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Troubles anxieux et névrotiques


A. Pelissolo

Les troubles anxieux font partie des pathologies psychiatriques les plus fréquentes en population géné-
rale, avec une prévalence totale de 12 % à 15 %. Il existe sept diagnostics principaux de troubles
anxieux chroniques : les phobies (spécifiques, sociales et l’agoraphobie), le trouble panique, le trouble
anxieux généralisé, les troubles obsessionnels compulsifs (TOC), et les états de stress post-traumatique.
En plus de l’anxiété, présente dans chacun de ces syndromes, des caractéristiques sémiologiques per-
mettent de porter un diagnostic spécifique, comme l’objet de la peur, ses mécanismes, les stratégies
mises en œuvre pour la contrôler, etc. Les traitements qui ont fait la preuve de leur efficacité dans les
troubles anxieux sont surtout les thérapies comportementales et cognitives, et certains antidépresseurs
sérotoninergiques. Enfin, les troubles névrotiques reposent sur des fonctionnements particuliers de per-
sonnalité, pouvant être ou non associés à des troubles anxieux. La névrose hystérique occupe une place
particulière, avec des tableaux souvent complexes et des mécanismes encore largement incompris.
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Mots-clés : Antidépresseur ; Anxiété ; Conversion ; Panique ; Phobie ; Thérapie comportementale et cognitive

Plan mais les jeunes adultes sont les plus touchés. Leur gravité est très
variable, allant de formes relativement légères et peu gênantes à
■ Introduction 1 des formes très sévères et invalidantes.
En plus de la gêne psychologique et fonctionnelle produite
■ Épidémiologie 1 par les pathologies anxieuses, celles-ci constituent des facteurs
■ Sémiologie de l’anxiété 2 de risque pour d’autres affections psychiatriques (dépressions
Émotions anxieuses 2 et addictions notamment) et somatiques (maladies cardiovas-
Cognitions anxieuses 2 culaires), et induisent des consommations de soins et de
Comportements anxieux 2 médicaments importantes, justifiant un repérage attentif et des
Signes d’accompagnement 3 traitements adéquats.
Cas particuliers : les attaques de panique 3 Dans la description de ces troubles, il faut distinguer trois
■ Troubles anxieux 4 niveaux :
Trouble panique et agoraphobie 4 • les symptômes de base (émotions anxieuses, pensées anxieuses,
Phobies sociales 5 comportements anxieux), qui sont des signes pouvant être pré-
Phobies spécifiques 7 sents sans gravité chez des sujets normaux, mais qui peuvent
Troubles obsessionnels compulsifs 7 devenir pathologiques du fait de leur intensité, de leur répéti-
Anxiété généralisée 8 tion, de leur mauvais contrôle ;
État de stress post-traumatique 9 • les diagnostics de troubles anxieux à proprement parler

(phobies, troubles obsessionnels compulsifs [TOC], etc.), qui
Troubles névrotiques 9
correspondent à des syndromes bien établis sur la base d’un
Conversions et personnalités hystériques 10
regroupement de symptômes ;
• les troubles névrotiques (névrose d’angoisse, névrose obsession-
nelle, etc.), qui correspondent à l’association de symptômes
 Introduction anxieux et de traits de personnalité particuliers supposés être
à l’origine des symptômes anxieux, dans la théorie psychana-
lytique.
L’anxiété est une émotion normale et banale, qui peut devenir
pathologique dans deux contextes différents :
• en tant que symptôme, dans presque toutes les affections psy-
chiatriques ;  Épidémiologie
• en tant que diagnostic spécifique, dans ce que l’on nomme les
« troubles anxieux ». Les troubles anxieux touchent environ 12 % à 15 % de la popu-
Il s’agit des troubles psychiques les plus répandus dans la popu- lation à un moment ou un autre de la vie. Ils concernent deux
lation générale. Ils peuvent concerner des personnes de tous âges, fois plus les femmes que les hommes, et apparaissent surtout dans

EMC - Traité de Médecine Akos 1


Volume 7 > n◦ 3 > juillet 2012
http://dx.doi.org/10.1016/S1634-6939(12)48040-1
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l’enfance et au début de l’âge adulte, même si des formes à début Ces pensées peuvent porter sur la situation actuelle (« Je fais
tardif, après 50 ou 60 ans, peuvent se rencontrer. La durée des un malaise, je suis en train de m’évanouir »), sur les événements
troubles est variable, de quelques mois à de nombreuses années, de l’avenir à court ou long terme (« Si ça continue, mon cœur va
avec parfois des évolutions continues sans aucune rémission. lâcher » ; « Tout le monde me voit me ridiculiser, je vais perdre mon
Les troubles anxieux les plus fréquents sont les phobies, qui travail »), ou aussi sur des événements du passé (« Je n’aurais pas
peuvent toucher jusqu’à 10 % de la population, mais chacun des dû dire ça », « Ai-je bien mis la bonne lettre dans l’enveloppe ? » ;
troubles anxieux connaît une prévalence supérieure à 1 %. « Je revois sans cesse la scène de l’accident »).
On parle de pensées obsédantes (ou d’obsessions) lorsque l’idée
angoissante s’impose dans l’esprit de manière intrusive et répé-
 Sémiologie de l’anxiété titive, lorsque le sujet ne peut la chasser et se concentrer sur
autre chose, et lorsqu’il tente en général de l’annuler avec d’autres
Avant de poser un diagnostic de trouble anxieux, il est indis- pensées, des réponses rassurantes ou des comportements de pro-
pensable d’analyser précisément les émotions, les pensées et les tections (rituels, compulsions).
comportements qui semblent anormaux, ainsi que leur évolution Il existe des flash-backs ou des reviviscences chez les patients
dans le temps. Tous ces éléments peuvent se rencontrer dans beau- ayant vécu un traumatisme psychologique, lors d’une agression
coup d’autres pathologies que les troubles anxieux (dépression, ou d’un accident par exemple, chez qui le souvenir s’impose sans
addictions, voire psychoses) ; il est donc essentiel, dans un second cesse à l’esprit sous forme d’images ou d’un film très détaillé,
temps, de procéder à un regroupement et à une hiérarchisation des comme s’il revivait vraiment la scène, de jour comme de nuit
symptômes. (cauchemars).
De nombreux patients développent de véritables scénarios
catastrophes, dans lesquels ils imaginent le pire, avec des événe-
Émotions anxieuses ments qui s’enchaînent et qui aboutissent inexorablement à des
conséquences terribles (« Si je monte dans ce métro et qu’il s’arrête
Les émotions présentes en excès dans les troubles anxieux sont entre deux stations, je vais avoir un malaise à cause de la chaleur,
surtout la peur, l’anxiété, l’angoisse. La peur est la réaction qui je ne pourrai pas sortir, personne ne pourra m’aider, je vais rester
accompagne la perception d’un danger précis. L’anxiété est un coincé et mourir étouffé »).
sentiment plus ou moins pénible d’attente ou d’appréhension Les enfants, mais parfois aussi certains adultes, développent des
douloureuse d’un danger, qu’il soit précis et identifié ou vague et peurs basées sur une pensée magique, qui se rapprochent de la
incertain. Les termes anxiété et angoisse sont aujourd’hui utilisés superstition, de croyances religieuses ou de pensées irrationnelles :
comme des synonymes. « Si j’ai des mauvaises pensées, il va arriver un malheur à mes
L’anxiété peut être aiguë (survenue rapide, durée brève), parents », « Si je ne touche pas cette porte trois fois, je risque de
paroxystique (survenue très brutale, intensité extrême), fluc- perdre ma femme ».
tuante, ou bien durable et continue. En plus de modifier les émotions (cercle vicieux : « Plus
L’intensité de l’émotion peut aller d’un niveau moyen à un j’y pense, plus je suis mal, et donc plus j’y pense ») et les
niveau très intense, parfois explosif comme dans les attaques de comportements (tentatives de protection, d’évitements, rituels,
panique. Les conséquences de ces émotions trop intenses et trop etc.), les pensées anxieuses peuvent provoquer transitoirement
fréquentes sont une douleur morale parfois aussi forte que dans la d’importants troubles de la concentration et de la mémoire qui
dépression, et des modifications secondaires et pathologiques des perturbent les performances intellectuelles et la réalisation des
comportements et des modes de pensée (évitements, ruminations, tâches.
etc.). Les pensées anxieuses sont à bien différencier :
Les émotions anxieuses pathologiques sont à bien différencier • de l’inquiétude normale face à un stress ou à un danger réel : tran-
de plusieurs autres types d’émotions : sitoire, adaptée à la situation, contrôlable par le raisonnement,
• les peurs ou les angoisses normales : il s’agit là de craintes liées à sans conséquence majeure ;
des situations réellement dangereuses, à des stress effectifs ou • des cognitions ou pensées dépressives avec une vision négative de
à des interrogations personnelles qui sont pénibles, mais peu soi et un point de vue pessimiste sur la situation actuelle et/ou
douloureuses, transitoires, contrôlables et sans retentissement passée ;
majeur ; • d’idées délirantes, qui sont des convictions erronées, inébran-
• la tristesse et les autres émotions dépressives (désespoir, honte) : lables malgré la preuve de l’erreur, pensées imposées par
quand elles sont intenses et durables, elles sont caractéristiques l’extérieur ou perçues comme une voix (hallucinations). Les
d’une dépression, qu’il faut rechercher à l’aide d’autres signes pensées anxieuses, les inquiétudes et les obsessions sont en effet
clés (anhédonie, ralentissement, idées suicidaires, etc.) ; vécues par le sujet comme provenant de sa propre pensée ; il a
• les angoisses psychotiques : caractérisées par une douleur indi- conscience de leur caractère excessif et il peut les critiquer, en
cible, non structurée, sans objet concret et sous-tendue par tout cas en dehors des moments aigus d’angoisse.
une sensation de vide intérieur, de morcellement physique ou
psychique ou de dépersonnalisation. Ce type d’angoisse très
particulier est présent dans les troubles psychotiques, comme la
schizophrénie ou les bouffées délirantes, et s’accompagne alors Comportements anxieux
souvent d’idées délirantes et d’hallucinations. Le plus souvent, les comportements anxieux consistent en
des évitements partiels ou complets des situations anxiogènes,
Cognitions anxieuses ou en une inhibition : paralysie, incapacité à penser et à
réagir en réponse à la peur et à l’angoisse. Parfois le compor-
Des pensées particulières accompagnent souvent les émotions tement est fait transitoirement d’agitation, d’agressivité, ou
anxieuses. Il peut s’agir d’inquiétudes (« Que va-t-il m’arriver ? », d’impulsivité. Il est cependant très rare que cela se traduise par
« Ça va mal tourner »), de doutes (« Ai-je bien fermé ma voiture ? »), des troubles du comportement visibles car, malgré leur crainte
de souvenirs, d’images, etc. Ces pensées ou cognitions peuvent de perdre leur contrôle, la plupart des personnes anxieuses
exister en dehors de toute pathologie, mais deviennent anormales tiennent à cacher leurs symptômes et parviennent en réalité à se
quand elles sont trop fréquentes et surtout quand elles s’imposent contrôler.
au sujet de manière excessive et envahissante. Même s’il peut Les conduites pathologiques peuvent prendre la forme de :
les remettre en cause à distance (« Je sais que je ne devrais pas • compulsions : actes répétés, souvent ritualisés et stéréotypés,
m’inquiéter » ; « Il n’y aucune raison que j’aie oublié de faire telle visant à calmer l’anxiété déclenchée par une obsession, même
chose »), le raisonnement sur le moment peut être très perturbé si le patient en comprend le caractère absurde et cherche sou-
par l’angoisse du fait des conséquences redoutées, qui peuvent vent à lutter contre le besoin d’accomplir ces actes. Il s’agit
être la peur de mourir, d’avoir un accident ou de toute autre soit de comportements visibles (se laver les mains de manière
catastrophe imminente. répétitive, vérifier sans cesse la fermeture d’une porte, etc.), soit

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Troubles anxieux et névrotiques  7-0150

Respiratoires :
- blocage
- hyperventilation
- gêne thoracique
- étranglement
Cardiovasculaires :
- palpitations
- tachycardie
- vasodilatation
Comportements :
Craintes :
- sidération
- perte de
Symptômes - agitation
contrôle
physiques - fuite
- devenir fou
- demande d’aide
Sensoriels : - mourir
- prise de produits
- étourdissement
- troubles de
l’équilibre
- paresthésies
Neurovégétatifs :
- hyperesthésie
- sueurs, nausées
- dépersonnalisation
- bouffée de chaleur
- déréalisation
- gêne gastrique
- douleur abdominale
- tremblement, fébrilité

Figure 1. Symptômes les plus caractéristiques des attaques de panique.

de « compulsions mentales » sous la forme de comptage (arith- constitue cependant une réaction très particulière et intense, qui
momanie), prières, conjurations, vérifications en imagination, peut rentrer dans le cadre de différents troubles anxieux qui seront
etc. ; évoqués plus loin.
• conduites contraphobiques : stratégies permettant d’affronter les Il s’agit d’une crise d’angoisse aiguë à début brutal, atteignant
situations anxiogènes et phobogènes avec moins d’angoisse son maximum en moins de 10 minutes, durant en moyenne 15
(par exemple l’accompagnement par une personne ou le port à 30 minutes, avec un sentiment de panique lié à la sensation de
d’un objet), le plus souvent sans effet de protection réel, mais perte de contrôle dans une spirale sans fin (Fig. 1). Les différents
avec un rôle symbolique rassurant ; symptômes anxieux décrits précédemment peuvent être présents
• autres conduites : prise impulsive ou compulsive d’alcool ou simultanément et très fortement, créant un emballement général
de drogues, demandes incessantes de réassurance auprès des de l’organisme et de la pensée. Les signes peuvent être nombreux
autres, lenteur extrême dans les actes afin de surveiller en per- et variés mais, en général, les patients présentent une série de
manence l’absence d’erreur, etc. symptômes physiques et émotionnels qui leur sont personnels :
Ces comportements entraînent un renforcement des pensées plutôt cardiaques pour les uns (palpitations, bouffées de chaleur,
anxieuses (sentiment de vulnérabilité et d’incapacité, dévalo- peur d’un infarctus), plutôt respiratoires pour les autres (tachy-
risation), un handicap fonctionnel et social, des conduites de pnée, impression et peur d’étouffer) ou encore sensoriels (vertiges,
dépendance et une aggravation de la peur. Un phénomène phy- céphalées, peur d’une attaque cérébrale).
siologique de base explique en grande partie le développement Cet état peut être déclenché par :
et le maintien de la plupart des troubles anxieux et phobiques : • un stress brutal, comme un accident ou une altercation ;
la peur provoque des évitements, et les évitements renforcent la • une confrontation à une situation phobogène (rencontre avec
peur, d’où un cercle vicieux sans fin. l’objet redouté chez un sujet présentant une phobie ou un autre
trouble anxieux) ;
Signes d’accompagnement • un facteur toxique (psychostimulant, psychodysleptique,
alcool, autres drogues), ou organique (cardiorespiratoire par
L’anxiété pathologique s’accompagne d’autres dysfonctionne- exemple) ;
ments plus ou moins nets selon les cas et en général peu • une période de fatigue ou de perturbation émotionnelle par
spécifiques : exemple au cours d’une dépression.
• des perturbations physiologiques : troubles du sommeil, Certaines attaques de panique peuvent survenir spontanément
troubles de l’appétit (incapacité transitoire à manger, ou hyper- sans aucun facteur déclenchant ni contexte favorisant. Si elles
phagie) ; se répètent de manière imprévisible et qu’elles perturbent la vie
• des symptômes physiques divers : douleurs, tensions, palpita- quotidienne, elles peuvent alors rentrer dans le cadre d’un trouble
tions, dyspnée, sueurs, tremblements, vertiges, bouffées de anxieux chronique appelé trouble panique, qui sera évoqué plus
chaleur, pollakiurie, etc. ; loin.
• des troubles relationnels : irritabilité, impatience, impulsivité et Dans les formes les plus intenses, les sujets peuvent avoir des
dépendance affective. impressions de déréalisation (perception déformée de la réalité)
D’autres signes associés peuvent aussi correspondre à une autre ou de dépersonnalisation (impression de ne plus être soi-même et
pathologie présente en même temps, par simple comorbidité ou de se transformer), mais seulement sur une durée brève.
par complication : dépression, alcoolodépendance ou autre addic- Le concept de crise de spasmophilie ou de tétanie n’existe qu’en
tion, trouble de la personnalité, etc. France et est souvent présenté comme une affection organique liée
à un déficit en magnésium ou en calcium. En fait, il s’agit le plus
Cas particuliers : les attaques de panique souvent de crises d’angoisse ou d’attaques de panique se manifes-
tant surtout par des signes musculaires liés à l’hyperventilation,
L’attaque de panique n’est pas une pathologie en elle-même, celle-ci induisant une hypertonie du fait de l’hypocapnie. Ces
car il s’agit d’un état transitoire qui peut ne jamais se répéter. Elle crises sont souvent déclenchées par des stress ou des contrariétés,

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mais peuvent aussi correspondre à un véritable trouble panique Tableau 1.


nécessitant un traitement, qui vise alors surtout au contrôle de la Définitions succinctes des troubles anxieux.
respiration (Fig. 1). Diagnostics Définitions
L’examen somatique dans l’urgence est à adapter à la situation
et aux premiers signes d’orientation, pouvant se limiter à une Trouble panique Répétition d’attaques de panique
auscultation et à une prise de pression artérielle, mais pouvant spontanées avec anxiété anticipatoire
(peur d’avoir peur)
aussi comporter quelques examens complémentaires (électro-
cardiogramme, examens sanguins et recherche de toxiques au Agoraphobie Peur intense de lieux ou de situations
moindre doute). Dans la plupart des cas, l’éloignement des dans lesquelles un malaise ou un
facteurs anxiogènes extérieurs et la présence rassurante d’un pro- incident pourrait survenir et être
fessionnel permet très rapidement de réduire l’intensité de la dangereux, sans sortie ni aide possible
crise ou la faire cesser. Si l’examen est en faveur d’une crise Phobie sociale Peur intense du regard et du jugement
d’angoisse sans facteur organique, il est important de l’expliquer de l’autre, par crainte d’un jugement
au patient. Insister sur l’origine psychologique de son état per- négatif ou d’une humiliation
met au patient d’attribuer à l’anxiété les symptômes physiques
observés. Rappeler au patient que la crise va naturellement Phobie spécifique Peur intense, mais limitée à une
céder et qu’en aucun cas sa vie n’est en danger est souvent situation précise (animal, sang, objet,
environnement, etc.), après élimination
fondamental.
d’une agoraphobie et d’une phobie
Des méthodes simples permettent également de réduire les
sociale
symptômes psychiques et physiques : défocaliser l’attention du
patient des impressions de menaces, l’inciter à se détendre et à se Trouble obsessionnel Répétition de pensées intrusives
relaxer, et surtout modifier son rythme respiratoire. Celui-ci doit compulsif considérées comme dangereuses ou
être le plus lent et le plus superficiel possible, bouche fermée et coupables (obsessions), et associées à des
en s’aidant d’une respiration abdominale plutôt que thoracique. actes répétitifs (compulsions) visant à
Les respirations amples et l’hyperventilation favorisent en effet réduire les risques ou l’angoisse
l’hypocapnie. Trouble anxieux généralisé Inquiétudes permanentes vis-à-vis des
Ces mesures permettent dans la très grande majorité des cas problèmes pouvant survenir dans
d’obtenir une interruption de la crise. La prescription médicamen- l’avenir, sans s’en sentir responsable,
teuse au cours de la crise d’angoisse elle-même doit être limitée avec tension nerveuse continue
autant que possible. Le patient ne doit pas en effet conserver en
État de stress Angoisses, phobies et reviviscences
mémoire une issue uniquement « médicalisée » de sa crise, en évi-
post-traumatique directement liées à un événement
tant tous les actes les plus symboliques et les plus techniques
traumatisant grave vécu dans le passé
(perfusions, injections, etc.). C’est ainsi qu’un meilleur contrôle
du patient sur son anxiété pourra être obtenu, dans la perspec-
tive d’éventuelles récidives, évitant de le rendre dépendant des
structures de soin les plus lourdes. • des plaintes somatiques multiples et/ou récurrentes, non expli-
Le médicament ne s’impose que lorsque la crise se prolonge quées totalement par une maladie organique ; les troubles
malgré les méthodes énoncées ci-dessus, ou que les symptômes souvent sous-jacents sont le trouble panique (si les symptômes
sont très intenses (agitation psychomotrice très importante par sont présents de manière paroxystique) et le trouble anxieux
exemple). La voie orale est à privilégier, car elle assure la meilleure généralisé (symptômes présents en continu) ;
biodisponibilité et rapidité d’action pour les produits anxioly- • des demandes d’examens répétées qui ne rassurent pas le
tiques, et elle permet de limiter le caractère technique de l’acte. Si patient lorsqu’ils sont normaux ;
une administration médicamenteuse est indiquée, il faut choisir • des demandes de traitements répétées ou des prescriptions non
un produit et une dose réellement actifs et anxiolytiques, et pros- indispensables que l’on ne parvient pas à modifier ;
crire tout placebo ou produit apparenté, qui pourrait être efficace, • des réactions excessives à des événements de vie ;
mais sans permettre au patient d’accéder à une compréhension et • d’autres troubles psychologiques qui ne s’améliorent pas mal-
à une maîtrise du phénomène. gré des traitements bien suivis (syndromes dépressifs, prises
Les traitements disponibles dans le traitement aigu de l’anxiété d’alcool), et qui peuvent être secondaires à un trouble phobique
sont essentiellement les benzodiazépines, par exemple le diazé- ou un trouble panique par exemple ;
pam 5 ou 10 mg ou l’alprazolam 0,25 ou 0,50 mg. • des comportements que l’entourage ou que le patient décrivent
L’effet anxiolytique, s’accompagnant éventuellement d’un effet comme anormaux et gênants sans forcément les rattacher eux-
sédatif, en fonction de la dose et de la sensibilité du patient, est mêmes à l’anxiété (un évitement de certains lieux à cause d’une
obtenu en 5 à 15 minutes environ. La voie intramusculaire est à phobie, de certaines activités à cause d’un TOC, etc.).
réserver aux cas exceptionnels où la voie orale n’est pas acces- Certains patients ont leur propre conception de leurs troubles,
sible (agitation majeure, contracture de la mâchoire, troubles de qui peut être fonction de croyances personnelles, familiales
la déglutition), avec par exemple du diazépam 10 mg. ou culturelles, les conduisant à n’en rapporter qu’un certain
Après disparition de l’angoisse, il est nécessaire de refaire une type de symptômes, le plus souvent somatiques. Ce peut être
évaluation diagnostique, d’expliquer au patient la nature de ses le cas de troubles digestifs chroniques prenant l’allure d’une
troubles, et de proposer un suivi ou une réévaluation à distance. Le colite spasmodique, mais pouvant correspondre à un trouble
traitement préventif des attaques de panique, dans le cadre d’un anxieux généralisé ou à un trouble panique, ou de crises dites
trouble panique, sera présenté plus loin. de « spasmophilie » correspondant en fait le plus souvent à des
attaques de panique. L’effort du clinicien est alors d’identifier la
participation psychique à ces troubles et de l’expliquer au patient,
tout en tenant compte de la représentation que celui-ci a de ses
 Troubles anxieux symptômes.

Ce sont des syndromes durables associant émotions, pensées et


comportements pathologiques autour d’une anxiété excessive. Le
Trouble panique et agoraphobie
type de trouble anxieux est défini surtout par l’objet de la peur et Le trouble panique est défini par la répétition, plus ou moins fré-
par les comportements qui en découlent. quente, d’attaques de panique [1, 2] . Certaines d’entre elles doivent
On classe les troubles anxieux en sept grandes catégories, résu- avoir été spontanées, inattendues, c’est-à-dire non facilitées par
mées dans le Tableau 1 [1] . une peur préalable et par une confrontation à une situation anxio-
Plusieurs types de situations doivent alerter le praticien quant gène. En outre, le diagnostic de trouble panique ne peut être
à l’existence possible d’un trouble anxieux, parmi lesquels : porté que si les attaques de panique sont à l’origine, pendant

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1 mois au moins, d’une crainte persistante de la survenue d’une Traitements


nouvelle attaque, de préoccupations concernant les risques liés
Le traitement aigu de l’attaque de panique a été vu plus haut.
à ces attaques (peur de mourir, de devenir fou, etc.), ou plus
Le traitement du trouble panique doit être un traitement de fond,
généralement d’un changement de comportement. Le symptôme
préventif de la survenue des attaques de panique. Il peut être médi-
fondamental qui est ainsi décrit est l’anxiété anticipatoire, que
camenteux et/ou psychothérapeutique, de bons résultats étant
l’on résume souvent par l’expression « la peur d’avoir peur ». Les
obtenus avec les deux approches, surtout en association. Les trai-
patients touchés ne redoutent en effet pas une situation particu-
tements médicamenteux sont recommandés si les attaques de
lière, mais plutôt leurs propres réactions de peur et cette forme
paniques sont fréquentes ou intenses, et la thérapie comporte-
extrême que représente l’attaque de panique.
mentale est indispensable si l’agoraphobie est sévère et que les
L’agoraphobie était définie initialement par la peur des grands
conduites d’évitement sont majeures.
espaces et/ou de la foule. La définition actuelle est élargie à la
Les traitements médicamenteux du trouble panique sont
crainte de toutes les situations dont on ne peut pas s’échapper faci-
essentiellement les antidépresseurs sérotoninergiques [3] . Il est
lement en cas de malaise, d’incident, ou d’attaques de panique,
préférable de prescrire en première intention des inhibiteurs spé-
ou dans lesquelles on ne peut recevoir une aide en cas de pro-
cifiques de recapture de la sérotonine (IRS) en raison de leur bonne
blèmes. Chez les sujets présentant un trouble panique, la crainte
tolérance, comme par exemple l’escitalopram (150-300 mg/j) ou
principale concerne les risques de survenue d’une crise, alors que
la paroxétine (30-50 mg/j), mais toujours en commençant par des
chez les autres sujets, cette crainte est plus floue, avec l’intuition
doses faibles, par exemple la moitié du comprimé le moins dosé,
d’un risque de malaise, de chute, d’accident mal défini.
cela afin d’éviter une recrudescence anxieuse (malaises, troubles
Typiquement, les situations redoutées sont la foule, surtout en
digestifs, attaques de panique) souvent constatée en début de
milieu fermé (métro, grand magasin, salles de spectacle), d’autres
traitement. La dose efficace peut être atteinte en 1 à 2 semaines
endroits clos dont la sortie n’est pas immédiate (train, avion,
en général, et une amélioration est constatée entre la 3e et la
ascenseur), mais aussi des endroits ouverts au sein desquels les
6e semaine. En cas d’efficacité, le traitement doit être poursuivi à la
patients craignent de perdre leurs repères et de ne pas trouver
même dose sur une durée longue, au moins 1 an, et arrêté ensuite
appui (grande place vide à traverser, rue ou pont, etc.). Dans les
progressivement et prudemment. La venlafaxine (75-225 mg/j) ou
cas extrêmes, le simple fait de s’éloigner d’une zone de sécurité, en
la clomipramine (100-200 mg/j) peuvent constituer des alterna-
général le domicile, engendre une peur intense, voire des attaques
tives en cas d’échec des IRS, avec le même schéma thérapeutique.
de panique, limitant alors gravement les possibilités de déplace-
Les benzodiazépines sont très souvent utilisées par les patients,
ment.
en automédication ou sur prescription, au moment des attaques
Comme pour toute phobie, la peur est reconnue par le sujet
de panique ou pour faciliter l’affrontement des situations redou-
comme irrationnelle, excessive, mais crée une gêne significative
tées. Elles peuvent être efficaces sur les symptômes immédiats,
dans sa vie. Elle s’accompagne de comportements d’évitement
mais engendrent très rapidement, dans ce contexte, une dépen-
ou de fuites, et de conduites contraphobiques de réassurance qui
dance psychologique et physique. Elles n’ont pas d’effet de fond
consistent essentiellement en un besoin d’être accompagné pour
pour la prévention des attaques de panique. Elles ne sont donc
affronter les situations redoutées, à l’origine d’une dépendance
pas recommandées.
importante.
Les thérapies comportementales et cognitives (TCC) sont effi-
caces pour traiter le trouble panique (gestion et prévention des
attaques de panique) et surtout l’agoraphobie (réduction des
Diagnostic différentiel conduites d’évitement) [4] . Elles sont basées sur l’information du
Le trouble panique étant surtout basé sur la récurrence des patient sur son trouble, des techniques de relaxation, d’exposition
attaques de panique, son diagnostic renvoie aux points abordés graduelle aux situations redoutées (sortir de chez soi, prendre les
au chapitre précédent, en ayant soin principalement d’avoir écarté transports en commun, rester longtemps dans les lieux anxio-
un trouble qui ne serait que symptomatique d’un épisode dépres- gènes) et donc sur une désensibilisation et un déconditionnement
sif, d’une dépendance alcoolique (crises d’angoisse lors des phases de la peur (Tableau 2). L’exposition peut se faire directement en
d’intoxication et de sevrage), d’autres prises de toxiques, ou d’une milieu réel, « in vivo », seul ou avec le thérapeute, ou d’abord
maladie somatique comme une hyperthyroïdie, un trouble du initialement en imagination si l’appréhension est trop forte au
rythme cardiaque, une épilepsie temporale, un phéochromocy- départ. Ces techniques nécessitent en général des séances hebdo-
tome, ou encore une maladie de Ménière. En outre, il ne faut madaires sur une durée de 3 à 4 mois, avec des tâches prescrites
pas confondre l’agoraphobie avec les phobies sociales (cf. infra), entre les séances, et leurs effets peuvent être plus durables que
même si les situations en cause peuvent être en partie les mêmes : ceux des traitements médicamenteux utilisés seuls.
l’agoraphobe peut avoir peur de la foule, mais du fait d’une sen-
sation d’enfermement, pas du regard des autres.

Phobies sociales
Épidémiologie et évolution Les phobies sociales ont été longtemps négligées, alors qu’il
Le trouble panique, avec ou sans agoraphobie, touche envi- s’agit de troubles anxieux fréquents, à l’origine d’un handicap par-
ron 2 % à 3 % de la population à un moment ou un autre. Il fois majeur. La peur est ici en rapport avec le regard d’autrui, qu’il
touche deux à trois fois plus les femmes que les hommes, et s’agisse d’un seul individu ou d’un groupe [1, 2] . Elle repose sur la
l’âge moyen d’apparition se situe entre 20 et 30 ans. Il s’agit d’un crainte d’être jugé ou évalué de façon négative en raison de son
trouble chronique, pouvant connaître des périodes de rémission allure, de sa personnalité ou de son comportement, avec la hantise
et d’aggravation, mais évoluer sur des années, voire plus de 10 de se conduire de manière embarrassante, voire humiliante aux
ou 20 ans. Les principales complications du trouble panique et yeux des autres. L’exposition à ce type de situation déclenche qua-
de l’agoraphobie, outre la souffrance quotidienne et le handi- siment systématiquement une réaction anxieuse plus ou moins
cap fonctionnel qu’ils peuvent engendrer (évitement de lieux intense, qui peut aller parfois jusqu’à une véritable attaque de
ou de moyens de transport, nécessité d’un accompagnement panique.
permanent), sont les épisodes dépressifs et les usages abusifs La peur de certains symptômes physiques visibles est caractéris-
de médicaments et d’alcool. Ces produits sont utilisés à visée tique des phobies sociales : peur de rougir, de trembler, d’avoir des
anxiolytique et/ou antidépressive initialement, mais engendrent nausées ou des vomissements, ou encore de perdre le contrôle de
rapidement une dépendance (alcool, benzodiazépines) et les ses urines ou de ses intestins. Peuvent survenir également un trem-
troubles s’aggravent mutuellement. Des syndromes dépressifs blement de la voix, un bégaiement ou une impossibilité complète
sont retrouvés chez un tiers à la moitié des patients, et des pro- de s’exprimer, des palpitations et des bouffées de chaleur, une
blèmes de dépendance chez plus d’un quart. Les risques suicidaires inhibition ou une maladresse dans des gestes habituellement bien
sont importants, surtout en cas de complication dépressive ou maîtrisés (remplir un verre, écrire, effectuer un travail manuel par
d’alcoolisme associé. exemple).

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7-0150  Troubles anxieux et névrotiques

Tableau 2.
Principales indications des thérapies cognitivocomportementales (TCC) et des médicaments, utilisés séparément ou en association, dans les troubles anxieux.
Thérapies cognitivocomportementales Chimiothérapie
Trouble panique Relaxation Certains antidépresseurs a (escitalopram, venlafaxine
Exposition intéroceptive LP, paroxétine, citalopram, clomipramine)
Restructuration cognitive

Agoraphobie Désensibilisation, exposition graduée Aucun (sauf anxiolytiques ponctuels)

Phobies spécifiques Désensibilisation, exposition graduée Aucun (sauf anxiolytiques ponctuels)

Phobies sociales Restructuration cognitive Paroxétine, venlafaxine LP, escitalopram b


Exposition en groupe
Entraînement aux compétences sociales

Trouble anxiété généralisée Relaxation Benzodiazépines (1 à 4 semaines)


Restructuration cognitive Buspirone
Exposition cognitive Escitalopram, venlafaxine, paroxétine
Méditation en pleine conscience

Troubles obsessionnels compulsifs Restructuration cognitive Antidépresseurs sérotoninergiques (escitalopram,


Exposition avec prévention de la réponse ritualisée paroxétine, fluoxétine, sertraline, clomipramine)

États de stress post-traumatique Exposition Paroxétine


Restructuration cognitive
EMDR

Autres troubles anxieux Gestion du stress Benzodiazépines (1 à 4 semaines)


Troubles de l’adaptation Relaxation Hydroxyzine, étifoxine
Affirmation de soi Propranolol (manifestations fonctionnelles
Méditation en pleine conscience cardiaques à type de tachycardie et de palpitations
au cours de situations émotionnelles transitoires)
a
Indication : prévention des attaques de panique avec ou sans agoraphobie.
b
Indication : trouble anxiété sociale caractérisée lorsqu’il perturbe de manière importante les activités professionnelles ou sociales.
EMDR : eyes movement desensitization and reprocessing.

La sévérité de ces phobies sociales tient, d’une part, à l’intensité pour phobie sociale souffrent ou ont souffert de dépression. Les
de l’anxiété ressentie au moment de l’exposition et/ou avant autres troubles associés fréquemment sont les autres troubles
celle-ci et, d’autre part, aux conduites d’évitement qui se déve- anxieux et les problèmes d’abus ou de dépendance à l’alcool. Cer-
loppent progressivement, et qui peuvent toucher de nombreuses tains phobiques utilisent en effet l’alcool à visée anxiolytique et
situations de la vie quotidienne. C’est ainsi que certains pho- désinhibitrice lors de prestations publiques ou de rencontres, et
biques peuvent aménager, voire remanier de nombreux aspects risquent alors de perdre plus ou moins complètement la maîtrise
de leur vie professionnelle, relationnelle et affective en rai- de leur consommation.
son de l’impossibilité d’affronter certaines situations sociales. La
gravité du trouble peut être également liée à certaines de ses
complications, dépression et abus d’alcool notamment. Traitements
Les principales situations à l’origine des phobies sociales sont Lorsque la phobie sociale est intense et gênante, différents
la prise de parole en public (discours, réunions, examens), traitements peuvent être proposés, médicamenteux et/ou psycho-
l’exécution de tâches précises sous le regard éventuellement atten- thérapeutiques [2] . Des ␤-bloquants sont souvent prescrits chez les
tif d’autrui (écrire, manger, boire, travailler, utiliser des toilettes sujets présentant une anxiété de performance, mais de manière
publiques), et l’initiation ou la poursuite de conversations plus ou ponctuelle, avant la confrontation à une situation redoutée. Ils
moins personnalisées avec des personnes connues, inconnues ou peuvent en effet réduire certains signes périphériques de l’anxiété
intimidantes (supérieurs hiérarchiques, autorités). Pour certains (palpitations, tremblements, symptômes neurovégétatifs) et donc
sujets, le simple fait d’attirer l’attention d’autrui est insupportable indirectement diminuer l’appréhension et l’anxiété psychique. Il
et vécu comme une évaluation critique : arriver en retard à une peut s’agir d’une solution efficace dans les formes peu sévères ou
réunion, marcher devant une terrasse de café ou une file d’attente, d’un appoint utile à d’autres stratégies thérapeutiques.
se montrer en maillot de bain à la plage ou à la piscine, etc. En outre, des études ont été effectuées sur des médicaments
Certains sociophobes ne redoutent qu’une seule catégorie de pouvant représenter des traitements de fond des phobies sociales.
situations ou seulement quelques-unes, alors que d’autres les Seuls des IRS (escitalopram, paroxétine) ou la venlafaxine ont pu
redoutent presque toutes ; on parle alors de phobie sociale géné- montrer une efficacité supérieure au placebo et durable dans le
ralisée. Lorsque l’objet de la crainte est surtout le fait de rougir en temps dans cette indication [3] . Il est donc justifié de prescrire ce
public, avec une peur obsédante que les autres s’en aperçoivent, type de traitement dans les formes sévères, même si une prise en
on utilise le terme d’éreutophobie qui est une forme particulière et charge psychologique est, en outre, essentielle. Les doses efficaces
répandue de phobie sociale. sont du même ordre que pour le traitement des dépressions. Les
effets ne sont pas sensibles avant plusieurs semaines, voire 2 ou
3 mois, et le traitement doit être poursuivi au moins 6 ou 12 mois
Épidémiologie pour stabiliser les résultats obtenus. Ce traitement présente un
La plupart des enquêtes réalisées dans le monde entier intérêt même en l’absence de trouble dépressif, mais est d’autant
retrouvent des taux de prévalence sur la vie compris entre 3 % plus indiqué en cas de comorbidité dépressive.
et 6 %. L’âge moyen de début de la phobie sociale est d’environ Les TCC sont les traitements les plus importants, seules ou en
15 ans, même si certains sujets se décrivent comme phobiques association aux traitements médicamenteux. Il s’agit, d’une part,
depuis la première enfance. Il s’agit d’un trouble chronique, avec de corriger les fausses croyances ou les erreurs de raisonnement
parfois quelques fluctuations de sévérité dans le temps, mais le sous-tendant les peurs de l’autre (thérapie cognitive) et, d’autre
plus souvent sans rémissions véritables en l’absence de traitement. part, d’entraîner le patient à s’exposer progressivement au regard
L’existence d’une phobie sociale augmente de manière significa- de l’autre et à mieux s’affirmer (thérapie comportementale) [4] .
tive le risque de dépression : environ 60 % des patients consultant Comme pour les autres phobies, une réduction franche des peurs

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Troubles anxieux et névrotiques  7-0150

est ainsi obtenue par le mécanisme de la désensibilisation. Ces Les obsessions sont des craintes, des images, des doutes ou des
méthodes peuvent se pratiquer en individuel, mais les thérapies questions qui font intrusion dans la pensée du sujet de manière
de groupe sont les plus efficaces, permettant des jeux de rôle et irrépressible et persistante, et qui provoquent des angoisses
une entraide des patients. intenses. Les compulsions sont des actes (physiques ou mentaux),
des gestes ou d’autres comportements effectués de manière répéti-
Phobies spécifiques tive et inutile par rapport aux circonstances, mais qui permettent
d’atténuer l’anxiété liée aux idées obsédantes. Ces compulsions
Les phobies spécifiques sont très répandues dans la population peuvent engendrer également une lutte anxieuse du sujet qui
générale, touchant environ 5 % des individus. Autrefois dénom- tente de résister à des comportements vécus comme absurdes,
mées « phobies simples », elles correspondent à des peurs intenses, mais irrépressibles. Lorsque les compulsions sont effectuées d’une
excessives et durables de situations ou d’objets bien définis, et ne manière très précise, ou qu’elles ont une fonction de conjura-
correspondant pas à une agoraphobie ou à une phobie sociale [1, 2] . tion (éviter qu’une catastrophe ne survienne de manière un peu
La peur ressentie par le sujet n’est donc pas en lien avec la pré- magique), on parle de « rituels ».
sence d’une autre personne, ni avec l’anticipation d’un malaise Les thèmes des obsessions et des compulsions peuvent être
ou d’un incident pouvant survenir dans la situation redoutée. innombrables, mais les plus fréquents concernent :
Il s’agit d’une peur « brute », sans élaboration mentale particu- • le doute et les erreurs : crainte de ne pas avoir accompli quelque
lière. Le contact ou même la vue de l’objet redouté, la photo chose correctement (fermeture d’une porte ou d’un robinet,
d’une araignée par exemple, peut suffire à provoquer une réaction crainte d’avoir blessé quelqu’un, d’avoir commis une erreur,
anxieuse intense, voire une tentative d’échappement. Les phobies etc.), et donc compulsions de vérification, de répétition, et
spécifiques les plus fréquentes concernent les animaux (souris, grande lenteur dans l’exécution des tâches ;
serpents, insectes, oiseaux, chiens, etc.), le sang et les blessures • la contamination et la souillure : crainte de toucher ou d’être en
ou les procédures médicales comme les injections, la hauteur ou contact avec un agent sale ou toxique (microbe, toxique cancé-
le vide, les orages ou bien encore l’obscurité. La plupart de ces rigène, etc.), et donc compulsion de protection ou de lavage ;
situations rappellent, de près ou de loin, des dangers réels, et il • la sexualité et l’agressivité (pulsions, mots ou scènes visualisées,
est probable que ces phobies dérivent de peurs ancestrales ayant etc.) ;
été utiles à la survie de l’espèce. Dans certains cas, cependant, • l’ordre et le rangement : besoin irrépressible de respecter la
on retrouve aussi des antécédents de « traumatismes » pouvant symétrie ou l’ordonnancement des choses, des procédures très
expliquer l’apparition de la phobie chez une personne donnée (le précises et rigides, ou des nombres exacts de répétitions (arith-
souvenir d’avoir été mordu par un chien, ou d’avoir failli tomber momanie).
d’un toit ou d’un pont, etc.). Les phobies d’impulsion sont une forme particulière d’idées
Dans la mesure où il s’agit de peurs bien circonscrites à des obsédantes, caractérisées par la peur irraisonnée d’effectuer un
objets bien définis, leur retentissement dans la vie quotidienne acte dangereux ou inacceptable (agresser ou insulter quelqu’un,
est assez faible en général, soit parce que les objets en question ne se blesser soi-même, avoir des pulsions sexuelles envers autrui),
sont pas souvent rencontrés (serpents, orages), soit parce que la contre sa propre volonté, en cédant à une impulsion subite. Les
personne peut assez facilement les éviter (oiseaux, hauteur, etc.). actes en question ne sont en fait jamais réalisés, mais c’est l’idée
Il arrive cependant que certaines phobies occasionnent de véri- elle-même, les conduites d’évitement qui en découlent, et sou-
tables handicaps, avec des conséquences non négligeables pour la vent le sentiment de culpabilité qui l’accompagnent qui créent
santé ou l’adaptation sociale : incapacité à accepter une prise de une angoisse et une souffrance durables.
sang ou un examen d’imagerie par résonance magnétique (IRM) Les TOC se distinguent de conduites normales (vérifications
(claustrophobie), impossibilité de travailler à un étage élevé, peur occasionnelles, perfectionnisme, « manies », superstitions, souci
de certains animaux domestiques, etc. de propreté) :
Les seuls traitements efficaces des phobies spécifiques sont les • par le caractère envahissant des obsessions et des compulsions ;
thérapies comportementales, qui visent à une désensibilisation • par le niveau de souffrance engendré ;
(extinction) de la peur par une méthode de confrontation progres- • et par les perturbations occasionnées dans la vie quotidienne.
sive et assistée, avec ou sans relaxation [4] . Les résultats peuvent Le temps passé dans les ruminations obsédantes ou les rituels
être très bons en quelques séances, mais il existe des cas diffi- est considéré par exemple comme anormal à partir de 1 heure
ciles liés en général à l’ancienneté des troubles, qui commencent par jour.
en général dans l’enfance. Une thérapie effectuée après 50 ans En outre, les TOC se distinguent des idées délirantes, des hal-
d’évolution et d’évitements sera naturellement beaucoup plus dif- lucinations et des actes imposés par le fait que le sujet reconnaît
ficile qu’en cas d’apparition récente. que ses pensées et ses comportements proviennent de son esprit
Les traitements médicamenteux, et notamment les antidé- propre et ont un caractère absurde et inadapté par rapport à la
presseurs, ne sont pas efficaces, et donc pas justifiés dans le réalité. Il faut noter que le degré de cette prise de conscience
traitement des phobies. Les anxiolytiques comme les benzodia- est variable selon les individus, et qu’elle peut être absente chez
zépines peuvent avoir un effet apaisant transitoire sur la peur l’enfant, sans que cela ne remette en cause le diagnostic de TOC.
ou l’angoisse, mais n’ont aucun effet à long terme sur la phobie Les enfants ont fréquemment des idées obsédantes proches de la
elle-même. Ils peuvent donc être recommandés ponctuellement si pensée magique, confondant leur imagination avec la réalité (« Si
nécessaire, notamment avant qu’une thérapie comportementale je pense à un malheur, il risque plus d’arriver »).
puisse être débutée, mais en se méfiant des risques de consomma- Il existe des formes particulières de TOC, souvent graves, asso-
tion prolongée et donc de dépendance. ciées à la maladie des tics complexes de Gilles de la Tourette.
Il y aurait des facteurs de vulnérabilité, notamment génétiques,
Troubles obsessionnels compulsifs communs aux deux affections.
La principale complication des TOC est la dépression, qui
Les TOC touchent environ 2 % à 3 % des individus, apparaissent touche près d’un sujet sur deux, surtout dans les formes sévères et
tôt dans la vie, souvent dès l’enfance, et ont tendance à évoluer chroniques. Il existe de plus un handicap psychosocial majeur lié
sur de très longues périodes [1, 2] . Le handicap de certains patients aux TOC eux-mêmes : dans les formes sévères, les rituels peuvent
peut être majeur. durer plusieurs heures par jour, envahir l’ensemble de la vie du
On connaît encore peu de choses sur les causes, biologiques sujet et la rendre incompatible avec un fonctionnement social
ou psychologiques, des TOC, mais on sait de mieux en mieux les normal. Ces deux facteurs expliquent le risque suicidaire élevé et
traiter, grâce aux combinaisons de chimiothérapie et de TCC. Les la nécessité de traiter les formes sévères de TOC.
hypothèses biologiques actuelles mettent en cause des dysfonc-
tionnements des systèmes sérotoninergiques cérébraux, avec une
implication probable des noyaux gris centraux.
Traitement
Les TOC comportent deux éléments sémiologiques distincts, Deux types de traitement sont aujourd’hui reconnus comme
bien que très liés l’un à l’autre : les obsessions et les compulsions. efficaces dans le traitement des TOC : les antidépresseurs

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7-0150  Troubles anxieux et névrotiques

sérotoninergiques et les TCC. En fonction du souhait des patients On estime que le TAG touche environ 3 % des hommes et
et de leur disponibilité, l’un ou l’autre peuvent être proposés, 6 % des femmes de la population générale, à un moment ou
mais c’est souvent l’association des deux qui permet d’obtenir les un autre de leur vie. Il commence habituellement au milieu de
meilleurs résultats. l’âge adulte (chez des sujets au tempérament anxieux en géné-
Une classe particulière d’antidépresseurs doit être utilisée : les ral), et constitue le trouble anxieux le plus fréquent chez les
inhibiteurs de la recapture de la sérotonine, soit spécifiques sujets âgés. Les principales complications du TAG sont la dépres-
(fluoxétine, paroxétine, sertraline, etc.), soit non spécifiques sion et l’usage excessif d’anxiolytiques, avec un risque élevé de
comme la clomipramine [3] . Les premiers (IRS) sont préférés en dépendance aux benzodiazépines du fait de la chronicité du
première intention du fait de leur meilleure tolérance. Les résul- trouble.
tats obtenus sont indépendants de l’existence ou non d’un état
dépressif associé. Les doses recommandées sont au moins celles Diagnostic différentiel
utilisées dans la dépression, et souvent supérieures (40 ou 50 mg/j
Il est parfois difficile de différencier l’anxiété généralisée d’une
de fluoxétine ou de paroxétine par exemple) si besoin. Il s’agit
tendance non pathologique à l’inquiétude, que l’on retrouve
dans tous les cas d’un traitement de fond, dont les effets ne
chez beaucoup de sujets. Il faut alors vérifier que l’inquiétude
peuvent être évalués avant plusieurs semaines en général, et par-
est réellement excessive et surtout incontrôlable, empêchant le
fois plusieurs mois. Il est indispensable de le poursuivre pendant
patient de penser ou de se concentrer sur autre chose. En outre,
plusieurs mois s’il est efficace, par exemple pendant 6 à 12 mois,
le trouble doit avoir des répercussions dans la vie du sujet, altérer
et de se méfier d’une rechute à l’arrêt.
la qualité de vie ou constituer un vrai handicap dans le travail
Les psychothérapies reconnues comme efficaces dans les TOC
ou la vie familiale notamment (attitudes anxieuses vis-à-vis des
sont les TCC, basées sur deux types de technique principale-
proches).
ment [4] :
L’anxiété généralisée doit principalement être différenciée des
• l’exposition avec prévention de la réponse ritualisée ; comme
autres troubles anxieux d’une part, et de la dépression d’autre
dans les phobies, l’objectif est de réduire progressivement
part. Cela est parfois délicat, car il peut exister des symptômes
l’anxiété liée aux obsessions grâce à une confrontation accom-
communs, et l’anxiété généralisée est très souvent associée à
pagnée et graduée aux obsessions, tout en empêchant le
d’autres pathologies (« comorbidité »).
patient d’effectuer ses rituels et ses compulsions. Dans les
Certains sujets vulnérables au stress peuvent présenter des états
formes simples, environ 12 séances hebdomadaires peuvent
anxieux proches de l’anxiété généralisée à la suite d’événements
être suffisantes, mais des thérapies plus longues sont souvent
de vie négatifs ou déstabilisants, mais l’on parle alors de « trouble
nécessaires ;
de l’adaptation avec anxiété » si cet état est clairement secondaire
• la restructuration cognitive : l’objectif est ici d’apprendre au
à ces événements et dure en général moins de 6 mois.
sujet à « démonter » ses raisonnements erronés, à relativiser ses
Les syndromes dépressifs s’accompagnent souvent de symp-
craintes, et à assouplir des schémas de pensée trop rigides.
tômes anxieux proches de l’anxiété généralisée. Si l’inquiétude,
Si le TOC s’inscrit clairement dans le contexte d’un trouble de
l’insomnie, la tension interne ou les autres signes ne sont apparus
la personnalité de type névrotique, une autre forme de psycho-
qu’au moment d’une phase dépressive, on ne peut pas porter le
thérapie, d’inspiration analytique par exemple, peut être discutée
diagnostic d’anxiété généralisée, et le traitement de la dépression
par ailleurs.
doit résoudre l’ensemble des troubles. Cependant, beaucoup de
patients déprimés souffrent par ailleurs d’une anxiété généralisée,
préexistante et/ou persistante après résolution de l’épisode dépres-
Anxiété généralisée sif, ce qui doit faire alors porter les deux diagnostics et traiter les
deux troubles.
L’anxiété généralisée (ou « trouble anxiété généralisé » ou TAG,
pour le DSM IV), correspond à un état d’alerte et d’inquiétude
quasi permanent, associé à des signes psychiques et physiques de
Traitements
tension anxieuse, cela sur une période d’au moins 6 mois [1, 2] . Le La prise en charge du TAG comporte trois volets [5] : des
terme généralisé vient du fait qu’il n’y a pas, comme dans les pho- mesures générales, la psychothérapie, et le traitement médica-
bies, de peur focalisée sur un objet ou une situation précise, mais menteux. S’il existe des comorbidités, elles doivent être traitées en
une tendance à se faire du souci « pour tout ou pour rien ». Ces parallèle.
inquiétudes sont excessives du fait de leur fréquence et de leur Les mesures générales sont indispensables et peuvent suf-
intensité par rapport à la réalité des risques : soit les événements fire dans bien des cas. Comme dans toute maladie chronique,
redoutés sont en réalité assez bénins, soit ils sont peu probables et l’éducation du patient est un point clé de la prise en charge. Elle
rien n’indique qu’ils vont survenir. Certains patients s’inquiètent repose sur une information claire sur les symptômes du trouble,
de perdre leur travail, d’avoir des problèmes d’argent, de tomber son évolution en insistant sur son caractère chronique et ses aggra-
malade, sans motifs réels. D’autres imaginent des scénarios catas- vations transitoires, et les traitements en détaillant avantages et
trophes si un de leur proche n’est pas rentré à l’heure au domicile inconvénients des choix possibles. Des règles d’hygiène de vie
(accident, enlèvement), si une lettre recommandée leur est adres- simples permettent de diminuer l’intensité des symptômes, même
sée (expulsion, licenciement), ou même à la simple sonnerie du si elles ne sont pas toujours faciles à faire respecter : activités
téléphone. physiques régulières, aménagement de l’emploi du temps pour
Cette inquiétude chronique, et quasi permanente, s’accom- éviter les surcharges de travail, permettre un sommeil suffisant et
pagne de signes d’anxiété psychique : hypervigilance diffuse vis- des plages de loisirs, et suppression des toxiques en excès (tabac,
à-vis de l’environnement, avec des troubles de la concentration alcool, caféine, etc.).
et de la mémoire secondaires. Elle s’accompagne également de Quelques exercices simples de relaxation et de respiration
signes physiques qui peuvent être très divers et qui reflètent peuvent être proposés. Il existe de nombreux livres psychoédu-
surtout une hyperactivité neurovégétative (palpitations, sueurs, catifs détaillant certaines techniques de relaxation et de gestion
vertiges, tensions et douleurs musculaires, vertiges, nausées, du stress. On peut conseiller la pratique du yoga, du tai-chi-chuan
etc.). Ces symptômes, qui peuvent être retrouvés aussi dans les ou du qi gong. Pour les patients ne parvenant pas à maîtriser seuls
attaques de panique, sont ici présents de manière durable, par- ces techniques, le recours à une véritable thérapie de relaxation
fois toute la journée, mais de manière moins intense. Ils sont peut être nécessaire. Une psychothérapie de soutien peut être mise
associés à des troubles du sommeil, notamment des difficultés en œuvre par le médecin ou un psychologue : être à l’écoute des
d’endormissement et des réveils nocturnes, à une irritabilité, soucis du patient, l’inciter à verbaliser ses préoccupations, et lui
à une sensation de fébrilité et d’agitation intérieure, à une proposer des conseils simples sur les situations anxiogènes de la
fatigabilité, et à des réactions de sursaut dans la journée, vie quotidienne.
déclenchées par des stimulations soudaines (sonnerie du télé- Parmi les psychothérapies structurées, les TCC sont les plus
phone, contact physique, apparition imprévue dans le champ étudiées dans le TAG, avec des résultats clairement positifs. Elles
visuel, etc.). consistent, d’une part, en une approche cognitive dans laquelle

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Troubles anxieux et névrotiques  7-0150

le thérapeute aide le patient à identifier ses pensées irrationnelles • un syndrome de répétition marqué par des reviviscences du
anxiogènes et les « schémas » qui les sous-tendent (croyances de traumatisme, par exemple sous la forme de cauchemars, de
fond sur soi et l’avenir), avec notamment un travail sur l’inutilité flash-backs dans la journée, des impressions de mort immi-
des inquiétudes et des ruminations [4] . Et, d’autre part, l’approche nente ;
comportementale inclut surtout des techniques de relaxation qui • des symptômes anxieux (anxiété généralisée, phobies, évite-
permettent de réduire l’hyperactivité végétative et attentionnelle, ments), concernant surtout les situations voisines de celles dans
et des méthodes d’exposition aux situations que le patient évite à lequel l’événement initial est survenu ;
cause de son anxiété. Ces techniques sont efficaces sur le court • des symptômes dépressifs à type d’émoussement des affects, de
et long terme, et sont donc a priori préférables au traitement pessimisme avec fatigue et idées suicidaires.
médicamenteux. Ce sont des thérapies courtes (12 à 25 séances Les complications principales des ESPT sont les troubles
hebdomadaires), dans lesquelles le patient est responsabilisé et dépressifs et les addictions, à l’alcool, aux drogues ou aux ben-
actif. Des méthodes plus récentes, basées en particulier sur la pra- zodiazépines.
tique de la méditation, sont des compléments utiles, notamment
pour prévenir les rechutes. Traitement
Le traitement médicamenteux n’est pas systématique et doit
prendre en compte les comorbidités, l’évolution et la sévérité La meilleure prévention des pathologies post-traumatiques
du trouble, et l’efficacité des mesures non médicamenteuses. Les est la prise en charge précoce des personnes soumises à un
principaux traitements utilisables sont les benzodiazépines et les traumatisme violent, avec principalement un soutien psycholo-
antidépresseurs. gique permettant notamment de verbaliser l’anxiété et d’évoquer
Les benzodiazépines ont des effets anxiolytiques quasi immé- l’événement et les émotions ressenties. Il est nécessaire également
diats, ce qui explique que beaucoup de patients souffrant de d’informer le sujet sur les éventuelles complications précoces pou-
TAG les utilisent de manière ponctuelle ou durable. Elles n’ont vant survenir, et les méthodes simples, par exemple de relaxation,
cependant pas d’effet thérapeutique à long terme, et leurs incon- permettant de les contrôler.
vénients ne peuvent être négligés : sédation, troubles mnésiques, Des techniques bien codifiées héritées des méthodes mili-
risques de chutes chez les personnes âgées, et surtout de sevrage taires (« debriefing psychologique »), en individuel ou en groupe,
et de dépendance. Leur utilisation doit donc être limitée à des peuvent être intéressantes dans la prévention des ESPT, mais elles
phases d’accentuation de l’anxiété, ou d’attente d’une autre stra- doivent être bien maîtrisées par des professionnels entraînés, au
tégie, en respectant les précautions habituelles : information du risque sinon de provoquer plutôt une aggravation des symp-
patient sur les risques pris, arrêt progressif avant 12 semaines de tômes [4] .
traitement maximum, et contre-indication en cas d’antécédent Une fois que les troubles se sont installés, les techniques
addictif. thérapeutiques les plus éprouvées sont également d’ordre psy-
Certains antidépresseurs (venlafaxine, paroxétine et escitalo- chothérapique, de type TCC surtout. Une méthode récente de
pram disposent d’une autorisation de mise sur le marché [AMM] ce type est de plus en plus utilisée en raison de son effi-
dans cette indication) peuvent constituer en revanche des solu- cacité, l’eyes movement desensitization and reprocessing (EMDR),
tions thérapeutiques à long terme lorsque le trouble est intense basée sur un travail mental sur le souvenir traumatique asso-
et produit une gêne majeure dans la vie du patient [3] . Comme cié à une capture attentionnelle par des mouvements oculaires
dans la dépression, il faut compter environ 3 semaines pour horizontaux.
qu’ils soient efficaces. Les posologies efficaces sont en géné- Les traitements médicamenteux ont le plus souvent des effets
ral les mêmes que dans la dépression. La question de la durée limités dans les ESPT sévères et installés. Les molécules parais-
de traitement reste cependant mal résolue : une durée mini- sant les plus intéressantes sont les antidépresseurs, et notamment
male de 6 mois semble nécessaire, avec ensuite une réduction les IRS comme la paroxétine ou l’escitalopram [3] . Ils agissent sur
pragmatique et progressive des posologies, mais des rechutes les symptômes émotionnels associés au ESPT, et notamment sur
peuvent conduire à des traitements prolongés, surtout si aucune les symptômes dépressifs lorsqu’ils existent, mais peuvent éga-
psychothérapie n’est mise en œuvre. Naturellement, les anti- lement soulager au moins partiellement les symptômes les plus
dépresseurs sont d’autant plus justifiés quand il existe une spécifiques du trouble que sont les reviviscences du traumatisme
dépression associée, ce qui est le cas chez plus de la moitié des (flash-backs, cauchemars, etc.).
patients.
Parmi les alternatives aux benzodiazépines, la buspirone a
montré une certaine efficacité dans le TAG avec peu d’effets  Troubles névrotiques
secondaires, notamment pas de risque de dépendance, mais un
délai d’action de 1 à 3 semaines et, en fait, des effets globa- Les classifications psychiatriques n’intègrent plus le terme
lement assez décevants. Les autres options permettant d’éviter de névrose dans leur nosographie [1] . Il s’agit en effet d’un
les risques de dépendance sont des anxiolytiques non benzodia- concept directement issu des théories psychanalytiques freu-
zépiniques comme l’étifoxine ou les antihistaminiques comme diennes, qui fait l’hypothèse de mécanismes psychologiques
l’hydroxyzine. particuliers (refoulement, déplacement, conflits intrapsychiques,
etc.) à l’origine des symptômes anxieux ou dépressifs. Ces
mécanismes étant souvent difficiles à objectiver, et n’étant
État de stress post-traumatique pas présents chez tous les patients, les classifications privilé-
gient la description des troubles, sans hypothèse étiologique
L’état de stress post-traumatique (ESPT) est un trouble anxieux générale.
chronique survenant dans les suites d’un événement grave et bru- Il existe cependant des correspondances assez fortes entre
tal, qui a été à l’origine d’un danger vital ou d’une menace dans les concepts classiques de névroses et les diagnostics actuels.
l’intégrité physique : catastrophe naturelle, bombardement, atten- Dans la théorie psychanalytique, les névroses comportent des
tat, viol ou autre agression, accident de voiture, etc. [1, 2] . Le patient symptômes pouvant être ceux des troubles anxieux, associés
peut avoir été impliqué lui-même ou avoir assisté à la mort ou à à des dysfonctionnements « structurels » correspondant en par-
l’accident d’autres personnes. tie aux définitions des troubles de la personnalité (Tableau 3).
La réaction immédiate du sujet est souvent marquée par une On peut ainsi reconstituer des diagnostics descriptifs, par
frayeur intense puis par une sidération plus ou moins longue exemple en associant un TOC à une personnalité obsession-
(prostration, dépersonnalisation), suivie d’une amélioration pro- nelle compulsive, ce qui peut se rapprocher de la névrose
gressive et ensuite d’une « phase de latence » pendant laquelle le obsessionnelle. Cependant, un diagnostic de névrose ne peut
patient retrouve son état normal. pas reposer uniquement sur une approche descriptive des
Après quelques semaines, quelques mois ou parfois quelques symptômes observés, et nécessite une analyse spécifique de
années, des symptômes anxieux et dépressifs réapparaissent, avec phénomènes complexes, abordables au travers d’explorations par-
notamment : ticulières (entretiens psychanalytiques, tests projectifs, analyses

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7-0150  Troubles anxieux et névrotiques

Tableau 3.
Correspondances entre névroses, dans l’approche psychanalytique, et troubles anxieux et de la personnalité dans les classifications psychiatriques actuelles.
Nosographie psychanalytique Classifications psychiatriques actuelles
Troubles anxieux Troubles de la personnalité associés
Névrose d’angoisse Trouble panique Personnalité évitante
Agoraphobie
Anxiété généralisée

Névrose obsessionnelle Trouble obsessionnel compulsif Personnalité obsessionnelle compulsive


Névrose phobique Phobies spécifiques Personnalité évitante
Phobies sociales
Agoraphobie

Névrose traumatique État de stress post-traumatique Non décrite


Névrose hystérique Conversions, troubles somatoformes a Personnalité histrionique et dépendante
a
Ne sont pas classés dans les troubles anxieux.

des rêves, etc.). Ces aspects relèvent avant tout de mécanismes Le diagnostic d’une conversion hystérique nécessite :
psychopathologiques en rapport avec les troubles de la personna- • d’éliminer toutes les étiologies organiques possibles, en
lité. s’appuyant sur le maximum d’arguments cliniques et paracli-
Si la plupart des troubles névrotiques se retrouvent en grande niques nécessaires. La présence d’arguments psychopatholo-
partie dans les pathologies et personnalités anxieuses, la question giques en faveur d’un mécanisme conversif ne doit pas conduire
de l’hystérie doit être traitée à part, car elle ne connaît pas de à négliger d’autres causes possibles, dont certaines peuvent
correspondance directe dans les troubles anxieux. coexister ;
• de rechercher les éléments psychopathologiques en faveur d’un
Conversions et personnalités hystériques mécanisme conversif : l’existence d’antécédents similaires (ou
d’autres conversions) dans la vie du patient, l’existence de
La conversion est un phénomène médicopsychologique très facteurs favorisants récents (stress émotionnels ou affectifs,
particulier, dont les mécanismes ne sont toujours pas vrai- deuil, fatigue, etc.), une difficulté à faire restituer par le patient
ment élucidés et dont les présentations cliniques peuvent être l’évolution des symptômes et les éléments de son histoire,
très variées. Elle est souvent considérée comme un diagnostic une grande sensibilité de la symptomatologie à des facteurs
d’élimination par rapport à des étiologies organiques, mais il est psychologiques et à la suggestion, l’existence de « bénéfices
aussi utile et nécessaire de connaître les éléments du diagnostic secondaires », notamment sociaux et affectifs, à la symptoma-
positif pour éviter certaines erreurs. tologie présentée (attention des médecins et des proches, statut
Les conversions hystériques sont définies par l’existence de de « malade », échappement à certains facteurs de stress, etc.),
symptômes évoquant une affection, somatique en général, mais l’existence d’éléments en faveur d’un trouble de la personnalité
sans en avoir : sous-jacent de type histrionique ou passif-dépendant.
• ni tous les éléments de l’examen objectif ; Après l’établissement du diagnostic, la prise en charge d’une
• ni l’évolution typique dans le temps (fluctuation et mobilité des conversion hystérique doit rester globale, médicopsychologique,
symptômes) ; en associant donc des spécialistes de plusieurs domaines tra-
• ni les facteurs étiologiques habituels. vaillant de manière concertée pour aider le patient. L’éventualité
Il s’agit d’une pathologie d’origine psychologique, dont les d’une cause organique se révélant par la suite doit être gar-
mécanismes psychiques supposés sont ceux d’un mécanisme de dée en mémoire, tout en évitant la répétition d’examens
défense particulier (« protégeant » la conscience de l’individu de complémentaires si l’on sait qu’ils ont été plusieurs fois négatifs.
conflits inconscients ou d’angoisse trop importantes) : la conver- L’intervention de spécialistes, psychiatres ou psychologues, est
sion. Celle-ci peut concerner tous les organes du corps et « mimer » toujours nécessaire, et une hospitalisation peut être utile pour pré-
quasiment toutes les pathologies. On en connaît cependant des ciser le diagnostic, mettre en place des soins, et éloigner le patient
présentations plus communes et classiques : de certains facteurs favorisants.
• les paralysies (paraplégie, tétraplégies, monoplégies, etc.), ou L’intervention thérapeutique doit être mise en place rapi-
d’autres troubles moteurs ou de l’équilibre (troubles de la dement, car la réversibilité de certains symptômes conversifs
marche, astasie-abasie, blépharospasmes, etc.) ; diminue avec leur ancienneté. Elle vise principalement :
• les déficits sensoriels (cécité uni- ou bilatérale, surdité, anosmie, • à créer une alliance thérapeutique avec le patient (relation de
anesthésie) ; confiance, mais sans dépendance ni manipulation ou séduction
• les troubles mnésiques (amnésie partielle ou totale) ; réciproque) ;
• les troubles de l’expression (aphasie, aphonie, mutisme) ; • à prendre en compte le symptôme conversif, avec les soins qu’il
• les crises d’allure convulsive ; peut nécessiter (kinésithérapie, rééducation, surveillance des
• les troubles de la vigilance (états seconds, états somnambu- complications), mais en expliquant au patient que la cause est
liques, états crépusculaires, pertes de connaissance, coma) ; probablement plus psychologique qu’organique ;
• les douleurs, plus ou moins localisées. • à traiter les éventuels troubles psychiatriques associés, qui
Des symptômes de type psychiatrique peuvent également être peuvent aggraver ou entretenir les symptômes conversifs
retrouvés : (dépression, anxiété, addiction, etc.) ;
• des crises d’agitation ou d’angoisse, des états de transe ; • à réduire ou à supprimer les facteurs environnementaux entre-
• les illusions de la mémoire et les fabulations ; tenant le trouble (relations conflictuelles, facteurs de stress,
• des troubles du comportement comme des fugues inexpliquées etc.) ;
ou les personnalités multiples. • à permettre au patient de s’exprimer progressivement sur sa
Les conversions hystériques peuvent survenir en dehors de problématique psychologique, en se basant ou non au départ
toute pathologie psychiatrique préalable, et chez des personnali- sur les symptômes présentés.
tés non pathologiques, même si certains facteurs favorisants sont Dans certains cas, à visée diagnostique ou thérapeutique, il
retrouvés dans la majorité des cas (cf. infra). peut être utile de tenter d’agir de manière assez directe sur les
L’évolution des troubles conversifs peut être très variable, allant symptômes, au travers de la suggestion et de la persuasion ou
d’accidents très aigus de résolution rapide à des tableaux chro- de procédés intermédiaires (hypnose) permettant d’explorer des
niques pouvant durer des années. problèmes non abordables en état de conscience normale, ou de

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Troubles anxieux et névrotiques  7-0150

donner des injonctions parfois très efficaces. Les symptômes aigus [2] Boulenger JP, Lépine JP. Les troubles anxieux. Paris: Flammarion
et récents répondent beaucoup mieux à ces injonctions que les Médecine-Sciences; 2011.
conversions anciennes. [3] Yadak J, Pelissolo A. Antidépresseurs et traitement des troubles
anxieux. In: Médicaments antidépresseurs. Paris: Flammarion
Médecin-Sciences; 2011.
[4] Fontaine O, Fontaine P. Guide clinique de thérapie comportementale
 Références et cognitive. Paris: Retz; 2006.
[5] Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé. Diagnos-
[1] American Psychiatric Association. Diagnostic and Statistical Manual tic et prise en charge en ambulatoire du trouble anxieux généralisé de
of Mental Disorders, (4th ed). Washington DC, 1994. Traduction l’adulte. Recommandations pour la pratique clinique. Paris: ANAES;
française par Guelfi JD. Paris: Masson; 1996. 2002.

A. Pelissolo, Professeur (antoine.pelissolo@upmc.fr).


Service de psychiatrie adultes, Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Pelissolo A. Troubles anxieux et névrotiques. EMC - Traité de Médecine Akos 2012;7(3):1-11 [Article
7-0150].

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