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Les secrets de la stratégie d’Amazon pour devenir le Google de la consommation

Avez-vous remarqué la flèche sous le logo d’Amazon ? Elle affiche clairement l’ambition du groupe :
être un distributeur universel où l’on trouve de tout, de « A » jusqu’à « Z ».
La croissance d’Amazon est tout simplement stupéfiante. Créée en 1995, l’entreprise réalise vingt ans
plus tard un chiffre d’affaires de 10 000 dollars par seconde auprès de 150 millions de clients avec
près de 200 millions de références, soit des ventes annuelles supérieures à 60 milliards de
dollars (Auchan, fondé en 1961, est à 60 milliards d’euros).

Elle compte près de 100 000 salariés, dont la moitié ont été recrutés depuis 2011 (Renault, créé en
1899, en a 127 000). Elle est désormais l’enseigne de distribution préférée des consommateurs dans de
nombreux pays, dont la France (où elle précède Picard et Yves Rocher). Le directeur général de
Walmart, la plus grosse entreprise du monde (447 milliards de dollars de chiffre d’affaires, 2,2
millions de salariés) a déclaré qu’Amazon était devenu son principal concurrent.

Cette formidable croissance n’est pas sans rappeler celle de Google : lui aussi réalise 50 milliards de
dollars de chiffre d’affaires, mais emploie seulement 45 000 personnes, soit moitié moins
qu’Amazon. Chacun des deux groupes a construit un remarquable écosystème et leurs points
d’affrontement se multiplient : après avoir lancé sa tablette Kindle, Amazon va très certainement
proposer une console de jeux et un Kindle phone, qui viendra concurrencer les smartphones Nexus de
Google. Réciproquement, Google, jusqu’ici cantonné aux offres Internet grand public (Gmail, Drive,
etc.) a récemment décidé de riposter à Amazon Web Services, la plateforme de services en ligne
qu’Amazon propose avec succès aux entreprises (machines virtuelles, stockage, hébergement, etc.).

Il existe cependant une différence majeure entre les deux groupes. Google est une entreprise
extrêmement rentable : en 2012, le groupe a dégagé un bénéfice net de 10,7 milliards de dollars et il
dispose d’une trésorerie de plus de 54 milliards. À l’inverse, Amazon a perdu 39 millions de dollars en
2012. Depuis près de 15 ans, son résultat est quasiment à l’équilibre, parfois légèrement négatif,
parfois légèrement positif, mais toujours proche de zéro. En fait, là où Google s’interroge sur la
meilleure manière d’utiliser sa fortune (qui lui a permis par exemple de racheter la division téléphones
de Motorola en 2012), Amazon n’a aucune hésitation : chaque dollar engrangé est systématiquement
réinvesti dans la croissance. Au cours des dernières années, les ventes d’Amazon ont ainsi crû au
rythme – stupéfiant pour une entreprise de cette taille – de 35% par an.

Jeff Bezos, le fondateur d’Amazon, a réussi un tour de force qui constitue maintenant son principal
avantage concurrentiel : il a fait accepter à ses actionnaires que l’entreprise ne réaliserait aucun
bénéfice, et que par conséquent ils ne recevraient aucun dividende. Les investisseurs sont supposés se
rattraper sur la revente de leurs actions, une fois que le groupe sera devenu leader mondial.

De fait, Amazon est un concurrent atypique, parfois présenté comme déloyal : comment voulez-vous
lutter contre une entreprise qui ne cherche pas à faire de profits, lorsque vos propres actionnaires
exigent que vous en fassiez ? Les Virgin Megastores n’ont pas trouvé la parade et la Fnac est bien à la
peine pour relever le défi. Nos libraires, que la loi Lang ne protège plus suffisamment, ont obtenu le
vote d’une nouvelle loi pour interdire ce qu’ils considèrent comme une distorsion de concurrence, la
gratuité des frais de livraison. Cette loi a été votée à l’unanimité par nos députés, de droite comme de
gauche.

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Jusqu’où ira cette croissance effrénée ? Amazon vend déjà des bijoux, de l’électroménager, des jouets,
des vêtements ou encore des pièces détachées pour automobiles. C’est la première librairie au monde,
à la fois pour les livres papier et pour les livres électroniques, mais aussi le troisième client mondial de
Bosch pour les outils. Aux États-Unis, l’entreprise a débuté la livraison de produits frais sous la
marque Amazon Fresh (fruits et légumes), ce qui complète ses offres de fleurs, de vin ou encore de
médicaments. Elle teste l’implantation de casiers dans les centres commerciaux, qui permettront de
livrer des produits encombrants lorsque vous n’êtes pas chez vous.

Parallèlement, le groupe a ouvert 20 nouveaux entrepôts géants rien qu’en 2012 et en compte ainsi à
présent une centaine. Encore plus étonnant, sous la marque Mechanical Turk, Amazon propose même
de mettre à votre disposition de la main d’œuvre temporaire bon marché, capable de remplir à distance
des tâches qu’un ordinateur peinerait à réaliser (transcription d’enregistrements audio, identification
d’objets sur des photos, relecture de textes, etc.). Après être devenu un acteur majeur dans les produits,
Amazon fait ainsi une incursion dans les services.

Reste qu’Amazon est encore à ce jour 7 fois plus petit que Walmart (et moitié plus petit que
Carrefour). Il lui reste donc encore du chemin à parcourir avant de devenir le premier distributeur
mondial, mais il ne fait aucun doute que c’est son objectif. Les commerces physiques, fussent-ils
protégés par le législateur, auront bien du mal à y résister.

Source : Atlantico.fr

Annexe 1

La rumeur sur les intentions d’Amazon de contrôler la livraison de ses produits circulait depuis
plusieurs mois. Elle s’est concrétisée mercredi lorsque le géant de la vente en ligne a annoncé un
accord pour louer 20 Boeing 767 à la société Air Transport Services Group (ATSG).

Le groupe de Seattle va créer son propre réseau de distribution et pouvoir se distancer de UPS et
FedEx, les deux transporteurs avec lesquels il collabore pour l’instant. Amazon avait discrètement
réalisé des tests l’année dernière avec 5 Boeing de ATSG. La location d’un Boeing cargo usagé est
estimée à 325 000 dollars par mois. Ce montant double pour la location d’un nouveau modèle.
La démarche d’Amazon traduit aussi une certaine frustration avec des transporteurs qui peinent à
suivre le rythme de la forte croissance de ses ventes - 20% en 2015 pour un chiffre d’affaires de 107
milliards de dollars - et sa volonté de réduire au maximum la durée entre la transaction en ligne et la
livraison du produit. En 2013, UPS avait été surchargé par le volume des achats sur amazon.com et
n’avait pas réussi à livrer de nombreuses commandes avant les fêtes.

Une seconde librairie

Depuis, Amazon a ouvert un centre de tri de paquets dans la région de Seattle à partir duquel les
produits sont livrés directement dans les postes de la région de Seattle pour une livraison le jour-même
avec le courrier. Amazon a aussi lancé Prime Now en 2014, un service de distribution immédiat assuré
par des sous-traitants depuis les entrepôts du groupe à travers les Etats-Unis pour un abonnement de
99 dollars par an. Dans plusieurs villes américaines, Amazon assure même la livraison de repas
préparés par certains restaurants.

Autre développement notoire dans la stratégie du groupe: l’ouverture de librairies Amazon baptisées
Amazon Books. Le premier magasin a ouvert ses portes à Seattle en novembre 2015. Le groupe a
annoncé cette semaine son intention d’ouvrir sa seconde librairie à San Diego. Selon le groupe
General Growth Properties qui gère des centres commerciaux aux Etats-Unis, Amazon pourrait ouvrir
jusqu’à 400 boutiques. D’autres experts du marché cités par le quotidien USA Today estiment que le

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nombre de librairies Amazon pourrait plutôt tourner autour de 12 à 18. Dans ces boutiques, le groupe
de Seattle vend aussi ses appareils électroniques comme le Kindle.

Source : bilan.ch, 10 mars 2016

Annexe 2 :

Le patron-fondateur d'Amazon, Jeff Bezos, défend la culture de l'entreprise et sa stratégie de paris


parfois coûteux, dans une lettre adressée mardi aux actionnaires du géant de la distribution en ligne, et
rendue public sur le site internet du gendarme boursier américain (SEC).

"Un mot sur les cultures d'entreprise: elles sont tenaces, stables, difficiles à changer. Elles peuvent être
une source d'avantage ou de désavantage", écrit-il.

"Nous n'avons jamais prétendu que notre approche était la bonne -- seulement que c'est la nôtre -- et
sur les deux dernières décennies, nous avons rassemblé un groupe de personnes ayant la même
mentalité. Des gens qui trouvent notre approche énergisante et sensée", ajoute-t-il.

Amazon a beaucoup été critiqué au fil des années pour les conditions de travail qu'il impose à ses
salariés, notamment dans ses centres de traitement des commandes.

Un article du New York Times l'été dernier avait également décrit des conditions de travail
"blessantes" pour les salariés dans les bureaux, dressés les uns contre les autres pour améliorer la
productivité, l'un d'entre eux assurant même aux journalistes avoir "vu pleurer" presque tous ses
collègues. Le groupe avait accusé le journal d'avoir ignoré ou omis certains éléments à décharge dans
son enquête.

"Nous voulons être une grande entreprise qui soit aussi une machine à inventions", indique encore
mardi Jeff Bezos, se disant persuadé que "notre culture nous met en position pour atteindre cet
objectif".

Il relève aussi que contrairement à d'autres grands groupes, qui se disent favorables à l'invention "mais
ne veulent pas souffrir des séries d'expériences ratées nécessaires pour y arriver", Amazon accepte de
prendre des risques, avec des paris ambitieux qui ne réussissent pas toujours mais peuvent s'avérer
payants.

"Nous sommes le meilleur endroit au monde pour échouer (nous avons beaucoup de pratique!)",
commente-t-il.
Il n'évoque pas d'échec en particulier, mais cite en revanche la division de services en ligne aux
entreprises AWS, le système d'abonnement Prime et la plateforme avec laquelle il permet à d'autres
commerçants de vendre leurs articles sur ses sites comme "des exemples de paris ambitieux d'Amazon
qui ont fonctionné".

Amazon était revenu dans le vert l'an dernier, avec un bénéfice net de 596 millions de dollars, et avait
vu son chiffre d'affaires dépasser pour la première fois la barre des 100 milliards de dollars. Une
grosse partie de cette croissance était due à AWS.

Source : bilan.ch, 6 avril 2016

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QUESTIONS :

1. Caractérisez la stratégie d’Amazon.

Que penser de la stratégie d’Amazon fondée sur la croissance au détriment des profits ?

2. Que pourrait-il se passer si les actionnaires perdaient confiance en la stratégie du groupe ?

3. Est-il habituel pour des dirigeants de se positionner ainsi sur le long terme ?

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