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Le programme Cognitive Remediation Therapy (CRT) est l’un des programmes de remédiation cognitive
les plus diffusés dans les pays anglo-saxons, et qui a été traduit et validé en France. En raison de la
renommée internationale de ce programme, l’ensemble de l’équipe qui a supervisé la traduction de la
CRT a décidé de garder en français son appellation anglaise. La CRT est une méthode papier/crayon,
administrée en face-à-face thérapeute patient et focalisée sur la rééducation des fonctions exécutives.
La CRT comprend trois modules : flexibilité cognitive, mémoire et planification. Cette méthode pallie les
déficits cognitifs le plus souvent altérés dans la schizophrénie. Elle a prouvé son efficacité sur différents
profils de patients souffrant de schizophrénie, selon l’âge ou l’importance du déficit. Chez les patients,
outre l’amélioration des fonctions exécutives testées avant/après programme, la CRT montre en imagerie
cérébrale l’activation de zones frontales hypoactivées avant traitement. Elle est utilisée actuellement tant
en hospitalisation qu’en ambulatoire, et s’inscrit le plus souvent dans une perspective de réhabilitation
sociale et professionnelle. Des adaptations de cette méthode sont dispensées dans d’autres pathologies
psychiatriques, telle l’anorexie mentale, et des essais prometteurs débutent dans les pathologies du spectre
autistique.
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EMC - Psychiatrie 1
Volume 9 > n◦ 2 > avril 2012
http://dx.doi.org/10.1016/S0246-1072(12)58376-8
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37-820-A-60 Cognitive Remediation Therapy (CRT) : un programme de remédiation cognitive pour la schizophrénie et les troubles des fonctions exécutives en pathologie mentale
leurs résultats sur une plus large population en comparaison à des d’altérations cognitives révélatrices de dysmaturations cérébrales
sujets contrôles, sur trois tests évaluant les fonctions exécutives : et de remaniements cérébraux visibles en imagerie [10] . Dans
le Wisconsin Card Sorting Test (WCST), la Tour de Londres et un ce modèle, l’éclosion des troubles survient souvent durant la
test d’empan verbal. maturation pubertaire, à une étape critique de la maturation
Le FEP a été élaboré d’une part à partir de la technique cérébrale.
de l’Integrated Psychological Therapy (IPT) de Brenner [3] afin La CRT a pour objectif d’agir et de pallier certains déficits cog-
de remédier aux déficits de flexibilité cognitive des patients et nitifs du patient souffrant de schizophrénie. Mais le modèle de
d’améliorer leurs difficultés dans la vie quotidienne, et d’autre déficit cognitif dans lequel s’inscrit l’action de la CRT inclut éga-
part de la technique de réhabilitation assistée par ordinateur de lement d’autres facteurs fondamentaux tels que la motivation,
Bracy [4] . Le premier programme ne comprenait qu’un module les traits de personnalité du sujet, son état affectif, et le contexte
unique de flexibilité cognitive et de planification. Puis le FEP particulier dans lequel le programme va prendre place.
a été révisé avec l’ajout d’un module permettant d’entraîner la Les fonctions cognitives en jeu qui vont être la cible de la CRT
mémoire de travail [1, 2, 5] . incluent des processus perceptifs, l’attention, la mémoire, le rai-
Le FEP dans sa forme actuelle vise à rééduquer et à entraîner sonnement et la résolution de problèmes. Il est évident qu’une
les dysfonctionnements frontaux et préfrontaux. Ces dysfonc- activité aussi courante que faire ses courses et mettre son projet
tionnements, comprenant donc des atteintes de la flexibilité de courses en exécution avec succès implique toute une série de
cognitive, de la mémoire de travail et de la planification, sont fonctions cognitives en cascade, depuis l’attention soutenue pour
vus comme opérant de manière distribuée sur les mécanismes réfléchir aux produits dont on a besoin, en passant par la mémo-
cognitifs complexes, en série ou en parallèle, avec des conséquen- risation de la liste d’items ou des boutiques dans lesquelles il faut
ces sur l’attention, le raisonnement, les processus de traitement se rendre, jusqu’à la planification du trajet, de l’estimation du
visuospatiaux, la mémoire, le contrôle émotionnel, etc. temps horaire et du budget à prévoir. Il en est de même pour la
Dans sa forme définitive, le FEP est très similaire à la CRT. décision de regarder un programme à la télévision, de suivre une
Il est au départ dispensé sur une durée de 7 semaines, avec 2 conversation et d’y participer, ou encore de décider de préparer
semaines de huit sessions de 1 heure pour le module de flexi- un repas.
bilité cognitive, 2 semaines de huit sessions pour le module Les difficultés cognitives du patient schizophrène sont décrites
de mémoire de travail et 3 semaines de 12 sessions pour le depuis Bleuler [11] , qui avait placé les difficultés attentionnelles
module de planification. Le FEP a permis des résultats posi- et les troubles du cours de la pensée au cœur des difficultés du
tifs sur sept patients schizophrènes chroniques stabilisés en patient souffrant de schizophrénie. Les difficultés cognitives du
comparaison à sept patients participant au programme IPT de patient atteint de schizophrénie débutent bien avant l’éclosion
Brenner [3] et sept patients participant au programme informa- des troubles, tôt dans l’enfance [12, 13] , avec très précocement une
tisé de Bracy [4] . Ces améliorations sont constatées à la passation atteinte des performances verbales [14, 15] .
d’échelles d’aptitudes générales et d’intelligence du type Wechsler Les anomalies cognitives du patient souffrant de schizophré-
Adult Intelligent Scale – forme révisée (WAIS-R) pour les sous- nie concernent tant le domaine attentionnel que la mémoire, les
tests d’arithmétique, de compréhension et de similitudes, sur les fonctions exécutives, le langage, la planification, ainsi que la cog-
erreurs persévératives du WCST (test de Wisconsin d’assemblage et nition sociale (théorie de l’esprit, appréhension des émotions) [16] .
catégorisation de formes, couleurs et nombre de figures, sensible Les déficits cognitifs sont stables tout au long de l’évolution de
aux dysfonctionnement frontaux) et sur l’épreuve de la tour de la maladie schizophrénique, même si certaines altérations sont
Londres. accentuées lors d’épisodes aigus de la maladie [17, 18] . Une étude
À partir de ces résultats prometteurs, Delahunty, au sein d’une effectuée chez des patients traités stabilisés et des patients non
clinique privée de neuropsychologie, a continué d’entraîner traités montre que les anomalies attentionnelles, en mémoire de
quelques patients schizophrènes mais aussi des enfants ayant des travail et des fonctions exécutives persistent malgré un traitement
difficultés d’apprentissage, ou atteints de syndrome d’Asperger, bien conduit [19] .
ou encore des enfants hyperactifs avec déficits de l’attention.
De même, cette neuropsychologue rééduque des patients adultes
ayant des troubles obsessionnels compulsifs, ou ayant commis
des gestes suicidaires répétés, ainsi que des patients neurologiques
Dysfonctions exécutives et schizophrénie :
ayant des lésions vasculaires (préface in [6] ). comment mettre en évidence ces altérations ?
Fonctions exécutives
Cognitive Remediation Therapy : Largement altérées dans la schizophrénie, elles sont testées
la plupart du temps par le WCST, une épreuve d’arrangement
modèles cognitifs sous-jacents et d’assemblage de cartes au cours de laquelle le sujet doit
découvrir une règle de tri (par couleur, forme ou nombre),
Caractères généraux puis assembler correctement un certain nombre de cartes. De
plus, il doit s’adapter à un changement de règle déterminé par
Le modèle de symptômes cliniques et d’altérations cognitives l’expérimentateur et par déduction retrouver la nouvelle règle
sur lequel repose la CRT est basé sur un ensemble de symp- de classement. Les scores ainsi définis concernent le nombre
tômes qui postulent une interaction complexe entre différents de catégories achevées, le nombre d’erreurs persévératives, et les
facteurs de vulnérabilité à la maladie schizophrénique, ainsi que autres types d’erreurs. Les erreurs persévératives sont révélatrices
des facteurs de résilience et des facteurs de stress. Des interven- d’un dysfonctionnement frontal et sont liées à des difficultés à
tions de type thérapies cognitives agissent à différents niveaux de maintenir un set cognitif. Ces difficultés peuvent également être
ces dimensions. De manière générale, une intervention du type liées à des difficultés de résolution de problèmes, d’abstraction,
CRT peut augmenter les ressources cognitives disponibles, dimi- d’attention soutenue [20] ou de mémoire verbale à long terme [21] .
nuer la charge cognitive, remédier aux biais de raisonnement qui La CRT repose également sur l’entraînement de la mémoire de
peuvent survenir, et peut jouer un rôle sur la perception et la travail, dans la perspective du modèle du central executive [22] . Ce
compréhension de l’information en général par l’intermédiaire modèle appréhende l’efficience à stocker des informations et à
de changements métacognitifs. Par ailleurs, la maladie schi- les manipuler en fonction d’un contexte approprié. Cette capa-
zophrénique a une composante neurodéveloppementale [7] . Le cité cognitive est souvent évaluée par le test de complètement de
modèle neurodéveloppemental de la schizophrénie postule qu’il phrases de Hayling (Hayling Sentence Completion Test [24] ) où il
existe des anomalies subtiles du développement cérébral qui s’agit de remplacer le dernier mot d’une phrase en l’inscrivant
surviennent durant la vie embryonnaire ou dès les premières dans son contexte, puis dans un second temps, d’inhiber
années de la vie de l’enfant, et s’accompagnent d’anomalies cli- le mot congruent au contexte pour choisir un mot incon-
niques comme les signes neurologiques mineurs [8] , d’anomalies gruent. Cette épreuve est aussi sensible aux dysfonctionnements
morphologiques mineures [9] , d’anomalies génétiques, ainsi que frontaux [23] .
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EMC - Psychiatrie 3
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• WCST.
• Hayling Sentence Completion (test de complètement de 15 Stratégies sur lesquelles s’appuie
phrases). le programme de Cognitive Remediation
• Stroop Color Naming test. Therapy
• Empan mnésique chiffré de la WAIS.
• Épreuve de fluence verbale phonologique (cf. supra). La CRT, dans chacun des livrets qui la composent, est basée
• Test d’inhibition spatiale : ce test se déroule en trois parties. La sur l’entraînement du sujet à des exercices répétitifs allié à
première partie est une épreuve de temps de réaction simple. l’apprentissage de stratégies.
Pour la deuxième partie, le participant doit appuyer sur le bou- Les techniques d’administration sont basées sur :
ton adjacent à celui face à la lampe qui s’allume. Enfin, dans • l’apprentissage sans erreur ;
la troisième partie (condition incompatible), le participant doit • la répétition massive des tâches ;
éteindre la lampe qui s’allume en appuyant sur la touche située • la réalisation d’exercices de complexité graduelle ;
en arrière de la lampe allumée. • l’étayage ;
• Test des six éléments de la batterie d’évaluation des dys- • le renforcement positif ;
fonctions exécutives (Behavioral Assessment of Dysexecutive • la verbalisation.
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Une séance doit être préparée à l’avance par le thérapeute ne se maintient pas durablement 6 mois plus tard. Le coût de la
qui sélectionne les exercices spécifiques qu’il va proposer au CRT estimé dans cette étude est plus onéreux que celui d’une thé-
patient, en fonction de la séance précédente et des aptitudes de rapie ordinaire, mais moins élevé que ne l’est celui d’une thérapie
celui-ci. comportementale ou le maintien d’un patient dans une institu-
Chaque séance de 1 heure doit comprendre quatre ou cinq tion. Une étude récente a entrepris d’évaluer les effets de la CRT
exercices différents, et de manière constante un exercice basé sur en fonction de l’âge des sujets. Elle a porté sur un effectif de
du matériel de type Stroop (générant un conflit visuospatial et deux groupes de plus de 40 sujets ayant plus ou moins 40 ans.
nécessitant la mise en jeu de processus d’inhibition), des tâches Le bénéfice chez les sujets âgés est essentiellement observé dans
d’assemblage de jetons, de pièces ou de cartes mettant en jeu le domaine mnésique avec une amélioration après programme
les fonctions exécutives (reproduisant les différentes étapes du significative mais toutefois moins substantielle que celle réali-
WCST) et se termine par des tâches de rééducation motrice des sée auprès des sujets jeunes. Par ailleurs, cette amélioration ne
doigts ou des mains (mettant en jeu l’aspect moteur du fonction- s’accompagne pas d’une amélioration du fonctionnement social
nement exécutif) destinées à détendre le patient et à terminer sur ni de l’estime de soi [59] . Wykes et al. en concluent que, chez les
une note ludique. sujets âgés, un programme dispensé sur une durée supérieure à
Parmi les stratégies de traitement de l’information utilisées dans 3 mois serait nécessaire, en raison de la diminution de la flexibi-
la CRT, on trouve : lité cognitive, afin de renforcer le maintien des informations et des
• verbalisation des indices, incitations et stratégies relatives à la stratégies acquises. Une étude effectuée chez 21 sujets jeunes souf-
tâche en cours ; frant de schizophrénie (moyenne d’âge 18 ans) versus 19 jeunes
• réduction de l’information ; patients ayant une thérapie usuelle, tous ayant une durée récente
• subdivision de la tâche ; de la maladie, conclut à une amélioration seulement au niveau du
• simplification de la tâche ; WCST, accompagnée d’une certaine amélioration clinique. Il n’y
• présence d’invitations écrites ; a pas d’amélioration dans le domaine social ni pour l’estime de
• regroupement ; soi [60] . Reeder et al. [56] se sont intéressés à évaluer le lien entre amé-
• répétition ; lioration du fonctionnement social et aptitudes cognitives, avant
• emploi de méthodes mnémoniques ; tout programme et après CRT. Ils constatent qu’avant programme
• catégorisation, organisation, planification. un bon niveau de mémoire verbale était associé à un score faible
de dépression et de symptômes déficitaires, et que la dimension de
vitesse d’exécution dans une tâche d’inhibition était corrélée aux
Matériel utilisé indices de fonctionnement social. Après programme, un meilleur
Il comprend les différents manuels, un grand nombre de fonctionnement social était associé à une amélioration au WCST
feuilles de papier (photocopies d’exercices et feuilles blanches et à l’épreuve de complètement de phrases de Hayling. Pour Ree-
d’entraînement), des stylos, surligneurs de couleurs différentes, der et al. [56] , ces deux scores seraient en faveur d’un mode cognitif
crayons, gomme, règle, jetons d’assemblage, jeux de cartes et de fonctionnement plus tourné vers l’environnement externe et
pièces de monnaies (factices de préférence). moins vers un mode introverti. De plus, ces auteurs constatent
Sur les manuels de l’édition française [6] ont été ajoutées diffé- que les capacités de mémoire verbale à long terme, de mémoire
rentes grilles d’évaluation rattachées à chaque exercice. Celles-ci de travail verbale, d’inhibition et de mémoire visuospatiale à long
ne sont destinées qu’au thérapeute et doivent être utilisées comme terme sont associées avant traitement aux indices de fonctionne-
s’utilise par exemple le dossier clinique d’un patient. Elles ne font ment social. Après CRT, c’est la dimension de capacité à générer
donc pas partie du contenu pédagogique du manuel. Elles rendent un schéma qui est associée à une amélioration du fonctionnement
compte à titre indicatif de la progression du patient, de ce qu’il social.
a fait au cours d’une séance, de son comportement, de sa vitesse Une étude de Penades et al. de 2010 [61] a tenté d’utiliser un
d’exécution, de la qualité de compréhension des tâches, de la capa- modèle de régression linéaire entre les domaines cognitifs verbaux
cité qu’il a à générer des stratégies, etc. Elles sont surtout très utiles et exécutifs, et le fonctionnement social. Les auteurs, en reprenant
au thérapeute tout au long de son programme pour avoir une idée l’étude de Reeder et al. [56] observent que, bien que la mémoire
précise de l’avancement du patient. verbale soit prédictive du fonctionnement social avant CRT, c’est
par l’intermédiaire d’une amélioration sur les fonctions exécutives
qu’on observe une amélioration du fonctionnement dans la vie
Cognitive Remediation Therapy : de tous les jours, la mémoire verbale jouant le rôle de fonction
cognitive intermédiaire.
avancées et résultats Une étude d’imagerie cérébrale a été effectuée chez 12 patients
schizophrènes dont la moitié était recrutés dans un programme
La première étude de Wykes [58] sur la méthode CRT adaptée CRT et six patients contrôles ayant des jeux de rôle et de la
du FEP de Morice et Delahunty [2] évalue 33 patients schizo- relaxation, versus six témoins sains. L’ensemble des participants
phrènes stabilisés, 17 sous CRT et 16 sous thérapie usuelle, ayant effectuaient une épreuve de mémoire de travail (n-back test) avant
des plaintes cognitives et des performances faibles au WCST [58] . puis après programme avec résonance magnétique nucléaire fonc-
Les résultats montrent une amélioration après 3 mois pour les tionnelle. Les résultats avant CRT indiquent une hypoactivation
épreuves de flexibilité cognitive et de mémorisation constatée au frontale chez les patients. Après CRT, le groupe de patients sous
Trail Making Test (TMT), aux épreuves de fluence, de Stroop, de CRT présentait une augmentation d’activation, notamment dans
complétion de phrases de Hayling et sur l’empan visuel. Dans le le gyrus frontal inférieur et le cortex visuel occipital, le groupe
domaine de la planification, on note de meilleures performances contrôle sans CRT restait stable tandis que les contrôles sains
seulement pour le test des six éléments de la BADS. Il n’y a pas présentaient une diminution d’activation par rapport au niveau
d’effet notable de la CRT sur la symptomatologie clinique [58] . Un d’aptitudes avant programme. Ce résultat indique une amélio-
article traitant de la durabilité des effets à 6 mois vient complé- ration des performances en mémoire de travail ainsi que des
ter ces données sur le même groupe de sujets [55] . Cette étude processus de stratégie visuelle de restitution de l’information [62] .
conclut que seul le domaine de la flexibilité cognitive est main- Par ailleurs, Wykes et al. [63] ont entrepris de déterminer le coût
tenu durablement 6 mois après la fin du programme et que celui-ci d’un programme de CRT. Les auteurs se basent sur l’estimation en
est indirectement lié à une amélioration du comportement social termes de valeur ajoutée d’un progrès durable sur l’empan mné-
avec une amélioration de la symptomatologie clinique à la BPRS sique (durabilité à long terme jugée sur 6 mois) avec un bénéfice
(Brief Psychiatric Rating Scale). En effet, les patients qui se sont à 3 mois sur la flexibilité cognitive. Parallèlement, ils concluent
le plus améliorés dans ce domaine ont vu leur fonctionnement ainsi à un coût peu important de la CRT en comparaison à une
social se modifier de manière positive et se sont améliorés cli- thérapie usuelle, immédiatement après programme, mais ce coût
niquement. Les symptômes cliniques qui ont été le plus modifiés s’élève sur une période de 6 mois après programme. Cette étude
seraient les items « troubles du cours de la pensée », et « hostilité ». est complétée par une étude de Patel et al. [64] où à l’aide d’une
L’estime de soi, qui est très améliorée en fin de programme CRT, méthode de projection de ce qu’un sujet peut nécessiter en termes
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de coûts sur les services de soins, ils démontrent qu’un béné- patientes, une étude sur un effectif plus large de 23 sujets a été
fice de la CRT sur la mémoire de travail à 6 mois peut se révéler entreprise [70] . Une amélioration de leurs capacités de flexibilité a
peu coûteux en termes d’amélioration sociale et de progrès dans été démontrée sur l’épreuve du Trail Making Test, et le CAT/BAT,
l’utilisation de services sociaux et de soins. ainsi qu’une diminution des réponses persévératives. À la figure
Dans une méta-analyse regroupant 40 études qui recensent de Rey, les scores s’améliorent, témoignant d’une amélioration de
plus de 2 000 participants, Wykes et al. [65] insistent sur le fait la cohérence centrale. Ces améliorations persistent à 6 mois [71] .
que les thérapies de remédiation cognitive apportent une amé-
lioration dans l’ensemble des domaines cognitifs importants à
l’exception de l’apprentissage visuel et de la mémoire, ce qui laisse
un choix étendu et large sur les techniques possibles. Par ailleurs,
Conclusion
ces auteurs insistent sur le fait que le choix de techniques privi-
La technique de la CRT est un programme complet et très
légiant l’apprentissage massif et la répétition d’exercices ont un
riche généré à partir des modèles neuropsychologiques classiques
effet plus évident quoique modeste sur la cognition, tandis que
du fonctionnement frontal dans tous les domaines cognitifs et
l’apprentissage de stratégies a un moindre effet cognitif et un
moteurs où il est impliqué, et du modèle de Frith [38, 39] qui rend
effet plus évident sur le retentissement fonctionnel. Ceci s’opère
compte des déficits neuropsychologiques de la schizophrénie. La
probablement par un meilleur transfert des compétences cogni-
CRT apporte un bénéfice certain aux patients schizophrènes, en
tives acquises sur des situations pratiques et concrètes de la vie
termes d’amélioration de mémoire de travail, d’attention sou-
quotidienne. En outre, lorsque ces deux pratiques sont intégrées
tenue et de flexibilité cognitive, qui lorsque ce programme se
dans un programme de réhabilitation, le bénéfice des techniques
prolonge par une réinsertion sociale ou professionnelle trouve
de remédiation cognitive est d’autant plus renforcé. Par ailleurs,
immédiatement une application dans la vie quotidienne du
Wykes et al. [65] , sur la base d’études qui ont observé l’incidence de
patient. La CRT, comme tous les autres programmes de remé-
la remédiation cognitive en fonction de l’âge des participants ou
diation cognitive, doit s’inscrire dans un projet de réinsertion et
de résultats négatifs obtenus chez des sujets plus âgés [66] , émettent
servir de tremplin, sans quoi le bénéfice de la remédiation finit
l’hypothèse d’un moindre effet des techniques de remédiation
par disparaître. L’avantage de la CRT est sa grande plasticité et
chez les sujets plus âgés.
son adaptabilité à de nombreux profils de patients, et à de nom-
breuses pathologies mentales. Elle peut assurément être pratiquée
chez l’enfant, voire dans certains domaines de rééducation neu-
Application du programme rologique (épilepsies, accidents vasculaires, etc.). Cette méthode
doit être diffusée afin de mieux déterminer les adaptations pos-
de Cognitive Remediation Therapy sibles du programme pour des pathologies comme la bipolarité,
à d’autres pathologies les troubles du spectre autistiques chez l’enfant ou l’adulte, ou
encore les déficits attentionnels avec hyperactivité de l’enfant. La
Syndrome d’Asperger CRT constitue la base d’un formidable outil thérapeutique qui doit
être intégré avec d’autres thérapies psychosociales, comme les thé-
Une application d’une partie de la CRT centrée sur des exer- rapies comportementales ou les programmes de remédiation des
cices de mémoire de travail et de flexibilité cognitive a été habiletés psychosociales. Il va sans dire qu’une diffusion large de
faite chez deux sujets adultes souffrant de syndrome d’Asperger. cette méthode permettra d’affiner toutes ces applications possibles
L’un de ces sujets seulement semble avoir été amélioré à trois pour une meilleure adaptation des thérapies psychosociales aux
épreuves de mémoire de travail (digit span, n-back test et épreuve de multiples difficultés de nos patients.
Brown-Peterson), ainsi qu’au quotient de l’épreuve de mémoire de
Wechsler et au Trail Making Test. Par ailleurs, chez ce même sujet,
on dénote une amélioration de l’estime de soi et de questionnaires
de flexibilité cognitive remplis par sa famille [67] . Ces tentatives Références
doivent être répliquées et étendues sur de plus larges effectifs. Des
centres français développent actuellement et adaptent la CRT aux [1] Delahunty A, Morice R, Frost B. Specific cognitive flexibility
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corporelle suffisant. Ce programme inclut dix sessions de remédia- review of current knowledge. Rev Neurol 2007;163:1157–68.
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gramme est basé sur le Trail Making Test, le test du CAT/BAT 2004;30:109–18.
(chat/chauve souris) qui met en jeu la substitution des mots cat [10] Mouchet-Mages S, Rodrigo S, Cachia A, Mouaffak F, Olie JP, Meder
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Amado I, Todd A. Cognitive Remediation Therapy (CRT) : un programme de remédiation cognitive pour
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