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Enseigner la

compréhension
Les essentiels : Didactique du français

Aurélie Romet
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TABLE DES MATIERES


I. Comprendre, qu’est-ce que c’est ? ............................................................................................................................. 3

I.1 Comprendre, c’est composer avec les mots d’un autre ................................................................. 3

............................................................................................................................................................. 3

............................................................................................................................................................. 3

I.2 Les obstacles à la compréhension ................................................................................................. 3

1.3 Comprendre, c’est donc : .............................................................................................................. 5

I.5 Quelles compétences construire ? ................................................................................................. 6

II. Que disent les programmes ? ............................................................................................................................... 7

II.1 Construire le parcours du lecteur autonome ................................................................................. 7

II.2 Les compétences de lecture ......................................................................................................... 7

II.3 Quelles sont les 2 approches ? ................................................................................................... 10

III. Comprendre des textes littéraires .................................................................................................................. 11

III.1 Quels enjeux ? ........................................................................................................................... 11

III.2 Quelles œuvres ? ....................................................................................................................... 11

III.3 Quels dispositifs ? ...................................................................................................................... 12

III.4 Quels liens avec les autres domaines ? .................................................................................... 13

IV. La mise en œuvre ................................................................................................................................................... 14

IV.1 Trois priorités ............................................................................................................................. 14

IV.2 Les activités d’écriture ............................................................................................................... 14

IV.3 Les activités d’oral ..................................................................................................................... 15

IV.4 l’EDL au service de la compréhension ...................................................................................... 15

V. Comment enseigner la compréhension ? ..................................................................................................... 16

V.1 Un enseignement explicite .......................................................................................................... 16

V.2 Maitriser des gestes professionnels ........................................................................................... 16

Table des matières


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V.3 Enseigner des stratégies de compréhension ............................................................................. 17

VI. Pour aller plus loin ............................................................................................................................................... 20

IV.1 Pour résumer ............................................................................................................................. 20

IV.2 Quels auteurs à connaitre ? ....................................................................................................... 20

IV.4 Liens vidéos = séances de classe : ........................................................................................... 20

IV.2 Bibliographie, sitographie .......................................................................................................... 21

Table des matières


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I. COMPRENDRE, QU’EST-CE QUE


C’EST ?
I.1 Comprendre, c’est composer avec les mots d’un autre
La jeune femme avançait sur le sable en dansant. Les roseaux chantaient sous le vent. »
Dans cette phrase, l’auteur a fait le choix de mots particuliers. Il a écrit, par convention, une suite de
lettres, celles qui composent le mot « roseau » et qui renvoient dans notre dictionnaire mental à une
plante. Il a également placé les mots dans un certain ordre grammatical qui, toujours pas convention,
nous permet de comprendre de qui on parle, ce que fait la personne et les circonstances de l’action
(où ? comment ?). Cette part d’informations livrée par l’auteur est non négociable, elle obéit à des règles
strictes et ne laisse aucune part à l’interprétation.
Cependant, malgré ces conventions non négociables, rien ne garantit que l’image mentale que l’auteur
se fait de cette scène soit la même que la vôtre. Entre en scène notre imagination, nourrie de nos
expériences personnelles et notre culture. Certains vont imaginer une femme blonde, petite dansant sur
la plage tandis que d’autres la verront brune et grande dansant dans les dunes d’un désert.

Ainsi, la compréhension est souvent incertaine. Elle exige autant d’obéissance que de « liberté
interprétative ». Il faut donc arriver à trouver un équilibre entre les droits et les devoirs du lecteur car
comprendre c’est fabriquer son propre sens avec les mots d’un autre.
Parfois, l’auteur donne des informations qu’il suffit d’attraper au vol de la lecture. Ce sont les
informations explicites. Mais souvent l’auteur ne dit pas tout. Il laisse parfois des « blancs » dans son
texte car il a confiance dans les compétences et les habiletés du lecteur pour les combler. C’est ce
qu’on appelle les informations implicites. Certains élèves vont pouvoir lever sans effort ces
connivences laissées par l’auteur confiant, qui, selon les mots d’Umberto Ecco mise « sur l’intelligence
du lecteur pour mettre à jour les 50% du travail qu’il lui a laissés ». Malheureusement, beaucoup de
petits lecteurs passent à côté, se détournent du sens initial et empruntent des chemins fort éloignés. Ils
tombent « en panne de sens » et se perdent dans les méandres de l’interprétation faussée. Certains
enfants ont une absence de conscience de la nécessité d’aller au-delà des informations explicites.
Comprendre c’est donc composer avec les mots d’un autre en utilisant des stratégies de raisonnement
et de réflexion pour se rapprocher au plus près du texte. D’après l’article d’A. Bentolila, dans « Essentiel de la
Pédagogie », Nathan
Pour Eduscol, « La compréhension se définit comme la capacité à construire, à partir du texte et des
connaissances antérieures, une représentation mentale cohérente de la situation évoquée par le
texte ».

I.2 Les obstacles à la compréhension

Il est rare qu’un texte mette en jeu une seule compétence. Lire c’est mobiliser des compétences
multiples. Aussi, la difficulté réside-t-elle moins dans le choix des textes que dans l’identification des
obstacles qu’ils engendrent. L’enseignant doit pouvoir repérer les compétences nécessaires pour
comprendre un texte donné et repérer/lister très vite les obstacles à la compréhension. Choisir un
support de lecture pour les élèves n’est pas un acte anodin mais déterminant.

• Les difficultés liées au déchiffrage : C’est la première difficulté et le préalable incontournable


à la maitrise de compréhension.

I. Comprendre, qu’est-ce que c’est ? 3 sur 22


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o Comment lever l’obstacle ? Entrainer l’identification des mots par l’automatisation du


déchiffrage et la mémorisation des correspondances graphèmes/phonèmes, entrainer
la fluence, enseigner la lecture à voix haute…

• Les difficultés liées à des malentendus cognitifs : Les élèves pensent qu’il suffit de déchiffrer
tous les mots pour comprendre. La conséquence est une lecture mot à mot qui provoque, au
mieux, la « constitution d’îlots de compréhension » juxtaposés et, au pire, un accès au sens
voué à l’échec.

o Comment lever l’obstacle ? Rendre conscient l’élève du sens même de l’acte de lire.
Lire ce n’est pas déchiffrer. Lire c’est se servir du déchiffrage pour comprendre, restituer,
trouver des informations, les hiérarchiser.

• Les difficultés liées au vocabulaire : On a vu que l’insuffisance du stock lexical réduisait


fortement les chances d’accès au sens. Quand dans le répertoire mental, « il n’y a personne au
numéro demandé », l’enfant ne peut que se détourner du chemin de la lecture. Mais le capital
lexical n’est pas la seule difficulté. La maîtrise de la polysémie des mots est un vrai obstacle.
On sait que c’est la signification dominante qui reste active pendant la lecture des apprentis-
lecteurs. Dans la phrase « Les marcheurs découvrirent un superbe paysage en arrivant sur le
plateau » le mot « plateau » risque de déstabiliser plus d’un élève car dans leur répertoire
mental la signification dominante est celle du support plat servant à transporter des objets.

o Comment lever l’obstacle ?

▪ Lister la liste de mots complexes en amont de la séance de lecture et définir


les mots indispensables à la compréhension (laisser ceux pouvant est être
définis par le contexte ou l’observation dérivationnelle).
▪ Enrichir le vocabulaire des élèves par des séances d’enseignement structurées
et explicites du vocabulaire en lien avec les textes étudiés.
▪ Apprendre des stratégies : Comprendre des mots selon le contexte ou en
observant leur dérivation.
• Les difficultés liées aux connaissances sur la langue : Comprendre un écrit suppose que le
lecteur soit doté d’habiletés propres au traitement du texte. C’est d’abord maîtriser la syntaxe.
Par exemple, dans la phrase « Dans le jardin de mamie, tombent les marrons que les enfants
ramassent », à la question « Qui est-ce qui tombe ? », beaucoup d’enfants répondent
« Mamie ». C’est donc établir des relations entre les idées exprimées, comprendre la cohésion
du texte (traitement des connecteurs, des temps verbaux).

o Comment lever l’obstacle ? Enseigner et entrainer des stratégies pour chaque difficulté
évoquée.

• Les difficultés liées dans la maîtrise de l’univers culturel : C’est la faible étendue des
connaissances dites encyclopédiques qui entravent souvent la compréhension des textes.

o Comment lever l’obstacle ? Faire lire et ouvrir sur la connaissance du monde.

• Les difficultés à maîtriser les mécanismes d’inférence : L’inférence est l’habileté à gérer
l’implicite, ce qui n’est pas dit mais que l’on peut deviner en raisonnant ou en faisant appel à
ses connaissances. C’est effectuer des liens entre les informations du texte, ses propres
connaissances et son raisonnement pour combler les blancs laissés par l’auteur. On sait par le
biais des évaluations nationales que la difficulté principale des élèves reste la gestion de cet
implicite.

o Comment lever l’obstacle ? Enseigner et entrainer des stratégies sur l’implicite.

I. Comprendre, qu’est-ce que c’est ? 4 sur 22


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Exemple d’entrainement sur l’implicite : « Fichier Cléo », Retz, CE1


« Quand j’ai ouvert la boite, j’ai vu qu’ils étaient tous cassés. Ce n’est pas grave nous ferons une
omelette ce soir ». Qu’est ce qui est cassé ?

• Les difficultés liées à la mémoire de travail : Lire un texte n’est pas de tout repos pour notre
cerveau. La mémoire joue un rôle central dans le processus d’accès au sens. Quand on lit, on
va chercher les mots de notre mémoire visuelle à long terme (répertoire mental). En parallèle,
on doit garder en mémoire ces mots à mesure qu’on les décode (mémoire à court terme ou
mémoire de travail). Il faut associer les mots lus à leur signification et construire des ponts avec
des situations connues pour affiner la compréhension. La mémoire de travail est très sollicitée.
Elle doit en plus retenir les informations qui viennent d’être lues, les connecter avec les
anciennes et les suivantes. C’est elle qui assure la mise en relation de l’information inter-
phrastiques. D’où ce besoin, lorsqu’elle est surchargée, de revenir en arrière, de relire.

o Comment lever l’obstacle : Faire lire par étapes et segmenter le texte.

• Les difficultés à contrôler et analyser son degré de compréhension : L’enfant ne sais pas
évaluer son degré de compréhension car il ne se permet pas de se dire « Ce mot, cette phrase,
je suis certain de les avoir compris. « Ce mot, cette phrase, je pense les avoir compris à peu
près », « Ceux-là, je ne les ai pas compris »

o Comment lever l’obstacle : Proposer régulièrement de verbaliser ce type


d’autoévaluation.

1.3 Comprendre, c’est donc :

• Se construire une représentation mentale juste : lieux, personnages mais aussi


ce que ces derniers ressentent (leurs émotions, leurs sentiments, le pourquoi de
leurs actions…)
• Intégrer des informations les unes après les autres : les garder en mémoire
• Réguler, vérifier sa compréhension et accepter de faire des réajustements. Le sens évolue en
fonction des nouvelles informations. Les hypothèses produites se voient confortées ou balayées.
• Les mettre en relation en combinant informations explicites/implicites et ses propres
connaissances (encyclopédiques, personnelles…)

I.4 Quelles stratégies pour découvrir un texte ?

• Les stratégies de pré-lecture : Elles préparent la lecture et se font en amont. Elles permettent
d’identifier les objectifs de lecture et d’anticiper sur l’objet de la lecture (Création d’hypothèses).
C’est la 1ere étape qu’on appelle « construire l’univers de référence ». L’élève apprend à
percevoir, avant d’entrer dans le texte, les indices clés de celui-ci et à les mettre en liens avec
ses connaissance antérieures. Le fait de cerner les informations que l’on va recevoir permet de
mieux les comprendre et les retenir. Regardez la vidéo pédagogique « Aider les élèves à faire
des hypothèses et anticiper l’écrit » https://vimeo.com/177106821

• Les stratégies liées à la construction d’images mentales cohérentes (interprétation des


mots des phrases et des idées du texte). C’est la compréhension de ce qui est dit et la
clarification de ce qu’on en a compris : relire, paraphraser, découper le texte pour en
comprendre la structure, prendre des notes, comprendre les mots difficiles …

• Stratégies pour aller au-delà et des idées : ce sont les traitements inférentiels, l’interprétation
de l’implicite et le fait de lier les contenus du texte à ses connaissances de lecteur pendant la

I. Comprendre, qu’est-ce que c’est ? 5 sur 22


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lecture. Ces stratégies consistent à se poser les bonnes questions : « Qui ? », « Quoi ? »,
« Où ? », « Comment ? », « Pourquoi ? » selon la stratégie du maçon de Marise Bianco.

• Stratégies postérieures à la lecture : aident à la restructuration, à l’organisation et à la


mémorisation des informations lues (schéma ou carte mentale des informations qui aident à la
synthèse ou sous forme de résumés ou de critiques littéraires).

I.5 Quelles compétences construire ?

Pour aider les élèves à comprendre, Roland Goigoux et Sylvie Cèbe dans leur ouvrage « Lector,
Lectrix », Retz ont listé 5 compétences à construire et entrainer.

• Les compétences de décodage : On sait que décoder avec aisance est un prédicteur
essentiel à la compréhension. Le décodage est une opération coûteuse en énergie et prive les
élèves de leur ressource d’attention et de mémorisation. Décoder avec difficulté, c’est prendre
le risque d’oublier ce qui vient d’être lu. Maîtriser cette habileté permet donc de libérer la charge
cognitive pour que le lecteur puisse se concentrer sur le sens. Le cycle 2 a rendu aussi
automatisées que possible les opérations de décodage et d’identification des mots. Cependant,
certains élèves du cycle 3 rencontrent encore des difficultés dans la maitrise du déchiffrage. Il
est important de leur permettre de poursuivre leur apprentissage par des exercices adaptés à
leurs besoins.

• Les compétences linguistiques : Elles sont axées sur 2 champs d’apprentissage.

o Le lexique : favoriser la connaissance et la maîtrise du sens des mots (sémantique)


o La syntaxe : développer la connaissance de langue et de ses codes (syntaxe).

• Les compétences référentielles : Il s’agit des compétences dites encyclopédiques. Elles sont
constituées des savoirs sur le monde, des références culturelles. Elles permettent de
comprendre des univers littéraires, de les mettre en liens (« Le Petit Poucet » débute comme
« Hansel et Gretel ». Ce sont des enfants abandonnés dans la forêt par des familles affamées.
Ils tentent de retrouver leur chemin avec des cailloux). Elles permettent aussi de lever certains
implicites de lecture. Les textes narratifs (les plus difficiles !) convoquent une charge cognitive
intense fortement tributaire des connaissances culturelles du lecteur.

• Les compétences textuelles : Elles sont relatives au fonctionnement des textes. Ce sont
celles qui nous permettent de mobiliser nos connaissances sur les types de textes et d’utiliser
leurs caractéristiques pour bien les lire. Un documentaire ne se lit pas comme un texte narratif
ou comme une fiche de fabrication…Chaque type de texte appelle des compétences de lecteur
différentes. De plus, les relations inter-phrastiques ne sont pas explicitées, c’est au lecteur de
trouver les relations causales, de cerner la chronologie des actions…Elles nous permettent
d’avoir recours aux habiletés d’inférence.

• Les compétences procédurales (ou stratégiques) : Il s’agit de sélectionner les informations


lues, les traiter, les réguler pour se construire une image mentale cohérente et juste. Tout
lecteur-expert a besoin d’anticiper, faire des hypothèses que le texte va peu à peu venir
bousculer en les confirmant ou les infirmant. Plus le texte est résistant, (porteur d’implicite fort,
vocabulaire complexe…) plus le lecteur va alors avoir besoin de régulièrement revenir en
arrière, relire. Cela fait partie des stratégies du lecteur pour se bâtir une compréhension juste.

I. Comprendre, qu’est-ce que c’est ? 6 sur 22


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II. QUE DISENT LES


PROGRAMMES ?
II.1 Construire le parcours du lecteur autonome

Le BO du 26 avril 2018 résume en 2 pages l’enjeu fondamental de l’enseignement de la lecture. Son


titre « Construire le parcours d’un lecteur autonome » invite l’école à former des bons lecteurs actifs et
ayant le goût de la lecture. Cette note de service rappelle les 2 objectifs de l’enseignement de la
lecture : permettre à l’élève d’accéder au sens des textes mais aussi au plaisir que la lecture procure.

• Construire un parcours de lecteur

Il s’agit de penser sur la durée le rapport aux livres de l’élève et d’inscrire le lecteur dans un parcours
qui va de la maternelle jusqu’au lycée. Pour cela, des listes de références d’ouvrages (albums, BD,
poésies, œuvres du patrimoine…) sont disponibles sur Eduscol pour chaque cycle. Une
programmation par cycle est à favoriser afin de construire un parcours cohérent et réfléchi. Cette
façon de penser la lecture en termes de parcours permet de proposer des rencontres nombreuses et
variées avec des œuvres.
L’objectif, au-delà de créer une véritable culture du livre est aussi de bâtir une culture commune. Il
s’agit également de créer des ponts entre les œuvres et les genres artistiques. (Les films « La Belle et
la Bête » de Jean Cocteau, « Peau d’Âne » de Jacques Demy sont des entrées intéressantes et
riches. Elles peuvent servir de supports de réflexion, de comparaison aux œuvres littéraires étudiées
en classe.)

• Former des lecteurs autonomes

C’est procéder simultanément à 2 types de traitement de l’écrit :


o La reconnaissance des mots écrits (identification des mots)
o La compréhension c’est-à-dire l’accès au sens. (Repérage des informations explicites et
implicites au cycle 2 auxquelles s’ajoute l’interprétation au cycle 3).

À retenir
Un lecteur autonome c’est un lecteur qui a compris que l’acte de lire n’est pas seulement
déchiffrer mais aussi comprendre. C’est un lecteur qui a conscience qu’un écrit peut avoir des
obstacles, que ces obstacles sont identifiables et repérables. C’est enfin un lecteur qui a une stratégie
pour chaque obstacle rencontré et donc initie des régulations au moyen des stratégies qu’il dispose.

II.2 Les compétences de lecture

Cycle 2 Cycle 3

Que disent les programmes ? 7 sur 22


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LES COMPETENCES DU CYCLE 2

• Identifier des mots de manière de plus en plus aisée (la mécanique) : On sait que, pour
comprendre et devenir un lecteur autonome, il faut avoir automatisé le déchiffrage. L’enfant va
passer du déchiffrage (fusion de syllabes et oralisation) au décodage (identifier les mots dans
un objectif de prise de sens.

• Comprendre un texte et contrôler sa compréhension (le réflexif) : C’est être capable de


comprendre le sens général d’un écrit lu en repérant les informations explicites mais aussi
implicites. Réguler sa compréhension, c’est être capable de modifier au long de sa lecture ses
hypothèses.

o Exemple : « La caravane avance lentement sous le ciel brûlant ». L’enfant imagine


d’abord une voiture remorquant un engin roulant pour un départ en vacances. « Les
chameaux écrasés de chaleur peinaient à avancer dans le sable » L’enfant régule et à
partir du contexte, de ses connaissances et de sa réflexion et comprend qu’il ne peut
s’agir de la remorque initialement imaginée mais d’un groupe de personnes dans le
désert (Touaregs ?)

• Lire tous types de textes (la confrontation aux écrits différents) : C’est être capable de
connaître les caractéristiques des différents écrits rencontrés (documentaires, BD, poèmes,
affiches, recettes…), d’adapter ses stratégies de lecteur (un texte documentaire ne se lit pas
comme un texte narratif). Il convient pour ce dernier d’effectuer une lecture linéaire et
chronologique alors que pour le second, la présence de paragraphes, de photos, permet à
l’élève de sélectionner et de traiter l’information de façon non linéaire).

• Lire à voix haute (vers l’autonomie du lecteur) : C’est lire en identifiant correctement les mots,
en jouant sur le rythme, le ton l’expressivité. C’est manifester, face à un auditoire, la
compréhension d’un texte lu.

LES COMPETENCES DU CYCLE 3

• Lire avec fluidité : C’est avoir mémorisé la lecture des mots fréquents et irréguliers, avoir
automatisé le décodage, être capable de prendre en compte les groupes syntaxiques, la
ponctuation…

• Comprendre un texte littéraire et se l’approprier : Les textes littéraires échappent à toute


fonction utilitaire. Ils emploient un langage littéraire qui obéit à des préoccupations esthétiques
afin de capter l’intérêt du lecteur. L’auteur de littérature cherche des mots particuliers pour
exprimer ses idées avec soin au travers de moyens linguistiques. (Répétitions de structures
grammaticales, des métaphores, des comparaisons, des jeux de mots...). Comprendre un texte
littéraire est complexe et doit faire l’objet d’un enseignement spécifique (comprendre l’univers,
les implicites très forts, les désignations des personnages qui sont souvent très nombreuses et
variées, les références culturelles, humoristiques…). C’est une forme d’écrit particulière et les
élèves doivent en être informés. Pour le comprendre, ils doivent se « l’approprier » c’est-à-dire
accéder à la compréhension par des activités de clarification (Reformuler des passages,

Que disent les programmes ? 8 sur 22


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restituer l’ordre des évènements, placer les actions sur un axe temporel, proposer des résumés
courts, raconter l’histoire sous forme de vignettes de BD, jouer l’histoire sous forme de
saynètes, changer le point de vue d’un personnage…)

• Comprendre des textes, des documents et des images et les interpréter : Il s’agit d’utiliser
les compétences des élèves en compréhension au service de tous types de supports et cela,
en utilisant d’autres domaines d’enseignement (Identification de la nature du document, de la
source, apprentissage explicite de la mise en liens des informations dans des documents
comportant plusieurs supports (texte, graphiques, images, documents numériques…). On est
dans la construction de savoir-faire et dans la mise en place d’automatismes préparant le
collège.

Eduscol, fiche-ressource « Lire et comprendre des documents qui associent textes, images et schémas »

• Contrôler sa compréhension et devenir un lecteur autonome :

C’est s’engager dans une démarche progressive pour accéder au sens. Il s’agit pour l’élève de prendre
conscience que lire c’est être dans un état de veille et d’alerte permanent : mobilisation des
connaissances lexicales, culturelles, grammaticales (repérage des mots de liaisons, des pronoms,
recherche d’informations implicites…). C’est comprendre que les représentions mentales construites au
fil de la lecture peuvent évoluer et que le sens initial peut être bousculé. C’est avoir conscience que l’on
peut ne pas comprendre, que l’on peut revenir en arrière pour mobiliser des stratégies et clarifier le
sens.

QUELS

SUPPORTS ?

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II.3 Quelles sont les 2 approches ?

Jocelyne Giasson distingue deux approches dans l’enseignement de la compréhension :

• Celle qui s’intéresse aux stratégies de compréhension et qui propose un


enseignement explicite de ces stratégies.
• Celle qui se concentre sur le contenu du texte et vise la co-construction de la
signification grâce à des discussions ouvertes entre les élèves sous le pilotage de
l’enseignant (construction du sens par le « débat »). Selon cette approche, l’élève
apprend à se faire une représentation du texte par les échanges effectués avec
l’enseignant et ses pairs. :

Ces deux approches sont complémentaires et considèrent que le lecteur doit être activement engagé
dans la tâche de lecture (« lecteur actif »). Cet enseignement est construit sur l’ensemble du parcours
scolaire de l’enfant. Il débute en maternelle dès la familiarisation avec les premiers textes lus ou
racontés et e poursuit jusqu’au cycle 4.

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III. COMPRENDRE DES TEXTES


LITTERAIRES
Lire étant une activité complexe, on considère désormais qu’il faut l’analyser, la rendre consciente. Les
textes littéraires sont devenus l’objet d’une attention privilégiée car ils sont, par nature, des textes
résistants. La lecture littéraire se définit comme un mode particulier de lecture. Elle se définit selon 3
traits caractéristiques :

• La mobilisation du lecteur du point de vue affectif : identification aux personnages, les émotions
déclenchées ;
• La mobilisation du lecteur d’un point de vue cognitif : travail d’interprétation
• La mobilisation du lecteur du point de vue culturel : univers particulier, référence à d’autres
œuvres.

III.1 Quels enjeux ?

• Familiariser et/ou réconcilier les élèves avec l’univers des textes et de livres
• Faire du livre l’objet d’un investissement heureux
• Nourrir l’imagination et enrichir les connaissances de monde de l’élève
• Construire un socle de références culturelles commun
• Construire un parcours littéraire
• Préparer l’entrée à la littérature du collège
• Support d’étude privilégié pour la compréhension. Ce sont des textes plus résistants. Les
processus de compréhension engagés sont nombreux. Ils sont souvent des supports propices
à l’interprétation.

À retenir
La compréhension relève du domaine du consensus explicatif. Les élèves arrivent à la
même conclusion car le texte ne laisse pas ou peu de choix.
L’interprétation relève plus des choix que le texte peut offrir. Certains textes, en particulier les textes
littéraires, offrent des structures polysémiques et suscitent un travail d’interprétation fort. Catherine
Tauveron les appelle les textes « proliférants ». Le lecteur s’empare et saisit le sens qui lui semble le
plus proche de ses convictions ou de son analyse. L’expérience personnelle et le cadre émotionnel
entrent en jeu et influent dans cette analyse.

III.2 Quelles œuvres ?

DES ATTENDUS DE FIN DE CYCLE PRECIS

DU CP au CE2 = Lire 5 à 10 œuvres en classe par an.


• CM1 = 5 ouvrages de la littérature de jeunesse et 2 œuvres du patrimoine
• CM2 = 4 ouvrages de la littérature de jeunesse et 3 œuvres du patrimoine
Littérature patrimoniale = œuvres de référence tombées dans le domaine public
Littérature classique = œuvres plus récentes souvent étudiées ou rééditées

Comprendre des textes littéraires 11 sur 22


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DES LISTES DE REFERENCE POUR LES 3 CYCLES :

Pour permettre aux enseignants de construire le parcours du lecteur, Eduscol a mis à disposition des
listes de référence pour choisir des ouvrages adaptés à chaque niveau, aux besoins et aux goûts des
élèves (de la maternelle au collège).

« La lecture d'œuvres complètes, par l'adulte d'abord puis de façon autonome par l'élève, permet de
donner des repères autour de genres, de motifs, de personnages, de séries, d'auteurs et d'accéder ainsi
à une culture littéraire. Il s'agit de confronter fréquemment les élèves à des œuvres susceptibles de
nourrir leur imagination, de susciter leur intérêt et de développer leurs connaissances. », Eduscol.

Pour le cycle 3, les œuvres s’inscrivent dans 6 grands thèmes :

Exemples d’œuvres de la liste cycle 3 (Ce sont, dans la grande majorité, des versions abrégées) :

Œuvres du patrimoine Œuvresquels


• « L’Odyssée », Homère
• « Charlie et la Chocolaterie », R. Dahl
• « La petite sirène », Andersen
• « Les aventures d’Alice au pays des
• « Les fables » J. de la Fontaine
merveilles », L. Caroll
• « Robinson Crusoë », D. Defoë
• « Les contes du Chat perché » M. Aymé
• « La Belle et la Bête » Mme de Beaumont
• « Liberté », P. Eluard
• « Bécassine et la grande guerre », G.
• « Fifi Brindacier », A. Lindgren
Languereau
• « Nouvelles histoires pressées », B. Friot
• « L’île au trésor » Stevenson
• « Astérix, le tour de Gaule », Goscinny, Uderzo
• « Les enfants du capitaine Grant », J. Verne

Lire des textes littéraires, c’est vivre des aventures par procuration. On peut penser que la longueur de
ces romans, même adaptés, pose problème aux jeunes lecteurs. Mais il ne s’agit pas toujours de les
faire lire en intégralité. L’enseignant peut choisir un passage, lire lui-même un extrait, faire visionner des
scènes dans sa version cinématographique. Il convient de faire avancer l’œuvre et se concentrer sur
des scènes clés…

III.3 Quels dispositifs ?

L’enseignement de la lecture littéraire s’apprend dès que les enfants savent lire même s’ils ont encore
quelques habiletés à acquérir. C’est une nouvelle forme d’ambition qu’investit l’école, celle de les faire
accéder à l’univers des textes littéraires et de la lecture littéraire en tant que procédure particulière. Pour
cela des dispositifs variés sont à explorer et alterner.

• La lecture offerte avec contrat d’écoute : C’est le dispositif le plus rencontré en classe. C’est
l’enseignant qui prend en charge la lecture orale. Sa lecture constitue un mode d’entrée
facilitateur à la lecture littéraire car les élèves sont allégés de la tâche d’identification des mots.
L’enseignant joue avec l’expressivité et la clarté de la diction. Les élèves peuvent plus
facilement se concentrer sur la compréhension et l’interprétation. C’est un moment de partage
littéraire. Cependant ce dispositif peut avoir des limites. Certains élèves restent passifs et tout

Comprendre des textes littéraires 12 sur 22


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comme les textes écrits, survolent l’écoute et ne font que très peu d’inférences. La lecture offerte
ne profiterait qu’aux élèves déjà habiles en compréhension. Il existe une alternative : rendre
l’écoute active en proposant un contrat d’écoute. En amont de la lecture, l’enseignant propose
de repérer certains éléments. Il peut demander par exemple dans une séance de repérer les
personnages, les liens qui les unissent, ceux à qui on aimerait ressembler… Dans une autre
séance concentrer l’écoute des élèves sur la durée de l’histoire et ses étapes puis les lieux, les
objets étonnants…Peu à peu l’enseignant affinera ses questions.

• Le dévoilement progressif : c’est un dispositif permettant de segmenter la tâche mais c’est


aussi une façon de permettre à l’élève d’anticiper sur les évènements futurs et faire des
hypothèses. Ce dispositif est à privilégier pour les romans policiers ou les romans à chute !

• Le débat interprétatif : « Dispositif didactique qui permet de donner du sens à un texte en


confrontant les idées différentes des lecteurs. La classe est le lieu où émergent différentes
lectures individuelles en vue de construire une lecture commune ouverte à différentes
interprétations respectueuses du droit du texte. Le débat porte sur les points d’incertitude du
texte », Eduscol. Le rôle du maitre dans le débat est crucial car, tout en laissant les idées des
élèves se confronter, il est le garant du droit du texte. Il amène l’élève à réfléchir « aux nœuds
de compréhension » d’un texte. Il rend nécessaires l’argumentation et la justification en
dirigeant les enfants vers une relecture, passage obligé de toute validation. Apprendre à
retourner dans le texte et justifier ce qui a amené un lecteur à penser un point de vue, c’est le
rendre actif. Ce dispositif est très efficace lorsque les textes sont porteurs de nombreux
implicites ou lorsqu’ils laissent le lecteur faire des choix d’interprétions. C’est souvent le cas des
textes littéraires…Ce dispositif peut être travaillé en classe entière, en ateliers ou petits groupes.

Pour aller plus loin :


« Comprendre et interpréter un texte littéraire, la lecture offerte avec contrat d’écoute », fiche-ressource,
Eduscol
https://cache.media.eduscol.education.fr/file/Lecture_Comprehension_ecrit/90/4/RA16_C3_FRA_17_lect_activ_contra_
N.D_612904.pdf

« Le débat interprétatif, fiche-ressource », Eduscol


https://cache.media.eduscol.education.fr/file/Lecture_Comprehension_ecrit/89/0/RA16_C3_FRA_11_lect_eval_debat_N.
D_612890.pdf

III.4 Quels liens avec les autres domaines ?

A la fin du programme de français, il y a une partie « culture littéraire et artistique » Cette invitation à
croiser le monde de la littérature et des arts est une entrée très riche pour les élèves. Elle ouvre leur
culture artistique et offre généralement beaucoup de stimulation et de motivation. Pensez à croiser
littérature, cinéma, sculpture, peinture…
Exemple : L’Odyssée d’Homère connait de multiples versions cinématographiques. Faire travailler une
classe sur certaines scènes de films ou sur les affiches, c’est offrir un support stimulant et original.
Analyser les tableaux, les poteries racontant l’épopée d’Ulysse, sans oublier les BD ou les albums qui
ont repris l’aventure sont des moyens d’enrichir leur culture sans oublier la part de plaisir
qu’entretiennent ces types de supports.

Ulysse et les sirènes dans la BD, sur une poterie en tableau…

Cette notion de plaisir est très importante. Dans chaque roman, le lecteur peut s’identifier
au héros et ressentir à travers lui des émotions fortes. La découverte du plaisir de la lecture n’empêche
pas de travailler la construction des compétences de compréhension nécessaires à la résolution des
problèmes posés par le texte. Cela passe par un travail de lecture, d’écriture et d’expression orale.

Comprendre des textes littéraires 13 sur 22


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IV. LA MISE EN ŒUVRE


IV.1 Trois priorités

Lire un texte, surtout un texte long, c’est prendre du plaisir à partager les émotions d’un autre, vivre son
aventure par procuration. Mais ce plaisir nécessite un apprentissage qui passe par un travail de lecture
indissociable des activités d’écriture, des activités d’oral et d’étude de la langue.

IV.2 Les activités d’écriture

• De écrits pour construire la compréhension comme les écrits intermédiaires : ce sont des
écrits où s’élaborent les étapes essentielles de la compréhension et le lieu où se développe le
travail cognitif. Ce sont des écrits pour apprendre et pour penser.

o Faire des schémas ou dessins (cycle2) pour le rappel de récit


o Prendre des notes (cycle 3) pour le rappel de récit
o Élaborer des cartes mentales, tableaux, listes des personnages, des lieux pour élaborer
les relations entre les personnages, leurs motivations à agir...
o Noter les étapes et les différentes actions de l’histoire

• Les écrits pour traduire sa compréhension : Le carnet de lecteur est un outil essentiel et
fortement recommandé par Eduscol.

o Pour noter ses prédictions, ses hypothèses, ses réactions de lecteur


o Pour exprimer un point de vue
o Pour copier des mots, des phrases qui plaisent
o Pour faire des résumés
o Pour anticiper et inventer une suite
o Pour noter des questions pour ses camarades, celles
qu’on se pose

• Les écrits pour aller plus loin : Ce sont toutes les activités d’expression écrite qu’un
enseignant peut proposer en prolongement. Par exemple, demander à un élève de se mettre à
la place d’un personnage pour raconter une scène en adoptant un autre point de vue :
« Raconte la scène du Cyclope en te mettant dans la peau d’un compagnon d’Ulysse » ou
« dans la peau du Cyclope ». On peut également demander aux élèves de transformer le
dénouement final. (« La chèvre de Mr Seguin » ou « La Belle et la Bête ». On peut tout aussi
bien demander à l’élève d’écrire le journal intime d’un personnage. Faire écrire le journal de la
Bête durant la visite de la Belle à sa famille…Transformer une scène de fable. (C’est le bœuf
qui veut se faire aussi petit que la grenouille…)

• Des écrits pour questionner le texte : les questionnaires. La pratique des questionnaires de
type questions/réponses est une pratique très ancrée dans les classes. Il doit faire l’objet d’une
grande attention. Ce recours systématique à ce type de dispositif comme outil de vérification de
la compréhension est à interroger. Il y a des questions parfois pertinentes qui témoignent de
l’avancée de la compréhension, de la capacité de l’élève à inférer, à faire du lien entre les
informations. Mais très souvent, seules des questions explicites sont proposées sans réelle

La mise en œuvre 14 sur 22


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possibilité de réflexion. Or, on sait que ce sont les questions implicites qui posent le plus de
problèmes aux élèves. De plus, généralement, le questionnaire ne permet l’accès qu’à une
compréhension de surface et pose lui-même des problèmes de compréhension.

Au concours, il est important de montrer que ce dispositif est à questionner. Il devrait davantage servir
d’aide à la compréhension plus qu’à servir d’outil d’évaluation de celle-ci. D’où l’importance de construire
ou de s’appuyer sur des questionnaires pertinents et de connaitre d’autres dispositifs. (Les quizz
vrai/faux avec justification orale, les puzzles de lecture…). Il est à noter que rares sont les enseignants
qui proposent de lire les questions de questionnaire en amont la lecture. Pourtant, c’est un moyen
efficace d’orienter le regard du lecteur. L’analyse des réponses des élèves nous
permet de mieux comprendre comment ils résolvent ce type de tâches. Cela nous
permet de mettre en lien leur mode de traitement et la façon dont ils envisagent
l’acte de lire mais aussi de mettre le doigt sur les dérives que suscitent certaines
pratiques enseignantes.

IV.3 Les activités d’oral

• La place de l’oral est fondamentale dans l’avancée des apprentissages.

La verbalisation et la confrontation des points de vue dans le débat interprétatif permettent


l’apprentissage de la justification et de l’argumentation. Les compétences narratives des élèves se
renforcent lors des rappels de récit. Pour cela, les ouvrages de Roland Goigoux et Sylvie Cèbe « Lector,
Letorinette » pour le cycle 2 et « Lector, Lectrix » pour le cycle 3 sont incontournables.
Partager ses impressions, faire un exposé sont tout autant de dispositifs qui permettent la construction
de compétences orales essentielles. Ces compétences viennent nourrir celles des élèves sur la
compréhension.

• La place de l’oral : Exemple de la lecture à voix haute

La lecture est un exercice fondamental pour construire la compréhension. Lire de façon hésitante, sans
prendre en compte la ponctuation, les groupes de souffle, conduit les élèves à égrener les mots sans
pause sur un ton monocorde et leur interdit
l’accès la compréhension. En leur apprenant à
repérer la syntaxe, à identifier et à jouer avec la
ponctuation, à identifier les mots clés, à les
accentuant, l’enseignant permet aux jeunes
lecteurs de construire le sens de l’écrit. Cela
suppose un apprentissage spécifique dans des
séances dévolues à cela. Puiseurs lectures sont
nécessaires et un entrainement régulier est
incontournable.

IV.4 l’EDL au service de la compréhension

Exemples d’objet d’étude :


• Enrichir le vocabulaire
• Comprendre la formation des mots
• Travailler autour des reprises anaphoriques
• Travailler les relations causales
• Travailler les relations spatio-temporelles
• Comprendre les choix des temps verbaux

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V. COMMENT ENSEIGNER LA
COMPREHENSION ?
V.1 Un enseignement explicite

Les programmes 2015 insistent de façon très prononcée sur la mise en place d’un enseignement
explicite de la compréhension. C’est donc un enseignement à part entière, amorcé au cycle 2 qui
consiste à :
• Apprendre à l’élève pendant la lecture à repérer les difficultés
• Apprendre à l’élève à utiliser et automatiser des stratégies de régulation pour surmonter ces
difficultés
Cet enseignement est explicite car il rend visibles par l’explication les opérations mentales de la
compréhension inaccessibles à l’observation directe. Il rend visibles les mécanismes invisibles du
lecteur expert et fait appel à la réflexion consciente de l’élève.

V.2 Maitriser des gestes professionnels

Longtemps considéré comme inné ou étant le fruit du seul bon sens du lecteur, l’accès au sens a changé
de statut à l’école. C’est désormais une discipline à part entière dans laquelle le maître a un rôle central.
Son attitude et sa posture pédagogiques sont fondamentales. Son rôle de modèle dans son rapport au
livre et le plaisir qu’il y trouve est crucial. Son rôle de guide est primordial. Il doit maîtriser des gestes
professionnels précis.

• Construire des séances d’apprentissage de la compréhension. L’enseignant annonce


clairement l’objectif (« Aujourd’hui, nous allons apprendre à nous mettre à la place des
personnages pour comprendre leurs actions », « Aujourd’hui nous allons utiliser nos
connaissances sur les familles de mots pour comprendre les mots inconnus d’un texte »). Il
donne donc à cet enseignement un statut de leçon. Il convient de rendre perceptibles les
mécanismes et les stratégies qui conduisent à comprendre un texte. Pour atteindre cet objectif,
les leçons de lecture sont régulières et structurées et s’inscrivent dans une progression.

• Endosser la responsabilité du choix du texte à entendre ou à lire. Le choix du texte est un


acte pédagogique fort. Le texte ne doit pas être ni trop simple, ni trop complexe (Pas de texte
trop « lisses » ni de textes trop « résistants »).

• Identifier les difficultés d’un texte lu ou entendu. Il est important par exemple de lister en
amont les difficultés lexicales que pourraient rencontrer l’élève, d’identifier la difficulté que
pourrait représenter un trop grand nombre d’identifications différentes des personnages (le
loup, il, la bête, l’insatiable carnivore, le monstre…), de repérer les implicites, leur accessibilité

• Réduire cette difficulté : l’enseignant endosse la responsabilité de réduire la complexité de la


tâche. Il segmente l’activité en tâches accessibles (en segmentant le texte en paragraphes, en
prenant en charge une partie de la lecture, en expliquant quelques mots, en posant des
questions progressives, en travaillant le texte en APC en amont avec les élèves en difficulté…)

• Donner à entendre et voir son expertise : en pensant à voix haute, l’enseignant met un haut-
parleur sur sa pensée et rend visible l’invisible. Il explique les mécanismes de la lecture qui sont
hautement mécanisés chez le lecteur-expert. Ils ne sont pas visibles car ils sont intégrés dans
la pratique du lecteur-expert sans qu’il en ait conscience. Ces mécanismes ne sont pas
directement accessibles. L’enseignant démontre ensuite les stratégies qu’il utilise. « Pour
identifier qui est caché derrière ce pronom, je recherche les marques du genre et d’un nombre,
je recherche en amont dans le texte de qui on parle… ». La place du langage est fondamentale.

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• Susciter la compréhension de tous : Il reformule, fait reformuler des élèves de niveaux de


langage différents, il paraphrase, il signale les divergences.

• Susciter la participation de tous et favoriser l’engagement des élèves : Il pose le cadre des
échanges et rappelle les règles, il provoque des débats d’idées ou d’opinions. Il stimule le
groupe par des questions ouvertes, il distribue la parole de façon équitable, il relance le débat,
il permet la confrontation des différents points de vue, il met en lumière les stratégies
optimales…

• Proposer une automatisation des mécanismes c’est à dire une pratique répétée, des
exercices systématiques, des révisions régulières, des sollicitations fréquentes dans des
contextes différents, dans des disciplines différentes. Il existe des manuels permettant de
s’exercer sur la compréhension de façon quotidienne. La collection « Cléo » d’Antoine Fetet,
offre des cahiers d’exercices quotidiens sur la compréhension (comprendre l’implicite en
particulier).

• Proposer des supports pour stimuler l’écriture (carnet de lecture, exposés, blogs pour parler
d’une lecture, donner envie aux autres de lire une œuvre et partager ses découvertes littéraires)

• Mettre en place une pratique de la culture du livre en proposant des mises en œuvre pour
développer des échanges variés (club de lecture, « séance coup de cœur », table ronde sur
des ouvrages, « speed-booking »…)

• Habituer l’élève à avoir une vigilance de lecteur : il permet à l’élève d’être en veille tout au
long de sa lecture.

Comprendre l’utilisation des pronoms.


Antoine Fetet, Cléo, CE1 Comprendre les réactions des personnages
Antoine Fetet, Cléo, CE2

V.3 Enseigner des stratégies de compréhension

C’EST QUOI DES STRATEGIES DE LECTURE ?

Stratégies de lecture : Ensemble de procédures que le lecteur expert mobilise délibérément


pour comprendre et surmonter un obstacle à la compréhension (se poser les bonnes questions,
relire, paraphraser, prendre des notes…)

On sait qu’un élève en difficulté de lecture est un élève qui ne possède pas ou peu de stratégies…Il est
important de faire comprendre au jeune lecteur que lire peut-être comparé à une résolution de
problèmes de compréhension et que ces problèmes peuvent être résolus à l’aide de stratégies.

Catherine Tauveron, dans « La littérature à l’école, Pourquoi et comment conduire cet apprentissage
spécifique ? » définit les actes de lecture de l’élève en utilisant les métaphores des métiers.
• Détective pour rassembler des indices et compléter le texte
• Stratège pour éviter les leurres tendus par l’auteur ou l’illustrateur
• Archéologue pour aller fouiller dans sa culture
• Tisserand pour tisser des liens, mettre en relation avec des textes (lecture en réseau)
• Orpailleur lorsque « découvrant un petit grumeau de sens », il creuse à nouveau « pour voir si
la pépite ne s’étend pas en filon ».

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Donc, enseigner des stratégies, c’est développer chez l’élève la prise de conscience de l’existence de
procédures à travers l’explicitation, leur verbalisation, la discussion, l’argumentation et le débat.
Cet enseignement permet aux élèves de devenir des lecteurs actifs qui contrôlent leur propre
compréhension.

QUELLES STRATEGIES ENSEIGNER ?

Eduscol nous rappelle les stratégies mises en place par un lecteur-expert.

COMMENT ENSEIGNER DES STRATEGIES ?

Exemple de démarche : empruntée à Marise Bianco et Laurent Lima dans « 11 stratégies pour
apprendre à comprendre des textes narratifs », Hatier. Ils utilisent également la métaphore des
métiers pour parler des actions du lecteur. Le maçon est celui qui va combler les trous du textes (les
« blancs » laissés par l’auteur). Le détective qui doit se méfier des déguisements (les reprises
pronominales par exemple). L’architecte qui construit des ponts entre les évènements et leurs causes.

1. Annonce de l’objectif général et de l’objectif spécifique : « Aujourd’hui, nous allons apprendre


à surmonter un obstacle en lecture ». (Rappelez que, comme une voiture, le lecteur peut avoir une
« panne de sens »). Nous allons apprendre à repérer les mots difficiles et à utiliser le contexte
pour y remédier.
2. Modelage : L’enseignant présente la manière de s’y prendre pour utiliser une stratégie et montre
ses propres procédures. (Quand met-il en œuvre la stratégie enseignée ? A quel problème permet-
elle d’apporter une réponse ? Il met un haut-parleur sur sa pensée et rend visible l’invisible.
3. Pratique guidée : De nouveaux exemples sont donnés pour permettre aux élèves de s’exercer.
Des activités en petits groupes peuvent être proposées pour favoriser la l’entraide et la coopération.
4. Formalisation de la stratégies apprise (institutionnalisation) : reformulation de la stratégie apprise
et de la procédure à effectuer.
5. Phase d’entrainement (individuel ou groupes) pour favoriser l’automatisation des procédures

Exemple de stratégies : apprendre à prédire et anticiper, apprendre à se construire une représentation


mentale, à utiliser le contexte pour interpréter un mot inconnu, à inférer les sentiments des personnages,
à repérer les liens de cause/conséquence, apprendre à activer ses connaissances antérieures …

POUR CONCLURE

Comprendre, c’est partir à la conquête de l’autonomie du lecteur. Enseignant et élèves sont co-
partenaires dans cet apprentissage qui se veut explicite, structuré et surtout source de plaisir !

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Pour aller plus loin : Eduscol, « Les stratégies de lecture en compréhension »


https://cache.media.eduscol.education.fr/file/Lecture_Comprehension_ecrit/87/6/RA16_C3_FRA_04_lect
_comp_strat_N.D_612876.pdf

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VI. POUR ALLER PLUS LOIN


IV.1 Pour résumer

• Dès la maternelle, l’apprentissage de la lecture doit être orienté vers 4 dimensions : l’identification des
mots, la compréhension, l’utilité de l’écrit, le plaisir de lire.
• Les séances de lecture sont progressives, quotidiennes et le temps alloué à l’enseignement de la
compréhension doit aller crescendo et cela, dès le CP. Ne pas attendre que les élèves maîtrisent le code !
• L’école a pour objectif de construire le parcours du lecteur autonome.
• La lecture à voix haute par le maître est primordiale (de la PS au CM2). Il faut enseigner aux élèves à
comprendre des textes lus par l’adulte. Elle est à exercer quotidiennement.
• Il faut confronter les élèves à des textes longs pour les inciter à réfléchir à leur organisation et ne pas se
réduire à un simple repérage d’informations.
• Les textes courts permettent d’entrainer les stratégies et leur automatisation.
• Il faut enseigner explicitement les mécanismes et les stratégies de lecture dans des séances
spécifiques. L’enseignant met un haut-parleur sur sa pensée.
• Il faut aider les élèves à se bâtir une culture littéraire commune. Pour cela, le débat interprétatif permet de
confronter les points de vue.
• Il est nécessaire d’habituer les élèves à exercer leur compréhension collectivement. Chaque élève tire
profit de ce travail collectif pour réinvestir en autonomie les stratégies acquises.
• Proposer une grande diversité des textes lus (textes narratifs, documentaires, et numériques)
• Proposer des textes à lire dans les autres domaines d’enseignement

IV.2 Quels auteurs à connaitre ?

Noms Les idées

Instituteur puis professeur d’université en sciences de l’éducation


spécialiste de l’enseignement de la lecture. Il a dirigé une vaste étude sur
l’enseignement de la lecture au CP sur 132 classes afin de dégager des
pistes de réflexion et des points d’appui pour conduire un enseignement
Lecture Roland Goigoux
efficace. Il est un auteur de référence.
compréhension Il a publié avec Sylvie Cèbe « Apprendre à lire à l’école ». Ils sont à l’origine
des ouvrages à destination des classes : « Narramus », « Loctorino,
Sylvie Cèbe
Lectorinette » et « Lector, Lectrix », Retz pour enseigner les compétences
narratives et les stratégies de compréhension.
Institutrice puis enseignant-chercheur à l’université de Grenoble. Elle étudie
le lien étroit entre le langage et le développement des compétences en
lecture.
Lecture Elle a publié « Comment enseigner la compréhension en lecture », et « 11
Marise Bianco stratégies pour apprendre à comprendre », Hatier. Elle y met en avant la
Compréhension
stratégie du maçon, (qui pose les bonnes briques pour comprendre), de
l’architecte (qui construit des ponts entre les informations), du cinéaste
qui sait se construire une représentation mentale …

IV.4 Liens vidéos = séances de classe :

• CANOPE, Le débat interprétatif, « La Belle et la Bête », CM2


https://www.reseau-canope.fr/BSD/sequence.aspx?bloc=886107
• CANOPE : « Prendre des notes pour raconter », CE1/CE2
https://www.reseau-canope.fr/BSD/sequence.aspx?bloc=844

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• WEBTV Académie de Versailles : « Mener un débat littéraire interprétatif : interpréter le


comportement d’un personnage », CM1
http://webtv.ac-versailles.fr/spip.php?mot50
• Littérature offerte et débat interprétatif : Cosette
https://www.youtube.com/watch?v=GUEi9JDWwaQ

IV.2 Bibliographie, sitographie

• Les fiches-ressources Eduscol autour de la compréhension :

• Sous la direction de M. Blanco et L.Lima, « Comment enseigner la compréhension en


lecture ? Hatier, 2017.

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