ces
différences de traitement sont-elles licites ? Le CE a dit quoi car différence de
situation.
CE, 2021 : contentieux sur la tarification de fourniture d’eau. Différence de traitement
selon la date de raccord au ré seau d’eau. La différence de situation justifie
l’inégalité.

La situation est le lieu de résidence, le quotient familial et le volume de


consommation. Mais une différence de situation n’impose pas une différence de
traitement : cette solution est spé cifique en droit français. En droit de l’UE, le
principe d’é galité impose de traiter diffé remment des personnes.
● Pour un motif d’inté rê t gé né ral

L’exemple le plus emblé matique est l’arrêt CE, Sect. 1997, Commune de
Gennevilliers : le CE clarifie la situation à cause des incertitudes sur les refus de
modulation tarifaire pour l’accès aux services publics facultatifs de loisirs. Le
service ne doit pas faire du profit sur les dos des usagers. Le tarif ne doit pas
excé der ce coû t par usager. Le CE justifie ce revirement par un motif d’intérêt
général : un conservatoire de musique et de danse doit pouvoir ê tre fré quenté par
tous les é lè ves qui le souhaitent sans distinction de leurs possibilité s financiè res.

CE, 1999, Soc. Air France : mettait en cause les redevances d’atterrissage pour les
avions cargos : « L’intérêt qui s’attache au développement des aéroports parisiens comme
plateforme de fret international ».

2. Le principe de neutralité du service public (comme dé clinaison du principe


d’é galité )

Le service public ne doit pas afficher son penchant pour certaines conceptions
politiques, philosophiques, religieuses… Cette question est é voqué e de maniè re
gé né rale : elle touche aussi les bien les agents que les locaux.

Exemples :
- CE, 15 oct. 2014, Confédération nationales des associations familiales
catholiques : é tait en cause la dé cision du ministè re de l’é ducation que soit
relayé dans les é coles une campagne de lutte contre l’homophobie qui
reposait sur une ligne d’é coute et un site internet. La dé cision du ministre
selon l’association portait atteinte au principe d’é galité . Conseil d'É tat a
considé ré que la dé cision du ministre portait atteinte au principe de
neutralité du service public, au regard de ce que pré sentait ce site internet
(drogue, pé dophilie..)
- Jugement du TA de Grenoble du 23 mars 2023 : position d’une banderole sur
le fronton de la mairie de Grenoble qui indiquait l’opposition de la mairie de
Grenoble à la réforme des retraites. Le TA a dit que c’é tait une atteinte à la
neutralité du service public.

● Problématique de la laïcité
Le lé gislateur est intervenu par l’article 1 de la loi du 24 aout 2021 confortant le
respect des principes de la République dite Loi Séparatisme : cela codifie en partie
la jurisprudence voire étend l’empire de la neutralité. Elle l’impose aux organismes
public et privé s chargé s d’une mission de service public, mais aussi aux titulaires
des contrats de la commande publique ayant objet pour tout ou partie l’exé cution
d’un service public.
Lorsque l’on s’inté resse à sa porté e, cela touche aussi les bien les agents que les
locaux : loi du 9 décembre 1905 de Séparation des Eglises et de l’Etat qui interdit
pour l’avenir d’apposer un signe religieux sur les monuments publics et
emplacement publics, sous réserves d’exceptions (musé e…)

CE avis, 3 mai 2000, Marteaux : le principe de laïcité fait obstacle à ce que les agents
du service public disposent dans le cadre du service public du droit de manifester
leur croyance religieuse quand bien mê me :
- Ils ne sont pas en contact avec les usagers
- Ils seraient salariés d’une entité privée
Cela concerne tous les employés qui gèrent des services publics : Cass. Soc. 19 mars
2013, L. c/ Association Baby-Loup : crè che ouverte 24h/24. Contentieux car un
personnel est revenue de vacances en portant le voile. Règlement intérieur ne le
permettait pas. Dans cette procé dure, un enjeu essentiel é tait de dé terminer si la
crè che devait ê tre vue comme gé rant une mission de service public : si oui,
licenciement, si non, impossible de l’interdire. Cour de cassation a considé ré que
cette crèche ne prenait pas en charge une activité de service public, donc on ne
pouvait, pour ce motif, interdire le port du voile.
Cette exigence va plus loin : elle a donné lieu à un contentieux notamment sur le cas
d’é tudiants en é cole d’infirmiè re : le port de signes religieux est permis dans l’é cole,
mais quand ces é tudiants travaillaient en stage dans l’hô pital ils ne pouvaient plus
porter de signes religieux.
Sur la question des mè res qui apportent leur assistance à la mission de service
public lors de sorties scolaires : Peut-on leur imposer l’exigence de laïcité ? Non, ce ne
sont pas des agents publics.

A l’occasion d’un arrêt (2023, Assoc. Alliance Citoyenne) , le CE a estimé que les
personnes qui sont sélectionnés dans les équipes de France sont soumises au
pouvoir de direction d’un organisme en charge d’un service public pour le temps
des manifestations et compé titions donc soumises au principe de neutralité du
service public. On considè re que les personnes dans les é quipes de France se voient
imposé s le respect du principe d’égalité et de neutralité.

CE, 11 décembre 2020, Commune de Chalon-sur-Saône : est en cause la commune


dont le maire décide de supprimer ce repas de substitution. le CE va dire que
- Les communes gestionnaires d’un service public de restauration scolaire ne
sont pas tenus de distribuer aux usagers des repas différenciés leur
permettant de ne pas consommer des aliments proscrits par leur conviction
religieuse.
- Les usagers n’ont aucun droit à revendiquer de tels menus sur mesure
puisque l’article 1er de la C° interdit à quiconque de se pré valoir de ses
croyances religieuses pour s’affranchir des règles communes régissant les
règles entre les usagers et la commune
- En revanche, ni le principe de laïcité ni le principe de neutralité ne fait
obstacle à ce que de telles collectivités mettent en œuvre de tels repas.
CE ord., 21 juin 2022, Commune de Grenoble : affaire du Burkini : modification
apporté e par le conseil municipal de Grenoble au rè glement de ses piscines, sous la
pression d’une association citoyenne regroupant des femmes musulmanes, pour
autoriser le port du burkini. Action engagé e par le pré fet (déféré-laïcité) devant TA
de Grenoble. Le CE a ré pondu qu’il est possible de tenir compte des spécificités du
public concerné et le principe de laïcité ne fait pas obstacle à ce que ces spécificités
ne fassent obstacle à des raisons religieuses. En revanche, pas d’obligations pour les
collectivité s de tenir compte de ces obligations. C’est une possibilité donc pas un
droit pour les usagers concernés. Cependant, « lorsque le gestionnaire prend en
compte les convictions religieuses des usagers, le gestionnaire de ce service ne peut
procéder à des
adaptations qui porteraient atteinte à l’ordre publique ou qui nuiraient au bon
fonctionnement du service, notamment en ce que le caractère fortement dérogatoire
par rapport aux règles de droit commun elle rendrait plus difficile cet accès pour les personnes
ne bénéficiant pas de cette dérogation et une atteinte caractérisée à l’égalité de traitement. »

D. D’autres lois du service public ?

1. Le principe de gratuité

Principe de gratuité applicable à l’ensemble du service public ?


- Réponse négative, notamment pour les SPIC, qui sont censé s fonctionner
comme des entreprises privé es, ils sont financé s par les prix payé s par les
usagers.
- Mais question peut se poser pour les SPA, essentiellement financés par
l’impôt, mais pas de gratuité systé matique en la matiè re, ils sont en partie
financés par des redevances.

La gratuité s’impose pour certains services publics : ceux qui assurent les missions
de souveraineté qui incombent à l’État (sécurité d’incendies et de sauvetages). Et la
gratuité peut procéder de dispositions constitutionnelles : alinéa 13 préambule
1946 énonce que « La Nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction,
à la formation professionnelle et à la culture. L'organisation de l'enseignement public
gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’Etat. »

Mais besoin de nuancer cette affirmation constitutionnelle, au regard de la


jurisprudence constitutionnelle : CC. 11 oct. 2019, n° 2019-809 QPC : dé cision qui
portait sur la loi sur l’augmentation des droits à l’inscription pour les étudiants
étrangers hors UE. Ces dispositions sont elles compatibles avec alinéa 13 préambule
1946
? Ici on s’inté resse au sujet de la gratuité : Conseil constitutionnel dit que cette
exigence s’applique à l’enseignement supé rieur, mais elle ne fait pas obstacle pour
ce degré d’enseignement, à ce que des droits d’inscription modiques soient perçus
en tenant compte des capacité s financiè res des é tudiants.

2. Le principe de participation

Depuis anné es 1970, multiplication des dispositifs visant à permettre la


participation des usagers aux décisions concernant organisation et fonctionnement
du service public. Cela peut aboutit à des dispositifs trè s varié s, plus ou moins
aboutis, pas toujours pré sents. Il n’existe pas de norme constitutionnelle qui serve
de fondement à ce principe de participation. Il n’y a que ces dispositifs.

Chapitre 2 : la police administrative

Rappel : La police est une activité de service public. Donc à ce titre, elle est soumise
aux lois du service public. On la traite à part historiquement de par son objet et les
outils qu’elle mobilise.
Pré cision : Distinction entre police comme fonction de l’administration, et la police
comme fonction de l’É tat de maniè re gé né rale. Cette fonction de police consiste à
garantir l’ordre public, mais cette mission ne pè se pas que sur l’administration, elle
pè se sur toutes les institutions de l’É tat, et notamment le lé gislateur.
Si on se situe au niveau de la fonction de l’É tat, cette politique visant à assurer ordre
public peut prendre plusieurs formes : police administrative, ré gimes ré pressifs
donc mise en place dispositions pé nales.
Le Conseil constitutionnel exprime l’idé e de fonction de l’É tat en disant qu’il existe
un objectif à valeur constitutionnelle : la sauvegarde de l’ordre public, qui peut
reposer à la fois sur des rè gles de police (police administrative) ou sur un ré gime de
sanctions pé nales, ou mê me sur la combinaison des deux. On peut donc considé rer
que le droit pé nal participe d’une fonction de l’É tat : la sauvegarde de l’ordre public.

□ Section 1 : Définition

La dé finition classique police administrative : activité prise en charge par


différentes autorités administratives, qui consiste à assurer la sauvegarde de l’ordre
public.

I. Définition négative (ce que n’est pas la police administrative)

A. La police comme institution et la police comme fonction

Dans le langage courant, il y a 2 notions de police qui cohabitent ;


- Institutionnel qui vise la notion de police au sens organique
- Fonctionnelle qui est la notion de police au sens maté riel, comme activité et
qui est celle à laquelle on s’inté resse ici.

Pas de correspondance certaine entre ces deux notions d’institution et de fonction.


Les autorité s de police administrative les plus importantes ne sont pas les
institutions policiè res. Ce sont le Premier ministre, les pré fets, les maires etc. Les
autorité s policiè res participent à l’activité de police administrative, mais seulement
à l’é chelon de l’exé cution. Par ailleurs, l’institution de police n’assure pas que des
missions de police administrative, elle participe é galement à la ré pression pé nale,
des infractions. Donc elle est aussi mise au service de la police judiciaire.

B. Police administrative et police judiciaire

Autre distinction : police administrative et police judiciaire. Cette distinction qui a


des consé quences sur les diffé rences de ré gimes ensuite.
- Enjeu de compé tence juridictionnelle : le contentieux police administrative se
fait devant le juge administratif alors que le contentieux de police judiciaire
devant le juge judiciaire
- Enjeu sur le terrain de la responsabilité : activités qui peuvent provoquer des
dommages en fonction du type de police en cause, ce ne sont pas forcément
les mêmes personnes qui sont responsables.
o La police judiciaire dans la poursuite des infractions est le monopole
de l’É tat. Donc si elle cause un dommage, le dé biteur devra engager
une action en responsabilité contre l’É tat
o La police administrative est assuré e par plusieurs autorité s qui ne
relè vent pas de la mê me personne publique : le maire, le pré fet, le
ministre etc. Dans ce cas, responsabilité sera celle de la personne
publique au nom de laquelle les agents agissent.

Cette distinction est complexe car ce sont souvent les mê mes personnes qui
assurent ces deux types de missions, notamment en ce qui concerne l’institution
policiè re (police et gendarmerie nationale). Dans certaines situations, doutes
possibles sur la mission au titre de laquelle ils agissent (quand un policier utilise
son arme, agit-il en vertu de sa qualité de policier judiciaire ou administratif ?)

Ces critè res de distinction ont é té posé s par le Tribunal des conflits en application
du principe de sé paration des autorité s administratives et judiciaires, issu de la loi
des 16 et 24 août 1790.
Arrêt TC, 27 nov. 1952, Préfet de la Guyane : officier ministériel engage une action
en
responsabilité contre É tat du fait de l’interruption du fonctionnement des tribunaux
judiciaires. Quel est le juge compétent pour connaitre de cette action en responsabilité ?
Tribunal des conflits dé finit les bases du critè re permettant de distinguer les deux
polices : il dit qu’il faut tenir compte du lien entre les actes incriminé s et l’exercice
de la fonction juridictionnelle assuré e par la justice judiciaire. Si actes sont en lien
avec cette fonction juridictionnelle, le juge judiciaire sera compétent. S’in n’y a pas
de lien, l’acte a seulement avoir avec l’organisation du service public, donc le juge
administratif sera compé tent.

La difficulté est de transposer ce critè re quand est en cause l’action des forces de
l’ordre : pour dé terminer le type de mission, on s’attache au but poursuivi par
l’agent au moment où il a commis l’acte dommageable ou incriminé
Deux décisions affirment ce critère-là concernant action des forces de l’ordre :
□ CE sect. 1951, Baud, et TC, 7 juin 1951, Noualek. Transposition des principes
é voqué s par Pré fet de la Guyane, appliqué s à l’action des forces de l’ordre.
Donc il y a opé ration de police judiciaire lorsque l’opé ration est en relation
avec la ré pression d’une infraction pé nale dé terminé e, commise ou à
commettre. L’action des forces de l’ordre a donc ici un lien avec la fonction
juridictionnelle assuré e par les juridictions judiciaires.

Mais la mise en œuvre de ce critère peut être délicate comme le montre ces 2
illustrations

- TC, 1977, Motsch : un conducteur de vé hicule a forcé un barrage de police


é tabli pour procé der à des contrô les d’identité . Les policiers se lancent à la
poursuite de ce vé hicule, un policier tire et blesse la passagè re du vé hicule
qui était une auto-stoppeuse prise en charge par le conducteur. Question : quel
juge saisir ? Il faut dé terminer la nature de l’opé ration au moment où le
policier a tiré. Opération de police administrative ou judiciaire ? Ici, judiciaire car
même si la mise en place d’un barrage pour procé der à des contrô les
d’identité est une action administrative, l’intention de l’agent qui a tiré é tait
d’appré hender l’individu qui venait de commettre des infractions.

- TC, 1978, Société Le Profil : employé d’une socié té assure transport d’une
mallette avec des sommes importantes, opé ration de transport sé curisé e par
les forces de l’ordre. Un malfaiteur se saisit de la mallette et s’é chappe.
Socié té Le Profil engage action en responsabilité et se demande la
compé tence de juridiction. Ici, police administrative. Le pré judice invoqué
par la socié té trouvait essentiellement son origine dans les conditions dans
lesquelles a é té organisé e l’opé ration de sé curisation du transport de
fonds, il s’agit donc d’une opé ration de police administrative donc le juge
administratif est compé tent.
C. Police administrative et pouvoir de sanction administrative

De plus en plus, les autorité s administratives sont doté es d’un pouvoir de sanction.
Plusieurs types de sanctions administratives existent. Elles sont prises souvent à
l’é gard de professionnels pour non respect de la ré glementation professionnelle.
- AAI (autorité s administratives indé pendantes) : ARCOM...
- Institutions administratives classiques : préfet…

Comment distinguer entre deux décisions prises, la décision qui relève de la police
administrative et celle qui s’analyse comme une sanction administrative ?
Cela est compliqué , car certains actes peuvent s’analyser à la fois comme l’un ou
comme l’autre (ex : dé cision de retrait d’autorisation)
L’enjeux de la distinction en terme de ré gime juridique : ré gime des sanctions
administratives est plus exigeant pour l’administration que le ré gime des mesures
de police, car le ré gime des sanctions s’inspire en partie des procé dures de
sanctions pé nales (ex: on applique un ersatz du principe de lé galité des dé lits et des
peines).
Critè re de distinction principale est celui du critè re finaliste : si la finalité de la
mesure est ré pressive (= procè de de l’intention de punir) alors c’est une sanction
administrative, si la finalité est de pré server l’ordre public, alors c’est une mission
de police administrative.

CE, 22 juin 2001, Soc. Athis : dé cision prise par la Commission des autorisations de
bourses (COB, aujourd'hui autorité des marché s financiers) de retirer l’agré ment
d’une socié té de gestion de portefeuilles. Est-ce une mesure de police ou de sanction ?
Conseil d'É tat dit que la COB n’avait pas entendu sanctionner le manquement aux
obligations, mais elle avait entendu dans l’intérêt du bon fonctionnement du
marché d’assurer la sécurité des investisseurs, donc cela relevait de la police
administrative.

Un mauvais conducteur s’expose à 2 mesures : suspension de permis, et retrait


de points :
- la mesure de retrait de points relè ve de la sanction administrative
- Suspension de permis : mesure de police administrative : é viter qu’une
personne qui conduit mal mette en danger la vie des autres.

II. Définition positive

Dans la police administrative, il y a les polices gé né rales et les polices spé ciales. En
fonction du type de police, la notion d’ordre public ne recouvre pas la mê me
consistance. Cette notion n’est pas spé cifique au droit administratif.
Il existe finalement différentes ordres publics :
- La police générale : l’ordre public de base posant les règles en société. Il est
essentiellement matériel. Il a une consistance physique puisqu’il s’agit de
préserver la sécurité des personnes et des biens, la tranquillité publique…
- Le législateur a parfois senti le besoin de renforcer les restrictions dans un
domaine et a définit des règles de police spéciale qui chacun assurent la
préservation d’un ordre public spécial. Cet ordre public propre à une police
spéciale dépasse l’ordre public de base. Il existe une police du cinéma : l’ordre
public de cette activité de police intègre des éléments relatifs à la protection de
l’enfance.

A. L’ordre public général

Ce sont les actions de police général. Les titulaires de ce pouvoir sont le PM au


niveau national, le maire au niveau local et le préfet dans une certaine mesure. Ces
autorités sont limités. Cet ordre public de base n’est pas défini par les textes. Pas de
textes précisent ce que peut faire le PM. Le seule texte qui existe est celui au niveau
local : L.2212-2 du CGCT précise et définit les composantes de la police municipale
qui a pour objet d’assurer le bon ordre, la sureté, la sécurité et la salubrité publique. Il
s‘agit d’assurer :
- la sécurité publique des personnes et des biens,
- la tranquillité publique (prendre des mesures contre des nuisances lié es à
des activité s…),
- la salubrité publique (protection de l’hygiène et de la santé…)

Mais ces composantes de base dans certains domaines sont spé cialisé s selon les
besoins du lé gislateur pour assurer la protection de ces diffé rents é lé ments en
choisissant des domaines spé ciaux de police.
Exemple : Crise Covid, Etat d’urgence sanitaire avec un plan de protection contre un
risque lé tal qui relè ve de la sé curité publique. Le lé gislateur a renforcé les
prérogatives dans ce régime de certaines autorités. Comment s’articulent ces régimes de
police ? (Cf. Suite du CM)

A cô té de ces composantes matérielles, on retrouve des composantes immatérielles :


possibilité d’encadrer des discours, des vêtements. C’est un débat ancien tranché
depuis de nombreuses années. Au titre de ces pouvoirs de police général, l’autorité
de police peut se saisir de la conception immatériel de l’ordre public. C’est d’abord
sous l’image de la moralité publique que s’est développée cette police : une autorité
locale peut interdire des activités.
Exemples : des arrê té s de police ont pu interdire des combats de bœuf, de la
possibilité de se dé shabiller sur la plage ou le port de costume masculin pour les
femmes… On ne protè ge pas la santé ou la sé curité mais la moralité publique
générale.
A l’é poque plus ré cente, elle a eu à s’appliquer dans les domaines des
repré sentations ciné matographiques. Possibilité pour un maire d’interdire la
diffusion d’un film par un maire sur le territoire de sa commune. Arrêt CE, 1959,
Soc. Les Films Lutétia : un maire peut interdire projection d’un film sur territoire
de sa commune, non seulement en cas de risque d’atteinte à la sé curité ou à la
tranquillité publique mais aussi lorsque sa projection est susceptible d’ê tre à raison
du caractè re immoral du film et de circonstances locales particulières pré judiciable
à l’ordre public.

Affaire illustrant bien ce pouvoir : CE, 1985, Ville d’Aix en Provence : affaire
d’enfant enlevé s pas Rannucci et tué . Un auteur conteste les ré sultats du procè s et
remet en cause la culpabilité de Rannucci. Cela reposait sur un certain pull over
rouge. Il é crit un livre « Le pull over rouge » adapté au ciné ma. Le maire interdit la
diffusion de ce film. Cet arrêté est-il licite ? pas de trouble à l’ordre public, à la
tranquillité publique ou la salubrité . Mais porte atteinte à la moralité publique car
é mois dans la ré gion de ce meurtre. La diffusion potentielle de ce film pouvait
remettre en cause la moralité publique particuliè re à la ré gion.

La ré alité depuis une trentaine d’anné es est que cette composante de l’ordre public
justifie rarement une interdiction devant le juge administratif.
Exemples :
un maire avait essayé d’interdire l’affichage publicitaire des messageries roses
(minitel). Le CE a annulé cet arrê té de police.
Arrêt CCA de Bordeaux 2021 : maire prend un arrêté : interdiction d’une installation
sur sa commune d'un cirque avec animaux sauvages. CAA de Bordeaux dit que cette
interdiction n’est pas justifiée, en disant que les traitements infligés aux animaux
sauvages, invoqués en se fondant sur la moralité publique, ne peuvent justifier une
telle mesure de police en dehors de circonstances locales particulières. Pas de
circonstances particulières locales.
Arrêt CAA Bordeaux : Commune d’Albi avait interdit la prostitution dans les
artè res de la ville. Cet arrê t avait é té jugé valide
□ Cette forme de police a peu d’avenirs

Autre composante qui tend à naître : la ré fé rence au respect de la dignité de la


personne humaine. La protection de la dignité humaine apparait comme une
composante de l’ordre public gé né ral.
Arrêt CE, Ass. 1995, Commune de Morsang sur Orge : notoriété assez malsaine de
cet arrêt. Affaire du lancer de nains. Un maire interdit la représentation dans une
boite de nuit de la ville l’activité de lancer de nains. Cet arrêté est-il régulier ? Le CE va
se référer au respect de la dignité de la personne humaine : « le respect de la
dignité de la personne humaine est unes des composantes de l’ordre public. L’autorité
investie
du pouvoir de police municipale peut même en l’absence de circonstances locales
particulières interdire une attraction qui porte atteinte au respect de la dignité de la
personne humaine. »
3 Remarques :
- Le CC intègre le respect de la dignité humaine dans la même période dans sa
jurisprudence DC, 1994 : lois bioéthiques ont intégré dans le code civil le
respect de la dignité et du corps humaine : Momentum dans les années 1995
du respect de la dignité humaine.
- Les exigences de respect de la dignité de la personne humaine sont les
mêmes partout sur le territoire. Elles s’appliquent nonobstant la prise en
compte de l’existence de circonstances locales particuliè res. Egalité de cette
application sur tout le territoire national.
- Arrê t critiqué car certains ont pointé le retour d’une forme de retour à la
publique morale immatérielle. Souvent, les personnes qui ont dé fendu cet
arrê t ont dit qu’il n’y avait pas de moralité publique. Elle a é té dé finie par
Teitgen qui é voquait les atteintes au minimum d’idé es morales naturellement
admises en une é poque donné e en un lieu (dé finition relative) La ré fé rence à
la dignité aurait un registre diffé rent, plus objective. Elle transcende les lieux
et les é poques. Mais une certaine dimension subjective car cette appré ciation
peut changer dans le temps. L’autre critique porté e à cette dé cision est qu’elle
conduit à restreindre l’exercice des libertés et notamment celle des nains :
dans cette affaire, le requé rant é tait le nain. la dignité est aussi le droit de
pouvoir vivre de son travail. On n’est pas juge de sa propre dignité .
Crainte de la porte ouverte à la morale et aux interdictions

Bilan 30 ans après : descendance modeste. Il semble que cette exigence a pu fonder des
mesures de police dans deux grandeurs :
- Elle a servit de support pour interdire ou empê cher des pratiques ou des
discours discriminatoires ou de nature à stigmatiser un groupe sur la base
d’un critè re physique, religieux, ou é thique.
Physique :renvoie à l’arrê t de Morsang sur Orge avec la dignité du nain en
question come tous les autres nains)
Religieux : CE, ord. 2007, Association Solidarité des Français dite Affaire de
la soupe de cochon : association prétendument humanitaire mais portée en réalité
par l’extrê me droit mettant en place une soupe populaire en pré cisant que les
produits proposé s sont des produits à base de porc. Le préfet l’interdit au
nom du respect de la personne humaine car la pratique visait à discriminer
les SDF en fonction de leurs convictions religieuses.
Ethique : CE, ord. 2014, Min. de l'Intérieur / Soc. Les Prod. de la Plume et
Dieudonné M'Bala M’Bala : humoriste pé nalement condamné pour
antisé mitisme. Ministre de l’inté rieur demande au pré fet d’interdire la tenue
de ses spectacles à Nantes. Préfet se réfère au risque de trouble à l’ordre
public (manifs contre Dieudonné ), et se fonde aussi sur le respect de la
dignité de la personne humaine et interdit la tenue de ce spectacle. Donc avec
le critè re de protection de la dignité de la personne humaine, possibilité
d’interdire des pratiques de nature à stigmatiser tel ou tel groupe social.

Problè me : craintes car ré gime ré pressif envers certaines liberté s. Cela s’oppose à
un ré gime de police dans lequel la parole est libre mais en revanche, la loi dé finit
des interdits (Loi de 1881) et des infractions pour les abus. La personne est
poursuivie au pé nal si elle commet une de ces infractions.
Dans ce cadre, l’autorité de police interdit la représentation en restreignant à priori le
respect de la dignité .
Le CE en a fait une application mesurée : le recours à cette jurisprudence
(Dieudonné) ne se justifie que quand il y a une forte possibilité que seront tenus des
propos passibles de poursuites pénale (injure raciale…)
CE, Ord. 2023, Commune de Rennes : met en cause un rappeur français faisant é tat
de propos antisé mites. Le maire interdit le concert. Le CE annule l’interdiction car si
le rappeur avait eu ce type de propos, il s’é tait engagé e à ne pas reprendre les sons
avec les paroles antisé mites. Le CE a pu considé rer que l’arrê té é tait illé gale parce
qu’il n’y avait pas de certitudes de propos pouvant relever de poursuites pé nales.
CE, Ord, 2023 : Iman salafiste devant tenir une conférence dans une commune de la
banlieue parisienne avec des propos sur la femme pénalement répréhensible. Le
maire interdit et le CE valide l’interdiction.

Deuxiè me champ qui s‘est ouvert à cette jurisprudence : le CE a dé duit de cette


exigence de dignité de la personne humaine que le titulaire du pouvoir de police de
veiller à ce que le droit de toute personne à ne pas ê tre soumise à des traitement
inhumains ou dé gradant sois garanties et de prendre les mesures en ce sens.
L’expression « ne pas subir des traitements inhumais et dégradants » renvoie à l’art.
3 de la Conv. EDH. Le CE a pu considé ré que l’autorité de police avait le devoir de
prendre des mesures né cessaires.
CE, Ord. 2015, Assoc. Médecins du Monde : obligation de prendre des mesures
pour amé liorer l’hygiè ne à Calais. Conditions d’hygiè ne dé plorable. Il incombait à
l’autorité de police en raison des exigences de respect de la personne humaine
d’assurer un minimum d’hygiè ne par la mise en place de points d’eau.
CE, 2017, GISTI : Conseil d'É tat précise en se fondant sur les mêmes
considérations des traitements inhumains ou dégradants, que les autorités doivent
prendre des mesures pour la prise en charge des mineurs isolés.

A cô té de cette composante maté rielle, la question s’est posé e si d’autres


considé rations pouvaient inté grer des considé rations esthé tiques : CE, 1983,
commune de Bures-Sur-Yvette : un maire peut-il imposer des règles concernant
l’esthétiques des monuments au sein du cimetière municipal ? La réponse est négative.
Exit les considérations esthétiques.

B. Les ordres publics spéciaux

Ce sont les finalités poursuivis par les différents types de police spécial. Elles sont
nombreuses et multiples.
Cas du cinéma : art. L212-1 du code du cinéma : elle s’exprime à travers la
compétence du ministre de la culture concernant le visa d’exploitation des films en
France. Quelles sont les finalités poursuivies ? Ce visa peut être refusé pour des
considérations énumérées dans Code du cinéma. Les finalités de cette police spéciale
sont donc largement de nature immatérielle.
La police de la chasse est une police spé ciale
L police de l’affichage : on retrouve la pré servation de l’esthé tique et de
l’environnement. L’esthé tique n’est pas une composante gé né rale mais une
composante spé ciale.

□ Section 2 : les compétences de police

Qui peut exercer ce pouvoir ?

I. Les titulaires du pouvoir de police

Il faut distinguer police gé né rale et spé ciale, et au sein de chacun l’é chelon local et
national

A. La police générale

1. Au niveau national

C’est le Premier Ministre qui a ce pouvoir. Son fondement est jurisprudentiel avec
l’arrêt CE, 1919, Labonne : « il appartient au chef de l'État en dehors de toute délégation
législative et en vertu de ses pouvoirs propres de déterminer les mesures de police applicables
sur l’ensemble du territoire national ». A l’époque, c’est le PR qui a le pouvoir
réglementaire. Mais ce pouvoir passe au PM à partir de la IVème République. Il est
toujours au PM avec l’art. 21 de la C°.

Questionnement sur la pé rennité de cette jurisprudence : L’art. 34 de la C°


é numè re les compé tences du pouvoir lé gislatif pré cise qu’il incombe au lé gislateur
de fixer les règles relatives « aux droits civiques et aux garanties fondamentales accordées
aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques » Le suspens a été de courte durée : le
CE a écarté cette objection et a é noncé dans un arrê t du CE, 1982, Association Auto
défense : le
CE a dit que l’art. 34 de la C° n’a pas retiré au chef du gouvernement les pouvoirs de
police général qu’il exerçait antérieurement. Il se réfère aux articles 21 et 37 de la C°.
Précision sur cette articulation avec la loi : précision du Ce que lorsque le législateur
est intervenu dans un domaine de la police il incombe au PM d’exercer son pouvoir
dans le respect de la loi.
Cette compé tence du PM (Labonne) est souvent é voqué mais peu mis en œuvre.
L’exemple que l’on cote est souvent celui de la police municipale. La crise Covid a é té
l’occasion de remettre en œuvre ce genre de dé cisions. Décret du 16 mars 2020 qui a
dé cidé le confinement de la population française est intervenu sur le fondement de
la jurisprudence Labonne. Puis Arrêt CE, 22 déc. 2020 : le Premier ministre peut en
vertu de ses pouvoirs propres é dicter des mesures applicables à l’ensemble du
territoire et en particulier en cas d’é pidé mie. Ré gime de police spé cial s’est
substitué à ce dé cret avec l’é tat d’urgence sanitaire.

2. Au niveau local

L’autorité la plus importante est celle du maire. Ils sont titulaires du pouvoir de
police au niveau local dans les limites du territoire de leur commune. On parle de
police municipale. C’est un type de compé tence anté rieure à la Ré volution française
et a un fondement lé gislatif au 2212-1 du CGCT.
C’est une compétence propre du maire : le conseil municipal n’est pas compétent
pour prendre des mesures qui interfèrent avec le pouvoir de police du maire. Des
conseils municipaux ont pu annulé des décisions mais le CE a retoqué ces arrêtés.

L’autre autorité est celui du pré fet de dé partement. L’autorité pré fectorale
intervient à 4 reprises selon l’art. L2215-1 du CGCT.
- Police de la circulation sur les routes nationales hors-agglomé ration.
- Police dont le champ d’application excède le territoire d’une commune.
(exemple : restreindre l’utilisation de l’eau). Question autour de cette
compétence : Arrêt CE, 2022, Soc. Périgord Shooting Club : acticité de Ball-
trap. La question qui s’était posé est la question de compétence pour prendre
une interdiction portant restriction à cette activité. Les nuisances de cette
activité étaient ressenties sur le territoire de plusieurs communes. Est-ce le
préfet qui est compétent car territoire de plusieurs communes ou est-ce le maire où
l’établissement se situait ? C’est le maire qui est compétent : on regarde le
lieu d’où provient la nuisance et pas les lieux où elles sont ressenties.
- Police de substitution d’action : en cas de carence du maire, le pré fet peut
prendre des mesures à sa place aprè s mise en demeure. Si ces mesures
provoquent un dommage, le patrimoine responsable est celui de la commune
et pas de l’Etat.
- Dans certaines communes, la police a é té é tatisé : on parle de police d’Etat.
Lorsqu’une commune est sous un ré gime de police d’Etat, les pouvoirs
du
pré fet sont renforcé s puisqu’exerce une partie de ses compé tences en
matiè re de tranquillité publique. C’est lui qui est compé tent pour assurer la
police des manifestations et des tumultes dans les lieux publics et le tapage
nocturne. En pré sence d’une police d’Etat, la ré partition des compé tences est
assez subtile

Le pré sident du Conseil dé partemental a un pouvoir de police limité à la police de la


circulation sur les portions de routes dé partementales en dehors de
l’agglomé ration.

B. La police spéciale

Certaines autorité s titulaires du pouvoir de police gé né rale disposent aussi de


compé tences de police spé ciale.
Exemples :
- le maire a une autorité de police municipale. Il exerce aussi la police des
funé railles ou des animaux dangereux errants (abatage d’un animal
dangereux).
- Le préfet a un pouvoir spécial sur les installations classées (sites Seveso)

Certaines autorité s dé pourvues de police gé né rale disposent de compé tences de


police spé ciales.
- Des ministres n’ont pas de pouvoir gé né ral mais de pouvoir de police
spécial. Cas du ministre de l’Intérieur qui a une police en matiè re de droit des
é trangers (expulsion) ou des publications destiné es à la jeunesse. Le ministre
de la culture dispose du pouvoir de police du ciné ma
- Des AAI (API) ont des pouvoirs de police spécial comme l’ARCOM (ex CSA)
qui assure la police de la diffusion des chaines télés, mais aussi l’AMF (police
spéciale sur les marchés financiers)
- Des directeurs d’EP comme le pré sident d’Université ont des pouvoirs de
police dans leurs locaux.
Plusieurs autorités peuvent ê tre associé s à la mise en œuvre d’un seul ré gime de
police administrative
Exemples :
- L’Etat d’urgence sanitaire avec 3 autorités : PM, ministre de la santé et préfets
- La police spéciale des télécommunications associe à la fois le ministre en
charge et des agences é tatiques (ARCEP comme AAI et ANFR comme API)

II. Les concours de police

S’affirme de plus en plus à cause de la multiplication des pouvoirs de police.


Plusieurs pouvoir de police spé ciale peuvent prendre en charge des thé matiques
communes rentrant dans le champ de certaines autorité s de police. Cette question
a
donné lieu à la distinction entre le concours de police général et celle entre la police
générale et la police spécial.

A. Concours entre polices générales

Confirmation plutô t rare, au niveau national le pouvoir de police gé né rale est


rarement
exercé . Les mesures nationales s’imposent sur celle du niveau local. Le juge
administratif a reconnue la possibilité d’intervenir dans le domaine concerné s’il
existe des circonstances locales particuliè res et uniquement pour renforcer la
ré glementation.

Arrêt CE, 1902, Commune de Néris-les-Bains : dé cret du chef de l’Etat qui interdit
les jeux d’argent dans toutes les viles sauf dans les communes exploitants une
station thermale. Le maire de la commune l’avait interdit dans sa commune en
aggravant sa ré glementation en interdisant une chose permise selon des
circonstances locales. Articulation entre pouvoir de police exercé par le pré fet
(plusieurs communes) et pouvoir de police municipal. Conseil d'É tat dit qu’aucune
disposition n’interdit au maire d’une commune de prendre sur le même objet et
pour sa commune des mesures plus rigoureuses que celles décidées par le préfet.
A peu près même cas dans l’arrêt Labonne pour la police de la circulation : se posait
la question de la possibilité pour un maire d’aggraver les conditions de la circulation
selon des circonstances locales particulières. Il en résulte aussi que les maires
peuvent prendre des réglementations plus rigoureuses au regard des circonstances
locale (aujourd’hui, seulement régi par le code de la route)

B. Concours entre police générale et polices spéciales

Concerne pour l’essentiel la cohabitation entre l’exercice du pouvoir de police


gé né rale au niveau national, et pouvoir de police spé ciale des maires. C’est une
question complexe car pas de ré ponse univoque parce que la ré ponse dé pend de
l’intention du lé gislateur qui a mis en place le ré gime de police spé ciale. Le juge
administratif doit dé terminer au cas par cas si le lé gislateur a entendu donner un
compé tence exclusive à la police spé ciale (pas de possibilité d’intervenir pour la
police gé né rale locale) ou ne chasse par l’exercice de la police gé né rale.

3 ré gimes applicables en cas de concours de police :

- Le titulaire du pouvoir de police municipal peut interférer dans le champ


d’un régime de police spéciale en raison d’un régime de police général.
L’exemple type est celui de la police du ciné ma. CE Sect. 1959, Société
Les
Films Lutetia : Possibilité pour le maire d’interdire un film dans sa commune
pour des raisons particulières.

- Le maire peut toujours intervenir mais dans des situations limité es : il ne


pourra le faire qu’en cas d’urgence, péril imminent ou selon des
circonstances locales très particulières. CE, 2003, Houillères du bassin de
Lorraine : en cas de pé ril imminent, le maire peut prendre une mesure de
police d’interdiction.
Arrêt Ord. 2020 Commune de Sceaux : police spéciale d’urgence sanitaire, le maire
de sceaux prend un arrêté pour imposer le port du masque dans la commune pour
les personnes de plus de 10 ans. Cet arrêté municipal était-il légal? Conseil d'É tat
applique la grille précédente : considère qu’en principe ce pouvoir de police spéciale
empêche le maire de prendre des mesures au titre de son pouvoir de police
générale, « à moins que des raisons impérieuses liées à des circonstances locales
en
rendent l’édiction indispensable », et « à condition de ne pas compromettre la cohérence
et l’efficacité des mesures prises par les autorités de l’État »

- Impossibilité de cumul : l’Etat annonce l’exclusivité de la police spé ciale. Le


maire ne pourra pas prendre en compte des mesures allant à l’encontre de
cette police spéciale.
CE Ass. 2011, Commune de Pennes-Mirabeau : police spéciale des
télécommunications. Qui peut réglementer ? Conseil d'É tat dit que « le maire ne
saurait porter atteinte au pouvoir de police spéciale confié par la loi à différentes autorités
de l’Etat adopter sur les territoires de la commune une réglementation sur l’implantation
d’antennes relais de téléphonie mobile ». Donc affirmation de la compétence exclusive
du pouvoir de police spéciale a des conséquences pratiques importantes. Le CE
ne mentionne pas la possibilité d’action du maire. Affirmation de la seule
compétence de la police spéciale.
CE, 2012, Commune de Valence : police spé ciale en matiè re de dissé mination
volontaire d’OGM. Conseil d'É tat considè re qu’il existe une police spé ciale de la
dissé mination des OGM. Il reconnait que cette police spé ciale s’exerçait de
maniè re exclusive (le maire ne pouvait pas agir). Il en serait en aucun cas
s’immiscer dans une police spé ciale par la mise en œuvre de sa police gé né rale.

III. La délégation des compétences de police

Il est possible de déléguer une compétence de police en tout ou partie à un


opérateur privé. Cette question peut sembler appeler une ré ponse assez simple : les
compétences de police sont des compétences régaliennes donc indélégables. Il est
impossible de dé lé guer sur certains objets comme la police. Mais si ce n’est pas
dé lé gable en principe, il y a des exceptions.
CE, 1997, Commune d’Ostricourt : commune charge une société de surveillance
d’assurer la surveillance des rues de la commune pendant la nuit. Conseil d'É tat
considè re que ce contrat était entaché de nullité car il avait pour effet d’associer la
société privée à une mission de la surveillance des voies publiques relève de la
police seule.
CC, 10 mars 2011, n°2011-625 DC, Loi LOPPSI 2 : pouvoir qui permettait de déléguer
à des socié té s privé es l’exploitation et le visionnage de la vidé osurveillance sur les
voies publiques pour le compte d’une personne publique. Le CC a rendu une
dé cision restrictive en apparence en se fondant sur l’art. 12 de la DDHC qui
proclame la né cessité d’entretenir une force publique pour prononcer
l’inconstitutionnalité de cette disposition lé gislative. Il dé duit de l’art 12 qu’il rend
impossible la délégation à une personne privée de compétences de police générale
inhérentes à la force publique.
Conseil constitutionnel, 2021, Sté Air France : version constitutionnelle d’Arcelor
Lorraine. Conseil constitutionnel dans sa jurisprudence a dé cidé qu’il ne contrô lait
pas les directives europé ennes etc., sauf si est en cause l’identité constitutionnelle de
la France. Ici est en cause l’impossibilité de déléguer des compétences de la force
publique à des personnes privées. Cette impossibilité est considé ré e par le Conseil
constitutionnel comme faisant partie de l’identité constitutionnelle de la France.
● Principes inhé rents à l’identité constitutionnels a pour le moment la seule
impossibilité de dé lé guer des compé tences de la force publique à des
personnes privé es.

Le droit positif reste plus nuancé. Il reste possible de dé lé guer des activité s
maté rielles relevant de la police administrative. Cela doit s’opé rer sous le contrô le
d’une personne publique ou de ses adjoints. L’exercice d’un pouvoir de dé cision en
matiè re de police est impossible mais la participation à l’exé cution de dé cision de
police est possible. Cette action est contrô lé e par la personne publique et ses agents

Exemples :
- Loi qui associe des agents de sé curité privé à des missions de surveillance de
la voie publique. Cette loi est-elle conforme à la C° ? Oui parce que pas de
violation de l’art. 12 de la DDHC dè s lors que les agents en question sont
placé s sous l’autorité d’un OPJ et sous ré serve que soit continument garantie
l’effectivité du contrô le exercé e sur ces personnes par les OPJ (qui sont des
agents de l’Etat)
- Arrêt CE, 2019, Assoc. 40 millions d’automobilistes : possibilité pour des
vé hicules privé s d’identifier par des radars les excè s de vitesse, tout cela
assuré par des opé rateurs privé s. C’est une mission de police de la
circulation. Le CE a considé ré que ces dé cisions é taient lé gales parce que les
seules tâ ches maté rielles sont un simple accessoire de mission de police qui
restent dé volus aux FDO. C’est l’administration qui dé termine le trajet de
ces vé hicules et les
conducteurs n’ont pas accè s aux donné es de contrô les et aux
instruments permettant de relever les infractions.

□ Section 3 : l’exercice du pouvoir de police

I. Obligation ou faculté d’exercer ce pouvoir

La personne publique est dans l’obligation de prendre des mesures de police. Ces
mesures sont souvent ré glementaires mais aussi individuelles qui relè vent de la
police.

Le rô le du pré fet : le pouvoir de substitution d’action vise un but gé né ral ou


certaines polices spé ciales du maire. Lorsque le maire reste passif, le pré fet se
substitue au maire lors de la carence.
Les recours juridictionnels possibles dans les cas d’abstention d’exercice du pouvoir
de police
- Le REP : passivité de l’autorité de police s’analyse comme une décision de
refus, et cette décision peut être contestée par un REP. Arrêt CE, 1959,
Doublet : annulation comme refus ne s’impose que lorsque la mesure de
police est indispensable pour faire cesser un péril grave résultant d’une
situation particulièrement dangereuse pour l’ordre public.

- Le référé-liberté : procé dure d’urgence mise en place par loi de juin 2000, L
521-2 CJA : il peut ê tre utile pour contrecarrer la passivité d’une autorité
administrative dans l’exercice de son pouvoir de police afin de mettre un
terme à une atteinte manifestement grave et illé gale à une liberté
fondamentale. Plusieurs dé cisions emblé matiques, principalement dans un
contentieux où est en cause le droit à la vie, ou ce qui renvoie à l’art 3
Conv.EDH (prohibition des traitements inhumains ou dégradants). Arrêt Sect.
2011, Ville de Paris : engin de chantier perce une dalle et des gravats tombent
sur les clients du H&M en dessous de Chatelet les Halles. Action d’enjoindre
la mairie de suspendre les travaux le temps de remettre cette dalle. On
demande une injonction du juge au maire. Le CE dans cette affaire fait droit à
la demande en mobilisant le raisonnement suivant : lorsque la carence de
l’autorité de police crée un danger caractérisée et imminent pour la vie des personnes
portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté fondamentale,
le juge de référé liberté peut prescrire tout les mesures de nature à faire cesser le
danger résultant de cette carence. Cette jurisprudence ne joue pas à l’é gard de
toutes les menaces : elle ne joue que dans plusieurs hypothè ses : droit à la vie
(art. 3 Conv.EDH) ou risque d’atteinte à l’environnement.
Jurisprudence qui a connu des dé veloppements particuliers pendant la crise
sanitaire: CE, Ord, 22 mars 2020, Synd. Jeunes médecins : mê me raisonnement,
syndicat qui considè re qu’il fallait renforcer les interdits sur la population pendant
le confinement, notamment réduire les dérogations accordées aux personnes
confinées. Y-a-t-il une carence des autorités publiques ? Conseil d'É tat considère que les
mesures prises é taient suffisantes, tout en enjoignant au Premier ministre de mieux
définir les contours des dérogations et donc de restreindre leur étendue
finalement. Jurisprudence spé ciale car sur la base du mê me raisonnement que dans
Ville de Paris, le juge administratif se met en situation d’imposer aux autorité s
administratives de renforcer les restrictions pesant sur la population. le CE s’est
retrouvé dans une position délicate d’aller enjoindre au PM d’aggraver le
confinement. Il ne l’a pas fait mais à demander au PM de préciser encore plus les
possibilité de dérogations.

- Action en responsabilité : il s’agit de dé montrer une faute de la carence


de l’administration qui a entrainé un dommage.
CE, 2000, Compagnie d’assurances Zurich international : carence d’un maire qui ne
prend pas de mesures concernant des gens du voyage.

II. Typologie des mesures de police

Mesures de police sont diverses. En principe, elles sont fortement marqué es


d’unilatéralisme. Ce sont soit des mesures de nature juridique, soit des opé rations
maté rielles.
Les Actes juridiques sont trè s divers : mesures réglementaires, mesures
individuelles. On retrouve des autorisations/agré ments etc. Les actes
d’autorisation/d’agré ment ne peuvent exister que dans le domaine des polices
spéciales. Donc l’autorité de police gé né rale ne peut instituer un ré gime
d’autorisation qui subordonnerait l’exercice d’une liberté à autorisation d’une
autorité de police.
CE Ass., 1951, Daudignac : concerne le Mont-Saint-Michel : photographes
proposaient aux touristes de les prendre en photo. Mais nombre important de ces
photographes entraîne des nuisances dans la gestion des flux de tourisme. Le
maire dé cide de mettre en place un régime d’autorisation. Conseil d'É tat annule cet
arrê té en pré cisant qu’une autorité de police générale ne pouvait pas instituer un
régime d’autorisation. Ces ré gimes doivent ê tre prévus par la loi, ils relèvent des
polices spéciales.
Arrê t de CAA : maire qui a des difficulté s de circulation des poids lourd. Il met en
place un ré gime d’autorisation. Annulation car pas de son pouvoir.
III. Le contrôle des mesures de police

Contrô le des mesures se fait lorsqu’elles ont été prises et sont illicites. Pour
l’essentiel, ces mesures emportent des restrictions de libertés. Donc le contrô le de ces
mesures a des enjeux importants en matière de libertés publiques.
A. L’auteur du contrôle

Le contrô le se fait en grande partie par le juge administratif. Mais il n’est pas seule :
le juge judiciaire peut contrô ler des mesures de police dans le cas de la voie de fait.
Il peut aussi le faire par voie d’exception :
- textes qui figurent dans le Code pénal art R 610-5 : la violation des mesures de
police est sanctionnée d’une contravention de deuxième classe. Rien
n’empêche le pouvoir réglementaire de poser des sanctions pénales pour la
méconnaissance des mesures de police
- Art 111-5 Code pénal : « Les juridictions pénales sont compétentes pour
interpréter et apprécier la validité des actes administratifs lorsque de cet
examen dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis ». Les
juridictions pé nales ont la plé nitude de juridiction. Lorsque l’on ne respecte
pas une mesure, on est passible d’une contravention. Si on conteste, on peut
exciper de l’illé galité de la mesure de police supposé ment violé e. Si l’on
invoque de l’illé galité , le juge pé nal pourra appré cier s’il est lé gal ou non.

Exemple : Cass. Crim., 3 avril 2001 : arrêté préfectoral interdisant une


manifestation anti-IVG près d’un hôpital. La manifestation a quand mê me eu lieu,
les manifestants ont é té verbalisés, et à cette occasion le juge pénal a pu apprécier la
légalité de l’arrêté (mesure de police) pris par le pré fet.

B. L’intensité du contrôle

Question est de savoir l’intensité du contrô le du fait que la mesure de police porte
atteinte à des droits fondamentaux. Existait avant la Haute-police sur laquelle le
juge devait avoir un contrô le assez restreint (police des é trangers, des publications
é trangè res) et le juge é tait limité en cas d’erreur manifeste de l’appré ciation. Tout
cela a disparu. Harmonisation du contrôle des mesures de police. Implique la
légalité externe (procédure, forme) la légalité interne (qualification juridique des
faits et violation de la loi) Le juge veille un triple test :
- Adapté
- Nécessaire
- Proportionnée

Expressions utilisée par le Conseil d'É tat depuis CE Ass., 2011, API. Elles font donc
l’objet de 3 contrô les :
- Contrôle de l’adéquation : savoir si l’atteinte / la restriction à la liberté est
de nature à permettre la ré alisation de l’objectif poursuivi.
- Contrôle de la nécessité : savoir si la mesure de police est né cessaire
pour parvenir à l’objectif poursuivi. Contrô le plus exigeant, on peut
imaginer que
d’autres mesures peuvent être prises sans porter atteinte à l’exercice des
libertés.
- Contrôle de proportionnalité : savoir si la mesure ne porte pas une
atteinte excessive à l’exercice de telle ou telle liberté au regard de l’objectif
poursuivi.
Il faut un juste équilibre entre les libertés atteintes et l’intérêt général.
Triple test qui reprends d’autres é lé ments, notamment celui de proportionnalité :
Arrêt CE, 1933, Benjamin qui inaugure le contrôle de proportionnalité des mesures
de police.

4 remarques sur ces contrô les :


- Sur le contrôle de nécessité : la né cessité d’une mesure s’appré cie au regard
de la situation de fait à la date à laquelle la mesure a é té prise. Mais il y a une
limite: dès lors qu’une mesure s’est avérée inutile, il incombe à l’autorité de
police de l’abroger ou de la modifier CE, 2009, Commune de Crégols

- Sur le contrôle de proportionnalité : la proportionnalité d’une mesure


s’appré cie souvent au regard de l’é tendue de la mesure de police, à savoir son
champ d’application à la fois spatial, temporel (duré e), et matériel (objet
interdit ou pas interdit). Dè s lors qu’est en cause la police gé né rale, le juge se
montre très réservé à l’égard de mesures d’interdictions générales (sur le
plan gé ographique, de la duré e, et de l’objet des mesures). Illustrations :
CE sect., 1984, Préfet de police de Paris / Guez : arrêté interdisant de manière
générale et permanente les activité s musicales de toute nature sur les voies
pié tonnes de Paris. Conseil d'État considère que cette mesure était
disproportionnée.
CE, 2021, Ligue française pour la défense des droits de l'homme et du
citoyen : arrêté pris par le maire de Saint-Étienne, anti punk à chiens dans le
centre de la ville. Conseil d'É tat annule cet arrê té pour les mê mes raisons : il
constate ici que l’interdiction durait 3 mois, mais sans limitation de jours et
de plages horaires. Deuxiè me é lé ment : le périmètre de l’interdiction était
trop important (l’ensemble du centre-ville de Saint-É tienne). Et troisiè me
é lé ment : le nombre d’activité s prohibé s par l’arrê té . Donc interdiction très «
générale et absolue portant atteinte à la liberté personnelle ».

- Sur les contentieux assez problématique : pratique qui imposait le port du


masque dans les zones fré quenté es. Tendance de certain pré fet à é tendre
l’obligation du port du masque à des zones plus é tendues pour des raisons
pratiques. CE, 2020, Min. de la santé / Asso « Les Essentialistes - région
Auvergne- Rhône-Alpes : arrê t qui ouvre la voie à la prise en compte, dans le
contrô le de proportionnalité , de la né cessité que la mesure ait des qualité s de
simplicité et de lisibilité suffisantes pour le citoyen. Difficulté s pour savoir
où exactement le port du masque é tait obligatoire. Difficulté qui s’est
posé e
pour les autorité s de police, donc dans un objectif de compréhension et de
continuité, elles ont pris des arrêtés avec des champs d’application qui
excédaient ce qui était nécessaire. Conseil d'É tat dit qu’il faut tenir compte de
la nécessité pour les autorités administratives d’assurer l’effectivité des
mesures à prendre, en assurant leur simplicité et lisibilité. Le pré fet é tait
donc en droit de dé limiter des zones suffisamment larges pour englober les
points du territoire caracté risé par une forte densité de personnes.

- Sur l’articulation entre mesures de polices et droit des discriminations : CE,


2017, Ligue des droits de l'Homme c/ Commune de La Madeleine : arrê té de
police municipale, interdisant la fouille des poubelles sur le territoire de sa
commune dans un contexte de l’installation sur le territoire d’un groupe de
personnes Roms. La mesure prise ne visait pas spécifiquement la
communauté Rom. Mais elle a é té prise en raison de l’installation de cette
communauté sur le territoire de sa commune. Le Conseil d'É tat juge que « la
seule circonstance qu’une mesure de police affecte particulièrement la situation de
certaines personnes ne suffit pas à lui conférer un caractère discriminatoire. » Cela
renvoi à des discriminations indirectes (mesures générales qui ne visent
personne mais dont l’impact se fait ressentir particulièrement par un groupe
en particulier). « Il revient donc au juge administratif de vé rifier si la mesure
est justifié e par des considé rations relatives à l’ordre public, et de contrô ler
son caractè re proportionné en tenant compte de ses consé quences pour les
personnes dont elle affecte la situation, et en particulier lorsqu’elle apporte
une restriction à l’exercice des droits ». Le Conseil d'É tat dit donc ici
implicitement qu’il n’y avait pas de droit en cause (il n’existe pas de droit à
fouiller les poubelles). Recours de la Ligue des droits de l'Homme est rejeté.

Partie 5 : la responsabilité de l’administration

Le droit de la responsabilité administrative a é té entiè rement conçu par le Conseil


d’É tat. Il reste un droit quasi-exclusivement jurisprudentiel.

Introduction :
Considérations historiques sur de le droit de la responsabilité administrative.
Idé e que la responsabilité de l’administration pourrait ê tre engagé e a mis du temps
à s’installer, du moins pour les fonctions ré galiennes de
l’administration.
L’administration a pendant é té longtemps irresponsable. Mais il y avait un certain
nombre d’exceptions où la responsabilité de l’administration pouvait ê tre engagé e :
dans le domaine contractuel, lorsque des textes législatifs le prévoyait (responsabilité
pour les dommages de travaux publics pré vue par la loi 28 pluviôse an VIII), et
hypothè ses où c’é tait le juge judiciaire qui é tait compé tent pour connaître de
l’activité administrative dans hypothè se de la gestion privé e lorsque
l’administration agit comme une personne privé e (domaine privé des collectivité s).

Point de bascule où l’on abandonne le principe d’irresponsabilité de l’administration


: avec CE, 1905, Tomaso Greco : marque l’abandon de l’irresponsabilité de
l’administration en matière de police administrative. Ce champ de responsabilité
reste particulier puisque l’engagement de la responsabilité est subordonnée à
l’existence d’une faute qualifiée / lourde.

Il existe (ou existait jusqu’à ) aujourd’hui 2 cas d’irresponsabilité de l’administration


- Les opérations militaires : CE, 2010, Soc. Touax : derniers cas d’irresponsabilité
de l’É tat. « Les opérations militaires ne sont pas susceptibles d’engager la
responsabilité de l’État y compris sur le fondement de la rupture de l’égalité
devant les charges publiques (= y compris sans faute). » É taient ici en cause les
bombardements des forces de l’OTAN sur les immeubles de télévision serbe,
action engagée par cette société visait à obtenir réparation des dommages.
- Actes de gouvernement : CE, 2016, Bernabé : possible d’engager la
responsabilité sans faute de l’État du fait d’un acte gouvernemental.

Donc au XIXè me, la responsabilité de l’administration était plus difficile à engager


que celle d’une simple personne physique ou morale.
Mais la perspective actuelle est presque inverse : tendance massive à la mise en
cause de la responsabilité de l’administration. Elle peut ê tre engagé e non seulement
du fait des actes de ses agents, mais de plus en plus la responsabilité de
l’administration peut ê tre engagé e pour des dommages dont elle n’est pas la cause
mais qu’elle n’a pas empêchés.
Phé nomè ne d’extension du champ de la responsabilité administrative, est
l’illustration du phénomène général de la socialisation des risques. L’idé e que tout
risque doit ê tre couvert. On en trouve des traductions importantes dans le champ de
la responsabilité administrative. Et dé veloppement des fonds d’indemnisation. Elle
passe par la mise en cause de l’Etat mais aussi par un phénomène de multiplication
des régimes multiplicatifs de fond d’indemnisation.

2 types de responsabilité dont on ne parlera pas :


● La responsabilité pénale des personnes publiques. Leur responsabilité peut
ê tre engagé e mais de maniè re plus limité e que les personnes privé es :
- L’État ne peut être pénalement poursuivi,
- Les collectivités territoriales ne peuvent être pénalement poursuivis que
pour leurs activités qui sont susceptibles de faire l'objet d’une délégation de
service public, certaines mesures de sanctions existantes ne peuvent pas ê tre
prises à l’é gard des personnes publiques (ex: dissolution)

● La responsabilité civile des personnes publiques. La responsabilité


administrative fait é cho à la responsabilité civile, c’est toujours l’idé e
d’indemniser la personne qui subit un dommage. Mais on ne va s’inté resser à
l’action en ré paration que lorsqu’elle est formé e devant le juge administratif.
Mais il y a tout un contentieux de la responsabilité de l’administration qui
relè ve du juge judiciaire. Lorsque le juge judiciaire est compé tent, en ré alité il
n’applique pas le droit commun, il s’inspire des ré gimes de responsabilité du
droit administratif

Exemples : Cass. Civ., 1956, Trésor public c. docteur Giry : médecin requis par un
procureur pour intervenir sur un lieu d’une explosion dans le cadre d’une enquête
menée par les forces de l’ordre. À l’occasion de cette mission, il est blessé, il engage
une action en responsabilité devant le juge judiciaire pour obtenir ré paration
devant le juge judiciaire car il a é té blessé à l’occasion d’une opé ration mené e par la
police judiciaire. La cour d’appel fait application de 1384 Code civil (commettant
pré posé ). Cet arrê t est cassé par la Cour de cassation qui estime qu’il convenait pour
le juge judiciaire dans un tel contexte de s’inspirer des règles du droit administratif,
en l'occurrence du régime de responsabilité applicable aux collaborateurs
occasionnels du service public. Il aurait fallut s’inspirer de la jurisprudence
administrative.
TC, 8 février 2021 (perquisition) : opération de police judiciaire : perquisition au
domicile d’une personne dans le cadre d’une enquê te pré liminaire, entraine des
dommages, pour le colocataire de la personne perquisitionnée. Action en
responsabilité , le juge judicaire est compétent en principe. Tribunal des conflits
souligne que le ré gime applicable é tait un ré gime qui s’inspire des rè gles fixé es par
le juge administratif en la matiè re : tiers (colocataire) par rapport à l’opération de
police qui n’est pas visée doit bénéficier d'un régime de responsabilité sans faute.
□ On s’inspire de la responsabilité de l’administration

Chapitre 1 : les conditions d’engagement de la responsabilité

3 conditions réunies pour engager la responsabilité administrative :


- fait dommageable
- préjudice
- lien de causalité entre les deux
La responsabilité sans faute tient une place plus importante en droit administratif
qu’en droit de la responsabilité civile.

□ Section 1 : le fait dommageable

I. L’imputabilité

A. L’imputabilité entre personne publique

En principe, la personne publique responsable est celle dont les services, les
ouvrages, les agents ou actes juridiques sont à l’origine du dommage.
Mais par exception, cette imputabilité est plus délicate à déterminer, notamment en
pré sence de plusieurs personnes publiques. 5 situations :

1. La responsabilité du fait de l’exercice des fonctions juridictionnelles

Lorsqu’est en cause la fonction juridictionnelle, la responsabilité ne peut être


que celle de l’État (la justice est rendue au nom de l’É tat) Quand bien même
cette fonction serait assuré par un organe qui relève d’une autre personne publique.
En mê me temps, il arrive que la fonction juridictionnelle soit exercée par des
organes relevant d’autres personnes publiques.
CE Sect., 2004, Popin : au sein des universités, sections disciplinaires sont chargées
de juger les fautes commises par les étudiants, notamment la fraude aux examens,
mais aussi commises par le personnel. Sections qui é taient de vé ritables juridictions
administratives spé cialisé es. Dè s lors qu’on souhaitait engager une action en
responsabilité du fait de ce mauvais fonctionnement de la juridiction, ces actions ne
peuvent ê tre engagé es que contre l’É tat, car la justice est rendue en son nom.
Conseil d'É tat rappelle que quelles que soient les juridictions administratives en
cause, le contentieux de la réparation ne se déroulera que devant l’État.

2. L’utilisation du pouvoir de substitution d’action

Le pré fet prend une mesure à la place du maire, cette mesure entraîne un dommage,
l’action devra ê tre portée contre la commune : c’était au maire de prendre la
mesure, donc la collectivité endosse la responsabilité consécutive à l’acte en
cause.

3. La dé lé gation de service public ou d’exploitation d’un ouvrage

Que se passe-t-il quand le service est délégué à une personne privée et que le fonctionnement
de l’ouvrage provoque un dommage ? Qui sera responsable de la réparation du dommage ?
En principe, c’est au dé lé gataire qu’il incombe d’assumer la ré paration. Mais le
Conseil d'É tat a jugé dans CE, 2000, Agofroy, que la responsabilité du déléguant
peut être engagée à titres subsidiaire « dans l’hypothèse où le délégataire serait
insolvable »

4. L’acte dommageable est un acte d’exé cution du droit UE

Conseil d'É tat a jugé dans CE Sect., 2004, Gillot, que « dès lors que l’acte
dommageable est la conséquence directe et inéluctable d’un acte de droit dérivé de
l’UE, de telle sorte que l’autorité administrative ne disposait d’aucun pouvoir d’appréciation
dans sa mise en œuvre, cet acte ne peut engager la responsabilité de l’État. » —> sous-
entendu : action devra être engagée devant UE. Une décision du ministre de l’agriculture
qui demande à ses services de prendre une mesure d’exécution d’une directive
européenne.

5. Activité à laquelle collaborent plusieurs personnes publiques

Ici, notamment dans l’hypothèse où sont en cause des fautes commises par
plusieurs
personnes publiques, la victime pourra engager une action en responsabilité
contre l’ensemble des personnes publiques, ou contre une seule d’entre elles
pour l’ensemble de son pré judice, à charge de cette personne publique de se
retourner contre une autre personne publique
Arrêt de l’affaire du sang contaminé : le CE a dit que la victime peut engager contre une
seule personne publique et ce sera la personne publique qui devra se dé brouiller
aprè s.

6. Hypothèse de la collaboration entre personne publique et privées

Avis, CE, 2023 : avis de contentieux du CE : la victime pourra demander la


réparation à une personne publique, à charge de cette personne publique de
former une action récursoire à l’encontre des autres personnes publiques ou
privées impliquées.

B. L’imputabilité de la responsabilité entre la personne publique et son agent

Question de la responsabilité du commettant et du préposé. Qui du salarié ou de


l’employeur sera responsable ?
Ici, ré ponse donné e par le droit administratif ne repose pas sur les mê mes principes
que ceux du droit civil. De maniè re gé né rale, il y a un fil directeur dans tous les
contentieux qui vont suivre : l’objectif de favoriser l’indemnisation de la victime
avec le constat que l’administration est toujours plus solvable que ses agents.
Idé e : permettre à la victime d’engager la responsabilité de l’administration plutô t
que celle des agents de l’administration. Il faut faire 2 distinctions structurantes :
- Faute de service / Faute personnelle
- Obligation à la dette / Contribution à la dette

1. Faute personnelle et faute de service

a. Origine de la distinction

Explication de cette distinction est d’abord historique, liée à un système mis en


place par la Constitution du 22 frimaire an VIII. La Constitution du consulat, qui
met en place la garantie du fonctionnaire, qui consiste en ce que dè s lors qu’on
souhaite mettre en cause la responsabilité des agents de l’administration pour des
faits relatifs à leurs fonctions, devant les tribunaux judiciaires, on devait obtenir
l’autorisation du Conseil d’État.

Ce ré gime mis en place par la Constitution a é té abrogé par le décret-loi 19


septembre 1870 : dè s lors qu’il n’y avait plus besoin de l’autorisation du Conseil
d’État, risque que la responsabilité des agents de l’administration soit
systématiquement engagée devant les juridictions judiciaires, dans un contexte où
il y avait un principe d’irresponsabilité de l’administration. Pour é viter ce risque, ce
dé tournement de procé dure, le Tribunal des conflits avec la dé cision TC, 1873,
Pelletier, a posé un principe : « le décret-loi de 1870 n’a pu déroger au principe de
séparation des autorités administratives et judiciaires (voire infra), et donc attribuer au juge
judiciaire la connaissance d’actes effectués dans l’exécution de leurs services, par les
agents de l’administration. » Dè s lors que sont en cause des actes des agents de
l’administration commis dans le cadre de leur service, ils ne peuvent ê tre poursuivis
devant le juge judiciaire. Distinction posé e entre faute de service, et faute
personnelle de l’agent.
Il n’est pas possible d’engager la responsabilité des agents du fait d’une faute de
service et que dè s lors que la faute n’est pas dans l’exé cution du service, c’est le
judiciaire qui devient compé tent.

b. L’é conomie de la distinction

Elle paraît simple intuitivement. Mais il faut affiner cette distinction. On considè re
qu’il y a 2 types de faute personnelle :
- Faute commise en dehors du service (ex: accident de la route provoqué par
un agent, pas de lien avec le service)
- Faute commise à l’occasion du service, mais détachable de ce service en
raison de sa particulière gravité ou l’intention de nuire qui les a motivé, pour
deux raisons :
o Soit parce qu’elle est d’une particulière gravité (TC, 1908, Girodet c.
Morizot : propos obscènes tenus par un instituteur dans sa classe (faits
commis à l’occasion du service) mais faute personnelle car
particulièrement grave.
o Soit parce qu’elle manifeste une intention de nuire de l’agent : Civ 1,
18 janvier 2023 : Cour donne sa propre définition de la faute
personnelle de l’agent public : « un manquement volontaire et
inexcusable à des obligations d’ordre professionnel et déontologique »

2 précisions :
TC, 1935, Thepaz : le simple fait que le comportement de l’agent soit constitutif
d’une infraction pénale n’entraine pas pour cette simple raison la qualification de
faute personnelle.
Exemple : type : lorsqu’un fonctionnaire au volant d’un véhicule de service commet
une faute de conduite, qui peut ê tre une infraction pénale, mais pas forcément une
faute personnelle si elle a é té commise à l’occasion du service.
TC, 1935, Action française : Tribunal des conflits pré cise que le simple fait que le
comportement d’un agent est constitutif d’une voie de fait (voire infra) n’entraîne
pas de manière automatique la qualification de faute personnelle. É tait en cause la
dé cision du pré fet de saisine de journaux de l’action française : é tait considé ré
comme une voie de fait. Mais cette faute n’a pas é té considé ré e comme personnelle.

c. L’hypothè se du cumul des fautes

Il arrive qu’à l’origine d’un dommage, on trouve à la fois une faute personnelle et
une faute de service : on parle de cumul des fautes.
L’inté rê t du cumul des fautes est pour la victime : elle pourra engager son action
devant le juge administratif et demander indemnisation de l’ensemble de son
préjudice, et l’administration pourra se retourner ensuite contre ses agents.

Hypothèse courante, illustrée par une série d’affaires emblématiques :


- CE, 1911, Anguet : bureau de poste dans lequel un usager vaque à ses
occupations, le bureau de poste ferme quand l’usager est encore présent, des
agents constatent sa pré sence quand ils manipulent des fonds, et le chassent
violemment. L’usager engage leur responsabilité : Faute personnelle des agents
(violence) ou faute de service (fermeture anticipée) ? Conseil d'É tat reconnaît le
cumul des 2 fautes : violence des agents et mauvais fonctionnement du
service ( fermeture pré maturé e)
- CE Ass.,2002, Papon : Maurice Papon, longue carriè re : ministre, pré fet de
police de Paris, et d’abord secré taire gé né ral de pré fecture de la Gironde : il
participe à l’organisation de convois de déportés juifs vers l’Allemagne, et
l’administration française a mê me devancé l’Allemagne à ce moment-là .
Papon condamné au pénal, mais également sur l’action civile :
indemnisation des descendants de dé porté s, il considérait lui qu’on ne
pouvait pas lui imputer une faut personnelle mais c’était une faute
administrative. Il engage une action devant le juge administratif. Le Conseil
d'É tat considè re un cumul de faute : qu’à l’origine du pré judice il y avait à la
fois une faute personnelle de Papon d’une particuliè re gravité , mais aussi une
faute de service (de l’É tat) en ce qu’il a mis en œuvre une politique autonome
d’arrestation et d’internement des Juifs. Mais confirmation diffé rente :
d’abord agent condamné pour faute personnelle, puis se retourne contre
l’État.

d. L’hypothè se rare de la faute à double face

Hypothè se dans laquelle un mê me comportement peut ê tre qualifié aussi bien de


faute
personnelle et de faute de service. Un même comportement est à la fois une faute de
service et une faute personnelle (à ne pas confondre avec le cumul de faute)
CE, 1918, Lemonnier : arrê t à l’origine de cette hypothè se. Affaire d’une fête de
village organisée, à l’occasion de laquelle il y a un stand de tir. Au cours de la
journé e, stand de tir mal placé , les balles qui ratent leur cible passent par dessus le
stand et risquent de toucher les gens qui passent. Le maire est prévenu, il ne fait
rien. Puis une dame reçoit une balle au visage, elle survit. Est-on en présence d’une
faute personnelle (du maire) ou une faute de service (de la commune) ? Conseil d'É tat
considè re ici que le comportement du maire peut-être qualifiée à la fois de faute de
service et de faute personnelle. La passivité du maire de mise en place de mesure
de sécurité est à la fois une faute grave et une faute personnelle.
L’inté rê t de cette qualification en faute à double-face est que le fait de reconnaître la
faute à double-face permet de donner à la victime une option concernant l’action en
justice pour obtenir réparation : soit devant le juge judiciaire au titre de la faute
personnelle du maire (action en responsabilité civile), soit devant le juge
administratif contre la commune. Cela permet d’agir devant l’administration, qui
est toujours solvable.

Cette jurisprudence est tombé e en désuétude, en raison de l’affirmation d’une autre


série de jurisprudences, depuis les années 1940, qui permet de parvenir au mê me
ré sultat sans passer par l’idé e de faute à double-face. La victime engage la
responsabilité de l’administration devant la faute de l’agent alors mê me que c’est
une faute personnelle de l’agent car elle n’est pas dé pourvu de tout lien avec le
service.
2. Obligation et contribution à la dette

La distinction entre obligation et contribution à la dette est essentielle. Toute la


jurisprudence administrative sur la responsabilité est inspiré e par une exigence de
permettre à la victime d’obtenir une indemnisation, donc de favoriser son action
contre la personne publique. Il faut comprendre la distinction à l’aune de cette
exigence.

L’ obligation à la dette est la réponse à la question « Contre qui la victime peut


engager une action en responsabilité ? » Ce sont les personnes pouvant voir leur
responsabilité engagée.
La contribution à la dette est la ré ponse à la question « Qui va supporter en
définitive le coût de l’indemnisation ? » Ce sont les personnes qui vont supporter
en dé finitive la charge de l’indemnisation de la dette.

a. Obligation à la dette

Contre qui la victime d’un dommage dû à l’administration et/ou ses agents doit porter son
action ? Ce sont les actions ouvertes à la victime.
- Dommage imputable aux services : juge administratif avec une action contre
l’administration
- Dommage imputable aux agents : juge judiciaire action pour faute
personnelle

- Cumul de fautes ou faute à double-face : victime a une option, elle peut


engager une action en responsabilité contre la personne publique pour
obtenir indemnisation de l’ensemble de son pré judice. Inté rê t est que la
victime pourra engager une action devant le juge administratif alors mê me
qu’est aussi en cause une faute personnelle de l’agent.

CE, 1949, Mimeur : ouvre une nouvelle piste, dé gage une nouvelle notion : « la faute
personnelle non dépourvue de tout lien avec le service » Lorsqu’à l’origine du
dommage il y a une faute personnelle de l’agent, mais que cette faute personnelle
n’est pas dé pourvue de tout lien avec le service, la victime pourra engager son
action devant le juge administratif contre l’administration pour obtenir réparation,
plutôt que contre l’agent auteur du dommage. Cette affaire fait donc tomber en
désuétude la jurisprudence Lemonnier. Pour se trouver dans cette situation, il faut
que la faute personnelle ait un lien soit matériel, soit spatial, soit temporel avec le
service :
- Lien matériel : faute personnelle, mais dommage provoqué à cause des
moyens du service
- Lien spatial : faits ont é té commis sur le lieu du service
- Lien temporel : faits ont é té commis pendant les heures de service
□ Dans ces 3 cas, la faute personnelle n’est pas dépourvue de tout lien avec le
service. Donc la victime pourra engager son action en responsabilité
contre la personne publique pour obtenir réparation de l’intégralité de
son préjudice.

Exemples de ces fautes personnelles non dépourvues de lien avec le service :


- CE, 1973, Sadoudi : deux policiers amis. Au cours d’une soiré e, l’un d’eux tue
accidentellement son collè gue de travail avec son arme de service, alors que
ses deux agents ne sont pas en service et pas sur leur lieu de service. Mais ici,
Conseil d'État permet aux ayants-droits de M. Sadoudi d’engager son action
contre l’administration car la faute personnelle de l’agent n’est pas
dépourvue de tout lien avec le service car à l’époque les agents avaient
obligation de conserver leur arme à leur domicile. L’administration a fourni
le moyen (donc lien maté riel existe).

- CE, 1988, Raszewski : affaire criminelle importante du tueur de l’Oise, qui a


tué 26 jeunes femmes. Mais ce tueur é tait un gendarme, donc il a pu é chapper
aux investigations, car il avait des infos de premiè re main sur l’avancement
de l’enquê te. Les parents de l’une des victimes, Mme Raszewski, engagent
une action en responsabilité contre l’État. Le Conseil d'É tat considè re qu’il y
avait é videmment une faute personnelle du gendarme, mais qu’elle est non
dépourvue de tout lien avec le service, car en raison de sa qualité de
gendarme le meurtrier a eu des informations de première main sur
l’enquête qui lui ont permis de continuer à perpé trer ses crimes et é chapper
plus longtemps à l’arrestation. Donc État a été condamné.

b. Contribution à la dette

Quelle est la répartition de la charge de la dette ? Quel est le patrimoine qui va


supporter le coût de l’indemnisation à la victime ?

CE Ass.,1951, Laruelle et CE, Delville (2 arrêts) : jurisprudence qui fait le point sur
les différentes actions possibles dans les différents contextes avec 3 possibilités :

- Le juge administratif considère qu’à l’origine du dommage il n’y a qu’une


faute de service, pas de faute personnelle. Alors il condamne administration
à indemniser l’agent pour l’ensemble des sommes auxquelles il a é té
condamné devant le juge judiciaire
- Le juge administratif considère qu’il y a une faute personnelle, mais aussi
une faute de service. Alors il indemnise partiellement l’agent condamné
devant le juge judiciaire, pour que chacun prenne sa part (hypothè se Papon).

- L’administration a été condamnée par le juge administratif. Le juge


administratif considère qu’il n’y a qu’une faute personnelle, alors il rejette
le recours de l’agent. La victime a agi devant le juge administratif, et
l’administration a é té condamné e à l’indemniser (hypothè se Raszewski)
Administration peut alors aussi considé rer qu’il y a aussi une faute
personnelle donc un cumul de fautes, et se retourner contre son agent pour
engager une action ré cursoire (devant le juge administratif) pour que l’agent
soit condamné à prendre en charge tout ou partie des sommes de
l’administration versé e à la victime. Cela peut se faire en cas de dé cisions de
justice ou de transaction (MARL)

Ici, atypique que l’action en responsabilité intervienne devant le juge


administratif, car le défendeur est ici une personne physique (l’agent), et non une
personne morale de droit public. La personne publique se retourne contre son agent
Il faut relever ici que l’appré ciation de la faute de l’agent prend une forte coloration
disciplinaire (question des manquements professionnels) : le juge administratif
s’inté resse moins au lien entre comportement de l’agent et le dommage qu’à
l’existence ou non de manquements de l’agent à ses obligations professionnelles.
Donc la faute personnelle de l’agent a une coloration différente de celle qu’elle a
devant le juge judiciaire. Idée intéressante illustrée dans une affaire célèbre dans les
années 1950 (CE, 1957, Jannier) : un groupe de jeunes au service militaire qui va
voler un véhicule militaire et part faire la fête et provoque un accident. Ici, la victime
de l’accident a agi contre l’État, qui a été condamné, et l’État s’est retourné contre
ses agents.
Si le juge judiciaire avait é té saisi, il ne se serait pré occupé que du comportement du
conducteur et recherché l’existence d’une faute personnelle de l’agent. Alors que
devant le juge administratif, l’action est engagé e à la fois contre le conducteur pour
une faute personnelle, mais aussi contre les autres militaires, qui ont commis un
manquement à leurs obligations professionnelles. Donc on constate que des fautes
professionnelles ont été commises par les autres.

II. Nature du fait dommageable

2 grands ré gimes de responsabilité de l’administration en droit administratif :


- responsabilité pour faute (fait dommageable est fautif)
- responsabilité sans faute (fait dommageable est non fautif).

A. La responsabilité pour faute


1. La dé finition de faute

Dé finition gé né rale de la faute en droit de la responsabilité administrative est la


même qu’endroit civil. Selon Planiol, la faute est « Un manquement à une
obligation préexistante »
La faute peut résulter de deux choses :
- d’un acte matériel
Exemple: violences commises par des agents de l’administration
- d’un acte juridique. Cet acte n’est pas forcé ment dé cisoire ou une AAU, un
simple avis peut ê tre une faute et provoquer un dommage justifiant que
puisse ê tre engagé la responsabilité de l’administration
CE Sect., 2003, SA Laboratoire pharmaceutique Bergaderm : avis d’une autorité
administrative (Commission de sé curité des consommateurs) exprimant des
réserves par rapport à un produit fabriqué par le laboratoire Bergaderm. Le juge
administratif reconnaît que la responsabilité de l’administration peut ê tre engagé e.
Il y avait eu une baisse de la vente de ce produit suite à l’avis. C’est un acte
juridique, il y a un dommage (perte de marché), et un lien de causalité entre les deux.
Donc la responsabilité de l’administration peut être engagée.

Lien de causalité peut exister entre illé galité , faute et condamnation à ré parer : en
principe, toute illégalité est constitutive d’une faute.
Mais en revanche, toute illégalité fautive n’entraîne pas forcément l’engagement
de la responsabilité de l’administration. Pour que l’administration soit condamné e,
il faut un lien entre l’illégalité et le dommage. Pour dé terminer si une dé cision
illé gale peut entraîner une condamnation de l’administration à ré parer un
dommage, il faut dé terminer si en l’absence de cette illé galité l’administration aurait
pu ou n’aurait pas pu prendre la mê me dé cision.

- Exemple de motif de lé galité externe : Une commune dé livre un permis de


construire à une personne. La dé livrance de ce permis de construire peut
cré er un dommage pour les tiers (voisins). Une fois bâ timent construit, le juge
administratif annule le permis de construire pour vice de procédure. Donc
on a un permis de construire illé gal, il y a une faute de l’administration. Un
dommage est invoqué , mais il y a un problè me : certes le permis est illé gal,
mais pour un problème de procédure, et si administration avait respecté la
procédure, l’administration aurait pu délivrer le même permis.
Si mis de côté le vice, la décision aurait pu être prise, alors pas de
dommage. Donc pas ré ellement de lien entre illégalité fautive et le
dommage subi. La dé cision sur le fond est lé gale, mais pas sur la forme,
mais la dé cision en elle-mê me pouvait ê tre prise.
- Exemple avec des motifs de lé galité interne : médecin contractuel qui
travaille dans un établissement hospitalier. Administration refuse de
renouveler son contrat, en se fondant sur un motif qui s’est avé ré ê tre erroné .
Mais mé decin fait un REP, et obtient satisfaction, car le juge administratif a
considé ré que la décision de non renouvellement était entachée d’une erreur
de droit : le motif invoqué par l’administration n’é tait pas de nature à ne pas
renouveler le contrat. Mais il n’obtient pas réparation, car certes motif
invoqué par administration n’est pas fondé, mais dans tous les cas, il y avait
d’autres motifs qui pouvaient justifier le non renouvellement (ex: motif
d’inté rê t gé né ral). Cela montre qu’il n’y a pas de lien de causalité entre
illégalité supposément à l’origine du dommage, et le dommage.

2. L’auteur de la faute

L’auteur de la faute de nature à engager la responsabilité d’une personne


publique, n’est pas forcément un démembrement du pouvoir exécutif. La
responsabilité de l’É tat devant le juge administratif peu aussi ê tre engagée à raison
de textes et des décisions émanant du pouvoir législatif ou de juridictions
administratives ou judiciaires. Donc la responsabilité de l’administration peut ê tre
engagé e en raison des décisions de l’ensemble des organes de l’État.

a. L’é ventualité de la responsabilité pour faute de l’Etat du fait de la loi

Cette idé e est ré cente, car le législateur est censé émaner des représentants du
peuple, et il y a des difficultés à l’idée que les représentants du peuple pourrait
mal faire.
Il existe depuis trè s longtemps en droit français une responsabilité de l’État sans
faute du fait des lois, depuis 1930.

Mais engagement de la responsabilité de l’É tat pour faute du fait de la loi


inconstitutionnelle ou inconventionnelle est une idée plus récente. Elle s’est
imposé e car il existe aujourd'hui plusieurs voies qui permettent de faire constater
l’inconventionnalité de la loi (CE, Ass. 1989 Nicolo : les juridictions ordinaires
peuvent constater l’incompatibilité de dispositions d’une loi avec engagements
internationaux) ou l’inconstitutionnalité de la loi (QPC existe depuis 2010 donc
possible de constater l’inconstitutionnalité d’une loi qui est en vigueur -> contrô le a
posteriori).
Donc question a fini par se poser : est-il possible d’engager une action en
responsabilité
de l’É tat dans l’hypothè se où l’inconstitutionnalité ou l’inconventionnalité aurait
causé
un dommage ? Oui. Responsabilité de l’É tat du fait des lois inconventionnelles :
CE Ass., 2007, Gardedieu : arrê t qui inaugure l’éventuelle responsabilité de l’État
du fait d’un manquement de la loi à un engagement international. Conseil d'É tat
dit ici que la responsabilité de l’É tat du fait des lois est susceptible d’ê tre engagé e
pour l’ensemble des pré judices qui ré sulte de l’intervention d’une loi adopté e en
mé connaissance d’un engagement international.
Formellement, le Conseil d'É tat ne parle pas de faute du lé gislateur ou de la loi mais
le terme de « manquement à des engagements internationaux » Cette jurisprudence
pose des conditions à l’engagement de la responsabilité de l’É tat du fait de la
mé connaissance des engagements internationaux :
- L’engagement doit remplir les conditions posé es art. 55 C° pour qu’il soit
applicable dans l’ordre juridique interne (ratification régulière, publication,
et également réciprocité)
- La disposition de l’engagement mé connue doit ê tre d’effet direct (GISTI
2012)
CE, 2018, A et Syndicat local CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers-
Villeneuve-Asnières : syndicat qui tente d’engager la responsabilité de l’É tat du fait
d’une loi inconventionnelle, le Conseil d’É tat rejette la requê te, car les dispositions
internationales supposément méconnue par la loi, étaient dépourvues d’effet
direct.

Responsabilité de l’État du fait des lois inconstitutionnelles.


CE, Ass. 24 décembre 2019, Société hôtelière Paris Eiffel Suffren : Conseil d'É tat
pré cise que la responsabilité de l’État peut être engagée pour réparer l’ensemble
des préjudices qui résultent de l’application d’une loi méconnaissant la
Constitution, mais deux conditions : la responsabilité de l’É tat ne peut ê tre engagé e
que si le Conseil constitutionnel a déclaré la disposition inconstitutionnelle sur le
fondement de l’art 61-1 C° (donc dans le cadre de la procédure de QPC). Le Conseil
constitutionnel doit avoir effectivement constaté l’inconstitutionnalité de la
disposition législative litigieuse. La seconde condition est qu’il ne faut pas que le
Conseil constitutionnel dans sa dé cision ait entendu de manière explicite ou
implicite écarter toute action indemnitaire du fait de l’inconstitutionnalité de la
loi : il l’exclu expressé ment ou il laisse subsister des effets pé cuniaires. Si l’action en
responsabilité demande des indemnisations pour les effets passé es d’une loi, cela
pourra ê tre refusé .

a. L’é ventualité de la responsabilité pour faute de l’Etat du fait des décisions


juridictionnelles

Cas mis de cô té : le juge compé tent pour connaître les actions en responsabilité du
fait de dysfonctionnements de la juridiction judiciaire est le juge judiciaire (art L781-1
Code de l’organisation judiciaire). Elle ne peut ê tre engagé e que pour faute
lourde
et l’autorité de la chose jugée s’oppose à la responsabilité de l’Etat dans le cas où cela
résulte d’une décision devenue définitive.

Ici encore, responsabilité de l’É tat peut ê tre engagé e du fait des juridictions
administratives. Arrêt CE Ass.,1978, Darmont : pose le cadre gé né ral concernant
cette responsabilité : le principe est qu’une faute lourde commise dans l’exercice de
la fonction juridictionnelle par les juridictions administratives est susceptible
d’ouvrir un droit à indemnité (responsabilité peut ê tre engagé e que si on dé montrer
existence d’une faute lourde). Mais en revanche, responsabilité de l’État ne peut être
engagée dès lors que la faute lourde alléguée résulterait du contenu même d’une
décision juridictionnelle devenue définitive (responsabilité ne peut pas ê tre
engagé e quand est en cause une supposé e faute lourde ré sultant du contenu d’une
dé cision du juge administratif) Principe d’irresponsabilité , en raison de l’autorité de
la chose jugé e.

Mais cette dé cision a é té depuis un peu atteinte :


CJCE, 2003, Köbler : l’É tat est responsable pour tout manquement à l’égard du
droit UE, y compris si ce manquement est imputable à ses juridictions. Donc
l’État est responsable de tout manquement de ses organes au droit UE, y
compris quand ce manquement est imputable aux juridictions.
Le Conseil d'É tat a tiré les conséquences de cette position en ce qui concerne le droit
UE : CE, 2008, Gestas : Conseil d'É tat complète la jurisprudence Darmont, en
précisant que la responsabilité de l’État peut être engagée dans le cas où le contenu
de la décision juridictionnelle est entachée d’une « violation manifeste du droit
communautaire ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers » Il reprend
la formule posée dans Kö bler. Donc Darmont continue à exister, sauf dans
l’hypothè se où est en cause la violation manifeste du droit communautaire.

Il faut tenir compte :


- Du degré de clarté de la règle du droit de l’UE
- De la marge d’appréciation laissé aux Etats
- Du caractère intentionnelle ou non du manquement (volontaire ou non)
- Voir si une institution de l’UE n’a pas pris position sur la question de nature
à induire le juge en erreur
- Si le juge a méconnu une obligation de renvoie préjudicielle du droit de
l’UE

CE, 2022, Société Kermadec (reprend CE, 2020, Lactalis) : apporte 2 précisions sur
cette question :
- La seule violation de l’obligation de renvoi d’une question préjudicielle à
la CJUE ne suffit pas pour caractériser la violation manifeste du droit UE.
- Cette jurisprudence a une consé quence : c’est devant le Conseil d’É tat va ê tre
porté e l’action. Est-ce que le fait que ce soit lui la juridiction compé tente pour
se prononcer sur une é ventuelle faute commise par le Conseil d'É tat lui-
mê me ne pose t-il pas problè me au regard de l’exigence d’impartialité de
cette institution ? Kermadec dit que le Conseil d'État peut lui même
apprécier la faute, il n’y a pas de manquement à l’obligation d’impartialité.
Mais il faut en revanche que les membres de la formation de jugement ayant
adopté la décision litigieuse s’abstiennent de siéger à l’instance.

3. La preuve de la faute

Question de la preuve est importante. En principe : Il appartient au demandeur de


dé montrer l’existence d’une faute de
l’administration.
Mais il existe plusieurs dispositifs de pré somption de faute, où il n’appartient pas au
demandeur de dé montrer la faute. C’est le cas de la responsabilité des personnes
publiques à l’é gard des usagers du fait du fonctionnement des ouvrages publics.
Mé canisme de présomption de faute : lorsqu’une personne circule sur une route
(ouvrage public) et a un accident, si elle souhaite mettre en cause la responsabilité
de l’administration (gestionnaire de la route), la victime n’a pas besoin d’apporter
des éléments prouvant un mauvais entretien des routes etc., c’est au contraire à la
personne publique de prouver qu’il n’y a pas de défaut de l’entretien normal de
l’ouvrage.
CE, 2000, Département de la Dordogne : accident mortel de moto, la chaussé e
pré sentait des dé formations (des bosses) donc administration n’a pas été en
mesure de démontrer que l’ouvrage public n’était pas mal entretenu.

4. L’exigence d’une faute lourde

Faute lourde a été une étape intermé diaire entre irresponsabilité de


l’administration, et responsabilité pour faute classique. Elle a tenu un rô le
important en droit administratif (arrêt Tomaso gréco voire supra). La faute lourde
est la faute d’une particulière gravité.

Cette jurisprudence sur la faute lourde se retrouve dans deux grands domaines :
- Activités régaliennes
- Activités présentant des difficultés particulières (pendant longtemps, c’é tait
le cas pour les activité s mé dicales). On ne permet pas engagement de la
responsabilité de l’administration pour toute faute, il faut une faute lourde.
Constat du reflux et de la disparition de la faute lourde Dans certains domaines, la
faute lourde a longtemps été exigé, puis a disparu
- Actes médicaux qui sont ré alisé s par les chirurgiens et mé decins.
CE Ass., 1992, Epoux V. : Conseil d'É tat abandonne le ré gime de l’exigence
de la faute lourde. On passe à un régime de faute simple (Solution codifié e
dans le CSP art L4142-1)

- Activités de secours : Conseil d'É tat bascule sur un régime de faute simple,
notamment pour la responsabilité du fait de l’activité du Samu
CE Sect., 1997, Theux : assistance en mer, lutte contre incendies.

- Activités pénitentiaires :
CE, 2003, Chabba : Conseil d'É tat bascule sur un ré gime de faute simple.

- Action du fisc
CE Sect., 2011, Krupa : Conseil d'É tat bascule sur un ré gime de faute simple.

- Police administrative (gé né rale ou spé ciales) : progressivement, on s’est


rendus compte que la faute lourde a disparu, mais ça n’a pas é té exprimé
dans un arrê t.

La faute lourde persiste dans certains domaines :


- Les activités de contrôle juridique assurées par différentes institutions
(Exemple : le préfet exerce son contrô le sur les collectivités par la tutelle.
La raison essentielle du maintien est d’éviter qu’il y ait un inversement du
contrô lé vers le contrô leur. Une personne pourrait ainsi se retourner vers le
préfet et non le maire en cas de mesure de police qui n’est pas prise. On veut
éviter les reports.
- En cas de ré gime de faute simple, le contrôleur craignant que sa
responsabilité soit engagé facilement est que ce contrôle devienne
asphyxiant.
Exemples :
- CE, 2000, Commune de St Florent : contrôle administratif assuré par le
préfet sur les collectivité territoriale.
- CE, Ass. 2001, Kechichian : contrôle exercée par une AAI (ici autorité
bancaire sur les personnes économiques)

La faute lourde s’impose. Mais on voit se développer des jurisprudences


dissidentes qui tendent vers la faute simple. Pour certaines activité s de contrô le, le
CE a basculé vers la faute simple, notamment dans le contrôle en matière de
licenciement. Pour licencier des salarié s, elle doit obtenir l’autorisation de
l’inspection du travail : contrô le de l’administration sur l’action des entreprises.
Ce
contrô le est un contrôle juridique. C’est un régime de faute simple (Arrêt du CE de
2020)

Responsabilité de l’Etat du fait de la justice administrative. Arrê t CE, Darmont, 1978


: le CE a posé un cadre juridique de faute lourde sauf lorsqu’est en cause le
contenu d’une décision juridictionnelle définitive (sauf si le contenu viole le
droit de l’UE, Cf arrê t Gestas) Il y a eu une é volution de jurisprudence imputable
à la CESDH. Cette évolution concerne un type de dysfonctionnement
spécifique de la jurisprudence administrative du délai de jugement. L’article
6§1 CESDH pose le droit au dé lai raisonnable. La CEDH a un problè me
d’engorgement et les recours les plus importants sont les manquements au droit
au délai raisonnable par les pays européens. La CEDH a voulu dé centraliser le
traitement de ces requê tes en dé veloppant le raisonnement suivant : ces
contentieux sont des contentieux de la responsabilité et devrait être traité au
niveau de chaque Etat qui doit disposer d’un recours effectif en cas de
manquement au droit au délai raisonnable de jugement. Le problè me qui s’est posé
en France est que la Cour a fait le constat d’un recours qui é tait possible mais il
fallait démontrer une faute lourde. La CEDH a constaté que le recours existe mais
l’Etat n’a jamais été condamné, et donc le recours n’é tait pas effectif.
Condamnation de la France dans CEDH, 2002, Lutz c. France. 3 mois plus tard, le
CE effectue un revirement de jurisprudence : lorsque sont en causes des actions
en responsabilité pour un délai déraisonnable de jugement, c’est un régime
de faute simple (CE, Ass. , 2002, Ministre de la Justice c. Magiera)

Activités des services de renseignement interne : la carence supposé des services


spéciaux de surveillance dans le suivi d’un individu est une responsabilité engagée
pour la faute lourde. (CE, 2018, Chennouf : affaire Merah où une famille d’un
militaire tué porte l’action contre l’Etat pour défaut de surveillance : il aurait fallu
démontrer une faute lourde ce qui n’était pas le cas en l’espèce)

B. La responsabilité sans faute

Cette responsabilité sans faute a connu des développements à la fin du XIXème et au


XXème siècle. Ces ré gimes restent subsidiaires : le principe en droit administratif
est que la responsabilité de l’administration en peut être engagée que pour faute.
Mais il existe des cas de responsabilité sans faute.
Cette question de responsabilité sans faute a suscité des réflexions sur le fondement
de cette responsabilité.

On considè re qu’il existe deux fondements de la responsabilité sans faute de


l’administration :
- Le risque : si le risque se concrétise par l’activité de l’administration,
l’administration devra garantir la mission et ré parer le pré judice des victimes
- La rupture d’égalité devant les charges publics : l’idé e est que tout individu
subit des contraintes de la vie en société. L’idée est que dès lors que ces
contraintes excèdent la normalité de ce qui est supportable, la personne
concernée aura droit à la réparation.
Il existe aussi au moins un régime de responsabilité sans faute qui n’est ni fondé sur
le risque et la rupture d’égalité mais sur les principes du droit commun et qu’il existe
des régimes législatifs de responsabilité sans faute.

1. La responsabilité pour risque

L’activité de l’administration crée un risque, il se concrétise et provoque un


dommage : l’administration devra réparer ce dommage. Il existe diffé rentes cas de
responsabilité sans faute

a. La responsabilité au profit des collaborateurs occasionnels du service public

C’est le plus ancien des ré gimes de responsabilité pour risque. Il est contemporain
de la loi du 9 avril 1898 sur les accidents du travail. Cette loi ne concerne pas
l’administration mais permettait l’indemnisation des accidents du travail pour les
risques de l’activité . Cela va ensuite s’appliquer aux fonctionnaires agents de
l’administration. Il a é té mis en place par l’arrê t CE, 1895, Cames : il met en place
l’é quivalent de la loi du 1898 avec un systè me de garantie pour les fonctionnaires.
Ce ré gime concernait tous les collaborateurs. Mais pour ce qui est des agents publics
a é té mis en place une lé gislation (sur les pensions et accidents du travail) qui fait
que dè s qu’un agent subi des dommages, il est garanti sur le fondement de la loi.
Cette jurisprudence a conservé un intérêt pour les collaborateurs occasionnels. Ce
sont les personnes qui prêtent à un concours à l’exécution d’une mission de service
public de manière ponctuelle.
Exemple : les personnes qui accompagnent en sortie scolaire qui se blessent sont
indemnisés de leur dommage car collaboratrice occasionnel du service public. C’est
aussi la personne qui va se jeter à l’eau pour sauver une personne qui se noie
également : cette personne a joué occasionnellement une activité de service public.

5 remarques complémentaires :
- Il est indifférent que l’aide ait été sollicité ou non : dès que la personne
intervient, le régime peut s’appliquer
- Cette collaboration doit être justifiée et nécessaire : il ne peut pas ê tre
superflu
- C’est un concours apportée à une mission de service public
- Il est indifférent qu’il existe un lien de solidarité spécifique entre la
personne qui a bénéficiée du concours et la personne qui a portée le
secours.
CE Sect., 1977, Commune de Coggia : En Corse, une famille se baigne sur une
plage municipale ; un membre de cette famille est en voie de se noyer ; un
autre membre tente de lui porter secours ; les 2 finissent noyé s. Il y a un lien
spécifique de solidarité entre les 2 personnes : ils sont de la mê me famille.
Le Conseil d’É tat considè re que peu importe : la personne qui a agi pour
tenter de sauver le membre de sa famille a collaboré à une mission de
service public (le sauvetage et la sé curité sur les plages) qui incombe à la
commune normalement.
- Le lien entre la mission de service public et l’intervention du collaborateur
peut être un lien indirect. Cela renvoie à une affaire au large du Gabon :
navire français en difficulté , pas de moyens de sauvetage à cet endroit. Le
sauvetage en mer français va solliciter une socié té française au Gabon et c’est
la socié té Elf qui va solliciter une autre socié té pour qu’un hé licoptè re porte
secours à ce navire : l’hé licoptè re s’é crase en mer. Le régime de responsabilité
pour risque des collaborateurs occasionnel peut ici fonctionner. (CE, 2009,
Chevillard)

b. La responsabilité au profit des tiers victimes de dommages accidentels


de travaux publics ou provoqué s par un ouvrage public

On a déjà vu des hypothèses de responsabilité du fait des travaux publics. Cas de


l’arrêt du motard qui se tue sur une route en mauvaise état : présomption de faute.
Pour les tiers, c’est un régime sans faute fondée sur l’idée de risque
CE, Sect. 1965, Arbez-Gindre : Incendie d’un ouvrage public qui s‘étend aux
immeubles voisins , les propriétaires des immeubles voisins sont tiers et pas
usagers. Le ré gime de responsabilité applicable est celui sans faute fondé sur le
risque.
Cas des nuisances des voies ferrés : sanctuaire autour du ré seau ferré que prolifè re
des animaux, notamment des nuisibles comme des lapins. Il peut y avoir des
consé quences subis par les agriculteurs à proximité des voies ferré s. Les
agriculteurs sont tiers et bénéficie d’un régime de responsabilité sans faute pour
ces dommages.

c. La responsabilité du fait des choses dangereuses (utilisé es


par l’administration)

Ce sont les choses utilisées par l’administration dans le cadre de ces missions de
service public. Il prend naissance avec un arrê t CE, 1919, Regnault-Desrosiers : est
en cause l’explosion d’un stock de grenade dans un fort militaire en Seine Saint
Denis. Ré action en chaîne qui entraîne une vingtaine de mort. Les personnes
victimes bé né ficient d’un régime de responsabilité sans faute fondé sur le risque lié
aux choses dangereuses stockées par l’administration.
Ce ré gime va s’é tendre à d’autres situations et aux hypothèses d’utilisation par les
FDO d’armes et d’engins dangereux. Ce ré gime va s’appliquer dans l’hypothè se où
une personne est blessé e par balle alors que tiers à l’opé ration de police. CE,
1949, Lecompte et Daramy : Les forces de l’ordre utilisent des armes de type
pistolet.
Si, à l’occasion d’une opération de police administrative, une personne est blessée
par un tir des forces de l’ordre, elle bénéficie d’une indemnisation sans avoir à
démontrer la faute de l’administration, mais uniquement si elle est tiers à
l’opé ration de police. (hypothè se de la balle perdue)
CE Sect., 27 juillet 1951, Aubergé et Dumont : les personnes visées par l’opération
de police bénéficient d’un régime de responsabilité pour faute simple en cas
d’utilisation d’armes à feu

Le CE a refusé de l’étendre à l’utilisation des gaz lacrymogènes par les FDO.


Mais il n’est pas dit que cette jurisprudence perdure puisque des tribunaux
administratifs ont appliqué le ré gime fondé sur ce ré gime pour les grenades à effet
de souffle. Il y a aussi un dé bat sur le LBD : les dommages provoqué s à l’é gard des
tiers : CAA de Nantes a refusé d’étendre ce régime de responsabilité des tiers car
arme ne serait pas létale.

Toujours sur les choses dangereuses pour les ouvrages publics ayant un risque
exceptionnel. CE, 1973, Dalleau : É tait en cause un ouvrage public pré sentant un
danger exceptionnel : la route n°1 de l’île de la Réunion, historiquement très
dangereuse. Le Conseil d’É tat a dé cidé qu’un usager de cette route qui subirait
un dommage bénéficiera d’un régime de responsabilité sans faute fondé sur le
risque à raison du caractè re particulier de cet ouvrage.

d. La responsabilité du fait des mé thodes dangereuses pré sentant un risque


exceptionnel

L’administration a parfois recours à des méthodes dangereuses, qui peuvent créer


des risques ; si ce risque se ré alise, la victime sera indemnisé e sur ce fondement
sans avoir à dé montrer une faute de l’administration. Historiquement, cette
jurisprudence s’est appliqué e dans des hypothèses où l’administration a recours à
des méthodes libérales de rééducation ou de réinsertion au sein d’établissements
accueillants des publics “à risques”. En cas de dommage causé s à un tiers, il
disposera d’un régime de responsabilité sans faute mais cela ne joue qu’au
bénéfice des tiers et pas aux autres usagers.
Arrêt de référence : CE Sect., 1956, Thouzelier : Un établissement accueille des
mineurs dé linquants de maniè re semi-fermé e. Certains quittent l’é tablissement sans
autorisation et provoquent des cambriolages. Les victimes du
cambriolage
bénéficient d’une indemnisation via ce régime de responsabilité sans faute
fondée sur le risque. Le risque découle de cette méthode libérale de rééducation.
Cette jurisprudence a été étendue à l’hypothèse des autorisations de sortie accordées
à des détenus. Lorsque le détenu prépare sa réinsertion et provoque un dommage, le
tiers victime aura droit à la réparation.

Le Conseil d’É tat a refusé d’étendre l’application de ce régime de responsabilité


à des mesures qui ne s’inscrivent pas dans la réinsertion des détenus mais qui
ont pour conséquence une libération anticipée.
Exemples : dé crets de grâ ce collective accordé e par le PR ; mesures de ré duction de
peine accordé e par le JAP…

Cette jurisprudence sur les mé thodes dangereuses a aussi reçu une autre
illustration dans le domaine de la responsabilité hospitalière : arrê t CE, 1993,
Bianchi : Lorsqu’un acte médical nécessaire au traitement d’un malade présente
un risque dont la réalisation est exceptionnelle, la responsabilité du service
public hospitalier est engagée dès lors que l’exécution de cet acte serait la cause
directe d’un dommage sans rapport avec l’é tat initial du patient.
Cette jurisprudence a entraîné beaucoup de dé bats : est-ce normal de faire peser sur
l’hôpital le coût de l’indemnisation d’un acte médical qui en général se passe bien mais qui
présente des risques exceptionnels ? Cela a conduit la loi Kouchner du 4 mars 2002 à
redé finir les conditions d’indemnisation de la victime dans ce genre d’hypothèses,
en prévoyant la mise en place d’un régime d’indemnisation fondé sur la solidarité
nationale (fonds de solidarité : l’ONIAM Office nationale de l’indemnisation des
actes médicaux).

e. La responsabilité du fait des situations pré sentant un risque exceptionnel

Cela renvoie à des choses localisées d’une personne exposée par sa situation à un
risque exceptionnel. Si ce risque se ré alise, la victime bé né ficie d’une indemnisation
sans faute.
CE, 2008, Ginoux : Un médecin militaire (= un agent de l’administration) est affecté
en Centrafrique. Aprè s une mutinerie de la part de militaires centrafricains, les
biens de ce médecin sont pillés. Ce régime de responsabilité sans faute fondé sur
le risque est applicable : de par sa situation et ses obligations professionnelles, ce
mé decin a é té exposé à un risque professionnel qui s’est ré alisé .
Il peut obtenir ré paration sans avoir à dé montrer une faute de l’administration.

f. La responsabilité du fait des produits et appareils de santé utilisé s dans


le cadre du service public hospitalier
Arrê t CE, 2003, Marzouk : Ce ré gime est à la fois une traduction et une trahison
d’un régime de responsabilité qui trouve son origine dans le droit de l’Union
européenne, et plus précisément dans la directive européenne du 25 juillet
1985 qui ordonne la mise en place un régime de responsabilité du fait des
fabricants.
Ce régime de responsabilité a entraîné l’introduction dans le Code civil de l’article 1386-
1. Le CE a contourné cette directive en mettant en place un régime de responsabilité
sans faute causé par l’hôpital : c’est une responsabilité qui pèse non pas sur le
fabricant mais sur l’utilisateur en cas de dommage consécutifs à l’utilisation ou à la
défaillance des produits ou appareils de santé. « Même en l’absence de faute de sa part,
le service public hospitalier est responsable des conséquences dommageables pour les usagers
de la défaillance des produits et appareils de santé qu’il utilisé ».

2. La responsabilité pour rupture d’é galité

Des personnes dans certaines situations se retrouvent exposées à des charges


importantes. L’engagement de la responsabilité de l’administration est
subordonnée à un préjudice qualifié : le pré judice doit ê tre anormal et spécial. Il est
anormal et spé cial par rapport à la masse de personnes.
L’autre idé e que la victime ne pourra demander ré paration que pour la part de
pré judice qui dé passe la normalité de ce que tout citoyen est censé porter. Au titre
de ce régime, la victime ne pourra pas demander la réparation de l’ensemble de son
préjudice: elle ne pourra demander que la ré paration de la part du pré judice qui est
anormale. Cela joue notamment pour les agents é conomiques CE, 2012, Bizouerne

a. La responsabilité du fait des dommages permanents de travaux publics

4eme fois que l’on é voque les travaux publics : pour les usagers (dommages) , pour
les tiers et pour les ouvrages dangereux (risques). On va parler ici des dommages
permanents non accidentels.
CE, 1931, Commune de Vic-Fezensac : é tait en cause le dommage consécutif à
l’amoncellement de feuilles mortes dans la gouttière obstruée d’une maison
venant de platanes situés sur la place d’une commune. Le dommage est permanent
avec des fuites d’eau qui en dé coulent. La proximité avec un ouvrage public
n’est pas censé entraîner des fuites d’eau récurrentes, le dommage du voisin a donc
été réparé.
CE, 1991 : un stade de football où joue des équipes et des jeunes. Un riverain
subit les nuisances du à l’utilisation diurne et nocturne de l’activité . C’é tait un
dommage permanent inhérent au fonctionnement normal de l’usage.

b. La responsabilité du fait des actes juridiques réguliers et licites


Lorsque l’application d’un acte juridique provoque un dommage anormal et
spécial, la personne est fondée à demander réparation sur le fondement de la
responsabilité de la personne publique. Ce peut ê tre un AAU, une loi et même une
convention internationale.

i. Lorsqu’une décision administrative individuelle fait peser sur une personne une
charge anormale et spéciale

On est dans le cas où une AAU fait peser sur une personne une charge anormale et
spé ciale. Ces sont les hypothè ses de refus licite de l’administration à porter
concours à l’exé cution d’une dé cision de justice.
CE, 1923, Couitéas : Dans le sud tunisien sous la pé riode coloniale, M. Couité as est
proprié taire d’un terrain de 40 000 hectares. Il dé plore la pré sence sur ce territoire
d’une tribu locale de 8 000 personnes qui occupe une partie de ce terrain. Il engage
une action en justice et obtient un jugement d’expulsion de cette tribu, mais celle-ci
ne quitte pas les lieux. M. Couité as demande à l’É tat le concours des forces de l’ordre
pour exé cuter le jugement d’expulsion, mais l’É tat refuse. Le Conseil d’É tat affirme
que ce refus de l’État est licite, parce qu’il y avait un risque de trouble à l’ordre
public. L’administration peut lé galement refuser de porter son concours. Mais
il condamne aussi l’État à indemniser M. Couitéas sur le fondement de la rupture
d’égalité, au motif que le refus de concours ne pouvait ê tre regardé , s’il excé dait une
certaine duré e, comme une charge lui incombant normalement. Préjudice anormal
sur le propriétaire qui était tenu d’être réparé.

Cette jurisprudence a reçu des applications importantes


Exemple : occupation d’une usine par des ouvriers en grè ve est interdit. Le
proprié taire obtient leur expulsion. Mais la force publique refuse. Le propriétaire
obtient réparation pour rupture d’égalité devant les charges publiques.

Autres situations mettant en cause une dé cision plus ou moins individuelles


CE, 1995, Lavaud : Un pharmacien a un officine dans une banlieue difficile de Lyon.
L’office HLM qui gé rait les tours du quartier dé cide de dé truire 10 tours pour
ré habiliter le quartier, ce qui entraîne une perte massive de chiffre d’affaires pour le
pharmacien et un risque de faillite. Il engage une action en responsabilité contre
l’office HLM sur le fondement de la responsabilité sans faute. Le Conseil d’État
considère qu’il a subi un préjudice anormal (perte du chiffre d’affaire) et spécial
(l’un des seules commerçant concerné) qui justifie son indemnisation.
Quand on gè re une pharmacie ou tout autre commerce, il y a toujours un alé a
é conomique normal. Ici, ce qui justifie l’indemnisation, c’est l’existence d’un
préjudice anormal ; seule la part d’anormalité est réparée dans le dommage subi
par le commerçant.
Autre exemple :
Il existe un droit de préemption pour les communes : lorsqu’un terrain est vendu,
elles peuvent ré cupé rer le bien en lieu et place de l’acheteur initial.
Dans une affaire, une commune avait exercé son droit de préemption puis a
renoncé à l’exercice de ce droit ; en résultat, le bien a été squatté pendant plusieurs
mois.
Il n’y avait pas d’irrégularité (la commune avait le droit de renoncer à ce droit de
pré emption), mais le vendeur a pu obtenir ré paration sur le fondement de ce
pré judice.

ii. La responsabilité du fait d’actes réglementaires

L’acte ré glementaire a vocation à s’appliquer de maniè re gé né rale et impersonnelle.


Il peut s’appliquer telle qu’un acte personnel.

CE, Sect., 1963, Commune de Gavarnie : Le maire de la commune prend un arrêté


interdisant la circulation des piétons sur des routes d’accès au célèbre cirque de
Gavarnie. Problè me : un commerçant tenait un commerce sur l’une de ces routes
donc pré judice é conomique. Ici, il y a bien un acte rè glementaire dont l’exécution
fait peser sur ce commerçant en particulier une charge anormale et spéciale ; il
obtient une indemnisation du fait de l’application de l’acte réglementaire causant
une application personnelle.

iii. La responsabilité du fait de la loi

On a dé jà envisagé la responsabilité de l’É tat du fait de la loi au titre de la


responsabilité pour faute, avec l’arrêt Gardedieu (2007). Mais bien avant 2007, le
Conseil d’État avait déjà reconnu la possibilité d’un engagement de la
responsabilité sans faute de l’État du fait de la loi.
Mais cette fois-ci, on dénonce une rupture d’égalité du fait de la loi. Arrê t CE, Ass.
1938, Soc. des produits Laitiers La Fleurette : produit un substitut du lait qui fini
par être interdit par la loi. La société subit un préjudice anormal et un préjudice
spécial puisqu’elle était la seule en France à produire ce lait. L’Etat est condamné à
indemniser la société pour son préjudice.
Cependant, le CE a posé concernant ce cas de responsabilité une exigence
supplé mentaire : l’idé e est qu’il ne faut pas que la loi ou ses travaux préparatoires
aient entendus exclure même de manière implicite toute indemnisation des
personnes qui subiraient les conséquences dommageables de son application. La
difficulté qui s’est posé e est que le CE l’a interpré té de maniè re stricte à l’é gard des
victimes. Il estimait que dè s lors que la loi poursuivait un inté rê t gé né ral et
pré é minent, il en dé duisait que le lé gislateur avait voulu exclure l’indemnisation.
Exemples des rigueurs de l’application : affaire des cultivateurs de riz de Camargue.
Sauf que nuisibles tels que les flamants roses. Loi de 1976 qui protè ge le flamant
rose et interdit son abattage. Ils ont alors prolifé ré avec les nuisances que cela a
entraîné une pré judice. Ils ont demandé indemnisation. Le CE avait écarté le
recours en considérant que la loi avait été adopté dans un objectif d’intérêt général
et prééminent.

Cela a changé : le CE est revenu sur cette rigueur d’application dans un arrêt CE,
2005, Société coopération agricole Ax’ion : Le Conseil d’É tat ré duit la porté e de cette
seconde condition en pré cisant que, désormais, l’objet de la loi n’est plus un critère
opérant pour déterminer la volonté implicite du législateur sur l’éventualité d’un
droit à réparation. Dé sormais, pour exclure l’indemnisation, il faut qu’il figure dans
la loi ou dans les travaux pré paratoires de la loi une affirmation explicite que le
législateur entend ne pas permettre l’indemnisation des personnes qui subiraient
un dommage consé cutivement à l’entré e en vigueur de la loi. Permet la mise en
œuvre effective de la jurisprudence La Fleurette.

CE, 1998, Bitouzet : S’inscrit dans la continuité de la jurisprudence La Fleurette,


mais trouve son origine dans la Convention EDH (Protocole n°1 article 1 sur le
respect de la propriété) Cette jurisprudence joue dans les hypothèses où la loi
permet à l’autorité publique d’interférer dans l’existence ou dans la jouissance
d’un droit de propriété sans indemnisation (→ la jurisprudence La Fleurette ne peut
pas s’appliquer).
Pour é viter une condamnation de la France par la CEDH, le Conseil d’É tat a
considé ré que nonobstant le refus d’indemnisation posé par la loi, le
propriétaire pourra obtenir une indemnisation lorsqu’il démontre qu’il
supporte une charge exorbitante et spéciale sans rapport avec l’objectif
poursuivi qui n’est pas proportionnée à l’intérêt général poursuivi.
Il é tait question dans cette affaire un principe ancien du droit de l’urbanisme
français : non-indemnisation des servitudes d’urbanisme. Le PLU dans une
commune dé termine l’affectation des sols. En fonction de là où l’on habite, les
consé quences peuvent ê tre importantes (selon si le terrain est en zone constructible
ou non) Mais pas d’indemnisation si le terrain de devient pas constructible. Le
requé rant a dit que ce principe de non indemnisation n’est pas compatible avec le
droit au respect des biens de la CESDH Protocole 1 article 1. Le CE n’a pas suivi
cette hypothè se : l’application de cette loi du code de l’urbanisme n’empê che pas
d’indemniser le proprié taire pour les raisons é noncé es plus haut.

Autre exemple ré cent : il existe en droit français le principe d’imprescriptibilité des


droits du domaine public. Il y reste et il faut une procé dure spé ciale de
dé classement par la loi pour qu’il en sorte. Cas des bouts de bâ timents publics, des
fragments de bâ timents publics qui disparaissent car volé s puis reparaissent en ce
que des produits
sont devenus privées et ces propriétaires veulent les vendre. Ils vont demander un
certificat d’exportation et le ministère de la culture qui va leur dire non car
imprescriptibilité. Cette application de la loi vis-à -vis des propriétaires de bonne foi.
La question qui a été posé est de savoir si ce régime d’imprescriptibilité des biens y compris à
l’égard des détenteurs de bonne foi est compatible avec l’article premier du protocole n°1 de la
CESDH ? Ouvre ici un droit à l’indemnisation.

iv. La responsabilité du fait des conventions internationales

Hypothè se où est en cause l’application d’une convention internationale


CE, 1966, Compagnie générale radioélectrique : L’application d’une convention
internationale peut entraîner la mise en cause de la responsabilité de l’État pour
rupture d’égalité devant les charges publiques. La victime doit dé montrer qu’elle a
subi un trouble anormal et spé cial, mais il y a 2 conditions supplé mentaire que doit
dé montrer la victime :
- L’engagement en question doit avoir régulièrement ratifié (exigence qui
depuis été supprimé en 2004)
- Ni la convention ni la loi qui en autorise la ratification ne doivent pouvoir
ê tre interpré té es comme ayant entendu exclure le principe d’une
indemnisation.

Cette jurisprudence a reçu peu d’application depuis 1966. Seulement 3 hypothè ses.
Ce sont souvent les mê mes à savoir les immunité s de juridictions et d’exé cution
dont bé né ficient les personnels diplomatiques en application de la Convention de
Vienne de 1961 qui organise l’immunité des diplomates é trangers dans un pays.
Difficulté en cas de litige entre un diplomate et son personnel de maison : litige
entre les deux sur un paiement de salaire. Le diplomate ne peut pas ê tre poursuivi
devant les tribunaux (de prud’hommes) Cas de l’arrê t CE, 2011, Susilawati.
Ces personnes ont pou obtenir des dommages et inté rê ts sur le fondement de la
jurisprudence radioé lectrique.

Cette jurisprudence a fait des petits : elle a eu des conséquences dans deux domaines.
- Sur la coutume internationale CE Sect. 2011, Saleh
- Aux actes de gouvernement (Conseil d’État, 2016, Bernabé : la responsabilité
de l’État pour rupture d’égalité devant les charges publiques peut être
engagée du fait d’un acte de gouvernement)

3. La responsabilité fondé e sur les principes de droit commun

Cette responsabilité est la transposition en droit administratif des principes du droit


civil, et en particulier la responsabilité fondé e sur la garde de l’enfant mineur
(article 1242 du Code civil). On n’applique pas le Code civil en droit administratif,
mais le ré gime s’inspire de la jurisprudence de la Cour de cassation.
Cas des enfants mineurs : Des enfants mineurs peuvent être placés dans deux types
de centres : dans des institutions privées ou publiques, dans les deux cas au titre de
l’assistance éducatives. La Cour de cassation a défini un régime de responsabilité
lorsque sont en cause des mineurs placés dans des institutions privées.
Le Conseil d’É tat a considé ré que, par équité pour les victimes, il convenait
d’appliquer le même régime pour les mineurs placés dans des institutions
publiques.
CE, 2005, GIE, AXA Courtage : En pré sence d’un dommage provoqué par un
enfant mineur placé au titre de l’assistance éducative (articles 375 et suivants du
Code civil), le Conseil d’É tat considè re que la décision de placement de l’enfant a
pour effet de transférer à l’institution chargée de l’accueillir la responsabilité
d’organiser, de diriger et de contrôler la vie du mineur. En raison des pouvoirs dont
l’institution se trouve ainsi investie, sa responsabilité est engagé e mê me sans faute
pour les dommages causé s au tiers par ce mineur. Cette responsabilité ne peut ê tre
atté nué e ou supprimé e qu’en cas de faute majeure ou de faute de la victime.

Le Conseil d’É tat a affiné cette jurisprudence :


● La garde au sens juridique n’est pas la garde matérielle : l’institution peut
être considérée comme responsable alors mê me que l’enfant mineur passait
le week-end chez ses grands parents.
● Cette jurisprudence joue aussi lorsque le placement a été décidé par une
autorité administrative et non par un juge.
● Cette jurisprudence joue pour les dommages subis par les tiers, mais aussi
au bénéfice des usagers du service public en cause
Exemples : autres mineurs placés dans le même établissement
● CE, 2006, Ministre de la Justice c. MAÏF : Ce régime de responsabilité joue
non seulement au sujet des enfants placés au titre de l’assistance
éducative, mais aussi au sujet des mineurs délinquants.

Pour les mineurs dé linquants, la victime a donc le choix d’invoquer :


1. La jurisprudence Thouzellier (1956) → fondée sur le risque.
● Permet d’engager la responsabilité de l’État, parce que c’est lui qui
a fait le choix de méthodes libé rales de ré insertion des mineurs
dé linquants.
● Ne peut pas jouer au bénéfice des usagers du service public (ex : les
autres mineurs de l’é tablissement). Seulement les tiers pourront
engager cette responsabilité .
2. La jurisprudence GIE Axa courtage (2005) → fondée sur la garde.
● Permet parfois d’engager la responsabilité d’une collectivité
territoriale (généralement le département).
● Peut jouer au bénéfice des usagers du service public.
Cette jurisprudence ne peut-elle pas connaître de nouveaux développements ? Pourrait-on à
la transposer pour le cas des détenus qui sont aussi sous la surveillance de l’administration
? Le CE a dit que non : reste seulement pour les enfants mineurs délinquants.

Le cas des régimes de responsabilité sans faute : il existe des régimes dans lesquelles
la loi prévoit expressément la responsabilité de l’Etat sans faute.
Exemple : le régime de responsabilité de l’Etat du fait des attroupement armées.
Article 2216-3 du CGCT : fait que l’Etat est responsable civilement (plan
indemnitaire) des dégâ ts et dommages résultants des crimes et délits commis par les
attroupements ou rassemblement armées ou non armées soit contre les personnes
soit contre les biens. Cas des dégâ ts lors des émeutes ou de la réforme des retraites en
2023 : Etat prend en charge les dégâ ts commis. On retombe sur les carences de la
police.
Champ d’application de ce régime : il faut un attroupement spontané qui entrainerait
des atteintes aux biens ou qu’un groupe de manifestant survient au cours d’une
manifestation qui va provoquer des dégâ ts.

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