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11.09.2020
PLAN :
Introduction – (séance 1)
Chapitre 1 : L’acte administratif
1 – La notion d’acte administratif – (séance 2)
2 – Le régime de l’acte administratif – (séance 3)
Chapitre 2 : Le contrat administratif
1 – La notion de contrat administratif – (séance 4)
2 – Le régime du contrat administratif – (séance 5)
Chapitre 3 : La légalité
1 – Le contrôle de légalité – (séance 6)
2 – La norme constitutionnelle – (séance 7)
3 – La norme internationale et de l’UE – (séance 8)
4 – Les circonstances exceptionnelle – (séance 9)
5 – Le droit souple – (séance 10)
6 – Les mesures d’ordre intérieur – (séance 11)
BIBLIOGRAPHIE :
Les grands arrêts de la jurisprudence administrative (GAJA), Grands arrêts, Dalloz
Les grandes décisions de la jurisprudence, Thémis, Puf
Les revues de droit administratif (AJDA, Droit Administratif, JCP A, RFDA…)
Les conclusions des rapporteurs publics
Manuels :
P.-L. FRIER, J. PETIT, Domat, Montchrestien
Y. GAUDEMET, Manuel, LGDJ
M. LOMBARD, G. DUMONT, J. SINIRELLI, Hypercours, Dalloz
J. MORAND-DEVILLIER, P. BOURDON, E. POULET, Cours, LGDJ
B. PLESSIX, Manuel, Lexis Nexis
D. TRUCHET, Thémis, Puf
P. SERRAND, Droit Fondamental, Puf
J. WALINE, Précis, Dalloz
B. SEILLER, Droit administratif, Flammarion
=> revue générale du droit : site en ligne, manuel gratuit de droit administratif
MODALITÉS DE CONTRÔLE DES CONNAISSANCES :
Écrit de trois heures (cas pratique, commentaire, dissertation ou questions de cours)
18.09.2020
Chapitre 1 : L’acte administratif
J. WALINE, Précis, Dalloz (consultable en ligne) -> p 452 et 462,463
B. SEILLER, Droit administratif, Flammarion -> Tome 2, p 121 et s.
L’acte administratif (unilatéral) est le mode d’action le plus classique et le mode de
référence de l’intervention administrative. Il s’oppose au contrat, il y a deux outils
juridiques, 2 modes d’actions administratif.
La notion est une analyse en quelque sorte de l’objet d’étude (ici l’acte administratif) à
travers la manière dont le juge l’appréhende. Les notions sont utilisées par le juge qui les
définies plus ou moins bien, la définition par les juges n’est pas pédagogique, elle est
utilitaire. Il faut comprendre pourquoi l’acte est utilisé par le juge est pourquoi il le qualifie
ou non comme un acte administratif. La définition suit l’intention du juge donc elle évolue, le
juge ne donne pas de guide dans ce domaine, il entretient une ambiguïté pour se donner une
marge de manœuvre. On se pose la question de : quand est ce que le juge va attirer vers lui
l’acte administratif ? quand va-t-il considérer que l’administration a agi par l’acte
administratif ?
La France est un pays qui a ses traditions, sa culture de l’Etat, du pouvoir qui est une culture
assez autoritaire, centralisé ou on a donné au chef de l’Etat une importance majeure. La
puissance de l’Etat exprimée à travers le chef de l’Etat qui est censé représenter les citoyens,
ne correspond peut-être plus aux attentes des citoyens. Cette démocratie représentative est
aujourd’hui contestée par les citoyens qui voudraient peut-être plus de participation. Cette
unilatéralité est retrouvée dans l’administration et dans ses actes. Finalement cette notion
d’acte administratif unilatéral incarne la notion de puissance publique. L’acte
administratif reste la règle générale du mode d’action de l’administration. Même si
l’administration n’agit plus seulement de manière unilatéral (il existe des contrats).
M. Hauriou avait fondé toute sa réflexion sur la puissance publique : « l’administration elle-
même s’est plié à ce que toutes ses opérations fussent décomposées en des actes produisant
des effets juridiques qui puissent être attaqués dans certains délais ». Ce qui caractérise
l’acte administratif c’est qu’il produit un effet juridique et cette production justifie la
soumission au droit. L’acte administratif est susceptible d’être contesté, porté devant un
juge. La reconnaissance de cette notion d’acte juridique par le juge a pour effet de soumettre
l’administration au droit. L’administration n’as pas cette habitude culturelle de se soumettre
au droit, il a fallu du temps pour que le traitement des litiges de l’administration soit confié à
un tiers, le contrôle du juge est justifié par les prérogatives exorbitantes de l’administration.
L’acte administratif n’a cessé d’évoluer, y compris jusqu’à une période récente. Ce qui est
assez remarquable dans cette histoire est que le régime de l’acte administratif était un régime
presque exclusivement jurisprudentiel. Ce régime a été codifié récemment (2013), on a
aujourd’hui un Code des Relations entre le Public et les Administration (CRPA). Ce Code va
permettre d’avoir un élément de connaissance du droit. La fixation de ces règles dans un code
freine un peu la possibilité de modification des normes qui étaient auparavant seulement
jurisprudentielle ; mais le juge ferme encore parfois les yeux sur ce code.
Section 1 – La notion d’acte administratif
L’acte est émis par l’administration de manière unilatérale. L’administration a la capacité
d’élaborer une norme par sa seule volonté et le juge va l’identifier comme un acte
administratif unilatéral. Mais ce n’est pas si simple, il y a différentes catégories d’actes
unilatéraux qu’il faut pouvoir identifier. Tous les actes qu’adopte l’administration ne
présentent pas le caractère d’acte unilatéral car un acte élaboré par l’administration peut ne
ème
pas avoir d’effet sur les tiers. À partir du milieu du 20 siècle on a décidé de donner à des
personnes morales de droit privé une prérogative administrative. L’acte administratif
n’émane pas toujours directement de l’administration.
Le juge va identifier l’acte administratif sur une base qui est le critère matériel d’abord, le
critère organique est en échec car l’administration n’est pas la seule à fournir ces actes.
C’est le contenu lui-même qui va intéresser le juge pour l’identification il sera donc utilisé
un critère organique mais qui n’est pas suffisant et surtout un critère matériel. Certains actes
pris par des organes de droit privé pourront être qualifié d’acte administratifs et certains
actes produits par l’administration ne seront pas considéré comme des actes administratifs
par le juge donc non contrôlé par le juge (ex. actes de gouvernements : car caractère
politique), cela prouve l’insuffisance du caractère organique. Certains actes par leur nature ne
sont pas administratifs : arrêt préfet de la Guyane (tribunal des conflits, 27 nov. 1952 – n°
01420), le tribunal des conflits met en avant que certains actes par leur nature ne puissent
pas être soumis au contrôle du juge (il s’agissait ici, de l’organisation des juridictions à
Cayenne) ; cette décision renvoie à un autre plus récente ou le Conseil d’Etat va rendre une
décision assez critiquée (CE, ass, 25 oct. 2002 – Mr Brouant, n° 235600) ; le CC avait
modifié son règlement concernant l’accès aux archive : acte juridictionnel ou administratif ?
le CE dit que ce règlement ne revêt pas le caractère d’un acte administratif et la motivation
est contestable, le raisonnement du juge n’est pas toujours clair et rationnel. Les critères
organiques et matériel ne sont donc pas précis et changeants.
Qu’est-ce qu’un acte administratif unilatéral ? La définition repose sur plusieurs élément,
l’auteur qui a donné la définition la plus claire est Charles Eisenmann qui donne 3 éléments
permettant de définit l’acte administratif :
• Acte unilatéral ;
• Acte juridique : c’est un acte qui repose sur un critère formel (une habilitation) et un
critère matériel (acte qui crée des droits et des obligations) ;
• Acte de volonté : il y a une volonté de l’administration de se soumettre à un droit
spécial. Mais l’administration peut ne pas avoir le choix si elle exprime la puissance
elle sera de fait, soumise au droit et contrôlée par le juge
« Par dérogation à l'article L. 231-1, le silence gardé par l'administration pendant deux mois
vaut décision de rejet :
1° Lorsque la demande ne tend pas à l'adoption d'une décision présentant le caractère d'une
décision individuelle ;
2° Lorsque la demande ne s'inscrit pas dans une procédure prévue par un texte législatif ou
réglementaire ou présente le caractère d'une réclamation ou d'un recours administratif (=
env. 80% des situations) ;
3° Si la demande présente un caractère financier sauf, en matière de sécurité sociale, dans les
cas prévus par décret ;
4° Dans les cas, précisés par décret en Conseil d'Etat, où une acceptation implicite ne serait
pas compatible avec le respect des engagements internationaux et européens de la
France, la protection de la sécurité nationale, la protection des libertés et des principes à
valeur constitutionnelle et la sauvegarde de l'ordre public ;
5° Dans les relations entre l'administration et ses agents. »
Il s’avère que le silence vaut refus car dans la plupart des situations en France ne sont
pas traitées par l’administration.
La procédure est importante, notamment concernant les sanctions car c’est une garantie de la
défense.
• La forme
La forme c’est d’abord la rédaction de l’acte. La plupart des actes sont explicites, écrits
(mais certains actes ne sont pas rédigés). Sur un acte explicite il peut être mis en avant un
défaut de forme.
La signature n’est pas toujours obligatoire dans les actes elle est donc très rarement une
cause d’annulation de l’acte.
L’élément important qui concerne la forme est la motivation. Dans la plupart des cas il n’y a
pas cette obligation de motivation. Cette obligation apparait dans certains cas dans un but
de protection des administrés. La loi du 11 juillet 1979 a été intégré dans le CRPA : art L.
211-1 et suivants, cette loi introduit pour la première fois l’obligation pour les actes
individuels, notamment défavorable une obligation de motivation (l’article 211-2 donne une
liste de situation où cette motivation est obligatoire). Cette obligation concerne aussi les
organismes professionnels collégiaux de droit privé (ordre des médecins, des avocats…).
§2. L’exécution de l’acte administratif
L’exécution c’est la vie de l’acte, c’est la question de l’entrée en vigueur. L’acte administratif
bénéficie du « privilège du préalable » l’administration a le pouvoir d’imposer sa décision aux
administrés. Une fois que la décision est prise la décision va s’imposer mais l’administré ne
pourra la contester qu’une fois qu’elle aura été prise (pas avant). Pour présenter un
caractère obligatoire l’acte devra respecter certaines règles.
• L’entrée en vigueur
Ce régime varie suivant que l’acte présente un caractère individuel ou réglementaire. L’acte
règlementaire, pour entrer en vigueur doit être publié. Si l’acte n’est pas publié il n’est pas
entré en vigueur, c’est un principe général du droit énoncé par le CE : CE, 12 déc. 2003, n°
243430, syndicat des commissaires et des hauts fonctionnaires de la police nationale. Pour les
actes individuels, ils n’entrent pas forcément en vigueur du fait de leur publication. Ils entrent
en vigueur après notification. S’il n’y a pas de notification on considère que l’acte n’es pas
entré en vigueur.
La question de l’entrée en vigueur d’un acte administratif est souvent mise en regard du
principe de non-rétroactivité de la loi qui est transposé aux actes administratifs, ce
principe a été consacré par un grand arrêt : CE ASS., 25 juin 1948, société du journal
« l’Aurore » (GAJA) : un acte ne peut entrer en vigueur à une date antérieure à sa
publication.
• Là L’exécution forcée ou exécution d’office
L’exécution forcée n’est pas une évidence. L’administration a le pouvoir de faire entrer en
vigueur une décision mais pour la faire exécuter il faut qu’elle ait un pouvoir d’exécution
forcée. Dans la plupart des cas l’administration n’as pas de pouvoir d’exécution forcé.
Elle peut recourir au juge pour cette exécution forcé mais pas le faire elle-même, il faut que
cette exécution soit prévue par les textes. Le législateur est intervenu plusieurs fois pour
mettre en place cette exécution forcé dans certains cas (dans le domaine militaire par
exemple). L’exécution forcée la plus connue est la mise en fourrière d’un véhicule, des
obligations ont été introduite dans le code forestier (ex. obligation d’élaguer, l’administration
a le pouvoir d’exécuter elle m^me cet acte et sanctionner le non-respect de cette obligation).
Trib. Confl., 2 déc. 1902, société immobilière de Saint-Just (GAJA) : pour la première fois a
donné à l’administration la possibilité de recourir à cette exécution forcée. Les conclusions
du rapporteur du gouvernement Romieu : justifie ce pouvoir, l’urgence peut justifier le
pouvoir d’exécution de l’administration (en l’espèce un danger imminent).
§3. La disparition de l’acte administratif
La question de la disparition de l’acte administratif est complexe, elle a été ces dernières
années, notamment depuis 2015 considérablement simplifiée. Il va être fait une présentation
en l’état actuel seulement.
La suppression d’un acte peu porter préjudice et la question est de savoir si les conséquences
ne seront pas trop grandes ? Il faut prendre en considération la sécurité juridique. De ce
point de vue la question de la non-rétroactivité n’est pas pertinente, la disparition non
rétroactive d’un acte peut conduire à des inégalités. Cette disparition a 2 modalités : le
retrait et l’abrogation.
Le retrait d’un acte consiste à le faire disparaitre de l’ordonnancement juridique, du paysage
juridique. On fait comme s’il n’avait jamais existé. C’est un acte fort : cela concerne les
actes à venir et les actes passés et certains peuvent subir le retrait de ces actes s’ils étaient
sous le régime de celui-ci.
L’abrogation consiste à faire disparaitre l’acte pour l’avenir. On ne remet pas en cause les
effets passés.
C’était un régime uniquement juridictionnel et qui est devenu plutôt textuel, codifié (CRPA).
Les règles sont donc bien identifiées grâce à cette codification, la codification reprend pour la
majorité une JP antérieure. Ce régime repose sur une distinction suivant que l’acte est créateur
de droit pu non créateur de droit.
• Les actes créateurs de droit
Un acte créateur de droit a pour vocation de donner des droits a des individus (ex. permis de
construire). L’acte créateur de droit va être moins facile à supprimer de l’ordonnancement
juridique, les règles sont plus restrictives.
02.10.2020
• Le retrait des actes non créateurs de droit
Le régime des décision légales non-créatrice de droit est identique à celui des décision légale
créatrice de droit. En principe le retrait n’est pas possible mais il y a des exceptions. Dans
certains cas, le juge admet qu’un acte non créateur de droit puisse être retiré par
l’administration : lorsque l’acte n’as reçu aucun commencement d’application. Mais
comme il n’y a pas eu de commencement d’application, le retrait est alors dans ce cas
équivalent à l’abrogation (impact seulement pour le futur).
Si l’acte est illégal, il est normal qu’on puisse corriger cette illégalité. L’acte ne peut être
retiré que dans un délai fixé par le juge administratif à propos des actes créateurs de droit
(arrêt Ternon), c’est-à-dire dans un délai de 4 mois : article L. 243-3 du CRPA. Et par
dérogation les mesure présentant un caractère de sanction peuvent être retiré à tout
moment au-delà même de ce délais (art L. 242-4 CRPA).
Un acte obtenu par fraude, peut-être à tout moment retiré. Arrêt : CE, 23 février 2009, Mme
B.-R. n° 310277 (= cas d’une qualification obtenue par fraude à la suite d’une thèse contenant
du plagiat).
Pendant longtemps on s’est demandé si on devait traiter spécifiquement les contrats passés
entre deux personnes publiques. Avec la décentralisation, les collectivités publiques vont
passer des contrats entre elles et donc le juge va s’interroger sur ces contrats. La
jurisprudence de référence est la suivante : TC, 21 mars 1983, UAP : « un contrat passé entre
deux personnes publiques revêt en principe un caractère administratif, impliquant la
compétence des juridictions administratives pour connaitre des litiges portant sur les
manquements aux obligations en découlant, sauf dans le cas où, égard à son objet, il ne fait
naitre entre les parties que des rapports de droits privé »
Le juge dans le cas d’un contrat entre deux personnes publiques présume toujours
l’administrativité mais il pourra renverser la présomption d’administrative en regardant son
contenu.
Le critère organique est à la fois essentiel et insuffisant.
Autre exemple : TC, 15 novembre 1999, commune Bourisp : une commune cède à une autre
commune des terrains, les juges vont considérer que le contrat dont l’objet faisait a priori
parti du domaine privé est un contrat administratif car il comprenait un certain nombre de
clauses exorbitantes du droit commun qui permettaient de le qualifier ainsi.
• Les contrats administratifs par la détermination de la loi
Un certain nombre de textes ont décidé de qualifier des contrats d’administratif.
Traditionnellement, on cite la loi du 28 pluviôse an VIII ; art 4, al 3. : le conseil de préfecture
est compétent sur « sur les difficultés qui pourraient s’élever entre les entrepreneurs de
travaux publics et l’administration concernait le sens ou l’exécution des clauses de leur
marché »
Le décret-loi du 17 juin 1938, sur les occupations du domaine public dispose que : « sont
portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs : aux contrats comportant
occupation du domaine public quel que soit leur forme ou leur détermination, accordé ou
conclus par les personnes publiques ou les concessionnaires »
Le concessionnaire du domaine public est souvent une entreprise privé amenée à passer des
contrats et ces contrats passé entre deux personnes privé (le concessionnaire et une autre
personne privée) sont des contrats administratifs.
EX. : TC, 14 mai 2012, Mme G c/ Sté d’exploitation sport évènements (SESE) et ville de
Paris, Req. N° C 3836
La qualification des marchés publics a été épineuse pendant un moment. Certains ont été
qualifié de contrat privé, d’autres de contrats administratifs, le législateur a fini par
intervenir à travers une loi de 2001 qui introduit la règle suivante : les marchés passés en
application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs » (Loi du
11 décembre 2001, portant mesures d’urgence à caractère économique et financier –
MURCEF – article 2).
Le critère organique est nécessaire mais non suffisant, le juge va donc se fonder également
sur des critères matériels.
§2. Les critères matériels
Le contenu doit révéler un régime exorbitant pour que le juge le qualifie de contrat
administratif, qu’est-ce qui différencie ce contrat d’un contrat de droit privé ? qu’est ce qui
justifie un régime dérogatoire ?
La conviction du juge va se former au regard de l’utilisation de deux critères : l’utilisation de
la clause exorbitante et le critère du service public
• Le critère de la clause exorbitante
C’est le critère classique mais il s’exprime de différentes manières. Si l’on parle de clause
exorbitante c’est qu’on estime que l’administration puisse se comporter en utilisant 2
casquettes, elle est tantôt puissance publique, tantôt elle se comporte comme une personne
privée. Ce n’est qu’en 1912 que la jurisprudence va tenir compte du contenu du contrat
pour le qualifier : CE, 31 juillet 1912, société des granits porphyroïde des Vosges et
conclusions de Léon Blum, il va développer la théorie de la clause exorbitante en déterminant
ce qui va qualifier un contrat administratif : le contrat par sa nature même doit être de ceux
que seul l’administration peut passer pour être un contrat administratif.
L’exorbitance paraît à la fois simple mais c’est à la fois un caractère difficile à cerner.
Concernant la doctrine, G. Vedel dit que « la clause exorbitante n’est pas celle qui aurait été
illicite dans un contrat de droit privé, mais une clause que l’on ne rencontre pas
fréquemment ». M. Waline, lui dit qu’une clause exorbitante est : « toute clause qui, dans
un contrat de droit privé, serait nulle comme contraire à l’ordre public ».
La jurisprudence n’est pas constante dans la définition de ces clauses, il n’y a pas de réelle
définition si ce n’est l’idée de normalité, la clause exorbitante serait celle qui est
dérogatoire aux relations aux personnes privées. La clause exorbitante serait celle qui
exprime une prérogative de puissance publique.
Des décisions récentes ont pu renouveler la notion de clause exorbitante : TC, 13 octobre
2014, n° 3963, société AXA France IARD : « considérant, en troisième lieu, que le contrat
litigieux ne comporte aucune clause qui, notamment par les prérogatives de puissance
reconnues à la personne publique contractante, dans l’exécution du contrat, implique, dans
l’intérêt général, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratif ». Une autre
décision : TC, 12 février 2018, n° 4109 : cette décision rappel l’idée de régime exorbitant des
contrats administratifs, aujourd’hui c’est l’intérêt général qui justifie cette exorbitance.
Une remarque tirée d’une jurisprudence du CE (à l’époque ou EDF était une société
publique) : le CE a considéré que les contrats d’achat d’électricité passés par EDF (société
publique) étaient des contrats de droit public car les contrats relevaient d’un régime
exorbitant. (CE, 19 janvier 1973, Société d’exploitation de la rivière du Sant, n° 82338).
Aujourd’hui EDF est devenu privé et l’achat d’électricité est aujourd’hui un contrat de droit
privé.
09.10.2020
Cette situation fait l’objet de critiques de la part de la doctrine, notamment une critique assez
sévère d’Yves Gaudemet : « les contrats administratifs, privés du fondement commun de
l’article 34 de la constitution qui place dans le domaine de compétence de la loi les principes
fondamentaux des obligations civiles et commerciales, n’appartient plus évidemment à la
famille du contrat ; ils sont exclusivement des procédures, une règlementation destinée aux
parties publiques pour s’assurer le concours d’un partenaire ».
Cela concerne les contrats passés par l’Etat mais aussi par les collectivités, cela est
confirmé par le Conseil d’Etat qui se fonde sur un décret-loi du 12 novembre 1938 pour tirer
cette compétence réglementaire : CE, 5 mars 2003, Ordre des avocats à la cours de Paris
Le contrat administratif est un accord de volonté donc il suppose une liberté contractuelle
des cocontractants. Ce qui le caractérise c’est l’inégalité des parties, c’est donc une liberté
encadrée.
C’est un élément inhérent à la notion même de contrat. Cela signifie la liberté de recourir au
contrat de son choix et de choisir son cocontractant, de choisir le contenu du contrat et
s’engager sur sa propre volonté. Si la liberté contractuelle existe, elle a une valeur
particulière. Ce principe de liberté contractuelle a été reconnu comme un principe général du
droit par le Conseil d’Etat : CE, 28 janvier 1998, Sté Borg Warner, n° 138650.
La question est de savoir si la liberté contractuelle peut être reconnue aux personnes
publiques. En principe, le législateur ne peut pas limiter la liberté contractuelle des
personnes publiques les principes applicables en droit des contrats privé sont les même en
droit administratif. Cela est d’autant plus vrai pour les collectivités qui dispose de la libre
administration d’où découle la liberté contractuelle. On ne peut pas la limiter mais pour autant
elle n’a pas la même valeur qu’en droit privé. Si elle est reconnue, la liberté contractuelle
est encadrée car le contrat administratif est particulier et le justifie. Finalement on va
chercher à donner des règles spécifiques pour le contrat administratif qui conduisent à une
limitation de la liberté contractuelle.
La première difficulté du contrat administratif est que l’on n’a jamais pu consacrer la liberté
de choix du cocontractant. Le choix du cocontractant, notamment sur les marchés publics, est
dicté par un certain nombre de considérations complexes : tantôt on prend on considération
les finances publiques. Pendant longtemps il fallait choisir le moins cher, mais elle pouvait
être facilement contournée en connaissant des informations sur l’entreprise la moins chère
afin de remporter le marché. Mais le moins disant ne peut pas apporter des prestations de
bonne qualité. On a progressivement glissé des critères du moins disant au mieux disant :
une protection des finances publiques mais aussi s’assurer de la qualité du service.
Traditionnellement on distinguait les délégation d service public (fondé sur la liberté) et les
marchés publiques (avec un strict contrôle), aujourd’hui les deux régimes se sont rapprochés,
ils sont presque identiques avec le principe du mieux disant des deux côtés. Le principe est
celui de la liberté : CE, 3 mai 1974, Flesh, le CE rappelle la liberté contractuelle en matière
de délégation de service public.
Cette liberté est de plus en plus encadré sous l’effet du droit de l’Union Européenne. La
première limite est liée au droit de la concurrence : une décision du CE montrait son
attachement à l’application du principe de libre concurrence, cet arrêt est important car il
concernait une délégation de service publique. Pour des raisons de simplification on a voulu
confier le contentieux du droit de la concurrence a une juridiction. À partir du moment où le
législateur confie le contentieux a une seule juridiction (CA Paris), la question est de savoir
si le CE ne peut pas dégager certaines compétences en matière de droit de la concurrence c’est
ce qu’il fait dans cet arrêt : CE sect. 3 novembre 1997, société million et marais ; en se basant
sur le droit de l’UE. Ce qui est remarquable c’est que le CE prend une compétence
concurrente a la CA de Paris.
Autre influence du droit de l’UE, influence concernant les procédures. Une intervention du
législateur qui va créer de nouvelles procédures qui découlent des directives de l’UE dont le
référé précontractuel. C’est une procédure qui permet au concurrent évincé d’un marché de
service public de contester le résultat du concours en référé en bloquant la procédure
pour éviter que le contrat soit signé. Arrêt : CE sect., 3 octobre 2008, SMIRGEOMES : il
s’agissait d’un contrat pour le choix d’un délégataire concernant les ordures ménagères, un
litige va naitre concernant le cocontractant va naitre, un référé va être formé et il va être
confirmé la possibilité de saisir le juge pour notamment manquement à la publicité.
La spécificité des contrats administratifs tient à leur exécution. La première spécificité est de
donner des prérogatives a l’administration. Mais l’administration a également des
obligations envers son cocontractant.
Les obligations :
Les droits :
Dans les contrats administratifs il y a des règles spéciales concernant la sous-traitance. Le fait
que les contrats soient conclu intuitu personae n’interdit pas la sous-traitance. Dans certains
cas cette sous-traitance st obligatoire. Cette sous-traitance est régie par la loi du 31 décembre
1975 : elle pose des règles particulières. On parle d’agrément et d’acceptation des sous-
traitants. La règle est que l’on ne peut sous-traiter que sous la double condition que le sous-
traitant soit agréé par l’administration. Et l’idée d’acceptation est qu’il faut que
l’administration accepte ce sous-traitant (la société sous-traitante doit préalablement être
soumise à l’acceptation de l’administration).
La question de la cession du contrat a aussi été regardée. Normalement elle ne serait pas
possible étant donné qu’il s’agit d’un contrat intuitu personae. Il a été recherché l’équilibre
entre la cession de contrat et l’intuitu personae. Il existe un droit du cocontractant reconnu
tardivement, à la cession du contrat. Pour pouvoir céder un contrat il faut que la cession soit
soumise à l’autorisation de l’administration. C’est un principe général du droit applicable sans
texte. L’administration pourra refuser la cession du contrat si cela justifie la protection de
l’intérêt général
On peut envisager qu’au cours de l’exécution d’un contrat il y ait des faits qui puissent
modifier les conditions de l’exécution du contrat. Que fait-on dans ce cas ? Le droit
administratif a ici été un modèle pour le droit privé.
Les faits nouveaux peuvent être des circonstances extérieures au contrat, un fait de
l’administration. Ce qui va faire la différence avec le droit privé ce sont les principes du droit
publique.
• La force majeure
C’est un évènement extérieur, indépendant de la volonté des parties ; c’est un événement
irrésistible, qui empêche la formation du contrat. C’est un événement imprévisible. C’est
exceptionnellement reconnu par le juge
La question a été de savoir si la grève était un cas de force majeur. Elle est
exceptionnellement reconnue comme cas de force majeur. La grève ne peut être considéré
comme une cause d’exonération dès lors que le cocontractant aurait pu exercer une action
pour l’empêcher. Si le cocontractant pouvait la prévoit alors ce n’est plus un évènement
imprévisible ; si le cocontractant pouvait la surmonter alors elle n’est plus irrésistible.
La force majeure est souvent un évènement de type catastrophe naturelle (inondation,
tempête…).
La force majeure va libérer le cocontractant de son obligation d’exécuter son obligation et va
constituer une cause d’exonération de sa responsabilité contractuelle. Al force majeur pourra
aussi mettre le cocontractant en situation de demander la résiliation du contrat.
La force majeure ne produit ses effets que pendant le temps qu’elle se réalise. Lorsque le fait
de force majeur prend fin l’obligation réapparait.
• Le fait du prince
C’est une mesure que les pouvoirs publics vont prendre qui va avoir pour conséquence de
modifier les termes du contrat. L’administration utilise son pouvoir de modification unilatéral
qui a un effet aggravant sur la situation financière du cocontractant.
Le CE encadre cela. La règle est que l’administration puisse compenser les effets de sa
décision. CE, 2 février 1983, Union des transports publics urbains et régionaux (n° 34027).
La théorie du fait du prince c’est un peu vidé au profit de l’imprévision.
Ce fait n’est pas sans conséquence. Le fait du prince ouvre un droit à indemnité au
cocontractant dès lors que sa situation s’est aggravée. Le problème est que si l’on fait d’un cas
de fait du prince un cas d’imprévision ce ne sont plus les mêmes règles.
CAA Paris, 25 mai 1993, société Renoveco (n° 91PA00863) : le juge exclue la théorie de la
force majeure en raison de l’intervention de l’administration (pas d’extériorité) ; le juge
envisage ensuite la situation sous l’angle de la théorie du fait du prince et de l’imprévision et
il rejette la théorie du fait du prince.
Si une situation de fait du prince est reconnue, c’est avantageux pour le cocontractant qui a un
droit à être indemnisé intégralement du préjudice subi. L’obligation d’indemniser trouve son
fondement dans la responsabilité contractuelle de l’administration qui doit rétablir l’équilibre
financier qu’elle a rompu par son fait.
• La théorie de l’imprévision
L’imprévision est un événement qui intervient au cours de la réalisation d’un contrat,
indépendant de la volonté du cocontractant qui présente des caractères anormaux et
imprévisibles. Il faut qu’il y ait un déséquilibre très important, massif du contrat, qui rend
presque l’exécution impossible du fait de la mobilisation financière qui va être nécessaire.
Cette théorie a été mise en place après la première guerre mondiale, à une époque où on a dû
faire face à des problématiques économiques importantes, relatives au prix des matières
premières notamment. C’est plus une théorie d’ordre économique (ex. effondrement du
marché des matières premières). Progressivement on a introduit des événements non-
économique mais qui entraine des problèmes économique (ex. séisme qui n’empêcherai pas
totalement la réalisation de la mission ou bien intervention de l’administration).
Pour que la théorie puisse être mobilisé il faut qu’elle soit indépendante de la volonté du
cocontractant. Il faut un déficit important, le cocontractant doit être dans une situation
financière difficile. On parle de bouleversement du contrat. On dit que l’imprévision crée une
situation extracontractuelle. L’intérêt du service public va faire que cette situation ne libère
pas le cocontractant de ses obligations.
CE, 30 mars 1916, Cie. Générale d’éclairage de Bordeaux (n° 599928) : c’est l’arrêt qui
consacre cette théorie, cette théorie est d’ordre public, l’administration devra compenser les
coûts engendrés pour le cocontractant.
Cette théorie a été réhabilité en quelque sorte ces dernières années par la Cour de cassation
pour les contrat privé (Civ, 1ère, 16 mars 2004, n° 01-15.804) qui l’utilise depuis quelques
années puis a été intégré dans le Code civil.
Les effets : le cocontractant doit continuer à faire fonctionner ses services et en contrepartie il
a le droit à une indemnité d’imprévision, c’est une compensation qui n’est pas intégrale. Cette
indemnisation tient compte des pertes subies et du déficit créer par les charges
extracontractuelles. Cette charge extracontractuelle est partagée entre l’administration
(indemnisation) et le cocontractant qui prendra en partie en charge le coût de l’imprévision.
C’est aussi une théorie qui a normalement un effet temporaire, si la situation ne peut pas être
redressé alors l’imprévision pourra devenir un cas de force majeur justifiant que le
cocontractant puisse demander une résiliation.
CE Ass., 9 décembre 1932, Cie. Des tramways de Cherbourg (n° 89655, 01000, 01001) : dès
lors que la situation devient définitive le CE va parler de force majeure et donner la possibilité
de mettre un terme au contrat
Chapitre 3 : Le principe de légalité
Comment le juge raisonne-t-il pour apprécier la légalité d’un acte ? Comment le juge
contrôle-t-il la légalité et par rapport à quoi ?
Que signifie la légalité en droit positif ? Que signifie le fait que l’administration soit soumise
au contrôle de légalité ? Cela signifie que l’administration est soumise au droit et c’est une
bonne chose mais ça n’a pas été facile en France. On a tout de même au cours des siècle
progressé dans ce sens. Le principe de légalité signifie que l’administration est soumise à
toutes les règles qui lui sont supérieures. Avant le principe de légalité concernait
uniquement la loi mais aujourd’hui de nouvelles normes se sont ajoutées (constitution,
traités, droit européen…). Sur ce travail du contrôle de légalité le juge est à l’œuvre en
permanence.
Parmi les évolutions des sources de la légalité on parle beaucoup du principe de sécurité
juridique qui constitue un élément du « bloc de légalité » : arrêt KPMG, CE Ass. 24 mars
2006 : la première fois que ce terme est utilisé et qu’on lui donne un sens : la sécurité
juridique est le fait d’éviter que l’acte réglementaire ne soit pas modifié trop brutalement : « il
incombe à l’autorité investie du pouvoir règlementaire d’édicter, pour des raisons de sécurité
juridique, les mesures transitoires qu’implique, s’il y a lieu, une règlementation nouvelle ».
C’est ici une nouvelle obligation que le juge impose à l’administration en France.
Section 1 – Le contrôle de légalité par le juge administratif
Comment le juge raisonne-t-il ? quels éléments prend-t-il en compte dans son contrôle ?
§1. Les vices susceptibles d’affecter la légalité des actes administratifs
Ce sont les cas d’ouverture de REP (demande d’annulation), c’est ce qui justifie qu’un REP
soit engagé. Le juge de l’excès de pouvoir c’est le juge auquel on s’adresse pour l’annulation
d’un acte mais ce n’est pas le seul rôle du juge administratif et tout ce qui ne relève pas de
l’annulation relève du plein contentieux. Le juge de l’excès de pouvoir n’utilise qu’un
pouvoir principal : celui de l’annulation, dès lors qu’on demande plus que la simple
annulation on est dans le plein contentieux. Les vices susceptibles d’affecter la légalité des
actes administratifs sont les défauts qui vont justifier l’annulation d’un acte.
Un grand arrêt a mis l’accent sur le REP en disant qu’il s’applique même sans texte, on met
en avant le caractère démocratique du REP. CE Ass., 17 février 1950, ministre de l’agriculture
c/ Dame Lamotte le REP est un « recours qui est ouvert même sans texte contre tout acte
administratif, et qui a pour effet d’assurer conformément aux principes généraux du droit, le
respect de la légalité ». Le REP est un recours d’intérêt général.
Ces vices ne sont pas inhérents à la procédure administrative. On a donné la paternité à E.
Laferrière de ce raisonnement, il l’a expliqué et systématisé dans un ouvrage : Traité de la
juridiction administrative et des recours contentieux (1887). Il dégage les premiers éléments
qui peuvent donner lieu à l’ouverture d’un REP :
• L’incompétence de l’auteur
• Le vice de forme
• La violation de la loi
• Le détournement de pouvoir
Le CE a décidé à un moment donné d’organiser ces vices donnant lieu à un REP. Dans le
contentieux de l’annulation il y a une organisation des vices entre la légalité externe et la
légalité interne. Cette distinction entre l’égalité interne et l’égalité externe apparait
tardivement dans la jurisprudence du CE : CE Sect., 20 février 1853, Sté Intercopie. Dans un
REP on estime qu’il y a deux causes juridiques (=ce qui justifie les questions de
recevabilité) : légalité interne et externe. Cad que lorsque l’on fait un recours (on a un délai
pour faire ce recours), le recours peut être fondé sur des vices de légalité interne et externe. Si
dans le recours on ne met en avant qu’un vice de légalité interne, au bout d’un certain délai
prévu, on ne peut plus développer un vice de légalité externe car il y a un changement de
cause juridique. La notion de cause juridique est donc très importante et dans le REP il y a
2 causes juridiques possible : légalité interne et légalité externe.
A / Les causes de légalité externe
La légalité externe est constituée de 3 vices : l’incompétence, le vice de procédure et le vice
de forme.
• L’incompétence
L’incompétence est le moyen le plus important en droit administratif, c’est la question de
l’autorité qui a pris l’acte. Pour édicter un certain acte administratif il faut en avoir la
compétence. C’est un moyen d’ordre public, si le juge constate l’incompétence il la soulève
d’office. L’incompétence peut être :
• Matérielle : on ne peut prendre un acte que dans le domaine de compétence qui nous
est donné.
• Territoriale : on ne peut prendre un acte que dans l’espace ou on est compétent (ex. un
maire uniquement sur sa commune).
• Temporelle : si on a eu une compétence mais qu’on l’a perdue dans le temps, on ne
peut pas faire un acte. On a mis en avant la théorie du fonctionnaire de fait qui
permet de corriger l’incompétence temporelle, on considère que l’acte reste valable
(pour la sécurité de l’administré). Cette théorie a été mise en place par le juge
judiciaire (à propos d’un mariage célébré par une personne non compétente, le
mariage n’a pas été annulé). Cela a notamment été mis en avant dans cet arrêt
concernant un arrêt de reconduite à la frontière : CE Sect., 16 mai 2001, préfet de
police c/ M. Mtimet, le fonctionnaire avait dépassé la limite d’âge au moment où il
prend l’acte mais l’acte été considéré comme légal tout de même.
L’incompétence concerne aussi le CE dans une certaine mesure. Un vice d’incompétence peut
être observé dans certains règlements doivent être pris après l’avis du CE. Et une
administration, un ministre peut prendre une mesure d’application sans saisir le CE, dans ce
cas l’acte peut être annulé en développant l’idée que l’acte a été pris par une autorité
incompétente. La non-saisie du CE entache l’acte d’un vice d’incompétence si cette saisie
était obligatoire.
• Les vices de procédure
Aujourd’hui, paradoxalement, tout manquement à une procédure ne constitue pas un
motif d’annulation de l’acte. Le CE distingue 2 formes d’irrégularité : des irrégularités
substantielles et des irrégularités non-substantielles. En faisant cette distinction le CE laisse
place à une forme de subjectivité (pour qualifier la substantialité des irrégularités). Les
choses ont évolué en 2011, une loi est intervenue : la Loi du 17 mai 2011 de simplification et
d’amélioration de la qualité du droit, dans son article 70 elle dispose que « lorsque l’autorité
administrative … ». Le CE a sauté sur l’occasion pour consacrer ce principe dans un arrêt :
CE Ass., 23 décembre 2011, Danthony, on parle dans cet arrêt de subjectivisation du juge, il
prend en compte l’influence du vice de procédure sur le sens de la décision prise, cela
conduit à une hiérarchisation des vices puisque le vice de la procédure devient susceptible
dans certains cas d’entrainer l’annulation de l’acte mais pas toujours.
• Les vices de forme
C’est un vice qui peut entrainer une illégalité mais qui pourra aussi ne pas avoir une grande
importance.
B / Les causes de légalité interne
• La violation de la loi ou l’erreur de droit
C’est la méconnaissance d’un principe ou d’une règle supérieure. Aujourd’hui la violation de
la loi va au-dessus de la loi, le terme est demeuré mais il n’a plus la même signification que
soue la 4ème République. On est sur un vice qui est assez objectif (le texte est conforme ou
non conforme à la norme supérieure). Cela étant, l’erreur de droit est le fait que
l’administration se trompe de norme, le juge aujourd’hui à un raisonnement quelque part
subjectif par rapport à ce vice. Le juge va se poser la question de l’impact de l’erreur fait
par l’administration : est-ce que si l’administration avait utilisé le bon texte elle aurait pu
prendre la même décision ? si la réponse est oui, pourquoi supprimer cette décision ? Le juge
peut alors effectuer une substitution de base légale, le juge va corriger en quelque sorte l’acte
de l’administration. Cela conduit à une évolution du REP qui n’est pas conforme à l’origine, a
l’origine le REP est un recours objectif, le juge est seulement une « machine » de contrôle
(vice = annulation). Dans certains cas, donc, le juge va seulement corriger l’acte c’est ce qui
se passe dans cet arrêt : CE Sect., 3 décembre 2003, préfet de la Seine-Maritime c/ El Bahi
(n° 240267).
A / Le contrôle restreint
On dit dans certains cas que le juge à un contrôle restreint. L’étendue du contrôle n’est pas
forcément liée au cas d’ouverture du REP. Dans le contrôle restreint le juge va contrôler
n’importe quel vice mais il ne contrôlera pas la qualification des faits, il se limitera à la
matérialité de ceux-ci. Le juge ne va pas pousser son contrôle jusqu’à la qualification
juridique des faits par l’administration. Le juge va contrôler les motifs de la décision et il ne
censurera la décision que si elle comporte des erreurs manifestes.
CE Sect., 25 avril 1990, institution technique de Dunkerque.
Dans ce type de contrôle restreint, au fur et à mesure, le juge a assorti son contrôle minimum
d’un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation. Aujourd’hui dans quasi tous les cas de
contrôle restreint, le juge va aussi contrôler l’erreur manifeste d’appréciation. Pendant
longtemps, le juge n’effectuait qu’un contrôle minimum sur les sanctions prononcées par
l’administration, mais cela pouvait créer des injustices (il y des administrations indulgentes et
d’autres plus sévères) donc le juge va pousser son contrôle et contrôler la qualification
juridique des faits.
Ce type de contrôle (restreint + erreur manifeste d’appréciation) s’est généralisé
progressivement, aujourd’hui il existe très peu de cas ou le juge n’exerce qu’un contrôle
restreint. Malgré tout, il est difficile d’obtenir l’erreur manifeste d’appréciation, il faut
vraiment une grave disproportion.
Le juge n’effectue pas de contrôle erreur manifeste d’appréciation lorsque le juge ne peut pas
se mettre à la place de l’administration (ex. dans le cadre de jury de concours). En dehors de
cela l’erreur manifeste d’appréciation est contrôlée.
B / Le contrôle normal
L’expression contrôle normale peut induire en erreur. Lorsque le juge effectue un contrôle
normal c’est un contrôle que l’on peut qualifier de plein, de poussé. La différence entre
restreint et normal se fait dans la façon dont le juge contrôle les faits, dans le contrôle
normal le juge va contrôler la qualification des faits.
Le juge va censurer toute erreur de qualification juridique des faits (et tous les autres vices
aussi)
On trouve dans certains manuel le terme de « contrôle maximum » mais il n’existe pas de
contrôle maximum, le contrôle maximum est le contrôle normal. À partir du moment où il a
été contrôler la qualification juridique des faits il n’est pas possible d’aller plus loin. Contrôler
la qualification juridique des faits c’est pour le juge se mettre à la place de l’administrateur (le
juge se demande : qu’aurais-je fait à la place de l’administrateur ?).
Ex. de contrôle normal : le contrôle en matière sportive, le contrôle du dopage est un contrôle
normal, c’est un contrôle de la qualification des faits (à partir de quel niveau de produit
parme-t-on de dopage ?).
On parle dans certains cas de contrôle de proportionnalité. C’est une forme de contrôle
normal. C’est le contrôle de l’adaptation de la décision aux faits. C’est un contrôle qui ne fait
que traduire que le juge se met à la place de l’administrateur. On observe que la tendance
historique est le glissement d’un contrôle restreint vers un contrôle plus poussé de type
contrôle de proportionnalité. Ce contrôle n’est pas possible dans tous les domaines. Ex.
contrôle de proportionnalité en cas de décision de reconduite à la frontière. On est dans le
contrôle normal mais c’est un contrôle poussé qui justifie la proportionnalité.
Parfois on glisse directement du contrôle restreint au contrôle normal / proportionnel sans
passé par l’étape du contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation
CE Ass., 19 avril 1991, Belgacem et Mme Babas : « il appartient au préfet d’apprécier si la
mesure envisagée n’est pas de nature à comporter des conséquences d’une gravité
exceptionnelle sur la situation personnelle de l’intéressé »
CE. Ass., 13 novembre 2013, Dahan : « il appartient au juge de l’excès de pouvoir, saisi de
moyen en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent ayant fait l’objet d’une
sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à, justifier une sanction et si la
sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ».
C / La théorie du bilan
C’est une théorie mise en place dans un domaine particulier, c’est une théorie
spécifique qui s’applique en matière d’expropriation. Dans la procédure
d’expropriation il y a l’intervention du préfet qui va déclarer l’utilité publique de
l’opération. Le juge a un moment donné a utilisé cette technique.
CE Ass., 28 mai 1971, Fédération de défense des personnes concernées par le projet
dénommé « Ville nouvelle Est » : il s’agissait d’une opération d’urbanisme pour la
construction d’un campus universitaire et qui nécessitait donc une expropriation de
certaines personnes. Le juge va mettre en place la technique du bilan, il fait un bilan
des avantages et inconvénient de l’opération et sur la base de ce bilan il va juger
l’utilité publique de l’opération valable ou non
CE Ass., 20 octobre 1972, Société civile sainte marie de l’assomption : on veut créer
une bretelle d’autoroute qui passe dans le parc d’un hôpital psychiatrique, donc
importance du calme, le bilan penche ici dans le sens des inconvénients.
Le contrôle du bilan est-il restreint ? normal ? Le contrôle du bilan est un contrôle
sur pièces (et les pièces valent ce qu’elles valent). Le juge n’a donc que les éléments
qu’on lui met en main. En réalité ce contrôle du bilan est un contrôle original,
spécifique a certain domaine mais c’est plus un contrôle restreint qu’un contrôle
normal. L’avantage de cette théorie c’est de contrôler là où il n’y a pas de faits. On est
plus sur un contrôle type contrôle minimum avec contrôle de l’erreur manifeste
d’interprétation. C’est une appréciation assez subjective mais globalement les
annulations de déclaration d’utilité publique sont rarement obtenues. C’est un
contrôle interessant mais en réalité il n’est pas poussé. (CE, 22 octobre 2003,
association SOS rivière et environnement.)
Section 2 – La norme constitutionnelle
L’intérêt est d’abord historique. Historiquement le juge ne contrôlait l’acte administratif
que par rapport à la loi. Jusqu’à la 5ème Rep le juge n’effectuait qu’un contrôle de légalité
stricte. Ensuite il a été élargi le champ des normes susceptible d’être contrôlé à la norme
constitutionnelle. Cela conduit à une extension du contrôle de légalité, on contrôle les actes
administratifs par rapport à la norme constitutionnelle. Puis on verra également le contrôle de
constitutionnalité de l’acte administratif qui est un contrôle spécial.
La question est de savoir si la loi fait écran ou si on peut aller au-delà. Le juge s’est demandé
s’il devait regarder la conformité par rapport à la norme Constitutionnel, il a forgé ce
contrôle « lui-même » car il n’en était pas initialement doté. Dans certains cas le juge va
contrôler par rapport à la constitution et dans d’autre cas non, ce n’est pas homogène.
§1. Le contrôle au regard de la norme constitutionnelle
Est-ce que le juge va pouvoir contrôler les actes administratifs par rapport à toutes les
normes constitutionnelles ? lesquelles ?
La norme constitutionnelle n’est pas seulement la Constitution mais tout le bloc de
constitutionnalité qui intéresse ici. Un certain nombre de règles constitutionnelles encadrent le
fonctionnement de l’administration. Ces articles ont un effet direct sur le contrôle
administratif : les articles 13 et 21 de la Constitution. La question des nominations par
exemple est une question de compétence, la question des contreseings également touche au
domaine du droit administratif, l’absence de contreseing peut être objet de recours.
Traditionnellement le juge administratif se réfère donc à la Constitution. Les articles 34 et 37
de la Constitution répartissent les domaines légal et règlementaire, au niveau des
compétence le juge devra vérifier la compétence pour savoir s’il ne relève pas du domaine de
la loi par exemple. L’article 72 concerne la libre administration des collectivité
territoriales, le juge se réfère à la constitution pour voir qui de l’’Etat ou des collectivités
territoriales est compétent.
La question des autres dispositions de la Constitution se pose, comment le juge procède-t-il.
En 1960 un arrêt a été rendu sur cette question : CE, 12 février 1960, Sté EKY (n° 46922) :
« dès lors, c’est par une exacte application de la Constitution que le gouvernement, par voie
réglementaire, les a définies et a fixé les peines qui leur sont applicable ». Pendant longtemps,
le juge administratif ne faisait pas de contrôle au regard des normes constitutionnelle, il l’a
fait à partir de 1960, dans l’arrêt précité il accepte de contrôler par rapport à une norme
constitutionnelle. Le juge considère alors dans cet arrêt que l’ensemble des normes
constitutionnelle constitue des normes de référence au-delà de la loi. C’est une première
étape de l’élargissement du contrôle du juge au-delà de la loi. Pour le juge administratif la
norme constitutionnelle ne constitue une norme de référence que si elle est rédigée de manière
suffisamment précise. Cela apparait notamment dans une décision : CE, 29 novembre 1968
Tallagrand : demande d’indemnité du fait de l’appropriation par l’Algérie d’une école privée
en 62, les requérants avaient invoqué une disposition du préambule de la Constitution
évoquant la solidarité et de tous les français, le juge n’a pas utilisé cette norme car elle n’était
pas suffisamment précise. La majorité des normes du bloc de constitutionnalité sont tout de
même considéré comme suffisamment précises.
Qu’en est-il des normes jurisprudentielles prise par le Conseil constitutionnel ? ces principes
à valeur constitutionnel peuvent-ils être une référence pour le juge administratif dans son
contrôle ? Le CE va préciser sa position dans une décision : CE, 29 mai 1992, Association
amicale des professeurs titulaires du muséum national d’histoire naturel : le CE pour la
première fois se réfère à une décision du Conseil constitutionnel, « Considérant qu’ainsi que
l’a énoncé le Conseil constitutionnel dans sa décision (…) ».
Un arrêt a marqué une évolution remarquable : CE ASS, 3 juillet 1996, Koné. Le CE va
loin dans cette décision, il va consacrer lui-même un PFRLR, lors que normalement c’est le
Conseil constitutionnel qui dégage les PFRLR. « Ces stipulations doivent être interprétés
conformément au principe fondamental reconnu par les lois de la République, selon lequel
l’Etat doit refuser l’extradition d’un étranger lorsqu’elle est demandée dans un but
politique », ce PFRLR n’avait auparavant jamais été reconnu par le conseil
constitutionnel.
Le préambule de 1946 présente la caractéristique d’énoncer des principes très généraux. Le
Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat se sont efforcés de tirer des dispositions précises
de ce préambule alors qu’ils avaient à faire à dies dispositions floues (droit à la santé, droit
d’obtenir un emploi…). Le CE s’est efforcé de donner dans sa JP une portée concrète à
certains de ces alinéas : par exemple, CE ASS, 8 décembre 1978, GISTI : le CE va dégager
le principe selon lequel la Nation assure les conditions nécessaires à la famille et à son
développement ; le droit à mener une vie familiale normale, à partir de ce principe il va
annuler un texte qui limitait le regroupement familial des personnes immigrés.
Autre norme de référence : la Charte de l’environnement, intégrée dans la Constitution en
2005. Cette charte proclame de grands principes dont il est difficile de tirer des normes
précises (ex. l’art. 1 proclame le droit de vivre dans un environnement équilibré et
respectueux de la santé), en revanche, certains articles sont un peu plus précis (ex. l’art.
6 qui expose le devoir des politiques publiques de promouvoir un développement durable). Il
y a une hétérogénéité entre des normes très floue et des normes beaucoup plus précises. La
valeur constitutionnelle et de référence directe de cette charte dans son intégralité va vite être
reconnu par le CE dans un arrêt : CE ASS, 3 octobre 2008, Commune d’Annecy : « que ces
dernières dispositions, comme l’ensemble des droits et devoirs définis dans la Charte de
l’environnement et à l’instar de toutes celles qui procèdent du Préambule de la constitution
ont valeur constitutionnelle ; qu’elles s’imposent aux pouvoirs publics et aux autorités
administratives dans leur domaines de compétence respectifs ».
Dans ce cas l’acte ne constitue pas l’application stricte d’une disposition législative. Il n’y a
pas de loi entre l’acte administratif qui peut faire écran. La question est différente lorsque le
requérant invoque un moyen d’inconstitutionnalité alors que l’acte est issu d’une norme
législative, on dit que la loi fait écran
Attention ! il ne faut pas confondre le contrôle au regard de la norme constitutionnelle et le
contrôle de constitutionnalité.