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Embolie pulmonaire

Pr LAKHAL Zouhair
Service de cardiologie
H.M.I Mohamed V
objectifs
 Citer les facteurs de risque de l’embolie pulmonaire
 Décrire les signes cliniques
 Estimer la probabilité clinique
 Citer et hiérarchiser les examens complémentaires
 Reconnaitre les indices de sévérité
 Savoir traiter une embolie pulmonaire
DÉFINITION

 L’Embolie Pulmonaire (EP) est la conséquence de


l’obstruction des artères pulmonaires ou de leurs
branches par des embols le plus souvent cruoriques.
 elle est le plus souvent inaugurale et révélatrice de la
« maladie thrombo-embolique veineuse ».
EPIDEMIOLOGIE

 L’EP est une maladie très fréquente.


 moins de 40% des EP sont effectivement
diagnostiquées.
 70 % des EP secondaires à une TVP MI
 La 3ème cause de mortalité cardiovasculaire.
 25 à 30% des embolies pulmonaires non
traitées décèdent .
Physiologie du système veineux
LES VALVULES

Disposées tous les 5cm environ, elles s’ouvrent en milieu d’expiration et lors de la
contraction musculaire, puis se ferment lors du relâchement, empêchant le sang
de redescendre sous l’effet de la pesanteur.
II-Physiopathologie
Trois facteurs interviennent dans la genèse des TVP (triade de
Virchow) :
- stase veineuse (Liée à une réduction de mobilité, varices,
compression extrinsèque ou la persistance de séquelles thrombotiques)
- lésions vasculaires:Interventions chirurgicales,Cathéters veineux,
Sclérothérapie, Toxicomanie IV, Séquelles de thrombose ancienne
- hypercoagulabilité : =anomalies biologiques favorisant les
thromboses. Déficit en AT III, protéines C et S. cancer,
thrombophilie
CES 3 MECANISMES SONT LE PLUS SOUVENT INTRIQUES.

 Formation du thrombus dans une veine  Migration du


thrombus dans la voie pulmonaire
Conséquences physiopathologiques
 Sont proportionnelles à l’importance du territoire
vasculaire amputé.
 l’atteinte distale peut donner une symptomatologie
fonctionnelle plus riche, mais les répercussions
cardiaques seront peu importantes.
 Si proximale, l’amputation vasculaire pulmonaire est
importante, les conséquences sur l’hématose et les
répercussions cardiaques seront plus graves.
II-Physiopathologie
CONSEQUENCES:

 HEMODYNAMIQUES
 RESPIRATOIRES
PHYSIOPATHOLOGIE
Conséquences hémodynamiques

- Elévation de la post charge du VD


- Dilatation du VD et IT
- Activation neuro-hormonale
- Elévation de la demande en
oxygène et Ischémie du VD.
- Diminution de la FE du VD
- Diminution du remplissage VG
- Diminution du débit cardiaque
- Baisse de la TA et de la perfusion
coronaire du VD
- Choc cardiogénique et décès.
PHYSIOPATHOLOGIE
Conséquences respiratoires:

Hypoxie et hypocapnie( hyperventilation du territoire


perfusé) : évocateur d’un effet shunt  territoire
normalement ventilé mais non perfusé.

Secrétion humorale (PDF, histamine, sérotonine,


prostaglandine,thrombine) Vaso et Bronchoconstriction
qui aggrave l’état respiratoire
III-Facteurs de risque

A- Facteurs de risques chirurgicaux


Chirurgie générale
Chirurgie du petit bassin
Chirurgie orthopédique
Chirurgie carcinologique+++
Immobilisation prolongée ( Port d’un plâtre)
B-Facteurs de risque médicaux

• Alitement prolongé
• Maladies à « haut risque » (syndrome myéloprolifératif)
• Sd néphrotique, colite ulcéreuse, maladie de Behçet
• cancer, insuffisance cardiaque , AVC
• obésité, varices,
• grossesse, post-partum, contraception oestro-progestative,
traitement hormonal
C- Anomalies biologiques acquises ou
congénitales

• déficit en antithrombine, protéine C, protéine S

• Résistance à la protéine C activée

• syndrome des antiphospholipides ,

• anomalies du fibrinogène et de la fibrinolyse

• hyperhomocystéinémie

• Elévation du facteur VIII.


IV- Diagnostic

URGENCE: Le diagnostic doit être établi dans les 24h

Le diagnostic positif doit être orienté par les Facteurs de


risque+++
Facteuts prédisposants à la MTEV- ESC 2014
Signes fonctionnels :

- Dyspnée
- Douleur thoracique : basithoracique,coup de
poignard < réaction pleurale.
- Fièvre : <l’infarctus pulmonaire ou thrombose
veineuse coexistante.
- Hémoptysie.
- Toux.
-Syncope: :
< l’amputation vasculaire +++ → valeur Pc
< syndrome vagal réactionnel à la douleur.
Examen physique :

- Tachycardie, Tachypnée.
- ICD : RHJ, HMG, insuffisance
tricuspidienne.
- Signes de TVP : grosse jambe
douloureuse, oedème, inflammation,
cyanose.
- Signes de gravité : état de choc, détresse
respiratoire.
Classification clinique d’une suspicion d’EP aigue
Scores de probabilité d’EP( Wells et Genève)

Score de Wells simplifié Points


Antécédent de TVP ou EP + 1.5
Cancer +1
Chirurgie récente ou immobilisation + 1.5
Hémoptysie +1
Signe de TVP +3
Rythme cardiaque >100min + 1.5
Diagnostic autre moins probable que l’EP +3

Probabilité clinique Prévalence EP


Faible 0-1 4%
Moyenne 2-6 21 %
Forte ≥7 67 %
Score de Genève révisé Points
Age > 65 ans 1
Antécédent de thrombose veineuse ou d’embolie pulmonaire 3
Chirurgie ou fracture <1 mois 2
Néoplasie active 2
Douleur unilatérale d’un membre inférieur 3
Hémoptysie 2
FC 75 – 94 / min - ≥ 95 / min 3-5

Douleur à la palpation du réseau VP et œdème unilatéral MI 4

Probabilité clinique Prévalence EP


Faible 0-3 8%
Moyenne 4 - 10 28 %
Forte ≥ 11 74 %
Apports des examens
complémentaires
1- Radiographie de thorax

• Souvent normale
• Atélectasie en bande, opacité liée à l’infarctus
pulmonaire
• Epanchement pleural isolé souvent minime
• Ascension d'une coupole diaphragmatique
• Elargissement d'une artère pulmonaire

• Exclut Dc : pneumonie, pneumothorax, fracture de côte


2- ECG

• Normal dans 20% des cas


• Tachycardie sinusale
• Coeur pulmonaire aigu:
S1Q3 ; T négatives de V1 à V3 ; déviation axiale
droite ; BBD,
• Fibrillation auriculaire

• Exclut :
infarctus du myocarde
péricardite aiguë
3- Gazométrie Artérielle :

 Hypoxie < 85 mmHg gravité si < 60mmHg


 Hypocapnie < 35 mmHg
 PaCo2 peut être ↑ si pathologie pulmonaire
sous jacente+++

 Sensibilité et Spécificité très faible


 Peut
 Aucun intérêt Dc
 Intérêt pour évaluation gravité
4- Biologie:
- D-Dimères+++ si probabilité clinique faible ou intermédiaire :
 excellente
sensibilité
o VPN très élevée = 98 à 99,6% selon études:
 EP très peu probable lorsque DDimères < 500

 faible spécificité
o infections, maladies inflammatoires, cancer, grossesse..

- Syndrome inflammatoire biologique :


élévation CRP, VS, hyperleucocytose

- Marqueurs de gravité : élévation troponine ++ et


BNP
5- Echodoppler cardiaque:+++
Recherche des signes de surcharge droite+++++(Cœur pulm aigu)
- Dilatation OD-VD-AP.
- HTAP
- Mouvement paradoxal du septum (plus de 25 % des patients)
- Rarement : visualisation direct du thrombus dans les cavités
droites en serpentin
- Appréciation Cavités gauches

- Visualisation du thrombus par ETO

Dc ≠ : tamponnade, insuffisance cardiaque globale +++


6- Echodoppler veineux  recherche d’une TVP

veine incompressible, caillot, flux doppler


Bilatérale et tout l’axe veineux profond.

Forte valeur prédictive positive, mais un écho-Doppler normal


n'exclut pas l'embolie pulmonaire.

TVP = présence EP si probabilité clinique d’EP


(EP  = 70% des patients ont une TVP à l’EDVMI)
7- Angioscanner thoracique
• Examen de référence+++
• Sensibilité et spécificité : environ 90%,
 plus efficace pour les atteintes lobaires que
segmentaires (visualisation du thrombus après
injection),
 moins performant pour les embols distaux
8- Scintigraphie pulmonaire de ventilation/perfusion
Normale: permet d’écarter le diagnostic si absence de
défects de perfusion (risque d'avoir une embolie : 0,2%)
Peu utile chez le malade ayant des ATCD broncho-
pulmonaires.
les limites de cet examen: la non disponiblité dans les 24h
Indication: si contre indication de l’angioscanner
(insuffisance rénale, allergie, grossesse) ou en cas de forte
probabilité clinique avec angioscanner négatif
4-Angiographie pulmonaire

• Gold standard,
• réservée à des patients chez
lesquels les autres méthodes ont
laissé un doute

• De moins en moins d’indication


avec les progrès
technologiques de l’angio
scanner
STRATÉGIE
DIAGNOSTIQUE
Algorithme de diagnostic EB non à haut risque
Algorithme de diagnostic EB à haut risque
Dc de gravité, marqueurs
et stratification du risque de décès
V-Evaluation de la gravité de l’EP
L’évaluation de la gravité de l’embolie pulmonaire conditionne
les modalités de prise en charge thérapeutique
Elle repose sur:
1-les paramètres cliniques:
- chute de la tension <90mmhg
- Index de sévérité de l’EP « Score de PESI » qui évalue le
risque de décès à 30 jours
2-Les paramètres paracliniques:
- Dysfonction ventriculaire droite
- Elévations des biomarqueurs (BNP, troponine)
Kucher N, Circulation 2003
Indice de sévérité d’une EP (PESI et PESI-s)
VI-Diagnostic différentiel

A- Douleur
-IDM
-Dissection aortique
-Péricardite
-pneumothorax
B- Dyspnée
OAP, crise d’asthme
C-Fièvre+foyer radiologique pathologique
-pneumopathie
-pathologie néoplasique
VII- Formes cliniques
A- Formes frustes
Accidents dyspnéiques ou douleur thoracique transitoire

B- Formes graves (poumon-cœur-cerveau)


Pronostic vital immédiat mis en jeu
Tableau d’Insuffisance Respiratoire Aigue
Poumons Cœur cerveau
Cyanose choc agitation
polypnée IVD aigue confusion
C-Formes survenant sur un cœur ou un poumon
pathologique
- Décompensation d’une cardiopathie, BPCO
- Signes cliniques sont souvent insidieux
- Diagnostic difficile à confirmer

D-Formes récidivantes ou chroniques


Inaperçues
Responsables de mort subite ou de complications post-
opératoires
Evolution

• A court terme : choc cardiogénique, mort subite ( 25


à30%) en l’absence de TTT

• Récidive d’un événement thrombo-embolique


rechercher néoplasie ou trouble de la coagulation

• A long terme : coeur pulmonaire chronique post


embolique.
VIII-TRAITEMENT
- Hospitalisation en USIC.
- Mise en condition: position demi-assise,
oxygénothérapie, voie veineuse et
monitoring (TA, FC, FR,Sao2).
- Prélèvement : bilan standard+ groupage
RAI bilan de thrombophilie
- Recherche de CI aux Anticoagulants ou
aux thrombolytiques,
A- Les moyens
1- Traitement symptomatique
-Institué le plus rapidement possible
-Repos au lit
-Antalgiques
-Oxygénothérapie
-Remplissage et Inotropes (dobutamine,
noradrénaline) si hypotension artérielle
2- Traitement curatif

a) Héparinothérapie
- Débuté dés la suspicion de l’EP
Héparine non fractionnée (HNF)
- bolus de 50-100 U/Kg
- dose d’entretien: 18 UI/Kg/h en pousse seringe
- vérifier le TCA à la 4ème heure après changement de
dose et toute les 24h
- contrôler le taux de plaquettes deux fois par semaine
préconisé chez les insuffisants rénaux
b- Les anti-vitamine K (AVK)

donner les AVK au mieux dès le premier jour


Par voie orale
-arrêter l'héparine après au moins 4 jours d'anticoagulation
conjointe par héparine et AVK et lorsque le TP, exprimé
en international normalized ratio [INR], est entre 2 et 3
(contrôlé à deux reprises à 24 heures d'intervalle)
-Durée du traitement: 3 à 6mois , parfois à vie dans certains
cas de risque très important de récidive
C- Les anticoagulants oraux directs (AOD)

- Rivaroxaban (XARELTO): 15mgx2/j pdt 21j puis 20mg/j


Apixaban (ELIQUIS); 10mgx2/j pdt 7j puis 5mgX2/j
Dabigatran ( PRADAXA): 150mgx2/J ( 110mgx2/j si
âge≥80ans) au 6éme jour après HBPM
- Administrés par voie orale à dose fixe. Action rapide
- Aussi efficace que le traitement classique (HBPM+AVK)
- CI : Insuffisance rénale sévère, grossesse, allaitement
d- Les thrombolytiques
Streptokinase – Actilyse - Métalyse
Action rapide
Détruit raidement le thrombus
Indiqué uniquement en cas d’embolie grave du fait du risque
hémorragique accru
24 heures après thrombolyse
e-Interruption de la veine cave inférieure

mise en place d'un « filtre » endoveineux


En cas de contre-indication formelle aux anticoagulants
temporaires ou prolongés
récidive d’embolie pulmonaire prouvée sous traitement
bien conduit
f-Embolectomie chirurgicale
désobstruction vasculaire en urgence sous
circulation extra-corporelle
Indication:
- EP proximale bilatérale en état de choc, ayant une contre-
indication à la thrombolyse ou résistant à celle-ci

-Etat hémodynamique extrêmement sévère réfractaire au


traitement symptomatique
3- Traitement préventif

 Non médicamenteux :
- Levée précoce en post op.
’alitement : surélévation des membres.
- En cas d
- Bas de contention
 Médicamenteux : anticoagulation prophylactique
après chirurgie orthopédique et carcinologique,
alitement et immobilisation prolongée, péripartum.
- HBPM: Enoxaparine (Lovenox 40mg) 1injection sc/j
- AOD après PTH et PTG: Xarelto 10 mg/j, Pradaxa
110mgx2/j, Eliquis 2.5 mg/j
B-Indications
En fonction du score de PESI
A- EP avec risque intermédiaire faible
Hospitalisation
-Repos
-Oxygénothérapie en fonction du besoin
-Héparine+ AVK ou AOD seul
B-EP avec risque intermédiaire élevé
Hospitalisation en unité de soins intensifs
-Repos
-Oxygénothérapie en fonction du besoin
- Héparine+AVK ou AOD
- Si échec thrombolytique
C-EP à haut risque
Prise en charge en réanimation
Repos au lit
Oxygénothérapie voir une ventilation assisté
Un remplissage en cas d’état de choc
Thombolytiques ou :
Embolectomie+/- interruption de la VCI
IV- Conclusion

- L’EP est une urgence Grave, souvent sous-diagnostiquée


- Diagnostic parfois difficile, d’où l’interêt de plusieurs
arguments (clinique et paraclinique) et surtout de sa
probabilité se basant sur ses facteurs de risque
- Le traitement est curatif par les anticoagulants. La
thrombolyse est indiquée en cas d’EP grave
- Sa Prévention repose essentiellement sur la bonne
prescription des anticoagulants à dose prophylactique
chez les sujets à risque

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