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Christophe Legrenzi
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Résumé :
Abstract:
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INTRODUCTION
Pour autant, l’immense majorité des décideurs ignore ces enjeux du fait d’une
comptabilité « verticalisée » construite historiquement pour mieux maîtriser les
dépenses par grande fonction de l’entreprise (Lorino, 1991). À l’époque de
l’élaboration des premières véritables comptabilités analytiques, les coûts
principaux étaient liés à l’achat de matière première ou de composants, et à
l’utilisation des machines, loin devant la masse salariale. Aujourd’hui, le travail
représente la majorité des dépenses des économies développées.
C’est pourquoi, il nous parait fondamental dans une économie en pleine mutation,
de présenter à la fois l’historique mais aussi les différentes définitions, périmètres
d’application et enjeux économiques tout en repositionnant ces concepts les uns
par rapport aux autres. L’objectif poursuivi est de mieux en comprendre les
interactions afin de fournir des éléments tangibles à nos décideurs en vue
d’optimiser l’usage et le pilotage de l’outil informatique au profit de la compétitivité
de leur entreprise.
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1. DEFINITIONS
1.1. INFORMATION
1.2. INFORMATIQUE
1.3. NUMERIQUE
Le terme « numérique » est de plus en plus usité dans notre vocabulaire. Il a
même tendance à se substituer à informatique induisant à la fois ambiguïté et
confusion. Pour preuve, en 2013, le syndicat professionnel du secteur informatique
et télécom, le « Syntec » Numérique, a décidé de rebaptiser les « SSII » - Société
de Services et d’Ingénierie en Informatique » en « ESN » - Entreprises de Services
du Numérique.
En fait, le terme « numérique » vient du latin « numerus » (« nombre », « multitude
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On y trouve dans ces 3 définitions en langue anglaise un rapport avec les chiffres :
les « digits » qui exprime clairement la conversion du réel analogique vers le
numérique. Exprimé autrement, « numérique », qualifie une représentation de
l'information par un nombre fini de valeurs discrètes, s’opposant à « analogique ».
Le terme « digital », appliqué à un ordinateur, est utilisé en langue anglaise depuis
1945. En 1964, l'Histoire générale des sciences présente « l'histoire des machines
dites numériques ou digitales ». Cette fois-ci le terme anglais est sans confusion
contrairement au terme français. Ainsi, digital est en anglais spécifique au
traitement informatique, sans l'ambiguïté que numérique a en français entre son
usage mathématique et son application aux ordinateurs.
Pour Wikipédia en français : « On dit numérique une information qui se présente
sous forme de nombres associés à une indication de la grandeur à laquelle il
s'applique, permettant les calculs, les statistiques, la vérification des modèles
mathématiques. Le calcul numérique se fait sur ces nombres, par opposition au
calcul algébrique, qui se fait sur des variables désignées par un symbole (…) »
C’est le secteur de l’informatique et des télécommunications qui a permis la
conversion des signaux électriques en suites de nombres, dans le but
d'automatiser les traitements et d’améliorer l'efficacité des transmissions de
données. La théorie de l'information associée à cette transformation indique que
tout message peut être codé sous forme numérique. La théorie de l'information est
une théorie probabiliste permettant de quantifier le contenu moyen en information
d'un ensemble de messages, dont le codage informatique satisfait une distribution
statistique précise. Ce domaine trouve son origine scientifique avec Claude
Shannon qui en est le père fondateur avec son article : « A Mathematical Theory of
Communications » publié en 1948 (Shannon, 1948 ; Shannon et Weaver ,1949).
L'une des caractéristiques fondamentales de cette théorie est l'exclusion de la
sémantique. La théorie de l'information est indifférente à la signification des
messages. Le sens d'un message peut pourtant être considéré comme essentiel
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Le système d’information est une notion complexe, dont la définition et les contours
ne sont pas toujours clairement établis, et qui est souvent confondu avec
informatique.
Avant d’évoquer la notion de système d’information, il nous faut parler de la notion
de système au travers notamment de la théorie générale des systèmes. C’est dans
les années 1940 à partir d’une collaboration entre Norbert Wiener, professeur de
mathématiques au MIT et Arturo Rosenblueth de la Harvard Medical School avec
l'ingénieur Julian Bigelow sur le développement d'appareils de pointage
automatique pour canons antiaériens qu’une théorie fondatrice voit le jour : « pour
contrôler une action finalisée (orientée vers un but), la circulation de l'information
nécessaire à ce contrôle doit former une boucle fermée permettant d'évaluer les
effets de ses actions et de s'adapter à une conduite future grâce aux performances
passées » (De Rosnay, 1975). C’est le principe de rétroaction (ou feed-back) selon
lequel un organisme réagit à son environnement en s’y adaptant progressivement.
C'est la naissance de ce que Wiener appelle la cybernétique » (Wiener, 1947) qui
a pour but principal l'étude des régulations chez les organismes vivants et les
machines construites par l'homme. Il faut comprendre que cette « méthode
comportementale d’étude » est alors totalement révolutionnaire car elle s’oppose
aux procédés traditionnels qui prônent l’analyse des phénomènes par leur
décomposition (ou dissection) et l’étude de leur fonctionnement interne.
Cette nouvelle méthode d’analyse scientifique sera formalisée par la suite par le
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La théorie générale des systèmes inspira des scientifiques aussi célèbres que
l’économiste et sociologue américain Herbert A Simon, qui a permis de mieux
expliciter le processus de décision tout en introduisant le concept de système de
traitement de l’information (Herbert A.S., 1969), ou le français Jacques Mélèse
pour l’analyse modulaire des systèmes de gestion (Mélèse J., 1972), ou encore
Jean-Louis Lemoigne qui inspira plus tard Hubert Tardieu dans la conception de la
méthode Merise sous la forme de système opérant, système de pilotage et
système d’information (Tardieu et al., 2000).
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En langue anglaise (Wikipédia, Cambridge dictionary), une fois de plus les sens et
définitions sont divers pour « Information system (IS) » :
- « A computer IS is a system composed of people and computers that
processes or interprets information.The term is also sometimes used in
more restricted senses to refer to only the software used to run a
computerized database or to refer to only a computer system. »
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1.5. SYNTHESE
Système
Informatique Numérique
d’Information
2. ENJEUX ECONOMIQUES
Ce qui est intéressant dans la figure ci-dessus est que l’on constate aisément la
disparité des enjeux entre informatique et système d’information, assimilé au
numérique, sur la base d’une simple valorisation monétaire. Ainsi, les coûts du
système d’information sont beaucoup plus importants que les seuls coûts
informatiques. Mieux, les données stockées sur les systèmes informatiques
constituent un actif immatériel très important. Cumulées depuis des années, le
patrimoine informationnel des organisations représente un montant près de dix fois
supérieur au budget annuel des systèmes d’information et cent fois supérieur au
budget annuel informatique.
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Pour arriver à évaluer ces enjeux économiques, une méthode d’estimation a été
utilisée pour chacune des définitions proposées. Elle repose à la fois sur les
ressources, les parties prenantes concernées, les taux d’utilisation des outils
informatiques ainsi que la part du travail consacrée à des traitements manuels de
l’information.
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2.4. ILLUSTRATION
A titre d’exemple, une entreprise a été choisie, filiale d’un grand groupe industriel
français du secteur de l’énergie, et spécialisée dans les interventions de
maintenance. Son budget annuel de fonctionnement est de l’ordre de 800 millions
d’euros employant près de 6000 personnes. Elle affiche des résultats
opérationnels en-dessous des standards du groupe, d’environ 20 millions d’euros
de bénéfices, soit une rentabilité de 2,5%.
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La culture de gestion est très orientée coût. Chaque dépense se doit d’être
pleinement justifiée avant d’être engagée, de l’embauche d’un stagiaire au
déplacement d’un collaborateur, l’acceptation se fait par un membre de la Direction
Générale.
Potentiel
Enjeux Gains estimés
d’optimisation
10% par centralisation,
homogénéisation des
Informatique 10 M€
outils et pratiques
1 M€
informatiques
10% à 20% au minimum
sur les usages
Numérique 70 à 90 M€
informatiques et les
7 à 18 M€
processus existants
20% à 40% en
numérisant et
Système
80 à 100 M€ dématérialisant des 16 à 40 M€
d’Information processus et tâches
manuelles
ne fait alors que la rigidifier, devenant par là-même un obstacle à l’efficacité des
services…/… l’informatisation s’est développée sans lien suffisant avec les
réflexions sur l’évolution des structures administratives et de l’organisation du
travail. L’informatique est restée ‘plaquée’ sur les schémas et les procédures
existants » (Le Garrec, 1992).
En résumé, David Norton identifie trois raisons qui empêchent les entreprises de
retirer tous les bénéfices de leurs investissements dans les technologies de
l’information (Norton, 1987) :
Nous avons été dirigés par une vision technologique
Nous n’avons pas su identifier les changements organisationnels
Nous ne possédons pas les outils nécessaires pour appréhender les
bénéfices
Loin d’avoir fait le tour des enjeux managériaux liés au numérique et aux systèmes
d’information, de nombreux axes de recherche s’ouvrent à commencer par la
mesure de plus en plus systématique et précise du poids du numérique et des
systèmes d’information de nos organisations, secteur par secteur, tout en mettant
en perspective les quatre concepts que sont : information, informatique, numérique
et système d’information. Les estimations données méritent d’être approfondies.
Comme ces quatre concepts sont intimement liés, il faut bien comprendre leurs
interactions. La performance de l’entreprise « numérique » du futur se joue bien au
confluent de ces notions.
Une autre voie à approfondir serait celle des facteurs de pilotage et de
gouvernance des systèmes d’information influençant le plus la performance
d’entreprise.
CONCLUSION
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BIBLIOGRAPHIE