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Bronchiolite aiguë du nourrisson

I. Pour bien comprendre


A. Épidémiologie
Cette pathologie infectieuse virale concerne par définition les nourrissons âgés de moins de 12
mois ; taux d'hospitalisation de 3,6 % parmi les nourrissons de moins de 12 mois. Les
épidémies automno-hivernales commencent au Nord, puis évoluent vers le Sud. Le VRS est
l'agent infectieux principal (60–70 %). Il a une incubation de 2 à 8 jours et est associé aux
formes les plus graves donc hospitalisées. L'élimination du virus se prolonge sur 3 à 7 jours,
parfois jusqu'à 4 semaines.
D'autres virus peuvent être identifiés, notamment le métapneumovirus (10–12 %), les
rhinovirus (environ 20 %), les virus parainfluenzae, le virus influenzae (grippe), les
coronavirus et les adénovirus. En période de fin de printemps et début d'été, ce sont les
entérovirus qui sont le plus fréquemment rencontrés.
B. Physiopathologie
La contamination est interhumaine, par gouttelettes et de façon manu-portée, favorisée par la
mise en collectivité. La multiplication virale débute dans les cellules des voies aériennes
supérieures (rhinite) et se poursuit dans les cellules épithéliales des bronchioles. La réaction
inflammatoire, entraîne une obstruction des voies aériennes, à la fois endoluminale (bouchon
muqueux) et murale (inflammation pariétale). La réduction de calibre conduit à un sifflement
expiratoire souvent audible et l'atteinte bronchioloalvéolaire à des crépitants. Il existe une
hyperréactivité bronchique inconstante. Il existe une augmentation considérable du travail
respiratoire qui amène à un épuisement des nourrissons les plus jeunes (hypercapnie), des
effets shunt par apparition d'atélectasies ou des troubles des échanges gazeux (hypoxémie). La
deuxième phase est sécrétoire avec l'apparition de râles bronchiques bulleux. La troisième
phase est réparatrice avec une guérison devant être obtenue à 1 mois.
Infection virale (VRS surtout), épidémique et saisonnière, contagieuse.
II. Diagnostiquer une bronchiolite
A. Diagnostic clinique
1. Identifier une bronchiolite aiguë
• premier épisode aigu de gêne respiratoire chez un nourrisson de moins de 12 mois, à toute
période de l'année;
• se déroulant selon la séquence : rhinite suivie de signes respiratoires : toux, sibilants et/ou
crépitants, accompagnés ou non d'une polypnée et/ou de signes de lutte respiratoire (mise en
jeu des muscles accessoires intercostaux inférieurs,
sternocléidomastoïdiens, asynchronisme thoraco-abdominal, battement des ailes du
nez);
• fièvre inconstante et ne faisant pas partie de la définition.
2. Écarter l'éventualité d'un autre diagnostic ou d'une pathologie associée
Un premier épisode de dyspnée sifflante peut être le mode de révélation d'autres diagnostics
que celui d'une bronchiolite aiguë.
Signes devant faire particulièrement rechercher un autre diagnostic :
• manifestations respiratoires préalables (toux chronique, encombrement) orientant vers une
pathologie respiratoire chronique (par exemple, mucoviscidose) ;
• stridor, orientant vers une obstruction des voies aériennes, congénitale
(trachéobronchomalacie, sténose congénitale) ou acquise (par exemple, compression par
adénopathie tuberculeuse) ;

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• souffle cardiaque, tachycardie, parfois hépatomégalie et œdèmes, orientant vers une
insuffisance cardiaque ;
• mauvaise prise pondérale, orientant vers une pathologie chronique (cardiaque ou
respiratoire) ;
• fièvre élevée devant évoquer une atteinte bactérienne, surtout chez le nouveau-né.
Bronchiolite aiguë : 1er épisode de gêne respiratoire avant l'âge de 12 mois répondant au
cadre syndromique défini par les recommandations.
Évoquer une myocardite aiguë en cas de dyspnée avec tachycardie et hépatomégalie.
B. Évaluation de la gravité clinique et des facteurs de risque associés
1. Gravité clinique
L'évaluation se fait toujours après une désobstruction rhinopharyngée (DRP).
La date du début des signes de lutte ou de la toux est à prendre en compte en raison du risque
d'aggravation pendant les premières 48 heures.
2. Facteurs de risque associés
Il existe des critères de vulnérabilité et environnementaux nécessitant une vigilance accrue. Ils
apparaissent comme des facteurs associés à un risque d'hospitalisation plus élevé.
Critères de vulnérabilité :
• prématurité < 36 SA ;
• âge < 2 mois en tenant compte de l'âge corrigé (risque d'apnées) ;
• comorbidités :
– dysplasie bronchopulmonaire;
– ventilation néonatale prolongée;
– cardiopathie congénitale avec shunt non opérée (retentissement hémodynamique);
– déficits immunitaires;
– pathologies avec un risque accru de toux inefficace et fatigabilité musculaire (maladies
neuromusculaires, polyhandicap, trisomie 21, etc.) ;
• enfants présentant une indication de traitement par palivizumab.
Critères environnementaux :
• contextes sociaux ou économiques défavorables, difficultés d'accès aux soins ne permettant
pas un retour à domicile ;
• tabagisme passif ;
• pour les prématurés ≤ 35 SA :
– tabagisme pendant la grossesse ; tabagisme passif ;
– naissance dans la période autour de l'épidémie à VRS ;
– fratrie ; crèche ;
– absence d'allaitement maternel.

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Forme clinique
Légère Modérée Grave
État général altéré (dont Non Non Oui
comportement)
Fréquence respiratoire < 60/min 60–69/min ≥ 70/min ou
(1 minute) bradypnée apnée

Fréquence cardiaque Non Non Oui


> 180/min ou < 80/min

Utilisation des muscles Absente ou Modérée Intense


accessoires légère

SpO2 à l'éveil en air ambiant > 92 % 90 %< SpO2 ≤ 92 % ≤ 90 % ou cyanose

Alimentation > 50 % < 50 % sur 3 prises Réduction


Consécutives importante ou refus

Interprétation Les formes légères Les formes modérées sont Les formes graves sont
sont définies par la définies par la présence d'au définies par la présence
présence de tous moins un des critères d'au moins un des
les critères (Non retrouvés dans les formes critères
graves) graves

C. Enquête paraclinique
1. Généralités
Le diagnostic de bronchiolite aiguë est exclusivement clinique.
Aucun examen complémentaire n'est nécessaire dans la majorité des cas.
2. Rationnel des explorations complémentaires

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Radiographie de thorax de face en cas de :
• signes de gravité clinique ;
• suspicion d'un diagnostic différentiel.
Signes radiographiques possibles:
• distension thoracique :
– hyper clarté des deux champs pulmonaires ;
– élargissement des espaces intercostaux, horizontalisation des côtes ;
– abaissement des coupoles diaphragmatiques ;
– cœur apparaissant souvent comme de petit volume ;
• atélectasie(s), le plus souvent en lobaire supérieur droit ;
• pneumopathie souvent bilatérale, non systématisée, liée au virus.
diagnostic différentiel :
• cardiomégalie (pouvant argumenter le diagnostic de myocardite aiguë) ;
• anomalies vasculaires… ;
• rarement pneumothorax ou pneumomédiastin.
Virologie respiratoire
La recherche du VRS dans les sécrétions rhinopharyngées par des tests rapides, Elle ne doit
pas être systématique. recherche du virus grippal en période épidémique, qui peut conduire à
la prescription d'un antiviral spécifique.
Autres examens
Parfois Un bilan infectieux. Une gazométrie (veineuse ou capillaire) n'est utile que dans les
formes les plus graves afin de mesurer le degré d'hypercapnie.
Radiographie du thorax si signes de sévérité clinique ou doute diagnostique.
III. Argumenter l'attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient
A. Principes de prise en charge
Orientation initiale et premières mesures thérapeutiques sont fonction de la gravité clinique de
la bronchiolite (forme légère, modérée ou sévère), ainsi que des facteurs de risque associés.
Aucun traitement spécifique n'a montré son efficacité sur la guérison.

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B. Prise en charge des formes ambulatoires
La prise en charge des formes ambulatoires repose essentiellement sur la libération des voies
aériennes supérieures (DRP, lavages de nez) et sur le fractionnement de l'alimentation.
La surveillance nécessite une information et une éducation des parents.
Une forme légère avec des critères de vulnérabilité ou environnementaux (notamment : âge <
2 mois, prématurité, comorbidité, contexte social défavorable…) justifiera d'une vigilance
accrue avec consultation quotidienne.
Les parents ou aidants doivent être formés pour réaliser correctement un lavage de nez. Les
conseils de surveillance donnés aux parents doivent être clairs et compréhensibles.
C. Prise en charge des formes hospitalisées
Les modalités nutritionnelles (nutrition entérale ou hydratation IV) ainsi que les critères de
mise en route d'une oxygénothérapie sont précisés dans le tableau 56.2.
En l'absence d'amélioration ou en cas d'aggravation sous oxygénothérapie standard, un
support ventilatoire (lunettes à haut débit ou CPAP) est à proposer.
L'initiation et la surveillance des 24 premières heures requièrent un lieu adapté et un
personnel formé et suffisant, et peuvent nécessiter le transfert dans un établissement ayant une
unité de soins continus/intensifs, réanimation.
La surveillance clinique est pluriquotidienne dans les 48 premières heures, où il existe un
risque de dégradation rapide surtout en cas de vulnérabilité (âge < 2 mois). Elle porte sur la

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détresse respiratoire, la tolérance de l'alimentation, la réactivité ou l'état d'épuisement du
nourrisson. La surveillance du poids est quotidienne.
La sortie d'hospitalisation est autorisée si l'enfant est sevré en oxygène depuis au moins 4
heures incluant une période de sommeil et s'il est « autonome » sur le plan alimentaire (au
moins la moitié de ses rations quotidiennes).
D. Évolution
L'évolution habituelle d'une bronchiolite conduit le plus souvent vers la guérison, qui doit être
obtenue à 1 mois.
La persistance de signes respiratoires quotidiens après ce délai doit faire demander un avis
spécialisé pour éliminer une bronchiolite oblitérante ou une évolution vers un asthme viro-
induit.
Le risque de présenter une deuxième bronchiolite a été évalué à 50 % sur des études
anciennes.
La survenue d'un troisième épisode sifflant doit faire porter le diagnostic d'asthme.
En cas de deuxième épisode de bronchiolite, l'existence d'un terrain atopique familial ou
personnel peut rendre licite un traitement d'épreuve par des bronchodilatateurs avec nécessité
d'une évaluation systématique de son efficacité (auscultation et évaluation des signes de lutte
avant/après) avant de poursuivre la prescription.
Troisième épisode de dyspnée sifflante → évoquer un asthme.
E. Prévention des infections à VRS
1. Mesures préventives générales
Objectifs :
• réduire l'incidence de la bronchiolite et différer l'âge d'un premier épisode ;
• éviter la dissémination de cette affection (caractère épidémique).
Mesures générales :
• éviction de facteurs favorisants (tabagisme pendant la grossesse, tabagisme passif, garde en
collectivité avant l'âge de 6 mois pour les enfants les plus à risque) ;
• informations sur le mode de contamination, distanciation systématique de 2 mètres en
périodes épidémiques sauf pour les parents, éviter les transports en commun, magasins,
promiscuité inutile ;
• décontamination quotidienne des objets et des surfaces en collectivité.
Mesures spécifiques en milieu hospitalier :
• mise en place d'un « plan bronchiolite » dans les services de pédiatrie ;
• port du masque pour le personnel soignant ; lavage des mains au SHA ; surblouse lors des
soins proches.
2. Palivizumab
Le palivizumab (Synagis®) est un anticorps monoclonal humanisé dirigé contre le VRS. Du
fait de son coût élevé, sa prescription est limitée en France aux enfants prématurés les plus à
risque d'hospitalisation liée au VRS et à certaines pathologies chroniques graves du
nourrisson.
Règles d'hygiène simples : lavages des mains, éviter toute promiscuité inutile.

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