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Modalités d’utilisation
des antidépresseurs
J.F. Costemale-Lacoste, R. Gaillard, H. Lôo

Les années 1950 sont le berceau d’une véritable révolution en psychiatrie avec la découverte de molécules
efficaces tant sur les troubles psychotiques que sur les troubles de l’humeur, permettant une transfor-
mation de l’asile et de ses aliénés en hôpital recevant des patients qui passent la plupart de leur vie à
l’extérieur des murs hospitaliers. La classe des antidépresseurs connaît depuis quelques années l’apparition
de nouvelles molécules, plus sélectives mais aussi mieux tolérées. L’indication principale est la dépression,
mais elle est élargie à de nombreuses autres pathologies psychiatriques et non psychiatriques reprises
dans cet article. Les modalités d’utilisation, les indications, les effets secondaires et indésirables des trai-
tements antidépresseurs y sont développés. En termes d’efficacité, si tous les traitements antidépresseurs
sont quasiment égaux sur les populations de patients dans les cohortes internationales, des particularités
sont à connaître. Les recommandations internationales assorties de publications récentes peuvent aider
le clinicien à justifier son choix de molécule. À l’avenir, de nouvelles molécules ainsi que l’amélioration
des critères cliniques et biologiques qui permettent d’orienter le clinicien dans son choix de traitement
devraient permettre d’améliorer le taux de rémission. La rapidité d’action est dans tous les cas un véritable
enjeu.
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Mots-clés : Psychotropes ; Antidépresseurs ; Bonne pratique ; Recommandations ; Modalités d’utilisation

Plan ■ Surveillance d’un traitement antidépresseur. Recherche


d’effets indésirables 9
■ Introduction 1 Risque suicidaire 9
Risque cardiaque 10
■ Traitements ayant l’autorisation de mise sur le marché Métabolisme et antidépresseurs 10
comme antidépresseur : généralités 2 Trouble de la libido 10
Éléments de classification 2 Surveillance hépatique 10
Voie d’administration parentérale d’un traitement antidépresseur 3 Chez la femme enceinte 11
Délais d’action 3 Chez l’enfant 11
■ Stratégies d’utilisation des traitements à efficacité Chez le sujet âgé 11
antidépressive dans la dépression 4 ■ Arrêt d’un traitement antidépresseur 11
Généralités 4
■ Perspectives 12
Traitement de première ligne : épisode dépressif isolé 4
Traitement de deuxième ligne et dépression résistante : échec ■ Conclusion 12
d’un premier antidépresseur 6
Prescription des antidépresseurs dans les troubles dépressifs
récurrents 7

 Introduction
■ Prescription des antidépresseurs en dehors de leur
indication principale 7
Dépressions du trouble bipolaire 7
Troubles anxieux 7 La découverte des antidépresseurs à la suite d’observations
Douleurs 8 fortuites de cliniciens avertis a permis l’avènement de la psycho-
Schizophrénie 8 pharmacologie des troubles dépressifs. C’est en 1957 que chacun
Troubles du comportement alimentaire 8 de leur côté, Kline et Kuhn permirent le développement respectif
Addictions 8 de l’iproniazide [1] et de l’imipramine [2] . De nos jours, de mul-
Troubles de la personnalité 8 tiples thérapeutiques antidépressives sont à notre disposition. Ces
thérapeutiques sont les antidépresseurs, classés en inhibiteurs de
■ Bilan préthérapeutique 8 la monoamine oxydase (IMAO), tricycliques, inhibiteurs sélectifs
■ Interactions médicamenteuses 9 de la recapture de la sérotonine (ISRS) et/ou les inhibiteurs de

EMC - Psychiatrie 1
Volume 12 > n◦ 1 > janvier 2015
http://dx.doi.org/10.1016/S0246-1072(14)65256-1

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la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNA) et


autres antidépresseurs, mais il existe aussi des thérapeutiques à
 Traitements ayant l’autorisation
effets antidépresseurs non classés parmi les antidépresseurs. Les de mise sur le marché comme
antidépresseurs ont un effet sur la dépression, mais les indica-
tions sont élargies à d’autres pathologies telles que les troubles antidépresseur : généralités
anxieux, les migraines ou encore les douleurs neuropathiques, les
troubles du sommeil, la fibromyalgie, les troubles du comporte- Éléments de classification (Tableaux 1 et 2)
ment alimentaire, ainsi que certains troubles du comportement
des impulsions. Les antidépresseurs sont classés en premier lieu selon leurs
Dans la dépression, il semble que malgré le nombre de trai- propriétés pharmacologiques d’obtention d’autorisation de mise
tements à notre disposition et les efforts de la prévention en sur le marché (AMM) (Tableau 1). Il serait illusoire de considérer
santé publique seulement 20 % des patients reçoivent une thé- que ce modèle de classification puisse rendre compte du méca-
rapeutique adéquate [3] . De 40 à 50 % des patients dépressifs ont nisme d’action de ces antidépresseurs. Les mécanismes d’action
une mauvaise observance de leur traitement [4] , et même lorsque des antidépresseurs font l’objet d’un autre article de l’Encyclopédie
les patients prennent correctement un antidépresseur prescrit à Médico-Chirurgicale.
posologie et durée efficaces, 30 à 50 % d’entre eux sont résis- En dehors de cette classification, certains classent les traite-
tants [5] . Cette résistance nécessite des stratégies thérapeutiques ments antidépresseurs en fonction de leurs propriétés psychoto-
complémentaires. Ces stratégies reposent essentiellement sur la niques, sédatives, anxiolytiques ou encore antalgiques.
connaissance des thérapeutiques à disposition, des recommanda- Lôo et al. [8] ont proposé à la suite de Lambert [9] une classifica-
tions qui leur sont associées et des caractéristiques du patient à tion des antidépresseurs en fonction des propriétés psychotonique
traiter. ou sédative de chacun. Cette classification datant de 1979 ne
L’objectif de cet article est de permettre au clinicien une prend pas en compte les nouveaux antidépresseurs et notam-
approche pratique de la prescription d’un traitement anti- ment les ISRS. Cette classification montre que les IMAO sont les
dépresseur, et d’apporter une synthèse des recommandations traitements les plus psychotoniques, alors que la trimipramine
nationales [6] et internationales sur leur utilisation. est le traitement antidépresseur le plus sédatif. La trimipramine
Puis sont envisagées les perspectives de l’orientation actuelle (Surmontil® ) a d’ailleurs été synthétisée pour avoir une forte
des recherches sur les nouvelles molécules antidépressives. activité histaminergique en lui octroyant la chaîne aliphatique

Tableau 1.
Antidépresseurs disponibles sur le marché français en 2013 (adapté d’après [6, 7] ).
Famille DCI Nom commercial Voie d’administration Posologies usuelles d’AMM
Imipraminiques ®
Amitriptiline Elavil p.o., i.m., i.v. lente p.o. : 75–150 mg par jour
Laroxyl® i.m. ou i.v. : 50–100 mg par jour
Amoxapine Defanyl® p.o. 100–400 mg par jour
Clomipramine Anafranil® p.o., i.m., i.v. lente p.o. : 75–150 mg par jour (dose maximale 250 mg)
i.m. : 100–150 mg par jour
i.v. : 2–3 ampoules de 25 mg/2 ml par jour
Dosulépine Prothiaden® p.o. 75–150 mg par jour
Doxépine Quitaxon® p.o., i.m., i.v. lente p.o. : 10–300 mg/j
i.m. : 100–400 mg/j
i.v. : 25–100 mg/j
Imipramine Tofranil® p.o., i.m., i.v. lente p.o. : 75–150 mg/j
Maproptiline Ludiomil® p.o. 75–150 mg/j
Trimipramine Surmontil® p.o. 75–150 mg/j
IMAO non spécifique Iproniazide Marsilid® p.o. 50–150 mg/j mais très variable
et irréversible
IMAO sélectif Moclobémide Moclamine® p.o. 300–600 mg/j
ISRS Citalopram Seropram® p.o., i.v. lente p.o. ou i.v. : 20–40 mg/j
Solution buvable : 16–32 mg/j
Escitalopram Seroplex® p.o. 10 mg/j (dose maximale 20 mg/j)
Fluoxétine Prozac® p.o. 20 mg/j (dose maximale 60 mg/j)
Fluvoxamine Floxyfral® p.o. 100 mg/j (dose maximale 300 mg/j)
Paroxétine Deroxat® p.o. 20 mg/j (dose maximale 50 mg/j)
Sertraline Zoloft® p.o. 50–200 mg/j
IRSNA Duloxétine Cymbalta® p.o. 60 mg/j (dose maximale 120 mg/j)
Milnacipran Ixel® p.o. 100 mg/j
Venlafaxine LP Effexor LP® p.o. 75–375 mg/j
Venlafaxine Effexor® p.o.
Autres Agomélatine Valdoxan® p.o. 25 mg/j
Miansérine Athymil® p.o. 10–90 mg/j
Mirtazapine Norset® p.o. 15–45 mg/j
Tianeptine Stablon® p.o. 37,5 mg/j
IRNADA Bupropion Zyban® p.o. Hors AMM 150–450 mg/j

DCI : dénomination commune internationale ; AMM : autorisation de mise sur le marché ; p.o. : per os ; i.v. : voie intraveineuse ; i.m. : voie intramusculaire ; IMAO :
inhibiteur de la monoamine oxydase ; ISRS : inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine ; IRSNA : inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline ;
IRNADA : inhibiteur de la recapture de la noradrénaline et de la dopamine.

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Tableau 2.
Récapitulatif des propriétés autres des antidépresseurs disponibles sur le marché français.
Famille DCI Nom commercial Anticholinergique Antihistaminique ␣-adrénolytique
Imipraminiques ®
Amitriptiline Elavil ++ + ++
Laroxyl®
Amoxapine Defanyl® + + +
Clomipramine Anafranil® + ± +
Dosulépine Prothiaden® + + +
Doxépine Quitaxon® + + ++
Imipramine Tofranil® + ± +
Maproptiline Ludiomil® + + ++
Trimipramine Surmontil® ± + ++
IMAO non spécifique Iproniazide Marsilid® − − −
et irréversible
IMAO sélectif Moclobémide Moclamine® − − −
ISRS Citalopram Seropram® − − −
Escitalopram Seroplex® − − −
Fluoxétine Prozac® − − −
Fluvoxamine Floxyfral® − − −
Paroxétine Deroxat® ± − −
Sertraline Zoloft® − − −
IRSNA Duloxétine Cymbalta® − − −
Milnacipran Ixel® − − −
Venlafaxine LP Effexor LP® − − −
Venlafaxine Effexor® − − −
Autres Agomélatine Valdoxan® − −
Miansérine Athymil® − + ++
Mirtazapine Norset® − + +
Tianeptine Stablon® − − −
IRNADA Bupropion Zyban® − − −

DCI : dénomination commune internationale ; IMAO : inhibiteur de la monoamine oxydase ; ISRS : inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine ; IRSNA : inhibiteurs
de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline ; IRNADA : inhibiteur de la recapture de la noradrénaline et de la dopamine.

de la lévomépromazine [10] . Ce sont généralement les proprié- Voie d’administration parentérale


tés antihistaminiques de certains antidépresseurs, notamment
tricycliques, qui expliquent en partie la sédation [11] . Les proprié- d’un traitement antidépresseur
tés ␣-adrénolytiques de molécules telles que l’amitriptyline, la Les voies d’administration parentérales sont à réserver aux
doxépine, la maproptiline, la trimipramine, la miansérine et la patients pour lesquels la voie orale n’est pas possible : soit en cas
mirtazapine sont également en partie responsables de l’activité de patient ne pouvant pas prendre de traitement per os (catatonie,
sédative. Ce type de classification permet au clinicien de choi- grand ralentissement psychomoteur ou trouble de la déglutition
sir parmi les thérapeutiques disponibles le moment opportun de sévère, agitation secondaire à la dépression, etc.), soit chez un
la journée où le patient reçoit le traitement. Ainsi, une thérapeu- patient ne pouvant pas donner son consentement, par consé-
tique considérée comme sédative est prescrite le soir ou au coucher quent généralement hospitalisé sous contrainte et refusant la prise
pour faciliter le sommeil, et une thérapeutique considérée comme du traitement per os alors que des enjeux vitaux ou des risques de
« psychostimulante » est prescrite en première partie de jour- complications sévères existent. Après amélioration, l’équivalent
née. Parmi les thérapeutiques considérées comme stimulantes, la de posologie per os de la molécule ayant permis la réponse est
fluoxétine (Prozac® ) pour les ISRS et l’imipramine (Tofranil® ) pour à proposer au patient. Généralement, une ampoule correspond
les tricycliques sont à prendre en considération. Les IMAO et le à deux fois sa posologie per os sauf pour le citalopram qui, en
bupropion sont des traitements psychotoniques. Pour les théra- dehors d’être le seul ISRS disponible à la fois en solution buvable
peutiques anxiolytiques ou sédatives, il convient de mentionner et en ampoule injectable, ne nécessite pas d’ajustement de poso-
la trimipramine, la doxépine, la mirtazapine, la miansérine et logie de la forme parentale à la forme « comprimé ». La forme
la maproptiline. Les autres molécules sont considérées comme « solution buvable » présente une biodisponibilité supérieure à
intermédiaires, et les réponses sédatives ou psychostimulantes la forme « comprimé » de 25 %. Par conséquent, l’équivalent de
sont variables selon les patients et/ou les posologies utilisées. posologie est de 8 mg de solution buvable pour un comprimé dosé
Parmi les ISRS, une molécule est à différencier en raison de la à 10 mg [7] .
fréquence clinique de la sédation : il s’agit de la paroxétine qui est La voie parentérale garantit l’observance thérapeutique. Les
généralement prescrite le soir pour cette raison. La fluvoxamine, délais d’action restent, quant à eux, similaires pour les deux voies.
moins utilisée actuellement, a également un effet sédatif parfois
important.
Il est aussi important de considérer l’activité anticholiner-
gique de certains antidépresseurs tricycliques qui contre-indique
Délais d’action
l’utilisation en cas de glaucome en angle fermé, d’hypertrophie Les délais d’action des antidépresseurs dans l’épisode dépressif
prostatique symptomatique ou encore de trouble neurodégéné- caractérisé sont très variables d’un sujet à l’autre. Il convient de
ratif avec déficit d’acétylcholine tel que la maladie d’Alzheimer. déterminer deux types de délais d’action. Le délai d’action dit pré-
Les ISRS, les IMAO, les atypiques et les IRSNA en sont dépourvus coce est de quelques jours à semaines après le début du traitement.
(Tableau 2). Le délai d’action à moyen terme, à partir de deux semaines suivant

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le début du traitement, peut s’étendre jusqu’à huit à 12 semaines. Tableau 3.


Les recherches actuelles cherchent à diminuer ce délai d’action Facteurs de risque de récurrence dépressive (adapté des recommanda-
(cf. infra). tions de l’American Psychiatric Association [26] ).
Facteurs de risque
Délai d’action à court terme
Persistance de symptômes dépressifs sub-syndromiques
Il est défini comme survenant dans les deux premières semaines
Antécédents d’épisodes dépressifs caractérisés multiples
du traitement. Des échelles spécifiques ont permis d’étudier ce
délai dans différentes études. Une revue de la littérature [12] montre Sévérité de l’épisode initial et des épisodes ultérieurs
que les symptômes cibles du délai d’action à court terme des anti- Début des troubles dans le jeune âge
dépresseurs sont essentiellement le sommeil et l’anxiété. Cette Présence d’une maladie somatique chronique
action peu spécifique peut être liée à l’effet sédatif ou stimulant qui Histoire familiale de maladies psychiatriques, en particulier de trouble
amène une amélioration clinique sur l’angoisse ou l’inhibition qui de l’humeur
n’est pas à proprement parlé un effet antidépresseur. En termes de
Évènement psychosocial stressant
prédiction de la réponse, il est possible d’affirmer qu’une réponse à
court terme puisse être positivement corrélée à la réponse à moyen Style cognitif de pensées négatives
terme [13] justifiant, au-delà de la surveillance classique de tolé- Persistance de troubles du sommeil
rance, un suivi rapproché qui permet d’observer ces éléments. En
revanche, le fait de ne pas répondre dans les deux semaines n’est
pas forcément un critère de mauvaise réponse ultérieure [14] . nécessite un traitement. Ce type de structuration/hiérarchisation
peut paraître peu écologique, mais c’est en définitive la meilleure
Délai d’action à moyen terme façon de savoir si le traitement qu’on va introduire dans la vie
Le délai d’action à moyen terme peut être défini comme étant du patient a une chance de lui être plus bénéfique qu’un pla-
situé entre deux et quatre semaines [12, 15] . Il est à différencier du cebo [22, 23] . D’autre part, plus les symptômes sont sévères et plus
temps de traitement d’attaque qui est de quatre à six semaines. l’efficacité du traitement antidépresseur contre placebo est grande.
Ce délai d’action justifie que le clinicien puisse maintenir le Ces deux remarques justifient d’autant plus la nécessité de traiter,
traitement à des posologies efficaces suffisamment longtemps grâce à un dépistage efficace, les patients devant y avoir recours
avec une bonne observance du patient, même en l’absence et seulement ces patients. La pharmacoépidémiologie montre par
d’une efficacité cliniquement perceptible. Classiquement, il sur- exemple que jusqu’à 40 % environ des patients ayant recours à
vient après deux semaines au minimum et correspond à une un antidépresseur n’ont pas de dépression [24] et en même temps
amélioration sur le ralentissement psychomoteur et/ou les idées seulement un quart des patients dépressifs sont traités par antidé-
suicidaires, puis sur l’humeur dépressive [15, 16] . Ce délai justifie presseurs selon l’étude ESEMeD [25] , environ 20 % selon Briffault
des posologies efficaces stables durant toute cette période. D’après et al. [3] .
Quitkin [17] , un changement de traitement semble être justifié si Le fait de ne pas traiter pharmacologiquement un épisode
le patient ne présente aucune amélioration clinique significative dépressif d’intensité légère est à distinguer du fait qu’il est impor-
après 4 semaines [18] . Cependant, il semble important de prendre tant de traiter les symptômes résiduels d’un épisode dépressif en
en compte les données de l’étude STAR*D [14] qui montrent qu’un rémission partielle (cf. infra) (Tableau 3).
certain nombre de patients bénéficiant d’un traitement prolongé
jusqu’à 12 semaines peuvent s’améliorer jusqu’à rémission sans
autre stratégie thérapeutique. Ces données peuvent justifier qu’en
Traitement de première ligne : épisode
dehors d’une aggravation et en cas d’une amélioration partielle dépressif isolé
dans un délai de quatre à huit semaines le traitement puisse
être poursuivi à posologie suffisante avant de proposer un switch Grands principes
ou une adjonction thérapeutique. Dans tous les cas, l’Agence Choisir un traitement pour un premier épisode parmi
française de sécurité sanitaire des produits de santé a statué sur le l’ensemble des thérapeutiques disponibles est parfois affaire
fait que : « à l’exception des cas où les patients s’aggravent, il n’est d’habitude et de préférence personnelle du clinicien. Néanmoins,
pas justifié de modifier un traitement antidépresseur pour cause certaines études peuvent aider dans ce choix.
d’inefficacité avant une durée de prescription de quatre semaines La méta-analyse conduite par Cipriani enseigne que le trai-
à posologie efficace. » [6] . tement dont le rapport efficacité/acceptabilité le plus élevé est
l’escitalopram (Fig. 1) [27] (l’Agence nationale de sécurité du
médicament [ANSM] a émis des recommandations concernant
 Stratégies d’utilisation l’allongement du QT de ce produit, cf. infra), suivi par la sertra-
line. L’efficacité la plus importante allant à la mirtazapine sur les
des traitements à efficacité 12 molécules testées. Une récente publication de révision de cette
antidépressive dans la dépression méta-analyse conclut qu’il n’y a pas de réelle supériorité d’un
antidépresseur de première intention par rapport à un autre, à
Généralités l’exception de la réboxétine, qui a des effets inférieurs mais n’est
pas commercialisée en France [28] .
Le traitement de la dépression nécessite de la diagnostiquer et Quelques études de comparaison des antidépresseurs tricy-
de définir à quel moment le patient va bénéficier au mieux du cliques contre ISRS conclurent que les imipraminiques sont
traitement antidépresseur. supérieurs en termes d’efficacité [29] . Bien entendu, du fait de leur
En effet, les études qui concernent la justification d’un tel moins bonne tolérance en comparaison aux molécules récentes,
traitement pharmacologique montrent que la part de patients ils restent un choix de seconde voire troisième ligne. La fluvoxa-
répondeurs au placebo après six semaines est de 30 %, voire plus mine serait l’ISRS le moins bien toléré [29] .
selon les études [6, 19, 20] . L’objectif du traitement antidépresseur est d’obtenir une rémis-
Rechercher le nombre de symptômes présents chez le patient sion complète de la symptomatologie. Cette rémission complète
est donc important pour déterminer l’intensité et la nécessité (qui peut être chiffrée à l’aide d’échelles telles que l’Hamilton
d’introduire un traitement ou d’y sursoir [21] . Avoir au moins Depression Rating Scale, pour laquelle un score inférieur ou égal à
six symptômes d’un épisode dépressif caractérisé, comme inscrit 7 signe la rémission, ou encore la Montgomery-Asberg Depression
dans les classifications internationales (Classification internatio- Rating Scale pour un score inférieur à 10), permet de diminuer le
nale des maladies 10, Diagnostic and Statistical Manual of Mental risque de rechute. L’ensemble des recommandations internatio-
Disorders, Fourth Edition, Text Revision [DSM IV-TR]), d’intensité nales mais aussi nationales fixent d’ailleurs la rémission complète
significative et pendant une durée suffisante permet de déterminer et un fonctionnement identique à l’antérieur comme les objectifs
que le patient présente une intensité au moins modérée et qu’il du traitement [5, 6, 18, 21, 22, 30] .

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Figure 1. En ordonnées : classement selon l’efficacité ; en


1er Mirtapazine
abscisse : classement en fonction de l’acceptabilité (adapté
2e Escitalopram d’après Nut [27] ).

3e Venlafaxine

4e Sertraline

Classement selon l’efficacité


5e Citalopram

6e Milnacipran

7e Bupropion

7e Duloxétine

9e Fluvoxamine

10e Paroxétine

11e Fluoxétine

12e Reboxétine

12e 11e 10e 9e 8e 7e 6e 5e 4e 3e 2e 1er


Classement selon l’acceptabilité

Traitement d’attaque d’un épisode dépressif isolé Dans les épisodes dépressifs à caractéristiques aty-
piques (DSM IV), les IMAO ont fait la preuve de leur efficacité [41] .
Il correspond au traitement d’épisodes dépressifs modérés à
Cependant, les effets secondaires à type d’hypertension artérielle
sévères.
justifient un régime pauvre en tyramine parfois difficile à mettre
Cette phase de traitement a une durée d’environ quatre à six
en œuvre. Bon nombre de dépressions atypiques répondent très
semaines, pouvant aller jusqu’à 12 semaines (cf. supra).
bien aux antidépresseurs tricycliques [42] . Si l’on se réfère au guide
Les traitements ISRS sont considérés comme des traitements de
du prescripteur proposé par Stahl, la sertraline, qui présente
première intention en raison de leur rapport efficacité/tolérance
aussi des propriétés de blocage de la recapture de la dopamine,
favorable. D’après les recommandations de la Canadian Network
pourrait être bénéfique dans ce type de dépression. Il en serait
for Mood and Anxiety Treatments [22] , l’ensemble des « nouvelles
de même pour la fluoxétine, la duloxétine, la venlafaxine, le
molécules » que ce soit les ISRS, les IRSNA (duloxétine, mil-
milnacipran selon cet ouvrage [43] . Ces molécules pourraient donc
nacipran, venlafaxine) ou les traitements classés dans « autres
probablement être préférées en première intention et les IMAO
antidépresseurs » peuvent être choisis en première intention.
prescrits en cas de résistance.
Cependant, la tolérance n’est pas toujours aussi bonne qu’avec
Dans les épisodes dépressifs avec caractéristiques psychotiques,
les ISRS selon les méta-analyses dont dispose le médecin [31–33] . La
l’association d’un antipsychotique atypique au traitement anti-
posologie initiale prescrite peut être inférieure à la posologie cible
dépresseur est préconisée dans les recommandations de bonne
si l’on cherche à diminuer les effets indésirables d’une posologie
pratique. L’association antidépresseurs tricycliques et antipsy-
d’emblée à pleine dose. Cependant, la plupart des ISRS sont bien
chotique atypique représente le traitement de choix de cette
tolérés à pleine dose d’emblée.
phase d’attaque [44] . Cette association est supérieure en termes
Du point de vue des cibles symptomatiques différentielles
d’efficacité en comparaison à l’utilisation d’une seule de ces classes
selon les traitements, aucune étude n’a à ce jour réussi à déter-
(antipsychotiques ou antidépresseurs). Une récente méta-analyse
miner formellement quel antidépresseur choisir pour quel type
a revu ce concept bien connu des cliniciens [45] .
de symptomatologie. On n’a pour le moment pas non plus de
Dans les épisodes avec caractéristiques mélancoliques, les anti-
biomarqueurs disponibles qui apporteraient un argument réa-
dépresseurs tricycliques pourraient être supérieurs aux ISRS [46]
liste pour choisir un antidépresseur en particulier. Pourtant,
sans qu’il n’y ait de preuve scientifique forte. Le guide de
les prémices d’une médecine personnalisée tendent à voir le
l’American Psychiatric Association (APA) de 2010 rappelle égale-
jour [34, 35] .
ment cette possibilité.
Les molécules ISRS ayant fait leurs preuves dans l’anxiété (AMM
sur le trouble anxiété généralisé) telles que la sertraline, la paroxé-
tine ou encore l’escitalopram peuvent être proposées au patient Traitement de consolidation
chez qui l’anxiété prédomine ou est nettement présente. La ven- La consolidation se situe après la rémission des symptômes,
lafaxine et plus récemment la duloxétine peuvent également donc chez un patient qui ne présente plus de symptômes pour
être proposées. La mirtazapine et la miansérine présentent aussi la rémission complète et avec des symptômes résiduels si la rémis-
des qualités anxiolytiques du fait de leurs propriétés sédatives sion est partielle. Le patient est à risque important de rechute pour
(cf. supra). Les IMAO ont également une place particulière dans cette deuxième catégorie et nécessite une prise en charge complé-
la dépression associée à une forte anxiété [36] . mentaire pharmacologique et/ou psychothérapeutique. Elle dure
L’agomélatine, antagoniste 5-HT2C et 2B et agoniste des récep- généralement 16 à 20 semaines, et son but est d’éviter au maxi-
teurs mélatoninergiques MT1 et MT2, pourrait être proposée en mum les rechutes et récurrences [47] .
première intention [37] . Elle présente une excellente tolérance cli- Le traitement antidépresseur utilisé est dans la majorité des cas
nique. Une méta-analyse datant de 2013 montre qu’elle s’est celui qui a permis la rémission à posologie identique [48] . Les anti-
montrée supérieure en comparaison au placebo, mais en raison dépresseurs ayant l’AMM pour cette indication sont la sertraline et
d’un effet de taille faible les auteurs posent la question du sens la venlafaxine [7] . Cependant, et même si Lépine et al. ont démon-
clinique de ce traitement qui améliore les patients d’environ tré que la sertraline est un traitement préventif des récurrences
1,5 points en moyenne à l’échelle de Hamilton [38] . En revanche, quel que soit le traitement antidépresseur ayant permis la rémis-
il semble que l’agomélatine puisse cibler une dimension difficile sion [49] , il paraît peu logique de changer un traitement efficace et
à améliorer dans la dépression, l’anhédonie [39, 40] . bien toléré.

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37-860-B-71  Modalités d’utilisation des antidépresseurs

Dans la dépression avec caractéristiques psychotiques, la ques- d’améliorer l’observance et de s’assurer des concentrations plas-
tion du traitement de consolidation reste entière. Continuer le matiques en fonction de la posologie prescrite, notamment en
traitement antipsychotique ou l’arrêter ? D’autant qu’il s’agit d’un dépistant les patients métaboliseurs rapides [51] .
« sous-type » de dépression à fort risque de rechute et récurrences.
Changement (« switch ») d’antidépresseur
Une étude prospective qui devrait répondre à cette question par
l’inclusion d’environ 400 patients avec un épisode dépressif avec Il correspond à la prise d’un nouvel antidépresseur à la place
caractéristiques psychotiques est en cours et devrait livrer ses d’un autre. Il peut se faire au sein même de la classe thérapeu-
conclusions [50] . tique actuelle (ISRS-ISRS par exemple) ou d’une classe vers une
autre. Le switch d’un ISRS vers un IRSNA n’est pas forcément
plus favorable au patient que la stratégie de classe thérapeutique
Traitement de deuxième ligne et dépression ISRS vers autre ISRS [54] . Certaines études laissent suggérer que
la durée du traitement serait à l’origine de l’amélioration plu-
résistante : échec d’un premier tôt que le switch. Cette remarque va dans le sens des données
antidépresseur montrant qu’un nombre significatif de patients s’améliore jusqu’à
12 semaines après l’introduction du traitement [55] . Cependant, les
Généralités et définitions recommandations et consensus d’experts préfèrent l’option du
Étant donné la fréquence de non-réponse à un premier anti- switch après quatre à six semaines de réponses insuffisantes [26, 51] .
dépresseur, les stratégies de deuxième ligne sont importantes.
Combinaison (« add-on ») de plusieurs traitements
Cette étape nécessite de reconsidérer le diagnostic (comme à
antidépresseurs avec des mécanismes d’actions
chaque changement de traitement), d’essayer de juger le niveau
complémentaires et avec un potentiel effet synergique
d’observance du patient et de s’assurer que les doses prescrites
étaient des posologies efficaces [26] . Cette stratégie serait plus efficace pour les patients partiellement
Concernant la définition de la résistance, de nombreuses défi- répondeurs que l’optimisation [51, 56] . La stratégie d’adjonction de
nitions existent sans que l’une d’entre elles ne fasse réellement miansérine à la fluoxétine paraît plus efficace que ne l’est celle
consensus. d’augmentation des doses de fluoxétine [57] et l’association sertra-
line 100 mg et miansérine 30 mg s’est montrée supérieure à la
sertraline seule à 100 mg [58] . Une étude reprenant des données
de l’étude STAR*D (même si le design de celle-ci ne visait pas la
“ Point important comparaison entre les différents bras de l’étude) ne retrouve pas
de différence entre la tranylcypromine (un IMAO non sélectif),
et la combinaison venlafaxine et mirtazapine, avec une meilleure
Définition de la résistance admise en Europe tolérance en faveur de cette association [59] . Les posologies utilisées
d’après le Commitee for Medicinal Products for dans cette association sont les posologies habituelles de chacune
Human Use des deux molécules. Cette association est surnommée la « rockette
Un patient est considéré comme résistant lorsque deux californienne » par Stahl.
thérapeutiques de classes différentes, pour une posologie Les associations thérapeutiques des IMAO avec d’autres anti-
et une durée suffisante de traitement, échouent à induire dépresseurs sont possibles et ont été testées essentiellement avec
des IMAO sélectifs. Ces associations sont possibles mais parfois
une réponse acceptable.
sources de plus d’effets indésirables. Par exemple, les associations
IMAO et fluoxétine, mais aussi IMAO et clomipramine, ont été
testées avec un bénéfice sur l’efficacité [51] .
Enfin, l’adjonction du bupropion, du fait de ses propriétés dopa-
L’échec peut être considéré différemment en termes de durée
minergiques, paraît logique mais l’absence d’AMM en France dans
supposée de la phase d’attaque (cf. supra). La réponse à un trai-
cette indication et le coût pour le patient en limitent l’accès (il
tement antidépresseur est généralement évaluée en fonction de
l’amélioration à l’échelle de dépression choisie. Elle est découpée s’agit pourtant d’une des molécules les plus prescrites aux États-
en trois catégories : non-réponse (moins de 25 % d’amélioration), Unis).
réponse partielle (25 à 50 % d’amélioration), réponse (plus de 50 % Adjonction d’un traitement non antidépresseur à activité
d’amélioration). Différents modèles de résistance permettent de antidépressive
chiffrer le niveau de résistance du patient mais ces modèles, tous Les agents fréquemment proposés en adjonction sont le
imparfaits, sont plus fréquemment utilisés en recherche [51] . Ils lithium, les hormones thyroïdiennes (triiodotyronine : Cynomel®
peuvent cependant permettre de mieux percevoir l’« étape » où ou tyroxine : Levothyrox® ), les antipsychotiques atypiques, les
le patient se situe et aider le clinicien à proposer une stratégie molécules à action dopaminergique et enfin la buspirone. Une
plus efficace pour le patient que celles déjà proposées pendant molécule thymorégulatrice est parfois utilisée en raison de son
l’épisode. Les deux modèles les plus utilisés sont le modèle de indication dans le maintien de la réponse chez les patients bipo-
Thase et Rush, et plus récemment celui du Maudsley [52] . laires déprimés. Il s’agit de la lamotrigine. Cette stratégie est
proposée dans la recommandation de l’APA [26] et est bien docu-
Traitement de l’épisode mentée [60, 61] .
Deux situations sont possibles : soit le patient est partiellement La buspirone est considérée comme une adjonction de première
répondeur, soit le patient est non répondeur. La logique voudrait étape en raison de sa tolérance mais aussi de preuves de son effi-
que l’on augmente les posologies dans le cas de réponse incom- cacité, même si elle semble modérée [51] .
plète et que l’on change de traitement en cas d’absence de réponse. Le lithium est l’adjonction qui reste la mieux explorée dans
Mais les choses sont sensiblement plus complexes. la dépression résistante [62, 63] . Elle est bien tolérée et efficace
Ainsi, plusieurs stratégies sont proposées dans la littéra- chez environ 50 % des patients résistants [62, 63] . Les posologies
ture [6, 20, 21, 26, 30, 51] . indiquées doivent permettre une lithiémie plasmatique en four-
chette basse avec une cible de 0,8 mEq/l environ. Cette stratégie
Optimisation du traitement est peu pratiquée, probablement en raison de la nécessité d’un
C’est une augmentation de posologie du traitement déjà en monitorage sanguin. Ce monitorage assure également une bonne
cours mais aussi une amélioration de l’alliance thérapeutique avec observance et amène à un suivi régulier qui permet de renfor-
le médecin. La posologie nécessaire à la rémission pour un patient cer l’alliance thérapeutique. L’APA, dans ses recommandations,
est différente pour chacun et il faut parfois la rechercher « pas souligne le fait qu’une étude d’augmentation du citalopram
à pas ». Cette stratégie souffre du manque de preuves. Sa vali- par le lithium n’a pas montré d’efficacité/tolérance supérieure à
dation est reconnue pour les tricycliques mais pas pour les ISRS l’adjonction d’hormones thyroïdiennes.
généralement prescrits en première intention [53] . Le monitorage En ce qui concerne les hormones thyroïdiennes, elles ont fait
sanguin, même s’il n’est pas recommandé, pourrait être un moyen leurs preuves en association aux antidépresseurs tricycliques, mais

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Modalités d’utilisation des antidépresseurs  37-860-B-71

les données de littérature manquent pour les ISRS [51] . Une étude Avec les antidépresseurs en monothérapie, le risque de virage va
de 2012 ne retrouve pas de supériorité entre sertraline seule ou de faible à élevé des ISRS aux tricycliques en passant par modéré
en association d’hormones thyroïdiennes chez 153 patients trai- avec les IRSNA. Les antidépresseurs peuvent également favoriser
tées en double aveugle par triiodotyronine au moins sur la durée les états mixtes. Par conséquent, la prescription d’un antidépres-
habituellement nécessaire à la réponse [64] . seur doit être réfléchie avec prudence, les patients sont à surveiller
Concernant les antipsychotiques, l’aripiprazole a obtenu étroitement et le thymorégulateur doit être systématiquement
l’approbation de la Food and Drug Administration (FDA), avec maintenu à posologie efficace.
comme posologies retenues une initiation entre 2,5 et 5 mg/j,
et une augmentation qui peut aller jusqu’à 15 mg/j [26, 65] . Les
faibles posologies ont un effet potentiellement désinhibiteur et Troubles anxieux
sont fréquemment utilisées chez les patients chez lesquels prédo- Trouble anxiété généralisée [6]
mine un ralentissement psychomoteur. La quétiapine bénéficie de
preuves d’efficacité et les recommandations indiquent la possibi- Dans ce trouble, les traitements ayant fait leur preuve et
lité de prescriptions à des posologies allant de 50 à 400 mg/j [26] . pour lesquels une AMM est en cours sont : la paroxétine et
L’association fluoxétine et olanzapine est une association fixe vali- l’escitalopram pour les ISRS, la venlafaxine et la duloxétine pour
dée aux États-Unis par la FDA [51] . L’importance de la surveillance les IRSNA, l’imipramine pour les tricycliques.
métabolique dans ces associations, surtout si prescrites pour une Les posologies sont identiques à celles utilisées dans la dépres-
durée longue, est à souligner. sion. La phase d’attaque a une durée d’environ huit semaines.
Enfin, les molécules psychostimulantes ont fait la preuve de
leur efficacité [26] . Il s’agit du modafinil, du méthylphénidate et des Trouble obsessionnel compulsif [70]
agonistes dopaminergiques tels que le pramipexole. Ces stratégies Avec des résultats publiés dès le début des années 1980, le traite-
sont assez mal documentées et il est probablement préférable de ment le mieux documenté dans la littérature scientifique concerne
ne pas les prescrire en dehors de centres habitués à cette prescrip- la clomipramine [71, 72] . Cependant, compte tenu de leur meilleure
tion. tolérance, les ISRS sont à préférer en première intention. La clomi-
pramine, qui apparaît plus efficace dans certaines méta-analyses,
est à réserver aux troubles résistants après échec de plusieurs thé-
Prescription des antidépresseurs rapeutiques.
dans les troubles dépressifs récurrents La plupart des patients ne retrouvent pas de bénéfice avant
quatre à six semaines de traitement et il faut attendre jusqu’à
Le Tableau 3 rappelle les principaux facteurs de risque de récur- 12 semaines. Une alliance forte avec le patient est à consti-
rences dépressives. tuer. Surtout que durant cette phase les objectifs sont d’obtenir
Le trouble dépressif est fréquemment un trouble dépressif récur- des posologies maximales tolérées qui sont ensuite diminuées.
rent. Il se définit par l’existence chez un patient d’au moins deux Par exemple, citalopram 20 à 60 mg/j, paroxétine 20 à 60 mg/j,
épisodes dépressifs caractérisés préalables (DSM IV). La question fluoxétine 40 à 60 mg/j. En l’absence d’amélioration après
essentielle pour ce trouble est : continuer ou discontinuer le traite- huit à 12 semaines, l’APA considère que le traitement est à
ment après la phase de consolidation ? Avec la crainte sous-jacente revoir.
que le patient présente une récurrence résistante et/ou invalidante La venlafaxine, qui ne bénéficie pas d’AMM dans cette indica-
à l’arrêt. tion, s’est montrée efficace à la posologie de 225 à 350 mg/j [73] . La
Sur ce point, l’ANSM [6] indique que le traitement de main- duloxétine à des posologies pouvant dépasser 120 mg/j pourrait
tenance doit être justifié par l’amélioration d’au moins un des être bénéfique en cas d’échec des ISRS [74] . Le milnacipran pour-
paramètres suivants : « fréquence, durée et intensité des épisodes, rait également être un recours [75] . Aucun IRSNA n’a cependant
qualité et durée des intervalles libres ». La phase de maintenance d’AMM dans cette indication.
est la phase qui succède à la phase de consolidation. Il n’existe
pas de réel consensus dans les recommandations, qu’elles soient
Trouble panique [6]
nationales ou internationales. Les données actuelles semblent
indiquer que plus le nombre d’épisodes est important, plus le La clomipramine est un traitement efficace dans le trouble
début des troubles survient tôt, plus le nombre de symptômes panique. Les posologies recommandées sont des doses plus faibles
résiduels est important ou plus il existe une charge familiale de que celles pour le traitement de la dépression.
trouble de l’humeur, plus le risque de récurrences est élevé. Ces La paroxétine est l’ISRS principalement proposé dans ce trouble.
paramètres sont donc à identifier et à inclure dans le choix de La posologie efficace est de 40 mg/j. Elle est bien tolérée et
maintenance ou de « discontinuité » [26] . aussi efficace que la clomipramine. La sertraline aurait également
une bonne efficacité sans qu’elle ne dispose de l’AMM. Certains
IMAO ont également une efficacité prouvée en dehors de leur
 Prescription des antidépresseurs AMM.
Le délai de réponse et les posologies sont identiques à ceux de
en dehors de leur indication la dépression. Certains patients peuvent répondre à une posologie
plus faible.
principale
Phobie sociale [6, 76]
Les modalités de prescription et de surveillance sont assez
proches de celles des indications précédentes (cf. supra). Certaines L’escitalopram, la paroxétine, la sertraline et la venlafaxine ont
spécificités sont à connaître. l’indication d’AMM pour la phobie sociale. Les antidépresseurs
ont une action plus rapide que la thérapie comportementale cog-
nitive, même si les deux approches sont indiquées toutes les deux
Dépressions du trouble bipolaire en première intention. Les posologies recommandées sont de
l’ordre de celles proposées dans la dépression. La durée initiale
En association d’un thymorégulateur, les ISRS peuvent être
de traitement est de deux à quatre semaines et la consolidation
considérées ainsi que les tricycliques, voire les IMAO selon
nécessaire est d’une durée de six à 12 mois après rémission.
l’ANSM [6] . Dans cette indication, l’association fluoxétine et olan-
L’iproniazide n’a pas été testé dans cette indication, mais le
zapine a un potentiel avantage [51] . D’autres possibilités existent
moclobémide a montré des résultats assez variés.
en fonction de la réponse et de la présentation clinique du
patient, telles que l’adjonction au traitement thymorégulateur
de lamotrigine, de psychostimulants tels que le pramipexole [66] ,
État de stress post-traumatique [6]
le modafinil [67] , mais aussi d’hormones thyroïdiennes [68] ou Le seul traitement ayant l’AMM est la paroxétine pour des poso-
d’aripiprazole [69] . logies allant de 20 à 50 mg/j. La plupart des antidépresseurs ont

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37-860-B-71  Modalités d’utilisation des antidépresseurs

bénéficié d’études dans lesquelles ils se sont montrés efficaces, sauf France, obtient également un grade A de recommandation avec
pour les IMAO dont les preuves ne sont pas établies. La sertraline un niveau 2. En grade B, on peut retenir la fluvoxamine et la ser-
est efficace pour des posologies de l’ordre de 200 mg/j. traline. Les autres antidépresseurs n’ont pas de preuves suffisantes
pour être recommandés de manière claire.
En ce qui concerne l’anorexie, les antidépresseurs ne semblent
Douleurs [77] pas être particulièrement plus efficaces que le placebo et ne sont
Les antidépresseurs peuvent trouver une indication dans plu- pas recommandés.
sieurs états douloureux chroniques. La littérature rapporte que Bien entendu, ces deux troubles peuvent être secondaires ou
les migraines, les polyneuropathies douloureuses, les douleurs alors s’accompagner d’une dépression, et trouvent alors fréquem-
neuropathiques centrales, les neuropathies médicamenteuses, les ment une amélioration lors de la prescription d’antidépresseur
algies de la face, les douleurs post-zostériennes et la fibromyalgie dans ce cadre.
peuvent bénéficier d’un traitement antidépresseur.
La duloxétine, à la posologie de 60 mg/j, est un traitement ayant
fait ses preuves dans la polyneuropathie diabétique et approuvé
Addictions
par la FDA dans les lombalgies chroniques ainsi que dans la fibro- Il existe une sorte de comorbidité bidirectionnelle quand on
myalgie. Cependant, une revue de littérature Cochrane de janvier parle d’addiction et de trouble de l’humeur : les patients avec un
2013 ne retrouve pas d’amélioration nette de la fibromyalgie avec trouble dépressif ont un risque trois fois plus important d’avoir un
la duloxétine ou le milnacipran contre placebo [78] . abus de substance [82] et les patients présentant une addiction ont
Dans la migraine, l’amitriptyline a démontré son efficacité. Les un risque quasiment multiplié par quatre sur la vie entière d’avoir
récentes recommandations de l’American Academy of Neurology un épisode dépressif en comparaison à la population générale [83] .
considèrent l’amitriptyline et la venlafaxine comme des molé- Dans la consommation d’alcool, il est fréquent d’avoir des
cules de niveau B au même titre que l’aténolol ou encore les patients qui développent des symptômes dépressifs ou plutôt dys-
triptans pour la prévention des migraines [79] . phoriques, résolutifs à l’arrêt des consommations sans qu’il ne
L’amitriptyline est également efficace dans les douleurs post- s’agisse d’un épisode caractérisé de dépression.
zostériennes, mais aussi les neuropathies médicamenteuses pour Dans l’addiction à l’alcool [84] , les ISRS ne permettent pas
lesquelles il est également possible d’utiliser la clomipramine, la d’obtenir une diminution significative des consommations
venlafaxine et la duloxétine seules ou en association des traite- d’alcool. Il n’apparaît pas non plus clair qu’ils puissent avoir
ments antalgiques opiacés. un effet sur la symptomatologie dépressive en dehors d’épisodes
caractérisés d’intensité sévère dans les cohortes de patients d’âges
hétérogènes. En revanche, chez les buveurs tardifs (plus de 25 ans,
Schizophrénie [80] alcoolisme de type A), ils pourraient diminuer les consommations.
La question est restée longtemps affaire de débats et contro- Dans l’addiction au tabac, le bupropion a prouvé son efficacité
verses. Aujourd’hui, on sait que les antidépresseurs sont efficaces et a l’AMM pour cette indication pour un traitement d’une durée
dans certaines dimensions du trouble schizophrénique et plus de sept à neuf semaines à la posologie de 300 mg/j après un passage
largement dans les troubles psychotiques. Dans la dépression à 150 mg/j pendant six jours. Les prises doivent être espacées de
du patient atteint de schizophrénie, les antidépresseurs ont une huit heures.
efficacité. Cependant, comme précédemment souligné par de En somme, les antidépresseurs ne sont pas vraiment des molé-
Maricourt et Krebs [80] , la dernière revue de littérature sur le sujet cules de choix dans le traitement des addictions, mais peuvent
date de 2002 et montre que les données sont probablement peu être proposés en cas de comorbidité dépressive.
fiables en ce qui concerne l’activité antidépressive. Dans cette
large revue de la littérature, les auteurs n’ont pas retrouvé de risque
d’aggravation de la symptomatologie psychotique ; les antidépres- Troubles de la personnalité [85]
seurs n’ont pas d’effet psychomimétique dans la schizophrénie. Les patients qui présentent un trouble de la personnalité comor-
Dans les symptômes négatifs, les antidépresseurs qui auraient bide à un épisode dépressif présentent une moins bonne efficacité
démontré une certaine efficacité sont la fluoxétine et le bupro- des traitements antidépresseurs. Les patients avec une sévérité
pion ; malgré l’activité dopaminergique de ces traitements, importante de leur trouble de personnalité sont ceux qui y
l’amélioration de l’émoussement affectif et de l’apragmatisme répondent le moins bien.
n’est aucunement relayée par l’aggravation des symptômes psy- Dans les troubles de l’humeur, les troubles de personnalité
chotiques. sociopathique et borderline sont les mieux étudiés. Dans le trouble
En ce qui concerne les troubles anxieux associés à la schizophré- de la personnalité borderline, les symptômes qui seraient les plus
nie, ils répondraient plus particulièrement à la fluvoxamine et à accessibles aux ISRS sont la colère et l’agressivité. La symptoma-
la clomipramine. tologie thymique est moins accessible à ces thérapeutiques. Le
Dans l’akathisie secondaire aux neuroleptiques, la mirtazapine trouble explosif intermittent, fréquemment comorbide, est quant
aurait une activité favorable. à lui une cible thérapeutique des ISRS dont la fluoxétine pour des
posologies élevées.
Troubles du comportement alimentaire [81] Dans le trouble de personnalité borderline, il n’y a pas
d’argument qui ferait prescrire un antidépresseur pour en chan-
Seule la fluoxétine a une AMM dans les troubles du comporte- ger l’évolution. Cependant, il est possible de les prescrire en cas
ment alimentaire et est réservée aux patients qui présentent une de trouble comorbide (addictions, anxiété, etc.).
boulimie. La posologie de 60 mg/j est celle qui a prouvé son effi-
cacité. L’objectif du traitement est de diminuer la fréquence des
prises alimentaires compulsives et celle des comportements de  Bilan préthérapeutique [6]

purgation, que ce soit les vomissements ou la prise de produits


laxatifs. D’après les recommandations de la World Federation of Le bilan préthérapeutique recherche les antécédents de dépres-
Biological Psychiatry parues en 2011, les antidépresseurs pour sion, les thérapeutiques ayant fonctionné dans les épisodes
lesquels existent des preuves significatives d’efficacité dans la précédents, que ce soit un trouble dépressif ou un autre trouble
boulimie sont la fluoxétine, la fluvoxamine, la sertraline, le bupro- relevant d’une thérapeutique antidépressive, ainsi que les effets
pion. Le délai moyen à retenir pour l’effet thérapeutique est de secondaires rencontrés. Le risque suicidaire est évalué et les anté-
huit semaines. cédents familiaux de troubles psychiatriques, notamment au
Des études divergentes existent concernant plusieurs autres premier degré et jusqu’au second degré, sont à rechercher car ils
antidépresseurs. peuvent influencer le diagnostic. Une attention particulière doit
La fluoxétine est la seule molécule à obtenir le plus haut être accordée à la recherche d’éléments personnels ou familiaux en
niveau de recommandation (grade A, niveau 1) [81] . La désipra- faveur d’une maladie bipolaire (symptômes de la série maniaque
mine, un antidépresseur tricyclique dont on ne bénéficie plus en notamment).

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Une allergie, un terrain somatique particulier, pouvant expli- Tableau 5.


quer le tableau sont à rechercher. Inhibition des isoenzymes du cytochrome P450 par les antidépresseurs
Un bilan cardiologique, avec notamment un électrocardio- (adapté des recommandations de l’American Psychiatric Association [26] ).
gramme et√ mesure de l’espace QT corrigé à la fréquence cardiaque Antidépresseurs 1A2 2A6 2B6 2C8 2C9 2C19 2D6 2E1 3A4
(QTc = QT/ RR) est à réaliser pour les imipraminiques et for-
tement recommandé avec d’autres antidépresseurs tels que Amitryptiline + +
l’escitalopram et le citalopram. En effet, ces deux traitements Bupropion +++
induisent un allongement du QT dose-dépendant [86] . Il ne Citalopram + + + +
paraît pas exagéré qu’un électrocardiogramme fasse aujourd’hui Duloxétine ++
parti de l’évaluation systématique initiale du patient pour
Escitalopram ++
qui on doit avoir recours à une thérapeutique antidépres-
sive à condition qu’il ait été lu par un médecin en ayant Fluoxétine ++ ++ ++ + ++ +++ +
l’habitude. Fluvoxamine +++
La prescription des imipraminiques nécessite de s’être assuré, Imipramine + + + +
éventuellement par une consultation spécialisée, de l’absence de Mirtazapine + +
risque lié à leurs propriétés anticholinergiques : risque de glau-
Paroxétine + +++ + + +++ +
come à angle fermé, de rétention aiguë d’urine (surtout chez
l’homme avec une hypertrophie bénigne de prostate symptoma- Sertraline + ++ + + ++ ++ ++
tique), d’une aggravation d’un trouble neurodégénératif. Venlafaxine + + +
Certains antidépresseurs nécessitent de s’assurer de l’absence
+++ : inhibiteur puissant ; ++ : inhibiteur modéré ; + : inhibiteur faible.
d’une hypertension artérielle, notamment les IMAO et certains
IRSNA (venlafaxine).
(quatre fois plus que la sertraline), provoquant un risque de sur-
dosage avec certains antidépresseurs tels que les imipraminiques.
 Interactions médicamenteuses [6, 87]
L’association est par conséquent à éviter.
Les interactions avec d’autres médicaments via ce système enzy-
Tous les antidépresseurs ont un métabolisme hépatique impor- matique sont possibles et à prendre en considération.
tant dans la transformation de ces molécules lipophiles en
composés plus hydrosolubles. La « superfamille » d’enzymes
connue sous le nom de cytochrome P450 (CYP450) est la famille
permettant la majorité de ces transformations. Les isoformes de
▲ Mise en garde
ces enzymes (ou isoenzymes) fonctionnelles forment des voies
par lesquelles les antidépresseurs sont métabolisés par le foie. Une Utilisation de la phytothérapie
place particulière est à réserver au milnacipran qui présente un La phytothérapie parfois utilisée par certains patients peut
moindre métabolisme hépatique. représenter un risque d’interaction notable. Le millepertuis
Le Tableau 4 est un récapitulatif du métabolisme des principaux (Hypericum perforatum) [5] est une plante ayant des proprié-
antidépresseurs par le foie en fonction des isoenzymes du CYP450. tés antidépressives. Il ne s’agit pas d’un antidépresseur. La
En termes d’interaction médicamenteuse, il est important
dose quotidienne devrait être de 600 à 900 mg/j pour en
de prendre en compte la capacité des antidépresseurs à inhi-
obtenir un effet. Il n’existe pas de preuves suffisantes pour
ber certaines isoenzymes (Tableau 5) pouvant ainsi augmenter
la concentration de molécules nécessitant l’isoenzyme inhi- en recommander l’utilisation. En revanche, cette plante
bée. Aucun antidépresseur n’est un inducteur enzymatique, en présente de nombreuses interactions pharmacologiques
revanche, le jus de pamplemousse est connu comme étant avec les antidépresseurs. Pour exemple, elle diminue
un inducteur du CYP450 3A4, augmentant notamment le notablement les concentrations sériques d’antidépresseurs
catabolisme des médicaments et rendant inefficaces certains tricycliques et de certains antirétroviraux utilisés dans le
hypolipémiants. Le tabac est quant à lui un inducteur du traitement du virus de l’immunodéficience humaine.
CYP4501A2, isoenzyme responsable de la biotransformation de
la mirtazapine.
Pour les antidépresseurs, un exemple pourrait être celui de
la fluoxétine qui inhibe de manière puissante l’isoenzyme 3A4

 Surveillance d’un traitement


Tableau 4. antidépresseur. Recherche d’effets
Isoenzymes du cytochrome P450 métabolisant les antidépresseurs
(adapté des recommandations de l’American Psychiatric Association [26] ).
indésirables
Antidépresseurs 1A2 2B6 2C9 2C19 2D6 3A4 Le Tableau 6 reprend en fonction de chacune des catégories
Amytriptiline + + ++ ++ ++ +
d’effets indésirables, fréquents ou gênants, les classes pharmaco-
logiques qui peuvent être impliquées. Le praticien pour connaître
Bupropion + ++ + +
l’imputabilité de la molécule doit se référer à un descriptif plus
Citalopram ++ + ++ précis tel que le Vidal® [7] . En effet, même s’il existe des spécifici-
Duloxétine ++ ++ tés de classe, les effets indésirables ont une imputabilité propre en
Escitalopram ++ + + fonction de la molécule prescrite. La suite détaille certains effets
Fluoxétine + + ++ + ++ +
qui doivent être connus.
Imipramine ++ + ++ ++ ++
Maproptiline + ++ Risque suicidaire
Mirtazapine ++ + ++ +
La promesse d’une diminution du taux de suicide grâce à
Paroxétine ++ l’amélioration symptomatologique de la dépression par les anti-
Sertraline ++ + ++ + + dépresseurs est difficile à démontrer à l’échelle d’une population.
Venlafaxine + + ++ + Cependant, on observe depuis l’introduction des antidépresseurs
ISRS une diminution du taux de suicide. Il existe une stagnation
++ : substrat majeur ; + : substrat mineur. de cette courbe, voire une augmentation du taux de suicides aux

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37-860-B-71  Modalités d’utilisation des antidépresseurs

Tableau 6. Tableau 7.
Principaux effets secondaires en fonction de la classe thérapeu- Tableau des fréquences des effets secondaires sur la libido des traitements
tique [5, 7, 26] . antidépresseurs (adapté des recommandations de la Canadian Mood and
Anxiety 2009 [22] ).
Classes d’effets Effets secondaires Antidépresseurs
secondaires potentiels associés Fréquence des dysfonctions Antidépresseurs
sexuelles
Cardiovasculaire Arythmies Tricycliques
Hypertension IRSNA, bupropion < 10 % Agomélatine
Bupropion
Crise hypertensive IMAO non sélectif
Mirtazapine
Augmentation du Mirtazapine Moclobémide
cholestérol
10–30 % Citalopram
Augmentation du poids ISRS, tricyclique, IMAO, Duloxétine
mirtazapine, Escitalopram
miansérine Milnacipran
Hypotension IMAO Venlafaxine
orthostatique > 30 % Fluoxétine
Anticholinergique Constipation Tricycliques, certains Fluvoxamine
IRSNA Paroxétine
Confusion Tricycliques Sertraline
Sécheresse buccale Tricycliques, IRSNA,
bupropion Il apparaît dans une méta-analyse de la cohorte Nurse’s Health
Dysurie Tricycliques Study (NHS) que le risque d’évènement cardiaque pouvant entraî-
Troubles de Tricycliques, certains
ner une mort subite est 1,5 fois plus important chez les patientes
l’accommodation IRSNA déprimées qu’en population générale. Cependant, il faut noter
que ce risque peut être en partie lié au traitement antidépres-
Neurologique Maux de tête ISRS, IRSNA, bupropion
seur [92] .
Myoclonies Tricycliques, IMAO En dehors de ces effets, le risque de trouble du rythme ventri-
Abaissement du seuil Bupropion, tricycliques culaire est à prendre en compte chez les patients présentant soit
épileptogène une histoire familiale de trouble du rythme soit une anomalie
Akathysie ISRS, IRSNA électrocardiographique initiale, essentiellement avec les antidé-
Autres Diaphorèse/ Tricycliques, certains presseurs tricycliques mais aussi récemment avec certains ISRS
hypersudation ISRS, IRSNA (cf. supra). Un électrocardiogramme préthérapeutique peut être
proposé raisonnablement.
Risque de chute Tricycliques, ISRS
Bruxisme ISRS
Saignements ISRS Métabolisme et antidépresseurs
intestinaux
Les molécules présentant un fort pouvoir antihistaminique
IMAO : inhibiteurs de la monoamine oxydase ; ISRS : inhibiteurs sélectifs de la tels que certains tricycliques mais aussi la miansérine et la mir-
recapture de la sérotonine ; IRSNA : inhibiteurs de la recapture de la sérotonine tazapine sont responsables d’une altération de la sensation de
et de la noradrénaline. satiété responsable à son tour d’une prise de poids par augmen-
tation de l’appétit. Notons que la modification des transmissions
États-Unis après la mise en garde de la FDA sur leur prescription sérotoninergique, dopaminergique et noradrénergique peut être
chez les jeunes adultes jusqu’à 25 ans comme rappelé par Poirier responsable de modification de l’appétit [93] .
et Martinez [88] . Ceci va dans le sens de la prévention du suicide Dans tous les cas, il est nécessaire de surveiller la prise le poids
par les antidépresseurs. des patients sous traitement avec un effet antihistaminique H1
Notez qu’une étude sur plus de 220 000 vétérans masculins pré- central important.
sentant un épisode dépressif, montre que le risque suicidaire était Concernant l’apparition d’un diabète, il ne semble pas que
diminué en corrélation avec la prise d’ISRS et que d’autres études l’utilisation d’un antidépresseur puisse être reliée à l’apparition
apportent également le même type de conclusion [89] . d’un diabète [94] . Cependant, le syndrome métabolique et sa
Kupfer et al. [89] rappellent dans un article publié dans le Lancet résistance insulinique, primum movens d’un diabète de type 2,
de mars 2012 que malgré ces données des conclusions certaines pourraient être associés à la prescription de certains antidépres-
ne peuvent être faites sur la base d’études méthodologiquement seurs tels que les imipraminiques et les IRSNA. Les ISRS seraient
limitées. favorablement corrélés à l’amélioration glycémique des patients
La prudence reste donc de mise. L’évaluation précoce du clini- présentant un diabète de type 2 et ayant une comorbidité dépres-
cien après introduction du traitement ainsi que l’information du sive [95] .
patient sur ce risque sont des éléments majeurs de prévention.
La levée d’inhibition par les antidépresseurs qui justifierait la Trouble de la libido
prescription systématique d’une benzodiazépine n’est pas une
prévention efficace. Le risque d’effet paradoxal aux benzodiazé- Tous les antidépresseurs peuvent être responsables d’effets néga-
pines existe et nécessite une prévention tout aussi drastique que tifs sur la libido. La dépression partage ce désavantage. Certains
celle mise en œuvre lors de l’introduction des antidépresseurs. antidépresseurs présentent plus d’effets sur la libido que d’autres.
Le Tableau 7 propose un récapitulatif de ces effets.
Risque cardiaque
Surveillance hépatique [96]
Dépression et risque cardiovasculaire partagent un lien
étroit. Ainsi, avoir une maladie cardiovasculaire augmente Devant le risque d’hépatites médicamenteuses, tous les antidé-
le risque de développer un trouble dépressif et vice-et- presseurs ne sont pas égaux. Ainsi, dans chaque classe, certains
versa [90] . Différentes hypothèses physiopathologiques ont antidépresseurs présentent un risque hépatique plus important.
été proposées, parmi lesquelles le mécanisme inflamma- Parmi les ISRS, la paroxétine figure en chef de file pour ce risque
toire, l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, le système alors que la sertraline semble être le traitement pour lequel la sécu-
rénine–angiotensine–aldostérone, le système plaquettaire et les rité hépatique est la plus reproduite. De très rares cas d’hépatites
comportements alimentaires liés à la dépression [91] . ont été signalées avec la fluoxétine et le citalopram.

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Modalités d’utilisation des antidépresseurs  37-860-B-71

Pour les IRSNA, la duloxétine est responsable d’une élévation l’âge [100] et l’intolérance médicamenteuse du fait de modifica-
des enzymes hépatiques (plus de trois fois la normale) pour envi- tions métaboliques, de pathologies intercurrentes ou encore de
ron 1 % des patients : le délai très variable d’apparition (trois polymédications entraînant des interactions.
semaines à deux ans) nécessite une surveillance. Il serait préfé- Un autre élément de cette problématique est la fréquence de
rable d’éviter la prescription de ce traitement chez les patients la résistance dans cette tranche d’âge. Pourtant, ne pas traiter ou
présentant une hépatopathie. Concernant la venlafaxine, cette sous-traiter une dépression chez un sujet âgé peut être l’occasion
élévation est moins fréquente (0,4 %). d’une aggravation notable des capacités fonctionnelles parfois
Avec les antidépresseurs imipraminiques, une élévation asymp- déjà relativement réduites dans les activités de la vie quotidienne.
tomatique des enzymes hépatiques est fréquente, mais les cas La rémission permet, dans certains cas, le recouvrement d’une
d’élévation sévère ne sont que de quatre cas pour 100 000. La autonomie perdue.
survenue d’une hépatite de mécanisme immunoallergique (fré- Chez le sujet âgé, il existe une fréquence plus importante
quemment accompagnée de signes périphériques : fièvre, éruption de caractéristiques psychotiques dans la dépression [101] . Cette
cutanée) nécessite la contre-indication à vie des tricycliques du fait présentation répond généralement bien à un antidépresseur de
d’une toxicité croisée. première intention et ne justifie pas toujours un traitement
Avec le bupropion, la fréquence de perturbation des tests enzy- antipsychotique qui peut être utilisé avec précaution en cas de
matiques hépatiques est de l’ordre de 0,1 à 1 %. résistance ou de risque majeur pour le patient ou l’entourage,
Avec l’agomélatine, l’incidence d’une élévation des transami- en lien avec des comportements induits par les éléments psycho-
nases au-delà de trois fois la normale a une fréquence de 1,1 %. tiques.
Un bilan biologique hépatique est à réaliser à l’instauration, puis Les troubles neurodégénératifs sont un facteur de risque dépres-
à trois, six, 12 et 24 semaines, et à ce rythme en cas de modifica- sif, mais aussi de résistance aux antidépresseurs. Là encore,
tion de la posologie. Dans le cas d’une augmentation des enzymes traiter de manière efficace un épisode dépressif peut permettre
hépatiques, le traitement doit être arrêté et les enzymes hépatiques une meilleure autonomie. Même en l’absence de trouble neu-
surveillées jusqu’à normalisation d’après le résumé des caractéris- rodégénératif, les anomalies vasculaires de la substance blanche,
tiques du produit. dénommées leucoaraïose, sont fréquentes avec l’avancée en âge.
Le milnacipran, du fait de son faible effet de passage Il s’agit d’un facteur reconnu de résistance thérapeutique [102] .
hépatique, a un intérêt dans les intolérances hépatiques aux Chez le sujet âgé, les traitements anticholinergiques sont à évi-
antidépresseurs. ter, notamment en cas de troubles mnésiques et surtout dans les
cas où un traitement anticholinestérasique est utilisé dans le cadre
d’une maladie d’Alzheimer, d’une démence à corps de Lewy ou
Chez la femme enceinte d’un autre trouble neurodégénératif.
Le site internet proposé par le Centre de référence sur les Dans cette population, le monitorage sanguin des antidépres-
agents tératogènes (CRAT) regroupe des recommandations claires seurs peut être justifié d’emblée. Chez les sujets âgés, il est possible
concernant les thérapeutiques pouvant être proposées pendant la que des posologies assez faibles puissent être responsables de
grossesse et en cours d’allaitement. Il est régulièrement mis à jour dosages plasmatiques élevés de l’antidépresseur, entraînant une
et très simple d’utilisation. En cas de doute, le CRAT est joignable augmentation de risque de surdosage [103] .
directement par téléphone ou par e-mail. Le siège se situe sur le Enfin, le risque d’hyponatrémie par sécrétion inappropriée
site de l’hôpital Armand Trousseau à Paris. d’hormone antidiurétique et le risque de saignement, qui existent
Une attention particulière est à porter à la paroxétine en raison chez tous les patients à qui sont prescrits des antidépresseurs, sont
des risques concernant des malformations cardiaques. Ce risque a plus fréquents chez le sujet âgé.
été mis en évidence par des études cas témoins, des méta-analyses En ce qui concerne l’hyponatrémie par sécrétion inappropriée
et par la lecture des registres d’enfant nés sous paroxétine, mais des d’hormone antidiurétique, les autres étiologies, telle qu’un syn-
données contradictoires existent. La surveillance échographique drome paranéoplasique, sont à rechercher.
est plus étroite en cas d’exposition au moment de la cardioge-
nèse [97] .
Les ISRS ont été suspectés de favoriser l’hypertension artérielle  Arrêt d’un traitement
pulmonaire chez le nouveau-né. Ces données ont été contrôlées
et infirmées par une large étude [97] . antidépresseur
L’arrêt du traitement antidépresseur, après une phase de conso-
Chez l’enfant lidation ou de maintenance, doit suivre certains principes afin
d’éviter la survenue d’un syndrome d’arrêt (ou de sevrage).
Sur ce point, les recommandations de l’Afssaps datant de jan- Le tableau clinique regroupe généralement des troubles
vier 2008 restent valides. Le traitement d’un épisode dépressif gastro-intestinaux (nausées, vomissements, douleurs abdomi-
d’intensité modéré ou sévère, en l’absence d’une réponse à une nales, diarrhées), un syndrome pseudo-grippal (myalgies, frissons,
psychothérapie, peut être un antidépresseur. Le seul traitement sudation, asthénie, céphalées, rhinorrhée), des troubles neuro-
ayant l’AMM chez l’enfant à partir de 8 ans est la fluoxétine. logiques à type de troubles de l’équilibre (vertiges, lipothymies,
Notons qu’aux États-Unis l’escitalopram a également l’indication ataxie), de troubles sensoriels (engourdissement, paresthésies, sen-
dans la dépression de l’adolescent. Les antidépresseurs tricycliques sations de décharges électriques, troubles visuels), des troubles
ne sont pas recommandés et n’ont d’ailleurs pas fait la preuve moteurs rares. Ce tableau s’accompagne fréquemment de symp-
de leur efficacité dans cette population dans une méta-analyse tômes psychiatriques à type d’anxiété, d’agitation, d’irritabilité,
Cochrane datant de 2002 [98] . de trouble du sommeil. Ces troubles peuvent aller jusqu’à la pré-
La surveillance du risque suicidaire dans cette population doit sence d’un véritable état maniaque ou confusoagité.
être étroitement conduite par le prescripteur et ce particulière- Comment arrêter le traitement antidépresseur ? Comme rap-
ment en début de traitement. pelé par Lôo et Olié [104] , ce syndrome ne fait partie d’aucune de
Des doutes sur d’éventuelles anomalies du développement de la nos classifications internationales actuelles. Une des propositions
maturation sexuelle nécessitent une surveillance développemen- de ces deux auteurs pour prévenir cet effet est de diminuer la
tale et un bilan endocrinien chez les patients exposés pour une posologie d’environ 25 % par mois.
longue durée aux traitements ISRS [99] . Il s’agit d’une proposition qui donne un fil directeur, mais qui
L’objectif posologique est la dose minimale efficace. doit prendre en compte la symptomatologie du patient et la phar-
macocinétique de l’antidépresseur concerné : chaque patient a
Chez le sujet âgé une tolérance différente à la diminution posologique.
Certains antidépresseurs comme la fluoxétine ont des demi-vies
Il existe une double problématique chez le sujet âgé : la très longues, de l’ordre d’une semaine, et gardent des taux sériques
nette augmentation de fréquence des troubles dépressifs avec élevés même après l’arrêt. La durée nécessaire à l’élimination est, si

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37-860-B-71  Modalités d’utilisation des antidépresseurs

Tableau 8. depuis quelques années vers le regroupement de ces données et


Facteurs de risque supportant la prescription d’une maintenance du trai- plusieurs articles de 2013 posent la question de l’intérêt d’une telle
tement antidépresseur pour une durée de deux ans (d’après [22] ). approche [34, 35] .
Facteurs de risque Une autre approche serait de considérer qu’on se trompe depuis
le départ, notamment en ce qui concerne les différents systèmes
Sujet âgé monoaminergiques, dont la perturbation ne serait qu’une consé-
Au moins trois EDM préalables (trouble dépressif récurrent) quence et non pas la cause du trouble. Une des pistes actuelles
Épisode dépressif chronique (2 ans ou plus sans rémission) concerne l’hypothèse glutamatergique de la dépression [107] . Cette
théorie développée depuis les années 1990 présente aujourd’hui
EDM avec caractéristiques psychotiques
un centre d’intérêt majeur, depuis la découverte fortuite par
EDM d’intensité sévère l’équipe de Berman et al. d’un effet antidépresseur rapide après
Épisode ayant été difficile à traiter injection intraveineuse de kétamine. D’après les données à dis-
Comorbidité somatique et/ou psychiatrique significative(s) position, l’induction de cette réponse rapide, dans les heures qui
Rémission partielle (symptomatologie résiduelle) suivent l’administration, est secondaire au blocage des récepteurs
N-méthyl-D-aspartate au glutamate par la kétamine et à la stimu-
Histoire personnelle de récurrence après arrêt du traitement
lation secondaire des récepteurs AMPA au glutamate. In fine, ces
antidépresseur
modifications glutamatergiques conduisent à une synaptogenèse
EDM : épisode dépressif majeur. rapide dépendant notamment de la libération du principal fac-
teur neurotrophique cérébral, le brain-derived neurotrophic factor
(certains polymorphismes du gène au BDNF-Val66Met- rendent
la kétamine inefficace sur la synaptogenèse). Pour le moment,
l’on compte cinq demi-vies, d’environ un mois. La survenue d’un la difficulté est de trouver comment faire pour maintenir la
syndrome d’arrêt est donc moins fréquente ou de survenue moins réponse à la kétamine qui ne dure guère que quelques jours.
rapide. À l’opposé, la venlafaxine a une demi-vie courte, de l’ordre En agissant sur un autre système de neurotransmission, la capa-
de cinq heures, et est plus à risque de syndrome d’arrêt de survenue cité de la scopolamine à induire une réponse antidépressive
rapide. La paroxétine présente également des risques importants rapide modifie également notre conception des effets retardés des
de syndrome de sevrage, notamment liés à un phénomène de antidépresseurs.
rebond cholinergique. L’approche glutamatergique de la dépression est une décou-
Une deuxième question lorsque l’on parle d’arrêt verte qui permet à la recherche d’explorer de nouvelles pistes pour
d’antidépresseur est : quand arrêter ? Classiquement, lors d’un élaborer les antidépresseurs de demain.
épisode isolé la durée de traitement est de l’ordre de quatre à Un autre niveau de réflexion apporté par l’équipe de Liu
cinq mois après rémission (cf. supra). Dans le trouble dépressif est le déficit en magnésium (Mg2+ ). Les récepteurs NMDA sont
récurrent, il existe un risque de nouvel épisode dont la probabilité en configuration « bloquée » lorsqu’un ion Mg2+ est placé sur
est fonction de divers facteurs (Tableau 3). La question que l’on son récepteur, permettant une régulation. S’il existe un défi-
se pose devient : traitement à vie ou discontinu ? cit en magnésium extracellulaire, alors les récepteurs NMDA
Les recommandations canadiennes [22] montrent qu’il est dif- sont « hyperactivés » et laissent passer l’ion calcium (Ca2+ ). Cette
ficile d’établir un consensus sur cette question, et mettent en équipe a pu démontrer que l’augmentation extracellulaire en
balance le risque d’effets indésirables et le risque de récur- ion Mg2+ réduit le flux de Ca2+ au travers des récepteurs NMDA et
rences des patients. Ces recommandations proposent un profil entraîne une augmentation de la plasticité synaptique dans le cor-
de patients qui doivent bénéficier d’un traitement de mainte- tex préfrontal et l’hippocampe [107] . Le problème de cette approche
nance prolongé d’au moins deux ans (Tableau 8) sans renseigner est la très faible biodisponibilité du Mg2+ pour le cerveau.
davantage plus à distance. Même remarque pour les recom- D’autres approches de recherche s’intéressent à la substance
mandations européennes ou des institutions anglaises (NHS). P, à la voie cholinergique ou encore à des enzymes de cer-
Globalement, les recommandations proposent qu’après les deux taines cascades de signalisation intracellulaires (GSK3, mTOR,
ou trois années de traitement de maintenance, l’indication du AKT) qui sont des cibles indirectes de la plupart des traitements
traitement soit régulièrement revue et discutée, en fonction des psychotropes.
facteurs de risque de rechutes et des effets indésirables. Peu Ces recherches vont dans le sens d’une prise en charge qui per-
d’études permettent d’établir des recommandations plus à dis- mettrait au patient d’obtenir une réponse et une rémission plus
tance. Durant toute cette phase, la posologie ayant permis la rapide, et chez un plus grand nombre de patients, afin de dimi-
rémission doit être maintenue à pleine dose dans la mesure du nuer la durée d’évolution de l’épisode source de complications,
possible. d’une évolution négative de la maladie ou encore d’un impact
socio-médico-économique plus important.

 Perspectives
Plus la recherche avance et plus les éléments de preuves allant  Conclusion
vers le constat d’une multiplicité des syndromes dans la dépres-
sion sont nombreux et précis. Cette hétérogénéité est à la fois Les traitements antidépresseurs sont efficaces dans le trouble
clinique et biologique. Il existe de nombreuses pistes allant dépressif. La littérature internationale aide à mieux prescrire ces
d’hypothèses assez anciennes, telles que les anomalies de l’axe psychotropes et à déterminer des stratégies efficaces de prise en
hypothalamo-hypophyso-surrénalien ou inflammatoires [105, 106] à charge des patients. Ces traitements ont des indications dans de
des hypothèses regroupant des éléments plus actuels tels que les nombreuses pathologies psychiatriques, voire non psychiatriques.
découvertes en neuro-imagerie couplées à la génétique voire à Inversement, des traitements non classés dans les antidépresseurs
l’épigénétique ainsi qu’à la biologie cellulaire. Quelques exemples pourraient s’avérer efficaces dans la pathologie dépressive.
de données génétiques aident à percevoir certaines susceptibi- Des données récentes de la littérature semblent contredire cer-
lités telles que les polymorphismes du gène des récepteurs aux tains dogmes tels que le changement de classe thérapeutique en
glucocorticoïdes (NR3C1), de la mono-oxydase A, de gènes de cas d’inefficacité ou encore les durées nécessaires à l’activité anti-
récepteurs métabotropiques au glutamate ou encore de la gly- dépressive d’un traitement comme le montrent les études sur la
cogène synthase kinase 3␤ [89] . Ces données peuvent également kétamine ou la scopolamine.
aider à prédire la réponse [34] . Cependant, pris séparément ces Les nouveaux antidépresseurs ne sont pas dépourvus d’effets
paramètres n’ont pas de signification statistique suffisante pour indésirables et certains nécessitent des surveillances qui doivent
conduire à une utilisation large et aider le clinicien à déterminer être connues et respectées par les praticiens pour la sécurité des
le traitement qui sera efficace au patient. Autrement dit, on ne patients. Pour l’heure, on ne peut pas déterminer formellement
peut pas prédire la réponse. Les recherches actuelles se tournent le bon traitement au bon patient au bon moment. A contrario,

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Modalités d’utilisation des antidépresseurs  37-860-B-71

les recommandations nationales et internationales, précieuses [24] Bellamy V, Roelandt J, Caria A. Troubles mentaux et représentations
pour guider la prescription, souffrent de leur sous-utilisation de la santé mentale : premiers résultats de l’enquête Santé mentale en
dans notre spécialité : un effort est aujourd’hui nécessaire tant population générale. Direction de la recherche de l’évaluation et des
concernant la perception de ces enjeux dans la société que concer- statistiques. Paris: Inserm, Etudes et Résultats; 2004, 347p.
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R. Gaillard.
H. Lôo.
Service hospitalo-universitaire de santé mentale et de thérapeutique, Pôle XVe arrondissement, SHU addictologie, Centre hospitalier Sainte-Anne–Université
Paris Descartes, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Costemale-Lacoste JF, Gaillard R, Lôo H. Modalités d’utilisation des antidépresseurs. EMC - Psychiatrie
2015;12(1):1-15 [Article 37-860-B-71].

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