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“L’Ennemi”
❖ Introduction
Accroche :
Extrait : Le sonnet “L'Ennemi”, poème n°10 de la section “Spleen et Idéal” des Fleurs du
Mal, évoque le temps au double sens du terme : à la fois comme durée (le temps qui passe)
et comme état de l'atmosphère (pluie, orage, soleil). L'Ennemi est donc une allégorie
représentant le temps.
Vers 1 : Vers négatif, restrictif. Le poète se tourne vers son passé qu'il décrit à l'aide d'une
métaphore par le groupe nominal “un ténébreux orage”. Le nom commun “orage” symbolise
la colère, la violence. L'adjectif qualificatif “ténébreux” ajoute à cette violence une tonalité
nocturne associée au spleen. La jeunesse de l'auteur est décrite comme brève, révolue par
l’emploi du passé simple du verbe être.
Vers 2 : Le 2ème vers forme une antithèse opposant l'obscurité du 1er vers à la lumière. Le
groupe nominal “brillants soleils” est une périphrase métaphorique désignant les éclairs. Le
poète insiste sur des moments de bonheur, d'intensité, d'éclat mais ce sont des instants
brefs, éphémères. Il s'agit d'une vie placée sous le signe de la dualité opposant spleen et
idéal d'une manière conflictuelle.
Vers 3 : Le récit progresse dans le temps. On passe du passé simple au passé composé..
Les noms communs “tonnerre” et “pluie” sont les effets destructeurs de l'orage. Cette
destruction est confirmée par le nom commun “ravage” renforcé par l'emploi de l'adverbe
d'intensité “tel”.
Vers 4 : Dans ce vers, nous arrivons au présent, au bilan. L'emploi du verbe “rester”
suppose un sentiment de perte. Le nom commun “ jardin” est une métaphore désignant
l'âme du poète. Son jardin correspond à son for intérieur. Le poète est atteint au plus
profond de lui-même. Le groupe nominal “fruits vermeils” est une image représentant les
richesses morales et intellectuelles. Le poète se sent incapable d'exprimer ses richesses. Le
poète se sent appauvri, on perçoit son regret par l'emploi de la locution “bien peu”
Conclusion : Nous voyons une dégradation rapide sous les asseaux du temps qui passe. On
passe de l'extérieur à l'intérieur. Le temps s'infiltre dans la conscience du poète. Les rimes
suggèrent un conflit entre le spleen (orage-rivage) et l'idéal (soleils-vermeils).
Vers 6 : Métaphore filée du jardinier par l'emploi des noms communs “pelle” et “râteaux”
désignant les instruments employés. Emploi d'une tournure impersonnelle “il faut” marquant
le devoir, la nécessité. Le poète résiste désespérément à l'agression du spleen. Il essaie
d'empêcher la perte de son patrimoine.
Vers 7 : Spectacle de désolation, par l'emploi du groupe nominal “les terres inondées”. L'eau
submerge les lieux. Entre les vers 6 et 7, on est passé du terme poétique “jardin” au terme
plus neutre “terres”, et du singulier au pluriel. L'esprit du poète se divise et se dégrade.
Vers 8 : C’est un vers pessimiste. Image de chute par l'emploi du nom commun “trous”, de
destruction par l'emploi du verbe “creuse” et de la mort par l'emploi du nom commun
“tombeaux”. Ces termes dressent un tableau désolant.
Conclusion : Ce 2ème quatrain évoquant l'automne s'achève sur une image lugubre,
pessimiste. C'est un présage de la fin, de la mort qui s'annonce.
Vers 9 : Le poète s'interroge. La question introduite par la locution “qui sait si” exprime une
espérance vague mais présente. L'expression “les fleurs nouvelles que je rêve” rappelle le
titre du recueil poétique. Les fleurs sont symboles de vie et de beauté. Le poète espère une
seconde vie, un second souffle, une seconde jeunesse. Ce vers apparaît léger, joyeux avec
l'emploi de l'allitération en [ai].
Vers 10 : Le nom commun “sol” marque ici le dernier état dans la dégradation du poète. Le
poète s'est encore appauvri. La comparaison “comme une grève” produit 2 effets : d'une
part, le poète est submergé par les forces contraires de la nature, et d'autre part, tout est
rasé. Cette terre est devenue stérile, rien ne pousse.
Vers 11 : Ce vers contraste avec le précédent. On a une longue périphrase désignant les
forces créatives, les capacités de créer. Le nom commun “aliment” suggère une force vitale.
L’adjectif qualificatif “mystique” est un adjectif baudelairien qui désigne les forces spirituelles,
la capacité pour le poète à déchiffrer le monde. Par l’emploi du nom commun “vigueur”, le
poète espère un élan. Cet espoir est ici douteux, on le voit par l’emploi du conditionnel
“ferait”.
Vers 13 : La périphrase “l'obscur Ennemi qui nous ronge le cœur” désigne le temps
apparaissant comme une hantise, une obsession. L'adjectif qualificatif “obscur” est
polysémique; d'une part, il renvoie au spleen, d'autre part, il est synonyme d'invisible,
d'insaisissable. Le nom commun “cœur” est employé pour dire que l'ennemi touche l'homme
au plus profond de son être appuyé par l'emploi du verbe ronger. Le pronom personnel
“nous” dépersonnalise le poète puisque l'on est passé du personnel “je” à l'universel “nous”.
Le Temps est donc l'ennemi de tous les hommes.
Vers 14 : Métaphore filée du cœur. Le nom commun “sang” symbolise la vie qui part. L'ordre
des mots dans ce vers suggère la lente victoire du temps puisque le temps se déploie
suivant le volume croissant des verbes : “croit”, puis “se fortifie”. Le temps est de plus en
plus oppressant et l'homme est de plus en plus affaibli. Le temps est donc représenté
comme une sorte de vampire.
❖ Conclusion
❖ Vocabulaire
Spleen : anglicisme qui désigne l’ennui de toutes choses, une mélancolie profonde, voire un
certain dégoût de la vie.
Locution : groupe de mots formant une unité de sens et ayant la même fonction qu’un mot.
(ex : locution verbale (avoir l’air, prendre garde), adverbiale (en vain, tout de suite), conjonctive (dès que, pour
que), prépositive (auprès de, jusqu’à)).
Interjection : Mot invariable pouvant être employé isolément pour traduire une attitude
affective de la personne qui s'exprime (ex. ah !, oh !, zut !).