INTRODUCTION
Le monitorage de la mécanique respiratoire de patients en état d’insuffisance respiratoire répond à deux objectifs complémentaires : évaluer la nature et
la gravité des anomalies mécaniques dont souffre le système respiratoire agressé (anomalie de compliance/élastance, élévation des résistances), et
optimiser les procédures ventilatoires appliquées à ce système, tant en termes d’efficacité que de tolérance.
La mécanique respiratoire est principalement régie par l’équation du mouvement des gaz inspirés, selon laquelle la pression (P) nécessaire à l’inspiration
d’un volume de gaz à un débit donné dans le système respiratoire est dépendante de deux grandeurs :
- Le travail que lui oppose la déformation du système, qui est proportionnel à son élastance (Ers) et au volume inspiré.
- La résistance à l’écoulement gazeux qui est proportionnelle à la résistance (Rrs) et au débit.
L’inertance est une troisième composante de la pression nécessaire à l’inspiration. En raison de sa valeur extrêmement faible, elle est en général négligée
(1).
P = Ers x V + Rrs x
Formule 1. équation du mouvement des gaz inspirés.
Ainsi, mesurer l’élastance et les résistances du système respiratoire revient à résoudre l’équation du mouvement des gaz inspirés.
Chez des patients placés sous ventilation artificielle exclusive, c'est-à-dire dont toute activité musculaire respiratoire est abolie, l’équation reste identique à
la différence que P est représenté par la pression de travail du respirateur (Pméca). Quel que soit le mode choisi, les machines modernes mesurent assez
précisément les variables ventilatoires que sont pressions, volumes et débits. Les paramètres mécaniques inhérents au patient, Ers et Rrs, sont alors les
inconnues d’une équation relativement simple à résoudre. En revanche, lorsque persiste une activité respiratoire spontanée, l’équation est rendue plus
complexe, en ce sens que la pression développée par les muscles respiratoires (Pmus) et celle du respirateur s’additionnent. Une troisième inconnue
s’ajoute alors, et l’équation du mouvement devient:
Il est donc important de distinguer les situations de ventilation contrôlée pure, dans lesquelles le relâchement musculaire est total, des situations de
ventilation partielle qui autorisent une participation du patient. Dans le premier cas, le monitorage de la mécanique respiratoire passe par un cycle
respiratoire entrecoupé d’occlusions du circuit respiratoire permettant un recueil statique des données. Dans le deuxième cas, il est nécessaire de réaliser
de très courtes interruptions permettant de résoudre l’équation du mouvement.
Précisons enfin qu’en contrepartie de leur simplicité, les formules décrites ici n’apprécient qu’une mécanique respiratoire globale, alors que des
inhomogénéités peuvent exister.
L’existence d’une activité respiratoire du patient définit la ventilation partielle, par opposition à la ventilation contrôlée. Si la pression musculaire ne peut
pas être mesurée directement, son existence peut être identifiée de façon indirecte par les interférences qu’elle crée sur les courbes de monitorage. Le
paramètre dépendant varie en effet en fonction des qualités mécaniques du système respiratoire mais aussi de l’existence ou non d’une pression
musculaire: par exemple, l’existence d’un effort inspiratoire spontané se traduit en ventilation volumétrique par une diminution de la pression mécanique
nécessaire à l’obtention du volume contrôlé, ce qui se manifeste par un infléchissement (à concavité supérieure) de la courbe de pression affichée sur le
respirateur. Il est plus difficile d’attribuer à une activité musculaire l’augmentation du volume courant en ventilation barométrique.
PRESSIONS
La pression affichée sur l’écran du respirateur nécessite quelques précisions pour une interprétation correcte ne prêtant pas à confusion. Cette pression
est mesurée à la pièce en Y du circuit d’insufflation, elle représente la pression mécanique appliquée par la machine au système respiratoire du patient : en
ventilation mécanique on la nomme communément « pression airway » (Paw).
Lors d’une insufflation à débit constant, la pression s’élève initialement brutalement durant quelques millisecondes, correspondant à la pression nécessaire
à vaincre les résistances à l’écoulement gazeux, puis plus progressivement à mesure que le volume est délivré, selon une courbe dont la formule est
l’équation du mouvement. A la fin de l’insufflation, la pression airway décroit brutalement pour revenir à zéro, sauf si de façon intentionnelle elle est
maintenue à un certain niveau en expiration ; elle devient alors une « pression expiratoire positive extrinsèque » (PEPext). La pression expiratoire affichée
à l’écran est ainsi nulle ou égale à la PEPext, alors que la pression alvéolaire, elle, décroît tout au long de l’expiration. Le gradient existant entre la pression
avéolaire et la pression airway assure le débit expiratoire. Lorsque le débit est nul, le gradient est nul, et donc la pression airway est égale à la pression
alvéolaire. En conditions physiologiques, la totalité de l’air inspiré est expiré ; le débit s’annule donc avant l’insufflation suivante, signant une pression
alvéolaire nulle en fin d’expiration (figure 1).
Figure 1 : représentation schématique de l’évolution des pressions airway et débit au cours
d’un cycle de ventilation à volume contrôlé.
Paw : pression airway mesurée à la pièce en Y ; Pcrête : pression maximale inspiratoire ;
Pplat : pression de plateau ; Pexpi : pression expiratoire
La surface hachurée représente la pression résistive, la surface pointillée représente la
pression de distension élastique des alvéoles. Pression airway et pression alvéolaire ne sont
identiques qu’en l’absence de débit : sur cette figure, une occlusion téléinspiratoire annule
la pression résistive et la Paw devient égale à la pression alvéolaire. En expiration, la
pression élastique diminue en même temps que le débit expiratoire, et devient égale à la
PEP lorsque l’expiration est complète.
Cette dernière notion est importante : mesurer la pression alvéolaire nécessite un débit nul et
un certain délai afin que s’équilibre la pression entre alvéoles et pièce en Y. Cela peut être
imposé au patient, par une occlusion du circuit de ventilation, classiquement réalisée en
monitorage en fin d’inspiration et en fin d’expiration.
La pression airway alors affichée par le ventilateur est une pression
transthoracopulmonaire (Palvéolaire - Patmosphérique) ; elle décrit la distension du poumon
mais aussi de la cage thoracique. Elle ne représente donc pas exclusivement la pression de
distension des alvéoles, celle classiquement jugée dangereuse en termes de barotraumatisme.
Certains auteurs ont ainsi proposé de monitorer plus précisément la pression transpulmonaire
(Palvéolaire – Ppleurale) mais au prix de difficultés encore difficilement surmontées :
- la mesure directe par un capteur de pression pleurale de pression est invasive et ne peut décrire l’évolution de la pression sur l’ensemble de la cavité
pleurale.
- en considérant la pression pleurale équivalente à la pression œsophagienne, certains ont proposé d’insérer un ballon dans l’œsophage et d’utiliser la
valeur de pression ainsi recueillie dans le calcul des pressions transpulmonaire (Palv – Poeso) et transthoracique (Poeso – Patm) (2, 3). La méthodologie
reste encore à standardiser et la pertinence de ce procédé à préciser pour l’utiliser en pratique courante (4, 5).
ELASTANCE
DEFINITION
L’élastance représente la pression nécessaire à distendre le système
respiratoire d’une unité de volume, ou en termes de monitorage de
ventilation artificielle, le changement de pression transthoracopulmonaire
(Pttp) par unité de changement de volume à l’insufflation. L’élastance
globale du système respiratoire peut être décomposée en élastance
pulmonaire (EL) et en élastance de la paroi thoracique (ECW), chacune
représentant approximativement 5 cmH2O/l chez le sujet sain.
Ers = ∆ Pttp / ∆V (cmH2O/l)
= EL + ECW
= ∆ Ptp / ∆V + ∆ Ptt / ∆V
Formule 3. élastance du système respiratoire, décomposée en élastance pulmonaire (changement de pression transpulmonaire par unité de
changement de volume) et élastance thoracique (changement de pression transthoracique par unité de changement de volume).
Ers : élastance du système respiratoire ; EL : élastance pulmonaire ; ECW : élastance de la paroi thoracique ; ΔPttp : variation de pression
transthoracopulmonaire ; Ptp : pression transpulmonaire ; Ptt : pression transthoracique ; ΔV : variation de volume du système respiratoire.
Cette distinction est importante à garder en mémoire en pratique clinique, d’autant plus que les évolutions des pressions de distension du poumon et de la
cage thoracique sont différentes au cours de l’inspiration et par ailleurs non linéaire :
- le poumon isolé au repos est vide et sa pression de distension suit une évolution d’allure logarithmique.
- la cage thoracique au repos n’est pas vide et sa pression de distension suit une évolution d’allure exponentielle passant au zéro de pression pour un
volume non nul.
- La pression de déformation de l’ensemble thoracopulmonaire résulte ainsi d’un équilibre entre des forces élastiques différemment réparties selon le
volume de distension ; son évolution est linéaire autour du volume de repos de la respiration physiologique, mais globalement sigmoïde d’une valeur
extrême à l’autre (figure 3).
Figure 3. évolution non linéaire de l’élastance de la cage thoracique (Pw), du poumon (Pl) et du système respiratoire statique
VC : capacité vitale ; PW : pression appliquée à la cage thoracique isolée ; PL : pression appliquée au poumon isolé ; PRS : pression appliquée au système
respiratoire dans sa globalité. Au repos, le système respiratoire n’est pas vide et contient un volume nommé capacité résiduelle fonctionnelle. Inspirer
est un phénomène actif et implique le développement d’une pression inspiratoire, de rendement de plus en plus faible avec la distension, jusqu’à un
plateau au niveau de la capacité inspiratoire maximale. L’expiration physiologique est un phénomène passif : à l’arrêt de l’effort inspiratoire, le système
respiratoire tend spontanément à revenir à sa position de repos. D’après Agostoni E, Static behavior of the respiratory system. In: Handbook of
physiology, 2nd ed. American Physiological Society; 1986:113–130.
MONITORAGE
Mesurer les qualités élastiques du système respiratoire commence par éliminer l’influence de ses qualités résistives. La première manœuvre consiste donc
à interdire tout débit de gaz par une occlusion du circuit, permettant de mesurer à la pièce en Y (Paw) les valeurs des pressions de distension alvéolaire en
fin d’inspiration et en fin d’expiration, soient Pplat et PEPtot. Connaissant ces deux valeurs ainsi que le volume de gaz insufflé (Vt), on peut résoudre
l’équation comme suit :
ΔP = Ers x Δ V
Pplat – PEPtot = Ers x Vt
Ers = (Pplat – PEPtot) / Vt
Formule 4. calcul de l’élastance du système respiratoire par la mesure des pressions d’occlusion téléinspiratoire et téléexpiratoire.
Ers : élastance du système respiratoire ; Pplat : pression de plateau; PEPtot : pression expiratoire positive totale ; Vt : volume courant.
RESISTANCES
DEFINITION
Les forces résistives sont principalement réparties sur les voies aériennes, et, en conditions physiologiques, d’évolution linéaire avec le débit. Elles sont
décrites par la formule :
Rrs = ΔP /
Formule 5. résistances du système respiratoire.
Rrs : résistances du système respiratoire ; ΔP : variation de pression inspiratoire ; : débit inspiratoire
En conditions pathologiques, cette évolution n’est plus parfaitement linéaire, du fait d’une répartition parfois hétérogène des lésions, mais on négligera ce
phénomène en pratique clinique.
MONITORAGE
En fin d’insufflation, lorsque le volume courant défini est entièrement délivré, et sous réserve de l’utilisation d’un débit inspiratoire constant le seul
paramètre non connu de l’équation du mouvement est le paramètre Rrs, qu’il est donc facile d’extrapoler :
REPRESENTATION VISUELLE
La figure 4 résume visuellement les différentes manœuvres et temps de recueil de données ainsi définis :
Figure 5. diagramme schématisant l’évolution de la pression d’insufflation à débit constant appliquée au système respiratoire.
V : volume ; Paw : pression d’insufflation ; Pres : pression résistive = Rrs x = constante ; t : temps.
En ventilation à débit constant, V peut être remplacé par le temps, ainsi le diagramme correspond à la courbe de pression affichée sur le respirateur.
Dans les bas volumes pulmonaires, l’insufflation se traduit par un recrutement alvéolaire et un aspect concave en bas de la courbe de pression (a); dans
la zone optimale de volume pulmonaire, la pente de la courbe de pression est constante (b) ; en cas de surdistension, la diminution de la pression de
distension avec l’insufflation se traduit par une concavité supérieure de la courbe de pression (c).
Ainsi, la seule appréciation visuelle de la portion ascendante de la courbe de pression fournit une indication sur le volume pulmonaire autour duquel travail
le système respiratoire, l’objectif étant d’obtenir une pente la plus linéaire possible.
τ = Rrs / Ers
Formule 8 : constante de temps τ du système respiratoire. Rrs : résistances du système respiratoire ; Ers : élastance du système respiratoire
Le poumon se vide de 64% de son volume en 1τ et complètement en plus de 4τ.
Cet indice n’est cependant pas utilisable en monitorage clinique, puisque d’une part les résistances ajoutées par la sonde d’intubation ne sont pas
d’évolution linéaire, et que d’autre part, la pathologie implique le plus souvent des volumes pulmonaires où l’élastance n’est pas, elle non plus, d’évolution
linéaire.
PHENOMENES RESISTIFS
Intervenir sur les phénomènes résistifs a pour objectif de lutter contre l’hyperinflation et la PEPi, c'est-à-dire de permettre au volume insufflé d’être
totalement expiré.
Dans ce but, la diminution du volume courant a le désavantage d’impliquer une augmentation de la fréquence respiratoire afin de maintenir la ventilation-
minute, et par ce biais de réduire le temps expiratoire, ce qui tend à annuler les effets bénéfiques espérés. En revanche, l’augmentation du temps
expiratoire par réduction du temps inspiratoire a le double avantage d’être efficace et relativement sûre : l’augmentation nécessaire du débit inspiratoire
n’a en effet d’impact que sur la partie résistive de l’équation du mouvement (et en terme de monitorage sur la pression de crête), et aucun sur la
distension alvéolaire téléinspiratoire (et la Pplat). Si des lésions de cisaillement peuvent être craintes, le barotraumatisme est, lui, écarté.
En outre, les bronchodilatateurs ont naturellement pour but de diminuer les résistances expiratoires. L’utilisation de gaz à meilleure performance
rhéologique tels que l’hélium n’a pas fait la preuve d’une réelle efficacité mais est théoriquement intéressante.
Le monitorage de l’efficacité de ces manœuvres sur la ventilation passera par l’analyse visuelle de la courbe de débit qui devra tendre vers un débit nul en
fin d’expiration, et la quantification de la PEPi par la répétition d’occlusions téléexpiratoires.
PHENOMENES ELASTIQUES
L’élastance peut être réduite de façon tout à fait notable par la seule mise en position proclive (7) : ce phénomène est le fait d’une amélioration de la
compliance thoracique par la réduction de la contrainte abdominale mais aussi de la compliance pulmonaire par un possible recrutement alvéolaire dans
les cas de condensations alvéolaires déclives.
L’utilisation thérapeutique d’une PEP externe a pour corollaire de garder les alvéoles constamment « ouvertes » (5): d’une part celles-ci participent aux
échanges gazeux, et d’autre part la capacité résiduelle est augmentée au détriment du volume résiduel. Le système respiratoire fonctionne alors dans des
zones plus favorables de la courbe d’élastance. Cependant, le niveau de PEP externe à appliquer peut être difficile à mesurer : la PEP externe étant une
pression transthoracopulmonaire, la pression expiratoire peut s’appliquer plus à la distension de la cage thoracique (augmentation de la pression
transthoracique par exemple en cas de déformation thoracique), qu’à celle des alvéoles (pression transpulmonaire), en d’autres termes la pression qui est
responsable du traumatisme lié à la ventilation, Ainsi, Talmor et al. ont récemment tenté de montrer qu’une PEPe ne garantissait pas de façon certaine
une pression transpulmonaire constamment positive et donc des alvéoles « ouvertes » en fin d’expiration (8). Dans cette étude, la PEPe était réglée de
manière à ce que la pression transpulmonaire (estimée par l’intermédiaire de la pression œsophagienne) soit constamment positive. Les patients de ce
groupe avaient ainsi des PEPe plus élevées, et à la 72ème heure un gain de PaO2/FiO2 plus grand par rapport au groupe contrôle, dont la PEPe était fixée
selon les pratiques habituelles. Toutefois, un facteur confondant était que les pressions de plateau étaient également plus basses dans le groupe contrôle.
Par ailleurs, de nombreuses restrictions méthodologiques ont été soulevées (9-12), notamment l’assimilation de la pression pleurale à la pression
oesophagienne, qui font persister le doute sur la signification de la pression transpulmonaire mesurée et sa pertinence clinique.
L’élastance peut enfin être améliorée par d’autres manœuvres de recrutement alvéolaire : application intermittente de pressions inspiratoires élevées et
soutenues, décubitus ventral,… Il n’est pas l’objet de débattre ici de leurs modalités mais leur effet escompté est double : amélioration directe de
l’élastance par l’ouverture alvéolaire et augmentation de la capacité résiduelle fonctionnelle plaçant le poumon dans une zone de meilleure rentabilité
élastique.
PEP INTRINSEQUE
Pour pouvoir initier une inspiration, un patient dont l’expiration est
incomplète doit au préalable réaliser un effort propre à annuler la PEP
intrinsèque. Cela se traduit sur la courbe de pression œsophagienne par
un début de dépression précédant l’inversion du débit entre expiration et
expiration. Le débit peut être mesuré sur le respirateur en cas de
ventilation artificielle, ou par un spiromètre en ventilation spontanée. La
différence entre la valeur de repos de la pression œsophagienne et sa
valeur au passage à zéro du débit correspond à la PEPi (figure 5).
Il peut exister une légère différence de valeur entre PEPi statique et PEPi dynamique qui est due à l’hétérogénéité de distribution des valeurs de PEPi au
sein du parenchyme. La PEPi statique mesure en effet la valeur moyenne de la PEP après équilibration de toutes les PEPi régionales. La PEPi dynamique
quant à elle correspond à la PEPi régionale la plus basse, suffisante pour inverser le flux. En cas de forte inhomogénéité des constantes de temps
régionales, la différence peut devenir notable. Petrof et al. ont ainsi observé dans un groupe de patients une valeur de 10.6 ± 0.8 cmH2O pour la mesure
statique et 6.0 ± 0.9 cmH2O en conditions dynamiques (13).
L’existence d’une expiration active peut également conduire à surestimer la PEPi dynamique. En effet, l’action des muscles expiratoires génère alors une
pression expiratoire qui n’est pas due aux forces de rétraction élastique thoracopulmonaires. La mesure de la pression gastrique permet dans ce cadre
d’estimer la contribution des muscles abdominaux : au début de l’effort inspiratoire la pression gastrique diminue en même temps que la pression
œsophagienne puis augmente avec l’inspiration (14). La valeur de cette diminution est à retrancher de la valeur de PEPi dynamique mesurée par la
méthode décrite ci-dessus.
Figure 6. représentation visuelle des courbes de monitorage des pressions, volumes et débits de travail du respirateur en ventilation assistée
proportionelle, et la manœuvre d’occlusion téléinspiratoire concourant à la résolution de l’équation du mouvement des gaz inspirés. Flow débit ; Ers :
élastance du système respiratoire ; Pplat : pression de plateau ; PEPe : pression expiratoire positive extrinsèque ; Paw pressions des voies aériennes ; Vt
: volume courant.
D’après Younes M, Webster K, Kun J, Roberts D, Masiowski B: A method for measuring passive elastance during proportional assist ventilation. Am J
Respir Crit Care Med 2001; 164: 50-60
Deux limites peuvent être opposées à cette méthode : d’une part la PEP utilisée dans la formule est le PEPe, ce qui néglige l’existence d’une éventuelle
PEPi, d’autre part, l’occlusion téléinspiratoire étant très courte, elle ne permet pas l’équilibration des pressions dans un poumon à constantes de temps
inhomogène ce qui implique les limites précédemment décrites. Les résultats de cette étude menée sur 74 patients montraient toutefois une excellente
corrélation entre cette mesure et la mesure statique réalisée sur les mêmes patients (r = 0.92) (16).
Figure 7. représentation visuelle des courbes de monitorage des pressions, volumes et débits de travail en ventilation assistée proportionelle, et la
manœuvre d’impulsion inspiratoire concourant à la résolution de l’équation du mouvement des gaz inspirés.
Flow : débit ; Pmus : pression musculaire ; Paw : pressions des voies aériennes ; ext. pulse : impulsion ; Δ : variation de débit de gaz ; Δ Paw : variation
de pression des voies aériennes ; Rrs : résistances du système respiratoire ; Ers : élastance du système respiratoire.
D’après Younes M, Kun J, Masiowski B, Webster K, Roberts D: A method for noninvasive determination of inspiratory resistance during proportional
assist ventilation. Am J Respir Crit Care Med 2001; 163: 829-39
Cette méthode souffre naturellement un certain nombre de simplifications et de restrictions largement développées dans l’article concerné, mais sa
validation clinique fait état d’une excellente corrélation entre les valeurs estimées par cette méthode et la mesure de Rrs en conditions statiques (r = 0.92).
CONCLUSION
Le monitorage de la mécanique respiratoire rend compte de l’efficacité et de la tolérance de la ventilation artificielle. La connaissance des conditions
nécessaires à ce monitorage et de la signification de chaque indice recueilli permet l’identification des lésions dont souffre le système respiratoire, et
l’optimisation des manœuvres qui lui sont appliquées. La lutte contre la surdistension alvéolaire en est l’objectif prioritaire : la maîtrise des volumes, débits
et pressions d’insufflation ainsi que des contraintes auxquelles ils s’opposent (élastance, résistances) concourt à optimiser les volumes pulmonaires et à
faire évoluer le système respiratoire dans une zone de rentabilité et de sécurité mécanique dont le reflet principal est une pression de plateau inférieure à
30 cmH2O.
Deux limites existent à l’optimisation du monitorage respiratoire : d’une part l’impossibilité d’appréhender simplement les inhomogénéités de répartition
des lésions, que ce soit au sein du parenchyme pulmonaire (pneumopathie lobaire) ou entre poumon et cage thoracique (syndrome restrictif) ; d’autre part
l’utilisation non routinière des manœuvres propres à estimer finement le travail respiratoire spontané (pression œsophagienne, ventilation assistée
proportionnelle,…).