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La responsabilité sociétale dans les entreprises Marocaines :

Quels effets sur la relation client

La responsabilité sociétale dans les entreprises Marocaines :


Quels effets sur la relation client
KHADIJA BELMOUSS
Enseignante chercheuse, Faculté de Droit, Meknès
Belmouss.khadija@yahoo.fr

En complément des outils marketing traditionnels, la responsabilité sociétale de l’entreprise


peut constituer un élément de réponse aux enjeux commerciaux de l’entreprise.
L’implication dans la société de manière plus responsable peut attirer de nouveaux clients, et
développer la fidélisation. Par le label social, les entreprises engagent un processus de
progrès continu qui intègre toutes les parties prenantes d'une bonne relation client et qui
permet de faire la différence dans la relation avec ses clients..
Cependant, l’engagement citoyen du consommateur Marocain est encore très peu déterminant
au regard des principaux critères d’achat tels que le prix, la qualité, la garantie ou la marque.
L’objet de ce travail est de répondre aux questions suivantes :
1. Quelles sont les motivations de ce nouveau consommateur responsable ?
2. Dans quelle mesure est-il possible d’inciter le consommateur Marocain à s’engager au
travers de ses actes d’achat.
3. Quelles actions peuvent développer les entreprises Marocaines pour encourager à la fois
une production et une consommation plus responsables ?
Mots clés : RSE - marketing durable - relation client- consommateur Marocain

Abstract :
Social responsibility in Moroccan companies:
What effects on customer relationship
In addition to traditional marketing tools, social responsibility of the company can be an
answer to the commercial challenges facing the company.
Involvement in society more responsible can attract new customers and develop loyalty. By
social labeling, companies undertake a continuous improvement process that integrates all
stakeholders of a good customer relationship and allows for the difference in the relationship
with its customers.
However, citizen engagement Moroccan consumer is still very little critical towards the main
purchasing criteria such as price, quality, warranty or brand.
The purpose of this paper is to answer the following questions:
1. What are the motivations of the new responsible consumer?
2.To what extent is it possible to encourage the Moroccan consumer to engage through its
purchasing actions?
3.What actions can develop Moroccan companies to encourage both production and
consumption more responsible?

Keywords: Social responsibility - sustainable marketing - customer relationship- Moroccan


consumer.

Revue Marocaine de recherche en management et marketing, N°14, Avril-Juin 2016 Page 271
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Introduction

Le développement durable transposé au monde de l’entreprise se traduit à travers ses


engagements de responsabilité sociale. La responsabilité sociétale des entreprises, appelée
aussi, responsabilité sociale des entreprises (RSE), est un concept dans lequel les entreprises
intègrent les préoccupations sociales, environnementales, voire de bonne gouvernance dans
leurs activités et dans leur interaction avec les « stakeholders » ou les parties prenantes que
sont les salariés, les actionnaires, les fournisseurs, les sous-traitants, les consommateurs,…
C’est chercher un juste équilibre entre la préoccupation économique de l’entreprise, le
développement social et le respect de l’environnement.

Il s’agit donc, pour les entreprises, de prendre en compte les effets et les impacts de
leurs activités, d’intégrer ces préoccupations dans le management stratégique et d’en rendre
compte aux tiers concernés. En termes managériaux, « la RSE constitue les modalités de
réponse de l’entreprise aux interpellations sociétales en produisant des stratégies, des
dispositifs de management, de conduite de changement et des méthodes de pilotage, de
contrôle, d’évaluation et de reddition incorporant de nouvelles conceptions de
performances » (Capron, Quairel-Lanoizelée, 2007, p. 16).

L’idée est que les entreprises se mesurent en lien avec trois nouveaux « P »: Profit,
People, Planet (Peter Fisk ,2010). Les entreprises ne sont donc plus évaluées seulement par
rapport au profit qu’elles génèrent mais aussi par rapport à leur comportement vis-à-vis de
l’humain et vis à vis de la planète.

Du fait de l’évolution des mentalités, les parties prenantes de l’entreprise, pas


seulement les consommateurs, attendent une démarche plus responsable. Le marketing doit
permettre un bon échange entre l’entreprise et les parties prenantes, la société en général.
Chaque fois que des modifications apparaissent dans l’environnement
macroéconomique, le comportement du consommateur se modifie et le marketing doit
s’adapter, KOTLER (2012) développe la notion de parties prenantes en l’associant au
marketing de la valeur, davantage centré sur la valeur .Les entreprises à hautes performances
sont souvent celles essayant de satisfaire l’ensemble de leurs parties prenantes. Le succès
dépend de la capacité de l’entreprise à maitriser la valeur créée pour le client et la satisfaction
qui en résulte.

Dans les pays avancés, la RSE gagne du terrain, se développe sous la pression des
ONG et de l’opinion publique. Cependant, on ne peut pas dire autant pour le cas du Maroc où
la RSE avance mais à petits pas.

Le Maroc est un fournisseur habituel de matières premières qui entrent dans la


composition des produits cosmétiques et alimentaires : huile d’argan, huile d’olive, miel ou de
produits artisanaux. L’essentiel des recettes se fait à l’export, le marché local est encore très
étroit.

En 2004 ; a été créée la plateforme Marocaine du commerce équitable (PMCE). C’est


une association à but non lucratif qui ambitionne de développer les filières du commerce
équitable au Maroc.

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En effet, le rôle du Maroc dans la promotion du commerce équitable ne doit pas se


limiter à la production des produits équitables et solidaires pour exportations. Le Maroc doit
commencer à fabriquer des produits finis sur place, au lieu de se contenter seulement
d’exporter les matières premières.

Cela nécessite un engagement plus à fond des entreprises et des consommateurs


Marocains dans des démarches de développement durable.

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I - La RSE au Maroc : état des lieux

1- Les entreprises Marocaines et la responsabilité sociale : quelle


implication ?

D’après une enquête ( Sustainable Square Consultancy and Think Tank, 2013)
réalisée, en juin 2013 auprès de 200 entreprises, sur le degré d’implication des entreprises
dans le RSE dans les pays du Maghreb (Maroc, Tunisie, Algérie), il y’a une grande prise de
conscience du rôle croissant de la société civile et l’influence de l’opinion publique sur les
entreprises. 85% des entreprises marocaines interrogées confirment leur engagement dans le
déploiement du concept RSE et dans la mise en place d’activités axées RSE.
En réaction à ces prestations, les entreprises ont commencé à surveiller les actions de
leurs fournisseurs. 31% des réponses en Tunisie, 25% au Maroc et 19% en Algérie,
confirment la mise en place des directives pour leurs fournisseurs autour du respect des
problématiques de l’environnement, la sécurité des produits, droits de l’homme. Certains
utilisent des certifications mondialement reconnues tandis que d’autres imposent leurs propres
codes et normes.
Les gouvernements des trois pays sont entrain de contribuer à restaurer la culture de la
RSE au sein des entreprises et mettent en place un dispositif juridique encadrant la
transparence sociale et environnementale des entreprises.
Cependant, selon la même étude, il existe une mauvaise interprétation de cette notion,
qui reste perçue comme une pratique qui a pour objectif la mise en place d’actions de
mécénat, de parrainage ou de sponsoring.
Une autre étude menée en 2005, par la direction des investissements du Maroc en
partenariat avec Vigeo (leader du marché de la mesure de RS), auprès de 1000 entreprises,
composées aussi bien des grandes entreprises que de PME, confirme un vif intérêt et une
réelle volonté d’implication des entrepreneurs marocains dans ce domaine : plus de 75% des
entrepreneurs marocains se sentent directement concernés par la RS. Par ailleurs, ils estiment
qu’il s’agit d’un enjeu qui les concerne dès maintenant et non pas à long terme.
Les secteurs sur lesquels, l’effort de RS doit porter en priorité, les plus fréquemment
cités sont : la bonne gouvernance d’entreprise, l’éradication de la corruption et le respect de la
législation sociale. L’engagement sur des objectifs de RS n’est pas perçu comme une
contrainte mais véritablement comme un atout pour l’image de marque de l’entreprise, la
sécurisation de ses approvisionnements et les relations clients. En outre, un investissement
socialement responsable est considéré comme rentable à long terme aux actionnaires et à la
communauté par plus de 80% des personnes interrogées.
Par ailleurs ; la CGEM (confédération générale des entreprises marocaines) a créé son
propre label pour la RSE en 2006. Par cette initiative, la CGEM entend promouvoir les
facteurs d’attractivité de l’investissement productif et de la croissance à long terme qui sont le
développement humain, le respect des droits fondamentaux de la personne humaine et de
l’état de droit, la qualité des conditions d’emploi, la régulation des relations professionnelles,
la protection de l’environnement, la transparence et l’effectivité des règles concurrentielles.
La CGEM se réfère pour l’entreprise à la définition que donne la norme ISO 26000
des lignes directives de la responsabilité sociétale des organisations :
« Responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et activités
sur la société et sur l’environnement », se traduisant par un comportement éthique et
transparent qui :
 contribue au développement durable y compris à la santé et au bien-être de
la société ;
 prend en compte les attentes des parties prenantes ;

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 respecte les lois en vigueur tout en étant en cohérence avec les normes
internationales de comportement ;
 est intégré dans l’ensemble de l’organisation et mis en œuvre dans ses
relations.
Le label RSE de la CGEM est attribué pour une durée de trois années aux entreprises
basées au Maroc, membres de la confédération, sans discrimination de taille, de secteur, de
produits ou de services. Toute entreprise postulant au label doit se soumettre à une évaluation,
menée par l’un des tiers-experts indépendants accrédités par la CGEM. Cette évaluation vise
à attester que les actes de gestion d’une entreprise postulante présente une assurance
raisonnable de conformité avec les engagements de la charte de responsabilité sociale. En
particulier, cette entreprise doit fournir des preuves tangibles de non violation des obligations
légales figurant sur cette charte.
L’administration des douanes et impôts indirects, la CNSS, le crédit agricole du
Maroc, le groupe « Banques Populaires », la Banque Marocaine pour le Commerce et
l’Industrie et la direction Générale des impôts se sont associés à la confédération pour
promouvoir le label RSE. Ces acteurs octroient aux entreprises labellisées des avantages et
traitements spécifiques (tarification préférentielle, simplification des procédures,
assouplissement des contrôles, gestion personnalisée, célébrité dans le traitement des
dossiers,…).

Cependant pour développer la responsabilité sociale dans les entreprises marocaines, la


mise en place de labels officiels s’avère nécessaire. En l’absence d’un lebel, il est difficile de
vérifier l’origine d’un produit qui s’auto-qualifie de « commerce équitable ». La direction de
l’économie sociale réfléchit ainsi à la possibilité de créer un label officiel (La vie
économique numéro de 9décembre 2009). Si le principe de certification est entériné, les
producteurs devront participer au lourd investissement que cela engendre, avec la création
d’un organisme certificateur compétent.

2- Le consommateur « durable » est-il né au Maroc ?

Un nombre croissant d’ouvrages, d’articles et de rapports d’études mettent en évidence


la montée en puissance des préoccupations environnementales, sociales et sociétales chez les
consommateurs à travers le monde.
D’après une enquête ( Ethicity, 2008 ) menée en février 2008 sur les déclaratifs et
comportements des Français en matière de développement durable et de « consommation
responsable », 83% des Français estimaient qu’à travers leurs décisions d’achat, ils agissaient
au service de leur conviction, 78,9% disaient choisir des produits et services respectueux de
l’environnement, 77,1% affirmaient faire attention à ne pas acheter de marques produites par
des entreprises dont ils réprouvaient le comportement.
Au Maroc ; il y’a une absence des études auprès des consommateurs sur leurs
déclaratifs ou comportements en matière de consommation responsable. Cependant ; on peut
dire que la consommation engagée commence à retenir l’attention d’une partie de la
population marocaine. C’est un thème apte à devenir porteur, mas il est encore trop tôt pour
dire qu’elle est appelée à devenir un véritable ressort des motivations d’achat. Plusieurs
facteurs peuvent, à notre avis, expliquer ce constat :
1- comme tous les pays en voie de développement, le Maroc connait des écarts de
richesses importants. Les dépenses de consommation y sont inégalement réparties ; elles sont
concentrées dans les zones urbaines et parmi la frange de la population la plus aisée. Les
évolutions positives de l’économie sont ainsi plus souvent favorables aux classes sociales
aisées qu’aux populations les plus pauvres.

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2- De plus ; les marocaines sont particulièrement sensibles aux prix or les produits
équitables sont plus chers que les produits du commerce classique. Les produits bio ou
équitables sont entre 10% et 50% et parfois jusqu’à 100% plus chers que leurs équivalents
classiques (Christophe Sempls, Marc Vandercammen 2009). Le choix de l’écoproduit
suppose trop souvent un sacrifice financier.
3- Les consommateurs sont de plus en plus demandeurs de transparence sur les impacts
environnementaux et sociaux des produits et sur leur traçabilité,
Les citoyens ont en effet le droit de savoir comment sont maitrisés les risques qui pèsent
sur leur vie quotidienne pour ne plus avoir à les subir ,et de pouvoir choisir ,à partir d’une
information honnête ,complète et précise ,dans quelle entreprise ils placent leur confiance ,
…..Ils ont le droit d’exiger que l’entreprise respecte des standards haut niveau visant un
comportement plus responsable vis-à-vis de la société ( Olivier Dubigeon 2005 ). Cette
demande, si elle est alimentée par de nombreuses compagnes d’ONG et d’associations de
consommateurs, constitue pourtant un levier efficace pour réorienter l’offre, or la législation
au Maroc ne contraint par les entreprises à donner ces informations
4- Il y’a également un manque d’informations sur les produits du commerce équitable
puisqu’il n’est pas toujours aisé d’identifier les engagements éthiques des entreprises. Les
consommateurs éprouvent souvent beaucoup de difficultés à reconnaitre les logos-certifiant
que le produit respecte l’environnement. En ce sens, les labels agissent comme des marques
en offrant aux consommateurs un moyen facile de reconnaître un produit éthique et de repérer
le produit à choisir parmi une multitude d’autres options. Ils réduisent les coûts de recherche
et d’information des consommateurs en limitant le temps qu’ils consacrent à la recherche d’un
produit éthique.
Il y’a un manque d’informations même sur les points de vente où ces produits sont
commercialisés. Combien de Marocains, par exemple, savent qu’il y’a au Maroc des
magasins spécialisés qui commercialisent des produits provenant de plus de 500 coopératives
avec un énorme choix : produits cosmétiques (savon à base de cactus, champoing, crème…)
mais aussi alimentaires (dattes, confitures, sirop, céréales, couscous, safran…). Trois
magasins ont déjà ouvert à Casablanca, Mohammedia et Agadir. Le développement de
magasins solidaires est très important dans ce processus de valorisation des produits du
territoire. Combien de marocains, même ceux qui résident à Rabat ou à Salé, savent que Label
Vie propose près de 150 produits alimentaires issus du commerce équitable sur un stand dédié
au magasin Carrefour de Salé.
5-Au niveau étude et recherche ; il y’a une absence quasi-totale de statistiques sur les
déclarations des consommateurs à propos d’achat de ces produits. L’absence de données
statistiques sur la question complique l’activité. La PMCE, simple association, ne recense pas
les chiffres de ses membres. Il est très difficile, voire impossible, d’estimer l’apport du
commerce équitable aux producteurs Marocains, de connaitre le chiffre d’affaires ou les
quantités exportées et vendues au Maroc et à l’étranger.
Cependant, même si les statistiques représentant les intentions des consommateurs à
propos d’achat des écoproduits seraient disponibles. La traduction de ces valeurs durables en
comportement effectifs obligerait à nuancer le constat. En effet ; entre vouloir et pouvoir
d’achat, entre intention et comportement effectif existe un grand écart. Le marketing
responsable se heurte souvent aux contradictions du client qui s’avère « bon consommateur
mais mauvais citoyen » dans ses comportements d’achat. Les consommateurs aiment les
écoproduits mais ne les achètent pas souvent, d’ailleurs l’échec commercial de plusieurs
écoproduits témoignent cette réalité.
En France, par exemple, un chiffre d’affaires de 210 millions d’euros en 2007, même
si c’est 10 fois plus qu’en 2002 ; cela reste une goutte d’eau en termes de volume (Christophe
Semples & Marc Vandercammen, 2009).

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Il est plus facile de se déclarer favorable aux causes humanitaires contre la pollution,
le travail des enfants,… que d’avouer que l’on ne prête pas attention à ces problèmes.
« Si je vous dis » « je consomme bio » l’mage externe de moi est valorisée… même
si ce n’est pas toujours ce que je fais. Le bio c’est quand même plus cher et pas toujours
accessible dans mon supermarché habituel » (Elizabeth PASTORE REISS, 2007).
Le déclaratif représente en partie ce que fait le consommateur et en partie l’image qu’il
aimerait projeter de lui-même.
Une première explication réside dans le biais de désirabilité sociale (Christophe
Sempels & Marc Vandercammen ,2009) apparaissant lors de l’enquête. Consciemment ou
inconsciemment, lorsque nous sommes interrogés sur un sujet donné, nous pouvons être
amenés à surestimer notre intérêt où nos intentions dans le souci de plaire, ou à tout le moins
de ne pas déplaire à notre interlocuteur.
D’autres raisons peuvent expliquer cet écart comme les facteurs externes ou
contextuels (prix élevés, absence dans le supermarché, etc.….).
La question qui reste à poser « pouvons-nous faire confiance aux résultats d’un grand
nombre d’études basées sur le discours des consommateurs ?

Certains travaux (Christophe Sempels & Marc Vandercammen ,2009) ont mis en
évidence que seulement 30% à 40% des intentions sont réellement mises en œuvre par les
individus. D’autres travaux ont mis en évidence des écarts plus variables encore : de 26% à
57% des personnes participant à diverses études ont réalisé ce qu’elles avaient dit qu’elles
réaliseraient.

II- La relation client dans une stratégie de marketing durable.


1- La RSE : une source d’avantages pour la relation client.

Des relations durables et étroites avec les clients constituent un avantage


concurrentiel considérable.

1-1- Améliorer l’image de marque de l’entreprise :


Le premier avantage qu’une entreprise peut retirer de son engagement dans une
démarche de développement durable touche à son image. Elle n’obtient pas seulement un
impact d’image positif, mais elle alimente aussi sa crédibilité, sa légitimité et son capital de
confiance. Un positionnement qui est devenu un atout concurrentiel clé face aux exigences de
plus en plus marquées du monde économique qui prône un développement durable, face à des
consommateurs qui souhaitent désormais consommer « responsable », à des salariés qui
recherchent une cohérence avec les valeurs portées par l’entreprise , et à des investisseurs et
actionnaires volontaristes et désireux d’appliquer leurs valeurs personnelles à la gestion de
leurs entreprises.
Cependant, l’entreprise doit être très prudente car tout décalage entre l’image diffusée
par l’entreprise et son appréhension par le public crée une confusion et un effet généralement
contraire à celui recherché.
1-2- Se différencier des concurrents :

La RSE est un point de différence entre les nouveaux entrants sur le marché et les
entreprises qui y sont implantées quelque temps avant. L’action sociétale de l’entreprise
(Caroline Lassalle Saint-Jean , Olga Gontier Barykina , Olivia Verger Lisicki 2007) peut

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venir compléter les outils marketing classiques comme les offres promotionnelles, des
avantages réservés à des clients fidèles, etc.

1-3- Suivre les attentes des consommateurs :

La proximité avec les acteurs locaux qu’offrent les démarches sociétales peut
constituer une source de connaissance complémentaire des attentes des consommateurs,
parfois plus directe et nuancée que les études de marché.
Pour concevoir des produits, il importe de comprendre les tendances de la société,
anticiper les mouvements profonds qui influencent le corps social, percevoir les attentes
émergentes. « Quand on se trouve face à des désirs déconnectés de tous besoins basiques
(majoritairement satisfaits, avec des bémols toutefois pour tous les pauvres), cela devient
« fichtrement » compliqué ! En effet, le consommateur, en consommant, contribue à créer
l’offre. Il produit une information nouvelle structurant la demande » (Caroline Lassalle Saint-
Jean , Olga Gontier Barykina , Olivia Verger Lisicki ,2007) .

Adopter une production responsable, permet aux entreprises de satisfaire une partie de
la population, à travers le monde, qui adhère aux valeurs d’une consommation responsable.
Celle-ci est souvent prête à payer un prix plus élevé pour des produits / services qui
bénéficient à la communauté.

1-4- Fidéliser les clients :

L’implication de l’entreprise dans la société peut attirer de nouveaux clients et les


préserver contre la volatilité de la clientèle. La RSE crée un socle de clients fidèles, engagés
qui, même en cas de crise (conjoncturelle, structurelle), seront toujours plus enclins à accorder
leur confiance, connaissant mieux que les autres le comportement responsable voire
exemplaire de l’entreprise.

1-5- Servir une clientèle vulnérable et à faible revenu :

Un apport important de la responsabilité sociale aux entreprises consiste à permettre à


la population vulnérable d’avoir accès à leurs produits et services. Satisfaire les besoins de la
clientèle vulnérable (à faible revenu, analphabète, peu alphabétisée ou isolée
géographiquement,…) peut permettre de concevoir un produit selon les concepts
d’abordabilité, d’accessibilité et de valeur sociétale ( Caroline Lassalle Saint-Jean , Olga
Gontier Barykina , Olivia Verger Lisicki ,2007), ce qui procure à ce dernier un avantage
concurrentiel, puisqu’il s’adressera à un nouveau marché et favorisera l’établissement de
relations constructives avec les clients et employés. Plusieurs solutions doivent cependant,
être adoptées par les entreprises :
 la réduction des prix et la personnalisation des produits dans le but de
répondre aux besoins uniques de la clientèle et d’établir des liens avec les
communautés exclues (exemples, les collectivités isolées au monde rural au Maroc,
par exemple).
 Mener des études pour découvrir les obstacles rencontrés lors de l’utilisation
de produit ou service par la clientèle vulnérable.

1-6 - Enfin ; et contrairement à l’idée selon laquelle, la RSE ne peut


procurer une augmentation des ventes que dans la durabilité ; des analyses effectuées
(Olivier Dubigeon, 2005) indiquent qu’un « marketing engagé permet d’augmenter les ventes

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grâce à des projets CRM (costumer relationship management) engagés dans des causes avec
un pourcentage de 37% et parfois à très court terme. Les exemples suivants (Olivier Dubigeon
, 2005) permettent d’illustrer ce constat :
Exemple 1 :
Le service bancaire « American Express » a entrepris de restaurer la statue de la liberté
à New York dans les années 80 pour un coût de 4 millions de dollars. Cet investissement
augmenta l’utilisation de la carte de 28% et l’ouverture de nouvelles cartes de 45% le premier
mois.
Exemple 2 :
L’entreprise de grande distribution Sears s’est alliée avec l’association sans but
lucratif engagée dans l’accompagnement des personnes souffrant de concerts.

Cette action augmenta de 56% les ventes dans les villes où est présente l’association
contre 16% dans les villes où elle n’est pas présente.

2- Comment stimuler la consommation responsable pour une


bonne relation client :

2-1- Le rôle de marketing est, d’abord, de rendre acceptable un sacrifice sur une
dimension donnée en mettant en avant les avantages de l’écoproduit sur d’autres dimensions
pour le client lui-même et / ou pour la société. L’écoproduit entre souvent en concurrence
avec son équivalent fabriqué de façon classique.
Le choix de l’écoproduit suppose trop souvent soit un sacrifice financier (les produits
bio ou équitables sont généralement plus chers que leurs équivalents classiques), une moindre
performance ou un niveau d’effort plus élevé (les couches lavables ne sont pas aussi
absorbantes que les couches industrielles classiques et nécessitent un travail de nettoyage).Il
s’agit d’intégrer dans l’évaluation du produit par le client des bénéfices indirects : faibles
impacts environnementaux ou caractère local du produit, effets sur la santé ; contribution à
des relations commerciales nord-sud plus équitables, bien-être animal etc.
A cet égard, la communication marketing doit faire preuve de plus de transparence et
de pédagogie, le but de la communication n’étant plus forcément de consommer plus, mais de
consommer mieux (Christophe Sempls, Marc Vandercammen ,2009).

2-2- Le marketing doit également recourir à des approches qualitatives afin de


comprendre en amant les besoins sous-jacents à certaines décisions d’achat et les freins qui
peuvent empêcher l’adoption de nouveaux produits.

2-3- Pour être crédible, l’intérêt de l’entreprise pour le développement durable


nécessite un minimum de formalisation. Cet intérêt doit s’incarner non seulement dans la
structure de l’entreprise (création d’une fonction transversale « développement durable » en
lien étroit avec les parties prenantes) mais aussi dans le système de management :
 quelles sont les valeurs de l’entreprise ?
 quelles sont les spécificités en matière de développement durable du
secteur d’activité de l’entreprise ?
 quel est l’impact écologique de l’entreprise ? de ses produits ? etc.
La démarche consiste ensuite à définir la politique de développement qui doit être
formalisée dans des plans d’actions concrets. La mise en œuvre opérationnelle suppose que
des outils concrets soient mis à la disposition des acteurs et qu’une formation leur soit
dispensée.

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Des compagnes de communication et de sensibilisation d’abord internes doivent être


mises en place car c’est l’ensemble des employés qui met en œuvre la politique de
développement durable de l’entreprise et pas seulement les dirigeants. La RSE ne doit pas être
perçue au sein de l’entreprise comme une contrainte de plus. Au niveau externe, toute une
étape de sensibilisation, de communication et d’enquêtes auprès des consommateurs doit être
menée afin de capter l’attention du consommateur marocain.
L’objectif est de susciter l’adhésion de tous au projet de la RSE et d’en faire ainsi un
projet collectif, porteur de sens pour chacun.
Levier puissant pour gagner en acceptabilité et en légitimité sociale, les démarches
sociétales constituent de plus en plus un facteur de différenciation des entreprises aux yeux
des consommateurs et des partenaires, à condition d’être bien réfléchies et bien mises en
œuvre.

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Conclusion :

Le développement durable devient une source d’inspiration et d’innovation


technologique et sociale, avec une finalité inchangée : créer de la valeur pour l’entreprise (à
travers l’augmentation des ventes et l’amélioration de l’image) et pour les parties prenantes.
Si elles sont véritables, profondes et planifiées dans la durée, ces initiatives tirent les
entreprises vers le haut et sont un levier vers une société plus soutenable (Mathieu
JAHNICH ,2013).

L’entreprise est insérée dans un environnement étendu où l’information circule sur les
contrefaçons, la pollution, les conditions de travail, la santé etc. L’entreprise est alors obligée
de répondre aux attentes de partage et d’engagement. Cette pression est d’autant plus forte
que le risque est important que le client aille chez un concurrent. Selon cette approche,
l’entreprise est amenée à changer de conduite sous la pression des clients.

En effet, de nombreuses études se consacrent au poids du consommateur dans la


décision des entreprises de s’inscrire dans des pratiques socialement responsables. Les
préoccupations des consommateurs sont abondamment analysées par les chercheurs, qui
étudient les fondements de leurs attentes, les facteurs pouvant motiver les boycotts ou, de
manière plus générale, le développement d’une « consommation engagée » et « éthique ».(
Isabelle VAN DE WALLE et Lucie BRICE ,2011).
Le nouvel idéal de responsabilité sociale doit clairement, dans les buts et pratiques
de chaque entreprise, penser le client, non pas comme quelqu’un dont on tire un profit, mais
comme quelqu’un que l’on sert par ses produits ; et penser qu’en le servant, on sert la société
L’entreprise se doit d’être honnête envers les consommateurs et de ne pas surestimer ses prix
par appât du gain, sous peine de trahir la société toute entière: le respect du consommateur
apparaît comme une obligation, non pas nécessairement légale, mais morale.( Isabelle VAN
DE WALLE et Lucie BRICE, 2011).

Cependant, même s’ils sont étroitement associés à la théorie des parties prenantes, les
consommateurs ne forment qu’un groupe de stakeholders parmi d’autres. Employés,
actionnaires, clients / consommateurs, fournisseurs, pouvoirs publics, ONG,…. sont tous
concernés par la RSE. L’implication des parties prenantes constitue un excellent moyen de
s’assurer que les interlocuteurs de l’entreprise sont tout à fait d’accord avec son approche de
la RSE. L’information, la consultation et la concertation avec ses parties prenantes est
indispensable, c’est la condition sine qua none pour la légitimité et la valeur de la politique de
développement durable qu’elle souhaite engager.

Il n'existe pas de méthode universelle pour mettre en œuvre une approche de la


responsabilité sociale des entreprises (RSE). Chaque entreprise possède des caractéristiques
uniques qui vont dicter sa perception de sa responsabilité.

Le marketing joue ici un rôle crucial puisque la créativité des équipes et la puissance
de leur outil peut aider à transformer l’offre, à changer les attitudes des clients et, in fine, à
améliorer l’adéquation entre l’offre et la demande.

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Il faut se servir de la RSE pour grandir. Grandir socialement, humainement,


éthiquement, mais aussi grandir en terme financier. La RSE est un outil clé, facteur de
performance, mais qui doit avant tout guider une quête de sens de l’entreprise. L’entreprise
court en effet un vrai risque à négliger les enjeux de responsabilité sociale, tant le coût peut en
être pénalisant. Car, aujourd’hui, la performance » n’est plus seulement économique ou
financière, mais également sociale et environnementale.
L’entreprise qui n’intègre pas ces différentes dimensions risque de se priver
d’opportunités pour se faire référencer auprès de ses clients, voire de freiner son
développement. A contrario, un engagement RSE marqué lui permettra de prévenir un grand
nombre de risques, évitant ainsi d’éventuelles dépréciations (Sophie de Menthon ,2011).

Revue Marocaine de recherche en management et marketing, N°14, Avril-Juin 2016 Page 282
La responsabilité sociétale dans les entreprises Marocaines :
Quels effets sur la relation client

Références bibliographiques :

1 - Christophe Sempls et Marc Vandercammen « Oser le Marketing durable, concilier


marketing et développement durable, Pearson Education France, 2009.
2 - Elizabeth PASTORE_REISS « le marketing durable, comment concevoir des
produits et des services responsables » Eyrolles, éditions d’organisation, 2007.
3- Olivier Dubigeon, « mettre en pratique le développement durable, quels processus
pour l’entreprise responsable ? Village Mondial, Paris /Pearson Educations France 2° Edition
2005.
4-I.M.S_ Entreprendre pour la cité « la société, une affaire d’entreprise ?
L’engagement sociétal des entreprises : enjeux, pratiques, perspectives » Eyrolles, Editions
d’organisations 2007.
5-Jean-Pascal Gond et Jacques Lgalens « Manager la responsabilité sociale de
l’entreprise » Dareios Pearson 2012

6- Sustainable Square Consultancy and Think Tank (www.sustainablesquare.com)

Rapport RSE Afrique du nord Sustainable Square juin 2013.Pdf gipspsi.org.


(www.sustainablesquare.com) est un cabinet de conseil localisé à Dubai - Emirats Arabes
Unis, spécialisé dans les pratiques de Responsabilité et Soutenabilité des Entreprise (RSE), le
renforcement des activités commerciales responsables des organisations, l'optimisation
durable de leurs processus internes et l’amélioration du bien-être des communautés. Le
cabinet aide à la création d’un benchmark sur les pratiques de RSE au niveau régional en
investissant dans la recherche, le savoir-faire et l’identification de produits et dernières
pratiques ainsi qu’en innovant de nouvelles solutions pour faire face aux défis du marché du
développement durable.
7- « commerce équitable : le Maroc produit mais ne consomme pas encore ». La vie
économique numéro de 9décembre 2009.www.lavieeco.com.
8- Etude menée par la direction des investissements du Maroc, en partenariat
avec Vigeo qui est une agence indépendante de mesure de RS des organisations
www.vigeo.com/cpetudedivigeo-051128.pdf.
9 - Ethicity (Conseil en développement durable et marketing éthique) «Déclaratifs et
comportements des français en matière de développement durable et de consommation
responsable ».Résultats et analyse de l’enquête menée en février 2008. Enquête commanditée
par Ethicity et Aegis Media Expert,et réalisée par TNS media intelligenceTM.
www2.ademe.fr/servlet/getBin?name...pdf.
10 -Capron, Quairel-Lanoizelée, 2007,cité par Michel CAPRON Institut de Recherche
en Gestion IAE Gustave Eiffel ;mtpf.mlab-
innovation.net/fr/assets/ressources/.../Capron%20VF.pdf.

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La responsabilité sociétale dans les entreprises Marocaines :
Quels effets sur la relation client

11- Peter FISK (2010) cité par Hygie Ethik® Consulting - RSE & DD 31 Mai
2011« Les 3 P, nouveau paradigme de l'économie durable ;
www.hygieconsulting.com/2011/05/blog-post_31.html.
12- KOTLER , KARTAJAYA, SETIAWAN «From Products to Customers to the
Human Spirit – 15 octobre 2012 – Edition De Boeck cite par Mickaël Lesage 2013 “Ethique
et marketing” www.creg.ac-versailles.fr.
13- Mathieu JAHNICH, Septembre, « S’il vous plaît… dessine-moi le marketing
responsable » 2013. Étude exploratoire sur le marketing responsable, ADEME
www.presse.ademe.fr/.../ademe_etude-marketing-responsable_rapport.pd...
14- Sophie de Menthon, Septembre 2011 « rapport du Ministére français du Travail,
de l’Emploi et de la Santé » ;
travail- emploi.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_final_RSE.pdf.
15-Isabelle VAN DE WALLE et Lucie BRICE « les attentes des consommateurs en
matière de responsabilité sociale des entreprises ».Credoc cahier de recherche, décembre
2011. www.credoc.fr/pdf/Rech/C289.pdf.
16- HAAS John A. W. [1915], “Social Responsibility of the Business Man,cite par -
Isabelle VAN DE WALLE et Lucie BRICE « les attentes des consommateurs en matière de
responsabilité sociale des entreprises ».Credoc cahier de recherche, décembre 2011.
www.credoc.fr/pdf/Rech/C289.pdf

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