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Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique

UNIVERSITE D’ORAN
FACULTE DE DROIT

Le contrat de distribution sélective


Etude comparée

Mémoire présenté pour l’obtention du diplômede


magistère en droit comparé des affaires
(étude comparée)
sous la direction de :

Pr. Dalila ZENNAKI

Présenté et soutenu publiquement par : Mustapha HOCINI

Membres du jury :

Président :Mustapha MenouerProfesseur

Encadreur :Dalila Zennaki Professeur

Examinateur : Fatiha ZanounMessabihi Maitre de conférence (A)

Année universitaire : 2011/2012


Je tiens à remercier sincèrement Madame le Professeur Dalila Zennaki, pour ses précieux conseils et le
temps qu’elle m’a accordé tout au long de la préparation de ce mémoire.

Qu’il me soit permis ici, de lui témoigner, ma profonde gratitude.

2
PRINCIPALES ABREVIATIONS

- al. : alinéa

- als. : alinéas

- art. : article

- arts. : articles

- Bull. : Bulletin des arrêts de la Cour de cassation. (chambre civile)

- C.A. : Cour d'appel

- Cass. com., : Cour de cassation. (chambre commerciale)

- Cass. crim., :Cour de cassation. (chambre criminelle)

- C. alg. com. : Code algérien de commerce

- C.civ. : Code civil

- C.civ.alg : Code civil algérien

- C. civ. fr : Code civil français

- C. com. : Code de commerce

- C. fr. com. : Code français de commerce

- ch. : chambre

-Coll. : Collection

- comp. : comparer

- Cons. conc. : Conseil de la concurrence

- C.J.C.E. : Cour de Justice des Communautés européennes

- comm. : commenté.

3
- D. : Recueil Dalloz

-doctr. : Doctrine

- Dr. : Droit

- éd. : édition

- ÉDIK. : Édition et diffusion Ibn Khaldoun

- Fasc. : Fascicule

- Gaz. Pal. : Gazette du Palais

- ibid. : au même endroit

-INC. : Institut national de commerce

-inf. : Infra

- J.C.P. : Jurisclasseur périodique (Semaine juridique)

-jur. : Jurisprudence

- J.O.C.E. : Journal officiel des Communautés Européennes

- J.O.R.A. : Journal officiel de la République algérienne

- L.G.D.J. : Librairie générale de droit et de jurisprudence

- Litec. : Librairie technique

- obs. : observations

- op. cit. : Option citée

-ord. : Ordonnance

-ord. Fr. : Ordonnance française

- p. : page

- pp. pages

-P.A : petites affiches

4
- préc. : précité

- PUF. : Presses Universitaires de France

-Règ : Règlement.

- Rec. : Recueil des arrêts de la Cour de Justice C.E.E

-Rev. Jur. Com. : Revue de jurisprudence commerciale

- R.J.D.A. : Revue de jurisprudence de droit des affaires

-R.I.D.C. : Revue internationale de droit comparé

- R.T.D.Civ. : Revue trimestrielle de droit civile

- R.T.D.Com. : Revue trimestrielle de droit commerciale

-R.T.D. Eur. : Revue trimestrielle de droit européen

- s. : suivant

- somm. : sommaire

- Trib. com. : Jugement du tribunal de commerce

-Trib. Corr : Jugement du tribunal correctionnel

-T.G.I. : Jugement du tribunal de grande instance

- t. : tome

-V. : voir

- vol. : volume

5
Introduction

Dans une société de consommation caractérisée par la production de masse, où


l’objectif essentiel des entreprises n’est plus de produire mais de vendre, la distribution se
révèle comme une fonction déterminante dans l’acheminement des produits du fabricant à
l’utilisateur ou consommateur final1.

Elément fondamental de la politique commerciale des fabricants, la distribution, qui permet


de mettre à la disposition du consommateur final les biens et services, consiste à sélectionner
et à gérer un ensemble de moyens pour que les produits soient disponibles au bon endroit,
dans les quantités voulues et dans les conditions les plus propices à susciter l’acte d’achat2. La
sélection est pratiquée plus particulièrement lorsqu’il s’agit de commercialiser des produits de
luxe ou de haute technicité dont la nature requiert un distributeur spécialisé disposant d’un
personnel qualifié et d’un point de vente approprié.

En effet, à ce type de produits sont associés une grande qualité, une réputation, un savoir
faire, une histoire, un prix distinctif et une communication haut de gamme qui, à peine de
n’avoir aucun sens, reposent nécessairement sur la technique de la distribution sélective. Cette
méthode de commercialisation apparue dans les années soixante-dix, permet aux fabricants de
produits de qualité de défendre leur image en s’assurant que leurs produits seront distribués
dans de bonnes conditions3.

Parallèlement à cet objet principal, l’objet secondaire du contrat de distribution sélective est
d’organiser une collaboration entre les parties dans le but commun d’accroître et de fidéliser
la clientèle. Afin d’instaurer la loyauté et l’équilibre des relations commerciales, les pouvoirs
publics gardent un œil sur cette collaboration et insistent sur la liberté du distributeur

1
D. LEGEAIS, Droit commercial, Sirey, 1998, 12ème édition, p. 330.

2
A. DAYAN, Manuel de la distribution, Ed. d'Organisation, Paris, 1981, p. 03.

3
J. J. BURST et R.KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence », RTD com,
1978, p. 475.

6
notamment en matière de fixation du prix de revente, mais attribuent néanmoins un droit de
contrôle au fabricant propriétaire de la marque et promoteur du réseau4.

Suite à un long combat mené devant les tribunaux et les autorités de concurrence en France,
les entreprises de luxe ou de haute technicité ont désormais le droit de mener à bien la
stratégie commerciale qui leur convient aussi bien que le droit de choisir les détaillants qui
répondent à leurs critères d’exigence et seront capable de contribuer par leur action au
développement de l’image de marque. Le choix des distributeurs aptes à revendre les produits
du fabricant se succèdera par la conclusion des contrats cadres mettant à la charge des parties
un ensemble d’obligations qui, aussi diverses soient-elles, peuvent être identifiées aux effets
réels du contrat.

Ainsi, le contrat de distribution sélective est celui par lequel « un fournisseur s’engage à
approvisionner dans un secteur déterminé un ou plusieurs commerçants qu’il choisit en
fonction de critères objectifs de caractère qualitatif, sans discrimination et limitation
quantitative injustifiées et par lequel le distributeur est autorisé à vendre d’autres produits
concurrents »5.

Cet accord consiste donc pour un fabricant à choisir des distributeurs afin de maintenir le bon
renom de sa marque. En outre, le contrat de distribution sélective concerne essentiellement les
produits de luxe, de prestige ou de marque, comme les parfums, ou encore les produits de
haute technicité ou ceux qui présentent une originalité.

De nature spéciale, ce contrat est une création de la pratique contractuelle du monde des
affaires. La distribution sélective se situe au carrefour de plusieurs disciplines juridiques. Il
s'agit d'un contrat assujetti non seulement aux règles du droit des obligations telles que
définies par le Code civil, mais également à des dispositions particulières issues de divers
textes6. La principale limite à la liberté des parties est constituée par le droit de la
concurrence7.

4
MARIE-LAURE ALLAIN. CLAIRE CAMBOLLE, « Les relations entre producteurs et distributeurs : bilan et limites
de trente ans de régulation ».http://ceco.polytechnique.fr/.

5
La définition est tirée de l’arrêt de principe Ninna Ricci (crim. 3 Nov. 1982, Bull. crim., n° 258, Inf. rap. Gavalda
et Lucas de Leyssac, Gaz. Pal., 1982.2.658, note Marchi).
6
Loi n°89-02 du 7 février 1989, modifiée et complétée, relative aux règles générales de protection du
consommateur J.O.R.A. du 08 février 1989, n° 06, p. 114 ; Décret exécutif n°97 - 37 du 14/01/1997,
7
Les contrats de distribution sélective sont en effet des contrats organisant des réseaux.
Or, tout réseau constitue une entente verticale susceptible de porter atteinte aux règles du droit
de la concurrence8. En d’autres termes, si le fabricant est libre, en vertu du principe de la
liberté contractuelle, de choisir le mode de commercialisation de ses produits, la limitation du
nombre des revendeurs par la sélection est de nature à porter atteinte au principe de la libre
concurrence entre les agents économiques9.

Face à ce paradoxe, il convient de se demander si un fabricant de produits de luxe ou de haute


technicité peut librement recourir au système de la distribution sélective ?

Le droit communautaire et le droit français ont posé comme principe, la condamnation


générale de l’élimination de concurrents sur le marché10. Néanmoins, pour ne pas entraver la
liberté du fabricant de choisir le circuit qui convient à ses produits, les contrats de distribution
sélective ont été soumis à l’examen des autorités compétentes pour appliquer le droit de la
concurrence. Sur ce point, la question essentielle sera de savoir si ces contrats sont
compatibles avec les exigences du droit de la concurrence.

Le droit de la concurrence français, depuis l’ordonnance de 1986, inspirée par le droit


communautaire, jusqu’aux textes les plus récents, a eu une influence immense et durable sur
le développement du droit de la concurrence algérien.

définissant les conditions et modalités de fabrication, de conditionnement, d’importation et de


commercialisation sur le marché national de produits cosmétiques et d’hygiène corporelle ( JO N° 04
/ 1997 ) ; Ordonnance n°03-03 du 19 juillet 2003, modifiée et complétée, relative à la concurrence
J.O.R.A. du 20 juillet 2003, n°43, p.21 ; Loi n°04-02 du 23 juin 2004, modifiée et complétée, fixant les
règles applicables aux pratiques commerciales, J.O.R.A. du 27 juin 2004, n°41, p.3 ; Décret exécutif
n°07-390 du 12 déc. 2007 fixant les conditions et modalités d’exercice de l’activité de
commercialisation de véhicules automobiles neufs, J.O.R.A. du 12 décembre 2007, n°78.
7
J. M. HENRIOT-BELLARGENT, Consécration de la distribution sélective des produits de parfumerie de marque
aux plans économique et juridique : Gaz. Pal. 1985, 2, doctr. p. 406.

8
PH. MALAURIE ET L. AYNES, Droit civil, Les contrats spéciaux, Defrénois, 3éme éd., 2007, p. 256.

9
Y. SERRA, Le droit français de la concurrence, Dalloz, coll. « Connaissance du droit », 1993, p. 12.

10 er
Article 81§1 du traité de Rome pour le droit européen et articles 7, 8 et 36-2 de l’ordonnance du 1
décembre 1986 pour le droit français.

8
En effet, le législateur algérien s’est inspiré de son homologue français pour concevoir un
cadre juridique efficace en matière de concurrence et des dispositions sensées assurer le
passage du système d'organisation centralisée en place à celui d'une économie de marché.
L’ouverture de l’économie algérienne sur son environnement régional et international, par la
future adhésion à l‘OMC et la mise en œuvre des accords d’association avec l’Union
Européenne et de libre-échange avec d’autres pays, avait imposé une harmonisation de la
réglementation relative à la concurrence11.

S’il est indispensable d’être attentif au droit français puisqu’il constitue la source d’inspiration
du droit national, il s’agira également de mesurer la portée des textes algériens face à cette
problématique de la validité de la distribution sélective.

La distribution sélective repose sur un processus de sélection des points de vente par le
fabricant selon des critères objectifs. L’ensemble des points de vente sélectionnés constituera
un réseau permettant d’acheminer le produit au consommateur final. La sélection, pour être
efficace, doit être complétée par des mesures visant à maintenir l’étanchéité du réseau, c'est-à-
dire à assurer que seuls des revendeurs agréés mettent sur le marché les produits en
empêchant les revendeurs non agréés de se procurer les produits contractuels. Certains
distributeurs extérieurs au réseau n'hésitent en effet pas à s'affranchir des contraintes d'un
réseau fermé pour revendre indument des produits sans l'autorisation du responsable du
réseau12.

On peut se demander, face à cette situation, si les législateurs français et algériens ont prévu
des dispositions pour lutter contre ces pratiques parfois désastreuses pour l’image de marque,
et si les textes en vigueur permettent de protéger efficacement le contrat de distribution
sélective.

Toutefois, il s’agira plus exactementde vérifier si l’appréciation de cette variante des contrats
de distribution se fait de la même manière, selon les mêmes critères, qu’il s’agisse du droit

11
BERNARD CUBERTAFOND, Professeur des universités à Paris 8, « L’Algérie face aux modèles administratifs et
politiques concurrents » In La responsabilité du gestionnaire public local, Actes du colloque franco-algérien
organisé à Rennes les 25 et 26 octobre 2007 par la Chambre régionale des comptes de Bretagne et la Chambre
territoriale des comptes d’Oran, sous la direction de Michel Rasera, Presses universitaires de Rennes, collection
« L’Univers des normes », 2008, 284 p., p.19 à 30. www.forcesdudroit.wordpress.com

12 e
D. FERRIER, Droit de la distribution, Litec, 4 éd., 2006, p. 277.

9
français ou du droit national. Une comparaison entre la méthode adoptée par les autorités de
contrôle françaises et celle adoptée par les autorités algériennes est alors très intéressante, elle
nous permettra d’étudier de manière approfondie les critères communs utilisés par les deux
systèmes, mais aussi de déceler les différences d’appréciation s’il en existe, il sera alors
possible de dire si l’objectif de développement et d’harmonisation du droit algérien et de son
application a été atteint ou non.

En effet, l’étude présentée ici est une étude comparée, néanmoins son enjeu principal
consistera à examiner beaucoup plus les textes algériens.

L’analyse de la réglementation sera accompagnée tant par l’illustration de la jurisprudence


communautaire et française, que par quelques arrêts de la jurisprudence algérienne qui, sans
être abondante en matière de contrats de distribution, détient des positions qu’il convient de
citer.

En effet, tout à l’inverse du système français, le fait que la législation sur la concurrence soit
récente dans le système juridique et économique algérien ne permet pas d’avoir, pour
l’instant, une abondance de jurisprudence ou de doctrine surtout dans le cadre d’un contrat de
distribution sélective et l’appréciation dans la pratique de ce contrat des situations de
positions dominantes ou l’existence d'ententes ou de concentrations dans la sphère
économique algérienne13.

Quoi qu’il en soit, la distribution sélective semble avoir la cote dans les pays développés en ce
qu’elle permet de valoriser les produits et d’améliorer le service rendu aux consommateurs.
Cependant, cette pratique n’est pas toujours possible et lorsqu’elle est envisageable, elle
implique des contraintes et le respect de certaines règles qui prohibent les accords ayant pour
objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence.

Le principe d’un réseau de distribution sélective consiste pour un fabricant à choisir, sur la
base de critères définis, les distributeurs qui seront les seuls agréés à distribuer ses produits.
Aux termes du contrat, le fabricant s’engage à ne vendre les produits qu’aux distributeurs
agréés et ces derniers ont obligation de n’approvisionner que d’autres distributeurs agréés ou
les consommateurs finals.
13
R. POESY, le rôle du conseil de la concurrence et du juge judiciaire en Algérie et en France en droit des
pratiques anticoncurrentielles, aspects procéduraux, in L’Algérie en mutation, les instruments juridiques de
passage à l’économie de marché, Sous la direction de R. CHARVIN et A. GUESMI, L’Harmattan, 2001, p. 161.

10
Or, des distributeurs clandestins parviennent fréquemment à se procurer les produits
contractuels en vue de la revente dans des conditions qui échappent au contrôle du fabricant.
Toutefois, ce dernier peut agir en justice contre le distributeur agréé responsable de la
« fuite » et contre le distributeur hors réseau responsable d’une revente illicite de produits
couverts par un réseau sélectif.

C’est pourquoi l’étude de la distribution sélective débouche sur deux aspects indissociables.
Elle couvrira dans un premier temps la caractérisation de ce mode de distribution, c’est à dire
de la déterminer puis d’en exposer les étapes ; en second lieu l’appréciation de la distribution
sélective, c’est à dire vérifier sa validité au regard du droit de la concurrence puis constater
son efficacité à travers les avantages qu’elle présente et l’étanchéité du réseau grâce à des
mesures de protection prévues par la loi.

A cet effet, seront consacrées deux parties :

La première relative à la caractérisation de la distribution sélective et la seconde aura trait à


l’appréciation de ce contrat de distribution.

11
Première partie : Caractérisation de la distribution sélective

Voilà plus de trente ans que la pratique de la distribution sélective a été reconnue par les
autorités de la concurrence14 et pourtant elle ne dispose toujours pas d'une détermination
générique susceptible de s'imposer15. Cependant une telle détermination s'avère indispensable
si l'on veut bien comprendre la spécificité de la figure et mesurer combien elle est seule à être
adaptée à la vente de produits de luxe ou de haute technicité.

La distribution sélective suscite encore plus d'intérêt quand il s'agit d’analyser le


fonctionnement des relations contractuelles des parties, en raison de l'importance des
investissements et des enjeux économiques en question. Dans ce cas, le contrat qui encadre
les relations d'affaires entre le producteur et le distributeur devra se soumettre à certaines
règles quant à sa formation, ses effets et son extinction. Dans tous les cas, la distribution
sélective représente un système organisé d'engagements réciproques, particulièrement adapté
à des relations d'affaires complexes destinées à réaliser certains objectifs économiques.

Compte tenu de ce qui précède, il conviendra donc, dans un premier temps, de déterminer la
distribution sélective en démontrant que ce type de contrat, relativement nouveau, tire sa
légitimité de caractéristiques juridiques et économiques, pour ensuite analyser les
conséquences de la sélection des distributeurs. Dans un deuxième temps, il apparaît
indispensable de se référer aux étapes de ce contrat, pour être à même de démonter les règles
applicables aux relations établies entre le fournisseur et le distributeur.

14
Arrêts de la CJCE du 11 décembre 1980, L'Oréal, affaire 31/80, Rec. p. 3775, point 16, interprété à la lumière
de l'arrêt du 25 octobre 1977, Metro I, affaire 26/76, Rec. p.1875, points 20 et 21 et de l'arrêt du Tribunal du 27
février 1992, Vichy/ Commission, affaire T-19/91, Rec. p. II-415, points 69 à 71 cité par Ferrier.

15
J. M. HENRIOT-BELLARGENT, Consécration de la distribution sélective des produits de parfumerie de marque
aux plans économique et juridique : Gaz. Pal. 1985, 2, doctr. p. 406.

12
Chapitre 1 : Détermination de la distribution sélective

La distribution sélective découle du souci des producteurs d’assurer une commercialisation


optimale de leurs produits par un réseau fermé de distributeurs spécialisés. Cette
commercialisation se fait sous l’égide d’un contrat cadre par lequel les partenaires
économiques font choix de leur stratégie commerciale et fixent le contenu de leurs
engagements pendant toute la durée de leurs relations et au jour de la dissolution.

Pour bien déterminer ce contrat, il faut retrouver, à travers une analyse générale, les caractères
propres à l’identification de la distribution sélective (Section 01). Mais cela ne suffit pas en
raison de la nature spéciale de ce contrat qui de mande une étude du fonctionnement de la
distribution sélective (Section 02).

Section 01 : l’identification de la distribution sélective

Il est intéressant de constater que la distribution sélective était inconnue du vocabulaire


juridique il y a peu, et que c’est sous l’influence du droit européen que s’est développée la
notion de ce système de distribution.

Ainsi, pour bien cerner la notion de la distribution sélective, on cherchera d’abord à l’analyser
sous différentes approches (§1), avant de mettre l’accent sur son particularisme en indiquant
ce qui la distingue des autres contrats de distribution (§2).

13
Paragraphe 01 : l’analyse de la distribution sélective

Pour rendre compte de la complexité de la distribution sélective, ce contrat a été apprécié


sous l’angle juridique(A) puis économique(B). Ces différentes approches ont permis
d’éclairer d’un jour nouveau cette pratique et de lui donner une certaine légitimité.

A) L’approchejuridique

Les nécessités des affaires, l’imagination des praticiens et le principe de la liberté


contractuelle sont à l’origine de la création et du foisonnement des contrats de distribution 16.
Pendant longtemps le commerce était essentiellement conçu comme l’activité du fabricant lui-
même qui se limite à la production des biens et à la vente directe à une clientèle avec laquelle,
il entretenait un dialogue constant et des relations cordiales17.

Cependant, avec l’accroissement et la diversification de la production s’est imposée la


nécessité d’une intermédiation dans le domaine des produits et services, c’est à dire une
fonction de commercialisation de la production ou de la création d’un fournisseur vers le
destinataire final qu’est le consommateur.18

16
P. PIGASSOU : "La distribution intégrée" , RTD com 1980, p. 476.

17
J. B. BLAISE, Droit des affaires, 2e éd., coll. « manuels », Paris, LGDJ, 2000, p. 475.

18
D. FERRIER, op. cit, p. 3.

14
Il est apparu alors, la fonction de la distribution sous forme de contrats variés suscitant un
encadrement juridique qui, fondé au départ sur le seul principe de la liberté contractuelle, a
subi des limitations progressives dans l’intérêt général et dans l’intérêt de certaines catégories
de cocontractants.19

Compte tenu de l’importance de cette fonction et du dépassement des relations entre un


fournisseur et un seul distributeur, il est apparu également la technique d’organisation d’un
réseau regroupant tout un ensemble de distributeurs autour d’un fournisseur20. Ce dernier va
choisir le type de réseau qu’il souhaite créer et ce, en fonction des nécessités de la distribution
de ses produits. S’agissant des produits de luxe ou de haute technicité, il pourra se tourner
vers un réseau de distribution sélective. Le principe de ce type de réseau consiste pour un
fabricant de produits d’une certaine nature à sélectionner, sur la base de critères définis, les
distributeurs qui seront les seuls habilités à faire partie de son réseau21.

Cette technique de commercialisation engendre de multiples problèmes juridiques. Elle se


matérialise effectivement par la mise en place d’un réseau qui repose pratiquement sur un
contrat cadre. Ce contrat cadre consacre l’engagement du fabricant et ceux de ses revendeurs
sélectionnés sur la base de critères non discriminatoires et préalablement définis 22. De ce fait,
les accords de la distribution sélective requièrent, pour leur validité, l’application du droit des
contrats. Naturellement, le contrat de distribution sélective doit être conforme aux règles de
l’ordre public et en particulier au droit de la concurrence.

Par ailleurs, la distribution sélective suppose l’exclusion de commerçants qui ne bénéficient


pas de l’agrément du fabricant. Ce dispositif suscite alors deux types de problèmes juridiques.

En premier lieu, le propriétaire du réseau sélectif se trouve confronté au principe de la liberté


du commerce et de l’industrie et des règles de l’interdiction des ententes anticoncurrentielles
et pratiques discriminatoires. Son système sera, en principe, également mis en cause par la

19
C. THIBIERGE- GUELFUCCI, Libres propos sur les transformations du droit des contrats, RTD civ. 1997, p. 353.

20
A. SAYAG, Le contrat-cadre. 2. La distribution, Etudes du CREDA, Paris, Litec, 1995. p. 76.

21
JEAN -PIERRE CHAMOUX ET HENRI LEPAGE, Distribution sélective et droit de la concurrence : critique d’une
vision néoclassique, Journal des Economistes et des Etudes Humaines, vol.7 numéro 4, décembre 1996.

22
F. COLLART- F. DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, Dalloz 2006, 5ème éd,
coll.Précis, p. 263.

15
réglementation du refus de vente, désormais abolie en droit français 23. En second lieu,
l’écoulement des produits par voie sélective soulève un conflit lorsque les points de vente non
agréé parviennent néanmoins à se procurer les articles réservés au réseau sélectif pour les
revendre aux consommateurs.

D’un coté, le comportement de ces revendeurs parallèles semble juridiquement fondé


puisqu’en vertu du principe de la relativité des conventions, le contrat de distribution sélective
ne leur est pas opposé. De l’autre, la revente clandestine des produits cause un préjudice
certain au fabricant dont l’organisation du réseau est mise à mal et dont l’image de marque
des produits peut indubitablement souffrir24. De plus, le circuit de distribution sélective des
produits et/ou services de haute renommée se limite rarement au territoire national et dépasse
les frontières du pays d’origine du fabricant, les conflits qui en résultent prennent souvent une
dimension internationale25.

En droit français et algérien, la distribution sélective est une activité commerciale qui consiste
en l’achat de produits ou services en vue de les revendre. En effet, le législateur algérien
qualifie l’activité de la distribution, en raison de son objet, d’un acte de commerce. Or, le
Code de commerce ne définit pas l’acte de commerce ; il se borne à donner respectivement
dans ses articles 2, 3 et 4 une énumération des actes de commerce par leur objet, par leur
forme et par leur accessoire26.

Force est de constater que tous les actes de commerce prévus par ces articles ont un but
lucratif, intéressé. Par déduction, l’acte de commerce doit nécessairement être un acte
spéculatif. Mais, le critère de la spéculation ne semble pas à lui seul suffisant, puisque de
nombreuses entreprises de nature civile ont un but lucratif, comme les professions libérales

23
O. GAST ; GRILLAULT LAROCHE, HAYETTE, La distribution sélective et la franchise, JCP E, n° 50, 14/12/2000,
pp. 36-46.

24
A. THALMANN, La protection des réseaux de distribution contre le commerce parallèle. Etude comparée des
droits européen, français, anglais, allemand et suisse, Libraire Droz, Genève 2001, p. 136.

25
G. VIRASSAMY et M. BEHAR-TOUCHAIS, Les contrats de la distribution, LGDJ, 1999, p. 342.

26
F. ZERAOUI-SALAH, Traité de droit commercial algérien : les actes de commerce, le commerçant et l’artisan,
les activités commerciales réglementées, le registre de commerce, Editions Edik, 2003, p. 67.

16
(avocats, médecins, architectes, experts comptables..), ou encore des sociétés civiles ou
agricoles27.

Etant par excellence un acte d’entremiseeffectué dans un but de profit, la distribution sélective
est déclarée à juste titre, au sens de l’article 02 du code de commerce, un acte de commerce.
Corrélativement, toute personne exerçant la distribution sélective de manière habituelle et
professionnelle acquiert la qualité de commerçant. Est sensé également avoir cette qualité, le
fabricant des produits objet du contrat de distribution sélective28.

Prévue à l’article premier du code de commerce algérien, la qualité de commerçant est


attribuée à toute personne physique ou morale qui exerce des actes de commerce et en fait sa
profession habituelle, sauf si la loi en dispose autrement. Il convient de rappeler que le
législateur a, par la réforme survenue en 199629, ajouter plus de précision à l’article premier
en indiquant que le commerçant peut être personne physique ou morale 30. La société
commerciale en est la figure essentielle du commerçant personne morale. Toutefois, la société
ne peut bénéficier de la personnalité morale qu’à compter du jour de son immatriculation au
registre du commerce31.

Aux termes de l’article 01 bis du code de commerce algérien, le contrat établissant le rapport
entre le fournisseur et son distributeur agréé est régis par des règles qui sont soit issues du
code commerce, soit issues du code civil, soit, le cas échéant, issues des usages de la
profession commerciale32.

27
Pour atténuer la distinction qui existe entre la société civile et la société commerciale et en se basant sur
l’article 215 du code de commerce, un auteur algérien écrit : « la société civile est néanmoins soumise, en tant
que personne morale de droit privé, à la procédure de règlement judiciaire et de faillite dès la cessation de
paiement ». M. SALAH, Les sociétés commerciales, t. 1, Les règles communes- La société en nom collectif- La
société en commandite simple, éd. Edik, 2004, p. 13.

28
Le législateur algérien considère la fabrication comme une opération de production. (art. 03 de la loi n°09-12
relative à la protection du consommateur et la répression des fraudes.)

29
Ord. N° 95-06 relative à la concurrence du 25 janvier 1995, J. O. R. A. du 22 février 1995, n°09, p.13.

30
Avant la réforme de 1996, l’article premier du code de commerce disposait comme suit : « sont commerçants
ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle ».

31
Art. 549 du code algérien de commerce

32
L’usage est, comme la coutume, une source non écrite de droit ; il s’est distingué en ce que la coutume est
impérative alors que l’usage est une règle supplétivefondée sur une volonté présumée. En droit civil, coutume
17
Les premières font, essentiellement, fonction de règles spéciales déterminantes pour la
profession et la protection du commerçant, les secondes commandent la validité du contrat
quant à ses conditions générales de fond et de forme, les dernières, lorsqu’elles sont
suffisamment anciennes, constantes et régulières, s’appliquent obligatoirement en cas de
silence du contrat33.

Par ailleurs, le contrat de distribution sélective est soumis à une législation spéciale qui, en
raison des engagements régionaux et internationaux de l’Algérie, aspire par son contenu vers
une harmonisation avec le droit des pays économiquement avancés. Cette législation repose
sur un ensemble constitué pour l’essentiel de trois textes fondamentaux :

La loi n° 89-02 du 7 février 198934 relative aux règles générales de protection du


consommateur abrogée récemment par la loi n° 09-0335 relative à la protection du
consommateur et de la répression des fraudes. Ainsi, ce dernier texte se veut rigoureux quant
aux principes qu’il fixe et dissuasive dans son application par référence aux préoccupations de
l’Etat algérien liées à la protection de la santé et de la sécurité du consommateur.
L’ordonnance n° 03-03 du 19 juillet 2003 relative à la concurrence modifiée et complétée
par le législateur en 200836 pour s’appliquer aux activités de production, de
distribution et de service y compris l'importation et celles qui sont le fait de personnes
morales publiques, d'associations et de corporation professionnelles quels que soient leur
statut, leur forme ou leur objet. Les principales mesures de cette nouvelle loi ont porté
également sur l’élargissement des membres du conseil de la concurrence et son placement

et usage ont peu d’importance car la législation écrite est très développée. Au contraire, l’usage tient une
grande place en droit commercial, surtout au plan international (droit du commerce international avec les
Incoterms notamment).

33
F. ZERAOUI-SALAH, op. cit, p. 39.

34
Loi n° 89-02 du 7 février 1989 relative aux règles générales de protection du consommateur J.O.R.A. du 08
février 1989, n° 06, p. 114.

35
La loi n° 09-03 du 25 février 2009 relative à la protection du consommateur et à la répression des fraudes
J.O.R.A. N° 15 du 8 mars 2009.

36
La loi n° 08-12 du 25juin 2008 modifiant et complétant l'Ordonnance n° 03-03 du 19 juillet 2003 relative à la
concurrence J.O. R.A. N° 36 / 2008.

18
auprès du ministre du Commerce alors qu’il était sous l’empire de l’ancien textesous l'autorité
du Chef du gouvernement37.

Aussi, l’arsenal juridique algérien en matière de régulation des activités commerciales s’est
enrichis récemment par l’élaboration de la loi n° 04-02 du 23 juin 2004 fixant les règles
applicables aux pratiques commerciales. Dans un but d’efficacité, le législateur algérien a
doté tous ces textes de dispositions pénales prévoyant des sanctions (généralement de fortes
amendes) qui frappent les contrevenants, lesquels engagent également leur responsabilité
civile selon les règles du droit commun de la responsabilité (existence d’une faute, survenance
d’un dommage et lien de causalité entre la faute et le dommage), pour la réparation civile du
préjudice subi par un concurrent.

Du reste, la distribution sélective est un secteur utilisant des moyens humains, matériels et
intellectuels pour faire passer ses produits de nature spéciale, de leur état de production à leur
état de consommation38. Afin de bien comprendre ce processus, l’analyse se ferra ci-après
sous l’angle économique.

B) L’approche économique

La distribution sélective s’analyse comme une technique choisie par un producteur et selon
laquelle ses produits et/ou services sont diffusés uniquement par des revendeurs sélectionnés
sur la base de critères objectifs et clairement définis. Ce mode de distribution constitue alors
au plan de l’analyse économique une pratique verticale restrictive de concurrence mais qui
demeure néanmoins agréée par les autorités de la concurrence lorsqu’elle permet d’obtenir
certains avantages économiques39.

37
D. ZENNAKI, Droit de la concurrence, cours de magistère, Faculté de droit, Université d’Oran, 2010/2011.

38
Le processus de mise à la consommation regroupe l’ensemble des étapes de production, d’importation, de
stockage, de transport et de distribution aux stades de gros et de détail. (art. 03 de la loi n° 09-03 relative à la
protection du consommateur et la répression des fraudes.)

39
J. –M. HENRIOT-BELLARGENT, Consécration de la distribution sélective des produits de parfumerie de marque
aux plans économique et juridique : Gaz. Pal. 1985, 2, doctr. P. 406.

19
Toutefois, si la distribution sélective limite directement le nombre des revendeurs et rend le
produit juridiquement indisponible, comment expliquer que l’analyse économique qui,
généralement, privilégie la concurrence loyale par rapport à toute autre fonctionnement des
marchés, ait pu ainsi admettre une telle pratique verticale restrictive ?

Il est en effet admis que les règles du droit de la concurrence ont pour but de concilier l’intérêt
général et la liberté des agents économiques40. Dans le cas de la distribution sélective, les
offreurs des produits de luxe peuvent accéder librement aux marchés et les consommateurs
peuvent rechercher les biens qui leur procurent la plus grande satisfaction pour un budget
donné41.

De ce fait, la distribution sélective a pu obtenir la reconnaissance du droit de la concurrence


en présentant des avantages pour le fabricant et ses revendeurs ainsi que pour les
consommateurs. En effet, le distributeur admis dans un réseau de distribution sélective trouve
de nombreux avantages en signant le contrat. Le plus évident est d’avoir dès l’ouverture de
son point de vente un chiffre d’affaires appréciable dont l’importance augmentera en fonction
de la notoriété du fabricant et l’aura de sa marque42.

D’autre part, la distribution sélective est une certitude de clientèle, c'est-à-dire dès son entrée
dans le réseau, le distributeur agréé verra un courant de clientèle se porter chez lui attiré par
l’enseigne et la marque du concédant. Il est des cas où le fabricant fournira immédiatement à
chaque membre du réseau un portefeuille de clients non pas potentiels mais certains dans sa
zone. L’avantage pour les revendeurs est alors manifeste. Autrement dit, la distribution
sélective limite les risques pour les revendeurs43.

Au-delà de ces avantages, la distribution sélective permet au fabricant et aux membres de son
réseau d’atteindre plusieurs types d’objectifs :

40
Y. SERRA, Le droit français de la concurrence, Dalloz, coll. « Connaissance du droit », 1993, p. 4.

41
N.CUSACQ, Le luxe et le droit, RTD com 2002, p.605.

42
V. SELINSKY, la distribution sélective des produits de marque, Cah. Dr. entr, 1984/2, 17.

43
F. FOURNIER, « L'équilibre des réseaux de franchise de parfumerie de luxe », dans Recueil Dalloz, 2002, p. 793

20
-offrir aux consommateurs des services de qualité après vente ou avant vente, notamment des
le cas des produits complexes ou de luxe pour lesquels l’image de marque doit être défendue
et préservée auprès des clients.

-s’assurer que le distributeur agréé fournira aux consommateurs un produit authentique et de


qualité loin de toute forme de contrefaçon.

-réduire l’incertitude subie par le revendeur agréé pour faire établir un climat de confiance
permettant à ce dernier de réaliser pleinement les objectifs du fabricant44.

Certainement, le distributeur agréé a été admis par le fabricant en raison de ses compétences ;
il est soumis à des conditions préalables pour intégrer le réseau et à un contrôle rigoureux une
fois faisant partie du réseau. Autant d’éléments dont vont bénéficier ses propres clients. En
toute hypothèse, la compétence du distributeur agréé se traduira par des conseils plus
pertinents et des services plus complets et mieux assurés que ceux des distributeurs ordinaires.

En effet, il incombe au distributeur agréé sous l’égide du fabricant de conseiller de façon


pertinente le client et pour ce faire, le cas échéant de l’interroger, de lui demander des
explications supplémentaires sur ses besoins, notamment, dans les domaines complexes et
nouveaux tel l’informatique où, d’une part il existe des composants multiples dont le choix
dépend de l’usage auquel le matériel est destiné et où, d’autre part, certains clients potentiels
sont inexpérimentés ; le rôle du distributeur agréé devient crucial45.

Au distributeur agréé revient également la tâche d’assurer le service après vente qui nécessite
l’existence d’installations techniques disposées et entretenues selon les normes du fabricant et
la constitution de stocks de pièces de rechange ainsi qu’un personnel formé à un niveau de
compétence convenu capable d’intervenir d’une façon efficace et rapide auprès des
consommateurs46.

44
M. NESSEMBAUM, « l’analyse économique de la distribution sélective », RJDA, Francis Lefebvre, 1995, n° 4, p. 316.

45
J.J. BURST ET R.KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence » RTD com,
1978, p. 475.

46
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p. 26.

21
Pour ces raisons, l’analyse économique de la distribution sélective a été
considérablement développée durant les quarante dernières années et différentes contraintes
ont été levées pour mieux s’adapter au monde des affaires dans lequel les produits et/ou les
services ne sont pas toujours homogènes.

En définitive, si l’analyse économique a pu, progressivement, admettre la distribution


sélective, il faudrait encore que le fabricant fasse bénéficier ses revendeurs d’avantages tout
en réduisant l’incertitude de leur environnement commercial, mais il faudrait également
contrôler que ses directives seront bien mises en application47. De plus, cette pratique
restrictive doit avoir pour effet d’apporter des avantages aux utilisateurs grâce à des conseils
compétents à la clientèle et à des prestations de services améliorées 48.

Il est à déduire des deux approches, juridique et économique que la distribution sélective
répond à une logique particulière qui met en évidence sa spécificité.

Paragraphe 02 : la spécificité de la distribution sélective

Les contrats de distribution sont nés des efforts des producteurs pour proposer des techniques
de diffusion de leur production via des professionnels de la vente.49Or, ces techniques ne sont
pas toujours aisées à présenter tant elles empruntent des formes juridiques différentes et
présentent des caractéristiques propres à chaque contrat de distribution.

47
J.J. BURST ET R.KOVAR, op. cit, p. 475.

48
Déc. Yves Saint Laurent, 16 déc 1991 Gaz. Pal. 1992 n° 136-137, p. 31.

49
D. MAINGUY, Contrats spéciaux, Dalloz 2006, p. 223.

22
La spécificité du contrat de distribution sélective fut expressément reconnue en France dès
1982 par trois arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation.50

Afin de démontrer cette spécificité, Le contrat de distribution sélective doit être différencié
d’une part, positivement, c'est-à-dire à la lumière de ses caractères et d’autre part,
négativement, en recherchant ce qui le distingue d’autres contrats de distribution.

A) les caractéristiques de la distribution sélective

La distribution sélective constitue une forme de coopération durable entre un producteur et un


distributeur dont la relation est régie par un contrat cadre. Il s’agit d’un mode de distribution
libre permettant la commercialisation de produits de marques concurrentes.

1-Une distribution régie par un contrat cadre :

a) La nature du contrat cadre :

Destinée à faire face à la complexité croissante des relations d’affaires et utilisée d’abord et
surtout dans les relations commerciales internationales, la technique du contrat cadre a bien
trouvé sa place dans le domaine de la distribution.51Il s’agit dans ce domaine de structurer une
collaboration durable entre les parties grâce à la combinaison d’un contrat de base et de
contrats d’application.52

50
Cass. crim., 3 nov. 1982, Lanvin, Nina Ricci et Rochas : Gaz. Pal. 1982, 2, jurispr. P. 658, note J. P. Marchi ; D.
1983, inf. rap. P. 211, obs. C. Gavalda et C. Lucas de Leyssac. – J. M. Henriot-Bellargent, Consécration de la
distribution sélective des produits de parfumerie de marque aux plans économique et juridique : Gaz. Pal.
1985, 2, doctr. P. 406.

51
PALLUSSEAU, Les contrats d’affaires : JCP éd. G 1987, Ι, 3275.

52
PH. LE TOURNEAU, Quelques aspects de l’évolution des contrats, Mélanges Pierre Raynaud, p. 349, DALLOZ,
1985.

23
Ignoré par la législation tant française qu’algérienne et posant de réelles difficultés devant les
tribunaux53, le contrat cadre reste jusqu’à présent un sujet à controverse dans la doctrine.

Comment définir alors la notion du contrat cadre ? Et pourquoi préférer structurer la


distribution sélective par la technique du contrat cadre ?

-La définition du contrat cadre :

Certains auteurs ont définit le contrat cadre comme « un accord qui porte engagement des
parties à coopérer dans un domaine déterminé, qui précise les actions de coopération à
entreprendre et qui renvois à des contrats d’application le soin de régler le régime de ses
actions ».54

D’autres auteurs trouvent cette définition pas suffisamment large et précisent que le contrat
cadre concerne un accord général de base fixant les objectifs prioritaire d’une situation
complexe, sans nécessairement établir les moyens pour réaliser les objectifs. En règle
générale, il suppose postérieurement la négociation et la signature de contrats d’application le
plus souvent indépendants les uns des autres, pour atteindre les objectifs de l’accord
initial. »55

Ces définitions montrent que l’on se trouve face à un contrat de nature originale dont la
formule s’impose pour organiser et simplifier des relations d’affaires durables et complexes56.
D’autant plus que le contrat cadre occupe un rang élevé et ne peut être assimilé à une simple
promesse de contrat ou un pacte de préférence en ce qu’il est permanant et général et surtout
contraignant pour les contrats d’application.57

53
D'après M. BORE, l'étape décisive en France quant à la reconnaissance du contrat cadre se trouve dans les
arrêts de l'assemblée plénière de la Cour de cassation de 1995 relatifs à l'indétermination du prix ,J. BORE,
« Morte au champ d'honneur : la jurisprudence sur l'indétermination du prix dans les contrats cadre de longue
durée », Mélanges CLAUDE CHAMPAUD , LGDJ, Paris, 1997, p.101.

54
MERCADAL ET JANIN, « les contrats de coopération inter-entreprises », éd, Lefebvre 1974, n°45, p. 32. cité
par LAMETHE.

55
D. LAMETHE, « L’accord cadre », Gaz. Pal. 1978, 2, doct., p. 366.

56
F. POLLAUD-DULIAN ET A. RONZANO, Le contrat-cadre, par delà les paradoxes, RTD com. 1996, p. 180 à 210.

57
PH. LE TOURNEAU, La concession commerciale exclusive, ECONOMICA, 1994, p. 35.

24
En effet, la promesse unilatérale de contrat est valable dès qu’une seule partie a donné son
consentement au contrat projeté. Or, le contrat cadre est un contrat formé par le consentement
des deux contractants. Même lorsqu’elle est synallagmatique, la promesse de contrat ne peut
s’apparenter au contrat cadre car elle suppose un consentement réciproque définitif au contrat
dont les parties subordonnent la formation à l’accomplissement d’une formalité qu’elles
s’engagent à réaliser58. En revanche, dans le contrat cadre, le consentement doit être donné
non seulement au contrat cadre, mais aussi à la formation de chacun des contrats
d’application59.

Aussi et surtout, le contrat cadre suppose suite à sa conclusion la passation de contrats


d’application, ce qui n’est pas tout à fait le cas de la promesse de contrat. En cela, le contrat
cadre se distingue par un régime juridique particulier qui se traduit par la coexistence de deux
contrats distincts pour la réalisation d’une même opération économique60.

Le contrat cadre se distingue ainsi nettement de la promesse unilatérale et synallagmatique de


contrat, mais il se distingue aussi du pacte de préférence. Ce dernier est un contrat de
réservation qui est utilisé essentiellement pour préparer une vente et surtout une vente
d’immeuble. Une personne, le promettant, consent a réservé à son partenaire, le bénéficiaire,
la priorité de l’offre d’une conclusion d’une vente future, pour le cas où il déciderait de la
vente.61

Il y a donc dans le pacte de préférence, une sorte de second consentement nécessaire, comme
celui déjà vu dans les contrats cadre. Mais, une analyse attentive des caractéristiques propres
des deux types d’accords fait apparaître de réelles divergences. D’abord, le contrat cadre est
un contrat principal régissant des relations de longue durée alors que le pacte de préférence
n’est qu’un accessoire d’un contrat principal. En suite, le pacte de préférence a pour objet de

58
Dans un arrêt relatif à une promesse de vente, la cour suprême algérienne avait statué, aux termes de
l’article 71 du code civil algérien, que les parties pouvaient fixer le délai pour conclure la vente projetée soit par
une date prévue dans le contrat de promesse, soit par un accord implicite, soit par la survenance d’un fait.
Arrêt n° 247607 du 23/05/2001. Revue de jurisprudence algérienne n°1/2001.

59
F. POLLAUD-DULIAN ET A. RONZANO, préc.

60
A. SAYAG, L'étude du CREDA, le contrat cadre, 1 : exploration comparative, Litec, Paris, 1994, p. 62.

61
A. BENABENT,Droit civil, Les contrats spéciaux civils et commerciaux,.7ème édition, 2006, Montchrestien, p.
52

25
créer une obligation négative comme par exemple l’obligation de ne pas vendre un bien à un
tiers sans respecter la préférence consenti au bénéficiaire.

L’obligation négative n’est pas de l’essence du contrat cadre. Ce dernier peut contenir des
clauses d’exclusivité mais qui ne sont de la même intensité de l’obligation négative qui est
caractéristique du pacte de préférence.

Enfin, le contrat cadre met à la charge des parties plusieurs obligations négatives et positives,
alors que le pacte de préférence ne crée qu’une seule obligation négative62.

Le contrat successif se rapproche également du contrat cadre puisque ce dernier est un contrat
préparant la conclusion d’une multitude de contrat à venir. Le contrat successif est un contrat
unique, mais dont l’exécution des obligations des contractants est successive et suppose
l’écoulement d’une certaine durée. La durée apparaît ainsi comme un point commun tant elle
est un élément essentiel du contrat successif et du contrat cadre. En effet, le contrat cadre peut
se présenter comme un contrat dont l’exécution est successive par la conclusion de plusieurs
contrats d’application pendant toute la durée de la relation contractuelle63.

Toutefois, un auteur français fait remarquer que « le contrat cadre se distingue du classique
contrat à exécution successive par un élément de complexité propre à la situation qu'il sert à
régir. Cet élément de complexité empêche que l'on puisse ou que l'on veuille régler toutes les
modalités d'exécution de l'opération au moment où les parties s'engagent sur un objet
donné. »64

En conclusion, force est de constater que le rapprochement avec toutes ces notions voisines
n’enlève rien au caractère spécifique du contrat cadre. Il s’agit d’un contrat original qui doit,
pour son efficacité, être complété d’un ensemble de contrats d’application qui se matérialisent
par de simples bons de commande et ordres de service.65

62
J. SCHMIDT-SZALEWSKI, « La force obligatoire à l’épreuve des avant-contrats », RTD civ. 2000, p. 25.

63
G. BRIERE DE L’ISLE, La notion de contrat successif, Rec. Dalloz, 1957, chronique, p. 26.

64
A. SAYAG, préc, p. 66.

65
PH. ANTOMATTEI ET J.RAYNARD, Droit civil, Contrats spéciaux, éd. Litec, 2002, p. 30.

26
Bien qu’il ne délimite pas les éléments essentiels de l’accord des parties, le contrat cadre est
en lui-même un contrat qui fait naître immédiatement des obligations indépendamment de
toute conclusion ultérieure de contrats d’application. D’un point vue pratique, le contrat cadre
facilite les relations d’affaires qui ont vocation à s’inscrire dans le temps en ce qu’il est souple
et permet aux parties de gérer l’imprévision66.

Cela dit, il faut préciser qu’en matière de relations commerciales, le contrat cadre ne suffit pas
à lui-même car Il ne contient aucune offre portant sur les termes précis de l’opération
envisagée pas les parties. La fonction de l’accord cadre ne pourrait être pleinement réalisée
que par la conclusion de contrats d’application qui ont un caractère complémentaire puisqu’ils
concourent au même but que le contrat cadre67, mais ils sont également subordonnés en ce
que les parties doivent respecter les lignes directrices prévues au contrat de base. 68

En toute hypothèse, le contrat cadre se trouve le plus souvent utilisé pour tenter de mettre en
œuvre une coopération durable entre partenaires économiques. Ce type de contrat est fréquent
dans le secteur de la distribution, car les parties sont soucieuses de fixer par avance un cadre
général de leurs relations d’affaires qui, une fois établies, sont sensées durer dans le temps. 69

Dans la distribution sélective, le contrat cadre fait fonction d’un outil juridique efficace pour
régir les relations entre les parties ; relations bilatérales entre le fournisseur et un distributeur
agréé unis par la convention, et multilatérales par l’intermédiaire du fournisseur qui met en
faisceau des accords prévus entre chaque autre distributeur agréé, de manière à monter une
organisation de distribution de produits de luxe au niveau d’un marché donné70.

66
J. GHESTIN, La notion de contrat-cadre et les enjeux théoriques et pratiques qui s’y attachent, JCP Cah. dr.
entr., 1997, supl. 3/ 4, p.7.

67
« Contrat-cadre et contrats d’application sont étroitement unis tant juridiquement qu’économiquement. Ils
sont complémentaires » , PH. LE TOURNEAU, Quelques aspects de l’évolution des contrats, Mélanges Pierre
Raynaud, op cit, p. 360.

68
A. SAYAG, préc, p. 72.

69
Le contrat cadre est également utilisé dans le secteur agro-industriel, dans la sous-traitance industrielle, mais
aussi dans la publicité, l’assurance ainsi que dans le secteur bancaire et financier.

70
LEBEL, CASALONGA ET MENAGE, La distribution des produits de luxe, L.G.D.J., 1990, p. 9.

27
La technique du contrat cadre permet donc de bien s’adapter à l’activité économique de la
distribution et répond de ce fait aux besoins des parties. Ainsi, le réseau de distribution
sélective est constitué par un ensemble de contrats cadres identiques qui favorisent
l’intégration des distributeurs agréés dans le circuit du fournisseur et instaurent une
coopération entre ce dernier et les revendeurs sélectionnés pour revendre ses produits. En tant
qu’instrument d’intégration, le contrat cadre permet au fabricant de mettre en place son réseau
dont la structure dépendra de son choix. Soit réseau simple formé, après sélection, par un
certain nombre de distributeur agréé, soit réseau dualiste composé de grossistes et de
détaillants sélectionnés71.

En tant que moyen de coopération, le contrat cadre permet aux parties à un accord de
distribution sélective de délimiter les objectifs qu’ils sont convenues d’atteindre et les moyens
à mettre en œuvre notamment pour une bonne commercialisation des produits contractuels
auprès des consommateurs. En raison du caractère fermé du réseau sélectif, le contrat cadre
permet aussi au fabricant, par le biais de certaines clauses, de contrôler et de sauvegarder
l’étanchéité de son réseau72.

Enfin, le contrat cadre contient des clauses qui contribuent à la protection de la marque du
fabricant en interdisant toute utilisation non conforme aux aspirations du propriétaire de la
marque. Une telle utilisation, lors qu‘elle est dévalorisante, doit faire l’objet, au titre du
contrat cadre, de sanctions qui peuvent aller jusqu’à la résiliation anticipée du contrat de
distributeur agréé73.

71
O. GAST ; GRILLAULT LAROCHE, HAYETTE, La distribution sélective et la franchise, JCP E, n° 50, 14/12/2000,
pp. 36-46.

72
A. SAYAG, préc, p. 94.

73
FROGER, La sanction de la rétrocession illicite, Cah. dr. entr, 1991/1, 21 (n spécial distribution sélective).

28
2- la commercialisation de produits concurrents :

Par la distribution sélective, le producteur cherche à obtenir une commercialisation conforme


à la nature de ses produits est une application uniforme de sa stratégie commerciale. 74
Généralement utilisé pour la distribution des produits de luxe ou de haute technicité, ce
contrat ne contient pas de clause d’approvisionnement exclusif.75 C’est ainsi que la
distribution sélective apparaît comme une concession libre à la différence de la concession
exclusive qui contient une exclusivité réciproque.76

De ce qui précède, il ressort que le fabricant peut approvisionner d’autres commerçants


agréés, et le distributeur peut se fournir chez d’autres producteurs. A vrai dire, le distributeur
agréé est même souvent incité à conclure d’autres contrats de distribution sélective avec
d’autres fournisseurs afin d’organiser une confrontation avec les articles d’autres marques.77

La liberté de choix dont bénéficie le distributeur agréé est assurée par une clause insérée au
contrat liant les parties. En effet, certains contrats de distribution de parfums de luxe précisent
en général que « les distributeurs agréés peuvent s’approvisionner, sous contrat, en produits
similaires aux produits contractuels auprès de producteurs concurrents ».78

Pour ce qui est des produits de haute technicité, la commission européenne de concurrence a
enjoint les fabricants d’éliminer certaines clauses qui limitaient la liberté
d’approvisionnement du distributeur en composants électroniques chez des fabricants
concurrents79. De même pour les clauses qui prévoient pour le distributeur agréé de réaliser

74
M. NESSEMBAUM, « l’analyse économique de la distribution sélective », RJDA, Francis Lefebvre, 1995, n° 4,
p. 316.

75
« la clause par laquelle un distributeur indépendant s’engage à ne s’approvisionner en produits contractuels
qu’auprès de son fournisseur ou d’une entreprise indiquée par celui-ci », J. B. BLAISE, droit des affaires, L.G.D.J.
2000, p. 539.

76
La circulaire Fontanet du 31 mars 1960 définit la concession comme « une convention liant le fournisseur à
un nombre limité de commerçants auxquels il réserve la vente d’un produit sous condition qu’ils satisfassent
à certaines obligations. »

77
M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n° 32.

78
Yves Saint Laurent, et T-88/92, Givenchy, Rec. CJCE, Il, p. 1851 et s., Contrats, conc., consomm. 1997, n°1, p.
13, note L. Vogel

79
J.J. BURST ET R.KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence » RTD eur
1978, p. 475.

29
une part minimale de ses achats auprès de son fournisseur et aboutissent ainsi à une
exclusivité d’approvisionnement de fait sans contrepartie80.

La commercialisation des produits concurrents est donc une caractéristique inhérente au


système de distribution sélective, qui au-delà d’être dans l’intérêt du distributeur, constitue un
avantage pour le fournisseur et le consommateur. Libre de s’approvisionner ailleurs, le
distributeur agréé proposera une présentation complète des marques concurrentes dont le
succès dépendra du choix offert au client. En réalité, l’absence d’une présentation variée est
parfois même invoquée comme un motif de refus d’agrément ou d’une résiliation anticipée du
contrat.81

Cela dit, il ne faudrait pas que cette obligation soit imposée de manière stricte, car tout
distributeur agréé qui ouvre un point de vente a besoin de temps pour se fournir en produits de
différentes marques concurrentes.82 Ménageant la chèvre et le chou, la jurisprudence française
a estimé que l’obligation imposée par le fournisseur d’offrir à la vente au moins quatre
marques de luxe concurrentes, que le distributeur agréé peut librement choisir, ne constituait
pas une exigence excessive.83

De telles exigences, sans être exorbitantes, offrent au consommateur un choix libre et varié.
En effet, la distribution sélective ne saurait être justifiée si elle ne va pas de l’intérêt du
consommateur. De plus, il s’agit là d’une nécessité dans l’objectif est de maintenir intact,
coûte que coûte, l’impact psychologique du produit auprès du consommateur. Dès lors, le
distributeur agréé ne saurait vendre, par négligence, ou consciemment, des produits banals
dont le voisinage pourrait déprécier l’image de marque des produits de luxe84.

80
P. PIRIOU, La distribution sélective et les règles communautaires de la concurrence, RTD eur. 1978. p. 628.

81
A. SAYAG, Le contrat-cadre. 2. La distribution, Etudes du CREDA, Paris, Litec, 1995. p. 80.

82
Yves Saint Laurent, et T-88/92, Givenchy, préc ; en l’occurrence, le distributeur dispose de dix-huit mois pour
recevoir l’investiture de marques concurrentes, ce que la commission européenne de la concurrence a estimé
être un délai suffisant.

83
Ibid.

84
S. POILLOT-PERUZETTO, « Exemption par catégorie des accords verticaux : la franchise », RTD. com 2001,
p. 550.

30
B) distinction des autres contrats de distribution :

Traiter la distribution sélective comme une forme d’un accord de distribution conduit à
montrer son caractère unique. Car ce contrat ne peut être assimilée ni à la concession
commerciale, ni à la franchise.

1- La distribution sélective et la concession commerciale :

La concession est accordée à une entreprise de commerce qui achète les produits pour les
revendre à sa clientèle en son nom et pour son compte.85le terme concession est étranger au
droit privé, il est en effet emprunté au droit administratif où il est employé pour désigner un
mode d’exploitation des services publics.86

En droit algérien, la concession administrative est régie par les articles 119 du code de la
Willaya et l’article 132 du code de la commune. En France, la seule définition officielle de la
concession commerciale résulte de la circulaire Fontanet du 31 Mars 1960. Ce texte présente
ce contrat comme « une convention liant le fournisseur à un nombre limité de commerçants
auxquels il réserve la vente d’un produit sous condition qu’ils satisfassent à certaines
obligations. »

En Algérie, aucune définition n’est apportée à la notion de concession commerciale.


Toutefois, le législateur algérien a consacré tout un texte à la concession automobile. Ainsi, le
décret exécutif 07-390 contient 41 articles tenant essentiellement aux conditions d’accès et
d’exercice de l’activité de concessionnaire d’automobiles neufs. Quant au contrat de
concession, le législateur n’apporte aucune précision de nature à conférer à ce contrat un
statut spécial et des règles propres aux caractéristiques de cette pratique malgré son nette
augmentation dans le commerce et l’économie nationale87.

85
J.B. BUISSON, M LACGER ET X TANDEAU DE MARSAC, Etudes sur le contrat de concession exclusive, Sirey
1968, p. 11.

86
PH. LE TOURNEAU, La concession commerciale exclusive, Economica 1994, p. 6.

87
M. BENACHOUR, « implantation d’usines automobile en Algérie : La concurrence s’aiguise entre Renault et
Volkswagen », www.lefinancier-dz.com.

31
En effet, le dispositif ignore totalement ce contrat, si ce n’est que l’article 02 qui met en
évidence le caractère contractuel de la relation liant le concessionnaire au concédant et
l’article 06 qui impose le respect des règlements en vigueur, notamment l’ordonnance relative
à la concurrence et son article 10 qui prohibe tout contrat d’achat exclusif conférant à son
titulaire un monopole de distribution sur le marché.

Pour bien distinguer la concession commerciale de la distribution sélective, il convient d’en


donner une définition qui, ignorée par la législation française et algérienne, a était l’œuvre de
la doctrine.

En 1963, Claude Champaud donnait une définition du contrat de concession comme suit :
« un commerçant, appelé concessionnaire, met son entreprise de distribution au service d’un
commerçant ou industriel appelé concédant pour assurer exclusivement, sur un territoire
déterminé, pendant une période limitée, et sous la surveillance du concédant, la distribution
des produits dont le monopole de revente lui est concédé. »88

Cette convention permet donc au concédant d’octroyer à des distributeurs géographiquement


répartis, une exclusivité de distribution limitée à un territoire déterminé. Le concessionnaire,
commerçant indépendant, est seul habilité à vendre, sur le territoire concédé et délimité par le
contrat, les produits du fournisseur89.

Tout porte à croire que l’exclusivité territoriale accordée par le concédant au concessionnaire
est ici le cœur du contrat, elle est l’élément essentiel du contrat de concession commerciale 90.
Aussi, comme dans le contrat de distribution sélective, le concessionnaire vend les produits du
fournisseur en utilisant la marque de ce dernier pour se prévaloir de la qualité de distributeur
privilégiés. Son activité commerciale fera, à l’instar de celle du distributeur agréé, l’objet d’un
contrôle de la part du fournisseur propriétaire de la marque qui doit veiller à rester maître de
son réseau91.

88
C. CHAMPAUD, La concession commerciale ; RTD com 1963, p. 451 et s

89
PH. LE TOURNEAU, préc, p. 15.

90
B. BOULOC, Vente commerciale, Exclusivité, Concession exclusive de vente, Résiliation, délai de préavis. Abus
de droit, RTD com., 1994, p.347.

91
PH. LE TOURNEAU, Concession exclusive.-conditions de validité au regard du droit des contrats.-formation.-
prix et durée, Fasc. 1025, JurisClasseur Contrats – Distribution., 2006.

32
Néanmoins, les deux contrats restent des techniques contractuelles permettant au distributeur
de garder son indépendance juridique. Ainsi, comme le distributeur agréé, le concessionnaire
est commerçant indépendant immatriculé au registre du commerce et des sociétés, sous sa
propre dénomination sociale et non sous celle du concédant. En tant que tel, il accomplit de
manière habituelle et répétitive, pour son propre compte et en son propre nom des actes de
commerce, achète des marchandises à son concédant dont il est propriétaire puis, les revend,
toujours en son nom et pour on compte.92

Malgré tous ces points communs, la distribution sélective se distingue nettement de la


concession commerciale. Tandis que la première se définit en fonction de critères qualitatifs
de compétence, la seconde repose sue un découpage du marché, attribuant à chaque
concessionnaire une zone géographique limitée assortie d’une protection contre la
concurrence active du fournisseur et des autres concessionnaires du réseau.93

Plus précisément, dans la concession commerciale, le concédant s’engage à vendre en


exclusivité ses produits à un commerçant, le concessionnaire, pendant une période et sur un
territoire déterminé à charge pour ce dernier de les commercialiser, de respecter les clauses du
contrat, et surtout, de ne vendre aucun produit concurrent à ceux de son concédant. La
distribution sélective quant à elle, n’entraine aucune exclusivité, ou du moins une exclusivité
de fourniture comme le précisent certains auteurs.94

En effet, le fournisseur peut approvisionner d’autres concurrents agréés dans la même zone
géographique et le distributeur agréé peut commercialiser des produits d’autres concurrents du
fournisseur à condition de ne pas dévaloriser l’image de marque des produits contractuels. En
d’autres termes, la concession commerciale vise à établir une exclusivité réciproque entre les
partenaires alors que la distribution sélective ne fait que profiter un commerçant d’une image
de marque en réservant une partie de son activité et de la surface de son magasin à la
distribution des produits d’un fournisseur d’articles de marque.95

92
C. CHAMPAUD, préc, p. 456.

93 e
D. FERRIER, Droit de la distribution, Litec, 4 éd., 2006, p. 281.

94
« Le contrat de distribution sélective emporte une exclusivité dans la mesure où le fournisseur s’engage à ne
vendre ses produits qu’aux distributeurs qui satisfont certains critères qualitatifs.», D. FERRIER, op. cit, p. 262.

95
PH. LE TOURNEAU, Les contrats de concession, éd. Litec, collection Affaires finances, 2003, p. 08.

33
Si les deux contrats limitent le nombre des distributeurs par une sélection objective, l’absence
d’une clause d’exclusivité territoriale dans le contrat de distribution sélective à conduit
certains auteurs à le qualifier de spécialisation fonctionnelle par opposition à la concession
commerciale qui serait une spécialisation territoriale.96

La concession commerciale est donc un contrat de distribution présentant des caractéristiques


propre à le distinguer nettement du contrat de distribution sélective. Qu’en est-il alors du
contrat de franchise ?

2 - La distribution sélective et la franchise :

Né aux Etats-Unis sous le nom de franchising,97le contrat de franchise est une méthode de
collaboration entre une entreprise franchiseur et une ou plusieurs entreprises franchisés.

La doctrine française s’accorde de manière générale à définir ce contrat comme une


convention par laquelle le franchiseur met à la disposition de son franchisé, en contrepartie du
paiement d’un droit d’entrée et de redevances, une marque et des signes de ralliement de la
clientèle, lui transmet un savoir faire substantiel et spécifique, exploité suivant des techniques,
notamment commerciales, uniformes, préalablement expérimentées, régulièrement mises au
point, contrôlées et transmises au franchisé sous forme d’une assistance continue.98

Par ailleurs la Cour de cassation française affirme que le contrat de franchise nécessite la
réunion de trios éléments essentiels :

-la mise à disposition par le franchiseur au franchisé d’une marque et/ou d’une enseigne.
96
J. B. BLAISE, Exemption par catégorie des accords d’exclusivité : RTD eur. 1985, p. 568 et s.

97
Le terme « franchising » n’est pas utilisé en France puisque la loi du 31 décembre 1975 interdit l’emploi des
termes étrangers. Certains auteurs français comme Jean Beauchard parlent du mot « franchise », alors que
d’autres, tel Phillipe Le Tourneau, se ralliant à la Cour de cassation française préfèrent employer le terme
« franchisage ».

98
PH. LE TOURNEAU, Les contrats de franchisage, Litec, 2003, p. 29 ; J.- M. LELOUP, La franchise, Droit et
ème
pratique, Delmas, 3 édition, 2000, p. 10 ; D. BASCHET, La franchise, Guide juridique-conseils pratique,
Gualino éditeur, 2005, p. 19 ;J.BEAUCHARD, Droit de la distribution et de la consommation, PUF, coll. Thémis –
Droit privé, 1996, p. 192 ; D. FERRIER, préc, p. 301.

34
-la transmission d’un savoir-faire du franchiseur au franchisé.

-la fourniture par le franchiseur d’une assistance continue au franchisé.99

Parce qu’il entraîne la transmission de signes de ralliement de clientèle et la communication


du savoir-faire et une assistance technique et commerciale, le contrat de franchise se distingue
du contrat de distribution sélective. Si celui-ci implique la mise à disposition d’une marque et
une assistance commerciale de la part du fournisseur au distributeur agréé, il ne fait toutefois
pas référence à l’existence d’un savoir-faire.100

Bien que les distributeurs sélectionnés arboreront l’enseigne du fournisseur101, adopteront une
présentation particulière de leurs magasins et s’engagerons à respecter certaines clauses de
pénétration du marché,102la distribution sélective ne crée aucune obligation de transmission
d’un savoir-faire.

En d’autres termes, le trait caractéristique du contrat de franchise n’est ni l’autorisation


d’utiliser une enseigne ou un nom commercial ni le droit sur une marque mais c’est bien la
communication d’un savoir-faire103. Tel n’est pas l’objet du contrat de distribution sélective,
qui peut se concevoir sans assistance ni transfert d’un savoir-faire du fournisseur au
distributeur sélectionné.104

99
Cass. com., 8 juill. 1997, D., n° 30/1997, chron., p. 960 ; RJDA 1997, n° 1481. cité par Baschet.

100
BURST ET KOVAR, « Le régime de la franchise en droit communautaire de la concurrence' », Gaz. Pal., 1987,
l, doctr, p. 438.

101
Selon CHAVANNE ET BURST, « l'enseigne est un signe visible qui sert à distinguer un établissement
commercial et à permettre au public de ne pas le confondre avec un autre », CHAVANNE (A) & BURST (J-J) :
ème
Droit de la propriété industrielle. 5 éd, Dalloz Delta 1998, N°1382. p. 841.

102
J. GUYENOT, « concessionnaires et commercialisation des marques », 1975, Librairie du journal des notaires
et des avocats, p. 16.

103
J. E. DE COCKBORNE, « les accords de franchise au regard du droit communautaire de la concurrence », RTD
eur 1989, p. 200.

104
Dans son arrêt Pronuptia, la CJCE déclare que « les contrats de concession et de distribution sélective ne
comportent ni utilisation d’une même enseigne, ni application de méthodes commerciales uniformes, ni
paiement de redevances en contrepartie des avantages consentis » Gaz. Pal 1986 III Doct. p.392-398.

35
Par conséquent, lors de la conclusion du contrat, le distributeur agrée, à la différence du
franchisé, n’est pas tenu de verser de droit d’entrée et de redevances à son fournisseur105.

Par ailleurs, les deux contrats se distinguent plus clairement quant à leur finalité. En effet,
dans la distribution sélective, l’objectif essentiel du fournisseur est de revendre ses produits
par l’intermédiaire de ses revendeurs agréés. En revanche, dans le contrat de franchise,
l’objectif du franchiseur doit être de réitérer, de reproduire, par l’intermédiaire de ses
franchisés, une méthode de commercialisation.106Enfin, la distribution sélective ne concerne
que la distribution des produits, alors que la franchise peut avoir pour objet la distribution des
produits, les prestations de services et la production industrielle.107

Si une distinction peut être maintenue entre la distribution sélective et la franchise selon qu’il
y a ou non transfert de savoir-faire, il est cependant essentiel d’observer que les deux contrats
présentent néanmoins plus d’un trait commun. Le distributeur agréé et le franchisé sont des
commerçants indépendants agissant en leur propre nom et pour leur propre compte. Ils
doivent également demeurer libres de fixer leur prix de vente à la clientèle. Comme le
franchisé, le distributeur agréé se verra, au titre du contrat, attribué le droit d’utiliser la
marque et les signes de ralliement de clientèle du fournisseur. 108

Il est à noter par ailleurs qu’aucun des contrats analysés ci-dessus ne fait l’objet d’une
législation spécifique ni en droit français ni en droit algérien et sont de ce fait des contrats
innomés. Du fait du retard qu’accusent la législation et la jurisprudence algériennes en
matière de contrats d’affaires109, un quotidien de presse nationale a affirmé que le législateur
algérien portait une attention particulière au contrat de franchise en raison des avantages
concrets que peuvent en tirer les opérateurs économiques algériens en matière de transfert de

105
D. MAINGUY, « les alternatives au contrat de franchise »,www.lexcellis-avocats.fr

106
P. PIGASSOU : "La distribution intégrée" , RTD com 1980, p. 483.

107
D. MAINGUY, préc.

108
D. BASCHET, op. cit, p. 69.

109
La franchise n’est pas définie dans le système algérien par un statut juridique particulier, mais la relation
contractuelle, pour fonctionner normalement, doit comporter un certain nombre d’obligations réciproques
entre le franchiseur et franchisé régies pour, l’essentiel, par les dispositions du code de commerce, des
dispositifs spéciaux relatifs à la concurrence, à la protection du consommateur, aux pratiques commerciales.
Par ailleurs, le code civil algérien, pose les principes généraux de toute relation contractuelle.

36
savoir faire et de techniques de gestion des entreprises, ainsi que les consommateur algériens
en matière de qualité et sécurité des services et des produits110.

En effet, lorsqu’il met en jeu des franchiseurs de renommée mondiale et des franchisés bien
encadrés, le contrat de franchise peut permettre de consolider un réseau concurrentiel en
Algérie et représenter une assurance qualité pour le consommateur algérien. Cette pratique
assure également la facilité pour les autorités nationales de régulation de contrôler le marché
puisqu’elle constitue un moyen efficace de combattre le marché informel et la contrefaçon111.

Toutefois, un économiste algérien affirme que les grandes marques internationales semblent
réticentes face au marché algérien et que de ce fait la franchise en tant qu'instrument de
modernisation des circuits commerciaux se trouve freinée par le peu de coopération manifesté
dans la lutte contre la contrefaçon dans notre pays112.

En vertu de la liberté contractuelle et du fait des combinaisons possibles des différentes


clauses contractuelles selon les objectifs des propriétaires de réseaux de distribution, il est
possible de passer d’un contrat à un autre. C’est dire la relativité de la distinction et la nuance
qui existent entre ces contrats de façon à rendre difficile la qualification de la relation
contractuelle et la mise en œuvre du régime juridique applicable.113

Ainsi, un distributeur sélectionné peut devenir un concessionnaire commercial stricto sensu


suite à une proposition d’un producteur satisfait et désireux de passer à une collaboration plus
étroite. Aussi, est-il fréquent qu’un même producteur développe son réseau de distribution en
franchise et en distribution sélective en faisant jouer la liberté contractuelle pour mieux
répondre aux attentes des parties.114

110
Actuellement, des enseignes de renom (Yves Rocher, Jacques Dessange, Celio, Carrefour, Swatch) se sont
installées dans plusieurs villes du pays, et la tendance ne fera qu’aller crescendo puisque la destination Algérie
intéresse, désormais, de nombreuses marques internationales, soucieuses, pour leur part, d’étendre leurs parts
de marché.

111
M. MAMART, « développement de la franchise en Algérie». El watan 4 décembre 2006

112
ABDENNOUR. NOUIRI,« Le commerce en réseau en Algérie », la revue de l'INC N° 06

113
PH. LE TOURNEAU, op. cit, p. 482.

114
D. FERRIER, op. cit, p. 262.

37
Toutefois, l’ensemble de ces contrats restent bien typés. La principale différence tient à
l’exclusivité territoriale qui est indispensable dans le contrat de concession commerciale sans
être utilisée dans le contrat de distribution sélective. Aussi, la présence d’un savoir-faire qui
caractérise le contrat de franchise sans être de l’essence du contrat de distribution sélective.

Section 02 : le fonctionnement de la distribution sélective

L’entreprise qui fabrique ou diffuse un produit peut avoir recours à la distribution


sélective si la commercialisation de ce produit requiert une aptitude ou une installation
particulière des distributeurs.

Une fois sélectionnés, les distributeurs forment un réseau et sont intégrés à l’activité du
fabricant mais gardent une indépendance ponctuée par un contrôle rigoureux de la part du
fabricant. (§1)

La distribution sélective suppose donc, au préalable, l’élaboration d’un réseau de distributeurs


agréés. Ce réseau se fonde sur un contrat type qui matérialise l’engagement du fabricant et de
ses distributeurs et peut avoir des formes variées (§2)

38
Paragraphe 01 : la relation entre le fabricant et le distributeur agréé

La distribution sélective est un accord liant le fabricant à un nombre limité de


commerçants auxquels il réserve la revente de ses produits sous condition qu’ils satisfassent à
certaines obligations. Cela signifie que le système de la distribution sélective consacre
l’indépendance juridique et économique du distributeur agréé (A), mais signifie aussi que le
fabricant garde un contrôle, reconnu par la loi et défini clairement au contrat cadre, sur
l’ensemble de l’activité de ses revendeurs.(B)

A)l’indépendance du distributeur agréé

Le contrat de distribution sélective est traditionnellement marqué par une logique


d’indépendance juridique, qui s’accorde avec les objectifs fondamentaux des partenaires. 115En
effet, le fabricant mise, au plan commercial, sur l’esprit d’entreprise et sur le dynamisme de
ses partenaires pour la promotion de ses produits et de sa marque et, au plan financier, il
entend échapper au poids des investissements nécessaires ainsi qu’aux retombées de leur
éventuel échec économique116.

Ainsi, le distributeur agréé gère librement son entreprise dont il est seul responsable et fixe
seul le prix de revente de ses produits et services. En conséquence, le distributeur agréé est un
commerçant juridiquement indépendant immatriculé au registre du commerce, sous sa propre
dénomination sociale et non sous celle du fournisseur117.

115
J. MESTRE, Résiliation unilatérale et non-renouvellement dans les contrats de distribution, in La cessation des
relations contractuelles d'affaires, PUAM, p. 12.

116
PALLUSSEAU, Les contrats d’affaires : JCP éd. G 1987, Ι, 3275.

117
M. ZOÏA, Concession libre, la distribution sélective, J.-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n°82.

39
En tant que tel, il accomplie de manière habituelle et répétitive, pour son compte et en son
propre nom des actes de commerce, achète des produits à son fournisseur dont il devient
propriétaire puis, le revend, toujours en son nom et pour son compte. Il est propriétaire de son
stock qu’il devra liquider avant la fin du contrat118.

Pour bien comprendre le statut du distributeur agréé en droit algérien, il convient de se


demander Qui est commerçant en droit commercial algérien?

D’après l’article 1er du Code de commerce, « est réputée commerçante toute personne
physique ou morale qui exerce des actes de commerceet en fait sa profession habituelle, sauf
si la loi en dispose autrement ». De cette définition, l’on retient essentiellement l’exercice des
actes de commerce, lequel fait de manière habituelle et professionnelle, détermine la qualité
de commerçant. Etant commerçant, le distributeur agréé est soumis à un statut particulier,
exerce normalement son activité de manière sédentaire, c’est-à-dire au moyen d’un local
commercial (le fonds de commerce) aux termes de l’article 19 de la loi n°04-08 du 14 août
2004 relative aux conditions d’exercice des activités commerciales.

Par ailleurs, tout étranger, souhaitant acquérir la qualité de commerçant, est soumis à
l’obligation de l’obtention de la carte de commerçant préalablement à l’exercice de son
activité commerciale sur le territoire national 119. Toutefois, le législateur algérien interdit la
qualité de commerçant à l’avocat, le notaire, le commissaire aux comptes, le comptable et
l’expert comptable120.

Personne physique ou morale, le distributeur agréé fait partie du réseau et jouit du droit de
revendre les produits du fournisseur en profitant de son aura et faisant usage de sa marque.
Par ailleurs, le distributeur agréé assure seul les risques de son entreprise. Il doit régler les
factures des produits et prestations demandés et ne peut être tenu des dettes de son
fournisseur. De même, le distributeur agréé doit respecter toutes les exigences de son
activités commerciale, qu’elles soient générales telles les obligations fiscales ou sociales ou
propre à son métier tel le recrutement et la formation du personnel sans négliger

118
V. G. VIRASSAMY, Les contrats de dépendance, LGDJ, 1986, préface J. Ghestin, p. 56.

119
M. SALAH, Les sociétés commerciales, t. 1, Les règles communes- La société en nom collectif- La société en
commandite simple, éd. Edik, 2004, p. 269.

120
Ibid.

40
l’aménagement adéquat du point de vente. Parallèlement à tous ces droits dont jouit le
distributeur agréé, il pourra voir sa responsabilité engagée par des comportements jugés
coupables de porter atteinte à l’image de marque et l’intérêt du réseau121.

L’indépendance du distributeur agréé s’exprime tout autant par la liberté de fixer lui-même
ses prix de revente. En effet, il est un commerçant indépendant en ce sens qu’il a la liberté de
faire des actes de commerce à un prix librement fixé par lui et peut librement négocier sa
marge bénéficiaire avec le producteur pour les produits qu’il met en vente. Aussi est-il
prohibé au producteur d’imposer un prix de revente minimum au revendeur agréé 122. Cette
prohibition repose sur différents fondements tant du droit français que du droit algérien.

Ainsi, le contrat de distribution sélective, s’il contient des clauses anticoncurrentielles


tombera sous le coup de l’article L. 420-01 du code de commerce français et parmi ces
clauses figurent les clauses de prix minimum imposés. En droit algérien, l’article 04 de
l’ordonnance n° 03-03 relative à la concurrence dispose que le prix des biens et services sont
librement déterminés par le jeu de la concurrence. Le législateur confirme cette liberté
accordée au revendeur dans l’article 07 du même texte en prohibant toute position dominante
ou monopolistique exercée par le fabricant sur le distributeur agréé et qui tend à faire obstacle
à la fixation des prix par le libre jeu de la concurrence123.

De même, le législateur algérien interdit à l’article 11, sous peine de sanctions, au fabricant
d’exploiter abusivement l’état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard le
distributeur pour l’obliger à revendre les produits contractuels à un prix minimum. De peur
d’être abusive, la liberté dont jouit le distributeur agréé ne saurait être absolue en ce qu’elle
est limitée soit par la loi soit par le fabricant propriétaire du réseau.

De façon expresse, le législateur impose la loyauté des pratiques commerciales et interdit au


distributeur agréé la revente à perte qui, bien que favorables en apparence aux intérêts des
consommateurs, constitue une infraction matérielle, qui n’exige pas la démonstration

121
P. PIGASSOU, La distribution sélective. JCP 1985 éd. E ΙΙ, 14423.

122
Cass. com, 3 mai 1992, Sté BP/Huard, JCP 1993 II 22164 ;CA Versailles, 27 janv. 2000, RTD Civ 2000, p570

123
D. ZENNAKI, Droit de la concurrence, cours de magistère, Faculté de droit, Université d’Oran, 2010/2011.

41
d’intentions frauduleuses124. En effet, l’article 19 de la loi n° 04-02 interdit au revendeur de
céder les produits contractuels à un prix inférieur à leur prix de revient effectif. Ce dernier est
évalué au prix d’achat unitaire figurant sur la facture, majoré des droits et taxes et, le cas
échéant, des frais de transport125.

Néanmoins, le législateur tempère cette interdiction en écartant son application dans des cas
spécifiques citées à l’article 19 tels les biens périssables menacés d’une altération rapide ou
les biens dont la vente est saisonnière ainsi que ceux démodés ou techniquement dépassés126.

Aussi, le code pénal algérien puni, en son article 172, la spéculation illicite qui consiste pour
le distributeur agréé, directement ou par personne interposée, d’opérer ou de tenter d’opérer la
hausse ou la baisse artificielle des pris des denrées ou marchandises, des effets public ou
privés.

En droit européen, la fixation préalable du prix de revente par le fournisseur est interdite par
l’article 81 du traité de Rome, mais elle ne peut être sanctionnée que si elle affecte le
commerce entre Etats membres d’une façon sensible127. Toutefois, le cour de justice

124
L'interdiction de la revente à perte a été introduite en France en 1963, dans le but de protéger le petit
commerce face à la puissance, naissante à l'époque, de la grande distribution. Ultérieurement, c'est la loi dite
Galland du 1er juillet 1996 sur la loyauté et l'équilibre des relations commerciales qui a introduit dans le code
de commerce le seuil de revente à perte (SRP), déterminé par référence au « prix unitaire figurant sur la
facture », majoré de différentes taxes et prix du transport.

125
Art. 19 de la loi n° 04-02 est la copie conforme de l’article 442-2 du code de commerce français.

126
Toutefois, cette disposition ne s'applique pas :

— aux biens périssables menacés d'une altération rapide ;

— aux biens provenant d'une vente volontaire ou forcée par suite d'un changement ou d'une cessation
d'activité ou effectuée en exécution d'une décision de justice ;

— aux biens dont la vente est saisonnière, ainsi qu’aux biens démodés ou techniquement dépassés ;

— aux biens dont l'approvisionnement ou le réapprovisionnement s'est effectué ou pourrait s'effectuer

à un prix inférieur. Dans ce cas, le prix effectif minimum de revente pourrait être celui du nouveau
réapprovisionnement ;

— aux produits dont le prix de revente s'aligne sur celui pratiqué par les autres agents économiques, à
condition qu'ils ne revendent pas en-dessous du seuil de revente à perte.

127
Le règlement d’exemption de 1999 couvre toutes les restrictions verticales contenues dans les accords de
distribution sélective conclus par des entreprises détenant une part de marché ne dépassant pas 30 %. Or, la
42
européenne avait déjà admis de la souplesse en matière de prix imposé pour la distribution
sélective en déclarant : « une certaine limitation de la concurrence sur le plan du prix doit être
considérée comme inhérente à tout système de distribution sélective, étant que les prix
pratiqués par des commerçants spécialisés restent nécessairement à l’intérieur d’une
fourchette beaucoup moins large que celle qu’on pourrait envisager dans le cas d’une
concurrence entre commerçants non spécialisés ».128

Il est d’autres cas où les clauses de l’imposition de prix minimum n’apparaissent pas
clairement au contrat cadre, ce qui donne lieu à une simple clause de prix minimum conseillé
de revente. Aucune sanction pénale n’est prévue à ce titre et, par conséquent, aucune sanction
civile, telle la nullité, n’en découle129.

Par ailleurs, des clauses du contrat de distribution sélective concernant, notamment, le droit de
contrôle du fournisseur sur la gestion de ses distributeurs agréés et les obligations de ces
derniers relatives à l’action publicitaires, peuvent avoir pour conséquence une limitation de
l’autonomie du distributeur pour la fixation de ses prix de revente.

Les autorités de contrôle françaises ont toujours tenté de condamner les clauses de prix
minimums imposés, l’objectif étant d’assurer le libre fonctionnement du marché mais
également de protéger le distributeur agréé contre le producteur. Aussi, récemment le conseil
de la concurrence français est allé dans ce sens par une décision rendue le 19 juillet 2001 :
« La société Bausch &Lomb enfreint les dispositions de l’article L. 420-1 du code de
commerce en imposant à son réseau de distribution des prix de vente pour les produits solaires
Ray-Ban au cours de la période 1995-1998. Le fait d’utiliser certaines clauses du contrat dans
le but d’empêcher les distributeurs de pratiquer des prix inférieurs aux prix conseillés et
d’organiser librement leurs promotions, en exerçant sur eux des pressions, constitue une

présence d’une clause de prix minimum imposé dans un contrat de distribution sélective entraine la perte de
l’exemption pour l’ensemble de l’accord mais il peut, sous certaines conditions , bénéficier d’une exemption
individuelle.

128
CJCE, 22 oct. 1986, aff. 75/84, Metro П, rec. CJCE, p. 3021. Cité par Burst et Kovar.

129
T. GRANNIER, Prix imposés, prix conseillés : le contrat de franchisage à l'épreuve du droit de la concurrence,
RTD com., 1991, p.358.

43
pratique illicite. Cette a pour objet ou pour effet, de faire obstacle au jeu de la concurrence par
les prix ».130

B) Le contrôle du fabricant

Dans la distribution sélective, le fabricant marque sa volonté de contrôler la revente


de ses produits aux clients finals en imposant à ses distributeurs spécialisés, à travers les
stipulations du contrat cadre, des normes de commercialisation destinées à renforcer l’unité du
réseau et à préserver l’image de marque du produit.131

Par conséquence, le distributeur agréé s’engage à maintenir en permanence dans ses vitrines
des articles de la marque, à suivre les campagnes promotionnelles, à appliquer les normes
d’installation et de présentation des produits contractuels, et même à prendre en compte les
conseils du fabricant pour l’aménagement de son local commercial132.

La jurisprudence européenne estime qu’il est légitime que le fabricant contrôle directement,
ou par l’intermédiaire d’un revendeur placé dans la chaîne des distributeurs agréés, le respect
des obligations découlant de la mise en place d’un réseau de distribution sélective de produits
de luxe ou de haute technicité.133

S’agissant des produits de luxe jouissant d’une image de marque ou de produits de haute
technicité requérant un personnel et des locaux adéquats pour les revendre, le fonctionnement
d’un système de distribution sélective ne saurait être efficace sans l’existence d’un contrôle du
fabricant assorti de sanctions en cas de violation des règles régissant le réseau mis en place 134.

130
Cons. conc., déc. n°01-D-45, 19 juill. 2001 relative à une saisine présentée par la société Casino France,
www.minefi.gouv.fr/conseilconcurrence/.

131
J. J. BURST ET R. KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence » RTD eur
1978, p. 475.

132 e
D. FERRIER, Droit de la distribution, Litec, 4 éd., 2006, p. 270.

133
CJCE, 25 oct. 1977, aff.26/27, Metro l, Rec. CJCE 1977. p. 1875. Cité par Burst et Kovar.

134
A. OSER, La distribution sélective en droit français et en droit communautaire, Gaz. Pal. 1977,2, doctr. p. 5

44
A ce niveau, deux questions se posent, à savoir comment se fait le contrôle du fabricant ? Et
quels sont les points sur lesquels va pouvoir se porter ce contrôle ?

L’existence d’un réseau de distribution sélective repose sur la sélection qui se pratique
souvent à deux niveaux ; le fabricant, propriétaire de la marque, fait la sélection d’un certain
nombre de grossistes qui, à leur tour, agréent des détaillants selon les critères de sélection
définis au contrat cadre par le fabricant.

Pour de tel réseaux composés de grossistes et de détaillants, le contrôle exercé a souvent une
double origine ; le fabricant prend sur lui de contrôler l’activité des distributeurs qu’il a lui-
même recruté et de façon hiérarchique un second contrôle est confié au distributeur.

C’est dire que le contrôle se ferra en cascade. En effet, le distributeur principal qui fait
fonction de grossiste contrôle son revendeur immédiat, et ce dernier contrôle la distribution
des détaillants135.

En revanche, si le réseau est basé sur un contrat cadre liant directement le fabricant à un
certain nombre de revendeurs agréés, le contrôle se ferra directement et portera sur le respect
des critères de qualification professionnelle ou d’installation du distributeur et de son
personnel ainsi que sur le respect de l’étanchéité du réseau ; mais aucun contrôle ne devrait
être admis sur des critères non retenus pour la sélection des revendeurs. En d’autres termes, le
contrôle bien que consacré par la loi ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire pour atteindre
l’objectif visé136.

Il est improbable que le contrat cadre impose à chacun des membres du réseau sélectif des
obligations strictes tant pour le respect des critères de sélection que pour le maintien de
l’étanchéité du réseau. Dès lors, ce droit de contrôle reconnu au fabricant paraît indiscutable si
l’on ne veut pas vider le système de son efficacité. Mais il serait sans doute vain d’organiser
un contrôle si l’on ne prévoyait pas dans le même temps des sanctions à l’encontre de toutes
violations des règles de sélection137.

135
M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n° 32.

136
J.J. BURST ET R.KOVAR, op. cit, p. 475.

137
ROMY ISABELLE, GAUTIER EVE, Responsabilité au sein du réseau de distribution exclusive et sélective, in: Les
contrats de distribution. Contributions offertes au Professeur François Dessemontet à l'occasion de ses 50 ans,
CEDIDAC 38, Lausanne 1998, 381-401.

45
Certains auteurs citent deux cas d’agissement enfreignant aux règles du réseau et qui peuvent
être sanctionnés à savoir, la revente à des détaillants non agréés et la vente dans des locaux de
tiers non agréés138. De façon générale, les contrats cadres de distribution sélective disposent
dans la rubrique consacrée aux ventes que : « le distributeur agréé s’engage à ne vendre les
produits qu’au détail et à des consommateurs directs et s’interdit donc de céder ces
produits, sous quelque forme que ce soit, à toute collectivité, à tout négociant, grossiste ou
détaillant »139.

La rétrocession est donc formellement interdite et le distributeur agréé doit s’en abstenir en ce
que le fabricant pourra, sur la base de la clause de non rétrocession, non seulement résilier
avant terme le contrat, mais, en outre, demander réparation sous forme de dommage-intérêts
du préjudice subi en conséquence des rétrocessions interdites.

En raison de la difficulté de déceler l’auteur de la rétrocession et pour bien contrôler


l’étanchéité du réseau, les fabricants ont procédé à la technique du « contremarquage ». Cette
dernière consiste à inscrire sur l’emballage des codes correspondants au numéro
d’identification du vendeur agréé et en cas de violation, le distributeur coupable est identifié
grâce aux codes inscrits sur les produits en circulation chez le revendeur hors réseau 140.

Est également responsable le distributeur hors réseau qui détruit ou masque les codes pour
brouiller les pistes et commet ainsi un acte de concurrence déloyale engageant sa
responsabilité civile. Toutefois, Les fabricants victimes d’une rétrocession déloyale doivent
apporter la preuve de la licéité de leurs réseaux de distribution sélective pour avoir la
condamnation des auteurs de la rétrocession interdite141.

D’une autre manière, le contrôle du respect de l’obligation de l’interdiction des ventes hors
réseau se fait au moyen des factures établies par le distributeur agréé. En cas de difficulté

138
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p. 136.

139
FROGER, La sanction de la rétrocession illicite, Cah.dr. entr 1991/1, 21 (n° spécial distribution sélective).

140
D. FERRIER, préc, p. 272.

141
Ibid.

46
d’avoir les factures, le fabricant peut agir en justice afin d’obtenir d’un revendeur non agréé la
communication des factures faisant preuve des reventes interdites142.

Ces méthodes de contrôle ainsi reconnues au fabricant sont assorties de sanctions permettant à
ce dernier de lutter contre les fléaux menaçant l’image de marque de ses produits et l’unité de
son réseau. Bon nombre de sanctions sont prévues en cas d’inobservation des règles de la
distribution sélective et les plus lourdes restent la résiliation du contrat de distribution avec
refus de fourniture pour l’avenir et même résiliation du contrat de fourniture en cours
d’exécution143.

Après avoir exposé ce pouvoir de contrôle que détient le fabricant sur son réseau dans le
marché français, il convient de se demander si ce contrôle peut être aussi efficace en Algérie ?

Pendant les années 70 en Algérie, les monopoles accordés aux entreprises publiques tant au
niveau du commerce intérieur qu’extérieur lui permettaient un contrôle quasi-total sur les
importations et le fonctionnement du marché national144. En effet, le commerce de gros était
l’apanage d’un certain nombre de sociétés nationales qui couvraient un large éventail de
produits de large consommation et que par l’intermédiaire de la SNNGA145, le commerce de
détail était investi par le secteur public, présent à tous les niveaux et contrôlant les circuits de
l’importation jusqu’à la mise à disposition du client final.

Le retrait de l’Etat du domaine du commerce de détail par la dissolution des EDG146 a permis
au marché informel d’investir le terrain abandonné par les entreprises publiques147. A cet

142
D. FERRIER, préc, p. 272.

143
FROGER, préc.

144
A cette époque de l’Algérie, les ministères du Plan, des finances, de l’agriculture et du commerce veillaient
grâce à tout un ensemble de mesures au bon fonctionnement du système : le contrôle des prix était sévère et
nul n’était censé ignorer la loi. L’ouverture d’un commerce était strictement subordonnée à la délivrance d’un
registre du commerce. Les contrôleurs et inspecteurs principaux du commerce étaient particulièrement bien
formés et leur plans de travail était cohérent. Ainsi, chaque daïra devait bénéficier d’un supermarché de 2000
m² et chaque wilaya d’au moins un supermarché de 3000 m².

145
Société Nationale des Nouvelles Galeries Algériennes.

146
Entreprise de Distribution des Galeries

47
égard, des experts d’une délégation européenne ont affirmé que le marché informel représente
actuellement 30% de l’économie algérienne148.

A l’inverse de l’environnement juridique et économique français, le marché algérien n’offre


que peut de garanties et moyens au fabricant pour bien contrôler la circulation de ses produits
en territoire national. En effet, les causes en sont la prolifération du marché informel et
l’impunité des auteurs des pratiques commerciales frauduleuses qui se manifestent par des
ventes et chats sans factures ou sous-factures, des registres de commerce élaborés grâce à des
prête-noms, des sous déclarations et fausses déclarations en douanes ainsi que le phénomène
de la contrefaçon qui touche quant à lui presque tous les secteurs de l’économie. Pour juguler
de telles pratiques illégales et hautement préjudiciables à l'économie nationale, les pouvoirs
publics doivent être en mesure d’assumer leur rôle de régulateur par la mise en œuvre d'une
série de mesures susceptibles de freiner la progression des pratiques commerciales
frauduleuses en Algérie149.

Parmi les réformes engagées par le législateur algérien pour mieux contrôler le marché, il y a
lieu de citer celles qui ont trait à la transparence des pratiques commerciales notamment les
nouvelles règles régissant la facturation. La loi n°04-02 prévoit des règles générales de la
facturation et le texte d’application fixe les règles relatives à l’établissement et à la
conservation de la facture150. La loi relative aux pratiques commerciales énonce aussi les
sanctions applicables en cas de violation des règles de facturation.

Sur le fondement de l’article 10 de la loi n°04-02, le distributeur agréé a l’obligation de


délivrer la facture dès la réalisation de la vente ou la prestation de services. Si son client est un
autre distributeur agréé, il doit réclamer la facture, par contre elle n’est délivrée au

147
Le ministre du commerce de l'époque attribue les causes du développement du marché informel à la
libéralisation du commerce qui a vu émerger pas moins de 15 000 importateurs, la compression des travailleurs
née de la récession économique et leur reconversion forcée dans le secteur informel ainsi qu'à la déperdition
scolaire.Réponses aux questions posées à M. BOUKROUH en 2003 rapportées par La Tribune

148
ILLYES MALKI, « Lutte contre le marché informel en Algérie, la délégation européenne apporte son
soutien. », EL watan 27/11/2006.

149
K. ASSIA, Un œil sur le commerce informel, le quotidien d’Oran du 20-12-2009.

150
Décret exécutif n°05-468 du 8 Dhou El Kaada 1426 correspondant au 10 décembre 2005 fixant les conditions
et les modalités d’établissement de la facture, du bon de transfert, du bon de livraison et de la facture
récapitulative.(J.O.R.A. n°80).

48
consommateur que s’il en fait la demande. La facture doit être émise en double exemplaire.
Le commerçant et son client doivent, chacun, en conserver un exemplaire. La facture doit
également comporter un numéro et des mentions obligatoires151.

Si en dépit de ses règles, le distributeur agréé entend échapper au contrôle du fabricant, ce


dernier demeure protégé contre tous les membres de son réseau coupables de pratiques
commerciales frauduleuses interdites par l’article 24 de la même loi et particulièrement
l’établissement de factures fictives ou de fausses factures dans le but de brouiller les pistes et
d‘échapper au contrôle.

Il convient de signaler que le texte algérien reprend les mesures édictées par l’article L. 441-3
du code commerce français qui oblige le commerçant à établir une facture pour chaque
opération qu’il réalise avec les autres agents économiques ou avec les consommateurs finaux.

Favorisant le commerce informel et l’évasion fiscale, le non respect des règles de facturation
est lourdement sanctionné par le dispositif algérien. Ainsi, un distributeur agréé épinglé pour
défaut de facturation écopera d’une amende égale à 80% du montant qui aurait dû être facturé.
Aussi, les cas des factures non conformes sont punis, sous certaines conditions prévues à
l’article 34, d’une amende allant de 10 000 à 50 000 DA152.

151
Décret exécutif n° 05-468 du 8 Dhou El Kaada 1426 correspondant au 10 décembre 2005 fixant les conditions
et les modalités d’établissement de la facture, du bon de transfert, du bon de livraison et de la facture
récapitulative.

152
En France, la violation des règles relatives à l’établissement de la facture fait l’objet de sanctions pénales et
fiscales. Sur le plan pénal, le commerçant est passible d’une amende 75 000 €. Le juge est en droit de porter le
montant de l’amende à 50% de la somme facturée ou de celle qui aurait due être facturée (art.L441-4 C.com.).
Sur le plan fiscal, une amende peut être infligée au commerçant dans certains cas (amende de 50% du montant
facturé lorsque la facture ne correspond pas à une livraison de biens réelle, amende de 50% du montant de la
transaction en l’absence d’émission d’une facture, le client étant solidairement responsable du paiement de
l’amende…).

49
Paragraphe 02 : la constitution du réseau

La conclusion par un même fournisseur d’un ensemble de contrats avec divers distributeurs,
préalablement sélectionnés, peut aboutir à la création d’un réseau de distribution. Il n’existe
pas de contrats entre ces différents distributeurs, mais leurs relations communes, les
engagements similaires ou quasi-similaires qu’ils ont avec un même fournisseur donnent à cet
ensemble une identité commune153.

Toutefois, un réseau de distribution sélective peut avoir différentes structures. En effet, la


distribution peut fonctionner par une structure simple reposant sur un ensemble de contrats
(A) ou une structure composée regroupant grossistes et détaillants (B).

A) la structure contractuelle

Le réseau de distribution concerne l’ensemble des personnes physiques et morales qui


concourent à la vente d’un bien ou d’un service depuis la production jusqu’au consommateur
final. Cet ensemble apparaît juridiquement comme « un groupe de contrats visant un but
commun à toutes les parties, connu et voulu par elles, qui assure la connexité de leur
convention »154.

Or, pour mettre un réseau de distribution, l’entreprise doit prendre en compte les forces et
faiblesses ainsi que les facteurs environnementaux du marché. En effet, un réseau de
distribution sélective peut fonctionner par une structure simple gouvernée par un contrat cadre
et intégrant un ensemble de distributeurs de même niveau. Par contre, d’autres réseaux
utilisent des circuits longs basés sur une structure composée de différents agents
économiques.

153
D. FERRIER, op. cit, p. 226.

154
P. PIGASSOU, « La distribution intégrée», RTD com 1980, p. 473.

50
Un réseau de distribution sélective peut être monté par un maillage de contrats. A chacun de
ces contrats sont parties, d’une part, le fournisseur et, d’autre part, un distributeur sélectionné.

De ce fait, le réseau a pour fonction de donner une dimension collective aux rapports
bilatéraux établis entre un fournisseur et un revendeur en vue de former un ensemble
cohérent.

Ainsi, la politique commerciale qu’implique le réseau doit veiller à l’intérêt commun du


fournisseur promoteur du réseau et des distributeurs adhérents au réseau155.

En raison de l’interdiction faite par le droit de la concurrence de la discrimination, le réseau se


caractérise aussi par la similarité des contrats de façon à éviter tout traitement discriminatoire
des revendeurs agréés156. Le réseau de structure contractuelle se caractérise finalement par la
combinaison des engagements. Chaque distributeur va bénéficier ou avoir à sa charge les
effets résultants du contrat que tout autre membre du réseau aura conclu avec le
fournisseur157.

A titre d’exemple et en matière de distribution sélective, un distributeur agréé sera tenu, aux
termes de son contrat, d’exécuter des prestations de service après vente ou de garantie au
profit non seulement de ses propres clients mais encore des clients d’un autre membre du
réseau158.

Pour bien souligner le caractère contractuel du réseau de distribution sélective, certains


auteurs précisent qu’aux termes de cette convention « le fabricant contracte l’obligation
d’approvisionner le distributeur sélectionné et ce dernier prend divers engagements variables
suivant les circonstances, mais parmi lesquels figurent normalement celui de ne pas
commercialiser le produit considéré ailleurs que dans le lieu convenu et de ne pas le vendre à
des revendeurs non agréés, c'est-à-dire à ceux qui ne sont pas membres du réseau que
constituent les distributeur s sélectionnés ».159

155
T. HASSLER, L’intérêt commun, RTD com. 1984, p.581.

156
M. MALAURIE-VIGNAL, Droit de la distribution, Sirey, 2006, p. 87.

157
D. FERRIER, op. cit, p. 272.

158
V. Lamy droit économique, 2003, n° 4551.

159
BONNET G. ET MOUSSERON J-M., chr. Dr. entreprise 1989, n°2, p. 12.

51
Dans ce domaine, l’unanimité n’existe pas. Une partie de la doctrine reconnaît donc le
caractère contractuel du réseau, alors qu’une autre partie, au contraire, le met en doute, voyant
qu’il s’agit plutôt « d’un type d’organisation de la distribution qu’une catégorie de contrats
proprement dite ».160

En effet, notent ces auteurs, le système de distribution sélective ne se conçoit qu’organisé en


un réseau et ne saurait s’appliquer à un contrat isolé.

A) La structure composée

Outre le système simple basé sur un contrat cadre unissant chaque distributeur agréé au
fabricant, il n’est pas rare qu’un fabricant choisisse de recourir à différentes catégories
d’opérateurs économiques pour mettre en place un réseau sélectif composé.

L’étude de la typologie des agents économiques chargés de la distribution fait apparaître trois
types d’opérateurs. On trouve en premier lieu le diffuseur chargé de la première mise sur le
marché du produit, de « l’introduction des marchandises dans l’appareil de distribution qui va
les acheminer jusqu’au consommateur final ». On distingue ensuite le grossiste, lequel fournit
des produits ou des services dans des quantités excédant les besoins normaux d’un
consommateur. Enfin, c’est au détaillant que revient le soin de commercialiser les produits ou
les services en quantité correspondante aux besoins des consommateurs161.

Si le fabricant d’articles de luxe choisit d’écouler ses produits par un circuit long composé de
grossistes et de détaillants, il doit opérer la sélection d’un certain nombre de grossistes qui, à
leur tour, habilitent des détaillants selon les critères de sélection définis par le contrat avec le
fabricant162.

160 ème
SCHAPIRA J. , Le TALLEC G., BLAISE J.B., IDOT L., Droit européen des affaires, PUF, Thémis, 2 volumes, 5 éd.
1999. p. 95.

161
J. BEAUCHARD, Droit de la distribution et de la consommation, PUF 1996, coll.Thémis, p. 220.

162
J. P. PAOUKDJIAN, le droit du parfum, 1982, LGDJ, p. 55.

52
Sur ce point, la commission européenne exige que la sélection des détaillants soit effectuée
par le grossiste mais accorde néanmoins un droit de contrôle au fabricant qui peut s’exercer
soit préalablement à la sélection par un véto soit ultérieurement par un retrait
d’agrément.163Dès lors se dessine le profil du réseau composé qui fonctionne selon des règles
bien précises. En effet, le grossiste agréé ne peut livrer que le ou les concessionnaires
exclusifs agréés qui, à leur tour, ne pourront approvisionner que les seuls détaillants agréés 164.

S’il fallait opter pour un réseau composé, le fabricant doit contrôler son système de
commercialisation en cantonnant chaque catégorie de distributeur dans sa fonction. Aux
termes du contrat de distribution sélective, le fabricant peut interdire les ventes en amont
consistant pour le détaillant de fournir un grossiste, mais aussi les ventes sautées à l’issue
desquelles le grossiste vend directement au consommateur final 165.

C’est par cette interdiction faite par le fabricant que se réalise, au sein du réseau composé, la
séparation des deux fonctions dans l’objectif de garantir une concurrence équitable entre les
différents membres du réseau. En revanche, si le fabricant autorisait les grossistes à vendre
ses produits directement au consommateur final, ils bénéficieraient d’un avantage
concurrentiel par rapport aux détaillants166.

Qu’il soit simple ou composé, le réseau sélectif apparaît comme le corollaire de rapports
bilatéraux établis entre un fournisseur et un revendeur agréé, et multilatéraux liant l’ensemble
des distributeurs agréés au fabricant et dont la finalité est de former une entité homogène apte
à commercialiser de façon optimale des produits d’une certaine nature.

163
Déc. n° 75/73/CEE de la commission, 13 déc. 1974. BMW, JOCE 3 févr. 1975. n° 1. 29.

164
J.J. BURST ET R.KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence » RTD com,
1978, p. 446.

165
V. Lamy droit économique, préc, n° 4542.

166
JEAN -PIERRE CHAMOUX ET HENRI LEPAGE, Distribution sélective et droit de la concurrence : critique d’une
vision néoclassique,Journal des Economistes et des Etudes Humaines, vol.7 numéro 4, décembre 1996.

53
Chapitre 02 : les étapes de la distribution sélective

La distribution sélective est une forme de distribution intégrée, c'est-à-dire que le fabricant
met en place un réseau de distributeurs agréés liés à lui par des engagements contractuels
souscrits dans le contrat cadre.

Ce contrat de distribution, comme tout autre contrat, doit naturellement rassembler les
éléments essentiels envisagés par les dispositions générales du code civil qui s’appliquent à
toutes les étapes du contrat de distribution sélective.

Il existe deux étapes importantes dans le contrat de distribution sélective : son existence
(section 01) et son extinction (section 02).

Section 01 : l’existence du contrat de distribution sélective

Lors de sa naissance et pendant toute sa vie, le contrat de distribution sélective doit donc obéir
à des conditions générales du droit des obligations qui sont absolument nécessaires pour la
validité de l’existence du contrat.

L’existence du contrat de distribution sélective commence par sa formation (§ 1) et se


concrétise par son exécution (§2).

Paragraphe 01: la formation du contrat de distribution sélective

La mise en place d’un réseau de distribution sélective peut, en effet s’apparenter à un mariage
dans lequel les deux parties doivent clairement établir leurs obligations mutuelles. Les parties
sont également tenues de respecter des conditions de forme et de fond légalement déterminées
par le droit commun des contrats dans le code civil ainsi que des dispositions spéciales
régissant les contrats de distribution.

54
A) les conditions de forme

L’accord de distribution sélective est un contrat commercial puisqu’il a pour objet un acte de
commerce et qu’il est accompli par un commerçant pour les besoin de son commerce. Il est
alors soumis à la fois aux règles commerciales et à la théorie générales des contrats.

Contrat commercial, le contrat de distribution sélective est nécessairement un contrat


consensuel167, c'est-à-dire un contrat qui se forme par le seul échange des consentements sans
qu’aucune formalité ne soit nécessaire à sa validité168. Or, l’avènement de la production et de
la distribution de masse, a entrainé l’émergence de contrats types réalisés par la pratique au
profit de l’entreprise. Ces contrats types, qu’on appelle les contrats cadres de distribution, ont
induit une réaction de protection de la part du législateur à la faveur de tous ceux qui ne
peuvent qu’adhérer au modèle structuré par le fabricant ou le refuser en bloc169. La protection
de la loi s’est traduite par l’exigence d’un écrit pour la formation du contrat cadre de
distribution170.

Mais une question se pose à ce niveau de savoir si ce formalisme a été légalement exigé pour
former l’acte ou uniquement pour le prouver ?

Pour répondre à cette question, il convient de traiter la nécessité de l’écrit pour la formation
du contrat de distribution sélective avant de s’intéresser au rôle de l’écrit en matière de preuve
en cas de litige devant les tribunaux.

167
La plupart des contrat commerciaux se concluent rapidement et sans besoin qu’il y ait un écrit, cependant,
l’article 30 du code de commerce algérien et l’article 110-3 du code de commerce français imposent le respect
d’un principe général en matière de preuve qui fait l’acte authentique le premier moyen pour constater un
contrat commercial.

168
Le législateur algérien dispose du consensualisme à l’article 59 du code civil en affirmant que « le contrat se
forme dès que les parties ont échangé leurs volontés concordantes, sans préjudice des dispositions légales ».

169
B.BERLIOZ-HOUIN ET G. BERLIOZ, « Le droit des contrats face à l'évolution économique », Mélanges R. Houin,
Dalloz-Sirey, 1985 p. 3.

170
M. S. ZAKI, « Le formalisme conventionnel, illustration de la notion de contrat-cadre », RIDC, 1986, p. 1079.

55
1-la nécessité de l’écrit :

En matière de vente commerciale, la convention de vienne de 1980 dispose que le


consensualisme est traditionnel dans les échanges commerciaux, internes et internationales,
même si la sécurité et les modalités pratiques des transactions imposent l’écrit171.

Donc, le contrat de vente commerciale n’a pas à être conclu ni constaté par écrit et ne doit non
plus répondre à aucune condition de forme. Il peut être prouvé par tous les moyens, même par
témoins172.

Aussi bien en droit français qu’en droit algérien, la règle de la liberté de la preuve en matière
commerciale est posée. Le code de commerce français tant ancien 173que nouveau174 prévoit à
l’instar de l’article 30 du code de commerce algérien que le contrat commercial peut être
prouvé par tous les moyens. Ainsi, pour des exigences de rapidité et de simplicité inhérentes à
la vie des affaires, l’intervention d’un officier publique ou d’un notaire n’est en principe
jamais requise.

Les contrats de distribution sélective répondent à ce même principe du consensualisme. La


rédaction d’un acte écrit est cependant exigée d’une part en raison des exigences du droit de la
concurrence, et d’autre part en raison des dispositions légales en matière d’information
précontractuelle prévue en France par la loi Doubin. En effet, l’interdiction des pratiques
discriminatoires, prohibées par le droit de la concurrence tant en France qu’en Algérie, a
justifié, à fin de contrôle, une formalisation des conditions par lesquelles un fabricant et des
distributeurs agréés conviennent de leurs accords de distribution sélective175.

171
Art. 11 de la convention de vienne du 11 avril 1980 sur les contrats de vente internationale de marchandises
er
conclues et signée sous l’égide de l’Organisation des Nations Unis. Elle est entrée en vigueur en France le 1
janvier 1988 et en Algérie le 8 Novembre de la même année.

172
PH. DELEBECQUE, M. GERMAIN, Traité de Droit commercial, Ripert et Roblot, t. 2, LGDJ, 17ème édition,
2004, p. 192. F. Zéraoui-Salah, Traité de droit commercial algérien : les actes de commerce, le commerçant et
l’artisan, les activités commerciales réglementées, le registre de commerce, Editions Edik, 2003, p. 60.

173
Art. 109 de l’ancien code de commerce français.

174
Art. 110-3 du nouveau code de commerce français.

175
M. MALAURIE-VIGNAL, Droit de la concurrence et droit des contrats, D. 1995, p. 51 : « Aucun contrat ne
semble échapper à l’emprise du droit de la concurrence : les contrats de distribution,franchise, concession,
distribution sélective, mais aussi le prêt, le courtage, ou le contrat de conseil, ou le contrat de sous-traitance en
56
L’article L. 441-7, Ι du code de commerce français stipule qu’« une convention écrite conclue
entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services indique les obligations
auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l’issue de la négociation
commerciale (…) ».176Le législateur français impose également que l’écrit soit communiqué à
la direction générale de la concurrence, la consommation et la répression des fraudes. 177 La
sanction de l’inobservation de cette disposition ne saurait être la nullité du contrat et se limite
toutefois à une peine d’amende.178

Ainsi, l’exigence par la loi d’un écrit pour la conclusion d’un contrat de distribution sélective
pour permettre aux administrations compétentes de faire la police des pratiques
discriminatoires et faire respecter les règles du droit de la concurrence ne fait que confirmer
l’influence qu’exerce ce dernier sur la théorie générale du droit des contrats.179

Aussi, la rédaction d’un contrat écrit a été favorisée par un important mouvement en faveur
d’une protection du distributeur dans ces relations d’affaires avec le producteur. Ce
mouvement est apparu parallèlement au souci de protéger le consommateur dans sa relation
avec le professionnel180.

Ainsi, parallèlement à l’obligation d’information au profit du consommateur, la loi française


du 31 décembre 1989 dispose que le fabricant est tenu, préalablement à la signature d’un

relèvent ». V. aussi, J. MESTRE et B. FAGES, L’emprise du droit de la concurrence sur lecontrat, RTD com. 1998,
p. 71.

176
La loi n° 2008-776 du 4 août 2008 relative à la modernisation de l’économie.

177
Art. L. 450-3 du code de commerce français.

178
Art. L. 441-7, П du code de commerce français.

179
F. DREIFUSS-NETTER, « Le droit de la concurrence et droit des obligations », RTD civ. 1990, p.369 ; B. Fages
et J. Mestre, préc; J. Rochefeld, « Nouvelles régulations économiques et droit commun des contrats », RTD civ.
2001, p. 671 et s.

180
G. BERLIOZ, Droit de la consommation et droit des contrats, JCP 1979, éd.G, I, 2954D ; J. Calais-Auloy,
L’influence du droit de la consommation sur le droit civil des contrats, RTD civ. 1994, p.239 ;L’influence du droit
de la consommation sur le droit des contrats, RTDCom.1998 , p.115 ; Mazeaud, L’attraction du droit de la
consommation, RTD Com.1998, p.95.

57
contrat de distribution sélective de fournir au distributeur candidat à la sélection un document
donnant des informations sincères, qui lui permette de s’engager en connaissance de cause. 181

Compte tenu de cette nouvelle disposition, il est bien clair que les propriétaires de réseaux de
distribution sélective vont désormais passer par écrit les accords qu’ils concluront ou
proposerons aux revendeurs qui satisfont à leurs critères d’adhésion au réseau. Une partie de
la doctrine française affirme, dans ce contexte, que la rédaction par écrit des contrats de
distribution exigée par la loi n’est qu’une règle détachée du formalisme consumériste que le
droit français des contrats développe depuis une trentaine d’années.182

De ce fait, la présence dans les relations entre professionnels des mêmes préoccupations
protectrices que celles concernant les relations entre consommateurs et professionnels met en
évidence l’influence du droit de la consommation sur le droit commun des contrats issu du
code civil.183En toute hypothèse, même si la règle du consensualisme reste le principe général
en matière de conclusion de contrats commerciaux, la nature du contrat de distribution
sélective, qui est d’organiser des rapports complexes de longue durée entre les parties,
implique de rédiger soigneusement le contrat et de le coucher par écrit.184

En effet, la présentation du contrat liant les parties doit en faire un acte aisément lisible de
sorte qu’une consultation commode permette de s’y référer souvent. Un acte clair avec un
contenu bien détaillé favorise une exécution sans failles des parties de leurs obligations
contractuelles d’une part, et facilite l’interprétation de la volonté réelle des parties de la part
du juge en cas de litige d’autre part185.

Tant en droit français qu’en droit algérien, un acte notarié n’est jamais nécessaire à la
formation du contrat de distribution sélective. Toutefois, l’article 1325 du code civil français
et l’article 326 bis 2 du code civil algérien disposent que les actes sous seing privé doivent
être fait en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant un intérêt distinct. En conséquence, un

181
GAST, OLIVIER ; GRILLAULT LAROCHE, HAYETTE, La distribution sélective et la franchise, JCP E, n° 50,
14/12/2000, pp. 36-46

182
PH. ANTOMATTEI ET J.RAYNARD, Droit civil, Contrats spéciaux, éd. Litec, 2002, p. 356.

183
D. ZENNAKI, Droit des obligations, cours de licence, Faculté de droit, Université d’Oran, 2006/2007.

184
M. ZOÏA, Concession libre, la distribution sélective, J.-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n°82.

185
P. ANCEL, Force obligatoire et contenu obligationnel du contrat, RTD civ, 1999, p. 771 et s.

58
réseau de distribution sélective, faisant intervenir au contrat plusieurs distributeurs agréés,
exige pour sa validité au regard du droit civil, la signature d’autant d’actes sous seing privé
que de distributeurs agréés liés au fabricant186.

Que le contrat de distribution sélective soit établit par un acte sous seing privé ou encore
mieux par un acte notarié, la forme écrite a l’avantage de fixer avec certitude le moment et le
contenu du contrat et partant, d’établir l’équilibre contractuel et la confiance dans le monde
des affaires. Mais, s’agissant de contrats commerciaux, la distribution sélective se forme, en
principe, par la seule concordance de la volonté des parties, l’écrit n’étant exigé qu’à titre de
preuve187.

2-La preuve :

En droit français, la preuve d’un acte portant une somme supérieure à 1500 € se fait en
principe par écrit.188De son coté, l’article 333 du code civil algérien exige la preuve écrite et
ce, en dehors des matières commerciales, pour les actes juridiques dont la valeur est
supérieure à 100.000 ou est indéterminée. Ainsi, par exception à ces dispositions générales,
les législateurs français et algérien prévoient à l’égard des rapports entre commerçants, que
les actes de commerce peuvent se prouver par tous les moyens189.

186
La cour suprême algérienne a estimé, dans un premier temps, que l’acte sous seing privé avait une force
probante complète et que la forme authentique n’était pas une condition de conclusion des contrats même en
matière d’immeuble, mais un moyen de preuve (arrêt n°57930 du 07/02/1990.) ; puis dans un deuxième
temps, a considéré qu’en matière de vente d’immeuble l’acte sous seing privé ne valait que promesse de vente
et l’acheteur devait consolider son acte par une forme notarié (l’arrêt n°108/108 du 05/05/1995). Devant cette
controverse jurisprudentielle et la difficulté d’interpréter l’article 12 de l’ l'ordonnance n° 70-91 du 15
décembre 1970 portant organisation du notariat et l’article 324 bis 1 du code civil, une jurisprudence récente
est venue trancher en affirmant que la forme authentique est requise, sous peine de nullité, en matière de
transfert de propriété immobilière (l’arrêt n° 210419 du 2000/04/26). www.coursuprême.dz.

187
Lamy droit économique, 2003, n° 4539.

188
Art. 1341 du code civil français.

189
F. NACER, Les contrats spéciaux, cours de licence, Faculté de Droit, Université d’Oran, 2005/2006.

59
Aussi bien en droit français qu’en droit algérien, la règle de la liberté de la preuve en matière
commerciale est posée. Le code de commerce français tant ancien190que nouveau191 prévoit à
l’instar de l’article 30 du code de commerce algérien que le contrat commercial peut être
prouvé par tous les moyens. Ainsi, pour des exigences de rapidité et de simplicité inhérentes à
la vie des affaires, l’intervention d’un officier publique ou d’un notaire n’est en principe
jamais requise.

Ainsi, c’est le principe de la liberté de la preuve qui s’applique pour mettre en évidence un
contrat de distribution sélective et ce pour des raisons de simplicité et de rapidité nécessaires
aux opérations commerciales. Dès lors, les règles du droit civil relatives à la preuve ne
s’appliquent pas aux contrats de distribution sélective, ceux –ci pouvant être prouvés par tous
moyens. Par exemple, si, en cas de litige, un contrat de distribution sélective est prouvé par
écrit, tous moyens de preuves peuvent être utilisés pour prouver « outre ou contre » le contenu
du contrat,192alors qu’en droit civil, en pareil cas, il faut une preuve par écrit.193 Cependant, si
le contrat est mixte, tous les moyens de preuve prévus par le droit commercial sont
opposables au commerçant mais ils ne le sont pas au non commerçant194.

Si la preuve contraire peut être apportée librement, la force probante de la preuve est laissée à
l’appréciation souveraine du juge. Pratiquement, la preuve pourra être faite par témoignage,
présomption et plus fréquemment par documents comptables. Ces derniers ne font, en
principe, preuve de leurs écritures que s’ils sont régulièrement tenus puisqu’un tribunal peut
prendre en considération, à titre d’indice, une mention d’une comptabilité irrégulièrement
tenue195.

190
Article 109 de l’ancien code de commerce français

191
Art. L. 110-3 du nouveau code de commerce français

192 ème
A. BENABENT, Droit civil, Les contrats spéciaux civils et commerciaux, Montchrestien, 7 éd., 2006, p. 191.

193
J.GHESTIN, Traité de droit civil, la formation du contrat, éd. LGDJ, 1999, p. 56.

194
F. ZEROUI-SALAH, op. cit, p. 59.

195 Cass. com. 24 novembre 2009, n° 08-20.549, « s'agissant d'un contrat entre commerçants, la preuve est
libre et les parties peuvent la rapporter par d'autres moyens que les éléments de preuve de droit commun. »
rfconseil.grouperf.com

60
La règle de la liberté de la preuve, appliquée aux contrats de distribution, permet
incontestablement le dénouement rapide des transactions commerciales. Mais, elle n’assure
que médiocrement la sécurité juridique pour les parties liées dans des relations de longue
durée. Pour cette raison et même en l’absence de prescription légale, les fabricants de produits
de marque de luxe ou de haute technicité ont souvent tendance, pour se prémunir contre
d’éventuelles contestations, à procéder à la rédaction de documents écrits développés sous
forme de contrats cadre englobant les conditions générales de contrats ultérieurs196.

On assiste donc à la renaissance du formalisme commercial dans l’intérêt de la sécurité


juridique des actes du commerçant. En effet, les contrats les plus indispensables à la vie des
affaires doivent être établis par écrits à l’instar du contrat de société (article 1835 du code
civil français et article 418 du code civil algérien), la vente ou le nantissement de fonds de
commerce (article L. 144-2 du code commerce français et article 79 du code de commerce
algérien), et plusieurs autres contrats dont l’écrit constitue une condition indispensable à leur
validité197.

Outre l’exigence d’un écrit pour la conclusion d’un contrat de distribution sélective, les
parties doivent veiller à respecter les conditions de fond prescrites par le droit commun des
contrats et par d’autres textes spéciaux.

B) Les conditions de fond :

La création d’un réseau de distribution sélective est un instrument stratégique qui permet à
un fabricant d’organiser sa coopération commerciale avec les revendeurs agréés. La mise en
place du réseau suppose l’élaboration et la conclusion d’un contrat cadre de distribution
sélective qui aura pour objet de définir les conditions des relations ultérieures que le fabricant
entretiendra avec les membres de son réseau198.

196 A. SAYAG, Le contrat-cadre 1- exploration comparative, LITEC, 1994, p. 92.

197
F. ZEAROUI-SALAH, préc, p. 60.

198
J.J. BURST ET R. KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence » RTD com,
1978, p. 475.

61
Ce contrat étant conclu entre commerçants, il est soumis aux règles générales du code civil
relatives à la formation de tout contrat, et aux règles de commerce qui garantissent les droits
des commerçants. Aussi, d’innombrables lois modernes, le plus souvent impératives,
réglementent des aspects particuliers du contrat de distribution sélective et constituent autant
de dérogations qui peu à peu, renouvellent le droit commun des contrats de distribution199.

Soumis aux règles générales et spéciales, le contrat de distribution sélective doit remplir
toutes les conditions de fond nécessaires à la formation des contrats et exigées par le code
civil ; un consentement libre et éclairé, un objet déterminé, la capacité des parties ainsi qu’une
cause réelle et licite.

L’étude portera, à ce niveau, sur l’application du code civil et les dérogations apportées en
raison du caractère spécial du contrat de distribution sélective.

1-le consentement :

Pour qu’un contrat de distribution sélective puisse être valablement formé, il faut que les
parties au contrat aient donné un consentement libre et éclairé au moment de la signature du
contrat.

a) un consentement libre :

A l’instar de tout contrat, le consentement au contrat de distribution sélective ne doit


naturellement être entaché d’aucun vice. Cependant, les distributeurs agréés se plaignent
parfois d’avoir été abusés dans leurs consentements en raison d’un déséquilibre contractuel
dans leur relation avec le fabricant réputé être le partenaire privilégié. Si, pour lutter contre ce
déséquilibre, les distributeurs agréés ne peuvent bénéficier de la législation consumériste, ils
ne sont pas pour autant évincés du droit commun des contrats dont la théorie des vices du
consentement pourrait constituer un moyen efficace pour faire tomber les conventions qui ne
sont pas loyalement conclues200.

199
G. CORNU, L’évolution du droit des contrats en France in Journées de la société de législation comparée
1979, R.I.D. Com.1979, p.447 ; J. MESTRE et B. FAGES, L’emprise du droit de la concurrence sur lecontrat, RTD
com. 1998, p. 71.

200
B. FAGES, « L’abus dans les contrats de distribution », Cah. dr. entr. 1998, n°6, p. 11.

62
Parmi ces vices du consentement, la violence reste le comportement déloyal le plus invoqué
par les distributeurs victimes d’abus commis par les fabricants en position de supériorité201.
La violence se définit comme « une contrainte exercée sur une personne pour la réduire à
passer un acte202 ». A l’inverse de l’erreur spontanée ou provoquée par le dol, la violence
n’altère pas la compréhension mais la liberté de la partie victime qui, tout en sachant que les
conditions du contrat lui sont désavantageuses, y consent sous une violence exercée par la
partie en position de force203.

Le code civil algérien a consacré deux articles à ce vice du consentement qui donne le droit à
la victime d’annuler le contrat si elle a contracté sous l’empire d’une crainte fondée, inspirée
par l’autre partie204. Lorsque la violence est exercée par un tiers, la victime ne peut demander
l’annulation du contrat que s’il est établi que l’autre partie en avait ou devait nécessairement
en avoir connaissance205.

Invoquant devant le juge, le vice de violence pour annuler le contrat, un détaillant affirme
avoir été dans la nécessité d’accepter les conditions du fabricant. La Cour de cassation
française avait estimé que le seul fait d’user de sa position dominante n’est pas illégal en soi
et ne constitue pas automatiquement le vice de violence. En effet, la Cour s’en tenait au
principe du libéralisme économique dans les rapports entre professionnels. Dans le cadre de
ses relations, chaque cocontractant est censé pouvoir résister aux pressions de l’autre partie de
façon à ne jamais consentir à un engagement qui lui porterait préjudice206.

201
B. MONTELS, « La violence économique, illustration du conflit entre droit commun des contrats et droit de la
concurrence »,RTD com., 2002, p. 417.

202
G. CORNU, Vocabulaire juridique Association H.Capitant, sous la dir. de G.Cornu, PUF 1996, 6ème éd.

203
« La violence est une contrainte exercée sur la volonté d'une personne pour l'amener à donner son
consentement. C'est la crainte qu'elle inspire qui vicie le consentement », J. GHESTIN ,Traité de Droit civil, Les
obligations, le contrat : formation, LGDJ 2° éd. 1988, n°443 ; J. CARBONNIER, Droit civil, tome 4, Les obligations,
22e édition, Puf, 2004, Paris, collection Thémis Droit privé, p. 204 ; J. TREILLARD, « Laviolence comme vice du
consentement en droit comparé», Mélanges Laborde-Lacoste, Bordeaux, éd. Bière, 1963, p. 420.

204
Art. 88 du code civil algérien.

205
Art. 89 du code civil algérien.

206
Cass. com, 21 février 1995, Bull. civ.,ІV, n° 50 ; JCP E. 1996, І.523, n° 2, note Mousseron ; RTD civ. 1996, p.
391, n°5, note J. Mestre.

63
Puis dans un important revirement, la chambre civile de la cour de cassation française
reconnaît explicitement, dans un arrêt du 30 mai 2000, que « la contrainte économique se
rattache à la violence ». Elle affirme également qu’il n’est pas contesté qu’une personne
morale incarnée en quelque sorte dans ses représentants, personnes physiques, puisse être
protégée contre la violence207.

Néanmoins, toute contrainte économique ne saurait être assimilée à la violence, les juges
continuent en effet d’exiger une faute commise par l’autre partie et ne prononce l’annulation
du contrat au titre de l’article 1112du code civil français que si la violence se révèle illégitime.

Depuis la réforme de 1996 et la loi du 15 mai 2001, le législateur français a multiplié les
réglementations de protection de la partie la plus faible dans le secteur de la distribution.
Ainsi, le droit de la concurrence devient défenseur des intérêts particuliers des distributeurs
face aux fabricants. En effet, lorsque la violence est telle qu’elle constitue un abus de
domination, la partie lésée peut recourir à l’article L. 442-2 du code de commerce208.

Suivant son homologue français, le législateur algérien a introduit dès 1995, suite au passage
à l’économie de marché, des dispositions relatives au délit d’abus de position dominante.

Cette tendance du législateur a été vivement critiquée par certains auteurs qui pensent que
cette méthode législative emporte des conséquences négatives, et qu’au lieu d’éloigner la
législation spéciale de son objectif pour en faire un instrument de protection, il aurait été
préférable d’exploiter les nombreuses ressources qu’offrent les dispositions du code civil 209.

207 ère
Civ. 1 , 30 mai 2000, Bull. civ. I, n°169

208
E. CLAUDEL, Le consentement en droit de la concurrence, consécration ou sacrifice ?, RTD com. 1999, p. 296.

209
TH. REVET, les apports au droit des relations de dépendance, RTD com, 1997, p. 37.

64
b) Un consentement éclairé :

Consacré depuis longtemps, le principe de l’obligation de renseignement du droit commun210a


donné lieu à un développement particulier en matière de contrats de distribution. En effet,
ayant pour objectif d’assurer une forme de moralisation des pratiques contractuelles, le
législateur français a, par la loi Doubin du 31 décembre 1989, obligé le fabricant à fournir, 20
jours avant la signature du contrat, un document avec des informations sincères permettant au
candidat à la sélection de s’engager en connaissance de cause. Le document d’information,
dont le contenu a été fixé par le décret d’application du 4 avril 1991, précise notamment,
l’ancienneté et l’expérience de l’entreprise, l’état et les perspectives du marché concerné,
l’importance du réseau, la durée du contrat, les conditions de renouvellement de résiliation et
de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités. Le décret précise également la
sanction pénale applicable en cas de violation de la loi du 31 décembre 1989211.

A noter qu’une partie de la doctrine française est hostile à cette obligation d’information
précontractuelle à la charge du fabricant. En effet, ce courant doctrinal estime qu’il est
« urgent de redonner au sujets de droit le sens de leur propre responsabilité, en repoussant
l’infantilisme juridique dans lequel ils sont aujourd’hui trop souvent confinés 212».

Par ailleurs, d’autres auteurs ont critiqué l’inefficacité de la sanction prévue en cas de
méconnaissance des règles de la loi Doubin et ont mis l’accent sur les hésitations
jurisprudentielles de prononcer la nullité du contrat de distribution en cas d’inobservation des
dispositions relatives à l’information précontractuelle. 213La justice française ne pouvait
décider d’une façon unanime si la nullité encourue était automatique ou si elle dépendait d’un
vice du consentement du distributeur. La Cour d’appel de Montpellier affirma à plusieurs
occasions, une solution selon laquelle la méconnaissance de l’obligation précontractuelle

210
M. MICHEL DE JUGLARD, l’obligation de renseignement, RTD civ. 1945, p. 1.

211 ème
Art. 2 du décret du 1991 punit de peines d’amendes prévues pour les contraventions de la 5 classe toute
violation de l’article L. 330-3 du code de commerce.

212
PH. LE TOURNEAU, Quelques aspects des responsabilités professionnelles, Gaz. Pal., 1986. 2. doctr., p. 616.

213
D. MAINGUY. J. L. RESPAUD, Comment renforcer l’efficacité de la loi Doubin ; Contrats-Conc.-Consom., mars
2003, p. 5 .M. BEHAR-TOUCHAIS et G. VIRASSAMY, Traitédescontrats, Les contratsde ladistribution, Paris,
L.G.D.J, 1999, n° 68.

65
d’information étant pénalement sanctionnée par le décret d’application, « ce qui démontre le
caractère d’ordre public de ces textes », leur inexécution « entraine la nullité du contrat »214.

Ce faisant, cette jurisprudence semble retenir une nullité de plein droit ou automatique, dès
lors que le fabricant ne justifie pas avoir communiqué dans le délai de 20 jours les
informations mentionnées par le législateur français dans le décret du 4 avril 1991. Puisque
pénalement sanctionnée, la règle est d’ordre public : y déroger par convention particulière
serait alors frappé de nullité en application de l’article 6 du code civil français215.

En revanche, la Cour d’appel de Rennes, dans un arrêt du 15 décembre 1999, retient ainsi
que : « le non respect par le franchiseur de son obligation précontractuelle n’est constitutif
d’un dol que s’il est établi que le comportement du franchiseur a conduit le franchisé à être
abusé sur les conditions réelles dans lesquelles il était amené à contracter 216».

Cette jurisprudence pose donc l’exigence de la preuve d’un vice du consentement pour
prononcer la nullité. En effet, en l’absence de la nullité comme sanction légalement prévue
dans les textes relatifs à l’information précontractuelle, il convient d’examiner si le
manquement à l’information précontractuelle par le fabricant a vicié le consentement du
distributeur.

La Cour de cassation française vient trancher cette controverse par un arrêt de la Chambre
commerciale du 10 février 1998. Il résulte de cet arrêt que le non respect des dispositions de
la loi Doubin n’emporte pas la nullité de plein droit du contrat de distribution mais, au
contraire, qu’il est nécessaire pour la partie lésée de démontrer l’existence d’un vice du
consentement, vice s’intégrant dans la théorie générale des vices du consentement217.

Cette obligation de renseignement amène souvent le fabricant à communiquer au revendeur


candidat à la sélection des éléments essentiels sur son entreprise. Pour éviter que le
distributeur ne fasse une mauvaise utilisation de ces informations, le fabricant a intérêt à faire

214
Montpellier, 4 déc. 1997 : JCP E, 1998, Ι, 606, obs,. Ph. Neau-Leduc.

215
Art. 06 du code civil français :« On ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui
intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs. »

216
JCP E 2000, Cah. dr. entr. N° 4, p. 18, obs. J. L. Respaud.

217
RTD. civ 1998, p. 130, obs. P. Y. Gautier, p. 365.

66
signer le distributeur un avant contrat de pourparlers dont une clause conviendra
expressément du secret des informations communiquées et de l’interdiction à leur bénéficiaire
de les utiliser lui-même. Le distributeur est tenu de cette façon à la confidentialité sous peine
d’engager sa responsabilité précontractuelle218.

En définitive, l’objectif essentiel visé par le législateur à travers l’obligation précontractuelle


d’information est de permettre au distributeur de s’engager dans ses relations d’affaires avec
le fabricant en connaissance de cause.

Une autre problématique tout aussi importante tient au consentement exprimé dans les
contrats signés via internet. En France, pour acquérir des produits de luxe sur internet rien
n’est plus facile ; il suffit pour le client d’exprimer son consentement par une signature
électronique. Cependant, la loi existe pour veiller à la sécurité et à la loyauté des transactions
commerciales notamment, en ce qui concerne l’identité des contractants, la nature de
l’information proposée, la valeur juridique des engagements pris en ligne ou encore la
protection des consommateurs.

Au plan international, la signature électronique trouve son origine dans l’adoption, le 16


décembre 1996, de la loi type sur le commerce électronique par l’assemblée générale de la
commission des nations unis pour le droit commercial international. Si cette loi exerce une
forte influence sur les Etats qui la considèrent comme une norme de fait, elle demeure
toutefois sans caractère contraignant219.

Influencé par le droit européen220, le législateur français a adapté son droit de la preuve à la
signature électronique par la loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de
la preuve aux technologies de l’information et relative à la signature électronique. Cette loi
modifie le droit français de la preuve en son article 1316-4 du code civil et reconnaît
désormais l’équivalence du support papier et du support numérique dès lors que certaines

218
J. SCHMIDT-SZALEWSKI, La sanction de la faute précontractuelle, RTD civ.1974, p.47 ; P. MOUSSERON,
Négociations contractuelles et responsabilité civile délictuelle, RTD com.1998, p. 243.

219
www.uncitral.org

220
La directive européenne du 13 décembre 1999 définit la signature électronique en son article 02 comme :
« une donnée sous forme électronique qui est jointe ou liée logiquement à d’autres données électroniques et
qui sert de méthode d’authentification ».

67
conditions son remplies221. A cet égard, le décret du 30 mars 2001 distingue la signature
électronique sécurisée de la signature électronique simple222. Pour bénéficier de la
présomption de fiabilité, la signature électronique sécurisée doit être propre au signataire ;
être créée par des moyens que le signataire puisse garder sous son contrôle exclusif ; garantir
avec l’acte auquel elle s’attache un lien tel que toute modification ultérieure de l’acte soit
détectable223.

Ne bénéficiant pas de la même présomption de fiabilité, la signature électronique simple n’est


cependant pas dénuée d’effet. Ainsi, toute personne s’en prévalant devra prouver la
conformité du procédé utilisé pour la signature avec les conditions posées par l’article 1316-4
du code civil, en l’occurrence « un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec
l’acte auquel elle s’attache »224

Faisant de même que son homologue français, le législateur algérien a élaboré une législation
reconnaissant et donnant une valeur légale aux signatures électroniques, leur conférant, sous
certaines conditions, la même force probante que les signatures manuscrites. Ceci grâce à
l’amendement du code civil par la loi n° 05-10 du 20 juin 2005 qui consacre dans ses articles
323 bis, 323 ter et 327 l’adoption de la signature électronique dans le système de preuve
algérien.

Cependant, le législateur algérien accuse un retard quant aux textes d’application de ses
articles qui ne contiennent aucune précision sur le champ d’application de l’écrit électronique
et de la signature électronique. Des experts insistent sur le rôle important que peuvent jouer
l’écrit électronique et la signature électronique dans le développement du commerce extérieur
d’un pays, d’où l’intérêt de voir le législateur algérien les mettre en application dans les plus
brefs délais225.

221
P. CATALA, « Ecritures électroniques et actes juridiques », Mélanges Cabrillac, Dalloz et Litec, 2000, p. 95.

222
Décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 pris pour l’application de l’article 1316-4 du code civil et relatif à la
signature électronique (JO, 31 mars 2001, p. 5070).

223 er
Décret n° 2001-272, 30 mars 2001, art. 1

224
L. LEVENEUR, Signature électronique : un décret, et beaucoup de questions, Contrats, concurrence,
consommation, 2001, n° 5, p. 3.

225
Déclaration de Mr J.-C. Monnier, ingénieur informaticien et membre consultatif de la commission
informatique de l’ordre des experts comptables en France, au quotidien national « jeune indépendant », en
68
Actuellement, les articles 323 bis, 323 ter contenus dans le code civil algérien qui sont
presque la copie conforme des articles français imposent les mêmes conditions édictées par le
code civil français pour qu’une signature électronique ait une force probante. En effet, le
législateur algérien pose l’obligation d’identification du signataire et la nécessaire intégrité de
l’écrit électronique pour que ce dernier soit attribué les mêmes effets qu’une preuve littérale.
Par ailleurs, l’article 327 reconnaît à l’écrit électronique la même force probante que celle de
l’acte sous seing privé à condition de se conformer à l’article 323 ter226.

Tout porte à croire qu’en adoptant ces règles, le législateur algérien poursuit les mêmes
objectifs que son homologue français, a savoir :

- favoriser les échanges électroniques en donnant force probante à l'écrit électronique.

-favoriser le commerce électronique en créant la notion d'acte électronique signé, non


répudiable et opposable aux tiers227.

2) L’objet :

Aux termes de la théorie générale des obligations, l’objet du contrat est l’opération juridique
que

les parties souhaitent réaliser ; il permet de déterminer ce à quoi le débiteur s’est engagé.

A l’instar du consentement, l’objet est une condition nécessaire à la formation valide du


contrat de distribution sélective228.

marge du séminaire tenu le 02/05/2005 à Alger, en collaboration avec le centre national des techniques de
l’information et de la communication (CETIC) sur le thème « de la capture au stockage de vos documents.
Numérisation- gestion électronique des documents-stockage-signature électronique ».

226
M. MAOUENE, La signature électronique en matière de preuve dans la législation arabe et internationale
(Etude Comparative). Le Caire 2008 – Edition, La maison du nouveau livre, p. 25.

227
T. GACEM, « L'écrit et la signature électronique devront bientôt avoir force probante en Algérie », jeune
independant du jeudi 5 mai 2005. www.jeune-independant.com

228
CH. LARROUMET, Droit civil, t.3, Les obligations, le contrat, Economica, 5e éd., 2003, p. 175 ; J. FLOUR, J.-L.
AUBERT ET E. SAVAUX, Les obligations, t.1, L'acte juridique, Sirey 2006, p. 163 ; J. CARBONNIER, Droit civil, Les
obligations, 18 ème éd.1998, p. 116.

69
S’agissant de matériels de haute technicité ou de parfums de luxe par exemple, le contrat ne
sera valablement formé qu’autant que son objet sera une chose présente, c'est-à-dire existant
au moment de sa conclusion. L’objet ne doit pas non plus contrevenir à l’ordre public et aux
bonnes mœurs. Dès lors, le contrat de distribution sélective est nul lorsque son objet est
illicite229. Dans la même logique, la distribution sélective est frappée de nullité absolue
lorsqu’elle porte sur certains objets mis par la loi hors du commerce230.

De ce fait, le bien ou le service constitue l’objet de l’obligation du fabricant, le nouveau texte


algérien relatif à la protection du consommateur et la répression des fraudes dispose en son
article 03 que le service est toute prestation fournie, tandis que le bien est un objet matériel
cessible à titre onéreux ou gracieux. le distributeur est tenu de payer le prix en contrepartie
de l’exécution du fabricant de son obligation. Or, le problème s’est posé de savoir si le contrat
cadre de distribution sélective doit préciser le prix de vente des produits contractuels qui ne
seront effectivement commandés et livrés qu’après la conclusion de contrats d’applications,
ou à tout le moins fixer la méthode de détermination du prix, ou encore laisser cette question à
la négociation ultérieure des parties.231

En d’autres termes, la détermination du prix au moment de la formation du contrat de


distribution sélective est-elle une condition de validité de ce contrat ?

L’exigence de la détermination du prix dans les contrats cadres en matière de distribution a


suscité jusqu’à un certain temps une abondante controverse jurisprudentiel. Dès 1971, la cour
de cassation française estimait qu’un accord cadre de distribution mettant à la charge du
distributeur une obligation d’acheter était un contrat de vente, auquel il fallait appliquer

229
Avant la modification du code civil par la loi 05-10, le législateur algérien consacrait l’article 93 à la nullité du
contrat pour impossibilité de son objet et l’article 96 pour la nullité encourue pour objet illicite. L’article 51 de
la loi 05-10 abroge l’article 96 du code civil et devient article 93 où les deux causes de nullité sont prévues dans
le même article. Un auteur algérien regrette l’abrogation de l’article 96 tant il avait l’avantage de la clarté, M.
SALAH, Les sociétés commerciales, tome 1, Les règles communes- La société en nom collectif- La société en
commandite simple, éd. Edik, 2004, p. 45.

230
G. LOISEAU, « Typologie des choses hors du commerce », RTD civ. 2000, p. 47.

231
M. JEOL, Le contenu juridique des décisions du 1er décembre 1995, inLa détermination du prix : nouveaux
enjeux, un an après les arrêts de l’assemblée plénière, Dalloz, 1997, p. 3.

70
l’article 1591 du code civil français qui prévoit la nullité en cas d’indétermination du prix par
les parties232.

Dans un premier revirement, la cour de cassation a étendu son champ d’intervention en se


fondant sur l’article 1129 du code civil relevant de la théorie générale des obligations qui
impose la détermination de l’objet du contrat comme condition essentielle requise par l’article
1108 du même code pour la validité de l’obligation. Cette jurisprudence, constante pendant
vingt ans, précisait que la sanction de l’indétermination du prix dans les contrats de
distribution était la nullité puisqu’il manquait un élément essentiel à la validité du contrat 233.

Annoncé, le 29 novembre 1994, par l’arrêt Alcatel rendu par la première chambre civile, le
grand revirement des juges français eu véritablement lieu par quatre arrêts redus par
l’assemblée plénière le 1er décembre234.

Dans la série d’arrêts de l’assemblée plénière consacrant le revirement de la jurisprudence


française, la Cour de Cassation a décidé que « lorsqu’une convention prévoit la conclusion de
contrats ultérieurs, l’indétermination du prix de ces contrats dans la convention initiale
n’affecte pas, sauf dispositions légales particulières, la validité de celle-ci, l’abus dans la
fixation du prix ne donnant lieu qu’à résiliation ou indemnisation »235.

3-la capacité des parties :

Tant en droit français qu’en droit algérien, la capacité pour conclure un contrat de distribution
sélective obéit aux règles générales issues du droit des obligations. Ainsi, en vertu de l’article
1123 du code civil français toute personne peut contracter si elle n’en est pas déclarée
incapable. Le législateur algérien reprend cette règle dans l’article 78 du code civil, mais en

232
Ch. com. 27 janv. 1971: D. 1972, 536, note Sayag.

233 er
G. CANIVET, « L’indétermination du prix, à propos des arrêts du 1 décembre 1995 », Introduction à la
conférence du 10 avril 2006 dans le cadre du cycle Droit, économie, justice. www.courdecassation.fr

234
Cass. Civ. I, 29 nov. 1994, Bull. Civ. IV n° 348, D. 1995, Jur. p. 122, note Aynès.

235
J. BORE, « Morte au champ d'honneur : la jurisprudence sur l'indétermination du prix dans les contrats cadre
de longue durée », Mélanges Claude Champaud , LGDJ, Paris, 1997, p.101 ; M. Jéol, « Le contenu juridique des
er
décisions du 1 décembre 1995 », RTD com. 1997, p. 1.

71
précisant que l’incapacité peut être partielle ou totale236. Sans entrer dans le détail des régimes
d’incapacité, dont l’étude relève du droit des personnes, il convient de préciser que le
législateur algérien fixe à l’article 40 du code civil l’âge de la capacité à 19 ans révolus tandis
que l'article 388 du code civil français fixe la majorité à 18 ans accomplis et confère la
capacité d’accomplir tous les actes de la vie civile237.

En matière commerciale, une question se pose de savoir si un mineur émancipé peut exercer
des actes de commerce.

En droit algérien, le législateur donne au mineur émancipé de l'un ou de l'autre sexe le droit de
commercer mais sous certaines conditions. En effet, le code commerce impose que le mineur
soit émancipé, âgé de dix-huit ans accomplis et avoir été préalablement autorisé.
L’autorisation doit être écrite et doit émaner de son père, ou sa mère, si le père est décédé,
absent, déchu de la puissance paternelle, ou dans l'impossibilité de l'exercer ou, à défaut du
père et de la mère par une délibération du conseil de famille, homologuée par le tribunal.

Le législateur impose la forme de l’écrit à l’autorisation préalable et exige qu’elle soit


introduite avec la demande d’inscription au registre de commerce238.

A l’inverse, un mineur en France, même émancipé, ne peut pas être commerçant en vertu de
l’article L 121-2 du code de commerce français et donc ne peut conclure un contrat de
distribution sélective, cet acte serait sanctionné par une nullité relative sur le fondement de
l’article 1108 du code civil239.

236
Art. 78 du code civil (la loi n° 05-10) : « toute personne est capable de contracter à moins qu’elle ne soit
déclarée totalement ou partiellement incapable en vertu de la loi. »

237
Art. 388 du code civil français Modifié par Loi n°2007-308 du 5 mars 2007 - art. 2 JORF 7 mars 2007 en
vigueur depuis le 1er janvier 2009.

238
Art. 05 du code de commerce algérien.

239
Cependant, il faut préciser qu’en France un mineur émancipé a la même capacité civile qu’un majeur, il ne
peut pas être commerçant mais peut faire des actes de commerce de manière isolée, il peut en principe
acheter un fonds de commerce mais ne pouvant pas être commerçant ne pourra pas l’exploiter. S’il hérite d’un
fonds il pourra le revendre librement.

72
4-La cause :

La cause, en droit civil français et algérien, est nécessaire à la validité du contrat de


distribution sélective. Dans un contrat synallagmatique, la cause de l’obligation de chaque
cocontractant réside dans l’objet de l’obligation de l’autre. Ainsi, dans un contrat cadre de
distribution sélective, c’est parce que le fournisseur doit intégrer le distributeur agréé que ce
dernier accepte de se plier aux exigences du réseau. C’est dire que la cause est le mobile
déterminant qui décide une partie à contracter240.

La cause d’un contrat de distribution doit être licite ; elle ne peut, en ce sens, être contraire à
l’ordre public ou aux bonnes mœurs ; dans le cas contraire, le contrat est nul. En application
des règles générales, un contrat peut être annulé pour cause illicite ou immorale même lorsque
l’une des parties n’a pas eu connaissance du caractère illicite ou immoral du motif
déterminant de la conclusion du contrat241.

Tout compte fait, la réunion de ces conditions de forme et de fond, édictées par le code civil et
ménagées par le code de commerce, est nécessaire pour la formation valide du contrat de
distribution sélective. En cas d’inobservation de ces règles, les dispositions générales issues
du code civil français et algérien prévoient une nullité absolue d’intérêt général ou une nullité
relative d’intérêt principalement particulier242.

La nullité absolue est invoquée par toute personne intéressée ; le juge peut la prononcer
d'office, elle se prescrit par 15 ans en droit algérien alors qu’en France désormais par 5 ans
(autrefois 30 ans, ancien art. 2262 code Civil français). Seul l’un des contractants atteint peut
invoquer la nullité relative, dans un délai de 5 ans à partir du jour de la conclusion du contrat
et ce en droit français et algérien. Cependant pour les vices du consentement, ce délai ne court
qu'à compter de la découverte du vice ou alors lorsque la violence a cessé243.

240
R. VATINET, Le mutuus dissensus, RTD civ. 1987, p.272.

241 er
Cass. civ. 1 , 7 octobre 1998, Bull. civ I, n° 85.

242
J. FLOUR, J-L AUBERT ET E. SAVAUX, Droit civil – Les obligations – 1° L'acte juridique, Paris, Armand Colin,.
11ème édition, 2004, p. 241.

243
D. ZENNAKI, Droit des obligations, cours de licence, Faculté de droit, Université d’Oran, 2006/2007.

73
Tout contrat de distribution sélective dont les conditions de forme, le consentement, la
capacité, l’objet et la cause répondent aux règles précitées est correctement formé et produit
ses effets entre les parties et envers les tiers.

Paragraphe 02 : les effets de la distribution sélective

Comme tout contrat, le contrat de distribution sélective produit des effets qui intéressent
essentiellement les obligations des parties (A), mais s’ajoutent également des effets envers les
tiers (B).

A) les obligations des parties

Le fournisseur soucieux de l’image de qualité de son produit ou de ses services peut mettre en
place un réseau de distributeurs spécialisés, en nombre limité et ce, au moyen de contrats de
distribution sélective. Ces contrats sont soumis, quant aux obligations des parties, aux règles
générales du code civil régissant le contrat et ses effets entre les parties.

S’appliquent également à la distribution sélective les règles relatives au contrat de vente


issues du code civil et du code de commerce. Ici ne seront développées que les obligations
spécifiques à ce contrat et issues pour la plupart de la pratique et la jurisprudence244.

Au regard de ces conventions établissant une relation durable entre les parties, il convient de
s’attacher d’abord aux obligations du distributeur sélectionné (1) avant d’examiner le contenu
des prestations souscrites par le fabricant (2).

244
F. COLLART-DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, contrats civils et commerciaux, Dalloz 2006, 5ème éd, coll.
Précis, p. 256.

74
1- les obligations du distributeur sélectionné :

Dans son arrêt de principe « duo » la cour de cassation française énonce le principe de validité
des obligations souscrites en précisant que le contrat doit tendre, par des obligations
réciproques que s’imposent les contractants, à assurer un meilleur service au
consommateur245.

Dès lors, au regard de cet impératif explicite, l’analyse des obligations du revendeur
sélectionné portera sur des obligations liées à l’image de marque du produit et sur ses
obligations liées à la cohérence du réseau.

a) les obligations liées à l’image de marque :

Cette référence à l’image de marque du produit est essentielle puisqu’un un réseau n’est licite
que si les propriétés en cause nécessitent, pour en préserver la qualité et en assurer le bon
usage, la mise en place d’un tel système. Cette idée force est rappelée par, notamment, la
Chambre Commerciale de la Cour de Cassation française dans ces décisions du 25 octobre
1992, lorsqu’elle précise que sont légitimes les obligations dont « le contenu procède du
souci de valoriser la marque »246 Dès lors, dans la mesure où le distributeur, admis par voie de
sélection, ne respecte pas les obligations lui incombant, il affecte l’essence même du contrat,
c'est-à-dire le fondement sur lequel repose le système247.

L’obligation essentielle mise à la charge du distributeur agrée par le contrat cadre le liant au
fournisseur reste celle de passer commande pour acquérir un assortiment de produits mais
également tout nouveau produit mis sur le marché par le fournisseur, afin d’élargir la
possibilité de choix du client final248.

A l’instar du contrat de concession ou du contrat de franchise, le contrat de distribution


sélective peut prévoir des clauses de quota ou de minima pour garantir un certain rendement à

245
Cass. crim : arrêts dits « duo » (aff lanvin, Nina Richi, Rocho) 3Nov 1982, Gaz. Pal. 1982, 2, 658.

246
Cass. crim : 27 oct. 1992 : RJDA 1/1993, p.17. note ferrier.

247
N. CUSACQ, « le luxe et le droit ». RTD com, 2002, p. 605.

248
D.FERRIER, le droit de la distribution, Lexis Nexis SA, 2006,p. 270.

75
l’opération envisagée par les parties.249La clause de quota est une stipulation par laquelle le
débiteur (le distributeur sélectionné) s’engage à acheter en marchandises de son fournisseur,
un pourcentage déterminé de son chiffre d’affaires, tandis que dans la clause de minima, il est
tenu d’acquérir un volume minimal ou une valeur minimale de marchandises.250

Afin de protéger en premier lieu, les distributeurs candidats à la sélection d’une élimination
due à des critères quantitatifs trop rigoureux et en deuxième lieu les distributeurs membres du
réseau d’une limitation de leur liberté contractuelle de s’approvisionner auprès d’autres
fournisseurs, il a été décidé que le montant du quota ou du minima doit être raisonnable.251

L’intensité juridique de l’obligation incombant au distributeur sélectionné issue d’une clause


de rendement (clauses de quota ou de minima) dépendra de la rédaction du contrat puisqu’il
appartient aux parties, faisant jouer leur liberté contractuelle, de préciser le degré d’intensité
des clauses de rendement.252

En effet, la clause de quota ou de minima peut atteindre dans certains contrats de distribution
sélective le degré d’une obligation de résultat donnant lieu en cas d’inexécution à un refus de
renouvellement de l’agrément ou la résiliation du contrat pour violation d’une obligation
contractuelle253. Force est de constater que le distributeur sélectionné conscient de l’aspect
aléatoire des résultats et soucieux de son intérêt ne consentira le plus souvent qu’a une
obligation de moyen sanctionnée en cas de défaillance contractuelle par des dommages et
intérêts.254

Il est à retenir qu’en cas de litige sur la portée de la clause de rendement, il est du ressort des
juges du fond d’apprécier le degré d’intensité des clauses de rendement, qui demeurent

249
A. SAYAG, Le contrat-cadre 1- exploration comparative, LITEC, 1994, p. 91 ; G.J. MARTIN, les contrats
d’intégration dans l’agriculture. RTD Com, 1974, p. 29.

250
PH. BEQUE, les clauses de quotas dans les contrats de concession exclusive, cah.dr.entr. , 1984, n° 4, . 21.-A.
Ronzano, clauses de rendement et contrats cadres de distribution, JCP 1996, éd, E, .535, n3et5

251
D.FERRIER, op.cit, p.270

252
PH. LE TOURNEAU, op.cit, p. 57.

253
Cass.com.9juill.1974: bull.civ. ,n° 226 note Sayag.

254
A. PLANQUEEL, Obligations de moyen, obligations de résultat, RTD civ, 1972, p.334.

76
généralement disputées et imprécises. En cas de confusion, la tendance est plutôt à reconnaître
l’existence d’une obligation de moyen.255

En droit algérien la validité des clauses de rendement est appréciée sur le fondement de la loi
n°04-02 relatives aux règles applicables aux pratiques commerciales. 256Ainsi, le législateur
algérien a fixé par cette loi les règles et principes de transparence et de loyauté applicables
aux pratiques commerciales.257

En application de l’article 30 de la loi n° 04-02 relative aux règles applicables aux pratiques
commerciales, le décret n° 06-306 est venu renforcer la protection accordée à la partie la plus
faible des clauses considérées comme abusives.258En effet, ce texte réglementaire a le mérite
de donner une définition révolutionnaire au terme « contrat » autre que celle prévue par
l’article 54 du code civil algérien.259

Certainement soucieux de conserver le prestige exceptionnel que connaît sa marque, un


fabriquant de produits de luxe ou de haute technicité, peut non seulement imposer au
distributeur, par le biais du contrat cadre, les conditions auxquelles il achètera les
marchandises, mais aussi les modalités de leur revente.

De ce fait, le distributeur agrée aura à sa charge des obligations relatives à la présentation des
produits dont la nature requiert un respect de normes établies par le propriétaire de la marque
de luxe sous forme de critères qualitatifs imposées à l’ensemble du réseau. 260 Il est alors
parfaitement légitime qu’un distributeur ne présentant pas les conditions fixées par le
fabriquant de manière précise et objective se voit opposer un refus d’agrément. 261Mais, une

255
CA Paris ; 10 oct.1989 : inf, rap.p.283, note Le tourneau.

256
J.O.R.A. n° 41 du 24 juin 2004, p.03.

257 er
Art. 1 de la loi n° 04-02 fixant les règles applicables aux pratiques commerciales modifiée et complétée.

258
J.O.R.A. n° 56 du 10 septembre 2006 portant les éléments essentiels des contrats conclus entre les agents
économiques et les consommateurs et les clauses considérées comme abusives, p.15.

259 er
Art. 1 du décret n 06-306_ v éga- Mohamed Boudali, la lutte contre les clauses abusives dans les contrats,
Dar El Fajr.n 2007, p.109.

260
D.FERRIER, op cit, p.270

261
Versailles 2 fev.1981 : jcp éd.CI 1982, suppl.n4, p.39.note Sayag

77
fois membre du réseau, le distributeur est contraint aux obligations stipulées dans le contrat de
base relatives à la qualité et à la présentation des produits262.

Ainsi, le distributeur agrée est tenu de présenter les produits dans leur état et sous leur
emballage originaux, ce qui garantira à la clientèle une présentation originale et luxueuse, de
même que ça protègera le produit contre toute altération susceptible de porter atteinte à la
sécurité et à la santé des consommateurs.263

En droit algérien, le législateur à introduit, lors de la réforme de la loi relative à la protection


des consommateurs, une définition du mot emballage à l’article 03 de la loi n° 09-03 relative
à la protection du consommateur et la répression des fraudes264. Aux termes de l’article 10 du
même texte, le législateur rappelle à tout intervenant l’obligation de sécurité qui lui incombe
en matière d’emballage.

Conformément à la cour de cassation française265et en application du droit communautaire


européen,266le fournisseur peut valablement obliger le distributeur agrée à ne vendre les
produits de sa marque que dans le lieu de vente pour lequel il a été sélectionné267. Par
conséquent, la vente des produits de luxe ou de haute technicité par correspondance et la
vente par Internet semblent être exclues. En effet, il n’est pas rare de constater dans certains
contrats de distribution sélective une clause d’interdiction de la vente par Internet, en ce que
cette forme de vente ne permet pas d’offrir aux consommateurs un service approprié par
rapport aux produits distribués268.

262
D.FERRIER, préc, p. 207.

263
Paris, 4 novembre1964, D.1965, 247.note J.P.Pamoukjian.

264
emballage : tout contenant constitué de matériaux de toute nature, destiné à conditionner, conserver,
protéger, présenter et permettre la manutention, le stockage et le transport de tout produit et assurer
l’information du consommateur.

265
Cass.com.18mai 1987, D.1987, JVR, p.558, note G.perléani, cité par Sayag.

266
Art. 4 du règlement d’exemption n° 2790/1999.

267
V. SELINSKY, la distribution sélective des produits de marque, Cah. Dr. entreprise, 1984/2, 17.

268
SOPHIE DE SENILHES ET OLIVIER ROUX,Distribution sélective et commerce électronique : une évolution
inachevée, RJDA 5/10 mai 2010. P. 467.

78
Cette interdiction est confirmée par la jurisprudence française qui déclare que ces clauses qui
ont pour but rappelons le, d’obliger le distributeur agrée à présenter les produits contractuels
uniquement dans l’établissement sélectionné, ne seront pas considérées comme restrictives de
concurrence si la nature des produits en cause justifie l’interdiction269.

Néanmoins, le droit communautaire européen énonce en la matière que « chaque distributeur


doit être libre de recourir à Internet pour faire de la publicité ou pour vendre ses produits ».

Dans l’affaire Yves Saint Laurent du 17 mai 2001 la commission européenne déclare que
l’interdiction de vente par Internet dans un contrat de distribution sélective constitue une
restriction qui ne peut être exemptée par le règlement n° 2790/99, mais elle ajoute toutefois
que cette interdiction est admissible si elle est objectivement justifiée270.

Toujours dans un objectif de préservation de l’image de marque des produits, et cela est
surtout vrai pour les parfums de luxe, le distributeur agrée s’engage à les revendre en l’état.

Résultant d’une recherche particulière et utilisant des matériaux d’un haut niveau qualitatif,
notamment pour leur conditionnement, les parfums de luxe demeurent des produits
sophistiqués et de haute qualité. Il s’ensuit que le revendeur agrée doit suivre à la lettre les
directives du fabriquant en matière de conditionnement et d’emballage pour éviter tout
phénomènes de dénaturation ou d’évaporation susceptibles de défraîchir le parfum271.

Dans ce contexte, les textes algériens entendent assurer la qualité du produit pendant tout le
processus de sa mise à la consommation, en mettant à la charge des professionnels intervenant
au processus de mise à la consommation dont le distributeur fait partie, toute une série

269
Cass. Com. 9 février 1976, JCP 1977.II. 1859 obs. J. Hemard.

270
La Commission européenne a rappelé dans un communiqué de presse en date du 17 mai 2001 qu’ « une
interdiction d’utiliser l’Internet, y compris dans un système de distribution sélective, constitue une restriction des
ventes aux consommateurs qui ne peut être couverte par le règlement d’exemption par catégorie du 22
décembre 1999. » Dans le cas particulier présenté à la Commission, cette dernière approuve le système de
distribution sélective mis en place par la société Yves Saint Laurent pour la distribution de ses parfums.

271
N. CUSACQ, op. cit, p.605.

79
d’obligations. Il s’agit notamment des obligations de conformité, de garantie, d’information et
de sécurité qui ont un impact direct ou indirect sur la qualité du produit272.

De ce fait, le distributeur agrée ne peut en aucun cas, même à prix réduit, écouler des produits
défectueux (altérés, défraîchis ou périmés) ou encore dépouillés de leur emballage d’origine
puisque toute violation à cette obligation est considérée comme une atteinte à l’image de
marque des produits. De surcroît, la législation relative à la protection du consommateur
impose au professionnel aguerri dans ses relations avec le consommateur profane de s’assurer
de la qualité des produits pendant tout le processus de mise à la consommation afin de
garantir la sécurité du consommateur273. Lorsque la défectuosité des produits est imputable au
distributeur agrée par faute ou par négligence, le fabriquant reprend les produits mais ne les
rembourse pas, sauf conventions particulières, mais si le produit est défectueux du fait du
fabriquant, ce dernier s’engage à le changer ou à rembourser le prix274.

L’environnement dans lequel est présenté le produit est tout aussi important que son
conditionnement. Aussi, il convient de préciser qu’un produit de luxe ou de haute technicité
ne saurait être proposé à la vente dans les mêmes conditions qu’un produit banal, ou toutes
autres conditions susceptibles de compromettre la renommée de la marque275.

Donc, le distributeur agrée est tenu de présenter les produits dans un environnement valorisant
la marque en adaptant soigneusement les aspects externes du magasin, telle que la façade, les
vitrines et la décoration de celui-ci, sans négliger pour autant les conditions concernant
l’aspect interne en garantissant un aménagement conforme aux normes fixées par le fabricant.

De plus, un fabricant de produits de luxe peut même exiger que d’autres marques de luxe
soient présentées dans le point de vente sélectionné mais sans être en droit d’imposer leur
identité au vendeur agrée. Du reste, le distributeur sélectionné doit assurer aux

272
D. ZENNAKI, la qualité a--elle sa place en législation algérienne ? Problématique en droit algérien de la
consommation,Symposium International : Qualité et Maintenance au Service de l’EntrepriseQUALIMA01 -
Tlemcen 2004.

273
Ibid.

274
Lamy droit économique, 2003, n° 4546 et s.

275
N. CUSACQ, préc, p. 608.

80
consommateurs par la présence dans le point de vente de personnes qualifiées, tous conseils
ou renseignements appropriés de manière à répondre efficacement à leurs besoins276.

b) Les obligations liées à la cohérence du réseau

Ces obligations ont une relation directe avec les obligations relatives à l’image de marque du
produit. En effet, le fondement même d’un réseau de distribution sélective réside dans le fait
qu’il constitue un tout uniforme. Il est donc nécessaire pour tous les membres du réseau de
respecter les stipulations contractuelles relatives à la cohérence du réseau sous peine d’être
exclu ou du moins d’être sanctionné277.

La nature des produits distribués aux consommateurs justifie l’existence d’une obligation de
service après vente incombant au distributeur ainsi qu’une obligation de garantie et de
réparation, ce qui implique la présence d’un personnel compétent et disponible de manière à
effectuer un service après vente et de maintenance de qualité. Le caractère contractuel et
cohérent du réseau oblige le distributeur à assurer la prestation du service après vente, de
garantie et de réparation à ses propres clients et aux clients des autres vendeurs du réseau. A
l’évidence, il s’agit là d’une obligation qui a pour but d’avantager le consommateur278.

Aussi, l’existence d’une manière permanente et en bon état d’un stock de pièces de rechanges
est nécessaire à la bonne prestation de ses services au profit du consommateur. La nouvelle
réglementation algérienne relative aux règles de protection du consommateur et la répression
des fraudes est venue préciser cette obligation à l’article 16 en plus de l’obligation de garantie
déjà prévue dans la législation modifiée. Désormais, le texte algérien semble efficace, puisque
les deux obligations sont complémentaires et ne sauraient être séparées.

En effet, le ministre algérien du commerce avait décidé en application du décret exécutif n°


90-266 que « les professionnels intervenant dans le processus de mise à la consommation des
produits soumis à garantie sont tenus de mettre en place et d’organiser un service après vente
approprié qui s’appuie, notamment, sur des moyens matériels adéquats, sur l’intervention

276
Y. DITRICH ET A.MENAIS. la distribution sélective à l’épreuve du commerce électronique, les cahiers Lamy
droit de l’informatique et des réseaux, n° 114 mai 1999.

277
FROGER, La sanction de la rétrocession illicite, Cah.dr. entr, 1991/1, 21 (n spécial distribution sélective).

278
SOPHIE DE SENILHES ET OLIVIER ROUX,op. cit, p. 469.

81
d’un personnel technique qualifié et sur la disponibilité de pièces de rechange destinées aux
produits concernés »279.

Dans le cas de la commercialisation de véhicules automobiles neufs, le législateur fait


obligation au concessionnaire d’avoir un personnel ayant les qualifications techniques et
professionnels requises et d’assurer un service après-vente qui doit comporter les révisions
périodiques couverts par la garantie, la maintenance, la vente de pièces de rechange et
d’accessoires d’origine280.

C’est pour dire l’importance qu’accorde le législateur à l’obligation du service après-vente en


raison de l’ouverture du marché algérien à divers produits et la prolifération de distributeurs et
réparateurs dans le domaine des produits d’une certaine technicité. Néanmoins, un quotidien
national déplore que cette prolifération s’effectue dans l’ignorance et l’inapplication quasi
totale des textes pourtant parfaitement bien élaborés. Aussi, l’auteur de cet article de presse
pointe du doigt les associations de consommateurs manquant à leurs missions d’information
et de défense des citoyens consommateurs281.

2) Les obligations du fournisseur

En application des règles générales, le fabricant est tenu de fournir les produits conformes à
ceux faisant l’objet du contrat, en quantité et en qualité et doit toutes les obligations que
supporte un vendeur. Dès lors, les obligations du fournisseur consistent à délivrer les produits
à la date et au lieu convenus, le risque lié au transport est le plus souvent précisé au contrat
cadre, à garantir la chose contre les vices cachés, et à la garantir contre l'éviction, c'est-à-dire
en permettre une possession paisible282.

279
Arrêté du 10/05/1994, portant modalité de mise en œuvre du décret exécutif N° 90 / 266 du 15 / 09 / 1990,
relatif à la garantie des produits et services. ( J.O.R.A. n° 35 / 1994 ).

280
Art. 33 du décret exécutif n° 07-390 du 12 décembre 2007 fixant les conditions et les modalités d’exercice
de l’activité de commercialisation de véhicules automobiles neufs (J.O.R.A. n° 78).

281
ALI HADJ ALI, le service après vente, ce que prévoit la loi », El watan du 19 décembre 2005.

282
F. COLLART-DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, op. cit, p. 269.

82
Le code civil algérien stipule à l’article 364 que le vendeur est obligé de délivrer à l’acheteur
l’objet vendu dans l’état où il se trouvait au moment de la vente. L’obligation de délivrance
consiste pour le fournisseur de procéder matériellement à la remise des produits contractuels
au lieu, date et conditions convenues au contrat cadre. Dans le cas où le fournisseur ne livre
pas à la date convenue, le distributeur est en droit, après l’envoi d’un courrier de mise en
demeure adressé sous la forme recommandée avec demande d’avis de réception, de refuser de
prendre livraison de la chose livrée et de se prévaloir de la résolution de la vente. Il s’agit
d’une sanction prévue par les règles générales qui prévoie l’effacement rétroactif des
obligations nées d’un contrat synallagmatique lorsque l’une des parties n’exécute pas ses
prestations283.

Si le revendeur agréé ne prend pas livraison de la chose, le fournisseur peut demander au juge
d'ordonner le retirement de la chose livrée par le distributeur sous une astreinte
financièrement dissuasive, de faire entreposer les marchandises chez un tiers aux frais de
l'acheteur, invoquer la clause résolutoire si elle est insérée au contrat cadre ou intenter une
action en résolution du contrat de distribution sélective284.

Enfin, si le distributeur ne paie pas, le fournisseur peut soit exercer son droit de rétention en
ne livrant pas la chose commandée, soit intenter une action en revendication afin de récupérer
le bien livré, soit invoquer la clause résolutoire si elle est contractuellement prévue afin
d’obtenir l’annulation rétroactive du contrat, soit demander en justice la résolution du contrat
aux torts du distributeur, soit invoquer la clause de réserve de propriété, soit bien entendu
assigner en paiement285.

Visant à promouvoir et faire circuler l’image de marque du produit auprès des


consommateurs, la publicité reste un facteur déterminant pour la réussite commerciale en
matière de produits de luxe. De ce fait, le fabricant, promoteur du réseau prend en charge
d’organiser une compagne publicitaire au niveau national et local. De plus le producteur est
tenu de fournir le distributeur en documentation illustrative et matériel promotionnel en vue
de mettre en valeur le produit pour développer les ventes. Parce que le réseau sélectif est
impérativement fermé, le fabricant est obligé, aux termes du contrat, à assurer la défense du
283
P. ANCEL, Force obligatoire et contenu obligationnel du contrat, RTD civ., 1999, p. 771 et s.

284
A. LARBI-CHAHT, les voies d’exécution, Dar El Hoda 2007, p. 174.

285
Ibid.

83
réseau contre toute violation interne par les membres agréés ou externe par les revendeurs non
sélectionnés. Il s’engage de ce fait à assurer aux distributeurs qu’ils seront les seuls à pouvoir
effectivement distribuer ses produits286.

L’analyse des obligations du fournisseur démontre, comme le fait remarquer un auteur,


qu’elles sont moins nombreuses que celles souscrites par le distributeur agréé, ce qui peut
causer une situation de déséquilibre contractuel au détriment du distributeur287, mais qui
n’affecte pas pour autant la validité de l’accord, l’égalité des obligations n’étant pas une
condition d’existence d’un contrat synallagmatique288.

B) Les effets envers les tiers :

1-L’effet relatif des conventions :

En application des règles du droit commun, les conventions une fois conclues, n’ont qu’un
effet relatif entre les partis et ne peuvent créer des obligations à la charge des tiers289.

En matière de distribution sélective, ce principe d’effet relatif des conventions donne-t-il donc
le droit à un distributeur non agrée de mettre en vente des produits couverts par la distribution
sélective sans engager sa responsabilité pour méconnaissance d’un contrat de distribution?

La réponse à cette question représente un vrai paradoxe. En effet, si en application du principe


de la liberté du commerce et de l’industrie, le contrat de distribution sélective est inopposable
aux tiers, le producteur, promoteur d’un réseau de distribution sélective peut toujours protéger
son réseau en opposant le contrat aux tiers.

286
D. FERRIER, le droit de la distribution, Lexis Nexis SA, 2006, p. 275.

287
D. MAINGUY,Le déséquilibre significatif entre contractants (professionnels). www.lexcellis-avocats.fr

288
A. SERIAUX, « La notion de contrat synallagmatique »,Études offertes à Jacques Ghestin – Le contrat au
début du XXIe siècle, LGDJ, 2001, pp. 777-788.

289
Art. 113 du code civil algérien et art. 1165 du code civil français.

84
Invoquée souvent par le distributeur non agrée en cas de litige avec un propriétaire d’un
réseau de distribution sélective, la liberté du commerce et de l’industrie est un principe à
valeur constitutionnelle.

En France, ce même principe a été institué par le décret d’Allarde des 12 et 17 mars 1791
290
selon lequel « il sera libre à toute personne d’exercer telle profession, art, ou métier qu’il
trouvera bon »291. En Algérie c’est la constitution qui consacre ce droit à l’article 37 qui
dispose que « La liberté du commerce et de l'industrie est garantie. Elle s'exerce dans le cadre
de la loi. » Assez récente en Algérie, cette liberté consiste dans le droit d’exercer librement
toutes activités économiques et professionnelles dans le cadre des lois et règlements en
vigueur. En effet, ce droit présente des limites qui peuvent être imposées soit par loi soit par
des conventions292.

2- l’opposabilité du contrat de distribution sélective :

En matière de contentieux des réseaux de distribution sélective, la question s’est toujours


posée de savoir si les dispositions issues du droit civil concernant l’effet relatif des
conventions, pouvaient dégager un tiers au réseau de distribution sélective de toute
responsabilité en cas de violation du contrat.

Il faut bien avouer, après cette question, que si le contrat de distribution sélective n’est pas
opposable en tant qu’acte juridique, il est en tant que fait juridique. En effet, l’opposabilité
peut être définie comme l’obligation des tiers de ne pas porter atteinte au contrat et la

290
Avant le décret d’Allarde, la liberté du commerce et de l’industrie était désignée en France par la liberté
d’entreprendre reconnu comme un principe général du droit. Ce n’est qu’en 1791, que cette liberté est
exprimé sous la forme de liberté du commerce et de l’industrie.

291
Le principe de la liberté du commerce et de l’industrie a aujourd'hui valeur constitutionnelle en France et ce,
depuis la décision du Conseil Constitutionnel du 16 janvier 1982 relative aux lois de nationalisation. Cette
même décision consacre également la liberté d'entreprendre qui constitue le corolaire de la liberté du
commerce et de l'industrie et qui possède aussi une valeur constitutionnelle.

292
M. MENOUER, La liberté du commerce et de l’industrie en France et en Algérie, Revue droit économique et
environnement. n°1, juin 2008, p.83.

85
situation créée par lui en tant que fait, en d’autres termes ne pas entraver l’exécution du
contrat en méconnaissant les engagements pris par les contractants293.

S’agissant de l’opposabilité du contrat de distribution sélective, la jurisprudence française a,


dans un premier temps, exclu toute protection des contrats de distribution sélective suscitant
beaucoup de commentaires, mais les juges ont dans un deuxième temps, totalement inversé
leur appréciation en condamnant sévèrement les détaillants non sélectionnés qui mettent en
vente les produits relevant de cette forme de distribution294.

Cette condamnation intervenait sur trois fondements :

1-l’article L.716-9 du code de la propriété intellectuelle français qui réprime de manière


générale l’utilisation de la marque d’autrui sans son consentement puisqu’un tiers hors réseau
qui commercialise les produits viole les droits du titulaire du réseau à savoir le promoteur du
réseau propriétaire de la marque de luxe.

En droit algérien L’ordonnance n° 03-06 relative à la protection des marques illustre en son
article 26, de façon toute aussi claire, l’acte de porter atteinte à la marque d’autrui qui, selon
les dispositions pénale du même texte, est passible de lourdes peines 295.

2-l’article L.121-1 du code de la consommation français qui sanctionne le fait d’induire le


consommateur en erreur par une publicité mensongère puisque le distributeur non agréé fait
croire au consommateur qu’il a été sélectionné par le promoteur du réseau. En droit algérien
un tel fait est qualifié de pratique commerciale déloyale sanctionnée par l’article 28 de la loi
n° 04-02 relative aux règles applicables aux pratiques commerciales296.

293
R. SAVATIER, Le prétendu principe de l’effet relatif des contrats, RTD. civ. 1934, p. 525 et s ; J. GHESTIN,
Nouvelles propositions pour un renouvellement de la distinction des parties et des tiers, RTD. civ. 1994, p. 777 et
s.

294
J. –M. HENRIOT-BELLARGENT, Consécration de la distribution sélective des produits de parfumerie de
marque aux plans économique et juridique : Gaz. Pal. 1985, 2, doctr. P. 406.

295
Un auteur algérien fait remarquer que les peines d’amendes prévues par le texte actuel sont beaucoup plus
sévères que celles qui existaient dans l’ordonnance abrogée 57-66, tandis que les peines d’emprisonnement
ont été allégées par le législateur de trois ans maximum à deux ans. F. ZERAOUI. SALAH, Traité de droit
commercial algérien : Les droits intellectuels : droits de la propriété industrielle et commerciale, droits de la
propriété littéraire et artistique, EditionsEdik, octobre 2006, p. 258.

296
D. ZENNAKI, Droit de la concurrence, cours de magistère, Faculté de droit, Université d’Oran, 2010/2011.

86
3-L’article 1382 du code civil français qui réprime la concurrence déloyale dont le
distributeur hors réseau se rend l’auteur en commercialisant des produits objet d’un contrat de
distribution sélective.

De même, le code civil algérien réprime l’acte de concurrence déloyale sur le fondement de
l’article 124 prévoyant la responsabilité civile. Cependant, lorsque la concurrence déloyale est
le résultat d’une entente ou d’un abus de domination, le législateur algérien a prévu des
dispositions spéciales issues de l’ordonnance n° 03-03 modifiée et complétée par
l’ordonnance n° 08-12.

Par ailleurs, l’application du principe de la tierce complicité met en évidence la faute


délictuelle commise par le distributeur non agréé qui, en s’approvisionnant chez le
distributeur agréé, a participé à la violation de l’étanchéité du réseau, essence même du
contrat de distribution sélective. Néanmoins, pour bénéficier de la protection du contrat contre
toute violation causée par un tiers, le propriétaire du réseau doit établir la validité de son
contrat. Ce qui compte alors c’est que les critères de sélection doivent être appliqués de
manière uniforme et non discriminatoire297.

A propos de la charge de la preuve, le fournisseur devait démontrer non seulement la licéité


de son réseau, mais encore le caractère illicite de l’approvisionnement du tiers. Dorénavant la
cour de cassation française affirme qu’il appartient au fournisseur d’apporter la preuve de la
validité de son contrat, alors qu’il incombe en revanche au tiers de prouver que son
approvisionnement était licite, en cas de refus de justifier la provenance des produits, le
caractère illicite de l’approvisionnement pourra être déduit par le juge298.

297
J. AZEMA, « réflexion sur la distribution sélective : l’action contre le distributeur parallèle », mélanges Albert
Chavanne, Litec 1990, p. 196.

298
Déc. Yves Saint Laurent, 16 déc. 1991 Gaz. Pal. 1992 n° 136-137, p. 31.

87
Section 02 : l’extinction du contrat de distribution sélective

Le contrat de distribution n’étant pas régi, pour l’essentiel, par une réglementation légale
particulière, les juges choisissent de s’en tenir, en matière d’extinction du contrat, aux
dispositions du code civil relatives à la théorie des obligations. Ainsi, le contrat de distribution
sélective prend fin soit par l’arrivée du terme convenu au contrat, soit par la résiliation
unilatérale selon des conditions expressément prévues par les parties. Une fois la relation
contractuelle rompue, les contractants exécuterons leurs obligations prévues au contrat et
relatives à la cessation des relations contractuelles.

Pour analyser la fin du contrat de distribution sélective, il convient de s’arrêter tout d’abord
sur les modes d’extinction de ce contrat (§1) et ensuite sur les effets de cette extinction (§2).

Paragraphe 01 : les modes d’extinction du contrat de distribution sélective

Conformément au droit commun, l’extinction du contrat de distribution sélective résulte de


l’arrivée du terme, ou de la résiliation unilatérale lorsque le cocontractant aura manqué à ses
obligations contractuelles.

A) L’arrivée du terme

Très généralement conclu pour une durée déterminée, le contrat de distribution sélective
s’éteint à la survenance de son terme. L’écoulement de la durée convenue au contrat aurait
donc un effet extinctif, puisqu’il met fin aux obligations réciproques des parties qui sortent de
la relation contractuelle et chacun reprend sa liberté299. En toute matière contractuelle, une
convention arrivée à son terme ne peut être renouvelée sans l’accord des parties et un
contractant ne peut imposer à l’autre le maintien des rapports contractuels.300

299
M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n° 32.

300
J. GHESTIN, C. JAMIN et M. BILLIAU, Traité de droit civil, Les effets du contrat, L.G.D.J., 3e éd., 2001, n°2.

88
Dans les deux législations, point de dispositions spéciales relatives aux modes d’extinction
des contrats de distribution. Néanmoins, les deux législateurs ont prévu de façon analogue des
dispositions générales et relatives à la liberté contractuelle qui font des clauses du contrat la
loi des parties301. Ainsi, le fabricant n’est tenu ni de justifier son refus de renouvellement, ni
de dédommager son distributeur agréé sauf abus de droit de sa part302.

En effet, si le fabricant a le droit de refuser de renouveler un contrat à durée déterminée arrivé


à terme, sa responsabilité sera engagée en cas d’abus de droit. Cet abus peut résulter d’une
faute intentionnelle, caractérisée par des manœuvres, un comportement malveillant, ou en
trompant le distributeur agréé.

Le législateur algérien considère l’abus de droit comme une faute engageant la responsabilité
civile de son auteur pour acte personnel dommageable. En effet, l’article 124 bis issue de la
modification survenue en 2005 dresse une liste non exhaustive de certains cas où l’exercice
abusif d’un droit est constitutif d’une faute303.

Aux termes de cet article, l’abus serait une faute subjective commise par le fabricant
exprimant une déloyauté et engageant sa responsabilité civile délictuelle.Car en abusant de
son droit le maître du réseau sortirait du contrat. Il s’agirait à proprement parler plus de la
violation du devoir de ne pas nuire à autrui que de la violation d’une obligation stipulée par le
contrat de distribution304.

301
Art. 1134 du code civil français et article 106 du code civil algérien.

302
La jurisprudence française affirme que « le non-renouvellement du contrat par le concédant constitue
l’exercice d’un droit contractuel » Cass. com., 9 juill. 1952, n° 4-406, RTD com. 1953, p. 720, obs. Hémard J.

303
Avant la modification de 2005, le législateur algérien invoquait l’abus de droit à l’article 41 dans le livre Ι
relatif aux dispositions générales et plus précisément dans le chapitre Ι du titre ІІ consacré au personnes
physiques. S’agissant de ce positionnement de l’abus de droit dans le code civil algérien, une partie de la
doctrine algérienne avait donné raison au législateur en ce qu’il suivait le reste des législateurs arabes qui
puisaient le fondement de l’abus de droit des principes du droit islamique (A. ALI. SOLAYMANE, les obligations,
ème
les sources de l’obligation en droit civil algérien, OPU 3 éd, p. 224). En revanche, d’autres auteurs algérien
ont vivement critiqué ce positionnement, notamment dans la limitation de l’abus de droit aux personnes
physiques ( B. LARBI, la théorie générale de l’obligation en droit civil algérien, P. 124. De même, d’autres
auteurs pensent qu’il aurait été préférable de mettre les dispositions de l’abus de droit dans le livre ІІ relatif
aux obligations et aux contrats directement après l’article 124 qui concerne la responsabilité civile (A. FLALI, les
obligations, l’acte dommageable, ENAG/EDITIONS 2002, p. 55.)

304
D. ZENNAKI, Droit des obligations, cours de licence, Faculté de droit, Université d’Oran, 2006/2007.

89
En statuant sur la modification d’un contrat de travail, la cour suprême algérienne fait valoir
que le délit d’abus de droit ne peut se constituer que par la seule intention de l’employeur de
nuire à l’employé mais exige encore qu’il y ait une déviation du comportement normal de la
part de l’employeur qui exerce son droit de modifier le contrat de travail. En effet, la haute
juridiction nationale affirme que, si l’employeur entend par la modification du contrat réaliser
un intérêt légitime dont l’importance est minime par rapport au préjudice subi par l’employé,
l’abus de droit ne sera pas retenu. En revanche, si l’intention de nuire à l’employé est la cause
principale de la modification du contrat en dehors de toute intention de réaliser un intérêt,
l’abus de droit sera retenue même si cet intérêt se réalise spontanément305.

La jurisprudence française quant à elle, sanctionne à ce titre, toute faute, même non
intentionnelle et semble de même avis que la jurisprudence algérienne lorsqu’elle affirme que
la faute existe dès que le titulaire du droit ne l’a pas exercé comme un homme avisé prévoyant
l’éventualité d’un dommage à éviter306.

Dans la distribution sélective, les exemples d’abus commis par le fabricant sont divers et
variés mais engagent tous la responsabilité de leur auteur. En effet, commet un abus de droit,
le fabricant qui subordonne la reconduction du contrat à l’obtention de certains résultats
exagérés que le distributeur agréé devra réaliser à l’arrivée du terme ou le fait de subordonner
la reconduction à un investissement discriminatoire. Par ailleurs, l’abus de droit le plus
fréquent consiste à laisser au distributeur agréé l’illusion d’une éventuelle reconduction du
contrat en lui indiquant faussement que son contrat serait renouvelé.

Serait encore une faute abusive le fait de ne pas indiquer au distributeur agréé que son contrat
serait substantiellement modifié307. Hormis les dispositions relatives à l’abus de droit,
s’applique en droit français et algérien le principe de la bonne foi dans les relations
contractuelles qui est contenue dans les dispositions générales du droit des obligations.Les
deux acceptions principales de la bonne foi pourraient permettre de fournir les critères retenus
pour fonder l’abus de droit. Le critère subjectif voudrait qu’il n’y ait abus de droit qu’à la

305
Revue judiciaire algérienne n° 02 de l’année 1990, arrêt n°80461 du 13/04/1990.

306
P. ESMEIN, La faute et sa place dans la responsabilité civile, RTD. civ., 1949, p. 481et s.

307
B. FAGES, « L’abus dans les contrats de distribution », Cah. dr. entr. 1998, n°6, p. 11.

90
condition d’une intention malicieuse du titulaire du réseau. Le critère objectif fonde l’abus sur
l’effet déraisonnable de la mesure adoptée par le fabricant au regard du distributeur agréé308.

En raison de leur nature particulière, la règle jurisprudentielle qui confère le droit au


fournisseur de ne pas renouveler le contrat de distribution n’est pas transposable aux accords
de distribution sélective. Si à l’arrivée du terme, le distributeur agréé remplit toujours les
conditions objectives de sélection et n’a commis aucun manquement contractuel, il ne saurait
être exclu du réseau de distribution sélective en mettant fin à son contrat. De surcroit, si le
fabricant décide de ne pas renouveler le contrat en l’absence de toute faute du distributeur
agréé, ce dernier peut exiger à être livré et peut agir en refus de vente si ses commandes n’ont
pas été honorées309.

En cas de litige devant les tribunaux, la preuve de l’abus de droit incombe au distributeur
agréé, victime de non-renouvellement de son contrat de distribution sélective par le fabricant
propriétaire du réseau. Quant aux modes de preuve, ils sont tous recevables, puisqu’il s’agit
d’un fait juridique310.

Bien que l’arrivée du terme du contrat à durée déterminée soit parfaitement connu par le
fournisseur et son distributeur agréé, il est tout d’abord admis qu’un préavis de non-
renouvellement doit être respecté par les parties avant l’arrivée de l’échéance, c'est-à-dire que
la partie qui ne souhaite pas renouveler son engagement est obligée d’informer son partenaire
suffisamment à l’avance.

La durée de ce préavis est le plus souvent contractuellement prévue. Le non-respect du


préavis contractuel constitue une faute engageant la responsabilité de son auteur et ouvrant
droit à des dommages et intérêts311.

Lorsque l’accord de distribution sélective n’intègre pas de dispositions sur ce point, il devra
néanmoins être respecté un préavis d’usage dont la justification se trouve dans la

308
J. MESTRE ,D’une exigence de bonne foi à un esprit de collaboration, RTD. civ 1986, p.100

309
Cour de cassation, chambre commerciale, 27 octobre 2009, n° : 08-19396, www.miglietti-avocat.com.

310
J. MESTRE, Résiliation unilatérale et non-renouvellement dans les contrats de distribution, in La cessation des
relations contractuelles d'affaires, PUAM, p. 12.

311
D. FERRIER, La rupture du contrat de franchisage, J CP CI 1977, II, 12441.

91
jurisprudence rendue en matière contractuelle qui, en se basant sur l’article L. 442-6 du Code
de Commerce français, sanctionne la rupture brutale de relations commerciales sans le respect
d’un préavis écrit et d’une durée suffisante312.

Le législateur algérien prévoit également le respect d’un préavis à l’article 120 du code civil
sous forme d’une mise en demeure dont le délai, à défaut de fixation par les parties
contractantes, est déterminé suivant l’usage.

B) La résiliation unilatérale

Le contrat de distribution sélective revêt un caractère synallagmatique en ce qu'il met à


la charge du distributeur agréé diverses obligations qui entretiennent avec celles du fabricant
un rapport de réciprocité. C’est pourquoi la rupture de ce contrat lorsqu’il est à durée
déterminée ne peut intervenir qu’à la suite d’un commun accord des parties. En l’absence
d’un tel accord, l’auteur de la rupture devra présenter un motif légitime pour obtenir la
résiliation, et c’est au juge d’apprécier si les manquements invoqués à l’appui d’une demande
en résiliation permettent de prononcer cette résiliation313.

En application des règles générales, le motif légitime est souvent l’inexécution de l’une des
parties de son obligation, ce qui donne le droit à l’autre partie de réclamer l’exécution du
contrat ou en demander la résolution avec réparation ou non du préjudice subi selon le cas314.

A vrai dire, les tribunaux reconnaissent à chaque partie au contrat de distribution le droit d’y
mettre fin à tout moment. L’examen de la jurisprudence française révèle combien les

312
« le fait pour tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de
rompre brutalement, même partiellement une relation commerciale établie, sans préavis écrit, tenant compte
de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux
usages du commerce, par des accords interprofessionnels, engage la responsabilité délictuelle », Cass. com., 6
février 2007, n° 0413178, note M. Chagny. danielbert.blogspirit.com.

313
G. VIRASSAMY et M. BEHAR-TOUCHAIS, Les contrats de la distribution, LGDJ, 1999, p. 162.

314
P. ANCEL, Force obligatoire et contenu obligationnel du contrat, RTD civ., 1999, p. 771 et s ; G.VINET, La
responsabilité contractuelle en question, in Le contrat à l’aube du XXIe siècle, Mélanges offerts à Jacques
Ghestin, L.G.D.J., 2001, p. 920 et s.

92
magistrats tiennent à la règle de la prohibition des engagements perpétuels. En effet, la Cour
de Cassation française a récemment indiqué que « si une convention à durée indéterminée a
pris soin de préciser certains cas de résiliation, la liste qu’elle renferme doit cependant être
considérée comme purement indicative et non pas comme limitative, de sorte que la
résiliation unilatérale demeure possible en dehors de ces cas ».315

A cet égard, certains contrats de distribution sélective en produits de parfumerie contiennent


une clause intitulée « Résiliation anticipée » que les parties prévoient à l’avance, et qui a pour
objet de citer les causes qui justifient la résiliation unilatérale 316. Ainsi, c’est la volonté
commune qui permet à l’une des parties de rompre la relation contractuelle à certaines
conditions prévues au contrat qui demeure, aux termes du code civil, la loi des parties.

Il serait donc légitime qu’une partie décide de cesser, avant la fin du contrat, toutes relations
commerciales avec l’autre partie. Un contrat de distribution sélective peut ainsi être résilié si,
par exemple, le distributeur agréé met en vente dans ses locaux des marchandises susceptibles
de déprécier par leur voisinage l’image de marque du fabricant. De ce fait, la résiliation
interviendra de plein droit en application d’une clause résolutoire expresse insérée au contrat.
Dans d’autres cas, la résolution peut être judiciaire et c’est au juge que revient le pouvoir
d’apprécier la gravité des manquements aux obligations contractuelles.

Respectant la liberté contractuelle et l’autonomie de la volonté 317, le législateur algérien


prévoit, comme le législateur français, la liberté des parties à insérer au contrat une clause
résolutoire. En effet, l’article 120 du code civil permet aux parties de prévoir une clause
mettant fin au contrat de plein droit et sans recours aux tribunaux, et ce en cas d’inexécution
des obligations découlant du contrat. Qu’elle soit prononcée par la justice ou survenue de
plein droit, le législateur impose au demandeur en résolution le respect d’une mise en

315
RTD com. 1995, p. 108.

316
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p.

317
Le droit des obligations est régi en Algérie par le Livre ІІ du code civil, « des obligations et des contrats ».
Depuis sa promulgation en 1975, jusqu’à nos jours, le code civil algérien a connu plusieurs modifications, dont
le législateur a voulu qu’elles soient en harmonie avec l’évolution de la société et de sa politique de
développement économique, l’économie de marché. La dernière réforme date du 13 mai 2007. Il s’agit de la loi
07-05 portant sur les dispositions relatives au contrat de bail.

93
demeure adressée à l’autre partie dont le délai, à défaut de fixation par les parties, est
déterminée suivant l’usage318.

Ainsi, à l’occasion d’un contrat de distribution de parfums luxe, la Cour de Cassation


française a décidé que le fait pour le distributeur agréé d’un producteur de parfums de vendre
des coffrets-cadeaux sur lesquels était mentionné qu’ils étaient offerts par le producteur était
un manquement grave aux obligations contractuelles.319

Bien que le préavis conventionnel ou d’usage320doit toujours être respecté sous peine de
dommages et intérêts, la constatation de telles infractions commises par le distributeur agréé
légitime parfois la résiliation par le fabricant du contrat sans mise en demeure préalable à
l’encontre du distributeur membre du réseau.

Paragraphe 02 : les effets de l’extinction du contrat de distribution sélective

La fin du contrat de distribution sélective entraîne la liquidation du lien contractuel entre le


fabricant et le distributeur agréé. Parfois cette fin donne lieu à un éventuel engagement de la
responsabilité de la partie auteur d’une rupture fautive. En outre, elle peut déclencher la prise
d’effets d’obligations post-contractuelles stipulées au contrat et supportées par le fabricant (A)
et par le distributeur agréé (B).

318
D. ZENNAKI, Droit des obligations, cours de licence, Faculté de droit, Université d’Oran, 2006/2007.

319
RTD com. 1996, p. 321, obs. Bouloc B. : “de tels agissements ont pour effet de porter atteinte à l’image de
produits de haute qualité et de nuire à la clientèle à laquelle étaient offerts des produits écartés par le
producteur lui-même ».

320
A défaut de précision expresse au contrat, le délai emprunte alors aux usages et coutumes de la profession,
et dure habituellement de trois à six mois.

94
A) les obligations du fabricant

Au terme extinctif, le fabricant est libre de ne pas renouveler le contrat sans avoir à
motiver sa décision321ni à verser d’indemnité à sonpartenaire le distributeur agréé.322Il en va
de même pour la résiliation du contrat à durée indéterminée dans le respect d’un préavis
raisonnable.

En revanche, lorsque le fabricant met fin au contrat brusquement ou sans aviser en temps utile
son cocontractant en respectant un délai de préavis propre à permettre au distributeur agréé
d’organiser sa reconversion, il s’expose à l’obligation de verser une indemnité au distributeur
exclu. Aussi, une rupture qui s’accompagnerait d’une intention de nuire ou de motifs
fallacieux engage la responsabilité du fabricant même si ce dernier a respecté un délai de
préavis raisonnable323.

Donc, le fournisseur est tenu, du fait d’une rupture abusive ou brutale, de verser des
dommages et intérêts à la victime de cette rupture dont il appartiendra au juge saisi d’évaluer
le montant en tenant compte des ventes perdues du fait de la rupture et de la marge
bénéficiaire que le distributeur aurait pu escompter si le contrat avait perduré.324

L’expiration du contrat de distribution sélective génère également le problème du sort des


stocks détenus par le distributeur agréé en fin de relations contractuelles.325

Les stocks, dont la valeur est importante aussi bien pour le distributeur que pour le fabricant
soucieux de son image de marque, risquent d’être difficiles à écouler pour un revendeur déjà

321
RTD civ. 1994, p. 352, note J Mestre.

322
Cass. com., 21 oct. 1971 : JCP 1971, ІІ, 16632.

323
G. VIRASSAMY, Les contrats de dépendance, LGDJ, 1986, préface J. GHESTIN, p.223 et s.

324
V. Lamy droit économique, 2003,n° 3551.

325
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, op. cit, p. 101.

95
exclu du réseau et remplacé par un autre revendeur qui pourrait agir en concurrence déloyale
contre lui s’il persiste à vendre les produits couverts par un réseau de distribution sélective.

Toutefois, une question se pose de savoir si le fabricant est tenu ou non de reprendre les
stocks ?

Le principe est que le distributeur agréé étant propriétaire de ces produits, ceux-ci restent
entre ses mains après la rupture du contrat. Faute de clause contractuelle l’autorisant à écouler
les produits lui restant en stock après la rupture du contrat, l’ancien membre du réseau ne
peut, en principe, les revendre. Néanmoins, le contrat de distribution sélective peut prévoir
des modalités d’écoulement ou de reprise des stocks détenus par le distributeur en fin de
contrat. En effet, les parties peuvent convenir d’une clause de reprise des stocks, par laquelle
le fabricant s’engage à racheter, à la fin du contrat, les stocks du distributeur et en cas de non
respect de cette clause, il sera tenu de verser des dommages et intérêts 326.

Aussi, le contrat peut stipuler une clause d’écoulement des stocks, par laquelle le fabricant
accorde au distributeur un droit provisoire d’utilisation de la marque pour lui permettre
d’écouler le stock restant en fin de contrat. En réalité, la manière de rompre le contrat de
distribution sélective pourrait servir de guide au juge pour trouver la solution au problème des
stocks détenus par le distributeur agréé. Ainsi, le juge réglera le sort des stocks au détriment
du cocontractant fautif, sans s’arrêter à l’interprétation des clauses contractuelles pour déceler
l’intention des parties327.

En conséquence, le fabricant qui a rompu la relation contractuelle avec un distributeur agréé


coupable de fautes répétées, ne sera pas tenu de reprendre les stocks. 328En revanche, si le
fabricant met fin au contrat d’une manière abusive, il se verra contraint de reprendre les
stocks du distributeur, à titre de réparation.329 Parfois, un contrat de distribution sélective peut
également prévoir, lors de la rupture, une clause stipulant le versement d’une indemnité de
clientèle par le fabricant au distributeur agréé. 330En l’absence de clause, un arrêt de la

326
D. FERRIER, op. cit.

327
D. FERRIER, le droit de la distribution, Lexis Nexis SA, 2006,p. 296.

328
Cass. com., 8 mars 1967, n° 64-11. 531, JCP éd. G 1968, ІІ, n° 15346, note Hémard J.

329
Cass. com., 17 mars 1970, n° 69-12. 225, JCP éd. CI 1970, П, n° 89232, obs. Hémard J.

330
RTD com. 2002, p. 457. note B. Saintourens.

96
chambre commerciale de la Cour de cassation du 9 octobre 2007 semble ouvrir le principe du
paiement d’une indemnité de clientèle sur le fondement de l’article 1371 du code civil
français et la théorie de l’enrichissement sans cause.

Evitant l’injustice qui consiste à priver le distributeur des fruits de ses efforts, la position de la
Cour de cassation française est une révolution : cela faisait plusieurs décennies que les
distributeurs réclamaient le bénéfice d’une indemnité qui soit indépendante des dommages et
intérêts accordés lorsqu’un titulaire d’un réseau rompt abusivement sa relation avec l’un de
ses revendeurs331.

A) Les obligations du distributeur

A la fin des relations contractuelles, le distributeur agréé doit respecter certaines obligations
prévues au contrat dans le but de bien gérer contractuellement la fin des relations
commerciales. En effet, le distributeur doit, dès la fin du contrat, restituer au fabricant tous les
signes distinctifs protégés par le droit de la propriété intellectuelle et qui faisaient référence au
fabricant pour éviter toute confusion, après la rupture du contrat, dans l’esprit des
consommateurs332.

Soucieux de la réputation et de l’aura de leurs marques, les fabricants imposent, la plupart du


temps, une clause de non-concurrence post-contractuelle qui empêche le distributeur agréé
d’exercer une activité qui ferait concurrence au fabricant. Pour être valable et ne pas porter
atteinte à la liberté du commerce, cette clause doit être limitée dans le temps, l’espace et
l’objet333.

331
J. Mestre, Résiliation unilatérale et non-renouvellement dans les contrats de distribution, in La cessation des
relations contractuelles d'affaires, PUAM, p. 12.

332
V. SELINSKY, la distribution sélective des produits de marque, Cah. dr. entr. 1984/2, 17.

333
D. FERRIER, appartenance de la clientèle et clause de non-concurrence : JCP E 1983, Cah. dr. entr. n° 1, p. 21 ;
F. ZERAOUI-SALAH, Traité de droit commercial algérien : le fonds de commerce et les droit intellectuels,t. 1 : Le
fonds de commerce, Editions Edik, 2001, p. 228.

97
En matière de distribution sélective, la jurisprudence française applique, pour juger de la
validité d’une clause de non-concurrence, le principe de proportionnalité entre l’intérêt du
fabricant et la liberté du distributeur agréé334.

A l’occasion d’un contrat de franchise, la Cour d’Appel de Paris a annulé une clause de non-
concurrence post-contractuelle en estimant que le franchisé, propriétaire de son fonds de
commerce, était dépossédé de toute sa clientèle et ne pouvait plus exercer sa profession. 335

La Cour de Cassation française a censuré cette décision en validant la clause prévu par le
franchiseur à la charge du franchisé et qui avait pour objet de le prémunir contre toute
concurrence post-contractuelle pendant une durée déterminée.336

Enfin, désireux de préserver leurs parts de marché, les fabricants de produits de marque
prévoiront souvent à la charge des distributeurs agréés une clause de non-réaffiliation post-
contractuelle leur interdisant d’adhérer à un réseau de distribution concurrent pendant une
durée de temps déterminée après la rupture du contrat de distribution sélective337.

Statuant récemment sur un contrat de franchise, La Cour de Cassation française a procédé à


une distinction entre la clause de non-réaffiliation et la clause de non concurrence en précisant
que la clause de non concurrence a pour objet de limiter l’exercice par le franchisé d’une
activité similaire ou analogue à celle du réseau qu’il quitte, tandis que la clause de non-
réaffiliation se borne à restreindre sa liberté d’affiliation à un autre réseau 338.

Cette première partie a permis de mettre en évidence la nature spéciale de la distribution


sélective qui se traduit par des techniques différentes par rapport aux autres formes de
distribution. En premier lieu,ce mode de distribution est réservé aux produits de luxe ou de
haute technicité et repose sur la sélection qualitative et parfois quantitative des distributeurs.

334
COLLOQUE du 6 décembre 2000 organisé sous le haut patronage de M. Guy CANIVET Premier Président de la
Cour de cassation, « conquête de la clientèle et droit de la concurrence. Actualité et perspectives françaises,
allemandes, communautaires et américaines ». http://www.creda.ccip.fr.

335
Paris, 13 nov. 1984 : Gaz. Pal. 1985, 2, p. 447.

336
Cass. com., 12 janv.1988 : Bull. civ. ΙV. N° 31.

337
V. SELINSKY, clause de non-réaffiliation et franchise, www.avocats.fr.

338
Cass. com, 28 septembre 2010, www.village-justice.com

98
En second lieu, le contrat liant les parties produits des effets de nature nécessairement
obligatoire pour les parties et envers les tiers, et ce pendant toute son existence et lors de son
extinction.

Il reste maintenant à démontrer la position de la loi vis-à-vis de cette pratique et notamment le


droit de la concurrence dont les règles n’admettent, que sous certaines conditions, la sélection
des distributeurs fondement même de la distribution sélective. Cela doit permettre de vérifier
la licéité de la distribution sélective et de mesurer combien elle est efficace à travers les
avantages qu’elle présente.

99
Deuxième partie : Appréciation de la distribution sélective

La distribution sélective se présente aux juristes avec deux aspects. Celui d’abord, qui
apparaît lorsqu’on l’examine dans sa validité339 ; celui ensuite qui se dévoile par l’étude de
son efficacité340.

La validité d’un système de distribution sélective dépend essentiellement de sa compatibilité


avec le principe de la libre concurrence341. La théorie de ce principe est qu’en se
concurrençant, les agents économiques devraient présenter le meilleur produit au meilleur
prix. La liberté de la concurrence est donc bénéfique pour l’économie générale.342

D’aucuns ne contestent que la distribution sélective est de nature à porter atteinte au principe
de libre concurrence entre agents économiques car elle limite le nombre de distributeurs et ne
favorise pas la baisse des prix.343Pourtant, les autorités et les juridictions compétentes
reconnaissent, sous certaines conditions la validité de la distribution sélective. Cet
aménagement en faveur des accords de distribution sélective est justifié par les avantages que
présente cette forme de distribution ainsi que l’existence d’un progrès qui bénéficie
équitablement aux utilisateurs et aux consommateurs.

Une fois la licéité du réseau de la distribution sélective est admise, le producteur aura
l’obligation de veiller à le protéger. L’étanchéité du réseau se mesurera à l’efficacité des
moyens juridiques dont dispose le fabricant et ses revendeurs pour la faire respecter par les
tiers et protéger le réseau contre la distribution parallèle. En effet, pour que la distribution
sélective soit efficace, qu’elle remplisse bien son rôle, il ne faut pas qu’il ait de faille dans le
système, autrement dit, on ne doit trouver les produits concernés que chez des distributeurs
agréés. Or, la pratique a toujours révélé que les tiers peuvent porter atteinte au réseau de
339
La validité est la qualité d’un acte qui n’est entaché d’aucun vice de nature à justifier son annulation,
Vocabulaire juridique. Association H.Capitant, sous la dir. de G.Cornu, PUF 1996, 6ème éd, (v, validité.)

340
L’efficacité est le caractère de ce qui produit l’effet qu’on en attend (v. définition du dictionnaire Robert)

341
La libre concurrence est définie comme « l’offre, par plusieurs entreprises distinctes et rivales, de produits
ou de services qui tendent à satisfaire des besoins équivalents avec pour les entreprises une chance réciproque
de gagner ou de perdre les faveurs de la clientèle. », G. Cornu, Vocabulaire juridique, PUF 1996, V. le terme
« concurrence ».

342
Y. SERRA, droit français de la concurrence, Dalloz, 1993, p.4.

343
J. B. BLAISE, droit des affaires, L.G.D.J, 2 ème èd.,2000, p.550.

100
distribution sélective en mettant en vente les produits réservés au réseau, alors qu’ils n’ont
font pas partie.

Il s’agira ici d’étudier en premier chapitre la validité de la distribution sélective ; en second


son efficacité.

Chapitre 01 : la validité de la distribution sélective

La CJCE a jugé que la licéité du système de distribution sélective dépend de sa conformité


avec l’article 81§ 1 du traité de Rome.344 Plus précisément et selon la même jurisprudence
communautaires, les systèmes de distribution sélective restent conformes à cet article s’il est
satisfait cumulativement à quatre conditions, à savoir :

1- il contribue à améliorer la production ou la distribution des produits, ou à promouvoir le


progrès technique ou économique,

2- tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte,

3- sans imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour
atteindre ces objectifs,

4- et sans donner à des entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en
cause, d’éliminer la concurrence345.

Une lecture attentive des cet arrêt de principe conduit à diviser l’étude de la validité de la
distribution sélective en deux sections ; la première aura pour objet d’analyser les critères
préalables auxquels un réseau de distribution sélective doit répondre, la deuxième section
traitera de l’application du droit de la concurrence à la distribution sélective.

344
C.J.C.E, 11décembre 1980, affaire 31-80(l’oréal), rev. CJCE, 1981, p.3775, cité par Ferrier.

345
Ibid

101
Section 01 : les critères préalables de la distribution sélective

Pour qu’un réseau de distribution sélective soit déclaré valable, le droit de la concurrence à
établi des critères de bases qui concernent à la fois les produits distribués (§1) et les
distributeurs membres du réseau (§2).

Paragraphe 01 : les critères tenant aux produits distribués

Le recours à un système de distribution sélective ne se justifie que dans la mesure où il est


nécessité par les caractères propres aux produits. C’est ce principe qu’a consacré la cour de
justice des communautés européenne par son arrêt « l’oréal » en déclarant : « les produits qui
font l’objet de la distribution sélective doivent avoir des propriétés telles que le réseau en
cause soit indispensable pour en préserver la qualité et en assurer le bon usage »346.

Il est compris, par cet arrêt que le domaine de prédilection de la distribution sélective reste les
produits de luxe et de haute technicité. En raison de l’absence de jurisprudence ou de doctrine
algérienne, ne seront exposés ici que les grands principes du droit communautaire et du droit
français relatifs aux critères des produits propres aux réseaux de distribution sélective.

346
P. PIRIOU, La distribution sélective et les règles communautaires de la concurrence, RTD eur. 1978. p. 602.

102
A) les produits de luxe

Définir avec précision ce qu’est le luxe n’est certainement pas une tache facile. 347Pour
commencer, le dictionnaire Petit Robert propose la définition suivante : « mode de vie
caractérisé par de grande dépenses, consacrées à l’acquisition de biens superflus par goût de
l’ostentation et du plus grand bien-être »348.

Indépendamment de l’ambigüité posée par l’étymologie du mot « luxe »349, il est possible
d’affirmer que le luxe reste le symbole de la qualité, la rareté et le raffinement patent. Ainsi
Charles Beaudelaire associe le luxe à la beauté et à la volupté.350

Une réalité est certaine toutefois, les produits visés par l’industrie du luxe partagent certaines
caractéristiques communes : la qualité des matériaux utilisés, la perfection de la fabrication, la
rareté du produit, la notoriété et le prestige de la marque, l’environnement de la vente, etc.351

L’approche communautaire tant de la commission des communautés européennes que celle de


la cour de justice des communautés européennes tend à associer le caractère de luxe des
produits au caractère technique pour justifier la validité de réseau de distribution sélective.

Ainsi, dans l’affaire Omega, la commission des communautés européennes a pris en compte à
la fois la technicité des produits en cause et leur caractère de luxe pour justifier la sélection
des distributeurs.352Egalement dans la décision Junghans, la commission, tout en insistant sur

347
L. GRIMALAC. La définition de la quintessence du luxe : un défi utile pour la justice ?, Gaz Pal. 28/30
OCT.2001, P.10.

348 e e
Le Petit Robert - Dictionnaire de la langue française, Société du nouveau Littré, Paris. 2 édition, 4 trimestre
1967.

349
« L'étymologie n'éclaircit pas le débat puisqu'elle oppose le lux qui symbolise la lumière, le rayonnement, le
raffinement, l'éclairage, l'élégance à la luxuria emblème de l'excès, de l'inutile et de la dépravation », N.
CUSACQ, Le luxe et le droit, RTD com 2002, p.605.

350
CH. BEAUDELAIRE, Les fleures du mal, 1857, p.86, la citation exacte est « là tout n’est qu’ordre de beauté,
luxe, calme et volupté ».

351 ème
J. CASTAREDE, Le luxe, Que sais-je ? , PUF 2003, 3 édition,p.9.

352
Déc. Omega du 28 oct. 1970, J.O.C.E., 1970 L 242-22 note. Burst et Kovar.

103
la technicité du produit, ne semble pas méconnaitre la nécessité d’un environnement et d’une
présentation correspondant à la qualité des produits commercialisés par un réseau sélectif. 353

A l’occasion de l’affaire l’Oréal du 11/12/1980, la cour de justice des communautés


européennes a tranché le débat concernant la validité des contrats de distribution sélective en
précisant que : « la seule qualité du produit de luxe n’est pas une condition suffisante pour la
validité des circuits de distribution sélective. Encore faut-il qu’une concurrence effective joue
sur le marché des produits concernés354.

Par d’autres décisions plus récentes, le tribunal de première instance des communautés
européennes reprend le même principe lors de l’affaire Yves Saint Laurent et Givenchy en
déclarant : « la notion de propriétés des cosmétiques de luxe, au sens de l’arrêt l’Oréal, ne
peut être limité à leurs caractéristiques matérielles mais englobent également la perception
spécifique qu’en ont les consommateurs et plus particulièrement leur aura de luxe ; il s’agit
donc de produits qui, d’une part, sont d’une haute qualité intrinsèque et, d’autre part, possède
un caractère de luxe qui relève de leur nature même. »355

Dans un objectif de protection de l’économie nationale, l’approche des juridictions françaises


a validé dès 1965, par la décision de la cour d’appel de Paris, le mode de distribution des
parfums de la société Guerlain en affirmant que son démantèlement « risquerait de tarir une
source de richesse nationale par la diminution ou la perte de devises » et qu’il s’agissait de
produits de « haute qualité ».356

Par ailleurs, certaines décisions de la jurisprudence françaises mettent l’accent davantage sur
le prestige de la marque que sur la haute qualité des produits concernés. Ainsi, la licéité d’un
système de distribution sélective est justifiée par la notoriété de la marque d’un article de
luxe, qui « tient moins à ses qualités intrinsèques qu’à l’engouement d’une clientèle raffinée,

353
Déc. Junghans du 21 dec.1976, J.O.C.E., 1977, L30-10. note Burst et Kovar.

354
C.J.C.E., L’Oréal, 1/12/1980, préc.

355
TPCIE, 12 déc 1996, aff. T-19/92, Yves Saint Laurent, et T88/92, Givenchy, Rec. CJCE, , p. 1851et s., Contrats,
conc, consom. 1997, n 1, p.13, note Vogel L.

356
CA Paris, 26 mai 1965, Gaz Pal., 1966. 76.

104
à son impatience de se le procurer et à l’assurance qu’elle désire avoir de sa diffusion
restreinte, signes incontestés de son prestige ».357

On retrouve le même critère de notoriété dans une jurisprudence ultérieure de la cour de


cassation française qui déclare que « la distribution sélective correspond à l’accord par lequel
un fournisseur, désireux de préserver la notoriété de ses produits, s’engage à approvisionner
un revendeur sélectionné en raison de son aptitude à distribuer ses produits »358

C’est en associant le prestige au caractère de luxe des produits pour justifier les accords de
distribution sélective, que la jurisprudence française commence à s’aligner sur la
jurisprudence communautaire. En effet, la cour de cassation française lors de l’affaire
opposant la société Channel à la société Boulogne de distribution statue que « la vente de
parfum de luxe par un personnel non qualifié et dans un local manifestement inadapté est
également génératrice d’un dommage majeur pour le prestige de la marque Channel
essentiellement associé à une idée de luxe et de raffinement. »359

Après avoir exigé la notoriété de la marque et le caractère de luxe pour tolérer cette pratique
restrictive de concurrence, la cour de cassation française entérine définitivement son
alignement à la jurisprudence communautaire en relevant que c’est la qualité du produit et
non la réputation de la marque qui légitime le recours à ce mode de distribution360.

En raison de la faiblesse de la production et du commerce des parfums de luxe en Algérie, les


affaires devant la justice ou le conseil de la concurrence semblent inexistantes et par voie de
conséquence aucune position de la jurisprudence algérienne n’est à relever sur ce point. En
revanche, le législateur algérien a consacré, en application du dispositif relatif à la protection
du consommateur, le décret exécutif n° 97-37 définissant les modalités et les conditions de

357
Trib. Corr. Seine, 27 nov. 1965, Gaz Pal., 1966.1.110

358
Cass.com. 9fevrier 1976, JCP1977.П. 1859 obs. J. Hemard

359
C. Crim, 4 décembre. 1990. Soc. Boulogne distribution c/ Soc Channel RTD. COM1991, p.333.

360
« …le seul fait que ces marchandises sont vendues sous une marque de luxe, n’est pas de nature à leur
conférer la qualification d’un produit de luxe relevant d’un système de distribution sélective… ». Cass. Com. , 8
juillet 2003, n° de pourvoi : 00 – 16726 cité par Le tourneau.

105
fabrication, de conditionnement, d’importation et de commercialisation de produits
cosmétiques et d’hygiène corporelle dont le parfum fait partie361.

Selon l’article 02 du décret, le législateur entend par produits cosmétiques et d’hygiène


corporelle, toute substance ou préparation, autre que les médicaments, destinée à être mise en
contact avec les diverses parties superficielles du corps humain tels que l'épiderme, le système
pileux et capillaire, les ongles, les lèvres, les paupières, les dents et les muqueuses, en vue de
les nettoyer, de les protéger, de les maintenir en bon état, d'en modifier l'aspect, de les
parfumer ou d'en corriger l'odeur.

L’alinéa 02 du même article écarte du champ d’application du décret les médicaments tels que
définis par l’article 171 de la loi n° 85-05362.

L’article 03 rejette à l’annexe І du décret qui comporte une liste des produits, considérés au
sens de l’article 02, comme produits cosmétiques et d’hygiène corporelle. Aux termes de cet
annexe, le législateur fait figurer le parfum, l’eau de toilette et l’eau de cologne comme
appartenant aux produits cosmétiques et d’hygiène corporelle.

En somme, il revient au fabricant de faire en sorte que ses produits recèlent une haute qualité
intrinsèque ; la réputation de la marque reste un indice mais n’est pas un critère suffisant pour
l’admission d’un réseau de distribution sélective.

De ces différentes approches, il ressort que tous les produits ne sauraient automatiquement
justifier cette forme de distribution. Il est donc nécessaire d’examiner si les propriétés des
produits en cause nécessitent, « pour en préserver la qualité et en assurer le bon usage, »363un
système de distribution sélective. Ainsi en l’absence de caractère intrinsèque aux produits
concernés, aucune référence du contrat, liant le fournisseur aux distributeurs sélectionnés, au

361
Décret exécutif n° 97 - 37 du 14/01/1997, définissant les conditions et modalités de fabrication, de
conditionnement, d’importation et de commercialisation sur le marché national de produits cosmétiques et
d’hygiène corporelle ( J.O.R.A. n° 04 / 1997 ).

362
La loi n° 85-05 du 16 février 1985 relative à la protection et à la promotion de la santé, modifiée et
complétée.

363
C.J.C.E, 11décembre 1980, affaire 31-80(l’oréal), rev.CJCE, 1981, p.3775, cité par Ferrier.

106
caractère de luxe ne suffit à elle-même pour admettre ce mode de commercialisation des
produits.364

B) Les produits de haute technicité

Le critère déterminant dans le choix d’un système de distribution sélective est le service rendu
à la clientèle, que ce soit pour les produits de luxe et de prestige ou pour les produits de
technicité avancée, dits de « haute technicité »365 .

En effet, la logique commerciale impose à un producteur d’ordinateurs, d’automobiles, ou


tout autre produit qui par nature est de haute qualité et technicité, le recours à une sélection
des distributeurs. L’accueil de ces produits exige un espace, un équipement, une qualification
nécessaire du commerçant et de son personnel, tout cela dans le seul but d’une bonne
commercialisation du produit auprès du consommateur.366

Il est assez difficile de saisir les propriétés des biens techniques. La loi et la jurisprudence,
procédant de façons différentes, se gardent de les définir.367La doctrine, pour sa part, s’est
rarement intéressée à ce problème.368Il faut donc recourir à la connaissance commune pour
circonscrire le domaine de notre recherche. Le petit Robert définit le terme « technique » :
« qui concerne les applications de la connaissance théorique, dans le domaine de la production

364
Y. DITRICH ET A.MENAIS, la distribution sélective à l’épreuve du commerce électronique. , les cahiers Lamy
droit de l’informatique et des réseaux, n° 114 mai 1999.

365
M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J.-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n°24.

366
J. GUYENOT, Les contrats de concession commerciale. Bibliothèque de droit commercial dirigée par R. Houin.
t16, Sirey, 1968, broché, 690 p. 287.

367
Les tribunaux français se réfèrent parfois au critère de haute qualité, voisin de la notion de haute technicité,
pour admettre comme justifier le refus de vente. J. Guyénot. Les concessions commerciales, Sirey, 1968. ,
p.255.« la notion de haute technicité d’un produit est en voie de devenir un des critères jurisprudentiels
fondamentaux et la pierre d’achoppement du refus illicite de vente…… ».

368
A bien chercher, il n’y a que l’analyse que fait Mr GUYENOT à propos du refus illicite de vente, op cit,, 288 et
s, : il distingue les biens de haute technicité accentuée, les biens de haute technicité et ceux de technicité
simple ou relative, sans toutefois en donner les définitions et les caractéristiques.

107
et de l’économie. »369La jurisprudence communautaire a, pendant longtemps, estimé que le
recours à la distribution sélective devait être limité aux produits qui nécessitent un tel système
de distribution. C’est ainsi que la CJCE mentionne systématiquement cette circonstance en
observant, comme dans l’affaire Junghans, « que la vente, dans de bonne conditions d’articles
d’horlogerie, d’une grande complexité technique, requiert que les articles soient vendus dans
des magasins spécialisés, par un personnel qualifié et dans des locaux permettant le stockage,
la présentation et la démonstration dans des conditions convenables ».370

Dans un second arrêt la CJCE vient rappeler le même principe par l’arrêt Métro П du 22
octobre 1986, mettant en évidence que « la complexité de la technologie en cause est
actuellement telle qu’elle est de nature à justifier un réseau de distribution disposant de
grossistes et détaillants spécialisés »371.

Ainsi une telle distribution est admise dans le secteur du luxe et, au-delà, il faut admettre que
les produits de haute technicité puissent en bénéficier puisqu’il s’agit d’un secteur dans lequel
la distribution sélective est légitimée par « le maintien d’un commerce spécialisé capable de
fournir des prestations spécifiques pour des produits de haute technicité »372.

La commission des communautés européennes semble s’engager dans une politique plus
libérale s’agissant de la nature du produit. On assiste ainsi à un élargissement progressif des
critères permettant de légitimer la distribution sélective. 373Tel est le cas des journaux qui
peuvent aussi être distribués par un réseau de distribution sélective en raison de leur caractère
culturel.374Il semblerait que la liste des produits pouvant être admis à la distribution sélective,

369
Le nouveau Petit Robert, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, rédaction dirigée
par Alain Rey et Josette Rey-Debove, Dictionnaires Le Robert, Paris, 1993. V. technique.

370
CJCE, 21 déc.1976, aff 77/10, Junghans, JOCE, 2févr. 1977, n° L30.

371 ème
16 rapport de la politique de la concurrence – 1986 n 97-106

372
Déc. SABA, 15 décembre 1975, JOCE n° 28 du 3 février 1976.

373
J.J. BURST ET R.KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence » RTD com,
1978, p. 446.

374
C.J.C.E., 19 juin 1981, Salonia, Rec. Cour de justice 1981.1583, note Burst et Kovar.

108
ne soit pas exhaustive, pourvu que les conditions du marché, pour un produit particulier soit
parfaitement concurrentielles.375

Plus récemment des marchandises ont été ajoutées à cette liste alors qu’elles n’étaient ni
sophistiquées ni d’une technique avancée, telles que la céramique de table et décorative. Ainsi
la Commission a souligné dans sa décision Villeroy et Boch du 16 décembre 1985, que
« certains produits ou services simples ont toutefois des propriétés telles qu’ils ne peuvent être
offerts utilement au public, sans l’intervention de distributeurs spécialisés.»376

Une partie de la doctrine française s’est demandé si cette évolution de la jurisprudence


européenne laissait place à une distribution sélective justifiée exclusivement par des
préoccupations d’ordre commercial. Tel serait le cas d’une marque réputée qui ne pourrait
s’accommoder d’une distribution par les circuits communs, ou encore la volonté d’un
producteur de se démarquer de ses concurrents en mettant sur pied un réseau de distribution
sélective.377

Il est bien admis que la distribution sélective est fondée sur la sélection des revendeurs qui
seront seuls habilités à acheter les produits du fabricant 378 ; autant dire qu’elle implique un
refus de vente aux autres, même si ce n’est pas le but du contrat. 379 La cour de cassation
française a d’abord admis, à une époque où le refus de vente était un délit, 380l’indisponibilité
juridique des produits de haute qualité et de haute technicité aux distributeurs hors réseau en
affirmant que :« le refus de vente était justifié parce que le contrat de distribution sélective
tendait à assurer un meilleur service aux consommateurs, spécialement pour les produits
requérant une haute technicité… ».381

375
J.BOULOUIS, Jurisprudence de la cour de justice des communautés européenne. In : annuaire français du
droit international, volume 29, 1983 p. 353.

376
Déc. Villeroy et Boch, 16 décembre 1985, JOCE 40 L.376 du 31 décembre 1985.

377
J.J. BURST ET R.KOVAR, préc, p. 463.

378
J. BEAUCHARD, Droit de la distribution et de la consommation, P.U.F, 1996, p. 201.

379
Cass. Com., 26 oct. 1983 : bull. civ. 1983, ΙV, n 282. cite par Le Tourneau.

380
Art. 37 de l’ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 sur les prix.

381
Crim. 3 nov. 1982 ; Bull. crim. n°258 ; « arrêt Nina Ricci ». cite par Beauchard.

109
La notion ¨d’amélioration du service rendu au consommateur¨ existe depuis longtemps dans
les jugements de la cour de cassation française. 382Ainsi en 1962 la haute juridiction française
a considéré que « le contrat concernant le commerce de produits requérant une haute qualité
ou de marchandises de haute technicité peut avoir pour effet de rendre juridiquement
indisponibles à l’égard des tiers les marchandises détenues par le vendeur, à condition qu’il
n’ait pas eu pour objet ou pour effet, même indirect, de limiter la liberté du concessionnaire
de fixer lui-même, comme il l’entend, le prix de vente des marchandises, mais qu’il tende
essentiellement à assurer une amélioration du service rendu au consommateur ».383

De façon plus pertinente encore, la jurisprudence française admet également, en raison du


caractère de haute technicité des produits, le refus d’agrément opposé à des revendeurs
désirant entrer dans le réseau mais ne répondant pas aux conditions fixées par le propriétaire
du réseau.384 Si la cour de cassation française a toujours contrôlé les réseaux de distribution
sélective avec sévérité, elle a toutefois reconnu la licéité de l’interdiction faite par le fabricant
aux membres du réseau de revendre les produits aux revendeurs hors réseau en mettant
l’accent sur leur caractère de haute technicité.385

La jurisprudence française a, en outre, précisé que le critère de la technicité du produit ne


pouvait justifier le refus de vente lorsqu’il s’agissait d’appareils dont la conception simple
permettait la vente par tout détaillant non spécialement qualifiés.386

Dans l’ensemble, la position de la jurisprudence française reste conforme à la position de la


jurisprudence européenne et au traité de Rome, puisque pour être admis tant au niveau
communautaire que national, les systèmes de distribution sélective doivent réserver une partie
équitable de leurs avantages aux utilisateurs387.

382
J. HEMARD, Une enquête sur les contrats d’exclusivité, le refus de vente et les prix imposés dans les pays du
marché commun. Revue internationale de droit comparé, 1964, vol 16, n° 4, p. 705.

383
Cass. Crim. 11 juillet 1962, D. 1962. 497 rapport Costa. Cité par hémard.

384
Paris, 18 déc. 1987, GP, 1988, 1, 168. cité par Beauchard.

385
Trib.com. Paris, 14 mai 1986, Lettre distrib. , 1986, n° 6. cité par Beauchard.

386
Cass. Com. 17 juill. 1990, n 19-14. 119 bull.civ. ΙV, n 220, p. 151. cite par Ferrier.

387
Art. 81§ 03 du traité de Rome.

110
La notion « d’avantages » n’étant pas développée, la doctrine considère que ceux-ci sont
essentiellement d’ordre qualitatif tel que, notamment, l’amélioration des services avant et
après vente, une disponibilité constante et une qualité irréprochable des produits, mais que
l’accent n’est pas mis de façon principale sur la concurrence par les prix388.

En somme, il convient de préciser que le juge communautaire et français ont circonscrit


logiquement la distribution sélective aux produits de luxe et de haute technicité en recherchant
prioritairement l’intérêt du consommateur. Toutefois, si la jurisprudence exige des critères
préalables tenant à la nature des produits distribués, il convient de constater qu’elle tient
compte également des critères tenant aux distributeurs.

Paragraphe 02 : les critères tenant aux distributeurs

La distribution sélective se justifiant à priori par des considérations tenant à la qualité, à la


technicité, voire à la notoriété du produit, il en résulte que la sélection des distributeurs doit
s’effectuer par des critères en relation avec ces conditions.389 De ce fait, la création d’un
réseau sélectif se caractérisera par le choix de distributeurs ayant certaines compétences et
correspondants aux conditions préétablies par le promoteur du réseau.

Aussi, pour permettre une meilleure rentabilisation des points de vente et assurer un meilleur
service aux consommateurs, le fournisseur est amené à limiter quantitativement le nombre des
revendeurs agrées pour commercialiser ses produits. Dès lors, il convient d’apprécier cette
nécessaire sélection qu’elle soit qualitative ou quantitative tant en droit français qu’en droit
algérien.

A) la sélection qualitative

388
M. NESSEMBAUM, « l’analyse économique de la distribution sélective », RJDA, Francis Lefebvre, 1995, n° 4,
p. 316.

389
G. LE TALLEC « une symbiose entre le droit communautaire et le droit national : la distribution sélective des
parfums ». RTD eur 1988, p. 437.

111
C’est dans l’arrêt Metro Ι du 25 octobre 1973 que la CJCE devait fixer les critères de
sélections des distributeurs qui constitue un élément de concurrence conforme à l’ancien
article 85§1. Ainsi la sélection est licite « à condition que le choix des revendeurs s’opère en
fonction de critères objectifs de caractère qualitatif relatifs à la qualification professionnelle
du revendeur, de son personnel et de ses installations, que les conditions soit fixées d’une
manière uniforme à l’égard de tous les revendeurs potentiels et appliquées de façon non
discriminatoire »390.

Afin de garantir la commercialisation de ses produits dans de bonnes conditions, le


propriétaire d’une marque de luxe ou de produits de haute technicité peut donc choisir ses
revendeurs en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif relatifs à la qualification
professionnelle du revendeur et de son personnel et à la présentation de ses installations391.

La sélection des distributeurs est devenue essentielle pour des fabricants de luxe qui se
refusent à voir leurs produits commercialisés dans des points de vente peu valorisants. Or,
cette sélection ne se justifie que dans la mesure où elle est nécessitée par les caractères
propres aux produits distribués, c’est là, la condition première de la validité de la distribution
sélective392.

Aussi, les conditions de sélection basées sur des critères objectifs de caractère qualitatif
auxquels doit satisfaire le distributeur doivent être strictement proportionnés aux impératifs
d’une bonne commercialisation des produits et appliqués sans discrimination.

1- le principe de proportionnalité :

Compte tenu de la nature spécifique des produits, la finalité d’un système de distribution
sélective doit être « de garantir une vente dans de bonnes conditions au consommateur »393.

On conçoit que, pour répondre à cette exigence, les critères puissent être très divers. Ils
tiennent à la qualification professionnelle du distributeur et de son personnel394, mais aussi à

390
CJCE, 25 oct. 1977. Metro l, Rec. CJCE 1977. p. 1875, cité par Ferrier

391
Cass-crim : arrêts dits « duo » (aff lanvin, Nina Richi, Rocho) 3Nov 1982, Gaz. Pal. 1982, 2, 658.

392
C.J.C.E, 11décembre 1980, affaire 31-80(l’oréal), rev.CJCE, 1981, p.3775, cité par Ferrier.

393
Déc. N° 76/159/CEE de la Commission, 15 déc. 1975, SABA, JOCE, 3févr. 1976, n° L28, p. 19, pt. 29.

112
la qualité de ses installations395, à ses références bancaires ou sa solvabilité396, à ses heurs
d’ouvertures397et à son standing et la présentation valorisante des produits398.

Les critères de sélection fixés par le fournisseur et liés à la compétence ou à l’aptitude du


distributeur ou de son personnel ont été considérés comme non restrictifs de concurrence.

En effet, le TPICE estime que les critères relatifs à la qualification professionnelle du


distributeur et de son personnel est une exigence légitime pour la vente de cosmétiques de
luxe399. En revanche, le tribunal a jugé disproportionné le critère de pharmacien d’officine car
il entrainait une limitation quantitative des points de vente400.

Pour que la distribution sélective et plus particulièrement dans le domaine des cosmétiques de
luxe, soit efficace la présence dans le point de vente d’une personne capable de donner au
consommateur des conseils ou des renseignements appropriés constitue en principe une
exigence légitime pour la vente des dits produits, qui fait partie intégrante d’une bonne
présentation de ceux-ci401.

Ayant pour but essentiel la protection et la sécurité des consommateurs que la bonne
commercialisation des produits, le législateur algérien n’a pas totalement négligé les
conditions relatives à la formation du personnel sensé servir les clients. En effet, le décret
exécutif n° 97-37 relatif aux produits cosmétiques et d’hygiène corporelle402 fait obligation au
fabricant, au conditionneur et à l’importateur d’avoir la qualification professionnelle pour

394
Déc. N° 85/616/CEE de la Commission, 16 déc. 1985, Villeroy et Bosch, JOCE, 31 déc. 1985,11° L376.

395
Déc. N° 85/404/CEE de la Commission, 10 juill. 1985. système de distribution Grundig, JOCE, 30 août 1985,
n°L233.

396
Déc. N° 841233/CEE de la Commission. 18 avr. 1984, IBM, JOCE, 4 mai 1984, n° L.233.

397
CJCE, 11 oct. 1983, aff.210/81, Société Demo-Studio Schmidt.Rec. CJCE, p.3045.

398
Déc. N° 85/6 16/CEE de la Commission, 16 déc. 1985, préc.

400
TPICE., 27 fev. 1992, Vichy c. Commission, T-19/91, Rec. p. II-415, note L. Vogel

401
Jean-Pierre Pamoukdjian, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p. 26.

402
Décret exécutif n° 97-37 du 5 Ramadhan 1417 correspondant au 14 janvier 1997 définissant les conditions et
les modalités de fabrication, de conditionnement, d'importation, et de commercialisation sur le marché
national des produits cosmétiques et d'hygiène corporelle. p.13( N° JORA : 004 du 15-01-1997 ).

113
l’exercice de cette activité commerciale. Une lecture attentive de ce texte démontre que le
législateur a manqué d’imposer cette qualification aux distributeurs des produits cosmétiques
et d’hygiène corporelle qui, selon le même texte, concernent aussi le parfum, l’eau de toilette
et l’eau de cologne.

La qualification professionnelle prévue par le législateur est attestée par l’un des titres
suivants :

-tous diplômes permettant l’exercice de la profession de médecin de vétérinaire ou de


pharmacien,

-tous diplômes d’ingénieurs orientés vers la chimie ou la biologie,

-tous diplômes d’études supérieures orientés vers la chimie.

Encore plus soucieux de l’intérêt et la sécurité des consommateurs, le législateur algérien


exige des conditions précises pour la commercialisation des produits techniques. Ainsi,
l’activité de concessionnaire de véhicules automobiles neufs est ouverte aux agents
économiques constitués sous la forme de sociétés commerciales et tenu de disposer d’un
personnel ayant les qualifications requises et/ou une expérience suffisante dans le domaine 403.

De manière analogue, le législateur algérien impose au postulant à l’activité de


concessionnaire de disposer d’infrastructures appropriées de stockage et de service après-
vente dont la superficie globale doit être égale ou supérieure à 5000 mètres carrés. En effet,
l’utilisation du mot « postulant » à, l’article 18 du décret, démontre que le législateur fait du
critère d’infrastructures appropriées une condition préalable à l’obtention de l’agrément de
concessionnaire de véhicules automobiles neufs.

Par ailleurs, ces infrastructures doivent être dotées de moyens de sécurité et de protection des
véhicules et être éventuellement couvertes. Comme condition préalable, le législateur impose
également au postulant à l’activité de concessionnaire de disposer lui même ou par le biais de
distributeur agréés, d’enceintes d’exposition et de vente dont la superficie de chacune doit être
égale ou supérieure à 200 mètres carrés.

403
Art. 18 du décret exécutif n° 07-390 du 12 décembre 2007 fixant les conditions et les modalités d'exercice
de l'activité de commercialisation de véhicules automobiles neufs. (J.O.R.A. n° 78 du 12 décembre 2007).

114
Si la sélection qualitative est admise, le conseil de la concurrence français exige que les
critères soient déterminés de façon objective. Cette condition est remplie lorsque le contrat
comporte une clause imposant un diplôme de pharmacien, un diplôme universitaire équivalent
ou un diplôme scientifique ou professionnel pour le distributeur de produits de cosmétiques de
luxe404. Certains auteurs voient dans l’admission des critères du fournisseur relatifs à la
qualification professionnelle et qui ont pour objectif la bonne commercialisation des produits,
une application de la règle de raison405.

Le juge communautaire se montre, en revanche, plus circonspect lors de l’appréciation des


critères concernant la localisation et l’aspect externe du point de vente. Le critère qualitatif
d’environnement et de localisation du point de vente a pour finalité d’assurer que des produits
de luxe ou de haute technicité ne sont pas vendus dans des lieux totalement inadaptés.

Le TPICE a par ailleurs estimé « qu’il appartient aux juridictions ou aux autorités nationales
de veiller à ce que les critères concernant l’aspect extérieur du point de vente, y compris ceux
concernant les vitrines, ne sont pas appliqués d’une manière disproportionnée406. »

Quant au juge français, il considère que la localisation du point de vente est généralement un
critère déterminant dans l’investiture, qui est parfaitement licite407, mais à condition que soit
rapportée la preuve par le fournisseur que la localisation du point de vente est inadaptée à la
nature et à la qualité du produit408.

Concernant l’interdiction de vendre d’autres produits de nature à déprécier l’image de marque


des produits de luxe, le TPICE admet qu’on puisse, compte tenu de leur aura et prestige,
exiger que les parfums et cosmétiques de luxe, ne soient pas vendus à proximité de certains

404 er
Cons. conc., déc. n° 96-D-57, 1 oct. 1996, Produits cosmétiques et d’hygiène corporelle, BOCCRF, 11 fév.
1997, p. 42.

405
D. FERRIER, Le Droit de La distribution, Lexis Nexis SA, 2006, p. 265.

406
TPICE, 12 déc. 1996.aff. T-19/92 et T-88/92, précité.

407 er
Cass. Com., 1 juill. 2003, Sté Anaisc/ Sté Marie Jeanne Godard : Cah. Dr. Entr. 2003, n° 5. p. 42, obs. D.
Mainguy.

408
Cass. Com., 16 mai 2000, Sté Pronovias c/ Sté Galeries Tomy : Cah. Dr. Entr. 2001, n° 4, p. 32, obs. D.
Mainguy.

115
autres produits tels que les produits d’alimentation et d’entretien, ou qu’il y ait une séparation
adéquate entre les produits de luxe et ceux véhiculant une image de qualité inférieure409.

Pour la jurisprudence française les critères de l’environnement du magasin sélectionnables


s’étendent aux autres marques représentées dans le point de vente : elles doivent appartenir à
la même catégorie, une cohérence est nécessaire dans la présentation à la clientèle de façon
qu’une marque prestigieuse ne souffre d’un voisinage d’un produit quelconque410.

La commission de la concurrence a reconnu explicitement à son tour, dans un avis du 1er


décembre 1983, les critères qualitatifs relatifs à la qualification et à la localisation et
l’environnement du point de vente en admettant l’existence d’une demande spécifique des
consommateurs de produits de luxe, se distinguant de la demande d’autres produits « pour
lesquels l’image et les conditions d’environnement de la vente sont des considérations soit
inexistantes soit accessoires dans la décision d’achat. »411 Elle reconnaît que la distribution
sélective est une adaptation de l’offre à une demande spécifique des consommateurs.

De surcroit, le TPICE juge que « constitue en principe une exigence légitime le critère
veillant à ce que l’enseigne du distributeur ne soit pas de nature à dévaloriser l’image de luxe
des produits de luxe412 ».

2- le principed’objectivité

Si les droits de la concurrence communautaire et français imposent au fournisseur les


principes de nécessité et proportionnalité, il est également exigé que soit appliqués les critères
de sélection de façon non discriminatoire à l’égard de tous les revendeurs potentiels413. Les
systèmes de distribution sélective constituent un élément de concurrence conforme à l’article

409
TPICE, 12 déc. 1996.aff. T-19/92 et T-88/92, précité.

410
Contrats, conc. Consom. 2000, comm. 148, obs. S. Poillot-Peruzzetto.

411 er
Commission de la concurrence. Avis parfums du 1 déc 1983 Bocc 28 déc 1983, cité par Le Tourneau.

412
TPICE, 12 déc. 1996.aff. T-19/92 et T-88/92, précité.

413
J.J. BURST ET R.KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence » RTD com,
1978, p. 446.

116
81§1 du traité de Rome pour autant que les critères de sélection soient appliqués de façon non
discriminatoire à l’égard de tous les distributeurs candidats à la sélection414.

Suivant cette position de la jurisprudence européenne le fabricant doit exiger les mêmes
conditions à tous les détaillant et lorsqu’un détaillant remplit ces conditions ou critères
qualitatifs, le fabricant doit accepter de l’intégrer dans son réseau : c’est le principe de la
sélection qualitative objective. Ce qui revient à dire qu’en distribution sélective, le fabricant
choisit ses critères, pas ses distributeurs415.

Dans l’arrêt Métro Ι, la CJCE a clairement souligné que les critères qualitatifs devaient être
appliqués « de manière uniforme à tous les revendeurs potentiels et appliqués de façon non
discriminatoire 416».Elle veille de ce fait à ce que la sélection des distributeurs ne se fasse pas
au détriment de ceux qui pratiquent par exemple une politique de bas prix et s’attache à ce que
ceux-ci ne soient pas exclus directement ou indirectement de la revente de certains produits
par le biais de conditions discriminatoires417.

En droit français, et depuis la circulaire du 31 mars 1960, dite circulaire Fontanet, un fabricant
qui requiert certaines conditions de standing du point de vente et de personnel, doit les
appliquer sans discrimination. Il n’en reste pas moins que le fabricant, en dernier ressort, est
seul juge de sa décision et reste maitre du nombre et du choix des intermédiaires avec lesquels
il entend se lier contractuellement418.

Se conformant à la jurisprudence européenne de l’arrêt Metro Ι, la cour d’appel de Paris


confirme par sa position que le système de distribution sélective SEIKO France qui réservait
des produits à des « horlogers-bijoutiers-joailliers » a été déclaré illicite : « considérant qu’en
acceptant comme seuls revendeurs les horlogers-bijoutiers-joailliers disposant d’une surface
de vente situé dans une artère commerçante ou un centre commercial, la société SEIKO
France institut ainsi l’exclusion de la grande distribution sans établir que cette exclusion soit

414
TPICE, 12 déc. 1996.aff. T-19/92 et T-88/92, précité.

415
GAST, OLIVIER ; GRILLAULT LAROCHE, HAYETTE, La distribution sélective et la franchise, JCP E, n° 50,
14/12/2000, pp. 36-46

416
CJCE, 25 oct. 1977. Metro l, Rec. CJCE 1977, p. 1875, cité par Ferrier.

417
D. Ferrier, op. cit, p. 268.

418
A. OSER, La distribution sélective en droit français et en droit communautaire, Gaz. Pal. 1977,2, doct. p. 7.

117
objectivement justifiée ; que partant elle révèle une pratique discriminatoire contraire aux
exigences de l’ordonnance de 1986 »419.

Quant à la cour de cassation, elle fait une allusion très nette au principe d’objectivité en
jugeant que « pour l’agrément des membres d’un réseau de distribution sélective de produits
de luxe, un critère relatif à la localisation d’un point de vente et à son environnement, afin
d’éviter la vente de tels produit en des lieux totalement inadaptés à leur nature et à leur
qualité, n’est pas en soi illicite ; l’application concrète de ce critère ne doit pas être
discriminatoire ou comporter des exigences disproportionnées420 ».

B) la sélection quantitative

Si l’on considère que la mise en place d’un système de distribution sélective vise
essentiellement à protéger l’image de marque des produits et assurer un service de qualité au
consommateur, il est envisageable qu’un producteur cherche à adapter quantitativement
l’écoulement de ses produits à la demande des consommateurs421.

Ainsi, à la sélection qualitative, s’ajoute une sélection quantitative des distributeurs qui seront
seuls agrées à vendre les produits du fabricant. Ce mode de sélection se traduirait donc par
une limitation volontaire du nombre des points de vente et peut constituer à priori une
restriction illicite de concurrence422.

Du point de vue français comme algérien, la limitation exercée sur les partenaires d’accéder
au marché ou aux activités commerciales constitue une entente anticoncurrentielle interdite

419
CA Paris, 11 sept. 2000, SA Carrefour France et autres c/ SA Seiko France, rép. Com. Dalloz, avril 2004. p. 43.

420
Cass. Com. 10 mai 2000, RTD. Com 2001, p. 549.

421
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p. 41.

422
M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n°96 ; Lamy
droit économique 2003, n°4844.

118
par le droit de la concurrence. Cette limitation peut également constituer un abus de position
dominante prohibée par les dispositions des textes français et algérien de la concurrence 423.

Néanmoins, les critères de sélection quantitatifs peuvent être admis, mais avec une vigilance
accrue de la part des autorités et des juridictions compétentes. C’est dans l’arrêt Lancôme du
10 juillet 1980 que la CJCE s’est prononcée sur les critères de sélection quantitatifs en
affirmant avec force « qu’un réseau de distribution sélective dont l’accès est subordonné à des
conditions allant au-delà d’une simple sélection objective de caractère qualitatif tombe en
principe sous l’interdiction de l’article 81§1, en particulier quand il est fondé sur des critères
de sélection quantitatifs»424.

Il fallait prendre parti pour ou contre le principe de la sélection quantitative des revendeurs,
qui est contraire aux règles du droit de la concurrence et implique une exclusion de certains
distributeurs. La jurisprudence européenne est venue par l’arrêt l’Oréal préciser en bonne
logique juridique qu’« il est de la compétence exclusive de la commission, sous réserve du
contrôle de la cour, de faire bénéficier de tels accords d’une exemption au sens de l’article
81§3 »425 Les techniques suivies par le fabricant
pour aboutir à cette limitation sont variées et vont de la fixation d’un chiffre d’affaire
minimum, à la limitation par zone géographique du nombre de revendeurs agrées.

1- La fixation d’un chiffre d’affaires minimum

Par certaines clauses d’un contrat de distribution sélective, un fabricant impose souvent aux
distributeurs d’atteindre des objectifs de vente. La réalisation d’un chiffre d’affaires annuel

423
D. ZENNAKI, La discrimination entre agents économiques, séminaire international le 18 et 19 octobre2008 à
Oran sur les contrats de distribution, organisé par le laboratoire de droit économique et environnement, faculté
de droit d’Oran en collaboration avec le centre d’étude et de recherches en droit des affaires et des contrats
(CERDAC, université de Bordeaux IV).

424
CJCE, arrêt du 10/07/1980 SA Lancôme et Cosparfrance Nederland BV c. Etos BV et Albert Heyn Supermart
BV affaire 99/79, rec. cour de justice 1980. 2327

425
C.J.C.E, 11décembre 1980, affaire 31-80(l’oréal), rev.CJCE, 1981, p.3778, cité par Ferrie

119
minimum en est l’exemple parfait. C’est sans doute aussi un moyen pour le fabricant de
s’assurer la maîtrise quantitative de son réseau de distribution426.

En effet, le critère de chiffre d’affaires minimum comporte un élément quantitatif en ce sens


que les commerçants qui n’arriveraient pas à réaliser l’objectif fixé par le fabricant pourraient
être exclus, mais il aurait l’avantage de permettre à tous les commerçants compétents et
pouvant atteindre le chiffre d’affaires exigé d’accéder au réseau427.

Même lorsque les fabricants utilisent une terminologie variante 428, la raison d’être de la clause
de fixation du chiffre d’affaires minimum est en réalité la même : limiter le nombre de
distributeurs agrées et garantir un certain rendement au fabricant. Un professionnel qualifié
dans le domaine du luxe fait savoir que « le chiffre d’affaires est le moyen de régulation
destinée à adapter le nombre de points de vente à la diffusion souhaitable ou possible du
produit. En faisant varier le niveau du chiffre d’affaires réclamé auprès du détaillant, le
fabricant va augmenter ou réduire la diffusion de ce produit en tenant compte de la structure
de l’évolution du marché [...] le chiffre d’affaires minimum est une assurance de qualité429 ».

Par une série de décision, la commission des communautés européennes a considérablement


assoupli la position hostile qu’elle avait à l’égard des critères quantitatifs et en particulier
celui de la fixation du chiffre d’affaires minimum par le fabricant. Ainsi, dans la décision
Yves Saint Laurent du 16 décembre 1991, il a été jugé que seule l’annulation des clauses de
sélection quantitative, à priori, a permis de légitimer la sélection effectuée sur la base de
critères qualitatifs430.

Il faut, au préalable rappeler, que par cette décision hostile aux critères quantitatifs, la
commission est restée fidèle à la jurisprudence de la CJCE, qui avait de puis longtemps posé
en principe qu’un réseau de distribution sélective dont l’accès est subordonné à des conditions

426
P. PIGASSOU : "La distribution intégrée" , RTD com 1980, p. 473.

427
J.J. BURST ET R.KOVAR, op. cit.

428
Les clauses de quota, de minima ou de minimum.

429
Intervention de M. MOSSER, président de la fédération française de l’industrie des produits de parfumerie,
de beauté et de toilette, lors d’un colloque le 22 mai 1991 sur les enjeux économiques, culturels et juridiques
de la distribution sélective : Gaz. Pal. 1991, 1, doctr., p. 383.

430
Déc. Yves Saint Laurent, 16 déc 1991 Gaz. Pal. 1992 n° 136-137, p. 31.

120
allant au-delà des critères qualitatifs, ne peut être justifié, en particulier lorsqu’il est fondé sur
des critères de sélection quantitative431. Cette interdiction préambulaire atteste de la méfiance
des autorités et juridictions européennes de ce que la sélection du fournisseur ne devienne
arbitraire et aboutit à exclure de la revente un nombre de commerçant qualifiés ou à écarter
certaines formes de distribution tels que les supermarchés et les magasins de libre service.

Bien qu’extrêmement contre les clauses de limitation quantitative des distributeurs au début,
la commission européenne de la concurrence relève après que, dans le domaine de la
distribution des produits de haute technicité, les contrats recelaient fréquemment l’obligation
pour le distributeur d’effectuer une part minimal de ses achats auprès du fabricant, pour
chacun des modèles de produits qu’il distribuait432. Ainsi, est justifiée, au regard du droit de la
concurrence communautaire, la sélection quantitative basée su la fixation par le fabricant d’un
chiffre d’affaires minimum. La commission analyse une telle exigence comme une des
préoccupations principales des systèmes de distribution sélective : celle pour le distributeur
sélectionné de disposer d’un stock suffisant de produit, afin de permettre au consommateur
d’effectuer un vaste choix parmi toute la gamme des produits du fabricant433.

Une partie de la doctrine voit en ce revirement de la jurisprudence européenne une solution


paradoxale, puisqu’elle peut avoir pour effet d’inciter des distributeurs, dans des zones
géographiques économiquement saturées, à demander l’agrément d’un nombre de marques
dont ils ne pourront jamais réaliser le chiffre d’affaires minimum.

C’est bien, paradoxalement, cette situation qui risque d’entrainer des investitures, suivies en
série d’exclusions ultérieures du réseau, favorisant de la sorte une concentration de la
distribution434.

A l’issue des arrêts « DUO », la cour de cassation française n’exclue pas de prendre en
considération les critères quantitatifs de sélection lorsqu’ils sont justifiés 435. Pour le critère de

431
CJCE, arrêt du 10/07/1980 SA Lancôme, préc.

432
Avis de la commission du 9 oct. 1986 sur le marché de l’électronique : BOCCRF 29 janv. 1987, p. 35.

433
Ibid.

434
C. VLIMART, « la décision d’exemption du contrat type Yves Saint Laurant Parfums : Son incidence sur les
tiers » Gaz Pal 1992, n° 136, 137 p. 28.

435
Cass-crim : arrêts dits « duo » (aff lanvin, Nina Richi, Rocho) 3Nov 1982, Gaz. Pal. 1982, 2, 658.

121
fixation du chiffre d’affaires minimum, la cour de cassation française, lors de l’arrêt Guerlain,
a déclaré que ce critère est l’une des manifestations de la limitation de la liberté commerciale
du distributeur436.

C’est dire que, la capacité ou non de réaliser ce chiffre d’affaires est, en réalité, un élément
menant à la limitation quantitative du nombre des distributeurs : seuls les points de vente
capables d’assurer une bonne rentabilité seront agrées437. De ce fait, la jurisprudence française
n’est pas restée insensible au caractère douteux de ce critère. Sans censurer complètement la
fixation du chiffre d’affaires minimum comme condition pour l’agrément, la cour d’appel de
Paris admet que ce critère quantitatif « est de nature à affecter la liberté d’approvisionnement
des membres du réseau de distribution » car il « a pour effet, d’un côté, de réserver l’accès au
réseau de distributeurs qui sont en mesure de souscrire à un tel engagement et, de l’autre, de
contraindre les distributeurs agréés à consacrer une part significative de leurs efforts à la vente
des produits contractuels ». La cour d’appel de Paris ajoute que « cette clause de fixation du
chiffre d’affaires minimum qui évite une extension excessive du réseau, des coûts de
distribution accrus et une détérioration progressive de l’image des produits n’est pas, en soi,
illicite438 ».

A moins d’être raisonnable et proportionné, la fixation d’un chiffre d’affaires minimum par le
fabricant ne peut être légitime et tombe de ce fait sous le coup de l’article 09 de l’ordonnance
de 1986 devenu article L420-3 du code de commerce français.

Toutefois la cour d’appel admet le droit du fournisseur d’imposer cette clause afin de garantir
une certaine rentabilité et protéger l’image de marque de ses produits439.

A ce critère de sélection mis au point par le propriétaire du réseau comme condition pour
revendre ses produits s’ajoute un deuxième critère qui consiste à limiter directement le
nombre de distributeur sélectionnés par secteur géographique.

436
CA Paris : arrêt Guerlain 26 mai 1965 : Gaz Pal 1965, 2, 76

437
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, op. cit, p. 50.

438 er
CA Paris, 1 fév 1995, Lettre distrib 1995, n° 4, p. 1,cité par beauchard.

439
F. FOURNIER, « L'équilibre des réseaux de franchise de parfumerie de luxe », dans Recueil Dalloz, 2002,
p. 793.

122
2-La limitation du nombre de distributeurs par zone géographique

La fixation d’un contingent maximum de revendeurs par secteur géographique par le


propriétaire d’un réseau de distribution sélective se traduit généralement par les clauses de
numerus clausus, clauses insérées dans le contrat d’investiture au réseau. Se fondant sur des
exigences légitimes et loin de traduire une volonté d’éviction de certains concurrents, la
limitation volontaire et directe du nombre des points de vente agréés doit permettre une
distribution efficace de produits de luxe ou de produit caractérisés par une certaine
technicité440.

A priori, la sélection quantitative directe exercée par le fabricant constitue une restriction de la
concurrence tombant sous le coup de l’interdiction des ententes de l’article 81§1 du traité de
Rome441. Or, la commission des communautés européennes affirme que ce type de sélection
peut s’avérer économiquement bénéfique dans certains cas, et peut bénéficier d’une
exemption au titre de l’article 81§3442.

Dans l’affaire OMEGA, la limitation directe des points de vente fut essentiellement justifiée
par la nécessité d’assurer à chacun des distributeurs OMEGA une capacité d’écoulement
suffisante. La commission retint d’abord la quantité relativement restreinte des montres
qu’OMEGA a la possibilité de fabriquer et l’étroitesse de la clientèle potentielle pour des
articles durables de ce prix. Elle considéra ensuite que l’agrément en qualité de revendeurs de
tous les détaillants satisfaisant aux conditions de qualification et de standing exigées par
OMEGA réduirait à quelques unités par an les possibilités de vente de chacun d’entre eux443.

En conséquence, les revendeurs seraient peu enclins à soutenir un réel effort de promotion des
ventes et des services à la clientèle, et ne pourraient offrir en permanence aux acheteurs une

440
C. VILMART, Distribution des produits de parfumerie et refus de vente, Cah. Dr. entr, 1981/4, 7.

441
G. LE TALLEC, « une symbiose entre le droit communautaire et le droit national : la distribution sélective des
parfums ». RTD eur 1988, p. 437.

442
P. PIRIOU, La distribution sélective et les règles communautaires de la concurrence, RTD eur. 1978. p. 602

443
Déc. OMEGA du 28 oct. 1970, J.O.C.E., 1970 L 242-22 note. Burst et Kovar.

123
gamme suffisante de modèles récents en raison du faible taux de rotation de leur stock.
Ainsi, l’absence de sélection quantitative aboutirait à une détérioration plutôt qu’à une
amélioration de la distribution444.

Ultérieurement, la commission avait évolué dans le sens d’une sévérité accrue à l’encontre
d’une fixation d’un nombre maximum de distributeurs agréés, à tel point qu’elle a fini par
condamner catégoriquement la sélection quantitative dans ses décisions Yves Saint Laurent et
Givenchy445.

De façon analogue à l’approche communautaire, les autorités administratives et judiciaires


françaises n’admettent pas d’une manière générale la limitation du nombre des membres du
réseau pour les contrats de distribution sélective. Concernant la décision relative aux pratiques
constatées dans la distribution des montres Rolex, le conseil de la concurrence français estime
que la clause relative aux « possibilités locales de ventes des produits Rolex » introduite dans
l’accord cadre Rolex, manque de précision et se prête à une application subjective et
éventuellement discriminatoire. Dès lors, cette clause constitue une pratique visée par les
dispositions de l’article 81§1 du traité de Rome, et l’article 07 de l’ordonnance de 1986
devenu article L 420-1 du code de commerce français446.

De son côté la société Rolex avait fait valoir que cette clause de limitation du nombre de
distributeurs agréés Rolex, figure aux accords cadre Rolex en raison de l’impossibilité dans
laquelle se trouve la société d’alimenter en marchandises sur le territoire français ou sur le
territoire de l’union européenne « tout distributeurs ayant fait la demande à Rolex, même s’il
répond pleinement aux critères fixés aux accords Rolex ».

De plus, la société Rolex affirme qu’elle tient objectivement compte de critères


démographiques et économiques, à savoir les caractéristiques de la population habitant la

444
P. PIGASSOU, La distribution sélective. JCP 1985 éd. E ΙΙ, 14423.

445
Affaires du 12 décembre 1996 du Tribunal de Première Instance de la Communauté Européenne:Yves Saint
Laurent (affaire T-19/92) et Givenchy (T-88/92) Rec CJCE, II p. 1851 et s., Contrats, Conc., Consom. 1997, n°1, p.
13, note Vogel L.

446
Déc. n° 96-D-72 du 19 nov 1996 (BOCCRF du 6 mars 1997). Cité par vignal.

124
zone de chalandise et l’évolution du chiffre d’affaires chez les distributeurs situés déjà dans
cette zone et dans les secteurs environnants447.

Il faut rappeler que par ce type de clause, tout fabricant de produits de luxe cherche
essentiellement à pouvoir surveiller efficacement l’activité des membres de son réseau,
s’assurer qu’ils ne commercialisent pas ses articles dans des conditions dévalorisantes.
L’image de marque des produits est en cause448.

449
A la suite des sanctions du conseil de la concurrence, la société Rolex a porté le litige
devant les juridictions françaises par un recours en annulation de la décision du conseil, et ce
au niveau de la cour d’appel de Paris. La cour a statué que « le choix des revendeurs doit
reposer sur des critères objectifs, sans exclure certaines formes déterminées de distribution de
manière discriminatoire, ni aller au-delà de ce qui est nécessaire à la bonne distribution des
produits et en tenant compte de l’intérêt du consommateur »450.

Elle affirme par la suite, que la société Rolex n’a pas respecté ces principes en réservant la
revente de ses produits à ses distributeurs initialement agréés. Elle n’a de plus pas permis une
application objective des critères de sélection en recrutant ses revendeurs selon « les
possibilités locales de ventes des produit ». Un tel critère est trop vague pour qu’un
distributeur, qui souhaiterait intégrer le réseau, puisse en apprécier la portée. Cette
imprécision favorise également une application subjective et discriminatoire du critère.
Comme le montrent la décision du conseil de la concurrence et l’arrêt de la cour d’appel de
Paris, la position française reste attachée à la détermination de critères d’ordre qualitatifs et
appliqués de manière objective, par opposition à un système dans lequel le fournisseur
pourrait se fonder sur des critères quantitatifs451.

447
C. A. Paris, 25 oct 1991 ? SA BARICHELLA c SAF MONTRES ROLEX, Rev contrat-concurrence-consommation
1992, n° 50.

448
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, op. cit., p.44.

449
La société Rolex France a été condamnée par le conseil de la concurrence, à une sanction pécuniaire de
178 000, et reçu injonction de modifier les contrats avec les distributeurs.

450
Cour d’appel de Paris du 2 décembre (BOCCRF du 9 décembre 1997).

451
M. ZOÏA, op. cit, n° 32.

125
Ce principe parait conforme à la jurisprudence communautaire452 dont les décisions
s’imposent à la commission et aux juridictions nationales des pays membres de l’union
européenne et qui donnent priorité à la liberté du commerce qui emporte la liberté pour le
distributeur d’acheter et de vendre tout produit commercialisable453.

Il convient toutefois de relever que dans le nouveau règlement d’exemption sur la distribution
automobile, le règlement communautaire n° 1400/2002, la commission européenne a introduit
une brèche dans ce principe en permettant l’exemption de systèmes de distribution sélective
fondés sur des critères de sélection qui ne seraient pas purement qualitatifs 454.

Cependant, la cour de cassation française a fait une interprétation restrictive de cette


possibilité d’admettre les critères quantitatifs dans un arrêt « Garage Gremeau / Daimler » du
28 juin 2005, imposant en pratique au fournisseur de définir et de mettre en œuvre des critères
qualitatifs objectifs pour bénéficier de l’exemption455.

Au-delà des critères tant qualitatifs que quantitatifs de sélection des distributeurs, c’est la
mesure de l’atteinte au libre jeu de la concurrence qui constitue la clef fondamentale de
validation des contrats de distribution sélective. Il conviendra, dès lors, de rechercher la licéité

452
La jurisprudence communautaire avait déjà posé les conditions de licéité, notamment dans l’arrêt « Yves
Saint Laurent » 12 décembre 1996 (T-19/92) dans lequel le Tribunal de Première instance estime qu’un
système de distribution sélective est conforme à l’article 81 § 1 TCE, « s' il est satisfait à quatre conditions, à
savoir: premièrement, que les propriétés du produit en cause nécessitent un système de distribution sélective,
en ce sens qu' un tel système constitue une exigence légitime, eu égard à la nature des produits concernés, et
notamment à leur haute qualité ou technicité, pour en préserver la qualité et en assurer le bon usage ;
deuxièmement, que le choix des revendeurs s'opère en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif fixés
d' une manière uniforme à l' égard de tous les revendeurs potentiels et appliqués de façon non discriminatoire ;
troisièmement, que le système en cause vise à atteindre un résultat de nature à améliorer la concurrence et
donc à contrebalancer la limitation de la concurrence inhérente aux systèmes de distribution sélective,
notamment en matière de prix ; et, quatrièmement, que les critères imposés n' aillent pas au-delà de ce qui est
nécessaire. La question de savoir si ces conditions sont remplies doit être appréciée d' une façon objective, en
tenant compte de l' intérêt du consommateur ».

453
D. FERRIER, op. cit, p. 264.

454
S. P. PERUZZETTO, « Règlement 1400/2002 de la commission du 31 juillet 2002 concernant l'application de
l'article 81, paragraphe 3 du traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le
domaine automobile » RTD com 2002, p. 750. L. VOGEL, Le droit de la distribution automobile, Lawlex, 2006, p.
12.

455
Cass. Com,Arrêt n° 982 du 28 juin 2005, www. Lexinter.com.

126
des réseaux de distribution sélective au regard des règles du droit de la concurrence et plus
spécialement celles régissant le refus de vente et les pratiques anticoncurrentielles

Section 02 : l’application du droit de la concurrence

Etant admis que les critères de sélection doivent remplir certaines conditions, la distribution
sélective soulève de nombreuses difficultés en ce qu’elle constitue un accord vertical
susceptible de porter atteinte au principe de la libre concurrence. Si l’on considère qu’un
réseau de distribution sélective est basé sur la réservation des produits du fournisseur aux
seuls revendeurs agréés et que cela implique un refus de vente, il faut s’interroger plus
généralement sur la justification de cette pratique discriminatoire au regard du droit de la
concurrence.

Un tel système peut constituer également une entente ou un abus de position dominante
illicite au regard du droit de la concurrence. Toutefois, les contrats de distribution sélective
qui seraient susceptibles de constituer des pratiques anticoncurrentielles font l’objet en droit
de la concurrence, d’un régime d’exemption.

Paragraphe 01: le refus de vente

La distribution sélective est axée sur la notion de prestige et une sélection stricte impliquant
un refus de vente, à priori, illicite à l’encontre de tout revendeur non sélectionnés. Or,
permettre à des distributeurs non agréés de vendre des produits de luxe revient à favoriser une
concurrence parasitaire également prohibée par la réglementation de la concurrence.

127
Il convient donc d’envisager successivement, d’une part, les problèmes posés par le refus de
vente(A), et d’autre part, sa justification en vue d’admettre un réseau de distribution
sélective(B).

A) les problèmes posés par le refus de vente

On ne peut pas concevoir le fonctionnement de la distribution sélective sans refus de vente


opposé par le propriétaire du réseau à des tiers demandeurs, situés au même stade économique
que les distributeurs sélectionnés456. Pour mieux déterminer les problèmes posés par le refus
de vente, notre étude, à ce niveau, portera sur ses éléments constitutifs, à savoir, la
présentation d’une demande(1) et l’opposition d’un refus(2).

1-Présentation d’une demande

a) L’auteur de la demande :

Sous l’empire de l’ordonnance de 1945, le législateur français prévoyait à l’article 37-01 que
la demande peut émaner de tout acheteur, qu’il soit un commerçant, un professionnel ou un
consommateur457. L’ordonnance du 1er décembre 1986, qui a eu pour mission de libérer les
prix, a dépénalisé le refus de vente, mais uniquement entre professionnels458. En revanche, le
législateur a laissé subsister des sanctions pénales lorsque le refus de vente de produits ou de
prestations de services est opposé à un consommateur.459

456 er
R. PLAISANT ET GEORGES DAVERAT, Gaz. Pal. 1982 (1 sem) p. 346

457 457
En effet, l’article 37-01 de l’ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 sur les prix , aujourd’hui abrogée,
incriminait le refus de vente lorsque « le producteur, commerçant, industriel ou artisan, refusait de satisfaire
dans la mesure de ses disponibilités et dans les conditions conformes aux usages commerciaux, aux demandes
des acheteurs de produits ou aux demandes de prestations de services, lorsqu’elles émanent de demandeurs
de bonne foi et que la vente de produits ou la prestations de services n’est pas interdite par la loi ou par un
règlement de l’autorité publique ».

458 er
P. PIGASSOU, refus de vente et pratiques discriminatoires dans l’ordonnance du 1 décembre 1986, Gaz. Pal.,
1987. 2, Doctr. 544.

459
«Il est interdit de refuser à un consommateur la vente d’un produit ou la prestation d’un service, sauf motif
légitime » (art. L. 122-1 du code de la consommation).

Les sanctions sont celles qui sont prévues pour les contraventions de cinquième classe, soit une amende de 1500
€ (art. R. 121- 13 2° du code de la consommation).

128
Le droit algérien de la concurrence, qui s’appuie sur des dispositions relativement récentes, a
introduit le refus de vente à l’article 07 de l’ordonnance n° 95-06 relative à la concurrence en
tant que pratique interdite parce qu’elle constitue une entrave au libre jeu de la concurrence460.

Depuis 1995, ce droit a fait l’objet de quelques modifications, en vue principalement de le


moderniser et de l’adapter, tant soit peu, aux règles de l’économie de marché. Ainsi est
promulguée l’ordonnance n° 03-03 qui vient abroger l’ancien texte et poser de nouvelles
règles relatives au jeu de la concurrence.461

Parmi les raisons essentielles ayant motivé la refonte totale de l’ordonnance n° 95-06 était de
séparer les règles relatives à la concurrence portant sur les ententes et accords illicites, les
abus de position dominante et les concentrations, des règles sur les pratiques commerciales. 462

Effectivement, point de trace, dans la réglementation de 2003 relative à la concurrence de


dispositions interdisant le refus de vente sans motif légitime. Ce dernier, qui constitue une
pratique commerciale discriminatoire est, toutefois, prohibé par l’article 15 de la loi n° 04-02
promulguée ultérieurement par le législateur algérien et fixant les règles applicables aux
pratiques commerciales.463

En France, la loi « Galland » de 1996 opérait un nouveau toilettage du droit de la concurrence


français464par une réforme qui a, entre autres, assoupli les règles relatives au refus de vente
parce qu’elles désavantageaient les fournisseurs dans leurs rapports avec la grande

Sont concernées par cette interdiction « toutes les activités de production, de distribution et de services, y
compris celles qui sont le fait de personnes publiques, notamment dans le cadre de conventions de délégation
de service public ».

460
BENNADJI CHERIF, Le droit de la concurrence en Algérie. Revue Algérienne des Sciences Juridiques,
Economiques et Politiques. 2000. – n° 3, p. 143-160.

461
Ord. n° 03-03 du 19 Joumada El Oula 1424 correspondant au 19 juillet 2003 relative à la concurrence.
J.O.R.A. n° 43.

462
www.mincommerce.gov.dz, « présentation de l’ordonnance 03-03 relative à la concurrence ».

463
La loi n° 04-02 du 05 Joumada El Oula 1425 correspondant au 23 juin 2004 fixant les règles applicables aux
pratiques commerciales. J.O.R.A. n° 41.

464
«Ainsi la loi Galland n’a pas voulu modifier en profondeur le droit de la concurrence, mais procéder à un
« réglage » afin de favoriser le développement d’une « morale » commerciale », M. GRAFF, Le droit de la
concurrence dans le rapport producteur-distributeur. In : Economie rurale, n° 245-246, 1998. La grande
distribution alimentaire. ,pp. 89-92.

129
distribution, cette dernière abusant de sa puissance d’achat dans la négociation avec des
pratiques parfois déloyales.465

Depuis sa promulgation en 2004, la loi algérienne fixant les règles applicables aux pratiques
commerciales reste le seul texte interdisant, en son article 15, le fait pour un commerçant de
refuser la vente d’un bien ou la prestation d’un service sans motif légitime.

Ayant fait l’objet de plusieurs réformes et doté de plus de précision, le droit de la concurrence
français prévoit, que la demande adressée à un fabricant ne peut désormais émaner que d’un
commerçant ou d’un professionnel et non plus d’un consommateur comme le prévoyait
l’article 37-01 de l’ordonnance du 30 juin 1945. Les auteurs de la réforme ont été conduits à
maintenir, dans un texte autonome, le traitement pénal du refus de vente visant les
consommateurs466.

A l’inverse du législateur français, la rédaction de l’article 15 de la loi algérienne laisse


clairement constater que la demande peut émaner d’un commerçant, d’un professionnel et
même d’un consommateur. En effet, le législateur algérien utilise le mot « public » pour
infirmer toute distinction entre un professionnel et un consommateur dans le traitement du
refus de vente.

b) L’objet de la demande

Pour que le délit de refus de vente soit constitué, il est nécessaire qu’une demande soit
présentée. La forme de la demande importe peu. Celle-ci peut être écrite ou orale. Toutefois,
la charge de la preuve incombant au demandeur, dans le cas d’une demande orale, les
difficultés de preuve seront plus grandes467.

465
M. L. ALLAIN. C. CHAMBOLLE, Les relations entre la grande distribution et ses fournisseurs. Bilan et limites de
trente ans de régulation. Revue Française d’Economie 2003, vol. 17, n°4, p. 184.

466
art. R. 121-13 2° du code de la consommation français

467
C. GIVERDON, « les délits et quasi délits commis par le commerçant dans l’exercice de son Commerce », RTD
com 1953, P. 860.

130
Conformément à l’article 36-2 de l’ordonnance du 1er décembre 1986, la demande peut
concerner aussi bien un achat de produit qu’une prestation de service. Il faut toutefois que la
demande en question s’adresse à un fournisseur de produits ou de prestation de services qui a
pour activité d’offrir les produits ou les services demandés. Ainsi, il ne peut y avoir refus de
vente si le vendeur n’a pas ou plus le produit ou le service sur lequel porte la demande de
l’acheteur468.

Avant l’entrée en vigueur de la loi régissant les pratiques commerciales, la loi algérienne à
travers l’article 07 de l’ordonnance n° 95-06 relative à la concurrence, interdisait le refus de
vente sans motif légitime, sans toutefois préciser l’objet de la demande émanant des
acheteurs. Le législateur algérien n’est pas resté insensible à cette lacune juridique et a
procédé à un changement utile en faisant clairement référence dans l’article 15 de la loi n° 04-
02 à l’objet de la demande qui peut être soit un bien soit une prestation de service469.

2-L’opposition d’un refus

Pour que l’infraction soit constituée, il est nécessaire qu’à la demande présentée, soit opposé
un refus de la satisfaire. La forme du refus de donner suite à la demande de l’acheteur a une
importance certaine au regard du droit de preuve.

Un refus de vente peut revêtir la forme écrite ou orale. Le problème se pose toutefois de
déterminer s’il y a refus de vente en cas de silence de l’agent économique sollicité de vendre
un bien ou de fournir une prestation. Il s’agit dans ce cas, de distinguer selon que l’auteur de
la demande avait des relations commerciales régulières antérieures avec le commerçant ou s’il
n’en avait pas. Si le demandeur avait des relations d’affaires antérieures avec le commerçant,
le silence doit s’interpréter comme une acceptation de contracter. A l’inverse, en dehors de
relations d’affaires antérieures, le consentement ne se présumant pas, il en découle que le
silence d’un fournisseur équivaut en fait à un refus de vente de sa part470.

468
R. KOVAR, Refus d’agréer ou de vente et droit communautaire des ententes. Cah. Dr. entr, 1984/4.

469
Art. 15 al. 02 de la loi n° 04-02 fixant les règles applicables aux pratiques commerciales : « il est interdit de
refuser, sans motif légitime, la vente d’un bien ou la prestation d’un service dès lors que ce bien est offert à la
vente ou que le service est disponible. »

470
C. VILMART, Distribution des produits de parfumerie et refus de vente, Cah. Dr. entr, 1981/4, 7.

131
En l’absence de dispositions spéciales, le droit commun fondé sur l’article 68 du code civil
algérien dispose que le silence vaut acceptation lorsque l’offre se rapporte à des relations
d’affaires déjà existantes entre les parties ou lorsqu’elle est seulement dans l’intérêt de son
destinataire. A l’instar de son homologue français, le législateur algérien prend en compte les
relations d’affaires antérieures pour interpréter le silence du fournisseur en une acceptation de
donner suite à la demande de l’acheteur. L’article 68 issu des dispositions générales régissant
les obligations, ajoute, en outre, que le silence vaut également acceptation lorsque l’offre est
seulement dans l’intérêt de son destinataire471.

Cette double condition posée par le code civil algérien peut bien s’appliquer à un litige
mettant en cause un contrat de distribution sélective. Effectivement, si l’auteur de la demande
est un distributeur agrée appartenant au réseau du fournisseur, le silence de ce dernier est une
acceptation en raison des relations d’affaires antérieures régies par un contrat cadre et
concrétisées par des contrats d’application.

Une lecture attentive de l’article enseigne également qu’une absence de réponse à une
demande émanant d’un distributeur agrée ne respectant plus ses engagements relatifs à la
protection et la promotion de l’image de marque du produit ne peut s’interpréter en une
acceptation puisqu’elle n’est pas dans l’intérêt de son destinataire, à savoir le propriétaire du
réseau de distribution sélective.

B) La justification du refus de vente

Si dans certains cas, le refus de vente est inacceptable et donne lieu à des sanctions sévères,
dans d’autres cas cela peut être justifié.

471
D. ZENNAKI, Droit des obligations, cours de licence, Faculté de droit, Université d’Oran, 2006/2007.

132
Les faits justificatifs du refus de vente, tels que présentés par le législateur français à l’article
36-2 de l’ordonnance de 1986472 sont au nombre de trois : le caractère anormal de la demande,
la mauvaise foi du demandeur et la justification par les dispositions du droit de la
concurrence.

1-Le caractère anormal de la demande

Le législateur français prohibe le refus de vente ou de prestations de services « lorsque les


demandes ne présentent aucun caractère anormal ». De façon raisonnable le juge français fait
savoir que la caractère anormal doit être analysé en considération « des pratiques habituelles
du vendeur ou du prestataire de services et de ses clients »473. En d’autres termes, le fabricant
peut considérer qu’une demande est anormale lorsqu’elle ne correspond pas aux normes qu’il
a établies. Mais ces normes doivent être identiques pour tous ses acheteurs et indispensables à
la bonne commercialisation de ses produits ou à la bonne exécution de ses prestations de
services.

Au plan légal, la circulaire Fontanet précise que l’anormalité de la demande peut résulter : soit
de la quantité des produits demandés, soit des modalités de livraison, soit des qualifications
professionnelles ou des installations insuffisantes.474

a) L’anormalité tenant aux quantités des produits demandés

La demande revêt un caractère anormal tenant à la quantité des produits demandés


« lorsqu’elle est hors de proportion, soit avec les besoins du demandeur, soit avec
l’importance habituelle des livraisons du vendeur »475.

Le critère de cette disproportion peut être déterminé par le vendeur, lorsque dans le cadre des
conditions générales de vente, il fixe des seuils minima et maxima de livraison. En
conséquence, le vendeur ne saurait refuser une demande qui les respecterait. Mais il pourrait

472
Abandonné en 1996 par le législateur françaisdepuis l'abrogation de l'article 36, paragraphe 2, de
l'ordonnance du 1er décembre 1986 par la loi n°96-588 du 1er juillet 1996,sur la loyauté et l'équilibre des
relations commerciales dite loi Galland.

473
H. D. COSNARD, « le refus de vente », RTD COM, 1962, p. 187.

474
G. Cas et R. Bout, Lamy droit économique, concurrence, distribution, consommation, 1991, n° 18717.

475
Circulaire Fontanet déc. 30/03/1960.

133
la refuser s’il estimait insuffisante ou excessive par rapport, soit à la qualité du demandeur,
soit aux quantités qu’il commande habituellement.

Ainsi, en matière de contrat de distribution sélective, le tribunal de Paris a jugé d’anormales,


les commandes de produits de parfumeries passés par des distributeurs, agrées uniquement
pour vendre sur le marché français, au détail et à des consommateurs directs et qui, en
violation de cet engagement, revendent à des grossistes étrangers. Le tribunal a décidé que ces
demandes étaient « hors de proportion avec leurs besoins normaux »476.

b) L’anormalité tenant aux modalités de livraison

Conformément à la réglementation française, la demande adressée par un acheteur à un


vendeur est anormale, lorsque les modalités de livraison demandées par l’acheteur sont
« particulières », c'est-à-dire manifestement contraires aux modalités de livraison
477
habituellement pratiquées par le vendeur .

Dans le secteur de l’électroménager de haute technicité, la jurisprudence française a donné


raison au vendeur contre un distributeur qui a refusé d’exécuter des prestations de services
imposées aux revendeurs du réseau et qui s’est vu opposé un refus de vente. Elle estime en
effet que « le but essentiel du système de distribution sélective est d’imposer aux
cocontractants qu’ils assurent aux consommateurs et usagers tous les services dont ils peuvent
avoir besoin, soit lors de l’installation des appareils de la société Dietrich, qui sont des
appareils requérant une haute technicité, soit par leur réglage et leur mise en route puis, par la
suite, pour leur entretien, par l’application de la garantie contractuelle de dépannage et de
service après-vente en général »478.

2- La mauvaise foi du demandeur :

476
Trib. Com. Paris 3 mars 1982, Gaz. Pal. 1982, 1, jur., p. 348, note Marchi.
477
Art. 30 ord. n°86-1243 du 1 décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence.

478
Colmar, 10 février 1983, Rev. Conc. Consomm. 1983 n° 4.

134
La mauvaise foi du demandeur justificative du refus de vente est une notion très difficile à
établir devant les tribunaux en raison de sa subjectivité479.

Dans ces conditions, la circulaire Fontanet de 1960 a donné une définition en citant « est de
mauvaise foi, le demandeur qui se présente comme un acheteur ordinaire, alors qu’en réalité il
se propose d’utiliser le produit acheté pour nuire au vendeur »480.

L’analyse de cette définition a donné lieu à deux positions doctrinales divergentes. La


première accepte cette définition et soutient que le texte fait ressortir clairement que la
mauvaise foi marque le passage de la libre concurrence à la concurrence déloyale.481

La seconde position doctrinale critique cette définition et la considère comme restrictive de la


notion de mauvaise foi à cause de son caractère incertain et inadapté à la réalité des
affaires.482

En droit algérien, la mauvaise foi n’est pas expressément formulée par des dispositions
spéciales, néanmoins, elle est clairement perceptible en droit commun à travers l’exigence de
bonne foi dans la formation et l’exécution du contrat.483

Affirmant la loyauté contractuelle, Le droit commun sanctionne, à travers l’article 86 du code


civil algérien, la mauvaise foi exprimée par un dol lors de la formation du contrat et donne à
la victime du dol le droit de demander l’annulation du contrat.484

Concernant la jurisprudence, les tribunaux français se sont, depuis longtemps, donné pour but
de protéger les marque de luxe et de grande renommée. Ainsi, la 9ème chambre correctionnelle
de Paris, a admis que le désir de maintenir le prestige des marques de haute qualité pouvait
justifier un refus de vente et que toute demande qui pouvait avoir pour but de nuire à la

479 ème
J. GHESTIN, Traitré de droit civil, la formation du contrat, 3 édition, Paris : LGDJ, 1993, pp. 231-239.

480
La circulaire Fontanet du 31 mars 1960 relative à l’interdiction des pratiques commerciales restreignant la
concurrnece, Section ІІ § 1. - « mauvaise foi du demandeur ».

481
H. D. COSNARD, op. cit, p. 187.

482
Paris 7 février 1961, JCP 1961 П 12052 note Plaisant.

483
Art. 107 al. 2 et 3 du code civil algérien

484
H. DENNOUNI, Contrat de consommation : information et qualité du produit en droit algérien, www. Sribd.
com

135
réputation de cette marque devait être considérée comme une demande faite de mauvaise
foi.485

Plus récemment, la cour d’appel de Paris a affirmé que le refus de vente est légitime lorsque
la mauvaise foi d’un revendeur non agrée était caractérisée par le fait qu’il commercialisait
déjà les produits litigieux, les ayant acquis de manière détournée.486

3- Justification par les dispositions du droit de la concurrence

L’article 36-2 de l’ordonnance de 1986 justifie aussi le refus de vente qui serait fondé sur les
dispositions de l’article 10 de la même ordonnance.

L’article 10 précise que « ne sont pas soumises aux dispositions des articles 7 et 8 (prohibant
les ententes et les abus de domination) les pratiques:

1. Qui résultent de l'application d'un texte législatif ou d'un texte réglementaire pris pour son
application;

2. Dont les auteurs peuvent justifier qu'elles ont pour effet d'assurer un progrès économique et
qu'elles réservent aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, sans donner aux
entreprises intéressées la possibilité d'éliminer la concurrence pour une partie substantielle des
produits en cause. Ces pratiques ne doivent imposer des restrictions à la concurrence que dans
la mesure où elles sont indispensables pour atteindre cet objectif de progrès.

Certaines catégories d'accords, notamment lorsqu'ils ont pour objet d'améliorer la gestion des
entreprises moyennes ou petites, peuvent être reconnues comme satisfaisant à ces conditions
par décret pris après avis conforme du Conseil de la concurrence ».

Le refus de vente et de prestations de services pourront être ainsi justifiés, aux termes de la
disposition finale de l’article 36-2 dans la mesure où ils résulteront de l’existence d’ententes
ou d’abus de domination qui seront eux-mêmes justifiés par l’une des causes prévues à
l’article 10. De même, lorsqu’il existe un réseau de distribution sélective ou exclusive, un
refus de vente peut être valablement opposé à l’acheteur, sans engager la responsabilité du
vendeur puisque ce refus résulte alors de l’existence d’une entente ou d’un abus de position

485 ème
9 ch. Corr. Paris, 4 nov. 1964, Gaz. Pal., 1965,Ι, 92.

486
CA. Paris,18 fév. 1988, D. 1988, IR., p. 88.

136
dominante ou de dépendance économique couvert par les exceptions prévues à l’article 10 de
l’ordonnance487.

Dès lors, la jurisprudence française a admis, en application de ces dispositions, des refus de
vente opposés par des fabricants de produits de luxe qui ont prouvé la contribution de leurs
systèmes de distribution sélective au progrès économique, et notamment à l’amélioration du
service rendus au consommateur.488

De son côté, le législateur algérien n’a pas expressément mentionné dans la loi n° 04-02 les
exceptions à l’interdiction du refus de vente, il n’a pas non plus, à l’inverse du législateur
français, fait référence à un renvoi aux dispositions de l’ordonnance n° 03-03 relative à la
concurrence. Toutefois, l’article 09 de la même ordonnance, qui s’inspire directement du texte
français, prévoit les même cas de dérogation en cas de refus de vente qualifié d’entente ou
d’abus de position dominante. En effet, le texte algérien justifie les ententes prohibées et les
abus de domination et écarte l’application des articles 6 et 7 prévus pour la prohibition de ces
pratiques restrictives489.

Donc, en droit algérien, le refus de vente peut être sanctionné soit, au titre des dispositions
générales issues du code civil, soit des dispositions spéciales lorsque ce délit est qualifié de
pratique restrictive mettant en évidence une entente ou une position dominante.

Il faut signaler également que l’ordonnance n° 08-12 modifiant et complétant l’ordonnance n°


03-03 n’a apporté aucun changement à l’article 09 qui, d’une façon implicite justifie le refus
de vente dans les cas suivants :

-les accords et pratiques qui résultent de l’application d’un texte législatif et réglementaire
pris pour son application.

-les accords et pratiques dont les auteurs peuvent justifier qu’ils ont pour effet d’assurer un
progrès économique ou technique, ou qu’ils contribuent à améliorer l’emploi, ou qu’ils

487
C. VILMART, op. cit.

488
CA. Paris, 16 février 1988, Gaz. Pal. 1988, 1, jur.,p.412.

489
D. ZENNAKI, La discrimination entre agents économiques, séminaire international le 18 et 19 octobre2008 à
Oran sur les contrats de distribution, organisé par le laboratoire de droit économique et environnement,
faculté de droit d’Oran en collaboration avec le centre d’étude et de recherches en droit des affaires et des
contrats (CERDAC, université de Bordeaux IV).

137
permettent aux petites et moyennes entreprises de consolider leur position concurrentielle sur
le marché.

Par ailleurs, le législateur algérien insiste, dans le dernier alinéa, sur l’autorisation du conseil
de la concurrence pour bénéficier de l’application de l’article 09, alors que le législateur
français ne prévoit qu’un avis conforme du conseil de la concurrence et fait exempter ces
pratiques par décret.

Face au volume important des affaires liées au refus de vente portées devant les tribunaux de
grande instance ou de commerce, et en vue de rééquilibrer les rapports entre distributeurs et
fournisseurs, le législateur français a abrogé l’interdiction du refus de vente suite à la réforme
de 1996490.

Le fait de supprimer l’interdiction du refus de vente du dispositif de la concurrence n’est pas


une autorisation systématique de ce délit. En réalité, un tel comportement, lorsqu’il porte
atteinte au libre jeu de la concurrence, peut toujours faire l’objet d’une sanction au titre de
l’ordonnance de 1986 en application de l’article 07 relatif aux ententes ou l’article 08 en cas
d’abus de position dominante. Par ailleurs, Lorsque le fournisseur ne peut justifier son refus
de vente et pratique de la sorte une discrimination illicite au détriment du revendeur évincé et
au profit de ceux retenus, il s’expose à la sanction prévue par l’article 36-1 de l’ordonnance de
1986491.

L’auteur d’un refus de vente injustifié peut également être sanctionné par le droit commun de
la responsabilité civile. En effet, l’article 1382 du code civil français permet à toute personne
victime du comportement fautif d’autrui d’obtenir réparation du préjudice qui lui est causé.

Au total, il est à retenir que depuis la réforme de 1996, un refus de vente injustifié émanant
d’un fournisseur envers un professionnel n’engage que sa responsabilité civile, alors que
refuser de vendre à un consommateur peut encore donner lieu à des sanctions pénales492.

490
La loi n°96-588 du 1er juillet 1996 sur la loyauté et l'équilibre des relations commerciales dite loi Galland.

491
D. FERRIER, Le droit des relations entre producteurs et grands distributeurs de produits alimentaires. In :
Economie rurale. N° 245-246, 1998. La grande distribution alimentaire. pp. 84-88.

492
Art. 30 de l’ordonnance de 1986, abrogé et remplacé par l’article L. 122. 1 du code de la consommation.

138
Depuis son adoption en 1997 par le législateur algérien, la réglementation relative à
l’interdiction du refus de vente n’a fait l’objet d’aucune modification importante. Aussi,
l’application du texte demeure toujours à portée générale ne faisant aucune distinction entre
les auteurs de la demande, qu’ils soient consommateurs ou professionnels 493.

Paragraphe 02 : les pratiques anticoncurrentielles

Dans un système de distribution sélective, le fabricant vend les produits uniquement à des
distributeurs choisis sur la base de critères spécifiques. Ces distributeurs s’engagent à ne pas
vendre les produits à des distributeurs non autorisés, afin de préserver l’étanchéité du réseau
de distribution494.

D’une manière générale, le contrat de distribution sélective est soumis aux mêmes règles du
droit de la concurrence que les autres types de contrats de distribution. Il s’agit de contrôler si
les pratiques mises en œuvre dans le cadre de rapports entre fournisseurs et distributeurs
agréés puissent constituer des ententes ou des abus de domination susceptible d’entrainer des
restrictions de concurrences considérées comme étant généralement inacceptables en droit de
la concurrence (A). En l’absence de telles pratiques restrictives et sous certaines conditions,
un accord de distribution sélective peut toutefois faire l’objet d’une exemption (B).

A) Ententes prohibées et abus de domination :

L’application des règles du droit de la concurrence par les autorités judiciaires et


administratives consiste à rechercher dans chaque cas si le réseau de distribution sélective
493
D. ZENNAKI, Droit de la concurrence, cours de magistère, Faculté de droit, Université d’Oran, 2010/2011.

494
C. VILMART, op. cit.

139
laisse s’opérer une concurrence suffisante entre les distributeurs agrées, et permet à d’autres
détaillants d’accéder au marché.

Pour juger de la conformité de la distribution sélective aux règles du droit de la concurrence,


il faut se référer d’abord aux règles relatives aux règles interdisant les ententes prohibées,
ensuite à celles régissant les abus de domination.

1) les ententes prohibées

L’entente anticoncurrentielle, pratique prohibée par l’article L. 420-1 du code de commerce


français, est un accord ou une action concertée qui a pour objet ou peut avoir pour effet
d’empêcher, de restreindre ou de fausser le libre jeu de la concurrence sur un marché de
produits ou de services déterminé. Cette entente peut prendre diverses formes ; écrite ou orale,
expresse ou tacite, horizontale entre concurrents sur un même marché ou verticale, comme par
exemple entre un producteur et un distributeur495.

Compte tenu du nombre et de la diversité des ententes anticoncurrentielles, il serait


impossible d’en fournir une liste exhaustive. Aussi, le législateur français et algérien se
bornent-t-ils à citer les exemples les plus caractéristiques : les accords ou pratiques concertées
qui tendent à limiter l’accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d’autres
entreprises, ceux qui tendent à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu de la
concurrence en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse, ceux qui tendent à
limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissement ou le progrès technique…

Des pratiques visées par d’autres dispositions du code de commerce, tels les prix imposés,
peuvent également relever de l’interdiction du droit de la concurrence lorsque celles-ci sont
constitutives d’ententes496. Dans un contexte de libéralisation du commerce et de
privatisation, les autorités judiciaires et administratives algériennes ont été confrontées à des
pratiques anticoncurrentielles découlant des différentes activités de production, de distribution

495 éme
.M. MALAURIE-VIGNAL,Droit de la concurrence interne et communautaire, Armand Colin, 3 éd., 2005, p.
161.

496
R. POESY, le rôle du conseil de la concurrence et du juge judiciaire en Algérie et en France en droit des
pratiques anticoncurrentielles, aspects procéduraux, in L’Algérie en mutation, les instruments juridiques de
passage à l’économie de marché, Sous la direction de R. CHARVIN et A. GUESMI, L’Harmattan, 2001, p. 161.

140
et de services497. Les pratiques anticoncurrentielles peuvent également résulter des activités
des personnes publiques lorsque celles-ci n’interviennent pas dans le cadre de l’exercice de
prérogatives de puissance publique ou dans un accomplissement de missions de service
public498.

Face à ce phénomène qui suscite inquiétude et interrogation, le droit de la concurrence


algérien s’est doté, récemment, de dispositif législatif et réglementaire qui, en prenant en
considération les caractéristiques structurelles du marché algérien, tente d’en préserver, à
priori, le fonctionnement régulier.

Ainsi, l’ordonnance n° 03-03 relative à la concurrence modifiée et complétée prohibe à


travers l’article 06 les pratiques et actions concertées, conventions et ententes expresses ou
tacites.

Le dispositif mis en place par le législateur algérien a pour objectif d’interdire les ententes
anticoncurrentielles lorsqu’elles ont pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre le
libre jeu de la concurrence dans un même marché ou dans une partie substantielle de celui-ci.

Le législateur algérien adopte la même approche suivie par le législateur français et pose
certaines conditions pour l’application de l’article 6 de l’ordonnance n° 03-03 relative à la
concurrence499.

En premier lieu, le législateur algérien impose l’existence d’une volonté de concertation de


plusieurs opérateurs économiques pour pratiquer des actions communes tendant à fausser la
concurrence dans un même marché ou, une partie substantielle de celui-ci. Faute de cette
volonté, la condition de concertation ou d’entente n’est pas remplie500. Selon l’article 6,
l’entente peut être expresse et c’est le cas des contrats et conventions écrites qui, même si ils

497
Ibid.

498
MINISTERE DU COMMERCE, DIRECTION GENERALE DE LA REGULATION ET DE L’’ORGANISATION DES
ACTIVITES COMMERCIALES, Présentée par Mme S.MEZIANI, « Modernisation de la legislation et de la
reglementation applicables aux activites commerciales », Journée d’étude du 11 avril 2007.
www.mincommerce.gov.dz

499
Ord. n° 03-03 du 19 Joumada El Oula 1424 correspondant au 19 juillet 2003, modifiée et complétée,
relative à la concurrence.

500
D. ZENNAKI, Droit de la concurrence, cours de magistère, Faculté de droit, Université d’Oran, 2010/2011.

141
sont valables au regard du droit commun, ne sauraient échapper à l’application de l’article 6,
car ce qui est visé est précisément le comportement des entreprises face au respect des règles
du marché. L’entente peut également être tacite et s‘exerce par une simple action concertée
sans laissé de traces écrites ce qui rend le contrôle du conseil de la concurrence compliqué en
raison de la difficulté liée à la recherche sur le terrain économique des indices probants
d’entente constituant une entrave au libre jeu de la concurrence501.

En second lieu, il est exigé que cette entente constitue effectivement une entrave à la
concurrence soit en l’empêchant, soit en la restreignant ou en faussant le libre jeu des forces
du marché. Par conséquent, les ententes qui n’ont pas pour vocation ou n’ayant pas pour effet
de faire obstacle à une concurrence loyale ne peuvent constituer un délit et n’entrent pas dans
le champ d’application de l’article 6 de l’ordonnance n° 03-03502.

La distribution sélective est une variante des contrats d’affaires qui permet au fournisseur de
conclure des accords verticaux avec un nombre limité de distributeurs sélectionnés dans la
même zone géographique. D’une part, les accords de distribution sélective restreignent le
nombre de revendeurs agrées et, d’autres part, interdisent les ventes à ceux non agrées, les
seuls acheteurs possibles des membres du réseau étant alors les autres distributeurs agrées et
les consommateurs finaux. L’application des clauses de ce type de contrats risque de
restreindre la concurrence intra marque, de faciliter les ententes entre fournisseurs ou
acheteurs et d’exclure une ou plusieurs catégories de distributeurs, en particulier en cas
d’effets cumulatifs de réseaux parallèles de distribution sélective sur un marché 503.

Au regard des articles 7 et 8 de l’ordonnance de 1986, pour être licite et échapper à la


prohibition des ententes, un système de distribution sélective doit être justifié par les
nécessités d’une distribution adéquate des produits en cause, et être fondé sur une sélection
des distributeurs en fonction de critères objectifs, qualitatifs et non discriminatoire. Lorsqu’ils

501
Y. SERRA, Le droit français de la concurrence, Dalloz 1993, p.80.

502
Les conditions de la condamnation d’une entente sont illustrées par le législateur algérien à l’article 06 de
l’ordonnance n° 03-03 susvisée.

503
JEAN -PIERRE CHAMOUX ET HENRI LEPAGE,Distribution sélective et droit de la concurrence : critique d’une
vision néoclassique,Journal des Economistes et des Etudes Humaines, vol.7 numéro 4, décembre 1996.

142
sont appliqués uniformément à tous les distributeurs, les critères de sélection permettent
d’appliquer une sélection non restrictive de concurrence504.

En effet, si une entreprise considère qu’une exigence de spécialisation technique dans la


distribution de ses produits, justifie la possibilité de sélectionner son réseau, sur la base de
critères ayant trait à l’installation matérielle et la qualification du personnel, « ces critères
doivent s’imposer à l’ensemble des points de vente commercialisant sa production ».505Toute
clause contraire imposée par le fabricant serait considérée comme anticoncurrentielle.

A titre d’exemple, d’une part, la Cour d’appel de Paris a condamné comme entente prohibée,
tout système de distribution sélective conduisant « à exclure par nature une ou des formes
déterminées de commerce qui seraient aptes à cette distribution »506 : un tel système
constituant une restriction discriminatoire et non proportionnée aux nécessités des produits en
cause, et, d’autre part, la conseil français de la concurrence condamne comme ententes
anticoncurrentielles, notamment, les clauses limitant la libre détermination par le distributeur
sélectionné, de ses prix de revente et ses marges ; les clauses limitant excessivement la liberté
commerciale des revendeurs ; les clauses de non rétrocession entre revendeurs agréés.507

Toutefois, une distinction est généralement opérée entre les systèmes de distribution sélective
qualitative et les systèmes de distribution sélective quantitative. Les premiers sont fondés sur
la base d’une sélection objective requise par la nature des produits et sans limitation directe du
nombre des distributeurs agréés. Les systèmes de distribution sélective quantitative ajoutent,
en revanche, d’autres critères de sélection qui limitent plus directement le nombre des

504
SYLVAINE POILLOT-PERUZETTO, « Exemption par catégorie des accords verticaux : franchise », dans Revue
trimestrielle de droit commercial, 2001, p. 550.

505
Les automobiles de haute technicité (Déc. n° 75/73/CEE de la Commission, 13déc. 1974, JOCE 3 févr. 1975,
n° L 29), les articles d’horlogerie d’une grande complexité technique (CJCE, 21déc. 1976, aff. 77/10, Junghans,
JOCE 2 févr. 1977, n° L 30), le matériel informatique (Déc. n° 84/233/CEE de la commission, 18 avr. 1984, IBM-
computer, JOCE 4 mai 1984, n° L 118), le matériel électronique de divertissement (CJCE, 25 oct. 1977, Metro І,
Rec. CJCE 1977, p. 1875 ; CJCE, 22oct. 1986, aff. 75/84, Metro ІІ, Rec. CJCE, p. 3021). Lamy droit économique
2003, n° 4516.

506
C. A. Paris : 10 déc 1985 ; Gaz Pal 1986, 2, p. 581.

507
Avis du 9 oct 1986 ; "Situation de la concurrence dans le négoce des composants électroniques actifs"
BOCCRF 19 janv 1987.

143
revendeurs agréés508. Le droit français est attaché à la détermination de critères d’ordre
purement qualitatif pour la sélection des distributeurs, par opposition à un système dans lequel
le fournisseur pourrait se fonder sur des critères quantitatifs. Ce principe paraît conforme à la
jurisprudence communautaire, en matière de distribution sélective509.

Cependant, dans son règlement d’exemption n°1400/2002 du 31 juillet 2002 spécifique à la


distribution automobile, la Commission européenne a introduit une brèche dans ce principe en
permettant l’exemption de systèmes de distribution sélective fondés sur des critères de
sélection qui ne seraient pas purement qualitatifs510. La Cour de cassation française a
néanmoins fait une interprétation très restrictive de cette possibilité, dans un arrêt « Garage
Gremeau / Daimler »du 28juin2005, imposant en pratique au fournisseur de définir et de
mettre en œuvre des critères qualitatifs objectifs pour bénéficier de l’exemption prévue par les
règles du droit de la concurrence interne et communautaire511.

D’une manière générale, le contenu des arrêts de la cour de cassation française, laisse
clairement penser qu’un réseau de distribution sélective n’est licite que dans la mesure où il
satisfait aux conditions suivantes :

La nature du produit doit justifier le recours à ce type de distribution (le principe de


nécessité).

Les distributeurs doivent être choisis sur la base de critères objectifs à caractère qualitatif et
appliqués sans discrimination (le principe d’objectivité).

Les critères de sélection ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour la bonne
commercialisation des produits (le principe de proportionnalité)512.

508
PH. LE TOURNEAU, Les contrats de concession, éd. Litec, collection Affaires finances, 2003, p. 08.

509
M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n° 32.

510
Règl. (CE) n° 1400/2002 de la Commission, du 31 juillet 2002, concernant l'application de l'article 81,
paragraphe 3, du traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur
automobile.

511
Cass. Com,Arrêt n° 982 du 28 juin 2005, www. Lexinter.com.

512
Cass. crim., 3 nov. 1982, Lanvin, Nina Ricci et Rochas : Gaz. Pal. 1982, 2, jurispr. P. 658, note J. – P. Marchi ;
D. 1983, inf. rap. P. 211, obs. C. Gavalda et C. Lucas de Leyssac.

144
Du côté procédurale, pour condamner une entente illicite, les règles du droit de la concurrence
obligent de démontrer l’existence d’un accord ou d’une concertation entre deux partenaires
économiques. Cependant, en matière de distribution, si certaines restrictions de concurrence
peuvent clairement découler des clauses de l’accord de distribution, d’autres types de
pratiques comme la sélection des distributeurs dans le cadre d’un réseau de distribution
sélective ne font généralement pas l’objet d’un accord spécifique des distributeurs.
L’exigence stricte de la démonstration d’un accord de volonté entre fournisseur et
distributeur, telle qu’elle résulte d’une tendance de la jurisprudence européenne et
française513, rend dans ce cas très difficile la démonstration d’une infraction au règles du droit
de la concurrence par les autorités compétentes et les éventuels plaignants 514.

Cependant, la cour de cassation a également affirmé que l’agrément par un fournisseur de


produits de marque en faveur de certains distributeurs se fonde sue l’acceptation de ces
derniers de la politique commerciale menée par le fournisseur. Donc, cet agrément ne
constitue pas un acte unilatéral tant il est perçu comme un contrat 515au sens de l’article 07 de
l’ordonnance de 1986 du droit français et de l’article 81 du traité de Rome en droit européen.

En effet, ce contrat peut cacher une entente prohibée et constitue dès lors une pratique
restrictive à caractère anticoncurrentiel. Toutefois, un réseau de distribution sélective qui
réuni les conditions d’application de l’article 10 de l’ordonnance peut échapper à
l’interdiction prévue par l’article 07 devenu article L. 420-1 du code de commerce français516.

2) Les abus de domination

513
M. MALAURIE. VIGNAL, op. cit, p. 162

514
Par un arrêt du 7 janvier 2011 (Pourvois n° 09-14316 et 09-14667), l'assemblée plénière de la Cour de
cassation a jugé que "sauf disposition expresse contraire du code de commerce, les règles du code de
procédure civile s'appliquent au contentieux des pratiques anticoncurrentielles relevant de l'Autorité de la
concurrence" et que "l'enregistrement d'une communication téléphonique réalisé à l'insu de l'auteur des
propos tenus constitue un procédé déloyal rendant irrecevable sa production à titre de preuve". la Cour de
Cassation française insiste sur le carctère légal et loyal de la preuve des pratiques anticoncurrentielles, T.
Voitellier, Loyauté et preuve des pratiques anticoncurrentielles, avocats.fr.

515
Y. GUENZOUI, Entente et contrat : le trouble notionnel, RTD com. 2006, p. 273.

516
O. GAST ; GRILLAULT LAROCHE, HAYETTE, La distribution sélective et la franchise, JCP E, n° 50, 14/12/2000,
pp. 36-46.

145
Une entreprise, propriétaire d’un réseau de distribution sélective, véhiculant une image de
grande renommée et ayant un succès auprès des consommateurs ne peut que jouir d’une
puissance économique par rapport aux concurrents et aux autres partenaires économiques. Par
cette puissance économique, l’entreprise peut détenir une position dominante et s’abstraire de
se fait d’une concurrence loyale.

La question qui sera examiné ici est de savoir si les accords de distribution sélective
constituent en soi un abus de position dominante lorsque l’un des contractants détient une
telle position.

Le fait, pour une entreprise, de s’affranchir des contraintes de la concurrence peut, d’une part,
consister en une domination absolue ou quasi-absolue qui est exercée sue l’ensemble des
entreprises présentes sue le marché (abus de position dominante) et d’autre part, correspondre
à une domination relative exercée par une entreprise sur une autre (abus de dépendance
économique).

a) L’abus de position dominante

Ni le droit français ni le droit communautaire ne donnent de définition à cette pratique


anticoncurrentielle. Toutefois, la jurisprudence communautaire estime que la position
dominante concerne « une position de puissance économique détenue par une entreprisequi
lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d’une concurrence effective sur le marché
en cause, en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure
appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et, finalement, des consommateurs »517.

S’inspirant de cette jurisprudence, le législateur algérien a, par l’article 3 de l’ordonnance n°


03-03, donné une définition de la position dominante qui depuis, n’a pas été modifiée par la
loi n° 08-12 relative à la concurrence. D’après cet article, la position dominante serait celle
« qui permet à une entreprise de détenir, sur le marché en cause, une position de puissance
économique qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d’une concurrence
effective, en lui fournissant la possibilité de comportement indépendant dans une mesure
appréciable vis à vis de ses concurrents, de ses clients ou des ses fournisseurs ».

517
CJCE, 14 février 1978, United Brands Company et United Brands Continental BV c/ Commission, aff. 27/76,
Rec. p 207 cité par vignal.

146
De son coté, l’article 7 prohibe l’abus d’une position dominante ou monopolistique sur un
marché ou un segment de marché dans les mêmes conditions que pour les ententes illicites à
l’article 6. Cependant, contrairement aux pratiques d’entente qui peuvent être le fait de tout
opérateur économique, entreprise, association etc., l’abus de position dominante ne peut être
le fait que d’une entreprise ou d’un groupe d’entreprises en position dominante. Il convient
d’observer que le législateur français mentionne expressément à l’article L. 420-2 que
l’exploitation abusive d’une position dominante doit être commise par une entreprise ou un
groupe d’entreprises tandis que le législateur algérien ne l’évoque que tacitement par renvoi à
l’article 3 qui donne une définition de la position dominante en précisant qu’elle est détenue
par une entreprise518.

Certains auteurs soutiennent qu’une position dominante détenue par une entreprise sur un
marché n’est pas condamnable en soi : seul l’abus d’une position dominante est prohibé par
l’article L. 420-2 du code de commerce français519. De façon analogue, le texte algérien
n’interdit pas la position dominante mais l’abus de position dominante, qui se traduit par les
comportements illicites posés par l’article 7 et qui constituent des entraves au libre
fonctionnement de la concurrence520.

Pour constater cette infraction, d’autres auteurs affirment que l’entreprise en position
dominante doit non seulement jouir d’une indépendance de comportement par rapport à ses
concurrents et à ses partenaires, mais encore être en mesure d’exercer un pouvoir sur eux521.

L’interdiction de l’abus de position dominante, édictée à l’origine par l’article 8 alinéa 1 de


l’ordonnance du 1er décembre 1986 et adoptée par le législateur algérien à l’ordonnance 95-06

518
position dominante : la position permettant à une entreprise de détenir, sur le marché en cause, une
position de puissance économique qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d’une concurrence
effective, en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-à-
vis de ses concurrents, de ses clients ou de ses fournisseurs.

519
« Les simples expectatives d’abus ne sont en principe pas réprimées. Il faut que l’entreprise se livre à une
exploitation abusive de la situation ». Y. CHAPUT, Le droit de la concurrence, Paris, PUF, 1988, p.74.

520
D. ZENNAKI, Droit de la concurrence, op. cit.

521
« … la domination ne s’exprime pas seulement en parts de marché mais est définie comme un pouvoir
économique. », M. MALAURIE. VIGNAL, op. cit, p. 193.

147
est applicable aux accords de distribution si le producteur abuserait de sa position dominante
sur le marché ou une partie substantielle de celui-ci522.

Cette notion de position dominante implique, par conséquent, une analyse du marché sur
lequel elle s’exerce et qui va servir de cadre pour analyser la restriction à la concurrence. En
effet, le critère principal pour la prohibition est celui de la part de marché détenue par
l’entreprise en position dominante. Une forte part de marché suffit à faire la preuve de la
position dominante. Ainsi, préalablement à toute analyse de la validité d’un accord de
distribution sélective, les autorités compétentes chargées d’appliquer le droit de la
concurrence, doivent fixer de façon précise le marché de référence à la fois géographiquement
et par produits523.

A cet égard, il faut rappeler que les critères de détermination de la position dominante ont été
définis en droit algérien par le décret exécutif n°2000-314, qui prend cumulativement pour
référence l’intensité des avantages dont bénéficie l’opérateur et le rapport entre le chiffre
d’affaires de l’opérateur économique et le chiffre d’affaire global de l’ensemble des autres
opérateurs activant sur le même marché ou segment de marché 524. Néanmoins, la position
dominante a cessé de faire l’objet de l’intérêt réglementaire qui avait le mérite de fixer les
critères constitutifs de la position dominante et de définir l’abus de position dominante. C’est
ainsi que fut abrogé le décret exécutif n°2000-315 du 14/10/2000. Il est aujourd’hui du ressort
du Conseil de la concurrence de dire l’existence ou la survenance d’une situation d’abus de
position dominante.

522
Le conseil de la concurrence français rappelle que « le marché est défini comme le lieu sur lequel se
rencontrent l’offre et la demande pour un produit ou un service spécifique ». Rapport annuel du conseil de la
concurrence français pour l’année 1999, p. 47 ;en droit algérien, il est entendu par marché au sens de
l’ordonnance 03-03 « tout marché des biens ou services concernés par une pratique restrictive , ainsi que ceux
que le consommateur considère comme identiques ou substituables en raison notamment de leurs
caractéristiques, de leurs prix et de l’usage auquel ils sont destinés, et la zone géographique dans laquelle sont
engagées les entreprises dans l’offre des biens et services en cause ».

523
« La délimitation du marché pertinent est un instrument d’analyse essentiel en droit de la concurrence » M.-
C. BOUTARD-LABARDE ET G. CANIVET, Droit français de la concurrence, LGDJ, 1994, p. 7.

524
Avant de mentionner la notion d’entreprise à l’ordonnance 03-03, le législateur algérien faisait référence à
la notion d’agent économique dont il donnait la définition à l’article 03 de l’ordonnance 95-06 comme
suit : « Est entendu par agent économique, au sens de la présente ordonnance, toute personne physique ou
morale quelle que soit sa nature, exerçant des activités ou réalisant des actes relevant du champ d'application
défini à l'article 2 ci-dessus ».

148
L’abus de position dominante consistera alors en tout acte constitutif de manœuvre tendant à
contrôler l’accès au marché national ou à altérer les mécanismes de la concurrence ou encore
à empêcher l’émergence de toute solution équivalente sur le marché525. A la différence du
législateur français, La non détermination par le dispositif algérien du taux de parts de marché
à partir duquel il y aura effectivement une situation de position dominante est susceptible de
rendre l’appréciation, aussi bien des entreprises concernées que du conseil national de la
concurrence délicate526.

En ce qui concerne le marché géographique, la taille de celui-ci importe peu ; il peut s’agir
bien évidemment du marché national ou d’un marché régional, voire d’un marché local. Il
faut déterminer la dimension géographique du marché en tenant compte des possibilités
réelles d’approvisionnement des utilisateurs527. Quant au marché des produits, il est déterminé
en fonction de la nature des produits et de leurs qualités objectives, d’une part, et en fonction
des utilisateurs, d’autre part.

Aussi, le marché des produits comprend tous les produits et services que le consommateur
considère comme interchangeables en raison de leurs caractéristiques, de leurs prix et des
usages auxquels ils sont destinés. Il convient donc de déterminer le degré d'interchangeabilité
ou de substituabilité requis pour considérer que des produits appartiennent à un même
marché528.

Le critère de substituabilité ou au contraire l’absence de substituabilité entre les produits est la


référence déterminante pour la délimitation du marché des produits. En effet, l’analyse
économique définit le marché comme le lieu de la confrontation d’une offre et d’une demande
de biens identiques ou substituables. Rapporté à un fabricant de produits de luxe, ceci signifie

525
Art. 5 du décret exécutif n° 2000-314du 14 octobre 2000 définissant les critères conférant à un agent
économique la position dominante, ainsi que ceux qualifiant les actes constituant des abus de position
dominante(JORA n° 61 du 18 octobre 2000 p.12), abrogé par l’article 73 de l’ordonnance 03-03 du 19 juillet
2003 relative à la concurrence, modifiée et complétée.

526
En revanche, pour les opérations de concentration, le législateur algérien fixe le seuil à 30% à l’ordonnance
95-06, puis le modifie à l’ordonnance 03-03 pour l’élever à 40% des ventes ou achats effectués sur un marché.

527
J. BEAUCHARD, Droit de la distribution et de la consommation, P. U. F., collection Thémis Droit privé, 1 ère
édition 1996, p. 43.

528 e
D. FERRIER, Droit de la distribution, Litec, 4 éd., 2006, p. 143.

149
que plus les produits ou services substituables à ceux fournis par son entreprise seront
nombreux, plus sa position sur le marché sera faible529.

Cela dit, la notion de substituabilité demeure, en pratique, une référence assez relative ; des
biens différents ou des biens de même nature peuvent être plus ou moins substituables mais
sont rarement parfaitement substituables. Aussi, est il nécessaire de prendre en compte
différents éléments susceptibles de fournir une indication sur le degré de substituabilité des
produits pour délimiter le marché pertinent et écarter les produits qui ne sont pas
substituables530.

Concernant la distribution sélective, il convient donc de délimiter le marché affecté par cette
forme de commercialisation, et ainsi, par exemple, parmi les produits de même nature, un
marché pertinent peut être réduit à certains d’entre eux au regard de leur diffusion sélective.
Les « produits de parfumerie de luxe » ont pu être considérés comme constituant un marché
spécifique, distinct de celui des produits vendus par d’autres circuits de distribution531.

Il est à noter que les ordonnances algériennes et françaises prévoient toutes les deux la
possibilité pour le conseil de la concurrence, de prononcer une sanction pécuniaire (en
France) ou une amende (en Algérie) à l’encontre des auteurs d’un abus de position
dominante532.

Parmi les rares affaires d’atteinte à la concurrence par un abus de position dominante que le
Conseil national de la Concurrence a eu à trancher, le cas de la SNTA retient le plus
d’attention. En effet, la société nationale des tabacs et allumettes s’est vue infliger par le
conseil une amende pécuniaire de 768.000,00 DA pour abus de position dominante voire
monopolistique et pratiques discriminatoires envers ses clients. Le Conseil a été saisi par une
requête d’un client victime de ces pratiques.

529 e
J. SCHAPIRA, G. LE TALLEC, J.-B. BLAISE & L. IDOT, Droit européen des affaires, P.U.F., 1992, 5 éd. 1999, p.
127.

530
D. MAINGUY, Réflexions sur la notion de produit en droit des affaires, RTD com. 1999, p. 47.

531
Déc. n° 92/33/CEE de la Commission, 16, dec. 1991, Yves Saint Laurent, JOCE 18 déc ? n° L 12 ; Déc. n°
92/428/CEE de la Commission, 24 juill. 1992, Givenchy, JOCE 19 août 1992, n° L 236 ; sur la détermination de
marché de référence, cf. Commission n° 97/C 392/03, Code Lamy droit économique 2002.

532
R. POESY, le rôle du conseil de la concurrence et du juge judiciaire en Algérie et en France en droit des
pratiques anticoncurrentielles, aspects procéduraux, in L’Algérie en mutation, les instruments juridiques de
passage à l’économie de marché, Sous la direction de R. CHARVIN et A. GUESMI, L’Harmattan, 2001, p. 161.

150
Les infractions constatées sont les suivantes :

- les ventes discriminatoires : la SNTA approvisionnait certains clients de façon privilégiée


jusqu’à hauteur de 1.000 paquets par livraison contrairement aux autres acheteurs qui
recevaient uniquement 100 paquets et même voyaient leurs demandes d’approvisionnement
rejetées ;

- le stockage spéculatif : après enquête le conseil de la concurrence a constaté que la SNTA


procédait à un stockage spéculatif de ses produits pour influer sur le fonctionnement du
marché533.

En définitive, la position dominante implique qu’un producteur de produits de luxe ou de


haute technicité soit en mesure de s’affranchir des contraintes de toute concurrence et puisse
imposer ses conditions à tous ses distributeurs agréés. Ce qui revient à comprendre que la
position dominante n’est pas prohibée en soi ; elle est condamnée dans les mêmes conditions
que les ententes anticoncurrentielles c’est à dire « si elle a pour objet ou peut avoir pour effet
d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur le marché ». Ceci
implique donc que, par le biais de la constitution d’un réseau de distribution sélective, un
producteur qui chercherait à renforcer ou étendre sa position dominante de manière à
empêcher le développement d’une concurrence loyale, serait sanctionné à ce titre.

Est également sanctionnable, l‘entreprise qui bien qu’elle ne détient pas une position
dominante sur le marché, abuse de la dépendance économique de son entreprise cliente.

a) L’abus de dépendanceéconomique

Emprunté au droit allemand, l’abus de dépendance économique est une interdiction récente en
droit français, puisqu’elle constitue une innovation de l’ordonnance de 1986. En effet, les
règles du droit de la concurrence en France ne permettaient de réprimer que l’abus de position
dominante et n’avaient aucune solution au problème posé par la puissance d’achat de la
grande distribution qui, en détenant un pouvoir de négociation considérable, abuser de la
dépendance économique des fournisseurs534.

533
Forum mondial sur la concurrence du 11 décembre 2008, questionnaire sur les défis que doivent relever les
jeunes autorités de concurrence, Contribution de l'Algérie. www.oecd.org.

534
M. DIETSCH, l’équilibre des relations fournisseurs-distributeurs, www.economie.gouv.fr

151
Désormais, l’article 8 alinéa 2 de l’ordonnance de 1986 dispose d’une prohibition, dans les
mêmes conditions que les autres pratiques anticoncurrentielles 535, de l’exploitation abusive
par une entreprise ou par un groupe d’entreprises de l’état de dépendance économique dans
lequel se trouve à son égard, une entreprise cliente ou fournisseur qui ne dispose pas de
solution équivalente. Il convient de noter ici que cette disposition dont a eu à imposer le
législateur français, est de portée générale. Elle ne vise pas uniquement la puissance d’achat,
mais toutes les formes de dépendance qui placent une entreprise sous la domination relative
d’une autre536.

En plus des pratiques d’ententes illicites et des abus de position dominante déjà consacrées
dans le droit algérien par l’ancien dispositif, l’ordonnance n° 03-03 intègre une nouvelle
pratique restrictive de la concurrence qui est désormais interdite et sanctionnée, à savoir
l’abus de l’état de dépendance économique.

Contrairement aux dispositions françaises issues de l’ordonnance de 1986, les textes algériens
ne faisait aucune distinction, jusqu’en 2003, entre le délit d’abus de position dominante et
celui de l’exploitation abusive d’une dépendance économique. Ainsi, le législateur algérien
citait comme critère d’un abus de position dominante, l’absence de solution équivalente due à
une situation de dépendance économique537. Suite à l’abrogation de l’ancien texte, les critères
qui identifiaient un abus de position dominante ont été transposés à l’article 11 de
l’ordonnance 03-03 pour prohiber l’exploitation abusive, par une entreprise, de l’état de
dépendance dans lequel se trouve à son égard une entreprise, client ou fournisseur538.

L’interdiction, ainsi introduite en 1986, a été codifiée dans le code de commerce français par
la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001, relative aux nouvelles régulations économiques. Ainsi,
l’article L. 420-2 alinéa 2 du code de commerce, énonce qu’est prohibée « dès lors qu’elle est
susceptible d’affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence, l’exploitation
535
C’est à dire qu’elle a pour objet ou peut avoir pour effet d’empêcher, restreindre ou fausser le jeu de la
concurrence sur le marché.

536
J. C. GRALL, "Distinction entre "relation de dépendance" et "état de dépendance économique", LAMY de
Droit Economique, Janvier 2002, n°147.

537
Art. 05 du décret exécutif n° 2000-3 du 14 octobre 2000 définissant les critères conférant à un agent
économique la position dominante, ainsi que ceux qualifiant les actes constituant des abus de position
dominante(J.O.R.A. n° 61 du 18 octobre 2000 p.12).

538
D. ZENNAKI, Droit de la concurrence, cours de magistère, Faculté de droit, Université d’Oran, 2010/2011.

152
abusive par une entreprise ou par un groupe d’entreprises de l‘état de dépendance économique
dans lequel se trouve à son égard une entreprise cliente ou fournisseur. Ces abus peuvent
notamment consister en refus des vente, en ventes liées ou pratiques discriminatoires visées à
l’article L. 442-6 ».

Ce dernier article énonce : « engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparé le


préjudice causé, le fait par tout producteur, commerçant, industriel ou artisan d’abuser de la
relation de dépendance dans laquelle il tient un partenaire ou de sa puissance d’achat ou de
vente en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées ».

De ce fait, la modification apportée par la loi dite « NRE » crée un nouveau délit « d’abus de
puissance d’achat ou de vente » et assoupli les conditions d’application de l’infraction
« d’abus de dépendance économique »prévue à l’article L. 420-2 du code de commerce ;
celle-ci ne nécessite plus, pour être retenue, d’avoir pour objet ou pour effet d’empêcher,
restreindre ou fausser le jeu de la concurrence sur le marché ; il suffit désormais que la
pratique prohibée soit simplement « susceptible d’affecter le fonctionnement ou la structure
de la concurrence »539.

Cette exigence se substitue à la condition anciennement requise par l’ordonnance de 1986 qui
subordonnait toute condamnation à la présentation de la preuve de l’affectation du marché.
Certains auteurs affirment que cette modification conduirait à abandonner l’exigence d’une
affectation du marché.540

Conscient de la gravité de ce délit et faisant de même que son homologue français, le


législateur algérien prohibe également cette pratique restrictive dès lors qu’elle est susceptible
d’affecter le libre jeu de la concurrence.

La réforme du 15 mai 2001 a également supprimé en France l’exigence de la preuve de


l’absence de solution équivalente pour la victime de cette pratique anticoncurrentielle.
Cependant, le conseil de la concurrence, la Cour d’appel de Paris et la Cour de cassation
donnent toujours une interprétation restrictive de la notion d’exploitation abusive d’un état de
dépendance économique en exigeant la réunion cumulative de quatre critères objectifs :

539
M. MALAURIE-VIGNAL, Le droit de la concurrence interne et communautaire, Dalloz 2005, P. 209.

540
M. MALAURIE VIGNAL, préc, p. 210.

153
1-l’importance du fournisseur dans le chiffre d‘affaires du revendeur.

2-la notoriété de la marque du fournisseur.

3-l’importance de la part du fournisseur sur le marché

4-l’absence sur le marché pertinent d’une solution équivalente pour la partie faible541.

Concernant les accords de distribution sélective, la limitation du nombre de distributeurs sur


la base de critères de sélection purement qualitatifs, n’est en principe pas considérée comme
anticoncurrentielle. En effet, les distributeurs sont présumés être sélectionnés seulement sur la
base de critères objectifs tels que la formation du personnel, la qualité des prestations assurées
ou encore la localisation du point de vente. Dans la mesure où ces critères ne sont pas
arbitraires et sont appliqués sans discrimination, ces accords ne sont pas à considérer comme à
risque et ont souvent été validés par les autorités de la concurrence542.

La distribution sélective quantitative ajoute d'autres critères de sélection qui limitent plus
directement le nombre potentiel de revendeurs agréés en imposant par exemple un niveau de
vente minimal ou maximal ou en fixant un contingent maximum de revendeurs agréés par
ville ou par région543.

Les accords basés sur la sélection quantitative seront eux plus problématiques et il faudra plus
particulièrement tenir compte dans leur analyse, de la position du fournisseur sur le marché.
En effet, les autorités françaises de contrôle considèrent parfois de façon trop automatique que
dès lors que la part de marché du fournisseur est inférieure à 30 % et que l'accord ne contient
ni de clauses restrictives, ni des critères de sélection qualitatifs discriminatoires ou une
application discriminatoire des critères, la pratique de la distribution sélective n'a pas d'effet
anticoncurrentiel544. S’attachant davantage à cette analyse économique fondée sur la part de
marché, le conseil français de la concurrence s’est même abstenu de condamner une

541
Cass. com., 9avr. 2002, Sté Sintel c/ Sté Lotue : RTD com. 2003, p. 75, obs. E. Claudel.

542
Cass. Com. 9 février 1976, JCP 1977.II. 1859 obs. J. Hemard.

543
V. Lamy droit économique, 2003, n° 4519.

544
CA Dijon, 1er avril 2004, DaimlerChrysler France c. Garage Cremeau, www. Lexinter.com.

154
application discriminatoire des critères de distribution sélective au motif que la part de marché
du fournisseur était inférieure à 30%545.

La situation du distributeur agréé quant à elle doit être analysée en tenant compte, à la fois de
l’absence d’alternatives suffisantes, appréciées objectivement par rapport à l’organisation du
marché, et de l’absence d’alternatives supportables, appréciées subjectivement par rapport à
ses possibilités. Sous ces deux aspects l’abus de dépendance économique peut notamment
consister en un refus de vente, en vents liées ou en des conditions de vente discriminatoires,
ainsi que dans la rupture de relations commerciales établie au seul motif que le distributeur
agréé refuse de se soumettre à « des conditions commerciales injustifiées »546.

C’est dans le même contexte qu’a été condamné un producteur pratiquant la distribution
sélective par la coexistence de deux réseaux : réseau de vente par correspondance et réseau de
distribution sélective.

Le caractère anticoncurrentiel de l’accord litigieux à été prononcé en raison de l’abus de


dépendance économique caractérisée par des conditions d’approvisionnement et de prix
discriminatoires imposés aux distributeurs agréés. 547Par ces notions, il semble bien que c’est
la vulnérabilité économique du distributeur agréé qui soit visée. S’agissant de l’image de
marque et la notoriété des produits comme facteur de dépendance économique, la doctrine
française semble partager des positions différentes.

Ainsi, certains auteurs affirment que la dépendance économique est définie par la dépendance
pour cause d’assortiment, lorsque l’image de marque des produits les rend non substituables à
d’autres produits, et c’est ce qui entraîne l’état de dépendance des commerçants agréés qui
tiennent à les distribuer par rapport à l’entreprise qui les fabrique. Ils ajoutent qu’un produit
de marque bénéficie d’une grande notoriété qui repose non seulement sur les efforts
publicitaires du producteur mais aussi sur les efforts des distributeurs sélectionnés ayant
obligation essentielle de maintenir l’image de marque. Or, au regard des conditions de
sélection parfois draconiennes et injustifiées, la perte du droit de revendre ses produits de

545
M. MALAURIE VIGNAL, op. cit, p.188.

546
XAVIER DERVILLE, La distribution sélective des parfums: paradoxes et perspectives, Cah. dr. entr. 1997 n° 3/4,
p. 57-59.

547 er
CA Versailles, 1 oct. 1991, Gaz. Pal. 1993, І, som., p. 37, note D. D’hoeraene ; Lamy droit économique 2003,
n° 4509.

155
marque entraine pour le distributeur exclu une diminution des vents et, par suite, de son
chiffre d’affaires548.

Cependant, d’autres auteurs avancent que l’état de dépendance économique ne peut résulter
de la seule notoriété de la marque et des signes distinctifs du fournisseur mais suppose
différentes conditions cumulatives telles qu’exigées par las autorités de contrôle de la
concurrence.549

En pratique, les actions visant à contester la validité d’un réseau de distribution sélective
émanent le plus souvent soit d’un distributeur qui s’est vu refusé l’accès à un réseau, soit d’un
distributeur qui, sans prétendre à l’agrément, veut seulement mettre en vente des articles
relevant de la distribution sélective. Mais de telles actions peuvent aussi être introduites par
d’autres opérateurs sur le marché se plaignant des atteintes portées à la concurrence par la
constitution ou le fonctionnement d’une entente verticale ou des pratiques anticoncurrentielles
qu’ils considèrent comme illicites et peuvent être sanctionnées de lourdes amendes550.

Apparaît ainsi la double finalité du contrôle de la validité de la distribution sélective. En


premier lieu, la sanction des agissements anticoncurrentiels émanant d’un producteur
propriétaire d’un réseau sélectif et en second lieu la protection et le maintien d’une structure
concurrentielle du marché.

La distribution sélective comme tout accord vertical portant atteinte au jeu de la concurrence
peut ne pas être appréciée comme étant restrictive de concurrence et bénéficier de la part des
autorités de contrôle d’une appréciation favorable.

B) La justification des pratiques anticoncurrentielles

548 er
A. DECOCQ, M. PEDAMON, « l’ordonnance du 1 décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la
concurrence » ; Juris class concurr consomm n° spécial 1 bis 1987 n° 28, p. 9.

549 e
D. FERRIER, Droit de la distribution, Litec, 4 éd., 2006, p. 268. ; M. Malaurie Vignal, op. cit, p. 208.

550
En 1998, le conseil de la concurrence français s’est autosaisi pour sanctionner sévèrement le géant mondial
LVMH qui a écoper d’une amende de 14,45 million d’euros pour avoir imposé les prix de gros à ses
distributeurs et s’être entendu avec eux sur le prix de revente au détail, de façon à les uniformiser vers le haut.
En matière de produits de haute technicité, Philips, Sony et Panasonic avaient été condamnés à payer une
amende de 34,4 millions d'euros pour entente illicite avec leurs distributeurs français sur les prix de vente au
détail de leurs produits. L e figaro, 9 juillet 2009.

156
Bien que la liberté de la concurrence soit limitée par la condamnation des formes déloyales ou
excessive de concurrence, elle admet néanmoins des tempéraments au nom de finalités socio-
économiques qui commandent dans certains cas la mise à l’écart des règles du droit de la
concurrence. Le système d’exemption a pour but d’autoriser, sous certaines conditions, des
accords verticaux qui en réalité sont restrictifs de concurrence. L’étude de l’exemption de la
distribution sélective nécessite la détermination des conditions exigées par la loi ainsi que les
procédures à suivre.

1) les conditions de l’exemption de la distribution sélective

Du point de vue de la concurrence, les clauses d’un contrat de distribution sélective risquent
de restreindre la concurrence intramarque, de faciliter la collusion entre fournisseurs ou
acheteurs et d’exclure une ou plusieurs catégories de distributeurs, en particulier en cas
d’effets cumulatifs de réseaux parallèles de distribution sélective sur un marché. 551

En général, la distribution sélective ne relève pas de l’interdiction prévue par les règles du
droit de la concurrence pour autant que trois conditions soient satisfaites : premièrement, la
nature du produit en question doit requérir un système de distribution sélective,
deuxièmement, les distributeurs doivent être choisis sur la base de critères objectifs de nature
qualitative et, troisièmement, les critères définis ne doivent pas aller au delà de ce qui est
nécessaire.552

Aussi, le droit français et algérien prévoient qu’aucune sanction n’est prononcée lorsque la
pratique de la distribution sélective est conforme à l’intérêt général. Ce mode de distribution,
normalement anticoncurrentiel, est alors exempté. En effet, les deux droits admettent des
exemptions individuelles fondées soit, sur le rachat de la pratique anticoncurrentielle par la loi
soit sur un bilan économique.

L’article L.440-4 du code de commerce français prévoit l’exemption de pratiques « qui


résultent de l’application d’un texte législatif ou d’un texte réglementaire pris pour son
application. De même, l’article 9 al. 1er de l’ordonnance n° 03-03 exonère de l’interdiction

551
M. P. PIRIOU, « La distribution sélective et les règles communautaires de la concurrence », RTD eur. 1978, p.
628

552
J.J. BURST ET R.KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence » RTD com,
1978, p. 462.

157
prévue aux articles 6 et 7 relatifs aux ententes et abus de position dominante, les pratiques qui
résultent de l’application d’un texte législatif ou réglementaire pris pour son application.

La doctrine française affirme que cette disposition est d’interprétation stricte, seule une loi ou
un règlement peut exonérer le comportement anticoncurrentiel.553

Outre le rachat par la loi, le législateur algérien suit son homologue français, non sans nuance,
dans la détermination de l’exemption tirée du progrès économique. Ainsi, l’article 9 alinéa 2
du droit algérien prévoit des faits justificatifs et suppose, pour s’appliquer, la conjonction de
trois conditions. Pour bénéficier d’une exemption sur le fondement de cet article, un accord de
distribution sélective doit : 1°) avoir pour objet ou pour effet d’assurer un progrès économique
ou technique2°) contribuer à l’amélioration de l’emploi :

3°) permettre aux petites et moyennes entreprises de consolider leur position concurrentielle
sur le marché.

Le législateur français quant à lui prévoit, en plus du progrès économique, de réserver aux
utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, sans donner aux entreprises
intéressées la possibilité d’éliminer la concurrence pour une partie substantielle des produits
en cause ni imposer des restrictions non indispensables.

Un accord de distribution sélective qui tombe sous le coup des dispositions du droit de la
concurrence peut donc échapper à la condamnation, en bénéficiant d’une exemption accordée
par les autorités de la concurrence après l’établissement du « bilan économique » de cette
pratique et l’évaluation de ses aspects positifs et négatifs554.

En droit français comme en droit algérien, une comparaison des textes d’interdiction et ceux
de l’exemption montre que cette technique du « bilan économique se traduit par la mise en
balance des éléments positifs : apport économique et apport consumériste ou plus largement

553
M. MALAURIE-VIGNAL, op. cit, p. 211.

554
Y. DITRICH ET A.MENAIS, la distribution sélective à l’épreuve du commerce électronique. , les cahiers Lamy
droit de l’informatique et des réseaux, n° 114 mai 1999.

158
utilitaire, et des éléments négatifs : atteinte aux capacités concurrentielles du partenaire et
atteinte à la concurrence sur le marché555.

Par ailleurs, on retrouve en droit de la concurrence algérien le même traitement de faveur


accordé par le législateur français à certains accords, notamment lorsqu'ils ont pour objet
d'améliorer la gestion des entreprises moyennes ou petites556.

La PME algérienne est définie comme une entreprise de production de biens et/ou de services
employant entre 1 et 250 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 2
milliards de dinars557. La contribution des petites et moyennes entreprises dans la croissance
et le développement économique d'un pays est unanimement reconnue. Toutefois dans les
pays nouvellement adhérent à l'économie de marché, à l'instar de l'Algérie, le tissu des PME
reste peu développé et extrêmement vulnérable aux aléas du marché. En examinant les
chiffres concernant les créations de nouvelles entreprises en Algérie, on se rend compte que le
tissu de PME est peu développé. Selon les chiffres du Ministère des PME et de l’artisanat
algérien, le nombre de PME en 2007 était de 410 959 entreprises pour une population de 33,8
millions d’habitants, soit 1,21 PME pour 100 habitants. Cette moyenne est très faible en
comparaison avec les pays développés558.

En raison de ce retard accusé par la PME algérienne et dans un objectif d’encourager sa


création et son développement sur le marché, le législateur algérien, à la différence de son
homologue français, n’insiste pas sur la gestion mais sur la consolidation de la position
concurrentielle sur le marché. En effet, la stratégie de développement actuelle est basée sur la
promotion de l’entrepreneuriat privé par la création et la multiplication des PME, c’est

555
R. POESY, le rôle du conseil de la concurrence et du juge judiciaire en Algérie et en France en droit des
pratiques anticoncurrentielles, aspects procéduraux, in L’Algérie en mutation, les instruments juridiques de
passage à l’économie de marché, Sous la direction de R. CHARVIN et A. GUESMI, L’Harmattan, 2001, p. 161.

556
Art. L 420-4 du code de commerce français.

557
Art. 4 de la loi n° 01-18 du 12/12/2001 (loi d’orientation sur la promotion de la PME)

558
M. BOUKHARI, Maître de conférences à l’Université SAAD DAHLAB de Blida, « Rôle de l’État vis-à-vis des
TPE/PME dans un pays nouvellement adhérent à l’économie de marché : cas de l’Algérie ». Colloque
international, La vulnérabilité des TPE et des PME dans un environnement mondialisé, 11es Journées
scientifiques du Réseau Entrepreneuriat, 27, 28 et 29 mai 2009, INRPME, Trois-Rivières, Canada.

159
pourquoi le législateur algérien adopte cette position en vue de diminuer la vulnérabilité des
PME algériennes face à la mondialisation559.

Le législateur français après avoir posé que la distribution sélective lorsqu‘elle est
anticoncurrentielle doit être condamnée en elle même ou « per se », tempère ce principe par
l’admission de cette pratique commerciale nécessaire pour atteindre certains objectifs
économiques, à savoir la protection et le développement du secteur du luxe qui constitue un
revenu important pour l’économie française560. La mise en balance des effets
proconcurrentiels et anticoncurrentiels adoptée en France trouve son origine dans l’article
81§3 du traité de Rome qui a pour objet de réguler le marché européen. Toutefois, le droit
français n’a pratiquement jamais recours au système de l’exemption et admet plus facilement
une autre règle inspirée d’une méthode américaine de traitement des pratiques
anticoncurrentielles, qualifiée de « règle de raison ».561 De ce fait, l’article L. 420-1 est plus
utilisé que l’article L. 420-4-1, 2.

Appliquée à un accord de distribution sélective, cette règle trouve son terrain d’élection et
conserve tout son intérêt. Dès 1987 le conseil de la concurrence français consacre clairement
son recours à la règle de raison pour l’appréciation des réseaux de distribution sélective et
déclare que les systèmes de distribution sélective des produits cosmétiques sont admissibles si
les critères de choix des revendeurs ont un caractère objectif, sont justifiés par les nécessités
d’une distribution adéquate des produits en cause, n’ont pas pour objet ou pour effet d’exclure
par nature une ou des formes déterminées de distribution et ne sont appliquées de façon
discriminatoires562.

C’est sur le fondement de l’article 7 de l’ordonnance de 1986 et non en application de l’article


10 qui prévoit l’exemption, que le conseil de la concurrence a tirer la justification de la

559
Ministère algérien de la PME et de l’Artisanat (2008), Bulletin d’information économique N°12, Alger.

560
F. FOURNIER, « L'équilibre des réseaux de franchise de parfumerie de luxe », dans Recueil Dalloz, 2002,
p. 793.

561
R. KOVAR, Le droit communautaire de la concurrence et la règle de la raison, RTD eur. 1987, p. 237.

562
Déc. n ° 87-D-15, du 15 juin 1987, relative à la situation de la concurrence dans la distribution en pharmacie
er
de certains produits cosmétiques et d’hygiène corporelle, 1 rapport d’activité du conseil de la concurrence, p.
43 cité par Blaise

160
distribution sélective des avantages d’une distribution adéquate pour apprécier l’atteinte à la
concurrence563.

En matière de vente de produits de haute technicité, le conseil de la concurrence français a eu


une saisine contre un fabricant d’appareils photographiques qui se réservait certains travaux
de réparation et refuser de livrer aux réparateurs indépendants les pièces détachées nécessaires
à la réparation des produits de sa marque. Le conseil a statué que « les limitations de vente
peuvent être justifiées par des nécessités objectives tenant à la mise en place d’un service
après vente de qualité, élément essentiel de l’image de marque du fabricant et ne constituent
pas des abus de position dominante ».

le commentaire de cette décision par certains auteurs démontre que le conseil ne s’est pas basé
sur le progrès économique en raison du service après vente de qualité rendu au consommateur
mais emprunte une autre voie en décidant que le refus de vente ne restreint pas la concurrence
car il contribue à la protection de l’image de marque, résultat des efforts et d’un
investissement du fabricant564.

Récemment, la Cour de cassation française, en écartant l’application de l’article L. 420-4-1,


2, a adopté le même raisonnement en déclarant qu’un réseau de distribution sélective doit être
justifié en raison des « propriétés des produits », en présence de produits de haute technicité
justifiant un personnel spécialisé et de produits de luxe justifiant une commercialisation
valorisante.565

Si le juge français est favorable à la règle de raison, le juge communautaire entend limiter la
portée de cette règle en l’appliquant que dans le cadre de l’article 81 para 3, c’est à dire du
bilan économique permettant de racheter la pratique anticoncurrentielle. Pour examiner un
accord de distribution sélective au regard de l’article 81§1 il faut successivement :

563
GAST, OLIVIER ; GRILLAULT LAROCHE, HAYETTE, La distribution sélective et la franchise, JCP E, n° 50,
14/12/2000, pp. 36-46.

564
J.B. BLAISE, « L'utilisation de la règle de raison en droit interne de la concurrence », in Le droit de l'entreprise
dans ses relations externes à la fin du XXe siècle, Mélanges en l'honneur de Claude Champaud, Paris, Dalloz,
1997, pp. 85-100.

565
Cass. Com. 21 oct 1997, Bull. civ. ІV, n ° 271. cité par Vignal.

161
-rechercher si l’accord correspond à une catégorie bénéficiant d’un règlement d’exemption ; si
la réponse est affirmative, l’accord est réputé compatible avec le droit communautaire. Or, il
n’existe pas de règlement d’exemption par catégorie pour les accords de distribution sélective
sauf pour le cas de la distribution automobile.566Cependant, elle est intégrée dans le règlement
d’exemption des accords verticaux n °2790/1999 et les lignes directrices sur les restrictions
verticales. En application de ce règlement, la distribution sélective, qu’elle soit qualitative ou
quantitative, bénéficie de l’exemption par catégorie pour autant que la part de marché du
fournisseur n’excède pas 30% et que l’accord ne contient pas de clauses dites « noires »
énumérées à l’article 4 du règlement comme les clauses de fixation du prix ou les clauses de
non rétrocession567.

-En l’absence de ces conditions posées par le règlement, un accord de distribution sélective
échappe à l’interdiction de l’article 81§1. Dans le cas contraire, il convient d’examiner si
l’accord pourrait bénéficier d’une exemption individuelle à condition de remplir les exigences
du paragraphe 3 du même article.

-Si l’examen est favorable, il convient de procéder à la notification de l’accord auprès de la


commission de la concurrence européenne et si l’examen est défavorable, il est conseillé de
mettre fin à l’accord ou de le modifier pour éviter des dépenses souvent de grande importance
et se voir sanctionné par la résiliation de l’accord en cas d’intervention des autorités de la
concurrence.

Ces principes bien posés par le droit communautaire et interne ne s’appliquent qu’aux
ententes illicites et pratiques concertées et ne peuvent exonérer un abus de domination infligée
par une entreprise en position de force.568 En droit communautaire, « l’abus d’une position
dominante n’est susceptible d’aucune exemption, de quelque façon que ce soit ».569En
revanche, le droit français dispose d’une possibilité d’exempter individuellement un

566
Règl. (CE) n° 1400/2002 de la Commission, du 31 juillet 2002, concernant l'application de l'article 81,
paragraphe 3, du traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur
automobile.

567
Sylvaine Poillot-Peruzzetto, « Règl. 2790/1999 concernant l'application de l'art. 81, § 3, du traité à des
catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées », RTD com 2000, p. 507.

568
Y. SERRA, Le droit français de la concurrnce. Editions Dalloz – 1993, p. 93.

569
TPICE 10 juill. 1999 Tetra Pack, T-51/89, Rec. ΙΙ. 309. cité par Vignal

162
comportement abusif par l’article L. 420-2 du code de commerce qui renvoie à l’article
L.420-1prévue pour les pratiques anticoncurrentielles dont l’abus de position dominante en
fait partie.570 En effet, la Cour de cassation française a censuré un arrêt d’appel qui avait
retenu l’abus de position dominante contre la société Nikon.571

Cela dit, il convient de préciser que le conseil de la concurrence français applique à la fois les
dispositions du droit national et du droit communautaire et que sa compétence n’est que
subsidiaire puisqu’il doit cesser toute poursuite si la commission européenne décide
d’intervenir dans la même affaire572.

Après avoir étudié les conditions et les formes d’exemption de la distribution sélective, il
convient de démontrer les procédures à suivre par le promoteur d’un réseau sélectif pour faire
exonérer son accord.

2) Les procéduresd‘exemption :

Dans l'hypothèse où le fournisseur décide toutefois de mettre en œuvre des restrictions de


concurrence sans courir le risque d'être exposés aux sanctions mentionnées ci-dessus, il est
impérieux, dans ce cas, d'introduire préalablement à la mise en œuvre de l’accord de
distribution sélective une procédure formelle de notification aux autorités de la concurrence
concernées en vue de la délivrance d'une exemption individuelle573

a) la notification préalable

570
M. MALAURIE-VIGNAL, op. cit, p. 214

571
Com. 14 nov, 1995, Sté Nikon, Contrats, conc., consom. 1996, n ° 7, obs. L. Vogel.

572
A. PIROVANO, L’expansion de l’ordre concurrentiel dans les pays de l’Union européenne, in L’Algérie en
mutation, les instruments juridiques de passage à l’économie de marché, Sous la direction de R. CHARVIN et A.
GUESMI, L’Harmattan, 2001, p. 129.

573
Rappelons qu’une exemption individuelle peut être accordée si les entreprises parties à l'accord de
distribution sélective peuvent démontrer l'existence de gains d'efficience pour la distribution des produits et
exposer les raisons pour lesquelles leur système de distribution sélective est susceptible d'entraîner des
avantages pour les consommateurs, en dépit du fait que l'accord ne bénéficie pas d'une exemption par
catégorie.

163
En France et Jusqu’en 2002, tout accord devait être notifié en vue d’obtenir une décision
d’attestation négative ou d’exemption. Une fois notifié et faisant l’objet d’une attestation
négative, un accord de distribution sélective qui comportait une entente bénéficiait d’une
validité provisoire à l’égard de l’article 82 du traité de Rome574.

Une question se pose toutefois. N’y t’il pas un risque pour l’opérateur économique à ce que la
validité de son réseau de distribution sélective soit contestée à chaque refus d’agrément
opposé à un distributeur ?

Pour conforter la sécurité juridique des producteurs et diminuer le nombre de notifications, la


réforme des accords verticaux survenue en Europe en 1999 a l’avantage d’être simple 575et
conduit, d’une part, à étendre le champ des exemptions automatique par le critère des 30% de
part de marché et, d’autre part, à limiter les notifications par le principe de la validité ab
initiodes accords qui remplissent les conditions de l’article 81§ 3.576

Dans la même optique, le règlement n° 1/2003 relatif à la mise en œuvre des articles 81 et 82
supprime le caractère obligatoire de la notification préalable et fait rétroagir le bénéfice de
l’exemption à la date de conclusion de l’accord visé.577

574
La notification devrait le cas échéant être effectuée soit auprès de la Commission soit auprès du Conseil de
la concurrence et ce, en fonction de la définition du marché et de l'étendue de la restriction de concurrence :
- Si la restriction de concurrence produit des effets entre états membres, la notification doit être effectuée à la
Commission (Article 81 du Traité de Rome);

- Si la restriction de concurrence produit des effets sur lemarché français ou une partie substantielle de celui-
ci, la notification doit être effectuée au Conseil de la concurrence (Article 420-2 du code de commerce
français).

575
Avec le règlement n ° 2790/1999, la Commission européenne substitue un texte unique à trois règlements
distincts (règlement 83/83 relatif à la distribution exclusive; 84/83 relatif à l'achat exclusif ; 4087/88 relatif à la
franchise). Elle étend l'exemption par catégorie à des domaines jusque là non couverts, puisqu'elle s'applique
désormais à la distribution sélective. La simplification a aussi été réalisée grâce à la diminution du nombre des
articles. Sous le régime ancien, les règlements relatifs à la distribution exclusive, à l’achat exclusif et la franchise
comportaient respectivement 10, 19 et 9 articles, soit au total 38 articles; le règlement n ° 2790/1999 qui
couvre, de surcroît, la distribution sélective, n'en compte plus que 13. Grâce à cet effet de dénominateur
commun basé sur l’importance de la part de marché (30%) et l’absence de restriction caractérisée, le
règlement unique réalise donc une véritable simplification.

576
Règl. CE n° 2790 /1999, 22déc 1999, Code Lamy droit économique 2002.

577
« Ces dispositions constituent un premier pas vers la décentralisation, puisque dans la réforme générale de
la mise en oeuvre des articles 81 et 82, la Commission souhaiterait également accorder aux autorités
164
Le législateur français s’est inspiré du droit communautaire et a mis en place des décrets
d’exemption par catégories grâce auxquels certaines catégories d’accords sont présumées
remplir la condition de progrès économique. En effet, l’article L. 420-4 du code de commerce,
habilite les autorités administratives (ministre chargé de la concurrence, par voie de décret,
pris après avis conforme du conseil de la concurrence) à exonérer des articles L. 420-1 et
L.420-2 certaines catégories d’accords ayant pour objet d’améliorer la gestion des entreprises
moyennes et petites578.

En l’absence de décret d’exemption, il revient à l’auteur de la distribution sélective de prouver


que cette dernière comporte des avantages économiques et que ces avantages sont suffisants
pour compenser les incidences sur la concurrence. Pour déterminer l’applicabilité ou non de
l’article L.420-1 du code de commerce français, le conseil de la concurrence dresse un bilan
économique des avantages et des inconvénients de l’entente ou de l’abus de domination. Ce
bilan devra alors révéler un progrès économique tangible (c'est-à-dire que la pratique de la
distribution sélective doit avoir des effets réels positifs et suffisants) pour justifier l’entrave à
la concurrence.

Cependant, Lorsqu’un accord de distribution sélective est susceptible d'affecter le commerce


entre Etats membres, les juridictions françaises doivent appliquer les articles 81 et 82 du
Traité de Rome.579 La notion d’affectation du commerce intra-communautaire a fait l’objet de
la communication n°2004/C 101/07 de la Commission européenne580.

Afin d'assurer une application cohérente du droit communautaire de la concurrence, le


règlement 1/2003 pose le principe de l'application obligatoire du droit communautaire et
prévoit les règles de conflit en cas d'application parallèle du droit national français et du droit
européen de la concurrence.

nationales la possibilité d'exempter. », Sylvaine Poillot-Peruzzetto, « la modification des règles de procédure et


le projet de règlement d'exemption » RTD. com 2000, p. 252.

578
M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n°80.

579
Art. 3§1 du règlement (CE) n° 1/2003 du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de
concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité de Rome.
580
Communication de la commission européenne, Lignes directrices relatives à la notion d'affectation du
commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité de Rome, Journal officiel de l’Union européenne du 27.4.
2004 n° C 101/81.

165
Le règlement n°17/62 du 6 février 1962 applicable avant le 1er mai 2004 prévoyait une
compétence exclusive de la Commission européenne pour accorder ou retirer une exemption
individuelle et tant qu'il existait un règlement d'exemption par catégorie, les organes
nationaux pouvaient constater qu'un accord était exempté. En revanche, le Conseil de la
concurrence pouvait depuis 1992 également imposer des sanctions (amendes) en vertu des
dispositions codifiées depuis dans l'article L. 470-6 du code de commerce, les amendes étant,
dans une procédure de concurrence, à distinguer des dommages et intérêts tels qu'accordés
devant les juridictions581.

Par ailleurs, la compétence des juges nationaux pour appliquer les articles 81 et 82 n'était pas
jusqu'à présent totale puisqu'ils pouvaient constater l'illégalité d'une entente au regard de
l'article 81 paragraphe 1, mais ils n'avaient pas reçu compétence générale pour appliquer
l'article 81 paragraphe3.

Le règlement n° 1-2003 (article 3) modifie l'articulation des compétences nationales et


communautaires et investit désormais les juridictions françaises d’une application pleine des
articles 81 et 82 du Traité au profit d'une décentralisation. Le plaignant n'encourt ainsi plus le
risque d'une suspension de procédure par une notification d'accord auprès de la Commission
européenne. Aux termes de l'article 6 du même règlement, plus qu'une possibilité, cette
application du droit communautaire de la concurrence est une obligation lorsque les pratiques
concurrentielles affectent le commerce intracommunautaire582.

Ainsi, lorsque des accords de distribution sélective affectent à la fois le commerce national et
intracommunautaire, la Commission et les juridictions françaises peuvent être amenées à
appliquer parallèlement les articles 81 et 82 du Traité et le droit français, ce qui rend leur
articulation nécessaire, à condition d’appliquer le principe de la primauté du droit
communautaire583.

Il ressort donc de l’évolution du système de procédures d’exemption, que le législateur


français a opté, sous l’influence du droit communautaire, pour le contrôle à posteriori des

581
F. JENNY, Droit européen de la concurrence et efficience économique, Revue d'économie industrielle, Année
1993, Volume 63, Numéro 1, p. 193 – 206.

582
Sur ce point V ; « le droit de la concurrence ». Rapport du Congrès National des Tribunaux de Commerce
Bordeaux, le 19 novembre 2004 par Jean Morin. cgtribc.pagesperso-orange.fr

583
J. B, BLAISE ET L. IDOT, « concurrence » ,RTD eur, chron., oct-déc 2004, n°4, p. 687, pt 44

166
accords de distribution sélective. Contrairement, le législateur algérien impose l’attestation
négative aux opérateurs économiques et appliquent de ce fait le système de contrôle à priori.

Le droit algérien de la concurrence a intégré par l’ordonnance n° 03-03 une nouvelle


disposition qui consacre une mesure préventive, à travers l’attestation négative. En effet, en
application de cette nouvelle procédure, les entreprises dont les comportements sont
susceptibles d’être non conformes aux règles du droit de la concurrence, peuvent demander au
conseil de la concurrence de vérifier si les pratiques ou accords qu’elles souhaitent mettre en
œuvre peuvent être considérés comme compatibles avec la loi de la concurrence et bénéficier
de l’attestation négative. Cette nouvelle disposition instituée par le législateur algérien vise à
amoindrir l’aspect répressif de l’ordonnance 95-06 et à rendre ce nouveau texte plus pratique
afin de favoriser son développement au niveau de la sphère commerciale et sa réelle
application sur le terrain par les agents économiques.

En effet, l’ancienne ordonnance ne contenait pas de mesures de rachat des pratiques


restrictives en les frappant de prohibition per se à l’article 6 pour les ententes illicites et
l’article 7 pour les pratiques d’abus de position dominante.

Depuis la modification de 2003, le traitement des pratiques anticoncurrentielles s’exerce dans


des conditions et selon des critères qui sont presque identiques à ceux adoptés par
l’ordonnance française de 1986, tant au niveau des conditions de prohibition qu’au niveau des
critères et procédures d’exonération. Ainsi, en application de l’article 8 de l’ordonnance n°
03-03, est promulgué le décret exécutif n°05-175 du 15 mai 2005 fixant les modalités
d’obtention de l’attestation négative relative aux ententes et abus de position dominante584.

Aussi, ce texte d’application comporte en annexe, l’imprimé de demande d’obtention de


l’attestation négative (identités du demandeur et des autres parties concernées ainsi que l’objet
de la demande) et la fiche de renseignements à joindre à la demande (données relatives à
l’entreprise, au marché concerné et aux motifs de la demande).

Le législateur algérien définit l’attestation négative à l’article 02 du décret exécutif en


précisant qu’elle est délivrée par le conseil de la concurrence, sur demande des entreprises

584
Décret exécutif n° 05-175 du 3 Rabie Ethani 1426 correspondant au 12 Mai 2005 fixant les modalités
d'obtention de l'attestation négative relative aux ententes et à la position dominante sur le marché J.O.R.A n°
35 du 18 Mai 2005, p. 03.

167
intéressées, par laquelle le conseil constate qu’il n’y a pas lieu, pour lui, d’intervenir à l’égard
des pratiques prévues aux articles 6 et 7 de l’ordonnance relative à la concurrence.

Le décret exécutif a prévu en outre, que le dossier d’obtention d’attestation négative dont, il
fixe les pièces constitutives à l’article 4, soit déposé contre accusé de réception au secrétariat
générale du conseil de la concurrence ou transmis par envoi recommandé par l’entreprise ou
les entreprises concernées ou leurs représentants qui doivent présenter un mandat écrit
attestant des pouvoirs de représentation qui leur sont conférés. Prévoyant aussi le cas des
entreprises étrangères, le législateur algérien leur fait obligation d’indiquer une adresse en
Algérie. Après le dépôt du dossier en bonne et due forme, la demande reçoit un numéro
d’inscription porté sur l’accusé de réception.

En cours d’analyse de la demande, le conseil de la concurrence peut, à travers le rapporteur


désigné pour l’instruction du dossier, demander aux entreprises concernées ou à leurs
représentants mandatés, la communication de renseignements ou de documents
complémentaires qu’il juge nécessaires. Par ailleurs, le décret accorde aux demandeurs
d’attestation négative le droit de demander à ce que certaines informations ou certains
documents fournis dans le dossier soient couvert par le secret des affaires et ce, en portant la
mention « secret d’affaires ».

Dans un système de contrôle a priori on oblige les opérateurs économiques à notifier à


l’autorité compétente les contrats, les accords, les projets d’opérations de concentration qui
sont éventuellement de nature à tomber sous le coup des interdictions qu’elles édictent. La
notification peut être rendue obligatoire ou rester facultative. L’autorité saisie peut soit
interdire l’accord, soit considérer qu’il ne tombe pas sous le coup des prohibitions (attestation
négative), soit l’autoriser après modification éventuelle si elle estime qu’il est susceptible de
contribuer au progrès économique (exemption).

On peut même imaginer que cette autorité définira à l’avance par un règlement général les
conditions détaillées auxquelles elle accepte de considérer que telle catégorie d’actes ou
d’opérations présentent un bilan favorable (exemption par catégorie). Mais ce système de
contrôle a priori doit obligatoirement être complété d’un système de contrôle a posteriori. Que
la notification soit obligatoire ou pas, il peut naturellement arriver qu’elle ne soit pas faite.
Dans cette hypothèse, il faudra bien que l’autorité compétente puisse être saisie du dossier

168
pour constater après coup que les accords, opérations ou projets qui ne lui ont pas été notifiés
tombent sous le coup de la prohibition légale (contrôle plus répressif).

Dans un système de contrôle a posteriori, les opérateurs sont laissés libres d’agir à leur guise
sur le marché ou de réaliser les opérations structurelles qui leur conviennent sous leur
responsabilité. Après coup, l’autorité compétente, saisie par ceux qui ont à se plaindre de
l’inobservation des règles de concurrence ou se saisissant d’office, peut être amenée à
examiner ces agissements et le cas échéant à les interdire et à ordonner la remise des choses
en leur état antérieur ou à les justifier en raison de leur contribution au progrès économique :
il ne s’agit pas alors d’exemption mais de rachat585.

b) les autoritésconcernées :

Au sens de l’ordonnance n° 03-03 modifiée et complétée, le conseil de la concurrence est seul


habilité à délivrer des attestations négative pour exonérer les pratiques anticoncurrentielles de
l’application des articles 6 et 7 relatifs aux en tentes et abus de position dominante. En effet,
l’article 9 alinéa 3 vient confirmer la compétence exclusive du conseil de la concurrence en
matière d’exonération prévue par l’article 8.

En France, Le conseil de la concurrence qui a été institué par l’ordonnance de 1986, est
l’héritier de la commission de la concurrence qui, elle même, avait remplacé, en 1977, la
commission technique des ententes et des positions dominantes qui avait été mise en place en
1954.

Un peu plus de huit ans après l’ordonnance française de 1986 relative à la liberté des prix et
de la concurrence, le législateur algérien par une ordonnance en date du 25 janvier 1995, a
créé un conseil de la concurrence chargé de la promotion et de la protection de la
concurrence et rattaché aux services de la présidence de la république. 586Placé sous la houlette
du chef du gouvernement par l’ordonnance 03-03, le conseil de la concurrence est composé de
9 membres permanents alors que sous l’empire de l’ancienne ordonnance, cette autorité était
composée de 12 membres dont cinq seulement étaient permanents.

585
Y. SERRA, Le droit français de la concurrence, Dalloz 1993, p. 93.

586
Art. 2 de l’ordonnance n° 95-06 du 23 chaâbane 1415 correspondant au 25 janvier 1995 relative à la
concurrence ; Décret présidentiel n° 96-44 du 17 janvier 1996 fixant le règlement intérieur du Conseil de la
concurrence.

169
En outre, l’ordonnance de 2003 confirme que Le Conseil de la concurrence est une autorité
administrative autonome, jouissant de la personnalité juridique et de l’autonomie financière ;
il a un rôle consultatif et contentieux ; il peut coopérer et échanger des informations avec les
autorités de régulation sectorielles ainsi qu’avec les autorités étrangères homologues 587.

Compte tenu de la loi n° 08-12 du 25 juin 2008 modifiant et complétant l’ordonnance relative
à la concurrence, Les principales réformes portent essentiellement sur le placement du Conseil
de la concurrence auprès du ministre du Commerce et ramène le nombre de ses composants à
12 membres permanents, répartis dans trois (03) catégories, à savoir :

a) Six (06) experts dans les domaines juridiques et économiques, ayant des compétences en
matière de concurrence, de distribution, de consommation et de propriété intellectuelle ;

b) Quatre (04) professionnels ayant une expérience dans les secteurs de la production, de la
distribution, de l'artisanat, des services et des professions libérales ;

c) Deux (02) représentants des associations de protection des consommateurs.

le nouveau dispositif apporte également des enrichissements en ce qui concerne les


attributions, l’organisation et le fonctionnement du Conseil de la concurrence. Ainsi, par
exemple, son champ de compétence s’est élargi au domaine des marchés publics, qui
constitue une source potentielle de pratiques anticoncurrentielles588.

Cet amendement apporté à la composante du conseil vise à renforcer son efficacité et son
homogénéité dans la mise en œuvre de ses prérogatives de régulation du marché algérien.
Créé à cette fin, le conseil de la concurrence est appelé à occuper une position importante au
sein des institutions de l’Etat algérien.

Cependant, tant en droit français qu’en droit algérien, le Conseil de la concurrence est un
organe quasi-judiciaire qui ne peut pas intervenir pour le contrôle des fautes civiles de
discrimination, subordination de vente, ni pour celui de pratiques restrictives constitutives
d’infractions pénales tels les prix imposés ou la revente à perte, à moins que de telles

587
M. C. BELMIHOUB, "Nouvelles régulations économiques dans les services publics de réseaux : Fonctions et
institutions", Revue IDARA, n° 2, 2004, p. 9.

588
R. ZOUAÏMIA, "Le Conseil de la concurrence et la régulation des marchés en droit algérien", Revue IDARA, n°
36, 2008, pp. 7-45.

170
pratiques apparaissent comme la manifestation d’entente ou d’abus de domination. De même,
le Conseil est incompétent pour prononcer la nullité des stipulations contractuelles révélant
ces pratiques589.

En outre, le Conseil dispose d’une compétence générale et n’est pas compétent si seules sont
en jeu les relations contractuelles entre un fournisseur et un de ses distributeurs agréés, et si
les pratiques dont il est saisi ne portent pas atteinte au fonctionnement du marché. Les deux
législateurs ont néanmoins donné au président du conseil de la concurrence la possibilité de
saisir la juridiction compétente, lorsqu’à l’occasion d’affaires relevant de ses compétences, il
constate une pratique discriminatoire, une vente subordonnée, une menace de rupture abusive
des relations commerciales, ou une participation à la violation d’un réseau de distribution
sélective590.

589
R. POESY, le rôle du conseil de la concurrence et du juge judiciaire en Algérie et en France en droit des
pratiques anticoncurrentielles, aspects procéduraux, in L’Algérie en mutation, les instruments juridiques de
passage à l’économie de marché, Sous la direction de R. CHARVIN et A. GUESMI, L’Harmattan, 2001, p. 161.

590
Ibid

171
Chapitre 02 : l’efficacité de la distribution sélective

Longtemps suspectés de constituer des restrictions verticales au libre jeu de la concurrence,


les contrats de distribution sélective ont été progressivement admis par les autorités
judiciaires et administratives en grande partie grâce à l’efficacité prouvée dans le domaine de
la distribution des produits de luxe et de haute technicité. A travers cette efficacité, les
avantages de la distribution sélective en termes de garantie, de sécurité et d’information
donnés aux consommateurs sont, depuis longtemps, avérés. Elle apparaît, également, par les
moyens que les réseaux utilisent, comme un outil efficace pour le progrès économique.

Cependant, un circuit de distribution sélective n’a d’efficacité que si son titulaire dispose de
moyens juridiques pour protéger l’étanchéité du réseau contre toute violation par des tiers
hors réseau.

Ce chapitre traitera donc, premièrement, des avantages de la distribution sélective (section


01), et deuxièmement, de la protection prévue par la loi à l’étanchéité du réseau (section 02).

Section 01 : les avantages de la distribution sélective

Rechercher les avantages procurés par la distribution sélective revient, dans une certaine
mesure, à prendre en considération l’intérêt réservé au consommateur (paragraphe 01) ainsi
que la contribution au progrès économique (paragraphe 02).

172
Paragraphe 01 : l’intérêt du consommateur591

Compte tenu de la nature spécifique des produits, la finalité d’un système de distribution
sélective doit être « de garantir une vente dans de bonne conditions au consommateur ».592

A cet effet, et en vue de développer, il convient de préciser que l’intérêt du consommateur


réside dans la qualité du service (A) et la protection du consommateur (B).

A) la qualité du service :

Il existe d’autres réseaux de distribution des produits de grande marque notamment la


distribution exclusive et la franchise593ou l’octroi d’une licence de marque.594Pourtant, le
mode de la distribution sélective est le plus utilisé par les propriétaires de marques de luxe en
raison de sa spécificité et de son adéquation aux attentes des consommateurs. 595 L’exigence

591
Dans bien des cas, il est difficile de distinguer le consommateur du professionnel. Or, cette distinction est
bien nécessaire à l’application des règles de la protection du consommateur. Sur ce point, le législateur
algérien a tranché en assimilant au consommateur « toute personne physique ou morale qui acquiert, à titre
onéreux ou gratuit, un bien ou un service destiné à une utilisation finale, pour son besoin propre ou pour le
besoin d’une autre personne ou d’un animal dont il a la charge ».

592
Cass-crim : arrêts dits « duo » (aff lanvin, Nina Richi, Rocho) 3Nov 1982, Gaz. Pal. 1982, 2, 658.

593
F. FOURNIER, « L'équilibre des réseaux de franchise de parfumerie de luxe », dans Recueil Dalloz, 2002,
p. 793.

594
F. ZERAOUI-SALAH, Traité de droit commercial algérien : droits de la propriété industrielle et commerciale –
droits de la propriété littéraire et artistique. Ed. Ibn Khaldoun 2006, p. 252.

595
Rapp. Du conseil économique et social (CES), La filiale luxe, www.La Doc.fr 1996, p. 95.

173
de critères qualitatifs et quantitatifs, soutenue par une partie de la doctrine française,596est
justifiée devant les tribunaux, en cas de conflits, par la nature du produits et la qualité du
service nécessaire et destiné à satisfaire une clientèle de plus en plus exigeante et ayant un
gout raffiné.597

Compte tenu de l’obligation faite par la loi de veiller à l’intérêt du consommateur, il est
nécessaire que le distributeur agrée soit qualifié pour pouvoir conseiller utilement le
consommateur, réputé être profane et inexpérimenté.598

Se conformant aux critères qualitatifs, le distributeur doit, également, permettre au


consommateur de bénéficier en permanence d’un assortiment complet et varié puisqu’il n’est
pas débiteur d’une obligation d’exclusivité à l’encontre du fournisseur. 599En effet, le
revendeur agréé s’engage à posséder la totalité ou la majeure partie de la gamme des produits
et d’acquérir tout nouveau produit afin de satisfaire le client dès que la demande lui est faite.
Les articles de luxe s’achètent souvent sur un coup de tête. 600Manifestement, l’avantage
essentiel du mode de la distribution sélective réside dans la qualité du service rendu par les
membres du réseau à la clientèle, à une certaine clientèle qui, en acquérant un produit
prestigieux, veut en même temps entrer dans le monde du luxe.601

Les avantages de ce mode de distribution sont assurés aux consommateurs même après la
vente du produit. En effet, la nature du produit exige des services d’installations et de service
après vente assurés par le distributeur agrée aux clients.602Soucieux de préserver son image de
marque et d’accroitre sa clientèle, le fabricant est en droit d’imposer aux membres de son

596
M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n°96 ;
Lamy droit économique 2003, n°4844 ; R. Kovar, sélection quantitative : jusqu’à quel point faut-il ; la
jurisprudence actuelle et ses limites : RJDA 1995, p. 311.

597
N.CUSACQ, Le luxe et le droit, RTD com 2002, p. 605.

598
Déc. n°84/233/CEE de la commission, 18 avr. 1984, IBM Personnal computer, JOCE mai 1984, n°L 118, p. 4.

599
GAST, OLIVIER ; GRILLAULT LAROCHE, HAYETTE, La distribution sélective et la franchise, JCP E, n° 50,
14/12/2000, pp. 36-46

600
M. ZOÏA, op. cit.

601
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p. 26.

602
Colmar, 10 février 1983, Rev. Conc. Consomm. 1983 n° 24, P. 31.

174
réseau de disposer d’un atelier doté d’un personnel spécialisé en vue d’effectuer un service
après vente de qualité aux consommateurs.603

Le droit algérien de la protection du consommateur ne prévoyait pas à la loi n° 89-02 le


service après vente au profit du consommateur et se limitait à imposer l’obligation de garantie
aux fabricants au titre de l’article 06, une obligation qui pouvait s’étendre aux prestations de
service.604La loi n° 09-03, remplaçant la loi n° 89-02 sur la protection du consommateur,
intervient notamment pour entériner cette obligation de garantie et de service après vente
comme une nouveauté qui a pour but de réguler, en particulier dans le secteur de l’automobile
et des services.605

Il apparaît donc que la qualité du service est intrinsèquement liée aux réseaux de distribution
sélective. Ceci a été d’ailleurs confirmé par la commission européenne qui déclare que les
mentions publicitaires « à emporter » ou « libre service » peuvent licitement être interdites par
un fabricant de matériel haute fidélité à ses distributeurs, car de telles offres sous entendent
que ces derniers renoncent à fournir les conseils et les prestations de service auxquels ils sont
tenus par leur contrat de distribution sélective.606

B) la protection du consommateur

Pour acquérir des biens ou se procurer des services, les consommateurs entrent en relation
avec des personnes, physiques ou morales, qui font profession de vendre des biens ou de
fournir des services.607Or cette relation et évidemment déséquilibrée.608 Le législateur entend,

603
CA Paris, 10 janv. 1991, RJDA 1991, n° 3, n° 223.

604
Art. 06 de la loi n° 89-02 relative aux règles de protection du consommateur modifiée et complétée.

605
AMNAY IDIR, « sur fond de crise mondiale, la protection du consommateur comme priorité nationale ». El
Watan 24 mars 2010.

606
Déc. n°85/4004/CEE de la commission, 10 juill 1985, Grundig. JOCE 30 août 1985, n° L 233.

607
G. CAS, D. FERRIER, Traité de droit de la consommation, PUF 1986, p. 2.

608 ème
J. CALAIS-AULOY, F. STEINMETZ, Droit de la consommation, 4 éd Dalloz 1996, p. 2.

175
par des règles d’ordre public609, protéger le plus faible contre le plus puissant, le profane
contre le mieux informé.610

Pour ce qui est de la notion de consommateur en droit algérien, un auteur avait appelé à
élargir cette notion, notamment en matière de sécurité et en faire bénéficier toute personne
quelle que soit sa qualité, susceptible de subir un préjudice du fait des produits ou services
mis sur le marché611. En effet, à l’inverse du législateur français qui accorde la même
protection aux professionnels, le législateur algérienexclu du domaine des consommateurs, le
professionnel agissant dans son activité c'est-à-dire dans le processus de mise à la
consommation qu’il soit producteur, fabricant, intermédiaire, artisan, commerçant,
importateur, distributeur612.

A côté de la qualité de service et le bien être de la clientèle, la distribution sélective présente


l’avantage d’une meilleure protection pour le consommateur à travers la garantie, la sécurité
et l’information prodiguée par un personnel compétent613. En effet, à cause de la cherté des
produits de luxe tels les parfums et le caractère compliqué des produits de haute technicité tel
le matériel hi fi, le consommateur bénéficie d’une garantie des vices cachés dont le produit ou
le service pourraient être entachés.614

609
PH. MALAURIE, La notion d'ordre public économique, Rev. conc. conso., n° 83, 1995, p. 48 ; J. CALAIS-AULOY,
L’influence du droit de la consommation sur le droit civil des contrats, RTD Civ. 1994, p.239 ; J. Calais-Auloy,
L’influence du droit de la consommation sur le droit des contrats, RTD Com.1998 , p.115

610
J. BEAUCHARD, Droit de la concurrence et de la consommation, PUF 1996, p. 239.

611
« C’est pourquoi nous proposons une nouvelle rédaction de l’article 02 de la loi du 7 février 1989 comme
suit « tout produit, bien ou service de toute nature doit présenter la sécurité à laquelle toute personne peut
légitimement s’attendre quant à sa personne et ses biens ». H. DENNOUNI, « De l’étendue de l’obligation de
sécurité en droit algérien » in B. Saintourens et D. Zennaki, L’obligation de sécurité, Presse Universitaires de
Bordeaux, 2003, p. 9.

612
D. ZENNAKI, Droit de la distribution, cours de magistère, Faculté de droit, Université d’Oran, 2010/2011.

613
Y. DITRICH ET A.MENAIS, La distribution sélective à l’épreuve du commerce électronique. , les cahiers Lamy
droit de l’informatique et des réseaux, n° 114 mai 1999.

614
L. RIEBEN, La validité de la distribution sélective et exclusive en droit communautaire américain et suisse, éd
Droz, Genève 2000, p. 95.

176
Ainsi, le consommateur est couvert par une garantie conventionnelle qui lui permet d’avoir
les pièces de replacement et de remettre en état le produit défectueux.615Mais, bien entendu,
l’exclusion de la garantie contractuelle ne saurait faire obstacle à la mise en œuvre de la
garantie légale que tout acheteur peut invoquer.616Néanmoins, la clause limitant la garantie
d’un fabricant aux seuls produits acquis par les consommateurs auprès de ses distributeurs
agrées a été reconnue licite par la cour de cassation française.617

Lors de la dernière modification de la loi n° 89-02618, le législateur algérien a donné une


définition au terme « garantie »619et a, de façon explicite et à l’instar de son homologue
français, insisté sur le bénéfice du consommateur de la garantie légale prévue à l’article
13620conjuguée à une éventuelle garantie conventionnelle accordée par l’intervenant, à titre
onéreux ou gratuit.621

Le droit algérien considère la garantie comme un droit fondamental du consommateur et un


élément essentiel devant figurer dans les contrats conclus entre l’agent économique et le
consommateur. Ainsi, toute restriction de cet élément est considérée comme une clause
abusive au détriment du consommateur.622

Le fait que la distribution sélective suppose l’étanchéité du réseau ainsi que l’interdiction que
le fournisseur s’impose de ne pas vendre à des commerçants non agrée permet de garantir

615
PH. LE TOURNEAU, la responsabilité des vendeurs et fabricants,éd.Dalloz, Paris, 2001, p. 220.

616
Rev. Marché commun 1995, n° 384, p. 46, obs. Vogel L.

617
Cass. Com., 18 oct. 1994, n° 92-21.187 et n° 93-10.219, jointes, Bull. civ ΙV n° 310, p. 251, D. 1986, jur., p.
311, note Krimmer.

618
La loi n° 09-03 du 25 février 2009, relative à la protection du consommateur et à la répression des fraudes,
J.O.R.A. du 08 mars 2009, n°15, p.10.

619
Garantie : lorsqu’un produit présente un défaut, l’intervenant doit, au cours d’une période déterminée,
changer ce dernier ou rembourser son prix ou le réparer ou modifier la prestation à ses frais.

620
Art. 13.- L’acquéreur de tout produit consistant en un appareil, un instrument, un véhicule, une machine, un
outil ou tout autre bien d’équipement, bénéficie de plein droit d’une garantie.

621
Art. 14 de la loi n° 09-03 précitée.

622
Décret exécutif n° 06-306 du 17 Chaâbane 1427 correspondant au 10 septembre 2006 fixant les éléments
essentiels des contrats conclus entre les agents économiques et les consommateurs et les clauses considérées
comme abusives.

177
l’origine et l’authenticité du produit pour le consommateur. Inversement, hors ce réseau, le
consommateur doit se montrer plus vigilent, sachant qu’il ne bénéficiera pas d’une garantie, ni
d’un service après vente623.

La distribution sélective est également un moyen pour le consommateur de trouver, sur le


marché, des produits et des services conformes à ce qui est annoncé et présentant le niveau de
qualité qu’il est en droit d’attendre. La sécurité est en même temps garantie, avec des
exigences de plus en plus fortes des amateurs de luxe. Dans le cas des produits touchant à la
santé et à la sécurité, comme les produits de pharmacie, les cosmétiques et les produits
d’hygiène corporelle, la garantie de l’authenticité conférée par la distribution sélective
apparaît alors comme un facteur jouant en faveur de l’intérêt du consommateur624.

Prévue, à l’origine, pour la sécurité des personnes physiques, 625l’obligation de sécurité s’est
développé et touche désormais le domaine des biens.626 A cet effet, le législateur algérien vise
aux articles 09 et 10 de la loi n° 09-03 les produits mis à la consommation627 et présente de
façon détaillée les conditions nécessaires à la santé, la sécurité et aux intérêts des
consommateurs628.

Il s’agissait d’adapter la législation algérienne à l’économie de marché. En effet, s’agissant


d’une économie libérale, la multiplicité et la complexité des produits proposés au

623
Contrefaçon et distribution sélective. ec.europa.eu.

624
Lamy droit économique, 2003, n° 4604.

625
A. VIALARD, « l’obligation de sécurité du transporteur maritime de passagers » in B. Saintourens et D.
Zennaki, L’obligation de sécurité, Presse Universitaires de Bordeaux, 2003, p. 129.

626
H. DENNOUNI, op. cit, p. 9.

627
« Alors que dans le code civil, le professionnel n’était pas sanctionné que lorsque la victime était atteinte
d’un dommage, en droit de la consommation, l’obligation de sécurité se trouve à toutes les étapes de la mise
en circulation du produit. Le législateur algérien qualifie cette mise en circulation de mise à la consommation ;
l’article 01 alinéa 02 de la loi n° 89-02 la définit « le processus de mise à la consommation du produit et/ou du
service s’étend de l’ensemble des opérations du stade de la création initiale jusqu’à l’offre finale à la
consommation ». D. ZENNAKI, « L’apport du droit de la consommation à l’obligation de sécurité en droit
algérien », Etudes à la mémoire de Christian Lapoyade-Descamps, éd. Presse Universitaire de Bordeaux. 2003,
p. 733.

628
D. ZENNAKI, vice caché et défaut de conformité, revue semestrielle du laboratoire de droit privé
fondamental OPU 2001.

178
consommateur rendent les accidents plus fréquents.629Pour une protection optimale, le
législateur algérien insiste à l’article 11 de la loi n° 09-03 sur la conformité du produit qui doit
satisfaire à l’attente légitime du consommateur. De même, l’ancien texte accordait une place
importante à la conformité du produit pendant tout le processus de sa mise à la
consommation.630

Si en cas de litige sur la conformité, il appartient au juge de trancher la question du caractère


défectueux ou non du produit, certains auteurs algériens critiquent la jurisprudence algérienne
en la matière et la considère comme « figée, car se limitant aux règles du droit
commun ».631S’agissant du droit commun, d’autres auteurs évoquent l’article 140-bis du code
civil algérien qui est copié de l’article 1386 du code civil français qui « malgré son efficacité,
est peu adapté aux réalités algériennes et que, de ce fait, il est difficile de l’appliquer ».632

Outre l’intérêt du consommateur, une distribution sélective bien maitrisée par le fabricant
permet également de protéger certains secteurs économiques particulièrement touchés par la
contrefaçon.633En 2007, les services algériens de la douane ont saisi 1,4 millions d'articles
contrefaits suite à la demande des entreprises touchées 634. Les grandes sources du marché
algérien de la contrefaçon sont la Chine, suivis, respectivement par la Turquie et les Emirats
arabes unis635.

629
F. NACEUR, « le contrôle de la sécurité des produits » in B. Saintourens et D. Zennaki, L’obligation de
sécurité, Presse Universitaires de Bordeaux, 2003, p. 49.

630
D. ZENNAKI, La qualite a-t-elle sa place en legislationalgerienne? Problematique en droit algerien de la
consommation,Symposium International : Qualité et Maintenance au Service de l’EntrepriseQUALIMA01 -
Tlemcen 2004.

631
H. DENNOUNI, op. cit.

632
Horizons 14 mai 2010, quotidien national d’information, « Séminaire national sur la responsabilité du
producteur : le consommateur ignore ses droits. » par M. KEDADER, intervention du Dr K. CHEHIDA.

633
D. ALLERES, la propriété intellectuelle dans l’univers du luxe, La revue des réseaux 1998, volume 16, n° 88 , p.
139.

634 634
En se basant sur l’article 258 du code des douanes , la Cour suprême algérienne fait obligation à la
direction des douanes de présenter et de prouver les éléments ayant conduit à l’évaluation réelle de la
marchandise saisie. Arrêt de la Cour suprême algérienne n° 311902 du 22/03/2006. www. Coursuprême. dz.

635
MOUMENE BELGHOUL, La lutte contre la contrefaçon en Algérie. www.algerie-monde.com

179
Sur la quantité saisie, 42% représentent les pièces détachées, "un marché de grande envergure
au vu de la demande croissante". Le représentant des douanes souligne que les produits
cosmétiques et d’hygiène corporelle, l'électroménager, les appareils informatiques et le tabac
sont considérablement touchés par la contrefaçon et la circulation illicite des produits
contrefaits représente un réel danger pour la santé et la sécurité des utilisateurs et
consommateurs algériens636.

A condition d’être bien maitrisé, un système de distribution sélective est un moyen efficace
pour protéger certains secteurs économiques en Algérie. Ainsi, certaines industries naissantes
en Algérie comme le pharmaceutique ou l’automobile ont besoin de réseaux étanches et de
points de vente agréés et contrôlés pour garantir aux consommateurs des produits et des
pièces de rechange sans danger. Ce système facilite également le travail des pouvoirs publics
dans la lutte anti-contrefaçon par une identification facile des fournisseurs et l’ensemble des
distributeurs formant les réseaux.

En effet, pour bénéficier de l’intervention des pouvoirs publics et faire cesser la vente des
produits contrefaits, le fabricant doit apporter la preuve de l’existence et de la licéité de son
réseau. Grâce à ces informations communiquées lors de la demande d’intervention, les
services douaniers peuvent détecter rapidement les articles circulant illégalement hors d’un
réseau et affiner ainsi leur action de pistage des contrefacteurs637.

La distribution sélective présente donc l’avantage certain d’être un rempart pour préserver le
consommateur contre tous les dangers du faux en mettant à sa disposition un produit original
et des services complémentaires après vente ou avant vente.

636
« La contrefaçon en Algérie : Des pertes Estimées à 200 millions d'euros », Source : L’ACTUEL
INTERNATIONAL N° 86 décembre 2007.

637
Unifab (union des fabricants), contrefaçon et distribution sélective, projets de règlement d’exemption par
catégorie et de lignes directrices sur les restrictions verticales. ec.europa.eu

180
Paragraphe 02 : le progrès économique

Si la méthode de la distribution sélective assure un service de qualité au consommateur, elle a


également l’avantage de contribuer aux améliorations et à la promotion du progrès
économique. Cet avantage considéré comme un justificatif d’une telle commercialisation se
traduit par l’accroissement de la production et l’amélioration de la distribution d’une part (A),
ainsi que la création et le maintien de l’emploi d’autre part (B)

A) L’accroissement de la production et l’amélioration de la distribution :

En matière économique, les réseaux de distribution sélective ont la cote. Permettant de


valoriser les produits et d’améliorer les marges, ce mode de commercialisation est
actuellement mis en place par de nombreux fabricants dans le secteur des produits de luxe ou
de technologie avancée. Cependant, la distribution sélective n’est pas toujours possible. De
plus, lorsqu’elle est envisageable, elle implique des contraintes et le respect de certaines
règles de base638.

Pour assurer la validité de leurs réseaux de distribution sélective face aux règles du droit de la
concurrence, les entreprises doivent présenter des avantages objectifs, de nature à compenser
les inconvénients d’une telle restriction à la libre concurrence causée pas la pratique de la

638
JEAN -PIERRE CHAMOUX ET HENRI LEPAGE, Distribution sélective et droit de la concurrence : critique d’une
vision néoclassique,Journal des Economistes et des Etudes Humaines, vol.7 numéro 4, décembre 1996.

181
distribution sélective. Ainsi, la justification d’un réseau de distribution de produits de luxe,
dont les effets seraient apparemment anticoncurrentiels, est possible.

Par les avantages que doivent présenter les réseaux sélectifs, il faut entendre la contribution à
l’amélioration de la production et la distribution, et à la promotion du progrès technique et
économique.

Pour les fabricants, la distribution sélective est aussi un instrument de gestion de leurs réseaux
commerciaux. En effet, en limitant les points de vente, la distribution sélective évite une
multitude inutile de magasins qui accroit considérablement les frais de structure des
fabricants, les dépenses de publicité, de promotion et de formation, sans que ces
investissements puissent être rentabilisés, étant donné les faibles chiffres réalisés par un trop
grand nombre de petits détaillants639. Cette rationalisation du réseau n’est pas établit dans le
seul intérêt des fabricants. La sélectivité donne l’assurance aux distributeurs de réaliser un
certain niveau de chiffre d’affaires et donc de marge, ce qui leur permet d’investir et de
participer à la promotion de la marque.

Toutefois, l’existence d’une amélioration de la production et de la distribution ne saurait être


appréciée de manière subjective, en se limitant aux seuls avantages que retirent les partenaires
qui utilisent la distribution sélective. Il faut arriver à des avantages objectifs, sensibles et
supérieurs aux inconvénients causés par cette pratique restrictive. En d’autres termes, plus
l’entrave à la concurrence est manifeste, plus la contribution au progrès économique de celle-
ci doit être importante640.

Pour ce qui est du progrès technique et économique, la distribution sélective tend par des
procédés sophistiqués à augmenter le bien être des individus soit par accroissement, soit par
une transformation de la consommation. Pour l’industrie du luxe et de la haute technicité, la
distribution sélective est d’un enjeu capital en quête de la formation et du prélèvement de la
rente. C’est dans les magasins agréés que ce réalise l’achat, c’est à dire l’acte du
consommateur payant le produit et son image. C’est pourquoi le producteur doit veiller à ce
que le point de vente soit capable, non seulement de bien présenter le produit, d’offrir des

639
M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n°96.

640
Déc. Yves Saint Laurent, 16 déc 1991 Gaz. Pal. 1992 n° 136-137, p. 31.

182
conseils ainsi qu’un service de qualité, mais aussi de ne pas altérer les représentations
associées au produit et à la marque641.

Une distribution sans règles et non sélective est susceptible de détourner le consentement à
payer du consommateur vers d’autres produits. Dès lors, il ne peut exister de rente des
produits de luxe sans l’utilisation et la parfaite maitrise de la distribution sélective. Toutefois,
le vente des produits de luxe ne peut être rentable sans la promotion et la protection de la
marque qui confère au produit une valeur supplémentaire. En effet, pour que cette rente
existe, il faut des règles de propriété industrielle strictes ; une marque de luxe est un capital et
la propriété de ce capital doit être protégée642.

D’autre part, la faculté accordée au distributeur de commercialiser dans son magasin des
marques de luxe différentes présente l’avantage d’attirer des clients motivés par un choix
complet et libre. La liberté d’approvisionnement mettra également les producteurs de luxe en
concurrence sévère pour s’imposer auprès des amateurs de luxe643.

Les textes du droit européen précisent clairement les effets positifs qu’une restriction verticale
doit apporter et ce de manière cumulative. Ainsi, un accord de distribution sélective doit
entrainer une amélioration de la distribution, permettre au fournisseur de planifier la vente de
ses produits de manière plus exacte et plus longtemps à l’avance, assurer au distributeur agréé
un approvisionnement régulier, limiter les risques du marché, réduire les coûts de distribution,
faciliter la promotion de la vente des produits, stimuler la concurrence, réserver aux
distributeurs agréés membres du réseau une partie équitable du profit en les faisant bénéficier
d’un approvisionnement régulier et qu’ils peuvent se procurer plus vite et plus aisément les
produits contractuels.644

De ce fait la distribution sélective aboutit, par ces méthodes, à une productivité dynamique et
concurrentielle dans le secteur du luxe où le fabricant doit toujours élaborer des produits de

641
F. FOURNIER, « L'équilibre des réseaux de franchise de parfumerie de luxe », dans Recueil Dalloz, 2002,
p. 793.

642
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p. 131.

643
M. NESSEMBAUM, « l’analyse économique de la distribution sélective », RJDA, Francis Lefebvre, 1995, n° 4,
p. 316.

644
Communication de la Commission, du 13 octobre 2000: lignes directrices sur les restrictions verticales
(COM(2000/C 291/01). Journal officiel C291 du 13.10.2000). europa.eu

183
qualité. En revanche, la baisse de la qualité réduit à terme le consentement du consommateur
à payer pour les articles de luxe.

Les maisons de luxe vont connaître des croissances importantes au cours des années 80,
phénomène amplifié dans les années 90. La difficulté est de savoir jusqu’à quel point les
maisons de luxe peuvent développer de nouveaux produits sans détériorer leur image de luxe
et leur aura tant il faut allier la croissance et le développement de la marque avec le maintien
des caractères de luxe645.

La distribution sélective est enfin un moyen de renforcer la position des fabricants nationaux
de produits de luxe sur les marchés étrangers. En effet, pour le plus grand bien de l’économie
nationale, une grande partie du chiffre d’affaires des marques de luxe se réalise à
l’exportation, notamment vers les pays riches dotés d’une importante puissance d’achat.

Pour les articles de luxe européen, les Etats-Unis et le Japon restent des marchés très actifs,
assurant toujours les ventes les plus importantes d’Hermès, de Vuitton ou de Dior. De plus, la
Russie postsoviétique compte aujourd’hui bon nombre de nouveaux riches qui aiment les
articles de luxe tels VacheronCanstantin, Cartier ou Tissot. D’autres marchés émergents se
révèlent tout aussi avides de montres suisses. Après des années de barrières douanières, l’Inde
se met à l’heure helvétique. Quant à la Chine, elle se prend d’une véritable passion pour
Swatch aussi bien que pour Oméga ou Rado646.

Au demeurant, l’engouement des consommateurs pour une marque de luxe est toujours
précaire d’où la nécessité de l ‘entretenir et de l’internationaliser. A cette fin, les fabricants de
luxe doivent investir dans la création de réseaux sélectifs composés d’agents spécialistes et
capables de bien représenter la marque de façon à maintenir et promouvoir sa notoriété auprès
des consommateurs647.

Cela dit, le secteur du luxe, en raison de ses caractéristiques propres, se montre


particulièrement vulnérable aux aléas du marché liés aux événements politiques et
économiques. Ainsi, les attentas du 11 septembre, suivis par la guerre en Irak ont provoqué

645 ème
J. CASTAREDE, Le luxe, Que sais-je ? , PUF 2003, 3 édition, p.125.

646
BERNARD FORNAS, « le luxe à un avenir fabuleux ». L’express du 13 avril 2006. www.lexpress.fr

647
JEAN -PIERRE CHAMOUX ET HENRI LEPAGE, op. cit.

184
une période de tension politique internationale ayant eu des répercussions économiques sur le
domaine des échanges internationaux. En effet, les USA constituant une des plus importantes
destinations des exportations de produits de luxe européens, l’attitude adoptée par la France
lors du conflit en Irak, a certainement influé sur l’image véhiculée par les produits provenant
des entreprises françaises. A la suite de cette position contraire aux intérêts américains, 39%
des consommateurs américains ont boycotté les produits français648.

Dans un autre domaine, l’épidémie de SRAS649 a pu avoir des répercussions directes sur les
destinations touristiques et sur les échanges commerciaux avec l’Asie650.

Conçus de matériaux nobles et rares, les produits de luxe sont à la fois précieux, nouveaux et
emprunts d’un grand esprit créatif651. Ce sont également des produits qui utilisent les plus
récents procédés de fabrication afin de garantir une qualité inestimable du produit. Dès lors,
la distribution sélective doit contribuer au progrès technique se caractérisant par une nouvelle
méthode de production mais aussi par une nouvelle organisation du travail recherchant
toujours la solution technique et sophistiquée qui est aussi la plus automatisée et la plus
informatisée.652

Mais lorsqu’on remplace un atelier artisanal classique par un ensemble automatisé, surveillé
par un ordinateur, ne contribue-t-on pas à l’accroissement du chômage ?

648
R. BIGOT, La consommation engagée : mode passagère ou nouvelle tendance de la consommation ?
www.insee.fr

649
Syndrome respiratoire aigu sévère

650
« Evolution du commerce et des politiques commerciales. » www.wto.org.

651
Le secteur du luxe s’est toujours illustré par une grande capacité d’innovation, technologique ou non. En
France, c’est par exemple Coco Chanel qui a conçu le premier pantalon pour femmes dans les années 20,
l’utilisation de la fermeture éclair pour les sacs à main par Hermès en 1923, ou encore le 1er parfum pour
homme, créé par Jean Patou en 1934. Enfin, l’innovation, c’est le domaine des cosmétiques, avec des
laboratoires de recherche dédiés à la découverte de nouvelles molécules et la mise au point de nouveaux
produits. Chez le français L’Oréal, ceci représente 3 000 employés et plus de 500 brevets par an sur les produits
de soins, y compris solaires

652
« Le progrès technique n’apporte automatiquement ni le progrès intellectuel, ni le progrès moral. Il
n’apporte ni le bonheur et ni la sagesse. Il apporte seulement le progrès économique. Le progrès technique ne
peut être une fin, il est seulement un moyen », JEAN FOURASTIE, « Le progrès technique et les activités
économiques »,Revue économique 1966, nº 1 janvier, p. 115-126.

185
Il convient d’observer alors que la distribution sélective n’est efficace et n’a d’avantages que
si, en plus du progrès économique, elle contribue au progrès social par la création et le
maintien d’emplois.

B) La création et le maintien de l’emploi :

Bien que le progrès économique et technique favorise la croissance économique, cette


dernière n’entraine pas nécessairement le progrès social et risquerait même de mettre en péril
la stabilité de l’emploi. Dans ce contexte, le législateur français a ajouté, par la loi NRE du 15
mai 2001, à la condition du progrès économique, une référence expresse à la création et du
maintien de l’emploi comme facteur d’exonération des restrictions verticales653.

La distribution sélective en tant qu’accord verticale a su développer un modèle économique


performant et poursuivre son expansion à l’international. La vente de produits de luxe ou de
haute technicité demeure en effet un secteur très important et qui, de plus est créateur
d’emplois. Etant utilisée pour divers produits, la distribution sélective regroupe une multitude
de métiers tels la haute couture, les parfums et cosmétiques, la joaillerie, la maroquinerie, les
voitures, le matériel Hi Fi….

Directement ou indirectement, environ 170.000 personnes participaient au secteur du luxe en


France en 2005, à un titre quelconque : fabrication (directe ou non), logistique, distribution,
marketing. Une autre étude donne 110.000 emplois directs dans la filière. À cette donnée
française, il convient d’ajouter les effectifs employés hors de France. En ordre de grandeur, on
peut envisager que près de 100 000 personnes travaillent dans les maisons du luxe français
dans le monde654.

En Algérie, l’État reste le principal pourvoyeur d’emploi, et les statistiques le démontrent si


bien. Déjà en 2001, avant le lancement du fameux programme d’emploi-jeune, la fonction
publique, à elle seule, comptait 25% de l’emploi structuré soit au niveau de l’administration
soit au niveau des entreprises publiques. A côté de ce secteur public, coexiste un secteur privé

653
A. PIROVANO, Droit de la concurrence et progrès social après la loi NRE du 15 mai 2001, Recueil Dalloz Sirey,
n° 1, 03/01/2002, pp. 62-70.

654
www.industrie.gouv.fr

186
partagé entre le formel et l’informel655. Par ailleurs, le niveau élevé du chômage structurel en
Algérie s’explique par le faible niveau de formation et de qualification des demandeurs
d’emploi qui, de ce fait, se trouvent en déphasage flagrant avec la structure de l’offre
d’emploi. Le marché du travail en Algérie est quasiment inexistant du fait de sa
désorganisation656.

A l’heure des délocalisations, l’Algérie devrait profiter de la capacité des maisons de luxe à
créer de l’emploi industriel et commercial en ouvrant des sites de production et de distribution
sur le territoire national. Pour que ces maisons de luxe apportent non seulement des gains de
productivité mais aussi davantage de croissance économique et des emplois nouveaux, l’Etat
doit garantir un ensemble de conditions permettant à la fois une restructuration du secteur
industriel, la création et l'essor des petites entreprises, la croissance de nouveaux secteurs, le
lancement de nouveaux produits et la mise en place de mécanismes assurant une amélioration
effective des qualifications des travailleurs657.

Au plan réglementaire, la loi n° 90-11 relative aux relations de travail658, a fortement réduit le
domaine de l’intervention de l’Etat en matière de fixation des salaires et de relations de travail
donnant plein pouvoir aux négociations entre partenaires sociaux (conventions collectives)659.

Néanmoins, l’intervention des autorités reste constante en matière de recrutement. C’est


pourquoi le décret exécutif n° 07-386 du 5 décembre 2007 a été publié en application des
dispositions de la loi n° 06-21 du 11 décembre 2006 relative aux mesures d’encouragement et

655
Une enquête récente du Forum des chefs d’entreprises (FCE) révèle que « le secteur informel constitue une
partie importante de l’économie nationale». Cette enquête montre d’ailleurs qu’en 2007 l’emploi informel
représentait 32% des 8,25 millions de personnes employées en Algérie. Dans le secteur du commerce, cette
proportion passe à plus de la moitié. www.fce.dz.

656
NADJI KHAOUA, L'entreprise, l'Université et le Marché du Travail en Algérie: tentative d'analyse, Revue du
chercheur, n° 06/2008, p. 09.

657
« Développement de la formation professionnelle en Algérie ». www.eurojar.org/fr

658
La loi n° 90-11 du 25 avril 1990, modifiée et complétée, relative aux relations de travail (J.O.R.A. n° 17 du 25
avril 1990).

659
Art. 123 de la loi 90-11modifiée et complétée, relative aux relations de travail : « A la demande d'une des
parties visées à l'article 114 ci-dessus, la négociation des conventions et accords collectifs est menée par des
commissions paritaires de négociation composées d'un nombre égal de représentants syndicaux de travailleurs
et d'employeurs dûment mandatés par ceux qu'ils représentent. Leur désignation est du ressort de chacune
des parties à la négociation. »

187
d’appui à la promotion de l’emploi, ayant pour objet de fixer le niveau et les modalités
d’octroi des avantages en faveur des employeurs qui procèdent au recrutement des
demandeurs d’emploi660.

Mais il faut également veiller à former les personnels commerciaux en boutique qui sont les
ambassadeurs de la marque face au client. Ils sont là pour conseiller le client et l’orienter vers
le produit le plus adapté à ses besoins. En France, le joaillier Cartier a créé sa propre école de
formation. Les exemples sont innombrables et montrent à quel point la formation joue un rôle
essentiel dans les secteurs du luxe et de la haute technicité. C’est, bien sûr, un des points clés
des contrats de distribution sélective661.

Soucieux de la formation professionnelle, le législateur algérien impose à chaque employeur


occupant habituellement 20 salariés ou plus de réaliser des actions de formation et de
perfectionnement en direction des travailleurs, selon un programme soumis à l’avis du comité
de participation. Le travailleur est tenu de suivre ces cours et formation. Il est également tenu
d’organiser des actions d’apprentissage en direction des jeunes âgés entre 15 et 25 ans.
L’employeur est exonéré du paiement des charges sociales pendant toute la durée du contrat
d’apprentissage662.

Le développement de connaissances nouvelles prend une importance grandissante avec


l'émergence de l'économie fondée sur le savoir. Pour tirer profit d’un secteur aussi important
que la distribution sélective, l’Algérie doit non seulement présenter toutes les conditions
possibles à un transfert de savoir faire étranger, garant d’un développement durable, mais
aussi mettre en avant les artisans nationaux et commerçants porteurs d’un savoir exceptionnel,
à transmettre aux futures générations.

Art. 2 du décret exécutif n° 07-386 : « L’employeur qui recrute des demandeurs d’emploi bénéficie d’un
660

abattement de 20% de sa quote-part de cotisation de sécurité sociale pour chaque demandeur d’emploi
recruté pour une durée égale au moins à douze (12) mois. »

661
« Le luxe : production et services ». www.conseil-economique-et-social.fr

662
Arts. 57 et 58 de la loi n° 90-11 relative aux relations de travail.

188
Section 02 : la protection du réseau de distribution sélective

La diffusion des produits de luxe ou de haute technicité par l’intermédiaire de distributeurs


sélectionnés est une condition importante pour préserver et promouvoir l’image de marque et
la réputation commerciale du produit. La protection de tels réseaux contre toute
commercialisation hors réseau revêt dès lors une importance essentielle.

Or, si la loi fait preuve d’un certain libéralisme en ce qui concerne la validité de la distribution
sélective à l’inverse, elle n’offre pratiquement que peu de protection aux titulaires de réseaux
de distribution sélective pour faire respecter le système par les tiers et protéger le réseau
contre la distribution parallèle.663

Une bonne protection serait de garantir au promoteur du réseau et aux distributeurs agrées,
une double mesure : la première, plus générale, fondée sur le droit commun afin de faire
cesser un distributeur considéré comme illicite (§1) ; la seconde, plus spéciale, qui consiste à
agir sur la base de dispositions pénales contre les distributeurs parallèles et assurer la défense
du réseau d’une façon efficace (§2).

Paragraphe 01 : la protection par le droit commun

Le recours à la justice peut s’avérer nécessaire pour protéger le réseau contre la distribution
parallèle. Dénommée de parallèle car cette distribution concerne d’autres distributeurs que

663
J. AZEMA, « réflexion sur la distribution sélective : l’action contre le distributeur parallèle », mélanges Albert
Chavanne Litec 1990, p. 196.

189
ceux sélectionnés par le fournisseur et contractuellement liés à lui.664Dès lors, l’organisation
de la distribution sélective souffre de ce mal que sont les ventes parallèles aussi appelées
« marché gris »665. En effet, les distributeurs non agrées se procurent et vendent les articles
qu’ils ne peuvent obtenir directement du fabricant, car ils ne remplissent pas les conditions
exigées pour faire partie du réseau officiel666.

A côté d’un grand manque à gagner pour les distributeurs agrées, 667le « marché gris »détruit
les efforts des fabricants. En effet, les ventes parallèles sont source de dégradation de l’image
de marque des produits auprès des consommateurs en raison d’une présentation dévalorisante
et d’une absence de service après vente.668

On peut donc se demander si la loi dispose le fournisseur, titulaire de la marque, de moyens


pour agir contre les revendeurs extérieurs au réseau qui se procurent les produits par voies
parallèles. Faute de quoi, c’est dans les obligations contractuelles à l’intérieur du réseau que le
titulaire de la marque pourra retrouver une certaine protection.

L’étude à ce niveau portera d’abord sur l’action en concurrence déloyale(A), ensuite, sur la
responsabilité du fournisseur(B).

A) l’action en concurrence déloyale

664
A. THALMAN, la protection des réseaux de distribution contre le commerce parallèle, éd Droz, Genève 2001,
p. 52.

665
« Marché des biens qui ont été produits à l'étranger sous licence officielle ou directement par la marque
pour le marché local, mais qui sont réimportés sur son marché d'origine sans son autorisation. Bénéficiant d'un
différentiel de taxes et/ ou de conversion de devises, ces biens, au prix plus bas, constituent alors pour
l'entreprise une sorte d'auto-concurrence contre laquelle il est difficile de lutter légalement ». www.
Emarketing.fr

666
C. VILMART, Distribution des produits de parfumerie et refus de vente, Cah. Dr. entr, 1981/4, 7.

667
La profession des parfumeurs évalue Le poids du marché parallèle des parfums à plus de 10% du marché
mondial de la parfumerie. www.arnaques.be

668
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p. 150.

190
Pour assurer la loyauté de la concurrence, et en l’absence de dispositions légales
spécifiques, les juges français se sont référés à la responsabilité délictuelle de droit commun,
fondée sur les articles 1382 et 1383 du code civil français.669

Ainsi, l’action en concurrence déloyale n’est autre que l’application pure et simple des
mécanismes de droit commun de la responsabilité civile aux relations entre professionnels. 670

Pour la jurisprudence française, si aux termes de l’article 1165 du code civil, les conventions
n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes, un tiers commet une faute et engage sa
responsabilité délictuelle lorsqu’en pleine connaissance de cause, il participe à la violation
d’un engagement ou tout au moins viole consciemment le droit d’autrui.671

A ce sujet, le législateur algérien a repris textuellement l’article 1382 du code civil français à
l’article 124 du code civil de 1975 qui dispose que : « Tout acte quelconque de la personne
qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »672.

La protection d’un réseau sélectif par l’article 124 du code civil algérien met face à face, deux
protagonistes aux intérêts contraires ; le promoteur du réseau comme victime qui aspire à la
réparation de tous les préjudices soufferts, et le distributeur parallèle comme responsable qui
cherchera à s’exonérer, en prouvant que le dommage n’est pas du fait de sa faute.

La responsabilité civile délictuelle régit les relations entre deux personnes (le propriétaire du
réseau et le revendeur non agréé) qui n'étaient liées par aucun lien juridique, avant la
survenance de la violation du réseau causé par le revendeur non agréé. La relation juridique
qui s’instaure dès lors entre elles, provient de ce que l’auteur du dommage se doit, au titre de
l’action en concurrence déloyale, de répondre de son fait dommageable. Ainsi nait une
obligation de réparation à l’égard de la victime. Le dommage est donc la condition première,

669
PAUL ROUBIER, « théorie générale de l’action en concurrence déloyale » RTD com 1948, P. 542 ; M. L.
IZROCHE, « Droit du marché et droit des obligations, les fondements de la sanction de la concurrence déloyale
et du parasitisme » RTD com 1998, p. 18.

670
R. HOUIN. M. PEDAMON, précis Dalloz 1990, droit commercial, n° 551 et s.

671
Trib. Com. Nantes, 23 avril 1956 et trib. Com. Nice, 29 avril 1955, J.C.P. 1956, П, 9640, note R. Plaisant et J.
Lassier ; Aix en Provence ? 14 octobre 1958, Gaz. Pal. 1958, 2.363 ; Bordeaux, 10 déc. 1958, J.C.P. 1959. П.
10933.

672
A. LOURDJANE, Le droit civil algérien, t. 1, Paris, Éditions l'Armattan, 1985. p, 95.

191
qui marque le point de départ de toute responsabilité civile délictuelle : sans préjudice causé
au système de la distribution sélective, point de responsabilité du distributeur clandestin 673.

Le code civil algérien consacre également la faute comme étant à l’origine de la responsabilité
civile délictuelle et qu’elle constitue son fondement de principe674. Le législateur l’a voulue
de deux natures différentes: la faute prouvée et la faute présumée. La première est l’assise de
la responsabilité du fait personnel, tandis que la seconde engage la responsabilité du titulaire
de l’obligation de surveillance675.

Ainsi, au sens de l’article 124 du droit civil, L’objectif premier de l’action en concurrence
déloyale est de sanctionner le comportement non conforme aux règles du commerce et de la
concurrence et qui s’est soldé par un préjudice causé aux intérêts d’autrui676. A cet égard, la
cour suprême algérienne affirme que l’atteinte portée aux intérêts purement matériels
constitue, à l’instar de celle portée à l’intégrité corporelle, l’honneur ou la réputation, une
assise de la responsabilité civile délictuelle677.

Il ressort des textes et de la jurisprudence que le système algérien investit tout fournisseur du
droit d’intenter en justice tout responsable d’une atteinte illicite portée à ses intérêts matériels
ou à l’intégrité et l’image de marque de son réseau. Afin d’obtenir réparation du préjudice
causé, le fournisseur aura à formuler une action en concurrence déloyale fondée sur l’article
124 du code civil relatif à la responsabilité civile délictuelle678.

673
A. THALAMAN, op cit, p. 73.

674
« la faute peut découler de la violation d’une simple règle d’usage, de coutume ou de bonne moralité, dans
la mesure où le magistrat a l’intime conviction que de telles transgressions entrent dans le cadre de la
définition générale de la faute civile » N. TERKI, les obligations, responsabilité civile et régime général, OPU, p.
65.

675
A. FILLALI, les obligations, l’acte dommageable, ENAG/EDITIONS, Alger 2002, p. 45.

676
A. VIALARD : Droit civil algérien. La responsabilité délictuelle. OPU 1986, P. 17.

677
Cour Suprême, Chambre Civile, 15 novembre 1989, La revue judiciaire, 1990, p.14.

678
F. ZERAOUI-SALAH, Traité de droit commercial algérien : le fonds de commerce et les droits intellectuels,
tome 2 : les droits intellectuels, Editions Edik, 2001, p.27.

192
En France, la tendance des juges à être favorable à l’application du droit commun pour
protéger les contrats de distribution sélective a été bien accueillie par certains auteurs 679. Ces
derniers affirment que si les contrats n’ont pas d’effet à l’égard des tiers, ils constituent
néanmoins des faits objectifs qui leur sont opposables : « l’opposabilité du contrat aux tiers
n’est pas une dérogation au principe de relativité des contrats…les parties ne prétendent pas
lier les tiers sans leur volonté en étendant les effets du contrat, elles entendent leur faire
respecter les effets que celle-ci a produits entre elles ».680

Marquant un net recul de la responsabilité des distributeurs parallèles, la jurisprudence


française a, ensuite, fait un revirement spectaculaire par une position que la cour de cassation
défend dès 1988 en énonçant qu’un tiers ne commet pas de faute par le seul fait qu’il vend les
produits en cause sans être distributeur agrée.681

Bien que la solution retenue cette fois par la cour de cassation française s’explique par une
volonté d’harmonisation des solutions en matière de concurrence déloyale avec la
jurisprudence sur le refus de vente,682la doctrine française a critiqué de façon unanime la
position adoptée par la haute juridiction française.683

Sensible à la critique de la doctrine et secouée par les plaintes en masse et répétées des
titulaires de marque, la jurisprudence française a fini récemment par revenir sur sa position et
a rendu des arrêts qui témoignent d’une grande fermeté vis-à-vis des revendeurs qui diffusent
hors réseau les produits commercialisés par des distributeurs sélectifs. 684

Pourtant, en l’espèce, la cour de cassation, n’avait pas abandonné le principe selon lequel la
seule vente hors réseau n’est pas condamnable. Elle est néanmoins allée chercher deux autres

679
LIMPENS, L’opposabilité des contrats à l’égard des tiers, Mélanges ; P. Roubier, t.ΙΙ, 1961, p. 89 ; FLOUR ET
ème
AUBERT, les obligations, l’acte juridique, 5 éd, coll. Armand colin 1991 n° 434 ; François Collard-Dutilleul,
Philippe Delebeque, précis Dalloz 2006, Contrats civil et commerciaux n° 944, p. 697.

680 ème
MARTY ET RAYNAUD, les obligations, Tome 2, les sources, 2 éd., Sirey 1988 n° 113.

681
Cass. com. 13 décembre 1988, Dalloz, 1989, J. p. 427, note A. Benabent.

682
G. LE TALLEC, La distribution sélective des parfums, RTD eur. 1988, p. 437.

683
C. CHAMPALAUNE, L’égalité des opérateurs économiques dans l’exercice de la concurrence en droit interne,
www. Courdecassation.fr.

684
Cass. com. 27 oct, 1992, SARL Pin Ups and Co c/Soc. des parfums Loris Azzaro, D. 1992, Jur. P. 5005 et s.

193
circonstances qui entrainent la condamnation du distributeur hors réseau. Il s’agit d’une part
de l’acquisition irrégulière de la marchandise, et d’autre part des avantages tirés par le
revendeur non agréé sans adhésion au réseau.685

Cette nouvelle position de la jurisprudence française parait particulièrement significative et


riche en enseignements. En effet, la cour élargit d’une part, la gamme des actes de
concurrence déloyale ; et d’autre part, elle facilite la preuve de comportement déloyal. 686 Pour
vérifier la réalité de l’action en concurrence déloyale et en mesurer l’ampleur et les
conséquences, il est souhaitable, tout d’abord, de montrer les conditions de la responsabilité
des revendeurs hors réseau(1), pour, ensuite, s’intéresser à la réparation du préjudice
concurrentiel(2).

1-les conditions de la responsabilité délictuelle

En l’absence du rôle que pouvait jouer la jurisprudence algérienne en matière de


développement des règles de la distribution sélective, ce sont les conditions classiques fixées
par la théorie générale de la responsabilité civile qui s’appliquent à un conflit opposant un
fournisseur et un distributeur non agréé.

Ainsi, la recevabilité d’une action en concurrence déloyale dépend du principe classique de


lien de causalité entre le préjudice subi par le fournisseur et la faute commise par le
distributeur hors réseau, qu’il soit personne physique ou morale 687. Aussi, selon l’article 126
du code civil algérien, n’engage sa responsabilité délictuelle pour violation d’un réseau
étanche, que l’auteur pourvu de discernement688. En matière de preuve, l’article 323 prévoit

685
Cass. com. 27 oct. 1992, Azzaro, Cah.Dr. entr. П 1992, p. 23.

686
« Les grands arrêts du droit des affaires » sous la direction de J. MESTRE, E. PUTMAN, D. VIDAL. Dalloz 1995.
p. 262.

687
Le législateur algérien reconnaît la responsabilité pénale des personnes morales depuis la promulgation de
la loi 04-15 (J.OR.A. du 2004-11-10, n° 71, pp. 7-10) modifiant et complétant l'ordonnance n° 66-156 du 8 juin
1966 portant le code pénal algérien. Désormais, l’article 18 bis du code pénal algérien fixe, à la lumière de
l’article 121-2 du code pénal français, les peines encourues par la personne morale en matière criminelle et
délictuelle.

688
Art. 42 al. 02 du droit civil algérien fixe l’âge du discernement à 13 ans, alors qu’en droit français, Il n’y a pas
d’âge précis pour fixer le moment à partir duquel le mineur est doué de discernement. Sans aucun doute le
discernement n’est pas acquis par l’enfant en bas âge et le jeune enfant, mais il l’est par un adolescent de 15
ans (limite également retenue en droit pénal dans un certain nombre de cas).

194
l’administration de la preuve incombe à celui qui se prévaut d’un fait ou d’une obligation dont
il se prétend créancier. Réciproquement celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou
le fait qui a produit l'extinction de son obligation. Cette règle est parfaitement logique car il
est normal de faire supporter la charge de la preuve à celui qui trouble l’ordre juridique689.

Lorsqu’un fabricant se prévaut de la mise en place d’un réseau de distribution sélective pour
demander la condamnation d’un revendeur hors réseau, il lui faut d’une part prouver
l’existence et la licéité de son réseau et d’autre part, montrer que l’acte du tiers non agrée est
fautif.

a) la licéité du réseau :

Alors que les rétrocessions sont libres au sein du réseau de distribution sélective, le droit
communautaire et le droit français s’accordent à permettre au fabricant d’interdire aux
distributeurs agrées de rétrocéder les produits contractuels à des distributeurs n’appartenant
pas au réseau. Ainsi, un système de distribution sélective doit, à peine de n’avoir aucun sens,
être étanche de façon à ne permettre qu’aux revendeurs agrées d’être approvisionnés690.

Toutefois, une question se pose ici de savoir si cette étanchéité constitue une condition de la
licéité du réseau.

Contrairement au droit allemand691, en droit français, seule l’étanchéité théorique est requise,
le fabricant n’est tenu de prouver que l’existence juridique de son réseau, il ne doit prouver ni
l’origine des fuites hors de son réseau, ni de rapporter la preuve du respect des membres de
son réseau des engagements contractuels.692

689
D. ZENNAKI, Droit des obligations, cours de licence, Faculté de droit, Université d’Oran, 2006/2007.

690
G. LE TALLEC, op. cit.

691
Le droit allemand exige que le fournisseur prouve non seulement l’étanchéité théorique de son réseau,
c'est-à-dire l’existence d’un contrat de distribution sélective avec chacun de ses détaillants agrées, mais aussi
l’étanchéité pratique de son système, c'est-à-dire qu’à chaque fois qu’il y a vente en dehors du réseau de
distribution sélective, le fabricant engage les actions judiciaires à l’encontre des revendeurs non agrées
concernés.

692
Cass. com., 21 juin 1994, n° 92-16-197, bull.civ. ΙV, n° 235, p. 184. « Le fait qu’un distributeur parallèle ait pu
s’approvisionner en parfums litigieux n’était pas de nature à démontrer, à lui seul, l’illicéité du réseau ».

195
Néanmoins, le système juridique français fait peser sur le fabricant la charge de la preuve de
la réalisation des conditions qu’implique le système de distribution sélective. Il appartient au
fabricant « d’établir la licéité de son réseau de distribution sélective considéré dans
l’ensemble des conventions s’y rapportant ».693 Cette condition posée par les juges français,
ne semble guère contestable, car si le fabricant invoque la violation de son système, il parait
légitime d’exiger de lui qu’il établisse sa licéité.

La cour de cassation française estime que la preuve de la licéité du réseau de distribution


sélective est rapportée lorsque l’analyse du contrat cadre démontre que :

-les distributeurs agrées ne peuvent vendre les produits contractuels qu’aux consommateurs
finals ou à d’autres distributeurs agrées.

-la fixation des prix de revente reste libre

-les critères de sélection sont objectifs de caractère qualitatif694.

a) La faute du distributeur parallèle :

Apparemment, la jurisprudence française refuse de considérer le seule fait d’avoir mis en


vente ou vendu des produits relevant d’un réseau de distribution sélective comme constituant,
en soi, un acte de concurrence déloyale.

La responsabilité du distributeur parallèle ne peut donc s’établir que si à la revente hors réseau
s’ajoute une faute commise par le distributeur non agrée.695

693
Com. 22 mai 1985, bull.civ. ΙV, n° 170 ; D. 1988, Som. 295, obs. Gavalda et Lucas de Leyssac.

694
Cass. com., 9fevr. 1976, JCP, 1977.ІІ. 18598, note Hemard.

695
PH. LE TOURNEAU, Droit du marché et droit commun des obligations, la spécificité du préjudice contractuel,
RTD com. 1998, p. 83.

196
En effet, la cour de cassation retient qu’ « un réseau de distribution sélective est un fait
juridique opposable aux tiers. Le revendeur non agrée qui, en parfaite connaissance de cause
de l’existence d’un tel réseau, commercialise des produits protégés sans justifier d’un accord
du fabricant, commet un acte constitutif de concurrence déloyale ».696

En d’autres termes, la faute engageant la responsabilité du revendeur parallèle réside dans une
acquisition irrégulière des produits. Aussi, d’autres actes plus spécifiques peuvent constituer
une concurrence déloyale

1-L’acquisition irrégulière des produits

Selon un arrêt de la chambre commerciale de la cour de cassation française, constituerait une


faute, l’obtention ou la tentative d’obtention par un revendeur hors réseau auprès d’un
distributeur agrée, de produits commercialisés par un réseau de distribution sélective en
violation de l’engagement du distributeur agrée de ne pas revendre à des intermédiaires
extérieurs au réseau697.

A travers cet arrêt, la cour de cassation définissait pour la première fois ce qu’il fallait
entendre par « acquisition irrégulière ». Ainsi, la complicité de l’acheteur dans la violation par
un distributeur agrée de l’obligation contractuelle de ne revendre qu’aux membres du réseau
est une preuve d’une acquisition irrégulière698.

Les juges font ici application en matière commerciale du principe, bien connu en droit civil,
de la responsabilité civile du tiers complice de la violation d’une obligation contractuelle. 699

Aussi en droit algérien, le recours à la règle générale pour faire établir la responsabilité du
tiers fautif paraît possible.

696
CA. Aix-en-provence, 10 juin 1993, Bull. Aix 1993, n°1, p. 29, note Pietro C.

697
Cass. com. 27 oct. 1992, D. 1992.505, note A. Benabent.

698
Ibid.

699
LIMPENS, op. cit.

197
Ainsi, la victime d’une concurrence déloyale peut mettre en jeu la responsabilité civile du
revendeur hors réseau sur le fondement de l’article 124 du code civil en application du
principe de la tierce complicité, lorsque celui-ci s’approvisionne auprès d’un distributeur
agrée et l’aide ainsi à violer son obligation contractuelle de non-rétrocession.700

Par ailleurs, le législateur algérien fait référence implicitement à l’acquisition irrégulière des
produits en interdisant à la loi n° 04-02 aux commerçants de détenir des produits importés ou
fabriqués de manière illicite en ce que cela constitue une pratique commerciale frauduleuse 701.

Il convient de rappeler que le caractère irrégulier de l’acquisition des produits par le


distributeur non agrée suppose un réseau sélectif parfaitement étanche et sans faille. Il
incombe au chef du réseau d’apporter la preuve que son réseau est fermé. Aussi, le fabricant
est tenu de prouver, d’une part, que le revendeur intrus a acheté les produits en pleine
connaissance du contrat dont il a facilité la violation et d’autre part de mettre en évidence la
manœuvre frauduleuse utilisée par le revendeur fautif702.

Donc, pour engager la responsabilité civile du distributeur parallèle, il faut prouver qu’il avait
connaissance de l’existence du contrat et donc de l’obligation contractuelle du distributeur
sélectionné. Seule la complicité consciente peut être retenue. La responsabilité délictuelle du
tiers ne peut être fondée sur sa négligence ou son imprudence703. Pour convaincre le juge de
l’existence de cet élément psychologique, difficile à établir, le fabricant peut recourir à certain
moyens pratiques. Informé de la violation de son réseau, le fabricant peut notifier au
revendeur clandestin les contrats de distribution sélective qu’il a conclus avec les membres de
son réseau. Pour l’avenir le distributeur non agrée aura perdu sa situation initiale de
distributeur de bonne foi et qu’il est désormais entrain de vendre en pleine connaissance des
produits couvert par un système de distribution sélective dont il ne peut plus prétendre ignorer
l’existence704.

700
B. STARCK, « des contrats conclus en violation des droits contractuels d’autrui », J.C.P. 1954.Ι.1180.

701
Art. 25 al. 01 de la loi n° 04-02 relative aux règles applicables aux pratiques commerciales.

702
A. CONDOMINES, le point sur la distribution sélective. www.economag.com

703
P. ESMEIN, La faute et sa place dans la responsabilité civile, RTD civ., 1949, p. 481et s.

704
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p. 149.

198
Egalement, pour mettre l’intrus sur ses gardes, le propriétaire du réseau peut faire imprimer
sur l’emballage contenant les produits une mention de type « produits ne pouvant être vendus
que par des distributeurs agrées ». Cette mention a l’avantage de diffuser un message clair et
fait office d’un indice non négligeable aidant le juge à mieux cerner la psychologie du
distributeur clandestin705.

Il faut bien admettre qu’un professionnel est forcément averti et conscient de se qu’il fait dans
l’exercice de sa profession. En effet, le revendeur non agrée est réputé être un professionnel
donc, il sait ce qu’est la distribution sélective. Il a sans doute agi en connaissance de cause et
se trouve donc complice de la violation de ses engagement par le distributeur agrée706.

S’agissant des manœuvres frauduleuses, il incombe au fabricant d’apporter la preuve de la


complicité frauduleuse du distributeur non agrée dans la violation de l’obligation contractuelle
du distributeur agrée de ne vendre les produits qu’aux consommateurs ou à des vendeurs
agrées. Le plus souvent, le fabricant se trouve dans l’impossibilité de fournir une preuve
palpable aux juges, car les distributeurs hors réseau prennent évidemment toutes les
précautions requises707.

2-Les actes spécifiques de concurrence déloyale

L’entreprise du fabricant peut être touchée par des actes déloyaux sans relation avec
l’exécution du contrat de distribution sélective. La jurisprudence française a décidé que « si la
libre recherche de clientèle est de l’essence même du commerce, l’abus de la liberté du
commerce causant, volontairement ou non, un trouble commercial constitue un acte de
concurrence déloyale ou illicite »708.

705
V. SELINSKY, la distribution sélective des produits de marque, Cah. Dr. entr, 1984/2, 17.

706
Ibid

707
PH. LE TOURNEAU, op. cit.

708
Cass. com. 22 octobre 1985, Bull. civ. ΙV, n°245, p. 206.

199
A ce titre, un auteur algérien affirme qu’il est plus juste d’établir une distinction entre la
concurrence déloyale et la concurrence illicite, la première est le résultat d’un acte volontaire
tandis que la deuxième manque de l’élément intentionnel709.

Les actes de concurrence déloyale peuvent se traduire tantôt par un comportement parasitaire,
tantôt par la volonté de désorganiser l’entreprise du fabricant. Le parasitisme consiste souvent
pour un distributeur non agrée à exploiter la notoriété de l’entreprise du fabricant,
généralement dans le but de créer une confusion dans l’esprit de la clientèle et de profiter de
la réputation de la marque710.

Aucun texte du droit algérien ne donne de définition à la pratique déloyale de parasitisme711.


Cependant, la loi fixant les règles applicables aux pratiques commerciales interdit le
ralliement de la clientèle d’autrui par des procédés déloyaux en créant un risque de confusion
dans l’esprit du consommateur. En effet, la lecture de l’article 27 °2 montre que le législateur
algérien identifie le comportement parasite à travers l’imitation des signes distinctifs d’un
agent économique concurrent, de ses produits ou services et de sa publicité.

Aussi, le distributeur étranger au réseau se comporte en parasite lorsqu’il se présente lui-


même comme un distributeur agrée et usurpe ainsi une qualité qui ne lui appartient pas et qui
peut séduire indûment l’acheteur parce qu’il croit qu’il va bénéficier des avantages d’un
réseau sélectif. L’auteur de ces actes déloyaux qualifiés de « concurrence parasitaire » engage
sa responsabilité civile712.

Le comportement parasitaire peut se traduire également pare la pratique de la marque d’appel


qui consiste, pour un distributeur non agrée, à proposer la vente d’objets marqués, alors qu’il
n’est pas en mesure de satisfaire à la demande de ces objets. L’objectif recherché par l’auteur
est d’attirer la clientèle et d’obtenir d’elle, lors qu‘elle se présente, qu’elle achète, au lieu de

709
F. ZERAOUI-SALAH, Traité de droit commercial algérien : le fonds de commerce et les droit intellectuels,t 1 :
Le fonds de commerce, Editions Edik, 2001, p. 29.

710
Colloque « Le parasitisme économique » placé sous la direction de M. J. DUPICHOT., Paris 1987, Gaz. Pal.-
Litec 1988.

711
La Cour de cassation française a récemment défini le parasitisme comme « l’ensemble des comportements
par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser,
de ses efforts et de son savoir-faire». Cass. com. 26 janv. 1999, Sté Canavese. www.prodimarques.com

712
PH. LE TOURNEAU, "Parasitisme", Juris-Classeur Concurrence-Consommation, 1995, fascicule 227.

200
l’objet marqué qui fait défaut, d’autres objets concurrents et disponibles713. Cette pratique
parasitaire constitue un acte de concurrence déloyale qui engage la responsabilité civile et
demeure condamnée par les tribunaux. Par ailleurs, la pratique de « la marque d’appel » peut
être pénalement sanctionnée au titre de l’usage illicite de la marque d’autrui714.

Entrent également dans la catégorie des actes spécifiques de concurrence déloyale, ceux qui
ont pour objet ou peuvent avoir pour effet de désorganiser l’entreprise rival715, plus
précisément d’appliquer sciemment une « stratégie de démolition de structure commerciale
concurrente ».716

La désorganisation peut se réaliser par l’intermédiaire du personnel de l’entreprise


concurrente suite à un débauchage dans des circonstances suspectes pouvant entraîner un
déplacement illicite de clientèle, comme le débauchage massif ou s’il intervient au cours du
contrat717. Cependant, le principe de la liberté du travail donne la liberté au salarié de mettre
fin à son engagement pour exercer une activité concurrente pour son propre compte ou pour
celui d’un nouvel employeur.718

D’autre part, la désorganisation peut être causée par l’obtention de secrets d’affaires ou du
savoir faire dans des conditions irrégulières. S’agissant des produits de luxe et de haute
technicité, le secret d’affaires et le savoir faire constituent des éléments fondamentaux de la
réussite commerciale de l’entreprise. Il est donc tentant pour un concurrent, en employant des
procédés déloyaux tel que l’espionnage industriel ou le détournement de fichiers, de profiter
indûment de ces moyens.719 Le dénigrement peut aussi constituer un acte de concurrence

713 e
A. CHAVANNE, J. J. BURST, Droit de la propriété industrielle, Dalloz 5 édition 1998, P. 734.

714
A. CHAVANNE, "Le délit d'usage de marque et son évolution", Mélanges Mathély, Litec 1990, p. 101.

715
Y. SERRA, Le droit français de la concurrence, Dalloz 1993, p. 46.

716
« La protection du Secret des Affaires : Enjeux et propositions ». Rapport du groupe de travail présidé par M.
Claude Mathon, avocat général à la Cour de Cassation. 17 avril 2009. www.claudemathon.fr

717
CLAIRE FAVRE, concurrence déloyale et pratiques anticoncurrentielles, REVUE LAMY DE LA CONCURRENCE •
AVRIL / JUIN 2008 • N° 15.

718
Y. SERRA, Le droit français de la concurrence, Dalloz 1993, p. 63 ;D. FERRIER, appartenance de la clientèle et
clause de non-concurrence : JCP E 1983, Cah. dr. entr. n° 1, p. 21.

719
N.CUSACQ, Le luxe et le droit, RTD com 2002, p.605.

201
déloyale engageant la responsabilité civile de son auteur. Il peut être définit comme la
recherche de la dépréciation, dans l’esprit de la clientèle, d’une chose ou d’une personne on
en disant du mal.720

Conscient du préjudice certain de cette pratique, le législateur algérien la considère comme


une pratique commerciale déloyale et dispose à l’article 27°1de la loi n° 04-02 qu’elle
consiste à dénigrer un agent économique concurrent en répandant à son propos ou au sujet de
ses produits ou services des informations malveillantes. Pour être condamnable, le
dénigrement doit porter sur un concurrent ou un produit nommément désigné ou tout au
moins facilement identifiable et doit faire l’objet d’une diffusion publique susceptible de
produire des effets dommageables vis-à-vis de la clientèle.721

Dans ce contexte, la publicité comparative qui, consiste à vanter un produit ou un service par
comparaison et au détriment d’un produit ou d’un service concurrent, a parfois été condamnée
comme constituant un acte de concurrence déloyale722. Cependant depuis la loi n° 92-60 du
18 janvier 1992 (art 10-01 devenu art. L 120-08 et s. du code de la consommation français),
elle est autorisée dans des conditions rigoureuses prévues par le texte. 723Globalement, toute
publicité s’appuyant sur des déclarations fausses ou fallacieuses concernant le produit de
l’annonceur ou celui du concurrent est interdite dans tous les pays.

En Algérie, les rapports nationaux rendus en 2004 à la ligue internationale du droit de la


concurrence724indique qu’il n’est pas nécessaire de mentionner le nom du concurrent ou de

720
M. MALAURIE VIGNAL, Le droit de la concurrence interne et communautaire, Dalloz 2005, p. 151.

721
P. ROUBIER, le doit de la propriété industrielle, Sirey 1952, t. 1, p. 209.

722
C. GALVADA, « Constitue un trouble manifestement illicite, la publicité qui sous couvert d'une publicité
comparative dénigre manifestement le produit adverse », Recueil Dalloz 1996 p. 179.

723
PASCAL WILHELM ET MARIE DUBARRY, « la publicité comparative ». Revue Lamy Droit des Affaires, mars
2002.

724
La Ligue internationale du droit de la concurrence (LIDC) est une association établie de longue date à
Lausanne en Suisse et qui a pour spécificité de s'intéresser à la fois aux droits de la concurrence, aux droits de
la propriété intellectuelle ainsi qu'à la concurrence déloyale au niveau international comme au niveau national.
Elle encourage essentiellement les principes de loyauté et de justice dans la pratique concurrentielle.
www.ligue.org

202
son produit puisque toute référence, implicite ou explicite, est considérée comme publicité
comparative725.

B) La responsabilité du fabricant (le contrôle) :

La protection des réseaux de distribution sélective contre le tiers extérieur au réseau n’est pas
suffisante, le fabricant doit veiller à la protéger contre certains agissements des membres du
réseau susceptible de le perturber et de nuire à sa parfaite efficacité. Au contrôle interne
exercé par le fabricant, s’ajoute celui effectué par les distributeurs agrées qui accompagnent
les actions du fabricant pour assurer l’étanchéité du réseau.

1-le contrôle interne par le fabricant :

Le fabricant, responsable de l’intérêt commun du réseau, ne saurait laisser faire la vente de ses
produits par les membres de son réseau à des tiers étrangers, sans mettre en doute la
crédibilité des motifs invoqués pour justifier la mise en place de son système de distribution
sélective.726

Conformément à la jurisprudence tant communautaire727 que française728, les clauses


interdisant aux distributeurs agrées de revendre à un distributeur non agrée sont licite et ne
sauraient constituer en elle-même une restriction de la concurrence. La distribution sélective
est, dès lors, fondée sur l’interdiction faite au distributeur sélectionné de revendre, autrement

725
N. BADI BOUKEMIDJA, « Les atteintes à la publicité ». El watan 29 novembre 2009.

726
Ainsi le tribunal de commerce de Paris, dans une décision du 14 mai 1986, affirmait que « le fournisseur se
discréditerait et discréditerait son système de distribution sélective, s’il ne sanctionnait pas les distributeurs
agréés qui ont manifestement violé l’engagement contractuel leur interdisant de revendre à un distributeur
non agréé ». Trib. Com. De Paris, 14 mai 1986, D, 1988, Som. 23.

727
CJCE, 25 oct. 1977, aff. 26/27, Metro l, Rec. CJCE 1977. p. 1875 ; CJCE, 22 oct. 1986, aff. 75/84, Metro П, rec.
CJCE, p. 3021. Cité par Burst et Kovar.

728
Cass-crim : arrêts dits « duo » (aff lanvin, Nina Richi, Rocho) 3Nov 1982, Gaz. Pal. 1982, 2, 658.

203
dit de rétrocéder des produits objet du contrat, à un distributeur non agrée, sous peine de créer
ou de contribuer à créer un marché parallèle en marge du marché officiel.729

Par conséquence, toute violation de l’interdiction de la rétrocession entre distributeur agrée et


distributeur non agrée va entraîner la mise en œuvre de certaines sanctions du distributeur
fautif ayant méconnu ses obligations contractuelles. Pour qu’une responsabilité contractuelle
apparaisse, deux conditions doivent être remplies, d’une part, le contrat de distribution
sélective doit avoir été valablement formé, et d’autre part, l’une des parties au contrat doit
avoir manqué, d’une manière inexcusable, à ses obligations contractuelles730.

Attribuant au contrat le rang qui lui convient, le législateur algérien en fait, à l’article 10 du
code civil, la loi des parties et dispose qu’il ne peut être révoqué, ni modifié que du
consentement des parties ou pour les causes prévues par la loi. De surcroit, l’article suivant
exige qu’il soit exécuté conformément à son contenu, et de bonne foi731.

En cas de violation du réseau par un distributeur agrée, deux sanctions sont à prévoir ; la
résiliation du contrat et l’exclusion du distributeur fautif du réseau.

a) la résiliation du contrat

Le distributeur agréé qui viole l’obligation contractuelle de ne vendre les articles objet du
contrat qu’aux consommateurs finals ou à d’autres revendeurs agréés, engage sa
responsabilité contractuelle. Il se verra opposer la résiliation du contrat de distribution
sélective soit par application de la clause résolutoire, prévue assez souvent dans les contrats
de distribution sélective, soit par application des dispositions du code civil relatives aux
sanctions de la violation des engagements contractuels appliquées par les tribunaux.732

729
ROMY ISABELLE, GAUTIER EVE, Responsabilité au sein du réseau de distribution exclusive et sélective, in: Les
contrats de distribution. Contributions offertes au Professeur François Dessemontet à l'occasion de ses 50 ans,
CEDIDAC 38, Lausanne 1998, 381-401.

730
A. FILLALI, Les obligations : la théorie générale du contrat, ENAG/EDITIONS 2005, p. 353.

731
D. ZENNAKI, Droit des obligations, cours de licence, Faculté de droit, Université d’Oran, 2006/2007.

732 ème
ALEX WEIL, FRANÇOIS TERRE, Les obligation, précis Dalloz, 4 éd., n° 488. 493 et s. ; JEAN CARBONNIER,
ème
Les obligations, 22 éd. refondue : P.U.F. 2000., n° 188.

204
A cet égard, la clause résolutoire lors qu’elle est prévue par les parties au contrat de
distribution sélective, la résiliation interviendra automatiquement et de plein droit sur la base
des articles 1134 du code civil français et 106 du code civil algérien aux termes desquels les
conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites 733. En effet, la
clause résolutoire, très fréquente dans la pratique, tend à affranchir le fabricant de la voie
judiciaire pour mettre fin à la relation avec le distributeur responsable de la rétrocession
illicite.734Donc, aucune formalité judiciaire ne sera utile à moins qu’il ne soit stipulé
autrement à l’acte.735

A l’instar de son homologue français, le législateur algérien permet aux parties d’insérer au
contrat l’option de la clause résolutoire qui donne la faculté au fournisseur de provoquer la
rupture de la relation contractuelle sans recourir à l’office du juge 736. A défaut d’une clause
résolutoire, le fabricant peut agir sur la base de l’article 119 qui permet de saisir le tribunal
pour demander la résiliation et mettre fin à la relation contractuelle avec l’auteur de la
rétrocession illicite.

La résiliation judiciaire est un mode particulier de rupture du contrat de distribution sélective


qui, en dépit des inconvénients que comporte toute action judiciaire (coût, honoraires et
longueur de temps), présente des avantages certains.

En effet, le recours du fabricant au juge pour sanctionner le revendeur fautif prouve un


contrôle interne efficace. De cette façon, le fabricant montre de manière claire aux membres
de son réseau et aux tiers, qu’il tient fermement en main l’ensemble de ses distributeurs. Son
action en justice a valeur d’exemple, elle se veut dissuasive à l’encontre de ceux qui seraient
tentés de transgresser la règle de l’interdiction des rétrocession hors réseau.737

Chaque fois saisi d’une demande de résiliation de contrat pour violation des obligations
contractuelles, le tribunal doit tout d’abord statuer sur la validité des conventions qui lui sont

733
P. ANCEL, Force obligatoire et contenu obligationnel du contrat, RTD civ., 1999, p. 771 et s.

734
M. L. IZROCHE, « Contrats conditionnels et définis », RTD com 1998, p. 521.

735 ème
J. CARBONNIER, Droit civil, les obligations, 22 édition refondue 2000, janvier. PUF, 1956, p. 340.

736
Art. 120 du code civil algérien.

737
R. VERNIAU, « les sanctions de l’atteinte à l’image par un distributeur agréé », Cah. dr. entr. 1991/1, p. 26 et
s.

205
soumises. Il pourra constater ensuite, la violation des obligations souscrites et les
conséquences qui en découlent.738

Outre la violation de la clause de non rétrocession, la vente par un distributeur agréé dans les
locaux de tiers non agréés ou la création d’un point de vente non agréé donne le droit au
fabricant de résilier le contrat avant terme et, en outre, demander réparation du préjudice subi
sur le fondement de l’article 124 ainsi que les articles 106 et 107 du code civil algérien pour
inexécution des obligations stipulées au contrat739.

b) L’exclusion du réseau

Le distributeur qui aura violé ses engagements contractuels se fera sanctionné par la
résiliation de son contrat de distribution sélective ; d’autant plus qu’il ne pourra plus être
admis au réseau du fabricant même s’il remplit de nouveau les conditions de sélection. Le
distributeur doit donc s’abstenir de toute forme de rétrocession des produits du fabricant à des
professionnels ou n’importe quelle personne qui n’est pas consommateur ou distributeur
agréé740. On peut donc se demander si le caractère illicite du comportement de l’auteur de la
vente hors réseau est fondé sur une violation des dispositions du code civil, qui consacrent le
principe de la bonne foi.

Un auteur français fait observer qu’un membre d’un réseau de distribution sélective qui
fournit le marché parallèle ou fait circuler les produits dans des locaux non agréés est par la
force des choses de mauvaise foi. En effet, le distributeur agréé sait que le système de
distribution sélective ne fonctionne que si tous les membres respectent leurs obligations et il
sait qu’il cause un préjudice certains à l’ensemble des membres du réseau ainsi qu’au
fabricant741.

Dès lors, le fabricant peut valablement, après résiliation du contrat, exclure son cocontractant
fautif en raison de sa mauvaise foi au sens de l’article 1134 du code civil français ainsi qu’en
application de l’article 442-06 du code de commerce français. Cependant, il semble bien que

738
R.T.D. com. 1989. 519, note B. Bouloc ; Gaz. Pal 1989. 1. 420 note J. J. Burst.

739
A. Fillali, op. cit, p. 351.

740
ROMY ISABELLE, GAUTIER EVE, op. cit.

741
P. PIGASSOU, La distribution sélective. JCP 1985 éd. E ΙΙ, 14423.

206
le fabricant ait seul le droit de pardonner le distributeur qui a manqué à ses obligations et le
réintégrer de nouveau dans son réseau, après s’être assuré qu’il remplit les conditions de
sélection requises742.

En application des règles générales, le fabricant qui décide d’invoquer la vente fautive devant
un juge, fait peser sur lui la charge de la preuve. Cette preuve, qui est une condition
essentielle du succès de l’action engagée par le fabricant, reste libre et peut être établie par
divers moyens telles que les factures d’achats ou le marquage distinctif de l’emballage743.

2-Le contrôle interne par les membres du réseau

Il faut bien admettre que l’ensemble des revendeurs agréés sont liés entre eux par des rapports
de confiance et de fidélité qui découlent de la chaine des contrats constituant l’ensemble du
réseau ; sans ces liens, le système ne saurait fonctionner. L’auteur de la déloyauté qui
alimente le marché parallèle ruine, par ses rétrocessions interdites, l’efficacité du réseau et
porte indubitablement atteinte aux intérêts des autres distributeurs agréés744.

De ce fait, les membres du réseau ont le droit d’intenter une action qui a pour fondement
juridique la concurrence déloyale. En effet, en ne respectant pas les obligations liées au lieu
de vente, à la commercialisation, à la publicité, et en général à toutes les contraintes mises au
point par le fabricant et inhérentes au système de distribution sélective, le distributeur agréé
commet un acte de concurrence déloyale à l’égard d’un distributeur également agréé et
respectant le contrat745.

Dans le secteur de la parfumerie en France, la concurrence déloyale causée par les


rétrocessions illicites ne touche pas que les distributeurs agréés, mais la profession de la

742
J. MESTRE, Résiliation unilatérale et non-renouvellement dans les contrats de distribution, in La cessation des
relations contractuelles d'affaires, PUAM, p. 12.

743
JEAN-PIERRE PAMOUKDJIAN, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p. 149.

744
F. FOURNIER, « L'équilibre des réseaux de franchise de parfumerie de luxe », dans Recueil Dalloz, 2002,
p. 793

745
J. AZEMA, « réflexion sur la distribution sélective : l’action contre le distributeur parallèle », mélanges Albert
Chavanne Litec 1990, p. 196.

207
parfumerie en général. Dès lors, les organisations professionnelles représentatives ont qualité
pour agir dans l’intérêt de leurs membres.746

Le tribunal de grande instance de Montpellier a récemment donné raison au syndicat de la


parfumerie française en affirmant que :

« La chambre syndicale est le garant pour ses membres et le consommateur de la distribution


sélective des produits de parfumerie ».

« Attendu que les pratiques des prévenus sont constitutives d’un trouble pour l’ensemble des
professionnels représentés par la chambre syndicale »747.

Par ailleurs, il est à souligner qu’il serait souhaitable que soit développée une action conjointe
fabricant/distributeur, chacun des partenaires invoquant des préjudices certes différents, mais
complémentaires. Cette complémentarité, loin de l’analyse de la distribution sélective en
termes de rapports de force mais plutôt d’intérêts communs, devrait constituer un rempart
contre toute violation interne ou externe du réseau et renforcer ainsi l’efficacité de la
distribution sélective.

En l’espèce, la condamnation du distributeur non agréé auteur ou complice d’une atteinte à


l’organisation du réseau est fondée sur les règles du droit commun. Mais c’est aussi sur le
droit pénal que les propriétaires des réseaux de distribution sélective ont tenté, avec succès, de
rétablir l’étanchéité de leurs systèmes.

Paragraphe 02 : la protection par le droit pénal

Faute de pouvoir agir efficacement contre l’auteur de l’approvisionnement illicite, c’est contre
le distributeur parallèle lui-même que les promoteurs d’un système de distribution sélective
dirigent le plus souvent leurs poursuites. A cet égard, deux voies sont possibles et ont été
largement employées. La première consiste à agir sur la base du droit des marques (A), et la
seconde se basera sur la responsabilité pénale pour acte de publicité trompeuse (B).

A) la protection par le droit des marques


746
J. P. PAMOUKDJIAN, préc, p. 147.

747
TGI de Montpellier, 20 juin 1988, confirmation cour d’appel de Montpellier, 30 juin 1989, inédit.

208
La distribution sélective porte pratiquement toujours sur des produits marqués authentiques,
c'est-à-dire mis en circulation par des distributeurs agréés sous la marque du fabricant et avec
son consentement. Or, des distributeurs non agréés arrivent des fois à acheter ces produits
marqués puis les vendent en gros ou en détail à divers circuits parallèles ou aux
consommateurs finals.

La question qui se pose à ce niveau est de savoir si un distributeur parallèle peut faire usage
de la marque d’un fabricant dans le commerce lorsqu’aucune autorisation expresse n’a été
donnée à cette fin par le titulaire ?

Durant de nombreuses années, la jurisprudence française reconnaissait au fabricant, qui a


constaté qu’un revendeur non sélectionné vendait ses produits sans son autorisation, le droit
d’agir à son encontre en contrefaçon au sens des dispositions du code pénal qui incriminaient
ceux qui « auront fait usage d’une marque sans le consentement de l’intéressé.»748

Désormais, suite à un revirement complet de la jurisprudence, la vente d’un produit de


marque en dehors du réseau par lequel il est distribué n’est plus considérée comme une
contrefaçon au sens des dispositions du code pénal. Cette jurisprudence qui semble
aujourd’hui bien établie, est fondée sur la théorie consacrée par le droit européen relative à
l’épuisement du droit de marque749.

Il est nécessaire d’expliciter l’acte de l’usage illicite d’une marque (1) pour comprendre la
théorie de l’épuisement du droit de marque (2).

1) L’usage illicite de la marque d’autrui

Il arrive que des revendeurs qui ne font point partie du réseau parviennent cependant à
s’approvisionner en produits marqués pour les revendre sans autorisation et violent de cette
façon un droit de propriété absolu reconnu au fabricant au titre des dispositions protégeant la
propriété intellectuelle750.

748
Art. 422-2 du code pénal français.

749
A. FRANÇON, "L'épuisement du droit de marque", JCP G 1990, doctr, 3428.

750
J. PASSA, « Contrefaçon et concurrence déloyale » LITEC, 1997. p. 9.

209
Pour lutter contre ce phénomène, les fabricants peuvent-ils recourir aux dispositions du droit
pénal ? Est-ce que ces dispositions visent tout usage de la marque d’autrui ou faut-il
distinguer selon que la marque utilisée est authentique ou contrefaite ?

A ces questions, qui ont suscité une abondante jurisprudence en France, et continuent à
diviser auteurs et tribunaux, n’a été apportée aucune réponse claire jusqu’à ce jour.

a) Condamnation de tout usage illicite de la marque d’autrui

L’idée de la protection de la marque n’est pas totalement récente en Algérie. Son apparition,
organisée et structurée dans un texte de lois remonte aux années de l’après indépendance avec
la promulgation de l’ordonnance n° 66-57 du 19 mars 1966. Ce texte fut finalement
abandonné pour laisser place à l’ordonnance n° 03-06 du 19 juillet 2003 au motif que, d’une
part, le système algérien de protection de la marque devait se conformer avec les standards
internationaux et en particulier les règles de l’organisation mondiale de commerce et que,
d’autre part, le législateur algérien cherchait à trouver des solutions à certains problèmes qui
sévissent dans le monde du commerce et en particulier le fléau de la contrefaçon 751.

Les dispositions du texte algérien sont tirées de la législation française dont la protection des
droits du commerçant sur sa marque est reconnue depuis 1857. Ainsi, l’influence des
principes adoptés par le législateur français dans les articles L. 711 et suivants du code de
propriété intellectuelle752 est manifeste sur le dispositif algérien issue de l’ordonnance de
2003, malgré certaines divergences entre les choix des deux législateurs. Tandis que le
législateur algérien, dans le souci de protéger le consommateur, impose, sous peine de

751
F. ZERAOUI-SALAH, Traité de droit commercial algérien : Les droits intellectuels : droits de la propriété
industrielle et commerciale, droits de la propriété littéraire et artistique, EditionsEdik, octobre 2006, P. 202.

752 er
Le Code de la Propriété Intellectuelle français a été promulgué par la loi n° 92 - 597 du 1 juillet 1992. J.O du
3 juillet 1992, p. 8801.

210
sanctions753, que soit marqué tout produit ou service vendu ou mis en vente 754, le législateur
français qualifie la marque d’instrument de concurrence et affirme que son titulaire est libre
de l’utiliser ou non pour ses produits et services755.

Pour bénéficier de la protection pénale de la marque, le législateur algérien exige que soient
respectées, par le titulaire, toutes les procédures relatives au dépôt et enregistrement de la
marque756. En revanche, si la marque n’est pas enregistrée, son propriétaire ne pourra se
prévaloir que d’une protection civile fondée sur l’action en concurrence déloyale ou l’action
en usurpation de marque757. Etant la source principale du texte algérien, le législateur français
dispose de même en précisant à l’article L. 716-2 que « les faits antérieurs à la publication de
la demande d’enregistrement ne peuvent être considérés comme ayant porté atteinte aux droits
du titulaire de la marque ».

Cependant, les deux textes prévoient une exception aux procédures d’enregistrements pour les
marques notoires, mais à la différence des textes français, l’ordonnance n° 03-06 ne donne
aucune définition à la marque notoire758. L’usage illicite de la marque est sanctionné en
France par l’article L. 716-9 du code de la propriété intellectuelle qui reprend l’article 422-02
du code pénal, abrogé par la loi du 1er juillet 1992.759

753
Article 33 de l’ordonnance n° 03-06 relative à la protection des marques : « sont punis d’un
emprisonnement d’un (1) mois à un (1) an et une amende de cinq cent mille (500.000DA) à deux millions
(2.000.000 DA) de dinars ou de l’une des ces deux peines seulement :

1) ceux qui ont contrevenu aux dispositions de l’article 3 de la présente ordonnance en n’apposant pas de
marque sur leurs produits ou leurs services ou qui ont sciemment vendu ou mis en vente un ou plusieurs
produits ou offert des services sans marque ;

754
Art 03 alinéa 1 de l’ordonnance n° 03-06 relative à la protection des marques.

755
« C’est ici l’illustration du caractère libéral et non consumériste de la marque française. », A. CHAVANNE. J. J.
e
BURST, Droit de la propriété industrielle, Dalloz 5 édition 1998,p. 498

756
La demande d’enregistrement se fait auprès de l’INAPI : un dossier doit être déposé et des redevances
acquittées. L’INAPI pratique un examen de forme, contrôle si la marque remplit les conditions de validité et
vérifie l’existence de marques antérieures. Une fois enregistrée, la marque est publiée.

757
Art. 35 de l’ordonnance 03-06 relative à la protection des marques.

758
Arts. 07 et 09 de l’ordonnance n° 03-06 relative à la protection des marques.

759 o er
La loi n 92-597 du 1 juillet 1992 modifiée, relative à la partie législative du Code de la propriété
intellectuelle français.

211
S’attachant à une interprétation littérale de ces dispositions pénales, les juges français de la
chambre criminelle décidaient d’une manière claire que le délit d’usage était constitué chaque
fois que l’emploi de la marque était effectué contre la volonté du titulaire de celle-ci sans
distinguer entre les marques authentiques et les marques contrefaites. En effet, à travers une
jurisprudence abondante, les juges français ont démontré que le délit d’usage illicite de
marque est constitué dès lors que l’on utilise la marque d’autrui sans autorisation et quand
bien même la marque utilisée est la marque authentique760.

La chambre commerciale de la cour de cassation française avait retenu le délit d’usage contre
un revendeur non agrée par application de l’article 422-2 du code pénal français. La
jurisprudence française devait ainsi consacrer une conception très large de l’article 422-2 du
code pénal.761

A cet égard, certains auteurs français ont considéré qu’en raison même de sa généralité,
l’article 422-2 du code pénal vise tout usage de la marque d’autrui sans qu’il y ait lieu de
distinguer selon que la marque utilisée est la marque authentique ou la marque contrefaite 762.

De son côté le législateur algérien a expressément conféré au titulaire d’une marque


enregistrée le droit de s’opposer à tout usage commercial de sa marque sans son accord
préalable. Est également interdit en droit algérien, l’usage commercial d’un signe ou d’un
nom commercial semblable au point de prêter à confusion sur des produits ou des services
similaires763. Certains auteurs algériens affirment que pour être constaté, le délit d’usage
nécessite l’élément matériel, à savoir la contrefaçon de la marque utilisée sans toutefois

760
A. CHAVANNE, "Le délit d'usage de marque et son évolution", Mélanges Mathély, Litec 1990, p. 101, spéc. p.
101.

761
Cass. crim. 24 fevrier 1987, Dalloz, 1988, sommaires commentés p. 297, obs. Gavalda et Lucas de Leyssac.

762
M. Marthely écrit : « … Lorsque l’usage de la marque est effectué contre la volonté de son titulaire, il est
bien certain qu’il est illicite, bien que pourtant sur le signe authentique, car il n’est pas permis de disposer du
bien d’autrui sans son accord. Il n’est pas possible de mettre en doute que l’article 422-2 réprime non
seulement l’usage de la marque contrefaite ou limitée, mais encore l’usage, lorsqu’il n’est pas autorisé, de la
marque authentique », P. MARTHELY, Le droit français des signes distinctifs, éd. Journ. Des notaires 1984, p.
169.

763
Art. 09 de l’ordonnance n° 03-06 relative à la protection des marques.

212
distinguer entre l’auteur de la contrefaçon et l’auteur de l’usage illicite d’une marque
contrefaite764.

Il en résulte que le législateur algérien ne prévoit de sanctions pour l’usage illicite de la


marque d’autrui que lorsqu’il y a contrefaçon de la marque authentique. De ce fait, le droit
national n’a pas adopté une application générale du délit d’usage et a du suivre le revirement
jurisprudentiel survenu ultérieurement en France.

b) Revirementjurisprudentiel en France

Très vite la chambre criminelle de la cour de cassation française changea sa position favorable
à la condamnation du délit d’usage par l’article 422-02 du code pénal en écartant l’application
de ce texte lorsque « les produits ont été régulièrement acquis ».765Cette nouvelle position de
la jurisprudence française met en évidence une réticence de la cour de cassation devant cette
nouvelle extension du domaine des dispositions de l’article 422-2 du code pénal.766

En effet, suite à une évolution remarquable, la cour de cassation à travers sa chambre


criminelle va affiner davantage sa position en déclarant que « l’article 422-2 du code n’a pas
pour objet de sanctionner pénalement les revendeurs de produits, même commercialisés au
mépris d’un système de distribution sélective, lorsque la marque n’a pas été contrefaite ».767

Par cet arrêt, les juges français abandonnent l’application générale de l’article 422-2 et
limitent sa portée aux seuls produits contrefaits. Les fabricants ne pouvant alors, en cas de
produits authentiques, invoquer les sanctions des dispositions réprimant la contrefaçon pour
faire « la police » de leur réseau.

Telle a été également l’appréciation d’un important courant doctrinal qui s‘est prononcé en
faveur d’une interprétation étroite de l’article 422-2 et recommandait d’envisager son

764
F. ZERAOUI-SALAH, op. cit, p. 270.

765
Cass. crim. 18 mai 1987, bull. crim. N° 200, p. 541.

766
A. CHAVANNE, op. cit.

767
Cass. crim. 5 avril 1990, Dalloz, 1990, sommaires commentés, p. 371, obs. D. Ferrier.

213
application strictement pour incriminer l’usage par un distributeur parallèle d’une marque
contrefaite.768

En droit algérien, les rédacteurs de l’ordonnance n° 03-06 paraissent avoir été inspirés par
cette nouvelle position de la jurisprudence française qui fait de la contrefaçon un élément
essentiel pour sanctionner l’auteur d’un usage commercial sans autorisation d’une marque
enregistrée. Il faut remarquer aussi qu’en droit français et algérien, la bonne foi est en principe
indifférente dans les poursuites pénales du délit d’usage illicite de la marque d’autrui769.

Cependant, une divergence paraît subsister en France entre la jurisprudence de la chambre


criminelle et celle de la chambre commerciale de la cour de cassation française. En effet,
après avoir adhéré à la nouvelle position de la chambre criminelle par des arrêts défavorables
à la condamnation pénale du distributeur parallèle, la chambre commerciale adopte une
position inverse. Ainsi, en approuvant une cour d’appel, elle admet que « le commerçant qui,
sans avoir la qualité de revendeurs agréé, commercialise des parfums de grande marque dont
la vente est réservée à un réseau de distribution sélective organisé par le propriétaire de la
marque, se rend coupable d’usage illicite de la marque ».770

En adoptant cette position rigoureuse, la chambre commerciale va dans le sens d’une


protection efficace des intérêts du fabricant et de l’ensemble de ses distributeurs agréés,
puisque elle reconnaît au fabricant de recourir à l’action en contrefaçon pour lutter contre
toutes ventes parasitaires effectuées par des distributeurs non agréés au mépris de son réseau
sélectif. Par un autre arrêt, la chambre commerciale entérine définitivement son opposition à
la chambre criminelle et statue que « le délit d’usage illicite de la marque d’autrui résulte de la
seule commercialisation des produits concernés sans qu’il y ait à rechercher l’existence de

768 ème
A. Chavanne et J. J. Burst, Droit de la propriété industrielle, précis Dalloz, 2 éd. 1980, n° 830 ; CA. Lyon, 6
fevrier 1985, J.C.P. éd. E., 1985, n° 14602 note J. Azema ; B. Pochon, Gaz. Pal., 1976, 2, 795.

769
Le législateur français a prévu quelque exceptions où la mauvaise foi est exigée notamment à l’article L. 716-
11 aet b et l’article L. 716-11 a, b et c relatifs aux délits spécifiques aux marques collectives. De son côté le
législateur algérien exige expressément la mauvaise foi à l’article 33 en utilisant le mot « sciemment » pour
ceux qui ont vendu ou mis en vente un produit ou offert un service non marqué.

770
Parfumerie Michelle c/Sté Chanel, Contrats-Concurrence-Consommation, avril 1993, p. 9, obs. Vogel.

214
faits propres à caractériser une contrefaçon, une imitation frauduleuse ou une altération
délibérée du conditionnement des produits en cause ».771

Il s’agit là d’un retour de la chambre commerciale à la jurisprudence initiale caractérisée par


l’application de l’article 422-2 à toute vente hors réseau et condamnant l’auteur au délit
d’usage illicite de la marque d’autrui sans toutefois opérer une distinction entre les produits
authentiques et ceux contrefaits par le distributeur parallèle.

Quoi qu’il en soit, la chambre criminelle, bien qu’hésitante au début, semble à travers
l’évolution de sa jurisprudence converger de plus en plus avec la théorie de l’épuisement du
droit des marques, consacrée par le législateur, tant européen que français. En effet, ce
passage sera consacré à la jurisprudence communautaire et française car celle de l'Algérie n'a
rien prévu dans ce domaine ; cette dernière a surtout limité son intervention aux généralités
relatives à l’atteinte aux droits exclusifs sur la marque772.

2) L’épuisement du droit des marques :

Ce dernier revirement jurisprudentiel s’est donc inspiré d’un principe bien établi en droit
européen fondé sur la théorie de l’épuisement du droit de marque. Selon cette théorie, le droit
exclusif, dont dispose le fabricant sur sa marque s’épuise pour les produits concernés, après
leur première mise en circulation sur le marché commun.773

Pour veiller à établir durablement un marché unique, le traité de Rome a prévu, en matière de
propriété industrielle, un ensemble de dispositions, les unes traitant de la libre circulation des
marchandises, les autres de l’existence et l’exercice des droits privatifs, le tout dans un
ensemble destiné à promouvoir la concurrence.774

On verra d’abord, en matière de marque, l’application du principe de l’épuisement du droit de


marque, puis les limites de l’épuisement de ce droit.

771
Cass. com., 21 juin 1994, n° 92-17.361, D. 1994, IR., p. 204.

772
F. ZERAOUI-SALAH, op. cit, p. 259.

773
C. GAVALDA, G. PARLEANI, Doit européen des affaires – Litec 1992 n° 59 ; n° 919

774
E. VERBRAEKEN, « L'incidence de l'article 30 du traité de Rome sur le droit national des marques ». RTD com
1997, p. 591.

215
a) l’application du principe

Au cours des dernières années, le droit des marques en France a été considérablement modifié
sous l’influence du droit communautaire. Parmi les nouveau principes admis en droit français,
il y a lieu de citer l’introduction des dispositions relatives à l’épuisement du droit des
marques775.

Ainsi, en reprenant l’article 7 de la directive européenne n° 89/104/CEE776, le code de la


propriété intellectuelle français en son article L. 713-4 alinéa 1er « le droit conféré par la
marque ne permet à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produits qui ont été
mis dans le commerce dans la communauté européenne ou dans l’espace économique
européen sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement. »

Dès lors, ces dispositions interdisent aux titulaires de marques d’empêcher l’usage de leurs
marques et partant agir en contrefaçon une fois que les produits marqués ont été mis dans le
commerce par le titulaire du droit ou avec son consentement. C’est dire que le titulaire de la
marque n’est maître que de la première mise en circulation de ses produits, sans pouvoir par la
suite recourir à son droit de marque pour se protéger et interdire la vente par des distributeurs
non agréés. Si le principe de l’épuisement du droit met à mal la protection des réseaux de
distribution sélective par le droit des marques, il favorise la libre circulation des produits et
services et tend à endiguer le phénomène de cloisonnement de marché777.

En réalité, appliquer cette théorie à un distributeur non agréé revient à enlever au titulaire de
la marque une partie de ses droits exclusifs sur la marque, le privant de la sorte d’un moyen de
protection contre la commercialisation de ses produits par des distributeurs clandestins.
Toujours est-il, ce mécanisme ne fonctionne que s’il s’agit de marque authentique n’ayant pas
fait l’objet d’une contrefaçon par le tiers qui en violant le droit de marque invoque
l’application du principe de l’épuisement de droit. Aussi, le droit communautaire limite les
effets de ce principe à l’espace économique européen778.

775
A. CHAVANNE, « Nouvelle loi sur les marques de fabrique » RTD com 1991, p. 197.

776
Directive n° 89/104/CEE du Conseil de l’Europe, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États
membres sur les marques.

777
J. AZEMA. RTD com., 2001. n°1. chronique. p. 432.

778
J. L. COLOMBANI, Epuisement du droit des marques. www.Avocats.fr

216
Une autre condition toute aussi déterminante tient à ce que la première mise du produit
litigieux dans le commerce soit faite par le titulaire de la marque ou avec son consentement.

Dès lors, peut-on estimer qu’il y a consentement du titulaire de la marque, même lorsque l’un
des membres de son réseau viole son obligation contractuelle de l’interdiction de revente à
des distributeurs hors réseau ?

L’interprétation de la notion de consentement n’est certainement pas chose aisée et a donné


lieu à des réponses différentes notamment entre la CJCE et la cour de cassation française.

Si la réponse de la CJCE fut positive et qu’elle a considéré que les droits sont épuisés car la
violation d’une obligation contractuelle n’entraîne pas nécessairement le défaut de
consentement du titulaire, la cour de cassation française s’est orienté vers une approche
subjective. Ainsi, la haute juridiction française a pris en compte le non respect du distributeur
agréé de ses engagements contractuels pour constater le défaut de consentement du titulaire de
la marque lors de la première mise à la circulation du produit. Pas de consentement, pas
d’épuisement et donc application des règles de la contrefaçon779. Cette opposition entre la
jurisprudence européenne et française ne fait que confirmer la difficulté de l’application du
principe de la libre circulation des produits et services qui se heurte le plus souvent au
caractère territorial des droits de marque780.

On peut alors se demander s’il est possible de concilier deux objectifs complètement
contradictoires ; la libre circulation des produits d’un côté et la protection de la propriété
industrielle de l’autre. Comme solution à ce problème, des tempéraments ont été apportés à la
rigueur du principe de l’épuisement du droit de marque. A vrai dire, l’article L. 713-4 du code
de la propriété intellectuelle français n’est pas achevé par la formule citée ci-dessus781. Le
second alinéa de l’article pose les limites à l’application du principe de l’épuisement de droit

779
« Evolution de la théorie de l’épuisement du droit de marque » Lamy droit économique, 2003, n°4579, p.
1720.

780
N. BOUCHE,Le principe de territorialité de la propriété intellectuelle, préf. F . Pollaud-Dulian, L'Harmattan,
2002, p. 257.

781
A. FRANÇON, "L'épuisement du droit de marque", JCP G 1990, doctrine 3428.

217
de marque782. Ainsi, dans le domaine des marques, la théorie de l’épuisement du droit
comporte des limites. Ce sont ces limites qu’il faut maintenant étudier.

b) Les limites de l’application du principe

Afin de sauvegarder la propriété industrielle contre tout abus, la CJCE a changé d’optique en
ce qui concerne la marque. Ce changement, qui s’est traduit par la fixation de limites au
principe de l’épuisement, a conduit le droit communautaire et français à reconnaître en
quelque sorte le droit de suite au profit du titulaire de marque. 783 En effet, l’évolution de la
jurisprudence communautaire atteste que la CJCE reconnaît, qu’en plus de protéger son
titulaire contre ses concurrents, la marque remplit aussi une autre fonction, qui est d’indiquer
au consommateur l’origine du produit. La CJCE qualifie même d’essentielle cette dernière
fonction de la marque.784

Aussi, la directive communautaire relative à l’harmonisation des législations nationales des


pays européens en matière de marque, du 21 décembre 1988, précise que le but de la marque
enregistrée est notamment de garantir la fonction d’origine de la marque. C’est donc pour
assurer la protection du consommateur qu’est apparue la nécessité d’apporter une dérogation à
la règle d’épuisement du droit, notamment en cas de reconditionnement affectant l’état initiale
du produit785.

En droit français, l’article L. 713-4 du code de la propriété intellectuelle stipule en son second
alinéa « toutefois, faculté reste alors ouverte au propriétaire de s’opposer à tout nouvel acte de
commercialisation s’il justifie de motifs légitimes, tenant notamment à la modification ou à
l’altération, ultérieurement intervenue, de l’état du produit ».

Ce texte admet clairement que l’application du principe de l’épuisement du droit de marque


ne peut avoir lieu si le produit a été altéré ou modifié après sa mise sur le marché d’un des

782 ème
A. CHAVANNE & J-J. BURST, Droit de la propriété industrielle. 5 éd, Dalloz Delta 1998, p. 725.

783
J. J. BURST ET R. KOVAR, JCP, 1976, éd. E 12266.

784
J. J. BURST ET R. KOVAR, « Le conditionnement de produits marqués et le droit communautaire », JCP 1978,
éd. E. ІІ 12830.

785
A. CHAVANNE, « Nouvelle loi sur les marques de fabrique », op. cit.

218
pays de la communauté européenne. En d’autres termes, l’épuisement du droit ne joue qu’en
cas d’usage normal du produit.786

En effet, l’adverbe « notamment » suppose que, pour des produits de luxe, dont le prestige
repose sur l’image de marque, une commercialisation dévalorisante, hors des critères requis
des distributeurs agréés, puisse conduire les titulaires des marques à se défendre par une
action en contrefaçon, sans que l’on puisse leur opposer la règle de l’épuisement du droit, dès
lors que l’usage de la marque est fait sans leur accord. Il lui faudra, cependant, justifier de
motifs légitimes, une modification ou une altération n’en sont que des exemples parmi tant
d’autres. En matière de distribution sélective, le souci de protéger le réseau contre les atteintes
des revendeurs non agréés, en vue de la protection des produits de luxe est, tout aussi, un
motif légitime787.

Ainsi, la cour d’appel de Paris a jugé que « l’existence d’un réseau de distribution sélective,
conforme aux critères de licéité imposés par le droit de la concurrence, constitue un motif
légitime pour écarter l’effet d’épuisement et interdire la distribution des produits et la
diffusion de la marque en cause lorsque celles-ci sont opérées en violation des règles du
réseau. »788

Très récemment, la société Chanel avait agi en contrefaçon à l’encontre de sociétés qui
avaient acheté des produits cosmétiques et de parfumerie de la marque Chanel pour les
revendre dans des conditions dévalorisante.789En l’espèce, la jurisprudence française a retenu
l’existence d’un motif légitime écartant la règle de l’épuisement des droits sur les produits.

Elle déclare, entre autres, que « les conditions d’exposition à la vente des produits Chanel et
la publicité ayant accompagné l’opération commerciale affectaient négativement la valeur de

786
Ibid.

787
M. NUSSEMBAUM, Evaluation du préjudice de marque : le cas particulier de l’atteinte à l’image de marque,
JCP. Ed, E. 1993, І, n° 303, p. 567.

788
V. Paris, 1er oct. 1997, Dalloz affaires 1997, n° 39, p. 1293.

789
Solderie en libre service aménagée dans un hangar situé dans une zone commercial, affichettes
promotionnelles de qualité médiocre.

219
la marque en ternissant l’allure et l’image de prestige des parfums et cosmétiques de luxe de
la société Chanel »790.

En traçant des limites au principe plus général de l’épuisement du droit des marques, le droit
européen et français renforce la protection des réseaux de distribution sélective et procurent le
fabricant d’une arme redoutable, à savoir l’action en contrefaçon et ce qu’elle peut engendrer
comme sanctions pénales. Par ailleurs, il est à noter que les juridictions européennes et
françaises s’accordent parfaitement à écarter la théorie de l’épuisement international des
droits de marque.791

B) La protection par l’action en publicité trompeuse

Il n'existe pas en droit français de définition générale de la publicité 792. L'article L.121-1 du
Code de la consommation procède par la négative et se borne à interdire toute publicité
trompeuse à destination du consommateur793.

790
ANNE-KATEL. MARTINEAU, «marque et distribution sélective : arrêts du 23 mars 2010 sur la marque
Chanel », www.avocats.fr.

791
« Evolution de la théorie de l’épuisement du droit de marque » Lamy droit économique, 2003, n°4579, p.
1720.

792
La publicité est définie en jurisprudence française comme « tout moyen d’information destiné à permettre
au client potentiel de se faire une opinion sur les caractéristiques des biens ou services proposés, et ce, quel
que soit le support de cette communication. », Cass. crim., 14 oct. 1998, n° 98-80.527

220
Elle est entendue, au sens de la loi algérienne n° 04-02 fixant les règles applicables aux
pratiques commerciales, en tant que toute communication ayant pour objectif direct ou
indirect de promouvoir la vente de biens ou services, quel que soit le lieu ou les moyens mis
en œuvre794.

En droit algérien comme en droit français, la publicité trompeuse est un délit « ergaomnes »,
c’est-à-dire répréhensible par sa seule existence, même si la personne qui s’en plaint n’en a
pas objectivement été victime, dès lors qu’elle est de nature à induire en erreur sur les qualités
substantielles du produit ou du service795. Cependant, lorsque la publicité trompeuse a incité
la victime à conclure un contrat, elle peut alors être assimilée à un dol. Mais, alors que le dol
ne peut être invoqué que par la partie lésée afin d’obtenir l’annulation du contrat, les textes
sur la publicité trompeuse sont des textes de nature pénale qui peuvent être soulevés par toute
personne ayant un intérêt796.

Dés lors, l’action en publicité trompeuse peut être intentée par tout utilisateur, même
potentiel, ainsi que par des associations de défense des consommateurs, et ce en l’absence
d’un contrat, selon l’article 65 de la loi n° 04-02 qui stipule que les associations de protection
du consommateur et les associations professionnelles légalement constituées ainsi que toute

793
Art. L. 121-1 du code de la consommation français pose le règle suivante : « Est interdite toute publicité
comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature
à induire en erreur, lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs éléments ci-après ; existence, nature,
composition, qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine, quantité, mode et date de
fabrication, propriétés, prix et conditions de vente de biens ou services qui font l’objet de la publicité,
conditions de leur utilisation, résultats qui peuvent être attendus de leur utilisation, motifs ou procédés de la
vente ou de la prestation de services, portée des engagements pris par l’annonceur, identité, qualité ou
aptitude du fabricant, des revendeurs, des promoteurs ou des prestataires ».

794
Pour donner une définition à la publicité le législateur algérien s’est inspiré de la loi française du 25 mai
1999, modifiant la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l'information et la protection du
consommateur, (art. 03 de la loi n° 04-02 relative aux règles applicables aux pratiques commerciales).

795
Pour ce qui est de la publicité comparative, il convient de préciser que le législateur français l’interdit par
l’article L. 121-8 du code de la consommation, tandis que le droit algérien, toujours en attente de la
promulgation d’une loi spéciale relative à la publicité, ne connaît pas de réglementation de cette pratique
considérée, à l’instar de la publicité trompeuse, comme illicite. Cependant, il faut noter que le décret exécutif
90-366 du 10 novembre 1990 relatif à l'étiquetage et à la présentation des produits domestiques non
alimentaires stipule en son article 08 alinéa 02 « Est interdite toute notion tendant à distinguer abusivement un
produit d’autres produits similaires ». Ainsi, la référence à l’interdiction de la publicité comparative semble
exister en droit algérien et ce, depuis longtemps.

796
FOURRES, La mauvaise foi dans la publicité trompeuse, Gaz. Pal. 1977-1 doctr, p. 170.

221
personne physique ou morale ayant intérêt, peuvent ester en justice tout agent économique qui
a enfreint aux dispositions de la loi 04-02 relative aux règles applicables aux pratiques
commerciales797.

En pratique, et même selon l’article 28 de la loi précitée, un réseau de distribution sélective


peut être confronté à cette atteinte par un commerçant non agréé qui entend profiter de la
notoriété qui s’attache au produit pour drainer vers lui une clientèle qui, attirée par la marque
de ce produit, se rendra dans ses magasins et achètera, par la même occasion, des produits
d’une autre marque798.

Cette pratique consiste pour un revendeur à proposer à un prix avantageux un produit


déterminé, généralement un produit dont la marque est connue, pour attirer la clientèle dans le
point de vente. Mais très souvent les produits faisant l’objet de cette pratique ne sont pas en
stock chez le revendeur en quantités suffisantes pour répondre à la demande ; le commerçant
dirige alors le client vers d’autres produits799.

La publicité trompeuse est qualifiée de pratique commerciales déloyale en droit algérien et la


loi n° 04-02 en punit tout auteur d’une amende de cinquante mille dinars (50 000 DA) à cinq
millions de dinars (5 000 000 DA). Aussi, les marchandises, les matériels et équipements
ayant servi à commettre les infractions peuvent être saisis sous réserve des droits des tiers de
bonne foi. Les biens saisis doivent faire l’objet d’un procès-verbal d’inventaire selon les
procédures définies par voie réglementaire800.

797
Les associations sont régies par en droit algérien la loi 90-31 de 4 décembre 90. Les associations de
consommateurs existaient déjà avant la promulgation de cette loi. Elles étaient créées par la loi 89-02 de
février 89.Ces associations sont reconnues d'utilité publique et peuvent se porter partie civile pour exiger
réparation pour les dommages enregistrés, selon la loi 0903 du 25 février 2009. Un conseil national de
protection du consommateur sera créé par décret en application de l'article 24 de la loi n°09-03 du 25 février
2009 relative à la protection du consommateur et à la répression des fraudes. Le conseil sera chargé d'émettre
son avis et proposer des mesures qui contribueront au développement et à la promotion de la politique de
protection du consommateur. La composition et les compétences de ce conseil sont déterminées par voie
réglementaire.

798
F. ZERAOUI-SALAH, Traité de droit commercial algérien : le fonds de commerce et les droit intellectuels,t 1 :
Le fonds de commerce, Editions Edik, 2001, p. 29.

799
PH. LE TOURNEAU, "Parasitisme", Juris-Classeur Concurrence-Consommation, 1995, fascicule 227.

800
Arts. 38 et 39 de la loi n° 04-02 relative aux règles applicables aux pratiques commerciales.

222
Le législateur français a récemment saisi l’occasion de l’adoption de la loi n° 2008-3 du 3
janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs pour
transposer en droit français, la directive n° 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques
commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs. Cette loi refond le Titre
II du Code français de la consommation, relatif aux « pratiques commerciales », en y
intégrant, dans un chapitre préliminaire, la notion communautaire de « pratiques
commerciales déloyales ». Ainsi, cette nouvelle loi sanctionne la publicité trompeuse d’une
façon générale comme étant une pratique commerciale déloyale qui peut prendre la forme soit
d’une action trompeuse soit d’une omission trompeuse. Le législateur français est venu
préciser également que les actions trompeuses peuvent être commises même au préjudice de
professionnels, à l’inverse des omissions trompeuses, qui ne peuvent être commises que
contre des consommateurs801.

En droit français et en droit algérien, la publicité visée par les textes ne doit pas être
seulement mensongère, elle doit être trompeuse, c'est-à-dire de nature à induire en erreur celui
qui la reçoit.

Une publicité emphatique, optimiste ou humoristique est tolérable au niveau des tribunaux802.
Ni la mauvaise foi de son auteur ni l’induction en erreur de la victime, sont des éléments
constitutifs du délit de publicité trompeuse ; il suffit que la publicité soit de nature à induire en
erreur pour engager la responsabilité de l’annonceur.803

En matière de distribution sélective, les juges du fond retiennent le délit de publicité


trompeuse lorsqu’un distributeur non agréé commercialise des produits portant la
mention « ne peut être vendu que par un distributeur agréé ». Aussi, lorsqu’il se présente
comme un distributeur agréé pour la vente des produits concernés par la distribution sélective,
le revendeur non agréé engage sa responsabilité804. Le fabricant de produits de luxe qui

801
La nouvelle loi intègre également dans le système français la nouvelle notion de « consommateur
normalement informé et raisonnablement attentif et avisé », alors qu’il existait dans le texte ancien la notion
de « consommateur moyen » et qui servait depuis longtemps de référence à la jurisprudence française (CA
Paris, 31 janvier 1985, Gaz. Pal. 1985, 2, somm. p. 221).

802 er
N. BADI BOUKEMIDJA, « les atteintes à la publicité », El watan 1 novembre 2009.

803
N. FERRY-MACCARIO, Droit du marketing, éd 2005, Pearson Education France, p. 104.

804
M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n° 32.

223
invoque le délit de publicité trompeuse doit apporter la preuve de la licéité du contrat de
distribution sélective le liant à ses revendeurs agréés.

En matière de produits de haute technicité et notamment dans le domaine de l’informatique,


l’attitude des tribunaux français à tendance à être plus rigoureuse même à l’égard des
distributeurs agréés. En effet, selon une jurisprudence classique, une publicité qui donne des
renseignements qui ne sont pas techniquement inexact mais seulement trop flatteurs, qui
peuvent en conséquence donner à l’utilisateur une conception trop simpliste ou trop optimiste
d’un système informatique sont de nature à engager la responsabilité du revendeur agréé805.

Une fois reconnu coupable, l’auteur de publicité trompeuse engage non seulement sa
responsabilité pénale, mais aussi sa responsabilité civile. Des demandes de dommages et
intérêts peuvent être présentées devant les juridictions compétentes indépendamment de toute
poursuite pénale. En raison de l’importance du tort que provoque ce comportement déloyal, la
victime de publicité trompeuse peut enfin et surtout obtenir la cessation judiciaire de la
publicité trompeuse806.

La lecture attentive des textes français et algérien enseigne que la lutte rigoureuse contre ce
délit n’est plus de la simple protection des professionnels propriétaires des réseaux, mais celle
même des consommateurs. En effet, se présenter faussement comme un distributeur agréé
auprès du public ou bien vendre des marchandises dont le conditionnement annonce que leur
distribution est réservée à des distributeurs sélectionnés et de nature à induire en erreur les
consommateurs sur la qualité du revendeur807.

Le décret exécutif n° 97-37 relatif aux produits cosmétiques et d’hygiène corporelle


promulgué par le législateur algérien en application de l’article 03 de la loi n° 89-02 relative à
la protection du consommateur interdit toute forme d’information du consommateur, tout
procédé de publicité, d’exposition ou de vente de nature à induire en erreur le consommateur
sur les caractéristiques des produits cosmétiques et d’hygiène corporelle notamment, la

805
ANDRE BERTRAND, Droit français de la concurrence déloyale, CEDAT, 1998, p108.

806
PH. LE TOURNEAU, « La spécificité du préjudice concurrentiel », RTD com. 1998, p . 83.

807
A. BIENAYME, « L'intérêt du consommateur dans l'application du droit de la concurrence : un point de vue
d'économiste ». Revue Internationale de droit économique, N°3, 1995.

224
composition, les qualités substantielles, les modes de fabrication, les dimensions ou l’origine
des produits808.

La jurisprudence française estime qu’un auteur de publicité trompeuse qui se dit faussement,
auprès des consommateurs, revendeur agréé, implique qu’il considère cette investiture comme
présentant les garanties de qualité réservées aux clients ou induisant l’idée de luxe recherchée
par les consommateurs. Le vendeur parallèle usurpe ainsi une qualité qui ne lui appartient pas
et qui peut séduire indûment l’acheteur parce qu’elle s’accompagne à ses yeux de diverses
garanties.809

Si l’action en contrefaçon se présente comme une action distincte basée sur un droit spéciale,
alors que l’action en concurrence déloyale n’est autre que l’application ordinaire des règles de
la responsabilité civile, peut-on alors penser à un cumul des deux actions pour renforcer la
protection et garantir une meilleure défense aux propriétaires des réseaux sélectifs ?

Du point de vue théorique, les deux actions sont toujours considérées comme séparées.
L’action en contrefaçon, lors qu’elle intervient pour protéger un droit privatif devrait exclure
l’action en concurrence déloyale.810

Du point de vue pratique, la cour de cassation française a implicitement mis l’accent sur
l’option entre les deux voies. Elle estime que « l’action en concurrence déloyale a pour objet
d’assurer la protection de celui qui ne peut se prévaloir d’un droit privatif ».811

A cause de l’insuffisance des sanctions économiques prévues par l’action en contrefaçon, la


pratique judiciaire moderne, notamment en France, tend à associer les deux actions en
recherchant un complément d’indemnisation au titre de l’action en concurrence déloyale812.

808
Décret exécutif n°97 - 37 du 14/01/1997, définissant les conditions et modalités de fabrication , de
conditionnement, d’importation et de commercialisation sur le marché national de produits cosmétiques et
d’hygiène corporelle ( JO N° 04 / 1997 ).

809
G. BONNET ET J.M. MOUSSERON, « Donner et retenir ne vaut », Cah. Dr entr, 1989/2, 21.

810
J. SCHMIDT-SZALEWSKI, « La distinction entre l'action en contrefaçon et l'action en concurrence déloyale
dans la jurisprudence ». RTD com 1994, p. 455

811
Cass. com. 6 déc. 1984, D. 1987, somm. P. 42.

812
J. SCHMIDT-SZALEWSKI, préc , p. 463.

225
Conclusion

Au terme de cette étude, il apparaît que la distribution sélective est tout à fait acceptée par les
tribunaux et les autorités de contrôle de la concurrence. En France, la position favorable de la
législation et de la jurisprudence s’inscrit dans une longue évolution. En Algérie, la législation
en vigueur semble bien adaptée à faire face à cette technique contractuelle dont la maitrise
dépasse les règles générales pour dépendre d’une réglementation spéciale. Il s’agit d’un
contrat qui ne repose pas uniquement sur les techniques juridiques classiques que sont le droit
des obligations contractuelles et les règles applicables au contrat de vente. En limitant

226
directement le nombre de distributeurs potentiels, le contrat de distribution sélective est
rigoureusement encadré par le droit de la concurrence.

Si la législation algérienne tant générale que spéciale semble partir du bon pied, La mise en
œuvre et le développement de la distribution sélective exige les meilleures conditions
possibles où l’Etat doit non seulement veiller à l'instauration d'un système stable, transparent
et crédible susceptible de créer un climat de confiance pour les fabricants nationaux et
étrangers, mais aussi au dénouement rapide et équitable des conflits résultant de cette pratique
commerciale813.

De l’autre rive de la méditerranée, les juges français exercent de façon efficace leurs trois
missions: préciser et compléter la loi, éliminer les antinomies et adapter la loi aux faits. Face à
un contentieux technique et spécialisé, la jurisprudence française en matière de contrats de
distribution a pour avantage de pouvoir faire varier les solutions en fonction des spécificités
de chaque situation et d'être créée par des juges souvent choisis pour leur expérience et leurs
compétences techniques.

Aidés par une doctrine abondante et variée, les tribunaux français se sont ainsi adaptés, par
petites avancées successives, à la nature conflictuelle de la distribution sélective qui, en raison
de sa pratique courante, connaît une évolution constante. Outre la distribution sélective, il a
été montré que le succès de la jurisprudence française en droit des affaires s'explique
également par un refus des normes écrites. Ce refus est la conséquence de deux mouvements
qui dominent aujourd'hui l'évolution du droit des affaires en France: la contractualisation et
l'européanisation814.

Par rapport aux résultats obtenus en France, l’Algérie est appelée à moderniser et renforcer le
système judiciaire actuel pour palier aux situations croissantes et de plus en plus complexes

813
« Cependant, si les textes en vigueur encouragent l’investissement, la réalité rapproche la réglementation
de la fiction. », M. SALAH, le développement de l’investissement à la lumière des textes récents – ordonnance n°
01-03 du 20 août 2001et ses textes d’application. Revue entreprise et commerce – REC- 2005, p. 81 à 95.

814
La contractualisation serait la manifestation juridique de la transformation des règles du droit des affaires, la
négociation et le contrat se substituant à l'autorité de l’Etat. L’européanisation se manifeste par l’influence du
droit communautaire sur les procédures et sur les règles de droit substantiel des états membres de l’union
européenne.

227
du monde des affaires815. Pour se faire, le législateur a engagé un ensemble de réformes ayant
trait essentiellement à la qualification des magistrats et les auxiliaires de justice de manière à
ce qu’ils assument dans de bonnes conditions les fonctions d’une justice commerciale
moderne. Aussi, la modernisation doit toucher aux règles essentielles de procédure pour les
adapter aux besoins du règlement efficace des litiges commerciaux. Enfin, pour offrir une
sécurité juridique renforcée aux investisseurs étrangers, l’arbitrage peut constituer un bon
moyen alternatif de résolution des différends commerciaux d’où la nécessité de consolider son
cadre juridique et de renforcer toutes les institutions qui gèrent les modes de règlement
alternatifs des différents (arbitrage, conciliation et médiation).

Parallèlement à la contribution des tribunaux français, le conseil de la concurrence a joué un


rôle déterminant dans l’élaboration des règles de la distribution sélective. Ceci s’explique par
le fait que ce conseil s’affirme comme un organe doté d’un pouvoir de décision et de sanction
autonome dans le domaine des pratiques anticoncurrentielles. L’intervention de la cour
d’appel de paris à largement participé à ce succès816.

Bien que le transfert du contentieux des décisions du conseil de la concurrence à la juridiction


judiciaire ne soit pas fait sans difficultés, le système français est à présent une véritable
réussite et participe réellement au développement du droit de la concurrence français817.

815
L’Algérie s’est dotée de nombreux textes à caractère législatif et réglementaire, venus modifier
profondément le cadre juridique de l’ensemble des branches du droit: droit des affaires, droit civil, droit
administratif, droit foncier, procédure civile et administrative, droit de la famille, droit de la nationalité,
condition des étrangers, etc. Aussi de la Constitution du 28 novembre 1996 (révisée le 12 novembre 2008) on
retiendra les règles de base suivantes: «Le pouvoir judicaire est indépendant» (article 129), «les décisions de
justice sont motivées et prononcées en audience publique» (article 134), «le juge n’obéit qu’ à la loi» (article
138), «la loi protège le justiciable contre tout abus ou contre toute dénaturation du juge» (article 141), enfin et
surtout il est affirmé que «la Cour suprême constitue dans tous les domaines du droit, l’organe régulateur de
l’activité des cours et des tribunaux» et «assure l’unification de la jurisprudence à travers le pays et veille au
respect du droit» (article 143). De façon complémentaire, l’Algérie a adhéré à un nombre impressionnant de
conventions multilatérales et de conventions bilatérales (protection des investissements, entraide judicaire et
exécution des décisions de justice, suppression des doubles impositions, arbitrage international).

816
la Cour d'appel de Paris est compétente, en vertu de l'article 15 de l'ordonnance du 1er décembre 1986,
devenu l'article L. 464-8 du Code de commerce, pour statuer sur les recours formés contre les décisions du
Conseil de la concurrence.

817
ANNE PERROT, « L'évolution de la politique de la concurrence française » In: Économie rurale. N°277-278,
2003. pp. 206-217.

228
En dépit de toutes les réformes apportées par le législateur algérien, le conseil de la
concurrence reste sans activité contribuant ainsi largement à la naissance d’un marché sans
règles où les pratiques commerciales déloyales sont devenues monnaie courante.

Pour une meilleure maitrise du marché algérien, l’Etat doit instaurer un cadre normalisé de
collaboration et d’échange d’information entre le conseil de la concurrence et les différentes
autorités nationales de contrôle (conseil de la concurrence, service des douanes, inspection
des finances …) en vue d’assurer l’efficacité nécessaire à la lutte contre le marché informel.
En effet, lorsque le secteur du marché gris est circonscrit, les pratiques déloyales diminuent et
les règles du droit de la concurrence reprennent la valeur qui leur est due. De même, pour la
coopération internationale dans le domaine de la concurrence afin que le Conseil de la
concurrence national puisse travailler en partenariat avec les Autorités de Concurrence
étrangères et bénéficier de leurs expériences.

De façon aussi pertinente, il faut procéder à la formation continue des personnels en charge
de la concurrence (cadres, enquêteurs, rapporteurs du Conseil de la concurrence,…etc.) pour
permettre d’avoir un bon traitement des cas de pratiques anticoncurrentielles dans le marché
algérien. A cette fin et à l’instar du système français, il serait tout-à-fait souhaitable de
constituer une banque de données dans le domaine de la concurrence et assurer la publication
des décisions du Conseil de la concurrence faisant jurisprudence.

Par ailleurs, l’insuffisance de la culture de la concurrence dans notre pays et de sa propagation


freine l’instauration des règles de la concurrence au niveau du marché. Le plus grand défi
auquel doit faire face les autorités publiques est principalement le manque de cette culture.
Alors que l’environnement économique et institutionnel en Algérie est marqué par les règles
de gestion propre à l’économie de marché, la consécration et le développement d’une culture
de la concurrence chez les différents intervenants sur le marché algérien est de première
importance pour une application efficace de loi.

Face à cette situation de désorganisation du marché algérien Certaines interrogations restent


posées :

Y a t-il un avenir pour une distribution bien organisée des produits de luxe ou de haute
technicité en Algérie? Et plus généralement y a t-il un avenir pour les règles d’un droit des
affaires qui soit compatible avec l’ouverture et l’insertion de notre économie sur le marché
international?
229
D’autre part, il convient de se demander s’il y a une volonté politique réelle de mise en œuvre
des réformes adoptées afin de favoriser le développement des contrats d’affaires en Algérie
comme la franchise ou la distribution sélective?

Aussi, l’avenir de la distribution sélective en Algérie dépendra de la protection du réseau


accordée par la jurisprudence et la législation tant générale que spéciale, notamment celle
relative à la protection de la propriété intellectuelle et industrielle. Force est de constater que
l'absence de contrôle et de l’application de la loi dans le marché actuel algérien a permis à bon
nombre d’opérateurs économiques de profiter du laxisme des pouvoirs publics et de s’adonner
aux pratiques commerciales illicites qui, en l’absence de répression, pourraient gravement
nuire à un fabricant de produits de luxe et à l’ensemble de ses distributeurs.

Il est grand temps de rappeler que la qualité essentielle d’un système juridique est d’assurer
aux opérateurs économiques la sécurité à laquelle ils peuvent prétendre pour mener à bien
leurs affaires. Entre l’entrepreneur et le parasite, il faut choisir non sur des critères de moralité
mais plutôt raisonner en termes d’efficacité économique et sociale.

Bibliographie

- I / Principaux textes législatifs et réglementaires (par ordre chronologique)

A- En droitalgérien

230
- Ordonnance n°75-58 du 26 septembre 1975 portantCode civil, J.O.R.A. du 30
septembre 1975, n°78, p.990.

- Ordonnance n°75-59 du 26 septembre 1975 portant Code de commerce, J.O.R.A. du 19


décembre 1975, n°101, p.1073.

- Loi n°89-02 du 7 février 1989 relative aux règles générales de protection du


consommateur J.O.R.A. du 08 février 1989, n° 06, p. 114.

-Loi 90-10du 14 avril1990 relative à la monnaie et au crédit. J. O. R. A. du 18 avril 1990,


p.450.

- Règlement n° 91-03 du 20 Février 1991, relatif aux conditions d'exercice des


opérations d'importation de bien en Algérie et de leur financement, J. O. R. A. du25 mars
1992, n°23, p.563.

- Circulaire 63 du 20 août 1990, du Ministère de l’économie.

- Ordonnance n°95-06 relative à la concurrence du 25 janvier 1995, J.O.R.A. du 22


février 1995, n°09, p.13.

-Décret exécutif n°97 - 37 du 14/01/1997, définissant les conditions et modalités de


fabrication, de conditionnement, d’importation et de commercialisation sur le marché
national de produits cosmétiques et d’hygiène corporelle ( JO N° 04 / 1997 ).

- Ordonnance n°03-03 relative à la concurrence du 19 juillet 2003, J.O.R.A. du 20 juillet


2003, n°43, p.21.

- Ordonnance n°03-04 du 19 juillet 2003 relative aux règles générales applicables aux
opérations d’importation et d’exportation de marchandises, J.O.R.A. du 20 juillet 2003,
n°43, p.29.

- Loi n°04-02 du 23 juin 2004 fixant les règles applicables aux pratiques commerciales,
J.O.R.A. du 27 juin 2004, n°41, p.3.

- Décret exécutif n° 05-175 du 3 RabieEthani 1426 correspondant au 12 Mai 2005 fixant


les modalités d'obtention de l'attestation négative relative aux ententes et à la position
dominante sur le marché J.O.R.A n° 35 du 18 Mai 2005, p. 03

231
- Décret exécutif n°07-390 du 12 déc. 2007 fixant les conditions et modalités d’exercice
de l’activité de commercialisation de véhicules automobiles neufs, J.O.R.A. du 12
décembre 2007, n°78.

- Loi n°08-12 du 25 juin 2008, modifiant et complétant l’ordonnance n°03-03 relative à la


concurrence, J.O.R.A. du 02 juillet 2003, n°36, p.10.

- Loi n°09-03 du 25 février 2009, relative à la protection du consommateur et à la


répression des fraudes, J.O.R.A. du 08 mars 2009, n°15, p.10.

B- En droitfrançais

- Code civil français.

- Code de commerce français.

- Ordonnance n°86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de


concurrence.

- Loi n°89-1008 du 31 décembre 1989 « dite loi DOUBIN », relative au développement


des entreprises commerciales et artisanales et à l’amélioration de leur environnement
économique, juridique et social.

- Loi n°96-558 du 1er juillet 1996 dite « loi Galland » sur la loyauté et l’équilibre dans
les relations commerciales.

-La loi n°2001-420 du 15 mai 2001dite « loi NRE » modifiant le code de commerce
français.

C- En droit communautaire

- Traité de Rome instituant la Communauté Européenne, J.O.C.E, du 24 décembre 2002.

- Règlement d'exemption n°1983/83/CE du 22 juin 1983 concernant l’application de


l’article 85 paragraphe 3 du traité à des catégories d’accords de distribution exclusive, J.O
n° L.281 du 13 octobre 1983, p.24.

232
- Règlement d’exemption n°123/85/CE du 12 décembre 1984, concernant l'application de
l'article 85, paragraphe 3, du traité CEE à des catégories d'accords de distribution et de
service de vente et d'après-vente de véhicules automobiles, J.O 1985, p.16.

- Règlement d’exemption nº4087/88/CE du 30 novembre 1988 concernant l'application


de l'article 85 paragraphe 3 du traité à des catégories d'accords de franchise, J.O nº L 359
du 28/12/1988, p. 46.

- Règlement d’exemption n°1475/95/CE du 28 juin 1995, concernant l'application de


l'article 85 paragraphe 3 du traité à des catégories d'accords de distribution et de service
de vente et d'après-vente de véhicules automobiles, J.O. C. E n° L 145 du 29/06/1995, p.
25.

- Règlement d'exemption 2790/1999/CE du 22 décembre 1999, concernant l’application


de l’article 81, paragraphe 3, du traité à des catégories d’accords verticaux et de pratiques
concertées, J.O. C. E L336 du 29/12/1999, p.21.

- Règlement d’exemption n°1400/2002/CE du 31 juillet 2002, concernant l'application de


l'article 81 paragraphe 3 du Traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques
concertées dans le secteur automobile, J.O. C. E n° L 203 du 1/ 8/ 2002, p. 30.

- II / Ouvrages généraux et manuels (par ordre alphabétique)

A- En langue française

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distribution, L.G.D.J, 1999.

233
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Montchrestien, 8éme éd., 2008.

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BOUBAKER (M), La distribution en Algérie : Enjeux et perspective, Office des Publications


Universitaires., 1995.

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économique –concurrence, distribution, consommation, éd. 2009.

BUSSY (J), Droit des affaires, Presses de sciences po et Dalloz., 1998.

CALAIS-AULOY (J) et STEINMETZ (F), Droit de la consommation, Dalloz 1996, 4ème


éd., coll. Précis

CARBONNIER (J), Les obligations, PUF 1998, 21ème éd., coll.Thémis

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COLLART DUTILLEUL (F) et DELEBECQUE (Ph), contrats civils et commerciaux,


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MALAURIE (Ph), AYNÉS (L) et GAUTIER (P), Les contrats spéciaux, Defrénois, 3éme
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ZÉRAOUI-SALAH (F), Traité de droit de commercial algérien, Le fonds de commerce


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ZÉRAOUI-SALAH (F), Traité de droit de commercial algérien, Les droits intellectuels, éd.
EDIK, 2006.

ZÉRAOUI-SALAH (F), Traité de droit commercial algérien : les actes de commerce, le


commerçant et l’artisan, les activités commerciales réglementées, le registre de commerce,
Editions Edik, 2003

- III/ Ouvrages spéciaux (par ordre alphabétique)

A- En langue française

BASCHET (D),La franchise, Guide juridique-conseils pratique, Gualino éditeur, 2005

BUISSON (B), DE LAGGER (M) et TANDEAU de MARSAC (X), Etude sur le contrat de
concession exclusive, Edition Sirey., 1968.

GUYÉNOT (J), Les contrats de concession commerciale, Sirey, tome 16, 1968.

LELOUP (J-M), La franchise, Delmas, 3éme éd., 2000.

LE TOURNEAU (Ph), Les contrats de concession –Distribution sélective. Concession


exclusive. Distribution automobile. Droit interne et communautaire-, LITEC., 2003.

LE TOURNEAU (Ph), Les contrats de franchisage – Franchise de distribution, de comptoir,


industriel, artisanal, financier. Franchisage de service. Franchisage international. Réseaux
de franchisage-, LITEC., 2003.

LE TOURNEAU (Ph), La concession commerciale exclusive, ECONOMICA, 1994.

Pamoukdjian (J. P), Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ.


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THALMAN (A), La protection des réseaux de distribution contre le commerce parallèle.
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B- En langue arabe
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1990.
RAJAM (N), L’organisation des modes de distribution, pratiques et études de cas, Dar
elouloum, 2006.

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d’Oran, 2010/2011.

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2005/2006.

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d’Oran, 2006/2007.

ZÉRAOUI-SALAH (F), Droit commercial, cours de licence, 3éme année, Faculté de


Droit, Université d’Oran, 2002/2003.

ZÉRAOUI-SALAH (F), Droit commercial, cours de magistère, 1ér année, Faculté de


Droit, Université d’Oran, 2006/2007.

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- VII / Jurisprudence (par ordre chronologique)

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- CA PARIS, 26 MAI 1965, Gaz Pal., 1966. 76.

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J.

- CASS. COM., 17 MARS 1970, n° 69-12. 225, JCP éd. CI 1970, П, n° 89232, obs.
Hémard J.

- CASS. COM., 21 OCT. 1971 : JCP 1971, П, 16632.

- CASS.COM. 9 JUILL. 1974 : bull.civ. ,n226 note Sayag.

- DEC. N° 75/73/CEE DE LA COMMISSION, 13 déc. 1974. BMW, JOCE 3 févr. 1975.


n° 1. 29.

- CJCE, 21 DEC.1976, aff 77/10, Junghans, JOCE, 2févr. 1977, n° L30.

- CJCE, 25 oct. 1977, aff. 26/27, Metro l, Rec. CJCE 1977. p. 1875. Cité par Burst et
Kovar

- ARRETS DE LA CJCE DU 11 DECEMBRE 1980, L'Oréal, affaire 31/80, Rec. p.


3775, point 16, interprété à la lumière de l'arrêt du 25 octobre 1977, Metro I, affaire
26/76, Rec. p.1875, points 20 et 21 et de l'arrêt du Tribunal du 27 février 1992, Vichy/
Commission, affaire T-19/91, Rec. p. II-415, points 69 à 71 cité par Ferrier.

- VERSAILLES 2 FEV.1981 : jcp éd.CI 1982, suppl.n4, p.39.note Sayag

- C.J.C.E., 19 JUIN 1981, Salonia, Rec. Cour de justice 1981.1583, note Burst et Kovar.

- CRIM. 3 NOV. 1982 ; Bull. crim. n°258 ; « arrêt Nina Ricci ». cite par Beauchard.

- CASS-CRIM : ARRETS DITS « duo » (afflanvin, Nina Richi, Rocho) 3Nov 1982,
Gaz. Pal. 1982, 2, 658

- CRIM. 3 NOV. 1982, Bull. crim., n° 258, Inf. rap. Gavalda et Lucas de Leyssac, Gaz.
Pal., 1982.2.658, note Marchi

- CASS. COM. 6 DEC. 1984, D. 1987, somm. P. 42.

- COM. 22 MAI 1985, bull. civ. ΙV, n° 170 ; D. 1988, Som. 295, obs. Gavalda et Lucas de
Leyssac.

243
- CJCE, 22 oct. 1986, aff. 75/84, Metro П, rec. CJCE, p. 3021. Cité par Burst et Kovar

- CASS.COM.18MAI 1987, D.1987, JVR, p.558, note G.perléani, cité par Sayag.

- CA. PARIS, 16 FEVRIER 1988, Gaz. Pal. 1988, 1, jur.,p.412.

- CA PARIS ; 10 OCT.1989 : inf, rap.p.283 note Le tourneau

- CASS. CRIM. 5 AVRIL 1990, Dalloz, 1990, sommaires commentés, p. 371, obs. D.
Ferrier.

- CASS. COM. 17 JUILL. 1990, n 19-14. 119 bull.civ.ΙV, n 220, p. 151. cite par Ferrier.

- C. CRIM, 4 DECEMBRE. 1990. Soc. Boulogne distribution c/ Soc Channel RTD.


Com, 1991, p.333.

- CA VERSAILLES, 1ER OCT. 1991, Gaz. Pal. 1993, І, som., p. 37, note D’hoeraene D.

- TPICE., 27 FEV. 1992, Vichy c. Commission, T-19/91, Rec. p. II-415, note L. Vogel

- CASS-CRIM : 27 oct. 1992 : RJDA 1/1993, p.17. note ferrier

- CASS. COM. 27 OCT, 1992, SARL Pin Ups and Co c/Soc. des parfums Loris Azzaro,
D. 1992, Jur. P. 5005 et s.

- CASS. COM. 27 OCT. 1992, Azzaro, Cah. Dr. entr. П 1992, p. 23.

- CA. AIX-EN-PROVENCE, 10 JUIN 1993, Bull. Aix 1993, n°1, p. 29, note Pietro C.

- CASS. COM., 21 JUIN 1994, n° 92-16-197, bull. civ. ΙV, n° 235, p. 184.

- CA PARIS, 1ER FEV 1995, Lettre distrib 1995, n° 4, p. 1,cité par beauchard.

- TPCIE, 12 DEC 1996, aff. T-19/92, Yves Saint Laurent, et T88/92, Givenchy, Rec.
CJCE, , p. 1851ET S., CONTRATS, CONC, CONSOM. 1997, n 1, p.13, note Vogel
L.

- CASS. COM. 21 OCT 1997, Bull. civ. ІV, n ° 271. cité par Vignal.

- CASS. CIV. 1ER, 7 OCTOBRE 1998, Bull. civ I, n° 85.

244
- CASS. COM. 10 MAI 2000, RTD. Com 2001, p. 549.

- CASS. COM., 16 MAI 2000, Sté Pronovias c/ Sté Galeries Tomy : Cah. Dr. Entr. 2001,
n° 4, p. 32, obs. D. Mainguy.

- CA PARIS, 11 SEPT. 2000, SA Carrefour France et autres c/ SA Seiko France, rép.


Com. Dalloz, avril 2004. p. 43.

- CASS. COM., 9avr. 2002, StéSintel c/ StéLotue : RTD com. 2003, p. 75, obs. E.
Claudel.

- CASS. COM., 1er juill. 2003, Sté Anaisc/ Sté Marie Jeanne Godard : Cah. Dr. Entr.
2003, n° 5. p. 42, obs. D. Mainguy.

- CA DIJON, 1ER AVRIL 2004, DaimlerChrysler France c. Garage Cremeau, www.


Lexinter.com.

- CASS. COM, ARRET N° 982 DU 28 JUIN 2005, www. Lexinter.com.

- CASS. COM, 28 SEPTEMBRE 2010, www.village-justice.com

- VIII / Principaux sites web


Http://www.abc-luxe.com/

Http//:www.algeria-watch.org

Http://www.dictionnaire-juridique.com

Http//:www.creda.ccip.fr

Http//:www.distripedie.com

Http//:www.distrib.net

Http//:www .edoctorale74.univ-lille2.fr

Http//:www.el-mouradia.dz

245
Http//:www.franchise-magazine.com

Http//:www.joradp.dz

Http//: www.jurisfutur.comDossiersconcession.htm.

Http//: www.jurismaroc.xooit.fr

Http//:www.legalis.net

http//: www.lexcellis-avocats.fr

Http//:www.lexinter.net

http// :www.mincommerce.gov.dz

ANNEXE

Modèle d’un contrat cadre de distribution de montres de luxe.

Article 1" - CHAMPS D'APPLICATION DU CONTRAT DE DISTRIBUTION.

Ce contrat de distribution s'applique à la vente en magasin sans exclure d'autres formes de


distribution.

Les règles applicables à la vente à distance en ligne, d'une part, et à la vente par
correspondance, d'autre part, font l'objet de contrats spécifiques.

246
Article 2 - LE CHOIX DES DETAILLANTS SELON DES CRITERES OBJECTIFS

Le distributeur a été choisi en sa qualité de détaillant distribuant ses produits dans son ou ses
magasins mentionnés ci dessous répondant aux critères objectifs suivants :

1) Le point de vente doit être de façon générale représentatif en horlogerie, c'est-à-dire


proposer aux consommateurs un choix minimal de cinq marques horlogères. Les marques
FESTINA, CALYPSO. CANDINO, FESTINA OR, LOTUS, étant des marques notoirement
connues, elles ne doivent en aucun cas servir de produits d'appel, ce qui nuirait à leur image
auprès des consommateurs.

2) L'emplacement géographique du point de vente est important pour le fournisseur qui


dispose actuellement d'un réseau de .points de vente et qui doit s'assurer d'une couverture
nationale homogène eu égard à la population de chaque département.

3) Le point de vente doit avoir un choix représentatif de la collection des montres FESTINA,
CALYPSO, CANDINO, FESTINA OR, LOTUS.

Ainsi, pour la marque FESTINA, des montres des lignes CHRONO, DAME, CLASSIQUE, et
SPORT doivent être présentes au sein du point de vente.

Pour la marque CALYPSO, des montres en ligne ENFANT, ADO et SPORT doivent
également être présentées par le point de vente aux consommateurs.

Ces lignes présentent non seulement l'étendue de la collection FESTINA et CALYPSO mais
constituent un ensemble homogène, facteur important sur les ventes.

4) Les montres FESTINA, CALYPSO, FESTINA OR, CANDINO et LOTUS doivent être
mises en valeur dans le point de vente, tant au niveau des vitrines extérieures qu'intérieures.

5) Le personnel du point de vente, pour des raisons de sécurité, doit être le plus stable
possible. Le nombre de vols et d'agressions, parfois très violentes, dont sont victimes les
détaillants, poussent en effet la société FESTINA France à recommander la plus grande
vigilance dans le choix du personnel et éviter toute rotation excessive de ce personnel.

247
Le distributeur se doit de prévoir un personnel affecté au point de vente en mesure de
procéder à l'accueil du public.

Dans le cadre d'un contact direct avec la clientèle, le personnel du point de vente doit être en
mesure de donner des informations complètes sur le plan technique, en réponse aux questions
posées par les clients sur les caractéristiques et le mode de fonctionnement des produits
proposés à la vente.

6) Le personnel du point de vente doit être en mesure d'effectuer un service après-vente et de


réparation de qualité, dont notamment changement de pile, de bracelet, assurer et contrôler
l'étanchéité, remplacer un verre cassé. L'horloger doit ainsi avoir un niveau CAP en horlogerie
ou justifier d'une expérience professionnelle minimale de deux ans.

En répondant à ces critères, le point de vente est en mesure de montrer sa capacité à


promouvoir les marques exploitées par la société FESTINA France, dont il reconnaît qu'il
s'agit de marques de renommée concernant des produits de qualité.

Le Service après-vente doit accepter, sans porter atteinte aux services à apporter à ses propres
clients, tout client qui désire faire réparer une montre achetée auprès d'un autre distributeur
FESTINA France, que l'achat ait eu lieu sur internet, par correspondance, ou auprès d'un autre
magasin.

Article 5 - AUTORISATION DE LA PUBLICITE NON TARIFAIRE

Le distributeur s'engage à ne réaliser aucune forme de publicité ou promotion non tarifaire des
marques de la société FESTINA de sa propre initiative sans l'accord préalable et écrit de la
société FESTINA sur la forme et sur le contenu de cette publicité.

Le distributeur s'engage à ne pas porter atteinte à l'emballage ou au mode de conditionnement


du produit ni à l'emplacement de la marque sur ceux ci.

Article 7 - PRIX PUBLICS LIBRES - INTERDICTION DE LA VENTE A PERTE.

Le distributeur est informé de la prohibition de la vente à perte. Il s'engage également à ne pas


pratiquer de promotion tarifaire en utilisant les produits de marques exploitées par FESTINA
comme produits d'appel dans des circonstances susceptibles de porter atteinte à l'image de
marque de la société FESTINA et à ses marques de renommée.

248
La société FESTINA France reconnaît que les prix de vente publics sont librement fixés par
les détaillants. Cette règle n'est pas remise en cause par la pratique de la maison mère située
en Espagne consistant au pré-étiquetage des produits livrés à ses filiales mais dont te prix
indiqué ne correspond qu'à un prix public conseillé.

Modèled’uncontrat de distribution sélective des produits de haute technicité.

Entre : le distributeur agréer

……………………..

Dont le siège social est à :

……………………

……………………

……………………

……………………
249
Et : GREENTOOL, dont le siège est, Espace commercial Saint Niel, avenue de la libération,
56300 PONTIVY Cedex

PREAMBULE

Développée dans les pays scandinaves depuis plus de 40 ans, l’armoire séchante permet un
séchage efficace et économique. GREENTOOL est l’importateur et distributeur sur le
territoire national Français de l’armoire séchante ETS 1700E.

L’excellence des produits PODAB se fonde sur des valeurs de bases : Simple

Economique

Respectueux de l’environnement

Robuste

SERMIC offre également un niveau de service élevé à ses distributeurs Agréés : conseil,
promotion, support à la vente, assistance technique, délais de livraison, etc.

L’ensemble des engagements de GREENTOOL sont décrits à l’article 2 ci-après.

En contrepartie, et afin d’optimiser les conditions dans lesquelles les consommateurs peuvent
acquérir les produits, SERMIC recourt à la distribution sélective de ses produits, dans le cadre
d’un réseau qui participe à la marque et au développement durable de la vente des produits
PODAB en assurant une information adéquate au consommateur et qui contribue
substantiellement à l’image de Marque des produits.

La distribution des produits PODAB nécessite notamment que les consommateurs puissent
acquérir ces produits dans un environnement adéquat :

- localisation et qualité du point de vente,

250
- qualité de la présentation des produits,

- niveau de conseil et de service aux clients notamment service après vente.

La distribution des produits PODAB est ouverte à tous distributeurs, qui remplissent ces
conditions.

Article 1 :

GREENTOOL confère au distributeur la qualité de DISTRIBUTEUR AGREE des produits


PODAB jusqu’au 31 décembre 2010. le contrat sera ensuite tacitement reconduit pour des
périodes successives d’un (1) an ( du 1er janvier au 31 décembre), sauf dénonciation de l’une
ou l’autre des parties adressée au plus tard trois (3) mois avant l’échéance contractuelle ou
résiliation anticipée dans les conditions prévues à l’article 8.

Le non renouvellement du présent contrat à l’une quelconque de ses échéances s’effectuera


sans indemnités ni de part ni d’autre.

Le DISTRIBUTEUR AGREE est autorisé par GREENTOOL à distribuer l’ensemble des


produits figurant sur le catalogue PODAB.

GREENTOOL concède en outre au DISTRIBUTEUR AGREE le droit non exclusif d’utiliser


la Marque PODAB aux fins de distribution des Produits dans son point de vente, à l’exclusion
de toute autre utilisation.

GREENTOOL pourra refuser la commercialisation de ses produits dans les magasins de


chaines qui, bien qu’étant exploités sous une même enseigne, ne respecteraient pas les critères
de sélections visés à l’article 3.

Article 2 : engagement de GREENTOOL

- Promouvoir l’image de la Marque PODAB

- Approvisionner le DISTRIBUTEUR AGREE dans les meilleurs délais


251
- Tenir informé le DISTRIBUTEUR AGREE de l’évolution des produits et de la
présentation des nouvelles gammes

- Communiquer et appliquer au DISTRIBUTEUR AGREE les tarifs en vigueur à la date


de chacune des livraisons

- Faire bénéficier le DISTRIBUTEUR AGREE des conditions d’approvisionnement et


de paiement visées aux conditions générales et particulières de Vente,

- Faire bénéficier le DISTRIBUTEUR AGREE de la garantie des Produits de la Marque


PODAB et de son service après vente,

- Fournir au DISTRIBUTEUR AGREE des matériels de publicité et de promotion sur le


lieu de vente (PLV brochures, etc.…)

Article 3 : CRITERES DE SELECTION DES DISTRIBUTEURS AGREES

Le DISTRIBUTEUR AGREE déclare disposer d’un ou plusieurs points de ventes physiques


et exercer une activité de spécialiste ou disposer d’un département spécialisé dans le domaine
des produits électroménagers.

Si le DISTRIBUTEUR AGREE souhaite réaliser des ventes à distance, en accessoires, de son


activité principale de commercialisation des Produits dans son point de vente physique, il
s’engage à ce que son support de vente à distance respecte l’ensemble des engagements
prévus du présent contrat. Ce point constitue une condition indispensable à l’agrément du
distributeur.

 locaux et installations du DISTRIBUTEUR AGREE

L’espace de vente du DISTRIBUTEUR AGREE devra être identifiable immédiatement et


sans équivoque comme un espace d’achat spécialisé en produits électroménagers. Cet
espace est nettement séparé de toute zone achalandée de produits, alimentaires,
vestimentaires, cela d’une façon générale qui ne soit pas consacrée à l’aménagement de la
maison.

La qualité du point de vente permet une présentation adéquate des Produits qui soient
visibles, facilement accessibles et présentés de manière attractive pour les consommateurs.

252
 qualité de la présentation des Produits :

Le DISTRIBUTEUR AGREE assure la promotion des marques et des produits qu’il


distribue en présentant de façon attractive un large assortiment dans son point de vente.

Les produits sont présentés en excellent état, complet et avec leurs différents accessoires
d’origine ou optionnels.

 personnel affecté à la vente des Produits :

le DISTRIBUTEUR AGREE assure disposer dans le point de vente en permanence d’un


interlocuteur qualifié, en mesure de répondre de manière immédiate et complète aux
questions de ses client sur les Produits PODAB.

Ces interlocuteurs, qualifiés, possèdent une bonne connaissance des fonctionnalités et des
caractéristiques techniques des Produits PODAB distribués, ils veillent par leur conseil à
assurer l’achat de produits correspondant aux attentes de ses clients et à préparer la bonne
utilisation future des Produits acquis.

 assortiment et stock :

Le DISTRIBUTEUR AGREE dispose d’un stock suffisant, et en adéquation avec son


potentiel, apprécié en fonction de ses ventes passées et ventes prévisible.

Tous les Produits présentés dans le point de vente devront être disponible à l’achat.

Il s’assure en permanence de la qualité du stock de Produits en sa possession, d’informer


GREENTOOL de tout défaut éventuel pouvant les affecter et s’abstient de vendre tout
produit dont la qualité ou le conditionnement serait altéré.

 livraison des commandes

Le DISTRIBUTEUR AGREE est tenu de vérifier les colis à la livraison, d’apposer si


nécessaire des réserves sur le bon de livraison lorsque l’anomalie est détectée et d’en
informer la société GREENTOOL immédiatement.

L’absence de réserves atteste du bon état des produits livrés et ne pourra ouvrir droit à
réclamation a posteriori de la part du DISTRIBUTEUR AGREE.

253
 service après vente et garantie

Le DISTRIBUTEUR AGREE est contractuellement lié au client final. Il est à ce titre son
interlocuteur privilégié dans le cadre de la mise en œuvre de la garantie constructeur et des
prestations relatives aux services après vente.

 information GREENTOOL

Le DISTRIBUTEUR AGREE s’engage à informer GREENTOOL de toutes modification


importante relative à ses activités ou susceptible d’avoir un impact sur la
commercialisation des Produits.

 Grossistes

Le DISTRIBUTEUR AGREE qui exerce une activité de GROSSISTE, est dispensé des
critères précédents qui ne le concernent pas. Il peut revendre les Produits à d’autres
revendeurs Distributeurs Agrées à la condition expresse que ces derniers remplissent
l’ensemble des conditions prévues au présent contrat et qu’ils soient situés dans l’état
français et peut en apporter la preuve à tout moment. Le GROSSISITE est par conséquent
tenu de suspendre temporairement ou définitivement les livraisons des produits PODAB à
d’autre Distributeurs qui ne satisferaient pas plus aux critères ci-après définis ou qui ne
seraient pas agréés.

Le grossiste soumet à l’approbation de GREENTOOL la liste des distributeurs auxquels il


envisage de revendre les Produits PODAB. Il fournit les informations nécessaires à
GREENTOOL pour les agréer selon les critères définis dans le présent contrat.

 vente à distance

Le distributeur pour lequel la vente à distance ne représente pas une activité accessoire
sera agréé, sur la base des critères définis à l’annexe 1.

Article 4 : ENGAGEMENT DU DISTRIBUTEUR AGREE

254
Le DISTRIBUTEUR AGREE s’engage à satisfaire à l’ensemble des critères de sélection
ci-dessus et à promouvoir la marque et à développer les ventes de Produits.

A défaut, GREENTOOL pourra mettre le DISTRIBUTEUR AGREE en demeure de se


conformer au(x) critère(s) dans un délai imparti et/ou mettre fin au présent contrat de plein
droit.

Le DISTRIBUTEUR AGREE accepte expressément les dispositions des conditions


générales et particulières de ventes GREENTOOL.

 revente des produits :

le DISTRIBUTEUR AGREE s’engage à vendre les produits uniquement à des


consommateurs ou à d’autres distributeurs agréés et s’engage à s’approvisionner en
produits PODAB exclusivement auprès de GREENTOOL, ou d’autres distributeurs
agréés.

Le DISTRIBUTEUR AGREE s’engage à répondre aux répondre aux enquêtes de


satisfaction que GREENTOOL pourrait mettre en place.

 politiquetarifaire

Le DISTRIBUTEUR AGREE est libre de sa politique tarifaire dans le respect de l’image


de marque des produits PODAB.

Le DISTRIBUTEUR AGREE s’engage à ne pas pratiquer de promotion tarifaire en


utilisant les produits PODAB comme produits d’appel dans les circonstances susceptible
de porter atteinte à l’image de marque PODAB.

Article 5 : CONFIDENTIALITE

255
GREENTOOL et le DISTRIBUTEUR AGREE s’engage réciproquement à ne divulguer
aucune information confidentielle qui pourrait porter atteinte aux intérêts légitimes de
l’autre partie.

Article 6 : DROIT DE PROPRIETE INTELLECTUELLE : MARQUES, BREVETS,


DESSINS, MODELES ET AUTRES DROITS DE PROPRIETE INTELLECTUELLE.

Le DISTRIBUTEUR AGREE s’engage à respecter la propriété intellectuelle des marques,


brevets, modèles et autres éléments de propriété intellectuelle détenus par GREENTOOL.

Il s’engage à ne réaliser aucune forme de publicité ou promotion non tarifaire des produits
PODAB de sa propre initiative, et par conséquent à n’adjoindre à la marque aucune autre
marque, dénomination, logotype et signes distinctifs sans l’accord préalable et écrit de
GREENTOOL sur la forme et le contenu de cette publicité.

Le DISTRIBUTEUR AGREE communique à GREENTOOL dans un délai raisonnable


avant la diffusion, tout projet et épreuve comportant une référence aux produits et/ou à la
marque PODAB.

Tout matériel publicitaire et promotionnel ainsi que tout matériel d’exposition remis au
DISTRIBUTEUR AGREE par GREENTOOL restent la propriété exclusive de
GREENTOOL.

En aucun cas le DISTRIBUTEUR AGREE ne pourra demander réparation à


GREENTOOL d’un préjudice résultant d’une atteinte portée aux droits de propriété
intellectuelle de GREENTOOL ou du fait d’une éventuelle contrefaçon de la marque et/ou
des brevets et/ou des dessins et modèles par un ou des tiers.

Article 7 : INCESSIBILITE DU CONTRAT


256
Il est expressément rappelé que la conformité aux critères de sélection constituent pour
SERMIC la garantie de son savoir faire et ont été déterminant pour cette dernière dans la
conclusion de ce contrat.

En conséquence, le présent contrat est strictement personnel au DISTRIBUTEUR


AGREE, dans le cadre de son point de vente, et ne pourra faire l’objet de la part de ce
dernier d’aucun transfert ou cession, en tout ou partie et des droits qui sont issus, sous
quelque forme que ce soit, sans l’accord préalable et écrit de GREENTOOL.

Article 8 : RESILIATION ANTICIPEE DU CONTRAT

A défaut de respect de l’une quelconque des clauses, le présent contrat pourra être
considéré comme résilié de plein droit, un (1) mois après l’envoi d’une mise en demeure
au DISTRIBUTEUR AGREE par lettre recommandée avec accusé de réception, restée
sans effet satisfaisant, ceci sans préjudice du droit pour SERMIC à d’éventuels dommages
et intérêts.

Chacune des parties aura, en outre, la faculté de considérer le présent contrat comme
résilié de plein droit en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde (sauf poursuite du
contrat dans les conditions de l’article L.622-13 du code de commerce) ou équivalent.

Article 9 : CONSEQUENCE DE FIN DE CONTRAT

En cas de cessation du présent contrat, pour quelque cause que ce soit, et notamment en
cas de non renouvellement ou de résiliation anticipée, les parties conviennent de ce qui
suit :

L’éventuel stock résiduel de produits, à la date de prise d’effet de la cessation du présent


contrat, pourra être repris par GREENTOOL sans que le DISTRIBUTEUR AGREE ne
puisse s’y opposer.

257
Cette reprise des stocks s’effectuera alors au prix facturé par GREENTOOL, sans
réduction des frais éventuels (transport, remise en état des produits…).

A compter de la date à laquelle le contrat aura pris fin, et pour quelque motif que ce soit,
toutes les commandes non encore livrées pourront être annulées par GREENTOOL.

Le DISTRIBUTEUR AGREE s’engage à supprimer, à compter du terme du présent


contrat, tout matériel commercial afférent, tout signe distinctif ou inscription de nature à
laisser croire aux tiers qu’il demeure un lien quelconque entre le DISTRIBUTEUR
AGREE et SERMIC au travers de la marque PODAB.

Article 10 : GENERALITES

Les termes du présent contrat représentent la totalité des conventions entre les parties.

Le présent contrat n’est pas un contrat d’adhésion et le DISTRIBUTEUR AGREE en


accepte toutes les clauses.

Le présent contrat s’inscrit dans le cadre de relations contractuelles nouées entre un


fournisseur et un distributeur indépendant et ne sont donc pas des relations de mandant à
mandataire ou un agent commercial. Le DISTRIBUTEUR AGREE exercera donc les
droits concédés par le présent contrat pour son propre compte.

Le fait pour GREENTOOL de ne pas se prévaloir de certains de ses droits ou de ne pas


relever certaines violations n’affecte en rien le droit de GREENTOOL à s’en prévaloir
ultérieurement.

En cas de nullité de l’une quelconque des dispositions du présent contrat, les autres
dispositions demeureront en vigueur et les parties chercheront de bonne foi des
dispositions équivalentes valables.

258
Article 11 : LOI APPLICABLE ET REGLEMENT DES LITIGES

Le présent contrat est soumis au droit français. Tout litige sera de la compétence exclusive
du tribunal de commerce de Lorient

Fait à ___________________________, le ________________ en double exemplaire

LE DISTRIBUTEUR AGREE GREENTOOL

259
Table des matières

Introduction…………………………………...………………………………………6

Première partie : Caractérisation de la distribution sélective………………...………11

Chapitre Ι : Détermination de la distribution sélective…………………………………..12

Section 1 : L’identification de la distribution sélective………………………..………..12

Paragraphe 1 : L’analyse de la distribution sélective……………………………..……13

A) L’approche juridique………………………………………………………………....13

B)L’approche économique……………………………………………………………...18

Paragraphe 2 : La spécificité de la distribution sélective……………………………....21

A) Les caractéristiques de la distribution sélective……………………………………...21

1-Une distribution régie par un contrat cadre……………………………………..…….22

a)La nature du contrat cadre……………………………………………………....……22

b)Les avantages de la technique du contrat cadre………………………………....……25

2-La commercialisation de produits concurrents………………………………...…......27

B) Distinction des autres contrats de distribution……………………………...………...29

1- La distribution sélective et la concession commerciale………………………………29

2 - La distribution sélective et la franchise………………………………………………33

Section 2 : le fonctionnement de la distribution sélective……………………………….37

Paragraphe 1 : La relation entre le fabricant et le distributeur agréé…………………...37

A) L’indépendance du distributeur agréé…………………………………………….......38

B)Le contrôle du fabricant…………………………………………………………...….42

Paragraphe 2: La constitution du réseau…………………………………………….....48

A) La structure contractuelle………………………………………………………….….49

B) La structure composée…………………………………………………………….….51

Chapitre ΙΙ: Les étapes de la distribution sélective……………………………………...53

260
Section 1 : L’existence du contrat de distribution sélective………………………….….53

Paragraphe 1 : La formation du contrat de distribution sélective……………………....53

A)Les conditions de forme……………………………………………………………....54

1-La nécessité de l’écrit………………………………………………………………....55

2-La preuve……………………………………………………………………………...58

B)Les conditions de fond………………………………………………………..............61

1- Le consentement……………………………………………………………………....61

a) Un consentement libre………………………………………………………………...62

b) Un consentement éclairé……………………………………………………………....64

2- L’objet………………………………………………………………………………….69

3-La capacité des parties………………………………………………………………....71

4-La cause……………………………………………………………………..................72

Paragraphe 2: Les effets de la distribution sélective……………………………………73

A) Les obligations des parties............................................................................….............73

1- Les obligations du distributeur agréé…………………...……………………...............74

a)Les obligations liées à l’image de marque………………...…………………………....74

b)Les obligations liées à la cohérence du réseau………………...……………………….80

2 -Les obligations du fournisseur……………………………...………………………….82

B) Les effets envers les tiers……………………………………......……………………..84

1- L’effet relatif des conventions…………………………………......…………...............84

2- L’opposabilité du contrat de distribution sélective…………...……...………………....85

Section 2 : L’extinction du contrat de distribution sélective……...……...……………….87

Paragraphe 1 : Les modes d’extinction du contrat de distribution sélective…......……....88

A) L’arrivée du terme………………………………………………………...…...……....88

B) La résiliation unilatérale………………………………………………………..............92

Paragraphe 2: Les effets de l’extinction du contrat de distribution sélective…………...94

261
A)Les obligations du fabricant……………………………………………………………94

B)Les obligations du distributeur agréé…………………………………………………..97

Deuxième partie : Appréciation de la distribution sélective……………………………...99

Chapitre Ι : La validité de la distribution sélective……………………………………...…100

Section 1 : Les critères préalables à la validité de la distribution sélective……………...101

Paragraphe 1 : Les critères tenant aux produits distribués…………………………...…101

A)Les produits de luxe…………………………………………………………..............102

B) Les produit de haute technicité……………………………………………………….106

Paragraphe 2 : Les critères tenant aux distributeurs……………………………………110

A) La sélection qualitative……………………………………………………………....111

1- Le principe de proportionnalité………………………………………………………..112

2- Le principe d’objectivité……………………………………………………................116

B) La sélection quantitative……………………………………………………………....118

1-La fixation d’un chiffre d’affaires minimum………………………………................119

2- La limitation du nombre de distributeurs par zone géographique…………………….123

Section 2 : L’application du droit de la concurrence…………………………………….127

Paragraphe 1 : Le refus de vente………………………………………………………..127

A) Les problèmes posés par le refus de vente……………………………………............128

1- La présentation d’une demande…………………………………………………….…128

a) L’auteur de la demande…………………………………………………………….….128

b) L’objet de la demande………………………………………………………………....130

2- L’opposition d’un refus………………………………………………………………..131

B) la justification du refus de vente……………………………………………………...132

1- Le caractère anormal de la demande………………………………….…………….......133

a) L’anormalité tenant aux quantités des produits demandés…………….………………133

b) L’anormalité tenant aux modalités de livraison………………………………………..134

262
2- La mauvaise foi du demandeur ……………………………………………...…………135

3-Justification par les dispositions du droit de la concurrence……………………...…...136

Paragraphe 2: Les pratiques anticoncurrentielles……………………………...………...139

A)Ententes prohibées et abus de domination………………………………………...…...140

1- Les ententes prohibées……………………………………………………………….....140

2- Les abus de domination………………………………………………………………...146

a) L’abus de position dominante………………………………………………………....147

b) L’abus de dépendance économique…………………………………………………....152

B) Justification des pratiques anticoncurrentielles……………………………………...…157

1- Les conditions de l’exemption de la distribution sélective……………………………158

2- Les procédures d‘exemption……………………………………………………………164

a) La notification préalable………………………………………………………………..165

b) Les autorités concernées………………………………………………………………...170

Chapitre ΙΙ : L’efficacité de la distribution sélective……………………………………....173

Section 1 : Les avantages de la distribution sélective……………………………………..174

Paragraphe 1 : L’intérêt du consommateur……………………………………………….174

A)La qualité du service……………………………………………………………………174

B)La protection du consommateur………………………………………………………..177

Paragraphe 2 : Le progrès économique…………………………………………………...182

A) L’accroissement de la production et l’amélioration de la distribution…………………182

B) La création et maintien de l’emploi……………………………………………………187

Section 2 : La protection du réseau de distribution sélective……………………………...190

Paragraphe 1 : La protection par le droit commun………………..…………………….191

A) L’action en concurrence déloyale……………………………………………………..192

1-Le fondement de l’action en concurrence déloyale…………………………………….193

2- Les conditions et les formes de la concurrence déloyale……………………………….196

263
a) Les conditions de la concurrence déloyale……………………………………………..196

b) Les formes de la concurrence déloyale………………………………………………....198

B) La responsabilité contractuelle………………………………………………………....205

1-Le contrôle interne fait par le fabricant……………………………………………...…205

a) La résiliation du contrat……………………………………………………………...…206

b) L’exclusion du réseau…………………………………………………………………..208

2-Le contrôle interne fait par les membres du réseau…………………………………….209

Paragraphe 2: La protection par le droit pénal……………...…………………………....211

A) La protection par le droit des marques……………………………………………...….211

1-L’usage illicite de la marque d’autrui…………………………………………………..212

a) Condamnation de tout usage illicite de la marque d’autrui...........................………….212

b) Revirement jurisprudentiel en France………………………………………………….216

2) L’épuisement du droit des marques………………………………………………….....218

a) L’application du principe……………………………………………………………….219

b) Les limites de l’application du principe..................................................……………...221

B)L’action en publicité trompeuse……………………………………………..…………224

Conclusion…………………………………………………………….…………….230

Bibliographie……………………...……………………………………………………...234

Annexe……………………………………………...……………………………………...248

Table des matières…………………………………………...……………………………260

264
Le résumé :

Réservée à la vente des produits de luxe ou de haute technicité, la distribution sélective est
le contrat par lequel le fabricant s’engage à approvisionner dans un secteur donné, un ou
plusieurs commerçants qu’il choisit en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif,
sans discrimination et sans limitation quantitative injustifiée, et par lequel le distributeur
agréé est libre de commercialiser des produits concurrents. Le contrat de distribution
sélective ne fait l’objet d’aucune réglementation spéciale ni en droit algérien ni en droit
français, et reste de ce fait soumis à la théorie générale du droit des contrats, et à quelques
règles spéciales issues pour l’essentiel du droit de la concurrence.

Ce contrat est également de nature à porter atteinte au libre jeu de la concurrence dans la
mesure où le propriétaire du réseau réserve l’approvisionnement de ses produits aux seuls
distributeurs agréés et oppose un refus de vente aux distributeurs qui n’ont pas été admis
au réseau. De plus par la limitation du nombre de distributeurs agréés, la distribution
sélective risque de tomber sous la qualification d’une entente anticoncurrentielle et être
condamnée à ce titre.

En raison des avantages indéniables qu’elle offre, aussi bien aux producteurs et distributeurs
qu’aux consommateurs, la distribution sélective fait preuve d’une certaine admissibilité de la
part des autorités de concurrence qui, bien qu’elles gardent un contrôle rigoureux sur les
réseaux sélectifs, admettent le bien fondé de cette pratique commerciale, dont l’efficacité a
été depuis longtemps prouvée. Néanmoins, l’efficacité de la distribution sélective dépend
essentiellement de la protection générale et spéciale accordées par la loi aux producteurs et
distributeurs des produits de luxe ou de haute technicité pour protéger l’étanchéité de leurs
réseaux et l’image de marque de leurs produits.

Mots clés :

Contrat de distribution sélective; Produits de luxe; Produits de haute technicité; Droit de la


concurrence; Refus de vente; Abus de position dominante; Etat de dépendance économique;
Etanchéité du réseau; Ventes parallèles; Protection du réseau.

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